Denys d'Halicarnasse

DENYS DHALICARNASSE

 

ANTIQUITÉS ROMAINES.

ΔΙΟΝΥΣΙΟΥ ΑΛΙΚΑΡΝΑΣΕΩΣ ΡΩΜΑΙΚΗΣ ΑΡΧΑΙΟΛΟΓΙΑΣ ΛΟΓΟΣ ΤΡΙΤΟΣ.

 LIVRE TROISIEME, chapitre 6

chapitre 5 - chapitre 7

 

 

 

 

 

 

 

DENYS DHALICARNASSE

 

ANTIQUITÉS ROMAINES.

ΔΙΟΝΥΣΙΟΥ ΑΛΙΚΑΡΝΑΣΕΩΣ ΡΩΜΑΙΚΗΣ ΑΡΧΑΙΟΛΟΓΙΑΣ ΛΟΓΟΣ ΤΡΙΤΟΣ.

 LIVRE TROISIEME

 

 

 

 

 

 

 

LES ANTIQUITES ROMAINES DE DENYS D'HALICARNASSE

LITRE TROISIEME.

 

 

 

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CHAPITRE SIXIEME.

l. Horace rencontre sa. sœur aux portes de Rome. II. Elle pleure la mort d'un des Curaces son amant. III. Elle reproche à son frère la mort de ses cousins. IV. Sur ces reproches Horace entre en fureur et la tue. V.  Le père d'Horace ne désapprouve point cette action.

 

I. ς γὰρ ἐγγὺς ἐγένετο τῶν πυλῶν, ἄλλον τε ὄχλον ὁρᾷ παντοδαπὸν ἐκχεόμενον ἐκ τῆς πόλεως καὶ δὴ καὶ τὴν ἀδελφὴν προστρέχουσαν· διαταραχθεὶς δὲ κατὰ τὴν πρώτην ὄψιν, ὅτι καταλιποῦσα τὴν μετὰ μητρὸς οἰκουρίαν παρθένος ἐπίγαμος εἰς ὄχλον αὑτὴν ἔδωκεν ἀγνῶτα, καὶ πολλοὺς λαμβάνων λογισμοὺς ἀτόπους τελευτῶν ἐπὶ τοὺς ἐπιεικεῖς καὶ φιλανθρώπους ἀπέκλινεν, ὡς ἀσπάσασθαί τε πρώτη τὸν σωθέντα ἀδελφὸν ποθοῦσα καὶ τὰς ἀρετὰς τῶν τεθνηκότων παρ´ αὐτοῦ μαθεῖν βουλομένη τῶν εὐσχημόνων ὑπερίδοι γυναικεῖόν τι πάσχουσα. δὲ ἄρα οὐ τοὺς ἀδελφοὺς ποθοῦσα τὰς ἀσυνήθεις ἐτόλμησεν ἐξελθεῖν ὁδούς, ἀλλ´ ἔρωτι κρατουμένη τῶν ἀνεψιῶν ἑνός, ᾧ καθωμολόγητο ὑπὸ τοῦ πατρὸς ἐπὶ γάμῳ, καὶ κρύπτουσα τὸ πάθος ἀπόρρητον ἐπειδὴ {δὲ} τῶν ἀπὸ τοῦ στρατοπέδου τινὸς ἤκουσεν ἀπαγγέλλοντος τὰ περὶ τὴν μάχην, οὐκέτι κατέσχεν, ἀλλ´ ἐκλιποῦσα τὴν οἰκίαν ὥσπερ αἱ μαινάδες ἐφέρετο πρὸς τὰς πύλας οὐδὲν ἐπιστρεφομένη τῆς ἀνακαλούσης τε καὶ μεταδιωκούσης τροφοῦ.

II. ξω δὲ γενομένη τῆς πόλεως ὡς τὸν ἀδελφὸν εἶδε περιχαρῆ τοὺς ἐπινικίους ἐπικείμενον στεφάνους, οἷς αὐτὸν ὁ βασιλεὺς ἀνέδησε, καὶ τοὺς ἑταίρους αὐτοῦ φέροντας τὰ τῶν πεφονευμένων σκῦλα, ἐν οἷς ἦν πέπλος ποικίλος, ὃν αὐτὴ μετὰ τῆς μητρὸς ἐξυφήνασα τῷ μνηστῆρι δῶρον εἰς τὸν μέλλοντα γάμον ἀπεστάλκει (ποικίλους γὰρ ἔθος ἐστὶν ἀμφιέννυσθαι πέπλους Λατίνων τοῖς μετιοῦσι τὰς νύμφας), τοῦτον δὴ τὸν πέπλον θεασαμένη πεφυρμένον αἵματι τόν τε χιτῶνα κατερρήξατο καὶ ταῖς χερσὶν ἀμφοτέραις παίουσα τὸ στῆθος ἐθρήνει καὶ ἀνεκαλεῖτο τὸν ἀνεψιόν, ὥστε πολλὴν κατάπληξιν εἰσελθεῖν ἅπαντας ὅσοι κατὰ τὸν αὐτὸν ἦσαν τόπον.

IIIνακλαυσαμένη δὲ τὸν μόρον τοῦ μνηστῆρος ἀτενέσι τοῖς ὀφθαλμοῖς εἰς τὸν ἀδελφὸν ὁρᾷ καὶ λέγει·

« Μιαρώτατε ἄνθρωπε, χαίρεις ἀποκτείνας τοὺς ἀνεψιοὺς κἀμὲ τὴν παναθλίαν ἀδελφὴν ἀποστερήσας γάμου, ὦ δύστηνε! ἀλλ´ οὐδ´ ἔλεος εἰσέρχεταί σε τῶν ἀπολωλότων συγγενῶν, οὓς ἀδελφοὺς ἐκάλεις, ἀλλ´ ὥσπερ ἀγαθόν τι διαπεπραγμένος ἐξέστηκας τῶν φρενῶν ὑπὸ τῆς ἡδονῆς καὶ στεφάνους ἐπὶ τοῖς τοιούτοις ἐπίκεισαι κακοῖς τίνος ἔχων ψυχὴν θηρίου; »

κἀκεῖνος ὑπολαβών,

IV. « Φιλοῦντος, ἔφη, τὴν πατρίδα πολίτου καὶ τοὺς κακῶς αὐτῇ βουλομένους κολάζοντος, ἐάν τε ἀλλότριοι τύχωσιν αὐτῆς ὄντες, ἐάν τε οἰκεῖοι· ἐν οἷς τίθεμαι καὶ σέ, ἥτις ἑνὶ καιρῷ τὰ μέγιστα ἀγαθῶν τε καὶ κακῶν συμβεβηκότα ἡμῖν ἐπιγνοῦσα τήν τε νίκην τῆς πατρίδος, ἣν ὁ σὸς ἀδελφὸς ἐγὼ πάρειμι κατάγων, καὶ τὸν θάνατον τῶν ἀδελφῶν οὐκ ἐπὶ τοῖς ἀγαθοῖς, ὦ μιαρὰ σύ, τοῖς κοινοῖς τῆς πατρίδος χαίρεις οὔτ´ ἐπὶ ταῖς συμφοραῖς ταῖς ἰδίαις τῆς οἰκίας ἀλγεῖς, ἀλλ´ ὑπεριδοῦσα τῶν σεαυτῆς ἀδελφῶν τὸν τοῦ μνηστῆρος ἀνακλαίεις μόρον, οὐδ´ ὑπὸ τοῦ σκότους ἀποφθαρεῖσά που κατὰ μόνας, ἀλλ´ ἐν τοῖς ἁπάντων ὀφθαλμοῖς, καί μοι τὴν ἀρετὴν καὶ τοὺς στεφάνους ὀνειδίζεις, ὦ ψευδοπάρθενε καὶ μισάδελφε καὶ ἀναξία τῶν προγόνων. πειδὴ τοίνυν οὐ τοὺς ἀδελφοὺς πενθεῖς, ἀλλὰ τοὺς ἀνεψιούς, καὶ τὸ μὲν σῶμα ἐν τοῖς ζῶσιν ἔχεις, τὴν δὲ ψυχὴν παρὰ τῷ νεκρῷ, ἄπιθι πρὸς ἐκεῖνον ὃν ἀνακαλῇ καὶ μήτε τὸν πατέρα μήτε τοὺς ἀδελφοὺς καταίσχυνε.  »

Ταῦτ´ εἰπὼν οὐκ ἐφύλαξεν ἐν τῷ μισοπονήρῳ τὸ μέτριον, ἀλλ´ ὡς εἶχεν ὀργῆς ὠθεῖ διὰ τῶν πλευρῶν αὐτῆς τὸ ξίφος, ἀποκτείνας δὲ τὴν ἀδελφὴν παρῆν ὡς τὸν πατέρα.

V. Οὕτω δὲ ἄρα μισοπόνηρα καὶ αὐθάδη τὰ τῶν τότε Ῥωμαίων ἤθη καὶ φρονήματα ἦν καί, εἴ τις αὐτὰ βούλοιτο παρὰ τὰ νῦν ἔργα καὶ τοὺς ἐφ´ ἡμῶν ἐξετάζειν βίους, ὠμὰ καὶ σκληρὰ καὶ τῆς θηριώδους οὐ πολὺ ἀπέχοντα φύσεως, ὥστε πάθος οὕτω δεινὸν ὁ πατὴρ ἀκούσας οὐχ ὅπως ἠγανάκτησεν, ἀλλὰ καλῶς καὶ προσηκόντως ὑπέλαβε τὸ πραχθὲν ἔχειν· ὅς γε οὔτε εἰς τὴν οἰκίαν εἴασεν εἰσενεχθῆναι τὸν νεκρὸν τῆς θυγατρὸς οὔτ´ ἐν τοῖς πατρῴοις τεθῆναι μνήμασιν ἐπέτρεψεν οὔτε κηδείας καὶ περιστολῆς καὶ τῶν ἄλλων νομίμων μεταλαβεῖν, ἀλλ´ οἱ παριόντες αὐτὴν ἐρριμμένην ἐν ᾧ διεχρήσθη χωρίῳ λίθους ἐπιφοροῦντες καὶ γῆν ἐκήδευσαν ὡς πτῶμα ἔρημον κηδομένων. Ταῦτά τε δὴ στερρὰ τοῦ ἀνδρὸς καὶ ἔτι πρὸς τούτοις, ἃ μέλλω λέγειν· ὡς γὰρ ἐπὶ καλοῖς τε καὶ εὐτυχέσιν ἔργοις αὐθημερὸν ἔθυε τοῖς πατρῴοις θεοῖς ἃς εὔξατο θυσίας καὶ τοὺς συγγενεῖς ἑστιάσει λαμπρᾷ τε καὶ *καθάπερ ἐν ταῖς μεγίσταις ἑορταῖς ὑπεδέχετο ἐλάττους ἡγούμενος τὰς ἰδίας συμφορὰς τῶν κοινῶν τῆς πατρίδος ἀγαθῶν. Τοῦτο δ´ οὐ μόνον ὁ Ὁράτιος, ἀλλὰ καὶ μετ´ ἐκεῖνον ἄλλοι συχνοὶ Ῥωμαίων μνημονεύονται ποιήσαντες ἄνδρες ἐπιφανεῖς· λέγω δὲ τὸ θύειν καὶ στεφανηφορεῖν καὶ θριάμβους κατάγειν τέκνων αὐτοῖς ἀπολωλότων ἔναγχος, ὅταν εὐτυχήσῃ δι´ αὐτοὺς τὸ κοινόν· ὑπὲρ ὧν κατὰ τοὺς οἰκείους ἐρῶ καιρούς.

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I. HORACE était à peine arrivé aux portes de Rome , lorsque parmi une foule de peuple de toutes les conditions , qui était sorti de la ville , il rencontra sa sœur qui accourait au devant de lui. D'abord il est surpris de la voir ; il ne comprend pas comment cette fille en âge d'être mariée , a pu quitter la maison et sortir d'auprès de sa mère pour se mêler parmi une multitude inconnue. Mais après plusieurs soupçons sinistres , il se forme enfin une idée plus avantageuse de sa sagesse. Il crut que par une envie et une curiosité de fille , passant par dessus les règles de la bienséance, elle était venue pour faire à son frère, qui restait en vie , les premiers compliments sur sa victoire , et pour savoir de lui avec quel courage avaient combattu ses autres frères qui étaient morts dans l'action. Mais il se trompait sort ; ce n'était point par amitié pour ses frères qu'elle s'était enhardie à sortir ainsi contre sa coutume ; son véritable motif était l'amour qu'elle avait pour un de ses cousins auquel son père l'avait promise en mariage. Ayant tenu jusqu'alors cet amour caché , dès qu'un soldat lui eut appris des nouvelles du combat, il lui fut impossible de se retenir plus longtemps ; elle quitte brusquement la maison ; elle court aux portes comme une Bacchante sans regarder derrière elle et sans écouter la voix de sa nourrice qui la suit pour la rappeler.

II. A peine est-elle sortie de la ville qu'elle rencontre son frère. Elle le voit orné des couronnes dont le roi lui avait fait présent pour marques de sa victoire : la joie reluit sur son visage;  ses compagnons marchent devant lui ; ils portent les dépouilles des Curaces qui ont été tués dans le combat. Parmi ces dépouilles elle aperçoit une tunique de différentes couleurs qu'elle avait travaillée elle-même avec sa mère, et dont elle avait fait présent à son amant pour ses noces futures. Car c'était la coutume chez les Latins que ceux qui recherchaient une fille pour l'épouser, fussent revêtus d'un habit de différentes couleurs. Dès qu'elle voit cette tunique teinte de sang, elle déchire ses habits ; elle se frappe la poitrine de ses deux mains ; elle appelle son cousin ; l'air retentit de ses gémissements, et elle fait paraître tant de désespoir , que tous ceux qui l'entendent en sont épouvantés.

III. APRES avoir pleuré la mort de celui qu'elle aimait, elle regarde son frère avec des yeux fixes et immobiles ; elle s'écrie comme une furieuse :

« Ô le plus scélérat de tous les  hommes ! méchant ! te voila bien joyeux d'avoir tué tes cousins et d'avoir ravi à ta pauvre sœur celui qui la devait épouser. Tu n'es point touché de la mort de tes cousins que tu appelais autrefois tes frères. Transporté de joie comme si tu  avais fait quelque belle action , tu as même l'effronterie de  porter des couronnes sans te soucier du malheur des autres. Ah cruel ! de quelle bête farouche as-tu donc emprunté le cœur? »

IV. « JE n'ai point le cœur d'une bête féroce, lui répondit  Horace, mais celui d'un bon citoyen qui aime sa patrie et qui  punit ceux qui lui veulent du mal, sans le mettre en peine s'ils lui sont étrangers ou parents. Je te mets toi-même de ce nombre. Tu sais qu'il nous est arrivé aujourd'hui le plus grand bonheur que nous puissions souhaiter, et en même temps le plus funeste de tous les malheurs ; je veux dire la victoire que ta patrie a remportée par mes mains , et la mort de tes deux autres frères. Cependant, scélérate que tu es, tu ne prends aucune part ni à la joie publique de ta patrie, ni aux malheurs de notre maison ; tu oublies la mort de tes frères pour ne pleurer que celui qui devait être ton époux. Encore si tu te cachais pour cela. Mais non ! tu le fais aux yeux de tout le monde ; tu oses même me reprocher ma valeur et les couronnes que je porte. Malheureuse fille ! Que dis-je.! Tu ne mérites pas de porter ce nom, puisque tu es l'ennemie de tes frères et que tu te rends indigne de nos ancêtres. Mais puisque tu es plus sensible à la mort de tes cousins qu'à celle de tes frères ; puisque ton corps est parmi les vivants, et que ton âme est attachée et unie à un mort : va trouver celui que tu appelles, et cesse de déshonorer ton père et tes frères. »

 En disant ces paroles, il ne peut garder de mesures dans sa haine , ni modérer les transports de sa colère. Outré de l'indignité de sa sœur, il lui plonge son épée dans le côté ,et après l'avoir tuée il va trouver son père.

V. Dans ces premiers temps, les Romains avaient une telle horreur du mal, leurs mœurs étaient si sévères, si rigides, si cruelles, on peut même dire si farouches en les comparant avec nos manières et avec les mœurs de ce siècle, que le père apprenant ce qui était arrivé à sa fille, loin de s'en mettre en colère, trouva que c'était bien fait, et que son fils en avait agi comme un bon citoyen. Il ne permit pas même qu'on apportât chez lui le corps de sa fille ; qu'on l'enterrât dans le tombeau de ses pères ; qu'on lui fît des funérailles avec les ornements accoutumés, ni qu'on lui rendît les derniers devoirs. Son corps demeura étendu à la même place où elle avait été tuée , et ceux qui passaient par le chemin le couvrirent de pierres et de terre comme un cadavre abandonné de tout le monde. De là on peut juger combien ce père était dur et. inflexible. Mais ce que je vais dire le prouve encore davantage. Moins sensible à ses malheurs domestiques qu'au bonheur qui était arrivé à sa patrie, ce jour là même il offrit des sacrifices aux dieux de ses pères en action de grâces de l'heureux succès du combat, et donna à toute sa famille un superbe repas, comme dans les plus grandes fêtes. Au reste il n'est pas le seul qui en ait agi ainsi, l'histoire nous apprend que plusieurs illustres Romains ont fait la même chose après lui, qu'ils ont immolé des victimes, porté des couronnes, et célébré un triomphe peu de jours après la mort de leurs enfants lorsqu'ils avaient contribué au bien et à la prospérité de la république. Mais nous parlerons de cela quand il en sera temps.

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