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ORIBASE.

COLLECTION MÉDICALE.

texte grec seul

texte bilingue

Livre I

 



Table des matières

En mettant à la suite de chaque chapitre, quand il y a lieu, l'indication des passages parallèles, soit d'Oribase, soit des auteurs qui ont traité du même sujet que lui, et qui, pour la plupart, ont puisé aux mêmes sources, nous avons fourni aux lecteurs des renseignements utiles, et le moyen de retrouver la source des variantes non tirées des mss.

Tous les chap., pour lesquels le nom de l’auteur original n'est pas indiqué, proviennent de la même source que le chapitre antérieur qui porte cette indication.

Préface

1. Des bonnes et des mauvaises qualités des céréales, tiré de GALIEN (Hipp. Aff. § 6o, et Vict. rat. II, § 56, t. VI, p. 266 et 566-68)
2. Du froment, tiré d'ATHÉNÉE (Diosc. II, 107)
3. De l'usage des viandes d'après les saisons (Cf. II, 28)
4. Du froment bouilli, tiré de GALIEN (Paul. 1, 78; Act. Spir. anim. II, 5)
5. De l'alica (Hipp. Vict. rat. II, § 42, t. VI, p. 542; Diosc. II, 18; Paul. I, 78; Psellus, Vict. rat. II, 13; Anonym. ed. Ideler, 34. - Cf. IV, 1, p. 258, 1. 7 suiv.)
6. De l'amidon (Diosc. II, 123; Siméon Seth, p. 6; Anonym. ed. Ermerins, 2)
7. Des gâteaux faits avec de la farine
8. Du pain de froment (Hipp. Aff. § 51, 52; Vict. rat. II, § 42, t. VI, p. 260 et 540; Athen. III, 74 et 83; Diosc. II, 107 ; Paul. I, 78; Act. Spir. anim. II, 5; Sim. Seth, p. 147; Psellus, II, 10; Anon. ed. Erm. 2. - Cf. IV, 8)
9. Du pain, tiré d'ATHÉNÉE (Hipp. Vict. rat. II, § 44, t. VI, p. 542; Athen. III, 83)
10. De l'orge, tiré de GALIEN (Hipp. Vict. rat. § 40 et 54., p. 536 et 562; Diosc. II, 108; Paul. 1, 78; Act. Spir. anim. II, 5; Anonym. ed.Ermer. 2)
11. Sur le même sujet, tiré d'ATHÉNÉE

12. De l'alphiton et de la maza, tiré de GALIEN (Hipp. Aff. § 52; Vict.rat. II, § 40 et 44, t. VI, p. 260, 536-8 et 542; Aëtius, 1, voce
kriy®; Paul. I, 78

13. Du petit et du grand épeautre (Hipp. Vict. rat. II, § 43, t. VI, p. 542;Diosc. II, 111, 113, 115; Act. Spir anim. II, 5; Sim. Seth, p. 32).
14. De l'avoine (Hipp. Vict. rat. II, § 44, t. VI, p. 542; Diosc. II, 116;Sim. Seth, p. 117)
15. Du petit millet et du grand millet, qu'on appelle aussi méline (Hipp. Vict. rat. II, § 45, t. VI, p. 542; Diosc. II, 119 et 120; Paul. I,78; Act. Spir. anim. II, 5; Sim. Seth, p. 92; Psellus, II, 11 ; Anon. ed. Erm. 2; Anon. ed. Idel. 32.- Cf. IV, 10)
16. Du riz (Diosc. II, 117; Aët, I; Paul. I, 78; Act. Spir. anim. II, 5; Sim. Seth, p. 79; Psellus, II, 12; Anon. Erm. 2; Anon. Idel. 33).
17. Des lentilles (Hipp. Vict. acut. § 18, t. II, p. 486; Vict. rat. II, § 45 et 54, t. VI, p. 542 et 562; Diosc. II, 129; Paul. 1, 79; Act. Spir. anim. II, 5; Sim. Seth, p. 137; Psellus, II, 14; Anon. ed. Erm. 2; Anon. ed. Idel. 35)
18. Des fèves (Hipp. Vict. rat. II, § 45, t. VI, p. 542; Diosc. II, 127;Aët. I; Paul. I, 79; Sim. Seth, p. 134; Psellus, II, 15; Anon. ed. Erm. 2 ; Anon. ed. Idel. 36)
19. Des pois grecs (Hipp. Vict. rat. II, § 45, t. VI, p. 542; Paul. I, 79).
20. Des pois chiches (Hipp. Vict. acut. § 18, t. II, p. 486; Vict. rat. II,§ 45 et 54, t. VI, p. 542 et 562; Diosc. II, 126; Athen. II, 44; Paul. I, 79; Act. Spir. anim. II, 5; Sim. Seth, p. 27 sqq.; Psellus, II, 16; Anon. ed. Erm. 2; Anon. ed. Idel. 37)
21.  Des lupins (Hipp. Vict. acut. § 18, t. II, p. 486; Vict. rat. II, § 45;t. VI, p. 544; Athen. II, 45; Paul. I, 79; Psellus, II, 17; Anon. ed. Erm. 2 ; Anon. ed. Idel. 38)
22. Du fenugrec, qu'on appelle aussi corne de boeuf (Syn. IV, 27; ad Eunap. I, 45; Paul. 1, 79; Psellus, II, 18; Anon. ed. Idel. 39).....

23. Des phasèles et des gesses à fleurs jaunâtres (Hipp. Vict. rat. II, 45,t. VI, p. 542 ; Aët. I voce
f‹shloi; Paul. 1, 79; Act. Spir, anim. II,5; Psellus, II, 19; Anon. ed. Idel. 40)

24. Des gesses (Aët. I; Psellus, II, 20; Anon. ed. Idel. 41)
25. Des gesses chiches (Aët. 1)
26. Des haricots ou phaséoles (Hipp. Vict. rat. II, § 45, t. VI, p. 512; Diosc. II, 130; Aët. I ; Paul. I, 79; Anon. ed. Erm. 2)
27. De l'ers (Hipp. Vict. rat. II, § 45, t. VI, p. 544; Diosc. II, 131)
28. Du sésame et de l'érysimon (Hipp.. Aff. § 55, et Vict. rat. II, S 45,t. VI, p. 266 et 544; Diosc. II, 121; Sim. Seth, p. 116; Psellus, II, 21 ; Anon. ed. Idel. 42)
29. De la graine de pavots (Hipp. Vict. rat. II, S 45, t. VI, p. 544; Diosc. IV, 65)
30. De la graine de lin (Hipp. Vict. rat. II, § 45, t. VI, p. 544; Aët. I).
31. De l'ormin (Hipp. Vict. rat. II, § 45, t. VI, p. 544; Diosc. III, 135).
32. Du chanvre (Diosc. III, 155; Aët. I; Sim. Seth, p. 45; Anon. ed.Idel. 43) .....
33. De la graine du gatifier (Aët. I)
34. Du jarceau et de la vesce
35. De la courge (Hipp. Aff. § 55; Vict. rat. II, § 54, t. VI, p. 266 et 560; Athen. II, 53 et 78, IX, 14; Aët. I; Paul. I, 80; Act. Spir. anim. II, 6; Sim. Seth, p. 116; Psellus, II, 22; Anon. ed. Idel. 44. - Cf. II, 69, p. 184, I. 6; IV, 1, p. 263, l. 1 et 11, p. 304, l. 14)
36. Des pastèques (Hipp. Aff. II, § 57, t. VI, p. 266; Diosc. II, 163; Athen. II, 78; Aët. I; Alex. Trall. VII, 14, p. 370; Paul. I, 80; Act. Spir. anim. II, 6; Sim. Seth, p. 89; Psellus, II, 23; Anon, ed. Idel. 45)
37. Des melons (Paul. I, 80; Sim. Seth, p. 126; Psellus, II, 24; Anon. ed. Idel. 46)
38. Des concombres (Hipp. Aff. § 57; Vict. rat. II, 55, t. VI, p.266 et 564 ; Diosc. II, 1.64; Athen. II, 78, et III, 5; Aët. I; Paul. I, 80; Act. Spir. anim. II, 6; Sim. Seth, p. 5; Psellus, II, 25; Anon. ed. Idel. 47).
39. Des figues (Hipp. Vict. rat. II, § 55, t. VI, p. 564; Diosc. I, 83; Athen. II, 15-19; ad Eunap. I, 10; Aët. I; Paul. I, 81; Act. Spir. anim. II, 6; Sim. Seth, p. 39 et 106; Psellus, II, 26 et 27; Anon. ed. Idel. 48 et 49)
40. Sur le même sujet, tiré de RUFUS (Anon. ed. Idel. 49)
41. Du raisin, tiré de GALIEN (Hipp. Vict. rat. II, § 55, t. VI, p. 564; Diosc. V, 3; Aët. I; Paul. I, 81; Sim. Seth, p. 108; Psellus, II,2; Anon. ed. Idel. 50)
42. Des raisins secs (Hipp. Aff. § 55, t. VI, p. 266; Aët. I; Paul. I, 81; Sim. Seth; p. 110; Psellus, II, 29; Anon. ed. Idel. 51)

43. Des sycamins, qu'on appelle aussi mûres (Hipp. Vict. rat. II, § 55,t. VI, p. 562; Diosc. 1, 180; Athen. II, 37; Aët. I, voce
mñra; Paul. I, 81)

44. Des fruits de la ronce (Diosc. IV, 37; Athen. II, 37)
45. Du fruit de l'églantier (Diosc. I, 123)
46. Des baies de genévrier

47. Des pêches (Diosc. I, 164; Athen. III, 24; Alt. I, voce
m°la; Paul. I, 81; Act. Spir. anim. II, 6; Sim. Seth, p. 101)
48. Des abricots et des abricotins (Diosc. I, 165; Aët. I, voce
m°la; Paul. I, 81; Act. Spir, anim. II, 6; Sim. Seth, p. 14)

49. Des pommes (Hipp. Vict. rat. II, § 55, t. VI, p. 562 ; Diosc. I, 159, 161-63; Athen. III, 20; Aët. I; Paul. I, 81; Act. Spir anim. II, 6; Sim. Seth, p. 65; Psellus, II, 30; Anon. ed. Idel. 52)
50. Des coings et des poires à coings (Diosc. I, 160; Athen. III, 20; Paul. I, 81; Act. Spir. anim. II, 6; Sim. Seth, p. 43; Psellus, II, 31; Anon. ed. Idel. 53)
51. Des poires et des grenades (Hipp. Aff. § 54, et Vict. rat. II, § 55, t. VI, p. 262 et 562; Diosc. I, 167; Aët. I; Alex. Trait. III, 8; et VIII, 8, p. 205 et 443; Paul. I, 81; Act. Spir. anim. II, 6; Sim. Seth, p. 4 et 99; Psellus, II, 30; Anon. ed. Idel. 54)
52. Des nèfles et des sorbes (Hipp. Vict. rat. II, § 55, t. VI, p. 562; Diosc. I, 169 et 173; Aët. I; Paul. I, 81; Act. Spir. anim. II, 6; Sim. Seth, p. 72; Psellus, II, 32; Anon. ed. Idel. 55)
53. Des dattes (Diosc. I, 148; Athen. XIV, 66; Aët. I; Paul. I, 81; Sim. Seth, p. 131; Psellus, II, 33; Anon. ed. Idel. 56)
54. Des olives (Diosc. I, 138; Athen. II, 47; Aët. I; Paul. I, 81; Sim. Seth, p. 30; Psellus, II, 34; Anon, ed. Idel. 57.- Cf. II, 69, p. 184, l. 10)
55. Des noix et des noisettes (Hipp. Vict. rat. II, § 55, t. VI, p. 564; Diosc. I, 178 et 179; Athen. II, 41-43; Aët. I; Paul. I, 81; Act. Spir. Anim. II, 6; Sim. Seth, p. 45 et 63; Psellus, II, 35; Anon. ed. Idel. 58)
56. Des amandes (Hipp. Vict, rat. II, § 55, t. VI, p. 564; Diosc. I, 176;Athen. II, 42 et 43; Paul. I, 81; Act. Spir. anim. II, 6; Sim. Seth, p. 3; Psellus, II, 36; Anon. ed. Idel. 59)
57. Des pistaches (Diosc. I, 177; Athen. XIV, 61; Aët. I; Paul. I, 81; Sim. Seth, p. 92 ; Psellus, II, 37 ; Anon. ed. Idel. 61)
58. Des prunes (Diosc. I, 174; Athen. II, 33; Paul. I, 81; Act. Spir. anim. II, 6; Sim. Seth, p. 22)
59. Des jujubes (Paul. I, 81; Sim. Seth, p. 32; Anon. ed. Idel. 60)
60. Des caroubes (Diosc. I, 158; Paul. I, 81; Sim. Seth, p. 77; Psellus, II, 38; Anon. ed. Idel. 62)
61. Des câpres (Diosc. II, 264; Aët. I; Paul. I, 74; Act. Spir. anim I,4; Sim. Seth, p. 52; Psellus, II, 39; Anon. ed. Idel. 63)
62. Des sycomores (Diosc. I, 181; Athen. II, 36; Aët. I; Paul. I, 81)
63. Du fruit de la persée (Diosc. I, 187)
64. Du citron (Diosc. I, 166; Athen. III, 25-29; Paul. I, 81 ; Sim. Seth, p. 50; Anon. ed. Idel. 64)
65. Des plantes sauvages (Hipp. Vict. rat. II, § 54, t. VI, p. 566; Psellus, II, 40; Anon. ed. Idel. 65

À JULIEN.

LIVRE PREMIER.

[DES ALIMENTS.]

1 Empereur Julien, j'ai achevé, suivant votre désir, pendant notre séjour dans les Gaules occidentales, l'abrégé que Votre Divinité m'avait commandé et que j'ai tiré uniquement des écrits de Galien. 2. Après avoir loué cette collection, vous me commandâtes un second travail, celui de rechercher et de rassembler ce qu'il y a de plus important dans les meilleurs médecins et tout ce qui contribue à atteindre le but de la médecine; je me décidai volontiers à faire ce travail autant que j'en étais capable, persuadé qu'une pareille collection serait très utile, puisque les lecteurs pourraient y trouver rapidement ce qui, dans chaque cas, convient aux malades. 3. Jugeant qu'il est superflu et même tout à fait absurde de répéter plusieurs fois la même chose, en puisant chez les auteurs qui ont le mieux écrit, et chez ceux qui n'ont pas composé leurs ouvrages avec le même soin, je prendrai uniquement dans les meilleurs écrivains, n'omettant rien des matériaux qui m'étaient fournis autrefois par Galien seul, coordonnant mon ouvrage d'après la considération que cet auteur l'emporte sur tous ceux qui ont traité le même sujet, parce qu'il se sert des méthodes et des définitions les plus exactes, attendu qu'il suit les principes et les opinions hippocratiques. J'adopterai ici l'ordre suivant : je rassemblerai d'abord ce qui concerne la matière de l'hygiène et de la thérapeutique, ensuite ce qui a été dit sur la nature et la structure de l'homme, puis ce qui regarde la conservation de la santé et le rétablissement des forces chez les malades, après cela ce qui tient à la doctrine du diagnostic et du pronostic; enfin je traiterai de la guérison des maladies et des symptômes, en un mot de ce qui est contre nature; je commencerai par les propriétés des aliments.

1. DES BONNES ET DES MAUVAISES QUALITÉS DES CÉRÉALES. (Tiré de Galien.)

1 Non seulement quand on arrive en pays étranger et qu'on est obligé de manger quelque chose d'inaccoutumé, mais aussi dans son propre pays, il convient de s'assurer préalablement de la nature des aliments, soit en les humectant simplement avec de l'eau, sans recourir à la coction, soit en les faisant en même temps bouillir ou torréfier; car tous les grains qui se gonflent, perdent rapidement la dureté et la sécheresse qu'ils avaient auparavant, et deviennent plus mous et plus humides, sont les meilleurs; ceux, au contraire, qui conservent leur volume et leur dureté primitifs, ne valent pas autant ; car ils sont difficiles à digérer, essentiellement terreux; par conséquent ils ont de la peine à se transformer en sang. 2. On éprouvera de la même manière les amandes, les noix, les noisettes et les châtaignes; est-il nécessaire de parler aussi de l'orge mondée? Mais les enfants eux-mêmes le savent : celle qui se gonfle rapidement est la meilleure, et celle qui pendant longtemps garde un petit volume est mauvaise. 3. Certaines céréales ne se gonflent pas du tout quand on les fait bouillir; elles sont appelées dures par quelques anciens Grecs. 4. Toutes celles qui, sous un petit volume, ont le plus de substance, pourvu que cette substance soit épaisse et visqueuse, contiennent les meilleurs sucs et nourrissent le mieux; mais elles ne traversent pas facilement les intestins; celles, au contraire, qui ont une substance spongieuse, molle, et qui contiennent beaucoup de parties analogues au son, passent plus facilement, mais nourrissent moins; il est clair que, parmi ces dernières, toutes celles qui ont une odeur désagréable et quelque mauvais goût, renferment toutes de mauvaises humeurs et sont difficiles à digérer. 5. Vous reconnaîtrez que les céréales ont beaucoup de substance sous un petit volume, à leur poids quand on les pèse à la balance, et à la quantité de farine qu'elles fournissent; car les grains qui ont une substance compacte donnent beaucoup de farine sous un petit volume. 6. Ainsi les froments dont la substance est dense et compacte (ce qu'on reconnaît à la difficulté de les broyer avec les dents) donnent plus de nourriture sous un petit volume; ils sont de couleur jaune; ceux, au contraire, qui sont facilement écrasés par les dents, et qui, après être écrasés, offrent une apparence rare et spongieuse, fournissent peu d'aliment sous un grand volume. 7. Les orges les plus belles sont blanches après être mondées ; elles ont de la densité et du poids autant que l'orge peut en avoir; les orges exactement remplies et dont l'écorce est tendue sont meilleures que celles qui sont maigres et ridées. 8. Cette remarque ne s'applique pas seulement aux orges, mais tous les grains bien remplis et dont l'écorce est tendue sont les meilleurs, le moins qu'ils n'aient par hasard un volume excédant de beaucoup leur volume naturel, et qu'ils ne soient en même temps trop mous et trop spongieux; ces grains, sachez-le, contiennent une humeur excrémentitielle; ils sont inférieurs aux précédents ; par conséquent il ne faut pas s'en servir [immédiatement] après les avoir récoltés ; mais on les déposera dans des endroits secs et on les abandonnera longtemps à eux-mêmes, afin qu'une partie de l'humeur excrémentielle se perde par l'évaporation, et une autre par la coction, jusqu'à ce qu'étant séchés, ils se resserrent dans une juste mesure. 9. Les grains qu'on conserve très longtemps finissent par se détériorer; ils sont arrivés à cet état lorsqu'ils laissent échapper une espèce de poussière fine quand on les divise. 10. L'ivraie croît en abondance avec le froment; dans l'orge on en trouve peu, mais beaucoup d'égilope ; dans les lentilles, il se forme par la transformation de la plante elle-même de la pisaille et des sécurigères, qui sont de petites graines dures, rondes et impropres à l'alimentation; de même dans l'ers on trouve le gaillet et l'orobanche. 11. Les graines que je viens d'énumérer sont tout à fait mauvaises; quant à la plante qu'on appelle mélampyre, il est vrai qu'elle prend aussi naissance par la transformation du froment, mais elle n'est pas à beaucoup près aussi mauvaise que l'ivraie. 12. De semblables métamorphoses se font également pour les autres grains; aussi ne faut-il pas négliger de purifier tous ceux qu'on destine à servir d'aliment; car, il faut le reconnaître, si nous ne sentons pas le dommage qu'elles nous causent chaque jour, parce qu'il est peu marqué, ce dommage , s'additionnant pendant un long espace de temps, finira par devenir sensible.13. Sachez que les céréales propres à être emmagasinées sont celles qui se dessèchent avant de pourrir. 14. On appellerait avec raison petit froment le petit épeautre, car ce dernier ressemble au froment par sa couleur, sa densité et son degré de chaleur. 15. Il y a plusieurs autres céréales semblables qui ne sont pas tout à fait de la même espèce que celles que nous venons d'énumérer; quelques-unes tiennent le milieu entre l'orge et le petit épeautre ou entre le froment et le petit épeautre; d'autres se rapprochent beaucoup du grand épeautre, de l'orge, du petit épeautre ou du froment; il y en a d'autres encore qui ressemblent au grand millet ou au petit millet; les uns portent des noms simples, comme la graine qu'on appelle en Italie sitanium, les autres des noms composés, comme celle qu'on nomme en Cappadoce orge nue et celle qui, en Bithynie, a reçu le nom d'épeautre-froment.

2. DU FROMENT.

(Tiré du 1er livre d'Athénée. )

1. Parmi les céréales, celles qui ont les propriétés nutritives les plus prononcées sont les froments ; ils différent entre eux en ce qu'ils réchauffent ou humectent plus ou moins suivant les espèces, le soi qui les produit, la constitution des saisons et de l'air, enfin suivant la durée d'emmagasinage. 2. On distingue les froments, selon les espèces, en sitaniques et farineux, et en sémidalites; les sitaniques sont légers, d'une consistance spongieuse et blancs; car ils sont bien élaborés, et la substance terreuse qu'ils contiennent est suffisamment distribuée et dissoute par leur propre coction; aussi donnent-ils une nourriture toute préparée, qui se digère bien, et qui, en général, se transforme aisément; de plus cette nourriture s'assimile facilement et s'échappe promptement par la perspiration, mais elle est moins abondante et de moindre qualité que celle fournie par les sémidalites, et elle est plus favorable au développement de la santé qu'à celui de la force. 3. Le froment sémidalite est plus lourd que le sitanique; il est compact, jaune, transparent et difficile à digérer; mais il distribue une matière nutritive abondante qui se perd difficilement par la perspiration; en général, il est plus favorable au développement de la force qu'à celui de la santé. 4. Considérés d'après les lieux où on les récolte, les froments produits par des terrains secs et maigres diffèrent de ceux qui poussent dans les terrains fertiles et gras; car les premiers, formés d'une matière moins abondante, plus légère et plus ténue, sont, il est vrai, facilement élaborés et transformés, mais ils donnent moins d'aliment; à cette espèce appartiennent les froments produits par les terrains qu'on appelle brûlés ; car le froment, étant semé sur un sol où l'on a incendié des bois, devient blanc, spongieux et sitanique, à cause du peu de substance grasse et d'aliment que contiennent les cendres. 5. Les froments qui poussent dans les terrains fertiles et gras, y trouvant une nourriture abondante et ferme, sont compactes , pesants et très nutritifs; les plaines bien exposées aux vents et au soleil produisent aussi des froments de bonne qualité et beaucoup plus nutritifs. 6. Eu égard aux localités, les froments semés dans un pays très froid et exposé à la neige diffèrent de ceux qui poussent dans un pays chaud; car ceux que produisent les pays froids sont plus élaborés et composés de particules ténues; tels sont les sitaniques : comme, chez eux, la force [assimilatrice] se concentre, et qu'ils reçoivent une nourriture peu abondante, que cette nourriture leur arrive peu à peu et qu'elle subit une coction prolongée, peut-être la substance terreuse qu'ils renferment est plus élaborée et plus divisée; voilà pourquoi ces froments sont légers et se résolvent en farine fine. 7. Nous avons ouï dire aussi que les froments d'été sont également légers, et que ceux produits par les pays exposés à la neige leur ressemblent. 8. Les froments semés dans les pays chauds reçoivent une nourriture abondante et compacte, mais moins divisée et moins élaborée. 9. Les froments qui croissent dans les marais sont peu nourrissants et légers; ils font un sang mauvais et réchauffent moins le corps. 10 Les sols humides produisent également des froments peu nourrissants et faibles; il paraît que, par une transformation complète du genre, ils se changent en ivraie par suite de la surabondance d'eau. 11. Les froments récoltés dans des terrains ombragés et pleins d'arbres fournissent plus d'excréments que de substance utile. 12. Les froments diffèrent entre eux eu égard à la constitution des saisons et à celle de l'atmosphère; eu égard aux saisons, soit que leur succession se fasse d'une manière tempérée et égale, tant sous le rapport du froid et de la chaleur que sous celui des pluies et de la sécheresse, car alors le froment est bien nourri et d'un volume convenable; soit, au contraire, que les changements de saisons se fassent intempestivement, d'une manière démesurée et inégale; dans ce cas, en effet, le froment devient maigre et peu nourri; eu égard à l'atmosphère, les froments ne se ressemblent pas si l'air est serein, bien éclairé par le soleil, et bien rafraîchi par les vents dans le temps convenable, ou si, au contraire, il est nébuleux, mal réchauffé par le soleil, et si, de plus, il tombe souvent de petites pluies lorsque la saison est déjà chaude et que le grain est presque arrivé à sa maturité; car alors il périt par la rouille. 13. De même, vers le temps où les épis se remplissent, s'il souffle des vents lourds, secs et chauds, et que les vents appelés brûlants soufflent avec force et longtemps, ces vents brûlent et dessèchent les épis, d'où il résulte que le froment est peu nourri. 14. D'après la durée de l'emmagasinage, le froment nouveau diffère du vieux et de celui qui tient le milieu entre les deux; car le froment nouveau fournit beaucoup de suc crémeux par la coction, est flatulent et nutritif; le vieux, au contraire, fournit moins de cette espèce de suc; il est sec et peu nourrissant; mais celui qui tient le milieu, eu égard à la durée de l'emmagasinage, le tient également sous les autres rapports.

3. DE L'USAGE DES VIANDES D'APRES LES SAISONS.

1 Le cochon est très mauvais après le printemps jusqu'au coucher automnal des Pléiades; depuis cette époque jusqu'au printemps il est très bon. 2. La chèvre est mauvaise en hiver; au printemps elle commence à devenir meilleure jusqu'au coucher d'Arcture. 3. Le mouton est également très mauvais en hiver; il s'engraisse après l'équinoxe jusqu'au solstice d'été; quant au boeuf, il s'engraisse lorsque l'herbe monte en graine, vers la fin du printemps, et pendant tout l'été. 4. Parmi les oiseaux, les meilleurs en hiver sont ceux qui viennent [dans nos pays] pendant cette saison, par exemple le merle, la grive et le ramier; le coq de bruyère est bon en automne ; il en est de même de la tête noire, de la rubiette et du bruant ; c'est aussi dans ce temps que les cailles ont le plus de graisse. 5. Les poules ne se portent pas trop bien en hiver, surtout quand le vent est au sud; la tourterelle est bonne en automne. 6. Parmi les poissons, quelques-uns doivent être préférés pendant le frai, comme la salicoque, la langouste, et les mollusques, par exemple le calmar et la seiche; d'autres quand ils commencent à couver leurs oeufs, comme les muges ; mais quand ils ont une grande quantité d'oeufs ils sont maigres et peu nutritifs, et plus encore après le frai. 7. C'est après le coucher d'Arcture que le thon est le plus gras; en été il est moins bon.

4. DU FROMENT BOUILLI.

(Tiré de Galien.)

1. Le froment bouilli est un mets lourd et difficile à digérer; mais, si on le digère lorsqu'il est ainsi préparé, il a une grande puissance, il nourrit fortement et donne une force considérable à ceux qui le mangent.

5. DE L'ALICA.

1. L'alica, qui est une espèce de froment, est très nourrissant et contient des humeurs visqueuses, soit qu'on le mange après l'avoir fait bouillir dans de l'eau seule, avec du vin miellé, du vin d'un goût sucré ou du vin astringent (car chacun de ces liquides doit être employé suivant les circonstances), soit qu'on y mêle, en remuant, de l'huile et du sel; quelquefois on y ajoute aussi du vinaigre, et les médecins disent que l'alica ainsi assaisonné est de l'alica préparé à la ptisane. 2. Le pain fait d'alica est également très nourrissant, mais il ne passe pas aussi facilement qu'un autre.

6. DE L'AMIDON.

1. L'amidon se fait avec du froment; il a la vertu d'effacer les aspérités, car il n'a ni astringence, ni âcreté appréciables. 2. Il est semblable par ses qualités aux pains lavés, mais il donne moins de nourriture, et il ne développe pas de chaleur.

7. DES GÂTEAUX FAITS AVEC LA FARINE.

1. Les fritures se font uniquement avec l'huile; on verse l'huile dans une poêle placée sur un feu qui ne fume pas; quand cette huile est chaude, on verse dedans la farine de froment délayée dans beaucoup d'eau; par la cuisson dans l'huile, cette farine se prend et s'épaissit promptement comme du fromage nouveau; alors les cuisiniers retournent le gâteau de façon que la partie supérieure devienne inférieure et touche à la poêle, et que la partie inférieure, qui est suffisamment cuite, soit ramenée à la surface de l'huile ; quand la partie inférieure est prise, ils retournent de nouveau deux ou trois fois le gâteau jusqu'à ce qu'il leur semble cuit également de tous les côtés. 2. Il est évident que ce mets contient des humeurs épaisses, qu'il resserre le ventre, et qu'il engendre des humeurs crues; voilà pourquoi on y ajoute quelquefois tantôt du miel, tantôt du sel marin ; ces fritures constitueraient déjà une espèce de gâteau au même titre que ces autres gâteaux improvisés que font les gens de la campagne ou les pauvres de la ville. 3. Certes les fritures sans ferment qu'on cuit dans un four entouré de feu, dont on les ôte ensuite pour les jeter immédiatement dans du miel chaud afin de les en imbiber complètement, sont également une espèce de gâteau; il en est de même de toutes les fritures qu'on prépare au moyen d'itria, avec du miel; il y a deux espèces d'itria, les meilleures sont appelées rhymmata, les plus mauvaises lagana. 4. Par conséquent, tous les mets qu'on compose avec ces itria, ou avec de la farine sémidalite, contiennent des humeurs épaisses, passent difficilement, obstruent les conduits de l'aliment qui sont dans le foie, augmentent le volume de la rate, lorsqu'elle est affaiblie, enfin engendrent des calculs dans les reins ; mais ils sont très nourrissants si on les digère bien, et s'ils se transforment exactement en sang. 5. Ceux qu'on prépare avec du miel ont des propriétés mixtes, puisque le miel lui-même contient des humeurs ténues et atténue tout ce qu'il touche ; en conséquence, les gâteaux qui ont absorbé une plus grande quantité de miel pendant leur préparation, et qui ont été cuits pendant plus longtemps, passent naturellement plus vite, engendrent des humeurs qui participent au ténu et à l'épais, et sont plus favorables au foie, aux reins et à la rate, que les gâteaux préparés sans miel, pourvu toutefois que ces organes soient sains; si, au contraire, ils commencent à s'obstruer, ou s'ils sont affectés soit d'inflammation, soit de squirrhe, les gâteaux avec du miel ne sont pas moins nuisibles que les autres, quelquefois même ils le sont plus encore, surtout ceux dont la farine est très visqueuse; mais les mets ainsi préparés ne causent aucun dommage à la poitrine et au poumon. 6. Comme il y a dans mon pays beaucoup de gens qui font bouillir de la farine de froment avec du lait, il est bon de savoir que ce mets est du genre de ceux qui se collent aux voies alimentaires. 7. Tous les mets de ce genre, bien qu'ils contiennent de bonnes humeurs et qu'ils soient nourrissants, sont nuisibles à ceux qui en usent constamment, parce qu'ils causent des obstructions au foie, et qu'ils engendrent des calculs dans les reins.

8. DU PAIN DE FROMENT.

1. Le pain le plus favorable à la santé d'un homme qui n'est pas jeune et qui ne se fatigue pas est celui qui contient beaucoup de ferment, et aussi beaucoup de sel, qui a été longtemps trituré et manipulé, et qu'on a cuit dans un four chauffé de tous côtés à une chaleur modérée. 2. Le goût vous servira à juger de l'excès du ferment ou du sel; car il est mauvais que le goût soit désagréablement affecté par la trop grande proportion de ces ingrédients. 3. Ceux qui ont imaginé de préparer le pain lavé ont inventé un mets peu nourrissant, mais qui prévient, autant qu'il est possible, les dangers de l'obstruction; en effet, ce pain n'a rien d'épais, ni de visqueux; il est plutôt aérien que terreux; on reconnaît sa légèreté par le poids, et parce qu'il ne va pas au fond de l'eau, mais qu'il surnage comme du liège. 4. Les meilleurs pains sont ceux qu'on cuit dans un four chauffé de tous côtés; viennent ensuite les pains cuits dans un four chauffé par le bas seulement, pourvu qu'ils soient préparés de la même manière que les premiers; car ils leur sont inférieurs, parce qu'ils ne sont pas également cuits à l'intérieur. 5. Les pains cuits sur le gril ou dans les cendres chaudes sont tous mauvais, parce qu'ils sont inégalement cuits; en effet, leur extérieur est rôti outre mesure, tandis que l'intérieur est cru. 6. Après le pain de froment, le meilleur est celui de grand épeautre, si cet épeautre est de bonne qualité; après ces derniers le pain de petit épeautre occupe le second rang.

9. DU PAIN.

(Tiré du XXXe livre d'Athénée.)

1. Les pains légers sont peu propres à être réduits en crème et peu nourrissants, parce que la cuisson attaque et évapore davantage la partie nutritive; c'est aussi pour cela que les mets appelés itria et lagana sont peu propres à être réduits en crème. 2. Par la même raison, parmi les pains propres à être réduits en crème, ceux qui sont fortement cuits nourrissent moins que les autres; il en est de même du pain cuit deux fois; car, après l'avoir légèrement cuit, on le réduit de nouveau en farine par la trituration; ensuite il subit une seconde manipulation et une seconde cuisson; pénétré d'abord par la chaleur et rendu un peu diffluent, ce pain le devient beaucoup plus encore, et se dissout beaucoup plus par la seconde manipulation; une grande partie de sa substance se consume ensuite par la seconde cuisson; ce qui en reste devient léger, spongieux, ténu, et se distribue facilement dans le corps. 3. Il est clair que le pain chaud et frais est plus nourrissant que celui qui est froid et rassis, car sa chaleur favorise la digestion.

10. DE L'ORGE.

(Tiré de Galien.)

1 Le froment échauffe évidemment; l'orge, au contraire, a quelque chose de refroidissant de quelque manière qu'on la prépare, soit qu'on en fabrique des pains, soit qu'on la fasse bouillir après l'avoir mondée, soit qu'on en prépare de l'alphiton; elle engendre aussi une humeur détersive. 2. Le pain d'orge, parce qu'il ne contient rien de glutineux, est plus friable, non seulement que le pain de froment, mais que celui de grand épeautre, et surtout que celui de petit épeautre; il est clair, par conséquent, qu'il donne peu de nourriture au corps.

11. DE L'ORGE.

(Tiré du XXXe livre d'Athénée.)

1. L'orge nue et sans écorce fournit beaucoup de suc crémeux et de principe nutritif; elle se rapproche plus du froment que les autres espèces. 2. Après elle vient l'orge à deux rangées de grains, qui contient moins de matières impures que les orges rougeâtres à une seule rangée.

12. DE L'ALPHITON ET DE LA MAZA.

(Tiré de Galien.)

1. Ces mets fournissent une nourriture peu abondante, insuffisante pour ceux qui prennent de l'exercice, suffisante pour ceux qui n'en font pas. 2. Sous le rapport des propriétés nutritives, la maza diffère autant du pain d'orge que ce dernier diffère du pain de froment; elle se digère moins facilement que le pain d'orge et remplit davantage le ventre de flatuosités; si elle séjourne longtemps dans les intestins, elle y cause du trouble. 3. Si elle a été fortement triturée et mélangée, elle passe plus facilement; si on y ajoute du miel, cela fait qu'elle excite plus vite encore le ventre à rejeter les excréments.

13. DU PETIT ET DU GRAND ÉPEAUTRE.

1 Le pain fait de grand épeautre est le meilleur après celui de froment, du moins si le grand épeautre est de bonne qualité; après lui les pains de petit épeautre tiennent le second rang; mais, si le grand épeautre est de mauvaise qualité, les pains de petit épeautre ne sont nullement inférieurs aux premiers. 2. Si le petit épeautre est très bon, le pain qu'on fait avec lui, pourvu qu'il soit chaud, vaut beaucoup mieux que celui de grand épeautre; rassis il devient tellement inférieur au pain de grand épeautre, que, si on le mange après un ou deux jours, ou, à plus forte raison, après plusieurs jours de cuisson, on croit avoir de la terre glaise dans l'estomac ; quand il est encore chaud, il est recherché même par les habitants des villes, qui le mangent avec un certain fromage du pays appelé fromage au lait aigre. 3. Ce pain, dis-je, lorsqu'il est chaud, n'est pas seulement recherché par les paysans, mais aussi par les habitants des villes. 4. Celui qui a déjà trois ou quatre jours, est, même pour les paysans, plus désagréable à manger, plus difficile à digérer, et traverse plus lentement le ventre, inconvénient dont le pain chaud est exempt; dans ce cas, il nourrit suffisamment, en sorte qu'il n'est pas de beaucoup inférieur au pain de ménage fait avec du froment. 5. Le grain du petit épeautre est revêtu d'une pellicule comme le grand épeautre et l'orge; ce n'est qu'après l'avoir mondé qu'on en fait du pain ou qu'on s'en sert à tout autre usage; après l'avoir fait bouillir dans l'eau, on le mange aussi avec la sauce appelée par les paysans apothermon, en y ajoutant du vin doux cuit; quelquefois aussi on le mange avec du sel. 6. Le grand épeautre de qualité supérieure, s'il est bien mondé, fournit ce qu'on appelle le tragos, dont beaucoup de gens font usage lorsqu'il a été bouilli avec de l'eau; ils jettent ensuite l'eau et versent dessus du vin nouveau cuit, du vin d'un goût sucré ou du vin miellé; on y ajoute aussi des pignons macérés clans l'eau jusqu'à ce qu'ils se soient gonflés considérablement.

14. DE L'AVOINE.

1. L'avoine sert à la nourriture du bétail et non à celle de l'homme, à moins qu'on ne soit forcé par la famine à en faire du pain; mais, lorsqu'il n'y a pas de famine, on la mange après l'avoir fait bouillir dans de l'eau, avec du vin d'un goût sucré, du vin nouveau cuit ou du vin miellé, de la même manière que le petit épeautre. 2. Ainsi que ce dernier, l'avoine est pourvue d'une chaleur assez considérable, quoiqu'elle ne soit pas dure comme le petit épeautre; aussi donne-t-elle moins de nourriture; du reste, le pain d'avoine est désagréable; mais il ne resserre ni ne relâche le ventre.

15. DU PETIT MILLET ET DU GRAND MILLET, QU'ON APPELLE AUSSI MELINE.

1. Quelquefois on fait aussi du pain avec ces graines, quand il y a disette des céréales dont nous venons de parler; mais ce pain est peu nourrissant et froid; il est friable et cassant; aussi n'est-il pas étonnant qu'il dessèche le ventre relâché. 2. Dans la campagne, on fait bouillir la farine de millet, et on y mêle ensuite, pour la manger, de la graisse de porc ou de l'huile. 3. Le petit millet est, sous tous les rapports, meilleur que le grand, car il est plus agréable au goût, moins difficile à digérer, il resserre moins le ventre et il nourrit davantage. 4. Les paysans mangent aussi quelquefois la farine de millet après l'avoir fait bouillir avec du lait, de la même manière que la farine de froment ; évidemment ce mets est d'autant meilleur à manger, que le lait est supérieur à ces grains, aussi bien sous le rapport de la grande bonté des sucs que sous tous les autres.

16. DU RIZ.

1. On emploie cette céréale pour resserrer le ventre, mais elle est plus difficile à digérer que l'alica et nourrit moins.

17. DES LENTILLES.

1. Leur écorce est astringente, mais ce qu'on appelle leur chair contient des humeurs épaisses; elle est terreuse et possède des propriétés un peu âpres, propriétés dont l'écorce jouit au suprême degré; mais le suc que les lentilles contiennent est le contraire de l'astringent; voilà pourquoi on peut préparer avec elles une boisson qui relâche le ventre, si on les fait bouillir dans de l'eau, et qu'on donne cette eau à boire, en l'assaisonnant avec du sel ou du garon et en y ajoutant de l'huile. 2. Bouillies deux fois, comme nous l'avons déjà dit, les lentilles ont des propriétés opposées à celles de la décoction, car elles arrêtent les flux de ventre et donnent du ton à l'orifice de l'estomac, aux intestins et à tout le ventre. 3. Les lentilles privées d'écorce perdent l'astringence prononcée qu'elles avaient et deviennent alors plus nourrissantes, puisqu'elles contiennent des humeurs épaisses et qu'elles passent lentement; mais elles ne tarissent pas les fluxions vers les intestins, comme les lentilles non écorcées; c'est, en outre, un mets qui contient de mauvaises humeurs et qui engendre l'humeur atrabilaire. 4. Les lentilles obscurcissent aussi la vue quand l'oeil est en bon état, en le desséchant outre mesure; mais elles sont utiles quand l'oeil est dans l'état contraire.

18. DES FÈVES.

1. On prépare la purée de fèves soit seule, soit avec de l'orge mondée ; ce dernier mets donne un certain embonpoint, mais la chair n'est pas ferme comme celle que donne le porc; elle est plutôt un peu molle; la purée est flatulente, de quelque manière qu'on la prépare. 2. Les fèves n'ont pas une substance compacte et pesante, mais spongieuse et légère, et elles ont quelque chose de détersif de même que l'orge mondée. 3. Quoique la purée de fèves soit déjà un mets flatulent, les fèves bouillies et mangées entières donnent encore plus de vents. 4. Torréfiées, elles cessent d'être flatulentes, mais elles deviennent plus difficiles à digérer, ont de la peine à passer, et distribuent comme aliment une humeur épaisse. 5. Si on les mange vertes, avant qu'elles soient mûres et séchées, elles produisent le même effet que tous les autres fruits qu'on mange avant la maturité, c'est-à-dire qu'elles donnent au corps un aliment assez humide.

19. DES POIS GRECS.

1. Les pois grecs ressemblent un peu aux fèves, quant à leur substance considérée en général, et on les mange de la même manière; mais ils en diffèrent sous ces deux rapports : d'abord ils ne sont pas flatulents comme les fèves, et ensuite ils n'ont pas de propriété détersive; aussi traversent-ils plus difficilement le ventre que les fèves.

20. DES POIS CHICHES.

1. Les pois chiches ne sont ni moins flatulents ni moins nourrissants que les fèves, mais ils excitent les désirs vénériens en même temps qu'ils engendrent du sperme. 2. Ils possèdent une vertu détersive plus forte que les fèves; elle est si prononcée, qu'une certaine espèce broie manifestement les calculs qui se forment dans les reins ; ce sont les pois chiches noirs et petits; on les appelle béliers; ce qu'il y a de mieux dans ce cas, c'est d'en boire seulement la décoction après les avoir fait bouillir dans de l'eau. 3. Les pois chiches verts contiennent une humeur excrémentielle comme toutes les autres graines vertes; de même les pois chiches torréfiés cessent d'être flatulents, mais ils deviennent moins digestibles et plus resserrants; ils fournissent moins d'aliment au corps.

21. DES LUPINS.

1. Le lupin est d'une substance dure et terreuse; il engendre donc nécessairement une humeur épaisse ; si cette humeur n'est pas bien élaborée dans les veines, il y aura accumulation de l'humeur appelée proprement crue. 2. Adouci par l'ébullition, le lupin devient mangeable comme les substances sans qualité sensible, et cette ressemblance fait qu'il n'active ni ne retient les évacuations alvines.

22. DU FENUGREC, QU'ON APPELLE AUSSI CORNE DE BOEUF.

1. Il relâche le ventre, si on le mange au commencement du repas avec du garon; on le mange également avec du vinaigre et du garon; ou avec du vin, du garon et de l'huile; quelques-uns le mangent aussi avec du pain; alors il ne cause pas de mal de tête, comme celui qu'on prend avec du garon. 2. On mange aussi le fenugrec avant qu'il n'ait fructifié, avec du vinaigre et du garon; d'autres versent dessus de l'huile et le mangent avec du pain; pris de cette manière, il cause de la céphalalgie. 3. La décoction de fenugrec bue avec du miel peut faire évacuer toutes les humeurs nuisibles qui se trouvent dans les intestins; comme le fenugrec jouit aussi d'une vertu détersive, il provoque les déjections intestinales.

23. DES PHASÈLES ET DES GESSES À FLEUR JAUNÂTRE.

1. On mange également ces légumes comme le fenugrec, avant les autres mets, pour relâcher le ventre; dans ce cas, on les fait macérer dans de l'eau jusqu'à ce qu'ils poussent des racines , après quoi on les trempe dans du garon ; ils ont une humeur plus nourrissante que celle du fenugrec, pourvu qu'ils ne soient pas distribués dans le corps avant d'être convenablement digérés. 2. Ces légumes tiennent en quelque sorte le milieu entre les aliments qui renferment une bonne humeur et ceux qui en contiennent une mauvaise, entre ceux qui se digèrent facilement et ceux qui se digèrent difficilement, entre ceux qui passent vite et ceux qui passent lentement, entre les flatulents et ceux qui ne le sont pas, entre ceux qui nourrissent peu et ceux qui nourrissent beaucoup, car ils n'ont aucune propriété active.

24. DES GESSES.

1. On mange les gesses comme la purée de lentilles à l'orge mondée. 2. Elles contiennent une humeur qui a les mêmes propriétés, mais qui est d'une consistance plus épaisse que celle des gesses à fleurs jaunâtres et des phasèles : c'est pour cela même que les gesses ordinaires sont en quelque sorte plus nourrissantes que ces dernières.

25. DES GESSES CHICHES.

1. Les gesses chiches sont semblables aux gesses ordinaires; aussi les emploie-t-on exactement de la même façon ; elles ont les mêmes propriétés, à cette exception près que les gesses chiches sont plus dures et plus difficiles à cuire, et par conséquent plus difficiles à digérer que les gesses ordinaires. 2. Dans mon pays, on trouve dans les céréales une graine sauvage, dure et ronde, plus petite que l'ers, et qu'on appelle raxow avec un x (arachos), [pour la distinguer des gesses chiches désignées sous le nom d'rakow avec un k (aracos) ; ] on jette l'arachos après l'avoir trié de même que la securigère.

26. DES HARICOTS OU PHASÉOLES.

1. Les haricots sont appelés par quelques-uns gousses, par d'autres phaséoles. 2. Ils relâchent plus le ventre que les pois grecs, mais ils sont moins flatulents; ils sont nourrissants.

27. DE L'ERS.

1. Dans les grandes famines, on mange quelquefois de l'ers par nécessité; l'ers blanc est moins nauséabond que celui qui tient du jaune ou du jaune pâle. 2. Si on le fait bouillir deux fois et qu'on le fasse tremper plusieurs fois dans l'eau, il perd ce qu'il a de désagréable, mais il dépose en même temps ses propriétés détersives et incisives; aussi ne reste-t-il plus que la partie terreuse de sa substance, qui constitue alors un aliment desséchant sans amertume appréciable.

28. DU SÉSAME ET DE L'ÉRYSIMON.

1. La graine de sésame est grasse, aussi devient-elle bientôt huileuse lorsqu'on la conserve : c'est pourquoi elle rassasie vite ceux qui la mangent, retourne l'orifice de l'estomac, se digère lentement et donne un aliment gras au corps; comme elle contient une humeur épaisse, elle ne passe pas rapidement non plus. 2. Sous le rapport de la substance, l'érysimon est en quelque sorte de la même espèce que le sésame, mais il est plus désagréable à manger, donne moins d'aliment au corps, et il est plus mauvais sous tous les rapports ; tous deux sont d'un tempérament chaud et donnent par conséquent de la soif.

29. DE LA GRAINE DE PAVOT.

1. La graine du pavot cultivé est bonne comme assaisonnement, si on en saupoudre le pain; mais la graine blanchâtre est meilleure que la noirâtre; elle jouit d'une propriété refroidissante : c'est pourquoi elle fait dormir; et même, si on en prend trop, elle fait tomber dans la cataphora, et elle se digère difficilement; elle arrête encore l'expectoration des matières que la toux fait ordinairement rejeter de la poitrine et du poumon. 2. De plus elle convient à ceux qui ont une descente d'humeurs ténues de la tête, mais elle donne au corps un aliment peu abondant.

30. DE LA GRAINE DE LIN.

1. La graine de lin est mauvaise pour l'orifice de l'estomac et difficile à digérer; elle donne peu d'aliment au corps, n'a rien qui relâche le ventre, mais elle possède une légère vertu diurétique, surtout si elle est torréfiée.

31. DE L'ORMIN.

1. On l'emploie après l'avoir torréfié, réduit en farine par la trituration et mélangé avec du miel ; mais il contient peu de matière nutritive.

32. DU CHANVRE.

1. La graine de chanvre est difficile à digérer et mauvaise pour l'orifice de l'estomac ; elle cause de la céphalalgie, contient de mauvaises humeurs, mais elle échauffe fortement.

33. DE LA GRAINE DU GATILIER.

1. La graine du gatilier passe pour réprimer les désirs vénériens; elle donne peu de nourriture au corps; celle qu'elle donne dessèche, refroidit et est presque complètement exempte de flatuosités; pour toutes ces causes, la graine du gatilier convient à ceux qui veulent vivre chastement.

34. DU JARSEAU ET DE LA VESCE.

1. Ces graines ressemblent, par leur forme, aux lentilles; on en mange en cas de famine, et surtout dans le printemps, quand elles sont encore vertes, comme les pois chiches et les fèves. 2. Elles ne sont pas seulement désagréables au goût, mais encore difficiles à digérer; elles resserrent le ventre, contiennent de mauvaises humeurs, et engendrent l'humeur atrabilaire.

35. DE LA COURGE.

1. La courge bien bouillie n'a aucune qualité appréciable au goût; elle admet naturellement plusieurs modes de préparations, parce qu'elle tient le milieu entre les extrêmes; ainsi, considérée en elle-même, la courge donne au corps une nourriture humide et froide, par conséquent peu abondante; elle traverse facilement le ventre, parce que sa substance est glissante; elle ne se digère pas trop mal, lorsqu'elle ne se corrompt pas dans l'estomac avant [la digestion]. 2. Torréfiée ou frite dans la poêle, elle perd une grande partie de son humidité propre; mais ce qui reste de sa substance n'acquiert aucune propriété active; il en est de même, si on la prépare avec la sauce simple ; on se trouve très bien de l'accommoder avec l'origan, à cause de sa qualité aqueuse. 3. Quelques personnes conservent la courge pour l'hiver, après en avoir ôté les graines, et fait sécher ce qu'on peut appeler sa chair; mais, ainsi préparée, elle ressemble plutôt à tout autre chose qu'à de la courge; car elle n'a plus de suc et devient sèche comme de vieux souliers.

36. DES PASTÈQUES.

1. Par nature les pastèques sont un peu froides et pourvues d'une humidité abondante, mais elles ont quelque chose de détersif; voilà pourquoi elles poussent aux urines et passent plus facilement par le bas que les courges et les melons. 2. Leurs graines sont plus détersives encore que ce qu'on peut appeler leur chair, mais elles engendrent des humeurs nuisibles dans le corps, surtout si elles ne sont pas bien digérées; dans ce cas, elles causent habituellement le choléra; car la pastèque peut produire le vomissement, même avant qu'elle ne se soit corrompue [dans l'estomac], et, si on en mange abondamment, elle excitera à coup sûr des vomissements, à moins qu'on ne prenne après elle quelque mets qui contienne de bonnes humeurs.

37. DES MELONS.

1. Les melons sont moins humides que les pastèques, ils ont moins de mauvaises humeurs, poussent moins aux urines, passent moins facilement par le bas, et n'ont pas, comme elles, la faculté d'exciter le vomissement. 2. Quoiqu'ils soient de beaucoup inférieurs aux fruits d'arrière-saison favorables à l'orifice de l'estomac, ils ne sont pas aussi nuisibles à cette partie que les pastèques.

38. DES CONCOMBRES.

1. Ils ont quelque chose de diurétique aussi bien que les pastèques, mais moins qu'eux. 2. Pour ceux qui les digèrent bien, les concombres engendrent, quand on en mange beaucoup à la fois et longtemps de suite, une humeur froide et démesurément épaisse, laquelle ne saurait subir facilement, pendant la coction qui se fait dans les veines, la transformation en sang de bonne qualité.

39. DES FIGUES.

1. Les figues possèdent les propriétés communes non seulement à tous les fruits de l'arrière-saison, mais à tous ceux qu'on appelle fruits d'été; elles ne sauraient échapper non plus à l'inconvénient d'engendrer des humeurs de mauvaise nature, quoiqu'elles participent moins à cette propriété que tous les autres fruits d'été. 2. Elles ont l'avantage de traverser rapidement les intestins et de parcourir facilement tout le corps, car elles ont une faculté détersive assez notable. 3. Tous les fruits d'arrière-saison donnent peu d'aliment au corps, mais les figues ont cet inconvénient moins que tous les autres; cependant les figues, comme les fèves, ne produisent pas une chair compacte et ferme, mais tant soit peu spongieuse; il est vrai qu'elles remplissent aussi le ventre de flatuosités, mais la rapidité de leur passage fait que ces flatuosités ne persistent pas longtemps. 4. Les figues parfaitement mûres causent à peine quelque dommage; il en est de même pour les figues sèches qui ont beaucoup d'avantages, quoiqu'elles aient quelque inconvénient pour ceux qui en usent abondamment, car elles forment un sang qui n'est pas tout à fait de bonne qualité ; voilà pourquoi elles entraînent à leur suite une multitude de poux. 5. Elles jouissent d'une faculté atténuante et incisive qui excite le ventre à évacuer les excréments, et qui purge les reins; elles sont nuisibles au foie et à la rate, quand ces organes sont enflammés; il en est de même des figues fraîches, non qu'elles possèdent une faculté particulière, mais parce qu'elles rentrent dans la règle commune à tous les aliments et à toutes les boissons d'un goût sucré; mais, quand les organes susdits sont affectés d'obstruction ou de squirrhe, les figues sèches prises toutes seules ne leur font ni bien ni mal; elles leur font, au contraire, un bien notable, si on les mêle aux médicaments incisifs et détersifs. 6. Ceux qui mangent les figues fraîches ou sèches avec des aliments incrassants se font un mal considérable.

40. DES FIGUES.

(Tiré de Rufus.)

1. Les figues sont meilleures que les autres fruits d'arrière-saison, cependant elles ont aussi quelque inconvénient. 2. Les figues sèches peuvent nourrir suffisamment le corps; aussi les anciens les donnaient-ils à manger aux athlètes. 3. Pythagore fut le premier qui changea cette alimentation, en faisant manger de la viande à Eurymène de Samos; c'est ainsi que ce régime a été modifié.

41. DU RAISIN.

(Tiré de Galien).

1. Les figues et les raisins sont, pour ainsi dire, à la tête des fruits d'arrière-saison; car ils nourrissent plus que tous les fruits d'été et ne sont guère capables d'engendrer des humeurs viciées, surtout quand ils sont bien mûrs; seulement la chair qu'ils forment n'est pas ferme et dense, mais spongieuse et humide; voilà pourquoi l'embonpoint qu'ils produisent disparaît rapidement. 2. Les raisins nourrissent moins que les figues; leur plus grand avantage c'est de passer vite; pour cette raison ils font beaucoup de mal, si par hasard ils sont retenus, inconvénient que n'ont pas les figues mûres; car, lors même qu'il n'en passe pas beaucoup et qu'elles sont bien digérées dans l'estomac, elles fournissent au corps un aliment irréprochable. 3. Les raisins ne possèdent ni l'un ni l'autre de ces avantages, car, ils ne se digèrent pas facilement, s'ils sont retenus; et, pendant la distribution qui se fait dans le foie et dans les veines, ils engendrent une humeur crue qui ne se change pas facilement en sang. 4. Le raisin passe plus vite encore, si on avale les grains sans pépins, car les pépins sont astringents, se digèrent mal et ne s'assimilent pas. 5. Parmi les raisins mis en réserve, celui qu'on conserve dans le marc de raisins renforce l'estomac affaibli et excite à manger ceux qui n'ont point d'appétit ; mais il ne passe pas et porte à la tête, si on en mange beaucoup; celui qu'on conserve dans du vin nouveau cause encore plus facilement de la céphalalgie que le premier; celui qu'on conserve par la suspension ne porte pas à la tète, et ne resserre ni ne relâche le ventre; il est plus facile à digérer que les autres raisins mis en réserve. 6. Les raisins sucrés contiennent une humeur un peu chaude; aussi causent-ils de la soif; les raisins âpres et acides ont un suc froid; les raisins vineux tiennent le milieu entre le chaud et le froid; les raisins sucrés relâchent le ventre, surtout quand ils sont aqueux; les raisins acides et âpres ne sont pas seulement mauvais sous ce rapport [c'est-à-dire parce qu'ils resserrent le ventre], mais aussi sous celui de la coction qui se fait dans l'estomac. 7. La manière la plus exempte d'inconvénients de manger les raisins, c'est de les choisir quand ils sont naturellement charnus et qu'ils sont très mûrs, et d'en user modérément, soit qu'il aient acquis cette maturité sur le cep, soit que la suspension leur ait donné ce qui leur manquait sous ce rapport; la seconde manière est de prendre des raisins aqueux sans qualité acide ou âpre, qu'on peut manger en grande quantité pour relâcher le ventre. Quelques-uns boivent aussi du vin nouveau dans le même but, surtout celui qui a un goût très sucré, car il relâche très fortement le ventre; celui, au contraire, qu'on tire des raisins âpres ou acides est le plus mauvais sous tous les rapports. La liqueur provenant de la macération du marc de raisins est t diurétique et porte à la tête.

42. DES RAISINS SECS.

1. Les raisins secs âpres sont d'un tempérament plutôt froid; de même, les raisins secs sucrés sont plutôt chauds. 2. Ceux qui sont âpres renforcent l'orifice de l'estomac et resserrent le ventre : il est clair que les raisins fortement âpres ont ces mêmes propriétés à un degré plus fort. 3. Les raisins secs sucrés procurent une constitution en quelque sorte moyenne, car ils n'affaiblissent pas l'orifice de l'estomac et ne relâchent pas non plus le ventre d'une manière appréciable; ils sont toujours doués d'une faculté tempérante et modérément détersive, en sorte que, par ces deux qualités, ils émoussent les pincements légers à l'orifice de l'estomac; mais quant aux pincements plus forts, il est clair qu'ils ont besoin de remèdes plus efficaces. 4. Parmi les raisins secs, les meilleurs sont ceux qui sont un peu gras et ont la partie qu'on peut appeler écorce, mince. 5. Quelques personnes, et elles ont raison, ôtent les pépins des grands raisins secs et sucrés, par exemple des scybélitiques, avant de les manger; cette espèce de raisins secs a aussi la peau épaisse et dure, si on les conserve longtemps, et il faut les macérer dans l'eau avant de les manger; les pépins s'enlèvent aussi plus facilement par ce procédé. 6. Il y a d'autres raisins secs qui ont les propriétés contraires de ceux dont nous venons de parler, puisqu'ils sont âpres et petits et n'ont pas du tout de pépins. 7. L'aliment que les raisins secs distribuent au corps est, sous le rapport de la qualité, semblable à celui que lui donneraient les raisins frais eux-mêmes; mais, pour la quantité, celui qu'on tire des raisins secs, gras et doux, est plus abondant que l'aliment fourni par les raisins âpres et qui ne sont pas gras. 8. Les raisins secs sont aussi meilleurs pour l'orifice de l'estomac que les figues sèches.

43. DES SYCAMINS, QU'ON APPELLE AUSSI MÛRES.

1. Si les mûres arrivent dans un estomac pur, et si on les prend avant les autres mets; elles passent très rapidement et frayent la route aux autres aliments; si, au contraire, on les prend après d'autres mets ou si elles trouvent une humeur viciée dans l'estomac, elles se corrompent très rapidement, et leur corruption est d'une espèce toute particulière et inexprimable, de même que celle des courges; car, bien que ce soient les fruits d'été les plus innocents , toutes deux ont, si elles ne passent pas vite, une corruption de mauvaise nature de même que les pastèques; toutefois, ces dernières ne font pas non plus grand mal quand elles passent vite. 2. Le temps opportun pour manger les mûres ainsi que les pastèques, c'est quand le corps de l'estomac est sec et chaud, car alors le foie a nécessairement les mêmes qualités. 3. Les mûres sont aussi douées d'une légère astringence; elles humectent toujours, mais ne refroidissent pas dans toutes les circonstances, à moins qu'on ne les prenne froides; elles donnent très peu d'aliment au corps, ainsi que les pastèques.

44. DES FRUITS DE LA RONCE.

1. Les mourons sont plus astringents que les mûres, et, si on en mange souvent, ils donnent de la céphalalgie; chez quelques individus l'orifice de l'estomac en est aussi affecté; voilà pourquoi il faut bien laver ce fruit avant de se hasarder à le manger, précaution qu'il ne faut pas du tout négliger non plus pour les mûres; les mourons ne relâchent pas le ventre, ils le resserrent plutôt.

45. DU FRUIT DE L'ÉGLANTIER.

1. Le fruit de l'églantier est un peu plus astringent que celui de la ronce; aussi resserre-t-il plus fortement le ventre, mais il donne peu de nourriture au corps.

46. DES BAIES DE GENÉVRIER.

1. Les baies de genévrier sont légèrement sucrées et encore plus légèrement astringentes, mais elles sont aromatiques, et il est clair qu'elles échauffent à cause de l'âcreté dont elles sont douées. 2. Elles donnent peu de nourriture au corps, et, si on en mange beaucoup, elles causent des pincements à l'orifice de l'estomac, échauffent la tête et y causent de la douleur; elles poussent modérément aux urines.

48. DES PÊCHES.

1. Le suc de ces fruits et ce qu'on peut appeler leur chair se cor rompent facilement et sont tout à fait mauvais; par conséquent il ne faut pas en manger après les autres mets, comme quelques-uns ont la coutume de le faire, car elles se corrompent en surnageant [dans l'estomac], et corrompent en même temps les autres aliments.

48. DES ABRICOTS ET DES ABRICOTINS.

1. Ces fruits appartiennent aussi au genre des pêches, mais ils en diffèrent un peu en ce qu'ils sont meilleurs, car ils ne se corrompent ni ne s'aigrissent comme elles dans l'estomac; ils paraissent en général plus agréables au goût; c'est pourquoi ils sont aussi plus favorables à l'orifice de l'estomac. 2. Nous avons déjà dit auparavant que ces fruits nourrissent peu. 3. Les abricotins sont meilleurs que les abricots.

49. DES POMMES.

1. Les pommes astringentes ont une humeur froide et terreuse, tandis que les pommes aigres en ont une froide mais ténue; les pommes sucrées ont un tempérament moyen qui se rapproche du chaud; de même les pommes tout à fait fades, et pour ainsi dire aqueuses, se rapprochent plutôt du froid. 2. Les pommes astringentes retiennent évidemment les évacuations alvines ; les pommes aigres, si elles trouvent une humeur épaisse dans le ventre, la divisent et la font descendre; de cette manière elles rendent les excréments humides, mais, si elles trouvent le ventre pur, elles le resserrent plutôt; les pommes sucrées sont mieux absorbées. 3. Quant aux pommes fades, qui ne sont pas agréables au goût, qui ne donnent pas de force au ventre et ne le resserrent pas non plus, on a raison de les estimer peu, et on les jette aux cochons. 4. Celles qu'on met de côté après les avoir laissées bien mûrir sur l'arbre deviennent, souvent très utiles dans les maladies , soit qu'on les enduise de pâte pour les cuire modérément dans les cendres chaudes, soit qu'on les fasse bien bouillir dans la vapeur d'eau chaude. 5. Il faut les donner immédiatement après le repas, quelquefois avec du pain pour renforcer le ventre et l'orifice de l'estomac à ceux qui manquent d'appétit, qui digèrent lentement, qui sont sujets aux vomissements, à la diarrhée et à la dysenterie. 6. Les pommes fortement âpres se prêtent bien à cet usage, car elles gardent une astringence modérée, si on les prépare comme je viens de le dire, tandis que les pommes faiblement âpres perdent toute leur astringence par cette préparation et de-viennent semblables par là aux pommes naturellement aqueuses.

50. DES COINGS ET DES POIRES À COING.

1. Ces fruits ont cela de particulier, si on les compare aux autres pommes, qu'ils sont doués d'une astringence plus forte et que leur gelée peut se conserver, si on veut la mettre en réserve après l'avoir fait bouillir avec du miel, tandis que la gelée des autres pommes s'aigrit si on la conserve, parce qu'elle contient beaucoup d'humeur froide. 2. La gelée des poires à coing se conserve mieux; et même elle dure plusieurs années; dans ce cas, elle présente à l'ouverture du vase une croûte épaisse, comme il s'en forme souvent aussi une sur le miel et sur quelques autres substances; il ne faut pas toucher à cette croûte, si on veut que la gelée mise en réserve se conserve longtemps sans subir de changement. 3. La gelée de coings ronds est moins agréable et plus fortement astringente, en sorte qu'elle peut aussi quelquefois être utile pour renforcer le ventre affaibli â un degré très-prononcé.

51. DES POIRES ET DES GRENADES.

1. Si l'on applique aux poires et aux grenades tout ce que j'ai dit des pommes, on n'aura plus besoin d'un nouveau chapitre particulier sur ce sujet. 2. Les grenades donnent très peu de nourriture au corps, tandis que les poires, et surtout les grandes, qu'on appelle chez nous menates, ont quelque chose de nutritif.

52. DES NÈFLES ET DES SORBES.

1. Ces fruits sont tous deux astringents, mais les nèfles le sont beaucoup plus que les sorbes; voilà pourquoi les nèfles constituent un mets très utile quand le ventre est relâché ; mais les sorbes sont plus agréables à manger. 2. Il est clair qu'il faut user de tons ces fruits en petite quantité, et non en abondance, comme des figues et des raisins. 

53. DES DATTES.

1. Certaines dattes sont sèches et astringentes, comme les dattes d'Égypte; certaines autres sont molles, humides et sucrées, comme celles qu'on appelle caryotes (dattes-noix); les meilleures de cette dernière espèce croissent à Jéricho clans la partie de la Syrie ap2 pelée Palestine. 2. Entre ces deux espèces toutes les autres tiennent le milieu, et sont plus ou moins humides ou sèches, sucrées ou astringentes; quand les extrêmes seront trouvés, il vous sera très facile de déterminer toutes les espèces intermédiaires; nous avons, en effet, montré que les humeurs sucrées sont nourrissantes, et que les humeurs âpres sont favorables à l'orifice de l'estomac et resserrent le ventre. 3. Toutes les dattes sont difficiles à digérer et causent de la céphalalgie, si on en mange beaucoup; quelques-unes déterminent en outre une sensation de pincement à l'orifice de l'estomac. 4. L'humeur qu'elles distribuent dans le corps est toujours épaisse, et, de plus, elle présente quelque chose de visqueux, si les dattes sont grasses; lorsqu'il y a quelque principe sucré mêlé à cette humeur, elle obstrue en peu de temps le foie; quand cet organe est enflammé et affecté de squirrhe, il éprouve un grand dommage, si on mange de cette espèce de dattes; après le foie c'est la rate qui est atteinte et obstruée.

54. DES OLIVES.

1. Ces fruits donnent très peu de nourriture au corps, surtout ceux qui ont mûri sur l'arbre ; tandis que ces derniers contiennent une humeur grasse, les olives appelées halmades ou colymbades renferment une humeur astringente; voilà pourquoi elles renforcent aussi l'orifice de l'estomac et excitent l'appétit. 2. Parmi ces dernières, les plus propres à cet effet sont celles qu'on conserve dans du vinaigre.

55. DES NOIX ET DES NOISETTES.

1. Les noix aussi bien que les noisettes ne donnent pas beaucoup de nourriture au corps, cependant la noisette en contient davantage; toutes les deux sont douées d'une faculté modérément astringente, qui fait place avec le temps à une propriété huileuse. 2. La noix verte n'a pas de qualité astringente ni huileuse bien appréciable, mais elle est en quelque sorte fade et aqueuse. 3. La noix se digère plus facilement que la noisette; elle est plus favorable à l'orifice de l'estomac, surtout si on la mange avec des figues sèches. 4. La noix fraîche est évidemment plus propre à relâcher le ventre que ne l'est la noix sèche ; cependant, si on trempe une noix sèche dans l'eau et qu'on la pèle, elle devient semblable à la noix verte quant aux propriétés.

56. DES AMANDES.

1. Dans ces fruits c'est la faculté atténuante et détersive qui domine; quelques-unes possèdent à un tel degré la propriété de diviser les humeurs épaisses et visqueuses, qu'on ne saurait les manger à cause de leur amertume. 2. Les amandes sont aussi douées d'une propriété huileuse et grasse comme les noix; elles donnent peu de nourriture au corps.

57. DES PISTACHES.

1. Ces fruits nourrissent très peu, mais ils sont propres à renforcer le foie, car ils sont doués de propriétés: légèrement amères et astringentes.

58. DES PRUNES.

1. Les prunes donnent très peu de nourriture au corps, mais elles conviennent quand on se propose d'humecter et de refroidir modérément le ventre; elles sont également utiles après être séchées. 2. Les meilleures sont celles qui croissent à Damas.

59. DES JUJUBES.

1. Ces fruits sont mangés par les femmes ou par les enfants en jouant, mais ils sont peu nourrissants et difficiles à digérer; ils ne sont pas non plus favorables à l'orifice de l'estomac. 2. Il est clair qu'ils donnent très peu de nourriture au corps.

60. DES CAROUBES.

1. Les caroubes contiennent un mauvais suc; elles sont bilieuses, difficiles à digérer et ne passent même pas rapidement.

61. DES CÂPRES.

1. Les câpres ont des propriétés pénétrantes, et, pour cette raison, elles donnent très peu de nourriture au corps. 2. Salées et trempées dans l'eau assez longtemps pour qu'elles perdent toutes les propriétés qu'elles tenaient du sel, les câpres donnent peu de nourriture, il est vrai, mais enlèvent le phlegme contenu dans le ventre et résolvent l'obstruction des viscères, quand on les mange avant les autres mets avec du vinaigre miellé, ou de l'huile et du vinaigre. 

62. DES SYCOMORES.

1. On trouve cette plante à Alexandrie; elle porte un fruit semblable à la figue ; ce fruit n'a aucune âcreté, il est, au contraire, doué d'un goût légèrement sucré; il est, en quelque sorte, un peu refroidissant et humide.

63. DU FRUIT DE LA PERSÉE.

1. La persée se rencontre également à Alexandrie, et on raconte que son fruit est si pernicieux en Perse qu'il tue ceux qui en usent, mais qu'il est devenu bon à manger après avoir été transporté en Égypte, où on le mange comme les poires et les pommes. 

64. DU CITRON.

1. Ce fruit est composé de trois parties : la partie acide qui est au milieu, la partie qui entoure celle-là et qu'on peut appeler sa chair, enfin l'enveloppe qui le recouvre à l'extérieur. 2. Cette dernière partie est parfumée et aromatique, mais elle est difficile à digérer; cependant elle favorise la digestion, si on en use comme médicament, et, prise en petite quantité, elle renforce l'orifice de l'estomac. 3. On emploie la partie aigre et impropre à l'alimentation pour la jeter dans le vinaigre afin de le rendre plus aigre encore. 4. La partie moyenne qui donne de la nourriture au corps est difficile à digérer.

65. DES PLANTES SAUVAGES.

1. Outre qu'elles donnent peu de nourriture au corps, ces plantes contiennent toutes de mauvaises humeurs, et quelques-unes d'entre elles nuisent à l'orifice de l'estomac; il faut en excepter les plantes épineuses, au moment où elles sortent de terre.