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Les comices

 

vote aux comices

Définition

COMITIA. Ce mot est formé de co, cum ou con et de ire : le comitium est donc un endroit de réunion et les comitia sont la réunion elle-même ou les personnes rassemblées. Dans la constitution romaine les comitia sont les réunions ou les assemblées ordinaires et juridiques du peuple. Elles sont distinctes des conciones et des concilia ou, selon la définition plus stricte de Messala, les comitia sont ces assemblées réunies par un magistrat pour voter sur un sujet. Cette définition ne comprend pas toutes les comitia, puisque lors des comitia calata on ne met rien au vote, on annonce simplement certaines choses au peuple ou on le prend à témoin pour certains actes solennels, mais à cette exception près la définition est juste. 

Sortes d'assemblées

A Rome, tous les pouvoirs du gouvernement sont répartis  entre le sénat, les magistrats et le peuple dans ses assemblées. Pour dire vrai, seul le peuple (populus) est le véritable souverain : il délègue son pouvoir aux magistrats et au sénat. Les magistrats en particulier ne peuvent accomplir aucun acte public sans l’autorisation du sénat et du peuple. Cependant le peuple ou populus souverain n'est pas le même à tout moment. Dans les temps les plus reculés de Rome le populus comprend uniquement les patriciens (ou patres), la plebs et les clients ne font pas parties du populus. Le populus original est divisé en trente curiae et l’ensemble de ces curiae ou les comitia curiata sont donc le seul ensemble qui représente le populus.  Une sorte de regroupement des patriciens et de la plèbe apparaît dans les comitia centuriata, créés par le Roi Servius Tullius. A partir de là le terme populus s’applique aux patriciens et aux plébéiens assemblés dans ces comitia centuriata. Mais Servius divise localement tout le territoire romain en trente tribus, qui tiennent leurs réunions dans des assemblées appelées comitia tributa, qui, au cours du temps, acquièrent le caractère d’assemblées nationales, de sorte que le peuple ainsi rassemblé est appelé aussi populus. On va donc examiner dans l'ordre la nature, le pouvoir et le travail de ces différentes assemblées. 

COMITIA CALATA

Les comitia calata sont présidés par le collège des pontifes.  Ils se réunissent sur le Captitole.  Ils n'ont qu'un rôle passif: écouter la description du calendrier, consacrer les flamines, témoigner sur les déclarations de testaments et écouter la déclaration solennelle des héritiers.

I. COMITIA CALATA. Les comitia calata et les comitia curiata sont les seules assemblées qui se réunissent et sont reconnues à Rome avant la période de Servius Tullius.  Comme le populus qui les compose est le même que le populus des comitia curiata, on peut aussi les appeler comitia curiata, mais ils diffèrent de ceux-ci par les personnes qui les président et le lieu de leur réunion. Les comitia calata se tiennent sous la présidence du collège des pontifes; ce sont ceux-ci qui aussi les convoquent. Ils ont le nom de calata (de calare, c.-à-d. vocare) parce que les serviteurs ou les domestiques des pontifes s’appellent calatores. Leur réunion se fait probablement toujours sur le Capitole devant la curia Calabra, qui semble être un bâtiment officiel des pontifes destiné à cette fin. Pour ce qui concerne les fonctions des comitia calata, tous les auteurs conviennent que le peuple en assemblée reste passif : on le réunit uniquement pour écouter ce qu’on lui dit et pour être témoins de ce qui s’y fait. 

1.  La première utilité de ces comices c’est la proclamation devant le peuple des calendes de chaque mois, le jour où tombent les nones et peut-être aussi les ides aussi bien que la nature des autres jours : savoir s’ils sont fasti ou nefasti, comitiales, feriae, &c., choses connues dans les premiers temps uniquement par les pontifes.
2.  La seconde fonction des comitia calata c'est la consécration des flamines, et, après l'exil des rois, celle du rex sacrorum.
3.  La troisième chose qu’ils traitent c’est le testamenti factio ou la ratification des testaments. Son but est probablement d'empêcher, après la mort du testator, un conflit sur ses dernières volontés puisque l'ensemble du populus en est témoin. Il est probable qu’à cette époque l’écriture n’est pas encore suffisamment connue et que l’on considère comme d’une importance primordiale d’avoir le populus entier comme témoin d’un tel acte, qui consiste peut-être en une déclaration orale. Le populus ne vote donc pas sur la validité ou la non-validité des dernières volontés, mais agit uniquement comme témoin. Ces assemblées, où le populus sert de témoin pour des dernières volontés se tiennent dans les premiers temps deux fois par an; mais cette coutume tombe vite en désuétude. 
4.  Les comitia calata traitent d’une quatrième chose : la detestatio sacrorum : acte plus que probablement lié à la testamenti factio, c.-à-d., une déclaration solennelle, par laquelle l'héritier est enjoint à reprendre les sacra privata du testator avec la réception de ses biens. 

On a déjà observé qu'à l'origine les comitia calata ne sont formées que des membres des curiae, de sorte que ce sont les mêmes qui forment les comitia curiata; mais d’après ce que dit Aulu-Gelle (eorum autem alia esse curiata, alia centuriata), il est clair qu'après la période de Servius Tullius, il doit y avoir deux sortes de comitia calata : l’une rassemblée par curies par un licteur et l’autre par centuries par un cornicen (sonneur de cor). Nous n’avons aucune information sur ce que font ces dernières, bien qu'il ne soit pas impossible que lors de celles-ci, les pontifes y fassent toutes les annonces concernant le calendrier parce que cela concerne tout le monde et non pas le populus seul; et il se peut que plus tard lors des calata centuriata on transmette les testaments des plébéiens devant l’assemblée du peuple et que lors des calata curiata, ils soient transmis devant l’assemblée des curies. 

LES COMITIA CURIATA

II. COMITIA CURIATA : ils sont bien plus importants que les comitia calata, puisque le populus ici n'est pas présent passivement, mais doit décider par son vote si une mesure qu’on lui présente doit être adoptée ou rejetée. Lorsque le populus représente d'abord l’ensemble des vrais citoyens, c.-à-d., les patriciens ou ceux qui sont dans les curiae, il n’y a que les membres des curiae, c.-à-d., les patriciens, qui ont le droit de participer à ces assemblées. On n’est pas d’accord si les clients des patriciens ont le droit de voter mors des comitia curiata; mais il est fort probable que, quand ils sont présents, ils ne le font qu’en temps qu’auditeurs et spectateurs. Les comices curiates sont convoqués, lors de la période royale, par le roi lui-même ou par son tribunus celerum, et en l'absence du roi par le praefectus urbi. Après la mort d'un roi les comitia sont dirigés par l'interrex.  Sous la république, le président est toujours un des hauts magistrats patriciens : un consul, un préteur ou un dictateur. Les comices sont convoqués par des licteurs ou par des hérauts. On vote par curies, chaque curie ayant une voix; mais dans un curie chaque citoyen de cette curie a sa propre voix et la majorité des voix dans une curie détermine le vote de toute la curie. Comme il y a trente curies, il est impossible d'obtenir un majorité simple, qui doit toujours être 16. On ne sait pas ce qui se passe quand il y a, sur un projet, il y en a 15 pour et 15 contre. Le nombre pair de 30 s’explique uniquement parce que le chiffre trois et ses multiples ont une connotation sacrée dans tout ce qui concerne la constitution. Il n’y a aucun règlement sur l’ordre de vote des curies, mais on voit que le vote de la première et qui s’appelle principium, est déterminé par le sort. Cependant on ne sait pas s’il y a d’autres conditions particulières concernant la façon de voter. Le président des comices curiates est toujours celui qui les convoque, c.-à-d., durant la période royale, le roi lui-même ou la personne qui le représente et l’assemblée se tient toujours dans le comitium. 

En ce qui concerne les pouvoirs et les fonctions des comitia curiata, il faut avant tout considérer, que, dans les premiers temps, aucune assemblée, quelle qu’elle soit, n’a le droit de prendre position, de présenter des amendements ou de discuter des qualités et des défauts des sujets qu’on leur présentent. Ils ne peuvent que les accepter ou les refuser, de sorte que toutes les propositions ne sont en fait que des rogationes (populus rogatur), que le peuple accepte par la formule uti rogas ou rejette par la formule antiquo. Ce qui est ainsi décidé devient une loi pour le roi et le sénat aussi bien que pour le peuple. Le peuple doit prendre des décisions sur ces différents point : l'élection des magistrats, y compris celle du roi lui-même, la transgression des lois, la paix et la guerre, la peine capitale pour des citoyens romains, et, enfin, certaines affaires concernant les curies et les gentes.  

1.  Nomination du roi et des magistrats

Durant la période royale, le seul magistrat qui concentre tous les pouvoirs des magistrats républicains est le roi. Il nomme tous les autres magistrats, sauf les questeurs, qui sont élus par le peuple. Pour élire un roi, l'assemblée, comme dans tout autre sujet, comprend uniquement les personnes proposées par le sénat par le biais du président de l'assemblée, c.-à-d., quand le sénat passe un décret concernant l'élection, les interreges déterminent parmi les candidats, celui qui est choisi et le proposent alors aux curies; (cf. INTERREX et REX).
Les chefs religieux, comme les Curiones et les Flamines Curales, sont élus aussi par les curiae ou au moins consacrés par elles. En 104 PCN, une loi de Domitien transfère la nomination de tout le collège des pontifes aux comices tributes.

2.  pouvoirs legislatifs

Des propositions de loi sont transmises aux curiae par le roi ou par le sénat : celles-ci peuvent les accepter comme loi ou les rejeter.  Comme lois de la période royale période il y a les leges regiae; leur nombre ne doit pas avoir été grand : la coutume et la religion consacrent et établissent fermement les principales règles de conduite sans qu’il y ait besoin de règlements légaux formels. 

3.  La peine capitale pour les citoyens romains

On dit que le droit de décider de la vie des citoyens romains (iudicia de capite civis Romani) est donné au populus par le Roi Tullus Hostilius; et avant la constitution de Servius Tullius ce privilège est naturellement du domaine des patriciens. Ce n’est pour eux rien d’autre que le droit d’appel à une sentence du roi ou du juge devant l'assemblée de leurs pairs. Quand Valerius Publicola modifie cette loi, il doit l’étendre aussi aux plébéiens. 

4.  la guerre et la paix

Le quatrième pouvoir de l’assemblée du peuple est celui de décider de la guerre et de la paix, mais il se peut qu’ils ne puissent l’utiliser que sur demande du roi.  Il n’y a aucun doute pour la déclaration de guerre; mais il n'y a aucun exemple dans la littérature que le populus ait conclu des traités de la paix; on n’en a aucune trace avant une période avancée de la république, de sorte qu’on peut présumer que dans les périodes anciennes la conclusion de la paix est du ressors du roi (ou des consuls) et du sénat, et que Denys, comme dans beaucoup d'autres exemples, reprend une coutume postérieure pour la placer antérieurement. 

5.  autres fonctions

En plus de ces fonctions importantes les curies en ont incontestablement beaucoup d'autres sur leur propre administration interne; et parmi celles-ci on peut mentionner, l’admission de nouveaux membres dans la curie, la cooptatio d’étrangers ou l'adlectio de plébéiens, sans le consentement de l'ensemble des curies. Aucune arrogatio (adoption)ne peut se faire sans l’accord des curies assemblées sous la présidence des pontifes. Le consentement des curies s’exprime dans ces cas-ci par le terme lex curiata. On doit remarquer que quand un magistrat (tel que le roi) proposé à l'assemblée est élu, le populus tient une deuxième réunion, au cours de laquelle on l’installe officiellement dans ses fonctions. Cette formalité s'appelle lex curiata de imperio, ainsi que le droit de tenir les comitia. Alors il est un magistratus optima lege ou optimo iure, c.-à-d., en pleine possession de tous les droits et privilèges de sa charge.  

REFORMES DE SERVIUS TULLIUS

Jusque Servius Tullius, les comitia curiata sont les seules assemblées populaires de Rome et ils gardent naturellement le pouvoir intact des droits décrits plus haut; mais la constitution de ce roi provoque un grand changement, en transférant les principaux droits qui étaient jusque là aux mains des curies et en les donnant à une nouvelle assemblée nationale ou comitia centuriata. Le pouvoir d'élire les magistrats, la décision de faire la guerre, la transgression des lois et la juridiction d’appel à l’ensemble du peuple du peuple romain, passent aux comitia centuriata. Mais tandis que les patriciens sont obligés de partager leurs droits avec les plébéiens, ils se réservent le droit très important de sanctionner ou de rejeter toute mesure prise par les centuries. Et indépendamment de leur droit de décider en dernier ressors sur ces questions, ils paraissent, pendant un certain temps du moins, exercer une puissance considérable dans plusieurs départements du gouvernement: ainsi, l’abolition de la royauté et l'établissement de la république sont décidées par les curies; ils décident aussi des biens du dernier roi et des récompenses à donner à ceux qui ont fourni des renseignements sur la conspiration. L’acceptation des décrets passés par les centuries s’exprime par patres auctores fiunt et jusque la lex Publica aucun décret des centuries ou des tribus ne peut devenir une loi sans cet accord. On doit remarque que tant que les curies ont existé elles gardent l'exercice de droits tels que le bien-être de leurs propres corporations et les rites religieux qui leur sont associés. 

COMICES CURIATES A LA FIN DE LA REPUBLIQUE

On va donner une liste des pouvoirs et des fonctions que les curies continuent à exercer à la fin de la république.  

1. Ils confèrent l'imperium et le droit de prendre les auspices sur des magistrats après leur élection; ceci se fait par la lex curiata de imperio. Ce droit, cependant, au cours du temps, devient formel, et durant la période de Cicéron, des personnes même peuvent trouver plus de trois augures pour déclarer qu'elles ont été présentes aux comitia curiata, qui leur ont conféré l’imperium alors qu’en réalité aucunes comices n’ont eu lieu. Ce fait montre qu’à ce moment-là peu de personnes s’intéressent à de tels comices ou à l'octroi de l'imperium qu’elles donnent. 

2. L'investiture de certains prêtres, tels que les Flamines et le Rex Sacrorum, bien que celle-ci se fasse dans les comices curiates appelés calata. Le curio maximus est plus que probablement consacré, sinon élu, dans les comices curiates. 

3. Les affaires internes des curies elles-mêmes et des familles reliées à elles; mais la plupart d'entre elles viennent seulement devant les comitia calata (voir ci-dessus). Les vraies comitia curiata deviennent une simple formalité dès la période des guerres puniques et la division antique en curies, perdant graduellement de son importance, tombe dans l’oubli: la place des patriciens est reprise par les nobiles ou les optimates et les comices deviennent une cérémonie vide de sens : au lieu des trente curies qui donnent leurs voix, la cérémonie est exécutée par trente licteurs. Les comices calata patriciennes continuent beaucoup plus longtemps, particulièrement pour des arrogationes, qui sous l'empire deviennent assez importantes. [ ADOPTIO. ]  

Comices centuriates

III. COMITIA CENTURIATA. Le but de la législation de Servius Tullius est d'unir les différents éléments qui constituent le peuple romain en un grand ensemble politique : le pouvoir et l'influence seront déterminés par la propriété et l'âge. Pour cela, il divise, dans son recensement, l’ensemble des citoyens romains en six classes selon leurs biens et en 193 centuries ou voix : les assemblées où le peuple donne son vote s’appellent les comitia centuriata. [ CENSUS. ]  Par ce moyen, Servius fait un mélange de timocratie et d’aristocratie; et les citoyens pauvres, bien qu'ils soient sur un pied d’égalité avec les riches, cependant ne peuvent pas exercer une grande influence sur des affaires publiques, parce que les classes les plus riches votent en premier lieu, et se elles se mettent d’accord entre elles, elles forment une majorité avant que les classes plus faibles ne soient invitées à voter. Pour mieux comprendre ces observations générales, il est nécessaire de faire un exposé sur le recensement institué par Servius et sur la façon de distribuer les votes parmi les multiples divisions du peuple.  
L’ensemble du peuple est conçu comme une armée (exercitus, ou, selon le terme plus ancien classis). Il est donc divisé en deux parties: la cavalerie (equites) et l'infanterie (pedites), bien qu'il ne soit pas nécessaire de supposer que les gens se réunissent en armes. L'infanterie est divisée en cinq classes, ou, comme le dit Denys, en six classes, parce qu’il considère l’ensemble du peuple, dont la propriété ne peut être reprise dans le cens de la cinquième classe, comme sixième. La classe à laquelle un citoyen appartient, détermine le tributum, ou impôt de guerre qu’il doit le payer, comme le service qu'il doit assurer dans l'armée et l'armure dont il se sert. Mais pour voter dans les comices, chaque classe est subdivisée en un certain nombre centuries (centuriae, probablement parce que chacune est conçue pour contenir 100 hommes, bien qu’au cours des siècles le nombre de personnes ait différé), une moitié comprend les seniores et l’autre les iuniores. Chaque centurie compte pour une voix, de sorte qu'une classe a autant de voix qu’elle compte de centuries. De manière semblable, les equites sont divisés en un certain nombre de centuries ou de voix. Les deux auteurs qui font autorité sur ces subdivisions sont Tite-Live et Denys. Le tableau en annexe montre le recensement aussi bien que le nombre de centuries ou de voix assignées à chaque classe et l'ordre dans lequel ils votent.

Les différentes classes selon Tite-Live et selon Denys d'Halicarnasse

Selon Tite-Live.

Selon Denys.

I. CLASSIS. Census: 100,000 asses. I. CLASSIS. Census: 100 minae.
  40 centuriae seniorum.   40 centuriae seniorum.
  40 centuriae iuniorum.   40 centuriae iuniorum.
  2 centuriae fabrum.
II. CLASSIS. Census: 75,000 asses. II. CLASSIS. Census: 75 minae.
  10 centuriae seniorum.   10 centuriae seniorum.
  10 centuriae iuniorum.   10 centuriae iuniorum.
      2 centuriae fabrum (une votant avec les seniores et l'autre avec les iuniores).
III. CLASSIS. Census: 50,000 asses. III. CLASSIS. Census: 50 minae.
  10 centuriae seniorum.   10 centuriae seniorum.
  10 centuriae iuniorum.   10 centuriae iuniorum.
IV. CLASSIS. Census: 25,000 asses. IV. CLASSIS. Census: 25 minae.
  10 centuriae seniorum.   10 centuriae seniorum.
  10 centuriae iuniorum.   10 centuriae iuniorum.
      2 centuriae de cornicinum et de tubicinum (une votant avec les seniores et l'autre avec les iuniores).
V. CLASSIS. Census: 11,000 asses. V. CLASSIS. Census: 12-1/2 minae.
  15 centuriae seniorum.   15 centuriae seniorum.
  15 centuriae seniorum.   15 centuriae seniorum.
  3 centuriae accensorum, cornicinum, tubicinum. VI. CLASSIS. Census: en dessous de 12-1/2 minae.
  1 centuria capite censorum.   1 centuria capite censorum.

Différences entre les deux tableaux

Selon Denys et Tite-Live, les equites votent en dix-huit centuries avant les seniores de la première classe; et par conséquent, il y avait selon Tite-Live au total 194 centuries et, selon Denys, 193. Le chiffre pair de 194 centuries donné par Tite-Live rend impossible une majorité absolue dans le comices et l’on suppose qu'il commet une erreur dans les trois centuries d’accensorum (soldats de réserve, surnuméraires), de cornicinum et de tubicinum, qu'il ajoute à la cinquième classe. Denys semble avoir raison et il est confirmé par Cicéron, qui donne quatre-vingt-seize comme minorité; mais à d'autres égards, Cicéron est en désaccord avec Tite-Live et Denys : cette difficulté ne sera probablement jamais résolue de façon satisfaisante, car le texte est corrompu. Les autres anomalies entre Tite-Live et Denys ne sont pas de grande importance. Elles consistent dans les places assignées aux deux centuriae fabrum, aux deux des cornicines et des tubicines, et dans le recensement de la cinquième classe. Pour ce dernier point, Denys est plus logique dans sa gradation et mérite d'être préféré à Tite-Live. Pour les places assignées aux quatre centuries, il est impossible de déterminer si Tite-Live ou Denys a raison. On peut seulement dire que Cicéron n’est d'accord avec aucune des deux : il place une centurie de fabri tignarii dans la première classe. 

Ainsi tous les citoyens romains, qu’ils soient patriciens ou plébéiens, s’ils ont une certaine quantité de biens, ont le privilège de participer et de voter dans les comices centuriates : il n’y a aucune exclusion sauf les esclaves, les peregrini, les femmes et les aerarii. Les iuniores sont tous les hommes de âgés de dix-sept à quarante-six ans, et les seniores, tous les hommes de quarante-six et plus. L'ordre du vote est tel que si les dix-huit centuries d’equites et les quatre-vingts centuries de la première classe se mettent d’accord, la question est réglée immédiatement, vu qu'on ne doit plus inviter les autres classes à voter. Le pouvoir par conséquent, bien que tous les citoyens romains semblent être sur un pied d’égalité dans ces comices, est cependant tout à fait aux mains des riches. 

Fonctions des comices centuriates

En ce qui concerne les fonctions des comices centuriates, on doit observer d’abord, que toutes les affaires traitées auparavant par les comices curiates, sont transférées par Servius aux comices centuriates, c.-à-d., ils reçoivent le droit d'élire les hauts magistrats, de faire des lois et de décider de la guerre, et aussi de la conclusion de la paix avec des nations étrangères.

(a) L'élection des magistrats. Quand le magistrat qui préside a consulté le sénat sur la liste des candidats qui se présentent, on passe au vote. Les magistrats élus par les centuries sont les consuls (d'où le nom de comitia consularia pour ces assemblées), les préteurs (comitia praetoria), les tribuns militaires à pouvoirs consulaires, les censeurs et les decemvirs. On trouve aussi des exemples de proconsuls élus par les centuries, mais ceci ne se produit que dans des cas extraordinaires. 

(b.) Législation. Le pouvoir législatif des centuries consiste d’abord à accepter ou rejeter une mesure qui leur est proposée par le magistrat qui préside sous forme de senatus consultum : l'assemblée n'a pas le droit de proposer une mesure législative mais votent seulement les résolutions du sénat telles qu’on leur présente. Quand une proposition est votée par les centuries elle devient une loi (lex). La première loi votée par les centuries, dont nous ayons connaissance, est la lex Valeria de provocatione. Les lois des douze Tables sont sanctionnées par les centuries. 

(c) La déclaration de guerre, sur la base d’un senatus consultum appartient aussi aux centuries et il y en a de nombreuses mentions. On croit généralement qu'ils décident également de la conclusion de la paix et des traités, mais Rubino prouve d'une manière satisfaisante que ce n’est pas le cas dans les premiers temps de la république et peut-être jusqu’à la paix de Caudium mais qu'on signait la paix par simple senatus consultum sans demander l’avis du peuple. 

(d) Le pouvoir politique le plus élevé. Les comices centuriates sont en premier lieu la cour d’appel la plus élevée (cf. APPELLATIO), et en second lieu, elles s’occupent de toutes les offenses commises contre l'état; par conséquent, de tous les cas de perduellio et de maiestas, et aucun cas impliquant la vie d'un citoyen romain ne peut être jugé par une autre cour. Ce dernier droit est rétabli ou introduit par la lex Valeria et Spurius Cassius est condamné par les comices centuriates. Il n'y a aucune raison de croire que les lois des douze Tables augmentent le pouvoir des centuries. Il semble que Servius Tullius, en conformité avec ses principes, a été obligé de constituer son assemblée nationale au même moment que la haute cour de Justice. 

Rôle des curies

Tous les pouvoirs des centuries énumérés ci-dessus doivent être approuvés, une fois votés, par les curies et c’est par cette seule approbation qu'ils deviennent valides et obligatoires. L'élection d'un magistrat ou le vote d'une loi, bien qu'ils se fassent sur la base d’un senatus consultum, exigent cependant l’approbation des curies. Mais, au cours du temps, l'assemblée supprime ce pouvoir des curies : cela devient une simple formalité, et, finalement, les curies sont obligées de donner à l'avance leur approbation aux décisions des centuries. C’est la lex Publilia de 337 qui l’officialise. Comme les centuries deviennent graduellement assez puissantes pour se passer de l’approbation des curies, elles acquièrent également le droit de discuter et de décider de sujets qui ne leur sont pas présentés sous forme de senatus consultum; c'est-à-dire, elles acquièrent le pouvoir de créer des règles. Quant à l’élection des magistrats, à l’origine les comices ne peuvent élire que ceux qui sont proposés par le président, qui lui-même est entièrement guidé par la décision du sénat; mais au cours du temps, le peuple affirme son droit d'obliger le président à proposer un candidat qui se présente sans l’approbation préalable du sénat. Ce changement intervient en 482. Dans des mesures législatives un senatus consultum est porté devant le peuple par le consul ou le sénateur qui est à la base de cette mesure, après avoir été affichée pendant dix-sept jours, pour donner au peuple l’occasion d’être mis au courant de la nature de la loi proposée. On ne sait pas si les comices exigent un senatus consultum quand ils agissent en tant haute Cour de Justice : nous n’avons dans les textes aucun exemple de senatus consultum à ce sujet. 

Date de réunion des comices centuriates

Les comices centuriates ne peuvent se tenir que lors des dies comitiales ou fasti : c'est durant ces jours que l'on peut légalement traiter des affaires avec le peuple. Le nombre de ces jours d'environ 190 par an. Durant les dies nefasti (c'est-à-dire les dies festi, feriati; cf. DIES) et, au début, aussi lors des nundinae, aucune assemblée ne peut se tenir jusqu'à ce que, en 287, la lex Hortensia décide de considérer les nundinae comme des dies fasti : dorénavant les comices peuvent se réunir aux nundinae, bien que cela arrive rarement. Pour voter des lois, les comices ne peuvent se réunir tous les dies fasti. Pour les élections les comices se tiennent chaque année à une période fixe, bien que le sénat et les consuls aient la possibilité, s’ils le souhaitent, de les tenir plus tôt ou plus tard. 

Lieu de réunion des comices centuriates

Le lieu de réunion des centuries est le campus Martius, qui contient les septa (enclos de vote) pour les électeurs, un tabernaculum pour le président et la villa publica pour les augures. Le président des comices est le magistrat qui les a convoquées : ce droit est le privilège des consuls, et, en leur absence, des préteurs. Un interrex et un aussi un dictateur, ou son représentant, le magister equitum, peuvent de même convoquer et présider les comices. Au début de la république, le praefectus urbi tient les comices lors de l'élection des premiers consuls. Les censeurs ne peuvent convoquer le peuple que pour le recensement et le lustrum. Dans les cas où l'assemblée est constituée en Cour de Justice, les magistrats inférieurs, après avoir obtenu la permission des consuls, peuvent aussi les présider. 

Déroulement des comices centuriates

Une des fonctions principales incombant au président, et qu’il doit exécuter avant de tenir les comices, est la consultation des auspices (auspicari). À cette fin, le magistrat accompagné d'un augure sort de la ville tôt le matin et choisit un tabernaculum ou un templum. Là l'augure commence ses observations et dit si les comices peuvent se tenir ce jour-là ou doivent être remises à un autre jour. On donne la réponse au magistrat : si les auspices sont favorables, le peuple se réunit : cela se fait en trois actes successifs et distincts:
le premier est la convocation générale à l’assemblée (inlicium). Au moment de cette convocation circum moeros ou de moeris, on souffle dans une trompette pour rendre le signal plus audible : certains auteurs disent que cela se passe sans inlicium.
Quand le peuple s’est réuni à ce signal, commence le second acte : l'accensus ou l’appel à la concionem ou conventionem; c'est-à-dire, à une assemblée régulière, et à la foule est alors séparée, se regroupant selon les classes et les âges.  Alors le consul apparaît et ordonne au peuple de venir aux comices centuriates : il mène tout l'exercitus - lors des comices, le peuple romain est toujours considéré comme exercitus - hors de la ville, au campus Martius. Dans les temps anciens un contingent occupe le Janicule quand le peuple est rassemblé au Champ de Mars, afin de protéger la ville contre une attaque soudaine des peuples voisins : sur le Janicule, un vexillum est levé pendant la durée de l’assemblée. Cette coutume continue d’être observée même au moment où Rome n'a plus rien à craindre des tribus voisines. Quand le peuple est régulièrement rassemblé, les débats commencent par un sacrifice solennel et une prière du président, qui alors s’assied sur son tribunal.  Le président alors ouvre l’assemblée en donnant au peuple la raison pour laquelle on l’a rassemblé et conclut son exposé par les mots velitis, iubeatis Quirites, par exemple bellum indici ou ut M. Tullio aqua igni interdictum sit.... Cette formule est la même dans tous les comices et l’exposé du président s'appelle la rogatio.

1.  Quand les comices se rassemblent pour une élection, le magistrat qui les préside, doit donner lecture des noms des candidats et peut exercer une influence en recommandant celui qu’il trouve le plus apte pour la charge en question. Il n'est cependant pas obligé de donner les noms de tous les candidats qui se sont présentés : par exemple, si un candidat n'a pas atteint l'âge légitime ou s’il sollicite une charge sans avoir été investi de celles qu’il aurait dû exercer auparavant ou s'il y a un obstacle légal; le président peut déclarer que si une personne, à qui il fait une objection, est élue, il ne validera pas son élection.

2.  Si l'assemblée est réunie pour voter une mesure législative, le président habituellement recommande la mesure ou il peut donner à d'autres, s'ils le désirent, la permission de parler en faveur ou contre cette mesure (concionem dare). Dans ce cas, cependant, il est habituel que les particuliers parlent avant le magistrat et les orateurs, jusqu'aux Gracques, en parlant tournent leur visage vers le comitium et la maison de sénat.

3.  Quand les comices agissent comme Cour de Justice, le président énonce le crime, propose la sanction à infliger au contrevenant et alors permet à d’autres personnes de défendre ou d’attaquer l’accusé. 

Vote

Quand l’assemblée a assez discuté sur le sujet proposé, le président invite le peuple à se préparer au vote par les mots: ite in suffragium, bene iuvantibus diis. On passe alors le ruisseau Petronia et on va aux septa. Si le nombre de citoyens présents à l'assemblée est trop petit, la décision peut être reportée à un autre jour, mais ceci est rare : une question est habituellement mise aux voix si chaque centurie est représenté par quelques citoyens. Pour la façon de voter dans les temps reculés, les avis sont partagés: certains pensent qu'ils se font viva voce et d'autres au moyen de calculi ou des deux façons, bien qu'il semble plus probable que ce soit avec des calculi (caillou pour voter)  Les leges tabellariae prévoient un changement en ordonnant que les votes se fassent par écrit. [ LEGES TABELLARIAE ] mais avant les leges tabellariae, les rogatores, qui plus tard rassembleront les votes écrits, se tiennent à l'entrée des septa et demandent à chaque citoyen son vote, le notent et s’en servent pour déterminer la voix de chaque centurie. Dans les assemblées législatives, l'électeur, probablement des temps anciens, montre sa désapprobation par le mot antiquo et son approbation par uti rogas. Lors des élections, le nom du candidat élu est remis au rogator, qui marque les voix favorables par les points qu’il met à côté du nom; par conséquent puncta ferre veut dire être élu.  L’usage du vote aux élections par tablettes avec le nom des candidats écrits sur celle-ci, est établi en 139, par la lex Gabinia tabellaria; deux ans plus tard L. Cassius introduit le même usage dans les comices agissant en tant que Cour de Justice, et, ensuite, on l'établit également dans des assemblées législatives et dans les cas où les comices jugent des personnes pour perduellio. [ LEGES TABELLARIAE ]. Les deux tablettes données à chaque personne pour voter sur des mesures législatives, sont marquées l’une d’un U et l'autre d’un A (uti rogas et antiquo). Aux élections, les citoyens ont des tablettes vierges pour pouvoir écrire le nom du candidat pour lequel ils vont voter. Dans les assemblées juridiques, chaque citoyen reçoit deux tablettes marquées A (absolvo) et C (condemno). Il y a peut-être une troisième tablette contenant les lettres N.L. (non liquet) mais on n’en est pas certain. Il y a dans le Champ de Mars des septa ou enclos (on ne sait pas s’ils existent dans les temps les plus reculés), dans lesquels on admet les classes de citoyens les unes après les autres pour voter.  Les premiers à entrer sont les dix-huit centuries d’equites, puis suit la première classe et ainsi de suite. Il est très rarement arrivé que la plus basse classe soit invitée à voter, car il n'y a aucune nécessité pour cela, à moins que la première classe ne soit pas du même avis que les equites. Après que les comices centuriates se soient fondus avec les comices tributes, avant chaque assemblée, un grand espace près de la villa publica est entouré d’une clôture et divisé en compartiments pour les multiples tribus. L’ensemble de cette clôture s'appelle ovile, septa, carceres ou cancelli. Dans les périodes suivantes on érige un bâtiment en pierre pouvant contenir l’ensemble des votants; il est divisé en compartiments pour les classes aussi bien les tribus que les centuries; l'accès à ces compartiments est constitué par des passages étroits appelés pontes ou ponticuli.  En entrant, les citoyens reçoivent leurs tablettes et quand ils les ont consultées dans les enclos, ils quittent celles-ci en passant par un pont ou ponticulus et ils jettent leur voix dans un coffre (cista) sous le regard des rogatores. Alors les rogatores rassemblent les tablettes et les donnent aux diribitores, qui les classent et comptent les voix, puis les remettent aux custodes, qui contrôlent les points marqués sur la tablette. L'ordre de vote des centuries est déterminé dans la constitution de Servius, décrite plus haut; mais après le réunion des centuries et des tribus, l'ordre est déterminé par le sort : cela a de l’importance parce qu’il arrive fréquemment que la voix de la première détermine le vote de la suivante. Le vote, naturellement, continue jusqu’à ce qu’une majorité soit assurée. Dans le cas des élections, le candidat élu est proclamé deux fois -d'abord par le praeco et ensuite par le président : sans cette renuntiatio l'élection n’est pas valide. Quand tout est terminé, le président prononce une prière et lève l'assemblée avec le mot discedite

Report de séance

On mentionne de nombreux cas où les démarches de l'assemblée sont perturbées au point de devoir reporter la séance à un autre jour. Ceci se produit :
1. quand on voit que les auspices sont défavorables ou quand les dieux manifestent leur mécontentement par la pluie, le tonnerre ou la foudre;
2. quand il y a intercession d’un tribun;
3. quand le soleil se couche avant la fin de la séance parce que on a comme principe que les auspices sont valables uniquement du lever au coucher du soleil;
4. quand il y a morbus comitialis, c.-à-d. quand un des citoyens rassemblés a une crise d’épilepsie;
5. quand on descend le vexillum sur le Janicule : signal auquel tous les citoyens doivent obéir;
6. quand une émeute ou une insurrection éclate en ville, comme cela se produit pendant la dernière période de la république.

Dans toutes ces cas, l'assemblée doit reprendre son travail un autre jour, parfois le lendemain. Il semble y avoir une seule exception lors de l'élection des censeurs : si tous les deux ne peuvent être élus le même jour, il est nécessaire de recommencer l'élection et si un seul est élu, son élection n’est pas valide. 

COMICES TRIBUTES

IV. COMITIA TRIBUTA. Ces assemblées sont créés par la constitution de Servius Tullius, qui divise le territoire romain en trente tribus locales. Cette division est à l'origine purement topographique, elle a peu ou pas d'importance pour l'état; mais au cours du temps, cette division locale devient une union politique, et l’ensemble des tribus devient un rival redoutable pour les comices centuriates. Savoir quelle partie de la population romaine a le droit de participer aux comices tributes dépend de la question de savoir si les tribus sont instituées comme organisation locale pour tout le peuple (patriciens et plébéiens) ou si elles ne sont prévues que pour les plébéiens. La plupart des auteurs modernes adoptent l'avis de Niebuhr, qui dit que les patriciens ne sont pas considérés comme membres des tribus et en conséquence, n'ont pas le droit de participer à leurs assemblées, jusqu'à la période de la législation des decemviri. On n’a pas de preuves évidentes de cela mais en tout cas on n’a aucun argument suffisant pour contredire la thèse de Niebuhr : le fait que des patriciens et leurs clients sont présents lors de la réunion afin de troubler les comices tributes et de les empêcher de prendre une décision, ne prouve pas qu’ils aient le droit du vote. Après la période des decemvirs, les patriciens ont le droit du vote dans les assemblées des tribus, qui alors sont convoquées par les plus hauts magistrats : cf. TRIBUS 

Rôle des comices tributes

L’ensemble des tribus n’a, à l'origine, qu’un pouvoir local; elles servent à collecter le tributum, et à fournir des contingents pour l'armée; ils peuvent aussi discuter des affaires internes à chaque tribu, telles que la construction ou la maintenance des routes, des puits et de choses semblables. Mais leur influence s’accroît graduellement parce que la plèbe est plus nombreuse que les patriciens, se développe rapidement et est dirigée par les tribuns actifs et énergiques : l'administration interne des tribus se développe graduellement pour prendre la forme de l’administration des affaires internes de la république, alors que les comices centuriates ne servent plus qu’à représenter l'état dans sa relation avec les pays étrangers. Pendant que la plèbe prend de plus en plus de force, elle réclame de plus en plus; chaque victoire lui donne des forces nouvelles et les comices tributes obtiennent graduellement les pouvoirs suivants: 

1. L'élection des magistrats inférieurs, dont la fonction est de protéger la plèbe ou de superviser les affaires des tribus. La lex Publilia de 471 donne aux comices tributes le droit d'élire les tribuns de la plèbe. De la même manière, les comices tributes élisent les édiles, bien que les édiles curules soient élus à un autre moment et sous la présidence d'un consul. Plus tard, les questeurs et les tribuns militaires, qui auparavant étaient élus par les consuls, sont nommés par les assemblées des tribus. Les proconsuls envoyés dans les provinces et la prolongation de l'imperium pour un magistrat qui est déjà dans une province, est une des fonctions attribuées aux tribus dans des périodes postérieures. Les magistrats inférieurs élus par les tribus sont: les triumviri capitales, les triumviri monetales, les curatores viarum, les decemviri litibus iudicandis, les tribuni aerarii, les magistri vicorum et pagorum, les praefecti annonae, les duumviri navales, les quinqueviri muris turribusque reficiendis, les triumviri comoniae deducendae, les triumviri, les quatuorviri, &c., mensarii, et pour finir, après la loi de Domitien en 104 PCN, aussi les membres des collèges des prêtres. Le pontifex maximus est élu par le peuple depuis les temps anciens. 

2. Le pouvoir législatif des comices tributes est, dans un premier temps, très insignifiant, parce que la seule chose qu’ils peuvent faire c’est passer des résolutions et faire des règlements sur des affaires locales des tribus mais qui n’ont aucun impact sur l’ensemble de l'état. Mais quand les tribus commencent à représenter véritablement le peuple, des sujets affectant le peuple entier leur sont amenés par les tribuns, qui, formulés comme résolutions, sont transmis au sénat, où ils sont sanctionnés ou rejetés. Cette pratique des comices tributes leur donne graduellement le droit de prendre l'initiative de mesures ou le droit de lancer des mesures, jusque à ce que ce droit soit reconnu en 449 par une loi de L. Valerius Publicola et M. Horatius Barbatus.  Cette loi donne aux décrets pris par les tribus le pouvoir d'une vrai lex, liant tout le peuple, si elle obtient l’agrément du sénat et du populus, c.-à-d., le peuple réuni en comices curiates et centuriates. D'abord les tribus agissent avec grande modération, discutant uniquement de sujets qui ont un rapport avec leur propres ordre ou avec des plébéiens, tels l'amnistie après le sécession, les magistrats plébéiens, l’usure et d’autres choses semblables. En 339, la lex Publilia décréte ut plebiscita omnes Quirites tenerent. Cette loi était un re-promulgation de celle de 449 ou bien elle contient des spécifications plus détaillées sur les cas où les plebiscita concernent toute la nation, ou, elle rend leur validité indépendante de l’acceptation des autres comices, de sorte que rien ne peut être exigé sans le consentement du sénat. En 287, la lex Hortensia est votée : elle semble n’être qu’une confirmation des deux lois précédentes, car elle est formulée presque dans les mêmes termes; mais il se peut aussi que cette lex Hortensia instaure des plébiscites indépendants de l’approbation du sénat, de sorte que dorénavant les comices tributes deviennent tout à fait indépendants dans leur pouvoir législatif. Il y a, après cette loi, dans beaucoup de cas, des senatus consulta précédant un plebiscitum, mais ce n’est pas pour cette raison qu’un senatus consultum soit nécessaire pour chaque plebiscitum : on doit distinguer les plebiscita qui concernent les droits du peuple et ceux qui touchent à l’administration de la république; les premiers sont toujours mentionnés sans senatus consultum, les derniers jamais. [ PLEBISCITUM ]. 

3. Le pouvoir juridique des comices tributes est beaucoup plus limité que celui des comices centuriates, puisqu'ils ne peuvent prendre connaissance que des offenses contre la majesté du peuple, alors que tous les crimes commis contre l'état passent devant les comices centuriates. Mais des patriciens qui offensent la plèbe ou ses membres, sont jugés et condamnés par les tribus. Voila encore une différence entre le pouvoir juridique des centuries et celui des tribus : les premières peuvent infliger la peine de mort, mais les dernières seulement des amendes. Dans certains cas les tribus peuvent condamner quelqu’un à l’exil; mais cet exil n'est pas le résultat d'un vrai verdict, mais seulement une mesure prise contre ceux qui pendant le procès partent en exil volontairement : pour les condamner à un véritable exil, on ajoute l’interdictio aquae et ignis. On ne sait pas quand les tribus ont acquis ce droit, parce qu’elles ne l’ont pas au début. Les offenses pour lesquelles on appelle quelqu’un devant les tribus : mauvaise conduite d'un magistrat dans l'exécution de ses fonctions, négligence dans sa charge, mauvaise gestion d'une guerre, détournement de l'argent public, ainsi qu’une variété d'offenses de particuliers telles que trouble de la paix publique, usure, adultère... Les comices tributes agissent également comme cour d'appel, par exemple quand une personne proteste contre une amende infligée par un magistrat. Les accusateurs dans les comices tributes sont les tribuns et les édiles. 

Lieu de réunion, déroulement...

Pour ce qui concerne le moment où les comices tributes se réunissent, on observe les mêmes règles que pour les comices centuriates. Ils se réunissent dans ou hors de la ville, mais pas à plus de 1000 pas, parce que le pouvoir des tribuns ne va pas plus loin.
Pour des élections on choisit habituellement le Champ de Mars, mais parfois aussi le forum, le Capitole ou le cirque Flaminius. Ce sont généralement les tribuns qui président aidés par les édiles: aucun sujet ne peut être débattu devant les tribus sans que les tribuns en aient pris connaissance et aient donné leur accord; même les édiles ne peuvent faire de propositions sans la permission des tribuns. Un de ceux-ci est tiré au sort ou par commun accord pour être le président; mais ses collègues habituellement doivent signer la proposition qu'il présente devant la plèbe. Comme les comices tributes deviennent de plus en plus des assemblées nationales, de hauts magistrats sont parfois aussi présidents, mais avec l’accord préalable des tribuns. On a quelques exemples de hauts magistrats présidant les comices tributes réunies pour légiférer; mais on voit les consuls et les préteurs souvent présider les élections des tribuns, des édiles et des questeurs; de même lorsque les comices tributes se réunissent en Cour de Justice. 

Le déroulement des comices tributes est moins formel et solennel que celui des comices centuriates. Pour des élections, les candidats doivent donner leurs noms et le président les communique au peuple. Quand il s’agit d’une mesure administrative, un tribun (l’auteur de la proposition s'appelle rogator et les autres des adscriptores) met le peuple au courant lors de conciones et cela lors des trois nundinae précédentes. C’est la même chose quand le peuple doit se réunir en Cour de Justice. On ne consulte pas les auspices pour des comices tributes, on se contente de la spectio (observation) et les tribune ont droit à l'obnuntiatio (l’annonce de mauvais présages). 
La convocation à ces assemblées est aussi moins solennelle que celle des comices centuriates, le tribun choisi pour présider une élection ou présentant une rogatio, invite simplement les citoyens par ses viatores, qui sont également envoyés dans les différentes parties du pays pour inviter les personnes vivant au loin. Lors de la réunion, il s'assied sur le tribunal entouré par ses collègues et transmet au peuple son projet de loi, le nom du candidat ou les met au courant de la nature de l'offense qu’ils devront juger, concluant avec les mots velitis, iubeatis Quirites. Le projet de loi n'est jamais lu par le tribun, mais par un praeco. Alors commencent les discussions, au cours desquelles on peut s’opposer ou supporter la mesure mais on doit demander aux tribuns la permission de parler. Quand la discussion se termine, le président dit au peuple ite ad suffragium comme pour les comices centuriates. Alors on se réunit en tribus, qui comme les centuries, votent dans des enclos (septa). C’est le sort qui décide laquelle des 35 tribus vote la première. Cette tribu s’appelle praerogativa ou principium (les autres s’appellent iure vocatae).  Le vote de la première tribu est donné par une personne de distinction dont le nom est mentionné dans le plebiscitum, s'il est à caractère législatif. La façon de rassembler les voix est, dans l'ensemble, la même que lors des comices centuriates. L’annonce des résultats des votes est la renuntiatio. S'il deux candidats ont le même nombre de voix, c’est le sort qui décide. Les circonstances d’ajournement d’une réunion et son report à un autre jour sont identiques à celles données pour les comices centuriates. Mais si les comices tributes sont réunies en Cour de Justice, l’ajournement équivaut à un acquittement. Si après les comices, les augures constatent qu’une formalité a été négligée, le décret de l'assemblée est invalidé et les personnes élues à une charge doivent démissionner. 

V. Les comices centuriates réunies aux comices tributes - La constitution de Servius ne bouge pas tant qu’il n’y a pas de grands changements dans la république, mais quand la monnaie et la norme de la propriété changent, quand la constitution de l’armée n’est plus la même et surtout quand les plébéiens deviennent un élément essentiel de l’état romain, il devient difficile de laisser les equites et la première classe avoir une grande prépondérance dans les comices centuriates. Il devient nécessaire de donner plus de pouvoir et d’influence à l’élément démocratique qui s’accroît et va encore le faire. D’où l’idée de fusionner les comices centuriates et les comices tributes pour n’en faire qu’une seule assemblée, mais ceci ne se réalise pas. Il y a un changement mais aucun auteur ne mentionne la date de ce changement et en quoi il consiste : on ne peut se baser que sur des allusions. D'abord la période du changement : à partir de Tite-Live et de Denys on peut dire que le changement n'est intervenu qu’après l’installation des 35 tribus, c.-à-d. après 241. Quelques auteurs modernes imaginent ce changement lors de la censure de C. Flaminius, en 220, parce que, dit-on, il rend la constitution plus démocratique; tandis que Niebuhr et d'autres datent le changement à la censure de Q. Fabius et P. Decius, en 304. Mais il est évident qu’on doit remonter plus haut parce que la (tribus) praerogativa est mentionnée dès 396 pour l'élection des tribuns consulaires (ce que ne peuvent faire les comices tributes seules et une centuria praerogativa est une chose inconnue). 

La question sur la manière dont s’est faite la fusion entre les deux comices est sujet à beaucoup plus de discussions et de doutes que la question du moment où elle s’est passée. L’avis le plus valable parmi tous ceux qui ont été avancés à ce sujet est celui de O. Pantagathus, qui a été très minutieusement expliqué par Göttling. Pantagathus croit qu’on a divisé les citoyens de chaque tribu en cinq classes de propriété, chacune se composant de seniores et de iuniores, de sorte que chacune des 35 tribus contienne 350 centuries, un nombre qui correspond à celui des jours d'une année lunaire romaine.  Selon ce nouvel arrangement, les cinq classes anciennes, divisées en seniores et iuniores, continuent à exister comme avant, mais dorénavant elles sont plus étroitement liées aux tribus, alors que les tribus ne sont que des divisions locales et entièrement indépendantes de la propriété. Cette union fait que les classes deviennent des subdivisions des tribus, et qu'en conséquence il y a des centuries dans les classes et dans les tribus. Chaque tribu comprend dix centuries, deux de la première classe (une de seniores et une de iuniores), deux de la seconde (une de seniores et une de iunores), deux de la troisième, deux de la quatrième et deux de la cinquième classe. Les equites aussi sont divisés selon les tribus et les centuries. Il semble qu’ils votent avec la première classe et même qu’ils sont inclus dans celle-ci au point d’être appelés centuries de la première classe.  Les centuries de cornicines, tubicines et fabri, qui ne sont plus mentionnées, cessent probablement d'exister en tant que centuries distinctes.
Pour la façon de voter, il y a deux avis: selon le premier, une tribu entière est choisie par le sort pour donner d'abord sa voix (10 centuries), et, selon la seconde, une centurie de la première classe est tirée au sort. Si on adopte le premier avis, les voix des dix centuries de la tribu sont données les unes après les autres et la majorité (six) constitue une majorité contre les 242 autres. C'est une absurdité inconcevable pour des Romains. On ne peut, raisonnablement, accepter ce vote par tribus sauf dans le cas où les dix centuries de chaque tribu votent de façon unanime : ce qui est très souvent le cas et quand il en est ainsi, la tribus praerogativa est certainement la tribu choisie par le sort pour donner son vote unanime en premier lieu.  Mais s'il y a divergence de vues parmi les centuries composant une tribu, la véritable majorité ne peut être établie que par tirage au sort pour savoir de quelle tribu les deux centuries de la première classe doit être choisies pour voter en premier lieu. La tribu, d'ailleurs, à laquelle ces centuries appartiennent, qui vote en premier lieu, est de même appelée tribus praerogativa. Dans ces deux centuries, les seniores donnent leurs voix avant les iuniores, et dans les documents on les appelle par le nom de leurs tribus, Galera iuniorum (les iuniores de la première classe de la tribu Galeria), Aniensis iuniorum, Veturia iuniorum. Dès que la praerogativa a voté, la renuntiatio commence et le reste des centuries délibère pour savoir s’ils votent de la même manière ou non. Cela fait, les centuries de la première tribu votent immédiatement, parce qu’on n’a pas le temps de faire voter les 350 centuries les unes après les autres comme on le faisait pour les 193 centuries des comices centuriates. 

De la décadence à la disparition

Ces comices centuriates combinées avec les comices tributes sont plus démocratiques bien que les comices centuriates continuent à se réunir et gardent leur pouvoir face aux comices tributes, même après que ces dernières eurent acquis leur très grande importance dans la république.
Pendant la période de corruption morale et politique à Rome, ces derniers sont manoeuvrés principalement par les tribuns et les citoyens riches et respectables ont peu d’influence sur eux. Quand les affranchis et tous les Italiens sont incorporés dans les trente-cinq tribus et quand la corruption politique atteint son apogée, on ne trouve plus aucune trace du caractère calme et modéré des comices tributes des périodes précédentes.  La violence et le corruption deviennent chose courante et la multitude des nécessiteux prête une oreille attentive à toutes les incitations des riches corrompus et des tribuns démagogues.
Sylla pendant un certain temps réussit à éliminer ces démarches odieuses : selon certains, il supprime les comices tributes, ou, selon d'autres, il les prive du droit d'élire les sacerdotes et leur enlève tous leurs pouvoirs législatifs et juridiques (cf. TRIBUNUS).
Mais la constitution, qui existait avant Sylla, est restaurée peu après sa mort par Pompée et d'autres, sauf pour la juridiction, qui est définitivement enlevée au peuple par la législation de Sylla.
Le peuple perd encore lors de la dictature de J. César : c’est lui-même qui décide de la paix et de la guerre en liaison avec le sénat. Il prend en mains aussi la totalité de la législation, avec comme corollaire l’influence sur les magistrats et les tribuns.  Le peuple ne garde plus que l'élection des magistrats; mais même ce pouvoir est fort limité, car César a le droit de nommer la moitié des magistrats, sauf les consuls, et, en plus, il recommande au peuple les candidats qu'il souhaite faire élire: et qui se serait opposé à son souhait?
Après la mort de César, on continue à tenir des comices, mais ils sont toujours plus ou moins les instruments obéissants dans les mains des gouvernants, dont les pouvoirs illimités sont reconnus et approuvés par ces mêmes comices.
Sous Auguste, les comices acceptent toujours les nouvelles lois et élisent les magistrats, mais leurs démarches sont une simple farce, parce qu’ils ne peuvent élire aucune autre personne que celle recommandée par l'empereur.
Tibère prive le peuple de ce reste de leur ancienne puissance et donne le pouvoir d’élire au sénat. Quand le Sénat a terminé l’élection, le résultat est annoncé aux personnes rassemblées dans les comices centuriates et tributes. Le pouvoir législatif est enlevé complètement aux comices et tombe entièrement aux mains du sénat et de l'empereur.
Caligula redonne aux comices la place qu’ils avaient sous Auguste; mais la réforme est vite abandonnée et on en revient au système de Tibère.
A partir de ce moment on peut dire que les comices cessent d'exister : toute la puissance souveraine autrefois possédée par le peuple est conférée à l’empereur par la lex regia [ REGIA. ] Les peuple se rassemble seulement dans le campus Martius pour recevoir l'information sur la nomination des magistrats, puis, finalement, cette annonce (renuntiatio) semble être supprimée.