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ORIBASE.

COLLECTION MÉDICALE.

ΟΡΕΙΒΑΣΙΟΥ
ΙΑΤΡΙΚΩΝ ΣΥΝΑΓΩΓΩΝ

LIVRE IV.

ΒΙΒΛΙΟΝ Δ'.  

[DES ALIMENTS.]

texte grec uniquement

texte bilingue 

livre 1 - livre 2 - livre 3 - livre 5 

Table des matières

En mettant à la suite de chaque chapitre, quand il y a lieu, l'indication des passages parallèles, soit d'Oribase, soit des auteurs qui ont traité du même sujet que lui, et qui, pour la plupart, ont puisé aux mêmes sources, nous avons fourni aux lecteurs des renseignements utiles, et le moyen de retrouver la source des variantes non tirées des mss.

Tous les chap., pour lesquels le nom de l’auteur original n'est pas indiqué, proviennent de la même source que le chapitre antérieur qui porte cette indication.

1. De la préparation des aliments, tiré de GALIEN (cf. I, 8; p. 22 sqq.,et 13, p. 29, l. 3; infra 5, p. 280 sqq.)
De l'alphiton
(Aët. I, κριθή. Cf. I, 12, p. 26 et 27; infra 6, p. 281 sqq.), p. 257, 1. 9 sqq.
De l'alica (cf. I, 5, p. 16 sq.; infra 7 et 11, p. 292,1.3 sqq. et p. 302, 1. 1 et 10, sqq.), p. 258, 1. 7 sqq.
De la ptisane (Gal. De ptis. t. VI, p. 816 sqq.; Synops. IV, 34 et 36; Paul. I, 78; Anon. ed. Erm. 2. Cf. infra II, p. 302, 1. 3 sqq.), p. 259, 1. 10 sqq.
De la phacoptisane (Synops. IV, 34), p. 261, 1. 6 sqq.
De la courge (Aët. I; Synops. II, 34, Cf. 1, 35, p. 45, 1. 9; II, 69, p. 184, 1. 6 sqq.; infra II, p. 304, 1. 14 sqq.), p. 263, 1. 1 sqq.
Des navets (Aët. I; Paul. I, 76. Cf. II, 18, p. 83, 1. 10), p. 263, 1. 8.
De la racine de gouet (Aët. I. Cf. II, 1 9 et 20, p. 84 et 85), p. 263,1. 10 sqq.
De la racine d'asphodèle (Aët. I, voce κράμβη. Cf. II, 21, p. 85), p. 264, 1. 5 sqq.
De la cuisson des escargots (Aët. II, 183. Cf. II, 29, p. 95, l. II sqq.), p. 265, l. 1 sqq.
Substances animales propres à être salées (Aët. II, 149. Cf. II, 58, p. 154 sqq.), p. 265, 1. 5 sqq.
De la cuisson de la cervelle (Aët. II, 126. Cf. II, 35, p. 100, 1. 9 sqq.), p. 267, 1. 10 sqq.
Préparation de la sauce blanche (cf. II, 51, p. 116, L 5 sqq.), p. 267, L II sqq.
2. Sur le même sujet, tiré de RUFUS (Hipp. Affect. § 52, t. VI, p. 262; Athen. XIV,72)
3. Sur le même sujet, tiré de DIOCLES (Hipp. Vict. rat. II, S 56, t. VI,p. 566 et 570)
4. Du chou, tiré de MNESISTHEE de Cyzique
5. De la préparation du pain, tiré de DIEUCHES (cf. 1, p. 256, l. 4 sqq).
6. De l'alphiton (cf. I, p. 257, 1. 9 sqq.)
7. De la préparation des aliments (Synops. IV, 34-36)
8. De la préparation de l'amidon et des autres précipités (Diosc. II,123; Paul. VII, 3.- Cf I, 6, p. 17,1. 8 sqq.)
9. De la cuisson
10. De la préparation du petit millet, tiré de PHILOTIME
11. De la nourriture de ceux qui sont habituellement malades, tiré d'ANTYLLUS (Synops. IV, 36.-Cf. I, 7, p. 20,1. 3 sqq.; 8, p. 22, 1. 9 sqq.; 35, p. 44 sqq.; IV, 1, p. 258, 1. 8 sqq.; p. 259, l. 10 sqq.; 11, p. 292, 1. 3 sqq.; II, 3, p. 75; V, 14, p. 362, 1. 9)

 

1. DE LA PRÉPARATION DES ALIMENTS.

[Tiré de Galien.]

1. En mondant comme il faut le grand épeautre de qualité supérieure, on obtient le mets appelé tragos. 2. On fait du pain avec cette graine et avec le petit épeautre, ainsi qu'avec l'orge, après les avoir aussi mondés; car ils ont une pellicule à l'extérieur. 3. Si, après avoir moulu le froment, on sépare avec un tamis la partie la plus fine de la farine et qu'on fasse du pain avec le reste, on aura les pains appelés pains de son, tandis que les pains silignites et sémidalites se font avec la partie la plus pure de la farine. 4. Les pains de farine pure exigent une plus grande quantité de levure et une manipulation plus forte; ils ne doivent pas être cuits immédiatement après l'addition du ferment et après la manipulation; pour les pains de son, au contraire, il suffit d'une petite quantité de levure, d'une manipulation faible et d'un court espace de temps [entre la manipulation et la cuisson]. 5. De même les pains de farine pure ont besoin d'une cuisson plus prolongée, tandis que les pains de son exigent une cuisson plus courte. 6. Entre les pains les plus purs et les pains les plus impurs, il y a une distance assez considérable occupée par les degrés intermédiaires ; toutefois, il existe une espèce qui tient exactement le milieu entre les deux : c'est le pain appelé autopyre ou pain de ménage, fabriqué avec de la farine non tamisée, c'est-à-dire avec celle dont on n'a pas séparé la fleur du son. 7. L'alphiton le meilleur se fait avec de l'orge nouvelle modérément torréfiée; mais, à défaut d'orge semblable, on le fait aussi quelquefois avec les autres orges. 8. Tout alphiton bien préparé a une bonne odeur, mais le plus odoriférant est celui qu'on fait avec de l'orge nouvelle de qualité supérieure, dont l'épi n'est pas tout à fait sec. 9. Beaucoup de gens bien portants sont dans l'habitude de jeter de l'alphiton dans du vin nouveau cuit, dans du vin d'un goût sucré ou dans du vin miellé, quelquefois aussi dans de l'eau, et de boire ce mélange en été deux ou trois heures avant le bain; ils prétendent reconnaître que cette boisson prévient la soif. 10. On fait aussi la maza avec de l'alphiton qu'on a délayé dans de l'eau. 11. L'alica appartient au genre du froment. 12. Il faut prendre des précautions pour les bouillies qu'on prépare avec [ce qu'on appelle] l'alica lavé; cet alica lavé est simplement une gelée obtenue en délayant l'alica dans de l'eau ; comme cette gelée a besoin d'une cuisson très prolongée, ceux qui la préparent sont facilement induits en erreur, en croyant qu'elle est suffisamment cuite, et [s'il n'est pas assez cuit] l'alita lavé fait un tort assez grand aux malades, parce qu'il se caillebote et s'épaissit en peu de temps, attendu qu'il est glutineux. 13. Il faut donc faire bouillir longtemps l'alica sur des charbons, en le mêlant avec une grande quantité d'eau, et en le remuant avec de l'aneth jusqu'à ce qu'il soit cuit; c'est seulement alors qu'il faut y ajouter du sel; vous ne gâterez rien, lors même que vous ajoutez l'huile de suite. 14. Quand les pincements vifs à l'estomac, ou le passage de matières bilieuses, nécessitent parfois, pour les gens en santé, l'usage de bouillies, il faut leur donner à manger de l'alita, qu'on aura fait bouillir pendant très longtemps jusqu'à ce qu'il se prenne en gelée, et qu'on aura battu ensuite de manière à le rendre semblable à la crème de ptisane passée. 15. Il faut se servir de la même préparation pour l'alica lavé. 16. La ptisane sera convenablement préparée, si elle se gonfle considérablement pendant qu'on la fait bouillir, et si ensuite elle se prend en gelée par l'action prolongée d'un feu doux. 17. On y mêle du vinaigre au moment où elle a atteint son plus haut degré de gonflement. 18. Quand elle est complètement cuite, il faut y ajouter du sel fin peu de temps avant de la manger; l'huile, au contraire, peut y être ajoutée de suite, sans que par là on nuise à la cuisson; mais il ne faut pas y ajouter autre chose, si ce n'est un peu de poireau et d'aneth; ces substances doivent y être mises aussi dès le commencement. 19. On doit d'abord faire macérer l'orge crue dans de l'eau pendant un court espace de temps, ensuite on la jette dans un mortier et on la frotte avec les mains pourvues de quelque chose de raboteux comme le spart, qui sert à tisser des chaussures pour les bêtes de somme. 20. On cessera de frotter dès qu'on aura détaché la pellicule de l'orge; si toutes les pellicules n'ont pas été enlevées, la ptisane acquiert par la coction des propriétés plus ou moins détersives, mais elle n'acquiert aucune autre qualité nuisible. 21. La manière la plus mauvaise de préparer la ptisane est la suivante : les cuisiniers triturent l'orge crue dans un mortier avec de l'eau, et, après l'avoir fait bouillir pendant quelque temps, ils y ajoutent ensuite la boisson appelée hepsema ou siraeum (c'est-à-dire vin nouveau cuit); quelquefois aussi ils y mêlent en même temps du miel et du cumin; de cette façon ils font plutôt un cyceon que de la ptisane. 22. Le mets appelé phacoptisane est un excellent aliment, si on mêle les lentilles et l'orge mondée, non à parties égaies, mais en mettant moins d'orge mondée [que de lentilles], parce que l'orge se convertit en gelée et se gonfle considérablement, tandis que les lentilles se gonflent peu quand on les fait bouillir. 23. L'assaisonnement est le même pour ce mets que pour la ptisane, à cette exception près que, si on y ajoute de la thymbre ou du pouliot, il devient plus agréable et en même temps plus facile à digérer, tandis que la ptisane ne se prête pas à cet assaisonnement, mais n'admet que l'aneth et le poireau. 24. La plus mauvaise manière de préparer les lentilles, c'est de les faire bouillir avec du vin nouveau cuit, comme le font les cuisiniers pour les gens du peuple. 25. Si on veut faire bouillir du porc avec ces mets, on constatera que la viande fraîche et surtout les pieds vont bien avec l'orge mondée, et le porc salé avec les lentilles; de même, la viande qui tient le milieu entre ces deux espèces, c'est-à-dire la viande récemment salée, va bien avec la phacoptisane, tant sous le rapport du goût que sous celui de la facilité de la digestion. 26. C'est aussi un bon aliment que la bouillie de lentilles et de bette; il faut y mettre beaucoup de bette et une quantité un peu considérable de sel ou de garon doux; car, ainsi préparé, ce mets relâche mieux le ventre. 27. La courge aime naturellement à être assaisonnée avec de l'origan, à cause des propriétés aqueuses dont elle est douée par nature; car toutes les substances semblables ont besoin d'être mélangées à des ingrédients d'un goût âcre, acide, âpre ou salé, si on veut qu'elles ne soient pas désagréables à prendre et qu'elles ne causent pas du dégoût à ceux qui les mangent. 28. C'est un mets très appétissant que la courge préparée dans le plat avec du poisson salé, surtout si ce poisson est une des salaisons du Pont qu'on appelle ombrines. 29. Il faut faire bouillir fortement les navets; ceux qu'on a fait bouillir deux fois sont les meilleurs. 30. On mange aussi la racine de gouet de la même manière que le navet. 31. Dans certains pays, cette racine est plus âcre [que dans d'autres] ; à Cyrène et dans mon pays, cette plante se comporte d'une manière opposée, car, à Cyrène, le gouet est très peu âcre et n'a presque pas le goût de drogues, de sorte qu'il est même préférable aux navets. 32. On donne également à manger la racine de serpentaire en la faisant bouillir deux ou trois fois, et la racine d'asphodèle, en la préparant comme les lupins. 33. Quand nous faisons bouillir deux fois de semblables substances, il convient, lorsqu'elles semblent avoir atteint un degré modéré de cuisson, de jeter la première eau et de les transvaser immédiatement dans de l'eau chaude ; il faut ensuite les faire bouillir fortement une seconde fois dans cette dernière eau, de façon à ce qu'elles forment une gelée; car la substance qu'on fait bouillir deux fois ne doit toucher ni à l'air ni à l'eau froide, parce que, clans ce cas, elle ne forme plus une gelée parfaite, lors même qu'on la ferait bouillir pendant très longtemps. 34. Quand on a fait bouillir deux fois les escargots et qu'on les a assaisonnés, il faut les faire bouillir une troisième fois jusqu'à ce qu'ils soient devenus gélatineux, car, de cette façon, ils deviendront nourrissants; mais, pour relâcher le ventre, on se sert du bouillon obtenu en les assaisonnant immédiatement avec de l'huile, du garon et un peu de vin. 35. Les substances propres à être salées sont celles dont la chair est à la fois dure et imprégnée d'humeurs excrémentitielles; car celles dont la structure solide est ou extrêmement molle ou extrêmement sèche et dépourvue d'humeurs excrémentitielles ne se prêtent pas à cette opération. 36. Si donc on saupoudre de sel des animaux secs, ils cessent d'être mangeables parce qu'ils se racornissent : tel est par exemple le lièvre; mais la chair des cochons gras et d'un âge moyen est propre à être salée, parce qu'elle est à l'abri de ces deux inconvénients : à savoir, la sécheresse des individus âgés et l'humidité exagérée des jeunes pores ; car, tandis que les substances sèches deviennent semblables à du cuir quand elles sont salées, les substances démesurément humides, au contraire, deviennent diffluentes et se fondent quand elles sont en contact avec le sel. 37. Pour cette raison donc, tous les poissons qui ont la chair molle et dépourvue d'humeur excrémentitielle ne se prêtent pas non plus à cette opération ; tels sont, par exemple, ceux qu'on appelle poissons de roche et les motelles de la haute mer; mais les bolty, les ombrines et les petits thons peuvent être salés, ainsi que les thons de l'Océan, les sardines et les poissons appelés Sexitanes. 38. De même les animaux marins de grandeur démesurée s'améliorent par la salaison, parce que leur chair est imprégnée d'humeurs excrémentitielles, tandis que les rougets ne sont pas propres à être salés, attendu qu'ils ont la chair sèche et dépourvue d'hu­meurs excrémentitielles. 39. Il ressort évidemment de ce que nous venons de dire que toutes les substances dures, nerveuses et, pour ainsi dire, coriaces, deviennent difficiles à digérer quand elles sont salées, tandis que celles qui ont la disposition contraire prennent elles-mêmes des particules ténues et atténuent les humeurs épaisses et glutineuses. 40. Les meilleures salaisons, d'après mon expérience personnelle, sont celles de Cadix, qu'on appelle actuellement sarcles, et les ombrines qu'on apporte du Pont; les bolty, le petit thon et les salaisons appelées Sexitanes occupent après elles le second rang. 41. Toute cervelle s'améliore sous tous les rapports quand on la prépare avec des ingrédients incisifs et réchauffants. 42. Il faut préparer la sauce blanche simple avec de l'eau seule, de l'huile, de l'aneth et un peu de poireau, en y ajoutant, après qu'elle a suffisamment bouilli, une quantité modérée de sel. 43. Le bouillon de la plupart des substances, ou même de toutes, se sale toujours d'autant plus qu'on le fait bouillir plus longtemps ; plus tard il devient même amer, mais la substance solide qu'on fait bouillir dans l'eau y dépose les qualités qu'elle avait auparavant et acquiert à la longue la saveur qu'on appelle sans qualité et aqueuse, sans contracter aucun goût salé, amer ou astringent. 44. Si donc on s'avise de faire bouillir deux ou trois fois les substances amères, elles perdront entièrement dans l'eau leur amertume et appartiendront aux substances sans qualité ; de même les substances âcres perdront leur âcreté, si on les fait bouillir de cette manière; la même chose peut se dire également des substances astringentes. 45. L'eau même, quand on la fait bouillir toute seule pendant longtemps, devient plus salée qu'elle ne l'était auparavant.

2. DE LA PRÉPARATION DES ALIMENTS.

(Tiré de Rufus.)

[Ce chapitre se trouve dans le traité Du régime, dans le premier livre, vers la fin.]

1. Tous les mets que nous mangeons rôtis dessèchent; tous ceux que nous mangeons bouillis humectent, même quand par nature ils ne produiraient pas cet effet. 2. Les mets diffèrent aussi sous le rapport des assaisonnements qu'on y mêle, comme le coriandre, l'aneth, le cumin, les poireaux et tous les autres ingrédients qui servent encore de condiment à la viande. 3. Les assaisonnements doivent se révéler très peu au goût; car les mets trop relevés font sentir à l'estomac l'excès d'assaisonnement. 4. La meilleure manière d'assaisonner la viande est de le faire dès le commencement; celle à laquelle on a ajouté plus tard quelque chose est moins bonne, car, dans ce cas, la cuisson est inégale; cette addition conviendra [seulement] aux viandes fortes; c'est aux mêmes viandes qu'il importe d'ajouter aussi une grande quantité de sel pour consumer la graisse, car le gras s'imbibe de sel; [puis] il faut employer un feu très fort; si, au contraire, on veut rôtir les viandes maigres ou contenant peu de sang, on se servira d'un feu plus doux. 5. Les viandes de chèvre ou de brebis qu'on fait bouillir doivent toutes être cuites après le solstice d'été, car, à cette époque, elles ont une odeur plus mauvaise que pendant le reste de l'année; cela est bien plus prononcé pour les béliers et pour les boucs; et même leur chair rôtie aura une odeur plus ou moins désagréable. 6. Quand on fait cuire ces viandes, on doit ôter le couvercle, les faire bouillir dans une grande masse d'eau et les transformer par les assaisonnements; tous les os revêtus de viande ayant une mauvaise odeur doivent aussi être cassés et écrasés; car la moelle est la partie qui se pourrit la première; or, si elle n'est pas pourrie, elle est très grasse et très agréable. 7. Il faut distinguer les viandes qui doivent être bouillies fraîchement tuées de celles qui doivent l'être après avoir été conservées : d'abord toutes les viandes des animaux sauvages doivent être bouillies après avoir été conservées; parmi les animaux domestiques, le porc, le mouton et la chèvre exigent une cuisson immédiate; mais le boeuf doit être bouilli plus tard; parmi les oiseaux, il faut cuire après quelque temps les grandes espèces, les oiseaux de marais, les coqs, le ramier, la perdrix, le paon et le coq de bruyère; mais la tourterelle, le pigeon et la grive doivent être cuits de suite; tous les poissons doivent être bouillis quand ils palpitent encore, car ils ne supportent pas qu'on les conserve. 8. Toutes les viandes qu'il convient de laisser vieillir et de faire bouillir ensuite sont rendues plus cassantes à l'aide du vinaigre. 9. Quant aux poules, il faut les fatiguer en les pourchassant, et de plus verser dessus du vinaigre [quand on les a tuées]; cependant il peut suffire aussi de les pourchasser; car, même si vous faites bouillir immédiatement après la chasse un animal sauvage quelconque, il n'y aura pas de grand motif de blâme; cependant n'approuvez pas outre mesure cette façon d'agir. 10. On doit admettre que les grêlons (ladrerie), qu'on trouve dans les chairs, et qui se forment chez les porcs, rendent, s'ils sont en petit nombre, la viande plus agréable, mais que, s'ils sont plus nombreux, ils la rendent plutôt humide et désagréable. 11. Il faut donc tâcher d'éviter de se servir de viandes pareilles; si on est obligé parfois de les em­ployer, il faut y ajouter un peu de cire, ou, lorsqu'on les fait rôtir, graisser la broche de cire. 12. On reconnaîtra chez l'animal vivant s'il y a des grêlons, en inspectant le voisinage de la langue; car c'est là que se révèle la maladie, ainsi qu'aux pieds de derrière, parce qu'ils sont toujours en mouvement. 13. Ceux qui veulent accélérer la cuisson ajoutent les uns du natron, d'autres du suc de silphium, d'autres de la cire, d'autres du suc de figues et surtout celui des figues sauvages; de cette manière on accélère aussi la cuisson des viandes qu'on fait rôtir. 14. Les sauces comme le myttoton, celle à la menthe ou au céleri, et celles qu'on prépare avec du fromage et du vinaigre, ont toutes pour but principal de faciliter la digestion; mais le myttoton relâche à cause de l'ail. 15. Les viandes qui conviennent aux vieillards sont celles qu'on bat avant l'ébullition et qu'on fait macérer doucement dans de l'eau contenant du sel et du thym ou de l'origan de bouc. 16. Il ne faut pas laisser vieillir les poissons avant de les cuire, à l'exception des poissons très durs; il ne faut pas non plus les battre, si ce n'est les mollusques, mais on doit d'abord les macérer tous, comme on le fait pour la viande, dans de l'eau contenant du sel et du thym; quant à la viande des quadrupèdes, après l'avoir ainsi fait bouillir, on la soumettra [de nouveau] à une forte ébullition afin qu'elle s'assimile rapidement; mais les poissons, on ne doit ni les soumettre à une ébullition préalable, ni les griller, mais seulement les couvrir de feu, car, de cette façon, leur peau se détache complètement, et ce qu'ils ont de glutineux est absorbé. 17. Il convient de faire bouillir aussi simplement que possible ceux; qu'on ne peut griller. 18. On traite de la même manière les oiseaux et la viande, quand on a affaire à quelqu'un qui aime les choses bouillies. 19. Si, après avoir fait bouillir fortement les huîtres, on les grille et on les mange ensuite avec un peu de moutarde et de poivre, on les trouvera non moins dignes de louange, même pour les malades, que les testicules de coq bons à manger. 20. Le coing ne se corrompt pas du tout, et on le prend avec du miel cuit et un peu de vin, après avoir ôté l'écorce; ou bien on ôte les graines, on verse dedans du miel, on enduit complètement le fruit de pâte de farine et on le met dans de la braise jusqu'à ce que la pâte soit brûlée; alors on ôte la pâte, le fruit est entièrement cuit et il a absorbé tout le miel.

 

3. DE LA PRÉPARATION DES ALIMENTS.

(Tiré de Dioclès.)

1. Comme la plupart des mets ont besoin de quelque préparation, et s'améliorent, les uns par ce que nous y ajoutons, d'autres par ce que nous leur enlevons, ceux-ci enfin, parce que nous changeons certaines choses d'une façon ou d'une autre, il convient peut-être de dire quelques mots sur ce sujet. 2. Ce n'est pas la partie la moins importante de ces opérations, tant sous le rapport de la santé que sous celui de l'agrément, que le nettoyage des mets quand ils sont encore crus; il faut, avant tout, s'occuper d'abord de ce soin, en retranchant ce qui est inutile et en purifiant les substances qui ont certaines qualités désagréables. 3. On purifie toute chose, soit en la faisant bouillir, soit en la macérant, soit en la lavant à plusieurs reprises ; on fera donc bouillir ce qui a quelque amertume ou âpreté dans de l'eau, et dans du vinaigre coupé les substances qui ont une âcreté mordante; on enlèvera le goût salé par la macération, et on lavera les substances qui ont certaines impuretés. 4. Le feu et aussi les assaisonnements qui conviennent à chaque mets enlèvent surtout les mauvaises odeurs et les mauvaises qualités des sucs des aliments qu'on fait bouillir ou rôtir, et corrigent le défaut de suc. 5. Dans ce but il faut jeter sur tous de la rue, du cumin, de la coriandre, ainsi que les autres assaisonnements verts, mais aucune substance pulvérisée; dans les mets qui réclameraient quelque chose de semblable on mettra le suc des ingrédients écrasés; il y a encore l'origan, le thymbre, le thym, le sel, le vinaigre, l'huile, qui tous ont leurs propriétés spéciales. 6. Le fromage, de quelque espèce qu'il soit, est moins bon que les ingrédients susdits; celui qui entraîne le moins d'inconvénients est le fromage de chèvre fait avec de la présure, quand il est de bonne odeur, qu'il n'est pas vieux et qu'on en prend peu, surtout s'il est grillé. 7. S'il est quelquefois nécessaire d'y mettre du silphium, il faut prendre celui qui est très blanc, très odoriférant et très amer; car c'est dans les odeurs que consistent l'agrément et les propriétés des assaisonnements. 8. L'épaisseur qu'on obtient par une grande quantité de fromage, par le sésame, le silphium, et par la multitude des ingrédients pulvérisés, n'ajoute rien à l'agrément, mais elle rebute souvent. 9. Il convient de faire bouillir les mets secondaires, qui n'ont pas besoin d'une grande amélioration ou qui n'en exigent pas du tout, dans de l'eau simple, pour ainsi dire, et ceux qui ont une mauvaise odeur, qui sont humides ou peu succulents, dans de l'eau vinaigrée. 10. Il est également bon de faire bouillir dans de l'eau et du vinaigre les mets aqueux et fades, et dans du vinaigre doux ceux qui contiennent plutôt des sucs mauvais ou qui sont un peu âpres. 11. Le point le plus important est de préparer et de mêler les ingrédients de la manière qui convient aux saveurs et aux odeurs de chaque mets sans y mettre rien de pulvérisé; on atteindra le mieux ce but en tâchant de faire en sorte que le mélange ne soit imprégné d'aucune odeur ou d'aucune saveur, et qu'il ne se manifeste qu'une seule odeur et qu'une seule saveur, celles, bien entendu, qui conviennent à chacun des mets qu'on prépare. 12. On fera bouillir tous les mets sur des charbons d'une manière égale; lorsqu'ils seront cuits, on les ôtera du vase, quand les liquides sont encore en ébullition, et on ne les laissera pas tremper dans le bouillon pendant qu'il se refroidit, excepté les mets qu'on mange avec le bouillon. 13. Il faut rôtir tous les mets sur un feu doux et égal, et chercher à enlever plutôt les sucs aux substances qui en ont de mauvais, tandis qu'il faut plutôt rendre succulents ceux qui contiennent de bons sucs.

4. DU CHOU.

(Tiré de Mnésithée de Cyzique.)

1. Il faut hacher le chou avec un fer aussi tranchant que possible, ensuite le laver et laisser écouler l'eau; on hachera en même temps avec lui de la coriandre et de la rue en quantité suffisante; puis on l'arrosera d'oxymel et on y ajoutera au moins une petite quantité de silphium râpé. 2. Si vous voulez prendre une jatte de ce chou, [faites-le, et] il ne se formera rien de mauvais dans votre corps; et même si préalablement il existait déjà quelque chose de mauvais, le chou le poussera dehors; si un obscurcissement survient aux yeux, il le dissipe; les étouffements, et de plus les accidents malencontreux qui pourraient exister clans la région du diaphragme et des hypocondres, ainsi que les affections de la rate, le chou les enlève également; quand cet organe est d'un volume exagéré, il l'affaisse; et, lorsqu'on mange le chou cru, il est d'un effet admirable chez les gens atrabilaires, car il purge les veines. 3. Contre la goutte, il n'y a rien qui soit comparable au chou ainsi préparé et donné de grand matin à jeun. 4. Contre la dysenterie il faut prendre du chou, le faire bien macérer clans une grande quantité d'eau, le mettre ensuite dans de l'eau chaude et le faire bouillir, jusqu'à ce qu'il forme une gelée; après avoir décanté toute l'eau, on verse de l'huile dessus, puis on fait bouillir fortement le tout ensemble; ensuite on met le tout dans un pot et on y ajoute, en l'émiettant, une préparation farineuse, ou bien on mange seul le chou, et on le donne froid. 5. On ne fera pas cela seulement une seule fois, mais chaque jour de grand matin pendant plusieurs jours de suite; cependant il ne faut pas en prendre beaucoup, afin que cela ne devienne pas fâcheux.

5. DE LA PRÉPARATION DU PAIN

(Tiré de Dieuchès.)

1. Il faut faire le pain avec l'espèce de froment à farine légère; elle doit être aussi peu glutineuse que possible, et très légèrement fermentée avec de la levure douce, de façon que la pâte soit très solide ; on la triturera pendant longtemps. 2. La cuisson opérée dans un four chauffé par le bas me semble mieux assurée que celle opérée dans un four chauffé de tous les côtés, et celle dans la tourtière l'est encore plus, car elle est douce et prolongée, et le pain n'est guère exposé à être brûlé par le feu, pendant qu'on le cuit, parce que l'action du feu est au dehors. 3. Le pain cuit dans le four chauffé de tous côtés est plus sec et plus agréable à manger que celui qu'on cuit dans le four chauffé par le bas, mais ce mode de cuisson n'est pas sûr, parce qu'il peut arriver que la partie extérieure étant vite brûlée, l'intérieure reste crue. 4. Le pain cuit sous la cendre est le plus sec de tous les pains, mais ce mode de cuisson a encore plus d'inconvénients que le four chauffé de tous côtés; il faut qu'on ait beaucoup de charbons ardents, et que sur ces charbons il y ait une quantité considérable de cendres. 5. La meilleure pâte est celle qu'on fait avec l'espèce légère de farine et non avec de la sémidale; il convient qu'elle soit suffisamment triturée et qu'elle soit plus molle que celle dont on fait le pain cuit dans le four chauffé de tous côtés; ensuite on mettra la pâte sur la cendre placée sur le feu, on la couvrira d'une nouvelle quantité de cendres, puis on jettera dessus autant de charbons ardents que possible, et, pendant qu'on cuit le pain on fera principalement agir le feu en dessus. 6. Ce pain est le plus sec de tous; il peut être très utile, quand le ventre est relâché, que la digestion languit, ou qu'il y a beaucoup de pituite dans les intestins.

6. DE L'ALPHITON.

(Tiré de Dieuchès.)

1. On peut employer l'alphiton en boisson ou en bouillie, soit en le jetant, lorsqu'il est aussi fortement torréfié que possible, dans du bouillon de poulet en ébullition (dans ce cas on ne remue pas, mais on le laisse se prendre en gelée et on le fait arriver doucement à une température tiède sur le feu ou sur l'eau chaude, de façon que sa cuisson soit complète), soit dans du bouillon d'agneau ou de jeune bouc et qui n'est pas tout à fait exempt de graisse, soit dans du bouillon de cochon de lait; enfin on fait bouillir l'alphiton pour les individus affectés de dysenterie. 2. On peut, dans ce cas, se contenter d'ajouter à un quart de choée du meilleur alphiton à très gros grains deux cotyles de lait, le tiers d'eau et trois oboles de têtes de pavot légèrement torréfiées; il faut les mêler aux ingrédients triturés, faire bouillir le tout ensemble et l'administrer après qu'il a acquis la consistance d'une bouillie; il donne du repos aux malades en leur procurant une suspension des selles et du sommeil. 3. On ne doit pas se servir souvent de cette préparation, mais seulement trois ou quatre fois, car elle produit une certaine faiblesse, et les urines deviennent rares chez ceux qui en prennent beaucoup; il faut en user surtout chez les gens forts. 4. On fait aussi de l'alphiton avec l'avoine; on la torréfie tout entière avec l'enveloppe; on la monde, on la triture et on l'écrase, comme on le fait pour l'alphiton d'orge; l'alphiton d'avoine est meilleur et un peu plus exempt de flatuosités que l'alphiton d'orge.

7. DE LA PRÉPARATION DES ALIMENTS.

(Tiré de Dieuchès.)

1. Pour les gens très faibles et qui ne peuvent pas encore supporter des aliments plus épais que l'eau, le mieux est de faire macérer ou bouillir ou de triturer les aliments dans la boisson qu'on leur destine; car de ce mode d'administration il résulte qu'une partie de tous les aliments atténuée et réduite en vapeur se distribue dans le corps, qu'il ne reste de matière excrémentitielle ni dans le ventre inférieur, ni dans le supérieur, enfin que, pendant tout le cours de la journée, la boisson et l'aliment se distribuent simultanément dans le corps. 2. Cette manière de donner de la nourriture conviendra surtout aux gens chez qui le ventre est resserré et n'est point dérangé ; car ils ont besoin d'une nourriture à la fois pesante et ténue. 3. On peut donc faire macérer l'alphiton desséché et le mets appelé éricides; mais le pain mis en morceaux aussi chaud que possible et macéré est la préparation qui a la plus grande efficacité; on pourra également faire macérer de la même manière du froment torréfié et écrasé. 4. Cependant les boissons [alimentaires] obtenues par la décoction sont encore meilleures et nourrissent encore plus. 5. Pour ceux donc qui ont la fièvre et chez qui les crises ne se font pas facilement, il ne faut pas monder l'orge, mais la faire bouillir dans de l'eau après l'avoir lavée; on élèvera d'abord l'eau à une température tiède, puis on jettera cette première eau pour verser dessus une nouvelle quantité, dans laquelle on fait bouillir l'orge ; la décoction sera bonne, si on verse dix cotyles d'eau sur une mine d'orge on fait bouillir jusqu'à ce que l'orge crève ; ensuite on décante la partie la plus ténue de l'eau et on la donne soit seule, soit mêlée à du miel. 6. Cette boisson facilite les déjections alvines, pousse aux urines et nourrit fortement. 7. On donne encore l'orge changée par la torréfaction en alphiton, appelée aussi cachrys; avant de moudre cette orge torréfiée, on ôtera avec légèreté la glume brûlée, qui y est restée attachée, et on fera bouillir l'orge après l'avoir fait macérer. 8. Cette boisson resserre le ventre plus que celle dont nous avons parlé en premier lieu; on doit la faire bouillir dans de l'eau ainsi que l'orge crue. 9. On peut aussi faire bouillir dans de l'eau ce qu'on appelle éricides, en s'abstenant de remuer, afin que la décoction soit aussi claire que possible. 10. On pourra aussi faire bouillir du pain fermenté sec ou frais, du froment cru ou torréfié, du petit millet et presque tous les aliments qu'on supposera convenir au malade, soit dans la boisson qu'on lui donne, soit dans le bouillon d'agneau et dans plusieurs autres bouillons. 11. Les boissons alimentaires obtenues par la trituration sont plus épaisses et plus actives que celles qu'on obtient par la macération ou la décoction; on peut triturer aussi dans la boisson du malade presque tous les aliments dont nous venons de parler. 12. Il y a, en outre, plusieurs fruits d'arbre et plusieurs graines farineuses, dont on peut se servir, chez certains malades, à titre de nourriture ou pour ranimer les forces, en les pilant, les triturant, et les passant pour les mêler à la boisson qu'on doit administrer. 13. Il faut triturer les pains, soit secs, soit frais, et les popana, en les délayant dans de l'eau après les avoir fait macérer; on doit ensuite les passer à travers un linge. 14. Afin que la blancheur du pain ne se trahisse pas, on peut mêler à cette préparation des graines de concombre torréfiées, des amandes, des pignons ou des sorbes; on ajoute à chacun de ces ingrédients, ou à plusieurs, ou à tous à la fois, de la graine d'aneth ou de fenouil ; on donne le tout dans de l'eau miellée aux fébricitants, dans de l'eau miellée et dans du vin à ceux qui ne le sont pas. 15. Le petit millet et le grand millet triturés conviendront, surtout quand ils sont torréfiés et mondés, à ceux dont le ventre est surchargé de bile et qui ont des déjections nombreuses et ténues. 16. On triture et on délaye en même temps dans de l'eau une quantité qui ne soit pas moindre d'un oxybaphe dans dix oxybaphes d'eau pour chaque malade; on passe à travers un linge serré et on ajoute à un cotyle d'eau une quantité moyenne de vin âpre pour le donner à jeun. 17. Il conviendra de triturer avec le petit millet des châtaignes en petit nombre avec leur écorce intérieure; en passant les châtaignes à travers un tamis conjointement avec le petit millet, on obtiendra une bouillie pour les fébricitants. 18. La plus faible de toutes les bouillies qu'on puisse donner est celle qu'on fait avec l'orge torréfiée; on prend un demi-chénice d'orge pour six cotyles d'eau; quand la bouillie est complètement cuite, il convient de la remuer comme on fait pour l'orge mondée et de la passer. 19. Ainsi préparée, cette bouillie fait moins aller à la selle que celle d'orge mondée, et elle est plus claire. 20. Le bormos, que quelques uns appellent bramas (avoine), est, de toutes les graines farineuses, la plus facile à digérer; la bouillie qu'on en fait est la meilleure; elle est plus forte que celle d'orge torréfiée, et plus faible, mais plus agréable que celle d'orge mondée ; on la fait bouillir de la même manière que l'orge mondée, dans la proportion d'un cotyle d'avoine pour dix cotyles d'eau. 21. On prépare la bouillie de lentilles après avoir ôté leur écorce sans les torréfier ; dans ce but, on mêle aux lentilles une quantité double de cendre très fine de bois de sapin, puis on frappe doucement jusqu'à ce que l'écorce soit bien enlevée; on secoue ensuite le tout sur un crible fin et la cendre va au fond; quant aux lentilles, on les fait bouillir après les avoir lavées plusieurs fois, en y ajoutant un peu d'aneth ou de pouliot sans huile; on y mettra une quantité moyenne de sel et on versera dessus un peu de vinaigre, quand la bouillie est complètement cuite; chez les malades qui n'ont pas de fièvre, et chez ceux qui ont de la tendance à la diarrhée, on y ajoute, au lieu de vinaigre, un cyathe de vin très odoriférant. 22. On soulagera aussi le ventre en faisant bouillir conjointement avec les lentilles des poires ou des coings coupés par morceaux sans y mettre du vin ou du vinaigre; on fera bouillir un cotyle de lentilles dans sept cotyles d'eau. 23. Chez certains malades, dont il faut rendre les selles liquides, on peut employer la bouillie de lentilles en faisant bouillir avec elle les feuilles du sommet des jeunes pieds de bette ou de la mauve, ou du concombre ou de la courge, coupés par petits morceaux. 24. On emploiera l'amidon chez ceux qui sont atteints de dévoiement pendant la fièvre ; on peut en mêler aussi aux lentilles pour resserrer le ventre; on peut s'en servir également avec du lait, soit qu'on coupe ce liquide avec de l'eau, soit qu'on l'emploie seul; cette préparation convient encore mieux à ceux qui ont la dysenterie ou un catarrhe accompagné de toux; on fera bouillir dix drachmes d'amidon dans quatre cotyles de liquide. 25. Le petit millet convient très peu aux fébricitants, il est vrai, mais parfaitement bien à ceux qui sont incommodés du côté du ventre; on fera bouillir un oxybaphe de petit millet dans dix oxyhaphes d'eau ; on le triturera dans un mortier en versant dessus la quantité susdite d'eau; après l'avoir délayé et passé au tamis, on fait bouillir, en y mettant un peu d'aneth et de sel. 26. On mêlera la bouillie de petit millet passée au tamis à celle de lentilles et à celle d'orge mondée; de même on peut mettre dans une bouillie quelconque, excepté dans celle de lentilles, des graines de concombre crues au lieu d'huile. 27. Mêlez aussi soit la noix de pomme de pin appelée strobile, soit des noisettes ou des amandes après les avoir tamisées, à la ptisane et aux autres bouillies, mais surtout aux bouillies auxquelles vous voudriez ajouter quelque chose qui tienne lieu de lait. 28. Vous approprierez le mieux les bouillies à l'usage des gens qui toussent en y triturant des amandes; mais, pour ceux qui sont incommodés du côté du ventre, il faut, au lieu d'y mettre de l'huile, y triturer du pavot blanc torréfié légèrement avec son enveloppe, et dont on exprime le suc dans la bouillie; cela contribue aussi à faire dormir. 29. Pour resserrer le ventre, il faut triturer [dans les bouillies] les noix d'Eubée appelées aussi noix de Sardes (châtaignes) avec l'écorce interne qui touche à la noix; après les avoir triturées, on doit y ajouter en passant au tamis l'eau de pavot. 30. On peut aussi faire bouillir un quart [de mine ?] de sémidale dans dix cotyles d'eau avec une quantité modérée d'huile et d'aneth, après avoir lavé auparavant la sémidale; on traitera de la même manière l'alica, si on veut en faire une bouillie. 31. Faites aussi bouillir de la sémidale ou de l'alica, en y mêlant du lait, quand la bouillie est déjà complètement cuite; mais il importe que le lait qu'on verse dedans soit chaud et qu'il ne bouille pas longtemps avec ces ingrédients; on doit auparavant faire macérer l'alica dans de l'eau ; ensuite on y mêle le quart d'une chénice [de lait]; de chacun de ces deux ingrédients on met deux cotyles dans sept cotyles de lait; il faut faire cuire doucement ces bouillies sur des charbons, en les remuant et en tenant le vase dans la main, afin que la bouillie ne brûle pas. 32. On peut aussi mêler du lait à toute espèce de bouillie. 33. Le popanon, que quelques-uns appellent itrion, présentera les conditions les moins défavorables, si, après l'avoir pilé et réduit en poudre, on y triture des amandes ou des graines de concombre; sinon, il faut le faire bouillir avec de l'huile et de l'aneth, comme c'est la coutume. 34. On peut l'employer aussi pour resserrer le ventre, soit seul, soit mêlé aux lentilles; mais, pour les fébricitants, c'est ce qu'on peut donner de moins convenable. 35. Ceux qui le font bouillir dans du bouillon de poulet ou d'agneau s'y prennent comme il faut, car ils le font bouillir dans une grande quantité de bouillon et dans des pots de terre cuite, en n'y touchant pas, en ne remuant même pas, parce que de cette manière on parvient le plus facilement à le faire ramollir et à le pousser à un degré complet de cuisson. 36. Le pain sec est une bouillie très légère; pour les fébricitants on doit le réduire en poudre par la trituration, après l'avoir fait parvenir à une température tiède au feu et après l'avoir préalablement fait macérer; il faut en faire bouillir dix drachmes dans deux cotyles et lui faire acquérir l'épaisseur d'une bouillie; on triturera dans cette bouillie des amandes ou des graines de concombre. 37. Pour ceux qui n'ont pas de fièvre, il faut, en le pilant, rendre le pain aussi menu que la sémidale ou l'alica, ensuite le faire macérer préalablement pendant quelque temps, jeter l'eau et faire bouillir dix drachmes avec un cotyle et demi; après y avoir trituré quelqu'un des ingrédients susdits et lui avoir donné l'épaisseur de la bouillie d'alica, on l'administre avec du miel ou comme cela est agréable au malade. 38. On peut encore l'employer, soit seul, soit avec des lentilles, quand l'estomac ne digère pas et quand on est incommodé de flatuosités ou quand on a des selles liquides; on le donnera aussi en morceaux plus gros contre la constipation dans du bouillon de poulet, en le faisant macérer ou bouillir.

8. DE LA PRÉPARATION DE L'AMIDON ET DES AUTRES PRÉCIPITÉS.

1. On fait des précipités de toutes les graines farineuses de la même manière qu'on fait l'amidon, or l'amidon se fait de la manière suivante : on prend de la farine sémidalite la plus pure, on la fait macérer d'abord doucement, on la lave, on la passe à travers un linge dans une grande quantité d'eau et on enlève autant que possible la colle; après avoir donné au précipité le temps de se former dans un vase de terre cuite, on laisse écouler l'eau, on verse de nouveau dessus de la même manière une nouvelle quantité d'eau, et on continue à faire ainsi jusqu'à ce que l'eau décantée soit claire; ensuite on enlève le précipité et on le dessèche en l'exposant au soleil dans un vase de terre jusqu'à ce qu'il soit complément sec. 2. On traitera de la même manière l'ers, surtout l'ers blanc : l'écraser, enlever l'écorce par l'ébullition, le faire macérer, le réduire en poudre par la trituration, puis le délayer dans une grande quantité d'eau qu'on jette plusieurs fois par jour, jusqu'à ce que le liquide décanté soit clair, enfin le mettre de côté après l'avoir séché. 3. On peut donner cette préparation aux gens qui ont du pus dans la poitrine, en la mêlant à leur bouillie afin de favoriser l'expectoration, ainsi qu'aux femmes pour provoquer les règles, ou pour procurer de l'embonpoint ou un bon teint, en l'administrant dans du vin miellé ou avec de l'alphiton. 4. Un oxybaphe de cette farine suffit pour les gens bien portants, que ce soit un homme ou une femme. 5. On fait aussi un précipité avec les lentilles, en les écrasant de la même manière, en les faisant macérer et en les triturant comme l'ers; on jette l'eau jusqu'à ce que cette eau décantée soit claire. 6. Ce précipité étant séché, on peut le mêler aux bouillies des­tinées aux gens incommodés du côté du ventre; on l'emploiera surtout conjointement avec le petit millet, le pain sec, l'orge mondée et plusieurs autres bouillies. 7. Les bouillies faites avec des graines impropres à la panification sont moins utiles aux fébricitants que celles que nous venons d'énumérer, car elles sont moins nourrissantes et plus flatulentes; on peut user des bouillies faites avec ces graines réduites en farine par l'écrasement quand elles sont crues. 8. Pour ôter à la farine de fèves ses propriétés flatulentes, il faut verser dessus beaucoup d'eau et la faire bouillir; puis, quand la bouillie commence à se rider et qu'elle est complètement cuite, on jette toute l'eau et on y ajoute de la nouvelle eau chaude; il suffira d'ajouter deux cotyles d'eau et d'huile à un quart de chénice de la bouillie, arrivée déjà à un degré complet de cuisson. 9. On peut employer cette bouillie contre les coryzas et les catarrhes, en y mêlant un peu de rayons de miel. 10. On s'en servira aussi contre la dysenterie et le ténesme, si toutefois on la rend plus grasse, en ne la soumettant pas à une ébullition préalable et en ne jetant pas l'eau. 11. On peut aussi y mettre de la moelle, de la cire ou du fromage, surtout du fromage grillé, et beaucoup d'huile pour les malades dont on veut expulser les excréments. 12. On peut aussi mêler cette farine à l'orge mondée ou aux lentilles, pour les individus affectés de ténesme ou de dysenterie. 13. On fera bouillir dans six cotyles d'eau un quart de chénice de la farine dont on ne pousse pas la cuisson jusqu'au bout. 14. La purée de pois grecs est moins flatulente que celle de fèves et on l'assimile plus facilement : voilà pourquoi on la donnera surtout aux malades. 15. On peut s'en servir aussi contre les catarrhes et contre la toux; on fera bouillir également un quart de chénice dans six cotyles d'eau. 16. La purée de phasèles est la plus sucrée de toutes, mais elle est difficile à cuire; ses autres propriétés sont semblables à celles des purées susdites. 17. On la cuit aussi dans la même quantité de liquide. 18. Les purées de haricots et de gesses chiches sont les plus mauvaises de toutes les purées, et on ne saurait en faire une bouillie qui ait quelque avantage, dans quelque maladie que ce soit.

9. DE LA CUISSON.

1. On doit faire cuire toutes les graines impropres à la panification, aussi bien que l'orge et le froment, dans un pot dont on enduit le couvercle de pâte de farine ; on les fera bouillir très longtemps et sur un feu aussi doux que possible; car la bouillie ne saurait brûler, quoiqu'on la fasse bouillir aussi longtemps qu'on veut sans la remuer; c'est seulement lorsque les graines sont parvenues à un degré très avancé de cuisson qu'on doit remuer avec un petit bâton et tenir le pot dans sa main en l'agitant afin que la bouillie ne brûle pas. 2. Il faut se servir, tant pour les bouillies que pour les mets secondaires, d'huile qui n'ait pas la moindre odeur et qui ne trahisse au goût aucune propriété; l'huile d'olives vertes satisfera à ces conditions. 3. Il faut faire bouillir aussi bien que griller les poissons de grande taille dans leurs écailles ; on y mettra quelque assaisonnement et on y ajoutera beaucoup d'huile, même quand on les fait bouillir il convient aussi de faire bouillir préalablement l'eau salée et de n'y mettre le poisson que lorsqu'elle est en ébullition ; cuit de cette manière, le poisson devient plus succulent et il garde ses humeurs propres. 4. De même le poisson grillé sera meilleur, si on le cuit dans ses écailles; alors aussi il devient très tendre et très nourrissant. 5. On doit y ajouter les assaisonnements dans l'huile et le saupoudrer d'une quantité suffisante de sel ainsi que d'alphiton pulvérisé.

10. DE LA PRÉPARATION DU PETIT MILLET.

(Tiré de Philotime.)

1. Si on triture le petit millet cru et qu'on le réduise en poudre, si, après y avoir ajouté l'eau, on le triture de nouveau, si on décante l'eau et si on fait bouillir le millet de manière à ce qu'il devienne semblable à la farine obtenue par la mouture, ce mets est glutineux et doué d'une âpreté fortement prononcée; il resserre le ventre et il est susceptible de s'assimiler. 2. Si, au contraire, on fait bouillir cette graine en entier, comme c'est la coutume, le petit millet s'assimilera plus difficilement, il relâchera quelquefois le ventre, il sera expulsé par les excréments sans avoir subi de grands changements, quoiqu'il soit plus glutineux, mais il distribuera dans le corps une humeur douée d'une douce astringence.

11. NOURRITURE DE CEUX QUI SONT HABITUELLEMENT MALADES, ET MANIÈRE DE LA PRÉPARER.

(Tiré d'Antyllus.)

[Ce chapitre se trouve dans l'ouvrage Sur les moyens de traitement, au chapitre second du troisième livre, lequel traite de ce qu'on donne aux malades.]

1. Dans les maladies continues, il faut choisir un aliment qui se digère très facilement, qui se distribue très rapidement, qui ne nourrisse pas trop, et qui s'échappe aisément par la perspiration; car, si les aliments sont retenus, ils donnent du corps à la fièvre ; or le pain lavé pris dans de l'eau a toutes ces qualités. 2. On doit le faire avec du froment d'été qui ne soit pas trop pur, car, dans ce cas, il nourrit trop; il faut qu'il soit très fortement trituré et fortement cuit, mais on ne se servira pas de farine sémidalique à cause de sa puissance [nutritive], que ce soit de la farine du froment dont il a été parlé ou d'un autre; le pain doit, de plus, être fermenté et un peu rassis; on le fera macérer dans de l'eau chaude qu'on jette à chaque instant pour la renouveler, non pas tout le pain, mais sa partie intérieure, car la croûte est impropre à l'absorption de l'eau ainsi qu'à la digestion ; on doit interrompre la macération lorsque le pain non seulement s'est gonflé, mais qu'il a aussi laissé évaporer le ferment et qu'il en a perdu tout à fait l'odeur. 3. L'alica lavée appartient au même genre; on en fait une gelée en la lavant fortement, et on la donne après l'avoir fait bouillir dans de l'eau simple ou dans de l'eau miellée. 4. La crème d'orge mondée rentre égaiement dans ce genre; on fait bouillir une partie d'orge dans quinze parties d'eau; pendant la coction on réduit la masse du liquide au cinquième et on la passe à travers un tamis; on boit cette crème en y ajoutant un peu d'eau miellée. 5. On peut aussi ranger l'eau miellée elle-même dans la même classe de moyens nutritifs, si on la fait bouillir fortement suivant le mode décrit à propos de la crème d'orge mondée, c'est-à-dire en mêlant plusieurs parties d'eau à une partie de miel et en réduisant de même la masse au cinquième. 6. On prépare aussi une boisson avec l'alica de la manière suivante : prendre de l'alica fortement lavée, jeter à plusieurs reprises l'eau employée, faire macérer l'alica de nouveau pendant une heure dans de l'eau pure, ensuite, avec les mains, la triturer dans cette eau, jusqu'à ce qu'elle ait pris l'aspect du lait tant sous le rapport de la couleur que sous celui de l'épaisseur; l'alica, ayant été ensuite séparée par le filtre, ne fait pas partie de la bouillie, mais on ajoute à l'eau qu'il a rendue laiteuse un peu de sel, et, en outre, un peu d'aneth pour ceux qui éprouvera des pincements à l'orifice de l'estomac et aux intestins, un peu de pouliot ou de thym pour peux qui ont l'orifice de l'estomac retourné et qui souffrent de nausées, un peu de cumin pour ceux qui sont gonflés de flatuosités; on fait bouillir cette eau jusqu'à ce qu'elle se prenne et on donne la bouillie avant qu'elle se refroidisse. 7. Quand ce genre d'aliment est bien préparé, nous le préférons quelquefois à l'alica et au pain parce qu'il est facile à administrer, qu'il se digère aisément et qu'il se distribue rapidement dans le corps. 8. Ce sont là les aliments qui conviennent dans les fièvres aiguës; mais, dans beaucoup de circonstances, soit qu'on n'ait pas ces aliments sous la main, soit que l'état des malades ne se prête pas à leur usage, nous sommes forcés d'en employer d'autres, par exemple, l'itrion, les herbes potagères, l'alphiton et les oeufs. 9. Il faut que l'itrion soit fait avec le même froment que le pain bien cuit; il doit être très léger, car, s'il est épais, il donne lieu à une cuisson inégale; il faut qu'il soit réduit en poudre très fine par la trituration, de manière à ressembler à de l'alphiton; ensuite on le fait bouillir très fortement, de préférence dans de l'eau de pluie, jusqu'à ce qu'il constitue une masse uniforme : à défaut de cette eau, on prendra l'eau aussi pure que possible. 10. Il faut y mettre un peu de sel et point d'huile, si ce n'est une très petite quantité, qu'on fait bouillir avec l'eau avant d'y jeter l'itrion réduit en poudre. 11. On fait bouillir aussi de la même manière l'alica avec les mêmes assaisonnements. 12. De tous les légumes potagers, celui qui convient le mieux est la mauve, qu'on mange bouillie dans du garou et de l'huile; il en est de même de la bouillie faite avec cette herbe, bouillie qu'on prépare en cuisant les feuilles tendres de mauve sans les nervures, en les triturant ensuite dans un mortier et en les faisant bouillir de nouveau dans de l'eau avec du sel et de l'huile. 13. Les courges occupent le second rang; il faut les choisir très fraîches; on les fait bouillir en entier sans les râper, afin qu'elles ne s'imprègnent pas d'eau pendant l'ébullition; on les râpe quand elles sont cuites, et on les donne surtout dans de l'eau faiblement salée, car, ainsi préparé, ce mets n'est pas du tout désagréable; on peut donner aussi la courge dans du garon et de l'huile. 14. Il convient de faire bouillir les oeufs dans de l'eau, en remuant continuellement, car, si on les remue, ils ne se prennent ni ne s'épaississent; il vaut mieux les faire bouillir dans du vinaigre coupé, car de cette manière ils restent encore plus liquides.

fin du livre 4      terminé le 6 janvier 2005