Origine et fonctions des édiles

1.  Création des édiles plébéiens

Le nom de ces fonctionnaires proviendrait du fait qu’ils entretenaient le temple (aedes) de Cérès. Les aediles sont à l'origine au nombre de deux appelés aediles plebeii; ce sont des élus de la plèbe.  Cette charge est créée en même temps que celle des tribuns de la plèbe en 494. 

Fonctions des édiles plébéiens

Leurs fonctions semblent d'abord avoir été simplement ministérielles; ils sont les aides des tribuns sur des affaires que ceux-ci leur confient : parmi d’autres l’audition de causes de peu d’importance. 
Peu après leur création (446) ils ont la fonction de conservateurs des senatus consulta que les consuls jusqu'alors supprimaient ou changeaient arbitrairement.
Ils sont aussi les gardiens des plebiscita. 
D'autres fonctions leur sont graduellement confiées et il n'est pas toujours facile de distinguer certaines de leurs fonctions de celles des censeurs ni de distinguer les charges des édiles plébéiens de celles des édiles curules après l'établissement de l’édilité curule. 
Ils ont la direction générale des bâtiments sacrés et privés. Grâce à ce pouvoir ils s’occupent de l’entretien et des réparations des temples, curies etc. Ils vérifient que les bâtiments privés qui sont en ruines (aedes vitiosae, ruinosae) soient réparés par leur propriétaires ou détruits.
La supervision de l'approvisionnement et de la distribution de l'eau à Rome dépendent très tôt de l’administration publique. Selon Frontin c'est une fonction des censeurs; mais quand il n'y a aucun censeur c’est de la compétence des édiles. L’entretien de chaque source ou du ravitaillement est laissé à des entrepreneurs (redemptores) et tout ce qu’ils font doit avoir l'approbation des censeurs ou des édiles. 
L’entretien des rues et des trottoirs avec le nettoyage et le drainage de la ville sont de la compétence des édiles ainsi que l’entretien des cloaques.
Ils ont la charge de la distribution de blé à la plèbe : cette distribution est parfois gratuite, parfois le blé est vendu à un prix très bas. Cette distribution de blé à Rome ne doit pas être confondue avec la fonction d’achat à l’étranger qui est du ressort des consuls, des questeurs, des préteurs et parfois d’un magistrat extraordinaire comme le praefectus annonae. 
Les édiles vérifient si les terres publiques sont utilisées à bon escient et si on n’occupe pas illégalement les pâturages de l'état : ils ont le pouvoir de donner des amendes pour tout acte illégal. Les amendes sont utilisées pour paver des routes et pour d’autres choses d'utilité publique.
Ils ont la direction générale sur les achats et les ventes et par conséquent la surveillance des marchés, des choses exposées à la vente telles que les esclaves ainsi que la vérification des poids et mesures: cette partie de leur charge provient de la traduction grecque du mot édile : agoranomoi. 
Ils ont aussi la charge de vérifier l’arrivée en ville de nouvelles divinités ou religions, l'observance des cérémonies religieuses, les célébrations dans les anciens festins et fêtes. 
La direction générale de la police comprend l’obligation de faire régner l’ordre, la décence, l'inspection des bains et des maisons de divertissement, des maisons closes et des prostituées. 
Les édiles ont sous leurs ordres des officiers comme les praecones, les scribae et les viatores.

2.  Les édiles curules

Ils sont deux. A l’origine, ils sont choisis seulement parmi les patriciens, ensuite, un patricien et un plébéien, et enfin sans se préoccuper de leur appartenance. La charge d’édile curule est créée en 365 et, selon Tite-Live, parce que les édiles plébéiens ne voulaient pas donner leur accord pour que les ludi maximi durent quatre jours au lieu de trois. Alors on fait passer un senatus consultum suivant lequel deux édiles doivent être choisis parmi les patriciens. A ce moment, il y eut quatre édiles : deux édiles plébéiens et deux édiles curules.
Les signes distinctifs des édiles curules sont la sella curialis d'où provient leur titre, la toga praetexta, la préséance pour prendre la parole au sénat, et le ius imaginum. Uniquement les édiles curules ont le ius edicendi et le pouvoir de promulguer des édits. Les règles qui se trouvent dans ces édits servent de ligne de conduite pour tous les édiles.
En conséquence leurs édits servent principalement ou peut-être seulement uniquement de référence pour l’achat et la vente. Ils sont les initiateurs des actiones aediliciae : sont inclues dedans l’actio redhibitoria et la quanti minoris. Une grande partie des dispositions de l'édit des édiles se rattache aux achats et à la vente des esclaves. Les personnes des édiles plébéiens et curules sont sacrosancti.

3.  Ediles plébéiens - édiles curules : évolution de leurs fonctions

Il semble qu’après la création des édiles curules, les fonctions exercées auparavant par les édiles plébéiens sont presque toutes reprises indifféremment par tous les édiles. Cinq jours après leur élection ou leur entrée en charge ils tirent au sort ou se mettent d’accord entre eux sur la partie de la ville où ils exerceront leur fonction. Chaque édile est le seul dans son district à s'occuper du pavage et du nettoyage des rues. On peut supposer que c’est la même chose dans les autres matières.
Lors de l’organisations de Fêtes et de solennités publiques il y a une autre distinction entre les deux formes d’édilité. Plusieurs de ces Fêtes, comme celles de Flora et de Cérès sont organisées indistinctement par l'un ou l'autre des édiles mais les jeux plébéiens (plebeii ludii) sont organisés par les édiles plébéiens qui ont pour cela un budget. Les amendes prélevées sur les pecuarii et sur d’autres choses semblent entr’autres choses destinées à l’organisation de ces jeux.
La célébration des Ludi magni ou Romani, des Ludi scenici et des Ludi Magalesii ou Megalenses sont surtout du ressort des édiles curules et c'est à cette occasion qu’ils font des dépenses énormes pour satisfaire le peuple et obtenir des voix pour de futures élections. C’est à la fin de la deuxième guerre punique que les édiles ont commencé ces dépenses somptuaires et le phénomène s’est accru quand des gens se sont enrichis quand les armes romaines se sont emparées de la Grèce, l'Afrique et l'Espagne. Même le prodigalité des empereurs surpasse à peine celle des différents édiles curules sous la république : Jules César, puis le dictateur P. Cornelius Lentulus Spinther et surtout M. Aemilius Scaurus dont les dépenses ne se limitent pas à l’organisation des Jeux mais servent à des équipements collectifs publics comme la réparation des murs, des chantiers navals, des ports et des aqueducs.
Dion Cassius donne un exemple de Ludi Megalesii organisés par les édiles plébéiens mais ils sont organisés par senatus consultum et c’est une exception qui confirme la règle.

4.  Passage de 4 à 6 édiles (+ 2 édiles plébéiens : les Cereales)

En 45, Jules César propose d’élire deux édiles curules et quatre édiles plébéiens. Depuis lors tant que la fonction d’édile garde son importance six édiles sont élus tous les ans. Les deux nouveaux édiles plébéiens s’appellent Cereales et leur fonction est de s’occuper de l'approvisionnement en blé. Bien que leur fonction n’ait plus beaucoup d’importance après l'établissement du prefectus annonae par Auguste, ils perdurent encore durant des siècles au moins jusque Gordien.

5.  Elections des édiles

Les édiles appartiennent à la catégorie des minores magistratus. Denys déclare qu’à l’origine les édiles étaient élus par les comices curiates, mais c’est impossible. Les édiles plébéiens au début étaient élus par les comices centuriates, mais ensuite par les comices tributes, ainsi que les édiles curules. Mais il y a un vote séparé pour les édiles curules et les édiles plébéiens : les édiles curules sont élus en premier lieu. Il semble que, jusqu’à la lex annalis, un citoyen romain peut être candidat pour n'importe quelle charge, s’il a au moins vingt-huit ans. La lex annalis, qui est votée à l'initiative du tribun L. Villius Tappulus en 180, fixe l'âge qu’il faut pour occuper chaque charge. Le passage de Tite-Live ne mentionne pas les âges fixés par cette loi, mais il est possible de les trouver par divers passages d’auteurs romains : trente-six pour l’édilité. Du moins, c’est l'âge auquel un homme peut être candidat pour être édile curule, et il n’y a aucune raison que ce ne soit pas le même pour l’édile plébéien. Du temps de Cicéron, les édiles sont élus en juillet. L’élection se fait habituellement sur le champ de Mars (Campus Martius) et le magistrat qui les préside est le consul.

6.  Evolution de la fonction des édiles sous l'Empire

Les édiles existent sous l’empire, mais leurs pouvoirs diminuent graduellement et leurs fonctions sont exercées par de nouveaux magistrats créés par les empereurs. Après la bataille d'Actium, Auguste nomme un praefectus urbi, qui est chef de la police (fonction exercée avant par les édiles). Auguste enlève également aux édiles, pour l’exercer lui-même, la charge de superviser les cérémonies religieuses et de bannir de la ville tous les rites étrangers. Il assume également la supervision des temples : en faisant cela, il détruit l’édilité, en la privant de son ancienne fonction originelle. Ceci explique le fait mentionné par Dion Cassius : personne ne veut plus exercer une charge aussi méprisable. Auguste en est réduit à devoir convaincre des gens pour l’exercer : des personnes sont donc tirées au sort parmi ceux qui ont été questeurs ou tribuns et cela se fait plus d’une fois.
Le dernier exemple que l’on connaisse de la splendeur de l’édilité est l'administration d'Agrippa qui exerça volontairement cette charge et répara tous les bâtiments publics et toutes les routes à ses propres frais, sans prendre un franc au trésor public. L'édilité a cependant, à ce moment, perdu son véritable caractère. Agrippa a déjà été consul, avant d’accepter la charge d’édile, et ses dépenses somptueuses, lors de sa charge, marquent la fin de la splendeur de l’édilité. Auguste nomme les édiles curules pour éteindre les incendies et place une compagnie de 600 esclaves sous leurs ordres, mais les praefecti vigilum s’en chargent ensuite. Il crée de la même manière des curatores viarum pour superviser les routes près de la ville et les quatuorviri pour celles dans Rome. Les curatores operum publicorum et les curatores alvei Tiberis, également nommés par Auguste, dépouillent les édiles du peu qui leur reste comme fonction qu’on peut considérer comme honorable. Ils perdent également la surveillance des puits ou des sources, ainsi que celle des aqueducs. Ils sont, sous les premiers empereurs, une sorte de police chargée de réprimer la licence et le désordre public : ils inspectent les bains, les restaurants, les maisons closes et enregistrent les prostituées. Nous lisons que, sous Auguste et sous Tibère, des édiles recherchent les livres diffamatoires pour les brûler.