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 Athénée : les deipnosophistes 

De l'amour

Livre XIII

texte français seul mis en page par Philippe Renault

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Démosthène et ses vices.

 

63. Δημοσθένη δὲ τὸν ῥήτορα καὶ τεκνοποιήσασθαι ἐξ ἑταίρας ἔχει λόγος. Αὐτὸς γοῦν ἐν τῷ περὶ Χρυσίου λόγῳ προαγήοχε τὰ τέκνα ἐπὶ τὸ δικαστήριον ὡς δι' ἐκείνων ἕλεον ἕξων χωρὶς τῆς μητρός, καίτοι ἔθος ἐχόντων τῶν κρινομένων τὰς γυναῖκας ἐπάγεσθαι · ἀλλ' αἰδοῖ τουτ' ἐποίησεν, φεύγων τὴν διαβολήν. ᾿Ακόλαστος δ' ἦν ὁ ῥήτωρ περὶ τὰ ἀφροδίσια, ὥς φησιν ᾿Ιδομενεύς. ᾿Αριστάρχου γοῦν τινος ἐρασθεὶς μειρακίου καὶ δι' αὐτὸν παροινήσας εἰς Νικόδημον ἐξέκοψεν αὐτοῦ τοὺς ὀφθαλμούς. Παραδέδοται δὲ καὶ περὶ ὄψα καὶ περὶ νέους καὶ περὶ γυναῖκας πολυτελής. Τοιγαροῦν καὶ ὁ γραμματεύς ποτ' αὐτοῦ εἶπε· « Τί δ' ἄν τις περὶ Δημοσθένους λέγειν δύναιτο; τὰ γὰρ ἐνιαυτῷ μελετηθέντα ἐκείνῳ μία γυνὴ μιᾷ νυκτὶ συνέχεεν. » ᾿Αναλαβεῖν γοῦν καὶ εἰς τὴν οἰκίαν λέγεταί τινα Κνωσίωνα μειρακίσκον, καίτοι γυναῖκα ἔχων· ὡς καὶ αὐτὴν ἀγανακτήσασαν συγκοιμᾶσθαι τῷ Κνωσίωνι.

63. Il est de notoriété publique que l'orateur Démosthène a eu des enfants d’une courtisane. Alors qu'il prononçait son Discours sur l'Or, on sait qu'il amena ses enfants devant le tribunal, afin d'obtenir la compassion des juges. Il n'était pas accompagné de leur mère, bien que l'usage voulût qu'elle fût citée comme témoin du procès. Mais s'il s'abstint, c'était pour éviter le scandale.

L'orateur avait une sexualité débridée, aux dires d'Idoménéos. Un jour, alors qu'il était tombé amoureux d’un jeune homme du nom d'Aristarque, il s'en prit vivement à un certain Nicodème – à cause de notre jeune homme justement – et, dans un moment d'ivresse, il lui creva les yeux. Tout le monde sait qu'il dilapida sa fortune en repas fastueux, en jeunes garçons, et en femmes. D'où ce propos d'un de ses secrétaires : 

 

« Que peut-on dire de Démosthène? Ce qui lui a demandé une année de labeur a été anéanti en une seule nuit à cause d'une femme. » 

 

On raconte aussi que, bien que marié, il amena chez lui un jeune homme appelé Cnosion. Sa femme, en guise de vengeance, coucha finalement avec ce Cnosion...

 

DÉMOSTHÈNE

Naissance : Athènes, 384 avant J.C. - Décès : Athènes, 322 avant J.C.

Démosthène perdra son père, un riche armurier, à l'âge de sept ans. Formé à l'école d'Isée, il intentera un procès à ses tuteurs onze années plus tard, afin de récupérer une faible partie de sa fortune dilapidée par ces derniers.
De santé fragile et doté d'une voix faible qui manquait de netteté, Démosthène corrigera son défaut d'élocution en s'entraînant à parler avec des cailloux dans la bouche défauts (Plutarque, Vie de Démosthène, Cicéron, de Finibus). Passionné par l'oeuvre historique de Thucydide, il deviendra logographe (celui qui écrit les discours pour d'autres) et déclamera ses plaidoyers dans les procès d'État, pour le compte du ministère public.
Grâce à ses dons d'orateur, Démosthène entrera en politique vers 354 avant Jésus-Christ. Il tentera de mobiliser les sentiments nationalistes des Athéniens contre la menace d'invasion des troupes de Philippe II de Macédoine et prononcera alors ses célèbres discours - les Philippiques (réorganisation de l'armée), les Olynthiennes (porter secours à Olynthe), les discours Sur la paix et Sur les affaires de Chersonèse (prendre des mesures face à la guerre imminente) - à la tribune de l'assemblée, en faveur de la démocratie. Sa virtuosité rhétorique marquera l'apogée de l'art de l'éloquence. Le pays est alors affaibli par les séquelles des luttes fratricides entre les cités, l'égoïsme des riches qui refusent de payer l'impôt et l'oisiveté du peuple qui s'enfonce dans la paresse.
Devenu chef du parti patriotique en 340 avant Jésus-Christ, Démosthène s'alliera aux Thébains afin d'affronter Philippe II. Il sera vaincu à Chéronée en -338 avant Jésus-Christ. Attaqué par Eschine huit ans plus tard, alors que Ctésiphon proposait de lui décerner une couronne honorifique, Démosthène revendiquera fièrement d'avoir inspiré la résistance d'Athènes dans son discours Sur la couronne. Accusé, probablement à tort, d'avoir détourné des fonds en 325 avant Jésus-Christ (affaire d'Harpale), il sera condamné à une lourde amende qu'il ne pourra acquitter et sera banni un an d'Athènes. Démosthène tentera une nouvelle fois de mobiliser les Athéniens à la mort d'Alexandre le Grand. Condamné à mort par les Macédoniens, il devancera ses bourreaux en s'empoisonnant dans le temple de Poséidon. 

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Démosthène et les courtisanes

Le péripatéticien Sotion ne manquait pas de mérite; il a composé un recueil d'anecdotes de tous genres; il l'a intitulé la Corne d'Amalthée, ce qui est à peu près l'équivalent de l'expression latine, "Cornu copiae", la corne d'abondance. On trouve dans ce recueil l'anecdote suivante sur l'orateur Démosthène et la courtisane Laïs. La Corinthienne Laïs, dit Sotion, femme d'une beauté et d'une grâce ravissante, se faisait un immense revenu. Les hommes les plus opulents de toute la Grèce accouraient chez elle; on n'était admis qu'en donnant ce qu'elle exigeait, et elle mettait ses faveurs à un prix excessif; de là cet adage connu en Grèce: "Il n'est pas permis à tout le monde d'aborder à Corinthe"; car c'était en vain qu'on allait à Corinthe chez Laïs, si on ne pouvait donner la somme demandée. Un jour, Démosthène se rend secrètement chez elle, et sollicite ses faveurs. Mais Laïs lui demande dix milles drachmes, c'est-à-dire un talent, ce qui vaut dix mille deniers de notre monnaie. L'effronterie de cette femme et l'énormité de la somme confondent et effrayent Démosthène, qui se retire en disant : "Je n'achète pas si cher un repentir". Mais le mot est bien plus piquant en grec : Οὐκ ὠνοῦμαι μυρίων δραχμῶν μεταμέλειαν.

Aulu-Gelle, I, VIII.