le fonds d'écran provient de
CATHEDRAL CHURCH
OF SAINT ENNODIUS AND
SAINT VERONICA
AT WENCHOSTER
RETOUR
À L’ENTRÉE DU SITE
RETOURNER
à LA TABLE D'ENNODIUS ENNODIUS
Oeuvre numérisée par Marc Szwajcer
LETTRES
LIVRE VIII
livre I - livre II -
livre III - livre IV -
livre V - livre VI - Livre
VII
LIBER OCTAVUS.
|
LIVRE HUITIÈME.
|
EPISTOLA PRIMA.
ENNODIUS BOETIO.
|
LETTRE PREMIÈRE.
ENNODIUS A BOÈCE.
Eloge
de Boèce et compliments à
l’occasion de son élévation au Consulat (510). Il le prie
de lui céder une maison qu’il possédait à Milan. |
|
Optimæ spei plenus, cui faustum cupio,
ad curam officii epistolaris aspiro. Decet enim vestris fascibus hac
præfatione delibari; et inter purpuras, possessoris luce crescentes,
qualicunque non abstinere colloquio. Nunquid solius doctrinæ
beneficiis amor agnoscitur, nec fas esse credendum est, prodire in
medium desideria rusticantis? simplicius innotescunt vota nullo
peritiæ velata præstigio. Ergo nos hoc sumus ore, quod pectore: non
amara præcordiorum delenificis possumus mutare sermonibus; pudens
laudator est, cui in concinnatione blandimenti dicenda mens suggerit.
Deo ergo omnipotenti gratias, qui in
vobis, dum vetera familiæ vestræ bona custodit, nova multiplicat, et
quod plus est apice dignitatis dignos facit esse culminibus.
Redditur quidem vestræ gloria ista origini, sed, quod est clarius,
merito impetrante personæ.
Fuerit in morem veteribus curulium
celsitudinem campi sudore mercari, et contemptu lucis honorum luce
fulgere; sed aliud genus virtutis quæritur, postquam præmium facta
est Roma victorum. Noster candidatus post manifestam decertationem
debitum triumphum, dum nunquam viderit bella, sortitur. Judicio
exigit laureas, et congredi non necessarium duxit armatis. Inter
Ciceronis gladios et Demosthenis enituit, et utriusque propositi
acumina quasi natus in ipsa artium pace collegit. Nemo dissonantiam
Atticæ perfectionis metuat et Romanæ, nec præcipua gentium bona
societatem dubitet convenire. Unus es qui utrumque complecteris, et
quidquid viritim distributum poterat satis esse, avidus maximarum
rerum possessor includis. Eloquentiam veterum, dum imitaris,
exsuperas, dicendi formam doctissimis tribuis, dum requiris. Est
apud me epistolæ vestræ, quæ hujus rei fidem faciat, veneranda
compositio. Utinam quæ a vobis diriguntur, tam essent crebra quam
suavia!
Dicatis forsitan: Par fuit propinquum
laudare, in commune augmentum laborantem, quia non est proprium,
quod quasi singulariter videtur palmata conferre. Venit ad me
equidem portio de curuli. Sed, si mihi creditis, plus erigor de
genio et studiis sublimati. Interdum accesserunt ista de casibus,
soli contigerunt illa virtuti. Prope inops ad scriptionem adducitur
suffragii consularis, qui tantum de parentibus gloriatur. Tibi
utrumque in peculio est, Latiaris scientia et vena purpurarum. O si
mihi non styli epistolaris consideratio in longum equidem producta
manus opponeret! quod alii relatione dictant, ego crudum, et si
confusis ordinibus explicarem.
Redeo ad tabellarum fidem. Valere me
nuntio, et utrum valeatis imploro: ad summam beneficii postulans ut
dignatio me reciproci sermonis adtollat: hoc quoque deprecans, ut
domum quam in Mediolanensi civitate et abundantia vestra et
neglectus propemodum jam reliquit, mihi quo vultis genere concedatis.
Justum est enim ut parentes vestri habeant quod de patrimonii mole
descendit. Credite mihi, Deo teste, quia si impetrare sine
detrimento census vestri meruero, quasi dono obligatus, obsequiis
potioribus respondebo. De qua parte, sic vobis feliciter universa
contingant, si securus esse debeo, plenarii mihi documenti dirigite
firmitatem. |
C’est animé de l’espoir d’un heureux
succès que j’entreprends de vous écrire. Il nous est permis en effet
de venir, par ce discours, goûter notre part à vos honneurs du
consulat, et lorsque la pourpre dont vous êtes revêtu est rehaussée
encore par les mérites de celui qui la porte, c’est bien l’occasion
de donner libre cours à notre éloquence. Ne sera-t-il accordé qu’à
la science d’exprimer l’amour, et faudra-t-il croire qu’il est
défendu à un ignorant de laisser tout haut parler son cœur? Les vœux
que l’art ne déguise pas de ses artifices, n’en éclatent qu’avec
plus de sincérité. Quant à nous, ce que nous sommes de cœur, nous le
sommes de bouche, absolument inhabile à voiler sous les feintes
douceurs du langage les amertumes du cœur. C’est louer avec
discrétion que de ne faire entrer dans la louange que ce que suggère
la pensée.
Grâces soient donc rendues au Dieu
tout-puissant de ce qu’en votre personne il conserve la vieille
gloire de votre famille, y ajoute même et, ce qui est plus encore à
considérer que la sublimité de cette dignité, vous rend digne des
plus élevées. Cette gloire, il est vrai, était due à votre origine,
mais, et vous n’en êtes que plus illustre, vous l’obtenez par les
mérites de votre personne.
Ce fut l’usage des anciens de
conquérir sur le champ de bataille les dignités curiales et
d’acheter au péril de leur vie l’éclat des honneurs. Mais
aujourd’hui que Rome est devenue le prix des vainqueurs, il faut un
autre genre de mérite. Notre candidat, après une lutte éclatante,
reçoit un triomphe mérité, bien que jamais il n’ait vu la guerre. Il
a conquis ses lauriers au barreau et n’a pas cru nécessaire de
porter les armes. Ses armes, à lui, sont celles de Cicéron et de
Démosthène, et comme s’il fut né au sein de la paix, en un siècle
ami des arts, il a recueilli et s’est approprié ce que l’un et
l’autre de ces orateurs ont de suréminent. Qu’on ne craigne point
une fâcheuse discordance entre le génie d’Athènes et celui de Rome;
n’en doutez point, ce que les divers peuples ont de bon peut être
recueilli et réuni. A vous seul vous embrassez l’un et l’autre, et
ce qui, distribué entre plusieurs, aurait suffi à chacun, répond à
peine en bloc à votre avidité. Vous voulez imiter l’éloquence des
anciens et vous la surpassez; vous prêtez à vos maîtres la
perfection que vous leur demandez. J’en ai, dans votre très honorée
lettre, la preuve manifeste. Plut à Dieu que vos missives fussent
aussi fréquentes qu’agréables!
Vous direz peut-être: il n’est que
juste de louer un parent qui travaille au bien commun de la famille
car ce n’est pas à un seul, comme on pourrait le croire, que la toge
et les palmes apportent de l’honneur. Il m’arrive une part, il est
vrai, de vos dignités. Mais, croyez-le, je suis plus fier encore du
génie et des talents de celui qui les a reçues. S’il est arrivé que
ces dignités fussent attribuées au hasard, en vous elles ne furent
données qu’au mérite. On a vu les suffrages amener au bâton d’ivoire
consulaire des nullités, uniquement en considération de leurs aïeux.
En vous sont réunis et le mérite personnel de l’éloquence latine et
l’éclat d’une liguée où la pourpre est de tradition. O si le cadre
d’une lettre déjà longue ne m’imposait des limites! ce que d’autres
embellissent des grâces du discours, au risque de paraître oublier
ma condition, moi je le dirais tout crûment.
Je
reviens à l’objet propre des lettres : Je vous annonce que je vais
bien et je vous prie de me donner des nouvelles de votre santé, Vous
mettrez le comble à vos faveurs si vous m’accordez celle de me
répondre. J’ajoute une prière: vous avez dans la ville de Milan une
maison que, dans votre abondance, vous négligez et semblez avoir
abandonnée; je vous demande de me la céder à tel titre qu’il vous
plaira. N’est-il pas justes que vos parents aient ce qui provient du
patrimoine de famille? J’en prends Dieu à témoin, croyez que si j’ai
la bonne fortune de l’obtenir même sans que votre avoir subisse
aucun détriment, je vous en serai reconnaissant comme d’une
libéralité. Puissiez-vous, de votre côté, voir vos vœux aussi
heureusement réalisés. Veuillez donc, si je dois être assuré de
cette acquisition, m’en donner la garantie par un écrit en règle. |
|
EPISTOLA II.
ENNODIUS AVIENO.
|
LETTRE II.
ENNODIUS A AVIÉNUS.
Il le
complimente de son
éloquence. |
|
Par erat magnitudinem vestram ingenii
sui opulentiam, dum sancti patris sectatur instituta, depromere, et
multo acquisitam sudore doctrinam pro diligentiæ testimonio
ventilare. Gemina vobis contingit antefata concinnatione laudatio;
quando crescente susceptorum devotione fertur in medium palma
sermonis, res quæ nobis amorem vestrum reserat, vos extollit. Uno
eodemque usu et oris pompa multiplicatur et fidei. In pace
constituti illam subjectis affectionem putantur impendere, quam
loquuntur. Hæc, mi domine, ille occupatissimus pater et in humana
locatus arce custodit. Nam contemptum manifestat, qui in otio degens
verba non tribuit. Legisse me memini, Sermonis avari nullus honor.
Nunc ergo servitiis salutationis
adhibitis, indico me valere. Superest ut suggestio mea eliciti
gaudeat ubertate colloquii. |
Il appartenait à votre Grandeur, qui
s’attache à marcher d’après les leçons qu’elle reçoit d’un vénérable
père, de produire au jour l’opulence de son génie et de faire
briller, pour attester son affection filiale, la science acquise par
de si longs travaux. Cette composition vous vaudrait doublement des
éloges le jour où la piété filiale devenue plus en honneur, on
mettrait au concours la palme de la parole: ce discours qui nous
révèle votre bon cœur, vous fait honneur. Du même coup éclate la
pompe de votre éloquence et la force de votre foi. Ceux que la
fortune élève au faîte des dignités paraissent porter de l’affection
à leurs inférieurs en proportion de ce qu’ils daignent leur adresser
la parole. C’est, mon cher Seigneur, ce que ne manque point de faire
ce père si occupé, élevé aux plus hautes charges de l’Etat. N’est-ce
pas, en effet, témoigner du mépris que de garder le silence lorsque
l’on a le loisir de parler? Je me souviens avoir lu : l’Avare de
paroles ne rend point d’honneur.
Quant à
présent je vous adresse mes salutations respectueuses et vous fais
savoir que je vais bien. Il reste à désirer que mes avances me
vaillent la joie d’un long entretien. |
|
EPISTOLA III.
ENNODIUS MESSALÆ.
|
LETTRE III.
ENNODIUS A MESSALA.
Ennodius a reçu quelques compositions
oratoires de Messala et ne s’en montre pas entièrement satisfait.
Il lui reproche surtout de ne pas écrire. |
|
Post unam epistolam quam victus
crebris scriptionibus emisisti, in continua taciturnitate perduras:
et credo necessitate, non studio, servas philosophiam nil dicendi;
non respiciens veteres, ut loquerentur melius, in præsentia nil
locutos, et illam silentii curam nutricem fuisse sermonis. Tu
videris mihi disciplinas Atticas in muta fideliter parte sectari,
nolens silentio acquisita vulgare: ostende post oris ferias quæ tibi
per aurium callem divitiæ commearunt.
Destinasti mihi dictiones tuas; in
quibus et si non fuit optanda sublimitas, non tamen deprehensa est
quæ sorderet abjectio. Egi Deo gratias, quia jam te de vinculo in
quo negligentia constringebaris, exemeras. Promisi sequentibus
potiorem successum æstimatione principii. Sed vos inchoationem,
quantum ad me cui nihil dirigitis, cum extremitate junxistis.
Domine Messala, quotidie cujus sis
filius, habere ante oculos cordis Dei nostri dispensatione
contingat. Sed nolo prolixa esse, quæ aspera sunt.
Vale, officio salutationis accepto, et
correctum te suggestionibus meis frequentibus resigna maniis
litterarum. |
Après une lettre qu’enfin mes
nombreuses missives vous forcèrent à m’écrire, de nouveau vous vous
obstinez à garder le silence. Cette philosophie du silence, vous la
gardez, je crois, par nécessité, non à dessein ; vous ne prenez pas
garde que les anciens ne se taisaient un temps que pour mieux parler
dans la suite et que cette règle du silence était pour eux la source
de l’éloquence. Vous me paraissez, vous, n’adopter la méthode des
écoles silencieuses d’Athènes que dans sa première partie et vous
refusez de divulguer ce que vous avez appris dans le silence.
Montrez donc, en laissant parler vos lèvres, les trésors de science
que vos oreilles attentives ont recueillis.
Vous m’avez adressé vos dictions si je
n’y ai pas trouvé l’élévation désirable, on ne peut cependant y
relever rien de trop inférieur. J’ai rendu grâces à Dieu de ce que
vous aviez enfin brisé les liens où vous tenait enchaîné la
négligence. D’après ces débuts je me suis promis mieux pour
l’avenir. Mais hélas! ce dernier envoi que vous m’avez fait, à moi à
qui vous n’adressez rien, n’est encore que le premier.
Seigneur Messala, que Dieu vous
accorde d’avoir tous les jours présent aux yeux du cœur de qui vous
êtes fils. Mais je ne veux pas prolonger ces pénibles paroles.
Adieu.
Agréez mes salutations et montrez-moi par de fréquentes lettres, que
mes avis ont porté leur fruit. |
|
EPISTOLA IV.
ENNODIUS ARATORI.
|
LETTRE IV.
ENNODIUS A ARATOR.
Arator,
parti à la campagne, oublie de donner de ses nouvelles;
Ennodius en réclame. |
|
Ad longinqua digrediens caritatis
immemor exstitisti, non licuit tecum piam diligentiam muros exire.
Dum urbis habitator es, fabricatas blanditias, non sine dædala arte
custodis, at ubi rus petendum esse decreveris, quasi graves sarcinas
amicorum memoriam derelinquis. Tu villares delicias expetisti, et
nos apud te inter mœnium mala remansimus. Non habuit radicem
affectio, quam velut curarum tormenta separasti. Dicas, unde tam
velox exprobratio? nec æquum esse parari ante delicta tortorem.
Scripturum te, mox fuisses ad optata pervectus, sine cunctatione
promisisti: quantum pater tuus semper culparum tuarum vulgator
exposuit, jam a te pueri paginis vacui commearunt. Timeo ne ista
taciturnitas diuturnitate convalescat; et in usum silentii turpis
crescat incuria.
Domine mi, saluto ego, et promissi te
memorem debere esse convenio, quatenus inter cana nemora redimitus
hederis efferaris. |
En même temps que vous vous êtes
éloigné de nous, vous avez perdu le souvenir de notre amitié.
Emporter au delà des murs des sentiments d’affection vous fut chose
impossible. Tant que vous habitez la ville vous prodiguez, et non
sans art, vos hypocrites flatteries. Mais dès que vous avez décidé
d’aller à la campagne, vous laissez là, comme d’encombrants bagages,
le souvenir des amis. Vous avez cherché les délices des champs, et
nous, nous restons ici près de vous, emprisonnés dans nos murailles.
Elle n’avait pas de racines, cette affection, pour que vous l’ayez
ainsi mise de côté comme un importun souci. Vous direz peut-être :
Mais pourquoi si promptement éclater en reproches? Faut-il avant les
délits armer le bourreau? Vous deviez écrire aussitôt arrivé au
terme où vous portaient vos désirs, vous en aviez fait la promesse
formelle. .Or au dire de votre père, qui jamais ne sut cacher vos
méfaits, des serviteurs sont venus de chez vous sans porter de
lettres. Je crains que ce penchant à ne rien dire ne s’aggrave avec
le temps, et que l’abus du silence ne favorise chez vous cette
insouciance dont vous devriez rougir.
Mon cher
seigneur, je vous salue donc et je vous tiens comme obligé de vous
souvenir de vos promesses puisque c’est le front couronné de lierre
qu’à l’ombre des futaies séculaires vous êtes promené. |
|
EPISTOLA V.
ENNODIUS FAUSTO.
|
LETTRE V.
ENNODIUS A FAUSTUS.
Le laconisme d’Ennodius ne permet pas
de préciser les faits du plus vif intérêt auxquels cette lettre fait
allusion.
C’est d’abord une troupe de serviteurs appelés en premier lieu
artisans, envoyés par l’évêque de Milan;
mais la suite révèle que ces pauvres gens venaient chez Faustus
plutôt pour être assistés que pour servir. Dans le nombre
se trouvent des femmes aveugles. L’une de ces femmes est
d’origine libre, ce qui ferait supposer que les autres
étaient d’origine servile. Or c’est une vierge chrétienne qui
parait déterminée à persévérer, pour l’amour de Jésus-Christ,
dans ce saint état.
Ennodius passe ensuite à une affaire délicate entre Faustus et
l’évêque de Milan.
Probablement Faustus avait prêté ou vendu à l’évêque Laurent des
mules, comme Ennodius lui-même céda ses chameaux au pape,
et le bon évêque négligeait de les rendre ou d’en verser le prix.
Ennodius avait pris la liberté d’en parler devant le prélat,
mais celui-ci faisait la sourde oreille et, malgré l’appui
d’un Gaïanus, dévoué au service de Faustus, ce fut
peine perdue. Il croit cependant qu’on pourrait insinuer à
l’évêque de tenir compte des nombreux et signalés services que lui a
rendus Faustus et de lui témoigner sa reconnaissance par quelque
présent convenable. Ennodius prie son ami de lui notifier
sans retard s’il accepte ce procédé ou, si non,
comment il conviendra d’agir. Il est à croire qu’il s’agit de
quelque quasi-contrat mal déterminé. Faustus aurait eu
l’intention de prêter ou de vendre tandis que l’évêque aurait cru
recevoir un don. |
|
Directos a sancto episcopo artifices
prosequi commendatione non opus est. Res enim plus suo placitura
genio, de devotione laudatoris abjurat injuriam. Familia est quam,
cum videritis, non possitis ambigere ab Ecclesia destinatam, et de
ejus thesauris et gremio sub hoc studio processisse, ut tractata
liberaliter pariat vobis in illa melioris sæculi commutatione
mercedem. In quibus mancipiis, juxta annuntiationem beatissimi
Laurentii martyris, opes esse maximas quis negabit? Sunt enim feminæ,
quæ quamvis exterioris hominis lumina perdidissent, mentium
splendore radiabunt: quidquid enim corporibus de prosperitate
subducitur, ad frugem crescit animarum. Nolite male accipere, quod
nec videre poterunt, nec videri: procul a maturitate vestra
illiciens decore formositas. Qui vitam suam, sicut vos in hoc
innocentiæ calle disposuit, si tales pascat, in cœlis est: crede
mihi, quamvis vobis gaudia pariat fusa ad Deum ubertas illa
lacrymarum, contenti eritis possidere sub continuatione plangentes.
Inter ista bona quæ præfatus sum,
licet magno vobis labore et pretio constitissent, adjicio quæ
sequuntur. Una inter ipsas, et ingenua, et sine filiis, et puto,
quod fit sanctis vicinum desideriis, nec habebit. Est enim in
Christianis hominibus fecunda sterilitas, et maximum solatium sæculi
adjutoria non habere.
Sed ne forte animus vester in
occupationes publicas debeat de anagnostici prolixitate fastidium;
quamvis bona in principiis locata vos animent, et quemlibet rancorem
detergeat in exordio, juxta oratoriam disciplinam, locata dulcedo;
tamen ne desideria vestra fabricata dissimulatione suspendam, nulla
ex illis documenta promerui. Quia commemorationem mularum facerem,
episcopo durum videtur: et quamvis famuli vestri fratris Gaiani
institisset efficacia, et supra modum nos pressisset importunitas,
nihil communi actione profecimus. Hoc tantum volunt inseri, multis
sanctum patrem vestrum beneficiis vestris et gratia invitatum,
muneris vobis vicissitudinem prospexisse: quod genus documenti si
placet, sine cunctatione rescribite, aut quæ ejus forma esse debeat,
intimate. Nunc ego ille periclitatæ utilitatis et in obsequiis
vestris annis pluribus jam probatus, quantum egerim, quod vix alter
per infinita chartæ damna narrasset, pernicibus sum verborum
saltibus elocutus. |
Les artisans que vous adresse le saint
évêque, n’ont nul besoin d’être munis d’une recommandation. Quand
une chose porte en elle-même ce qui peut le plus contribuer à la
faire agréer, c’est lui faire tort que de s’employer à la louer. Il
vous suffira de voir cette domesticité pour ne pas douter qu’elle ne
vous soit envoyée par l’église et qu’elle n’ait été tirée de ses
trésors et de son sein que dans le but de vous faire acquérir à
vous-même, en échange des libéralités que vous lui prodiguerez, une
large récompense dans le siècle meilleur. Qui donc ne reconnaîtrait,
selon la parole du bienheureux martyr Laurent, que de tels marchés
sont les plus avantageux du monde et nous procurent les plus
précieuses richesses? Dans le nombre se trouvent des femmes privées
il est vrai de la vue corporelle, mais dont les âmes brillent d’un
éclat merveilleux: car ce qui leur est refusé de bien-être corporel
est tout profit pour leurs âmes. N’allez pas les mal recevoir parce
qu’elles ne pourront voir et qu’elles n’offriront pas à la vue de
votre maturité les charmes d’une séduisante beauté. Pour celui dont
la vie est vouée au culte de la vertu, subvenir à de telles misères
c’est être au ciel : croyez-moi : les larmes abondantes que vous
versez devant Dieu vous procurent déjà une grande joie, mais vous
serez heureux de posséder sous votre toit des chrétiennes dont les
pieuses larmes ne tarissent pas.
Ce n’est pas tout : bien que ce que je
vous ai déjà signalé vous paraisse de très grand prix, voici mieux
encore. L’une de ces femmes, d’origine libre, est sans enfants, et,
disposition bien proche de la sainteté, je pense qu’elle n’en aura
jamais. Car il y a pour les chrétiens une stérilité féconde et se
priver des douceurs du siècle est la plus grande consolation.
Mais de
crainte que votre esprit absorbé par les charges publiques n’éprouve
du dégoût à la lecture d’une trop longue lettre, bien que les bonnes
choses dont je vous parle au début soient propres à piquer vôtre
intérêt et que les agréments dont j’ai, selon les lois de la
rhétorique, paré mon exorde, doivent rendre attrayant tout le
discours, je ne veut pas vous tenir plus longtemps en suspens au
sujet de ce que vous désirez savoir et, sans plus tarder, je vous
dirai que je n’ai pu obtenir aucun renseignement. J’ai bien parlé
des mules devant l’évêque, mais il a paru ne pas prêter l’oreille à
ce sujet. Notre frère Gaïanus qui vous est tout dévoué, a insisté de
son côté et nous avons pressé la chose jusqu’à l’importunité, mais
nos efforts communs sont restés sans résultat. On ne voit plus
d’autre moyen que celui d’insinuer au saint pontife votre père qu’il
doit se souvenir des nombreux services que vous lui avez rendus et,
en retour, vous témoigner sa reconnaissance par quelque présent. Si
cette manière d’agir vous agrée, écrivez-le moi sans retard si non,
indiquez-moi de quelle façon nous devons procéder. Et maintenant,
moi dont le dévouement vous est connu et qui depuis de nombreuses
années me suis employé à servir vos intérêts, je vous ai en quelques
mots rapides signalé tout ce que j’ai fait ce récit sous la plaine
d’un autre eut sûrement exigé de nombreuses pages. |
|
EPISTOLA VI.
ENNODIUS AVIENO.
|
LETTRE VI.
ENNODIUS A AVIÉNUS.
Nouvelles
de sa santé. |
|
Credo ad justitiam pertinere, ut quod
a vobis exspecto, primus exhibeam. Decet enim ut qui bona opera
præstolatur, invitet exemplo. Expugnat calcaribus tarditatem, qui
formam ministrat officii.
His ergo salutationis munus
impertiens, sanum me esse, post inæqualitatem quam pro peccatis sum
passus, enuntio; et statum vestræ prosperitatis inquiro, sperans ut
in hujus rei solutione multus incumbas. |
C’est justice, je crois, de fournir
moi-même le premier ce que j’attends de vous. Il convient, en effet,
que si l’on désire être l’objet d’honnêtes prévenances, on y invite
par son exemple. On éperonne ainsi la lenteur de celui auquel, le
premier, on rend ses devoirs.
En vous
adressant l’hommage de mes salutations, je vous annonce que me voici
relevé de la maladie dont je fus affligé pour l’expiation de mes
péchés et revenu en santé, je vous prie de me faire connaître l’état
de votre prospérité et j’espère que vous serez abondant sur ce
sujet. |
|
EPISTOLA VII.
ENNODIUS SENARIO.
|
LETTRE VII.
ENNODIUS À SÉNARIUS.
Lettre d’amitié. |
|
. Apud sanctas conscientias non negat
caritati debita sua gratiæ principalis occupatio, nec eliminat pii
amoris aula fervorem. Testimonium dat solidæ affectioni, qui eam
inter impedimenta oblivione non obruit. Commendate mihi scriptione
culmina vestra, quæ voto importunus emerui: custodia communionis,
honor est dignitatum.
His ergo obsequentissime salutans,
epistolas brevitate constringo, sciens posse productas horreri:
faciens ut pro me Domino gratias referatis, qui molestiam quam
pertuli, antequam ea discere potuissetis, abstersit. |
Sous l’inspiration d’une conscience
pure, les charges dont honore la confiance du prince n’empêchent pas
de rendre à l’affection ce qui lui est dû et la cour n’exclut point
les élans d’une tendre amitié. C’est faire preuve d’une solide
affection que d’en garder les sentiments sous la presse des
affaires. Faites-moi apprécier davantage encore, en m’écrivant, les
honneurs auxquels vous êtes élevé et dont l’importunité de mes
prières m’a obtenu de vous voir comblé ; conserver les relations
d’ami est l’honneur des dignités.
Là-dessus, je vous adresse mes très humbles salutations et je me
borne à cette courte lettre sachant très bien que prolongée elle
courrait risque de vous déplaire. Je vous prie de rendre grâces au
Seigneur pour moi de ce qu’il a daigné dissiper la peine dont j’ai
souffert avant que vous eussiez pu en être informé. |
|
EPISTOLA VIII
ENNODIUS HELPIDIO
DIACONO.
|
LETTRE VIII.
ENNODIUS AU DIACRE HELPIDIUS.
Agréable badinage pour obtenir des lettres. |
|
Quibus modis fraternitatem tuam ad
scribendum, quave arte sollicitem, quando homo verborum locuples in
me silentia peregrina custodis? Elegi ut te loqui loquendo faciam,
et illam Atticam eruditionem ad epistolas alia garrulitate producam.
Justum fuit ut tot diebus a promissione desisteres, et qualiter
pervenisses, nulla paginæ directione signares? aut forte contra me
illam tuam cautelitatem æstimas esse servandam? Dedignaris
colloquio, quorum gratiam multo sudore quæsisti? Crede mihi, nisi ab
hoc te vitio sub ea qua ambulare soles velocitate suspenderis,
necesse est ut ad alios nostra patrocinia transferamus, qui memores
constituti amorem munerentur obsequiis. His ergo salutans, amico et
medico indico me gravi corporis inæqualitate laborare: quam nisi te
dictante pagina jocos exhibitura curaverit, distensam per tormenta
ranulam longis hominibus coæquabo |
Par
quels moyens, par quel artifice pourrais-je pousser votre fraternité
à écrire, lorsque vous, un homme si abondant en paroles, vous gardez
là-bas un silence obstiné? Et bien, je veux tenter de vous faire
parler en parlant moi-même et d’amener par mon propre bavardage
cette érudition Attique à se produire dans une lettre. Est-ce juste,
en vérité, d’être resté de si longs jours sans tenir votre promesse
et sans même me faire savoir par la moindre lettre comment vous
aviez fait le voyage? Seriez-vous par hasard disposé à persévérer à
mon égard dans ces excès de discrétion? Vous dédaignez donc
l’entretien de ceux dont vous avez, à si grands frais, recherché
l’amitié ! Croyez-moi, si vous ne vous corrigez de ce vice avec
cette promptitude qui d’ordinaire caractérise votre marche, nous
serons forcés de nous chercher d’autres patrons qui sachent se
souvenir et payer notre affection de retour. Là dessus, en vous
disant adieu, c’est à l’ami et au médecin que je m’adresse je vous
révèle que je suis atteint d’un mal très grave; si une lettre de
vous, qui m’apporte un peu de gaieté, ne vient me guérir, on me
verra bientôt tirer une langue de six pieds. |
|
EPISTOLA IX.
ENNODIUS MESSALÆ.
|
LETTRE IX.
ENNODIUS A MESSALA.
Il
lui reproche sa nonchalance et son penchant pour l’école
buissonnière; il le
presse de lui écrire. |
|
Si jam te favor divinus a proposito
negligentiæ ad votiva ducit studia, si quo te vena, quo te domnus
Faustus vocat, adtendis, optata non taceas scriptione. Sed timeo, ne
dum officiosum desidero, sustineam rusticantem, et incipiat hoc
desideriis meis resistere quod cupivi. Cœlestes divitiæ illam
inertiam stimulo pietatis exsuscitent, et mendicitatem oris tui
superna ope locupletent. Ecce injuriis provocatus scribe.
Salutem ergo dicens, rogo ut quid
circa te agatur tabularum promulgatione cognoscam. |
Si par la grâce de Dieu vous sortiez
de vos habitudes de nonchalance pour vous adonner à l’étude, si vous
preniez garde à ce que promet votre génie naturel, à ce qu’attend de
vous le seigneur Faustus, vous ne négligeriez certes pas de m’écrire
comme je le désire. Mais je crains fort une déception et que,
lorsque je désire vous voir laborieux, je ne vous trouve à courir
les champs dans une grossière oisiveté. Que la divine miséricorde
dont les trésors sont inépuisables, vous réveille de cette léthargie
et que par un secours d’en haut, elle enrichisse votre parole si
pauvre. Allons, qu’au moins ces affronts vous obligent à m’écrire.
Je vous
dis donc adieu et vous prie de me faire connaître par vos lettres ce
qui se passe autour de vous. |
|
EPISTOLA X.
MAXIMO V. S.ENNODIUS
|
LETTRE X.
ENNODIUS A MAXIME SÉNATEUR.
Cette
lettre fut écrite avant la 23e du VIIe livre
qui a trait également au mariage de Maxime.
Ennodius malade ne pouvant y assister, envoie au futur époux
l’expression de ses vœux. |
|
Bene disponantur superno vota nostra
judicio. Ipse ad nuptias tuas veniat, qui primo parenti, dum adhuc
nativa immortalitate gauderet, supernæ benedictionis munus indulsit.
Faciat tibi Christus noster nec custoditæ integritatis fructum
perire, nec munera nuptiarum. Sic virginitas prosit ad sobolem, ut
castitati tuæ fecunditas nihil decerpat: et miro dispensationis
arcano, nec sæculo, dum pater es, pereas, nec Dei gratiæ, dum
pudicus. Veniat super te quod Isaac juniori filio pie inductus
optavit.
Illis domum socrus auspiciis uxor intrœat, quibus ad Tobiæ
penetralia nurus accessit,
sit tibi causa perfectæ dilectionis in conjuge, in te virginitas
custodita. Solam illam deputatam tibi noveris, cui te quasi non
esses, ex mundi fæce servasti. Ecce quia venire non potui, oratione
non desum. Domine mi, spero ut, honore salutationis accepto, quæ a
me directa sunt, dignanter accipias. |
Que vos vœux trouvent dans le conseil
divin un favorable accueil; qu’à vos noces vienne Dieu lui-même qui
accorda au premier père, encore en possession de l’immortalité
originelle, la faveur de sa bénédiction. Daigne notre Christ vous
accorder de ne perdre ni le fruit de la vertu que vous avez gardée,
ni les avantages des noces. Qu’ainsi la virginité tourne à
l’avantage de la famille, et que votre chasteté n’y perde rien ; par
un dessein admirable de la Providence, le siècle ne perdra rien en
vous, puisque vous serez père, ni la grâce divine, puisque vous
serez pudique. Obtenez ce qu’Isaac, pieusement sollicité, souhaita à
son fils le plus jeune. Que votre femme entre dans la maison de sa
belle-mère sous ces mêmes auspices qui accompagnèrent au foyer de
Tobie sa belle-fille. Trouvez en votre épouse le motif d’un amour
parfait et qu’elle le trouve en vous dans la virginité si fidèlement
gardée. Croyez que celle qui vous est choisie est l’unique à
laquelle, comme si vous n’étiez pas de ce monde de corruption, vous
vous êtes gardé. Je n’ai pu venir, mais je suis présent par la
prière. Je vous salue et j’espère, cher seigneur, que vous daignerez
agréer mon envoi. |
|
EPISTOLA XI.
ARATORI ENNODIUS.
|
LETTRE XI.
ENNODIUS A ARATOR.
Arator était alors à Rome,
un mot de la lettre permet de le supposer et aussi la circonstance
qu’il assista aux noces du sénateur Maxime. Cette lettre à
Arator suivit donc de près la précédente à Maxime, si elles
ne furent pas portées en même temps. |
|
Miror cur devenustes turpi silentio ad
Romanum decorem politi in te bona colloquii, et coactas multo sudore
divitias fugiens dispensationem taciturnitate consumas. Quidquid
dignis collatum fuerit, dum in usu est, ornat auctorem: ingeniorum
elegantiam qui concludit, extenuat; unus error est, prodire
rusticantem, et dignum laudis honore delitescere. Nunquid non
habuisti digna memoratu, aut ego tibi visus sum non colendus
eloquio? Fuit aliquando materia, quæ sic omnium linguis et litteris
celebranda sit, quando ad nuptialem copulam perductus homo est, cui
cum magna sit lux natalium, abundantia facultatum, disciplina et
pudor utrumque transgreditur? qui vitia carnis abjurans, pro
blandimento turpi respuebat quidquid leges dedere pro remedio: et
nolens uxoris corpus deputare servitiis, putavit se addicere, si
quidquam mundo impenderet liberam castitatem? Hæc et si non diligis,
debes tamen pro ingenii tui ostentatione laudare. Possumus credere
te bonum fieri, si audiamus quæ honesta sunt prædicantem.
Nunc salutem largissimam dicens, ut
rescribas admoneo: et non me de epistola mea æstimes; quam, Deus
testis est, dum de basilica remearem, transcussione dictavi. |
C’est pour moi un étonnement de vous
voir, par votre honteuse obstination à garder le silence, laisser
perdre son prix à une éloquence façonnée pour faire l’ornement de
Rome, et consumer ainsi sans fruit, faute de les distribuer, des
richesses littéraires qui coûtèrent tant à amasser. Tout honneur
accordé à ceux qui le méritent rejaillit sur son auteur; empêcher
l’esprit de manifester sa culture, c’est l’amoindrir. C’est une même
aberration, qu’un rustre se produise ou qu’un homme en état de
cueillir des louanges, se tienne dans l’obscurité. N’avez-vous donc
rien à raconter, ou bien moi-même ne vous semblé-je pas digne de
jouir de vos entretiens? Il y eut au moins une matière qui
mériterait d’être célébrée par quiconque est capable de parler ou
d’écrire, je veux dire les noces de cet homme chez lequel
l’illustration de la naissance et l’abondance des richesses, aussi
grandes qu’elles soient, le cèdent à l’éducation et à la modestie.
Pénétré d’horreur pour tous les vices de la chair, il repoussait
comme de honteuses jouissances tout ce que les lois ont donné comme
remède et, refusant de livrer son corps aux exigences matrimoniales,
il croyait se trahir que de sacrifier au monde quelque chose de sa
libre chasteté. Quoique ces vertus ne soient pas de votre goût, vous
devriez quand même, pour montrer votre talent, en faire l’éloge?
Nous pouvons croire que vous devenez bon, si nous vous entendons
louer ce qui est honnête.
Maintenant en vous adressant mes plus profondes salutations, je vous
réclame une réponse. Ne me jugez pas sur cette lettre, car, Dieu
m’en est témoin, comme je revenais de la basilique, je l’ai dictée
durant le parcours. |
|
EPISTOLA XII.
ENNODIUS FLORO.
|
LETTRE XII.
ENNODIUS A FLORUS.
Dans
cette lettre et dans
plusieurs autres (VIII, 1, 19 ; IX, 7, 21, 22),
il est question de démarches faites par Ennodius pour acquérir dans
les environs de Milan une maison de campagne. Comme ces
démarches coïncident avec l’époque de sa grande maladie, il y
a toute apparence que les médecins lui conseillaient de se loger à
la campagne pour y jouir d’un air plus frais et plus pur.
D’après ses instances on peut juger qu’il y attachait la plus grande
importance. Il paraîtrait même qu’il fut en marché
successivement pour deux maisons; l’une qu’il tenta
d’acquérir par l’intermédiaire et l’influence de Faustus et qui
peut-être dépendait du domaine royal (VIII, 12, 19),
l’autre qu’il voulait acheter à Libérius avec le concours d’Aviénus
(IX, 7). On voit par une autre lettre (IX,
22) que Faustus fit aboutir les démarches. |
|
Qua te devinetione teneam, qua
diligentia complectar, ex animi tui potes qualitate colligere. Vix
enim amari continget, nisi quos sinceriter amare constiterit.
Congreditur inter se cœlestis vigor animarum, et studia sua multis
sibi pandit affatibus: et ideo vicissitudinem mihi reddere disponis.
Insiste domno ut suburbanum illud, si dignatur, dato a me pretio
comparari jubeat quod dum in Liguria fuero, feliciter habebam, et
post obitum meum ipse suique possideant. Mihi tamen post Deum,
libertatem, substantiam videtur ipse conferre, si hoc beneficii per
ipsum fuero consecutus. Sed sic filia tua vivat; sic de illa quales
optas filios teneas; sic Deus animam tuam sanctis suis faciat
coæquari, et frater tuus vivat, ut insistas suppliciter, importune,
quatenus ad effectum petitionem meam perducas. Cogites Deum, cogites
necessitates meas; quia nihil est quod potentia ipsius, quod
affectus circa me majus possit præstare. |
Si vous
voulez savoir combien sont étroits les liens de l’amitié qui me
rattache à vous, interrogez votre propre cœur: nul en effet ne
saurait être aimé s’il ne donne lui-même des témoignages de son
affection. Il s’établit entre les âmes comme une émulation d’amour ;
l’ardeur qui les anime trahit, muette, leurs sentiments réciproques.
Si donc vous êtes résolu à me payer de retour, insistez auprès du
seigneur Faustus pour qu’il me fasse acquérir, de mes deniers
comptants si bon lui semble, cette maison de campagne du Faubourg.
J’en jouirai paisiblement tant que je serai en Ligurie et, après ma
mort, lui et les siens la possèderont. C’est la liberté, la
subsistance, qu’après Dieu il paraîtra me rendre si j’obtiens par
lui cette bonne fortune. Et vous, que votre fille vive, qu’elle vous
donne des fils tels que vous les désirez, que Dieu élève votre âme à
la gloire de ses saints, que votre frère vous soit conservé, si par
votre insistance humblement importune vous amenez à succès ma
demande. Devant Dieu qu’il considère ma détresse il n’est pas de
plus grand service que son crédit et son affection puissent
actuellement me rendre. |
|
EPISTOLA XIII.
ENNODIUS AURELIANO
PRESBYTERO.
|
LETTRE XIII.
ENNODIUS AU PRÊTRE AURÉLIEN.
De
quel voyage Ennodius parle-t-il ici? de celui de 494 en Bourgogne?
ou bien de quelque autre voyage
en Provence ou à Lérins? |
|
Affectionem mentior, si vobiscum
digrediens non remansi, et beatitudinem vestram mecum quamvis
locatam in statione, non detuli: et quia animus in me, ut in
cæteris, imperator est corporis,
ipse circa diligentiam vestram est tota intentione captivus. Ergo
salutationis honorificentiam debita humilitate persolvens, nihil
valetudini meæ de itineris confractione indico decessisse. Ecce qua
sollicitudinem vestram benigni studii cura remuneror: facite quod
scriptum est, accepta restituentes, de prosperitatis vestræ me
significatione gratulari. |
Mon affection pour vous n’est
qu’hypocrisie s’il n’est pas vrai qu’en vous quittant je restai près
de vous et que votre béatitude, quoique arrêtée, fut emportée avec
moi. En moi, comme en tout homme, l’esprit commande au corps; mais
lorsqu’il s’agit de vous aimer, il perd toute son indépendance.
Donc, tout en vous payant avec toute l’humilité que je dois, le
tribut de mes salutations, je vous annonce que le brisement du
voyage n’a nullement altéré ma santé. Vous voyez de quelles
attentions et de quel aimable empressement je me plais à reconnaître
votre sollicitude: faites, comme il est écrit, qu’en rendant ce que
vous avez reçu, vous me donniez lieu de me réjouir à la nouvelle de
votre prospérité. |
|
EPISTOLA XIV.
ENNODIUS FAUSTO.
|
LETTRE XIV.
ENNODIUS A FAUSTUS.
Confidence d’ami en proie à la maladie et au chagrin. |
|
Tacerem molestias meas, nisi
intellexissem quod sollicitudo vestra me sublevat. Nam dum
cognoscitis, quam variis morborum fatigor incommodis, pro peccatis
meis febribus frequenter addicor, et vires quæ videbantur restitutæ,
franguntur. Ergo vos remedia consueta præstate, et usum illum sanctæ
conversationis impendite: ut quidquid medicina mortalium non valet,
fusis ad Deum nostrum precibus impetretis. |
Je
tairais mes tristesses si je ne comprenais que votre sollicitude
m’est un soulagement. Vous ignorez encore combien je suis malade, en
proie, pour l’expiation de mes péchés. à de fréquents accès de
fièvre mes forces qui semblaient rétablies, sont complètement
abattues. Vous donc, procurez-moi le remède accoutumé de votre
sainte conversation et puisque la médecine humaine est impuissante à
me donner la guérison, que vos prières me l’obtiennent. |
|
EPISTOLA XV.
ENNODIUS EDASIO.
|
LETTRE XV.
ENNODIUS A EDASIUS.
Edasius avait quitté Milan pour aller sans doute à Ravenne remplir
quelque emploi public,
car il promit en partant, à Ennodius alors chargé comme
diacre des intérêts temporels de l’église de Milan, de
s’employer à la conclusion d’une affaire; ce qu’il fit avec
succès. Si bien qu’Ennodius lui demande d’achever son œuvre.
il est probable qu’il s’agit d’un legs fait à l’église de Milan,
de plusieurs immeubles distincts. Edasius avait obtenu la
mise en possession d’une partie; Ennodius lui demande de
lever toute difficulté pour ce qui reste. Une constitution de
Constantin (311) accordait le droit le plus absolu de tester
en faveur de l’Église (code Theodos.
xvi, Tit.
ii, iv).
Mais dans la suite des restrictions furent apportées à ce droit par
Valentinien (370) et Théodose le Grand (390) qui
modifia son décret la même année (code Théod. Ibid.
xx, xxvii, xxviii).
Les revenus de Milan étaient employés par les diacres à venir,
d’office, en aide aux malheureux,
ix. 20. |
|
Ante experimentum amicorum fides
occulta est: postquam in lucem processerit, eorum qui aliquid
saporis habuerint, sibi mentes obligat. Est tamen minus libera
servitus, quæ caris exhibetur. Confiteor magnitudini tuæ: latebat me
ante relationem hominis mei, quid in sublimitate tua, et saporis et
gratiæ, sub nobili humilitate delitesceret: didici hominem, qui
canam in fide beatitudinem, dum amicorum absentiam bene tractat,
exsuperat. Plura quidem discedens promiseras: sed ad genium
conscientiæ tuæ majora præstitisti.
Domine fili, salutationis effusissimæ
munus impartiens, ago atque habeo insufficientes gratias de his quæ
mihi in prima potitiæ fronte collata sunt. Quod restat, deprecor ut
residua illa mancipia teneri jam facias. Ecce fiduciam de bonis
præcedentibus descendentem: qui ante ignoto preces metuebat offerre,
jam non dubitat imperare. |
Avant d’être mis à l’épreuve, le
dévouement des amis ne paraît pas : dès lorsqu’il s’est manifesté il
s’attache les cœurs animés de quelques sentiments. Mais combien elle
est volontaire la servitude que nous imposent ceux qui nous sont
chers! Je l’avoue à votre Grandeur : j’ignorais, avant de connaître
ce que mon homme m’a rapporté, tout ce qu’il y avait en votre
sublimité de sentiment et de bienveillance caché sous le manteau
d’une noble humilité : j’ai reconnu un homme que son dévouement
élève au-dessus de tout ce qu’il y a de plus vénérable, tant il
prend à cœur les intérêts de ses amis absents. A votre départ vous
aviez, il est vrai, beaucoup promis ; et voici que sous
l’inspiration de votre conscience, vous avez donné bien davantage.
Mon cher
Seigneur et fils, en vous payant le tribut de mes salutations les
plus cordiales, je vous ai et je vous rends des actions de grâces
insuffisantes pour les services que dès le premier instant de nos
relations, vous m’avez rendus. Et puis je vous prie de nous faire
entrer en possession de ce qui reste de ces propriétés. Voici une
confiance qui découle de vos bons offices précédents : lorsque
j’osais à peine vous adresser une prière tandis que vous m’étiez
inconnu, maintenant je n’hésite pas à vous envoyer un ordre. |
|
EPISTOLA XVI.
ENNODIUS BARBARÆ.
|
LETTRE XVI.
ENNODIUS A BARBARA.
Il
lui raconte sa maladie et sa miraculeuse guérison.
Il l’exhorte à accepter une charge à la cour;
peut-être d’y diriger l’éducation de jeunes princes ou
princesses. |
|
Non ego debiti immemor ab officiis
temperavi; nec constituta despiciens garrulitatem meam ab obsequii
exhibitione suspendi. Sed postquam ab urbe regressus sum, continuo
me variæ ægritudines, et quidquid ad mortem vocat, arctavit. Vere
domna mea, sic vobis vestrisque læta contingant, quia ad testimonium
veteris mysterii Christus noster iterum quamvis peccatorem, nec ut
illum qui amicus dici meruit, sed rursus vocavit Lazarum de
sepulcro. Est facti unitas in distantia personarum: et nunc amplior
magnitudo divini operis, quia quod ille meruit, mihi cessit
indebite.
Hæc causa me ab officii promulgatione
revocavit. Postquam tamen ad vitam reductus sum, continuo me ad
servitia vobis solvenda converti: rogans Deum, ut vos vestrosque
superno tueatur auxilio. Promitto mihi etiam et desideriis meis quod
cum felicitate vestra et gaudio, ad comitatenses excubias, quæ votis
meis satisfaciat, dignitas adepta vos evocet. Noli, domna, huic te
labori, huic oneri submovere. Videant bona Romanæ civitatis
provinciæ, et quæ monitis vix instituuntur, per bona quæ vobis Deus
contulit, formentur exemplis. Rogo tamen, reverentia salutationis
exhibita, ut exspectatissimo me relevetis alloquio: sed nec alterum
dictare patiamini, quæ ad me scribetis: sic nunquam ab impetratione
oratio vestra pellatur. |
Si j’ai différé de vous rendre mes
devoirs, si j’ai fait trêve de causeries et remis si longtemps de
vous envoyer l’expression de mes respectueux sentiments, n’y voyez
ni un oubli de ce que je vous dois, ni un mépris de ce que nous
avions convenu. Mais sachez qu’à peine revenu de Rome, je fus
assailli de diverses maladies et mis à deux doigts de la mort.
En vérité, Madame, puisse le ciel réserver un pareil bonheur à vous
et aux vôtres! tant il est vrai qu’en témoignage du prodige
d’autrefois, notre Christ a de nouveau rappelé du tombeau Lazare,
mais celui-là pécheur et loin de ressembler hélas! à celui qui
mérita d’être dit l’ami du Sauveur. C’est un même fait, malgré le
temps qui nous sépare; l’œuvre divine apparaît même plus grande en
ce dernier, puisque ce que Lazare mérita me fut gratuitement
accordé.
Voilà ce qui m’a tenu en silence mais
à peine revenu à la vie, mon premier soin fut de vous rendre mes
devoirs, priant Dieu qu’il vous couvre, vous et les vôtres de sa
protection. Je me promets bien de vous voir, selon mes désirs, pour
votre bonheur et votre joie, appelée à la dignité de dame de Cour en
service au palais. Gardez-vous bien, Madame, de vous soustraire à ce
labeur, de vous refuser à cette charge. Que les provinces voient ce
qu’il y a de bon à Rome et, presque insensibles aux paroles, que du
moins elles soient portées au bien par les beaux exemples dont vous
leur donnerez le spectacle.
Et
maintenant, après vous avoir rendu mes salutations, je vous prie de
ne pas me priver de votre chère correspondance qui est ma plus douce
consolation mais ne souffrez pas qu’un autre dicte ce que vous
m’écrivez: qu’ainsi votre prière toujours soit exaucée. |
|
EPISTOLA XVII.
ENNODIUS STEPHANIÆ.
|
LETTRE XVII.
ENNODIUS A STÉPHANIE.
Même
sujet que la précédente lettre à Barbara,
même allusion à la résurrection de Lazare, même
recommandation à Stéphanie de dicter elle-même ses lettres. |
|
Credo vos et ignorantes meis periculis
subvenisse: aut quare confidam nescire quidquam, quos per Deum
contingit universa prænoscere?
Postquam enim ab urbe redii, reparata
sunt in me divina mysteria: et quod senuerat temporibus, novellis
resurrexit exemplis. Iterum vocatus est Lazarus de sepulcro: non
quidem illius par merito qui amici Redemptoris nomen emeruit, sed in
diversitate actuum unius convenit forma mysterii. Deductus per
ægritudines multiplices ad sepulcra; sed cœlestis voce revocatus, ad
hæc primum quæ vobis solvuntur officia me converti: credens placere
Deo, si cultoribus ejus per linguam quam ipse reddidit principe loco
exhibeantur obsequia.
Ergo reverentia salutationis impensa,
deprecor ut pro me, sicut poposci, orare adtentius procuretis, ut
per meritum vestrum divina clementia dignetur confirmare quod
tribuit: et frequenter me pia litterarum vestrarum promulgatione
sublevetis. Rogo ut nullum alium dictare facias, per domni Asterii
animam et professionem tuam. Sic ei nitor quem optas, usque ad
consummationis tempus assistat. |
Je crois que, sans en être instruits,
vous m’êtes venus en aide dans le péril; sinon, d’où me viendrait
cette conviction que Dieu donne de ne rien ignorer à ceux qu’il
favorise d’une sorte de prescience universelle.
Donc après mon retour de la Ville, les
mystères divins furent renouvelés en moi et les merveilles anciennes
des temps reculés ont été reproduites dans le présent. De nouveau
Lazare fut rappelé du tombeau, non, à la vérité, l’égal de celui qui
mérita le nom d’ami du Rédempteur; mais si les faits sont
différents, le mystère est le même. Amené par des maladies multiples
jusques au tombeau, mais rappelé à la vie par la voix de Dieu, mon
premier soin est de me retourner vers vous pour vous rendre mes
devoirs. Je crois plaire à Dieu si tout d’abord j’applique cette
langue qu’il m’a rendue, à présenter mes hommages à ses serviteurs.
Après
donc m’être acquitté du devoir de vous saluer, je vous supplie de me
continuer avec plus de ferveur encore, le secours de vos prières,
afin que par votre mérite, la divine miséricorde daigne confirmer ce
qu’elle m’a accordé; et puis, que je reçoive fréquemment de vous ces
bonnes lettres dont la lecture m’apporte un si grand soulagement. Je
vous prie en outre, et par l’âme du seigneur Astérius, au nom de
votre sainte profession (de veuve), de ne point faire dicter vos
lettres par un autre: puisse-t-il briller de l’auréole que vous lui
désirez, jusques à la consommation des temps. |
|
EPISTOLA XVIII
ENNODIUS FAUSTO.
|
LETTRE XVIII.
ENNODIUS A FAUSTUS.
Il
appuie la demande d’un plaideur qui veut au préalable soumettre sa
cause au jugement de Faustus.
Cf. Sidon. Epist. VI, 3. |
|
Cœgit me ad studia mea portitor
præsentium litterarum, et quod volebam, prope importunus exegit. Sic
contulit beneficium, qui exigebat. Iste in negotio suo probatum
mundo justitiæ vestræ poscit examen: nec ab aliquo veritatem causæ
suæ discerni æstimat, si cessetis. Pro hoc precator accedo, ut dum
adestis mandatis cœlestibus et veritatem tota intentione
perquiritis, afflicti hominis necessitatibus succurratis. Spero
etiam, salutationis officio impenso, ut indicio me prosperitatis
vestræ, non neglectis quæ frequenter se ingerunt occasionibus,
sublevetis. |
L’importunité du porteur qui a exigé de moi cette lettre, sert mes
plus ardents désirs. Ainsi en m’adressant sa demande il me rend
service. Cet homme est en procès et demande à soumettre sa cause à
l’examen de votre justice dont tout le monde accepte les décisions
et il est persuadé que nul autre ne sera à même de discerner la
vérité de son bon droit si vous lui faites défaut. Je vous en
supplie pour lui vous, fidèle aux commandements divins, vous dont
l’unique objet est de découvrir la vérité, venez en aide à ce pauvre
affligé. J’espère en outre, tout en vous rendant l’hommage de mes
salutations, que vous profiterez des fréquentes occasions qui se
présentent pour me faire parvenir les nouvelles de votre prospérité
que je reçois toujours avec tant de bonheur. |
|
EPISTOLA XVIII.
ENNODIUS FAUSTO.
|
LETTRE XIX.
ENNODIUS A FAUSTUS.
Son
état de santé s’améliore. Allusion à l’affaire exposée
dans la lettre à Florus VIII, 12 : achat dune maison qui
devait, après la mort d’Ennodius, rester à Faustus. |
|
Quamvis omnis frequentia litterarum
videatur rara sollicitis nec sufficiat providentia pro pietate
suspenso: tamen pars ista cui impenditur, nisi responderit, ab
humanitate sejungitur. Ergo salutationis officia præfatus, Deo
tribuente indico mecum sanctorum suffragiis et vestris precibus jam
melius agi, et illam desperationis et febrium intepuisse
valetudinem. Nunc, quod restat, spero ut petitionem meam quam per
confamulum meum fratrem Florum destinavi, suscipere solita
benignitate dignemini: quia etsi mihi ad præsens res videtur esse
compendii, vobis quibus magis futura cordi sunt, utilitas ex hac
parte summa respondet. |
Aussi
fréquentes que soient les lettres, elles paraissent toujours rares à
ceux qui les attendent avec impatience, et toute l’exactitude que
l’on met à écrire reste insuffisante au gré de celui que l’affection
tient dans l’inquiétude ; mais recevoir une lettre et n’y pas
répondre, c’est, en vérité, fouler aux pieds les lois les plus
élémentaires de l’urbanité. Donc, après vous avoir rendu le devoir
de mes salutations je vous annonce, grâces à Dieu, que les suffrages
des saints et vos prières m’ont obtenu une sensible amélioration et
que cette violence de fièvre et de désespoir s’est amortie. Pour ce
qui reste, je nourris l’espoir que vous daignerez accueillir avec
votre bienveillance ordinaire la demande que mon frère Florus, comme
moi votre serviteur, vous remit de ma part. D’ailleurs si pour le
présent la chose paraît à mon avantage, vous qui considérez surtout
l’avenir, vous trouverez encore à y profiter le plus. |
|
EPISTOLA XX.
ENNODIUS AGNELLO.
|
LETTRE XX
ENNODIUS A AGNELLUS
Il
lui dépêche un serviteur pour recevoir le cheval promis. |
|
Si valerem corpore prosequi, verbis
abstinerem: at cum illa res valetudini deficit, ista succurrit. Scit
secretorum discussor, me et divisum præsentia a vobis abesse non
posse. Proinde sollicitudinem vestram nuntio meæ prosperitatis
relevo: et propter quod concessum est epistolare commercium, vestrum
requiro, indicans, honore salutationis impenso, puerum me ad
suscipiendum caballum direxisse. Tantum est ut talem mittatis, quem
et vos dedisse clareat, et ego pro honoris summa me gaudeam
suscepisse. |
Si j’étais en état de vous rejoindre,
je m’abstiendrais d’écrire. Mais comme ma santé ne le refuse, il me
reste cette dernière ressource. Celui pour qui rien n’est secret,
sait que malgré la distance qui nous sépare, je ne puis rester
éloigné de vous. Je viens donc calmer votre inquiétude par la
nouvelle qu’en ce qui me concerne tout est pour le mieux; c’est
l’objet du commerce épistolaire, et je vous en prie, de votre côté,
donnez-moi de vos nouvelles. J’ajoute, après l’hommage de mes
salutations, que je vous ai dépêché un serviteur pour recevoir le
cheval. Envoyez-le moi tel qu’il fasse honneur à celui qui l’a donné
et que je sois heureux et fier de l’avoir reçu. |
|
EPISTOLA XXI.
ENNODIUS BEATO.
|
LETTRE XXI.
ENNODIUS A BÉATUS.
Lettre d’excuses faisant
suite aux deux lettres (viii,
29, 30) à Béatus et Adéodat, relatives à l’épitaphe
de Cynégie. Il la dicte encore gravement malade. |
|
Si possem scribendo delere paginam
meam, multiplici hoc facere intentione procurarem. Sed quia non est
fas hominem non errare; ego ille canus, sed pater tuus, ne unquam
prioris epistolæ meæ sis memor, exposco. Sic te pater et patria
talem, qualem per singulos dies omnibus protestor, excipiat. Alienis
scriptis credidi, ut styli mei importuna festinatione morderem. Tu
feceras quod sapiens; qui soli domno Probo, artem tenenti inter
doctos, versus meos relegeras: quod facere decuit.
Ego importunus, qui alteri credere non
debuissem, quantum video, frustra commotus sum. Vade ergo ad domnum
Probum (sic pater tuus vivat: sic me, quem semper amasti, viventem
audias, quia ista pene mortuus dictavi) et osculare illi genua pro
me, et dic illi de extremo versu, Terentianus me induxit in illo
exemplo:
Sic fatur lacrimans, classique
immittit habenas.
Omnia tamen quæ fuerunt digna
correctione, prævidit.
Saluto, amore quo debeo. Si evasero,
versus ipsos emendo, et sic dirigo. Nam litteras tuas quas per
infantem Rufinum direxisti, Julio mense suscepi. Unde me contigit
nescire quod actum fuerat, ut taliter moverer. |
S’il m’était possible, en vous
écrivant, d’effacer ma dernière lettre (viii,
29), je le ferais mille fois. Mais parce qu’il est impossible à
l’homme de ne jamais se tromper, moi que vous entourez de respect
comme un vieillard, moi, votre père, je vous demande en grâce
d’ensevelir ma précédente lettre dans un éternel oubli :
Puissiez-vous revenir à votre père et à votre patrie doué des
qualités que chaque jour je proclame auprès de tous ceux qui
m’entourent.
J’eus le tort de me fier à une lettre
étrangère et dans la précipitation de ma plume, de vous blesser
inconsidérément. Vous aviez agi selon la sagesse en lisant mes vers
au seul seigneur Probus qui fait la loi parmi les savants. C’était
ce qu’il convenait de faire. Moi, je n’eusse pas dû si mal à propos
ajouter foi à un autre et, autant que je le puis comprendre, je me
suis ému sans motif. Allez donc au seigneur Probus, (qu’ainsi votre
père vive et moi-même que toujours vous avez aimé, puissiez-vous
m’entendre encore vivant, car je dicte ces lignes presque à la
mort), embrassez-lui pour moi les genoux et dites-lui de ce dernier
vers, que Terentianus m’a induit en erreur par cet exemple :
Sic fatur lacrimans,
classique immitit habenas.
Cependant il a indiqué tout ce qu’il y
avait à corriger.
Je vous
salue avec toute l’affection que je vous dois. Si je guéris, je
corrigerai les vers et je vous les renverrai. Votre lettre confiée
au jeune enfant Rufin ne m’est parvenue qu’en juillet c’est ainsi
qu’ignorant ce qui s’était passé, je me suis tellement ému. |
|
EPISTOLA XXII.
ENNODIUS FLORO.
|
LETTRE XXII.
ENNODIUS A FLORUS.
Annonce de sa miraculeuse guérison. |
|
Qui justius prosperitatis meæ
cognoscit indicia, nisi qui sinceriter et indesinenter optavit, nec
convenit prius alterum desideria aliena cognoscere? Ergo servitio
salutationis exhibito, indico me, cœlesti beneficio, postquam
cessavit humana curatio, mox sanatum: revocavit ad spem
prosperitatis res illa, quia medici destiterunt. Nunc gaudia vestra,
sicut de me æstimo, cognoscentes, mecum laudibus prosequimini tanti
beneficii largitorem: et si adhuc vos longior mora detinet, quam
bene valeatis, litteris intimate. |
A qui
ferais-je part de mon heureux retour à la santé sinon à vous qui
n’avez cessé de le désirer si sincèrement? Certes il ne convient pas
qu’un autre l’apprenne avant vous. Donc, vous ayant tout d’abord
salué, je m’empresse de vous faire savoir que par un bienfait du
ciel, lorsque j’étais abandonné des médecins, je viens d’être guéri
ce fut pour moi un motif de reprendre espoir de guérir que de voir
les médecins se déclarer impuissants. Je sais quelle sera votre joie
de cette nouvelle; unissez-vous donc à moi pour rendre grâces à
l’auteur de ce bienfait, et si votre absence doit se prolonger,
donnez-moi par lettre des nouvelles de votre santé. |
|
EPISTOLA XXIII.
ENNODIUS FLORO.
|
LETTRE XXIII.
ENNODIUS A FLORUS.
Il
recommande à Florus,
avocat autorisé ou magistrat de grand crédit,
l’affaire d’un plaideur, à condition toutefois que celui-ci
ait le bon droit de son côté. Le juge Vicarius eut l’occasion
de recourir lui-même pour son propre compte à la puissante
recommandation d’Ennodius. VII, 18. |
|
Spectabilis vir Eleutherius in negotio
suo, quod a domno præfecto audiendum Vicarius susceperat, ad
amplitudinem vestram a me commendatitias speravit: credens, salva
justitia, opem sibi integram posse suppetere, si meis apud vos
juvaretur alloquiis. Rogo ergo honore salutationis exhibito, ut ei,
si vere contra æquitatem laborat, manum medicam porrigatis: quia
nefas est, ut in præjudicio bonæ causæ prodesse sibi calliditas
videat, quod molitur. |
L’honorable Eleuthérius a une affaire dont l’audience a été
attribuée par le Préfet du prétoire à Vicarius. Il désire obtenir de
moi une lettre de recommandation auprès de votre Grandeur, persuadé
que, toute justice sauve d’ailleurs, il sera muni de tous les moyens
nécessaires s’il est aidé d’un mot de moi auprès de vous. Je vous en
prie donc, après vous avoir honoré de mes salutations, si réellement
le procès qu’on lui fait est injuste, prêtez-lui un secours
efficace, car il ne faut pas qu’au préjudice du bon droit la ruse
voie réussir ses habiles intrigues. |
|
EPISTOLA XXIV.
ENNODIUS FAUSTO.
|
LETTRE XXIV.
ENNODIUS A FAUSTUS.
Récit
de sa miraculeuse guérison par l’huile de saint Victor martyr de
Milan, d’une terrible
maladie qui avait duré deux mois. On retrouve ce récit dans
l’Eucharisticum (opusc.
v) écrit en actions
de grâces. |
|
Usum suum benignitas vestra supra
homines locata custodit. Vere medicina est cura sanctissimi; nam
venerabilis conscientia Deo semper insinuat quod requirit.
Digressis vobis, acrior me calor
exussit, et ad omnem desperationem præcipitante diabolo vela
patuerunt. Venit ad me medicus, et dixit se quod faceret non habere.
Hinc mihi major spes, quando homo cessaverit. Continuo me cum
lacrymis ad cœlestis medici auxilia converti; et domni Victoris oleo
totum corpus, quod jam sepulcro parabatur, contra febres armavi.
Scit Deus meus: mox adfuit magni militis imperator, et quod per
testem ejus idoneum poposci, incunctanter obtinui. Mox fervor ille
æterni frigoris procurator intepuit, et hora nona, sicut legitur,
Christo meo mandante discessit. Scio orationis vestræ tempora: scio
lacrimarum copiam in illo quoque momento juvisse laborantem.
Ecce indicia votiva non tacui: sed
portitorum raritas desiderium commune suspendit. Nam me multum juvat
relevatio vestra, quæ a vobis minime, qui læta respuistis, optetur. |
Votre extrême bonté qui a son principe
par delà l’humanité, ne se dément point. En vérité, quelle
excellente médecine que les soins d’une âme sainte Car une
conscience pure impose pour ainsi dire à Dieu ce qu’elle demande.
Après votre départ je me sentis brûler
d’ardeurs encore plus fortes et, poussé par le diable, je tombai
dans un complet désespoir. Le médecin vint et me déclara n’avoir
plus rien à faire. Abandonné des hommes, ce me fut un motif de
reprendre confiance. Aussitôt, fondant en larmes, je me tournai vers
le céleste médecin je demandai de l’huile de saint Victor et j’en
armai contre les fièvres tout ce corps dont on préparait déjà la
sépulture. Dieu le sait, à l’instant celui que ce grand soldat
tenait pour Général (Jésus-Christ) me porta secours, et ce que
j’avais demandé par le digne témoin de son nom, je l’obtins sans
délai. Bientôt cette funeste ardeur, principe de mort éternelle,
s’adoucit et, sur la neuvième heure,
comme on lit, par l’ordre de mon Christ, elle disparut entièrement.
Je sais les heures de votre prière, je sais qu’à ce moment vos
larmes furent en aide au pauvre patient.
Je n’ai
pas voulu vous taire une nouvelle si désirée ; mais la rareté des
porteurs ne m’a pas permis de satisfaire plus tôt à notre commun
désir. Car ce m’est un grand bonheur de vous savoir heureux bien
que, de votre part vous portiez la vertu jusqu’à paraître insensible
à tout sujet de joie. |
|
EPISTOLA XXV.
ENNODIUS FAUSTO.
|
LETTRE XXV.
ENNODIUS A FAUSTUS.
Ennodius profite d’une nouvelle occasion pour écrire encore à
Faustus sur le même sujet. |
|
Mox ubi me gratia superna respexit, et
animam de judicii cœlestis vicinitate trepidantem, concesso, ut
melioraretur, vivendi laxavit spatio, magnitudini vestræ beneficia
per litteras divina non tacui. Vere, cessantibus medicis, illius qui
innocentia et lacrymis emitur, medicina non defuit. Credite, nisi
mihi subvenisset destitutio curantium, nil valerem. Nam quia
ægrescebam hominum studiis, cœpi negligentia jam sanari. Hæc quidem
prioribus intimata sunt: sed ne occasio præteriretur, adjeci:
sperans, obsequio salutationis oblato, ut me de prosperitatis vestræ
de qua pendeo, (statu) sublevetis alloquiis. |
Aussitôt
que la miséricorde divine eut abaissé sur moi un regard favorable et
que mon âme, terrifiée de l’approche du jugement de Dieu, eut trouvé
quelque soulagement dans l’espoir qui lui était rendu de prolonger
quelque temps sa vie en ce monde pour son amendement, je ne manquai
pas d’écrire à votre Grandeur pour lui faire connaître ces bienfaits
divins. Oui, c’est vrai : dès lors que les médecins m’eurent
abandonné, celui dont l’assistance s’obtient par l’innocence et par
les larmes, ne me fit pas défaut. Croyez-le ; il me fallut cet
abandon complet de la médecine, sans quoi j’étais perdu et parce que
les soins des hommes me rendaient plus malade, leur défection fut le
commencement de ma guérison. Je vous ai déjà écrit tout cela dans
une première lettre ; mais, pour ne pas manquer une occasion,
j’ai ajouté ceci dans l’espoir qu’après avoir reçu l’hommage de mes
salutations, vous me ferez le plaisir de me donner des nouvelles de
votre prospérité au sujet de laquelle je suis dans l’inquiétude. |
|
EPISTOLA XXVI.
ENNODIUS AVIENO.
|
LETTRE XXVI.
ENNODIUS A AVIÉNUS.
Il
annonce sa convalescence. |
|
Necesse est ut qui desiderat scripta
vestra non taceat: nec silentii exemplum tribuat, qui cupit
alloquium. Juxta orationum vestrarum suffragia, quos innocentia et
devotio Deo nostro facit acceptos, meliorem me esse jam sentio:
desiderans honorificentia salutationis impensa, quam bene valeatis
agnoscere: quia post receptam salutem, unicum est solatium bono
vestræ prosperitatis adtolli. |
Si l’on
désire avoir de vous des lettres, il faut bien ne pas se taire et ce
n’est pas en vous donnant l’exemple du silence que l’on obtiendra de
vous faire parler. Grâce aux suffrages de vos prières que votre
innocence et votre piété font agréer de notre Dieu, je me sens déjà
mieux et je désire, après vous avoir rendu les devoirs de mes
salutations, savoir si vous vous portez bien, car maintenant que je
suis moi-même revenu en santé, je n’ai plus qu’une consolation la
joie de vous savoir en prospérité. |
|
EPISTOLA XXVII.
ENNODIUS BARBARÆ.
|
LETTRE XXVII.
ENNODIUS A BARBARA.
Encore gravement malade,
Ennodius se recommande aux prières de Barbara, du Souverain
Pontife et de ses autres amis de Rome. |
|
Quamvis adhuc inter extrema sim
positus, et pro peccatorum meorum mole, somni mei beneficia, dum
mereor in longum conteri, non sequantur: reverentiæ tamen vestræ
obsequiis quod debet pendens anima non omisit. Pene jam vocatur ad
judicium, et adhuc suspicit in hac luce quos coluit. Quam vera est
illa sententia, quod sanctus affectus nec morte pereat!
Ergo, domna mea, servitiis vos debitæ
salutationis prosequens, rogo ut, agnitis quæ circa me geruntur, pro
illo quo omnibus eminetis et sanguinis nitore et conversationis
radiis, domno meo apostolo et cæteris ejus fratribus supplicetis: ut
per vos exorata Dei potentia, clementiæ suæ quæ tarda esse non
solet, beneficia non refrenet. |
Je me trouve encore à l’extrémité; et
pourtant mon Seigneur, dans sa bonté, ne tient pas compte de
l’énormité de mes péchés, car je mérite de longtemps souffrir. Mon
âme toutefois, malgré qu’elle tienne à peine à la vie, n’a pas
manqué de rendre ses devoirs à votre révérence. Elle se voit sur le
point de comparaître au tribunal de Dieu, et ses regards se
reportent encore sur ceux qu’en ce monde elle a aimés. O qu’il est
donc vrai de dire qu’une sainte affection survit même à la mort.
Donc,
Madame, tout en vous saluant avec le respect que je vous dois, je
vous en prie, considérez ma position et au nom de l’éclat de votre
rang et de vos mérites, suppliez mon seigneur le Souverain Pontife
et les autres personnages ses frères, d’intercéder pour moi, afin
que le Seigneur tout puissant, à leur prière, ne retarde pas les
effets de sa clémence toujours miséricordieuse. |
|
EPISTOLA XXVIII.
ENNODIUS BEATO.
|
LETTRE XXVIII.
ENNODIUS A BÉATUS.
Il
annonce l’envoi du traité des études
(Opusc. vi),
composé pour lui et Ambroise. |
|
Qua mihi vicissitudinis, qua
obsequiorum cura pensabitur, quod te et in frequentibus paginis
alloquor et officio sermonis tui in lucem exire publicam non
detestor? Non me ætas tua, non ingenio meo potest revocare par
formula. Eligo benignis plus credere, quam peritis; ut bona originis
anteferant studiis: quod fidelis es, divini est muneris: in natura
eruditio: per Deum veniet res secunda. Necesse est ut totum tibi
amor integritatis exhibeat, primarum partium insignia jam tenenti.
Ergo honore salutationis accepto,
noveris me, juxta petitionem vestram, epistolam ad vos admonitionis,
quamvis sub festinatione, dictasse: quam ad domnum patricium
Symmachum idcirco dirigere procuravi, ut quod in ea emendatione
dignum est, corrigatur. Sed propter surreptionem negligentiæ, te
quoque ejus exemplaribus informavi. Qua de re tu apud te esto: et
cave ne tibi ad te perlatam manifestes comprehenso superius
eminentissimo viro, ceu rem novam postulans: quia si ejus eam
magisterio placuisse cognoveris, ad notitiam eorum perferre qui
sapiunt non timebis. |
Comment pourrez-vous me payer de
retour de ce que je vous écris si souvent et, qu’à votre occasion,
je ne crains pas d’affronter le public? Rien ne peut m’en détourner:
ni votre âge, ni l’imperfection du style en proportion avec la
pauvreté de mon génie. Je préfère me confier à l’indulgence qu’à la
science et l’on doit estimer les qualités reçues à la naissance
au-dessus des avantages que donnent les études : Etes-vous fidèle?
C’est une qualité naturelle dont Dieu vous a doué. L’érudition sera
aussi un don divin mais ne viendra qu’en seconde ligne. Il est
nécessaire que l’amour de l’intégrité soit votre unique règle de
conduite, vous déjà désigné pour remplir les premiers rôles dans la
société.
Vous
saurez donc, après avoir agréé l’hommage de mes salutations, que
selon votre demande, j’ai dicté à votre adresse, quoiqu’à la hâte,
une lettre de conseils. J’ai pris le soin de l’expédier au patrice
Symmaque pour y faire retoucher ce qui serait à corriger. Mais dans
la crainte que, par suite de quelque négligence, elle ne vint à se
perdre, je vous en fais tenir une copie. Ayez la discrétion de n’en
rien dire gardez-vous bien de révéler à l’éminent personnage dont
nous venons de parler, qu’un exemplaire vous a été adressé ;
demandez-lui en communication comme d’une chose nouvelle et si vous
reconnaissez que mon œuvre a mérité de lui plaire, vous la porterez
sans crainte à la connaissance des hommes de bon goût. |
|
EPISTOLA XXIX.
ENNODIUS BEATO.
|
LETTRE XXIX.
ENNODIUS A BEATUS.
Après avoir composé l’épitaphe de
Cynégie
(VII, 28, 29) comme il revenait de
Rome, au fort de l’été, Ennodius rentré à Milan,
y tomba dangereusement malade. Il revenait à peine en santé,
lorsqu’il reçut une lettre, du prêtre Adéodat au sujet de
l’épitaphe (VIII, 30). Béatus avait rapporté que parmi
le public lettré on contestait la mesure du dernier vers:
Exoptet similem matrona sortem.
Ce
vers étant un phaleuce,
la métrique exigerait que la syllabe ma de matrona fut
brève. Adeodat t’en informe sans spécifier d’où partait cette
critique. Le poète blessé au vif malgré la fièvre qui le mine
encore, défend son œuvre non sans une animosité qu’il ne
cherche même pas à déguiser et dont il devra plus tard faire des
excuses (VIII, 21). |
|
Non mihi tuus error illusit, nec
retroversa decepit affectio: tu ætatis, naturæ, propositi ordinem
custodisti: ego deliqui, aliter de te quam poscebat veritas,
judicando. Ad hoc redeunt, quos diligentia insulsa captivat.
Proinde jam sine circuitione loquendum est. Quo te immemorem tui
duxit insana præsumptio, ut sancto presbytero diceres, in versibus
illis, quamvis in temporis momento compositis, aliquibus videri
affectum conjugalis gratiæ non expressum? Aut ego diffamare volui
quod scripseram? aut epitaphia hoc poscebant, aut ratio? Quis hoc
imperitus, quis tecum sanitate vacuus dixit, ut carmen quod in
summam gratiam domnus Faustus excepit, te et participibus tuis
rodentibus læderetur? Forte de tertio Phaleucio, qui Terentianum
nesciunt, habuerint, quod de una syllaba quærentes occasionem
loquerentur. Vere dignus fui ista quæ pertuli, quia scriptum est,
margaritas ante immunda animalia non esse mittendas.
Quamvis dictionum et imperitiæ meæ bene sim conscius, te tamen nec
scire aliquid, nec sciturum ante didiceram.
Vale, et ad alios te quibus debeas
loqui, converte. |
Je ne suis point le jouet de votre
erreur et je ne me laisse pas davantage prendre à votre affection à
rebours. Vous, vous avez agi selon l’ordre de votre âge, de la
nature, de vos dispositions. Moi, je me suis trompé en jugeant de
vous autrement que ne l’exigeait la vérité. C’est toujours là qu’en
arrivent ceux qui se laissent dominer par une sotte affection.
Il faut, à cette heure, parler sans
détour: où vous a conduit votre présomption insensée? Comment,
oublieux de votre ignorance, avez-vous pu dire au saint prêtre
(Adéodat) que dans ces vers, quoique composés en un instant,
manquait, de l’avis de certains, la perfection d’une gracieuse
mesure? Entrait-il dans mon dessein de diffamer mon écrit?
L’Epitaphe exigeait-elle cela? Etait-ce raisonnable? Quel ignorant?
Quel insensé de vos pareils a parlé de la sorte, et livré à la dent
de vos critiques, une poésie qui obtint du seigneur Faustus
l’accueil le plus bienveillant? Le troisième phaleuce, peut-être,
parce qu’ils ignorent Terentianus,
a pu leur fournir, sur une syllabe, matière à gloser. Au reste, j’ai
ce que je mérite; n’est-il pas écrit de ne point jeter les perles
devant les animaux immondes? J’ai très bien conscience du peu de
valeur de mes dictions et de mon manque de talent; mais jusqu’ici
j’ignorais que vous eussiez quelque science ni que vous fussiez
capable d’en acquérir.
Adieu, passez à d’autres victimes de
votre mauvaise langue. |
|
EPISTOLA XXX.
ENNODIUS ADEODATO
PRESBYTERO.
|
LETTRE XXX.
ENNODIUS AU PRÊTRE
ADÉODAT.
Même objet que la précédente
lettre. |
|
Acerbo ægritudinis impetu et valida
febrium nimietate contritus, cum ut fidem veteris testimonii
Christus noster in me, quod in Lazaro fecerat, ostendisset, et
Evangelii fidem præsentibus declararet exemplis: litteras vestras
accepi. Ordinavit ille qui potuit, ut diebus quibus vitam
restituerat, amicorum quoque suorum eam et confirmaret et fulciret
alloquiis. De versibus unde tibi portentum illud dixit, risum mihi
stulta judicia fecerunt. Scias illos in summo pretio apud domnum
habitos, quamvis in temporis angustia et viridarii transcursione
conscriptos. Sed si eos non scripsisti, nec facias. Mihi sufficit,
dum feci, vota complesse. Nunc ad eam partem me confero, quæ
specialiter a sanctis poscenda est; ut pro ægro et amante adtentius
ores; si mereor, crebra mihi et instructionis et consolationis
præstes alloquia. |
J’étais
encore sous le coup des graves atteintes de la maladie et tout brisé
de la violence de la fièvre lorsque le Christ voulut donner en moi
un exemple de ce que rapportent les anciens témoignages de la
résurrection de Lazare et confirmer l’Evangile par des exemples
actuels. C’est alors que je reçus vos lettres. Il voulut, lui qui
est tout puissant, qu’en ces jours où il m’avait rendu la vie, ses
amis vinssent encore me réconforter et relever mon courage de leurs
lettres. A propos de mes vers, cette monstruosité qui vous en a été
dite, ce jugement insensé m’a fait rire en vérité. Sachez donc que
mon seigneur (Faustus) les a fort estimés, bien qu’ils aient été
composés en un instant, au passage du courrier. Si pourtant vous ne
les avez pas encore gravés, ne le faites pas. Il me suffit d’avoir,
en les écrivant, payé ma dette. Et maintenant j’en viens à ce qui
doit faire le principal objet des désirs des saints, je veux dire
que vous redoubliez vos prières pour votre ami malade et, si je le
mérite, que vous me favorisiez de fréquentes lettres pour mon
instruction et ma consolation. |
|
EPISTOLA XXXI.
ENNODIUS BOETIO.
|
LETTRE XXXI.
ENNODIUS A BOÈCE.
Billet relatif à la maison de Milan
qu’il lui a demandée (VIII,
1). |
|
Consideratio magnitudinis vestræ
exegit epistolare commercium; sed festinatio portitoris epistolam
brevitate conclusit. Non potui morari properantem: sed nec his
vacuum muniis propter res necessarias emisi. Crebras super domo quam
poposci, litteras destinavi. Si possibile est cupita tribui, jam
referte, quia omnia ædificia ejus sub negligentia consenescunt.
Domine mi, salutationis obsequia dependens, rogo ut vos juvetis sine
vestro dispendio supplicantem. |
La
considération de votre Grandeur, me fait un devoir de vous écrire,
mais la hâte du porteur m’oblige d’être bref. Je n’ai pu le retenir,
tant il est pressé, mais je n’ai pas voulu le laisser partir sans ce
billet, vu l’urgence de nos affaires. Je vous ai plusieurs fois
écrit relativement à la maison que je vous ai demandée. S’il vous
est possible d’accéder à mes désirs, ne tardez pas à me le faire
savoir, car tous les bâtiments, faute d’entretien, tombent de
vétusté. Mon cher seigneur, je vous adresse l’hommage de mes
salutations et vous prie de vouloir bien, sans détriment pour vous,
écouter ma demande et me venir en aide. |
|
EPISTOLA XXXII.
ENNODIUS SYMMACHO.
|
LETTRE XXXII.
ENNODIUS A SYMMAQUE.
Il
lui recommande un noble jeune homme qui va étudier à Rome. |
|
Rem necessariam providet, qui parenti
omnium orbatos et peregrinos insinuat: unica via est apostolatus
vestri solatium, quæ medetur externis. Absit afflictos dicere, quos
ad vos contigerit pervenisse: creatoris patriam, opes alibi non
requirunt, quos coronæ vestræ cura susceperit. Præsentum bajulus,
ortus nobiliter, profutura ad testimonium ingenuitatis studia Romana
requirit. Nunc beatitudini vestræ mea supplicis vestri commendat
assertio, ut salutationis servitiis dignanter acceptis, quod usu
facitis, pro mei consideratione geminetur. |
C’est
pourvoir à une urgente nécessité que d’adresser au Père commun les
orphelins et les étrangers. Vous n’avez aux soucis de votre
apostolat qu’une consolation, celle de prêter assistance à ceux qui
sont éloignés de leur patrie. Je me garderai de tenir pour affligés
ceux qui ont la bonne fortune de parvenir jusques à vous. Parents,
patrie, ressources, ils n’ont plus à les chercher ailleurs ceux sur
lesquels votre couronne étend sa sollicitude. Le porteur des
présentes, de noble extraction, va poursuivre à Rome les études
propres à mettre en relief la noblesse de sa race. Je le recommande
très humblement et avec instance à votre Béatitude. Daignez agréer
l’hommage de mes salutations et redoubler, en considération de moi,
la bienveillance qui vous est habituelle. |
|
EPISTOLA XXXIII.
ENNODIUS HORMISDÆ
DIACONO.
|
LETTRE XXXIII.
ENNODIUS AU DIACRE HORMISDAS.
Il
prédit à Hormisdas le souverain Pontificat et lui recommande un
orphelin venu à Rome cultiver les arts,
qui paraît être Arator. |
|
Et quod es, miseratione ornatur; et
quod futurus es, pietate conquiritur: et diaconum his studiis
extulisti, cujus rei promittit cura pontificem. Præsentium bajulus,
honestus moribus, natura sublimis, gemini solatii orbatus præsidio,
Romam pro honestis artibus, licet peregrinaturus, expetiit. Vide si
mereantur a religioso, bene nato, locupleti, juvari ista quæ
prætuli. Nunc officio salutationis exhibito, rogo ut si me, si bonam
quam cœmisti opinionem diligis, impensis portitor adulescat
auxiliis. |
Tandis
que la dignité dont vous êtes revêtu tire son plus bel ornement de
la bonté qui vous anime, tandis que tout ce qu’il y a de gens pieux
se demandent ce que vous serez un jour, l’application que vous
donnez aux affaires a tellement grandi le diacre que déjà elle nous
promet en lui le Pontife. Le porteur des présentes, que recommandent
et la pureté de ses mœurs et la sublimité de sa naissance, privé par
leur mort de l’assistance et des consolations de ses parents, s’est
rendu à Rome pour y cultiver, quoique étranger, les arts libéraux.
Voyez si ce que j’en ai dit le rend digne d’obtenir l’aide d’un
religieux bien né et qui dispose d’une grosse fortune. Et maintenant
après vous avoir rendu le devoir de mes salutations, je vous en
prie, si vous m’aimez, si vous tenez à la bonne réputation que vous
avez acquise, venez en aide au porteur de telle façon qu’il en
profite. |
|
EPISTOLA XXXIV.
ENNODIUS PORTIANO
ABBATI.
|
LETTRE XXXIV.
ENNODIUS A L’ABBÉ PORCIEN.
Sirmond remarque qu’il y eut en Auvergne,
au temps d’Ennodius, un abbé Porcien, du monastère de
Combroude dont le nom, Saint-Pourçain, est resté,
depuis 540, au monastère et à la petite ville bâtie auprès.
Peu d’années après on trouve en Provence un Porcien évêque,
présent aux conciles de Carpentras (6 nov. 527 selon
Sirmond; 529 selon Baronius) et de Vaison (529) présidés
par saint Césaire d’Arles. Etant données les relations
qu’Ennodius entretenait en Provence, sa patrie, il est
assez probable que la présente lettre fut adressée à ce dernier
encore abbé. Un mot ferait supposer que l’abbé avait demandé
à Ennodius quelque service, peut-être une composition
littéraire. La fin de la lettre laisse deviner qu’Ennodius
était encore laïque. |
|
Divinis declaratur exemplis, nisi per
Dei gratiam visitationem hominum cœlestium non venire. Quæ enim
recordatio potest esse peccantium, nisi occultis itineribus favor
cœlestis operetur, et per viam mentibus inspiratam quæ propter
peccata surrepere poterat, eliminetur oblivio? Impetratæ jam divinæ
misericordiæ fiducia est, cultorum Dei animis non deesse. Ergo
gratias refero Trinitati Deo nostro, qui ut me reverentia vestra
alioquiis visitaret, exegit. Suscipio obedientiam vestram: nec enim
exiguus cultus debetur obsequentibus, cum Christi gloria maneat
imperantem.
Orate pro me, qui humanitatis
imbecilla, dum adhuc estis homines, evitastis: quos contigit, necdum
corpore sequestrato, ponderibus carnis absolvi; et servitiis
salutationis acceptis, frugem circa me gratiæ, dum sermonis
adolescit cultura, concedite. |
Nous savons par les exemples divins
que la visite des hommes célestes est toujours une faveur de Dieu.
Quel souvenir en effet garderait-on des pécheurs si, par des voies
cachées, n’intervenait la grâce céleste, pour écarter des esprits,
sous l’influence de son inspiration, l’oubli qu’aurait pu faire
naître l’aversion qu’inspirent les péchés. Ce nous est un gage
assuré de la divine miséricorde que de ne pas être en oubli auprès
des amis de Dieu. Aussi je rends grâces à la Trinité notre Dieu qui
a contraint votre révérence à m’honorer de ses entretiens, J’accepte
aussi la loi de votre obédience : car il n’y a pas un mince honneur
à obéir lorsque la gloire du Christ est réservée à ceux qui
commandent.
Priez
pour moi, vous qui étant encore des hommes, avez évité les
faiblesses de l’humanité, vous qui liés encore au corps avez
le bonheur d’être dégagés des chaînes de la chair. Agréez l’hommage
de mes salutations et accordez-moi de féconder en mon âme par la
culture de vos saints discours la moisson de la grâce. |
|
EPISTOLA XXXV.
ENNODIUS AURELIANO
PRESBYTERO.
|
LETTRE XXXV.
ENNODIUS AU PRÊTRE AURÉLIEN.
Cassiodore
(Var. IV, 12) donne l’exposé complet de l’affaire scandaleuse,
qui fait l’objet de cette lettre.
Le petit
fils d’Archotamia était marié à une certaine Ethéria.
Celle-ci s’éprit d’un Libérius, auquel Cassiodore (Var.
IV. 46) donne le titre d’honorable (vir
spectabilis), et
contracta avec lui une union adultère. Archotamia,
par la plume d’Aurélien, en écrivit à Ravenne:
elle ajouta qu’en quittant son mari, Ethéria l’avait pillé et
s’en était allée riche des dépouilles de ses fils.
La
plainte et les revendications de la grand-mère en faveur de son
petit-fils furent d’abord adressées à Ennodius qui devait,
par le moyen du préfet Faustus, les faire parvenir.
Ennodius rend compte à Aurélien, du résultat de ses
démarches. |
|
Inamabilis quidem desideriis meis
militavit occasio, et votis aditum necessitas vix ferenda patefecit:
amplexus paginam præfatione blandientem, sequenti ejus elocutione
confusus sum. Nam dulce principium et sereni mella colloquii, relata
calamitas, quasi veste noctis, obnubit. Vere loquentibus vobis
ingesta sunt oculis, quæ legebam. Nam dum absentiæ felicitatem
pagina sapientis intercepit, coactus sum illam Ætheriam nimis
vidisse terrenam, et a sublimitate vocabuli in Tartarum duce culpa
depositam. Taceo quid debuerit parentibus, quid pudori: ex qua domo
infelix processit ad scelus: quod secuta est, relictis Dei
cultoribus, lupanaris vice conjugium. Credite mihi, ultionem
criminis, dum admittit crimen, exsecuta est: et turpi mersa
contubernio, et flagitium et pœnam flagitii reperit in marito. Secum
rei personam portavit: et judicis mulier, dum elegit indignum.
Producerem litteras, nisi memoriam
infaustæ feminæ desiderarem oblivione sepeliri. Vos, ut Galliæ
expulsione illorum subleventur, eligetis: nos, ne Italia
coinquinetur. Expetant potius Libycas syrtes: et ab humanitatis
consortio dividantur: quia si inde domnum Aurelianum fugerint, hinc
Ennodium, ad quæ loca declinabunt?
Domno præfecto quæ jussistis, pressius
intimavi: qui præcepta regia mox exegit, per quæ credimus viros
bonos et amicos occasionem invenisse præstandi: et vos tamen animum
ab anxietate removete: quia cœlestis sufficiet ad ultionem malorum
vigor examinis.
Domine mi, salutationis obsequia
præsentans, precor ut crebro me prosperitatis vestræ, quia
commeantium opportunitas ingeritur, relevetis alloquiis. |
C’est une occasion bien désagréable
qui, cette fois, a répondu à mes désirs et mes vœux se trouvent
servis par une dure nécessité : Aux charmes des débuts de votre
lettre que j’avais lus avec ravissement, succède un exposé dont je
suis demeuré confondu. Le malheur dont vous me faites part, a voilé,
comme d’une nuit obscure, les douceurs de ces premières lignes et la
suavité de ces paroles de miel. En vérité, tandis que je vous
lisais, les mots semblaient m’entrer dans les yeux comme des dards.
Car tandis que la lettre d’un sage coupe l’ennui de l’absence, d’un
instant de joie, je me suis vu forcé de constater la chute de cette
Ethéria, devenue trop terrestre et tombée, des hauteurs que son nom
indique, au fond du tartare, sous l’inspiration du mal. Je tais ce
qu’elle devait à ses parents, ce qu’elle devait à la pudeur, de
quelle maison cette malheureuse est sortie pour aller au crime,
comment elle abandonne les serviteurs de Dieu pour contracter un
mariage qui n’est qu’une prostitution. Croyez-moi: elle a trouvé
dans son crime même son juste châtiment et, sous le toit de son
nouveau mari, celui qui la plonge dans ce honteux libertinage se
chargera de l’en punir. En faisant choix de cet indigne, elle se
fait à elle-même justice de sa faute.
Je prolongerais ma lettre si je ne
désirais ensevelir dans l’oubli le souvenir de cette femme néfaste.
Vous voulez, par leur expulsion, en décharger la Gaule. Nous
souhaitons, nous, que L’Italie n’en soit pas souillée. Qu’ils
gagnent les Syrtes de Libye et qu’ils soient retranchés du commerce
de l’humanité. Si d’une part ils fuient Aurélien et de l’autre
Ennodius, en quel pays iront-ils chercher un asile?
Je me suis hâté de transmettre au
seigneur Préfet ce que vous m’aviez prescrit. Il a aussitôt obtenu
des ordres royaux qui, nous avons droit de le croire, feront
triompher la cause des honnêtes gens nos amis.
Et vous, quoiqu’il arrive, tenez-vous en paix, car pour le juste
châtiment des méchants la rigueur du jugement de Dieu sera
suffisante.
Mon cher
seigneur, en vous rendant l’hommage de mes salutations je vous prie,
puisque l’occasion de voyageurs ne vous manque pas, de me procurer
souvent le plaisir de recevoir de vos bonnes nouvelles. |
|
EPISTOLA XXXVI.
ENNODIUS BOETIO.
|
LETTRE XXXVI.
ENNODIUS A BOÈCE.
Aimable et gracieux billet d’ami;
réponse à Boèce qui reprochait à Ennodius d’être froid. |
|
Perdiderat eruditionis pretium lingua,
dum retices: quia dum venustatem eloquentiæ taciturnitas includebat,
credebatur non esse quod nuper efferbuit. Produxisti in lucem novum
jubar eloquii: et dum diem in epistola facis, splendorem recens
adeptus crederis jam maturum.
Gratias ago, quod me ad amicitiæ
custodiam paginæ tuæ flore compellis. Sed si fidei meæ esses
conscius, dubitationem de rebus constantibus non haberes. Timeo ne
ambiguitatem quam credis exhibeas; et dum amantis teporem metuis, in
affectionem frigescas.
Domine, ut supra, salutationis gratiam
persolvens, spero ut crebro ad me epistolarum commercia dirigas,
quia in his muniis et diligentia te admonet et perfectio ut multus
incumbas. |
Le silence fait perdre à votre langue
le fruit de votre érudition, et tandis que vous teniez ainsi voilée
la beauté de votre éloquence, on avait lieu de croire que vous
manquiez d’un talent qui tout récemment jeta un vif éclat. Vous avez
fait lever un nouvel astre de la parole et la clarté dont il brille
dans votre lettre, fait juger que dès son aurore il atteint le plein
jour.
Je vous rends grâces de ce que vous
m’écrivez une si charmante lettre pour me presser de rester fidèle à
l’amitié. Mais si ma foi vous était connue, vous n’auriez pas à cet
égard le moindre doute. Et moi, je crains de découvrir en vous cette
fidélité douteuse que vous me prêtez et tandis que vous soupçonnez
votre ami de tiédeur, je me demande si votre affection ne s’est pas
refroidie
Mon cher
Seigneur, je vous rends, comme par le passé, l’hommage de mes
salutations et j’espère que vous m’écrirez fréquemment car et
l’amitié et le talent vous invitent à donner à ce commerce une
grande étendue. |
|
EPISTOLA XXXVII.
ENNODIUS BOETIO.
|
LETTRE XXXVII.
ENNODIUS A BOÈCE.
Encore l’affaire de la maison de Milan
(VIII, 1, 31) Ennodius avait reçu
des promesses de Boèce, mais de secrètes entraves empêchaient
la conclusion définitive de l’affaire. Ennodius s’efforce de
lever ces obstacles. |
|
Quamvis tenui effectu petitionis
surgit eloquium, et conciliant et dotant facundiam res secundæ, in
qualibet verborum saturitate paginæ si repudientur, ab impetratione
jejunant: plus felicibus epistolis debetur laudatio quam peritis.
Jure loquitur verbis nitore sublimibus, qui summates viros dicendi
venustate captivat: quodvis oratorium schema sinistra sors dissipat:
ditescit enim lingua nutrita beneficiis.
Dudum ad eminentiam vestram direxi
qualicunque audacia producente colloquium: quod ita responsi genio
sublevastis, ut crederem me perdidisse digni favoris tempora per
quietem, quando modicus sudor judicium arcem tenentis illexerat.
Promiseratis etiam domum quam poposceram, non negandam. Geminis
elevatus successibus incedebam: si et opinio perfecti astipulatione,
et census locupletissimi crevisset impendio. Sed detestor moram,
quam sterilia quidem peccata pepererunt. Nam et homo culminis vestri
quem præstolabar advenit: et nihil sibi mandatum esse, quod
desideriis meis prodesse posset, asseruit. Vide meritorum meorum
fusca commercia: quorum contra me nitentia fidem frangere nequeunt,
exigunt tarditatem. Absit a conscientia mea, de vestra claritate
diffidere: obscenæ mentis est, putare constituti memoriam non
manere. Sed rogo ut dum propositi vestri lucem asseritis, eorum quæ
mihi debentur, obscura superetis. Ergo præstationi vestræ genium
dono celeritatis infundite.
Domine mi, cultum salutationis
impertiens, preces adjicio, ut consularem sportulam cum responso
præfatæ petitionis accipiam. |
Le moindre résultat qu’obtient une
requête relève le discours, et le succès donne de l’éloquence et la
nourrit; D’autre part, le discours à beau être abondant, si la
demande est refusée, les pages sont bien arides. On doit des éloges
aux lettres heureuses bien plutôt qu’aux lettres savantes. C’est, on
peut le dire, parler un langage sublime que de savoir, par le charme
de la parole, captiver les hommes les plus haut placés. La mauvaise
fortune fait évanouir tous les moyens oratoires; rien, au contraire,
n’enrichit la langue comme d’obtenir des faveurs.
Il y a déjà quelque temps j’adressai à
votre Eminence une lettre que j’avais pris l’extrême liberté de lui
écrire. Vous daignâtes y faire une réponse si bienveillante que j’en
étais à me reprocher d’avoir laissé perdre, en me tenant en repos.
un temps où j’étais en telle faveur qu’il me suffisait du moindre
effort pour gagner l’assentiment de celui qui disposait du pouvoir.
Vous aviez même promis que la maison dont je vous faisais la
demande, ne me serait pas refusée. C’était un double succès qui me
rendait très fier, car je voyais ma renommée grandie par le
témoignage flatteur d’un homme si parfait et mon avoir augmenté par
les libéralités de son opulence. Mais voici de détestables retards
qu’ont fait naître mes péchés. L’homme de votre Eminence que
j’attendais, est, il est vrai, venu, mais il assure n’avoir point
d’ordres en conformité de mes désirs. Voyez là de louches manœuvres
que je n’ai que trop méritées comme on ne peut s’opposer ouvertement
aux promesses qui m’ont été données et en obtenir la révocation, on
en fait retarder l’exécution. Loin de ma pensée d’avoir la moindre
défiance de votre parfaite bonne volonté; il est d’un esprit sans
conscience de supposer qu’on oublie ses engagements. Mais, je vous
en prie, tout en affirmant au grand jour que vous êtes un homme de
parole, déjouez les manœuvres ténébreuses ourdies contre moi.
Veuillez donc rendre utile ce que vous m’accordez par une prompte
réalisation.
Mon cher Seigneur, en vous rendant
l’hommage de mes salutations j’y ajoute la prière que votre réponse
à la susdite demande m’apporte, à moi aussi, votre largesse
consulaire.
|
|
EPISTOLA XXXVIII.
ENNODIUS SYMMACHO.
|
LETTRE XXXVIII.
ENNODIUS A SYMMAQUE.
Billet de recommandation en
faveur du jeune Béatus qui en parle un autre
adressé au diacre Hormisdas (ibid. 39). |
|
Non inefficaciter poscit, qui parenti
omnium peregrinos insinuat: nobilibus generalis debetur assertio,
maxime apud eos qui beneficia tribuunt non rogati. Beatum sublimem
adolescentem, præsentium bajulum, si corona vestra dignanter
accipiat, præclarum juxta morem pontificis ornat officium. Est enim
qui gratiam vestram et natalibus et moribus mereatur: sufficit
dignis stricta laudatio. Nunc servitiis salutationis exhibitis,
rogo, ut me amantem vestri crebri relevetis promulgatione colloquii. |
Comment
ne pas être écouté lorsqu’on recommande due étrangers au père
commun. Les nobles esprits on droit à u’ patronnés partout, mais
principalement auprès de ceux savent obliger même sans en être
priés. Si le sublime je11uu homme Béatus, porteur des présentes,
trouve un bienveillant accueil auprès de votre couronne, votre
glorieux pontifient comme il est de tradition, en sera illustré, car
ce jeune homme, et par sa naissance et par ses mœurs, est digne de
vne faveurs. IL suffit aux personnages de mérite d’être loués en de
mots. Après vous avoir adressé l’hommage de mes salnuLions je vous
prie de me réconforter, moi qui vous aime, de vos fréquentes
lettres. |
|
EPISTOLA XXXIX.
ENNODIUS HORMISDÆ
DIACONO.
|
LETTRE XXXIX.
ENNODIUS AU DIACRE HORMISDAS.
Il
lui recommande le jeune étudiant Béatus et lui prédit de nouveau que
bientôt il sera pape (VIII,
33). |
|
Si dignatio circa me promissa duraret,
assereretur frequentia litterarum: vix respiciunt humiles, quos ad
arcem eventus prosper evexerit: grave est, si spes secundarum rerum
caritatis nexus incidat: non debet præjudicare diligentiæ, cui
secundum vota blanditur. Si tamen aliquid circa me gratiæ
custoditis; si vivit amoris polliciti scintilla, Beatum commendo
nobilissimum adolescentem præsentium portitorem; cui justum est ut
consideratione mei, et parentem beatitudo vestra impendat, et
patriam. Esto specialis tutor, omnium mox futurus. Domine frater,
salutationis humilitate depensa, rogo ut sub celeritate quam bene
valeatis, scriptione signetis. |
Si vous
me gardiez encore la bienveillance qui me fut promise, de fréquentes
lettres m’en fourniraient la preuve. C’est à peine s’ils daignent
abaisser leurs regards vers les humbles mortels ceux qu’une heureuse
fortune a élevés au faite des honneurs. Ne serait-il pas très
fâcheux que la perspective d’heureux succès tranchât les liens de
l’amitié? Il ne faut pas que l’affection soit diminuée par le fait
de la bonne fortune qui nous sourit. Si pourtant je n’ai pas tout à
fait perdu vos bonnes grâces, s’il reste encore une étincelle de
l’amitié que vous m’aviez promise, souffrez que je vous recommande
Béatus, très noble jeune homme, porteur des présentes. Il est juste
qu’en ma considération il trouve auprès de votre Béatitude un père
et une patrie. Soyez le tuteur de ce particulier, vous qui bientôt
le serez de toute l’Eglise. Monseigneur et frère, après vous voir
très humblement salué, je vous prie de me signaler sans retard, par
une lettre, si vous êtes en bonne santé. |
|
EPISTOLA XL.
ENNODIUS BOETIO.
|
LETTRE XL.
ENNODIUS A BOÈCE.
Suite
de l’affaire de la maison de Milan dont Ennodius sollicite la
conclusion définitive
(VIII. 1, 31, 37). |
|
Precum iteratio bonam conscientiam
oblivionis accusat. Sed facessat stimulare currentem, et constantem
virum ad memoriam promissionis impellere. Hæc de his quæ a me dudum
culmini vestro sunt scripta, perstrinxi; ut domum de qua jam
paginati indicio voluntas vestra est patefacta, perficiam. Reliqua
epistolæ salutationis nuntio mancipavi; ut sicut apud nos valetudo
in statione est, ita de culmine vestro cœlestis faciat favor
agnosci. |
Renouveler une demande c’est accuser une bonne volonté d’être
oublieuse. Loin de moi de prétendre stimuler quelqu’un qui court, ni
rappeler au souvenir de sa promesse un homme fidèle à ses
engagements. Je veux seulement résumer ici ce que j’écrivis il y a
quelque temps à votre Eminence pour obtenir que la maison au sujet
de laquelle vous m’aviez déjà par lettre manifesté vos intentions,
me soit remise. Je charge le porteur de vous adresser mes
salutations et mes compliments et je souhaite d’apprendre que votre
santé est aussi bonne que la mienne. |
|
EPISTOLA XLI.
ENNODIUS AGAPITO.
|
LETTRE XLI.
ENNODIUS A AGAPIT.
Charmant billet d’amitié. |
|
Insolabiliter amantum ferretur
absentia, nisi opem darent remedia litterarum, quæ jejunas
desiderantum animas pascunt esca colloquii. Bene enim per stylum
dilectio amicam sibi pingit effigiem; cum qua sine laboris patientia
misceat mella sermonum. Ad hoc magnitudo tua artifex ne impastam
gratiam linqueres, scripsisti. Debeo vicissitudinem, quia memorem
mei te esse cognovi.
Honore ergo salutationis exhibito,
rogo ut quod scis apud caros et affectione præditos esse pretiosum
sub continuatione facere non omittas. |
On ne pourrait se consoler de
l’absence des amis si l’on ne trouvait dans le commerce épistolaire
un salutaire remède qui procure aux âmes avides de converser
ensemble, l’aliment désiré. Par la plume, en effet, le cœur se
représente à merveille un visage ami et, sans que le travail en
souffre, goûte les douceurs de la conversation. C’est ce que votre
Grandeur excelle à faire, et pour ne pas laisser nos relations sans
aliment, vous avez daigné m’écrire. Je dois vous payer de retour,
puisque vous me prouvez que vous ne m’oubliez pas.
En vous rendant l’hommage de mes
salutations je vous prie
ne pas omettre de continuer ce que
vous savez être pré cieux aux yeux de ceux qui vous sont chers et
qui savent vous aimer. |
|
EPISTOLA XLII.
ENNODIUS AVIENO.
|
LETTRE XLII.
ENNODIUS A AVIÉNUS.
Durant la grande maladie d’Ennodius,
Faustus et les siens l’avaient visité (VIII, 31). Après leur
départ le mal avait empiré. Au plus fort de ce mal
affreux, alors que la mort paraissait au pauvre malade
une délivrance, seule l’affection des Faustus le soutint
contre le désespoir. |
|
Ægritudinis vestræ indicium in meæ
contigit incrementum. Nam talis semper et usus et pene natura
solliciti, ut vix credat transiisse quod metuit: et quæ fecit
Redemptor noster cœlesti benignitate præterita, quasi sint in
occultis locata suspirat. Vere domne Aviene, jam in me nihil de
usura lucis istius, nisi vestra tantum, post amorem Dei, remansit
affectio: quando melius mecum agitur, talis sum, qualem me in
desperatione dimisistis. Superest ut precibus vestris et peccatorum
remissio concedatur, et si ita Deo videtur, pro vice remedii obitus
celer eveniat, ne amarius sit morte quod vivo.
Domine mi, salutationem debitam tota
humilitate persolvens, rogo ut per vos, quid in causa vestra de Roma
nuntietur, agnoscam. |
Vous êtes malade et cette nouvelle
vient augmenter mon propre mal. Car il est ordinaire à ceux qu’agite
l’inquiétude et comme naturel d’avoir peine à croire passé ce qu’on
redoute, de se mettre sous les yeux le bonheur d’autrefois et de
soupirer après son retour. En toute vérité, seigneur Aviénus, après
la crainte de Dieu, il ne me reste plus d’attache à cette triste vie
que votre affection. Aux meilleurs moments, je suis lei que vous
m’avez laissé, abîmé dans le désespoir. Il me reste à souhaiter que
vos prières m’obtiennent rémission de mes fautes et, si Dieu le
trouve bon, une mort prompte, fin de mes tourments, car mourir
serait moins amer qu’une telle vie.
Mon cher
seigneur, je vous salue, comme je le dois, en toute humilité, vous
priant de me faire connaître les nouvelles qui pourraient venir de
Rome au sujet de notre affaire. |
|
EPISTOLA XLIII.
ENNODIUS MESSALÆ.
|
LETTRE XLIII.
ENNODIUS A MESSALA.
Cette lettre au frère d’Aviénus est
écrite sous la même
inspiration que la précédente. |
|
Nunquid aliquando ab effectu destitit,
qui Deo cum fiducia supplicavit? Si animus in fide non claudicet, et
vota et votorum copia conjunguntur. Ecce egit apud vos silentium
meum, quod tanti temporis non valuit obtinere loquacitas. Quantum
video, scripta vestra nisi taciturnitas non meretur: quos mutos
putatis, alloquimini: ab his quibus lingua esse creditur, abstinetis.
Fecisti tamen quod decuit domnum et, ut ipsi dicitis, parentem; ut
me gravi ægritudine depressum dignum putetis alloquio. Rogo ut hoc
sub continuatione faciatis.
Domine mi, salutationis reverentiam
solvens posco ut pro me per omnes Dei sanctos supplicare non desinas,
quatenus vitæ redditus, de visione vestra gaudeam. |
Vit-on jamais celui qui s’adresse à
Dieu avec confiance ne pas obtenir ce qu’il demande? L’âme qui ne
chancelle pas dans la foi, voit ses vœux aussitôt exaucés. Or voici
que mon silence m’obtient de vous ce que depuis longtemps, ne purent
obtenir mes entretiens multiples. Autant que je le vois, pour
recevoir de vous des lettres il n’y a qu’à se taire ; vous ne
parlez qu’à ceux que vous croyez muets ; quant aux autres qui
passent pour avoir une langue, vous vous abstenez de leur adresser
la parole. A mon égard, vous avez agi comme il convenait à un ami
et, comme vous le dites vous-même, à un parent: dans l’abattement où
me jette cette grave maladie, vous avez pensé à relever mon courage
de vos bonnes paroles. Je vous supplie de me les continuer.
Mon cher
Seigneur, je vous rends l’hommage de mes salutations et vous prie en
grâce d’intercéder pour moi par tous les saints de Dieu, à fin que
rendu à la vie, j’aie encore le bonheur de vous voir. |
|
|