Vivre ses passions : l'argent

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Que la possession déchaîne l'orage...

LUCRÈCE : Disciple d'Epicure (342-270 A.C.N.) et, à travers celui-ci, de Démocrite (né vers 460 A.C.N.), il a écrit un poème philosophique et didactique en 6 chants De rerum natura à la gloire d'Epicure et de sa conception du monde. Resté à l'écart de la vie troublée de son époque, il a une ambition : libérer l'humanité par la connaissance. En s'inspirant de la doctrine d'Epicure, il tente d'arracher l'homme à ses passions, à ses craintes, à ses superstitions. La morale épicurienne est fondée sur la sensation, sur le réel; les dieux sont relégués loin de la terre, ils ne sont pas intervenus dans la création de l'univers (ils n'en ont pas besoin et il est mal fait), ils ne s'occupent pas des affaires humaines.

autres textes de lucrèce

En de multiples endroits de son oeuvre, Lucrèce n'a pas de mots assez durs pour s'attaquer aux riches : illusion, dureté, violence...

Deinde animi ingratam naturam pascere semper,
atque explere bonis rebus satiareque numquam ...
Hoc, ut opinor, id est, aevo florente puellas
quod memorant laticem pertusum congerere in vas,
quod tamen expleri nulla ratione potestur.
Quod si quis vera vitam ratione gubernet,
divitiae grandes homini sunt vivere parce
aequo animo ; neque enim est umquam penuria parvi.
At claros homines voluerunt se atque potentes,
ut fundamento stabili fortuna maneret
et placidam possent opulenti degere vitam,
nequiquam ...
Ergo hominum genus incassum frustraque laborat
semper et curis consumit inanibus aevum
nimirum quia non cognovit quae sit habendi
finis et omnino quoad crescat vera voluptas.
Idque minutatim vitam provexit in altum
et belli magnos commovit funditus aestus.

LUCRÈCE, De rerum natura, III, 1002-1003, 1008-1010 ; V, 1117-1123, 1430-1435.
   vocabulaire

Tenter sans cesse de combler notre âme insatiable, la combler de bonnes choses et pourtant ne jamais l'apaiser, c'est, à mes yeux, faire comme ces jeunes filles de la légende, dans la fleur de l'âge, qui versent un liquide dans un récipient percé qui ne peut donc jamais se remplir.
Si l'homme orientait sa vie d'une manière authentique, vivre modestement, dans la sérénité, serait, pour lui, grande richesse : le peu ne fait jamais défaut. Mais les hommes ont voulu être glorieux et puissants pour que leur aisance s'appuie sur un fondement solide et pour qu'ils puissent poursuivre leur vie comblée dans la paix. Peine perdue...
L'espèce humaine se démène donc toujours en pure perte et elle est rongée par des préoccupations sans objet. Il ne faut pas s'en étonner : l'homme ne connaît pas les limites de la possession ni celles du plaisir véritable. Progressivement, cette ignorance a conduit les hommes loin du port et les a exposés aux secousses des orages et de la guerre.

LUCRÈCE, De rerum natura, III, 1002-1003, 1008-1010 ; V, 1117-1123, 1430-1435.

1. Toute l'économie mondiale se résume dans l'utilisation, par notre espèce, de l'énergie solaire et des sources matériellement énergétiques qui en découlent, grâce à l'information technique. Ce développement technique a été l'instrument d'établissement de dominances pour la possession des objets et des êtres. L'impérialisme se mesure au nombre de brevets et de techniciens qu'un ensemble humain possède.

H. LABORIT, La vie antérieure, Paris, Grasset, 1989, p. 243.

2. La spirale des disparités.

Une fois enclenchée, l'évolution est difficilement réversible. Les inégalités de revenus et de fortune sont en effet porteuses d'autres injustices qu'elles entraînent et développent dans un processus cumulatif. Les travaux les moins bien rémunérés sont aussi les plus pénibles, les moins gratifiants ; ceux qui les exercent ont une espérance de vie réduite ; ils n'ont guère de chances d'accéder à une formation qualifiée, aux loisirs, à la culture, à des conditions de vie et de logements décentes. Leurs enfants, dès l'école, subiront leur environnement comme un handicap. Trouvant leurs prolongements dans les rapports avec la justice ou la fiscalité, les hiérarchies inégalitaires vont presque toujours dans le même sens. Au sommet, une élite restreinte, industrielle, financière, administrative, politique dont les membres sont étroitement solidaires, décide sans contrôle et au mieux de ses intérêts, des investissements, grands projets, regroupements et alliances multinationales qui conditionnent l'avenir de tous.

Le Monde diplomatique, Manière de voir, 5, Le triomphe des inégalités, Paris, Le Monde, 1989, p. 57.

3. Plus de 350 millions de tonnes de céréales restent stockées dans les pays riches quand l'aide alimentaire n'a jamais dépassé 10 millions de tonnes par an, 500 millions de personnes souffrent de malnutrition et 280.000 en meurent chaque semaine.

Le Monde diplomatique, Manière de voir, 5, Le triomphe des inégalités, Paris, Le Monde, 1989, p. 12.

4. Revenus et travail : distribution sans partage

Région privilégiée du monde, l'Europe prospère de la Communauté compte quarante-cinq millions de pauvres. Y figurent en grand nombre : personnes âgées, vivant souvent dans la solitude et la misère, mères célibataires - elles sont quatre millions, - populations immigrées. La moitié des seize millions de chômeurs sont sans travail depuis plus de deux ans et la majorité d'entre eux ne touchent plus d'allocations. Un jeune européen sur quatre est privé d'emploi, donc de revenus. La plupart n'en ont jamais eu. A l'autre extrémité, 20 % de la population disposent d'environ la moitié des revenus et des patrimoines et 10 % s'en attribuent plus d'un tiers. Partout et dans tous les secteurs d'activité, mécanismes du marché et impératifs économiques brisent les solidarités et liquident les acquis sociaux. D'année en année, les riches deviennent un peu plus riches et les pauvres un peu plus pauvres.

Claude JULIEN dans Le Monde diplomatique, Manière de voir, 5, Le triomphe des inégalités, Paris, Le Monde, 1989, p. 39.

aequus, a, um : égal, équitable (aequum est : il convient) (ex aequo : à égalité)
aestus, us
, m. : la chaleur, le bouillonnement
aevum, i,
n. : l'époque, la durée, l'âge
altus, a, um
: haut, profond, grand (métaph.)
animus, i
, m. : le coeur, la sympathie, le courage, l'esprit
at
, conj. : mais
atque
, conj. : et, et aussi
bellum, i,
n. : la guerre
bonus, a, um
: bon (bonus, i : l'homme de bien - bona, orum : les biens)
clarus, a, um
: célèbre
cognosco, is, ere, novi, nitum
: 1. apprendre à connaître, étudier ; pf. : savoir 2. reconnaître 3. instruire (une affaire)
commoveo, es, ere, movi, motum
: 1 - mettre en mouvement, déplacer, remuer. - 2 - secouer, agiter, ébranler (le corps ou l'esprit), émouvoir, impressionner, troubler. - 3 - exciter, faire naître (un sentiment). (commotus, a, um : en mouvement, ému, agité)
congero, is, ere, gessi, gestum
: entasser, amasser, rassembler, amonceler, accumuler, mettre en tas; faire son nid, nicher, s'établir.
consumo, is, ere, sumpsi, sumptum
: 1. employer, dépenser 2. consommer, épuiser 3. venir à bout, détruire
cresco, is, ere, crevi, cretum
: intr. - 1 - naître, pousser (au pr. et au fig.). - 2 - croître, s'accroître, grandir en nombre. - 3 - au fig. s'accroître (en parl. des ch.). - 4 - s'élever (en gloire, en réputation), grandir en considération, grandir en puissance, devenir puissant.
cura, ae
, f. : le soin, le souci
dego, is, ere
: passer le temps
deinde
, adv. : ensuite
divitiae, arum
, f. : les biens, les richesses, la fortune.
enim
, conj. : car, en effet
ergo
, conj. : donc
et
, conj. : et. adv. aussi
expleo, es, ere, evi, etum
: 1 - remplir, combler. - 2 - rendre complet, compléter. - 3 - rassasier, assouvir, satisfaire, contenter. - 4 - achever, terminer, accomplir, effectuer, exécuter. - 5 - compenser, réparer. 6 - récompenser. - 7 - diminuer, décharger, vider.
finis, is
, f. : la limite, la fin ; pl., les frontière, le territoire
florens, entis
: en fleur, brillant, éclatant, heureux
fortuna, ae
, f. : la fortune, la chance
frustra
, adv. : en vain
fundamentum, i
, n. : le fondement, la base, le support
funditus
, adv. : complètement, jusqu'aux fondations
genus, eris
, n. : la race, l'origine, l'espèce
grandis, e
: grand
guberno, as, are
: diriger un navire
habeo, es, ere, bui, bitum
: avoir (en sa possession), tenir (se habere : se trouver, être), considérer comme
hic, haec, hoc
: adj. : ce, cette, ces, pronom : celui-ci, celle-ci
homo, minis
, m. : l'homme, l'humain
id
, nominatif - accusatif neutre singulier de is, ea, is : il, elle, le, la, ce, ....
in
, prép. : (acc. ou abl.) dans, sur, contre
inanis, e
: 1 - vide. - 2 - à jeun, affamé. - 3 - qui ne porte rien; qui a les mains vides, qui a la bourse vide, qui n'a rien, pauvre. - 4 - qui n'a pas de corps, sans consistance; sans vie, mort. - 5 - au fig. inoccupé (en parl. du temps), non rempli. - 6 - sans réalité, vain; inutile; futile, frivole. - 7 - de peu de valeur. - 8 - orgueilleux, vaniteux, fat.
incassum
, adv. : en vain
ingratus, a, um
: 1 - désagréable, déplaisant, pénible. - 2 - ingrat, non reconnaissant; qui ne rapporte pas, infructueux, stérile, qui ne répond pas à l'attente. - 2 - qui a éprouvé de l'ingratitude, qu'on a payé d'ingratitude.
is
, nominatif masculin singulier de is, ea, id : ce, cette, celui-ci, il, 2ème personne sing. de eo, is, ire : aller
laboro, as, are
: peiner, travailler, souffrir
latex, icis
, m. : la liqueur, le liquide
magnus, a, um
: grand
maneo, es, ere, mansi, mansum
: rester
memoro, as, are
: rappeler au souvenir, raconter, rapporter
minutatim
, adv. : 1 - par petits morceaux, en petits fragments. - 2 - partiellement, isolément. - 3 - peu à peu, insensiblement.
natura, ae
, f. : 1 - la nature, l'universalité des choses créées, l'univers. - 2 - la nature, la puissance organisatrice et conservatrice de l'univers; l'ordre établi par la nature, les lois naturelles (physiques ou morales). - 3 - la nature, l'essence d'un être avec ses attributs, la constitution (physique ou morale); l'organisation (des êtres animés ou animés), la substance, l'être, l'élément. - 4 - la nature particulière (du corps ou de l'âme), les dispositions naturelles, l'instinct, les inclinations, le tempérament, le naturel, le caractère. - 5 -la nature, la propriété, la qualité (d'une chose). - 6 - le sexe, les parties sexuelles.
neque
, adv. : et ne pas
nequiquam
, adv. : en vain, inutilement
nimirum
, adv. : 1 - certes, assurément. - 2 - ironique : sans doute, c'est sans doute que, apparemment.
non
, neg. : ne...pas
nullus, a, um
: aucun
numquam
, inv. : ne... jamais
omnino
, adv. : complètement, tout-à-fait
opinor, aris, ari, atus sum
: supposer, conjecturer, penser, croire, estimer, présumer.
opulentus, a, um
: riche, opulent
parce
, adv. : avec économie, modérément
pareo, es, ere, ui, itum
: paraître, apparaître, se montrer; obéir
parvus, a, um
: petit
pasco, is, ere, pavi, pastum
:1 - faire paître, mener paître; absol. avoir des troupeaux, avoir des pâturages. - 2 - élever (des animaux). - 3 - nourrir, entretenir, alimenter, faire vivre. - 4 - nourrir (qqch), faire croître, entretenir, développer. - 5 - repaître, rassasier, assouvir. - 6 - paître, pâturer, brouter.
penuria, ae
, f. : le manque, la famine
pertundo, is, ere, udi, ususm
: transpercer, creuser, percer, trouer.
placidus, a, um
: doux, calme, paisible
possum, potes, posse, potui
: pouvoir
potens, entis
, m. : puissant
potestur, = potest
: il peut
proveho, is, ere, vexi, vectum
: s'avancer (provectus, a, um : avancé) transporter en avant, entraîner - faire monter, élever
puella, ae
, f. : la fille, la jeune fille
quae
, 4 possibilités : 1. nominatif féminin singulier, nominatif féminin pluriel, nominatif ou accusatif neutres pluriels du relatif = qui, que (ce que, ce qui) 2. idem de l'interrogatif : quel? qui? que? 3. faux relatif = et ea - et eae 4. après si, nisi, ne, num = aliquae
qui
, 1. nominatif masculin singulier ou nominatif masculin pluriel du relatif 2. idem de l'interrogatif 3. après si, nisi, ne, num = aliqui 4. faux relatif = et ei 5. interrogatif = en quoi, par quoi
quia
, conj. : parce que
quis
, 1. pronom interrogatif N. M. S. 2. pronom indéfini = quelqu'un 3. après si, nisi, ne, num = aliquis 4. = quibus
quoad
, conj. : + subj. : tant que, aussi longtemps que
quod
, 1. pronom relatif nom. ou acc. neutre singulier : qui, que 2. faux relatif = et id 3. conjonction : parce que, le fait que 4. après si, nisi, ne, num = aliquod = quelque chose 5. pronom interrogatif nom. ou acc. neutre sing. = quel?
ratio, onis,
f. : l'évaluation d'une chose, sa nature, son espèce, sa manière d'être, ses modalités - le système, le procédé, la méthode, le plan
res, rei
, f. : la chose, l'événement, la circonstance, l'affaire judiciaire; les biens
satio, as, are
: 1. rassasier, satisfaire 2. fatiguer, lasser, dégoûter
se
, pron. réfl. : se, soi
semper
, adv. : toujours
si
, conj. : si
stabilis, e
: ferme, solide, inébranlable
sum, es, esse, fui
: être
tamen
, adv. : cependant
umquam
, inv. : une seule fois ; avec une négation : jamais
ut
, conj. : + ind. : quand, depuis que; + subj; : pour que, que, de (but ou verbe de volonté), de sorte que (conséquence) adv. : comme, ainsi que
vas, vasis
, n. : le vase, le vaisseau, le pot, la vaisselle, les meubles, les bagages de soldats, les instruments, les ruches
verus, a, um
: vrai
vita, ae
, f. : la vie, l'existence, les moyens d'existence, la conduite, la biographie.
vivo, is, ere, vixi, victum
: vivre
volo, vis, velle
: vouloir
voluptas, atis
, f. : la volupté, le plaisir
texte
texte
texte
texte