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DION CASSIUS

TOME PREMIER

FRAGMENTS DES LIVRES I - XXXVI 

FRAGMENTS DU LIVRE VII

Guerre contre les Gaulois. Le Capitole assiégé. Marcus Capitolinus essaye de prendre le pouvoir: il est contrecarré et tué. Dictature de Camille pour plusieurs mandats. L'histoire du Lacus Curtius. Guerre contre les Latins. Rudesse de Manlius Torquatus.

texte grec seul

livre VI - livre VIII

 

LVI. Causes de l'expédition des Gaulois en Italie

An de Rome 364

LVI. Voici à quelle occasion eut lieu l’expédition des Gaulois : les Clusiens, qui avaient souffert de leur part tous les maux de la guerre, s’adressèrent aux Romains dans l’espoir d’en obtenir quelques secours, parce qu’ils n’avaient pas embrassé le parti des Véiens malgré leur communauté d’origine. Les Romains ne leur en accordèrent point, mais ils envoyèrent des députés aux Gaulois, pour traiter de la paix en faveur des Clusiens : la contestation ne portait que sur une petite portion du territoire, et la paix fut bien près de se conclure.Mais les Clusiens passèrent des négociations à un combat, où ils eurent pour auxiliaires les ambassadeurs romains. Les Gaulois, indignés de les trouver dans les rangs ennemis, commencèrent par envoyer, à leur tour, des députés aux Romains pour se plaindre : ceux-ci, loin de punir leurs ambassadeurs, les nommèrent tous tribuns militaires. Alors le courroux des Gaulois, d’ailleurs très prompts à s’emporter, fut à son comble : ils ne s’occupèrent plus des Clusiens et coururent droit à Rome. 

LVII. Les Romains sont battus par les Gaulois

LVII. Les soldats romains, envoyés à la rencontre des Gaulois, n’eurent pas le temps de respirer : le même jour, après une marche forcée, ils engagèrent immédiatement le combat et furent battus. L’attaque inattendue des barbares, leur grand nombre, leur corpulence gigantesque, leur voix dont les sons étrangers inspiraient l’effroi, frappèrent les Romains d’épouvante : ils oublièrent les règles de la tactique militaire et perdirent ainsi toute leur bravoure. La connaissance de la tactique, par la fermeté qu’elle donne, contribue puissament au courage de ceux qui l’ont acquise, mais fait-elle défaut, leur coeur faiblit bien plus facilement que si elle leur avait toujours manqué. Sans elle, une fougue impétueuse emporte souvent le succès, tandis que ceux qui s’écartent de ses lois, après les avoir étudiées, perdent jusqu’à leur énergie naturelle : telle fut la cause de la défaite des Romains.  

LVIII. Piété de Fabius Cæson

LVIII. Les Romains, renfermés et assiégés dans le Capitole, n’avaient d’espoir de salut que dans les dieux. Ils se montrèrent si fidèles à leur culte, même dans ce danger extrême, que les pontifes ayant eu à célébrer un sacrifice dans un lieu déterminé de Rome, Fabius Caeson appelé à remplir cet office pieux descendit du Capitole dans la ville, revêtu de ses ornements, comme dans les temps ordinaires. Il traversa l’armée ennemie, fit le sacrifice, et rentra, le même jour dans le Capitole.J’admire les barbares, qui, par respect pour les dieux ou par déférence pour la vertu de Caeson, épargnèrent ses jours ; mais j’admire bien davantage Caeson lui-même pour deux motifs : il osa s’avancer seul au milieu des ennemis, et loin de chercher comme il l’aurait pu, une retraite sûre, il aima mieux rentrer dans le Capitole et s’exposer volontairement à un danger manifeste. Cependant il savait que les Romains n’oseraient pas abandonner la sule place qui leur restait sur le sol de la patrie, et il ne pouvait se dissimuler que s’ils voulaient fuir, ils trouveraient un obstacle dans le grand nombre des assiégeants.

LIX. Camille, exilé, refuse le commandement

LIX. Pressé de prendre en main le commandement de l’armée, Camille refusa. Exilé, il ne pouvait l’accepter en respectant les lois qu’il observa toujours avec une religieuse fidélité. Aussi, dominé par le sentiment du devoir, au moment même où sa patrie courait un si grand danger, regarda-t-il comme indigne de lui de laisser à la postérité un exemple de leur violation.

LX. Le Capitole est sauvé par les oies sacrées

LX. Rome était au pouvoir des Gaulois, et ses habitants avaient cherché un asile dans le Capitole. Camille, alors en exil, leur écrivit qu’il était prêt à attaquer les barbares. L’émissaire, chargé de la lettre, pénétra dans la forteresse ; mais les Gaulois avaient pbservé la trace de ses pas, et ils se seraient propablement emparés du Capitole, si les oies sacrées qu’on y nourrissait n’avaient annoncé leur irruption par des cris. Elles arrachèrent au sommeil les Romains renfermés dans la citadelle et les firent courir aux armes.

LXI. Oracle de la Sibylle sur le Capitole

LXI. D’après un oracle de la Sibylle, le Capitole devait être la capitale de l’univers jusqu’à la fin du monde.

LXII. Februarius accuse Camille

LXII. Februarius, par jalousie contre Camille, l’accusa d’aspirer à la tyrannie. Le héros fur banni : plus tard rappelé dans sa patrie qu’il avait secourue durant son exil, au moment où elle était assiégée par les Gaulois, il poursuivit Februarius, qui fut condamné à son tour. Camille rendit le mois auquel Februarius a donné son nom plus court que les autres.

LXIII. Condamnation de Manlius Capitolinus

An de Rome 371

LXIII. Le peuple condamna M. Capitolinus : sa maison fut rasée et son patrimoine vendu aux enchères ; son nom et ses images furent effacés et détruits partout où ils se trouvaient. De nos jours, les mêmes peines, sauf la destruction des maisons, sont infligées à ceux qui conspirent contre l’Etat. On décréta aussi qu’aucun patricien n’aurait sa demeure au Capitole où il avait habité, et les membres de sa famille décidèrent que nul d’entre eux ne prendrait le prénom de Marcus que Capitolinus avait porté.
Pour s’être montré si différent de lui-même dans sa conduite, il vit sa fortune subir le plus grand changement. Guerrier accompli mais incapable de se modérer en temps de paix, il s’empara, pour établir la tyrannie, du Capitole qu’il avait sauvé. Patricien, il périt par la main d’un mercenaire ; réputé grand capitaine, il fut arrâté comme un esclave et précipité du rocher d’où il avait renversé les Gaulois.

LXIV. Manlius Capitolinus est précipité de la roche Tarpéienne

LXIV. Les Romains précipitèrent M. Capitolinus de la roche tarpéienne. Ainsi presque jamais rien n’est stable dans les choses humaines, et les événements heureux enfantent souvent des revers qui les égalent : ils font naître dans le coeur de l’homme l’espoir de succès semblables, et ils y allument incessamment de plus grands désirs ; jusqu’à ce que, jouet de mille illusions, il tombe enfin dans les malheurs les plus opposés à ses prévisions.

LXV. Habile conduite des habitants de Tusculum

An de Rome 374

LXV. Camille conduisit son armée contre les habitants de Tusculum ; mais ils détournèrent le danger par une ruse digne d’être citée : comme s’il n’avaient rien eu à se reprocher, comme si les Romains n’étaient animés d’aucun ressentiment et venaient en amis chez des amis, où ne faisaient que traverser le territoire de Tusculum pour marcher contre un autre peuple, ils ne changèrent rien à leurs habitudes et ne montrèrent aucune inquiétude. Ils vaquèrent aux travaux manuels et à leurs autres occupations ordinaires, comme en pleine paix : ils ouvrirent la ville aux Romains, leur donnèrent l’hospitalité et les traitèrent en amis. Ceux-ci, à leur tour, loin de leur faire aucun mal, leur accordèrent bientôt les droits de citoyens romains.

LXVI. Changements politiques, amenés par la belle-soeur du tribun Rufus

An de Rome 378

LXVI. Le tribun Rufus s’occupait des affaires publiques dans le forum, lorsque sa femme reçut la visite de sa propre soeur. Il ne tarda pas à rentrer chez lui : le licteur, suivant un ancien usage, frappa de sa verge à la porte de la maison. A ce bruit, la belle-soeur de Rufus, qui n’avait jamais entendu rien de pareil, se trouble et s’étonne : sa soeur et toutes les personnes présentes rient aux éclats : on la tourne en ridicule, parce qu’unie à un homme qui n’a jamais été revêtu d’aucune dignité, elle ignore les prérogatives des magistrats. Ce fut pour elle un sanglant affront, et il n’en pouvait être autrement d’après la petitesse d’esprit naturelle aux femmes. Son ressentiment ne s’apaisa que lorsqu’elle eût rempli la ville de trouble : ainsi les incidents les plus légers et les plus vulgaires deviennent l’occasion de grands malheurs, quand ils sont exploités par des esprits envieux et jaloux.

LXVII. Altération de la constitution romaine

An de Rome 379 et suiv.

LXVII. Dans le malheur, l’espérance de salut est toute puissante pour faire croire à ce qu’il y a de plus invraisemblable.Les séditions altéraient incessamment la constitution de l’Etat : les plébéiens obtenaient alors, sinon sans tumulte, du moins sans trop de peine, les concessions pour lesquelles ils soutenaient auparavant les guerres les plus terribles.

LXVIII. Troubles excités par L. Stolon

An de Rome 396

LXVIII. Les Romains étaient agités par de violentes séditions : Publius parvint presque à les calmer, en choisissant pour maître de la cavalerie le plébéien Licinius Stolon. Cette innovation indisposa les patriciens ; mais elle plut tant aux plébéiens qu’il ne briguèrent point le consulat, l’année suivante, et consentirent à l’élection des tribuns militaires. Dès lors, les deux partis se seraient peut-être réconciliés par quelques concessions réciproques, si le tribun Stolon n’eût dit aux plébéiens qu’ils n’auraient pas à boire, s’ils ne commençaient par manger. Par ces paroles, il leur persuada de ne rien céder et d’exiger, comme nécessaire, tout ce qu’ils avaient tenté d’obtenir.

LXIX. Dévouement de Curtius

An de Rome 393

LXIX. Un tremblement de terre avait eu lieu à Rome et le sol s’était entr’ouvert dans le forum : un oracle de la sibylle déclara que l’abîme se comblerait, dès qu’on y aurait jeté ce qu’il y a de plus précieux parmi les hommes. Plusieurs s’empressèrent d’y porter divers objets d’une grande valeur ; mais le gouffre ne se ferma pas. Curtius, patricien d’origine, à la fleur de l’âge, d’une beauté parfaite, d’une force extraordinaire, d’une âme énergique et d’une raison supérieure, comprit les paroles de l’oracle, et, s’avançant au milieu de ses concitoyens : "Pourquoi, dit-il, Romains, accuser l’obscurité de l’oracle plutôt que notre ignorance ? Cet objet que nous cherchons et qui nous cause une grande perplexité, c’est nous-mêmes : rien d’inanimé ne doit être préféré à ce qui est animé ; rien de ce qui est dépourvu d’intelligence, de raison et de sens ne peut être mis au-dessus de ce qui est doué d’intelligence, de sens et de raison. Que choisir plutôt qu’un homme, pour le jeter dans les flancs entr’ouverts de la terre et combler cet abîme ? Parmi les êtres sujets à la mort, il n’en est pas de meilleur, ni de plus fort. Ne voyez-vous pas qu’ils ont tous la tête et les regards baissés vers la terre, ne s’occupant que de leur nourriture et des plaisirs sensuels, seuls objets que la nature leur ait assignés en partage ? Seuls nous élevons les yeux vers les régions supérieures, seuls nous avons commerce avec le ciel, et méprisant les choses les choses de la terre, nous habitons avec les dieux. Nous leur ressemblons, nous sommes leurs rejetons et leur ouvrage ; non pas un ouvrage d’argile, mais un ouvrage divin : voilà pourquoi la peinture et la plastique leur donnent la forme humaine. S’il faut dire hardiment toute ma pensée, l’homme n’est qu’un dieu dans un corps mortel : dieu n’est qu’un homme incorporel, et par cela même immortel. C’est là ce qui fait notre supériorité sur les animaux : parmi ceux qui foulent la terre, il n’en est pas qui, devancé par notre agilité à la course, dompté par notre force ou pris dans nos pièges, ne deviennent notre esclave. Il en est de même de ceux qui vivent dans les eaux ou qui volent dans les airs : nous allons saisir les uns au fond des abîmes, même sans les voir ; nous faisons descendre les autres des régions éthérées, où nous ne pouvons les suivre : nous touchons de près à la puissance divine. Tel est mon sentiment : vous le partagez tous, je pense. Et qu’on ne s’imagine pas que je consulterai le sort, que je demanderai la mort d’une jeune fille ou d’un jeune Romain. Je me livre volontiers à vous : aujourd’hui même et sur-le-champ : envoyez-moi comme un héraut, un ambassadeur chez les dieux infernaux, pour être sans cesse votre défenseur et votre allié." A ces mots Curtius revêt ses armes, s’élance sur son cheval de bataille, et, sans montrer la moindre émotion dans ses traits, il se précipite au fond de l’abîme. Au même instant, la terre se referme, et Curtius obtient les honneurs réservés aux héros.

LXX. Manlius obtient le surnom de Torquatus

An de Rome 394

LXX. Manlius combattit seul contre le roi des Gaulois, l’étendit mort à ses pieds et le dépouilla. Il lui enleva le collier dont ces barbares se parent, suivant la coutume de leur pays, et le suspendit à son cou. A cette occasion il fut surnommé par ses concitoyens Torquatus, c’est-à-dire porteur de collier, et lègue ce surnom à ses descendants comme souvenir de cet exploit.

LXXI. Fait relatif à un personnage incertain

LXXI. Dion dit : par ce motif, quoique je ne fasse pas ordinairement usage de digression ; j’ai parlé de lui en indiquant l’olympiade : l’époque de son arrivée en Italie, généralement peu connue, deviendra ainsi plus certaine.  

LXXII. Députation des habitants d'Agylla

An de Rome 401

LXXII. A la nouvelle que les Romains se disposaient à leur faire la guerre, les habitants d’Agylla envoyèrent des députés à Rome, avant quelle fût déclarée : ils obtinrent la paix en cédant la moitié de leur territoire.

LXXIII. Valérius obtient le surnom de Corvinus

An de Rome 405.

LXXIII. Valérius était près de combattre contre un chef des Gaulois, lorsqu’un corbeau vient se poser sur son bras droit, le bec tourné contre le barbare. Il lui déchira le visage avec ses serres, et, lui couvrant les yeux avec ses ailes, il le livra sans défense à Valérius qui fut surnommé Corvinus. Corvus a la même signification que Korax.

LXXIV. Exigences des Latins; leur but

An de Rome 415.

LXXIV. Les Latins mettaient en avant ces exigences et d’autres semblables, sans espoir de les voir satisfaites car ils connaissaient mieux que personne l’orgueil des Romains ; mais afin de trouver dans leur refus un prétexte de se plaindre, comme s’ils avaient reçu une injustice.

LXXV. Le jeune Manlius est mis à mort, pour avoir désobéi à son père

LXXV. Le fils du consul Manlius, dans un combat singulier contre le latin Pontius, terrassa son adversaire. Son père lui décerna une couronne pour prix de sa victoire ; mais il lui trancha la tête d’un coup de hache, pour avoir transgressé ses ordres. Cet acte de cruauté rendit les Romains tout à fait soumis à leurs chefs.

LXXVI. Caractère de Manlius Torquatus

LXXVI. Il était évident pour tout le monde qu’ils avaient attendu l’issue du combat, afin d’embrasser le parti du vainqueur. Cependant Torquatus ne leur fit aucun reproche : il craignait qu’à la faveur de la guerre du Latium, ces peuples ne tentassent un nouveau coup de main. Il n’était pas toujours inflexible, et ne se montrait pas dans toutes les occasions tel qu’il avait été à l’égard de son fils. Bien au contraire, chacun vantait sa prudence dans les conseils et sa bravoure sur le champ de bataille. Aussi ses concitoyens et ses ennemis disaient-ils également qu’il tenait dans sa main la fortune des combats, et que s’il avait été à la tête des Latins, il leur aurait donné la victoire.

LXXVII-LXXVIII. Dévouement de Décius

LXXVII. Doris, Diodore et Dion racontent qu’à l’époque où les Samnites, les Toscans et d’autres peuples faisaient la guerre aux Romains, le consul Décius, qui commandait l’armée avec Torquatus, se dévoua spontanément à la mort : cent mille ennemis furent massacrés le même jour.

LXXVIII. [Pendant la guerre entre les Romains et les Latins, un devin annonça que les premiers remporteraient la victoire, si l’un des deux consuls se vouait aux dieux infernaux. Aussitôt Décius, dépouillant l’appareil militaire, prend le vêtement sacré, se précipite dans les rangs les plus épais des ennemis et périt frappé de mille traits : le combat eut une heureuse issu pour les Romains.]
J’admire une si belle action ; mais comment la mort de Décius rétablit-elle la fortune de leurs armes ; comment triompha-t-elle des vainqueurs et donna-t-elle la victoire aux vaincus ? Je ne saurais le comprendre. Quand je passe en revue de tels exploits (et plusieurs historiens, nous le savons, en ont déjà recueilli un grand nombre), je ne puis refuser d’y croire ; mais lorsque j’en examine les causes, je tombe dans une grande perplexité. Comment admettre, en effet, que par un changement subit la mort volontaire d’un seul pût sauver tant d’hommes et leur assurer la victoire ? Je laisse à d’autres le soin de rechercher par quel moyen de tels événements ont pu s’accomplir.

LXXIX. M. Torquatus refuse un nouveau consulat

LXXIX. Les Romains avaient pour M. Torquatus, à cause de sa dureté envers son fils, une haine si violente qu’ils donnaient son nom aux actes les plus inhumains : elle s’accrut encore, quand il eut célébré son triomphe, malgré la mort de ce fils et de son collègue. Cependant, pressés par une nouvelle guerre, ils n’hésitèrent pas à lui décerner un quatrième consulat ; mais il ne l’accepta pas, et, accompagnant son refus d’un serment : "Je ne pourrais, dit-il, vous supporter, et vous ne pourriez me supporter vous-mêmes.

LXXX. Droit de bourgeoisie accordé aux Latins

An de Rome 416.

LXXX. Les Romains, après s’être réconciliés avec les Latins, leur donnèrent le droit de bourgeoisie et tous les privilèges dont jouissaient les citoyens. Ce qu’ils avaient dénié en bravant les plus grands dangers, quand on les menaçait de la guerre, ils l’accordèrent de bon gré après la victoire ; aux uns pour prix de leur alliance, aux autres parce qu’ils n’avaient tenté aucune nouvelle attaque.

LXXXI. Noble réponse des habitants de Priverne au consul romain

An de Rome 426.

LXXXI. Les Romains délibérant sur le sort des Privernates, leur demandèrent comment ils croyaient devoir être traités, après la conduite qu’ils avaient tenue. Les Privernates répondirent avec fierté : en hommes qui sont libres et veulent rester libres. Le consul leur ayant demandé ensuite : "Que ferez-vous, si vous obtenez la paix ?" - "Nous nous tiendrons tranquilles, dirent-ils, si les conditions sont modérées : si elles sont intolérables, nous ferons la guerre." Pleins d’admiration pour tant de courage, les Romains ne se bornèrent pas à les traiter beaucoup mieux que les autres peuples,...

 

FIN DES FRAGMENTS DU LIVRE VII

ÉCLAIRCISSEMENTS.

LVI. Les Clusiens - malgré leur communauté d'origine (p. 109-111). Tite-Live, V, 35 : Clusini, novo bello exterriti, quum multitudinem, quum formas hominum inusitatas cernerent et genus armorum, audirentque saepe ab iis, cis Padum ultraque, legiones Etruscorum fusas, quamquam adversus Romanos nullum eis jus societatis amicitiaeve erat, nisi quod Veïentes consanguineos adversus populum Romanum non defendissent, legatos Romani, qui auxilium a senatu peterent, misere. Cf. Plutarque, l.l. XVII.

Les Romains ne leur en accordèrent point (p. 111). Le méme, l. l. De auxilio nihil impetratum.

Des députés (Ibid.). Tite-Live en précise le nombre, l. l.: Legati tres M. Fabii Ambusti filii missi. Plutarque, de mème, I. I.: Ἐπέμφθησαν δὲ τοῦ Φαβίων γένους τρεῖς ἄνδρες ἐνδόκιμοι καὶ τιμὰς μεγάλας ἔχοντες ἐν τῇ πόλει. 

Une petite portion du territoire (p. 111). Tite-Live, V, 36 : Ne se quidem pacem quam illi afferant aspernari, si Gallis egentibus agro quem latius possideant quam colant, Clusini partem finium concedant : aliter pacem impetrari non posse.

La paix, fut bien près de se conclure (Ibid.). Pour les détails de la négociation, cf. Tite-Live, l.l. 36, et Plutarque, Camill. l.l.

Ils eurent pour auxiliaires les ambassadeurs romains (Ibid.). Tite-Live, l. l.: Accensis utrimque animis ad arma discurritur, et proelium conseritur. Ibi, jam urgentibus romanam urbem fatis, legati contra jus gentium arma capiunt; nec id clam esse potuit, quum ante signa Etruscorum tres nobilissimi fortissimique romanae juventutis pugnarent. Cf. Plutarque, l. l.

Très prompts à s'emporter (Ibid.). De même, Fr. CLXIV, p. 264 de cette édition : Πρόχειροι δὲ ὑπὸ θυμοῦ πᾶν ὃ ἂν ἐγχειρώσωνται ἐπεξελθεῖν ὄντες.

Les nommèrent tous tribuns militaires (Ibid.). Cf. Tite-Live, l. l. et Plutarque, Camill. XVIII.

Et coururent droit à Rome (Ibid.) Tite-Live, l. l. 37 : Interim Galli, postquam accepere ultro honorem habitum violatoribus juris humani elusamque legationem suam esse, flagrantes ira, cujus impotens est gens, confestim signis convulsis, citato agmine iter ingrediuntur... Romam se ire magno clamore significabant. Plutarque, l. l. : Ἐβόων ἐπὶ τὴν Ῥώμην πορεύεσθαι, καὶ μόνοις πολεμεῖν Ῥωμαίοις, τοὺς δ' ἄλλους φίλους ἐπίστασθαι.

LVII. Et furent battus (p. 113.)  Voir Plutarque, l. l. Ἐξῆγον οἱ χιλίαρχοι τοὺς ωμαίους ἐπὶ τὸν ἀγῶνα, πλήθει μὲν οὐκ ἐνδεεῖς (ἐγίνοντο γὰρ ὁπλῖται τετραλισμυρίων οὐκ ἐλάσσους), ἀνασκήτους δὲ τοὺς πολλοὺς, καὶ τότε πρῶτον ἀπτομένους ὅπλων... Προελθόντες οὖν ἀπὸ τῆς πόλρως σταδίους ἐννενήκοντα, παρὰ τὸν Ἀλίαν ποταμὸν ηὑλίσθησαν, οὐ πόρρω τοῦ στρατοπέδου τῷ Θύμβριδι συμφερόμενον. Ἐνταῦθα δε τῶν βαρβάρων ἐπιφανέντων, αἰσχρῶς ἀγωνισάμενος δι' ἀταξίαν, ἐτράποντο.  Καὶ τὸ μὲν ἀριστερὸν κέρας εὐθὺς ἐμβαλόντες εἰς τὸν ποταμὸν οἱ Κελτοὶ διέφθειραν· τὸ δὲ δεξιὸν, ὑπεκκλῖναν τὴν ἐπιφορᾶν ἐκ τοῦ πεδίου πρὸς τοὺς λόφους, ἧττον ἐξεκόπη· καὶ διεξέπεσον ἀπὸ τούτων εἰς τὴν πόλιν οἱ πολλοί. Τοῖς δ'ἄλλοις, ὅσοι, τῶν πολεμίων ἀπειπόντων πρὸς τὸν φόνον, ἐσώθησαν, εἰς Βηίους αἱ φυγαὶ διὰ νυκτὸς ἦσαν κτλ. Cf. Tite-Live, l l. 38.

LVIII. A célébrer un sacrifice (p. 113). Tout ce récit est tiré de Tite-Live, V, 46 Sacrilicium erat statum in Quirinali colle genti Fabiae; ad id faciendum C. Fabius dorso, Gabino cinctu, sacra manibus gerens etc.
Deux passages expliqueront suffisamment ce qu'il faut entendre par Gabino cinctu. Le premier est de Servius, sur l'Rneid., VII, 612 : « Gabinus cinctus ex toga sic in tergum rejecta, ut ima ejus lacinia a tergo rejecta hominem cingat. » Le second d'Isidore, XIX, 24 : « Cinctus Gabinus dicitur, quum ita imponebatur toga, ut togae lacinia, quae post rejicitur attraheretur ad pectus, ita ut ex utrogne latere penderet.» Pour plus de détails, cf. Ferrar. De Re Vest. 14.

Par respect pour les dieux, etc. (p: 115). Tite-Live, I. I.: in Capitolium ad suos rediit, seu attonitis Gallis miraculo audaciae, seu religione etiam motis, cujus haudquaquam negligens est gens.

LIX. Camille refusa (Ibid.). Dion est d'accord avec Plutarque, ll. l. XXIV : Οὐκέτι γάρ ἐστι φυγάς, répétaient dans leur désespoir les Romains qui s'étaient réfugués à Véïes: οὐθ' ἡμεῖς πολῖται, πατρίδος οὐκ οὔσης, ἀλλὰ κρατουμένης ὑπὸ τῶν πολεμίων. Ταῦτ' ἔδοξε, καὶ πέμψσαντες ἐδέοντο τοῦ Καμῖλλου δέχεσθαι τὴν ἀρχήν. Ὁ δ' οὐκ ἔφη πρότερον, ἢ τοὺς ἐν τῷ Καπιτωλίῳ πολίτας ἐπιψηφίσασθαι κατὰ τὸν νόμον. Ἐκείνους γὰρ ἡγεῖσθαι πατρίδα σωζομένους... Τῆς μὲν οὖν εὐλαβείας καὶ καλοκαςγθίας τὸν Κάμιλλον ἐθαύμασαν.
Tite-Live est moins formel, l. l. 46 : Seu, quod magis credere libet, non prius profectum ab Ardea quam comperit legem latam ; quod nec injussu populi mutari finibus posset, nec, nisi dictator dictus, auspicia in exercitu habere. Cf. Denys d'ital. Fr. XIII, 7-8, éd. Milan.

En respectant les lois (Ibid.). Ce respect des lois était alors une vertu publique. Tite-Live, l. l.: Consensu omnium placuit, ab Ardea Camillum acciri, sed antea consulto senatu qui Romae esset; adeo regebat omnia pudor, discriminaque rerum prope perditis rebus servabant.

LX. L'émissaire (p.117). Pontius Cominius. Cf. Tite.Live, l. l., Plutarque, Camill., XXV-XXVI, et les passages cités dans les notes, p. 116 ; Denys d'Hal. Fr. l. l. 9

Elles arrachèrent au sommeil les Romains (Ibid.). Dans Tite-Live, l. l. 47, Manlius est éveillé le premier, et c'est lui qui appelle les Romains aux armes : Galli, seu vestigio notato humano, qua nuncius a Veiis pervenerat. - Anseres non fefellere, quibus sacris Junoni in summa inopia cibi tarnen abstinebatur; quæ res saluti fuit. Namque clangore eorum alarumque crepitu excitus M. Manlius, qui triennio ante consul fuerat, vir bello egregius, armis arreptis, simul ad arma ceteros ciens, vadit etc. Cf. Denys d'Hal. Fr. l. l. 10-11 ; Plutarq. Camill. XXVI.

LXIII. Le peuple condamna M. Capitolinus (p. 119). Cf. Denys d'Hal. Fr. XIV, 6, éd. Milan; Plutarque, Camill.. XXXVI; Tite-Live, VI, 20, Florus, I, 26, 8; S. Aur. Victor, De Vir illustr. 24, 5, éd. Arntzen; Valère Maxime, VI, 3, 1 ; Aulu-Gelle, XVII, 21, éd. Gronov., etc.

Sa maison fut rasée et son patrimoine vendu (Ibid.). Manlius fut donc traité comme Sp. Mélius; Tite-Live, IV, 15 : Nec satis esse sanguine ejus expiatum, nisi tecta parietesque, intra quae tantum amentiae conceptum esset, dissiparentur; bonaque, contacta pretiis regni mercandi, publicarentur; jubere itaque quaestores vendere ea bona, atque in publicum redigere. Le même, l. l. 16 : Domum deinde, ut monumento ares esset oppressae nefariae spei, dirai extempio jussit :id Aequimaelium, appellatum est. Cf. Valére Maxime, l. l.
A la place de la maison de Manlius, on éleva un temple en l'honneur de la déesse Monéta. Cf. p. 119, note 7; Tite-Live, VI, 20.

Sauf la destruction des maisons (Ibid.). Cette peine parait avoir été rarement infligée, même dans les temps anciens. Cicéron n'en cite que cinq exemples, Disc. pour sa Maison, XXXVIII : Sp. Maelii, regnum appetenlis, domus est complanata. Ecquid aliud ? aequum accidisse Maelio populus romanus judicavit; nomine ipso Aequimaelii, stultitia poena comprobata est. Sp. Cassii domus ob eamdem causam eversa; atque in eodem loco aedes posita Telluris. In Vacci pratis domus fuit M. Vacci, quae publicata est et eversa, ut illius facinus memoria et nomine loci notaretur. M. Manlius, quum ab adscensu Capitolii Gallorum impetum repulisset, non fuit contentus beneticii sui gloria; regnum appetisse est judicatus : ergo ejus domum eversam duobus lucis convestitam videtis... 
M. Flaccus, quia cum C. Graccho contra salutem reipublicae fecerat, et senatus sententia est interfectus, et ejus domus eversa et publicata est.

N'aurait sa demeure au Capitole (Ibid. et pag. 121). Cf. p. 119, lote 9, les passages de Tite-Live et de Plutarque.

Le prénom de Marcus (p. 121). S. Aur. Victor, l. l.: « Gentilitas ejus Manlii cognomen ejuravit, » où cognomen doit être remplacé par praenomen, comme le prouve Arntzen. Quant au fait en lui-même, Tite-Live, VI. 20, ne permet aucun doute : Gentis Manliae, decreto cautum est, ne quis deinde M. Manlius vocaretur.
A l'appui de cette résolution, Reimar en cite une semblable prise plus tard par la famille Claudia; Suétone, Tib. I : Patricia gens Claudia - quum praenominibus cognominibusque variis distingueretur, Lucii praenomen consensu repudiavit, postquam e duobus gentilibus, preeditis eo, alter latrocinii, caadis alter convictus est. Spanheim, De usu Num. Diss. X, p. 34, fournira d'autres exemples. Le même, l. l. p. 33, et Gronove soutiennent avec vraisemblance qu'il faut lire Manius et non pas Marcus dans Tite-Live, XLII, 49, et dans Tacite, Germanie , XXXVII, contre ceux qui voudraient conclure de ces passages que les Manlius reprirent plus tard le surnom de Marcus.

Précipité du rocher (p. 121). Tite-Live, VI, 20 : Tribuni de saxo Tarpeio dejecerunt; locusque idem in uno homme et eximiæ gloriae monumentum et poenae ultimæ fuit. Cf. Denys d'Hal. Fr. XIV, 6, éd. Milan.

LXV. Contre les habitants de Tusculum (Ibid.). Le sénat avait décrété la guerre aux Tusculans, pour les punir d'avoir combattu dans les rangs des Volsques. Camille fut chargé de cette expédition; Tite-Live, VI, 25. CI'. Plutarque, Camill. XXXVIII.

Ils détournèrent le danger (Ibid.). Dion reproduit Tite-Live, l. l. : Nec fuit cum Tusculanis bellum : pace constanti vim romanam arcuerunt, quam armis non poterant.

Ils ne changèrent rien - les traitèrent en amis (p.123). II faut lire Tite-Live,l. l., intrantibus fines Romanis non demigratum ex propinquis itineris locis - ut eo vix fama belli perlata videri posset; Plutarque, l. l., et les passages cités p. 122, notes 2 et 3.

Les droits de citoyens romains (Ibid.). Après une scène fort dramatique entre Camille, les Tusculans et le sénat romain, Tite-Live, arrive à la meme conclusion, l. l. 26 : Pacem in praesentia, nec ita multo post civitatem etiam impetraverunt. Cf. Denys d'Hal. Fr. XIV, 9, éd. Milan. 

LXVI. Le tribun Rufus (Ibid.). Tite-Live, l. l. 34 : M. Fabii Ambusti, potentis viri, quum inter sui corporis homines, tum etiam ad plebem, quod haudquaquam inter id genus contemtor ejus habebatur, filiae duae nuptae, Ser. Sulpicio major, minor C. Licinio Stoloni erat, illustri quidem, viro tarnen plebeio : eaque ipsa affinitas baud spreta gratiam Fabio ad vulgum quaesierat. Forte ita incidit... Le reste est raconté à peu prés comme dans Dion.

Ainsi les incidents les plus légers (p. 125). Le même, l. l.: Parva, ut plerumque solet, rem ingentem moliendi causa intervenit.

LXVIII. Publius (Ibid.). C'est-à-dire, Publius Manlius; Tite-Live, l. l. 39 : De foenore atque agro rogationes jubebant; de plebeio consalatu antiquabant; et perfecta utraque res esset, ni tribuni se in omnia simul consulere plebem dixissent. P. Manlius deinde dictator rem in causam plebis iuclinavit, etc. Cf. p. 125, note 7.

Qu'ils ne briguèrent point le consulat - et consentirent à l'élection des tribuns militaires (p. 127). Par une des lois qu'ils proposaient, C. Licinius et L. Sextius supprimaient les tribuns militaires et rétablissaient les consuls, à condition qu'il y en aurait un choisi parmi le peuple. De plus, aucune élection, hors celles des édiles et des tribuns du peuple ne put réussir. Licinius et Sextius, réélus tribuns, ne laissèrent créer aucun magistrat curule et repoussèrent l'élection des tribuns militaires : pendant cinq ans, la ville demeura dépossédée de ses magistrats; Tite-Live, l. l., 35. La concession de P. Manlius parut mettre lin à ce désordre.

LXIX. Divers objets d'une grande valeur (p. 129). Tite-Live, VII, 6 : Neque eam voraginem conjectu terrae, quum pro se quisque gereret, expleri potuisse prius, quam deum monitu quaeri coeptum quo plurimum populus romanus posset. Id enim illi loco dicandum vates canebant, si rempublicam romanam perpetuam esse vellent.

Curtius - les honneurs réservés aux héros (p. 129-133). Malgré son goût pour les harangues et l'amplification, Tite-Live est ici fort réservé et semble ne raconter le merveilleux dévouement de Curtius que pour se conformer à la tradition: Turn M. Curtium, juvenem bello egregium, castigasse ferunt dubitantes an ullum magis romanum bonum, quam arma virtusque, esset. Silentio facto, templa Deorum immortalium quae Foro imminent, Capitoliumque intuentem, et manus nunc in coelum, nunc in patentes terrae hiatus ad deos Manes porrigentem se devovisse : equo deinde, quam poterat maxime exornato, insidentem, armatum se in specum immisisse, donaque ac fruges super eum a multitudine virorum ac mulierum congestas, etc. Cr. Denys d'Hal. Fr. XIV, 20-21, éd. Milan.

LXX. Manlius combattit seul (p. 133 ). Dion avait probablement , comme Tite-Live, l. l. 10, emprunté ce récit au premier livre de Q. Claudius Quadrigarius. Aulu-Gelle, qui nous l'a conservé, IX, 13, raconte quelles vives émotions la narration du vieil Annaliste causait à Favorinus : « Q. Claudius primo Annalium purissime atque illustrissime, simplicique et incomta orationis antiquae suavitate deseripsit. Quem locum ex eo libro Favorinus philosophus quum legeret, non minoribus quati afficitque animuua suum motibus pulsibusque dicebat, quam si ipse coram depugnantes eos spectaret. »

L'étendit mort - comme un souvenir de cet exploit (Ibid.) Voici les passages les plus saillants du récit de Quadrigarius : « Quum interim Gallus quidam nudus, praeter scutum et gladios duos, torque atque armillis decoratus processit... Extemplo silentio facto cum voce maxima conclamat, si qui secum depugnare vellet, uti prodiret. Nemo audebat propter magnitudinem atque irmnauitatem faciei. Deinde Gallus irridere atque linguam exsertare. Id subito perdolitum est cuidam T. Manlio smnmo genere nato, tantum flagitinm civitati accidere, ex tanlo exercitu neminem prodire. Is, ut dico, processit, neque passus est virtutem romanam ab Gallo turpiter spoliari : scuto pedestri et gladio hispanico cinctus contra Gallum constitit. Metu magno ea congressio in ipso ponte, utroque exercitu inspectante, facta est. Ita, ut ante dixi, constiterunt : Gallus sua disciplina scuto projecto cantabundus : Manlius animo rnagis quarn arte confisus scutum scuto percussit atque statum Galli perturbavit. Dum se Gallus iterum eodem pacto constituere studet, Manlius iterum scutum scuto percutit, atque de loco hominem iterum dejecit : eo pacto ei sub gallicum gladium successit, atque hispanico pectus hausit. Dein continuo humerum dexterum eodem concessu incidit, neque recessit usquam donec subvertit, ne Gallus impetum icti haberet. Ubi eum evertit, caput praecidit : torquem detraxit, eamque sanguinolentam sibi in collurn imponit : quo ex facto ipse posterique ejus Torquati sunt cognorninati. »
M. Amédée Thierry pense, d'après Niebuhr, que ce récit fut forgé par la famille Manlia pour expliquer le surnom d'un de ses ancêtres, Hist. des Gaulois, Ire partie, ch. 3. Il est possible, en effet, que plusieurs circonstances aient été modifiées, quand ce récit tomba dans le domaine de la poésie populaire; mais il paraît difficile de ne pas admettre ici un fond historique. Quoi qu'il en soit, j'emprunte quelques détails à cet ingénieux écrivain « La tête du Gaulois tirant la langue jouit longtemps du privilége de divertir la populace romaine. Nous savons que, cent soixante-sept ans avant notre ère, elle figurait au-dessus d'une boutique de banquier, sur une enseigne circulaire appelée le bouclier du Kimri.
Marius ennoblit plus tard cette conception grotesque, en l'adoptant pour sa devise, après que, dans deux batailles célèbres, il eût anéanti deux nations entières de ces redoutables Kimris. »

LXXII. Les habitants d'Agylla (p. 135), c'est-à-dire les Cérites; Strabon, V, p. 152, éd. Casaub. 1587 : Ἄγυλλα γὰρ ὠνομάζετο τὸ πρότερον ἡ νῦν Καιρέα, καὶ λέγεται Πελασγῶν κτίσμα τῶν ἐκ Θετταλίας ἀφιγμένων· τῶν δὲ Λυδῶν, οἵπερ Τυρρηνοὶ μετωνομάσθησαν, ἐπιστρατευσάντων τοῖς Ἀγυλλαίοις, προσιὼν τῷ τείχει τις ἐπυνθάνετο τοὔνομα τῆς πόλεως, τῶν δ´ ἀπὸ τοῦ τείχους Θετταλῶν τινος ἀντὶ τοῦ ἀποκρίνασθαι προσαγορεύσαντος αὐτὸν « χαῖρε » , δεξάμενοι τὸν οἰωνὸν οἱ Τυρρηνοὶ τοῦτον ἁλοῦσαν τὴν πόλιν μετωνόμασαν. Cf. Cluvier, Italie Anc. II, 2, p. 490 et suiv.

Avant qu'elle fut déclarée (Ibid.). Dans Tite-Live, la déclaration de guerre précède l'envoi des députés à Rome, Vll, 19. Elle fut résolue, parce que les Cérites s'étaient unis aux Tarquiniens. Une lettre du consul Sulpicius, chargé de l'expédition contre Tarquinies , annonça que le territoire avait été ravagé près des salines romaines, et qu'une partie du butin avait été transportée sur les terres de Cérites. Dans ces circonstances, un nomma dictateur T. Manlius qui, de l'aveu du sénat et par la volonté du peuple, déclara la guerre aux Cérites. Ce fut alors que ceux-ci envoyèrent des députés à Rome ; Tite-Live, l. l. 20 : Tum primum Caerites, tarnquam in verbis hostium vis major ad bellum significandum quam in suis factis - pro se quisque legatos mitti jubebat ad petendam erroris veniam.

En cédant la moitié de leur territoire (p. 135). Tite-Live, l l, ne parle pas de cette clause; il dit seulement : Pax populo Caeriti data, induciasque in centum annos factas in senatusconsultum referri placuit.

LXXIII. Valérius était près de combattre (Ibid.) Il s'agit de M. valerius : il était tribun militaire et fort jeune; Tite-Live raconte le même fait, l. l. 26. Comme Dion, il avait sans doute emprunté ce récit à d'anciennes Annales qu'Aulu-Gelle copia plus tard, IX, 11 ; mais sans nommer l'auteur. Cf. Denys d'Hal. Fr. XV, 1-3, éd. Milan.
Pour prix de sa valeur, M. Valérius Corvus fut proclamé consul, l'année suivante, à l'âge de vingt-trois ans.

LXXIV. Les Latins mettaient en avant ces exigences (Ibid.) Je les ai indiquées (p. 135, note 10) ; mais il sera bon de consulter, pour les details sur la défection des Latins, Tite-Live, VIII, 1.4. Je transcris ici quelques passages tirés des ch. 5 et 6, où l'historien raconte l'arrivée des députés latins à Rome et l'indignation causée au sénat par le discours d'Annius, chargé d'exposer leur demande : Ubi est Romam ventum, in Capitolio eis senatus datus est. Ibi quum T. Manlius consul egisset cum eis ex auctoritate patrum, ne Samnitibus foederatis bellum inferrent; Annius, tamquam victor armis Capitolium cepisset, non legatus jure gentium tutus loqueretur : « Tempus erat, inquit, T. Manli, vosque patres conscripti, tandem jam vos nobiscum nihil pro imperio agere, etc. »... Quum consulis vocem subsecuta patrum indignatio esset, proditur memoriae adversus crebram implorationem deum quos testes foederum saepius invocabant consules, vocero Annii, spernentis numina Jovis romani, auditam.
L'impie ne tarde pas à être châtié; frappé de vertige, il tombe sur les degrés, roule jusqu'au bas et va se heurter la tète contre une pierre. Tite-Live se contente de dire qu'il s'évanouit; d'autres attirment qu'il en mourut. Vient ensuite le prodige obligé, pour attester la colère du ciel : le tonnerre éclate et l'orage gronde au moment de l'appel aux dieux contre la rupture des traités. Torquatus, envoyé par le sénat pour congédier les députés, ne doute pas de la vengeance de Jupiter, à la vue d'Annius terrassé, et la guerre contre les Latins est résolue avec acclamation.

LXXV. Le fils du consul Manlius (p. t37:i. Cf. Tite-Live, l. l. 7, et le passage de Zonaras, cité, p. 136, note 3.

Tout à fait soumis à leurs chefs (p. 137). C'est aussi au nom de la discipline que Manlius rend l'arrêt fatal contre son fils, dans Tite-Live , l. l. : Quum aut morte tua sancienda sint consulum imperia, aut impunitate in perpetuum abroganda; ne te quidem, si quid in te nostri sanguinis est, recusare censeam, quin disciplinam militarem, culpa tua prolapsam, poena restituas. I, lictor, deliga ad palum. Le même, l. l, 8 : Fecit tarnen atrocitas poenae obedientiorem duci militem.
AprèsMontaigne, Essais, lI, 2, Rollin, Hist. Rom., VIII, 3, blâme cet acte, comme contraire aux sentiments de la nature et de l'humanité. Suivant lui, c'est le cas de dire avec Horace :
Quum ventum ad verum est, sensus moresque repugnant.

LXXVI. Qu'ils avaient attendu l'issue du combat (Ibid.). Dion a suivi les autorités auxquelles Tite-Live fait allusion, l. l. 11 : Romanis post prælium demum factum Samnites venisse subsidio apud quosdam auctores invenio.

LXXXVIII. Un devin annonça. (p. 139). Cf. Tite-Live, l. l. 9.

Se vouait (Ibid.). Le même, 1.1.9, donne des détails fort précieux pour nous : Pontifex eum togam prætextam sumere jussit et, velato capite, manu subter togam ad mentum exserta, super telun subjectum pedibus stantem sic dicere : « Jane, Jupiter, Mars pater, Quirine, Bellona, Lares, Divi Novensiles, Dii Indigetes, Divi quorum est potestas Nostrorum Hostiumque, Diique Maties, vos precor, veneror, veniam peto feroque, uti populo romano Quiritium vim victoriamque prosperetis ; hostesque populi romani Quiritium terrore, formidine, morteque aficiatis. Sicut verbis nuncupavi, ita pro republica Quiritium, exercitu, legionibus, auxiliis populi, romani Quiritium, legiouns auxiliaque hostium mecum Diis Manibus Tellurique devoveo. » On pourra rapprocher de cette formule, un des plus antiques monuments de la littérature de Rome, celle qui nous a été conservée par Macrobe, Satura. III, 9, et qui servait à dévouer aux dieux infernaux les villes et les armées ennemies. Elle ne pouvait être prononcée que par le Dictateur ou le Général commandant, après qu'ils avaient évoqué les dieux étrangers, suivant une autre formule non moins curieuse, rapportée par le même Macrobe, l. l., ou il dit les avoir trouvées au Ve Livre Des choses cachées, composé par Sammonicus Serenus, qui les avait tirées lui-même d'un très ancien ouvrage d'un certain Furius.
Revenons à la formule conservée par Tite-Live, pour dire un mot des Dii Indigetes et des Dii Novensiles. La dénomination des premiers a été diversement expliquée par Servius, Georg. I. 498; .Eneid. XII, 794 ;  lndigites duplici ratione dicuntur, vel secundum Lucretium, I, 61, quod nullius rei egeant :
Ipsa suis pollens opibus, nihil indiga nostri.
Vel quod nos eorum indigeamus, unde quidam omnes Deos Indigetes appellari volunt. Alii patrios Deos Indigetes dici debere tradunt; alii ab invocatione Indigetes dici volunt, quod indigito est precor et invoco. 
L'explication la plus probable, suivant lui, est celle qui fait des Indigetes les Dieux de la patrie ; comme chez les Grecs, Θεοὶ πατρῷοι καὶ ἐγχώριοι.
Quant aux Dii Novensiles ou Novensides, ils furent importés de chez les Sabins, Varron, De Lingua Lat. V, 74, éd. de M. Egger. D'après Cincius, on donnait ce nom aux dieux étrangers, nouvellement admis dans Rome. De là, la dénomination de Novensiles, comme qui dirait nuper salientes. Cornificius voit en eux les Divinités protectrices de toutes les Nouveautés, d'où serait venu le nom de Novensides c'est-à-dire Novandis rebus praesides. Mais tout cela est incertain. Cf. Arnobe, III, 33; Sam. Pitisc. Ant. Rom..I, p. 657 et les autorités qu'il cite; Forcellini, Lex. Lat., au mot Novensiles.
Encore une remarque tirée de Tite-Live, l. l.: le Consul, le Dictateur ou le Préteur n'était pas tenu de se dévouer lui-même. Il pouvait, à son gré, dévouer tout autre citoyen; pourvu qu'il fît partie d'une légion. Si l'homme, ainsi dévoué, mourait, le sacrifice était bien et dûment accompli : s'il survivait, on enfouissait dans la terre son effigie haute de sept pieds ou plus, et on immolait une victime expiatoire. Le magistrat romain ne pouvait passer sans crime sur la place où cette effigie était enterrée. 
Si le Consul, le Dictateur ou le Préteur s'était dévoué lui-même, et s'il ne mourait pas, aucun sacrifice privé ou public ne pouvait plus être purement fait par lui. S'ils voulaient vouer leurs armes à Vulcain ou à tout autre Dieu, avec une victime ou toute autre offrande, ils le pouvaient. Le javelot qu'ils avaient tenu sous les pieds, en prononçant la prière sacramentelle, ne devait jamait tomber aux mains de l'ennemi ; s'il y tombait, un offrait à Mars un Suovétaurile expiatoire, c'est-à-dire, le sacrifice d'un porc, d'un bélier et d'un taureau.
Ce sacrifice terminait l'opération du dénombrement : il servait aussi à la purification des campagnes; et dans ce dernier cas, il était accompagné d'une formule dont la teneur nous a été transmise par Caton , De Re Rustic. CXLII.
Ce sacrifice s'appelait aussi Solitauralia, dénomination expliquée par Festus, à ce mot, p. 163, éd. de M. Egger.

Aussitôt Décius - une heureuse issue pour les Romains (p. 139-141) Cf. Tite-Live, 1. I. : Ipso, incinctus cinctu Gabino - consternatæ cohortes Latinorum fugam ac vastitiem late fecerunt. 
L'historien latin ajoute un peu plus loin, l.l. 10, des détails qui manquent dans Dion : Decii corpus ne eo die inveniretur, nox quaerentes oppressit; postero die inventum inter maximam hostium stragem, coopertum telis; funusque ei par morti, celebrante collega, factum est.
Peut-être, Dion s'en est-il abstenu, parce qu'il éprouvait plus que des doutes sur ce dévouement de Décius et sur ses conséquences. Cf. p. 141. J'ajoute quelques réflexions de Montaigne, Essais, II, 12 : « C'estoit une étrange fantaisie de vouloir... que la pauvre lphigenia, au port d'Aulide, par sa mort et immolation, deschargeast envers Dieu l'armee des Crecs des offenses qu'ils avoient commises :
Sed casta, inceste, nubendi tempore in ipso, 
Hostia concideret mactatu maesta parentis. (Lucret. I.99.)
Et ces deux belles et genereuses ames des deux Decius père et fils, pour propitier la faveur des Dieux envers les affaires romaines, s'allassent jecter à corps perdu à travers les plus espez des ennemis : quam fuit tanta deorum iniquitas, ut placari populo romano non possent, nisi tales viri occidissent ? (Cic. de Nat. Deor. III, 6). Ioinct que ce n'est pas au criminel de se faire fouetter à sa mesure et à son heure, c'est au juge qui ne met en compte de chastiment que la peine qu'il ordonne, et ne peult attribuer a punition ce qui vient a gre a celui qui le souffre : la vengeance divine presuppose nostre dissentiment entier pour sa justice et pour nostre peine. »

LXXIX. Les Romains (p. 141). Surtout la jeunesse; Tite-Live, l. l. 12 : Ita bello gesto, praemiis poenaque pro cujusque merito persolutis, T. Manlius Romam rediit: cui venienti seniores tantum obviam exisse constat; juventutem, et tunc, et onmi vita deinde, aversatam enm exsecratamque.

Quand il eût célébré son triomphe (p. 143). Tite-Live ne parle point de ce triomphe, attesté par des autorités irréfragables. Diodore de Sicile, XVI, 90 : Ῥωμαῖοι δὲ πρὸς Λατίνους καὶ Καμπανοὺς παραταξάμενοι περὶ πόλιν Σούεσσαν ἐνίκησαν καὶ τῶν ἡττηθέντων μέρος τῆς χώρας ἀφείλοντο. ὁ δὲ κατωρθωκὼς τὴν μάχην Μάλλιος ὁ ὕπατος ἐθριάμβευσεν. Cf. Val. Maxime, VI, 9, et Orose, III, 9. Pighius, Ann. Rom. t. I. p. 310, éd. Schott, le place en l'année 403, d'après les marbres du Capitole :
T. MANLIVS. L. F. A. N. IMPERIOSS. TORQVAT. A. CDXIII .
COSS. III. DE. LATINEIS. CAMPANEIS. SIDICINEIS. 
AVRVNCEIS. XV. K. IVNIAS.

Cependant-vous ne pourriez me supporter vous-mêmes (Ibid.). M. A. Mai signale un dissentiment entre Dion et Tite-Live : Ingens hoc