texte numérisé et mis en page par François-Dominique FOURNIER (Notes en grec relues et corrigées - F. D. F)
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Flavius Josèphe |
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ANTIQUITES JUDAÏQUES Flavius Josèphe Traduction de Julien Weill Sous
la direction de 1900 |
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LIVRE XVII— I[1] —1. Craintes et intrigues d’Antipater. — Mariage de Salomé. — 2. Hérode modifie, à l’instigation d’Antipater, les mariages projetés par lui. — 3. Épouses et enfants d’Hérode.[1] 1[2]. Quoique Antipater eût fait disparaître ses frères et chargé son père du plus impie des crimes et du remords qui les vengeait, ses espérances d’avenir ne s’accordaient pas à ses desseins. Délivré de la crainte de voir ses frères partager le pouvoir avec lui, il s’apercevait que l’accession au trône serait peur lui chose fort ardue et embarrassante, tant la nation avait conçu de haine contre lui. [2] C’était là un obstacle gênant ; mais ce qui le tourmentait plus encore, c’étaient les mauvaises dispositions de l’élément militaire, de qui dépendait, toute la sécurité de la maison royale toutes les fois que le peuple venait, à tenter une révolution. Telle était la situation pleine de péril que lui fit la mort de ses frères. [3] Il partageait, néanmoins le pouvoir avec son père comme s’il eût été roi lui-même, et ce qui aurait dû causer sa perte que faisait que grandir son crédit, car il avait trouvé moyen d’affermir la bienveillance de son père, en faisant croire qu’il n’avait dénoncé ses frères que par souci du salut d’Hérode, et non par haine contre eux et surtout contre lui. Voilà les malédictions qui le poursuivaient. [4] Toutes ces intrigues avaient été ourdies sur le chemin d’Hérode par Antipater afin d’écarter tous dénonciateurs possibles de ses projets et de priver Hérode de refuge et de secours le jour où Antipater se dresserait en ennemi déclaré. [5] C’était donc par haine contre son père qu’il avait machiné la perte de ses frères et qu’il s’attachait de plus en plus à ne pas lâcher son entreprise ; car, si Hérode mourait, le pouvoir lui serait assuré mais, si le roi prolongeait encore sa vie, les dangers renaîtraient, en cas de révélation de la machination qu’il avait ourdie en forçant son père, à devenir son ennemi[3]. [6] Aussi dépensait-il beaucoup pour se concilier l’entourage de son père, cherchant à contrebattre à force d’argent la haine soulevée contre lui ; surtout, il entretenait par de forts cadeaux le dévouement de ses amis de Rome, et, principalement de Saturninus, gouverneur de Syrie. [7] Il espérait attirer à lui également le frère de Saturninus par l’importance de ses libéralités et, par les mêmes moyens, la sœur du roi, mariée à l’un des premiers de l’entourage d’Hérode. Nul n’était plus habile à provoquer la confiance en simulant l’amitié avec ses familiers, ni plus retors pour cacher la haine qu’il éprouvait contre qui que ce fut. [8] Néanmoins il ne réussit pas à tromper sa tante, qui l’avait deviné depuis longtemps et ne se laissait plus berner par lui, ayant déjà par tous les moyens possibles lutté contre ses mauvais desseins. [9] Pourtant sa fille[4] était mariée à l’oncle maternel d’Antipater[5] qui, par ses calculs et, ses manœuvres, lui avait fait épouser cette jeune femme, précédemment, mariée à Aristobule. L’autre fille de Salomé[6] était la femme du fils d’Alexas[7], mari de Salomé. Mais l’alliance n’empêchait pas plus Salomé de pénétrer les mauvais desseins d’Antipater que les liens de parenté ne précédemment arrêtée dans sa haine (contre Aristobule)[8]. [10] Salomé avait désiré s’unir à Syllaios l’Arabe, dont elle était passionnément amoureuse, mais Hérode la contraignit d’épouser Alexas : l’impératrice Julia[9] avait joint ses efforts à ceux du roi et persuadé Salomé de ne pas s’attirer, par le refus de ce mariage, une hostilité manifeste ; car Hérode avait juré de retirer toute affection à Salomé si elle n’acceptait pas Alexas. Elle s’inclina devant cet avis parce que Julia était la femme de l’empereur et ne cessait de lui donner les meilleurs conseils. [11] A la même époque Hérode renvoya chez son père la fille du roi Archélaüs[10], naguère mariée a Alexandre, en lui rendant sur ses propres biens sa dot, afin d’éviter toute contestation[11]. [12] 2[12]. Hérode élevait lui-même avec beaucoup de soin les enfants de ses fils, car Alexandre avait eu de Glaphyra deux garçons[13] et Aristobule avait eu de Bérénice, fille de Salomé, trois garçons[14] et deux filles[15]. [13] Un jour, en présence de ses amis, après avoir placé prés de lui ces enfants et déploré le sort de ses fils, il souhaita que leurs fils n’eussent, pas les mêmes malheurs et, que, embellis par la vertu et l’esprit de justice, ils fussent en mesure de lui rendre les soins qu’il leur donnait[16]. [14] Il avait, promis en mariage, pour le moment où ils atteindraient l’âge voulu, à l’aîné des fils d’Alexandre[17] la fille de Phéroras, à l’aîné des fils d’Aristobule[18], celle d’Antipater ; il désigna pour le fils d’Antipater une fille d’Aristobule et la seconde pour Hérode, son propre fils, qu’il avait eu de la fille du grand-prêtre, car nos coutumes nationales admettent qu’on ait plusieurs épouses à la fois. [15] Le roi conclut les fiançailles de ces enfants par pitié pour leur état d’orphelins et pour leur concilier par ces alliances la bienveillance d’Antipater. [16] Or, Antipater ne cessait d’ourdir à l’égard des fils de ses frères les mêmes desseins qu’à l’égard de ceux-ci ; l’affection de son père envers eux ne faisait que l’exciter davantage, car il s’attendait à les voir devenir plus puissants que ses frères mêmes, surtout que, lorsqu’ils auraient l’âge viril, Archélaüs, un personnage royal, appuierait ses petits-fils, et Phéroras, qui était aussi tétrarque, son gendre[19]. [17] Enfin son irritation s’exaspérait en volant tout le peuple témoigner sa pitié aux orphelins et sa haine contre lui parce qu’il persistait à manifester en tout ses mauvais sentiments envers ses frères. Il intriguait donc pour obtenir la révocation des décisions de son père, voyant du danger dans une intimité avec des princes dont la puissance s’accroîtrait tellement. [18] Hérode changea d’avis, cédant aux instances d’Antipater, et décida que celui-ci épouserait lui-même la fille d’Aristobule, tandis que le fils d’Antipater épouserait celle de Phéroras, [19] 3[20]. Les accords matrimoniaux furent ainsi réglés contre l’intention[21] du roi. Le roi Hérode avait alors neuf épouses : d’abord la mère d’Antipater[22] et la fille du grand-prêtre[23], dont il avait eu un fils, nommé comme lui Hérode. Il avait également épousé une fille de son frère et une de ses cousines germaines ; ni l’une ni l’autre n’eut, d’enfant[24]. [20] Il avait aussi parmi ses épouses une Samaritaine[25] qui lui avait donné pour fils Antipas et Archélaüs, pour fille Olympias ; celle-ci fut plus tard la femme de Joseph, neveu du roi[26] ; quant à Archélaüs et à Antipas, ils étaient élevés à Rome chez un particulier. [21] Il avait, encore épousé Cléopâtre de Jérusalem dont il eut deux fils, Hérode et Philippe, ce dernier aussi élevé à Rome. Une autre de ses femmes était Pallas, mère d’un fils, Phasaël. Enfin il avait encore Phèdre et Elpis qui lui donnèrent deux filles, Roxane et Salomé. [22] De ses filles aînées, sœurs utérines d’Alexandre, que Phéroras avait dédaigné d’épouser, il maria l’une[27] à Antipater, fils de sa sœur[28], l’autre[29] à Phasaël qui était, lui, le fils de son frère[30]. Telle était la famille d’Hérode.
— II —1. Pour protéger la région de Trachonitide contre des incursions des Arabes, Hérode établit Zamaris à Bathyra. — 2. Condition des habitants de Bathyra. — 3. Descendants de Zamaris. — 4. Entente secrète d’Antipater et de Phéroras. Hérode sévit contre les Pharisiens et les partisans de Phéroras.[23] 1. A cette époque le roi, voulant être tranquille du côté des Trachonites, décida de créer en un lieu de la contrée une bourgade aussi grande qu’une ville peuplée de Juifs ; ainsi il pourrait rendre inviolable son propre territoire et avoir une place d’armes à portée de ses ennemis, d’où il pourrait s’élancer pour faire chez eux des ravages subits. [24] Il avait appris qu’un Juif de Babylone, avec cinq cents cavaliers tous instruits à tirer de l’arc à cheval et une parenté comprenant environ cent hommes, avait traversé l’Euphrate et se trouvait alors installé à Antioche auprès de Daphné en Syrie, car Saturninus, qui gouvernait alors la province lui avait concédé pour y séjourner une localité nommée Valaha. [25] Il manda ce chef avec tous ceux qui le suivaient, et promit de lui donner des terres dans la toparchie de Batanée, limitrophe de la Trachonitide ; il voulait faire de son établissement une sorte de rempart. Il assura à Zamaris et à ses gens l’exemption de tous impôts directs et de toutes autres contributions[31], puisque la terre qu’il leur donnait était en friche. [26] 2. Décidé par ces promesses, le Babylonien se rend sur les lieux, occupe le territoire en question et, y élève des murs et une bourgade qu’il nomma Bathyra. Cet homme servit effectivement de bouclier à la fois aux gens de ce pays contre les Trachonites et aux Juifs qui venaient de Babylone sacrifier à Jérusalem, qu’il empêchait d’être molestés par les brigandages des Trachonites. [27] Il vit venir, à lui de partout nombre de gens fidèles aux coutumes juives. Le pays devint très peuplé à cause de la sécurité que lui conférait l’exemption complète d’impôts. Ce privilège subsista tant qu’Hérode vécut : mais quand Philippe son fils lui succéda, il exigea de ces gens peu de chose et pendant peu de temps. [28] En revanche, Agrippa le grand et son fils Agrippa les saignèrent à blanc, sans toutefois rien entreprendre contre leur liberté. Les Romains, dont le pouvoir succéda au leur, confirmèrent eux aussi la liberté qu’ils demandaient, mais les écrasèrent totalement sous le poids des impôts. D’ailleurs je parlerai de cela avec plus de précision dais la suite de l’ouvrage quand s’en présentera l’occasion[32]. [29] 3. En mourant, Zamaris le Babylonien, qui s’était soumis à Hérode pour obtenir cette région, laissa après une vie vertueuse des fils excellents, entre autres Jacimos, illustre par son courage, qui organisa en troupe de cavalerie ses Babyloniens ; un de leurs escadrons servait de garde aux rois que je viens de nommer. [30] Jacimos, mort à un âge avancé, laissa un fils, Philippe, que sa valeur guerrière et ses autres mérites rendaient aussi estimable qu’homme du monde. [31] Aussi une amitié fidèle et un dévouement solide l’unissaient-ils au roi Agrippa ; de toute l’armée que le roi entretenait, c’était toujours lui l’instructeur et, lorsqu’il y avait une expédition à faire, le commandant. [32] 4[33]. Hérode étant, dans l’état d’esprit que j’ai décrit, toutes les affaires étaient du ressort d’Antipater et il avait toute facilité pour les conduire à son avantage, tant son père se confiait en son bon vouloir et sa loyauté. Il s’enhardit d’autant plus à étendre son pouvoir que son père, aveugle à ses mauvaises actions, avait une confiance absolue en ses paroles. [33] Tout le monde le redoutait, à cause de la grandeur de son autorité que de sa méchanceté, née de son inquiétude. Il était surtout courtisé par Phéroras et le courtisait en retour au plus haut degré, non sans l’avoir entouré de ses filets et avoir ameuté contre lui tout le gynécée. [34] En effet, Phéroras était asservi à sa femme, à sa belle-mère et à sa belle-sœur, et cela bien qu’il détestât ces femmes à cause des injurieux traitements dont elles avaient usé envers ses filles encore vierges. Il les supportait pourtant et ne pouvait rien faire sans ces femmes qui épiaient tous ses mouvements et, grâce à leur dévouement mutuel, marchaient toujours d’accord. [35] Antipater se les était entièrement attachées, tant par lui-même que par l’entremise de sa mère ; car les quatre femmes étaient toujours du même avis. Mais entre Phéroras et Antipater des bagatelles faisaient naître des dissentiments. [36] La seule qui leur faisait opposition, c’était la sœur du roi[34], qui de longue date observait tout ce manège et sachant que leur entente visait le malheur d’Hérode, ne se gênait pas pour la dénoncer. [37] Eux, avant reconnu que leur entente déplaisent au roi, imaginèrent de dissimuler leur liaison, feignant même en temps opportun de se détester et de s’injurier, surtout lorsque Hérode se trouvait là ou un espion chargé de lui rapporter ; mais en secret leur amitié réciproque ne devait que s’affermir, et il en fut ainsi. [38] Salomé, qui n’ignorait ni leur entente précédente en vue de cette grande entreprise, ni la persistance de leurs relations, ne lâcha pas prise, dépistant tous leurs artifices et les rapportant grossis à son frère, les entrevues secrètes, les orgies, les conciliabules clandestins : si tout cela n’était pas combiné pour sa perte, quelle raison y avait-il de s’en cacher ? [39] Ces gens qui, en apparence, étaient ennemis et déblatéraient l’un contre l’autre conservaient, à l’écart de tout le monde, leur entente et, dès qu’ils étaient seuls à seuls, ne se privaient pas de se caresser et d’organiser la lutte contre ceux à qui ils dissimulaient leur intelligence avec tant de soin. [40] Elle observait donc tout ces manèges et les dévoilait exactement dans des entrevues avec son frère, qui déjà par lui-même avait deviné la méchanceté, née de plupart de ces choses, mais qui ne se décidait pas à oser[35], bien que ses soupçons fussent éveillés[36] par les rapports de sa sœur. [41] Il y avait une secte de Juifs qui ce vantait d’observer très strictement la loi de leurs pères[37] et affectait un grand zèle[38] pour la divinité, secte à laquelle était soumis le gynécée. On les appelle Pharisiens, gens capables de tenir tête[39] aux rois, prévoyants[40] et s’enhardissant ouvertement à les combattre et à leur nuire[41]. [42] En fait, alors que tout le peuple juif avait confirmé par des serments son dévouement envers l’empereur et le gouvernement royal, ces hommes n’avaient pas juré, au nombre de plus de six mille : et comme le roi leur avait infligé une amende, la femme de Phéroras la paya à leur place. [43] En retour de cette marque d’amitié, ils lui prédirent — car la fréquentation de Dieu leur conférait le don de prophétie — que Dieu avait décrété que le trône échapperait à Hérode et à sa race et que la couronne passerait à elle-même, à Phéroras et à leurs enfants. [44] Ces propos, que Salomé avait découverts, étaient rapportés au roi, ainsi que le fait que quelques courtisans s’étaient laissé corrompre. Le roi fit alors périr les plus coupables des Pharisiens, l’eunuque Bagoas et un certain Carus qui l’emportait sur tous ses contemporains par sa beauté et était son mignon ; il fit mourir aussi tous les gens de sa maison qui étaient d’accord avec les Pharisiens. [45] Bagoas avait été entraîné par ceux qui promettaient de l’appeler père et bienfaiteur du roi à désigner, car, disaient-ils, il exercerait tous les pouvoirs et obtiendrait du prince la puissance que lui auraient donnée un mariage et la procréation d’enfants légitimes[42].
— III —1. Phéroras refuse de répudier sa femme. — 2. Antipater se fait envoyer à Rome. Syllaios est accusé de complot. — 3. Retraite, maladie et mort de Phéroras.[46] 1[43]. Après avoir châtié ceux des Pharisiens qui avaient été reconnus coupables de ces crimes, Hérode réunit ses amis en conseil et accusa la femme de Phéroras, en imputant à son audace l’outrage fait aux vierges et en tirant de cette injure personnelle un motif de plainte : n’organisait-elle pas de toutes ses forces contre lui et son frère une guerre contre nature par ses paroles et ses actes ? [47] L’amende qu’il avait infligée avait été évitée grâce à ses moyens ; enfin il n’y avait pas un des agissements actuels dont elle ne fût la complice. « Par suite, Phéroras, tu feras bien, dit-il — sans avoir besoin que je développe mon avis — de répudier de ton propre mouvement cette femme qui deviendrait une cause de guerre, entre toi et moi. [48] Et c’est maintenant, si tu tiens à ta parenté avec moi, que tu dois la renvoyer ; ainsi, en effet, tu resteras mon frère et tu seras plus détourné de me chérir ». [49] Mais Phéroras, bien qu’ébranlé par la force de ces paroles, répondit qu’il n’était pas plus juste de troubler son affection conjugale que ses sentiments fraternels et qu’il mourrait plutôt que d’avoir le courage de vivre privé d’une femme qu’il aimait. [50] Alors Hérode reporta sur Phéroras la colère provoquée par les évènements, bien qu’il en eût déjà tiré elle vengeance rigoureuse ; il défendit à Antipater et à sa mère de fréquenter Phéroras et leur ordonna de surveiller les femmes pour les empêcher de se rencontrer. [51] Ils le promirent bien, mais, dès qu’ils en avaient l’occasion, Phéroras et Antipater se réunissaient et faisaient bombance ensemble. Le bruit courait même que la femme de Phéroras avait des relations avec Antipater et que la mère de ce dernier facilitait leurs rendez-vous. [52] 2[44]. Se méfiant de son père et, craignant de voir croître la haine contre lui, Antipater écrivit à ses amis de Rome, les priant de mander à Hérode qu’il eût à l’envoyer au plus tôt chez l’empereur. [53] Ils le firent et, Hérode envoya Antipater chargé de présents considérables et d’un testament où il désignait comme son successeur au trône Antipater ; pour le cas où celui-ci mourrait avant lui, Hérode, le fils qu’il avait eu de la fille du grand prêtre. [54] En même temps qu’Antipater s’embarqua Syllaios l’Arabe, qui n’avait obéi à aucun des ordres de l’empereur. Antipater l’accusa devant l’empereur pour les mêmes faits que précédemment Nicolas, Syllaios fut aussi accusé par Arétas d’avoir tué contre son avis beaucoup de notables de Pétra, en particulier Soémos, personnage très digne d’estime pour toutes ses vertus, et de s’être débarrassé aussi de Fabatus, esclave[45] de l’empereur. Syllaios frit, aussi poursuivi pour le grief suivant. [55] Il y avait un garde du corps d’Hérode nommé Corinthus, en qui le roi avait la plus entière confiance ; Syllaios avait cherché à le persuader en lui promettant, une forte somme, de tuer le roi, et l’autre y consentit. Fabatus, ayant appris cela de la bouche même de Syllaios, le révéla au roi. [56] Celui-ci appréhenda Corinthus et, le fit mettre à la torture, si bien qu’il avoua tout. Il fit aussi saisir deux autres Arabes sur les dénonciations de Corinthus : l’un chef de tribu, l’autre ami de Syllaios. [57] Eux aussi, mis à la torture, reconnurent qu’ils avaient été apostés pour exhorter Corinthus à ne pas faiblir et pour lui prêter main-forte, si besoin était, dans l’accomplissement du meurtre. Saturninus, à qui Hérode avait dénoncé tout le complot, les envoya à Rome. [58] 3. Quant à Phéroras, qui persistait avec ténacité à soutenir sa femme, Hérode lui ordonna de se retirer dans son apanage. Il regagna volontiers sa tétrarchie, non sans avoir maintes fois juré qu’il n’en reviendrait pas avant d’avoir appris la mort d’Hérode. Aussi, quand on lui demanda, lors de la maladie du roi, de venir pour se voir confier certaines missions en cas de vacance du trône, il s’y refusa par respect pour son serment. [59] Cependant, Hérode, dans des constances analogues, n’imita point l’attitude de son frère ; il alla chez Phéroras quand celui-ci plus tard tomba malade, sans même être appelé ; Phéroras mort, il prit soin de faire mener sa dépouille à Jérusalem pour lui donner la sépulture et il édicta un grand deuil en son honneur. [60] Ce fut là pour Antipater, bien qu’il fût parti pour Rome, le début de ses malheurs, car Dieu devait le punir de son fratricide. Je vais poursuivre tout ce récit, car c’est un avertissement pour l’espèce humaine de pratiquer la vertu[46] en toute circonstance.
— IV —1. Enquête sur la mort de Phéroras. Révélations sur des intrigues d’Antipater. — 2. Découverte d’une tentative d’empoisonnement ourdie par Antipater et Phéroras contre Hérode. Sanctions contre le grand pontife Simon et sa fille. — 3. Accusations mensongères d’Antipater contre Archélaüs et Philippe.[61] 1[47]. Lorsque Phéroras fut mort et que ses obsèques[48] eurent été célébrées, deux de ses affranchis tes plus appréciés vinrent trouver Hérode et lui demandèrent de ne pas laisser sans vengeance le cadavre de son frère, de faire une enquête sur sa fin imprévue et triste. [62] Le roi tint compte de leurs paroles, qui lui semblèrent, sincères. Ils racontaient que la veille de sa maladie il avait soupé chez sa femme, qu’il avait absorbé du poison introduit dans un mets inusité et en était mort. Or, ce poison avait été rapporté par une femme d’Arabie sous prétexte de l’exciter à l’amour — on l’appelait un charme d’amour — en réalité pour le tuer. [63] Il n’y a pas en effet de plus expertes empoisonneuses que les femmes arabes. L’accusée était connue pour une amie des plus intimes de la maîtresse de Syllaios ; c’était pour la persuader de leur vendre le poison qu’étaient venues dans son pays la belle-mère et la belle-sœur de Phéroras, et elles l’avaient ramenée la veille du repas en question. [64] Le roi, surexcité par ces discours, fit torturer les esclaves de ces femmes et même quelques femmes libres ; comme l’affaire restait ténébreuse en raison de leurs dénégations, l’une d’elles, vaincue par les tourments, finit par lire qu’elle priait Dieu d’infliger de pareilles souffrances à la mère d’Antipater, cause des maux qu’elles supportaient toutes. [65] Ce mot conduisit Hérode à la vérité ; puis les tortures de ces femmes révélèrent, tout, les orgies, les réunions clandestines et même des paroles dites en secret par le roi à son fils et rapportées aux femmes de Phéroras : il s’agissait de l’ordre donné par Hérode à Antipater de passer sous silence un don de cent talents qu’il lui avait fait pour lui faire rompre tout commerce avec Phéroras[49]. [66] On connut encore la haine d’Antipater contre son père et ses lamentations auprès de sa mère sur la trop longue durée de la vie de celui-ci, sur sa propre vieillesse qui s’approchait, de telle sorte que, même si la couronne venait à lui échoir, il n’en jouirait guère ; d’ailleurs, combien de ses frères et de ses neveux étaient élevés à côté de lui en vue de la royauté et empoisonnaient sa sécurité[50] ! [67] Maintenant, même s’il arrivait malheur au roi, c’était à son frère plutôt qu’à son fils qu’il avait ordonné de confier le pouvoir. Antipater incriminait encore la grande cruauté du roi qui avait massacre ses fils ; c’était la crainte qu’on ne s’attaquât bientôt à eux qui les avait poussés, lui, à gagner Rome, Phéroras à se retirer dans sa tétrarchie. [68] 2[51]. Ces révéla Lions s’accordaient si bien avec les rapports de la sœur du roi qu’elles contribuaient à lui enlever toute idée de s’en défier. .lie roi, ayant convaincu la mère d’Antipater, Doris, d’avoir trempé dans les intrigues de son fils, commença par la dépouiller de tous ses ornements qui valaient beaucoup de talents, puis il la répudia et conclut amitié avec les femmes de Phéroras. [69] Sa colère contre son fils fut excitée au plus haut degré par un homme de Samarie nommé Antipater, intendant d’Antipater, fils du roi ; au milieu d’autres aveux faits dans les tortures, ce personnage révéla qu’Antipater s’était procuré un poison mortel et l’avait donné à Phéroras, en lui recommandant de profiter de son absence, qui le mettait à l’abri des soupçons, pour le faire prendre au roi. [70] Antiphile, un des amis d’Antipater, avait apporté d’Égypte œ poison et l’avait fait parvenir, à Phéroras par l’entremise de Theudion, oncle maternel du prince Antipater ; ainsi ce poison était venu entre les mains de la femme de Phéroras il qui son mari en avait confié la garde. [71] Cette femme, interrogée par le roi, avoua et, courant comme pour chercher le poison, alla se jeter du haut de son toit, mais sans se tuer, car dans sa chute elle retomba sur ses pieds. [72] Aussi, quand elle eut repris ses connaissance, Hérode lui promit l’impunité pour elle et ses proches si elle ne cherchait pas à dissimuler la vérité, mais menaça de l’écraser sous les pires supplices si elle préférait faire l’ignorante. Là-dessus elle promit et jura de révéler tous les faits exactement comme ils s’étaient passés et en effet elle dit, de l’avis de la plupart, toute la vérité : [73] « Le poison a bien été apporté d’Égypte par Antiphile ; son frère, qui est médecin, l’a fourni. Theudion nous l’a rapporté et je le gardais moi-même, l’ayant reçu de Phéroras ; il avait été prépare contre toi par Antipater. [74] Quand Phéroras tomba malade et que tu vins lui donner des soins, considérant le dévouement que tu lui témoignais, Phéroras fléchit dans sa résolution et m’ayant fait appeler : « Femme, me dit-il, Antipater m’a circonvenu contre son père, mon frère, en concevant un dessein homicide et en se procurant le poison qui devait servir à cet effet. [75] Mais à présent que je vois mon frère ne renoncer nullement à la bonté qu’il avait jadis pour moi et que je n’ai guère l’espoir de prolonger ma vie, je ne veux pas déshonorer mes ancêtres par une pensée fratricide ; apporte-moi ce poison pour le jeter au feu sous mes yeux. » [76] Et l’ayant cherché, la femme avait aussitôt exécuté les ordres de son mari ; elle avait consumé la majeure partie du poison, mais en avait gardé un peu pour elle afin que si, après la mort de Phéroras, le roi la poursuivait, elle pût échapper aux tourments ». [77] Ayant ainsi parlé, elle montra la boîte et le poison. Un autre frère d’Antiphile et sa mère, sous la violence des tourments et des supplices, dirent la même chose et reconnurent la boite. [78] On accusait aussi la fille du grand-prêtre, femme du roi, d’avoir reçu la confidence de tout ce complot et d’avoir voulu le cacher ; pour cette raison Hérode la répudia et raya son fils du testament qui le désignait pour régner ; il dépouilla aussi son beau-père Simon, fils de Boéthos, du grand-pontificat et le remplaça par Matthias, fils de Théophile, originaire de Jérusalem. [79] 3[52]. Sur ces entrefaites arriva de Rome Bathylle, affranchi d’Antipater ; mis à la torture, il fut convaincu d’apporter du poison le livrer à la mère d’Antipater et à Phéroras, de sorte glue, si le premier n’avait pas atteint le roi, le second leur permit d’en avoir d’avoir voulu raison. [80] Il arriva aussi des lettres des amis romains d’Hérode, écrites sur l’initiative et sous la dictée d’Antipater, pour accuser Archélaüs et Philippe de médire de leur père à cause du meurtre d’Aristobule et d’Alexandre et de s’être plaints du sort qui les menaçait eux-mêmes ; car ils étaient rappelés par leur père et cet appel n’avait pas d’autre but que leur perte. Les amis d’Hérode avaient prêté leur concours à Antipater moyennant une grosse somme. [81] Antipater lui-même écrivait à son père au sujet de ces jeunes princes, disant qu’il les absolvait complètement des plus graves accusations et que, pour leurs paroles, il les attribuait à leur jeunesse. Lui-même luttait contre Syllaios, faisait sa cour aux hommes les plus influents et avait acheté de splendides ornements pour deux cents talents. [82] On pourrait s’étonner que de toutes les menées qui se machinaient contre lui en Judée depuis sept mois déjà, rien ne lui eût été découvert. Il n’y avait d’autre cause à cela que le soin avec lequel les routes étaient gardées et la haine générale contre Antipater ; personne n’eût accepté de courir un risque pour assurer sa sécurité.
— V —1. Antipater revient de Rome et est mal reçu. — 2-7. Accusé par Nicolas de Damas devant Hérode et Quintilius Varus, il est convaincu d’avoir voulu empoisonner son père et perdre Salomé. — 8. Hérode le fait garder à vue et en réfère d l’empereur.[83] 1[53]. Hérode, à qui Antipater avait écrit que, dés qu’il aurait achevé toute sa mission comme il fallait, il se hâterait dit revenir, lui répondit en dissimulant sa colore et en l’invitant à ne pas s’attarder en route, de peur qu’il n’arrivât malheur à son père pendant son absence ; en même temps, il se plaignait quelque peu de sa mère, mais promettait d’abandonner ses griefs contre elle dès son arrivée ; [84] il lui témoignait de toute façon son affection de crainte que, pris de soupçon, il ne différât son retour vers lui, et que, s’attardant à Rome, il ne machinât en vue du trône et même n’obtint quelque succès à ses dépens[54]. [85] C’est en Cilicie qu’Antipater fut rejoint par cette lettre, ayant reçu auparavant à Tarente celle qui lui annonçait la mort de Phéroras : cette nouvelle lui avait été très pénible, non qu’il aimât Phéroras, mais parce que celui-ci était mort sans l’avoir, selon sa promesse, débarrassé de son père. Quand il arriva à Célendéris en Cilicie, il hésitait déjà à rentrer dans son pays, tant il était affligé par la répudiation de sa mère. [86] Ses amis lui conseillaient, les uns de s’arrêter dans ces parages pour observer les événements, les autres de ne pas retarder son retour dans sa patrie : une fois présent, il dissiperait toutes les accusations, car maintenant ce n’était rien d’autre que son absente qui avait donné du crédit à ses accusateurs. [87] Persuadé par les derniers, il s’embarqua et aborda au port Sébaste[55] construit à grands frais par Hérode et nommé ainsi par lui en l’honneur de l’empereur. [88] Là Antipater entrevit déjà ses malheurs, car personne ne vint au devant de lui, personne ne vint le saluer comme lors de son départ avec des prières et des vœux de bonheur ; plusieurs ne s’abstenaient même pas de l’accueillir avec des imprécations toutes contraires, en supposant qu’il venait expier ses crimes envers ses frères. [89] 2[56]. A ce moment se trouvait à Jérusalem Quintilius Varus[57], qui avait succédé à Saturninus dans le gouvernement de Syrie, il était venu en personne et à la demande d’Hérode pour lui donner des conseils sur la situation. [90] Pendant qu’ils délibéraient ensemble arriva Antipater, sans que rien lui eût été divulgué. Il entra au palais encore revêtir de sa robe de pourpre. Les gardes des portes le laissèrent pénétrer lui-même, mais écartèrent ses amis. [91] Il était déjà troublé, comprenant et clairement dans cruel piège il était tombé, surtout, quand son père, au moment où il s’avançait pour l’embrasser, le repoussa en lui reprochant d’avoir tué ses frères, comploté de le tuer lui-même, ajoutant que Varus entendrait et jugerait toute l’affaire le lendemain. [92] Antipater, apprenant et voyant en même temps son malheur, sortit tout égaré par la grandeur de son péril ; il vit venir à sa rencontre sa mère et sa femme, fille d’Antigone[58], qui avait été roi des Juifs avant Hérode ; elles lui apprirent tout et il se prépara à son procès. [93] 3[59]. Le jour suivant Varus et le roi tinrent conseil ; ils avaient convoqué chacun leurs familiers ainsi que les parents du roi et sa sœur Salomé ; puis les témoins qui devaient dénoncer, ceux qu’on avait mis à la question, enfin des esclaves de la mère d Antipater qui, peu avant son retour, avaient été arrêtés et trouvés porteurs d’une lettre dont le contenu était en résumé qu’il ne devait pas revenir parce que sort père était au courant de tout, qu’il ne lui restait plus d’autre ressource que l’empereur et d’évier de tomber avec elle aux mains de son père. [94] Antipater se jeta aux genoux de son père et le supplia de ne pas prononcer contre lui un jugement rendu à l’avance, mais après l’avoir écouté en homme capable de rester vraiment père. Hérode ordonna alors de l’amener au milieu de l’assemblée et se lamenta d’avoir procréé des enfants qui lui qui avaient valus tant de misères, et d’avoir mérité que la colère de la divinité exposât sa vieillesse aux coups d’Antipater[60] ; il rappela l’éducation et l’instruction qu’il leur avait données, l’abondance des richesses qu’il leur avait fournies pour tous leurs besoins quand et comme ils l’avaient voulu ; [95] rien de tout cela n’avait, empêché qu’il risquât de périr victime de leurs complots, car ils préféraient s’emparer tout de suite de la royauté par un acte impie, au lieu de l’attendre de la volonté et de la justice d’un père cédant aux lois de la nature. [96] Il se demandait avec étonnement quels espoirs avaient poussé Antipater à ne pas se détourner d’une telle entreprise, lui qui avait été désigné par écrit comme héritier du trône, qui, même du vivant de son père, ne lui cédait en rien ni par l’éclat de la dignité, ni par l’ampleur du pouvoir, puisqu’il jouissait d’un revenu annuel de cinquante talents et avait reçu pour son voyage à Rome une allocation de trois cents talents. [97] Hérode reprochait aussi à Antipater, si ses frères accusés par lui avaient été réellement pervers, de les avoir imités, et, dans le cas contraire, d’avoir porté sans motif de telles accusations contre ses proches parents ; [98] en effet, tout ce qu’Hérode avait appris de leurs actes, il ne le tenait que des dénonciations d’Antipater ; ce qu’il avait décidé contre eux, ce n’était que d’après son avis ; ainsi Antipater les absolvait de tout crime en devenant l’héritier de leur parricide. [99] 4[61]. En parlant ainsi, il se mit à pleurer et ne put continuer. Alors Nicolas de Damas, ami du roi, son commensal perpétuel et le témoin de tous ses actes, sur la demande que lui fit le roi d’achever son discours, exposa tout l’échafaudage, des indices et des preuves. [100] Antipater se tourna vers son père pour se défendre : il énuméra tous les témoignages de la bienveillance de son père envers lui, invoqua les honneurs qui lui étaient échu, et qu’il n’aurait jamais reçus s’il ne s’en était rendu digne par sa vertueuse conduite envers son père. [101] Tout ce qui exigeait de la prévoyance, il y avait sagement pourvu ; fallait-il mettre la main à la besogne, il avait tout accompli par des efforts personnels. Comment admettre qu’après avoir sauvé père des complots d’autrui, il eût comploté lui-même et qu’effaçant toute la réputation qui lui avaient, valu ses actes passés, il se fût exposé à la honte qu’entraînerait cette nouvelle conduite ? [102] D’ailleurs, il avait été désigné à l’avarice comme successeur du roi ; sans aucun empêchement il participait dès maintenant aux mêmes honneurs. Etait-il vraisemblable que, possédant sans risque et en toute innocence la moitié du pouvoir, il visât à prendre le tout en encourant blâme et dangers sans savoir s’il réussirait, et surtout alors qu’il avait vu le châtiment de ses frères, qu’il avait dénoncés et accusés des crimes qui pouvaient rester inconnus, dont il avait causé la perte quand ils avaient été convaincus de crimes contre leur père ? [103] Ces luttes mêmes qu’il avait soutenues sur place étaient des exemples de sa conduite absolument dévouée envers son père. De sa conduite à Rome il avait pour témoin l’empereur, aussi difficile à tromper que Dieu lui-même ; [104] la preuve en était dans les lettres envoyées par celui-ci, auxquelles on devait accorder de poids qu’aux calomnies de fauteurs de discordes, calomnies dont son absence avait donné à ses ennemis le loisir de préparer la plupart, ce que, lui présent, ils n’auraient pu faire. [105] Quant aux tortures, il les accusait d’avoir incité au mensonge, parce que la nécessité pousse ceux qu’on y soumet à parler pour plaire à leurs maîtres ; il s’offrait lui-même à subir la question. [106] 5[62]. Cette attitude produisit un revirement dans l’assemblée, car on plaignait vivement Antipater, qui recourait aux larmes et se déchirait le visage, de telle sorte que même ses ennemis étaient déjà saisis de pitié et qu’on voyait Hérode fléchir dans sa résolution, encore qu’il ne voulût pas le laisser voir. Nicolas, reprenant, mais en les développant davantage[63], les arguments déjà exposés par le roi, rassembla, pour prouver l’accusation, tous les éléments fournis par les tortures et les témoignages. [107] Il exposa surtout la bonté du roi, témoignée dans les soins et l’instruction donnés à ses fils sans qu’il y eût jamais rien gagné, n’ayant fait que tomber de malheurs en malheurs. [108] Et pourtant il s’étonnait moins de la folie des autres : jeunes et corrompus par de mauvais conseils, ils avaient oublié les lois de la nature dans leur impatience d’obtenir le pouvoir plus vite qu’il ne fallait. [109] Mais on pouvait à bon droit être épouvanté de la scélératesse d’Antipater, non seulement parce que tous les bienfaits de son père n’avaient pas fléchi un esprit semblable à celui des plus venimeux reptiles — encore ceux-là même répugnent-ils quelque peu à faire du mal à leurs bienfaiteurs — mais encore parce que le sort même de ses frères ne l’avait pas détourné d’imiter leur cruauté. [110] « Et pourtant., Antipater, c’est toi-même qui as dénoncé les projets audacieux de tes frères, toi-même qui as cherché des preuves contre eux et qui as châtié les coupables une fois découverts. Et ce n’est pas d’avoir hardiment manifesté ta colère contre eux que nous te blâmons : nous sommes épouvantés que tu te sois hâté d’imiter leur impudence, nous y voyons la preuve que déjà dans le passé tu as agi non pour le salut de ton père, mais pour la perte de tes frères, afin que ta haine contre leur méchanceté te procurât le renom d’un bon fils et que tu pusses plus sûrement comploter contre ton père. C’est ce que tes actes ont prouvé. [111] A peine t’étais-tu débarrassé de tee frères, convaincus de scélératesse par toi, que tu omettais de livrer leurs complices, montrant clairement à tous que tu t’étais mis d’accord avec eux contre ton père avant de lancer tes accusations. [112] Mais tu voulais réserver à toi seul les bénéfices d’un complot parricide et tirer des deux entreprises une volupté bien digne de ton caractère. L’une, ostensible, était dirigée contre tes frères, tu t’en vantais comme d’une action très glorieuse, et tu aurais eu raison si, [113] en réalité, tu n’avais pas été pire qu’eux, puisque tu dressais secrètement un piège contre ton père et que ta haine contre eux, au lieu d’être due à leurs entreprises contre lui — car en ce cas tu ne te serais pas laissé entraîner à un acte pareil — venait de ce qu’ils auraient pu prétendre, à meilleur droit que toi, à la succession au trône. [114] L’autre entreprise, c`était d’immoler ton père après tes frères, afin d’éviter d’être au plus tôt convaincu de les avoir calomniés et d’infliger à ton malheureux père le châtiment que tu méritais toi-même ; tu as imaginé non pas un parricide ordinaire, mais tel que l’histoire n’en a pas relaté jusqu’ici. [115] Ce n’est pas seulement le fils qui a comploté contre son père, mais contre un père qui l’aimait et le comblait de ses bien faits, un fils effectivement associé à la royauté, proclamé d’avance héritier, que personne n’empêchait de commencer dès lors à jouir de la puissance et dont l’espoir pour l’avenir était assuré par les intentions de ton père et par ses écrits. [116] Cependant ce n’était pas d’après la bonté d’Hérode, mais d’après tes mauvaises pensées que tu jugeais les choses, car tu voulais enlever jusqu’à sa propre part à ce père qui déférait à tous tes désirs, et celui que, en paroles, tu prétendais sauver par tes actions, tu cherchais à le faire disparaître ; [117] non seulement tu te faisais toi-même criminel, mais tu avais fait partager tes desseins à ta mère, tu excitais la discorde entre tes frères unis, tu osais appeler ton père un monstre alors que tu t’étais fait un caractère plus féroce que celui de tous les serpents. C’est ainsi que tu appelais à ton aide leur poison contre tes plus proches parents, contre les plus généreux bienfaiteurs et c’est avec le secours de gardes, avec des machinations d’hommes et de femmes que tu te protégeais contre ce vieillard, comme si ton âme ne suffisait pas à supporter la haine cachée en toi. [118] Et maintenant te voici, après que des hommes libres et des esclaves ont été torturés, que des hommes et des femmes ont été dénonces par tes complices, tout prêt à nier la vérité, impatient de supprimer non seulement ton père du nombre des vivants, mais encore la loi écrite contre toi, la vertu de Varus et le droit naturel. [119] As-tu donc une telle confiance en ton impudence que tu t’offres à la torture et taxes de mensongères les réponses obtenues par les tortures précédentes, pour que ceux qui ont préservé ton père soient repoussés comme ayant menti, tandis que les paroles que t’arrachera la torture passeraient pour être vraies ? Ne préserveras-tu pas le roi, ô Varus, de la menace de ses proches ? [120] Ne feras-tu pas périr ce monstre malfaisant qui, pour perdre ses frères, a feint l’affection envers son père et qui, alors qu’il devait recueillir tout seul et bientôt la royauté, s’est montré de tous le plus meurtrier ? Tu sais que le parricide est un crime qui fait injure à la fois à la nature et à l’humanité ; préméditée aussi bien qu’accomplie, qui le laisse impuni outrage les lois naturelles ». [121] 6. Nicolas ajouta encore ce qui concernait la mère d’Antipater, tout ce qu’elle avait raconté à certains en bavardant comme une femme, ses consultations de devins et ses sacrifices pour dévouer le roi, toutes les débauches d’Antipater avec les femmes de Phéroras, leurs beuveries et leurs orgies, les réponses arrachées par la torture et tout le dossier des témoignages. Il y en avait beaucoup et de toute sorte, les uns préparés, les autres improvisés pour dénoncer et confirmer. [122] En effet, certaines gens qui avaient passé des choses sous silence, par crainte qu’Antipater ne les punît s’il échappait, le voyant maintenant en butte aux accusations de ceux qui en avaient pris l’i,itiative et s’apercevant que la fortune, qui l’avait jadis follement favorisé, le livrait visiblement à ses ennemis, se laissaient entraîner par la haine insatiable déchaînée contre lui. [123] Cependant, ce gui précipitait sa ruine, c’était moins la haine de ses accusateurs que l’énormité de l’audace avec laquelle il avait projeté ses crimes, se sa méchanceté envers son père et ses frères, car il avait rempli la maison royale de discorde et de dissensions mutuelles : ni ses haines n’étaient dictées par la justice, ni ses amitiés par la bienveillance, mais seulement par l’intérêt. [124] La foule qui avait deviné cela depuis longtemps, elle qui juge les choses surtout par le sens moral, parce qu’elle n’est pas gênée par la colère pour donner son avis sur les événements, avait été empêchée de crier auparavant, mais, le pouvant désormais sans risques, dévoilait tout ce qu’elle savait. [125] On révélait alors toute sorte de vilenies et il était impossible de taxer cela de mensonges, parce que la plupart ne parlaient pas pour se concilier l’affection d’Hérode ni par crainte de se voir reprocher d’avoir tu ce qu’ils avaient à dire, mais parce qu’ils considéraient que les actions d’Antipater étaient mauvaises et qu’il méritait tous les châtiments, moins pour assurer la sécurité d’Hérode qu’à cause rte sa propre scélératesse. [126] Beaucoup de faits étaient même rapportés par des gens auxquels on n’avait pas enjoint de parler, de telle sorte qu’Antipater, bien que passé maître en mensonge et impudence, n’avait pas la force d’élever la voix pour les contredire. [127] Quand Nicolas eut cessé de parler et de développer ses preuves, Varus ordonna à Antipater de s’avancer pour se disculper, s’il avait préparé quelque chose qui le mit à l’abri des chefs d’accusation ; car il souhaitait personnellement et son père aussi — Antipater le savait — qu’il rie fût convaincu d’aucun crime. [128] L’autre gisait tourné la face contre terre, s’en remettant à Dieu et à tous pour témoigner de son innocence, ou établir par des signes manifestes qu’il n’avait pas comploté contre son père. [129] C’est une habitude chez tous ceux qui sont dépourvus de vertu, quand ils entreprennent de mauvaises actions, d’oublier que la providence divine préside à tout et d’agir à leur guise ; mais le jour où pris en flagrant délit ils risquent d’être châtiés, ils invoquent le témoignage de cette même divinité pour qu’elle retourne la situation. Tel fut le cas d’Antipater. [130] Alors qu’il avait toujours agi comme en l’absence de la divinité, maintenant, cerné de toutes parts par la justice, n’ayant pas d’autres moyens pour se justifier des accusations, il outrageait à nouveau la bonté divine en invoquant en témoignage tout ce qu’il avait pu conserver grâce à la puissance de ce Dieu, qui révélait tout ce qu’il n’avait cessé d’oser faire envers son père[64]. [131] 7[65]. Varus, après de fréquentes questions posées à Antipater, n’ayant rien obtenu de plus que des invocations à la divinité et voyant qu’il n’en finissait pas, ordonna d’apporter le poison pour éprouver la force qui lui restait encore. [132] Quand on l’eut apporté ; un condamné à mort le but sur l’ordre de Varus et succomba instantanément. Alors Varus se leva et, quitta l’assemblée ; il partit le lendemain pour Antioche, où il séjournait la plupart du temps parce que c’est la capitale de la Syrie. [133] Hérode fit sur le champ charger son fils de chaînes ; la foule ignora le contenu des conversations de Varus avec le roi et, ce qu’il avait ajouté en s’en allant, mais supposa que c’était d’après son avis qu’Hérode traitait ainsi Antipater. Donc, après avoir enchaîné celui-ci, Hérode expédia à Rome à l’empereur une lettre à ce sujet : et des envoyés chargés de le renseigner de vive voix sur la perversité d’Antipater. [134] Pendant ces mêmes journées on intercepta encore une lettre écrite à Antipater par Antiphile qui séjournait en Égypte ; cette lettre, ouverte par le roi, était ainsi conçue : « Je t’ai envoyé la lettre d’Acmé sans craindre de risquer ma propre vie. Tu sais en effet que je me trouverai de nouveau en danger du fait de deux familles si je suis pris. [135] Bonne chance dans ton entreprise. » Voilà ce que révélait cette lettre. Le roi recherchait aussi l’autre lettre[66], mais on ne la découvrait pas, et l’esclave d’Antiphile, qui portait celle qu’on avait lue, niait en avoir reçu une autre. [136] Comme le roi se trouvait embarrassé, un des familiers d’Hérode, remarquant que la tunique intérieure de l’esclave — il en portait deux — avait été recousue, supposa que la lettre était cachée dans ce repli ; et il en était réellement ainsi. [137] On saisit donc la lettre où était écrit ce qui suit : « Acmé à Antipater. J’ai écrit, à ton père la lettre que tu voulais, et après avoir fait faire une copie de la prétendue lettre de Salomé à ma maîtresse[67], je la lui ai envoyée ; quand il l’aura lue, je suis sûre qu’il se vengera de Salomé comme d’une traîtresse ». [138] Il s’agissait là d’une lettre soi-disant écrite par Salomé à la maîtresse d’Acmé, mais en réalité dictée, par Antipater sous le nom de Salomé ; tout au moins en ce qui concernait la pensée ; le style contrefait était bien celui de Salomé. [139] Quant à la lettre d’Acmé à Hérode, voici quel en était le texte — « Acmé au roi Hérode. Désireuse de te faire connaître tout ce qui se trame contre toi et ayant découvert une lettre écrite par Salomé à ma maîtresse contre toi, je l’ai recopiée à mon grand risque, mais pour ton salut, et je te l’envoie. Salomé l’a écrite parce qu’elle veut épouser Syllaios. Déchire donc la lettre afin que je ne sois pas également en danger de mort ». [140] En même temps Acmé avait écrit à Antipater lui-même, lui faisant savoir qu’obéissant à son ordre elle avait écrit à Hérode que Salomé s’efforçait, toujours de comploter contre lui et qu’elle, Acmé, envoyait à Hérode une copie de la prétendue lettre adressée à sa maîtresse par Salomé[68]. [141] Cette Acmé était juive de naissance, mais esclave de Julia, femme de l’empereur, elle agissait ainsi par amitié pour Antipater, qui l’avait achetée à grand prix pour en être aidé dans ses machinations criminelles contre son père et sa tante. [142] 8[69]. Hérode, épouvanté de la scélératesse immense d’Antipater, songea d’abord à se débarrasser de lui sur le champ comme d’un fomenteur des plus graves troubles qui avait comploté non seulement contre lui, mais contre sa sœur, et avait corrompu la maison impériale. Il y était encore incité par Salomé qui se frappait la poitrine et lui demandait de la tuer si la moindre preuve digne de foi pouvait être fournie contre elle pour un si grand crime. [143] Hérode fit donc amener son fils et l’interrogea, en lui ordonnant de répondre sans rien dissimuler s’il le pouvait. Comme celui-ci restait interdit, Hérode lui demanda, puisque partout il était pris en flagrant délit de scélératesse, de désigner au moins sans retard ses complices. [144] Et lui rejeta sur Antiphile la responsabilité de tout, mais ne nomma personne autre. Hérode, très affligé, songea alors à envoyer son fils à Rome[70] auprès de l’empereur pour subir la peine de ses complots. [145] Puis, craignant qu’il ne trouvât moyen d’échapper au danger grâce à l’aide de ses amis, il le garda enchaîné comme auparavant et envoya de nouveaux ambassadeurs aven une lettre pour accuser son fils, avec l’indication de tout ce qu’avait fait Acmé de concert avec lui et la copie des lettres saisies.
— VI —1. Maladie et testament d’Hérode. — 2-4. Révolte de Judas et de Matthias. Sa répression. — 5-6. Aggravation de la maladie d’Hérode. Son suprême projet de massacre. Son caractère.[146] 1[71]. Pendant que les ambassadeurs se hâtaient vers Rome avec les lettres et munis d’instructions sur ce qu’il fallait répondre quand on les interrogerait, le roi tomba malade et fit un testament où il donnait la royauté au plus jeune de ses fils[72], par haine contre Archélaüs et Philippe, en raison des calomnies d’Antipater ; il léguait à l’empereur une somme de mille talents et cinq cents talents à Julie, femme de l’empereur, aux enfants, aux amis et aux affranchis de celui-ci. [147] Il partageait aussi entre ses fils et petits-fils ses trésors, ses revenus et ses terres ; il enrichissait aussi beaucoup sa sœur Salomé, qui lui était toujours restée dévouée et n’avait jamais tenté de lui faire aucun mal. [148] Désespérant de survivre — car il avait environ soixante-dix ans — il devint féroce, se laissant aller à un excès de colère et d’amertume à l’égard de tous ; c’est qu’il se croyait méprisé et se persuadait que le peuple se réjouissait de ses malheurs, surtout lorsque certains démagogues se soulevèrent contre lui pour la raison que voici. [149] 2[73]. C’étaient Judas, fils de Sariphaios, et Matthias, fils de Margalothos[74], les plus savants des Juifs et ceux qui interprétaient le mieux les lois des ancêtres, chers aussi au peuple parce qu’ils instruisaient la jeunesse : chaque jour, tous ceux qui se souciaient d’acquérir de la vertu passaient leur temps avec eux. [150] Les hommes donc, ayant appris que la maladie du roi était incurable, excitèrent la jeunesse à détruire tout ce qu’il avait fait contre les coutumes des ancêtres et à mener la lutte sainte au nom des lois : c’était à cause de l’audace avec laquelle Hérode avait enfreint la loi qu’étaient arrivés au roi non seulement tant de malheurs, inconnus au commun des mortels, qui avaient rempli sa vie, mais encore sa maladie elle-même. [151] En effet, Hérode avait commis certaines infractions à la loi, que lui reprochait le groupe de Judas et de Matthias. Ainsi, au-dessus de la grande porte du temple, le roi avait placé une offrande très coûteuse, un grand aigle d’or, alors que la loi défend d’ériger des images et de consacrer des formes d’êtres vivants à qui veut mener une vie conforme à ses prescriptions. [152] Aussi ces sophistes ordonnèrent-ils d’abattre l’aigle : s’il y avait pour eux danger d’être mis à mort, il fallait considérer comme bien préférable à la joie de vivre la réputation de vertu acquise en mourant pour le salut et la sauvegarde de la loi de la patrie ; ils s’attireraient ainsi une renommée éternelle, seraient loués dès maintenant et légueraient à la postérité, en quittant la vie, un souvenir à jamais mémorable. [153] D’ailleurs, même pour ceux qui vivaient loin des dangers, le malheur n’était-il pas un accident inéluctable ? Aussi faisait-on bien, lorsqu’on aspirait à la vertu, de recevoir avec louange et honneur, en quittait la vie, la sentence de la destinée. [154] C’est encore un grand soulagement de mourir pour de telles actions dont le danger montre la voie, car en même temps on lègue à ses fils et à tous ses descendants, mâles ou féminins, le fruit d’une bonne renommée. [155] 3. Voilà le genre de propos avec lesquels ils excitaient la jeunesse. D’autre part, le bruit leur parvint que le roi était mort, ce qui fut d’un grand secours aux sophistes. A l’heure de midi ils montèrent au temple, abattirent et démolirent à coups de hache l’aigle, alors, qu’une grande foule s’y trouvait réunie. [156] Le préfet du roi, à qui l’entreprise fut annoncée, supposant qu’elle avait un but plus important que ce méfait, se rend sur les lieux à la tête d’une troupe assez forte pour repousser ceux qui s’efforceraient d’abattre l’offrande ; tombé à l’improviste sur des gens qui ne l’attendaient pas et qui, selon l’habitude de la populace, portés à des coups d’audace plutôt par une impulsion irréfléchie qu’après une préparation prudente, étaient en désordre et n’avaient pris aucune précaution nécessaire. [157] Parmi les jeunes gens, non moins de quarante qui l’attendaient de pied ferme, alors que le reste de la multitude s’était dispersé, furent arrêtés par lui, ainsi que les instigateurs de cet acte audacieux Judas et Matthias, qui avaient jugé honteux de lui céder la place ; il les amena au roi. [158] Celui-ci, quand ils furent en sa présence, leur demanda pourquoi[75] ils avaient osé jeter à bas son ex-voto. « Nos résolutions et nos actes, dirent-ils, ont été inspirés par la vertu digne d’hommes de cœur. Car nous avons eu souci des choses consacrées à la majesté de Dieu et des enseignements que nous avons reçus de la loi. [159] Il n’est pas étonnant que nous ayons jugé tes décrets moins respectables que les lois que Moïse nous a laissées, écrites sous la dictée et selon les instructions de Dieu. C’est avec joie que nous affronterons la mort ou tous les châtiments que tu pourras nous infliger, car ce n’est pas pour des actions injustes, mais par amour de la religion que nous allons connaître tout ce qui accompagne la mort ». [160] Tous disaient de même, témoignant dans leurs discours d’une audace égale à celle qui les avait décidés sans hésitation à un tel acte. [161] Le roi les ayant fait charger de chaînes, les envoya à Jéricho et y convoqua les principaux magistrats juifs. A leur arrivée, il réunit l’assemblée dans l’amphithéâtre et, couché sur une litière, parce qu’il ne pouvait se tenir debout, énuméra tous ses efforts et pendant combien de temps il avait travaillé pour eux, [162] les grandes dépenses qu’il avait faites pour l’édification du temple, alors que jamais pendant leurs cent vingt cinq ans de règne les Asmonéens n’avaient rien fait de pareil en l’honneur de Dieu, les offrandes magnifiques riant. il l’avait orné. [163] En échange il avait espéré laisser un souvenir et un nom illustre même après sa mort. Alors il se mit à hurler que, même de son vivant, ils ne s’étaient pas abstenus de l’outrager et que, en plein jour, à la vue de la foule, ils avaient eu l’audace de porter la main sur ses offrandes et de les enlever, commettant en apparence une offense contre la majesté royale, mais en réalité, à bien examiner le fait, un sacrilège. [164] 4. Voyant sa violence et de peur que dans son exaspération il ne les châtiât eux-mêmes, les notables juifs déclarèrent que ce n’était pas avec leur consentement qu’on avait agi et que certainement cet acte ne pouvait rester impuni. Hérode traita avec une douceur relative le reste, mais il déposa Matthias[76] le grand-pontife comme responsable en partie de ces événements et il le remplaça par Ioxares, frère de sa femme[77]. [165] Sous le pontificat de ce Matthias il arriva qu’un autre grand pontife installé pour un seul jour, celui où les Juifs jeûnent. [166] Voici pourquoi : Matthias, pendant qu’il exerçait ses fonctions, dans la nuit qui précédait le jour du jeûne, crut en rêve avoir commerce avec une femme, et comme, à cause de cela, il ne pouvait officier, on lui adjoignit comme coadjuteur Josèphe, fils d’Ellémos, son parent[78]. [167] Ainsi Hérode destitua Matthias du grand pontificat ; quant à l’autre Matthias, le promoteur de la sédition, et certains de ses compagnons, il les fit brûler vifs. Cette même nuit il y eut éclipse de lune[79]. [168] 5[80]. La maladie d’Hérode s’aggravait de plus en plus, car Dieu le punissait des actes qu’il avait commis contre sa loi. Il souffrait d’une fièvre lente qui ne manifestait pas autant son ardeur au contact de la main que dans l’intérieur des tissus qu’elle ravageait. [169] Il éprouvait aussi un violent désir de prendre de la nourriture et il était impossible de n’y pas déférer ; ajoutez l’ulcération des intestins et notamment du colon qui lui causait d’effrayantes souffrances ; aux pieds une inflammation humide et transparente, un mal analogue autour de l’abdomen, la gangrène des parties génitales engendrant des vers ; une respiration oppressée dans la station érecte, rendue désagréable par la fétidité de son haleine et la précipitation de son souffle ; enfin il éprouvait dans tous ses membres des convulsions spasmodiques d’une violence insupportable. [170] Les devins et les gens versés dans l’art de prédire l’avenir déclaraient que Dieu tirait ainsi vengeance des nombreuses impiétés commises par le roi. [171] Bien que tourmenté au delà de ce qui semble tolérable, il avait pourtant l’espoir de se relever encore, faisait chercher des médecins et observait scrupuleusement toutes leurs prescriptions pour son salut. Il traversa le Jourdain pour se faire traiter par les sources thermales de Callirhoé, qui, outre leurs autres vertus, sont potables ; cette eau se jette dans le lac appelé Asphaltite. [172] Là, parce que les médecins avaient cru le réchauffer, il se plongea dans un bain plein d’huile, mais on crut qu’il allait passer ; les lamentations de ses serviteurs le ramenèrent à lui, et n’ayant plus l’espoir de guérir, il ordonna de distribuer cinquante drachmes par tête à ses soldats, [173] et il fit aussi de grands présents à leurs officiers et à ses familiers. Il revint alors à Jéricho, où il tomba dans un tel accès atrabilaire, irrite contre tout le monde, qu’il imagina, déjà moribond, un acte terrible. [174] Sur son ordre étaient venus auprès de lui les Juifs les plus notables de tout le peuple ; ils étaient très nombreux parce que tout le monde avait été convoqué et ils avaient tous obéi à l’ordre rendu sous peine de mort. Or le roi, également furieux contre les innocents et les coupables, les enferma tous ensemble dans l’hippodrome et, [175] ayant mandé sa sœur Salomé et Alexas, mari de celle-ci, leur dit qu’il allait bientôt mourir puisqu’il était parvenu à ce comble de souffrances ; la mort était chose supportable et même désirable pour tout le monde, mais l’idée de se voir privé des lamentations et du deuil qui revenaient à un roi lui était très pénible ; [176] car il n’ignorait pas les sentiments ales Juifs ; il savait que sa fin était souhaitée par eux et leur serait très agréable puisque, de son vivant même, ils s’étaient d’avarice révoltés et avaient outragé tout ce qu’il avait établi ; [177] il appartenait donc à ses parents rie décider quelque mesure propre à soulager un peu cette angoisse. S’ils ne s’opposaient pas à son projet, il aurait des obsèques grandioses, telles qu’aucun autre monarque n’en avait eues, le deuil serait ressenti du fond du cœur par le peuple tout entier, et ce ne seraient pas des lamentations pour rire. [178] Donc quand ils l’auraient vu rendre le dernier soupir, ils devraient entourer l’hippodrome de soldats ignorant encore sa mort — qui ne devrait être révélée au peuple qu’après l’exécution de cet ordre — et leur enjoindre de percer de flèches ceux qui y étaient enfermés ; par ce massacre, ils ne manqueraient pas ne lui donner une double joie : ses ordres suprêmes seraient exécutés et, il serait honoré par un deuil magnifique. [179] Il les suppliait avec des larmes et invoquait leur affection familiale et la foi divine, les conjurant de ne pas lui refuser cet honneur, et ils lui en donnèrent leur parole[81]. [180] 6. Ces ordres suprêmes révèlent quel fut le caractère de cet homme, même aux yeux de ceux qui approuvèrent ses actes antérieurs et sa conduite envers ses proches en les mettant sur le compte de son amour de la vie. [181] Ce caractère n’avait rien d’humain, puisqu’en quittant la vie il préméditait de laisser tout le peuple en deuil et privé de ceux qui lui étaient les plus chers, en ordonnant de tuer un membre de chaque famille sans que ces hommes eussent rien commis contre lui ou été l’objet d’aucune autre accusation. Et cependant tous ceux qui prétendent à la vertu ont coutume de renoncer, à un tel moment, même à leur haine contre leurs ennemis légitimes.
— VII[82] —Peines prononcées par l’empereur. Exécution d’Antipater.[182] Pendant qu’Hérode donnait ces instructions à ses parents, arriva une lettre des ambassadeurs qu’il avait envoyés à Rome auprès de l’empereur ; il en prit connaissance ; elle disait en substance qu’Acmé avait été mise à mort par l’empereur, indigné de sa complicité criminelle avec Antipater. Quant à ce dernier, l’empereur laissait à Hérode lui-même le soin de décider, comme père et comme roi, s’il voulait l’envoyer en exil ou même le mettre à mort. [183] Ayant reçu ces nouvelles, Hérode se sentit mieux pendant un court espace de temps par la joie que lui procurait cette lettre, la mort d’Acmé et la liberté qu’il recevait de châtier son fils. Mais ses souffrances ayant repris de plus belle, il réclamait dans ses tourments de la nourriture. Il demanda une pomme et un couteau, ayant l’habitude depuis longtemps d’éplucher et de couper lui-même en morceaux les fruits qu’il mangeait. [184] Il prit le fruit, regarda autour de lui, voulut se frapper ; il l’eût fait si Achiab, son cousin germain, ne lui eût saisi vivement la main droite et n’eut poussé un grand cri auquel répondirent dans le palais des gémissements et un grand trouble, comme si le roi était mort. [185] Antipater, croyant son père vraiment mort, retrouva toute l’audace de ses paroles comme s’il était déjà délivré de ses chaînes et allait prendre en mains la royauté sans obstacle ; il parlait à son geôlier de sa délivrance, lui faisant de grandes promesses pour le présent et pour l’avenir, comme si c’était de cela qu’il fût question. [186] Or, le geôlier non seulement ne se laissa pas convaincre d’écouter Antipater, mais encore rapporta au roi les projets et les nombreuses sollicitations analogues dont il avait été l’objet auparavant. [187] Quand Hérode, qui déjà auparavant n’avait pas cédé à son affection pour son fils, eut entendu le geôlier, il poussa des cris, se frappa la tête, bien qu’il fût à toute extrémité, et, se soulevant sur son coude, il ordonna à quelques gardes d’aller tuer Antipater sans retard, sur le champ, et de l’ensevelir sans honneurs à Hyrcania.
— VIII —1. Nouveau testament d’Hérode. Sa mort. — 2. Avènement d’Archélaüs. — 3. Obsèques d’Hérode. — 4. Discours d’Archélaüs à l’armée. Demandes du peuple.[188] 1[83]. Puis, ayant changé de sentiments, il refit son testament : à Antipas, auquel il avait d’abord laissé la couronne, il donna les tétrarchies de Galilée et de Pérée ; [189] Archélaüs obtint la royauté : son fils Philippe, frère légitime[84] d’Archélaüs, eut la Gaulonitide, la Trachonitide, la Batanée et Panias à titre de tétrarchie ; Iamné, Axotos et Phasaelis furent attribués à sa sœur Salomé avec cinq cent mille drachmes d’argent monnayé. [190] Il pourvut aussi au reste de ses parents et les enrichit chacun par des legs de capitaux et de revenus. A l’empereur il donna dix millions de drachmes d’argent monnayé et, en plus, de la vaisselle d’or et d’argent et des étoffes d’un très grand prix ; à Julia, femme de l’empereur et à quelques autres, il distribua cinq millions de drachmes. [191] Cela réglé, le cinquième jour après avoir fait tuer son fils Antipater, il mourut[85] ; il avait régné trente quatre ans depuis l’exécution d’Antigone et trente-sept, depuis sa désignation par les Romains, homme d’une cruauté égale envers tous, cédant à la colère, rebelle à la justice, il jouit d’une fortune sans égale. [192] En effet, de simple particulier, il devint roi et, bien qu’entouré d’innombrables dangers, échappa à tous et atteignit un âge très avancé. Mais quant à ses affaires de famille et ses rapports avec ses fils, si, à son point de vue, il fut favorisé par le sort, puisqu’il les regardait comme ses ennemis et parvint à en triompher, à mon avis il fut profondément malheureux. [193] 2[86]. Avant que la mort du roi ne fût divulguée, Salomé et Alexas renvoyèrent ceux qu’on avait enfermés dans l’hippodrome, disant que le roi leur ordonnait de partir dans leurs champs pour s’occuper de leurs affaires. Ce fut là un grand bienfait qu’ils accordèrent au peuple. [194] Ensuite la mort du roi fut rendue publique et Salomé et Alexas, ayant réuni l’armée dans l’amphithéâtre de Jéricho, lurent d’abord une lettre écrite par Hérode aux soldats pour les remercier de leur fidélité et de leur dévouement envers lui et pour les inviter à témoigner les mêmes vertus à Archélaüs son fils qu’il désignait comme roi. [195] Puis le garde du sceau royal Ptolémée lut le testament, qui ne devait être exécutoire qu’après approbation de l’empereur. Aussitôt s’élevèrent des acclamations en l’honneur du roi Archélaüs, et les soldats par bandes, aussi bien que leurs chefs, lui promirent leur dévouement et, leur zèle et invoquèrent l’aide de Dieu pour lui. [196] 3[87]. Ensuite on prépara les funérailles du roi. Archélaüs prit soin que le convoi de son père fût aussi somptueux que possible et fournit tous les ornements nécessaires pour la pompe funèbre qui devait escorter le corps. [197] On le portait sur une litière d’or parsemée de pierreries précieuses et variées ; il y avait une couverture pourprée ; le mort était revêtu de pourpre, paré d’un diadème surmonté d’une couronne d’or, et un sceptre était étendu à côté de sa main droite. [198] Autour de la litière marchaient ses fils et la foule de ses parents ; derrière, l’armée répartie selon la nationalité et la désignation des corps de troupes : d’abord les gardes, puis le corps thrace, ensuite tous les Germains et après eux les Gaulois, tous en tenue de campagne. [199] Derrière eux s’avançait le reste de l’armée marchant en ordre de bataille, conduit par les centurions et les chefs de cohortes. Suivaient cinq cents esclaves portant des aromates. On alla ainsi jusqu’à Hérodion, distant de huit stades[88], car c’est là que le roi fut enseveli conformément à ses volontés. Telle fut la fin d’Hérode. [200] 4[89]. Archélaüs observa un deuil de sept jours en l’honneur de son père — c’est ce qu’ordonne la coutume des ancêtres ; puis, après avoir offert un festin à la foule et levé le deuil, il monta au Temple. Tous ceux qu’il rencontrait lui adressaient des souhaits et des éloges, rivalisant entre eux à qui ferait les vœux les plus ardents. [201] Lui, monté sur une estrade élevée qu’on avait construite et assis sur un trône d’or, tendait les mains vers la foule, satisfait de ses acclamations, joyeux de son affection, et il remerciait ses sujets de ne pas lui témoigner de ressentiment pour les injustices que son père avait commises envers eux, ajoutant qu’il s’efforcerait de payer de retour leur bonne volonté. [202] Pour l’instant, cependant, il s’abstiendrait de porter le nom de roi, car il ne revêtirait cette dignité que lorsque l’empereur aurait ratifié le testament de son père : aussi, bien qu’a Jéricho l’armée eût vivement désirer le couronner du diadème royal, il avait refusé de recevoir cet honneur si convoité parce que celui qui devait le lui conférer définitivement ne s’était pas encore prononcé. [203] Mais, si le pouvoir lui échéait, sa bienveillance ne négligerait rien pour répondre à leur dévouement ; il s’efforcerait de se montrer en toute circonstance meilleur pour eux que son père. [204] Les Juifs, suivant l’habitude de la foule, étaient persuadés que les premiers jours révèlent les dispositions de ceux qui accident à de telles charges, et plus Archélaüs leur parlait avec douceur et flatterie, plus ils se répandaient en éloges. Ils se mirent à lui demander des largesses : les uns lui criaient d’alléger les tributs annuels, les autres de délivrer les captifs enchaînés sur l’ordre d’Hérode, qui étaient nombreux et enfermés depuis de longues années ; d’autres demandaient à être déchargés des droits sur les ventes publiques qu’on percevait avec rigueur. [205] Archélaüs ne les contredisait nullement, car il brûlait de faire plaisir en tout à la multitude, dans l’idée qu’il était important de s’assurer son dévouement, s’il voulait garder le pouvoir. Ensuite, après avoir sacrifié à Dieu, il alla festoyer avec ses amis.
— IX[90] —1-3. Répression d’une révolte à Jérusalem. Sabinus à Jérusalem. — 4. Antipas dispute le trône à Archélaüs. — 5-7. Discours d’Antipater et de Nicolas de Damas devant l’empereur qui réserve sa décision.[206] 1[91]. Sur ces entrefaites, quelques Juifs, réunis par le désir d’une révolution, se finirent à déplorer le sort de Matthias et de ceux qui avaient été mis à mort avec lui par Hérode, et qui, sur le moment, avaient été privés des honneurs funèbres par la crainte qu’inspirait le roi. C’étaient les gens qui avaient été condamnés pour l’enlèvement de l’aigle d’or. Ils polissaient donc de grands cris et des lamentations et lançaient au roi des injures comme un soulagement pour ces morts. [207] Ils se réunirent pour réclamer qu’Archélaüs les vengeât en châtiant les hommes honorés par Hérode, qu’en premier lieu et ouvertement, il destituât le grand-pontife désigné par Hérode et choisit un homme plus respectueux de la loi et plus leur pour ce poste. [208] Archélaüs, bien que fort mécontent de leur agitation, s’inclina, dans sa hâte de faire au plus vite le voyage de Rome pour observer les dispositions de l’empereur. [209] Il leur envoya donc son général d’armée et le chargea de les amener par la persuasion à renoncer à leur projet de vengeance[92], à considérer que la peine subie par leurs amis était conforme aux lois, que leurs exigences atteignaient un haut degré d’insolence ; d’ailleurs, les circonstances n’y étaient guère propices et exigeaient plutôt de la concorde jusqu’au moment où il reviendrait vers eux investi du pouvoir par le consentement de l’empereur ; alors il délibérerait avec eux sur leurs revendications ; pour le moment, ils devaient rester tranquilles et éviter de paraître séditieux. [210] 2. Après avoir donné au générai ces indications et ces instructions, il l’envoya auprès d’eux. Mais ceux-ci, par leurs cris, l’empêchèrent de parler et le mirent en danger de mort, ainsi que tous ceux qui osaient ouvertement leur conseiller de se modérer et de renoncer à ces projets. Décidés a suivre en toute chose leur propre impulsion plutôt que l’autorité des pouvoirs établis, [211] ils jugeaient affreux, après avoir été privés du vivant d’Hérode de leurs plus chers amis, qu’on les empêchât, même après sa mort, de les venger en obéissant à leur colère ; ils considéraient comme légal et buste ce qui devait leur faire plaisir, incapables de prévoir le danger qui en résulterait et, même si quelques-uns le soupçonnaient, dominés par la joie immédiate que leur procurerait le châtiment de leurs ennemis les plus détestés. [212] Beaucoup de gens furent envoyés par Archélaüs pour parlementer avec eux ; certains marne virent sans qu’il les en eût priés et uniquement de leur propre gré, pour les ramener à plus de douceur ; mais ils n’en laissèrent parler aucun. C’était le soulèvement de quelques enragés, qui menaçait de dégénérer en une grande révolte, car la multitude affluait vers eux. [213] 3. Vers ce moment, arrivait la date de la fête où la loi des Juifs prescrit de servir que des pains azymes : c’est la fête appelée la Pâque et qui commémore leur sortie d’Égypte. On la célèbre avec beaucoup de zèle et la coutume veut qu’on y immole une plus grande quantité de victimes que dans aucune autre fête. [214] Une foule innombrable descend alors de tout le pays et même de l’étranger pour honorer Dieu. Même les séditieux qui pleuraient Matthias et Judas, interprètes des lois, se réunirent dans le Temple avec force victuailles qui, ces agitateurs n’avaient pas honte d’aller mendier. [215] Archélaüs, craignant que quelque désordre plus grave ne résultât de leur extravagance, envoya une compagnie d’hoplites avec un chiliarque pour réprimer l’élan de révolte avant que tout le peuple ne fût gagné par leur folie, avec ordre de lui amener ceux qui se distingueraient le plus par leur désir de rébellion. [216] Contre ces troupes les séditieux de la faction des exégètes de la loi et la multitude s’excitèrent avec des cris et des exhortations ; ils s’élancèrent sur les soldats et, les ayant cernés, les tuèrent pour la plupart à coups de pierres ; un petit nombre seulement et le chiliarque purent s’échapper, n’étant que blessés. Cela fait, les auteurs de la révolte se remirent à célébrer leur sacrifice. [217] Archélaüs se demandait si tout n’était pas perdu dans le cas où il ne réprimerait pas ce mouvement populaire ; aussi envoya-t-il toute son armée et sa cavalerie, cette dernière pour empêcher les gens qui campaient autour du Temple de porter secours à ceux qui étaient dans l’intérieur et afin que ceux qui seraient refoulés par l’infanterie fussent repris quand ils se croiraient déjà en sûreté. [218] Les cavaliers tuèrent environ trois mille hommes : le reste s’enfuit dans les montagnes voisines[93]. Archélaüs fit donner par des hérauts l’ordre que chacun rentrât chez soi, et la multitude s’en alla, abandonnant la fête par crainte de maux plus grands, malgré l’audace que lui donnait son inexpérience. [219] Archélaüs descendit alors vers la mer en emmenant, outre sa mère, Nicolas[94], Ptolémée et Ptollas[95] ses amis, après avoir confié à son frère Philippe le soin de toutes ses affaires privées et publiques. [220] Il était aussi accompagné de Salomé, sœur d’Hérode, qui emmenait ses enfants, et de nombreux parents qui assuraient vouloir travailler à lui faire obtenir la royauté, mais qui, en réalité, allaient agir contre lui et protester surtout au sujet des événements qui avaient en lieu dans le Temple. [221] A Césarée, Archélaüs rencontra Sabinus, procurateur des biens de l’empereur en Syrie, qui était venu en Judée en toute hâte pour mettre en sûreté la fortune d’Hérode ; mais Varus, survenant, l’empêcha de poursuivre sa mission, Archélaüs l’ayant fait mander par Ptolémée. [222] Pour être agréable à Varus, Sabinus n’occupa point toutes les citadelles de la Judée et ne mit pas les trésors sous scellés ; il permit à Archélaüs de les conserver jusqu’à ce que l’empereur eût pris une décision à cet égard, et, cette promesse faite, il resta à Césarée. Cependant, quand Archélaüs se fut embarqué pour Rome et que Varus fut reparti pour Antioche, Sabinus se rendit à Jérusalem et occupa le palais royal. [223] Puis, ayant mandé les commandants des garnisons et tous les intendants du domaine, il leur fit savoir qu’il exigeait des comptes et garnit les citadelles à sa guise. Néanmoins, les gardiens observèrent les instructions d’Archélaüs et persistèrent à sauvegarder tout ce qu’il leur avait confié, en feignant de garder tout pour l’empereur. [224] 4[96]. A la même époque, Antipas, fils d’Hérode, s’embarqua pour Rome afin de revendiquer de son côté le trône, car les promesses de Salomé suscitaient en lui l’espoir de régner et il se croyait bien plus légitime successeur qu’Archélaüs, puisqu’il avait été désigné comme roi dans le testament précédent, plus sûr, à son avis, que les dispositions postérieures. [225] Il emmenât avec, lui sa mère et le frère de Nicolas, Ptolémée, familier très honoré d’Hérode et qui lui était dévoué. [226] Mais celui qui le poussait le plus à réclamer la royauté, c’était Irénée, un rhéteur à qui sa réputation d’éloquence avait valu de se voir confier cette cause[97]. C’est pourquoi Antipas ne supportait pas ceux qui lui conseillaient de s’effacer devant Archélaüs, qui était plus âgé que lui et avait été inscrit par son père comme roi dans le codicille. [227] Quand il fut arrivé à Rome, tous ses proches passèrent de son coté, moins par affection pour lui que par haine contre Archélaüs ; ils désiraient surtout d’être libres, sous l’administration d’un proconsul romain. S’il y avait un obstacle à cela, ils pensaient qu’Antipas favoriserait plus leurs intérêts qu’Archélaüs et ils travaillaient tous à lui donner la royauté. D’ailleurs Sabinus envoya à l’empereur un réquisitoire contre Archélaüs[98]. [228] 5[99]. Archélaüs, de son côté, avait adressé à l’empereur une lettre où il déposait ses titres, le testament d’Hérode, les comptes de sa fortune, apportés par Ptolémée et munis du sceau royal, et il attendit les événements. [229] Après avoir pris connaissance de tous ces documents, ainsi que des lettres de Varus et de Sabinus, du montant de la fortune et des revenus annuels, ainsi que de la lettre écrite par Antipas pour revendiquer la royauté, l’empereur réunit ses familiers pour prendre leur avis, et avec eux Caïus, fils d’Agrippa et de sa fille Julia, qu’il avait adopté et à qui il avait donné la première place au conseil, et il pria ceux qui le voulaient de prendre la parole sur l’affaire en suspens. [230] Le premier qui parla fut le fils de Salomé, Antipater, personnage très éloquent et très hostile a Archélaüs. Il dit qu’Archélaüs se moquait en demandant la royauté, puisqu’il avait effectivement saisi le pouvoir avant que l’empereur y eût consenti ; il lui reprocha l’audace qu’il avait montrée en massacrant les Juifs le jour de la fête : [231] même s’ils avaient mal agi, leur châtiment aurait dû dépendre de ceux qui pouvaient user contre eux de leur toute-puissance, au lieu d’être l’œuvre d’un seul homme[100]. Il avait agi en roi, il avait manqué envers l’empereur qui délibérait encore à son sujet ; si c’était en particulier, c’était encore bien pire, puisque, simple prétendant à la couronne, il avait privé l’empereur de son pouvoir sur ces hommes[101]. [232] Antipater reprochait en outre à Archélaüs d’avoir changé certains chefs de l’armée, d’avoir siégé prématurément sur le trône royal, d’avoir rendu la justice comme s’il était roi, d’avoir accédé à des pétitions faites au nom du peuple, bref tous les actes qu’il n’aurait pas accomplis avec plus d’assurance si l’empereur l’avait investi du pouvoir. [233] Il lui attribuait même la délivrance des prisonniers de l’hippodrome et encore beaucoup de fautes, les unes réelles, d’autres croyables parce qu’elles étaient de nature à être commises par un jeune homme qui, par appétit de régner, s’empare prématurément de la puissance : ainsi sa négligence touchant le deuil de son père et le festin célébré la nuit même de la mort de ce dernier. Cela, disait Antipater, avait été la première cause du soulèvement populaire : [234] alors que son père l’avait chargé de tels bienfaits et jugé digne de si grandes faveurs, c’est par de tels actes qu’Archélaüs payait de retour le défunt, en affectant comme un comédien de pleurer pendant le jour tandis que, toutes les nuits, il jouissait des plaisirs propres à la royauté. [235] Archélaüs se montrerait le même envers l’empereur, si celui-ci lui accordait la couronne, qu’envers son père : en effet il dansait et chantait comme après la chute d’un ennemi, et non après le convoi funéraire d’un homme qui lui était si proche et avait cru devoir tellement le combler. [236] Antipater déclarait que le plus grave de tout était qu’Archélaüs vînt à présent auprès de l’empereur pour obtenir la royauté de son consentement, alors qu’il avait fait déjà tout ce qu’il aurait pu faire si l’empereur lui avait conféré le pouvoir. [237] Il grossissait surtout dans son discours le massacre qui avait eu lieu autour du Temple et l’impiété commise quand, pendant la célébration d’une fête, on avait égorgé en guise de victimes des étrangers et des gens du pays, rempli le Temple de cadavres sur l’ordre non pas d’un étranger, mais de celui qui prétendait avoir un titre légal à exercer la royauté, afin de pouvoir assouvir sa nature tyrannique par une injustice odieuse à tous les hommes. [238] C’est cette nature qui avait empêché les gens, même en rêve, de voir jamais la succession du trône lui revenir, et cela à cause de la vertu de son père qui certes connaissait son caractère. Antipater ajoutait qu’Antipas tirait un appui plus grand du testament : il avait été appelé au trône par son père quand celui-ci n’était pas encore malade physiquement, et moralement, mais possédait encore une raison intacte et la force de s’occuper de ses affaires. [239] En admettant même que son père eût pris dès le début en faveur d’Archélaüs les mêmes dispositions qu’à présent, ce dernier avait déjà montré quelle sorte de roi il serait en privant l’empereur, maître de sa couronne, du droit de lui conférer la puissance et en n’hésitant pas, quoique simple particulier, à faire égorger ses compatriotes dans le Temple. [240] 6. Antipater après ce discours et après avoir renforcé ses paroles en présentant, comme témoins beaucoup de ses parents, cessa de parler. Nicolas se lève pour plaider en faveur d’Archélaüs. « Les événements du temple, dit-il, doivent être mis sur le compte des sentiments des victimes plutôt que de l’intervention d’Archélaüs : ceux qui avaient pris l’initiative d’une telle tentative n’étaient pas seulement coupables d’agir personnellement avec insolence, mais aussi de forcer à se défendre des gens naturellement pacifiques. [241] D’ailleurs, si en apparence ils se soulevaient contre Archélaüs, en réalité il était clair que c’était contre l’empereur, car ceux qui, envoyés opportunément par Archélaüs, étaient survenus pour réprimer leur insolence avaient été attaqués et tués par les mutins ne se souciaient ni de Dieu ni de la loi concernant ce jour de fête[102]. [242] Antipater ne rougissait pas de s’instituer le défenseur de ces gens-là pour servir son inimitié contre Archélaüs ou par haine de la justice. Ceux qui surprennent et maltraitent les premiers des gens inoffensifs, voilà ceux qui les forcent à recourir aux armes, même malgré eux et pour se défendre. [243] Tous les autres griefs portés par les accusateurs, Nicolas montra qu’ils s’adressaient à tous les membres du conseil royal, car rien de ce qu’on alléguait pour convaincre Archélaüs d’injustice n’avait été fait sans leur volonté[103] et ce n’étaient pas des actes injustes par nature, mais seulement présentés de manière à nuire à Archélaüs, si grande était leur volonté de faire tort à un parent qui avait rendu des services à son père et qui n’avait cessé de les traiter eux-mêmes en ami. [244] Le testament avait été écrit par le roi quand il avait toute sa raison et il avait plus de valeur que le précédent, puisque il laissait expressément à l’empereur, souverain absolu, le soin de décider au sujet de son contenu. [245] L’empereur n’imiterait nullement l’insolence de ceux qui, ayant largement profité de la puissance d’Hérode vivant, se hâtaient d’attaquer sans rougir toutes ses volontés, alors qu’aucun d’eux n’avait eu envers leur parent une conduite aussi bonne qu’Archélaüs. [246] Par conséquent, l’empereur ne voudrait pas casser le testament d’un homme qui s’était toujours montré son ami et son allié, testament en toutes lettres confié à sa foi ; la méchanceté de ces gens-là ne ferait pas la loi à la droiture et à la bonne foi de l’empereur, qualités reconnues par tout le genre humain ; [247] il ne condamnerait pas comme fou et égaré d’esprit, un roi qui avait laissé sa succession à un fils vertueux et, qui s’était réfugié sons son autorité : Hérode ne s’était pas trompé dans le choix de son héritier, puisqu’il avait eu la sagesse de s’en remettre pour tout à l’avis de l’empereur[104]. [248] 7. Après cet exposé Nicolas, se tut. L’empereur releva avec bienveillance Archélaüs qui s’était présenté à ses pieds et déclara qu’il était tout à fait digne de la royauté, montrant clairement que son intention était de se conformer strictement au testament et aux dispositions en faveur d’Archélaüs. [249] Cependant il ne prit aucune décision définitive, tout en laissant Archélaüs rassurer parce qu’il avait reçu un témoignage si probant. Quand les assistants eurent été congédiés, il délibéra à part soi s’il fallait confirmer la royauté à Archélaüs seul ou la partager entre tous les enfants d’Hérode, qui tous avaient besoin de grand secours[105].
— X —1-3. Soulèvement des Juifs causé par les exactions de Sabinus. Sabinus assiégé dans Jérusalem. — 4-8. Autres troubles suscités par divers brigands ou agitateurs ; leur répression. — 9-10. Varus délivre Sabinus et met fin à la révolte.[250] 1[106]. Avant qu’aucune solution fût intervenue, Malthacé, mère d’Archélaüs, mourut de maladie, et une lettre de Varus, proconsul de Syrie, annonça le soulèvement des Juifs. [251] En effet, sitôt après l’embarquement d’Archélaüs, tout le peuple s’était agité ; Varus, qui se trouvait présent, avait châtié les fauteurs du mouvement et, après avoir à peu près apaisé la rébellion, qui avait été importante, était parti pour Antioche en laissant à Jérusalem urne légion de son armée pour brider les velléités de révolte des Juifs. [252] Pourtant, rien ne pouvait faire cesser la sédition. Varus parti, Sabinus, procurateur de l’empereur, resté sur place, tourmentait grandement les révoltés, persuadé que les troupes qu’on lui avait laissées les accableraient sous le nombre. [253] Ayant beaucoup de gardes armés, il s’en servait pour presser les Juifs et, en les agitant, il entretenait la révolte : en effet, il s’efforçait de s’emparer des citadelles par la force et poursuivait avec acharnement la découverte des trésors du roi, poussé par l’appât du gain et une insatiable cupidité. [254] 2. Quand arriva la Pentecôte — c’est le nom d’une de nos fêtes nationales — tant par dévotion que parce qu’ils supportaient, avec colère les insolences de Sabinus, on vit, se réunir plusieurs dizaines de milliers rie gens, Galiléens, Iduméens, toute la population de Jéricho, des habitants de la Transjordanie, enfin la plupart ries Juifs eux-mêmes qui s’étaient, joints à cette foule et qui désiraient plus fougueusement que les autres le châtiment de Sabinus. [255] S’étant divisés en trois colonnes, ils campèrent en trois endroits : les uns occupaient l’hippodrome ; des deux autres groupes, l’un était posté sous le mur nord du Temple, face au midi, occupant le quartier Est[107], tandis que le troisième groupe gardait le couchant du côté où s’élevait le palais royal. Tout ce dispositif avait pour but d’assiéger les Romains après les avoir encerclés de toutes parts. [256] Sabinus redoutait le nombre et la résolution de ces gens qui ne craignaient pas la mort et n’acceptaient pas d’être vaincus dans une lutte où la victoire leur paraissait un devoir. Il écrivit donc aussitôt à Varus et ne manqua pas, comme il est d’usage en pareil cas, de le supplier de lui porter immédiatement secours, disant que les troupes qu’on lui avait laissées se trouvaient en grand danger et s’attendaient à se voir bientôt prises et massacrées. [257] Quant à lui, s’étant installé dans la plus élevée des tours de la citadelle, nommée Phasaël parce qu’elle avait été bâtie en l’honneur de Phasaël, frère d’Hérode, et appelée de son nom après que les Parthes l’eurent tué, il exhortait les Romains à faire une sortie contre les Juifs ; n’osant pas lui-même descendre au milieu des siens, il trouvait juste que les autres s’exposassent à la mort pour sa cupidité. [258] Les Romains ayant risqué cette sortie, un violent combat s’engagea où les Romains eurent effectivement l’avantage, sans pourtant que le moral des Juifs fût brisé par la vue de leur péril et le grand nombre de leurs morts. [259] Par des mouvements tournants les Juifs escaladèrent les portiques qui entouraient l’enceinte extérieure du Temple et, engageant une lutte violente[108], ils se mirent à lancer des pierres les uns avec leurs mains, les d’autres à l’aide de frondes, car ils étaient dressés à ce genre de combat. [260] En même temps les archers rangés en bataille causèrent de grandes pertes aux Romains, parce qu’ils étaient très habiles et difficiles à attaquer, étant hors de portée de javelot et pouvant ainsi plus aisément venir à bout de leurs ennemis, pendant longtemps la lutte se poursuivit dans ces conditions. [261] Puis les Romains exaspérés mirent le feu aux portiques à l’insu des Juifs qui y étaient montés ; la flamme, augmentée par beaucoup de matériaux combustibles, atteignit rapidement la toiture. [262] Celle-ci, formée d’une charpente enduite de poix et de cire avec un revêtement d’or également lié par la cire, céda bientôt. Ainsi furent détruits des ouvrages fameux par leur grandeur et leur magnificence tandis que tous les gens qui étaient sur les portiques furent surpris par une catastrophe imprévue. [263] Les uns furent entraînés dans l’écroulement du toit, les autres abattus de toutes parts par l’ennemi ; beaucoup, désespérant du salut, épouvantés par le fléau qui les cernait, se jetèrent d’eux mêmes dans le feu ou se percèrent de leur épée y échapper. Tous ceux qui essayaient de se sauver en reculant vers le chemin par lequel ils étaient montés, furent tués par les Romains parce qu’ils étaient sans défense et que leur courage était abattu, sans que leur désespoir pût leur être d’aucun secours puisqu’ils n’avaient aucune arme. De ceux qui avaient escaladé le toit, pas un n’échappa. [264] Et les Romains, s’élançant à travers les flammes par les endroits praticables, s’emparèrent du trésor où étaient les richesses sacrées : beaucoup furent volées par les soldats, tandis que Sabinus s’appropria ouvertement quatre cents talents. [265] 3. Quant aux Juifs, ils étaient également attristés par le deuil de leurs amis tombés dans cette bataille et par le pillage des offrandes. Néanmoins, ceux de leurs éléments qui avaient le plus de cohésion et de valeur vinrent assiéger le palais royal, menaçant de l’incendier et de tuer tous les occupants s’ils ne sortaient sur le champ, mais promettant la vie sauve pour eux et Sabinus s’ils obéissaient à cette injonction. [266] La majorité des troupes royales déserta de leur côté. Mais Rufus et Gratus, qui commandaient à trois mille des meilleurs soldats d’Hérode, hommes solides et entreprenants, et les amenèrent aux Romains, et une partie de la cavalerie qui avait été sous les ordre de Rufus vint aussi renforcer ceux-ci. Pourtant les Juifs, loin de se désintéresser du siège, [267] minaient les remparts et exhortaient les dissidents à ne pas retarder l’heure qui allait leur rendre leur liberté nationale. Sabinus aurait certainement désiré sortir, mais, se souvenant de ses actes, [268] il n’osait se fier à l’ennemi et voyait dans l’excessive générosité des propositions de celui-ci un motif de les rejeter ; en même temps il s’attendait à l’arrivée de Varus, et dans cette pensée, il soutenait le siège. [269] 4[109]. A ce moment il y avait mille autres causes de troubles en Judée, car en maints endroits force individus poussaient à la guerre, soit par espoir de butin, soit par haine des Juifs. [270] Deux mille hommes, qui avaient servi sous Hérode et dont l’engagement était terminé, se réunirent en Judée même pour combattre les troupes royales, tandis qu’Achiab, cousin d’Hérode, leur résistait ; refoulé de la plaine vers les hauteurs par ces guerriers éprouvés, il sauvegarda ce qu’il put, grâce aux difficultés du terrai. [271] 5. Il y avait aussi un certain Judas, fils d’Ézéchias, le redoutable, chef de brigands qui n’avait été pris par Hérode qu’avec les plus grandes peines. Ce Judas, réunit autour de Sepphoris en Galilée une troupe de désespérés et fit une incursion contre le palais royal : s’étant emparé de toutes les armes qui s’y trouvaient, il en équipa ceux qui l’entouraient et emporta toutes les richesses qu’il avait recueillies en cet endroit ; [272] il terrorisait tout le voisinage par ses razzias et ses pillages, visant à une haute fortune et même aux honneurs de la royauté, car il espérait parvenir à cette dignité non par la pratique de la vertu, mais par l’excès même de son injustice. [273] 6[110]. Ajoutons encore Simon, ancien esclave du roi Hérode, bel homme à qui sa haute taille et sa force physique inspiraient grande ambition et confiance. Exalté par le désordre des affaires, il eut l’audace de ceindre le diadème, et après avoir réuni un certain nombre de gens, [274] il se fit proclamer roi par ces fous, se figurant en être plus digne que tout autre ; il brûla le palais de Jéricho, en livra le contenu au pillage et anéantit de même par le feu beaucoup d’autres maisons royales en bien des endroits du pays, tout en laissant ses compagnons piller le contenu. Il aurait fait pis encore si l’on ne s’était hâté de le châtier. [275] Car Gratus, qui avait amené aux Romains les troupes royales, vint attaquer Simon avec toutes les fortes dont il disposait. [276] La bataille fut acharnée et longue ; la plupart des gens de Pérée, manquant de discipline et combattant avec plus d’audace que de science, furent massacrés. Simon lui-même, au moment où il se sauvait dans un défilé, fut pris par Gratus, qui lui lit couper la tête. [277] Le palais d’Amatha sur le fleuve Jourdain fut aussi incendie par une brande analogue à celle de Simon. Tant était grande la démence qui régnait alors dans le peuple, parce qu’il n’avait pas un roi national capable de maintenir tout le monde en paix par son mérite, que les étrangers vertus pour mettre l’ordre et réprimer les séditions ne faisaient que les exciter sournoisement par leur injustice et leur cupidité. [278] 7[111]. Même un certain Athrongés, qui n’était pourtant illustre ni par la noblesse de ses ancêtres ni par la grandeur de son mérite ni par l’abondance de ses richesses et qui n’était qu’un simple berger, absolument inconnu de tout le monde et seulement remarquable par sa haute stature et la force de ses bras, osa aspirer à une royauté dont l’acquisition lui donnerais la joie de sévir davantage : s’il devait mourir, il faisait bon marché de sa vie qu’il était prêt à sacrifier pour ce but. [279] Il avait quatre frères[112], eux aussi de grande taille et confiants pour leur succès dans la force de leurs bras ; il les regardait comme le rempart de sa royauté et chacun d’eux commandait un corps de troupes, car une grande foule s’était rassemblée autour d’eux. [280] Ces hommes étaient ses généraux et se battaient pour lui tout, en opérant à leur gré. Quant à lui, couronné d’un diadème, il tenait conseil sur ses affaires et réglait tout souverainement. [281] Cet homme garda longtemps sa puissance, portant le titre de roi et libre d’agir à sa guise. Ses frères et lui s’appliquaient. à massacrer beaucoup de Romains et de soldats du roi, animés de la même haine contre les uns et les autres, détestant les derniers à cause des violences qu’ils avaient commises cous le règne d’Hérode, et les Romains pour les injustices qu’on leur attribuait présentement. [282] Plus le temps passait, plus s’exaspérait leur sauvagerie ; il n’y avait moyen pour personne de leur échapper, en raison soit de leur cupidité, soit de leur habitude du meurtre. Ils tendirent même un jour près d’Emmaüs une embuscade à une troupe de Romains qui envoyait les vivres et les armes de l’armée ; ayant réussi à envelopper ce détachement, ils percèrent de flèches le centurion Arius qui le commandait et quarante de ses plus vaillants fantassins ; [283] les survivants, effrayés par leur malheur, se sauvèrent sous la protection de Gratus et des soldats du roi qui l’entouraient et abandonnèrent les cadavres. Cette guerre d’escarmouches se prolongea longtemps, faisant beaucoup d’ennuis aux Romains et beaucoup de mal à leur propre peuple. [284] Finalement ces chefs furent pris, l’un dans un combat avec Gratus, l’autre par Ptolémée ; l’aîné des frères[113] était tombé aux mains d’Archélaüs. Le dernier, survivant, affligé par le malheureux sort de celui-ci, voyant qu’il ne lui fallait plus désormais espérer de salut à cause de son isolement et de son épuisement, abandonné par son armée, se rendit à Archélaüs sous la foi du serment et de la protection divine. Mais ce dénouement ne se produisit que plus tard. [285] 8. A ce moment donc la Judée était pleine de brigands et, dès que l’un d’entre eux avait réuni autour de lui une troupe de séditieux, il se proclamait roi et se lançait à l’assaut de sa nation, car s’ils ne s’attaquaient que rarement aux Romains et leur causaient peu de dommages, on revanche ils faisaient un très grand carnage de leurs compatriotes. [286] 9[114]. Dès qu’il eut été informé de l’état des affaires par la lettre de Sabinus, Varus, inquiet pour sa légion, prit avec lui les deux autres — il y en avait trois en tout en Syrie — quatre ailes de cavalerie et tons les auxiliaires que lui fournirent alors les rois ou certains tétrarques, et il se hâta d’aller au secours de ceux qui étaient assiégés en Judée. [287] Tous les détachements qu’il avait envoyés en avant avaient l’ordre de gagner vivement Ptolémaïs. Les gens de Béryte, quand il traversa leur territoire, lui fournirent encore quinze cents auxiliaires. Arétas de Pétra, que sa haine contre Hérode avait rendu l’ami des Romains, lui envoya une grande force de fantassins et de cavaliers. [288] Une fois toutes ces troupes concentrées à Ptolémaïs, Varus en confia une partie à son fils et à un de ses familiers et les envoya combattre les Galiléens qui habitent la région limitrophe de Ptolémaïs. [289] Le fils de Varus fondit sur les ennemis, les mit en fuite et s’empara de Sepphoris, y mit le feu et vendit les habitants comme esclaves. Varus lui-même, partant avec toute son armée en direction de Samarie, épargna la ville parce qu’elle n’avait pas mérité le reproche d’avoir participé à la révolte ; mais il campa dans une bourgade appartenant à Ptolémée[115] et, nommée Arous. [290] Or, les Arabes l’incendièrent par haine d’Hérode et aussi de ses amis, partant de là les Arabes pillèrent une autre localité nommée Sampho et la brûlèrent, bien qu’elle fût très forte et dans une assiette solide. Pendant toute leur marche rien ne fut épargné et ils portèrent, partout le feu et le fer. [291] On incendia aussi Emmaüs sur l’ordre de Varus, pour venger ceux qui y avaient été tués : le village avait été précédemment évacué par les habitants. [292] De là Varus touchait presque Jérusalem, et ceux des Juifs qui campaient de ce côté là pour assiéger la légion lâchèrent pied à la vue de ces renforts et se retirèrent sans poursuivre le siège. [293] Quant aux Juifs de Jérusalem que Varus réprimandait avec véhémence, ils se défendirent contre ses accusations en prétendant que c’était à cause de la fête que le peuple s’était rassemblé, que la guerre n’avait pas été provoquée par leur volonté, mais par l’audace des gens venus du dehors ; eux-mêmes s’étaient réunis aux Romains et avaient été assiégés avec ceux-ci bien plutôt qu’ils n’avaient désiré les assiéger. [294] Déjà s’étaient présentés à Varus Josèphe, cousin du roi Hérode, Gratus et Rufus amenant leurs soldats et les Romains qui avaient été assiégés. Mais Sabinus ne vint pas voir Varus et quitta secrètement la ville pour le bord de la mer. [295] 10. Varus détacha clans le pars une partie de son armée pour rechercher les fauteurs de la rébellion. De ceux qu’on dénonça il fit châtier les uns comme principaux responsables et relâcha les autres ; il y eut deux mille personnes crucifiées pour cette affaire. [296] Ensuite il renvoya son armée qui ne lui semblait plus utile en rien ; d’ailleurs, les soldats avaient commis beaucoup de désordres et avaient enfreint même les consignes de Varus dans le désir des gains que leur procuraient leurs méfaits. [297] Ayant appris que dix mille Juifs s’étaient rassemblés, Varus se hâta d’aller les surprendre. Mais ils n’osèrent pas en venir aux mains et, se rangeant au conseil d’Achiab, ils se rendirent. Pardonnant à la masse les fautes qu’elle avait commises en se révoltant, Varus envoya les chefs à l’empereur. [298] Celui-ci remit en liberté la plupart d’entre eux et châtia seulement les parents d’Hérode qui s’étaient joints à l’insurrection, parce qu’ils avaient lutté contre leurs proches sans nul souci de la justice.
— XI —1-2. Les Juifs demandent à l’empereur un changement de régime. — 3. Discours de Nicolas de Damas pour Archélaüs. — 4-5. L’empereur règle la succession d’Hérode.[299] 1[116]. Après avoir ainsi réglé la situation et laissé en garnison à Jérusalem la même légion que précédemment, Varus se hâta de retourner à Antioche. Archélaüs vit naître pour lui à Rome de nouveaux tracas pour la raison que voici. [300] Une ambassade juive arriva à Rome sur l’autorisation donnée par Varus à la nation afin de demander l’autonomie[117]. Les ambassadeurs envoyés par la volonté de la nation étaient au nombre de cinquante, que soutenaient plus de huit mille des Juifs de Rome. [301] L’empereur convoqua le conseil de ses amis et les Romains les plus considérables dans le temple d’Apollon[118] qu’il avait édifié à grands frais. Les ambassadeurs se présentèrent avec la foule des Juifs de Rome et Archélaüs avec ses amis. [302] Tous les parents du roi refusaient de se ranger aux côtés d’Archélaüs par haine contre lui, mais regardaient comme dangereux d’unir contre lui leurs voix à celles des ambassadeurs, craignant qu’ils ne fussent déshonorés aux yeux de l’empereur s’ils voulaient agir ainsi contre un personnage de leur ramille. [303] Philippe était également arrivé de Syrie sur les exhortations de Varus, surtout pour aider son frère, pour lequel Varus avait beaucoup de sympathie, mais aussi, au cas d’un changement dans la succession royale — car Varus prévoyait qu’elle serait divisée en raison du nombre de ceux qui souhaitaient l’indépendance, — pour n’être pas en retard et obtenir du moins une part de royauté pour lui-même. [304] 2. Donc, quand on eut donné la parole aux ambassadeurs des Juifs, qui s’étaient proposé de parler en faveur de la suppression de la royauté, ils se mirent à critiquer les illégalités d’Hérode, déclarant que, s’il était nominalement leur roi, il avait en réalité réuni en lui les vices les plus insupportables de tous les tyrans afin de s’en servir pour perdre les Juifs, sans manquer de trouver dans son propre naturel de quoi renchérir encore à cet égard. [305] En tout cas, si nombreux qu’eussent été ceux qu’il avait fait périr par des supplices tels qu’on n’en avait jamais rapportés avant lui, les vivants étaient encore bien plus malheureux que les victimes parce que ces supplices tourmentaient non seulement leur vie et leur pensée, mais encore menaçaient leurs biens. [306] Hérode, en effet, n’avait cessé d’orner les villes circonvoisines habitées par des étrangers, en ruinant et faisant disparaître celles de l’intérieur de son royaume ; [307] il avait réduit son peuple à une misère sans espoir, alors qu’il l’avait reçu dans un rare état de prospérité ; il privait de leur fortune les patriciens, qu’il tuait pour des motifs insensés et, à ceux qu’il laissait vivre, il infligeait un prélèvement de leurs biens. [308] Outre les tributs qu’il imposait annuellement à chacun, il y avait des dons lucratifs faits à lui, à ses familiers, ses amis et ses esclaves chargés de la répartition des impôts, car on n’achetait pas même à prix d’argent le droit de n’être pas pressuré. [309] Quant aux jeunes filles séduites et aux femmes déshonorées, ils ne voulaient pas dénombrer combien il y en avait eu, victimes de sa débauche et de son inhumanité ; celles, en effet, qui ont souffert de ces attentats considèrent qu’obtenir le silence sur leur déshonneur est chose aussi précieuse que d’y échapper. Si grandes étaient les injustices dont Hérode les avait abreuvés qu’aucune bête féroce n’aurait pu en faire autant si on l’avait douée du pouvoir de commander aux hommes. [310] A coup sûr, à travers toutes les séditions et toutes les révolutions qu’avaient subies la nation jamais l’histoire n’avait enregistré une calamité semblable au fléau dont Hérode l’avait accablée. [311] Aussi était-ce à bon droit qu’ils auraient salué avec joie l’avènement d’Archélaüs, pensant que celui, quel qu’il fût, qui accéderait à la royauté, se montrerait plus modéré qu’Hérode ; c’était, par déférence pour lui qu’ils avaient célébré un deuil public pour son père et offert de le servir en toute autre occasion s’ils pouvaient obtenir de lui une conduite sage. [312] Mais Archélaüs, craignant sans doute de ne pas être reconnu pour le fils légitime d’Hérode, avait immédiatement montré sa folie à son peuple, et cela avant de posséder le commandement de manière sure, puisque l’empereur avait le pouvoir de le conférer ou de le refuser. [313] Il avait donné l’exemple de sa future vertu, de la modération et du respect des lois dont il ferait preuve envers ses futurs sujets. Car le crime qu’il avait commis dès le début contre ses concitoyens et contre Dieu en massacrant dans le sanctuaire trois mille de ses compatriotes. Comment donc ne les poursuivrait-il pas désormais d’une juste haine, lui qui, indépendamment de sa cruauté native, avait contre eux les griefs de s’être révoltés et d’avoir résisté à son pouvoir ? [314] En résumé, ce qu’ils demandaient c’était d’être débarrassés de la royauté et de tout autre gouvernement de cette espèce, et d’être rattachés à la Syrie sous l’administration des légats qu’on envoyait là-bas : ainsi l’on verrait bien s’ils étaient vraiment des factieux toujours avides de révolution ou s’ils étaient amis de l’ordre, dès qu’ils auraient des chefs qui les gouverneraient avec plus de douceur. [315] 3[119]. Quand les Juifs eurent parlé de la sorte, Nicolas disculpa les rois de ces accusations. Personne, de son vivant, n’avait accusé Hérode et il ne fallait pas que ceux qui auraient pu l’incriminer vivant auprès de juges équitables pour le faire châtier pussent intenter une accusation contre un mort. [316] Quant aux actes d’Archélaüs, c’était sur l’insolence de ces gens que Nicolas en rejetait la responsabilité, puisque après avoir cherché à agir contre la loi et avoir, les premiers, massacré ceux qui s’efforçaient d’arrêter leur violence, ils se plaignaient à présent d’une répression légitime. Il leur reprochait aussi leur penchant à la sédition, leur joie à se rebeller, leur incapacité d’obéir à la justice et aux lois parce qu’ils voulaient toujours faire leur volonté. [317] 4[120]. Ainsi discourut Nicolas. L’empereur, après les avoir entendus, leva la séance du conseil. Quelques jours plus tard, il se prononça : il ne proclama point Archélaüs comme roi, mais il fit de la moitié du pays qui était soumis à Hérode une ethnarchie qu’il lui donna, en promettant de l’honorer plus tard du titre de roi s’il s’en montrait digne par sa vertu. [318] Divisant l’autre moitié en deux parties, il les donna aux deux autres fils d’Hérode, à Philippe et à Antipas, celui qui avait revendiqué tout le royaume contre son frère, Archélaüs. Antipas eut pour sa part la Pérée et la Galilée qui lui versaient annuellement deux cents talents. [319] La Batanée, avec la Trachonitide et l’Auranitide, une partie de ce qu’on appela le domaine de Zénodore, rapportaient à Philippe cent talents. Quant aux districts soumis à Archélaüs, Idumée, Judée et Samarie, les habitants furent exemptés du quart de leurs tributs par l’empereur, qui décréta cet allégement pour les récompenser de ne pas s’être révoltés avec le reste de la multitude. [320] Les villes soumises à Archélaüs étaient la Tour de Straton[121], Sébaste, Joppé et Jérusalem. Gaza, Gadara et Hippos, villes grecques, furent détachées de son obédience pour être annexées à la Syrie. Archélaüs retirait de son lot un revenu de six cents talents par an[122]. [321] 5. Telle fut la partie des biens paternels qu’eurent les fils d’Hérode. Quant à Salomé, outre ce que son frère lui avait assigné dans son testament — Iamnia, Azotos, Phasaëlis et cinq cent mille drachmes en monnaie d’argent — l’empereur lui accorda encore le palais royal d’Ascalon. Son revenu total était de soixante talents par an, et son domaine était situé dans le territoire d’Archélaüs. [322] Les autres parents du roi obtinrent tout ce que prescrivait le testament. A chacune des deux filles non mariées, outre ce que leur père leur avait légué, l’empereur fit un don de deux cent cinquante mille drachmes de monnaie d’argent, et il les maria aux fils de Phéroras. [323] Il lit même cadeau aux enfants du roi de tout ce qui lui avait été légué personnellement, c’est-à-dire de quinze cents talents, se réservant seulement quelques meubles qui lui étaient agréables, non à cause de leur grand prix, mais comme souvenir du roi.
— XII[123] —Histoire du faux Alexandre.[324] 1. Lorsque l’empereur eut ainsi réglé la succession, un jeune homme de rare juive, mais élevé dans la ville de Sidon chez un affranchi romain, chercha à s’insinuer dans la parenté d’Hérode grâce à sa ressemblance physique avec Alexandre, le fils d’Hérode, qui avait été tué, ressemblance reconnue par tous ceux qui le voyaient. [325] Il y trouva un prétexte à revendiquer le pouvoir. Il prit comme complice un homme de son pays qui connaissait bien les affaires du palais, mais par ailleurs scélérat et capable de soulever dry grands troubles, qui fut son guide clans tourtes ses mauvaises actions. [326] L’imposteur se donnait pour Alexandre, fils d’Hérode, qui aurait été caché par l’un de ceux qui avaient reçu mission de le tuer ; ils auraient tué d’autres victimes pour tromper les témoins et l’aurait sauvé, ainsi que son frère Aristobule. [327] Cette fable l’enorgueillissait lui-même et il réussissait à tromper ceux qu’il rencontrait ; il aborda en Crête et gagna la confiance de tous les Juifs qu’il fréquenta ; puis, pourvu d’argent grâce à leurs libéralités, il partit pour Mélos. Là, il amassa encore plus d’argent parce qu’en le croyait de souche royale et qu’on espérait le voir reprendre le trône de son père et payer de retour ses bienfaiteurs. Il se hâta donc d’aller à Rome, escorté par ses hôtes ; [328] débarquant à Dicéarchia[124], il eut la chance de tromper de la même manière les Juifs de cet endroit et il groupa, autour de lui, comme s’il était roi, forces gens et les hôtes et amis d’Hérode. [329] La cause en était qu’ils accueillaient volontiers ses paroles en raison de la garantie que donnait son aspect ; en effet, même à ceux qui avaient beaucoup fréquenté Alexandre il avait si bien persuadé qu’il était celui-là et non un autre qu’ils allaient jusqu’à l’affirmer sous serment à leur entourage. [330] Aussi, lorsque le bruit de son aventure fut arrivé jusqu’à Rome, toute la foule des Juifs qui vivaient là vint à sa rencontre, louant Dieu de l’avoir miraculeusement sauvé et lui faisant fête par affection pour sa famille maternelle, toutes les fois qu’il s’avançait porté sur un char à travers les ruelles. [331] Aux frais de ses hôtes particuliers, il était environné de tout un appareil royal. Il y avait un grand concours de peuple, des acclamations et des vœux ; de tous les témoignages rendus d’ordinaire à ceux qui sont ainsi sauvés contre tout espoir, aucun ne manqua. [332] 2. Lorsque la nouvelle de cet événement parvint à l’empereur, il se méfia, sachant qu’Hérode n’était pas facile à tromper dans les affaires qui lui importaient beaucoup. Pourtant, cédant à l’espoir, il envoya Célados, un de ses affranchis qui avait fréquenté les deux jeunes gens, en lui ordonnant d’amener Alexandre sous ses yeux. [333] C’est ce que fit Célados, qui ne se montra pas plus perspicace que la foule. Mais l’empereur ne se laissa pris abuser, car, s’il y avait une ressemblance, elle n’était pas de nature à tromper les gens capables de raisonner avec sagesse. En effet, le travail manuel avait usé ce faux Alexandre et au lieu d’avoir, comme le véritable, le corps délicat qui convenait au luxe et à sa noble naissance, il avait au contraire le corps trop rude. [334] Ayant donc saisi la conspiration frauduleuse du disciple et du maître et leur entente pour inventer des fables audacieuses, il les interrogea sur Aristobule, leur demandant ce qui était arrivé à ce prince, enlevé en même temps que son frère, et pourquoi il n’était pas également là pour revendiquer avec celui-ci les droits correspondant à une telle naissance. [335] L’autre répondit qu’il l’avait laissé dans l’île de Chypre sous prétexte qu’il craignait les dangers de la mer ; ainsi, s’il lui arrivait malheur à lui-même, la descendance de Mariamne ne serait pas entièrement éteinte, et Aristobule, lui survivant, défierait ceux qui leur tendaient des embûches. [336] Comme le jeune homme affirmait cela avec force et qu’il était appuyé par son instigateur, l’empereur le prit à part : « Comme récompense, dit-il, si tu ne me trompes pas, je te donnerai la vie sauve ; dis-moi donc qui tu es et qui t’a poussé à cette entreprise audacieuse, car c’est un attentat plus grave que ton âge ne le comporte ». [337] Alors, ne pouvant plus faire autrement, il avoue à l’empereur comment et par qui la machination a été conçue. L’empereur, pour ne pas trahir sa promesse envers lui et le voyant apte à un travail manuel, envoya ce faux Alexandre comme rameur sur la flotte ; quant à celui qui l’avait séduit, on le fit exécuter. [338] Comme châtiment pour les Méliens, on se contenta de leur laisser perdre tout ce qu’ils avaient dépensé sans résultat pour ce faux Alexandre. Telle fut la fin ignominieuse de l’entreprise hardie de cet imposteur.
— XIII —1. Règne d’Archélaüs. — 2. Nouvelles accusations contre lui. — 3-4. Son exil en Gaule, révélé par un songe comme la mort de sa femme. — 5. Annexion de son pays à la Syrie.[339] 1[125]. Lorsque Archélaüs, ayant obtenu l’ethnarchie, fut arrivé en Judée, il dépouilla du grand-pontificat Joazar, fils de Boéthos, auquel il reprochait d’avoir conspiré avec les révoltés, et il établit à sa place son frère Eléazar. [340] Il rebâtit aussi avec magnificence le palais de Jéricho et détourna la moitié des eaux qui servaient à arroser le village de Néara pour les amener dans une plaine transformée par lui en palmeraie. Il fonda aussi un bourg qu’il nomma Archélaüs. [341] Enfin, au mépris des lois nationales, il épousa Glaphyra, fille d’Archélaüs et veuve de son frère Alexandre, de qui elle avait eu des enfants, alors qu’il est interdit aux Juifs d’épouser leurs belles-sœurs[126]. Éléazar non plus ne resta pas longtemps grand-pontife, car on lui substitua de son vivant Jésus, fils de Sié[127]. [342] 2. La dixième année du règne d’Archélaüs[128], les principaux des Juifs et des Samaritaine, ne supportant plus sa cruauté et sa tyrannie, l’accusèrent auprès de l’empereur, surtout lorsqu’ils surent qu’il avait contrevenu aux ordres de celui-ci qui lui enjoignait de se montrer modéré envers eux. [343] L’empereur, quand il entendit ces accusations, entra en colère ; il manda le chargé d’affaires d’Archélaüs à Rome, qui se nommait aussi Archélaüs, et, jugeant au dessous de sa dignité d’écrire à celui-ci : « Toi, lui dit-il, embarque-toi immédiatement et amène le nous sans retard ». [344] L’autre, étant aussitôt parti, arriva en Judée, où il trouva Archélaüs festoyant avec ses amis ; il lui révéla les dispositions de l’empereur et pressa son départ. A son arrivée l’empereur écouta sa défense contre certains de ses accusateurs, puis l’envoya en exil en lui assignant pour résidence Vienne, ville de Gaule, et il confisqua ses biens[129]. [345] 3[130]. Avant qu’Archélaüs eût été invité à se rendre à Rome, il eut le songe suivant, qu’il raconta à ses amis. Il avait vu dix épis de blé pleins de froment ; déjà arrivés chacun à pleine maturité, et il lui avait semblé que des bœufs les dévoraient. Une fois éveillé, pensant que sa vision lui présageait des choses graves, il fit venir les devins qui s’occupaient d’interpréter les songes. [346] Comme ils différaient d’avis les uns des autres — car tous étaient loin de s’accorder — Simon, Essénien de race, après avoir demandé qu’on lui garantit sa sûreté, dit que cette vision présageait à Archélaüs un changement peu favorable dans ses affaires ; [347] en effet, les bœufs étaient signe de souffrance, puisque c’étaient des animaux assujettis à un labeur pénible ; quant au changement de situation, il s’annonçait par le fait que la terre labourée par leur travail ne pouvait rester dans le même état ; les dix apis signifiaient un nombre égal d’années puisqu’il y a une moisson par année : c’était le terme fixé pour la puissance d’Archélaüs. [348] Telle fut son interprétation de ce songe. Cinq jours après avoir vu cette vision, Archélaüs vit arriver l’autre Archélaüs envoyé en Judée par l’empereur pour le citer en justice. [349] 4. Chose analogue survint à Glaphyra sa femme, la fille du roi Archélaüs, qu’avait épousée, comme je l’ai dit plus haut, vierge encore, Alexandre, fils d’Hérode et frère d’Archélaüs. Après qu’Alexandre eut été mis à mort par son père, elle épousa Juba, roi de Libye. [350] Ce Libyen mort[131], elle vivait dans le veuvage en Cappadoce chez son père, quand Archélaüs l’épousa après avoir répudié sa femme Mariamne[132], tant l’amour qu’il éprouvait pour cette Glaphyra l’avait bouleversé. Or, devenue l’épouse d’Archélaüs, elle eut le songe que voici. [351] Il lui sembla voir Alexandre se tenant devant elle ; joyeuse, elle l’embrassait avec empressement ; [352] mais lui la réprimandait en disant : « Glaphyra tu confirmes donc le dicton qui dit qu’il ne faut pas se fier aux femmes[133], toi qui me fus fiancée et mariée vierge, toi qui, ayant eu des enfants de moi, as oublié mon amour et désiré te remarier. Cet outrage ne t’a pas encore contentée et tu as osé faire partager ta couche à un troisième époux, rentrant indignement et sans pudeur dans ma maison et épousant Archélaüs, ton beau-frère, mon frère. [353] Mais moi je n’oublierai pas ma bienveillance envers toi et je te libérerai de tout blâme en te reprenant pour femme comme autrefois ». Elle raconta ce songe à ses suivantes, et, quelques jours après, elle quitta la vie. [354] 5. J’ai pensé que ces faits n’étaient pas en dehors de mon sujet puisqu’ils touchent à l’histoire des rois et que, d’autre part, ils sont un exemple à citer en faveur de l’immortalité de l’âme et de la providence divine qui embrasse les choses humaines ; c’est pourquoi j’ai jugé bon d’en parler. Que ceux qui ne croient pas à de telles histoires gardent leur opinion personnelle à ce sujet, mais ne blâment pas qui les raconte pour exhorter à la vertu. [355] Le pays d’Archélaüs fut rattaché en tributaire à la Syrie et l’empereur envoya Quirinius, personnage consulaire, pour faire le recensement en Syrie et liquider les propriétés d’Archélaüs. [1] Un résumé du récit de Nicolas de Damas, source principale de Josèphe pour les sections 1-5, nous a été transmis par les Excerpta de Constantin Porphyrogénète (F. H. G., III, p. 352-3. [2] Section 1 = Guerre, I, 552-558 ; 561. [3] πολέμων ἠνάγκαζε τόν πατέρα καταστῆναι, sens obscur. [4] Bérénice, veuve d’Aristobule. [5] Ce personnage s’appelait Teudion, infra § 70 et Guerre, I, 592. [6] On ignore le nom de cette princesse. [7] Καλλέα παϊς mss. ; mais ce nom est inconnu et le passage parallèle, Guerre, I, 566, montre qu'il s'agit bien d'un fils (du premier lit) d'Alexas. [8] Ces deux mot paraissent omis. [9] Il s’agit naturellement de Livie. [10] Glaphyra. [11] συμφορᾷ (συμπεριφυρᾷ Niese) τοΰ δικαίου, texte obscur. [12] Section 2 = Guerre, I, 559-561, 564-565. [13] Alexandre et Tigrane, futur roi d’Arménie. [14] Hérode de Chalcis, Agrippa, Aristobule. [15] Mariamne et Hérodiade. [16] Le discours prononcé par Hérode (Guerre, I, 556) est ici mis en style indirect. [17] Nommé également Alexandre. [18] Hérode de Chalcis. [19] Le second Alexandre. [20] Section 3 = Guerre, I, 562-563. [21] ἄκοντος vulg. : ἔκοντος Naber. [22] Doris. [23] Mariamne (II) d’Alexandrie. [24] Nous ignorons le nom de ces deux femmes. [25] Malthaké. [26] Fils de son frère Joseph. [27] Kypros. [28] Salomé. [29] Salampsio. [30] Phasaël I. [31] ἁπασών αἱ εἰωθυΐα : texte altéré. [32] Promesse non réalisée. [33] Guerre, I, 567-571. [34] Salomé. [35] οὐ διακειμένῳ E A M (in margine), οὐ διὰ κενῆς Naber. [36] ύπονοιών καθισταμένων WE : ἁπονοῶν καθισταμένῳ Niese. [37] νόμου WE : νόμων Niese. [38] προσποιούμενον A : προσποιουμένων Niese vulg. [39] άντιπράσσειν WE : προϋπτειν Niese. [40] προμηθεΐς κἀκ τοῦ προὔπτου etc., texte suspect. [41] On se rappelle que Josèphe appartenait lui-même à la secte des Pharisiens. Visiblement il copie ici, sans réflexion, un auteur qui leur était hostile (Nicolas). [42] Sens douteux. [43] Section 1 = Guerre, I, 572. [44] Section 2 = Guerre, I, 573-577. [45] Dans doute un affranchi. [46] πολιτεύεσθαι A. M. W. : πολιτεύσαντος Niese. [47] Section 1 = Guerre, I, 582-589. [48] ταφαίτε codd. : ταφνίται Niese. [49] έπὶ τῖω μὴ φράζειν Hudson coll. Bello., I, 589 : ἐπικρόπτεσθαι [φράζειν] Naber. [50] Ce sont sans doute ces propos qui font dire à Nicolas de Damas (F. G. H., III, 351, § 13) que les révélations des esclaves soumis à la torture convainquirent Antipater d'avoir également voulu tuer sa tante (Salomé), ses frères survivants et les fils des morts. Rien de pareil chez Josèphe. [51] Section 2 = Guerre, I, 590-600. [52] Section 3 = Guerre, I, 601-607. [53] Section 1 = Guerre, I, 608-616. [54] Texte altéré. [55] Le port de Césarée. [56] Section 2 = Guerre, I, 617-619. [57] P. Quintilius Varus, consul en 13 av. J.-C., légat de Syrie de 6 à 4 av. J.-C. C’est le vaincu de la forêt de Teutobourg. [58] Le nom de cette princesse est inconnu. [59] Section 3 = Guerre, I, 620-629. [60] Texte profondément altéré. Nous traduisons d'après la version latine. [61] Section 4 = Guerre, I, 630-636. [62] Sections 5-6 = Guerre, I, 367-638. [63] μειζόνως ἐκδεινῶν (exemple unique) des mss. me paraît impossible ; je lis ἐκτείνων. [64] Texte altéré. [65] Section 7 = Guerre, I, 641-644. [66] Celle d’Acmé, mentionnée dans celle d’Antiphile. [67] L’impératrice Livie. [68] Ce paragraphe ne fait que répéter ce qui a été dit au § 137, où le texte même du message de Salomé à Antipater est reproduit : Josèphe s’est embrouillé dans son dossier. [69] Section 8 = Guerre, I, 640 ; 645-6 [70] C’était, parait-il, l’avis de Nicolas de Damas (F. H. G., III, 353). [71] Section 1 = Guerre, I, 647. [72] Antipas, le fils de la Samaritaine Malthaké. [73] Sections 2-4 = Guerre, I, 648-555. [74] Dans Guerre les noms des pères sont Sepphoraios et Margalos. [75] Nous lisons avec Bekker τί (non εἰ) τολμήσειαν [76] Ne pas confondre ce Matthias, grang-prêtre et fils de Théophile (supra § 78), avec l'agitateur de même nom (§ 149), fils de Margalothos. [77] La seconde Mariamne. [78] Le rêve avait provoqué une pollutio nocturna, d'où l'impureté lévitique. Cet évènement est relaté dans le Talmud de Jérusalem (Megilla, 1, 12 ; Ioma, 1, 1 ; Horayot, III, 2) et dans celui de Babylone (Megilla, q. b ; Ioma, 12 b ; Horayot, 12, b) ; cf. Derenbourg, Palestine, p. 160 et Schürer, II, 217. [79] La date de cette éclipse a été fixée du 12 au 13 mars, 4 av. J.-C. (Ginzel, Specieller Kanon etc., p. 195. [80] Section 5 = Guerre, I, 656-660. [81] Une historiette analogue dans les gloses de la chronologie Megillat Taanit § 25, mais le roi s’appelle Janée et c’est sa veuve Salminon qui s’oppose au massacre des « 70 anciens ». Cf. Derenbourg, Palestine, p. 164. Le caractère midraschique de ces anecdotes les rend suspectes. [82] Ch. VII = Guerre, I, 661-664. [83] Section 1 = Guerre, I, 665. [84] γνήσιος. Expression singulière, car Philippe était fils, non de Malthaké (mère d’Archélaüs et d’Antipas), mais de la juive Cléopâtre. [85] Dans la première quinzaine du mois de Nisan de l’an 4 av. J.-C. (Schürer, I, 415). [86] Section 2 = Guerre, I, 666-670. [87] Section 2 = Guerre, I, 671-673. [88] Dans Guerre, I, 33, la distance indiquée est 200 stades (de Jéricho) et correspond à peu près à l’emplacement présumé d’Hérodion ; Schürer, I, 417, cherche à concilier les deux textes en soutenant que le notre indique seulement la distance jusqu’où le cortège accompagna le corps. [89] Section 4 = Guerre, II, 1-5. [90] Résumé de ces événements (ch. 9 et 11) chez Nicolas (F. H. G., III, 354), où n’apparaît pas la distinction des deux délibérations distinguées par Josèphe. Il est aussi fait allusion au voyage d’Archélaüs et aux doléances des Juifs dans l’Évangile selon Luc, XIX, 12 suiv. [91] Sections 1-3 = Guerre, II, 5-19. [92] Ou, si l’on adopte la conjecture de Naber (μωρίας pour τιμωρίας) : « à leur folie ». [93] D’après Nicolas (F. H. G., III, 353) le nombre total des insurgés s’élevait à « plus de 10000 ». Le chiffre des morts vient de Nicolas (p. 354). [94] Alors sexagénaire et qui avait demandé sa retraite. (F. H. G., p. 353). [95] Πτόλλαν P. et Niese, Ποπλᾶ Bellum ; πόλλους ceteri, leçon conservée par Naber. [96] Section 4 = Guerre, II, 20-25. [97] δόξῃ δεινότητος τῆς περὶο αὐτῳ (ou αὐτὸν) τὴν βασιλείαν πεπιστεύμενος. Texte altéré. [98] Josèphe ne mentionne pas l’ambassade des villes grecques du territoire d’Hérode qui réclamaient leur indépendance. (Nicolas, F. H. G., III, 354, § 23 et 26). [99] Sections 5-7 = Guerre, II, 26-38. [100] Lire avec Hudson ἐξουσίᾳ (mss. έἔξῳ). [101] Texte altéré. [102] Il semble y avoir ici une lacune ; on ne voit pas que Nicolas ait justifié son dire que les insurgés s’attaquaient à l’empereur. [103] Texte douteux, nous traduisons au jugé. [104] Le résumé de Josèphe confirme le témoignage de Nicolas (F. H. G., III, 354) selon lequel celui-ci ne s'attaqua ni à Antipas, ni aux revendications des villes grecques qu'il conseilla à Archélaüs d'affranchir. [105] Texte et sens incertains. [106] Sections 1-3 = Guerre, II, 39-54. [107] Texte suspect. [108] Texte altéré (πολλοῖς ἀμάχου γενομένης P. πολλῆς μάχης γεν. ceteri et Naber). [109] Section 4-5 = Guerre, II, 55-56. [110] Section 6 = Guerre, II, 57-59. [111] Section 7 = Guerre, II, 60-65. [112] Au § 284, il semble bien qu'il n'y eût que quatre frères. Guerre, II, 60 et 64 présentent la même contradiction (G. Mathieu). [113] Sans doute Athrongès. [114] Sections 9-10 = Guerre, II, 66-79. [115] Le frère de Nicolas de Damas ? [116] Sections 1-2 = Guerre, II, 80-94. [117] C’est-à-dire de vivre en république. [118] Apollon Palatin. Ce temple faisait partie intégrante du palais impérial. [119] Section 3 = Guerre, II, 92. [120] Sections 4-6 = Guerre, II, 93-100. [121] Vieux nom de Césarée. [122] Cette répartition du royaume d'Hérode est le dernier événement mentionné dans les fragments de Nicolas (F. G. H., III, 354, § 29-30). [123] XII = Guerre, II 101-110. [124] Pouzzoles. [125] Sections 1-2 = Guerre, II, 111. [126] Voir Deutéronome, 25, 5 ; Lévitique, 18, 16 ; 20, 21 (Léon Hermann). [127] C’est vers cet endroit que devait cesser l’histoire de Nicolas de Damas. Privé de ce guide excellent et détaillé, Josèphe ne présente plus, jusqu’à l’époque de sa vie, qu’un récit incomplet, haché et anecdotique. [128] 6 après J.-C. [129] Cf. Dion Cassius LV, 27 ; Strabon, XVI, 2, 46. [130] Section 3 = Guerre, II, 112-116. [131] Juba II, descendant de Massinissa et roi de Numidie, puis de Maurétanie, régna jusqu’en 23 après J.-C. ; sans doute Glaphyra avait-elle été répudiée. [132] On en a fait sans raison suffisante une fille d’Aristobule (Guerre, I, 552). [133] Citation homérique. C’est ce que l’ombre d’Agamemnon fait à Ulysse (Odyssée, XI, 456). Dans les deux cas, c’est une ombre qui parle (George Mathieu).
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