VOLUME XI
PLATON
[256a] Ξένος Ἔστι δέ γε διὰ τὸ μετέχειν τοῦ ὄντος. Θεαίτητος Ἔστιν. Ξένος Αὖθις δὴ πάλιν ἡ κίνησις ἕτερον ταὐτοῦ ἐστιν. Θεαίτητος Σχεδόν. Ξένος Οὐ ταὐτὸν ἄρα ἐστίν. Θεαίτητος Οὐ γὰρ οὖν. Ξένος Ἀλλὰ μὴν αὕτη γ' ἦν ταὐτὸν διὰ τὸ μετέχειν αὖ πάντ' αὐτοῦ. Θεαίτητος Καὶ μάλα.
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[256a] L'ÉTRANGER. Mais il est, par participation à l'être. THÉÉTÈTE. Oui. L'ÉTRANGER. D'un autre côté, le mouvement est aussi différent du même. THÉÉTÈTE. Oui. 285 L'ÉTRANGER. Il n'est donc pas le même. THÉÉTÈTE. Non. L'ÉTRANGER. Et pourtant il est le même, parce que tout participe au même. THÉÉTÈTE. Soit.
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Ξένος Τὴν κίνησιν δὴ ταὐτόν τ' εἶναι καὶ μὴ ταὐτὸν ὁμολογητέον καὶ οὐ δυσχεραντέον. οὐ γὰρ ὅταν εἴπωμεν αὐτὴν ταὐτὸν καὶ μὴ ταὐτόν, ὁμοίως εἰρήκαμεν, ἀλλ' ὁπόταν μὲν [256b] ταὐτόν, διὰ τὴν μέθεξιν ταὐτοῦ πρὸς ἑαυτὴν οὕτω λέγομεν, ὅταν δὲ μὴ ταὐτόν, διὰ τὴν κοινωνίαν αὖ θατέρου, δι' ἣν ἀποχωριζομένη ταὐτοῦ γέγονεν οὐκ ἐκεῖνο ἀλλ' ἕτερον, ὥστε ὀρθῶς αὖ λέγεται πάλιν οὐ ταὐτόν. Θεαίτητος Πάνυ μὲν οὖν. Ξένος Οὐκοῦν κἂν εἴ πῃ μετελάμβανεν αὐτὴ κίνησις στάσεως, οὐδὲν ἂν ἄτοπον ἦν στάσιμον αὐτὴν προσαγορεύειν; Θεαίτητος Ὀρθότατά γε, εἴπερ τῶν γενῶν συγχωρησόμεθα τὰ μὲν ἀλλήλοις ἐθέλειν μείγνυσθαι, τὰ δὲ μή.
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L'ÉTRANGER. Il faut donc reconnaître que le mouvement est le même et n'est pas le même, et ne pas s'effaroucher de cela ; car quand nous disons qu'il est le même et n'est pas le même, ce n'est pas dans le même sens. [256b] Quand nous disons qu'il est le même, c'est à cause de sa participation à l'idée du même; quand nous disons qu'il n'est pas le même, c'est par rapport à ce qu'il a de commun avec l'autre, qui le distingue du même et fait qu'il est autre que le même, de sorte qu'on peut aussi dire justement qu'il n'est pas le même. THÉÉTÈTE. Tout-à-fait. .286 L'ÉTRANGER. En ce sens, s'il se pouvait faire que le mouvement participât du repos, il n'y aurait, rien de déraisonnable à l'appeler stable. THÉÉTÈTE. Ce serait au mieux ; mais nous sommes convenus qu'il y a des genres qui peuvent être mêlés les uns avec les autres, et d'autres qui ne le peuvent pas.
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[256c] Ξένος Καὶ μὴν ἐπί γε τὴν τούτου πρότερον ἀπόδειξιν ἢ τῶν νῦν ἀφικόμεθα, ἐλέγχοντες ὡς ἔστι κατὰ φύσιν ταύτῃ. Θεαίτητος Πῶς γὰρ οὔ; Ξένος Λέγωμεν δὴ πάλιν· ἡ κίνησίς ἐστιν ἕτερον τοῦ ἑτέρου, καθάπερ ταὐτοῦ τε ἦν ἄλλο καὶ τῆς στάσεως; Θεαίτητος Ἀναγκαῖον. Ξένος Οὐχ ἕτερον ἄρ' ἐστί πῃ καὶ ἕτερον κατὰ τὸν νυνδὴ λόγον. Θεαίτητος
Ἀληθῆ.
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[256c] L'ÉTRANGER. Oui; c'est ce que nous avons démontré avant d'en venir où nous en sommes maintenant; nous avons prouvé que c'est une distinction fondée dans la nature, THÉÉTÈTE. Sans doute. L'ÉTRANGER. Continuons. Le mouvement est autre que l'autre, comme nous venons de faire voir qu'il est différent du même et du repos. THÉÉTÈTE. Nécessairement. L'ÉTRANGER. Il est autre en un sens, et en un autre il ne l'est pas, suivant notre observation précédente. THÉÉTÈTE. C'est juste.
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[257a] Ξένος Οὐκοῦν καὶ τὸ ὂν αὐτὸ τῶν ἄλλων ἕτερον εἶναι λεκτέον. Θεαίτητος Ἀνάγκη. Ξένος Καὶ τὸ ὂν ἄρ' ἡμῖν, ὅσαπέρ ἐστι τὰ ἄλλα, κατὰ τοσαῦτα οὐκ ἔστιν· ἐκεῖνα γὰρ οὐκ ὂν ἓν μὲν αὐτό ἐστιν, ἀπέραντα δὲ τὸν ἀριθμὸν τἆλλα οὐκ ἔστιν αὖ. Θεαίτητος Σχεδὸν οὕτως. Ξένος Οὐκοῦν δὴ καὶ ταῦτα οὐ δυσχεραντέον, ἐπείπερ ἔχει κοινωνίαν ἀλλήλοις ἡ τῶν γενῶν φύσις. εἰ δέ τις ταῦτα μὴ συγχωρεῖ, πείσας ἡμῶν τοὺς ἔμπροσθεν λόγους οὕτω πειθέτω τὰ μετὰ ταῦτα. Θεαίτητος Δικαιότατα εἴρηκας.
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[257a] L'ÉTRANGER. Ne faut-il pas dire aussi de l'être qu'il est autre que tout le reste ? THÉÉTÈTE. Nécessairement. L'ÉTRANGER. Par conséquent, autant il y a de choses différentes de l'être, autant de fois l'être n'est pas. Car n'étant pas toutes ces choses, il est lui-même un, mais il n'est pas tout le reste, en nombre infini. THÉÉTÈTE. Il paraît. L'ÉTRANGER. Il ne faut pas s'effaroucher de cela, attendu que les genres sont susceptibles d'être associés les uns aux autres. Si on refuse de nous accorder notre dernière proposition, qu'on nous persuade d'abord sur les principes, on nous persuadera facilement sur les conséquences. THÉÉTÈTE. Rien de plus juste.
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[257b] Ξένος Ἴδωμεν δὴ καὶ τόδε. Θεαίτητος Τὸ ποῖον; Ξένος Ὁπόταν τὸ μὴ ὂν λέγωμεν, ὡς ἔοικεν, οὐκ ἐναντίον τι λέγομεν τοῦ ὄντος ἀλλ' ἕτερον μόνον. Θεαίτητος Πῶς; Ξένος Οἷον ὅταν εἴπωμέν τι μὴ μέγα, τότε μᾶλλόν τί σοι φαινόμεθα τὸ σμικρὸν ἢ τὸ ἴσον δηλοῦν τῷ ῥήματι; Θεαίτητος Καὶ πῶς; Ξένος Οὐκ ἄρ', ἐναντίον ὅταν ἀπόφασις λέγηται σημαίνειν, συγχωρησόμεθα, τοσοῦτον δὲ μόνον, ὅτι τῶν ἄλλων τὶ μηνύει [257c] τὸ μὴ καὶ τὸ οὒ προτιθέμενα τῶν ἐπιόντων ὀνομάτων, μᾶλλον δὲ τῶν πραγμάτων περὶ ἅττ' ἂν κέηται τὰ ἐπιφθεγγόμενα ὕστερον τῆς ἀποφάσεως ὀνόματα.
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[257b] L'ÉTRANGER. Voyons encore ceci. 289 THÉÉTÈTE. Et quoi? L'ÉTRANGER. Lorsque nous disons le non-être, nous ne parlons pas, je crois, du contraire de l'être, mais seulement de quelque chose d'autre. THÉÉTÈTE. Comment? L'ÉTRANGER. Par exemple, quand nous disons quelque chose qui n'est pas grand, voit-on que nous désignons par cette expression le petit plutôt que le moyen ? THÉÉTÈTE. Nullement. L'ÉTRANGER. Ainsi nous n'admettrons pas qu'une négation signifie le contraire, mais seulement quelque chose [257c] de différent des noms qui la suivent, ou, pour mieux dire, des choses auxquelles s'appliquent les noms que la négation précède.
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Θεαίτητος Παντάπασι μὲν οὖν. Ξένος Τόδε δὲ διανοηθῶμεν, εἰ καὶ σοὶ συνδοκεῖ. Θεαίτητος Τὸ ποῖον; Ξένος Ἡ θατέρου μοι φύσις φαίνεται κατακεκερματίσθαι καθάπερ ἐπιστήμη. Θεαίτητος Πῶς; Ξένος Μία μέν ἐστί που καὶ ἐκείνη, τὸ δ' ἐπί τῳ γιγνόμενον μέρος αὐτῆς ἕκαστον ἀφορισθὲν ἐπωνυμίαν ἴσχει τινὰ [257d] ἑαυτῆς ἰδίαν· διὸ πολλαὶ τέχναι τ' εἰσὶ λεγόμεναι καὶ ἐπιστῆμαι.
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THÉÉTÈTE. A merveille. L'ÉTRANGER. Voyons si tu seras encore d'accord avec moi sur ce point-ci. THÉÉTÈTE. Lequel ? 290 L'ÉTRANGER. L'idée de l'autre me paraît divisée en quantité de parties comme la science. THÉÉTÈTE. Comment? L'ÉTRANGER. La science est aussi une en quelque manière; mais chacune de ses parties appliquée à un objet quelconque, forme une division à part et reçoit [257d] un nom particulier. De là cette foule dé sciences et d'arts diversement nommés.
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Θεαίτητος Πάνυ μὲν οὖν. Ξένος Οὐκοῦν καὶ τὰ τῆς θατέρου φύσεως μόρια μιᾶς οὔσης ταὐτὸν πέπονθε τοῦτο. Θεαίτητος Τάχ' ἄν· ἀλλ' ὅπῃ δὴ λέγωμεν; Ξένος Ἔστι τῷ καλῷ τι θατέρου μόριον ἀντιτιθέμενον; Θεαίτητος Ἔστιν. Ξένος Τοῦτ' οὖν ἀνώνυμον ἐροῦμεν ἤ τιν' ἔχον ἐπωνυμίαν; Θεαίτητος Ἔχον· ὃ γὰρ μὴ καλὸν ἑκάστοτε φθεγγόμεθα, τοῦτο οὐκ ἄλλου τινὸς ἕτερόν ἐστιν ἢ τῆς τοῦ καλοῦ φύσεως. Ξένος Ἴθι νυν τόδε μοι λέγε.
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THÉÉTÈTE. Sans doute. L'ÉTRANGER. Eh bien ! n'en est-il pas de même des parties de l'idée de l'autre, qui pourtant est une? THÉÉTÈTE. Peut-être, mais voyons comment cela se fait. L'ÉTRANGER. N'y a-t-il pas une partie de l'autre qui cet opposée au beau? THÉÉTÈTE. Oui. L'ÉTRANGER. Est-ce une chose sans nom, ou qui a un nom? THÉÉTÈTE. Une chose qui a un nom ; ce que nous appe- 291 Ions non-beau, c'est ce qui est particulièrement autre que le beau. L'ÉTRANGER. Maintenant dis-moi ceci.
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[257e] Θεαίτητος Τὸ ποῖον; Ξένος Ἄλλο τι τῶν ὄντων τινὸς ἑνὸς γένους ἀφορισθὲν καὶ πρός τι τῶν ὄντων αὖ πάλιν ἀντιτεθὲν οὕτω συμβέβηκεν εἶναι τὸ μὴ καλόν; Θεαίτητος Οὕτως. Ξένος Ὄντος δὴ πρὸς ὂν ἀντίθεσις, ὡς ἔοικ', εἶναί τις συμβαίνει τὸ μὴ καλόν. Θεαίτητος Ὀρθότατα. Ξένος Τί οὖν; Κατὰ τοῦτον τὸν λόγον ἆρα μᾶλλον μὲν τὸ καλὸν ἡμῖν ἐστι τῶν ὄντων, ἧττον δὲ τὸ μὴ καλόν; Θεαίτητος Οὐδέν.
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[257e] THÉÉTÈTE. Quoi? L'ÉTRANGER. Le non-beau ne vient-il pas d'une chose qu'on tire d'un des genres des êtres, et que derechef on oppose à quelque autre être? THÉÉTÈTE. Oui. L'ÉTRANGER. Le non-beau consiste donc, à ce qu'il paraît, dans une opposition d'un être avec un être. THÉÉTÈTE. Très bien. L'ÉTRANGER. Mais quoi! de cette manière avons-nous moins de raisons pour mettre le non-beau au nombre des êtres que pour y mettre le beau? THÉÉTÈTE. Point du tout.
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[258a] Ξένος Ὁμοίως ἄρα τὸ μὴ μέγα καὶ τὸ μέγα αὐτὸ εἶναι λεκτέον; Θεαίτητος Ὁμοίως. Ξένος Οὐκοῦν καὶ τὸ μὴ δίκαιον τῷ δικαίῳ κατὰ ταὐτὰ θετέον πρὸς τὸ μηδέν τι μᾶλλον εἶναι θάτερον θατέρου; Θεαίτητος Τί μήν; Ξένος Καὶ τἆλλα δὴ ταύτῃ λέξομεν, ἐπείπερ ἡ θατέρου φύσις ἐφάνη τῶν ὄντων οὖσα, ἐκείνης δὲ οὔσης ἀνάγκη δὴ καὶ τὰ μόρια αὐτῆς μηδενὸς ἧττον ὄντα τιθέναι. Θεαίτητος Πῶς γὰρ οὔ;
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[258a] L'ÉTRANGER. On doit donc dire du non grand qu'il est, tout aussi bien que du grand lui-même. THÉÉTÈTE. Tout aussi bien. 292 L'ÉTRANGER. Ainsi, le non juste doit être assimilé au juste sous ce rapport que l'un n'existe pas moins que l'autre. THÉÉTÈTE. Évidemment. L'ÉTRANGER. Et nous en dirons autant du reste, dès que l'autre nous a paru être au nombre des êtres; s'il existe, il faut admettre que ses parties n'existent pas moins. THÉÉTÈTE. Nécessairement.
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Ξένος Οὐκοῦν, ὡς ἔοικεν, ἡ τῆς θατέρου μορίου φύσεως [258b] καὶ τῆς τοῦ ὄντος πρὸς ἄλληλα ἀντικειμένων ἀντίθεσις οὐδὲν ἧττον, εἰ θέμις εἰπεῖν, αὐτοῦ τοῦ ὄντος οὐσία ἐστίν, οὐκ ἐναντίον ἐκείνῳ σημαίνουσα ἀλλὰ τοσοῦτον μόνον, ἕτερον ἐκείνου. Θεαίτητος Σαφέστατά γε. Ξένος Τίν' οὖν αὐτὴν προσείπωμεν; Θεαίτητος Δῆλον ὅτι τὸ μὴ ὄν, ὃ διὰ τὸν σοφιστὴν ἐζητοῦμεν, αὐτό ἐστι τοῦτο.
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L'ÉTRANGER. Ainsi apparemment l'opposition entre une partie de l'autre [258b] et l'être, mis en regard l'un de l'autre, n'existe pas moins, si j'ose le dire, que l'être lui-même, et cette opposition ne représente point le contraire de l'être, mais seulement quelque chose d'autre que lui. THÉÉTÈTE. Rien de plus clair. L'ÉTRANGER. Or, quel nom lui donnerons-nous? THÉÉTÈTE. Évidemment c'est là le non-être que nous cherchions en cherchant le sophiste.
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Ξένος Πότερον οὖν, ὥσπερ εἶπες, ἔστιν οὐδενὸς τῶν ἄλλων οὐσίας ἐλλειπόμενον, καὶ δεῖ θαῤῥοῦντα ἤδη λέγειν ὅτι τὸ μὴ ὂν βεβαίως ἐστὶ τὴν αὑτοῦ φύσιν ἔχον, ὥσπερ τὸ μέγα [258c] ἦν μέγα καὶ τὸ καλὸν ἦν καλὸν καὶ τὸ μὴ μέγα <μὴ μέγα> καὶ τὸ μὴ καλὸν <μὴ καλόν>, οὕτω δὲ καὶ τὸ μὴ ὂν κατὰ ταὐτὸν ἦν τε καὶ ἔστι μὴ ὄν, ἐνάριθμον τῶν πολλῶν ὄντων εἶδος ἕν; ἤ τινα ἔτι πρὸς αὐτό, ὦ Θεαίτητε, ἀπιστίαν ἔχομεν; Θεαίτητος Οὐδεμίαν. Ξένος Οἶσθ' οὖν ὅτι Παρμενίδῃ μακροτέρως τῆς ἀποῤῥήσεως ἠπιστήκαμεν; Θεαίτητος Τί δή; Ξένος Πλεῖον ἢ 'κεῖνος ἀπεῖπε σκοπεῖν, ἡμεῖς εἰς τὸ πρόσθεν ἔτι ζητήσαντες ἀπεδείξαμεν αὐτῷ. Θεαίτητος Πῶς;
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L'ÉTRANGER. Est-il vrai, comme tu le disais, qu'il ne le cède du 293 côté de l'être à aucune autre chose ? Faut-il soutenir hardiment que le non-être existe réellement ayant sa nature à lui, et comme nous avons vu que le grand [258c] est grand, que le beau est beau, que le non-grand est non-grand et que le non-beau est non-beau, de même avons-nous dû et devons-nous encore dire que le non-être existe à l'état de non-être, et qu'il est au nombre des êtres comme une de leurs espèces? Ou bien, Théétète, nous reste-t-il encore quelque doute sur son existence? THÉÉTÈTE. Aucun. L'ÉTRANGER. Sais-tu que nous avons transgressé la défense de Parménide, et bien au-delà ? THÉÉTÈTE. En quoi? L'ÉTRANGER. Nous avons poussé notre démonstration plus loin qu'il ne nous permettrait d'étendre même notre examen. THÉÉTÈTE. Et comment?
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[258d] Ξένος Ὅτι ὁ μέν πού φησιν-- Οὐ γὰρ μήποτε τοῦτο δαμῇ, εἶναι μὴ ἐόντα, ἀλλὰ σὺ τῆσδ' ἀφ' ὁδοῦ διζήσιος εἶργε νόημα. Θεαίτητος Λέγει γὰρ οὖν οὕτως.
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[258d] L'ÉTRANGER. Ne nous dit-il pas: Tu ne comprendras jamais que ce qui n'est pas soit; Éloigne ta pensée de cette recherche (16) 294 THÉÉTÈTE Ce sont en effet ses paroles.
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Ξένος Ἡμεῖς δέ γε οὐ μόνον τὰ μὴ ὄντα ὡς ἔστιν ἀπεδείξαμεν, ἀλλὰ καὶ τὸ εἶδος ὃ τυγχάνει ὂν τοῦ μὴ ὄντος ἀπεφηνάμεθα· τὴν γὰρ θατέρου φύσιν ἀποδείξαντες οὖσάν [258e] τε καὶ κατακεκερματισμένην ἐπὶ πάντα τὰ ὄντα πρὸς ἄλληλα, τὸ πρὸς τὸ ὂν ἕκαστον μόριον αὐτῆς ἀντιτιθέμενον ἐτολμήσαμεν εἰπεῖν ὡς αὐτὸ τοῦτό ἐστιν ὄντως τὸ μὴ ὄν. Θεαίτητος Καὶ παντάπασί γε, ὦ ξένε, ἀληθέστατά μοι δοκοῦμεν εἰρηκέναι.
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L'ÉTRANGER. Nous, nous n'avons pas seulement démontré que le non-être est, nous avons fait voir quelle est l'idée du non-être ; car, après avoir démontré que l'autre existe, [258e] et qu'il est partagé entre tous les êtres comparés les uns aux autres, nous avons osé dire que c'est chacune de ses parties dans son opposition à l'être, qui est réellement le non-être. THÉÉTÈTE. Et je crois, étranger, que nous avons eu parfaitement raison.
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Ξένος Μὴ τοίνυν ἡμᾶς εἴπῃ τις ὅτι τοὐναντίον τοῦ ὄντος τὸ μὴ ὂν ἀποφαινόμενοι τολμῶμεν λέγειν ὡς ἔστιν. Ἡμεῖς γὰρ περὶ μὲν ἐναντίου τινὸς αὐτῷ χαίρειν πάλαι λέγομεν, [259a] εἴτ' ἔστιν εἴτε μή, λόγον ἔχον ἢ καὶ παντάπασιν ἄλογον· ὃ δὲ νῦν εἰρήκαμεν εἶναι τὸ μὴ ὄν, ἢ πεισάτω τις ὡς οὐ καλῶς λέγομεν ἐλέγξας, ἢ μέχριπερ ἂν ἀδυνατῇ, λεκτέον καὶ ἐκείνῳ καθάπερ ἡμεῖς λέγομεν, ὅτι συμμείγνυταί τε ἀλλήλοις τὰ γένη καὶ τό τε ὂν καὶ θάτερον διὰ πάντων καὶ δι' ἀλλήλων διεληλυθότε τὸ μὲν ἕτερον μετασχὸν τοῦ ὄντος ἔστι μὲν διὰ ταύτην τὴν μέθεξιν, οὐ μὴν ἐκεῖνό γε οὗ μετέσχεν ἀλλ' ἕτερον, ἕτερον δὲ τοῦ ὄντος ὂν ἔστι σαφέστατα [259b] ἐξ ἀνάγκης εἶναι μὴ ὄν· τὸ δὲ ὂν αὖ θατέρου μετειληφὸς ἕτερον τῶν ἄλλων ἂν εἴη γενῶν, ἕτερον δ' ἐκείνων ἁπάντων ὂν οὐκ ἔστιν ἕκαστον αὐτῶν οὐδὲ σύμπαντα τὰ ἄλλα πλὴν αὐτό, ὥστε τὸ ὂν ἀναμφισβητήτως αὖ μυρία ἐπὶ μυρίοις οὐκ ἔστι, καὶ τἆλλα δὴ καθ' ἕκαστον οὕτω καὶ σύμπαντα πολλαχῇ μὲν ἔστι, πολλαχῇ δ' οὐκ ἔστιν. Θεαίτητος Ἀληθῆ.
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L'ÉTRANGER. Qu'on ne vienne donc pas nous reprocher qu'après avoir présenté le non-être comme le contraire de l'être, nous osons affirmer son existence; car, quant à un contraire de l'être, il y a longtemps que .nous avons renoncé à discuter [259a] s'il y en a ou s'il n'y en a pas, et si l'on peut ou non l'expliquer. Mais pour la définition que nous venons de donner du non-être, qu'on nous prouve en nous réfutant qu'elle est fausse ; ou tant qu'on ne pourra le faire, il faut qu'on dise ce que nous avons dit, que les genres se mêlent les uns avec les autres,- que l'être et l'autre pénètrent dans tous, et aussi l'un dans l'autre; que l'autre, participant à l'être, est par cette par- 295 ticipation, et n'est pourtant pas ce à quoi il participe, mais quelque chose d'autre; qu'étant autre que l'être, il ne peut évidemment [259b] être que le non-être; que l'être à son tour participant à l'autre est autre que tous les autres genres; qu'étant autre qu'eux tous, il n'est pas chacun d'eux ni eux tous à la fois et n'est que lui-même; en sorte qu'incontestablement il y a mille choses que l'être n'est pas, par rapport à mille choses, et on peut dire de même de chacun des autres genres et de tous à la fois qu'ils sont de plusieurs manières, et que de plusieurs manières ils ne sont pas. THÉÉTÈTE. Cela est vrai.
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Ξένος Καὶ ταύταις δὴ ταῖς ἐναντιώσεσιν εἴτε ἀπιστεῖ τις, σκεπτέον αὐτῷ καὶ λεκτέον βέλτιόν τι τῶν νῦν εἰρημένων· [259c] εἴτε ὥς τι χαλεπὸν κατανενοηκὼς χαίρει τοτὲ μὲν ἐπὶ θάτερα τοτὲ δ' ἐπὶ θάτερα τοὺς λόγους ἕλκων, οὐκ ἄξια πολλῆς σπουδῆς ἐσπούδακεν, ὡς οἱ νῦν λόγοι φασί. Τοῦτο μὲν γὰρ οὔτε τι κομψὸν οὔτε χαλεπὸν εὑρεῖν, ἐκεῖνο δ' ἤδη καὶ χαλεπὸν ἅμα καὶ καλόν. Θεαίτητος Τὸ ποῖον;
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L'ÉTRANGER. Et si quelqu'un refuse son assentiment à ces contradictions, celui-là n'a qu'à y bien regarder et à nous offrir quelque solution meilleure. [259c] Si, au contraire, croyant avoir fait merveille, on se complaît à tirer ces raisonnements tantôt dans un sens, tantôt dans un autre, on y prendra bien plus de peine que cela ne vaut, comme nous le voyons maintenant. Car tout cela n'est ni fort spirituel ni difficile à trouver; mais ce qui est à la fois difficile et beau, le voici. THÉÉTÈTE. Qu'est-ce ?
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Ξένος Ὃ καὶ πρόσθεν εἴρηται, τὸ ταῦτα ἐάσαντα ὡς †δυνατὰ† τοῖς λεγομένοις οἷόν τ' εἶναι καθ' ἕκαστον ἐλέγχοντα ἐπακολουθεῖν, ὅταν τέ τις ἕτερον ὄν πῃ ταὐτὸν [259d] εἶναι φῇ καὶ ὅταν ταὐτὸν ὂν ἕτερον, ἐκείνῃ καὶ κατ' ἐκεῖνο ὅ φησι τούτων πεπονθέναι πότερον. Τὸ δὲ ταὐτὸν ἕτερον ἀποφαίνειν ἁμῇ γέ πῃ καὶ τὸ θάτερον ταὐτὸν καὶ τὸ μέγα σμικρὸν καὶ τὸ ὅμοιον ἀνόμοιον, καὶ χαίρειν οὕτω τἀναντία ἀεὶ προφέροντα ἐν τοῖς λόγοις, οὔτε τις ἔλεγχος οὗτος ἀληθινὸς ἄρτι τε τῶν ὄντων τινὸς ἐφαπτομένου δῆλος νεογενὴς ὤν. Θεαίτητος κομιδῇ μὲν οὖν.
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296 L'ÉTRANGER. Ce dont nous avons parlé précédemment, savoir, de laisser de côté tout cela, et d'être en état de suivre pas à pas, le plus possible, en les réfutant, [259d] ceux qui viennent dire que ce qui est autre est le même, ou ce qui est le même autre en un certain sens, en le prenant dans ce sens même et sous le point de vue dans lequel ils veulent qu'il en soit ainsi. Mais de prouver vaguement que le même est autre, l'autre identique, le grand petit, le semblable dissemblable, et de s'amuser à faire comparaître de la sorte les contraires dans son discours, ce n'est pas là une véritable méthode dialectique; c'est celle d'un novice qui commence à peine à faire connaissance avec les êtres. THÉÉTÈTE. Certainement.
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Ξένος Καὶ γάρ, ὠγαθέ, τό γε πᾶν ἀπὸ παντὸς ἐπιχειρεῖν [259e] ἀποχωρίζειν ἄλλως τε οὐκ ἐμμελὲς καὶ δὴ καὶ παντάπασιν ἀμούσου τινὸς καὶ ἀφιλοσόφου. Θεαίτητος Τί δή; Ξένος Τελεωτάτη πάντων λόγων ἐστὶν ἀφάνισις τὸ διαλύειν ἕκαστον ἀπὸ πάντων· διὰ γὰρ τὴν ἀλλήλων τῶν εἰδῶν συμπλοκὴν ὁ λόγος γέγονεν ἡμῖν. Θεαίτητος Ἀληθῆ.
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L'ÉTRANGER. En effet, mon cher, cette manie de séparer [259e] toutes choses les unes des autres, absurde en elle-même, annonce un esprit étranger aux Muses et à la philosophie. THÉÉTÈTE. Pourquoi? L'ÉTRANGER. Parce que le moyen le plus sûr d'anéantir tout 297 discours, c'est de disloquer ainsi toutes choses; car c'est à l'enchaînement des idées entre elles que nous devons le langage. THÉÉTÈTE. Il est vrai.
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[260a] Ξένος Σκόπει τοίνυν ὡς ἐν καιρῷ νυνδὴ τοῖς τοιούτοις διεμαχόμεθα καὶ προσηναγκάζομεν ἐᾶν ἕτερον ἑτέρῳ μείγνυσθαι. Θεαίτητος Πρὸς δὴ τί;
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[260a] L'ÉTRANGER. Vois combien nous nous y sommes pris à propos pour combattre ceux qui ont cette prétention, et les forcer de consentir au mélange d'une chose avec une autre. THÉÉTÈTE. Mais dans quel but ?
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Ξένος Πρὸς τὸ τὸν λόγον ἡμῖν τῶν ὄντων ἕν τι γενῶν εἶναι. Τούτου γὰρ στερηθέντες, τὸ μὲν μέγιστον, φιλοσοφίας ἂν στερηθεῖμεν· ἔτι δ' ἐν τῷ παρόντι δεῖ λόγον ἡμᾶς διομολογήσασθαι τί ποτ' ἔστιν, εἰ δὲ ἀφῃρέθημεν αὐτὸ μηδ' εἶναι τὸ παράπαν, οὐδὲν ἂν ἔτι που λέγειν οἷοί τ' ἦμεν. [260b] Ἀφῃρέθημεν δ' ἄν, εἰ συνεχωρήσαμεν μηδεμίαν εἶναι μεῖξιν μηδενὶ πρὸς μηδέν.
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L'ÉTRANGER. C'est que le langage humain est aussi un des genres qui existent. Si. nous en étions privés, le plus grave résultat serait d'abord pour nous d'être privés de toute philosophie : mais ici il fout en outre que nous nous entendions un peu sur ce que c'est que le langage. Si nous le supprimons absolument, nous ne pourrons plus rien dire : [260b] or ce serait le supprimer absolument que d'accorder qu'il n'y a aucun mélange d'une chose avec une autre chose,
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Θεαίτητος Ὀρθῶς τοῦτό γε· λόγον δὲ δι' ὅτι νῦν διομολογητέον οὐκ ἔμαθον. Ξένος Ἀλλ' ἴσως τῇδ' ἑπόμενος ῥᾷστ' ἂν μάθοις. Θεαίτητος Πῇ; Ξένος Τὸ μὲν δὴ μὴ ὂν ἡμῖν ἕν τι τῶν ἄλλων γένος ὂν ἀνεφάνη, κατὰ πάντα τὰ ὄντα διεσπαρμένον. Θεαίτητος Οὕτως. Ξένος Οὐκοῦν τὸ μετὰ τοῦτο σκεπτέον εἰ δόξῃ τε καὶ λόγῳ μείγνυται. Θεαίτητος Τί δή;
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THÉÉTÈTE. Pour ceci, c'est fort juste; mais je ne vois pas bien pourquoi nous avons besoin de nous entendre sur ce qu'est le langage. 298 L'ÉTRANGER. Tu le verras mieux sans doute en me suivant par ici. THÉÉTÈTE. Par où ? L'ÉTRANGER. Le non-être noua est apparu comme l'un de ces genres dont nous parlions, et répandu dans tous les êtres. THÉÉTÈTE. Oui. L'ÉTRANGER. Or, il nous reste à considérer s'il se mêle à l'opinion et au discours. THÉÉTÈTE. Pourquoi?
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[260c] Ξένος Μὴ μειγνυμένου μὲν αὐτοῦ τούτοις ἀναγκαῖον ἀληθῆ πάντ' εἶναι, μειγνυμένου δὲ δόξα τε ψευδὴς γίγνεται καὶ λόγος· τὸ γὰρ τὰ μὴ ὄντα δοξάζειν ἢ λέγειν, τοῦτ' ἔστι που τὸ ψεῦδος ἐν διανοίᾳ τε καὶ λόγοις γιγνόμενον. Θεαίτητος Οὕτως. Ξένος Ὄντος δέ γε ψεύδους ἔστιν ἀπάτη. Θεαίτητος Ναί. Ξένος Καὶ μὴν ἀπάτης οὔσης εἰδώλων τε καὶ εἰκόνων ἤδη καὶ φαντασίας πάντα ἀνάγκη μεστὰ εἶναι. Θεαίτητος Πῶς γὰρ οὔ;
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[260c] L'ÉTRANGER. S'il ne s'y mêle point, il s'ensuit que tout sera vrai; s'il s'y mêle, l'opinion et le discours seront faux; car penser ou dire le non-être, c'est proprement se qui fait le faux dans l'esprit et dans le discours. THÉÉTÈTE. Il est vrai. L'ÉTRANGER. Or, s'il y a du faux, il y a aussi de l'erreur. THÉÉTÈTE. Oui. 299 L'ÉTRANGER. Et s'il y a de l'erreur, il faut que tout soit mêlé d'apparences, de simulacres et de fantômes. THÉÉTÈTE., Sûrement.,
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Ξένος Τὸν δέ γε σοφιστὴν ἔφαμεν ἐν τούτῳ που τῷ τόπῳ [260d] καταπεφευγέναι μέν, ἔξαρνον δὲ γεγονέναι τὸ παράπαν μηδ' εἶναι ψεῦδος· τὸ γὰρ μὴ ὂν οὔτε διανοεῖσθαί τινα οὔτε λέγειν· οὐσίας γὰρ οὐδὲν οὐδαμῇ τὸ μὴ ὂν μετέχειν. Θεαίτητος Ἦν ταῦτα.
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L'ÉTRANGER. Eh bien, notre sophiste, ne disions-nous pas que tout en se réfugiant dans cette région, [260d] il nous soutenait hardiment que le faux n'est point, attendu que ce qui n'est pas ne se peut ni concevoir ni exprimer, et que le non-être ne participe jamais en rien de l'être? THÉÉTÈTE. En effet.
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Ξένος Νῦν δέ γε τοῦτο μὲν ἐφάνη μετέχον τοῦ ὄντος, ὥστε ταύτῃ μὲν ἴσως οὐκ ἂν μάχοιτο ἔτι· τάχα δ' ἂν φαίη τῶν εἰδῶν τὰ μὲν μετέχειν τοῦ μὴ ὄντος, τὰ δ' οὔ, καὶ λόγον δὴ καὶ δόξαν εἶναι τῶν οὐ μετεχόντων, ὥστε τὴν εἰδωλοποιικὴν καὶ φανταστικήν, ἐν ᾗ φαμεν αὐτὸν εἶναι, [260e] διαμάχοιτ' ἂν πάλιν ὡς παντάπασιν οὐκ ἔστιν, ἐπειδὴ δόξα καὶ λόγος οὐ κοινωνεῖ τοῦ μὴ ὄντος· ψεῦδος γὰρ τὸ παράπαν οὐκ εἶναι ταύτης μὴ συνισταμένης τῆς κοινωνίας. Διὰ ταῦτ' οὖν λόγον πρῶτον καὶ δόξαν καὶ φαντασίαν διερευνητέον ὅτι ποτ' ἔστιν, ἵνα φανέντων καὶ τὴν κοινωνίαν αὐτῶν τῷ [261a] μὴ ὄντι κατίδωμεν, κατιδόντες δὲ τὸ ψεῦδος ὂν ἀποδείξωμεν, ἀποδείξαντες δὲ τὸν σοφιστὴν εἰς αὐτὸ ἐνδήσωμεν, εἴπερ ἔνοχός ἐστιν, ἢ καὶ ἀπολύσαντες ἐν ἄλλῳ γένει ζητῶμεν.
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L'ÉTRANGER. Mais à présent nous savons qu'il en participe; de sorte que notre homme pourrait bien renoncer à se défendre sur ce point; mais il pourrait nous dire qu'il y a des espèces qui participent du non-être, et d'autres qui n'en participent pas, et que le discours et l'opinion sont du nombre de ces dernières. Ainsi il pourrait soutenir que cet art de faire des simulacres et des fantômes, que nous lui avons attribué, n'existe point, [260e] dès que l'opinion et le discours n'ont rien de commun avec le non-être; car dès qu'il n'y a plus entre eux rien de commun, il ne saurait y avoir 300 de faux. C'est pour cela que nous devons d'abord rechercher ce que c'est que discours, opinion, imagination, afin qu'après avoir bien connu toutes ces choses, nous puissions voir clairement ce qu'elles ont de commun avec le non-être, [261a] qu'après l'avoir vu nous démontrions l'existence du faux, et qu'après l'avoir démontrée nous emprisonnions le sophiste dans le faux, s'il le mérite, ou qu'au contraire nous le relâchions, pour le chercher ailleurs.
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Θεαίτητος Κομιδῇ δέ γε, ὦ ξένε, ἔοικεν ἀληθὲς εἶναι τὸ περὶ τὸν σοφιστὴν κατ' ἀρχὰς λεχθέν, ὅτι δυσθήρευτον εἴη τὸ γένος. φαίνεται γὰρ οὖν προβλημάτων γέμειν, ὧν ἐπειδάν τι προβάλῃ, τοῦτο πρότερον ἀναγκαῖον διαμάχεσθαι πρὶν ἐπ' αὐτὸν ἐκεῖνον ἀφικέσθαι. Νῦν γὰρ μόγις μὲν τὸ μὴ ὂν ὡς οὐκ ἔστι προβληθὲν διεπεράσαμεν, ἕτερον δὲ [261b] προβέβληται, καὶ δεῖ δὴ ψεῦδος ὡς ἔστι καὶ περὶ λόγον καὶ περὶ δόξαν ἀποδεῖξαι, καὶ μετὰ τοῦτο ἴσως ἕτερον, καὶ ἔτ' ἄλλο μετ' ἐκεῖνο· καὶ πέρας, ὡς ἔοικεν, οὐδὲν φανήσεταί ποτε.
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THÉÉTÈTE. Vraiment, étranger, il paraît que nous avions bien raison de dire en commençant que le sophiste est une espèce difficile à saisir : il ne lui manque pas de barricades, qu'il faut enlever à mesure qu'il les élève, avant de pouvoir arriver jusqu'à lui. A peine avons-nous forcé celle de la non-existence du non-être, qu'il nous [261b] en oppose une autre, et que nous voilà obligés de démontrer que le faux existe et dans le discours et dans l'opinion; après cela ce sera quelque autre difficulté, puis une autre encore; il semble que nous n'en verrons jamais la fin.
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Ξένος Θαῤῥεῖν, ὦ Θεαίτητε, χρὴ τὸν καὶ σμικρόν τι δυνάμενον εἰς τὸ πρόσθεν ἀεὶ προϊέναι. Τί γὰρ ὅ γ' ἀθυμῶν ἐν τούτοις δράσειεν ἂν ἐν ἄλλοις, ἢ μηδὲν ἐν ἐκείνοις ἀνύτων ἢ καὶ πάλιν εἰς τοὔπισθεν ἀπωσθείς; σχολῇ που, τὸ κατὰ [261c] τὴν παροιμίαν λεγόμενον, ὅ γε τοιοῦτος ἄν ποτε ἕλοι πόλιν. Νῦν δ' ἐπεί, ὠγαθέ, τοῦτο ὃ λέγεις διαπεπέρανται, τό τοι μέγιστον ἡμῖν τεῖχος ᾑρημένον ἂν εἴη, τὰ δ' ἄλλα ἤδη ῥᾴω καὶ σμικρότερα. Θεαίτητος Καλῶς εἶπες. Ξένος Λόγον δὴ πρῶτον καὶ δόξαν, καθάπερ ἐῤῥήθη νυνδή, λάβωμεν, ἵνα ἐναργέστερον ἀπολογισώμεθα πότερον αὐτῶν ἅπτεται τὸ μὴ ὂν ἢ παντάπασιν ἀληθῆ μέν ἐστιν ἀμφότερα ταῦτα, ψεῦδος δὲ οὐδέποτε οὐδέτερον. Θεαίτητος Ὀρθῶς.
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L'ÉTRANGER. Il faut avoir bon courage, Théétète, quand on avance toujours, ne fut-ce que pas à pas. Si on se décourage en pareille circonstance, que sera-ce en d'autres où l'on ne pourra faire un 301 pas en avant, et où même on se verra forcé de reculer? Fiez-vous à de pareilles gens [261c] pour prendre jamais une ville, comme dit le proverbe. Mais maintenant, mon cher, dès que nous aurons franchi la difficulté dont tu viens de parler, nous serons maîtres du plus fort retranchement; le reste sera plus facile et de moindre conséquence. THÉÉTÈTE. A la bonne heure. L'ÉTRANGER. Examinons donc, comme nous l'avons dit, le discours et l'opinion, afin de tirer à clair la question de savoir s'ils sont l'un et l'autre en contact avec le non-être, ou s'ils sont toujours vrais, et jamais faux ni l'un ni l'autre. THÉÉTÈTE. Fort bien.
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[261d] Ξένος Φέρε δή, καθάπερ περὶ τῶν εἰδῶν καὶ τῶν γραμμάτων ἐλέγομεν, περὶ τῶν ὀνομάτων πάλιν ὡσαύτως ἐπισκεψώμεθα. φαίνεται γάρ πῃ ταύτῃ τὸ νῦν ζητούμενον. Θεαίτητος Τὸ ποῖον οὖν δὴ περὶ τῶν ὀνομάτων ὑπακουστέον; Ξένος Εἴτε πάντα ἀλλήλοις συναρμόττει εἴτε μηδέν, εἴτε τὰ μὲν ἐθέλει, τὰ δὲ μή. Θεαίτητος Δῆλον τοῦτό γε, ὅτι τὰ μὲν ἐθέλει, τὰ δ' οὔ. Ξένος Τὸ τοιόνδε λέγεις ἴσως, ὅτι τὰ μὲν ἐφεξῆς λεγόμενα [261e] καὶ δηλοῦντά τι συναρμόττει, τὰ δὲ τῇ συνεχείᾳ μηδὲν σημαίνοντα ἀναρμοστεῖ. Θεαίτητος Πῶς τί τοῦτ' εἶπας; Ξένος Ὅπερ ᾠήθην ὑπολαβόντα σε προσομολογεῖν. ἔστι γὰρ ἡμῖν που τῶν τῇ φωνῇ περὶ τὴν οὐσίαν δηλωμάτων διττὸν γένος. Θεαίτητος Πῶς;
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[231d] L'ÉTRANGER. Eh bien donc faisons pour les mots le même examen que nous avons déjà fait pour les espèces et pour les lettres de l'alphabet : c'est, je crois, par là que nous trouverons ce que nous cherchons. THÉÉTÈTE. Qu'est-ce donc que nous devons considérer dans les noms ? 302 L'ÉTRANGER. S'ils peuvent tous être associés les uns aux autres, ou si au contraire il n'y en pas qui puissent être mêlés, ou si enfin les uns le peuvent et les autres ne le peuvent pas. THÉÉTÈTE. Évidemment il y en a qui le peuvent, et il y en a d'autres qui ne le peuvent point. L'ÉTRANGER. Tu veux dire, peut-être, que ceux-là peuvent être associés qui, prononcés de suite, [261e] représentent quelque chose à l'esprit, et que ceux-là ne le peuvent dont l'assemblage ne signifie rien. THÉÉTÈTE. Que dis-tu là? L'ÉTRANGER. Ce que j'avais cru être ton idée, quand tu m'as fait une réponse qui s'accorde avec ma propre opinion. En effet, nous avons deux espèces de signes pour représenter ce qui est au moyen de la voix. THÉÉTÈTE. Comment?
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[262a] Ξένος Τὸ μὲν ὀνόματα, τὸ δὲ ῥήματα κληθέν. Θεαίτητος Εἰπὲ ἑκάτερον. Ξένος Τὸ μὲν ἐπὶ ταῖς πράξεσιν ὂν δήλωμα ῥῆμά που λέγομεν. Θεαίτητος Ναί. Ξένος Τὸ δέ γ' ἐπ' αὐτοῖς τοῖς ἐκείνας πράττουσι σημεῖον τῆς φωνῆς ἐπιτεθὲν ὄνομα. Θεαίτητος Κομιδῇ μὲν οὖν. Ξένος Οὐκοῦν ἐξ ὀνομάτων μὲν μόνων συνεχῶς λεγομένων οὐκ ἔστι ποτὲ λόγος, οὐδ' αὖ ῥημάτων χωρὶς ὀνομάτων λεχθέντων. Θεαίτητος Ταῦτ' οὐκ ἔμαθον.
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[262a] L'ÉTRANGER. Ce qu'on appelle les noms et ce qu'on appelle les verbes. THÉÉTÈTE. Explique-nous les uns et les autres. 303 L'ÉTRANGER. Nous appelons verbe le signe représentatif des actions. THÉÉTÈTE. Oui. L'ÉTRANGER. Et nom le signe vocal qu'on applique à ceux qui font ces actions. THÉÉTÈTE. Certainement. L'ÉTRANGER. Maintenant des noms seuls prononcés de suite ne forment pas un discours, et il en est de même d'une suite de verbes sans aucun mélange de noms. THÉÉTÈTE. Je ne savais pas cela.
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[262b] Ξένος Δῆλον γὰρ ὡς πρὸς ἕτερόν τι βλέπων ἄρτι συνωμολόγεις· ἐπεὶ τοῦτ' αὐτὸ ἐβουλόμην εἰπεῖν, ὅτι συνεχῶς ὧδε λεγόμενα ταῦτα οὐκ ἔστι λόγος. Θεαίτητος Πῶς; Ξένος Οἷον “βαδίζει” “τρέχει” “καθεύδει,” καὶ τἆλλα ὅσα πράξεις σημαίνει ῥήματα, κἂν πάντα τις ἐφεξῆς αὔτ' εἴπῃ, λόγον οὐδέν τι μᾶλλον ἀπεργάζεται. Θεαίτητος Πῶς γάρ;
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[262b] L'ÉTRANGER. Alors il est clair que tu avais quelque autre motif de me faire tout à l'heure cette réponse qui se trouvait conforme à ma pensée; car c'était là précisément ce que je voulais dire, que les mots de l'une ou de l'autre espèce, prononcés ainsi de suite, ne font pas un discours. THÉÉTÈTE. Comment cela ? L'ÉTRANGER. Par exemple, marche, court, dort, et tous les autres mots qui signifient des actions, les pro - 304 nonçât-on tous à la suite les uns des autres, n'en formeront pas davantage un discours. THÉÉTÈTE. C'est impossible.
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Ξένος Οὐκοῦν καὶ πάλιν ὅταν λέγηται “λέων” “ἔλαφος” “ἵππος,” ὅσα τε ὀνόματα τῶν τὰς πράξεις αὖ πραττόντων [262c] ὠνομάσθη, καὶ κατὰ ταύτην δὴ τὴν συνέχειαν οὐδείς πω συνέστη λόγος· οὐδεμίαν γὰρ οὔτε οὕτως οὔτ' ἐκείνως πρᾶξιν οὐδ' ἀπραξίαν οὐδὲ οὐσίαν ὄντος οὐδὲ μὴ ὄντος δηλοῖ τὰ φωνηθέντα, πρὶν ἄν τις τοῖς ὀνόμασι τὰ ῥήματα κεράσῃ. Τότε δ' ἥρμοσέν τε καὶ λόγος ἐγένετο εὐθὺς ἡ πρώτη συμπλοκή, σχεδὸν τῶν λόγων ὁ πρῶτός τε καὶ σμικρότατος. Θεαίτητος Πῶς ἄρ' ὧδε λέγεις; Ξένος Ὅταν εἴπῃ τις· “ἄνθρωπος μανθάνει,” λόγον εἶναι φῂς τοῦτον ἐλάχιστόν τε καὶ πρῶτον;
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L'ÉTRANGER. De même si on dit de suite lion, cerf, cheval, et tous les noms qu'on a donnés à ceux qui font des actions, un pareil assemblage [262c] ne fait pas non plus un discours. Soit qu'on assemble les mots de la première ou de la seconde de ces deux espèces, ils ne représentent ni action ni inaction, ni existence d'un être non plus que d'un non-être, tant qu'on ne mêle pas les verbes aux noms. Mais dès qu'on les mêle, ils s'accordent, et il en résulte aussitôt un discours, la première combinaison, le premier et le plus petit de tous les discours. THÉÉTÈTE. Qu'entends-tu par là? L'ÉTRANGER. Lorsqu'on dit l'homme apprend, n'est-ce pas proférer un discours, le plus simple et le plus petit possible?
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[262d] Θεαίτητος Ἔγωγε. Ξένος Δηλοῖ γὰρ ἤδη που τότε περὶ τῶν ὄντων ἢ γιγνομένων ἢ γεγονότων ἢ μελλόντων, καὶ οὐκ ὀνομάζει μόνον ἀλλά τι περαίνει, συμπλέκων τὰ ῥήματα τοῖς ὀνόμασι. Διὸ λέγειν τε αὐτὸν ἀλλ' οὐ μόνον ὀνομάζειν εἴπομεν, καὶ δὴ καὶ τῷ πλέγματι τούτῳ τὸ ὄνομα ἐφθεγξάμεθα λόγον. Θεαίτητος Ὀρθῶς.
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[262d] THÉÉTÈTE. Oui. L'ÉTRANGER. En effet, on désigne là quelque chose qui est, fut ou sera, et ce n'est pas là seulement nommer, 305 c'est déterminer quelque chose en unissant les noms aux verbes. Aussi nous appelons cela discourir et non pas seulement nommer, et nous avons donné à cette union le nom de discours. THÉÉTÈTE. Fort bien.
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Ξένος Οὕτω δὴ καθάπερ τὰ πράγματα τὰ μὲν ἀλλήλοις ἥρμοττεν, τὰ δ' οὔ, καὶ περὶ τὰ τῆς φωνῆς αὖ σημεῖα τὰ μὲν [262e] οὐχ ἁρμόττει, τὰ δὲ ἁρμόττοντα αὐτῶν λόγον ἀπηργάσατο. Θεαίτητος Παντάπασι μὲν οὖν. Ξένος Ἔτι δὴ σμικρὸν τόδε. Θεαίτητος Τὸ ποῖον; Ξένος Λόγον ἀναγκαῖον, ὅτανπερ ᾖ, τινὸς εἶναι λόγον, μὴ δὲ τινὸς ἀδύνατον. Θεαίτητος Οὕτως. Ξένος Οὐκοῦν καὶ ποιόν τινα αὐτὸν εἶναι δεῖ; Θεαίτητος Πῶς δ' οὔ; Ξένος Προσέχωμεν δὴ τὸν νοῦν ἡμῖν αὐτοῖς. Θεαίτητος Δεῖ γοῦν. Ξένος Λέξω τοίνυν σοι λόγον συνθεὶς πρᾶγμα πράξει δι' ὀνόματος καὶ ῥήματος· ὅτου δ' ἂν ὁ λόγος ᾖ, σύ μοι φράζειν.
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L'ÉTRANGER. Et comme il y a des choses qui s'accordent et d'autres qui ne s'accordent pas entre elles, de même il y a des signes vocaux [262e] qui ne s'accordent pas les uns avec les autres, et ceux qui s'accordent forment le discours. THÉÉTÈTE. J'en conviens. L'ÉTRANGER. Encore cette petite observation. THÉÉTÈTE. Laquelle? L'ÉTRANGER. Un discours, quand il est, doit nécessairement être dit de quelque chose, et il serait impossible qu'il ne le fût de rien. THÉÉTÈTE. Soit. L'ÉTRANGER. Il faut aussi que ce discours ait telle ou telle qualité. 306 THÉÉTÈTE. Assurément. L'ÉTRANGER. Prenons-nous nous-mêmes pour exemples. THÉÉTÈTE. Volontiers. L'ÉTRANGER. Je vais te proposer un discours dans lequel j'unirai un sujet à une action par l'emploi d'un nom et d'un verbe, et tu me diras de quoi ce discours aura parlé.
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[263a] Θεαίτητος Ταῦτ' ἔσται κατὰ δύναμιν. Ξένος “Θεαίτητος κάθηται.” μῶν μὴ μακρὸς ὁ λόγος; Θεαίτητος Οὔκ, ἀλλὰ μέτριος. Ξένος Σὸν ἔργον δὴ φράζειν περὶ οὗ τ' ἐστὶ καὶ ὅτου. Θεαίτητος Δῆλον ὅτι περὶ ἐμοῦ τε καὶ ἐμός. Ξένος Τί δὲ ὅδ' αὖ; Θεαίτητος Ποῖος; Ξένος “Θεαίτητος, ᾧ νῦν ἐγὼ διαλέγομαι, πέτεται.” Θεαίτητος Καὶ τοῦτον οὐδ' ἂν εἷς ἄλλως εἴποι πλὴν ἐμόν τε καὶ περὶ ἐμοῦ. Ξένος Ποιὸν δέ γέ τινά φαμεν ἀναγκαῖον ἕκαστον εἶναι τῶν λόγων.
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[263a] THÉÉTÈTE. Je le veux bien, autant qu'il me sera possible. L'ÉTRANGER. Théétète est assis; voilà, j'espère, un discours qui n'est pas long. THÉÉTÈTE; Non, il est d'une longueur fort modérée. L'ÉTRANGER. C'est à toi de me dire sur quoi et de quoi parle ce discours. THÉÉTÈTE. Il est clair que c'est sur moi et de moi. L'ÉTRANGER. Et maintenant cet autre discours? THÉÉTÈTE. Lequel? 307 L'ÉTRANGER. Théétète, avec lequel je m'entretiens, vole. THÉÉTÈTE. Tout le monde reconnaît que c'est aussi sur moi et de moi qu'il parle. L'ÉTRANGER. Et chaque discours, avons-nous dit, doit nécessairement avoir telle ou telle qualité.
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[263b] Θεαίτητος Ναί. Ξένος Τούτων δὴ ποῖόν τινα ἑκάτερον φατέον εἶναι; Θεαίτητος Τὸν μὲν ψευδῆ που, τὸν δὲ ἀληθῆ. Ξένος Λέγει δὲ αὐτῶν ὁ μὲν ἀληθὴς τὰ ὄντα ὡς ἔστιν περὶ σοῦ. Θεαίτητος Υί μήν; Ξένος Ὁ δὲ δὴ ψευδὴς ἕτερα τῶν ὄντων. Θεαίτητος Ναί. Ξένος Τὰ μὴ ὄντ' ἄρα ὡς ὄντα λέγει. Θεαίτητος Σχεδόν. Ξένος Ὄντων δέ γε ὄντα ἕτερα περὶ σοῦ. πολλὰ μὲν γὰρ ἔφαμεν ὄντα περὶ ἕκαστον εἶναί που, πολλὰ δὲ οὐκ ὄντα. Θεαίτητος Κομιδῇ μὲν οὖν.
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[263b] THÉÉTÈTE. Oui. L'ÉTRANGER. Et quelle est la qualité de chacun de ces deux discours? THÉÉTÈTE. C'est sans doute que l'un est vrai et l'autre faux. L'ÉTRANGER. Et le vrai dit ce qui est, comme étant, sur ton compte. THÉÉTÈTE. Précisément. L'ÉTRANGER. Le faux dit autre chose que ce qui est. THÉÉTÈTE. Oui. L'ÉTRANGER. Il dit comme étant ce qui n'est pas. 308 THÉÉTÈTE A peu près. L'ÉTRANGER. C'est-à-dire ce qui est autre que ce qui est sur ton compte. Car nous avons dit qu'il y a pour chaque chose beaucoup d'être et beaucoup de non-être. THÉÉTÈTE. Sans doute.
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[263c] Ξένος Ὃν ὕστερον δὴ λόγον εἴρηκα περὶ σοῦ, πρῶτον μέν, ἐξ ὧν ὡρισάμεθα τί ποτ' ἔστι λόγος, ἀναγκαιότατον αὐτὸν ἕνα τῶν βραχυτάτων εἶναι. Θεαίτητος Νυνδὴ γοῦν ταύτῃ συνωμολογήσαμεν. Ξένος Ἔπειτα δέ γε τινός. Θεαίτητος Οὕτως. Ξένος Εἰ δὲ μὴ ἔστιν σός, οὐκ ἄλλου γε οὐδενός. Θεαίτητος Πῶς γάρ; Ξένος Μηδενὸς <δέ> γε ὢν οὐδ' ἂν λόγος εἴη τὸ παράπαν· ἀπεφήναμεν γὰρ ὅτι τῶν ἀδυνάτων ἦν λόγον ὄντα μηδενὸς εἶναι λόγον. Θεαίτητος Ὀρθότατα.
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[263c] L'ÉTRANGER. Quant au second discours que j'ai prononcé sur ton compte, d'abord, d'après les éléments que nous avons trouvés dans la définition du discours, il est impossible qu'il y en ait un plus bref. THÉÉTÈTE. Nous en sommes tombés d'accord. L'ÉTRANGER. Ensuite il parlait de quelque chose. THÉÉTÈTE. Oui, certes. L'ÉTRANGER. Et si ce n'est de toi, ce n'est assurément de personne. THÉÉTÈTE. Sans contredit. L'ÉTRANGER. Mais si ce n'était de rien, ce ne serait pas un 309 discours; car nous ayons établi comme impossible que ce qui est un discours ne soit dit de rien. THÉÉTÈTE. Cela est parfaitement juste.
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[263d] Ξένος Περὶ δὴ σοῦ λεγόμενα, <λεγόμενα> μέντοι θάτερα ὡς τὰ αὐτὰ καὶ μὴ ὄντα ὡς ὄντα, παντάπασιν [ὡς] ἔοικεν ἡ τοιαύτη σύνθεσις ἔκ τε ῥημάτων γιγνομένη καὶ ὀνομάτων ὄντως τε καὶ ἀληθῶς γίγνεσθαι λόγος ψευδής. Θεαίτητος Ἀληθέστατα μὲν οὖν. Ξένος Τί δὲ δή; διάνοιά τε καὶ δόξα καὶ φαντασία, μῶν οὐκ ἤδη δῆλον ὅτι ταῦτά γε ψευδῆ τε καὶ ἀληθῆ πάνθ' ἡμῶν ἐν ταῖς ψυχαῖς ἐγγίγνεται; Θεαίτητος Πῶς; Ξένος Ὧδ' εἴσῃ ῥᾷον, ἂν πρῶτον λάβῃς αὐτὰ τί ποτ' ἔστιν [263e] καὶ τί διαφέρουσιν ἕκαστα ἀλλήλων.
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[263d] L'ÉTRANGER. Mais ce qui est autre par rapport à toi, affirmé de toi comme étant te même, ce qui n'est pas affirmé de toi comme étant, un pareil assemblage de noms et de verbes a tout l'air d'être réellement et véritablement un discours faux. THÉÉTÈTE. Rien de plus vrai. L'ÉTRANGER. Que dire de la pensée, de l'opinion et de l'imagination? N'est-il pas maintenant évident que toutes ces choses nous viennent dans l'esprit tantôt vraies, tantôt fausses? THÉÉTÈTE. Comment? L'ÉTRANGER. C'est ce que tu comprendras plus aisément quand tu auras commencé par observer ce que sont ces diverses choses, [263e] et en quoi elles diffèrent les unes des autres.
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Θεαίτητος Δίδου μόνον. Ξένος Οὐκοῦν διάνοια μὲν καὶ λόγος ταὐτόν· πλὴν ὁ μὲν ἐντὸς τῆς ψυχῆς πρὸς αὑτὴν διάλογος ἄνευ φωνῆς γιγνόμενος τοῦτ' αὐτὸ ἡμῖν ἐπωνομάσθη, διάνοια; Θεαίτητος Πάνυ μὲν οὖν. Ξένος Τὸ δέ γ' ἀπ' ἐκείνης ῥεῦμα διὰ τοῦ στόματος ἰὸν μετὰ φθόγγου κέκληται λόγος; Θεαίτητος Ἀληθῆ. Ξένος Καὶ μὴν ἐν λόγοις γε αὖ ἴσμεν ἐνὸν-- Θεαίτητος Τὸ ποῖον; Ξένος Φάσιν τε καὶ ἀπόφασιν. Θεαίτητος Ἴσμεν.
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THÉÉTÈTE. Voyons, apprends-le-moi 310 L'ÉTRANGER. Je dis donc que pensée et discours c'est la même chose, avec cette seule différence que le dialogue intérieur de l'âme avec elle-même, et sans la voix, s'appelle pensée. THÈÉTÈTE. A merveille. L'ÉTRANGER. Tandis que ce qui vient de la pensée par la bouche, avec des sons articulés, s'appelle discours. THÉÉTÈTE. Fort bien. L'ÉTRANGER. De plus, il y a quelque chose que nous savons être contenu dans le discours. THÉÉTÈTE. Quoi? L'ÉTRANGER. L'affirmation et la négation. THÉÉTÈTE. Oui.
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[264a] Ξένος Ὅταν οὖν τοῦτο ἐν ψυχῇ κατὰ διάνοιαν ἐγγίγνηται μετὰ σιγῆς, πλὴν δόξης ἔχεις ὅτι προσείπῃς αὐτό; Θεαίτητος Καὶ πῶς; Ξένος Τί δ' ὅταν μὴ καθ' αὑτὸ ἀλλὰ δι' αἰσθήσεως παρῇ τινι, τὸ τοιοῦτον αὖ πάθος ἆρ' οἷόν τε ὀρθῶς εἰπεῖν ἕτερόν τι πλὴν φαντασίαν; Θεαίτητος Οὐδέν.
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[264a] L'ÉTRANGER. Et quand cela se fait en silence dans l'âme par la pensée, n'est-ce pas opinion qu'il faut l'appeler ? THÉÉTÈTE. Assurément. 311 L'ÉTRANGER. Quand, au contraire, cet état de l'âme n'est pas l'ouvrage de la pensée, mais de la sensation, comment le qualifier justement d'un autre ;nom que de celui d'imagination? . THÉÉTÈTE. D'aucun autre.
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Ξένος Οὐκοῦν ἐπείπερ λόγος ἀληθὴς ἦν καὶ ψευδής, τούτων δ' ἐφάνη διάνοια μὲν αὐτῆς πρὸς ἑαυτὴν ψυχῆς διάλογος, [264b] δόξα δὲ διανοίας ἀποτελεύτησις, “φαίνεται” δὲ ὃ λέγομεν σύμμειξις αἰσθήσεως καὶ δόξης, ἀνάγκη δὴ καὶ τούτων τῷ λόγῳ συγγενῶν ὄντων ψευδῆ [τε] αὐτῶν ἔνια καὶ ἐνίοτε εἶναι. Θεαίτητος Πῶς δ' οὔ; Ξένος Κατανοεῖς οὖν ὅτι πρότερον ηὑρέθη ψευδὴς δόξα καὶ λόγος ἢ κατὰ τὴν προσδοκίαν ἣν ἐφοβήθημεν ἄρτι, μὴ παντάπασιν ἀνήνυτον ἔργον ἐπιβαλλοίμεθα ζητοῦντες αὐτό; Θεαίτητος Κατανοῶ.
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L'ÉTRANGER. Par conséquent, puisque nous ayons admis un discours vrai et faux, puisque ensuite nous avons trouvé que la pensée est comme le dialogue de l'âme avec elle-même, [264d] l'opinion, le terme auquel aboutit la pensée, enfin l'imagination un mélange de sensation et d'opinion, il en résulte que toutes ces diverses choses étant en quelque sorte de .la même famille que le discours, doivent quelquefois pouvoir, être fausses. THÉÉTÈTE. Cela est certain. L'ÉTRANGER. Tu vois donc bien que le faux, dans l'opinion et dans le discours, n'a pas été aussi difficile à trouver que nous l'imaginions quand nous appréhendions d'avoir fait, en nous mettant à sa recherche, upe entreprise que nous ne pourrions mettre à fin. 312 THÉÉTÈTE Je le vois.
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Ξένος Μὴ τοίνυν μηδ' εἰς τὰ λοιπὰ ἀθυμῶμεν. Ἐπειδὴ [264c] γὰρ πέφανται ταῦτα, τῶν ἔμπροσθεν ἀναμνησθῶμεν κατ' εἴδη διαιρέσεων. Θεαίτητος Ποίων δή; Ξένος Διειλόμεθα τῆς εἰδωλοποιικῆς εἴδη δύο, τὴν μὲν εἰκαστικήν, τὴν δὲ φανταστικήν. Θεαίτητος Ναί. Ξένος Καὶ τὸν σοφιστὴν εἴπομεν ὡς ἀποροῖμεν εἰς ὁποτέραν θήσομεν. Θεαίτητος Ἦν ταῦτα.
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L'ÉTRANGER. Ainsi ne perdons pas courage pour le reste. [264c] Après avoir éclairci ce point, rappelons-nous les divisions par espèces que nous avons faites antérieurement. THÉÉTÈTE Lesquelles? L'ÉTRANGER. Nous avons distingué deux espèces dans l'art de foire des simulacres, l'art de copier, et l'art que nous avons appelé fantasmagorique. THÉÉTÈTE. Il est vrai. .L'ÉTRANGER. Et nous disions que pous ne savions auquel rapporter le sophiste. THÉÉTÈTE. Précisément.
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Ξένος Καὶ τοῦθ' ἡμῶν ἀπορουμένων ἔτι μείζων κατεχύθη σκοτοδινία, φανέντος τοῦ λόγου τοῦ πᾶσιν ἀμφισβητοῦντος ὡς οὔτε εἰκὼν οὔτε εἴδωλον οὔτε φάντασμ' εἴη τὸ παράπαν [264d] οὐδὲν διὰ τὸ μηδαμῶς μηδέποτε μηδαμοῦ ψεῦδος εἶναι. Θεαίτητος Λέγεις ἀληθῆ. Ξένος Νῦν δέ γ' ἐπειδὴ πέφανται μὲν λόγος, πέφανται δ' οὖσα δόξα ψευδής, ἐγχωρεῖ δὴ μιμήματα τῶν ὄντων εἶναι καὶ τέχνην ἐκ ταύτης γίγνεσθαι τῆς διαθέσεως ἀπατητικήν. Θεαίτητος Ἐγχωρεῖ. Ξένος Καὶ μὴν ὅτι γ' ἦν ὁ σοφιστὴς τούτων πότερον, διωμολογημένον ἡμῖν ἐν τοῖς πρόσθεν ἦν. Θεαίτητος Ναί.
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L'ÉTRANGER. Et comme nous étions dans cette incertitude, les ténèbres ont redoublé à l'apparition de cette maxime, tant débattue par tout le monde, qu'il n'y a pas d'image, de simulacre ni de fantôme quelconque, [264d] attendu qu'il est impossible qu'il y ait jamais du faux de quelque manière et en quoi que ce soit. 313 THÉÉTÈTE. C'est bien cela. L'ÉTRANGER. Or, maintenant que nous avons trouvé le faux, et dans le discours et dans l'opinion, il est possible qu'il y ait des imitations des êtres, et par conséquent un art de tromper. THÉÉTÈTE. Cela est possible. L'ÉTRANGER. Et nous sommes convenus précédemment que le sophiste appartient à l'une des espèces dont nous venons de parler. THÉÉTÈTE. Oui
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Ξένος Πάλιν τοίνυν ἐπιχειρῶμεν, σχίζοντες διχῇ τὸ [264e] προτεθὲν γένος, πορεύεσθαι κατὰ τοὐπὶ δεξιὰ ἀεὶ μέρος τοῦ τμηθέντος, ἐχόμενοι τῆς τοῦ σοφιστοῦ κοινωνίας, ἕως ἂν αὐτοῦ τὰ κοινὰ πάντα περιελόντες, τὴν οἰκείαν λιπόντες [265a] φύσιν ἐπιδείξωμεν μάλιστα μὲν ἡμῖν αὐτοῖς, ἔπειτα καὶ τοῖς ἐγγυτάτω γένει τῆς τοιαύτης μεθόδου πεφυκόσιν. Θεαίτητος Ὀρθῶς. Ξένος Οὐκοῦν τότε μὲν ἠρχόμεθα ποιητικὴν καὶ κτητικὴν τέχνην διαιρούμενοι; Θεαίτητος Ναί. Ξένος Καὶ τῆς κτητικῆς ἐν θηρευτικῇ καὶ ἀγωνίᾳ καὶ ἐμπορικῇ καί τισιν ἐν τοιούτοις εἴδεσιν ἐφαντάζεθ' ἡμῖν; Θεαίτητος Πάνυ μὲν οὖν.
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L'ÉTRANGER. Recommençons donc la division du genre [264e] dont nous sommes partis, et en prenant toujours à droite, suivons le sophiste dans les espèces dont il participe, jusqu'à ce que l'ayant dépouillé de tout ce qu'il a de commun avec d'autres que lui, nous ne laissions à part que sa nature [265a] propre, pour la connaître d'abord nous-mêmes , et pour la faire connaître ensuite à ceux dont la tournure d'esprit se prête le mieux à suivre cette méthode. THÉÉTÈTE. Fort bien. 314 L'ÉTRANGER. Nous avions commencé par la division de l'art de faire et de l'art d'acquérir. THÉÉTÈTE. Oui. L'ÉTRANGER. Et notre homme nous est apparu d'abord dans l'art d'acquérir, et, de division en division, dans la chasse, dans le combat, dans le négoce, et autres espèces du même genre. THÉÉTÈTE. Tout-à-fait.
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Ξένος Νῦν δέ γ' ἐπειδὴ μιμητικὴ περιείληφεν αὐτὸν τέχνη, δῆλον ὡς αὐτὴν τὴν ποιητικὴν δίχα διαιρετέον πρώτην. [265b] Ἡ γάρ που μίμησις ποίησίς τίς ἐστιν, εἰδώλων μέντοι, φαμέν, ἀλλ' οὐκ αὐτῶν ἑκάστων· ἦ γάρ; Θεαίτητος Παντάπασι μὲν οὖν. Ξένος Ποιητικῆς δὴ πρῶτον δύ' ἔστω μέρη. Θεαίτητος Ποίω; Ξένος Τὸ μὲν θεῖον, τὸ δ' ἀνθρώπινον. Θεαίτητος Οὔπω μεμάθηκα. Ξένος Ποιητικήν, εἴπερ μεμνήμεθα τὰ κατ' ἀρχὰς λεχθέντα, πᾶσαν ἔφαμεν εἶναι δύναμιν ἥτις ἂν αἰτία γίγνηται τοῖς μὴ πρότερον οὖσιν ὕστερον γίγνεσθαι. Θεαίτητος Μεμνήμεθα.
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L'ÉTRANGER. Mais maintenant qu'il est contenu dans l'art d'imiter, c'est l'art de faire qu'il nous faut diviser d'abord : [265b] cac imiter c'est faire; seulement c'est l'art de faire des simulacres, et non pas les choses elles-mêmes. N'est-il pas vrai ? THÉÉTÈTE. Très-vrai. L'ÉTRANGER. Or l'art de foire a deux parties. THÉÉTÈTE. Lesquelles? L'ÉTRANGER. L'une divine, l'autre humaine. THÉÉTÈTE. Je n'entends pas encore. 315 L'ÉTRANGER. Si nous nous rappelons bien ce que nous avons dit en commençant, nous avons appelé puissance capable de faire, toute puissance qui est cause que ce qui n'était pas arrive à l'être. THÉÉTÈTE. Mous nous le rappelons.
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[265c] Ξένος Ζῷα δὴ πάντα θνητά, καὶ δὴ καὶ φυτὰ ὅσα τ' ἐπὶ γῆς ἐκ σπερμάτων καὶ ῥιζῶν φύεται, καὶ ὅσα ἄψυχα ἐν γῇ συνίσταται σώματα τηκτὰ καὶ ἄτηκτα, μῶν ἄλλου τινὸς ἢ θεοῦ δημιουργοῦντος φήσομεν ὕστερον γίγνεσθαι πρότερον οὐκ ὄντα; ἢ τῷ τῶν πολλῶν δόγματι καὶ ῥήματι χρώμενοι-- Θεαίτητος Ποίῳ τῳ; Ξένος Τὴν φύσιν αὐτὰ γεννᾶν ἀπό τινος αἰτίας αὐτομάτης καὶ ἄνευ διανοίας φυούσης, ἢ μετὰ λόγου τε καὶ ἐπιστήμης θείας ἀπὸ θεοῦ γιγνομένης;
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[265c] L'ÉTRANGER. Tous les êtres vivants mortels, les végétaux qui croissent, soit d'une racine, soit d'une semence, à la surface de la terre, les corps inanimés fusibles et non fusibles contenus dans son sein, est-ce à quelque autre cause qu'à une puissance divine que nous attribuerons de les avoir fait passer du non-être à l'être? Ou bien nous en tiendrons-nous à la doctrine et au langage du vulgaire? THÉÉTÈTE. Quelle doctrine? L'ÉTRANGER. Que la nature engendre toutes ces choses en vertu d'une certaine cause mécanique et dépourvue d'intelligence. Dirons-nous, au contraire, que cette cause est douée de raison et d'une science divine qui provient d'un Dieu?
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[265d] Θεαίτητος Ἐγὼ μὲν ἴσως διὰ τὴν ἡλικίαν πολλάκις ἀμφότερα μεταδοξάζω· νῦν μὴν βλέπων εἰς σὲ καὶ ὑπολαμβάνων οἴεσθαί σε κατά γε θεὸν αὐτὰ γίγνεσθαι, ταύτῃ καὶ αὐτὸς νενόμικα.
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[265d] THÉÉTÈTE. J'avoue qu'il m'arrive souvent, peut-être par 316 la faute de mon âge, de varier entre ces deux opinions; mais à présent que je t'observe et que je te soupçonne de croire que tout cela est l'ouvrage d'un Dieu, je me déciderai aussi dans ce sens.
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Ξένος Καλῶς γε, ὦ Θεαίτητε. Καὶ εἰ μέν γέ σε ἡγούμεθα τῶν εἰς τὸν ἔπειτ' <ἂν> χρόνον ἄλλως πως δοξαζόντων εἶναι, νῦν ἂν τῷ λόγῳ μετὰ πειθοῦς ἀναγκαίας ἐπεχειροῦμεν ποιεῖν ὁμολογεῖν· ἐπειδὴ δέ σου καταμανθάνω τὴν φύσιν, ὅτι καὶ [265e] ἄνευ τῶν παρ' ἡμῶν λόγων αὐτὴ πρόσεισιν ἐφ' ἅπερ νῦν ἕλκεσθαι φῄς, ἐάσω· χρόνος γὰρ ἐκ περιττοῦ γίγνοιτ' ἄν. Ἀλλὰ θήσω τὰ μὲν φύσει λεγόμενα ποιεῖσθαι θείᾳ τέχνῃ, τὰ δ' ἐκ τούτων ὑπ' ἀνθρώπων συνιστάμενα ἀνθρωπίνῃ, καὶ κατὰ τοῦτον δὴ τὸν λόγον δύο ποιητικῆς γένη, τὸ μὲν ἀνθρώπινον εἶναι, τὸ δὲ θεῖον. Θεαίτητος Ὀρθῶς. Ξένος Τέμνε δὴ δυοῖν οὔσαιν δίχα ἑκατέραν αὖθις. Θεαίτητος Πῶς;
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L'ÉTRANGER . Fort bien, Théétète. Si tu nous paraissais pouvoir jamais adopter le sentiment contraire, nous ne manquerions pas de faire tous nos efforts pour Ramener à notre opinion par le raisonnement et pour forcer ta conviction; mais, je connais assez ton naturel pour être persuadé que, [265e] sans le secours de mes raisonnements, tu es porté de toi-même vers cette doctrine à laquelle tu te prétends entraîné en ce moment; je ne perdrai donc pas le temps en discours superflus; je me borne à établir que les choses que l'on dit être produites par la nature, sont l'œuvre d'un art divin; que celles que les hommes composent avec cellesJà, sont l'œuvre d'un art humain, et que par conséquent il y a deux manières de faire, lune humaine, l'autre divine. THÉÉTÈTE. Cest juste. L'ÉTRANGER. Maintenant partage en deux chacun de ces deux arts. 317 THÉÉTÈTE. Comment?
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[266a] Ξένος Οἷον τότε μὲν κατὰ πλάτος τέμνων τὴν ποιητικὴν πᾶσαν, νῦν δὲ αὖ κατὰ μῆκος. Θεαίτητος Τετμήσθω. Ξένος Τέτταρα μὴν αὐτῆς οὕτω τὰ πάντα μέρη γίγνεται, δύο μὲν τὰ πρὸς ἡμῶν, ἀνθρώπεια, δύο δ' αὖ τὰ πρὸς θεῶν, θεῖα. Θεαίτητος Ναί. Ξένος Τὰ δέ γ' ὡς ἑτέρως αὖ διῃρημένα, μέρος μὲν ἓν ἀφ' ἑκατέρας τῆς μερίδος αὐτοποιητικόν, τὼ δ' ὑπολοίπω σχεδὸν μάλιστ' ἂν λεγοίσθην εἰδωλοποιικώ· καὶ κατὰ ταῦτα δὴ πάλιν ἡ ποιητικὴ διχῇ διαιρεῖται.
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[266a] L'ÉTRANGER. Cet art de faire que tu as divisé tout à l'heure dans le sens de la largeur, divise-le maintenant en longueur. THÉÉTÈTE. Soit. L'ÉTRANGER. Tu obtiendras de la sorte quatre parties en tout, deux qui nous appartiennent, les arts humains, el deux qui appartiennent aux dieux, ou les arts divins. THÉÉTÈTE. Oui. L'ÉTRANGER. La seconde division que nous avons faite dans l'autre sens, nous donne dans chacune des deux premières parties deux membres distincts; l'art de faire*les choses mêmes, et ce qu'on peut appeler l'art de faire des simulacres; c'est là la deuxième division qu'on peut introduire dans l'art de faire.
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[266b] Θεαίτητος Λέγε ὅπῃ ἑκατέρα αὖθις. Ξένος Ἡμεῖς μέν που καὶ τἆλλα ζῷα καὶ ἐξ ὧν τὰ πεφυκότ' ἐστίν, πῦρ καὶ ὕδωρ καὶ τὰ τούτων ἀδελφά, θεοῦ γεννήματα πάντα ἴσμεν αὐτὰ ἀπειργασμένα ἕκαστα· ἢ πῶς; Θεαίτητος Οὕτως. Ξένος Τούτων δέ γε ἑκάστων εἴδωλα ἀλλ' οὐκ αὐτὰ παρέπεται, δαιμονίᾳ καὶ ταῦτα μηχανῇ γεγονότα. Θεαίτητος Ποῖα;
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[266b] THÉÉTÈTE. A quoi rapportes-tu ces deux dernières divisions ? L'ÉTRANGER. Nous, les autres animaux et les éléments dont 318 se composent les corps, le feu, l'eau, et tous les êtres frères de ceux-là, nous savons que Dieu en est l'artisan et le père. N'est-il pas vrai? THÉÉTÈTE. Oui. L'ÉTRANGER. Or chacune de ces choses a ses simulacres qui ne sont pas elle, mais qui sont aussi l'œuvre d'un art divin. THÉÉTÈTE. Quels simulacres?
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Ξένος Τά τε ἐν τοῖς ὕπνοις καὶ ὅσα μεθ' ἡμέραν φαντάσματα αὐτοφυῆ λέγεται, σκιὰ μὲν ὅταν ἐν τῷ πυρὶ σκότος [266c] ἐγγίγνηται, διπλοῦν δὲ ἡνίκ' ἂν φῶς οἰκεῖόν τε καὶ ἀλλότριον περὶ τὰ λαμπρὰ καὶ λεῖα εἰς ἓν συνελθὸν τῆς ἔμπροσθεν εἰωθυίας ὄψεως ἐναντίαν αἴσθησιν παρέχον εἶδος ἀπεργάζηται. Θεαίτητος Δύο γὰρ οὖν ἐστι ταῦτα θείας ἔργα ποιήσεως, αὐτό τε καὶ τὸ παρακολουθοῦν εἴδωλον ἑκάστῳ. Ξένος Τί δὲ τὴν ἡμετέραν τέχνην; ἆρ' οὐκ αὐτὴν μὲν οἰκίαν οἰκοδομικῇ φήσομεν ποιεῖν, γραφικῇ δέ τιν' ἑτέραν, οἷον ὄναρ ἀνθρώπινον ἐγρηγορόσιν ἀπειργασμένην;
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L'ÉTRANGER. Ceux que nous offrent les songes, et ceux qui nous apparaissent le jour et que nous nommons fantômes naturels, comme les ombres qui se forment dans le feu, [266c] et l'image réfléchie, quand la lumière propre à un corps, rencontrant une lumière étrangère sur une surface brillante et polie, produit une image qui fait sur la vue un effet contraire à l'effet ordinaire (17). THÉÉTÈTE. Ainsi cela fait deux sortes d'ouvrages de l'art 319 divin, savoir la chose même, et l'image qui l'accompagne. L'ÉTRANGER. Venons à notre art humain. Ne disons-nous pas qu'il fait une véritable maison au moyen de l'architecture, et que, par la peinture, il en fait une autre, qui est une espèce de songe de notre composition à l'usage des gens éveillés?
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[266d] Θεαίτητος Πάνυ μὲν οὖν. Ξένος Οὐκοῦν καὶ τἆλλα οὕτω κατὰ δύο διττὰ ἔργα τῆς ἡμετέρας αὖ ποιητικῆς πράξεως, τὸ μὲν αὐτό, φαμέν, [αὐτουργική], τὸ δὲ εἴδωλον [εἰδωλοποιική]. Θεαίτητος Νῦν μᾶλλον ἔμαθον, καὶ τίθημι δύο διχῇ ποιητικῆς εἴδει· θείαν μὲν καὶ ἀνθρωπίνην κατὰ θάτερον τμῆμα, κατὰ δὲ θάτερον τὸ μὲν αὐτῶν ὄν, τὸ δὲ ὁμοιωμάτων τινῶν γέννημα.
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[266d] THÉÉTÈTE. Sans doute. L'ÉTRANGER. Toutes nos oeuvres peuvent être rapportées ainsi à nos deux manières de Élire; la chose même à notre art de faire les choses, le simulacre à notre art de faire les simulacres. THÉÉTÈTE. Je commence à . comprendre. J'établis dans l'art de faire deux divisions, Tune le partage en art divin et art humain, l'autre le partage en art de produire les choses et art de produire des ressemblances.
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Ξένος Τῆς τοίνυν εἰδωλουργικῆς ἀναμνησθῶμεν ὅτι τὸ μὲν εἰκαστικόν, τὸ δὲ φανταστικὸν ἔμελλεν εἶναι γένος, εἰ τὸ [266e] ψεῦδος ὄντως ὂν ψεῦδος καὶ τῶν ὄντων ἕν τι φανείη πεφυκός. Θεαίτητος Ἦν γὰρ οὖν. Ξένος Οὐκοῦν ἐφάνη τε καὶ διὰ ταῦτα δὴ καταριθμήσομεν αὐτὼ νῦν ἀναμφισβητήτως εἴδη δύο; Θεαίτητος Ναί.
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L'ÉTRANGER. Or, rappelons-nous que dans l'art de foire des simulacres, nous avons dû distinguer deux espèces, l'art de copier et l'art de la fantasmagorie, si le [266e] faux est réellement le faux et doit être mis au nombre des êtres. 320 THÉÉTÈTE. Il est vrai. L'ÉTRANGER. Nous l'avons reconnu, et par conséquent nous ne devons faire aucune difficulté de compter ces deux espèces. THÉÉTÈTE. Oui.
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[267a] Ξένος Τὸ τοίνυν φανταστικὸν αὖθις διορίζωμεν δίχα. Θεαίτητος Πῇ; Ξένος Τὸ μὲν δι' ὀργάνων γιγνόμενον, τὸ δὲ αὐτοῦ παρέχοντος ἑαυτὸν ὄργανον τοῦ ποιοῦντος τὸ φάντασμα. Θεαίτητος Πῶς φῄς; Ξένος Ὅταν οἶμαι τὸ σὸν σχῆμά τις τῷ ἑαυτοῦ χρώμενος σώματι προσόμοιον ἢ φωνὴν φωνῇ φαίνεσθαι ποιῇ, μίμησις τοῦτο τῆς φανταστικῆς μάλιστα κέκληταί που. Θεαίτητος Ναί.
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[267a] L'ÉTRANGER. Maintenant il faut remarquer deux parties dans la fantasmagorie. THÉÉTÈTE. Lesquelles? L'ÉTRANGER. L'une où l'on se sert d'instruments étrangers, l'autre où l'on est à soi-même son propre instrument. THÉÉTÈTE. Comment cela? L'ÉTRANGER. Comme, par exemple, si quelqu'un se sert de son propre corps ou de sa propre voix pour contrefaire ta voix ou ta figure : cette partie de la fantasmagorie s'appellera la mimique. THÉÉTÈTE. Oui.
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Ξένος Μιμητικὸν δὴ τοῦτο αὐτῆς προσειπόντες ἀπονειμώμεθα· τὸ δ' ἄλλο πᾶν ἀφῶμεν μαλακισθέντες καὶ παρέντες [267b] ἑτέρῳ συναγαγεῖν τε εἰς ἓν καὶ πρέπουσαν ἐπωνυμίαν ἀποδοῦναί τιν' αὐτῷ. Θεαίτητος Νενεμήσθω, τὸ δὲ μεθείσθω. Ξένος Καὶ μὴν καὶ τοῦτο ἔτι διπλοῦν, ὦ Θεαίτητε, ἄξιον ἡγεῖσθαι· δι' ἃ δέ, σκόπει. Θεαίτητος Λέγε. Ξένος Τῶν μιμουμένων οἱ μὲν εἰδότες ὃ μιμοῦνται τοῦτο πράττουσιν, οἱ δ' οὐκ εἰδότες. καίτοι τίνα μείζω διαίρεσιν ἀγνωσίας τε καὶ γνώσεως θήσομεν; Θεαίτητος Οὐδεμίαν. Ξένος Οὐκοῦν τό γε ἄρτι λεχθὲν εἰδότων ἦν μίμημα; τὸ γὰρ σὸν σχῆμα καὶ σὲ γιγνώσκων ἄν τις μιμήσαιτο.
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L'ÉTRANGER. Appelons-la donc de ce nom de mimique.321 Quant à l'autre, pour le prendre à notre aise, nous la laisserons de côté, abandonnant [267b] à quelque autre le soin d'en former un ensemble et de lui donner un nom convenable. THÉÉTÈTE. Soit dit ainsi de la première, et passons-nous de la seconde. L'ÉTRANGER. Mais la première, Théétète, mérite encore une distinction. Penses-y bien. THÉÉTÈTE. Voyons. L'ÉTRANGER. Parmi ceux qui imitent, les uns savent ce qu'ils imitent, et les autres ne le savent pas. Et quelle distinction plus importante pourrions-nous établir que celle de la connaissance et de l'ignorance? THÉÉTÈTE. Aucune. L'ÉTRANGER. Or l'imitation dont je parlais tout à l'heure est de celles qui supposent la connaissance de ce qu'on imite; car on ne saurait imiter ta figure et ta personne sans te connaître.
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[267c] Θεαίτητος Πῶς δ' οὔ; Ξένος Τί δὲ δικαιοσύνης τὸ σχῆμα καὶ ὅλης συλλήβδην ἀρετῆς; ἆρ' οὐκ ἀγνοοῦντες μέν, δοξάζοντες δέ πῃ, σφόδρα ἐπιχειροῦσιν πολλοὶ τὸ δοκοῦν σφίσιν τοῦτο ὡς ἐνὸν αὐτοῖς προθυμεῖσθαι φαίνεσθαι ποιεῖν, ὅτι μάλιστα ἔργοις τε καὶ λόγοις μιμούμενοι; Θεαίτητος Καὶ πάνυ γε πολλοί. Ξένος Μῶν οὖν πάντες ἀποτυγχάνουσι τοῦ δοκεῖν εἶναι δίκαιοι μηδαμῶς ὄντες; ἢ τούτου πᾶν τοὐναντίον; Θεαίτητος Πᾶν.
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[267c] THÉÉTÈTE, Non, assurément. 322 L'ÉTRANGER. Mais en est-il de même pour l'image de la justice, et en général de toutes les vertus? N'y a-t-il pas beaucoup de gens qui, tout en ignorant ce que c'est réellement, et ne s'en formant qu'une opinion, s'appliquent à paraître posséder ces qualités telles qu'ils se les figurent, en les imitant de leur mieux dans leurs discours et dans leurs actions? THÉÉTÈTE. Oui, certes, il y en a beaucoup. L'ÉTRANGER. Mais est-ce qu'ils échouent tous dans leurs efforts pour paraître justes sans l'être en effet, ou n'est-ce pas le contraire? THÉÉTÈTE. Tout le contraire, certainement.
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[267d] Ξένος Μιμητὴν δὴ τοῦτόν γε ἕτερον ἐκείνου λεκτέον οἶμαι, τὸν ἀγνοοῦντα τοῦ γιγνώσκοντος. Θεαίτητος Ναί.
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[267d] L'ÉTRANGER. Nous devons donc distinguer ce nouvel imitateur qui ignore l'objet de son imitation, de l'autre qui le connaît. THÉÉTÈTE. Fort bien.
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Ξένος Πόθεν οὖν ὄνομα ἑκατέρῳ τις αὐτῶν λήψεται πρέπον; ἢ δῆλον δὴ χαλεπὸν ὄν, διότι τῆς τῶν γενῶν κατ' εἴδη διαιρέσεως παλαιά τις, ὡς ἔοικεν, ἀργία τοῖς ἔμπροσθεν καὶ ἀσύννους παρῆν, ὥστε μηδ' ἐπιχειρεῖν μηδένα διαιρεῖσθαι· καθὸ δὴ τῶν ὀνομάτων ἀνάγκη μὴ σφόδρα εὐπορεῖν. Ὅμως δέ, κἂν εἰ τολμηρότερον εἰρῆσθαι, διαγνώσεως ἕνεκα τὴν [267e] μὲν μετὰ δόξης μίμησιν δοξομιμητικὴν προσείπωμεν, τὴν δὲ μετ' ἐπιστήμης ἱστορικήν τινα μίμησιν. Θεαίτητος Ἔστω. Ξένος Θατέρῳ τοίνυν χρηστέον· ὁ γὰρ σοφιστὴς οὐκ ἐν τοῖς εἰδόσιν ἦν ἀλλ' ἐν τοῖς μιμουμένοις δή. Θεαίτητος Καὶ μάλα. Ξένος Τὸν δοξομιμητὴν δὴ σκοπώμεθα ὥσπερ σίδηρον, εἴτε ὑγιὴς εἴτε διπλόην ἔτ' ἔχων τινά ἐστιν ἐν αὑτῷ. Θεαίτητος Σκοπῶμεν.
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L'ÉTRANGER. Mais où prendre pour chacun d'eux un nom qui leur convienne? Il est évident que ce sera difficile, parce qu'il y avait apparemment chez les hommes d'autrefois pour la division des 323 genres en espèces je ne sais qu'elle aversion ancienne et irréfléchie qui faisait que personne n'entreprenait de diviser ; d'où il est arrivé que nous ne sommes pas riches en noms. Cependant, pour mieux distinguer, dût notre, innovation passer pour téméraire, nous appellerons imitation [267e] selon l'opinion, celle qui n'est que l'expression d'une opinion dans l'imitateur, et imitation savante celle qui est faite avec science. THÉÉTÈTE. Soit. L'ÉTRANGER. C'est de la première qu'il faut nous servir; car nous n'avons pas trouvé que le sophiste fût de ceux qui connaissent, mais plutôt de ceux qui s'en donnent l'apparence. THÉÉTÈTE. Oui, vraiment. L'ÉTRANGER. Eh bien ! considérons l'imitateur selon l'opinion comme nous ferions uu morceau de fer, pour voir s'il est tout d'une pièce ou s'il y a quelque soudure. THÉÉTÈTE, Voyons.
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Ξένος Ἔχει τοίνυν καὶ μάλα συχνήν. Ὁ μὲν γὰρ εὐήθης [268a] αὐτῶν ἐστιν, οἰόμενος εἰδέναι ταῦτα ἃ δοξάζει· τὸ δὲ θατέρου σχῆμα διὰ τὴν ἐν τοῖς λόγοις κυλίνδησιν ἔχει πολλὴν ὑποψίαν καὶ φόβον ὡς ἀγνοεῖ ταῦτα ἃ πρὸς τοὺς ἄλλους ὡς εἰδὼς ἐσχημάτισται. Θεαίτητος Πάνυ μὲν οὖν ἔστιν ἑκατέρου γένος ὧν εἴρηκας. Ξένος Οὐκοῦν τὸν μὲν ἁπλοῦν μιμητήν τινα, τὸν δὲ εἰρωνικὸν μιμητὴν θήσομεν; Θεαίτητος Εἰκὸς γοῦν. Ξένος Τούτου δ' αὖ τὸ γένος ἓν ἢ δύο φῶμεν; Θεαίτητος Ὅρα σύ.
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L'ÉTRANGER. Il y en a une et très visible. Entre les imitateurs selon l'opinion, il y a des gens simples [268a] qui 324 croient savoir ce dont ils n'ont qu'une opinion. Il y en a d'autres qui laiseent assez voir, par la versatilité, de leurs discours, qu'ils soupçonnent et appréhendent fort eux-mêmes de ne rien savoir de ce qu'ils font) semblant de savoir auprès des autres. THÉÉTÈTE. Nul doute qu'il n'existe de part et d'autre des gens tels que tu les décris. L'ÉTRANGER. Eh bien ! ne nommerons-nous pas les uns imitateurs simples, les autres imitateurs ironiques ? THÉÉTÈTE. Cela parait très raisonnable. L'ÉTRANGER. Maintenant le dernier de ces deux genres est-il un ou double? THÉÉTÈTE. Vois toi-même.
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[268b] Ξένος Σκοπῶ, καί μοι διττὼ καταφαίνεσθόν τινε· τὸν μὲν δημοσίᾳ τε καὶ μακροῖς λόγοις πρὸς πλήθη δυνατὸν εἰρωνεύεσθαι καθορῶ, τὸν δὲ ἰδίᾳ τε καὶ βραχέσι λόγοις ἀναγκάζοντα τὸν προσδιαλεγόμενον ἐναντιολογεῖν αὐτὸν αὑτῷ. Θεαίτητος Λέγεις ὀρθότατα. Ξένος Τίνα οὖν ἀποφαινώμεθα τὸν μακρολογώτερον εἶναι; πότερα πολιτικὸν ἢ δημολογικόν; Θεαίτητος Δημολογικόν. Ξένος Τί δὲ τὸν ἕτερον ἐροῦμεν; σοφὸν ἢ σοφιστικόν;
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[268b] L'ÉTRANGER. Je regarde et j'y distingue deux espèces : les uns exercent leur ironie en public dans de longs discours adressés à la multitude; les autres l'exercent dans le particulier par discours entrecoupés , en forçant leur interlocuteur de se contredire lui-même. THÉÉTÈTE. Tu as raison. 325 L'ÉTRANGER Comment nommerons^nous l'homme aux longs discours, politique ou bien discoureur pubhc? THÉÉTÈTE. Appelons-le discoureur public. L'ÉTRANGER. Et quel sera le nom de l'autre, sage ou sophiste?
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Θεαίτητος Τὸ μέν που σοφὸν ἀδύνατον, ἐπείπερ οὐκ εἰδότα [268c] αὐτὸν ἔθεμεν· μιμητὴς δ' ὢν τοῦ σοφοῦ δῆλον ὅτι παρωνύμιον αὐτοῦ τι λήψεται, καὶ σχεδὸν ἤδη μεμάθηκα ὅτι τοῦτον δεῖ προσειπεῖν ἀληθῶς αὐτὸν ἐκεῖνον τὸν παντάπασιν ὄντως σοφιστήν. Ξένος Οὐκοῦν συνδήσομεν αὐτοῦ, καθάπερ ἔμπροσθεν, τοὔνομα συμπλέξαντες ἀπὸ τελευτῆς ἐπ' ἀρχήν; Θεαίτητος Πάνυ μὲν οὖν. |
THÉÉTÈTE. Pour sage, c'est impossible : nous sommes convenus qu'il ne sait point; [268c] mais, puisque c'est un imitateur du sage, il est naturel qu'il en tire son nom ; et j'aperçois maintenant que voilà celui que nous devons appeler légitimement le vrai sophiste. L'ÉTRANGER. Et maintenant ne voulons-nous donc pas, comme précédemment, faire une chaîne des titres du sophiste, en les entrelaçant les uns dans les autres, depuis le premier jusqu'au dernier? THÉÉTÈTE. Très volontiers. |
Ξένος Τὸ δὴ τῆς ἐναντιοποιολογικῆς εἰρωνικοῦ μέρους τῆς δοξαστικῆς μιμητικόν, τοῦ φανταστικοῦ γένους ἀπὸ τῆς [268d] εἰδωλοποιικῆς οὐ θεῖον ἀλλ' ἀνθρωπικὸν τῆς ποιήσεως ἀφωρισμένον ἐν λόγοις τὸ θαυματοποιικὸν μόριον, “ταύτης τῆς γενεᾶς τε καὶ αἵματος” ὃς ἂν φῇ τὸν ὄντως σοφιστὴν εἶναι, τἀληθέστατα, ὡς ἔοικεν, ἐρεῖ. Θεαίτητος Παντάπασι μὲν οὖν.
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L'ÉTRANGER. Ainsi, dans la contradiction, l'imitation selon l'opinion dans le genre ironique, imitation dépendante de la fantasmagorie, comprise elle-même dans l'art de [268d] faire des simulacres, non pas l'art divin, mais l'art humain, qui produit 326 des prestiges à l'aide des discours, telle est " la race et le sang (18) » du vrai sophiste : on peut le dire en toute assurance, THÉÉTÈTE. Cela est certain.
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