RETOUR
À L’ENTRÉE DU SITE
ALLER
à LA TABLE DES MATIÈRES D E
SIDOINE APOLLINAIRE
SIDOINE
APOLLINAIRE
POÉSIE 5
Oeuvre numérisée par Marc Szwajcer
Étude
sur Sidoine Apollinaire et sur la société gallo-romaine au cinquième siècle.
avant-propos
Notice sur Sidoine Apollinaire
lettres
livre I
lettres livre II
lettres livre III
lettres livre IV
lettres livre V
lettres livre VI
lettres livre VII
lettres VIII
poésies 1
poésies2
poésies 3 et 4
poésies 6
l
CARMEN V.
PANEGYRICUS JULIO
VALERIO MAJORIANO AUGUSTO DICTUS.
|
V.
PANÉGYRIQUE PRONONCÉ EN L’HONNEUR
DE JULIUS VALÉRIUS MAJORIANUS AUGUSTE.
|
Concipe præteritos,
respublica, mente triumphos:
Imperium jam consul habet, quem purpura non plus
Quam lorica operit, cujus diademata frontem
Non luxu sed lege tegunt, meritisque laborum
Post palmam palmata venit: decora omnia regni
Accumulant fasces, et
princeps consule crescit.
Personat ergo tuum cœlo, rure, urbibus, undis,
Exsultans Europa sophos, quod rector haberis,
Victor qui fueras: fateor, trepidaverat orbis,
10 Dum
non vis vicisse tibi, nimioque pudore
Quod regnum mereare doles, tristique repulsa
Non moderanda subis, quæ defendenda putasti. |
Rappelle-toi, ô République, les
triomphes anciens; l’empire est aux mains d’un consul, aussi grand
sous la pourpre que sous la cuirasse. Son front se couronne du
diadème, non par orgueil, mais de l’aveu des lois; pour prix de ses
travaux, à la palme succède la robe palmée; les divers honneurs de
l’empire s’accroissent encore des faisceaux, et le prince ajoute à
sa gloire celle du consulat. L’Europe, dans l’excès de sa joie, fait
retentir de ses applaudissements et le ciel, et la terre, et les
mers, car elle a pour maître son vainqueur. Je l’avoue, l’univers
était consterné, lorsque tu refusais de profiter de ta victoire;
lorsque, dans ta modestie extrême, tu te plaignais d’être appelé au
trône, et que, par un généreux désintéressement, tu ne voulais pas
accepter un empire que tu avais défendu. |
Sederat exerto bellatrix pectore Roma
Cristatum turrita caput, cui pone capaci
Casside prolapsus perfundit terga capillus.
Lætitiam censura manet, terrorque pudore
Crescit, et invita superat virtute venustas.
Ostricolor pepli textus, quem fibula torto
Mordax dente vorat: tunc quidquid mamma refundit
20
Tegminis, hoc patulo concludit gemma recessu.
Hinc fulcit rutilus spatioso circite lævum
Umbo latus: videas hic crasso fusa metallo
Antra Rheæ, fetamque lupam, quam fauce retecta
Blandiri quoque terror erat, quanquam illa vorare
Martigenas et picta timet; pars proxima Tibrim
Exprimit; hic scabri fusus sub pumice tophi,
Proflabat madidum per guttura glauca soporem.
Pectus palla tegit, quam neverat Ilia conjux,
Liquenti quæ juncta toro vult murmura lymphis
30
Tollere, et undosi somnum servare mariti.
Ista micant clypeo; cuspis trabe surgit eburna,
Ebria cæde virum: propter Berlona tropæum
Exstruit, et quercum captivo pondere curvat.
Consurgit solium saxis, quæ cæsa rubenti
Æthiopum de monte cadunt, ubi sole propinquo
Nativa exustas afflavit purpura rupes.
Jungitur hic Sinnas, Numadum lapis additur isthic
Antiquum mentitus ebur: post caute Laconum
Marmoris herbosi radians interviret ordo. |
Rome, cette illustre guerrière, était
assise le sein découvert, et portant des tours sur sa tête; sa
chevelure s’échappe de dessous son large casque, et couvre ses
épaules. La déesse est attristée, sa terreur s’accroît de sa honte,
et, malgré son abattement, sa beauté survit à son courage. Elle a
une robe couleur de pourpre, que ramène sur son sein qui l’agite et
la repousse une agrafe formée d’une pierre précieuse. Son bras
gauche est appuyé sur un large et brillant bouclier, où se trouvent
représentés l’antre de Rhéa, et une louve pleine, que l’on ne
pouvait voir sans terreur caressant de sa gueule ouverte les fils de
Mars, quoiqu’elle parût craindre, même dans la peinture, de les
dévorer. Près d’elle, le Tibre, étendu sur un lit inégal, vomit de
son gosier verdâtre des flots qui s’échappent en murmurant. La
poitrine du dieu est couverte d’un manteau, ouvrage de son épouse
Ilia. On la voit couchée à côté de son humide époux, qui sommeille;
attentive à suspendre le murmure des ondes, elle favorise le repos
dont il jouit. Voilà ce qui éclate sur le bouclier. Rome tient en
arrêt une lance d’ivoire, fumante du sang des guerriers. Près
d’elle, Bellone érige un trophée, et fait plier le chêne sous le
poids des dépouilles ennemies. Un trône s’élève sur des marbres
tirés des hautes montagnes de l’Ethiopie, que le soleil brûle et
colore du pourpre le plus vif. Vient la pierre de Sinnas, puis celle
des Numides qui imite l’ancien ivoire, et enfin le marbre vert sorti
des carrières de Laconie, qui étale ses couleurs brillantes. |
40
Ergo ut se mediam
solio dedit, advolat omnis
Terra simul; tum quæque suos provincia fructus
Exposuit: fert Indus ebur, Chaldæus amomum
Assyrius gemmas, Ser vellera, thura Sabæus,
Atthis mel, Phœnix palmas, Lacedæmon olivum,
Arcas equos, Epirus equas, pecuaria Gallus,
Arma Chalybs, frumenta Libys, Campanus Iacchum,
Aurum Lydus, Arabs guttam, Panchaia myrrham,
Pontus castorea, blattam Tyrus, æra Corinthus.
Sardinia argentum, naves Hispania defert,
50
Fulminis et lapidem; scopulos jaculabile fulgur
Fucat, et accensam silicem fecunda maritat
Ira deum: quoties cœlum se commovet illic,
Plus ibi terra valet.
Subito flens Africa nigras
Procubuit lacerata genas, et cernua frontem
Jam male fecundas in vertice fregit aristas.
Et sic orsa loqui est: |
Dès que Rome s’est assise sur son
trône, tous les peuples de l’univers accourent en foule; chaque
province dépose à ses pieds le tribut de ses fruits. L’Indien
apporte de l’ivoire, le Chaldéen de l’amome, l’Assyrien des pierres
précieuses, l’habitant de la Sérique des toisons; le Sabéen présente
de l’encens, le peuple de l’Attique du miel, le Phénicien des
dattes, le Lacédémonien des olives, l’Arcadien des chevaux,
l’Epirote des cavales, le Gaulois des troupeaux, le Chalybs des
armes, le Libyen du blé, l’habitant de la Campanie du vin, le Lydien
de l’or, l’Arabe de l’aloès, le peuple de Panchaïe de la myrrhe, et
le Pont du castoréum; Tyr apporte de la pourpre, Corinthe de
l’airain, la Sardaigne de l’argent, l’Espagne des vaisseaux et des
laves de pierre de foudre, rochers que le feu du ciel frappe et
colore, matière sulfureuse lancée par la colère des dieux; mais plus
le ciel s’émeut dans ces contrées, plus la terre est fertile.
Soudain l’Afrique en pleurs se prosterne aux pieds de la déesse;
elle flétrit ses noires joues, et brise, en s’inclinant, les épis
déjà peu fertiles dont sa tête est couronnée. Puis, elle commence de
parler en ces mots: |
Venio pars
tertia mundi,
Infelix felice uno, famula satus olim
Hic prædo, et dominis exstinctis, barbara dudum
Sceptra tenet tellure mea, penitusque fugata
60
Nobilitate furens, quod non est, non amat hospes.
O Latii sopite vigor tua mœnia ridet
Insidiis cessisse suis: non concutis hastam?
Non pro me vel capta doles? tua nempe putantur
Surgere fata malis, et celsior esse ruina.
Sed melius, quo terror abit: jam vincere restat
Si pugnas, ut victa soles. |
« Je viens, moi, la troisième partie
du monde, malheureuse du bonheur d’un seul mortel. Conçu dans le
sein d’une vile esclave, ce brigand, aujourd’hui que mes maîtres ne
sont plus, fait peser sur son sol un sceptre barbare; la noblesse
entière est dispersée, et le furieux déteste tout ce qui n’est pas
lui-même. O valeur assoupie du Latium, il goûte la joie féroce
d’avoir surpris tes murs. Quoi! tu n’agites pas ta lance? Es-tu donc
insensible à mon sort, au tien même; ou penses-tu que mes désastres
rendront tes destins plus heureux, et que ta grandeur s’élèvera sur
mes ruines? Bannis plutôt la crainte, et tu seras victorieuse si tu
combats comme tu as coutume de faire, quand tu es vaincue. |
Porsenna superbum
Tarquinium impingens, complevit milite Thusco
Janiculum quondam; sed dum perrumpere portas
Obsidione parat, totam te pertulit uno
70
Coclitis in clypeo; presserunt millia solum
Multa virum, pendente via; nec ponte soluto
Cum caderet, cecidit. Rex idem denique morte
Admonitus scribæ didicit sibi bella moveri,
Non solum cum bella forent; mox pace petita,
In regnum rediit, non tam feriente fugatus,
Quam flagrante viro: steterat nam corde gelato
Scævola, et apposito dextram damnaverat igni,
Plus felix peccante manu, cum forte satelles
Palleret, constante reo, tormentaque capti
80 Is
fugeret, qui tortor erat. |
« Autrefois Porsenna, digne appui du
superbe Tarquin, inonda le Janicule des soldats d’Etrurie; mais
tandis qu’il s’apprête à briser tes portes, il te retrouve tout
entière sous le bouclier du généreux Coclès, intrépide Romain qui,
sur un pont chancelant, résista seul à plusieurs milliers d’ennemis,
et ne périt pas néanmoins, lorsque le pont rompu se fut écroule. Le
même roi, averti par la mort de son scribe, connut qu’on lui faisait
encore la guerre hors des combats. Bientôt il demanda la paix et
retourna dans son royaume, moins frappé de l’attentat contre sa vie,
que de l’image de son héroïque assassin. Car, Scœvola, plein de
calme, avait mis la main sur un brasier dévorant, plus heureux de sa
méprise, puisque les satellites frissonnaient en face d’un homme si
courageux, et que le roi, qui était le bourreau, fuyait à l’aspect
du supplice que s’infligeait le captif. |
Brennum tremuisti
Post melior: quodcunque tuum est, quodcunque vocaris
Jam solus Tarpeius erat; sed reppulit unus
Tum quoque totam aciem, Senones dum garrulus anser
Nuntiat, et vigilat vestrum sine milite fatum.
Me quoque (da veniam, quod bellum gessimus olim)
Post Trebiam Cannasque domas: Romanaque tecta
Hannibal ante meus, quam nostra Scipio vidit.
Quid merui? fatis cogor tibi bella movere,
Cum volo, cum nolo: trepidus te territat hostis,
90 Sed
tutus claudente freto, velut hispidus alta
Sus prope tesqua jacet, claususque cacuminat albis
Os nigrum telis gravidum, circumlatrat ingens
Turba canum, si forte velit concurrere campo:
Ille per objectos vepres tumet atque superbit,
Vi tenuis, fortisque loco, dum proximus Ela
Venator de colle sonet: vox nota magistri
Lassatam reparat rabiem: tum vulnera cæcus
Fastidit sentire furor. |
« Tu tremblas devant Brennus, et tu
fus plus courageuse ensuite. Ce que tu as aujourd’hui, ce que tu
possèdes se réduisait alors au seul mont Tarpéien; alors un seul
guerrier repoussa tous les bataillons ennemis; le cri des oies
sacrées t’annonça les Sénones, et ton destin veillait sans tes
soldats. Moi aussi (pardonne, si je te fis autrefois la guerre), tu
me domptas après les journées de Trébie et de Cannes, et mon
Hannibal vit les toits de Rome, avant que Scipion et vu ceux de
Carthage. Qu’ai-je donc mérité ? Les destins me forcent à guerroyer
contre toi, que je veuille, que je ne veuille pas. Un faible ennemi
t’épouvante., mais défendu par ta mer qui l’environne: ainsi le
farouche sanglier, couché dans sa bouge, pressé de toutes parts,
aiguise les blanches défenses dont sa noire gueule est armée; s’il
veut par hasard s’élancer dans la plaine, l’innombrable meute des
chiens aboie autour de lui; il se retranche fièrement derrière les
buissons voisins, faible de lui-même, fort de son asile, jusqu’à ce
que le chasseur, du haut de la colline prochaine, vienne exciter les
chiens; la voix connue du maître ranime leur courage épuisé, ils
s’élancent furieux, dédaignant les blessures. |
Quid prælia
differs?
Quid mare formidas, pro cujus sæpe triumphis
100 Et
cœlum pugnare solet? Quid quod tibi princeps
Est nunc eximius, quem præscia sæcula clamant
Venturum excidio Libyæ, qui tertius ex me
Accipiet nomen? debent hoc fata labori,
Majoriane, tuo: quem cur conscendere classem,
Ac portus intrare meos, urbemque subire,
Si jubeas, cupiam, paucis ex ordine fabor. |
« Que diffères-tu de combattre?
Pourquoi redouter les mers, quand le ciel même a coutume de
favoriser tes triomphes? N’as-tu pas aujourd’hui un prince
magnanime, à qui les destinées ont réservé la gloire de subjuguer
l’Afrique, et qui, lui troisième, recevra le nom d’Africain? Voilà
le succès promis à la valeur de Majorianus. Et si je désire que ce
prince monte sur tes flottes, entre dans mes ports, pénètre dans mes
murailles, veux-tu savoir pourquoi ? je te le dirai en peu de mots: |
Fertur
Pannoniæ qua
Martia pollet Acincus,
Illyricum rexisse solum cum tractibus Istri
Hujus avus; nam Theudosius quo tempore Sirmi
110
Augustum sumpsit nomen, per utramque magistrum
Militiam, ad partes regni venturus eoas,
Majorianum habuit. Latiis sunt condita fastis
Facta ducis: quoties Scythicis illata colonis
Classica presserunt
Hypanim,
Peucemque rigentem
Monte salutatis irrisit lixa pruinis?
Hunc socerum pater hujus habet, vir clarus, et uno
Culmine militiæ semper contentus, ut unum
Casibus in dubiis junctus sequeretur amicum.
Non semel oblatis tentavit fascibus illum
120 Ætio
rapere aula suo; sed perstitit ille
Major honoratis: cœpit pretiosior esse,
Sic pretio non capta fides; erat ille quod olim
Quæstor consulibus, tractabat publica jure
Æra suo, tantumque modum servabat, ut illum
Narraret rumor
jam rebus parcere nati. |
« On rapporte que l’aïeul de
Majorianus régna sur l’Illyrie et sur les contrées que baigne
l’Ister, dans les lieux de la Pannonie où s’élève la vaillante
Acincus. Car Théodose, quand il prit à Sirmium le nom d’Auguste,
prêt à partir pour les contrées orientales de l’empire, établit
Majorianus chef des deux milices. Les exploits de ce général sont
inscrits dans les fastes du Latium. Toutes les fois qu’il
franchissait les bords de l’Hypanis et l’île glacée de Peucé pour
aller combattre les Scythes, ses soldats saluaient du haut des monts
voisins les frimas qu’ils bravaient. Ce général eut pour gendre le
père de notre Majorianus, héros d’un grand renom, qui sut toujours
se contenter du commandement de la milice, et qui, dans les
circonstances critiques, suivit la fortune d’un ami. Plus d’une
fois, en lui offrant des faisceaux, la cour essaya de le ravir à son
Aétius; mais il persista dans un noble dédain, qui l’honora bien
plus que les honneurs; une fidélité aussi incorruptible fut d’un
plus grand prix encore. Questeur sous les consuls, il avait le
maniement des deniers publics, et montrait une telle sagesse que
l’on disait partout: « L’intégrité du père fera la fortune du fils.
» |
Senserat hoc
sed forte ducis jam
livida conjunx;
Augeri famam pueri, suffusaque bili,
Coxerat internum per barbara corda venenum.
Ilicet explorat cœlum, totamque volutis
130
Percurrit mathesim numeris, interrogat umbras,
Fulmina rimatur, fibras videt, undique gaudens
Secretum rapuisse Deo: sic torva Pelasgum
Colchis in aplustri steterat trepidante marito:
Absyrtum sparsura patri, facturaque cæsi
Germani plus morte nefas, dum funere pugnat,
Et fratrem sibi tela facit: vel cum obruit ignem
Taurorum, plus ipsa calens, texitque trementem
Frigida flamma virum, quem defendente veneno
Inter flagrantes perhibent alsisse juvencos. |
« Elle avait peut-être déjà compris,
l’envieuse épouse d’Aétius, que la renommée du jeune Majorianus ne
pouvait que s’en accroître; rongée par la jalousie, elle avait
nourri dans son cœur barbare une sourde haine. Aussitôt elle observe
le ciel, cherche dans l’astrologie quels nombres sont résolus,
interroge les ombres, examine avec soin la foudre, consulte les
entrailles des animaux, satisfaite d’avoir surpris le secret du dieu
des augures. Ainsi, dans le vaisseau des Argonautes, se réjouissait,
près de son amant effrayé, la farouche Médée; ainsi éclatait sa
joie, quand elle semait sur la route de son père les membres
d’Absyrte, et qu’elle ajoutait à son crime par la mort de son frère,
en se faisant de ce trépas comme une sorte d’arme; ainsi
s’applaudissait-elle quand elle étouffait les feux des taureaux,
brûlante elle-même, et qu’une flamme glacée couvrit son mari
tremblant, lui qui, défendu par des herbes enchantées, frissonna,
dit-on, au milieu des taureaux enflammés. |
140 Ergo animi
dudum impatiens, postquam audiit isti
Imperium et longum statui, laniata lacertos
Ingreditur qua strata viri, vocemque furentem
His rupit: |
« Maîtrisant à peine son courroux, dès
que l’épouse d’Aétius apprend qu’un empire de longue durée est
promis au jeune Majorianus, les bras déchirés, elle s’élance dans la
chambre où repose son mari, et sa fureur éclate en ces mots: |
Secure jaces
oblite tuorum,
O piger, et mundo princeps (sic sæcula poscunt)
Majorianus erit; clamant hoc sidera signis,
Hoc homines votis: isti quid sidera quæro,
Fatum aliud cui fecit amor? nil fortius illo.
Et puer est cupidus nunquam, sed parcus habendi.
Pauper adhuc jam spargit opes, ingentia suadet
150
Consilia, et sequitur; totum quod cogitat, altum est.
Urget quod sperat: ludum si forte retexam,
Consumpsit, quidquid jaculis fecisse putaris,
Istius una dies: tribus hunc tremuere sagittis
Anguis, cervus, aper;
non sic libravit in hostem
Spicula, qui nato serpentis corpore cincto,
Plus timuit, dum succurrit, dum jactibus iisdem
Interitum vitamque daret, stabilemque teneret
Corde tremente manum, totamque exiret in artem
Spe propiore metus, dans inter membra duorum
160 Unius
mortem: |
« Tu dors paisiblement, sans nul souci
des tiens, paresseux, et Majorianus, les siècles en ont ainsi
décidé, règnera sur le monde; les astres le proclament, les hommes
le désirent. Mais pourquoi consulter les astres, quand l’amour des
peuples lui promet d’autres destinées? Rien de plus courageux que
lui; c’est un enfant sans ambition, et qui désire peu. Pauvre
encore, il sème déjà les richesses, donne de hauts conseils et suit
les nobles résolutions. Toutes ses pensées sont profondes. Il hâte
ce qu’il espère. Parlerai-je de ses jeux? Les belles actions que tu
as faites dans le cours de ta vie, il les a toutes effacées, lui,
dans un seul our. De trois flèches il a terrassé un serpent, un
cerf, un sanglier, tremblants devant lui. Alcon ne lança pas son
trait avec plus d’adresse, lorsqu’il attaquait le serpent redoutable
qui avait enlacé de ses nœuds le corps de son fils, et qu’il sentait
redoubler sa crainte en le secourant, car le même coup allait porter
le trépas et la vie; le cœur plein d’effroi, ce malheureux père
tenait sa main ferme; sa crainte, aiguillonnée par l’espérance, se
consumait en efforts inouïs pour ne donner la mort qu’à un seul au
milieu des membres de deux. |
Libeat
decernere cæstu,
Cessit Eryx Siculus, simili nec floruit arte
Sparta,
Therapnæa pugilem cum gymnade pinguem
Stratus Bebryciis Amycus suspexit arenis.
Qui vigor in pedibus? frustra sibi natus Ophelte
Sicaniam tribuit palmam, plantasque superbas
Haud ita per siccam Nemeen citus extulit
Arcas,
Cujus in Ætolo volitantem pulvere matrem
Horruit Hippomenes, multo qui cespite circi.
Contemptu præmissus erat, cum carceris antro
170
Emicuit pernix populo trepidante virago,
Nil toto tactura gradu, cum pallidus ille
Respiceret medium post se decrescere campum,
Et longas ad signa vias, flatuque propinquo
Pressus in hostili jam curreret anxius umbra,
Donec ad anfractum metæ jam jamque relictus
Concita ter sparso fregit vestigia pomo. |
« Veut-il s’exercer au combat du
ceste? Il l’emporte sur Eryx de Sicile. Sparte ne brilla point
autant, lorsque, sur l’arène de Bébrycie, Amycus se vit abattre par
l’athlète habile de Thérapnée. Quelle force dans ses pieds! En vain
le fils d’Ophelte s’attribua la victoire en Sicile. Parthenopée
jamais ne franchit d’un pied plus agile les sables de Némée, lui
dont la mère, volant sur la poussière d’Etolie, avait fait trembler
Hippomène. Sa rivale, par dédain, l’avait pressé de s’avancer dans
le cirque, lorsque, aux yeux du peuple saisi de crainte, elle
apparut vive et légère, effleurant à peine le sol avec ses pieds;
Hippomène, pâle d’effroi, mesure l’espace du champ qui décroît
derrière lui, et tout celui qu’il doit encore parcourir jusqu’à la
borne; déjà pressé par le souffle d’Atalante, il court dans l’ombre
de son adversaire, jusqu’à ce que, se voyant sur le point d’être
dépassé par elle, au détour de la borne, il brise les pas d’Atalante
en laissant tomber trois pommes d’or. |
Qui videt hunc
equitem,
Ledæum spernit alumnum,
Ac
juvenem Sthenobæa tuum, cui terga vetustas
Pennati largitur equi, Lyciamque Chimæram
180 Quem
superasse refert, vulnus cum sustulit unum
Tres animas: vitam tum si tibi fata dedissent,
Majoriane ferox, vetuisses Castora frenos,
Pollucem cæstus, Alconem spicula nosse,
Bellerophontæis insultaturus opimis.
Si clypeum capiat, vincit Telamone creatum,
Qui puppes inter Graias, contra Hectoris ignem,
Ipsam etiam infidi classem defendit Ulyxis.
Missile si quanto jaculetur pondere quæris,
Segnius insertæ trepidans pro fasce
Camillæ
190
Excussit telum Metabus, nec turbine tanto
Stridula Pelidæ per Troilon exiit
ornus:
Nec sic heroum tardantem busta Creontem
Atticus Ægides rupit Marathonide quercu:
Nec sic intortum
violatæ Phœbados ultrix
In Danaos fulmen jecit, cum Græcia Trojæ
Noctem habuit, similemque facem, fixusque Capharei,
Cautibus inter aquas flammam ructabat Oileus. |
« Ceux qui voient Majorianus presser
les flancs de son coursier, dédaignent et le fils de Léda, et celui
de Sténobée, que l’antiquité nous représente monté sur un cheval
ailé, et terrassant la Chimère de Lycie, lorsque d’un seul trait il
lui donna trois fois la mort. Si les destinées, vaillant Majorianus,
t’avaient fait vivre en cet âge, devant toi Castor n’et osé dompter
les chevaux, Pollux combattre avec le ceste, Alcon lancer des dards,
et tu aurais méprisé les trophées de Bellérophon. S’il saisit un
bouclier, il surpasse le fils de Télamon, qui, au milieu des flottes
grecques, défendait contre les feux d’Hector les vaisseaux mêmes du
perfide Ulysse. Veux-tu savoir avec quelle force il lance un dard?
Métabus tremblant pour les jours de Camille, ne décocha pas son
trait d’un bras plus vigoureux; le javelot du fils de Pélée, en
sifflant dans les airs, ne perça pas Troïle d’un vol plus rapide; et
le fils d’Egée ne fit pas une blessure plus profonde à Créon qui
retardait les funérailles des héros; Minerve elle-même, pour venger
la prêtresse d’Apollon, violée dans son temple, ne lança pas plus
impétueusement la foudre contre les Grecs, quand leur flotte éprouva
cette nuit si désastreuse, cet incendie pareil à celui de Troie, ou
quand le fils d’Oïlée, suspendu aux rochers Capharéens, vomit des
flammes au sein des eaux. |
Parva loquor:
quid quod quoties tibi bella geruntur,
Discipulus non miles adest? et fingit alumnum,
200
Æmulus econtra spectat? quod viceris odit,
Et quos vincis amat: totus dormitat ad istum
Magnus Alexander, patris quem gloria torsit.
Quid faciam infelix?
nato quæ regna parabo,
Exclusa sceptris Geticis, respublica si me
Præterit, et parvus super hoc
Gaudentius hujus
Calcatur fatis? istum jam Gallia laudat,
Quodque per Europam est: rigidis hunc abluit undis,
Rhenus, Arar, Rhodanus, Mosa, Matrona, Sequana,
Ledus,
Clitis, Elaris, Atax, Vachalis, Ligerimque bipenni
210
Excisum per frusta bibit; cum
bella timentes
Defendit Turonos, aberas: post tempore parvo
Pugnastis pariter, Francus qua
Clodio patentes
Atrebatum terras pervaserat: hic cœuntes
Claudebant angusta vias, arcuque subactum
Vicum Helenam, flumenque simul sub tramite longo
Artus suppositis trabibus transmiserat agger.
Illic te posito, pugnabat ponte sub ipso
Majorianus eques: fors
ripæ colle propinquo,
Barbaricus resonabat hymen, Scythicisque choreis
220
Nubebat flavo similis nova nupta marito.
Hos ergo, ut perhibent, stravit; crepitabat ad ictus
Cassis, et oppositis hastarum verbera thorax
Arcebat squamis, donec conversa fugatus
Hostis terga dedit: plaustris rutilare videres
Barbarici vada festa tori, conjectaque passim
Fercula, captivasque dapes, cirroque madente
Ferre coronatos redolentia serta lebetas.
Ilicet increscit Mavors, thalamique refringit
Plus ardens Bellona faces; rapit esseda victor,
230
Nubentemque nurum, non sic Pholœtica monstra,
Atque
Pelethronios Lapithas
Semeleius Evan
Miscuit,
Æmonias dum flammant orgia matres,
Et Venerem Martemque cient, ac prima cruentos
Consumunt ad bella cibos, Bacchoque rotato
Pocula tela putant, cum crudescente tumultu
Polluit
Æmathium sanguis Centauricus Othrim. |
« C’est peu ce que je dis. Toutes les
fois que tu fais la guerre, n’as-tu pas en Majorianus un disciple
bien plutôt qu’un soldat? Il se dit ton élève, mais il est ton
rival. Il voit d’un œil jaloux tes victoires, et ceux que tu as
vaincus deviennent ses amis. Auprès d’un tel homme, il ne fait que
sommeiller, ce grand Alexandre que tourmentait la gloire de son
père. Que ferai-je, malheureuse? moi qui ai perdu la couronne des
Gètes, quels royaumes puis-je préparer à mon fils, si la République
m’oublie, si le jeune Gaudentius est foulé par les destinées de
Majorianus? Tout retentit de ses louanges, la Gaule et l’Europe
entière; déjà son courage a brillé sur les bords glacés du Rhin, sur
ceux de l’Arar, du Rhône, de la Meuse, de la Marne, de la Seine, du
Lez, du Clam, de l’Allier, de l’Aude, du Vahal; il a bu les eaux de
la Loire par fragments de glace tranchés avec le fer. Lorsqu’il
défendit les habitants de Tours qui appréhendaient la guerre, tu
étais absent. Peu de temps après, réunis, vous combattîtes dans le
pays découvert des Atrébates, que Clodio le Franc avait envahi. Là,
venaient aboutir divers chemins resserrés par un déifié; ensuite, on
voyait le bourg Helena formant un arc, puis on trouvait une rivière
traversée par un pont construit en planches. Tu étais là;
Majorianus, alors chevalier, combattait à la tête du pont. Voilà
qu’on entend résonner sur la colline prochaine les chants d’un hymen
que célébraient les Barbares dansant à la manière des Scythes ; deux
époux à la blonde chevelure s’unissaient alors. Majorianus, comme on
le rapporte, défit les Barbares. Son casque retentissait sous les
coups, et les lances étaient repoussées par sa cuirasse aux mailles
épaisses, jusqu’à ce qu’enfin l’ennemi plie, se débande et prend la
fuite. Vous eussiez vu errer à l’aventure sur des chariots les
brillants apprêts de l’hymen barbare; on emportait çà et là des
plats et des mets, puis des bassins couronnés de fleurs. Tout à coup
le combat redouble, et Bellone plus ardente brise le flambeau
nuptial; le vainqueur s’empare des essèdes et de la nouvelle épouse.
Le fils de Sémélé ne mit pas plus promptement en déroute les
monstres de Pholoé ni les Lapithes de Péléthronium, lorsque les
femmes de Thrace, enflammées par les Orgies, appelèrent Mars et
Cythérée, se servirent de mets sanglants pour commencer le combat,
se firent une arme de vases remplis de vin, et qu’au plus fort de la
mêlée le sang des Centaures souilla le mont Othrys, en Macédoine. |
Nec plus
nubigenum celebrentur jurgia fratrum.
Hic quoque
monstra domat, rutili quibus arce cerebri
Ad frontem coma tracta jacet, nudataque cervix
240
Setarum per damna nitet, tum lumine glauco
Albert aquosa acies, ac vultibus undique rasis,
Pro barba tenues perarantur pectine cristæ.
Strictius assutæ vestes procera cœrcent
Membra virum; patet iis altato tegmine poples,
Latus et angustam suspendit balteus alvum.
Excussisse citas vastum per inane bipennes,
Et plagæ præscisse locum, clypeosque rotare
Ludus, et intortas præcedere saltibus hastas,
Inque hostem venisse prius: puerilibus annis
250 Est
belli maturus amor; si forte premantur
Seu numero, seu forte loci, mors obruit illos,
Non timor; invicti perstant, animoque supersunt
Jam prope post animam. |
« Qu’on ne me vante plus les querelles
de ces frères enfants de la nue. Majorianus, lui aussi, a dompté des
monstres. Du sommet de la tête au front descend leur blonde
chevelure, tandis que la nuque reste à découvert; dans leurs yeux
mêlés de vert et de blanc, roule une prunelle couleur d’eau; leur
visage sans barbe n’offre que des touffes arrangées avec le peigne.
Des habits étroits tiennent serrés les membres vigoureux de ces
guerriers d’une haute stature; de courtes tuniques laissent paraître
leurs jarrets; un large baudrier presse leurs flancs aplatis. Lancer
au travers des airs la rapide francisque, mesurer de l’œil l’endroit
qu’ils sont sûrs de frapper, imprimer à leurs boucliers un mouvement
circulaire, c’est un jeu pour eux, aussi bien que de devancer leurs
piques par l’agilité de leurs sauts, et d’atteindre l’ennemi avant
elles. Dès leurs tendres années, ils sont passionnés pour les
combats. Si le nombre de leurs ennemis, ou le désavantage de la
position les fait succomber, la mort seule peut les abattre, jamais
la crainte. Ils restent invincibles, et leur courage semble leur
survivre au-delà même de la vie. |
Tales te
teste fugavit,
Et laudante viros: quisnam ferat? omnia tecum,
Te sine multa facit; pugnant pro principe multi,
Quam timeo ne jam iste sibi; si regna tenebit,
Huic vincis, quodcunque domas; nil fata relinquunt
Hic medium: percussor enim si respuis esse,
Servus eris; certe recto si tramite servat
260
Sidera Chaldæus; novit si gramina Colchus,
Fulgura si Thuscus, si Thessalus elicit umbras,
Si Lyciæ sortes sapiunt, si nostra volatu
Fata loquuntur aves, doctis balatibus
Hammon
Si sanctum sub syrte gemit, si denique verum
Phœbe, Themis, Dodona canis, post tempora nostra
Julius hic Augustus erit. Conjunctus amore
Præterea est juveni grandis quem spiritus armat
Regis avi: quo te vertas? ad culmina mundi
Hic fatum fert, ambo animum: consurge, simulque
270
Aggredere ignaros; neutrum mactare valebis,
Si jubeas utrumque mori; sed necte dolosas
Blanditias uni, ferro tamen iste petatur.
Quid loquor incassum? nihil est quod tanta cavemus,
Ut regnet, victurus erit. |
« Tels sont les hommes que Majorianus
a mis en fuite sous tes yeux, et applaudi par toi. Qui pourrait
supporter cela? il entre dans tes plus belles actions, et
sans toi, accomplit grand nombre de hauts faits. C’est pour le
prince que beaucoup de généraux combattent, mais je crains bien que
celui-ci ne combatte déjà pour lui-même. S’il obtient l’empire, il
va s’approprier l’honneur de toutes tes victoires. Les destinées ne
laissent point ici de milieu; si tu refuses d’être son assassin, tu
seras son esclave. Assurément, si le Chaldéen a l’art de bien
observer les astres ; si l’habitant de la Colchide connaît bien la
vertu des plantes vénéneuses; si le Toscan fait tomber la foudre à
son gré; si le Thessalien peut évoquer les ombres; si les oracles de
la Lycie ne sont point trompeurs ; si le vol des oiseaux annonce nos
destinées; si Jupiter Ammon fait entendre chez les Syrtes ses
prophétiques bêlements ; enfin, si les oracles d’Apollon, de Thémis,
de Dodone sont véritables, Julius doit plus tard être Auguste. Il a
de plus l’avantage d’être uni d’amitié avec le jeune Ricimer, digne
héritier de tout le génie du roi son aïeul. Quelle décision
prendras-tu? L’un est appelé par les destins à l’empire du monde,
tous deux y aspirent. Lève-toi, attaque-les à l’improviste. Tu ne
pourras les immoler en même temps, si tu veux les faire périr tous
deux à la fois; éblouis l’un de trompeuses caresses, reviens sur
l’autre le fer en main. Pourquoi d’inutiles paroles? C’est vainement
que nous prenons de si grandes précautions; il doit vivre pour
régner. » |
Commotus in
iras
Ætius, sic pauca refert: |
Aétius indigné lui répond en peu de
mots: |
Compesce
furentis
Impia vota animi; mortem mandare valebo
Insontis, taceam nostri? quisquamne precatur
Ut sine criminibus crimen fiat bene nasci?
Ad pœnam quis fata vocet? tua viscera ferro
280
Majoriane petam? Phœbus si nocte refulget,
Luna die, duplex ponto si plaustra
novatur
Parrhasis, Atlantem Tanais, si Bagrada cernit
Caucason, Hercinii nemoris si stipite lintris
Texta Nabathæum pro Rheno sulcat Hidaspem,
Si bibit Hispanus Gangem, tepidisque ab Erythris
Ad Tartesiacum venit Indus aquator Iberum:
Si se Pollucis perfundit sanguine Castor:
Thesea Pirithoi, Pyladem si stravit Oreste
Vel furibunda manus, raperet cum Taurica sacra
290
Matricida pius. Sed ne sprevisse dolorem
Forte tuum videar, vivat, careatque parumper
Militia: heu nobis potuit, nisi triste putasses,
Fortunam debere suam. |
« Réprime les vœux impies de ton âme
furieuse; je pourrais ordonner la mort d’un innocent, que dis-je? de
mon ami? Est-ce donc un crime d’être heureusement né, si l’on n’est
pas coupable d’ailleurs? Qui voudrait punir les destins? Quoi !
Majorianus, je te percerais le flanc! On verrait plutôt le soleil
briller pendant la nuit, la lune pendant le jour ; la grande et la
petite ourse...
le Tanaïs regarder l’Atlas, et le Bagrada le Caucase ; un esquif
construit avec du bois de la forêt d’Hercynie sillonner pour ceux du
Rhin les flots de l’Hydaspe dans la contrée Nabathéenne; l’Espagnol
boire les eaux du Gange, et, des tièdes bords de l’Erythrée,
l’indien venir s’abreuver à l’Hèbre de Tartessa; Castor se baigner
dans le sang de Pollux ; Thésée dans celui de Pirithoüs; ou bien
Oreste, d’une main furieuse, assassiner Pylade, Oreste, ce pieux
meurtrier de sa mère alors qu’il enlevait la statue de Diane en
Tauride. Mais, afin que je ne paraisse pas mépriser ta douleur,
qu’il vive, et qu’il soit éloigné pour un temps du service
militaire. Hélas! il aurait pu, situ n’avais regardé cela comme
fatal, nous devoir sa fortune. » |
Sic fatur, et
illum
Rure jubet patrio suetos mutare labores,
Fatorum currente rota, quo disceret agro
Quid possessorem maneat, quos denique mores
Jus civile paret, ne solam militis artem
Ferret ad imperium. Suspenderat ilicet arma
Emeritus juvenis, sterilis jejunia terræ
300
Vomere fecundans, sic quondam consule curvo
Vertebas campos, paulum si pace sequestra
Classica laxasses, fortis cui læva regebat
Stivam post aquilas, humili dum juncta camino
Victoris fumum biberet palmata bubulci. |
Il dit, et ordonne à Majorianus
d’échanger ses travaux accoutumés pour la campagne de ses pères. Les
destinées, toutefois, le voulaient ainsi, afin qu’il apprît alors
quelles choses concernent un possesseur, quelles sont les règles du
droit civil, et qu’il ne portât pas à l’empire la seule science du
soldat. Il avait donc suspendu ses armes, ce jeune vétéran, et il
fécondait avec le soc une terre inculte et stérile. C’était ainsi
que, inclinant sa personne consulaire, Cincinnatus cultivait ses
champs, lorsque la paix venait parfois interrompre le bruit des
trompettes guerrières; que ses mains vaillantes conduisaient la
charrue, après avoir dirigé les aigles, et que la palmée du bouvier
triomphal s’abreuvait de fumée auprès d’un âtre modeste. |
Principis interea gladio lacrymabile fatum
Clauserat Ætius: cujus quo tutius ille
Magna Palatinis conjungeret agmina turmis,
Evocat hunc precibus; sed non se pœna moratur
Sanguinis effusi; numerum collegerat ergo,
310 Non
animum populi; ferri mala crimina ferro
Solvit, et in nostram plus concidit ille ruinam.
Jam tunc imperium præsentis principis aurea
Volvebant bona fata colu; sed publica damna
Invidiam fugere viri: quicunque fuerunt
Nomen in Augustum lecti, tenuere relictum
Cæsaribus solium: postquam tu capta laboras,
Hic quod habet fecit. Trajanum Nerva vocavit
Cum pignus jam victor erat; Germanicus esset
Ut titulis, meritis fuerat; res ordine currit,
320 Hanc
ambit famam, quisquis sic incipit. Olim
Post Capreas Tiberi, post turpia numina Cai,
Censuram Claudi, citharam thalamosque Neronis,
Post speculi immanis pompam, quo se ille videbat
Hinc turpis, quod pulcher Otho, post quinta Viteli
Millia, famosi ventris damnata baratro;
His titulis princeps lectus, similique labori
Vespasianus erat. Sed ne fortasse
latronis
Me clausam virtute putes, consumpsit in illo
Vim gentis, vitæ vitium: Scythicam feritatem
330 Non
vires sed vota tenent, spoliisque potitus
Immensis, robur luxu jam perdidit omne,
Quo valuit dum pauper erat; mea viscera pro se
In me nunc armat; laceror tot capta per annos
Jure suo, virtute mea; fecundaque pœnis
Quos patiar pario; propriis nil conficit armis,
Gætulis, Numidis, Garamantibus,
Autololisque
Arzuge, Marmarida, Psyllo,
Nasamone timetur
Segnis, et ingenti ferrum jam nescit ab auro.
Ipsi autem color exsanguis, quem crapula vexat,
340 Et
pallens pinguedo tenet, ganeaque perenni
Pressus acescentem stomachus non explicat auram.
Par est vita suis: non sic Barchæus opimam
Hannibal ad Capuam periit, cum fortia bello
Inter delicias mollirent corpora Baiæ
Et se Lucrinas qua vergit Gaurus in undas,
Brachia Massylus jactaret nigra natator.
Atque ideo hunc dominum saltim post sæcula tanta
Ultorem mihi redde, precor, ne dimicet ultra
Carthago Italiam contra. |
Cependant, le glaive du prince avait
terminé les destinées déplorables d’Aétius ; l’empereur, afin de
réunir plus sûrement les nombreux bataillons du général aux soldats
du palais, supplie Majorianus de venir à la cour. Toutefois, la
punition du sang répandu ne tarde pas d’arriver. Valentinianus avait
rassemblé un grand nombre d’hommes, mais l’esprit du peuple n’était
pas pour lui; il punit le crime que le fer avait commis, et la chute
de l’empereur rendit nos calamités plus fatales encore. Cependant,
la Parque filait avec un fuseau d’or les heureuses destinées de
Majorianus, et les malheurs publics firent cesser les persécutions
de l’envie animée contre lui. Tous ceux qui furent appelés à porter
le nom d’Auguste montèrent sur un trône laissé par des Césars; mais,
comme tu languissais après avoir été prise, Majorianus s’est créé ce
qu’il possède. Lorsque Nerva adopta Trajan, celui-ci était déjà
vainqueur, et, avant d’être Germanicus par le titre, il l’avait été
par son mérite. C’est dans l’ordre: on a droit à de tels honneurs,
quand on commence de la sorte. Autrefois, après le séjour de Tibère
à Caprée, après les honteuses divinités de Caius, après la censure
de Claude, la harpe et le lit nuptial de Néron; après l’étalage de
cet énorme miroir, où se regardait Othon, d’autant plus méprisable
qu’il faisait plus de cas de sa beauté; après les cinq mille
poissons destinés à assouvir la gloutonnerie de Vitellius, ce fat
avec les mêmes titres, par les mêmes travaux que Vespasien parvint à
l’empire. Mais, pour que tu n’ailles pas croire que je suis resserré
par la valeur du pirate, sache que les désordres de sa vie ont:
énervé le courage de son peuple. Ce qui alimente la fierté des
Scythes, ce ne sont pas les forces, mais bien les désirs ; et,
depuis que Genséric s’est enrichi de dépouilles immenses, il a déjà
perdu dans le luxe toute cette mâle vigueur, qui faisait sa
puissance alors qu’il était dans la pauvreté. Il arme maintenant
pour lui contre moi mes propres enfants. Esclave depuis tant
d’années, je suis déchirée, par sa domination, par ma valeur à moi;
féconde en instruments de supplice, j’enfante ceux qui seront mes
bourreaux. Il ne fait rien avec ses propres armes; il se rend la
terreur des Gétules, des Numides, des Garamantes, des Autololes, des
Arzuges, des Marmoriques, de Psylles, des Nasamons, ce lâche dont
les monceaux d’or ont émoussé le fer. Ses traits sont décolorés, la
débauche le mine, l’embonpoint l’appesantit et le rend livide;
fatigué toujours par les excès de la table, son estomac exhale avec
peine un souffle corrompu. Telle est encore la vie des siens.
Hannibal Barca ne s’énerva point ainsi devant la riche Capoue,
lorsque les délices de Baies amollissaient le courage de ses
vaillants guerriers, et que le nageur Massyle fendait de ses bras
noirs les eaux du Lucrin, voisin du Gaurus. Ainsi donc, je t’en
conjure, après tant de siècles de souffrance, donne-moi dans
Majorianus un vengeur, et Carthage enfin cessera de combattre contre
l’Italie. » |
Sic fata,
dolore
350
Ingemuit, lacrymisque preces adjuvit obortis. |
Elle dit, et pousse un douloureux
soupir; les larmes qui baignent son visage viennent à l’appui de ses
prières. |
His hæc Roma
refert. Longas succinge querelas,
O devota mihi: vindex tibi nomine divum
Majorianus erit; sed paucis pauca retexam.
Ex quo Theudosius communia jura fugato
Reddidit auctoris fratri, cui guttura fregit
Post in se vertenda manus,
mea Gallia rerum
Ignoratur adhuc dominis, ignaraque servit.
Ex illo multum periit, quia principe clauso,
Quidquid erat miseri diversis partibus orbis,
360
Vastari solemne fuit: quæ vita placeret,
Cum rector moderandus erat? contempta tot annos
Nobilitas jacuit: pretium respublica forti
Rettulit invidiam. Princeps hæc omnia noster
Corrigit, atque tuum, vires ex gentibus addens,
Ad bellum per bella venit; nam maximus isse est,
Non pugnasse labor: terimus cur tempora verbis?
Pervenit, et vincit. |
Rome lui répond: « Mets fin à tes
longues alarmes, ô toi qui me fis dévouée : Majorianus te vengera,
les dieux sont garants de ma promesse; mais écoute ce que je vais te
dire. Depuis que Théodose eut rappelé à la commune possession du
trône, le frère de son bienfaiteur, lequel avait été mis en fuite,
et qu’étrangla une main qui plus tard devait se tourner contre
elle-même, ma province des Gaules est encore inconnue aux maîtres du
monde, et leur obéit sans les connaître. Depuis ce temps-là elle est
allée dépérissant, parce que les princes étant renfermés dans leurs
palais, les diverses parties d’un malheureux empire n’ont cessé de
se voir solennellement ravagées ; pouvaient-ils être contents de
leur sort, des sujets dont le maître avait besoin lui-même d’être
gouverné? Méprisée durant tant d’années, elle tomba dans
l’avilissement, et la République, défendue par un héros, lui
prodigua sa haine pour toute récompense. Notre prince répare tous
ces désastres; il accroît ses forces de celles des nations, et, de
combats en combats, s’achemine à la guerre que tu demandes; car, ce
qu’il y a de plus difficile, ce n’est pas de combattre l’ennemi,
c’est de parvenir jusqu’à lui. Pourquoi perdre le temps en discours
superflus? Majorianus arrive, il est déjà vainqueur. » |
Tali sermone
peractum
Concilium est, verbisque deæ famulante metallo,
Aurea concordes traxerunt fila sorores. |
Ainsi se termina l’assemblée et, le
métal précieux secondant les paroles de la déesse, les Parques
filèrent à l’empire des destins fortunés. |
370 Hos me, quos
cecini, Romæ Libyæque labores
Vota hominum docuere loqui; jam tempus ad illa
Ferre pedem, quæ fanda mihi vel Apolline muto
Pro Musis Mars vester erit. Conscenderat Alpes,
Rætorumque jugo per longa silentia ductus,
Romano exierat populato trux Alamannus,
Perque
Cani quondam dictos de nomine campos,
In prædam centum novies dimiserat hostes:
Jamque magister eras, Burconem dirigis illo,
Exigua comitante manu; sed sufficit istud,
380 Cum
pugnare jubes; certa est victoria nostris
Te mandasse acies; peragit fortuna triumphum,
Non populo, sed amore tuo; nolo agmina campo
Quod mittis paucos; felix te respicit iste
Eventus belli: certatum est jure magistri,
Augusti fato. |
Ces malheurs de Rome et de la Libye,
ce sont les vœux du genre humain qui m’ont appris à en retracer le
tableau. Il est temps d’en venir au sujet que je dois traiter.
Apollon fût-il sourd à ma lyre, votre courage me tiendra lieu de la
faveur des Muses. Le farouche Alaman avait franchi les Alpes, et
conduit ses troupes en silence sur les montagnes des Rhétiens; puis,
après avoir dévasté la campagne romaine, il s’était retiré, et avait
envoyé neuf cents hommes ravager les plaines qui tirent leur nom de
Canus. Déjà tu étais maître de la milice; tu envoies contre eux
Burcon accompagné d’un faible détachement; mais quelques soldats
suffisent, lorsque tu ordonnes de combattre; la victoire est
assurée, dès que tu as commandé la bataille; la fortune achève le
triomphe, non point à l’aide de tes gens, mais par amour pour toi;
je ne veux pas de bataillons ennemis, dans les plaines où tu envoies
quelques soldats; l’heureuse issue de cette guerre, on te la doit;
on a combattu avec la puissance d’un maître de la milice, avec le
destin d’un Auguste. |
Nuper post hostis aperto
Errabat lentus pelago; simul ordine vobis
Ordo omnis regnum dederat, plebs, curia, miles,
Et collega simul. Campanam flantibus austris
Ingrediens terram, securum milite Mauro
390
Agricolam aggreditur; pinguis per transtra sedebat
Vandalus, opperiens prædam, quam jusserat illuc
Captivo capiente trahi; sed vestra repente
Inter utrumque hostem dederant sese agmina planis,
Quæ pelagus collemque secant, portumque reducto
Efficiunt flexu fluvii. Perterrita primum,
Montes turba petit, trabibus quæ clausa relictis
Prædæ præda fuit, tum concitus agmine toto,
In pugnam pirata coit: pars lintre cavata
Jam dociles exponit equos, pars ferrea texta
400
Concolor induitur, teretes pars explicat arcus,
Spiculaque infusum ferro latura venenum,
Quæ feriant bis missa semel; jam textilis anguis
Discurrit per utramque aciem, cui guttur adactis
Turgescit zephyris; patulo mentitur hiatu
Iratam pictura famem, pannoque furorem
Aura facit, quoties crassatur vertile tergum
Flatibus, et nimium jam non capit alvus inane.
At tuba terrisono strepuit grave rauca fragore,
Responsat clamor lituis, virtusque repente
410
Ignavis vel parva furit; cadit undique ferrum,
Hinc tamen in jugulos. Hunc torta
falarica jactu
Præterit, ad mortem vix cessatura secundam:
Hunc conti rotat ictus, equo ruit aclide fossus
Ille, veruque alius; jacet hic simul alite telo,
Absentem passus dextram; pars poplite secto
Mortis ad invidiam vivit; partemque cerebri
Hic galeæ cum parte rapit, fortique lacerto
Dissicit ancipiti miserabile sinciput ense. |
Peu de temps après, l’ennemi errait
négligemment sur la surface des mers, depuis que tous les ordres de
l’empire, le peuple, le sénat, l’armée et votre collègue vous
avaient déféré le trône d’un commun accord. Au souffle de l’Auster,
il entre dans la Campanie, et attaque avec ses Maures le laboureur
plein de sécurité. Le gras Vandale, assis sur les bancs de ses
galères, attendait que ses esclaves apportassent, comme il l’avait
ordonné, le butin qu’ils auraient fait. Alors, soudain, vos soldats
se jettent entre les Maures et les Vandales, dans la plaine qui
sépare la mer des montagnes, et qui forme un port par un détour du
fleuve. La foule épouvantée gagne d’abord les montagnes; mais
renfermée loin de ses vaisseaux qu’elle a quittés, elle devient la
proie de ceux qu’elle voulait surprendre; puis ensuite, rassemblant
toutes leurs forces, les pirates s’unissent pour combattre. Les uns
font sortir des chaloupes leurs chevaux dociles, les autres cachent
sous une cuirasse de fer leurs corps bronzés; d”autres déploient
leurs arcs légers, et préparent des flèches qui porteront le venin
dans lequel elles furent trempées, et qui, d’un seul coup, doivent
frapper deux fois. Déjà le dragon aux replis tortueux court çà et là
entre les deux armées; son gosier s’enfle par les zéphyrs qui s’y
introduisent; sa large gueule simule sur la peinture la colère de la
faim; les vents donnent à la toile de la fureur, toutes les fois que
le souffle grossit son dos flexible, et qu’il ne peut plus contenir
l’air qui l’opprime. Mais la rauque trompette a fait retentir ses
accents graves et terribles; les clameurs des combattants se mêlent
au bruit des clairons; et soudain le courage enflamme les guerriers
même les plus lâches; le fer étincelle de toutes parts, mais les
traits des Romains portent seuls la mort. Celui-ci est traversé par
un javelot rapide, qui s’arrête à peine après avoir donné un premier
trépas; celui-là, renversé de son cheval par un coup de pique, roule
à terre. L’un tombe frappé d’une lance, l’autre percé d’un dard; un
autre est abattu par une flèche, pour avoir mal à propos écarté son
bouclier. Celui-ci a le jarret coupé, et la mort le dédaigne ;
celui-là fait jaillir avec le casque une partie de la cervelle, et,
d’un bras vigoureux, fait voler à ses pieds le devant de la tête
avec, son glaive à deux tranchants. |
Ut primum
versis dat tergum Vandalus armis,
420
Succedit cædes pugnæ discrimine nullo.
Sternuntur passim campis, et fortia quæque
Fecit iners trepidante fuga; mare pallidus intrat,
Et naves pertransit eques, turpique natatu
De pelago ad cymbam rediit. Sic tertia Pyrrhi
Quondam pugna fuit, cæsis cum millibus illum
Dentatus premeret; laceræ vix fragmina classis
Traxit in Epirum, qui Chaonas atque Molossos,
Qui Thracum, Macetumque manus per littora nostra
Sparserat, et cujus vires
Œnotria pallens,
430
Ipsaque, quæ petiit, trepidaverat uncta Tarentus. |
Aussitôt que le Vandale tourne ses
armes et prend la fuite, le carnage succède au combat. Les ennemis
tombent en foule dans la plaine; au milieu de la déroute, le plus
lâche se défend avec autant de courage que le plus vaillant
guerrier. Pâle de frayeur, le cavalier se précipite dans la mer,
dépasse les navires, puis ensuite, du sein des flots, regagne
honteusement une barque. Tel fut jadis le troisième combat de
Pyrrhus, lorsque, après lui avoir taillé en pièces plusieurs
milliers de soldats, Dentatus le pressait vivement. A peine s’il put
ramener en Epire les débris de sa flotte, celui qui gavait répandu
sur nos rivages les Chaoniens, les Molosses, les Thraces, les
Macédoniens; celui qui avait fait trembler l’Œnotrie et Tarente,
fertile en olives, par laquelle il avait été appelé. |
Hostibus
expulsis, campum qui maximus exstat
Jam lustrare vacat: videas hic strage sub illa,
Utrorumque animos; nullus non pectore cæsus,
Quisquis vester erat; nullus non terga foratus,
Illorum quisquis; clamant hoc vulnera primi
Prædonum tum forte ducis, cui regis avari
Narratur nupsisse soror, qui pulvere cæco
Clausus, et elisus pilis, vestigia turpis
Gestat adhuc probrosa fugæ; sic agmina vestra
440
Cum spoliis campum retinent, et Marte fruuntur. |
Les ennemis chassés, on se hâte de
parcourir ce vaste champ de bataille. On voyait là, sous les
monceaux de morts, quel avait été le courage des deux partis. Tous
tes guerriers, Majorianus, étaient frappés à la poitrine, tous les
ennemis étaient percés par derrière. C’est ce que crient assez haut
les blessures de ce chef des brigands, qui avait épousé, dit-on, la
sœur de l’avare Genséric; enseveli dans la poussière, les cheveux
arrachés, il porte encore les marques flétrissantes de sa honteuse
fuite. C’est ainsi que vos légions possèdent le champ de bataille
avec les dépouilles, et jouissent de la victoire. |
Interea duplici texis dum
littore classem
Interno superoque mari, cadit omnis in æquor
Silva tibi, nimiumque diu per utrumque recisus
Apennine latus, navalique arbore dives,
Non minus in pelagus nemorum, quam mittis aquarum,
Gallia continuis quanquam sit lassa tributis,
Hoc censu placuisse cupit, nec pondera sentit,
Quæ prodesse probat: non tantis major Atrides
Carpathium texit ratibus, cum Doricus hostis
450
Sigæas rapturus opes, Rhœteia clausit
Pergama; nec tantæ Seston juncturus Abydo
Xerxes classis erat, tumidas cum sterneret undas,
Et pontum sub ponte daret, cum stagna superbo
Irrupit temerata gradu, turmæque frequentes
Hellespontiaco persultavere profundo.
Nec sic Leucadio classis Mareotica portu
Actiacas abscondit aquas, in bella mariti
Dum venit a Phario dotalis turba Canopo:
Cum patrio Cleopatra ferox circumdata sistro,
460
Milite vel piceo fulvas onerata carinas,
Dorida diffusam premeret Ptolemeide gaza.
Hoc tu non cultu pugnas, sed more priorum,
Dite magis ferro, merito cui subjacet aurum
Divitis ignavi: tales ne sperne rebelles,
Et si non acies, decorant tamen ista triumphos. |
Cependant tu équipes une flotte sur
les rivages des deux mers, d’immenses forêts tombent devant toi,
prêtes à couvrir la plaine liquide ; trop longtemps dépouillé sur
l’un et l’autre flanc, ô Apennin, si riche en bois propres à la
marine, tu n’envoies pas dans la mer moins d’arbres que d’eaux. La
Gaule, toute fatiguée qu’elle est par des impôts continuels, paie
volontiers ce tribut, et ne regarde pas comme un fardeau ce qu’elle
croit devoir être utile à la patrie. Le grand Atride ne couvrit pas
d’autant de navires la mer Carpathienne, lorsque le Dorien, brûlant
d’enlever les richesses de Sigée, vint investir Pergame. Xerxès,
voulant unir Sestos à Abydos, n’avait pas une flotte aussi
considérable, lorsqu’il domptait les ondes rebelles, et qu’il
cachait la mer sous un pont; lorsque, d’un pas superbe, il traversa
les fleuves profanés, et que ses nombreux escadrons marchèrent sur
les abîmes de l’Hellespont. La flotte maréotique ne couvrit point
ainsi les eaux d’Actium au port de Leucade, lorsque, pour la guerre
d’un époux, des soldats, prix de l’hymen, accouraient de Canope;
lorsque la fière Cléopâtre, au son du sistre de la patrie, faisait
voguer ses vaisseaux d’or, chargés de soldats au teint couleur
d’olive, puis, avec les richesses de Ptolémée, poursuivait les Grecs
épouvantés. Ce n’est point avec un luxe pareil que tu combats, ô
César; mais, suivant la coutume des premiers Romains, le fer était
ta richesse, le fer que l’on a raison de préférer à l’or du riche
sans courage. Ne méprise pas toutefois ces rebelles; s’ils ne font
pas la gloire d’un champ de bataille, ils décorent du moins un char
de triomphe. |
Nec me Lagæam
stirpem memorasse pigebit
Hostis ad exemplum vestri: namque auguror isdem
Regnis fortunam similem, cum luxus in illa
Parte sit æqualis, nec pejor Cæsar in ista.
470
Ilicet aggrederis, quod nullus tempore nostro
Augustus potuit: rigidum septemplicis Istri
Agmen in arma rapis; nam quidquid languidus axis
Cardine
Sithonio sub Parrhase parturit ursa,
Hoc totum tua signa pavet:
Bastarna, Suevus,
Pannonius,
Neurus, Chunus, Geta, Dacus, Alanus,
Bellonothus, Rugus, Burgundio, Vesus, Alites,
Bisalta, Ostrogothus, Procustes, Sarmata, Moschus,
Post aquilas venere tuas; tibi militat omnis
Caucasus, et Scythicæ potor Tanaiticus undæ.
480 Quid
faciat fortuna viri? quascunque minatur,
Has tremuit jam Roma manus: modo principe sub te
Ne metuat, prope parva putat, nisi serviat illi,
Quod timuit regnante alio. Jam castra movebas,
Et te diversis stipabant millia signis:
Obsequium gens una negat, quæ nuper ab Istro
Rettulit indomitum solito truculentior agmen,
Quod dominis per bella caret, populoque superbo
Tuldila plectendas in prælia suggerit iras.
Hic tu vix armis positis, iterum arma retractas. |
Et je ne me repentirai pas d’avoir
comparé la race de Lagus à votre ennemi; j’augure que la fortune des
deux empires sera la même, puisqu’en Afrique le luxe n’est pas moins
grand que jadis, et que Rome possède un prince, digue rival
d’Auguste. Tu entreprends ce que nul empereur n’a pu tenter encore
de notre temps. Tu entraînes aux combats le soldat aguerri de
l’Ister aux sept bouches. Tous les peuples qui habitent le pôle
glacé vers la région de la Thrace, sous la grande Ourse, tous ces
peuples redoutent tes étendards. Le Bastarna, le Suève, le
Pannonien, le Neurus, le Chun, le Gète, le Dace, l’Alain, le
Bellonothe, le Rugien, le Burgunde, le Vésus, l’Alites, le Bisalta,
l’Ostrogoth, le Procrustes, le Sarmate, le Moschus, sont venus à la
suite de tes aigles; pour toi combat tout le Caucase, et le Scythe
qui boit l’eau du Tanaïs. Que fera la fortune d’un Genséric? Rouie a
pu trembler autrefois devant les peuples dont elle le menace;
aujourd’hui que tu es son chef, bien loin de craindre, elle, regarde
même comme peu de chose si elle ne fait pas fléchir ceux qu’elle
redouta sous le règne d’un autre. Déjà tu marchais au combat, des
milliers de peuples te suivaient avec leurs étendards divers; une
seule nation refuse de t’obéir; depuis peu, plus farouche que de
coutume, elle avait ramené des bords de l’Ister ses indomptables
bataillons, que les guerres ont privés de leurs chefs; Tuldila
excite au combat ce peuple superbe qui doit être puni. Alors, des
armes que tu as à peine déposées, tu es forcé de les reprendre. |
490 Bistonides
veluti Ciconum cum forte pruinas
Ogygiis complent thyasis, seu Strimonos arvis,
Seu se per Rhodopen, seu qua nimbosus in æquor
Volvit Hyperboreis in cautibus Ismarus Hebrum:
Dat somno vaga turba, simul lassata quiescunt
Orgia, et ad biforem reboat nec tibia flatum.
Vix requies: jam ponte ligant, rotat enthea thyrsum
Bassaris, et maculis Erythrææ nebridos horrens,
Excitat Odrysios ad marcida tympana mystas.
|
Ainsi, lorsque les Bistonides, dans
les plaines glacées des Ciconiens, célèbrent des danses en l’honneur
de Bacchus, soit que leur troupe vagabonde s’abandonne au sommeil
près du Strimon, ou sur le Rhodope, soit qu’elle dorme dans les
lieux où l’Ismare, couvert de nuages, roule l’Hèbre vers la mer
parmi les rochers Hyperboréens; tandis que les Ménades fatiguées se
reposent, et que l’on n’entend plus les sons retentissants de la
flûte à deux trous, à peine ont-ils un moment goûté les douceurs du
repos .............. soudain la Bacchante agite son thyrse avec
fureur, et, couverte de la peau tachetée d’un chevreuil d’Erythrée,
presse les Odrysiens, initiés aux mystères, de reprendre leurs
tambours détendus. |
Tu tamen hanc
differs pœnam, sed sanguinis auctor
500
Majoris, dum parcis, eras: non pertulit ultra
Hoc pro te plus cauta manus, vestrumque pudorem
Sprevit pro vobis; primi cadit hostia belli,
Quisque rebellis erat; prædam quoque dividis illis,
Mens devota quibus fuerat, quæ territa servit
Exemplo, gaudet pretio. |
Cependant, tu diffères le châtiment
des rebelles; mis ta modération va leur devenir funeste. Une troupe
plus avisée, ne souffrant plus leurs insultes, se charge du soin de
te venger, et dépasse les bornes de ta retenue; tous les rebelles
tombent victimes du premier combat. Tu partages le butin avec ceux
qui étaient dévoués à ta cause; c’est une leçon pour eux, ils se
soumettent, et jouissent de la récompense. |
Pharsalica
Cæsar
Arva petens, subitas ferro compescuit iras:
Sed sua membra secans, et causa mole coactus,
Flevit quos perimit; vestris hæc proficit armis
Seditio; quodcunque jubes, nisi barbarus audit,
510 Hic
cadit, ut miles timeat. Jam tempore brumæ
Alpes marmoreas, atque occurrentia juncto
Saxa polo, rupesque vitri, siccamque minantes
Per scopulos pluviam, primus pede carpis, et idem
Lubrica præmisso firmas vestigia conto.
Cœperat ad rupis medium, quæ maxima turba est,
Interno squalere gelu, quod colle supino
Arctatis conclusa viis, reptare rigenti
Non poterat revoluta solo; |
César, marchant aux plaines de
Pharsale, réprima par le fer une sédition subite ; mais, s’il mutila
se propres membres, forcé par la gravité des motifs, il pleura pour
les hommes qu’il immolait; cette sédition devint favorable à tes
armes; si le barbare se montre rebelle à tes ordres, il périt, et le
soldat apprend à te craindre. Au milieu des rigueurs de l’hiver, à
travers les Alpes couvertes de neiges, à travers ces rocs voisins
des cieux, ces masses vitrifiées, ces glaçons suspendus qui menacent
le voyageur, tu marches le premier à pied, et tu raffermis tes pas
glissants, à l’aide d’un fer recourbé sur lequel tu t’appuies. Vers
le milieu des montagnes, la plus grande partie de ton armée éprouve
les atteintes d’un froid excessif; le soldat, resserré en des routes
étroites, dans une pente rapide, s’efforce en vain de gravir, il
recule, il tombe sur le sol glacé. |
Fors unus ab
illo
Agmine, canentem cujus rota triverat Istrum,
520
Exclamat: Gladios malo, et solemne quieta
Quod frigus de morte venit; mea torpor inerti
Membra rigore ligat; quodam mihi corpus adustum
Frigoris igne perit; sequimur sine fine labori
Instantem juvenem; quisquis fortissimus ille est,
Aut rex, aut populus, castris modo clausus, aprica
Vel sub pelle jacet: nos anni vertimus usum.
Quod jubet hic, lex rebus erit; non flectitur unquam
Acceptis, damnumque putat, si temporis iras
Vel per damna timet; qua dicam gente creatum,
530 Quem
Scytha non patior? cujus lac tigridis infans
Hircana sub rupe bibit? quæ sustulit istum
Axe meo gravior tellus? en vertice summo
Algentes cogit turmas, ac frigora ridet,
Dum solus plus mente calet; cum classica regis
Arctoi sequerer, Romani principis arma,
Cæsareumque larem luxu torpere perenni
Audieram: dominos nil prodest isse priores,
Si rex hic quoque fortis erat. |
Alors, un de ces guerriers dont le
char avait foulé cent fois les glaces de l’Ister, s’écrie: « Je
préfère les épées et le froid solennel qui vient d’une mort
tranquille; une fatale torpeur enchaîne tous mes membres raidis et
inertes; mon corps succombe sous les rigueurs de l’hiver. Nous
suivons toujours un jeune héros avide de dangers; tout généreux
guerrier, ou roi, ou soldat, renfermé maintenant sous sa tente,
goûte les douceurs du repos. Nous renversons l’ordre des saisons. Ce
qu’ordonne Majorianus sert de loi à la nature : rien ne peut
l’arrêter dans ses entreprises; il regarde tomme un temps perdu les
heures que l’âpreté du froid lui dérobe. Dans quelle contrée
dirai-je qu’il est né, celui que je ne peux suivre, moi Scythe? De
quelle tigresse d’Hyrcanie a-t-il sucé le lait? Quelle terre plus
dure que la mienne a pu lui donner le jour? Voilà que sur le sommet
des Alpes il conduit ses légions glacées et se rit du froid, tant
son âme renferme d’ardeur! Quand je suivais les étendards du roi du
Nord, on me disait que les soldats romains, que les empereurs
s’énervaient dans le luxe et la mollesse. Qu’ai-je gagné à quitter
mes premiers maîtres, puisque celui-ci les surpasse en valeur? » |
Majora
parantem
Dicere, de scopulo verbis accendis amaris. |
Il allait en dire davantage, lorsque,
du haut de la montagne, tu l’animes par ces reproches amers: |
540 Quisquis es,
oppositi metuis qui lubrica clivi,
Frange cutem pendentis aquæ, scalproque levata
Sit tibi lympha gradus, turpes depone querelas;
Otia frigus habent: nunquid mihi membra biformis
Hylæi natura dedit? num Pegasus alis
Adjuvit quidquid gradior? pennasque volanti
Dat Calais Zetusque mihi, quem ninguida cernis
Calcantem jam dorsa jugi? vos frigora frangunt,
Vos Alpes; jamjam studeam pensare pruinas,
Æstatem sub Syrte dabo. |
« Qui que tu sois, qui crains les
sentiers glissants des Alpes, brise la surface des neiges glacées et
suspendues; avec cela forme-toi des degrés ; cesse tes plaintes
honteuses ; les oisifs ressentent seuls les atteintes du froid. La
nature m’a-t-elle donné les membres du centaure Hylœus? Pégase
m’a-t-il prêté ses ailes pour m’aider quand je marche? Calaïs et
Zétus m’ont-ils donné les leurs, pour voler sur les sommets glacés
que ta me vois fouler aux pieds? Le froid, les Alpes brisent votre
courage; bientôt, je pourrai vous dédommager de ces frimas, je vous
ferai passer l’été dans les Syrtes. » |
Sic agmina
voce
550
Erigis, exemploque levas, primusque labores
Aggrederis quoscunque jubes; tum cætera paret
Turba libens, servit propriis cum legibus auctor. |
C’est ainsi que par la voix, par
l’exemple, tu relèves et ranimes l’ardeur de tes bataillons; tu
commences le premier les travaux que tu ordonnes. Alors tes troupes
obéissent volontiers, puisque celui qui dicte des lois ne craint pas
de se soumettre lui-même à ces lois. |
Qui tibi
præterea comites, quantusque
magister
Militiæ, vestrum post vos qui compulit agmen,
Sed non invitum? dignus qui cederet uni
Sylla acie, genio Fabius, pietate Metellus,
Appius eloquio, vi Fulvius, arte Camillus. |
Quels comtes n’avais-tu pas encore,
quel chef de milice, qui commandait sous tes ordres l’armée contente
de lui obéir! Il l’emporte sur Sylla en pénétration, sur Fabius en
génie, sur Métellus en piété, sur Appius en éloquence, sur Fulvius
en courage, sur Camillus en habileté. |
Si præfecturæ quantus moderetur honorem
Vir quæras, tendit patulos qua Gallia fines.
560 Vix
habuit mores similes, cui teste senatu,
In se etiam tractum
commiserat Ulpius ensem. |
Veut-on connaître quel homme est
revêtu de la dignité de préfet dans la vaste étendue des Gaules? A
peine s’il eut des mœurs aussi pures, l’homme à qui Trajan, aux yeux
des sénateurs, confiait son épée, cette épée tirée contre lui-même. |
Qui dictat
modo jura Getis, sub judice vestro
Pellitus ravum præconem suscipit hostis.
Quid loquar hic illum qui scrinia sacra gubernat?
Qui cum civilis dispensat partis habenas,
Sustinet armati curas, interprete sub quo
Flectitur ad vestras gens effera conditiones.
Quid laudare Petrum parvis temeraria Clio
Viribus aggrederis? cujus dignatur ab ore
570 Cæsar
in orbe loqui, licet et quæstore diserto
Polleat; attamen hic nuper, placidissime princeps,
Obside percepto, nostræ de mœnibus urbis,
Visceribus miseris insertum depulit hostem. |
L’ennemi couvert de fourrures, et qui
dicte maintenant des lois aux Gètes, se fait, par un homme affidé,
interpréter tes jugements. Que dirai-je de ton auguste secrétaire?
Il régit si bien les droits du peuple, veille avec tant de zèle aux
intérêts des armées, explique tes intentions d’une manière si juste,
qu’il fait passer par toutes tes conditions une nation barbare. Mais
pourquoi, Muse téméraire, avec si peu de force, essaies-tu de louer
Pétrus, lui par la bouche duquel César daigne parler à l’univers,
quoiqu’il ait un questeur éloquent? Néanmoins, Prince très clément,
ce questeur, en recevant des otages, repoussa loin des murailles de
notre malheureuse ville l’ennemi qui s’y était jeté. |
Et quia
lassatis nimium spes unica rebus
Venisti, nostris petimus succurre ruinis:
Lugdunumque tuam, dum præteris, aspice victor.
Otia post nimios poscit te fracta labores;
Cui pacem das, redde animum; lassata juvenci
Cervix deposito melius post sulcat aratro
580
Telluris glebam solidæ: bove, fruge, colono,
Civibus exhausta est; stantis fortuna latebat
Dum capitur, væ quanta fuit? post gaudia, princeps,
Delectat meminisse mali; populatibus, igni
Et si concidimus, veniens tamen omnia tecum
Restituis: fuimus vestri quia causa triumphi,
Ipsa ruina placet. |
Et puisque, au milieu de nos
désastres, tu nous es venu comme dernière espérance, remédie à nos
malheurs, nous t’en conjurons, et en passant, illustre vainqueur,
regarde ton Lugdunum abattu par de longues souffrances, il te
demande des jours de calme; toi qui lui donnes la paix, rends-lui le
courage. Quand le cou fatigué du taureau a quitté quelque temps le
joug de la charrue, il sillonne mieux ensuite le dur sein de la
terre. Notre ville n’a plus ni bœufs, ni moissons, ni colons, ni
citoyens. Florissante, elle connut peu son bonheur ; depuis qu’elle
est prise, elle sent l’étendue de sa perte. Une fois dans la joie, ô
Prince, on aime à se rappeler ses malheurs passés. Quoique les
ravages, les incendies nous aient abattu, ta présence néanmoins
rétablit toutes choses; puisque nous avons été la cause de ton
triomphe, nos ruines mêmes nous plaisent. |
Cum victor
scandere currum
Incipies, crinemque sacrum tibi more priorum
Nectet muralis,
vallaris, civica laurus,
Et regum aspicient capitolia fulva catenas:
590
Cum vestes Romam spoliis, cum divite cera
Pinges Cinyphii captiva mapalia
Bocchi:
Ipse per obstantes populos raucosque fragores
Præcedam, et tenui, sicut nunc, carmine dicam,
Te geminas Alpes, te Syrtes, te mare magnum,
Te freta, te Libycas pariter domuisse catervas:
Ante tamen vicisse mihi. |
Lorsque tu monteras en vainqueur sur
le char de victoire, et que, à la manière des premiers
triomphateurs, tu ceindras ton front d’une couronne murale et du
laurier civique, lorsque le superbe Capitole verra des rois
enchaînés à ta suite, lorsque tu enrichiras Rome des dépouilles
ennemies, lorsqu’on représentera pompeusement sur la cire les mettes
envahies de ce Bocchus Cinyphien, alors j’irai, devançant tes pas, à
travers la foule empressée, au milieu des bruyants applaudissements,
et mes vers, quoique faibles comme ceux-ci, proclameront que tu as
dompté et les Alpes;et les Syrtes, et la grande mer, et les
détroits, et les bataillons de Libye, mais avant tout que tu as
vaincu pour moi. |
Quod lumina
flectis,
Quodque serenato miseros jam respicis ore,
Exsultare libet: memini, cum parcere velles,
Hic tibi vultus erat, mitis dat signa venustas.
600 Annue,
sic vestris respiret Byrsa tropæis.
Sic Partus rectum fugiat, Maurusque timore
Albus eat: sic Susa tremant, positisque pharetris
Exarmata tuum circumstent Bactra tribunal. |
Puisque tu abaisses tes regards sur
nous, puisque tu contemples d’un œil favorable de malheureux
citoyens nous pouvons bien nous livrer à la joie. Il m’en souvient,
quand tu daignas me pardonner, tu avais ce même visage; ce front
calme et serein annonce ta clémence. Ecoute-nous, et puisse Byrsa
respirer par tes victoires, le Parthe fuir sans retour, le Maure
pâlir de crainte, Suse éprouver un juste effroi, et le Bactrien
désarmé, dépouillé de ses flèches, ajouter un nouveau lustre à la
splendeur de ton trône! |
NOTES DU CARMEN V.
6. —
Princeps consule crescit. — L’auteur a dit de
même, dans le Panégyrique d’Avitus, v. 13:
.............. Emerita trabeis diademata crescunt.
Les empereurs, qui regardaient toutes les dignités comme au-dessous d’eux,
pensaient néanmoins que le consulat non seulement pouvait aller avec leur
fortune, mais qu’il ajoutait même de l’éclat à leur dignité. Voilà pourquoi
Claudien disait, in Stilichonem, II, v.
288:
. . . . Titulumne levem, parvique decoris
Credimus, Augusti quo se decorare fatentur? -
Et ailleurs, in Eutropium, I, v. 486
......................................... Hunc adspicit unum
Aula magistratum; vobis patribusque recurrit
Hic alternus honos.
13. — Sederat
exerto. — Cette élégante prosopographie de Rome peut bien le
disputer à celle que fait Claudien, in Consulatum Probini et
Olybrii, v. 75-112. Que le lecteur compare.
50. —Fulminis
et lapidem. — Espèce de pierre précieuse, selon Pline, XXXVII, 9
et 10, cité parle P. Montfaucon, Antiq. expl. tom. II, p.
326. Le nom de cette pierre vient, peut-être, de
κεραυνος
fulmen, parce que c’est, dit-on, avec la
foudre, que tombe la ceraunia.
Claudien parle de cette pierre, Laus Serenœ,
v. 77:
................................ Pyreaœisque sub antris
Ignea flumineæ legere Ceraunia nymphæ.
Ruricius de Limoges, Ep. II, 14, écrivant à une
dame appelée Ceraunia, lui disait: « Ut possis, secundum nomen tuum, cum illa
beatorum turba vera splendere Ceraunia, et vocabuli tui auctor
existere. »
53. — Subito
flens Africa. — Cette prosopopée paraît, en
plus d’un endroit, imitée de Claudien, De Bello Gildonico,
v. 136. Le fonds est le même, les données se ressemblent; dans Claudien,
l’Afrique se plaint de la tyrannie de Gildon, et dans Sidonius elle réclame
contre l’oppression de Genséric.
77. — Scævola.
— Tout le monde connaît le fait historique arrivé l’an de R. 246, que désigne ce
passage, et dont le souvenir nous a été conservé par Tite-Live, II, 10; Denys
d’Halicarnasse, V, 21 ;Valère Maxime, III, 3; Florus, I, 10, etc. Martial, I,
22, a consacré à ce fait cette belle épigramme, que Sidonius avait certainement
sous les yeux :
Cum peteret regem decepta satellite dextra,
Ingessit sacris se peritura focis;
Sed tam sæva pius miracula non tulit hostis,
Et raptum flaminis jussit abire virum.
Urere quam potuit contempto Mutius igne,
Hanc spectare manum Porsena non potuit.
Major deceptæ fama est et gloria dextræ:
Si non errasset, fecerat illa minus.
Le dernier trait de cette pièce est surtout facile reconnaître dans le Plus
felix peccante manu du poète gaulois. (Note de C.
Breghot du Lut).
107. Martia
pollet Acincus. — Acincum, ou Acincus, ville de la Pannonie
inférieure, située sur les bords du Danube.
124. — Hypanim.
— Fleuve de la Scythie d’Europe.
124. — Peucem.
— Ile voisine de l’embouchure du Danube, selon Jornandès, De
Rebus Geticis, XVI.
125. — Jam rebus
parcere nati. — Un
pareil éloge pouvait être mal interprété; il était d’autant plus hardi que le
sens contraire de la phrase se présente tout naturellement.
126. — Livida
conjunx. — L’épouse d’Aétius. Voyez Grégoire de Tours, Hist.
II, 8.
134. — Absyrtum.
— Médée fuyait avec Jason; Æètes, son père, envoie Absyrte sur la trace du
navire qui fend les flots de l’Euxin, emmenant les Argonautes, la Toison et
Médée. Absyrte meurt; sa sœur le déchire de ses mains, et sème la plage côtoyée
par Jason de chairs livides et d’os brisés. Biog. univ.,
partie mythol., art. Médée.
154. — Anguis,
cervus, aper. — Sidonius rappelle encore le même fait au
Carmen XIII, v. 15-18. Le P. Sirmond rapporte, dans ses Notes, un
distique ancien, que Pithou croyait être de notre poète :
Cervus, aper, coluber, non cursu, dente, veneno
Vitarunt ictus, Majoriane, tuos.
154. — Non sic
libravit in hostem. — Alcon,
Ἄλκων,
un des fils d’Erechthée (Apollonius de Rh., Argon., I, 97,
et Proxène dans le Scholiaste des Argon.), était si habile archer, qu’un serpent
ayant enlacé de ses replis le corps d’un de ses enfants, il perça le reptile
sans entamer la peau de son fils. Il alla d’Athènes, sa ville natale, en Eubée,
où il fonda une ville que M. Raoul Rochette (Col. gr. II,
101) présume avoir été Erétrie. Il eut deux fils, Phalère qui fut un des
Argonautes, et Abas, un de ceux auxquels on attribue l’origine et le nom du
peuple Abante. Biogr. univ., partie mythol.
Valérius Flaccus, dans ses Argonautiques, I, 398, rappelle
ainsi le fait raconté par Sidonius:
Insequeris, casusque tuos expressa, Phalere,
Arma gens; vacua nam lapsus ab arbore parva,
Te quater ardenti tergo circumvenit anguis.
Stat procul intendens dubium pater anxius arcum.
On peut citer encore Manilius, Astronom. V, 299:
Quin etiam ille pater tali de sidere cretus
Esse potest,qui serpentem super ora cubantem,
Infelix, nati somnumque animamque bibentem,
Sustinuit misso petere ac prosternere telo.
Ars erat esse patrem: vicit natura periclum,
Et pariter juvenem somnoque et morte levavit.
161. —
Cessit Eryx Siculus. —
Eryx, fils de Vénus et de Butès, régna en Sicile, et donna au petit empire dont
il était souverain le nom d’Erycie. Ce fut un athlète célèbre au combat du
ceste. Il défiait tous ceux qui passaient dans ses états. Hercule fut du nombre.
Biogr. univ., partie mythol.
162. —
Therapnæa. — Pollux est surnommé l’Athlète de Thérapné,
parce qu’il naquit dans cette ville de Laconie, aussi bien que son frère
Castor et ses sœurs Hélène et Clytemnestre.
163. Stratus
Bebryciis Amycus. — Amycus, fils de Neptune et de la nymphe
Bithynis ou Mélie, et frère de Mygdon, un des antagonistes vaincus et tués par
hercule dans l’expédition des Argonautes (Apollodore, I,
ix, 20; Hygin, Fab.
XVII; Heinsius sur Ovide, Amours, III,
vi, 25), combattit Lycus, roi des Maryandynes, et l’eût vaincu
peut-être si Hercule ne fût venu au secours de son ennemi et n’eût battu ses
sujets, les Bébryces (nation de la Mysie intérieure.) Orgueilleux de sa force,
Amycus invitait tous les étrangers qui passaient par ses états à se mesurer avec
lui au combat du ceste. Tous y perdaient la vie. Lorsque les Argonautes
côtoyèrent la Mysie, ils reçurent d’Amycus le même défi. Pollux se chargea d’y
répondre, et bientôt il eut étendu sur la poussière le chef présomptueux.
Biogr. univ. Ibid.
Pollux est nommé l’Athlète de Thérapné, parce qu’il naquit dans
cette ville de la Laconie.
166. — Arcas.
— Parthénopée, fils de la belle Atalante, remporta le prix du tir aux jeux
Néméens. Stace, comme Sidonius, l’appelle Arcas, Thebaidos,
VI, 560: Arcada Parthenopœum.
168. — Horruit
Hippomenes. — Sidon. Carmen II, v. 494
177. —
Ledæum alumnum. —
Castor, fils de Léda.
178. — Juvenem,
Sthenobæa, tuum. — Bellérophon, pour qui Sthénobée, femme
de Prœtus, avait conçu une vive passion. Ne pouvant se faire écouter, elle
l’accusa auprès de son époux, non seulement d’en vouloir à l’honneur de la
reine, mais encore de méditer l’assassinat du roi qui le comblait de bienfaits.
Prœtus, n’osant se venger ouvertement, envoya Bellérophon, sous un faux
prétexte, à la cour du roi de Lycie, Iobate, son beau-père. Bellérophon était
chargé d’une lettre dans laquelle le roi de Corinthe demandait au prince lycien
de faire périr le porteur. De là le proverbe: Cave ne
litteras Bellerophontis feras. Iobate, après avoir donné dix
jours l’hospitalité la plus généreuse à l’exilé, ouvrit la lettre de son gendre
; docile à ses vœux, il pria Bellérophon de débarrasser le pays de la Chimère.
Tel était le nom qu’on donnait à un monstre énorme, fils de Typhon et d’Echidna,
qui réunissait à une tête et à un poitrail de lion la queue d’un dragon et le
corps d’une chèvre. Bellérophon reçut alors des mains de Minerve le cheval
Pégase, qu’elle-même avait dompté, et qui devait faire disparaître pour lui les
plus imminents dangers de l’expédition. Suivant quelques mythographes, c’est
Bellérophon lui-même qui s’empara de l’immortel coursier et qui le façonna au
joug. Ensuite, après avoir élevé un autel à Minerve, il s’élança sur le dos du
quadrupède ailé, et s’avança par les airs vers le séjour de la Chimère, sur
laquelle il fit pleuvoir à l’aise des flèches mortelles, et qu’il ne tarda pas à
voir expirer. Biogr. univ.
180. — Vulnus
cum sustulit unum tres animas. — Le poète, sans doute, a dit
tres animas, parce que le Chimère, comme nous venons de le voir,
réunissait à une tête et à un poitrail de lion la queue d’un dragon et le corps
d’une chèvre.
185. — Telamone
creatum. — Ajax, fils de Télamon.
189. — Pro
fasce Camillæ. — Voyez l’Enéide de Virgile, XI.
191. — Stridula
Pelidæ per Troilon. — Troïle, le plus jeune des
Priamides qui restèrent à Troie; il fut tué par Achille.
192. — Creontem.
— Etéocle et Polynice avaient succombé dans la guerre des sept chefs; Créon
reprit la régence, et défendit de donner la sépulture aux ennemis. Cet ordre ne
fut point exécuté; Antigone ensevelit Polynice son frère; et Thésée, sur la
prière d’Adraste, vint sommer Créon de lever la prohibition. Créon refusa
d’abord, puis se vit battu par les troupes athéniennes, et consentit à tout.
194. — Violatæ
Phœbados ultrix. — Lorsque Troie succombait, Cassandre,
épouvantée au milieu du massacre général, s’était réfugiée dans le temple de
Minerve. Ajax l’Oïlide l’arrache de l’autel qu’elle tient embrassé, lui fait
violence, puis, condamné à mort par les Grecs, il se dérobe au sort qui l’attend
en jurant solennellement qu’il n’est point coupable du crime qu’on lui impute.
Presque immédiatement les vainqueurs s’embarquent; une épouvantable tempête
soulève les flots et dévore les navires. Ajax s’arrache à la mort, et se sauve
sur un écueil qui domine les flots en courroux. « J’échapperai malgré les
Dieux! » s’écrie l’orgueilleux Locrien. A peine a-t-il proféré ce blasphème, que
Neptune, d’un coup de trident, partage en deux le rocher dont la chute entraîne
celle de l’audacieux naufragé: il meurt. Odyss. III, 145; et IV,
499. Selon Hygin, Fab. CIX, et Virgile, Eneid. I,
42, c’est Minerve même qui, pour venger Cassandre, emprunte le tonnerre à son
père et foudroie le héros. Biogr. univ., partie mythol., au mot
Ajax.
202. — Magnus
Alexander. — Les victoires de Philippe attristaient Alexandre.
Mon père, disait-il aux enfants de son âge, ne me laissera donc rien à faire?
Voyez Juvénal, Sat. X, 168-170 — Sénèque, Epist. 91
et 119; — Val. Max. VIII, 14, ext. 2; — Plutarque et Quinte-Curce ; —
Boileau, Sat. XII, v. 100.
203. — Nato.
— L’histoire nomme deux fils d’Aétius; il s’agit peut-être ici du premier,
appelé Carpilio, comme son aïeul maternel. La femme d’Aétius était fille de
Carpiio, an rapport de Grégoire de Tours, Hist. Franc. II,
8. Elle devait être d’origine scythe; sans cela, comment se plaindrait-elle,
dans Sidonius, de son exclusion au trône des Gètes?
205. — Parvus
Gaudentius. — C’est le second fils d’Aétius; il s’appelait comme
son aïeul paternel; Genséric, après la prise de Rome, l’emmena en Afrique avec
deux filles de Valentinien. Idatii Chron.
208. — Lædus.
— Le Lez. On croit que l’auteur a voulu désigner cette petite rivière qui prend
sa source sur le revers méridional des Cévennes, et qui se jette dans le golfe
de Lion. De Valois, Notit. Gall.
209. — Clitis.
— On ignore quel est ce fleuve. Voyez la Notit. Gall. aux
mots Clitis, Elaris, Atax, etc.
210. — Bella
timentes Turones. — Les habitants de la Touraine craignaient sans
doute le voisinage des Armoriques, peuple qui, aspirant depuis longtemps à
l’indépendance, ou faisait la guerre aux Romains, ou bien se voyait attaqué par
eux.
212. — Clodio,
etc. —Le P. Pétau, Sirmond et Dubos s’accordent à placer en l’année 445 la
bataille livrée par le jeune Anthémius à Clodion, près du bourg d’Héléna,
qu’on croit être la ville de Lens, dit M. Aug. Thierry dans ses Lettres sur
l’Hist. de France, p. 92. — Voyez Dubos, tom. I, p. 321-327.
218. — Ripæ
colle propinquo. — M. de Chateaubriand, Etudes tom. III,
p. 110, et M. Thierry, Lettres, p. 92, ont copié cette
description, comme un tableau de mœurs barbares fort curieux. M. de
Chateaubriand observe que « cette manière de vivre dans des voitures roulantes
était en usage chez beaucoup de peuples, et notamment parmi les Francs. »
231. —
Pelethronios. — Péléthrone ou Péléthronion, ville de Thessalie,
fut occupée par les Lapithes, ce qui leur fait donner par les poètes le nom de
Péléthroniens:
Frena Pelethronii Lapisthæ gyrosque dedere
Impositi dorso. »
Georg., III, 115.
231. — Semeleius
evan. — Ce nom fut donné à Bacchus, fils de Sémélé, soit
d’un autel qu’il avait sur la montagne d’Evan, soit du cri Evan! Evan!
que les Bacchantes faisaient entendre dans les orgies. Oh les appelait
Evantes; voyez l’Enéide, VI. St. Clément d’Alexandrie dit que les
prêtresses de Bacchus couraient hurlant Evan, nom d’Eve qui se laissa
séduire par le serpent. Ainsi, suivant cet auteur, il y aurait eu dans les
orgies quelques traces du péché de notre premier père.
232. — Æmonias.
— Le nom d’Æmonie fut donné à la Thessalie, selon quelques auteurs, par Æmonia,
fille de Deucalion et de Pyrrha, et selon d’autres, par Æmonius; fils de
Pélasgus.
236. — Æmatrium
Othrym. — Montagne de Thessalie; les Centaures
faisaient leur demeure sur l’Othrys. Ce nom d’Æmathie, province de la Macédoine,
a été donné quelquefois à toute la Macédoine et même à la Thessalie. Pharsale
était très éloigné de l’Æmathie propre, et cependant Lucain l’appelle
Æmathios campos.
238. — Monstra
domat. — Voyez sur cette peinture des guerriers francs, Thierry,
Lettres, p. 93.
263. — Hammon
ou Ammon. — C’est le plus ancien
des surnoms de Jupiter. On croit qu’il est formé du mot grec
ammos,
qui signifie sable; mais Diodore prétend qu’il vient d’un ancien
roi de Libye, appelé Ammon, qui le premier éleva dans ses états un autel ou un
temple à Jupiter. Ce dieu était représenté avec des cornes ou avec une tête de
bélier, pour s’être montré, dit-on, soit à Hercule, soit à Bacchus, sous la
forme de cet animal.
305. — Pincipis
interea. — Aétius fut tué par
Valentinien, en 454. Voyez son article dans la Biogr. univ.
327. — Latronis.
— Genséric, suivant le P. Sirmond.
336. — Autololis.
— Peuple de la Mauritanie; Lucain, IV, 677; et Silius Italicus, III, 306.
337. — Arzuge.
— Peuple de l’Afrique ; on ignore quelle position il occupait. Orose et St.
Augustin, dans ses Lettres, parlent des Arzuges.
337. — Nasamone.
— Peuple de la Libye; Lucain, IX, 443.
356. — Mea
Gallia, etc. Les Gaules, depuis la mort de Valentinien le Jeune,
étaient restées soixante-six ans sans voir de prince légitime. .
376. — Cani.
—Contrée de la Rhétie, que l’on croit être aujourd’hui le pays des Grisons. Amm.
Marcellin, XV.
385. — Nuper
post hostis. — D’après la description du lieu où Majorien
combattit les Vandales, le P. Sirmond pense que la bataille se livra dans une
plaine du pays de Sinuesse, qui s’étend depuis l’embouchure du Gariglian
jusqu’au Vulturne, et qui est borné d’un côté par la mer, de l’autre par le mont
Massique.
411. — Falarica.
— Sorte de javelot qu’on lançait avec l’arbalète contre les tours de bois, afin
d’y mettre le feu ; ce javelot était revêtu d’une filasse poissée qu’on
enflammait.
429. — Œnotria.
— L’Œnotrie est une contrée de l’Italie qui fut autrefois habitée par les
Sabins.
436. — Prædonum
ducis. — Savaron prétend, d’après Victor
d’Utique, que le chef des Vandales, qui fut tué dans ce combat, s’appelait
Sersaon et qu’il était parent de Genséric.
473. — Sithonio.
—Dans le sens de septentrional. La Sithonie était une contrée de la
Thrace.
474. — Bastarna.
— Peuple qui occupait le territoire actuel de la Podolie et de l’Ukraine.
475. — Neurus.
— Les Neuri étaient des peuples de la Sarmatie européenne, qui avaient,
dit-on, le pouvoir de se métamorphoser en loups et de reprendre ensuite leur
première forme, quand ils le voulaient. Cette allégorie est fondée sur ce que
ces peuples portaient des peaux de loups, et les quittaient, suivant le besoin.
476. —
Bellonothus. — Peuple de la Scythie. Valérius Flaccus, Argon.
VI.
477. — Bisalta.
— Peuple de la Macédoine, vers la Thrace.
497. — Bassariis. — Bacchante,
de Bassareus, nom de Bacchus, formé de l’hébreu
batzar, qui signifie vendanger.
553. — Magister
militiæ. — S’agit-il ici de Ridmer, qui fut préfet de l’Italie,
comme nous l’apprenons par les Novelles de Majorien, ou de Népotianus,
qui fut, d’après Idace, préfet des Gaules en la même année ? L’abbé Dubos
veut qu’il soit question du comte Egidius; tom. I, p. 446.
558. — Si
præfecturæ. — Peut-être l’auteur veut-il parler de Magnus, de
Narbonne; c’est, du moins, la conjecture du P. Sirmond.
561. — Commiserat Ulpius ensem.
— Trajan émit incapable de soupçons; sa vertu lui répondait de la fidélité de
ceux qui devaient lui obéir. Il fit preuve de cette noble confiance,
lorsque, en remettant à Suburanus l’épée de préfet du prétoire, il lui dit « Je
vous confie cette épée, pour l’employer à me défendre, si je gouverne bien;
pour la tourner contre moi, si je gouverne mal. »
588. — Vallaris
civica laurus. — On donnait cette couronne à celui qui le premier
montait sur les remparts des ennemis, ou qui forçait leurs retranchements.
590. — Cum
vestes Romam. — Quelques manuscrits portent
vesties, dit le P. Sirmond. L’auteur a donc manqué à la mesure
du vers, ou bien il a usé d’une licence, comme Fortunat qui écrit
fodent pour fodient,
livre IX.
591. Bocchi.
— Le poète donne le nom de Bacchus à Genséric, parce que ce barbare possédait
encore les états d’un ancien roi nommé Bacchus. « Je pense, dit Billardon de
Sauvigny, que le nom de Bacchus était un nom de dignité. Ainsi, en nommant
Genséric Bacchus, c’est comme si l’on disait Genséric souverain. »
|