STRABON
Géographie
ΣΤΡΑΒΟΝΟΣ ΓΕΩΓΡΑΦΙΚΩΝ A'
LIVRE I
livre I - livre II - livre III - livre IV - livre VII - livre X
Que la science géographique n'est pas étrangère à la philosophie. - Qu'Homère partout dans ses poèmes a donné la preuve de connaissances géographiques. - Que les anciens traités de géographie fourmillent de lacunes, d'incohérences, d'erreurs, de mensonges et de contradictions. - Preuves et démonstrations à l'appui de ce jugement de l'auteur. - Tableau sommaire représentant en raccourci la disposition générale de la terre habitée. - Hypothèses et observations positives tendant à établir qu'en beaucoup de lieux la terre et la mer se sont réciproquement déplacées et substituées l'une à l'autre. |
ΥΠΟΘΕΣΙΣ Ὅτι οὐκ ἐκτὸς φιλοσοφίας ἡ γεωγραφικὴ πραγματεία. Ὅτι καὶ Ὅμηρος αὐτῇ πανταχοῦ τῶν ἐπῶν φαίνεται χρώμενος. Ὅτι οἱ πρότερον αὐτῇ χρησάμενοι ἐλλειπῶς ἢ ἀναρθρώτως ἢ ἐσφαλμένως ἢ ψευδῶς ἢ τοῖς αὐτοῖς ἀσυμφώνως εἰρήκασιν. Ἔλεγχοι καὶ ἀποδείξεις τοῦ εἰκότως αὐτὸν οὕτω κρίνειν. Κεφαλαιώδεις λόγοι πάσης οἰκουμένης συντόμως ὑποτυποῦντες τὴν διάθεσιν. Πίστις εἰκότων καὶ τεκμηρίων βεβαίων τοῦ κατὰ μέρη τὴν γῆν καὶ τὴν θάλασσαν ἐνηλλάχθαι καὶ εἰς ἀλλήλας μετατεθῆναι.
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CHAPITRE PREMIER 1. La géographie, que nous nous proposons d'étudier dans le présent ouvrage, nous paraît être autant qu'aucune autre science du domaine du philosophe; et plus d'un fait nous autorise à penser de la sorte : celui-ci d'abord, que les premiers auteurs qui osèrent traiter de la géographie étaient précisément des philosophes, Homère, Anaximandre de Milet et son compatriote Hécatée, comme Ératosthène en fait déjà la remarque ; puis Démocrite, Eudoxe, Dicéarque, Éphore et maint autre avec eux; plus récemment enfin Ératosthène, Polybe, Posidonius, philosophes aussi tous trois. En second lieu, la multiplicité de connaissances, indispensable à qui veut mener à bien une pareille œuvre, est le partage uniquement de celui qui embrasse dans sa contemplation les choses divines et humaines, c'est-à-dire l'objet même de la philosophie. Enfin, la variété d'applications dont est susceptible la géographie, qui peut servir à la fois aux besoins des peuples et aux intérêts des chefs, et qui tend à nous faire mieux connaître le ciel d'abord, puis toutes les richesses de la terre et des mers, aussi bien les animaux que les plantes, les fruits, et les autres productions propres à chaque contrée, cette variété, disons-nous, implique encore dans le géographe ce même esprit philosophique, habitué à méditer sur le grand art de vivre et d'être heureux. 2. Mais reprenons, point par point, ce qui vient d'être dit, pour aller plus encore au fond des choses. Et d'abord, montrons que c'est à bon droit qu'à l'imitation de nos prédécesseurs, d'Hipparque notamment, nous avons présenté Homère comme le fondateur même de la science géographique. Homère, en effet, n'a pas surpassé seulement en mérite poétique les auteurs anciens et modernes, il leur est supérieur encore, on peut dire, par son expérience des conditions pratiques de la vie des peuples, et c'est à cause de cette expérience même que, non content de s'intéresser à l'histoire des faits et de chercher à en recueillir le plus grand nombre possible pour en transmettre ensuite le récit à la postérité, il y a joint l'étude de la géographie, tant l'étude partielle des localités que l'étude générale des mers et de la terre habitée. Aurait-il pu, sans cela, atteindre, comme il l'a fait, aux limites mêmes du globe et en parcourir dans ses vers la circonférence tout entière? 3. Il commence par nous représenter la terre telle qu'elle est, en effet, enveloppée de tous côtés et baignée par l'Océan ; puis, des diverses contrées qu'elle renferme, il désigne les unes par leurs vrais noms et nous laisse reconnaître les autres à certaines indications détournées : ainsi, tandis qu'il nomme expressément la Libye, l'Éthiopie, les Sidoniens et les Erembes (les mêmes apparemment que les Arabes Troglodytes), il se contente de désigner indirectement les pays de l'Orient et de l'Occident par cette circonstance que l'Océan les baigne. Car c'est du sein de l'Océan, suivant lui, que le soleil se lève et au sein de l'Océan qu'il se couche et les autres astres pareillement: « Déjà le soleil, sorti à peine du sein de l'Océan aux eaux calmes et profondes, éclairait les campagnes de ses premiers rayons (01) ; » et ailleurs : « Déjà au sein de l'Océan a disparu l’étincelant flambeau du soleil, attirant après soi sur la terre le sombre voile de la nuit (02); » ailleurs encore il nous montre les astres « sortant de l'Océan où ils se sont baignés (03) ». 4. Au tableau qu'il fait maintenant de la félicité des peuples occidentaux, et de l'incomparable pureté de l'air qu'ils respirent, il est aisé de voir qu'il avait ouï parler des richesses de l'Ibérie, de ces richesses qui, après avoir tenté successivement Hercule et les Phéniciens, lesquels même, à cette occasion, occupèrent la plus grande partie du pays, provoquèrent en dernier lieu la conquête romaine. C'est bien, en effet, de l'Ibérie que souffle le zéphyr et du côté de l'Ibérie pareillement qu'Homère a placé le « Champ Élyséen, où les dieux, nous dit-il, doivent conduire Ménélas (04) » : « Quant à vous, Ménélas, les immortels vous conduiront vers le Champ Élyséen, aux bornes mêmes de la terre: c'est là que siège le blond Rhadamanthe, là aussi que les humains goûtent à la vie la plus facile, à l'abri de la neige, des frimas et de la pluie, et que du sein de l'Océan s'élève sans cesse le souffle harmonieux du zéphyr.» 5. Ajoutons que les îles des Bienheureux sont situées à l'extrémité occidentale de la Maurusie, à la rencontre de laquelle semble s'avancer en quelque sorte l'extrémité correspondante de l'Ibérie : or, si l'on réputait lesdites îles Fortunées, cela n'a pu tenir qu'à leur proximité d'une contrée aussi réellement fortunée que l'était l'Ibérie. 6. D'autres indications d'Homère nous montrent les Éthiopiens aussi habitant aux derniers confins de la terre, sur les bords mêmes de l'Océan; je dis « aux derniers confins de la terre » d'après le vers suivant (05), « Les Éthiopiens, qui vivent partagés en deux nations aux derniers confins de la terre, » dans lequel l'expression « partagés en deux nations » est elle-même parfaitement exacte, comme nous le démontrerons par la suite; et si j'ajoute « sur les bords mêmes de l'océan, » c'est d'après cet autre passage (06) : « Car Jupiter s'en fut hier vers l'Océan pour visiter les vertueux Éthiopiens et prendre part à leur banquet. » Voici maintenant comme il donne à entendre que l'extrémité septentrionale ou arctique de la terre est également bordée par l'Océan, Il dit en parlant de l'Ourse (07) : « Seule elle est dispensée de plonger au sein de l'Océan, » mais c'est qu'il emploie le nom de l'Ourse et aussi celui du Chariot pour désigner le cercle arctique : autrement, eût-il dit, alors que tant d'autres étoiles accomplissent aussi leur révolution dans la même partie du ciel toujours visible pour nous, que l'Ourse seule est exempte de plonger dans l'Océan? On a donc tort de le taxer, comme on a fait, d'ignorance, pour n'avoir connu, soi-disant, qu'une seule Ourse au lieu de deux. Il n'est pas probable, en effet, que, de son temps, la seconde Ourse fût déjà rangée au nombre des constellations, et ce n'est sans doute qu'après que les Phéniciens l'eurent observé et s'en furent servis pour la navigation que cet astérisme aura passé chez les Grecs, comme on voit que la Chevelure de Bérénice et Canope n'ont reçu les noms qu'elles portent que d'hier seulement, et que, de l'aveu d'Aratus (08), tant de constellations attendent encore les leurs. Il s'ensuit aussi que Cratès n'a pas eu raison de vouloir ici corriger le texte et de lire : «Οἷος δ', seul, le cercle arctique est dispensé de plonger au sein de l'Océan » [au lieu de οἴη δ', seule l'Ourse]: car la leçon qu'il rejette n'était nullement à rejeter. Héraclite, lui, est plus dans le vrai, et nous semble, si l'on peut dire, plus homérique, lorsque, comme Homère, il emploie le nom de l'Ourse pour désigner le cercle arctique : « L'Ourse, dit-il, limite commune de l'Orient et de l'Occident ; l'Ourse, à l'opposite de laquelle souffle Jupiter-Serein. » Car c'est bien le cercle arctique, et non pas l'Ourse elle-même, qui marque proprement la limite du couchant et du levant. Mais, si Homère, sous le nom de l'Ourse, constellation qu'il appelle aussi le Chariot, et qu'il nous montre dans le ciel poursuivant en quelque sorte et guettant Orion (09), a entendu désigner le cercle arctique, sous le nom d'Océan il a dû certainement entendre l'horizon, au-dessus et au-dessous duquel nous voyons, dans ses vers, se lever et se coucher les astres; et, comme il dit que l'Ourse achève sa révolution dans le même lien sans se coucher dans l'Océan, il faut qu'il ait su que le cercle arctique passe par le point le plus septentrional de l'horizon. Ajustons maintenant les paroles du poète, aux explications qui précèdent : comme le nom d'Océan éveille en nous l'idée correspondante d'horizon, d'horizon terrestre, et que le cercle arctique (qu'il désigne par le nom d'Arctos ou d'Ourse) n'est autre que le cercle qui, au jugement de nos sens, passe par le point le plus septentrional de la terre habitée, il demeure établi que, dans la pensée d'Homère, ce côté-là de la terre devait être aussi baigné par l'Océan. Il n'est pas jusqu'aux populations arctiques qu'Homère ne connût parfaitement; il ne les mentionne pas, à vrai dire, nominativement (ce qui se conçoit, du reste, puisque, même aujourd'hui, il n'existe pas encore pour elles de dénomination générale), mais il est aisé de les reconnaître à la peinture qu'il fait de leur genre de vie, quand il les qualifie de Nomades, de fiers Hippemolges, de tribus Galactophages et Abiennes 10) . 7. Il s'y prend encore d'autre façon pour nous donner à entendre que l'Océan entoure circulairement la terre; il mettra par exemple dans la bouche de Junon les paroles suivantes (11): « Car je veux aller visiter les bornes de la terre féconde et l'Océan, père des dieux », ce qui revient à dire que l'Océan confine à toutes les extrémités de !a terre; or on sait que lesdites extrémités figurent proprement un cercle, Dans l'Hoplopée (12) aussi, il fait de l'Océan la bordure circulaire du bouclier d'Achille. Ajoutons comme une nouvelle preuve de la curiosité scientifique qui possédait Homère, que le double phénomène du flux et du reflux de l'Océan ne lui était pas demeuré inconnu, témoin l'expression suivante (13), l'Océan aux flots rétrogrades » et ce passage [à propos de Charybde] (14) « Trois fois par jour elle vomit, et trois fois elle ravale ses ondes. » Il est vrai qu'il eût fallu dire ici deux fois au lieu de trois; mais, que la différence tienne à une erreur d'observation ou à une erreur de copie, toujours est-il que le but du poète était bien de décrire le phénomène en question. L'épithète « au courant paisible » (15), » semble aussi une image exacte de la marée montante, qui, de fait, a l'allure plutôt douce qu'impétueuse. Posidonius, de son côté, croit voir dans ce que dit Homère de rochers alternativement couverts et découverts et dans le nom de fleuve qu'il prête à l'Océan (16) une double allusion aux phénomènes des marées : passe pour la première raison, mais la seconde n'a pas de sens, car jamais le mouvement de la marée montante n'a ressemblé au courant d'un fleuve, et celui du reflux bien moins encore. L'explication de Cratès a quelque chose de plus plausible : suivant lui, les qualifications de courant profond, de courant rétrograde, voire même celle de fleuve, désignent bien, dans Homère, l'Océan tout entier, mais ce même nom de fleuve et celui de courant fluvial ne désignent plus qu'une partie de l'Océan, et de l'Océan pris dans le sens restreint, non dans le sens étendu, quand le poète vient à dire (17) : « Une fois le vaisseau sorti du courant du fleuve Océan pour entrer au sein de la vaste mer. » Ici, en effet, il s'agit, non pas de la totalité de l'Océan, mais d'un courant fluvial au sein de l'Océan, autrement dit d'une portion quelconque de l'Océan, que Cratès se représente comme une espèce d'estuaire ou de golfe se prolongeant, à partir du tropique d'hiver, dans la direction du pôle austral. De la sorte, en quittant ledit fleuve, un vaisseau aura pu se trouver encore en plein Océan; s'agit-il, au contraire, de la totalité de l'Océan, on ne conçoit plus qu'après en être une fois sorti le vaisseau s'y retrouve encore. Homère dit bien, à la vérité : « Quand sorti du courant du fleuve, il fut entré au sein de la mer », mais la mer ici ne saurait s'entendre que de l'Océan lui-même. Il demeure donc avéré que le passage, interprété autrement que nous ne le faisons, reviendrait à ceci, « qu'un vaisseau est sorti de l'Océan pour entrer dans l'Océan ». La question, pourtant, demanderait une plus ample discussion. Au surplus, que la terre habitée soit une île, la chose ressort tout d'abord du témoignage de nos sens, du témoignage de l'expérience. Car partout où il a été. donné aux hommes d'atteindre les extrémités mêmes de la terre, ils ont trouvé la mer, celle précisément. que nous nommons Océan, et, pour les parties où le fait n'a pu être vérifié directement par les sens, le raisonnement l'a établi de même. Les périples exécutés, soit autour du côté oriental de la terre, qui est celui qu'habitent les Indiens, soit autour du côté occidental, qui est celui qu'occupent les Ibères et les Maurusiens, ont été poussés loin, tant au nord qu'au midi, et l'espace qui demeure encore fermé à nos vaisseaux, faute de relations établies entre nos marins et ceux qui exécutent en sens contraire des périples analogues, cet espace, disons-nous, est peu considérable, à en juger par les distances parallèles que nos vaisseaux ont déjà parcourues. Cela étant, il n'est guère vraisemblable que l'Océan Atlantique puisse être divisé en deux mers distinctes par des isthmes aussi étroits qui intercepteraient la circumnavigation, et il paraît beaucoup plus probable que ledit Océan est un et continu; d'autant que ceux qui, ayant entrepris le périple de la terre, sont revenus sur leurs traces, ne l'ont point fait, de leur aveu même, pour s'être vu barrer et intercepter le passage par quelque continent, mais uniquement à cause du manque de vivres et par peur de la solitude, la mer demeurant toujours aussi libre devant eux. Cette manière de voir s'accorde mieux aussi avec le double phénomène du flux et du reflux de l'Océan, car partout les changements qu'il éprouve, notamment ceux qui consistent à élever et à abaisser le niveau de ses eaux, ont un caractère uniforme ou n'offrent que d'imperceptibles différences, comme cela se conçoit de mouvements produits au sein de la même mer et en vertu d'une seule et même cause. 9. Restent les objections d'Hipparque, mais elles ne sauraient convaincre personne : elles consistent à dire que le régime de l'Océan n'est pas, sur tous les points, parfaitement semblable à lui-même, et que, cela fût-il accordé, il n'en résulterait pas nécessairement que la mer Atlantique dût former un seul courant circulaire et continu. Ajoutons que, pour nier cette uniformité parfaite du régime de l'Océan, il s'appuie sur le témoignage de Séleucus de Babylone ! Pour plus de détails sur l'Océan et sur le phénomène des marées, nous renverrons, nous, à Posidonius et à Athénodore, qui nous paraissent avoir convenablement approfondi la question, nous bornant à dire présentement que le système que nous défendons répond mieux à l'uniformité constatée des phénomènes océaniques, et que, plus la masse d'eau répandue autour de la terre sera considérable, plus il sera aisé de concevoir comment les vapeurs qui s'en dégagent suffisent à alimenter les corps célestes. 10. Mais, si Homère a exactement connu et décrit les extrémités et la bordure circulaire de la terre, il n'a pas moins bien connu et décrit la mer Intérieure. Les pays qui entourent cette mer, à partir des colonnes d'Hercule, sont, comme on sait, la Libye, l'Égypte et la Phénicie, et plus loin la côte qui avoisine Chypre; puis viennent les Solymes, les Lyciens, les Cariens, et le littoral compris entre Mycale et la Troade, avec les îles adjacentes : or, tous ces lieux, le poète les a mentionnés en termes exprès, comme il a parlé aussi et des contrées ultérieures qui bordent la Propontide et des côtes de l'Euxin jusqu'à la Colchide et de l'expédition de Jason. Il connaissait, en outre, le Bosphore Cimmérien, et naturellement les Cimmériens eux-mêmes : on ne s'expliquerait pas, en effet, comment il eût pu connaître le nom des Cimmériens et ignorer leur existence, l'existence d'un peuple, qui, de son vivant ou peu de temps avant lui, avait, depuis le Bosphore, couru et ravagé tout le pays intermédiaire jusqu'à l'Ionie? Mais non, il les connaissait, et ce qui le prouve, c est qu'il a fait allusion à la nature brumeuse du climat de leur pays : « Un voile, dit-il, un voile de vapeurs et de nuages les enveloppe ; l'éclat du soleil ne resplendit jamais pour eux, et la funeste nuit plane toujours au-dessus de leurs têtes (18) » Il connaissait pareillement l'Ister (du moins nomme-t-il les Mysiens, nation thracique, riveraine de ce fleuve) et aussi tout le littoral à partir de l'Ister, autrement dit la Thrace jusqu'au Pénée, puisqu'il mentionne les Paeoniens et qu'il signale l'Athos, l'Axius et les îles situées vis-à-vis. Quant au littoral de la Grèce, prolongement de celui de la Thrace, il a été décrit par lui en entier jusqu'aux frontières de la Thesprotie. Il connaissait enfin l'extrémité de l'Italie, à en juger par la mention qu'il a faite de Temesa et des Sicèles, et l'extrémité de l'Ibérie, ainsi que la richesse et la prospérité des peuples qui l'occupaient, et dont nous parlions tout à l'heure. Si maintenant, dans l'intervalle, se laissent apercevoir quelques lacunes, on peut les lui pardonner, le géographe de profession lui-même omettant souvent bien des détails. Il est excusable aussi et ne mérite aucun blâme s'il a cru devoir mêler, çà et là, quelques circonstances fabuleuses à ses récits, d'ailleurs tout historiques et didactiques, car il n'est pas vrai, comme le prétend Ératosthène, que tout poète vise uniquement à plaire et jamais à instruire : tout au contraire, ceux qui ont traité le plus pertinemment les questions de poétique proclament la poésie une sorte de philosophie primitive. Mais nous réfuterons plus longuement ce jugement d'Ératosthène, quand nous aurons, plus loin, à reparler du poète. 11. Pour le moment, ce qui a été dit doit suffire à établir qu'Homère a été bien réellement le père de la géographie. Quant aux successeurs qu'il a eus dans cette science, c'étaient, comme chacun sait, des hommes d'un mérite éminent et familiarisés avec les études philosophiques : les deux qu'Ératosthène nomme immédiatement après lui sont Anaximandre, qui fut le disciple et le compatriote de Thalès, et Hécatée de Milet. Ératosthène ajoute qu'Anaximandre publia la première Carte géographique, et qu'il reste d'Hécatée un Traité de géographie, dont l'authenticité ressort, suivant lui, de l'ensemble des œuvres de cet auteur (19). 12. Maintenant que l'étude de la géographie exige une grande variété de connaissances, beaucoup l'ont dit avant nous; Hipparque notamment, dans sa Critique de la Géographie d'Ératosthène, fait remarquer très judicieusement que la connaissance de la géographie, si utile à la fois au simple particulier et à l'érudit de profession, ne saurait absolument s'acquérir sans quelques notions préliminaires d'astronomie et sans la pratique des règles du calcul des éclipses. Comment juger, par exemple, si Alexandrie d'Égypte est plus septentrionale ou plus méridionale que Babylone et de combien elle peut l'être, sans recourir à la méthode des climats? De même, comment savoir exactement si tel pays est plus avancé vers l'orient et tel autre vers l'occident, autrement que par la comparaison des éclipses du soleil et de celles de la lune? Ainsi s'explique Hipparque à cet égard. 13. En général, quiconque se propose de décrire les caractères propres de telle ou telle contrée a essentiellement besoin de recourir à l'astronomie et à la géométrie, pour bien en déterminer la configuration, l'étendue, les distances relatives, le climat ou la situation géographique, la température, et, en un mot, toutes les conditions atmosphériques. Puisqu'il n'est pas de maçon bâtissant une maison ni d'architecte édifiant une ville, qui ne tiennent compte préalablement de toutes ces circonstances, à plus forte raison le philosophe, qui embrasse dans ses études la terre habitée tout entière, y aura-t-il égard. Et, de fait, la chose lui importe plus qu'à personne. Car si, pour une étendue de pays restreinte, la situation au nord et la situation au midi n'impliquent qu'une légère différence, rapportés à la circonférence totale de la terre habitée, le nord comprendra jusqu'aux derniers confins de la Scythie et de la Celtique, et le midi jusqu'aux extrémités les plus reculées de l'Éthiopie, ce qui implique des différences énormes. De même il ne saurait être indifférent d'habiter chez les Indiens ou parmi les Ibères, peuples que nous savons être, à l'extrême orient et à l'extrême occident, en quelque sorte les antipodes l'un de l'autre. 14. Comme tous ces faits maintenant tirent leur principe du mouvement du soleil et des autres astres, et aussi de la tendance centripète des corps, nous voilà forcés d'élever nos regards vers le ciel, pour observer les apparences qu'en chaque contrée il nous découvre, apparences qui varient extrêmement, reproduisant ainsi la diversité même des lieux d'observation. Comment donc prétendre représenter avec exactitude et expliquer convenablement ces différences respectives dans la nature et l'aspect des lieux, si l'on n'a pas le moins du monde égard à cet ordre de phénomènes ? Il ne nous est pas possible, à vrai dire, vu le caractère spécial de notre ouvrage, qui doit être avant tout politique, de les approfondir tous; au moins convient-il que nous en exposions ici ce qui peut être à la portée de l'homme mêlé à la vie politique. 15. Mais celui qui a pu déjà élever si haut sa pensée ne reculera pas devant une description complète de la Terre : il serait plaisant, en effet, qu'après avoir, dans son désir de mieux décrire la partie habitée de la Terre, osé toucher aux choses célestes et s'en être servi dans ses démonstrations, il dédaignât de rechercher quelles peuvent être l'étendue et la constitution de la sphère terrestre elle-même, dont la terre habitée n'est qu'une partie, quelle place elle occupe dans l'univers, si elle n'est habitée que dans une seule de ses parties, celle que nous occupons, ou si elle l'est dans d'autres encore, et, dans ce cas, combien l'on en compte, quelles peuvent être aussi l'étendue et la nature de sa portion inhabitée et finalement la raison d'un pareil abandon. Il s'ensuit donc qu'il existe une certaine corrélation entre les études astronomiques et géométriques d'une part et la géographie, telle que nous l'avons définie, de l'autre, puisque cette science relie ensemble les phénomènes terrestres et célestes, devenus en quelque sorte des domaines limitrophes, et qu'elle comble l'immense intervalle « Qui de la terre s'étend jusqu'aux cieux (20). » 16. Allons plus loin et à cette masse déjà si grande de connaissances indispensables ajoutons l'histoire de la Terre elle-même, autrement dit la connaissance des animaux et des plantes et, en général, de toutes les productions, utiles ou non, de la terre et des mers, et notre thèse, croyons-nous, en deviendra plus évidente encore. Que cette connaissance de la terre, en effet, soit d'une grande utilité pour qui a su l'acquérir, la chose ressort et du témoignage de l'antiquité et du simple raisonnement : les poètes ne nous représentent-ils point toujours comme les plus sages ceux d'entre leurs héros qui ont voyagé et erré par toute la terre ? A leurs yeux c'est toujours un grand titre de gloire d'avoir « visité beaucoup de cités et observé les mœurs de beaucoup d'hommes (21). » Ainsi Nestor se vante d'avoir vécu parmi les Lapithes et d'être venu, pour répondre à leur appel : « Du fond de sa lointaine patrie, ces peuples l'avaient demandé et désigné par son nom (22) ; » Ménélas, pareillement : « Après avoir erré, dit-il, dans Chypre, en Phénicie, et chez les Égyptiens, je visitai tour à tour les Éthiopiens, les Sidoniens et les Erembes, puis la Libye, où je vis le front des agneaux armé de cornes (23) » Puis il ajoute comme un trait caractéristique de ce dernier pays : « Car trois fois, dans le cours d'une année, les brebis y mettent bas. » A propos de Thèbes, maintenant, de la Thèbes d'Égypte, il dira : « C'est le lieu où la terre, au sein fertile, donne les plus riches moissons (24); », ou bien encore : « Thèbes, la ville aux cent portes, dont chacune peut livrer passage à deux cents guerriers avec leurs chevaux et leurs chars (25). » Or, tous ces détails descriptifs sont autant de préparations excellentes à la sagesse, en ce qu'ils nous font bien connaître la nature d'un pays et les différents caractères des animaux et des plantes qu'il renferme, voire la nature de la mer et de ses productions, à nous qui sommes en quelque sorte amphibies et pour le moins autant habitants de la mer que de la terre ferme. Et c'est par allusion, sans doute, à tout ce qu'Hercule dans ses voyages avait vu et appris qu'Homère l'appelle « Connaisseur et expert en belles œuvres (26). » Ainsi le témoignage de l'antiquité et le raisonnement s'accordent pour confirmer ce que nous disions en commençant. Mais il est une autre considération qui nous paraît plus encore que le reste militer en faveur de notre thèse présente, c'est que la géographie répond surtout aux besoins de la vie politique. Où s'exerce, en effet, l'activité humaine, si ce n'est sur cette terre, sur cette mer, que nous habitons et qui offrent à la fois de petits théâtres aux petites actions, de grands théâtres aux grandes, le théâtre des plus grandes se confondant ainsi avec les limites mêmes de la terre entière ou de que ce nous appelons proprement la terre habitée, et les plus grands capitaines étant ceux qui parviennent à dominer sur la plus grande étendue de terre et de mer, et à réunir cités et nations en un seul et même empire, en un seul et même corps politique? Il est donc évident que la géographie, considérée dans son ensemble, exerce une influence directe sur la conduite des chefs d'État par la distribution qu'elle fait des continents et des mers, tant au dedans qu'en dehors des limites de la terre habitée, cette distribution étant faite naturellement en vue de ceux qui ont le plus d'intérêt à savoir si les choses sont de telle façon ou de telle autre et si telle contrée est déjà connue ou encore inexplorée. On conçoit, en effet, que ces chefs s'acquitteront mieux du détail de leur administration, connaissant l'étendue et la situation exacte du pays et toutes les variétés de climat et de sol qu'il peut présenter. Mais, maintenant, comme ces princes ont leurs États situés en diverses parties de la terre, et que leurs premières entreprises, leurs premières conquêtes partent de divers foyers et de centres différents, il ne leur est pas possible, non plus qu'aux géographes, de connaître également bien tous les pays de la terre ; et leurs connaissances aux uns et aux autres seront nécessairement susceptibles de plus et de moins. La terre habitée tout entière fût-elle rangée sous la même domination, sous le même gouvernement, il serait difficile encore que toutes les parties en fussent connues au même degré : dans ce cas-là même, on connaîtrait mieux que le reste les parties les plus proches de soi, d'autant que ce sont celles-là sur lesquelles il importe de répandre le plus de lumière, afin de les faire bien connaître, puisque, par leur position, elles sont plus à portée d'être utiles. Dès là rien d'étonnant que telle chorographie convînt mieux aux Indiens, telle autre aux Éthiopiens, telle autre encore aux Grecs et aux Romains. Quel intérêt, en effet, pourrait avoir le géographe indien à décrire la Béotie comme le fait Homère, qui nomme « Et les peuples d'Hyria et ceux de la pierreuse Aulis , ceux de Schoene et de Scôle (27). » Pour nous autres, à la bonne heure, la chose a de l'importance En revanche, une description si détaillée de l'Inde n'aurait plus d'intérêt pour nous : l'utilité n'y serait point, l'utilité, qui est proprement la juste et vraie mesure dans ce genre d'études. 17. Ce que nous avons dit [de l'utilité de la géographie] se vérifie même dans les petites opérations, à la chasse par exemple, car on chassera mieux connaissant la disposition et l'étendue de la forêt; et, en général, quiconque connaît les lieux s'entendra mieux qu'un autre à choisir un campement, à disposer une embuscade, à diriger une marche. Mais dans les grandes opérations l'évidence de notre assertion devient plus éclatante encore, d'autant qu'alors on est plus chèrement récompensé d'avoir su, plus chèrement puni d'avoir ignoré. Ainsi la flotte d'Agamemnon se trompe, ravage la Mysie pour la Troade et se voit réduite à une retraite honteuse. Ainsi les Perses et les Libyens, pour avoir cru reconnaître dans des passes libres et ouvertes des détroits sans issue, s'exposent aux plus grands périls, et laissent derrière eux, comme trophées de leur ignorance, les Perses, le tombeau de Salganée près de l'Euripe de Chalcis, de cet infortuné Salganée immolé par eux comme un traître pour avoir, soi-disant, mené perdre leur flotte des rivages Maliens tout au fond de l'Euripe ; les Libyens le monument de Pélore, mort victime d'une semblable erreur. La même cause encore, lors de l'expédition de Xerxès, remplit la Grèce de débris de naufrages, et longtemps auparavant l'émigration des Éoliens et celle des Ioniens avaient offert le spectacle de maints désastres pareils, tous occasionnés par l'ignorance. D'autre part, que de victoires dans lesquelles le vainqueur doit tout son succès à la connaissance des lieux ! Au défilé des Thermopyles, par exemple, n'est-ce pas Ephialte, qui, en indiquant aux Perses ce sentier dans la montagne, leur livre Léonidas et introduit en deçà des Pyles l'armée barbare ? Mais sans remonter si haut, je trouve une preuve suffisante de ce que j'avance soit dans la récente campagne des Romains contre les Parthes, soit dans leurs expéditions contre les Germains et les Celtes, où l'on voit ces Barbares retranchés au fond de leurs marais, de leurs forêts de chênes et de leurs solitudes impénétrables, combattre en s'aidant de leur connaissance des lieux contre un ennemi qui les ignore, le trompant sur les distances, lui fermant les passages et interceptant ses convois de vivres et ses autres approvisionnements. 18. La géographie, avons-nous dit, a rapport surtout aux opérations et aux besoins des chefs d'État. A la vérité, la morale et la philosophie politique ont aussi pour principal objet de régler la conduite des chefs, et ce qui le prouve, c'est que nous distinguons les différentes sociétés ou associations politiques d'après la forme de leurs gouvernements : le gouvernement pouvant être ou monarchique (nous appelons cette même forme quelquefois royauté), ou aristocratique, ou en troisième lieu démocratique, nous reconnaissons aussi trois espèces d'associations politiques, auxquelles nous donnons justement les mêmes noms, par la raison qu'elles tirent de leurs gouvernements respectifs le principe même de leur existence et comme leur caractère spécifique; en effet, la loi diffère suivant qu'elle émane de l'autorité d'un roi ou de l'autorité d'un sénat ou de celle du peuple, et la loi, comme on sait, est le type même et le moule qui donne la forme à une société, tellement qu'on a pu définir quelquefois le droit « l'intérêt du plus fort ». La philosophie politique s'adresse donc principalement aux princes ; mais si la géographie, qui, elle aussi, s'adresse surtout aux princes, répond de plus à un de leurs besoins de chaque jour, ne pourrait-on pas dire que cette circonstance constitue en sa faveur une sorte de supériorité sur l'autre science, supériorité, nous l'avouons, purement pratique? 19. Ce qui n'empêche pas que la géographie n'ait aussi son côté spéculatif ou théorique qu'on aurait tort de dédaigner, en ce qu'il touche à la fois à la technique, à la mathématique, à la physique, à l'histoire, voire même à la mythologie. Or la mythologie n'a assurément rien de pratique. Un récit tel que celui des erreurs d'Ulysse, de Ménélas ou de Jason n'est pas de nature à développer beaucoup cette prudence éclairée que recherche avant tout l'homme pratique, à moins qu'on n'y ait mêlé çà et là telle moralité utile inspirée par les aventures inséparables de semblables voyages, mais il ménagera tout au moins une jouissance délicate à ceux que le hasard conduit dans les lieux ainsi illustrés par la Fable, et l'esprit le plus pratique ne laisse pas que d'être sensible à l'éclat et à l'agrément de pareils souvenirs : seulement, il ne s'y arrête pas longtemps, car il est naturel qu'il accorde plus d'attention aux choses utiles. Naturellement aussi le géographe s'occupera plus de celles-ci que des autres et, procédant pour l'histoire et les mathématiques, comme il a fait pour la mythologie, ce sera toujours la partie la plus utile et la mieux avérée qu'il en extraira de préférence. 20. Mais c'est surtout, on l'a vu, de la géométrie et de l'astronomie que le géographe paraît avoir besoin pour l'objet qu'il se propose. Et de fait, comment en serait-il autrement? Comment le géographe pourrait-il bien comprendre, sans recourir aux méthodes que fournissent ces deux sciences, toutes les questions de configuration, de climat, d'étendue et autres semblables? Toutefois, comme les géomètres et les astronomes exposent ailleurs tout au long les moyens de mesurer la terre entière, nous devrons, nous, dans le présent ouvrage, supposer et admettre comme vrai ce qu'ils ont démontré dans les leurs; supposer, par exemple, la sphéricité du monde, celle aussi de la surface terrestre et avant tout la tendance centripète des corps. Et, comme ces faits sont à la portée de nos sens ou rentrent dans la catégorie des notions communes, il nous suffira, si même la chose en vaut la peine, d'en donner l'explication la plus brève et la plus sommaire. Ainsi, en ce qui concerne la sphéricité de la terre, nous rappellerons simplement ou la preuve indirecte qui se tire de l'impulsion centripète en général et de la tendance de chaque corps en particulier vers son centre de gravité, ou la preuve directe et immédiate résultant des phénomènes qu'on observe sur la mer et dans le ciel, et dont le témoignage de nos sens et les simples notions vulgaires suffisent à constater la réalité. Il est évident, par exemple, que la courbure de la mer empêche seule le navigateur d'apercevoir au loin les lumières placées à la hauteur ordinaire de l'œil, et qui n'ont besoin que d'être un peu haussées pour devenir visibles, même à une distance plus grande, de même que l'œil n'a besoin que de regarder de plus haut pour découvrir ce qui auparavant lui demeurait caché. Homère déjà en avait fait la remarque, car tel est le sens de ce vers : « Une fois soulevé par la vague immense, il put porter très loin sa vue perçante (28). » On sait aussi que, plus un vaisseau approche de la terre, plus chacune des parties de la côte se dessine nettement aux yeux des passagers, et que ce qui leur paraissait bas en commençant va s'élevant sans cesse devant eux. La révolution ou marche circulaire des corps célestes est de même rendue manifeste par diverses expériences, notamment au moyen du gnomon, qu'il suffit d'observer une fois pour concevoir aussitôt que, si les racines de la terre se prolongeaient à l'infini, la susdite révolution ne saurait avoir lieu. Quant à la théorie des climats, elle est exposée en détail dans des traités spéciaux sur les oekèses ou positions géographiques. 21. Mais encore une fois, pour le moment, nous n'avons besoin d'emprunter à ces différentes sciences qu'un petit nombre de notions, et de notions élémentaires, à l'usage surtout du politique et du capitaine. Car s'il importe, d'une part, qu'ils ne demeurent ni l'un ni l'autre tellement étrangers à l'astronomie et à la géographie, que, se trouvant transportés dans des lieux où les phénomènes célestes les plus familiers au vulgaire viendraient à se produire avec quelques légères anomalies, ils perdent tout à coup la tête et s'écrient dans leur trouble : « Allons, amis, puisque nous ignorons et le côté du couchant et le côté de l'aurore, et le point où le soleil, ce flambeau des mortels, descend au-dessous de la terre et le point d'où il remonte et s'élève au-dessus (29), » d'autre part , ils n'ont que faire d'approfondir ces études jusqu'à savoir quels sont, pour chaque lieu de la terre, et les astres qui se lèvent, et les astres qui se couchent ensemble, et ceux qui passent ensemble au méridien; quels sont et la hauteur correspondante du pôle et le point zénithal, et tant d'autres circonstances du même genre qui, suivant les changements d'horizon et de cercle arctique, viennent à changer aussi, soit seulement en apparence, soit en réalité. De ces faits, les uns pourront être négligés complètement par l'homme d'État et l'homme de guerre, à moins qu'ils ne veuillent en faire un objet de pure spéculation philosophique, les autres devront être admis de confiance, quand bien même les causes leur en demeureraient cachées : car cette recherche des causes appartient au seul philosophe de profession, le politique n'ayant pas assez de loisir pour s'y livrer, si ce n'est par exception. Il ne faudrait pas pourtant que celui qui prétendra lire ce traité fût assez novice ou assez nonchalant pour n'avoir jamais jeté les yeux sur une sphère, ni regardé les cercles qui y sont tracés parallèlement, perpendiculairement ou obliquement les uns aux autres, et la position respective des tropiques, de l'équateur et du zodiaque, ce cercle que suit le soleil dans sa révolution, déterminant de la sorte les différences des climats et des vents. Car il suffit qu'on comprenne tant bien que mal ces premiers éléments de la science et ce qui est relatif aux changements d'horizon et de cercle arctique, et en général tout ce qui sert d'introduction aux mathématiques proprement dites, pour être à même de suivre ce que nous exposons ici (30). Mais si l'on ignore ce que c'est qu'une ligne, droite ou courbe, ce que c'est qu'un cercle, une surface, sphérique ou plane, et que l'on ne soit pas en état de reconnaître dans le ciel les sept étoiles de la Grande-Ourse, ou telle autre constellation aussi connue, on n'a que faire, provisoirement du moins, d'un traité tel que le nôtre, et l'on doit, au préalable, se familiariser avec des notions, sans lesquelles il n'y a pas d'études géographiques possibles. Voilà pourquoi les auteurs de Portulans et de Périples ne font qu'un travail inutile, quand ils négligent d'ajouter à leurs descriptions ce qui, en fait d'éléments mathématiques et astronomiques, s'y rattache nécessairement (31). 22. En somme, il faut que le présent traité s'adresse à tout le monde, à la fois aux politiques et aux simples particuliers, comme notre précédente composition historique. Là aussi nous employions cette qualification de politique, pour désigner, par opposition à l'homme complètement illettré, celui qui a parcouru le cercle entier des études composant ce qu'on appelle d'ordinaire l'éducation libérale et philosophique. Car celui-là seul, disions-nous, peut blâmer et louer à propos et discerner dans l'histoire les événements vraiment dignes de mémoire, qui a médité sur les grandes questions de vertu et de sagesse et sur les différents systèmes qui s'y rapportent. 23. Ayant donc publié déjà des Mémoires historiques, utiles, nous le supposons du moins, aux progrès de la philosophie morale et politique, nous avons voulu les compléter par la présente composition: conçue sur le même plan, elle s'adresse aux mêmes hommes, à ceux surtout qui occupent les hautes positions. Et de même que, dans notre premier ouvrage, nous n'avons mentionné que les faits relatifs aux hommes et aux vies illustres, omettant à dessein tout ce qui pouvait être petit et obscur, ici aussi nous avons dû négliger les petits faits, les faits trop peu marquants, pour insister davantage sur les belles et grandes choses, qui se trouvent réunir à la fois l'utile, l'intéressant et l'agréable. Dans les statues colossales, on ne recherche pas l'exactitude minutieuse des détails, on accorde plutôt son attention à l'ensemble, au bon effet de l'ensemble : même jugement à appliquer ici. Car notre ouvrage est aussi, l'on peut dire, un monument colossal, qui reproduit uniquement les grands traits et les effets d'ensemble, sauf le cas où tel petit détail nous aura paru de nature à intéresser à la fois l'érudit et l'homme pratique. En voilà assez pour établir à quel point il est sérieux et digne de l'attention des philosophes.
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ΚΕΦ. Α' 1. Τῆς τοῦ φιλοσόφου πραγματείας εἶναι νομίζομεν, εἴπερ ἄλλην τινά, καὶ τὴν γεωγραφικήν, ἣν νῦν προῃρήμεθα ἐπισκοπεῖν. Ὅτι δ' οὐ φαύλως νομίζομεν, ἐκ πολλῶν δῆλον. Οἵ τε γὰρ πρῶτοι θαρρήσαντες αὐτῆς ἅψασθαι τοιοῦτοί τινες ὑπῆρξαν· Ὅμηρός τε καὶ Ἀναξίμανδρος ὁ Μιλήσιος καὶ Ἑκαταῖος, ὁ πολίτης αὐτοῦ, καθὼς καὶ Ἐρατοσθένης φησί· καὶ Δημόκριτος δὲ καὶ εὔδοξος καὶ Δικαίαρχος καὶ Ἔφορος καὶ ἄλλοι πλείους· ἔτι δὲ οἱ μετὰ τούτους, Ἐρατοσθένης τε καὶ Πολύβιος καὶ Ποσειδώνιος, ἄνδρες φιλόσοφοι. Ἥ τε πολυμάθεια, δι' ἧς μόνης ἐφικέσθαι τοῦδε τοῦ ἔργου δυνατόν, οὐκ ἄλλου τινός ἐστιν, ἢ τοῦ τὰ θεῖα καὶ τὰ ἀνθρώπεια ἐπιβλέποντος, ὧνπερ τὴν φιλοσοφίαν ἐπιστήμην φασίν. Ὡς δ' αὕτως καὶ ἡ ὠφέλεια ποικίλη τις οὖσα, ἡ μὲν πρὸς τὰ πολιτικὰ καὶ τὰς ἡγεμονικὰς πράξεις, ἡ δὲ πρὸς ἐπιστήμην τῶν τε οὐρανίων καὶ τῶν ἐπὶ γῆς καὶ θαλάττης ζῴων καὶ φυτῶν καὶ καρπῶν καὶ τῶν ἄλλων ὅσα ἰδεῖν παρ' ἑκάστοις ἔστι, τὸν αὐτὸν ὑπογράφει ἄνδρα, τὸν φροντίζοντα τῆς περὶ τὸν βίον τέχνης καὶ εὐδαιμονίας. 2. Ἀναλαβόντες δὲ καθ' ἕκαστον ἐπισκοπῶμεν τῶν εἰρημένων ἔτι μᾶλλον. Καὶ πρῶτον ὅτι ὀρθῶς ὑπειλήφαμεν καὶ ἡμεῖς καὶ οἱ πρὸ ἡμῶν, ὧν ἐστι καὶ Ἵππαρχος, ἀρχηγέτην εἶναι τῆς γεωγραφικῆς ἐμπειρίας Ὅμηρον· ὃς οὐ μόνον ἐν τῇ κατὰ τὴν ποίησιν ἀρετῇ πάντας ὑπερβέβληται τοὺς πάλαι καὶ τοὺς ὕστερον, ἀλλὰ σχεδόν τι καὶ τῇ κατὰ τὸν βίον ἐμπειρίᾳ τὸν πολιτικόν, ἀφ' ἧς οὐ μόνον περὶ τὰς πράξεις ἐσπούδασεν ἐκεῖνος, ὅπως ὅτι πλείστας γνοίη καὶ παραδώσει τοῖς ὕστερον ἐσομένοις, ἀλλὰ καὶ τὰ περὶ τοὺς τόπους τούς τε καθ' ἕκαστα καὶ τοὺς κατὰ σύμπασαν τὴν οἰκουμένην γῆν τε καὶ θάλατταν. Οὐ γὰρ ἂν μέχρι τῶν ἐσχάτων αὐτῆς περάτων ἀφίκετο τῇ μνήμῃ κύκλῳ περιιών. 3. Καὶ πρῶτον μὲν τῷ ὠκεανῷ περίκλυστον, ὥσπερ ἔστιν, ἀπέφαινεν αὐτήν· ἔπειτα δὲ τῶν χωρίων τὰ μὲν ὠνόμαζε, τὰ δὲ ὑπῃνίττετο τεκμηρίοις τισί, Λιβύην μὲν καὶ Αἰθιοπίαν καὶ Σιδονίους καὶ Ἐρεμβούς, οὓς εἰκὸς λέγειν Τρωγλοδύτας Ἄραβας, ῥητῶς λέγων, τοὺς δὲ πρὸς ταῖς ἀνατολαῖς καὶ δύσεσιν αἰνιττόμενος ἐκ τοῦ τῷ ὠκεανῷ κλύζεσθαι· ἐντεῦθεν γὰρ ἀνίσχοντα ποιεῖ τὸν ἥλιον καὶ δυόμενον εἰς τοῦτον, ὡς δ' αὕτως καὶ τὰ ἄστρα· καὶ τοὺς ἀστέρας λελουμένους ἐξ ὠκεανοῦ λέγει. 4. Τῶν δ' ἑσπερίων ἀνδρῶν καὶ τὴν εὐδαιμονίαν ἐμφανίζει καὶ τὴν εὐκρασίαν τοῦ περιέχοντος, πεπυσμένος, ὡς ἔοικε, τὸν Ἰβηρικὸν πλοῦτον, ἐφ' ὃν καὶ Ἡρακλῆς ἐστράτευσε καὶ οἱ Φοίνικες ὕστερον, οἵπερ καὶ κατέσχον τὴν πλείστην ἀρχήν, μετὰ δὲ ταῦτα Ῥωμαῖοι. Ἐνταῦθα γὰρ αἱ τοῦ ζεφύρου πνοαί. Ἐνταῦθα δὲ καὶ τὸ Ἠλύσιον ποιεῖ πεδίον ὁ ποιητής, εἰς ὃ πεμφθήσεσθαί φησι τὸν Μενέλαον ὑπὸ τῶν θεῶν
Ἀλλά
σ'
ἐς Ἠλύσιον
πεδίον καὶ
πείρατα
γαίης 5. Καὶ αἱ τῶν μακάρων δὲ νῆσοι πρὸ τῆς Μαυρουσίας εἰσὶ τῆς ἐσχάτης πρὸς δύσιν, καθ' ὃ μέρος συντρέχει καὶ τῆς Ἰβηρίας τὸ ταύτῃ πέρας· ἐκ δὲ τοῦ ὀνόματος δῆλον, ὅτι καὶ ταύτας ἐνόμιζον εὐδαίμονας διὰ τὸ πλησιάζειν τοιούτοις χωρίοις. 6. Ἀλλὰ μὴν ὅτι γε καὶ οἱ Αἰθίοπες ἐπὶ τῷ ὠκεανῷ ἔσχατοι, δηλοῖ· ὅτι μὲν ἔσχατοι, Αἰθίοπες, τοὶ διχθὰ δεδαίατα, ἔσχατοι ἀνδρῶν,
οὐδὲ τοῦ
«
διχθὰ
δεδαίαται
»
Ζεὺς γὰρ
ἐς ὠκεανὸν μετ'
ἀμύμονας
Αἰθιοπῆας Ὅτι δὲ καὶ ἡ πρὸς ταῖς ἄρκτοις ἐσχατιὰ παρωκεανῖτίς ἐστιν, οὕτως ᾐνίξατο εἰπὼν περὶ τῆς ἄρκτου· Οἴη δ' ἄμμορός ἐστι λοετρῶν ὠκεανοῖο. Οιὰ μὲν γὰρ τῆς ἄρκτου καὶ τῆς ἁμάξης τὸν ἀρκτικὸν δηλοῖ· οὐ γὰρ ἂν τοσούτων ἀστέρων ἐν τῷ αὐτῷ χωρίῳ περιφερομένων τῷ ἀεὶ φανερῷ οἴην ἄμμορον εἶπε λοετρῶν ὠκεανοῖο. Ὥστ' οὐκ εὖ ἀπειρίαν αὐτοῦ καταγινώσκουσιν, ὡς μίαν ἄρκτον ἀντὶ δυεῖν εἰδότος· οὐδὲ γὰρ εἰκὸς ἦν πω τὴν ἑτέραν ἠστροθετῆσθαι, ἀλλ' ἀφ' οὗ οἱ Φοίνικες ἐσημειώσαντο καὶ ἐχρῶντο πρὸς τὸν πλοῦν, παρελθεῖν καὶ εἰς τοὺς Ἕλληνας τὴν διάταξιν ταύτην, ὥσπερ καὶ τὸν Βερενίκης πλόκαμον, καὶ τὸν Κάνωβον, ἐχθὲς καὶ πρώην κατωνομασμένον· πολλοὺς δ' ἔτι νῦν ἀνωνύμους ὄντας, καθάπερ καὶ Ἄρατός φησιν.
Οὐδὲ
Κράτης
οὖν ὀρθῶς
γράφει, φεύγων τὰ μὴ φευκτά. Βελτίων δ' Ἡράκλειτος καὶ ὁμηρικώτερος, ὁμοίως ἀντὶ τοῦ ἀρκτικοῦ τὴν ἄρκτον ὀνομάζων · « ἠοῦς καὶ ἑσπέρης τέρματα ἡ ἄρκτος, καὶ ἀντίον τῆς ἄρκτου οὖρος αἰθρίου Διό ς. » Ὁ γὰρ ἀρκτικός ἐστι δύσεως καὶ ἀνατολῆς ὅρος, οὐχ ἡ ἄρκτος. Διὰ μὲν δὴ τῆς ἄρκτου, ἣν καὶ ἅμαξαν καλεῖ καὶ τὸν Ὠρίωνα δοκεύειν φησί, τὸν ἀρκτικὸν δηλοῖ· διὰ δὲ τοῦ ὠκεανοῦ τὸν ὁρίζοντα, εἰς ὃν καὶ ἐξ οὗ τὰς δύσεις καὶ τὰς ἀνατολὰς ποιεῖται. Εἰπὼν δὲ αὐτοῦ στρέφεσθαι καὶ ἀμοιρεῖν τοῦ ὠκεανοῦ οἶδεν, ὅτι κατὰ σημεῖον τὸ ἀρκτικώτατον τοῦ ὁρίζοντος γίνεται ὁ ἀρκτικός. Ἀκολούθως δὴ τούτῳ τὸ ποιητικὸν ἁρμόσαντες τὸν μὲν ὁρίζοντα ὀφείλομεν δέχεσθαι τὸν ἐπὶ τῆς γῆς οἰκείως τῷ ὠκεανῷ, τὸν δ' ἀρκτικὸν τῆς γῆς ἁπτόμενον ὡς ἂν πρὸς αἴσθησιν κατὰ τὸ ἀρκτικώτατον τῆς οἰκήσεως σημεῖον· ὥστε καὶ τοῦτο τὸ μέρος τῆς γῆς κλύζοιτ' ἂν τῷ ὠκεανῷ κατ' αὐτόν. Καὶ τοὺς ἀνθρώπους δὲ οἶδε τοὺς προσβορέους μάλιστα, οὓς ὀνομαστὶ μὲν οὐ δηλοῖ (οὐδὲ γὰρ νῦν που κοινὸν αὐτοῖς ὄνομα κεῖται πᾶσι), τῇ διαίτῃ δὲ φράζει, νομάδας αὐτοὺς ὑπογράφων καὶ « ἀγαυοὺς ἱππημολγοὺς γαλακτοφάγους ἀβίους τε.» 7. Καὶ ἄλλως δ' ἐμφαίνει τὸ κύκλῳ περικεῖσθαι τῇ γῇ τὸν ὠκεανόν, ὅταν οὕτω φῇ ἡ Ἥρα·
Εἶμι
γὰρ ὀψομένη
πολυφόρβου
πείρατα γαίης Τοῖς γὰρ πέρασι πᾶσι συνήθη λέγει τὸν ὠκεανόν· τὰ δὲ πέρατα κύκλῳ περίκειται· ἔν τε τῇ ὁπλοποιίᾳ τῆς Ἀχιλλέως ἀσπίδος κύκλῳ περιτίθησι τὸν ὠκεανὸν ἐπὶ τῆς ἴτυος. Ἔχεται δὲ τῆς αὐτῆς φιλοπραγμοσύνης καὶ τὸ μὴ ἀγνοεῖν τὰ περὶ τὰς πλημμυρίδας τοῦ ὠκεανοῦ καὶ τὰς ἀμπώτεις « ἀψορρόου ὠκεανοῖο », λέγοντα καί Τρὶς μὲν γάρ τ' ἀνίησιν ἐπ' ἤματι, τρὶς δ' ἀναροιβδεῖ. Καὶ γὰρ εἰ μὴ τρὶς ἀλλὰ δίς, τάχα τῆς ἱστορίας παραπεσόντος, ἢ τῆς γραφῆς διημαρτημένης · ἀλλ' ἥ γε προαίρεσις τοιαύτη. Καὶ τὸ « ἐξ ἀκαλαρρείταο » δὲ ἔχει τινὰ ἔμφασιν τῆς πλημμυρίδος, ἐχούσης τὴν ἐπίβασιν πραεῖαν καὶ οὐ τελέως ῥοώδη. Ποσειδώνιος δὲ καὶ ἐκ τοῦ σκοπέλους λέγειν τοτὲ μὲν καλυπτομένους, τοτὲ δὲ γυμνουμένους, καὶ ἐκ τοῦ ποταμὸν φάναι τὸν ὠκεανὸν εἰκάζει τὸ ῥοῶδες αὐτοῦ τὸ περὶ τὰς πλημμυρίδας ἐμφανίζεσθαι. Τὸ μὲν οὖν πρῶτον εὖ, τὸ δὲ δεύτερον οὐκ ἔχει λόγον· οὔτε γὰρ ποταμίῳ ῥεύματι ἔοικεν ἡ τῆς πλημμυρίδος ἐπίβασις, πολὺ δὲ μᾶλλον ἡ ἀναχώρησις οὐ τοιαύτη. Ὅ τε τοῦ Κράτητος λόγος διδάσκει τι πιθανώτερον. Βαθύρρουν μὲν γὰρ καὶ ἄψορρον λέγει, ὁμοίως δὲ καὶ ποταμὸν τὸν ὅλον ὠκεανόν· λέγει δὲ καὶ μέρος τοῦ ὠκεανοῦ τι ποταμὸν καὶ ποταμοῖο ῥόον, οὐ τοῦ ὅλου ἀλλὰ τοῦ μέρους, ὅταν οὕτω φῇ·
Αὐτὰρ
ἐπεὶ ποταμοῖο
λίπεν ῥόον
ὠκεανοῖο Οὐ γὰρ τὸν ὅλον, ἀλλὰ τὸν ἐν τῷ ὠκεανῷ τοῦ ποταμοῦ ῥόον μέρος ὄντα τοῦ ὠκεανοῦ, ὅν φησιν ὁ Κράτης ἀνάχυσίν τινα καὶ κόλπον ἐπὶ τὸν νότιον πόλον ἀπὸ τοῦ χειμερινοῦ τροπικοῦ διήκοντα. Τοῦτον γὰρ δύναιτ' ἄν τις ἐκλιπὼν ἔτι εἶναι ἐν τῷ ὠκεανῷ· τὸν δὲ ὅλον ἐκλιπόντα ἔτι εἶναι ἐν τῷ ὅλῳ οὐχ οἷόν τε. Ὅμηρος δέ γε οὕτω φησί·
Ποταμοῖο
λίπεν ῥόον, ἥτις οὐκ ἄλλη τίς ἐστιν ἀλλὰ ὠκεανός. γίνεται οὖν, ἐὰν ἄλλως δέχῃ, ἐκβὰς ἐκ τοῦ ὠκεανοῦ ἦλθεν εἰς τὸν ὠκεανόν. Ἀλλὰ ταῦτα μὲν μακροτέρας ἐστὶ διαίτης. 8. Ὅτι δὲ ἡ οἰκουμένη νῆσός ἐστι, πρῶτον μὲν ἐκ τῆς αἰσθήσεως, καὶ τῆς πείρας ληπτέον. Πανταχῆ γάρ, ὁπουποτοῦν ἐφικτὸν γέγονεν ἀνθρώποις ἐπὶ τὰ ἔσχατα τῆς γῆς προελθεῖν, εὑρίσκεται θάλαττα, ἣν δὴ καλοῦμεν ὠκεανόν. Καὶ ὅπου δὲ τῇ αἰσθήσει λαβεῖν οὐχ ὑπῆρξεν, ὁ λόγος δείκνυσι. Τὸ μὲν γὰρ ἑωθινὸν πλευρόν, τὸ κατὰ τοὺς Ἰνδούς, καὶ τὸ ἑσπέριον, τὸ κατὰ τοὺς Ἴβηρας καὶ τοὺς Μαυρουσίους, περιπλεῖται πᾶν ἐπὶ πολὺ τοῦ τε νοτίου μέρους καὶ τοῦ βορείου· τὸ δὲ λειπόμενον ἄπλουν ἡμῖν μέχρι νῦν τῷ μὴ συμμῖξαι μηδένας ἀλλήλοις τῶν ἀντιπεριπλεόντων οὐ πολύ, εἴ τις συντίθησιν ἐκ τῶν παραλλήλων διαστημάτων τῶν ἐφικτῶν ἡμῖν. Οὐκ εἰκὸς δὲ διθάλαττον εἶναι τὸ πέλαγος τὸ Ἀτλαντικόν, ἰσθμοῖς διειργόμενον οὕτω στενοῖς τοῖς κωλύουσι τὸν περίπλουν, ἀλλὰ μᾶλλον σύρρουν καὶ συνεχές. Οἵ τε γὰρ περιπλεῖν ἐγχειρήσαντες, εἶτα ἀναστρέψαντες, οὐχ ὑπὸ ἠπείρου τινὸς ἀντιπιπτούσης καὶ κωλυούσης τὸν ἐπέκεινα πλοῦν ἀνακρουσθῆναι φασίν, ἀλλὰ ὑπὸ ἀπορίας καὶ ἐρημίας, οὐδὲν ἧττον τῆς θαλάττης ἐχούσης τὸν πόρον. Τοῖς τε πάθεσι τοῦ ὠκεανοῦ τοῖς περὶ τὰς ἀμπώτεις καὶ τὰς πλημμυρίδας ὁμολογεῖ τοῦτο μᾶλλον· πάντη γοῦν ὁ αὐτὸς τρόπος τῶν τε μεταβολῶν ὑπάρχει καὶ τῶν αὐξήσεων καὶ μειώσεων, ἣ οὐ πολὺ παραλλάττων, ὡς ἂν ἐπὶ ἑνὸς πελάγους τῆς κινήσεως ἀποδι δομένης καὶ ἀπὸ μιᾶς αἰτίας. 9. Ἵππαρχος δ' οὐ πιθανός ἐστιν ἀντιλέγων τῇ δόξῃ ταύτῃ, ὡς οὔθ' ὁμοιοπαθοῦντος τοῦ ὠκεανοῦ παντελῶς οὔτ', εἰ δοθείη τοῦτο, ἀκολουθοῦντος αὐτῷ τοῦ σύρρουν εἶναι πᾶν τὸ κύκλῳ πέλαγος τὸ Ἀτλαντικόν, πρὸς τὸ μὴ ὁμοιοπαθεῖν μάρτυρι χρώμενος Σελεύκῳ τῷ Βαβυλωνίῳ. Ἡμεῖς δὲ τὸν μὲν πλείω λόγον περὶ τοῦ ὠκεανοῦ καὶ τῶν πλημμυρίδων εἰς Ποσειδώνιον ἀναβαλλόμεθα καὶ Ἀθηνόδωρον, ἱκανῶς διακρατήσαντας τὸν περὶ τούτων λόγον· πρὸς δὲ τὰ νῦν ἐπὶ τοσοῦτον λέγομεν, ὅτι πρός τε τὴν ὁμοιοπάθειαν οὕτω βέλτιον νομίσαι· τά τε οὐράνια συνέχοιτ' ἂν κρεῖττον ταῖς ἐντεῦθεν ἀναθυμιάσεσιν, εἰ πλεῖον εἴη τὸ ὑγρὸν περικεχυμένον. 10. Ὥσπερ οὖν τὰ ἔσχατα καὶ τὰ κύκλῳ τῆς οἰκουμένης οἶδε καὶ φράζει σαφῶς ὁ ποιητής, οὕτω καὶ τὰ τῆς θαλάττης τῆς ἐντός. Περιέχει γὰρ ταύτην ἀπὸ Στηλῶν ἀρξαμένοις Λιβύη τε καὶ Σἴγυπτος καὶ Φοινίκη, ἑξῆς δὲ ἡ πέριξ τῆς Κύπρου, εἶτα Σόλυμοι καὶ Λύκιοι καὶ Κᾶρες, μετὰ δὲ τούτους ἡ μεταξὺ Μυκάλης καὶ τῆς Τρῳάδος ἠιὼν καὶ αἱ προκείμεναι νῆσοι, ὧν ἁπάντων μέμνηται· καὶ ἐφεξῆς τῶν περὶ τὴν Προποντίδα καὶ τοῦ Εὐξείνου μέχρι Κολχίδος καὶ τῆς Ἰάσονος στρατείας. Καὶ μὴν καὶ τὸν Κιμμερικὸν Βόσπορον οἶδε, τοὺς Κιμμερίους εἰδώς· οὐ δήπου τὸ μὲν ὄνομα τῶν Κιμμερίων εἰδὼς, αὐτοὺς δὲ ἀγνοῶν, οἳ κατ' αὐτὸν ἢ μικρὸν πρὸ αὐτοῦ μέχρι Ἰωνίας ἐπέδραμον τὴν γῆν τὴν ἐκ Βοσπόρου πᾶσαν. Αἰνίττεται γοῦν καὶ τὸ κλίμα τῆς χώρας αὐτῶν ζοφῶδες ὄν, καὶ ὡς φησίν,
Ἠέρι
καὶ νεφέλῃ
κεκαλυμμένοι·
οὐδέ ποτ'
αὐτοὺς Γνωρίζει δὲ καὶ τὸν Ἴστρον, μεμνημένος γε Μυσῶν, ἔθνους Θρᾳκίου παροικοῦντος τὸν Ἴστρον. Καὶ μὴν καὶ τὴν ἑξῆς παραλίαν οἶδε, Θρᾳκίαν οὖσαν μέχρι Πηνειοῦ, Παίονάς τε ὀνομάζων καὶ Ἄθω καὶ Ἀξιὸν καὶ τὰς προκειμένας τούτων νήσους. Ἑξῆς δέ ἐστιν ἡ τῶν Ἑλλήνων παραλία μέχρι Θεσπρωτῶν, ἧς ἁπάσης μέμνηται. Καὶ μὴν καὶ τὰ τῆς Ἰταλίας ἄκρα οἶδε, Τεμέσην καλῶν καὶ Σικελούς, καὶ τὰ τῆς Ἰβηρίας ἄκρα καὶ τὴν εὐδαιμονίαν αὐτῶν, ἣν ἀρτίως ἔφαμεν. Εἰ δέ τινα ἐν τοῖς μεταξὺ διαλείμματα φαίνεται, συγγνοίη τις ἄν· καὶ γὰρ ὁ γεωγραφῶν ὄντως πολλὰ παρίησι τῶν ἐν μέρει. Συγγνοίη δ' ἂν, καὶ εἰ μυθώδη τινὰ προσπέπλεκται τοῖς λεγομένοις ἱστορικῶς καὶ διδασκαλικῶς, καὶ οὐ δεῖ μέμφεσθαι. Οὐδὲ γὰρ ἀληθές ἐστιν, ὅ φησιν Ἐρατοσθένης, ὅτι ποιητὴς πᾶς στοχάζεται ψυχαγωγίας, οὐ διδασκαλίας (χ άριν)· τἀναντία γὰρ οἱ φρονιμώτατοι τῶν περὶ ποιητικῆς τι φθεγξαμένων πρώτην τινὰ λέ γουσι φιλοσοφίαν τὴν ποιητικήν. Ἀλλὰ πρὸς Ἐρατοσθένη μὲν αὖθις ἐροῦμεν διὰ πλειόνων, ἐν οἷς καὶ περὶ τοῦ ποιητοῦ πάλιν ἔσται λόγος. 11. Νυνὶ δὲ ὅτι μὲν Ὅμηρος τῆς γεωγραφίας ἦρξεν, ἀρκείτω τὰ λεχθέντα. Φανεροὶ δὲ καὶ οἱ ἐπακολουθήσαντες αὐτῷ ἄνδρες ἀξιόλογοι καὶ οἰκεῖοι φιλοσοφίας· ὧν τοὺς πρώτους μεθ' Ὅμηρον δύο φησὶν Ἐρατοσθένης, Ἀναξίμανδρόν τε, Θαλοῦ γεγονότα γνώριμον καὶ πολίτην, καὶ Ἑκαταῖον τὸν Μιλήσιον· τὸν μὲν οὖν ἐκδοῦναι πρῶτον γεωγραφικὸν πίνακα, τὸν δὲ Ἑκαταῖον καταλιπεῖν γράμμα, πιστούμενον ἐκείνου εἶναι ἐκ τῆς ἄλλης αὐτοῦ γραφῆς. 12. Ἀλλὰ μὴν ὅτι γε δεῖ πρὸς ταῦτα πολυμαθείας, εἰρήκασι συχνοί. Εὖ δὲ καὶ Ἵππαρχος ἐν τοῖς πρὸς Ἐρατοσθένην διδάσκει, ὅτι παντὶ, καὶ ἰδιώτῃ καὶ τῷ φιλομαθοῦντι, τῆς γεωγραφικῆς ἱστορίας προσηκούσης ἀδύνατον λαβεῖν ἄνευ τῆς τῶν οὐρανίων καὶ τῆς τῶν ἐκλειπτικῶν τηρήσεων ἐπικρίσεως· οἷον Ἀλεξάνδρειαν τὴν πρὸς Αἰγύπτῳ, πότερον ἀρκτικωτέρα Βαβυλῶνος ἢ νοτιωτέρα, λαβεῖν οὐχ οἷόν τε, οὐδ' ἐφ' ὁπόσον διάστημα, χωρὶς τῆς διὰ τῶν κλιμάτων ἐπισκέψεως· ὁμοίως τὰς πρὸς ἕω παρακεχωρηκυίας ἢ πρὸς δύσιν μᾶλλον καὶ ἧττον οὐκ ἂν γνοίη τις ἀκριβῶς, πλὴν ἢ διὰ τῶν ἐκλειπτικῶν ἡλίου καὶ σελήνης συγκρίσεων. Οὗτός τε δὴ ταῦτά φησιν. 13. Ἅπάντες, ὅσοι τόπων ἰδιότητας λέγειν ἐπιχειροῦσιν, οἰκείως προσάπτονται καὶ τῶν οὐρανίων καὶ γεωμετρίας, σχήματα καὶ μεγέθη καὶ ἀποστήματα καὶ κλίματα δηλοῦντες καὶ θάλπη καὶ ψύχη καὶ ἁπλῶς τὴν τοῦ περιέχοντος φύσιν. Ἐπεὶ καὶ οἶκον κατασκευάζων οἰκοδόμος ταῦτα ἂν προορῷτο καὶ πόλιν κτίζων ἀρχιτέκτων, μή τί γε ὅλην ἐπισκοπῶν τὴν οἰκουμένην ἀνήρ· πολὺ γὰρ τούτῳ προσήκει μᾶλλον. Ἐν μὲν γὰρ τοῖς μικροῖς χωρίοις τὸ πρὸς ἄρκτους ἢ πρὸς νότον κεκλίσθαι παραλλαγὴν οὐ πολλὴν ἔχει, ἐν δὲ τῷ παντὶ κύκλῳ τῆς οἰκουμένης πρὸς ἄρκτον μὲν τὸ μέχρι τῶν ὑστάτων ἐστὶ τῆς Σκυθίας ἢ τῆς Κελτικῆς, μέχρι δὲ τῶν ὑστάτων Αἰθιόπων τὰ πρὸς νότον· τοῦτο δὲ παμπόλλην ἔχει διαφοράν. Ὁμοίως δὲ καὶ τὸ παρ' Ἰνδοῖς οἰκεῖν ἢ παρ' Ἴβηρσιν· ὧν τοὺς μὲν ἑῴους μάλιστα τοὺς δὲ ἑσπερίους, τρόπον δέ τινα καὶ ἀντίποδας ἀλλήλοις ἴσμεν. 14. Πᾶν δὲ τὸ τοιοῦτον ἐκ τῆς τοῦ ἡλίου καὶ τῶν ἄλλων ἄστρων κινήσεως τὴν ἀρχὴν ἔχον καὶ ἔτι τῆς ἐπὶ τὸ μέσον φορᾶς ἀναβλέπειν ἀναγκάζει πρὸς τὸν οὐρανὸν καὶ πρὸς τὰ φαινόμενα παρ' ἑκάστοις ἡμῶν τῶν οὐρανίων· ἐν δὲ τούτοις ἐξαλλάξεις ὁρῶνται παμμεγέθεις τῶν οἰκήσεων. Τίς ἂν οὖν διαφορὰς τόπων ἐκτιθέμενος καλῶς καὶ ἱκανῶς διδάσκοι, μὴ φροντίσας τούτων μηδενὸς μηδ' ἐπὶ μικρόν; καὶ γὰρ εἰ μὴ δυνατὸν κατὰ τὴν ὑπόθεσιν τὴν τοιαύτην ἅπαντα ἀκριβοῦν διὰ τὸ εἶναι πολιτικωτέραν, τό γε ἐπὶ τοσοῦτον, ἐφ' ὅσον καὶ τῷ πολιτικῷ παρακολουθεῖν δυνατόν, προσήκοι ἂν εἰκότως.
15.
Ὁ δ' οὕτω
μετεωρίσας
ἤδη τὴν
διάνοιαν οὐδὲ
τῆς ὅλης
ἀπέχεται γῆς.
Φαίνεται
γὰρ γελοῖον,
εἰ τὴν
οἰκουμένην
γλιχόμενος
σαφῶς
ἐξειπεῖν τῶν
μὲν οὐρανίων
ἐτόλμησεν
ἅψασθαι καὶ
χρήσασθαι
πρὸς τὴν
διδασκαλίαν,
τὴν δ' ὅλην
γῆν, ἧς
μέρος ἡ
οἰκουμένη,
μήθ' ὁπόση,
μήθ' ὁποία
τις, μήθ' ὅπου
κειμένη τοῦ
σύμπαντος
κόσμου, μηδὲν
ἐφρόντισε·
μηδ' εἰ
καθ' ἓν
μέρος
οἰκεῖται
μόνον τὸ καθ'
ἡμᾶς ἢ κατὰ
πλείω (ἢ) καὶ
πόσα·
ὡς δ' αὕτως
καὶ τὸ
ἀοίκητον
αὐτῆς πόσον
καὶ ποῖόν τι
καὶ διὰ τί.
Ἔοικεν
οὖν
μετεωρολογικῇ
τινι
πραγματείᾳ
καὶ
γεωμετρικῇ
συνῆφθαι τὸ
τῆς
γεωγραφίας
εἶδος, τὰ
ἐπίγεια τοῖς
οὐρανίοις
συνάπτον εἰς
ἕν, ὡς
ἐγγυτάτω ὄντα,
ἀλλὰ μὴ
διεστῶτα
τοσοῦτον 16. Φέρε δὴ τῇ τοσαύτῃ πολυμαθείᾳ προσθῶμεν τὴν ἐπίγειον ἱστορίαν, οἷον ζῴων καὶ φυτῶν καὶ τῶν ἄλλων, ὅσα χρήσιμα ἢ δύσχρηστα φέρει γῆ τε καὶ θάλασσα. Οἶμαι γὰρ ἐναργὲς ἂν γενέσθαι μᾶλλον ὃ λέγω. Ὅτι δὲ καὶ τὸ ὄφελος μέγα παντὶ τῷ παραλαβόντι τὴν τοιαύτην ἱστορίαν ἔκ τε τῆς παλαιᾶς μνήμης δῆλον καὶ ἐκ τοῦ λόγου. Οἱ γοῦν ποιηταὶ φρονιμωτάτους τῶν ἡρώων ἀποφαίνουσι τοὺς ἀποδημήσαντας πολλαχοῦ καὶ πλανηθέντας· ἐν μεγάλῳ γὰρ τίθενται τὸ « πολλῶν ἀνθρώπων ἰδεῖν ἄστεα καὶ νόον γνῶναι», καὶ ὁ Νέστωρ σεμνύνεται διότι τοῖς Λαπίθαις ὡμίλησεν, ἐλθὼν μετάπεμπτος Τηλόθεν ἐξ ἀπίης γαίης· καλέσαντο γὰρ αὐτοί. Καὶ ὁ Μενέλαος ὡσαύτως,
Κύπρον Φοινίκην
τε καὶ
αἰγυπτίους
ἐπαληθεὶς Πάντα γὰρ τὰ τοιαῦτα παρασκευαί τινες εἰς φρόνησιν μεγάλαι τῷ μαθεῖν τῆς χώρας τὴν φύσιν καὶ ζῴων καὶ φυτῶν ἰδέας. Προςθεῖναι δὲ καὶ τὰ τῆς θαλάττης· ἀμφίβιοι γὰρ τρόπον τινά ἐσμεν καὶ οὐ μᾶλλον χερσαῖοι ἢ θαλάττιοι. Καὶ τὸν Ἡρακλέα εἰκὸς ἀπὸ τῆς πολλῆς ἐμπειρίας τε καὶ ἱστορίας λεχθῆναι Μεγάλων ἐπιίστορα ἔργων. Ἔκ τε δὴ τῆς παλαιᾶς μνήμης καὶ ἐκ τοῦ λόγου μαρτυρεῖται τὰ λεχθέντα ἐν ἀρχαῖς ὑφ' ἡμῶν. Διαφερόντως δ' ἐπάγεσθαι δοκεῖ μοι πρὸς τὰ νῦν ἐκεῖνος ὁ λόγος, διότι τῆς γεωγραφίας τὸ πλέον ἐστὶ πρὸς τὰς χρείας τὰς πολιτικάς. Χώρα γὰρ τῶν πράξεων ἐστὶ γῆ καὶ θάλαττα, ἣν οἰκοῦμεν· τῶν μὲν μικρῶν μικρὰ τῶν δὲ μεγάλων μεγάλη· μεγίστη δ' ἡ σύμπασα, ἥνπερ ἰδίως καλοῦμεν οἰκουμένην, ὥστε τῶν μεγίστων πράξεων αὕτη ἂν εἴη χώρα. Μέγιστοι δὲ τῶν στρατηλατῶν, ὅσοι δύνανται γῆς καὶ θαλάττης ἄρχειν, ἔθνη καὶ πόλεις συνάγοντες εἰς μίαν ἐξουσίαν καὶ διοίκησιν πολιτικήν. Δῆλον οὖν ὅτι ἡ γεωγραφικὴ πᾶσα ἐπὶ τὰς πράξεις ἀνάγεται τὰς ἡγεμονικάς, διατιθεῖσα ἠπείρους καὶ πελάγη τὰ μὲν ἐντὸς τὰ δὲ ἐκτὸς τῆς συμπάσης οἰκουμένης. Πρὸς τούτους δὲ ἡ διάθεσις, οἷς διαφέρει ταῦτα ἔχειν οὕτως ἢ ἑτέρως, καὶ γνώριμα εἶναι ἢ μὴ γνώριμα. Βέλτιον γὰρ ἂν διαχειρίζοιεν ἕκαστα, εἰδότες τὴν χώραν ὁπόση τις καὶ πῶς κειμένη τυγχάνει καὶ τίνας διαφορὰς ἴσχουσα, τάς τ' ἐν τῷ περιέχοντι καὶ τὰς ἐν αὐτῇ. Ἄλλων δὲ κατ' ἄλλα μέρη δυναστευόντων καὶ ἀπ' ἄλλης ἑστίας καὶ ἀρχῆς τὰς πράξεις προχειριζομένων καὶ ἐπεκτεινόντων τὸ τῆς ἡγεμονίας μέγεθος, οὐκ ἐπ' ἴσης δυνατὸν οὔτ' ἐκείνοις ἅπαντα γνωρίζειν οὔτε τοῖς γεωγραφοῦσιν· ἀλλὰ τὸ μᾶλλον καὶ ἧττον πολὺ ἐν ἀμφοτέροις καθορᾶται τούτοις. Μόλις γὰρ [ἂν] τὸ ἐπ' ἴσης πάντ' εἶναι φανερὰ συμβαίη τῆς συμπάσης οἰκουμένης ὑπὸ μίαν ἀρχὴν καὶ πολιτείαν ὑπηγμένης· ἀλλ' οὐδ' οὕτως, ἀλλὰ τὰ ἐγγυτέρω μᾶλλον ἂν γνωρίζοιτο. Κἂν προσήκοι ταῦτα διὰ πλειόνων ἐμφανίζειν, ἵν' εἴη γνώριμα· ταῦτα γὰρ καὶ τῆς χρείας ἐγγυτέρω ἐστίν. Ὥστ' οὐκ ἂν εἴη θαυμαστὸν οὐδ' εἰ ἄλλος μὲν Ἰνδοῖς προσήκοι χωρογράφος, ἄλλος δὲ Αἰθίοψιν, ἄλλος δὲ Ἕλλησι καὶ Ῥωμαίοις. Τί γὰρ ἂν προσήκοι τῷ παρ' Ἰνδοῖς γεωγράφῳ καὶ τὰ κατὰ Βοιωτοὺς οὕτω φράζειν, ὡς Ὅμηρος·
Οἵθ'
Ὑρίην ἐνέμοντο
καὶ
Αὐλίδα
πετρήεσσαν ἡμῖν δὲ προσήκει· τὰ δὲ παρ' Ἰνδοῖς οὕτω καὶ τὰ καθ' ἕκαστα οὐκέτι. Οὐδὲ γὰρ ἡ χρεία ἐπάγεται · μέτρον δ' αὕτη μάλιστα τῆς τοιαύτης ἐμπειρίας. 17. Καὶ τοῦτο καὶ ἐν μικροῖς μὲν δῆλόν ἐστιν, οἷον ἐν τοῖς κυνηγεσίοις. Ἄμεινον γὰρ ἂν θηρεύσειέ τις εἰδὼς τὴν ὕλην, ὁποία τις καὶ πόση· καὶ στρατοπεδεῦσαι δὲ καλῶς ἐν χωρίῳ τοῦ εἰδότος ἐστὶ καὶ ἐνεδρεῦσαι καὶ ὁδεῦσαι. Ἀλλ' ἐν τοῖς μεγάλοις ἐστὶ τηλαυγέστερον, ὅσῳπερ καὶ τὰ ἆθλα μείζω τὰ τῆς ἐμπειρίας καὶ τὰ σφάλματα [τὰ] ἐκ τῆς ἀπειρίας. Ὁ μέντοι Ἀγαμέμνονος στόλος τὴν Μυσίαν ὡς τὴν Τρῳάδα πορθῶν ἐπαλινδρόμησεν αἰσχρῶς. Πέρσαι δὲ καὶ Λίβυες, τοὺς πορθμοὺς ὑπονοήσαντες εἶναι τυφλοὺς στενωπούς, ἐγγὺς μὲν ἦλθον κινδύνων μεγάλων, τρόπαια δὲ τῆς ἀγνοίας κατέλιπον· οἱ μὲν τὸν τοῦ Σαλγανέως τάφον πρὸς τῷ Εὐρίπῳ τῷ Χαλκιδικῷ τοῦ σφαγέντος ὑπὸ τῶν Περσῶν ὡς καθοδηγήσαντος φαύλως ἀπὸ Μαλιέων ἐπὶ τὸν εὔριπον τὸν στόλον· οἱ δὲ τὸ τοῦ Πελώρου μνῆμα καὶ τούτου διαφθαρέντος κατὰ τὴν ὁμοίαν αἰτίαν· πλήρης τε ναυαγίων ἡ Ἑλλὰς ὑπῆρξε κατὰ τὴν Ξέρξου στρατείαν, καὶ ἡ τῶν Αἰολέων δὲ καὶ ἡ τῶν Ἰώνων ἀποικία πολλὰ τοιαῦτα πταίσματα παραδέδωκεν. Ὁμοίως δὲ καὶ κατορθώματα, ὅπου τι κατορθωθῆναι συνέβη παρὰ τὴν ἐμπειρίαν τῶν τόπων· καθάπερ ἐν τοῖς περὶ Θερμοπύλας στενοῖς ὁ Ἐφιάλτης λέγεται δείξας τὴν διὰ τῶν ὀρῶν ἀτραπὸν τοῖς Πέρσαις ὑποχειρίους αὐτοῖς ποιῆσαι τοὺς περὶ Λεωνίδαν καὶ δέξασθαι τοὺς βαρβάρους εἴσω Πυλῶν. Ἐάσας δὲ τὰ παλαιὰ τὴν νῦν Ῥωμαίων στρατείαν ἐπὶ Παρθυαίους ἱκανὸν ἡγοῦμαι τούτων τεκμήριον· ὡς δ' αὕτως τὴν ἐπὶ Γερμανοὺς καὶ Κελτούς, ἐν ἕλεσι καὶ δρυμοῖς ἀβάτοις ἐρημίαις τε τοπομαχούντων τῶν βαρβάρων καὶ τὰ ἐγγὺς πόρρω ποιούντων τοῖς ἀγνοοῦσι καὶ τὰς ὁδοὺς ἐπικρυπτομένων καὶ τὰς εὐπορίας τροφῆς τε καὶ τῶν ἄλλων. 18. Τὸ μὲν δὴ πλέον, ὥσπερ εἴρηται, πρὸς τοὺς ἡγεμονικοὺς βίους καὶ τὰς χρείας· ἔτι δὲ καὶ τῆς ἠθικῆς φιλοσοφίας καὶ πολιτικῆς τὸ πλέον περὶ τοὺς ἡγεμονικοὺς βίους. Σημεῖον δέ· τὰς γὰρ τῶν πολιτειῶν διαφορὰς ἀπὸ τῶν ἡγεμονιῶν διακρίνομεν, ἄλλην μὲν ἡγεμονίαν τιθέντες τὴν μοναρχίαν, ἣν καὶ βασιλείαν καλοῦμεν, ἄλλην δὲ τὴν ἀριστοκρατίαν, τρίτην δὲ τὴν δημοκρατίαν. Τοσαύτας δὲ καὶ τὰς πολιτείας νομίζομεν, ὁμωνύμως καλοῦντες ὡς ἂν ἀπ' ἐκείνων τὴν ἀρχὴν ἐχούσας τῆς εἰδοποιίας· ἄλλος γὰρ νόμος τὸ τοῦ βασιλέως πρόσταγμα, ἄλλος δὲ τὸ τῶν ἀρίστων καὶ τὸ τοῦ δήμου. Τύπος δὲ καὶ σχῆμα πολιτείας ὁ νόμος. Διὰ τοῦτο δὲ καὶ τὸ δίκαιον εἶπόν τινες τὸ τοῦ κρείττονος συμφέρον. Εἴπερ οὖν ἡ πολιτικὴ φιλοσοφία περὶ τοὺς ἡγεμόνας τὸ πλέον ἐστίν, ἔστι δὲ καὶ ἡ γεωγραφία περὶ τὰς ἡγεμονικὰς χρείας, ἔχοι ἄν τι πλεονέκτημα καὶ αὕτη παρὰ τοῦτο. Ἀλλὰ τοῦτο μὲν τὸ πλεονέκτημα πρὸς τὰς πράξεις. 19. Ἔχει δέ τινα καὶ θεωρίαν οὐ φαύλην ἡ πραγματεία, τὴν μὲν τεχνικήν τε καὶ μαθηματικὴν καὶ φυσικήν, τὴν δὲ ἐν ἱστορίᾳ καὶ μύθοις κειμένην οὐδὲν οὖσι πρὸς τὰς πράξεις· οἷον εἴ τις λέγοι τὰ περὶ τὴν Ὀδυσσέως πλάνην καὶ Μενελάου καὶ Ἰάσονος, εἰς φρόνησιν μὲν οὐδὲν ἂν συλλαμβάνειν δόξειεν, ἣν ὁ πράττων ζητεῖ, πλὴν εἰ καταμίσγοι καὶ τῶν γενομένων ἀναγκαίων τὰ παραδείγματα χρήσιμα· διαγωγὴν δ' ὅμως πορίζοι ἂν οὐκ ἀνελεύθερον τῷ ἐπιβάλλοντι ἐπὶ τοὺς τόπους τοὺς παρασχόντας τὴν μυθοποιίαν. Καὶ γὰρ τοῦτο ζητοῦσιν οἱ πράττοντες διὰ τὸ ἔνδοξον καὶ τὸ ἡδύ, ἀλλ' οὐκ ἐπὶ πολύ· μᾶλλον γὰρ σπουδάζουσιν, ὡς εἰκός, περὶ τὰ χρήσιμα. διόπερ καὶ τῷ γεωγράφῳ τούτων μᾶλλον ἢ ἐκείνων ἐπιμελητέον. ὡς δ' αὕτως ἔχει καὶ περὶ τῆς ἱστορίας καὶ περὶ τῶν μαθημάτων· καὶ γὰρ τούτων τὸ χρήσιμον ἀεὶ μᾶλλον ληπτέον καὶ τὸ πιστότερον. 20. Μάλιστα δὲ δοκεῖ, καθάπερ εἴρηται, γεωμετρίας τε καὶ ἀστρονομίας δεῖν τῇ τοιαύτῃ ὑποθέσει. Καὶ δεῖ μὲν ὡς ἀληθῶς· σχήματα γὰρ καὶ κλίματα καὶ μεγέθη καὶ τὰ ἄλλα τὰ τούτοις οἰκεῖα οὐχ οἷόν τε λαβεῖν καλῶς ἄνευ τῆς τοιαύτης μεθόδου. ἀλλ' ὥσπερ τὰ περὶ τὴν ἀναμέτρησιν τῆς ὅλης γῆς ἐν ἄλλοις δεικνύουσιν, ἐνταῦθα δὲ ὑποθέσθαι δεῖ καὶ πιστεῦσαι τοῖς ἐκεῖ δειχθεῖσιν· ὑποθέσθαι δὲ καὶ σφαιροειδῆ μὲν τὸν κόσμον, σφαιροειδῆ δὲ καὶ τὴν ἐπιφάνειαν τῆς γῆς, ἔτι δὲ τούτων πρότερον τὴν ἐπὶ τὸ μέσον τῶν σωμάτων φοράν. Ταῦτα μὲν οὖν ἐπεὶ τῆς αἰσθήσεως ἢ τῶν κοινῶν ἐννοιῶν ἐγγύς ἐστιν, εἰ ἄρα, ἐπισημηνάμεθ' ἂν ἐπὶ κεφαλαίῳ μικρά· οἷον ὅτι ἡ γῆ σφαιροειδής, ἐκ μὲν τῆς ἐπὶ τὸ μέσον φορᾶς πόρρωθεν ἡ ὑπόμνησις καὶ τοῦ ἕκαστον σῶμα ἐπὶ τὸ αὑτοῦ ἄρτημα νεύειν, ἐκ δὲ τῶν κατὰ πελάγη καὶ τὸν οὐρανὸν φαινομένων ἐγγύθεν· καὶ γὰρ ἡ αἴσθησις ἐπιμαρτυρεῖν δύναται καὶ ἡ κοινὴ ἔννοια. Φανερῶς γὰρ ἐπιπροσθεῖ τοῖς πλέουσιν ἡ κυρτότης τῆς θαλάττης, ὥστε μὴ προσβάλλειν τοῖς πόρρω φέγγεσι τοῖς ἐπ' ἴσον ἐξῃρμένοις τῇ ὄψει. Ἐξαρθέντα γοῦν πλέον τῆς ὄψεως ἐφάνη, καίτοι πλέον ἀποσχόντα αὐτῆς· ὁμοίως δὲ καὶ αὐτὴ μετεωρισθεῖσα εἶδε τὰ κεκρυμμένα πρότερον. Ὅπερ δηλοῖ καὶ ὁ ποιητής· τοιοῦτον γάρ ἐστι καὶ τό ὀξὺ μάλα προιιδών, μεγάλου ὑπὸ κύματος ἀρθείς. Καὶ τοῖς προσπλέουσι δὲ ἀεὶ καὶ μᾶλλον ἀπογυμνοῦται τὰ πρόσγεια μέρη καὶ τὰ φανέντα ἐν ἀρχαῖς ταπεινὰ ἐξαίρεται μᾶλλον. Τῶν τε οὐρανίων ἡ περιφορὰ ἐναργής ἐστι καὶ ἄλλως καὶ ἐκ τῶν γνωμονικῶν· ἐκ δὲ τούτων εὐθὺς ὑποτείνει καὶ ἡ ἔννοια, ὅτι ἐρριζωμένης ἐπ' ἄπειρον τῆς γῆς οὐκ ἂν ἡ τοιαύτη περιφορὰ συνέβαινε. Καὶ τὰ περὶ τῶν κλιμάτων δὲ ἐν τοῖς περὶ τῶν οἰκήσεων δείκνυται. 21. Νυνὶ δὲ ἐξ ἑτοίμου δεῖ λαβεῖν ἔνια, καὶ ταῦθ' ὅσα τῷ πολιτικῷ καὶ τῷ στρατηλάτῃ χρήσιμα. Οὔτε γὰρ οὕτω δεῖ ἀγνοεῖν τὰ περὶ τὸν οὐρανὸν καὶ τὴν θέσιν τῆς γῆς, ὥστ' ἐπειδὰν γένηται κατὰ τόπους, καθ' οὓς ἐξήλλακταί τινα τῶν φαινομένων τοῖς πολλοῖς ἐν τῷ οὐρανῷ, ταράττεσθαι καὶ τοιαῦτα λέγειν·
Ὦ
φίλοι, οὐ
γάρ τ' ἴδμεν ὅπη
ζόφος, οὐδ'
ὅπη ἠώς, οὔθ' οὕτως ἀκριβοῦν, ὥστε τὰς πανταχοῦ συνανατολάς τε καὶ συγκαταδύσεις καὶ συμμεσουρανήσεις καὶ ἐξάρματα πόλων καὶ τὰ κατὰ κορυφὴν σημεῖα καὶ ὅσα ἄλλα τοιαῦτα κατὰ τὰς μεταπτώσεις τῶν ὁριζόντων ἅμα καὶ τῶν ἀρκτικῶν διαφέροντα ἀπαντᾷ· τὰ μὲν πρὸς τὴν ὄψιν, τὰ δὲ καὶ τῇ φύσει, γνωρίζειν ἅπαντα· ἀλλὰ τὰ μὲν μηδ' ὅλως φροντίζειν, πλὴν εἰ θέας φιλοσόφου χάριν, τοῖς δὲ πιστεύειν, κἂν μὴ βλέπῃ τὸ διὰ τί. Καὶ γὰρ τοῦτο τοῦ φιλοσοφοῦντος μόνου, τῷ δὲ πολιτικῷ σχολῆς οὐ τοσαύτης μέτεστιν, ἢ οὐκ ἀεί. Οὐ μὴν οὐδ' οὕτως ὑπάρχειν ἁπλοῦν δεῖ τὸν ἐντυγχάνοντα τῇ γραφῇ ταύτῃ καὶ ἀργόν, ὥστε μηδὲ σφαῖραν ἰδεῖν, μηδὲ κύκλους ἐν αὐτῇ, τοὺς μὲν παραλλήλους, τοὺς δ' ὀρθίους πρὸς τούτους, τοὺς δὲ λοξούς· μηδὲ τρο πικῶν τε καὶ ἰσημερινοῦ καὶ ζωδιακοῦ θέσιν, δι' οὗ φερόμενος ὁ ἥλιος τρέπεται καὶ διδάσκει διαφορὰς κλιμάτων τε καὶ ἀνέμων. Ταῦτα γὰρ καὶ τὰ περὶ τοὺς ὁρίζοντας καὶ τοὺς ἀρκτικοὺς καὶ ὅσα ἄλλα κατὰ τὴν πρώτην ἀγωγὴν τὴν εἰς τὰ μαθήματα παραδίδοται κατανοήσας τις ἄλλως πως δύναται παρακολουθεῖν τοῖς λεγομένοις ἐνταῦθα; ὁ [ δὲ] μηδ' εὐθεῖαν γραμμὴν ἢ περιφερῆ, μηδὲ κύκλον εἰδώς, μηδὲ σφαιρικὴν ἐπιφάνειαν ἢ ἐπίπεδον, μηδ' ἐν τῷ οὐρανῷ μηδὲ τοὺς ἑπτὰ τῆς μεγάλης ἄρκτου ἀστέρας καταμαθὼν, μηδ' ἄλλο τι τῶν τοιούτων μηδέν, ἢ οὐκ ἂν δέοιτο τῆς πραγματείας ταύτης ἢ οὐχὶ νῦν, ἀλλ' ἐκείνοις ἐντυχὼν πρότερον, ὧν χωρὶς οὐκ ἂν εἴη γεωγραφίας οἰκεῖος. 22. Ἁπλῶς δὲ κοινὸν εἶναι τὸ σύγγραμμα τοῦτο δεῖ καὶ πολιτικὸν καὶ δημωφελὲς ὁμοίως ὥσπερ τὴν τῆς ἱστορίας γραφήν. Κἀκεῖ δὲ πολιτικὸν λέγομεν οὐχὶ τὸν παντάπασιν ἀπαίδευτον, ἀλλὰ τὸν μετασχόντα τῆς τε ἐγκυκλίου καὶ συνήθους ἀγωγῆς τοῖς ἐλευθέροις καὶ τοῖς φιλοσοφοῦσιν· οὐδὲ γὰρ ἂν οὔτε ψέγειν δύναιτο καλῶς οὔτ' ἐπαινεῖν, οὐδὲ κρίνειν ὅσα μνήμης ἄξια τῶν γεγονότων, ὅτῳ μηδὲν ἐμέλησεν ἀρετῆς καὶ φρονήσεως καὶ τῶν εἰς ταῦτα λόγων. Οὕτως δὲ καὶ οἱ τοὺς λιμένας καὶ τοὺς περίπλους καλουμένους πραγματευθέντες ἀτελῆ τὴν ἐπίσκεψιν ποιοῦνται, μὴ προστιθέντες ὅσα ἐκ τῶν μαθημάτων καὶ ἐκ τῶν οὐρανίων συνάπτειν προσῆκε. 23. Διόπερ ἡμεῖς πεποιηκότες ὑπομνήματα ἱστορικὰ χρήσιμα, ὡς ὑπολαμβάνομεν, εἰς τὴν ἠθικὴν καὶ πολιτικὴν φιλοσοφίαν, ἔγνωμεν προσθεῖναι καὶ τήνδε τὴν σύνταξιν· ὁμοειδὴς γὰρ καὶ αὕτη, καὶ πρὸς τοὺς αὐτοὺς ἄνδρας, καὶ μάλιστα τοὺς ἐν ταῖς ὑπεροχαῖς. Ἔτι δὲ τὸν αὐτὸν τρόπον, ὅνπερ ἐκεῖ τὰ περὶ τοὺς ἐπι φανεῖς ἄνδρας καὶ βίους τυγχάνει μνήμης, τὰ δὲ μικρὰ καὶ ἄδοξα παραλείπεται, κἀνταῦθα δεῖ τὰ μικρὰ καὶ τὰ ἀφανῆ παραπέμπειν, ἐν δὲ τοῖς ἐνδόξοις καὶ μεγάλοις καὶ ἐν οἷς τὸ πραγματικὸν καὶ εὐμνημόνευτον καὶ ἡδὺ διατρίβειν. Καθάπερ τε καὶ ἐν τοῖς κολοσσικοῖς ἔργοις οὐ τὸ καθ' ἕκαστον ἀκριβὲς ζητοῦμεν, ἀλλὰ τοῖς καθόλου προσέχομεν μᾶλλον, εἰ καλῶς τὸ ὅλον· οὕτως κἀν τούτοις δεῖ ποιεῖσθαι τὴν κρίσιν. Κολοσσουργία γάρ τις καὶ αὕτη, τὰ μεγάλα φράζουσα πῶς ἔχει καὶ τὰ ὅλα, πλὴν εἴ τι κινεῖν δύναται καὶ τῶν μικρῶν τὸν φιλειδήμονα καὶ τὸν πραγματικόν. Ὅτι μὲν οὖν σπουδαῖον τὸ προκείμενον ἔργον καὶ φιλοσόφῳ πρέπον, ταῦτα εἰρήσθω. |
CHAPITRE II. 1. Si, après que tant d'autres ont traité ces matières, nous entreprenons de les traiter à notre tour, qu'on attende pour nous en blâmer que nous ayons été convaincu de n'avoir fait que répéter dans les mêmes termes tout ce qu'ils avaient dit avant nous. Il nous a semblé, en effet, que, malgré l'habileté avec laquelle nos prédécesseurs avaient traité, ceux-ci telle partie, ceux-là telle autre, ils avaient laissé dans le reste encore beaucoup à faire, et que, si peu que nous pussions ajouter à leur travail, ce peu suffirait encore à justifier notre entreprise. Or, la génération présente a vu ses connaissances géographiques s'étendre sensiblement avec les progrès de la domination des Romains et des Parthes, comme déjà, au dire d'Ératosthène, les générations postérieures à Alexandre avaient vu les leurs s'accroître beaucoup par le fait de ses conquêtes. Alexandre, en effet, nous a révélé en quelque sorte une grande partie de l'Asie, et, dans le nord de l'Europe, tout le pays jusqu'à l'Ister; les Romains à leur tour nous ont révélé tout l'occident de l'Europe jusqu'à l'Albis, fleuve qui partage en deux la Germanie, sans compter la région qui s'étend au delà de l'Ister jusqu'au fleuve Tyras. Quant à la contrée ultérieure jusqu'aux frontières des Maeotes et à la partie du littoral qui aboutit à la Colchide, c'est par Mithridate Eupator et par ses lieutenants que nous les connaissons. Enfin, grâce aux Parthes, l'Hyrcanie, la Bactriane et la portion de la Scythie qui s'étend au-dessus de ces deux contrées nous sont mieux connues qu'elles ne l'étaient de nos prédécesseurs : n'y eût-il que cela, nous aurions donc, on le voit, quelque chose à dire de plus qu'eux. Mais c'est ce qu'on verra mieux encore par les critiques que nous dirigeons contre eux, non pas tant contre les plus anciens que contre ceux qui sont venus après Ératosthène et contre Ératosthène lui-même, et cela à dessein et par la raison que leur grande supériorité de lumières sur le commun des hommes doit rendre d'autant plus difficile pour les générations futures la réfutation des erreurs qu'ils ont pu commettre. Si, du reste, nous nous voyons forcé de contredire parfois les autorités mêmes que nous avons choisies pour nos guides habituels, qu'on nous le pardonne. Ce n'est pas, en effet, chez nous un parti pris à l'avance de contredire tous les géographes sans exception qui nous ont précédé; il en est beaucoup au contraire que nous comptons négliger absolument comme nous ayant paru des guides trop peu sûrs, et nous réservons nos critiques pour ceux que nous savons être habituellement exacts. Disputer en règle contre toute espèce d'adversaires, ce serait en vérité perdre sa peine; mais contre un Ératosthène, un Posidonius, un Hipparque, un Polybe et autres noms pareils, il y a quelque-chose de glorieux à le faire. 2. Nous commencerons par Ératosthène l'examen en question, mettant toujours en regard de nos jugements les critiques qu'Hipparque a dirigées contre lui. Ératosthène ne mérite assurément pas qu'on le traite aussi cavalièrement que l'a fait Polémon, qui prétend démontrer qu'il n'avait même pas visité Athènes; mais il ne mérite pas non plus la confiance aveugle que quelques-uns ont en lui, malgré ce grand nombre de maîtres soi-disant excellents dont il aurait été le disciple. Il a écrit ceci : Jamais peut-être on n'avait vu fleurir dans une même enceinte, dans une seule et même cité, autant de philosophes éminents qu'on en comptait alors autour d'Arcésilaüs et d'Ariston. — Soit, mais à mon sens cela ne suffit point, et l'important était de savoir discerner dans le nombre le meilleur guide à suivre. C'est Arcésilaüs, on le voit, et Ariston qu'il met en tête des philosophes de son temps; il préconise beaucoup aussi Apelle et Bion, Bion, qui le premier, pour nous servir de son expression, « para la philosophie de la robe à fleurs des courtisanes », mais de qui, aussi, à l'en croire, on eût pu dire souvent avec le poète (32) : « Que de beautés mâles sous ces guenilles ! » Or ces seules appréciations suffisent à montrer son peu de jugement. Comment lui, qui fut à Athènes le disciple de Zénon de Citium, il ne mentionne pas un seul de ceux qui continuèrent l'enseignement du maître, et il vient nous nommer, comme ayant toute la vogue de son temps, les rivaux mêmes et les ennemis de Zénon, de qui il ne reste pas aujourd'hui apparence d'école! Son traité des Biens, ses Déclamations, ses autres ouvrages du même genre achèvent du reste , de nous montrer quelle a été sa vraie tendance philosophique : il a tenu comme qui dirait le milieu entre le philosophe décidé et celui qui, n'osant s'engager résolument dans la carrière, s'en tient uniquement à l'apparence ou ne voit dans la philosophie qu'une diversion agréable ou instructive au cercle habituel de ses études, sans compter que, jusque dans ces autres études, nous le retrouvons en quelque sorte toujours le même- Mais laissons cela, ne touchons présentement qu'aux points sur lesquels sa Géographie peut être rectifiée, et, pour commencer, reprenons la question réservée par nous tout à l'heure. 3. Est-il vrai, comme le prétend Ératosthène, que le poète vise uniquement à récréer l'esprit et nullement à l'instruire? Les Anciens définissaient, au contraire, la poésie une sorte de philosophie primitive, qui nous introduit dès l'enfance dans la science de la vie et nous instruit par la voie du plaisir de tout ce qui est relatif aux mœurs, aux passions et aux actions de l'homme; notre école aujourd'hui va même plus loin : elle proclame que le sage seul est poète. De là aussi cet usage pratiqué par les différents gouvernements de la Grèce de faire commencer la première éducation des enfants par la poésie, considérée apparemment non comme un simple moyen de divertissement, mais bien comme une école de sagesse. Ajoutons que les musiciens eux-mêmes, ceux qui enseignent soit à chanter au son des instruments soit à jouer de la lyre ou de la flûte, revendiquent ce mérite pour leur art et s'intitulent « précepteurs et correcteurs des mœurs », et que ce n'est pas là une opinion exclusivement pythagoricienne, qu'Aristoxène l'a émise également, et qu'Homère déjà qualifie les aèdes de « sophronistes ou d'instituteurs », notamment ce gardien de Clytemnestre, « A qui Atride, en partant pour Troie, avait longuement recommandé sa femme et confié le soin de veiller sur elle (33). » On sait, en effet, qu'Égisthe ne réussit à triompher de la vertu de la reine qu'après avoir « Conduit l'aède, pour l'y abandonner, sur les rivages d'une île déserte...: voulant alors ce que voulait son amant, Clytemnestre suivit Égisthe jusque dans sa maison (34). » Ératosthène d'ailleurs se contredit ici lui-même : avant d'émettre la proposition en question, quelques lignes à peine plus haut, et tout au début de son Traité de géographie, il avait solennellement déclaré que, dès la plus haute antiquité, tous les hommes ont eu à cœur de publier leurs connaissances géographiques ; qu'Homère, par exemple, a inséré dans ses vers tout ce qu'il avait pu apprendre des Éthiopiens, de l'Égypte et de la Libye, entrant même, à propos de la Grèce et des pays voisins, dans des détails presque trop minutieux, puisqu'il va jusqu'à rappeler et les « innombrables pigeons de Thisbé (35) » et les « gazons d'Haliarte (36) » et la « situation extrême d'Anthedon (37) » et celle de Lilée « aux sources du Céphise (38) », et qu'en général il évite de laisser échapper fût-ce une épithète inutile. - Or, je le demande, celui qui agit de la sorte vise-t-il plutôt à amuser qu'à instruire? - Ici peut-être, répondront les partisans d'Ératosthène, Homère songe à instruire; en revanche tout ce qui n'est pas proprement du domaine des sens a été peuplé par lui, comme par les autres poètes, de monstres imaginaires, semblables à ceux de la Fable. - Soit; mais alors il eût fallu dire que tout poète compose tantôt uniquement en vue de l'agrément, tantôt aussi en vue de l'instruction de ses lecteurs ; et c'est ce que ne fait pas Ératosthène, qui accuse Homère d'avoir cherché partout et toujours à amuser, jamais à instruire. Il va plus loin, et, pour corroborer son dire, demande ce que pourraient ajouter au mérite du poète cette connaissance exacte d'une infinité de lieux et toutes ces notions de stratégie, d'agriculture, de rhétorique et d'autres sciences encore que quelques-uns ont prétendu attribuer à Homère. - En prêtant ainsi à Homère la science universelle, on peut paraître, nous l'avouons, entraîné par un excès de zèle, et, comme le dit Hipparque, autant vaudrait faire honneur à l'eirésiôné attique des poires, des pommes dont elle est chargée, mais qu'elle ne peut produire, que de revendiquer pour Homère la connaissance de toutes les sciences, et de tous les arts sans exception. Sur ce point-là donc, ô Ératosthène, tu as peut-être raison; mais à coup sûr tu te trompes quand, non content de refuser à Homère autant d'érudition, tu prétends réduire la poésie à n'être qu'une vieille conteuse de fables, qu'on laisse libre d'imaginer tout ce qui peut lui sembler bon à divertir les esprits. N'y a-t-il donc rien, en effet, dans l'audition des poètes qui puisse nous porter à la vertu? Toutes ces notions, par exemple, de géographie, d'art militaire, d'agriculture et de rhétorique, que cette audition tout au moins nous procure, ne peuvent-elles rien pour ce but suprême? 4. Homère pourtant prête toutes ces connaissances à Ulysse, c'est-à-dire à celui de ses héros qu'il se plaît à décorer de toutes les vertus. C'est à lui, en effet, que s'applique ce vers : « Il avait visité de nombreuses cités et observé les mœurs de beaucoup d'hommes (39); » et cet autre passage : « Il possédait toutes les ressources de la ruse et celles de la prudence (40). » C'est lui qu'il nomme toujours le « destructeur des villes », lui encore qui réussit à prendre Ilion « Par la force de ses conseils, de sa parole et de sa trompeuse adresse.... » « Qu'il consente à me suivre, s'écrie aussi Diomède en parlant de lui, et nous reviendrons tous deux, fût-ce du milieu des flammes (41). » Ce qui n'empêche point qu'Ulysse ne se vante ailleurs de ses connaissances agricoles et de sa dextérité comme faucheur : « Qu'on me donne dans ce champ une faux à la lame recourbée et à toi la pareille (42), »; comme laboureur aussi : « Et tu verras si je sais creuser un long et droit sillon (43). » Et notez qu'Homère n'est point seul à penser de la sorte; tous les esprits éclairés, invoquant son témoignage, ont reconnu la justesse de cette thèse, que rien ne contribue autant à donner la sagesse qu'une semblable expérience des choses pratiques de la vie. 5. Quant à la rhétorique, qu'est-elle en somme ? La sagesse appliquée à la parole. Eh bien! Tout le long du poème également ce genre de sagesse brille chez Ulysse, témoin la scène de l'Épreuve 44), et celle des Prières (45) et celle de l'Ambassade (46), où le poète fait dire à Anténor en parlant de lui : « Mais quand on entendait cette voix puissante sortir de sa poitrine et que de ses lèvres les paroles tombaient abondantes et pressées, comme les neiges d'hiver, nul mortel alors n'aurait pu disputer à Ulysse la palme de l'éloquence (47). » Comment supposer maintenant que le poète qui a le talent de mettre les autres en scène, les faisant parler avec éloquence, commander les armées avec habileté, déployer en un mot tous les genres de mérite, ne soit lui-même qu'un de ces bavards, un de ces charlatans experts uniquement à duper le peuple par leurs jongleries et à flatter leur auditoire, mais incapables de lui rien apprendre d'utile? Le vrai mérite du poète, nous le demandons, ne consiste-t-il pas à faire de ses vers l'imitation même de la vie humaine? Eh bien ! Comment l'imitera-t-il, s'il n'a ni jugement ni expérience des choses de la vie? A nos yeux, d'ailleurs, le mérite des poètes ne saurait être de même nature que celui des ouvriers qui travaillent le bois ou les métaux : le mérite de ceux-ci n'implique dans leur caractère rien d'élevé ni d'auguste, mais le mérite du poète est inséparable de celui de l'homme même, tellement qu'il est absolument impossible de devenir bon poète, si l'on n'est au préalable homme de bien. 6. Prétendre donc enlever au poète jusqu'à la rhétorique, autrement dit l'art oratoire, en vérité c'est se rire de nous. Y a-t-il, en effet, de plus grand mérite pour l'orateur que celui du style? Et pour le poète également? Or, qui a jamais surpassé Homère pour la beauté du style? - Sans doute, dira-t-on; mais le style qui convient au poète diffère du style qui convient à l'orateur. - Diffère, oui, mais comme une espèce diffère d'une autre espèce du même genre, comme dans la poésie même la forme tragique diffère de la forme comique, et dans la prose la forme historique de la forme judiciaire. Nierez-vous donc que le langage constitue un genre, divisé en deux espèces distinctes, le langage mesuré et le langage prosaïque, ou si c'est que vous admettez que le langage absolument parlant puisse former un genre, mais non pas le langage, le style, l'éloquence oratoire? Eh bien ! Moi j'irai plus loin, je dirai que l'espèce de langage appelé prose, la prose ornée s'entend, n'est qu'une imitation du langage poétique. La première de beaucoup, la forme poétique parut dans le monde et y fit fortune; plus tard, dans leurs Histoires, les Cadmus, les Phérécyde, les Hécatée l'imitèrent encore, et, si ce n'est qu'ils en brisèrent le mètre, ils retinrent d'ailleurs tous les caractères distinctifs de la poésie; mais leurs successeurs, en retranchant au fur et à mesure quelqu'un de ces traits distinctifs, amenèrent la prose, descendue en quelque sorte des hauteurs qu'elle avait occupées jusque-là, à la forme que nous lui voyons aujourd'hui. C'est comme si l'on disait que la comédie, née du sein même de la tragédie, a quitté les hautes régions que celle-ci habite pour se ravaler jusqu'au ton de ce que nous nommons actuellement le langage prosaïque ou discours familier. Le mot chanter mis par les anciens au lieu et place du mot dire est une preuve de plus de ce fait, que la vraie source, le vrai principe du style orné ou style oratoire a été la poésie. En effet, dans les représentations publiques, la poésie se produisait toujours accompagnée de chant : c'était là l'ode, autrement dit le langage modulé, d'où sont venus les noms de rhapsodie, de tragédie, de comédie; et comme, dans le principe, le mot dire s'entendait uniquement de la diction poétique, et que celle-ci était accompagnée d'ode ou de chant, le mot chanter se trouva être pour les anciens synonyme de dire. Puis, l'une de ces deux expressions ayant été, par abus, appliquée à la prose elle-même, l'abus finit par s'étendre également à l'autre. Enfin le nom seul de discours pédestre, employé pour désigner la prose ou le langage affranchi de tout mètre, suffirait à nous la montrer descendue en quelque sorte d'un lieu élevé, et de son char, si l'on peut dire, ayant mis pied à terre. 7. Il n'est pas exact non plus de prétendre, comme l'a fait Ératosthène, qu'Homère n'a décrit en détail que ce qui était prés de lui et ce qui se trouvait en Grèce; il a décrit de même les contrées lointaines. Il a apporté aussi un soin particulier, plus de soin même qu'aucun des poètes, ses successeurs, dans l'emploi de la fable, ne visant pas en tout et toujours au prodigieux, mais sachant mêler, sous forme d'allégories, de fictions ou d'apologues, des leçons utiles à ses récits, notamment à celui des errances d'Ulysse: sur ce point-là encore Ératosthène s'est donc grossièrement trompé, puisqu'il n'a pas craint de qualifier de « sornettes » les commentaires sur l'Odyssée, et l'Odyssée elle-même. Mais la question vaut la peine d'être traitée plus au long. 8. Et d'abord notons que les poètes n'ont pas été seuls à admettre les fables : longtemps, bien longtemps même avant les poètes, les chefs d'État et les législateurs en avaient fait usage, en raison de l'utilité qu'elles présentent, et pour répondre à une disposition naturelle de l'être ou « animal pensant. » Car l'homme est avide de savoir, et son amour des fables est comme un premier indice de ce penchant. De là vient aussi, qu'en général, les fables sont les premières leçons qu'entendent les enfants et ce qu'on leur propose comme premiers sujets d'entretien. Et la cause de ce choix c'est que la fable, qui ne représente pas ce qui existe, mais autre chose que ce qui existe, leur révèle en quelque sorte un monde nouveau. Or, on aime toujours le nouveau, l'inconnu ; c'est même là ce qui rend avide de savoir, et, quand à la nouveauté s'ajoutent l'étonnant et le merveilleux, le plaisir est doublé, le plaisir, qui est comme le philtre de la science. Pour commencer, il y a donc nécessité d'user de semblables appâts mais, avec le progrès de l'âge, quand le jugement s'est fortifié, et que l'esprit n'a plus besoin d'être flatté, c'est à la connaissance du monde réel qu'il faut l'acheminer. Ajoutons que tout ignorant, tout homme sans instruction n'est lui-même, à proprement parler, qu'un enfant, aimant les fables comme un enfant les aime; l'homme même qui n'a reçu qu'une instruction médiocre en est là aussi jusqu'à un certain point : car chez lui, non plus, la raison n'a pas acquis toute sa force, sans compter qu'elle subit encore l'influence d'une habitude d'enfance. Mais, comme à côté du merveilleux qui fait plaisir, nous avons le merveilleux qui fait peur, il y a lieu de se servir de l'une et de l'autre forme avec les enfants, voire même avec les adultes. En conséquence, nous racontons aux enfants les fables agréables pour les tourner au bien, les fables effrayantes pour les détourner du mal : Lamia, par exemple, Gorge, Éphialte et Mormolyce sont autant de mythes de la dernière espèce. Quant au peuple de nos grandes villes, nous le voyons aussi, sensible à l'agrément des fables, se laisser entraîner au bien par l'audition de récits, comme ceux qu'ont faits les poètes des exploits fabuleux des héros, des travaux, par exemple, d'un Hercule ou d'un Thésée et des honneurs décernés par les dieux à leur courage, voire même, à la rigueur, rien que par la vue de peintures, de statues ou de bas-reliefs représentant quelque épisode semblable tiré de la fable. D'autre part, il suffit, pour qu'il se détourne avec horreur du mal, que, par l'audition de certains récits ou le spectacle de certaines figures monstrueuses, il perçoive la notion de châtiments, de terreurs, de menaces envoyés par les dieux, ou qu'il se persuade qu'il y a eu dans le monde des hommes frappés de la sorte. C'est qu'en effet il est impossible que la foule des femmes et la vile multitude se laissent guider par le pur langage de la philosophie et gagner ainsi à la piété, à la justice, à la bonne foi ; pour les amener à ces vertus, il faut recourir encore à la superstition. Mais sans l'emploi des mythes et du merveilleux, comment développer la superstition? Qu'est-ce en effet que la foudre, l'égide, le trident, les torches, les dragons, les thyrses, toutes ces armes des dieux, et en général tout cet appareil de l'antique théologie, si ce n'est de pures fables, dont les chefs ou fondateurs d'États se sont servis, comme on se sert des masques de théâtre, pour effrayer les âmes faibles. L'esprit des mythes poétiques étant ce que nous venons de dire et pouvant en somme exercer une heureuse influence sur les conditions de la vie sociale et politique, et profiter même à la connaissance de la réalité historique, on conçoit que les Anciens aient conservé, pour l'appliquer aux générations adultes, l'enseignement de l'enfance, et vu dans la poésie une école de sagesse propre à tous les âges. Plus tard, il est vrai, parurent l'histoire et la philosophie dans sa forme actuelle ; mais la philosophie et l'histoire ne s'adressent qu'au petit nombre, tandis que la poésie, d'une utilité plus générale, attire encore la foule dans les théâtres, et la poésie d'Homère infiniment plus qu'aucune autre. D'ailleurs, les premiers historiens et les premiers philosophes, ceux qu'on nomme les philosophes-physiciens, avaient été eux-mêmes des mythographes. 9. Par la raison maintenant qu'il rapportait les fables à un but moral et instructif, Homère a dû faire et a fait dans ses récits la part très grande à la vérité. Assurément « il y a mêlé le mensonge » ; mais, tandis que la vérité est le fond sur lequel il bâtit, le mensonge n'est pour lui qu'un moyen de séduire et d'entraîner les masses. « Et de même que la main de l'artiste ajoute à l'argent l'éclat d'une bordure d'or (48), » de même aux scènes vraies de l'histoire Homère allie la fable, comme un attrait, comme une parure de plus ajoutée à sa parole, sans cesser pour cela de viser au même but que l'historien ou que tout autre narrateur d'événements réels. C'est ainsi qu'ayant pris pour sujet un fait historique, la Guerre de Troie, il l'a embelli de ses mythes poétiques, et les erreurs d'Ulysse pareillement. Mais élever sur une base complètement chimérique elle-même tout un vain amas de prodiges et de fictions, le procédé n'eût pas été homérique, sans compter que le mensonge (la chose tombe sous le sens) paraît moins incroyable, quand on y mêle dans une certaine mesure la pure vérité. Polybe ne dit pas autre chose dans le passage où il disserte en règle sur les erreurs d'Ulysse; et Homère lui-même le donne à entendre dans ce passage : « Ulysse mêlait souvent à ses discours des mensonges comme ceux-ci qu'on pouvait prendre pour la vérité même (49); » Car, notez que le poète a dit souvent, et non pas toujours, ce qui eût ôté aux mensonges du héros cet air de vérité. Homère a donc tiré de l'histoire le fond même de ses poèmes. L'histoire en effet nous montre un prince du nom d'Éole régnant sur ce groupe d'îles dont Lipara est le centre ; elle signale aussi aux environs de l'Etna et de Leontium certains peuples inhospitaliers du nom de Cyclopes et de Lestrygons, et explique même par cette circonstance comment le détroit était alors inaccessible à la navigation ; elle ajoute que Charybde et Scylla étaient deux repaires de pirates. Ainsi des autres peuples mentionnés par Homère : nous les retrouvons tous dans l'histoire établis en telle ou telle contrée de la terre. Il savait, par exemple, que les Cimmériens habitaient aux environs du Bosphore cimmérique une région boréale et brumeuse, c'en fut assez pour que, par une licence heureuse et pour les besoins de la fable qu'il voulait mêler aux erreurs d'Ulysse, il transportât ce peuple dans une contrée ténébreuse, au seuil même de l'enfer. Nul doute, du reste, qu'il ne connût les Cimmériens, puisque, d'après les calculs des chronographes, l'invasion cimmérienne a précédé de peu l'époque où il vivait, si même elle ne lui est contemporaine. 10. Il connaissait pareillement et la situation de la Colchide et le fait de la navigation de Jason à Aea, et, en général, tout ce que la fable et l'histoire rapportent des enchantements de Circé et de Médée et de leurs autres traits de ressemblance : à l'aide maintenant de ces données, et sans tenir compte de l'énorme distance qui séparait les deux enchanteresses, puisque l'une habitait au fond du Pont, et l'autre en Italie, il imagina entre elles un lien d'étroite parenté, et osa les transporter toutes deux hors des mers intérieures, en plein Océan. Peut-être bien aussi Jason, dans ses errances, s'était-il écarté jusqu'en Italie ; car on montre aujourd'hui encore aux abords des monts Cérauniens, dans les parages d'Adria, dans le golfe Posidoniate et dans les îles qui bordent la Tyrrhénie, certains vestiges du passage des Argonautes. L'existence des Cyanées, ces roches qu'on nomme quelquefois les Symplégades, et qui rendent si difficile le passage du détroit de Byzance, était une donnée de plus dont Homère sut tirer bon parti. De la sorte, et par suite du rapprochement naturel qu'on établit entre son île d'Aea et la ville d'Aea, entre ses Planctae et les roches Symplégades, la navigation de Jason à travers les Planctae acquit de la vraisemblance, comme le rapprochement avec ce qu'on savait de Charybde et de Scylla rendit plus vraisemblable l'épisode « du passage d'Ulysse entre les deux rochers. » En somme, on se représentait de son temps la mer Pontique comme un autre Océan, et quiconque naviguait dans ces parages semblait s'être autant écarté que s'il se fût avancé par delà les colonnes d'Hercule ; elle était réputée, en effet, la plus grande de nos mers et, par excellence, on l'appelait le Pont, le Pont proprement dit, comme on appelle Homère le poète. Il se pourrait même que ce fût là le motif qui engagea Homère à transporter dans l'Océan les scènes dont le Pont avait été le théâtre, ce déplacement lui ayant paru devoir être, en raison de l'opinion régnante, plus aisément accueilli du public. Je croirais volontiers aussi que la position des Solymes aux confins de la Lycie et de la Pisidie, sur les sommets les plus élevés du Taurus, jointe à cette circonstance, que les populations comprises en dedans du Taurus, et surtout les populations du Pont, voyaient en eux les gardiens et les maîtres des principaux passages de cette grande chaîne du côté du midi, est ce qui l'a induit à déplacer de même cette nation et à la transporter sur les bords de l'Océan, situation extrême, analogue jusqu'à un certain point à celle qu'elle occupait réellement. Voici du reste le passage en question, il s'agit d'Ulysse errant sur son frêle esquif : « Cependant le puissant Neptune revient de chez les Éthiopiens; du haut des monts Solymes, il découvre au loin le héros (50) » Peut-être enfin Homère a-t-il emprunté à l'histoire des Scythes l'idée de son mythe des Cyclopes à un œil, les Scythes-Arimaspes, qu'Aristée de Proconnèse a le premier fait connaître dans son poème des Arimaspies, passant aussi pour n'avoir qu'un œil. 11. Cela posé, examinons ce que veulent dire ceux qui ont prétendu qu'il fallait chercher dans les parages de la Sicile ou de l'Italie le théâtre attribué par Homère aux errances d'Ulysse. La chose en effet peut s'entendre de deux façons, bien ou mal : bien, si l'on conçoit qu'Homère, sérieusement convaincu de la réalité des courses d’Ulysse dans ces parages, a accepté cette donnée comme vraie historiquement, mais l'a traitée avec la libre imagination d'un poète (et l'on est d'autant plus autorisé à croire que c'est là ce qu'a fait Homère qu'aujourd'hui encore on retrouve, non seulement en Italie, mais jusqu'aux derniers confins de l'Ibérie, les traces du passage d'Ulysse et de celui de maint autre héros); mal, si l'on veut voir de l'histoire dans de pures fictions, sans reconnaître, ce qui pourtant saute aux yeux, qu'en parlant comme il fait de l'Océan, de l'Enfer, des Bœufs du Soleil, du séjour d'Ulysse et des métamorphoses de ses compagnons dans le palais des déesses, de la stature colossale des Cyclopes et des Lestrygons, de la figure monstrueuse de Scylla, des distances énormes parcourue par le vaisseau d'Ulysse et de mainte autre circonstance analogue, Homère emploie à dessein le merveilleux poétique. Or, suivant nous, l'homme qui peut méconnaître à ce point les procédés du poète ne mérite pas même qu'on le réfute, car il n'eût pas fait pis en affirmant que le retour d'Ulysse dans Ithaque, le massacre des prétendants et le combat du héros contre les Ithaciens hors de l'enceinte de la ville se sont réellement passés comme le raconte Homère; et d'autre part il nous paraît souverainement injuste qu'on vienne chercher querelle à ceux qui entendent le poète ainsi qu'il faut l'entendre. 12. C'est pourtant là ce que fait Ératosthène en condamnant l'un et l'autre modes d'interprétation, mais dans les deux cas il a tort: tort dans le second cas, en ce qu'il prend la peine de réfuter longuement des mensonges notoires et qui ne méritaient pas même un mot de réfutation ; tort dans le premier cas en ce qu'il traite toute poésie de bavardage frivole, qu'il dénie aux connaissances techniques ou géographiques toute efficacité pour former les âmes à la vertu, et que, distinguant les fables en deux classes, suivant qu'elles se rattachent à un théâtre réel, comme Ilion, l'Ida ou le Pélion, ou à un théâtre imaginaire, comme le séjour des Gorgones ou celui de Géryon, il n'hésite pas à ranger dans cette deuxième catégorie le théâtre des errances d'Ulysse, prenant même à partie ceux qui le tiennent pour un emplacement réel et nullement fictif, et concluant de leur désaccord sur tel ou tel point secondaire que ce sont d'effrontés menteurs c'est ainsi qu'il triomphe de ce qu'on place les Sirènes tantôt sur le Pelorias, tantôt sur les Sirénusses, à plus de deux mille stades de là, tandis qu'à l'entendre le nom de Sirènes désigne ce rocher à triple pointe qui sépare le golfe de Cumes du golfe Posidoniate. Mais d'abord ledit rocher n'a pas trois pointes, il n'offre même pas à proprement parler de pointe élevée ou de promontoire, car la côte entre Surrentum et le détroit de Caprées décrit une espèce de coude allongé et étroit, avec le temple des Sirènes sur l'un des deux versants et au pied de l'autre versant, c'est-à-dire du versant du golfe Posidoniate, trois îlots déserts et rocheux, qui sont ce qu'on nomme proprement les Sirènes, tandis que sur le bord même du détroit s'élève un Athenaeum ou temple de Minerve qui donne son nom au coude tout entier. 13. Ajoutons qu'il ne faut pas, sous prétexte que, dans la description de certains lieux, différents auteurs ne se seront pas accordés de tout point, se tant hâter de rejeter comme fausse la description entière : dans certains cas même, il y aurait là une raison de plus pour croire à l'exactitude de l'ensemble. Dans le cas présent, notamment, étant cherché si les erreurs d'Ulysse ont eu réellement pour théâtre les parages de la Sicile et de l'Italie et si le séjour attribué aux Sirènes s'y trouve réellement quelque part, celui qui les place sur le Pelorias est loin sans doute de s'accorder avec celui qui les place aux Sirénusses, mais ni l'un ni l'autre ne diffèrent d'opinion par rapport à ce troisième qui nous les montre dans les parages de la Sicile et de l'Italie : ils rendent même l'assertion de celui-ci plus probable, par la raison que, sans désigner le même lieu, ils ne sont pas sortis non plus des parages de la Sicile et de l'Italie. Que si quelqu'un maintenant ajoute que le tombeau de Parthénopé, l'une des Sirènes, se voit à Neapolis, cette nouvelle circonstance ne rend-elle pas la chose encore plus croyable, bien qu'en nommant Neapolis on ait fait intervenir une troisième localité? Qu'on rappelle enfin que Neapolis est située précisément dans ce golfe qu'Ératosthène nomme le golfe Cyméen et qui est formé par les Sirénusses, et nous voilà persuadé plus fermement encore que ce sont bien là les lieux qu'habitaient les Sirènes. Assurément nous ne croyons pas que le poète ait sur chaque détail de ce genre pris des informations exactes, l'exactitude est même le moindre mérite que nous exigions de lui , nous ne saurions néanmoins supposer un seul instant qu'il ait pu composer son poème, sans rien savoir de positif sur les errances d Ulysse et sans rechercher où et comment elles avaient eu lieu. 14. Tel n'est pas cependant l'avis d'Ératosthène : Hésiode, lui, à l'en croire, aurait été parfaitement instruit et convaincu de la réalité des courses d'Ulysse dans les parages de la Sicile et de l'Italie, et la preuve qu'il en donne, c'est qu'au lieu de s'en tenir à la nomenclature homérique il a mentionné de plus et l'Etna, et Ortygie, cet îlot situé en avant de Syracuse, et la Tyrrhénie; mais, pour Homère, Ératosthène ne veut pas admettre qu'il ait pu connaître, lui aussi, ces noms et qu'il ait jamais eu la pensée d'assigner des lieux connus pour théâtre aux errances du héros- Eh quoi! Si la Tyrrhénie et l'Etna sont des lieux connus de tous, est-ce donc que le Scyllæum et Charybde, Circaeum et les Sirénusses soient des lieux complètement ignorés? Ou bien Ératosthène prétend-il que le frivole bavardage des poètes était au-dessous de la majesté d'Hésiode, et qu'il a été réservé à lui seul de suivre toujours les traditions reçues, tandis que le lot d'Homère a été de chanter étourdiment au gré de sa langue indiscrète? Mais, indépendamment de ce que nous avons déjà dit du caractère particulier aux mythes homériques, le grand nombre d'historiens qui ont célébré les mêmes faits, joint à la persistance des mêmes traditions dans les localités en question, ne prouve-t-il pas abondamment que ce ne sont pas là des fictions de poètes ou d'historiens, mais bien les vestiges réels de personnages et d'événements des temps passés? 15. Polybe, qui, lui aussi, a disserté sur le fait des errances d'Ulysse, a bien mieux su interpréter la pensée d'Homère : « Eole, nous dit-il, indiquait d'une voix prophétique les moyens de franchir les parages du détroit rendus si dangereux par le va-et-vient perpétuel des marées, de là ce surnom d'arbitre ou de dispensateur des vents, et ce titre de roi que l'admiration des peuples lui a décerné. De même Danaüs, pour avoir révélé le gisement des sources d'Argos, et Atrée, pour avoir enseigné que la révolution du soleil se fait en sens contraire du mouvement du ciel, tous deux en raison de cette faculté de prédire l'avenir et d'interpréter la volonté des dieux, se sont vus décorer du titre de rois. De même encore, maints prêtres égyptiens, chaldéens ou mages, en raison de leur supériorité dans telle ou telle branche de la science, ont obtenu de nos ancêtres commandements et dignités : de même enfin, chacun de nos dieux doit les honneurs qu'on lui rend à ce qu'il est réputé l'inventeur de quelqu'un de nos arts utiles. » Cela dit en façon de préambule, Polybe nie formellement qu'on puisse entendre dans le sens mythique soit le personnage d'Éole, en particulier, soit l'ensemble de l'Odyssée : quelques détails fabuleux sans importance ont bien pu, ajoute-t-il, y trouver place, comme dans le poème de la guerre d'Ilion, mais pour tout le reste le récit que fait le poète des événements, dont les parages de la Sicile ont été le théâtre, ne diffère pas de celui des autres historiens, qui ont rapporté les traditions des différentes localités de l'Italie et de la Sicile. Polybe n'applaudit pas non plus à l'étrange boutade d'Ératosthène s'écriant : « Le théâtre des erreurs d'Ulysse! Vous le trouverez le jour où vous aurez trouvé aussi l'ouvrier corroyeur qui a cousu l'OUTRE DES VENTS. » Loin de là, il nous montre comment le portrait qu'Homère a fait de Scylla s'applique exactement aux circonstances de la pêche des galéotes, telle qu'elle se fait autour du Scyllaeum : « Sans cesse bondissant autour de son rocher, le monstre poursuit dauphins et chiens marins; et la proie, même plus grosse, n'échappe point à sa rage (51). » Effectivement les thons, réunis en troupe, après avoir longé la côte de l'Italie, s'engagent dans le détroit, mais écartés de la côte de Sicile [par la force des courants], ils rencontrent des animaux de plus grande taille, tels que dauphins, chiens marins et autres cétacés, et deviennent ainsi la proie dont s'engraissent les galéotes, que Polybe nous dit s'appeler aussi espadons et chiens marins. Car ce qui se produit là, dans le détroit, comme aussi dans le Nil et dans les autres fleuves à l'époque des grandes crues, ressemble tout à fait à ce qui arrive dans les forêts incendiées : les bêtes menacées se rassemblent pour fuir le feu et l'eau et deviennent la proie d'animaux plus forts. 16. Polybe ne s'en tient pas là et nous décrit tout au long la pêche des galéotes, telle qu'elle se fait aux abords du Scyllæum. On place un homme en vigie, qui doit donner le signal à la fois pour tous les pêcheurs arrêtés au mouillage et montés sur de petites barques birèmes, deux sur chaque : tandis que l'un conduit la barque, l'autre, debout sur la proue, tient en main un harpon. La vigie signale l'apparition du galéote, qui s'avance d'ordinaire un bon tiers du corps hors de l'eau. La barque le joint et le pêcheur, une fois à portée de sa proie, la frappe de son harpon, puis le lui arrache du corps, moins le fer qui est fait en forme d’hameçon, et fixé exprès très mollement à la hampe. On lâche alors à l'animal blessé le long câble attaché au harpon, jusqu'à ce qu'il se soit épuisé à se débattre et à fuir; puis on le tire à terre ou bien on le recueille dans la barque, s'il n'est pas de dimensions énormes. Le harpon tomberait à la mer qu'il ne serait point perdu pour cela, vu qu'on a soin de le faire de bois de chêne et de bois de sapin, pour que, si la partie en chêne plonge entraînée par son poids, le reste demeure hors de l'eau et se laisse aisément reprendre. Il n'est pas rare que le rameur soit blessé à travers la barque, tant est longue l'épée des galéotes, tant cette pêche par l'énergique résistance de l'animal rappelle les dangers de la chasse au sanglier ! « De tels faits, ajoute Polybe, permettent de conclure, à ce qu'il semble, que ce sont bien les parages de la Sicile qu'Homère a entendu assigner pour théâtre aux errances d'Ulysse, puisqu'il attribue à Scylla poursuivant sa proie les habitudes mêmes des pêcheurs du Scyllæum; et la même conclusion se peut tirer des détails qu'il donne au sujet de Charybde, vu l'analogie qu'ils présentent avec les phénomènes qu'on observe dans le détroit. Quant à avoir dans le vers déjà cité (52), « Trois fois elle le rejette, etc. » trois fois au lieu de deux, ce n'est là, suivant Polybe, qu'une erreur sans importance soit de copie, soit d'observation. 17. « Ce qui se voit à Méninx, poursuit-il, s'accorde aussi le mieux du monde avec ce qu'Homère a raconté des Lotophages », et, si par hasard quelques circonstances ne se rapportent point, il veut qu'on s'en prenne soit aux changements que le temps a pu produire, soit aux défauts de renseignements précis, soit même à la licence poétique, laquelle consiste à employer tour à tour l'histoire, la diathèse et la fable. De ces trois éléments différents, l'un, l'histoire, a la vérité pour fin et intervient dans le Catalogue des vaisseaux, par exemple, quand le poète rappelle le caractère propre à chaque lieu, le sol pierreux de telle ville, l'extrême éloignement de telle autre; les nuées de colombes que nourrit celle-ci, la proximité où celle-là est de la mer; le second élément, la diathèse, a pour fin principale de produire de l'effet sur les âmes, et intervient par exemple dans les peintures de combats; quant à la fable, son objet, comme on sait, est de plaire et de surprendre. « Mais toujours la fiction, dit Polybe, et rien que la fiction, mauvais moyen pour persuader, procédé anti-homérique ! » Car la poésie d'Homère, tout le monde en convient, est une œuvre philosophique, bien différente par conséquent de ce que la juge Ératosthène, quand il défend d'appliquer à la poésie en général le critérium de la raison, c'est-à-dire le sens commun et d'y chercher aucune notion d'histoire positive. Polybe trouve aussi que le vers suivant : « De là et durant neuf jours je me sentis emporté par des vents contraires (53) », est plus facile à admettre, si on l'entend d'un faible trajet (car un vent défavorable ne vous pousse jamais directement au but), que si l'on veut y voir Ulysse emporté en plein Océan, comme il aurait pu l'être par des vents favorables soufflant sans interruption. « Encore, ajoute Polybe, en supposant que la distance de Malées aux Colonnes d'Hercule (distance évaluée par lui précédemment à 22 500 stades) ait été parcourue dans les neuf jours avec une vitesse égale, le trajet de chaque jour se trouverait-il avoir été de 2500 stades. Or, qui a jamais vu que de la Lycie ou de Rhodes, on soit venu en deux jours à Alexandrie? Et pourtant la distance entre ces deux points n'excède pas 4000 stades. » Enfin, auprès de ceux qui demandent comment il se peut faire qu'Ulysse ait abordé trois fois en Sicile, sans avoir passé une seule fois par le détroit, il excuse Homère en rappelant que les navigateurs modernes eux-mêmes ont toujours évité avec soin de tenir cette route. 18. Ainsi s'exprime Polybe, et en général il a raison. Mais quand il révoque en doute le fait de la navigation d'Ulysse hors des limites de la mer intérieure et en plein Océan, et qu'il entreprend de ramener la distance parcourue dans les neuf jours à une évaluation rigoureuse et à des mesures précises, il atteint lui-même en vérité aux dernières limites de l'inconséquence. Il cite bien à l'appui de sa thèse certains vers d'Homère, celui-ci par exemple : « De là et durant neuf jours je me sentis emporté par les vents pernicieux (54) » mais, d'un autre côté, il en dissimule d'importants comme celui-ci, « Quand le navire eut quitté le courant du fleuve Océan (55), » comme celui-ci encore, « Dans l'île d’Ogygie, surnommée le nombril ou le centre de la mer (56), » comme cette autre circonstance que dans ladite île précisément habite la fille d'Atlas, et comme ces vers relatifs aux Phéaciens , « Nous vivons isolés au sein de la mer immense, et, perdus aux derniers confins de la terre, nous n'avons de commerce avec aucun des mortels (57), » tous passages, pourtant, dans lesquels le théâtre de la fiction est évidemment la mer Atlantique. Or, en les dissimulant, comme il fait, Polybe supprime ou étouffe proprement l'évidence, en quoi, certes, il a tort. En revanche, il a pleinement raison de faire des parages de l'Italie et de la Sicile le théâtre principal des errances d'Ulysse et [la nomenclature géographique desdits parages] est là pour confirmer son opinion. Peut-on admettre, en effet, que l'unique autorité d'un poète, d'un historien, quel qu'il soit, ait pu persuader aux habitants de Neapolis de se dire possesseurs du tombeau de la sirène Parthénopé, à ceux de Cymé, de Dicaearchie et du Vésuve de consacrer chez eux les noms du Pyriphlégéthon, du lac Achérusien, du necyomanteum de l'Aorne, voire même les noms de Baïus et de Misène, deux des compagnons d'Ulysse? Même observation pour ce qui est des Sirénusses, du détroit de Sicile, de Charybde, de Scylla et d'Éole, mythes poétiques qu'il ne faut assurément pas examiner dans la grande rigueur, mais qu'il ne faudrait pas non plus laisser tout à fait de côté, comme on ferait de pures fictions, n'ayant ni racines ni fondements, et dénuées absolument de vérité et de ce genre d'utilité propre à l'histoire. 19. Ératosthène, du reste, Ératosthène lui-même, semble avoir entrevu quelque chose de cela, à en juger par les paroles suivantes : « On peut supposer, dit-il, que le poète a voulu faire de la région de l'Occident le théâtre des errances d'Ulysse; si maintenant il s'est écarté de la réalité, c'est que, d'une part, il manquait de renseignements précis, et que, d'autre part, il n'entrait pas dans son plan de représenter les choses purement et simplement comme elles sont, mais de tout exagérer dans le sens de la terreur et du merveilleux. » Oui, c'est cela qu'a fait Homère et Ératosthène l'a bien compris ; il a mal compris seulement le but que se proposait notre poète en agissant ainsi : il ne s'agissait pas en effet pour lui d'un jeu frivole, mais d'un but sérieux et utile. Sur ce point-là donc Ératosthène mérite d'être blâmé, ainsi que pour avoir dit qu'Homère avait placé de préférence dans les contrées lointaines le théâtre de ses fictions, à cause des facilités que l'éloignement prête au mensonge. Car le nombre des fictions lointaines, dans Homère, n'est quasi rien au prix du grand nombre de fictions dont la Grèce et les pays voisins sont le théâtre et qui se rapportent, soit aux travaux d'Hercule et de Thésée, soit aux traditions de la Crète, de la Sicile et des autres îles, du Cithéron, de l'Hélicon, du Parnasse, du Pélion, de l'Attique tout entière et du Péloponnèse. Jamais personne non plus ne s'est avisé de préjuger, d'après les mythes employés par les poètes, l'ignorance des poètes eux-mêmes. Il y a plus : comme, dans les mythes poétiques, tout n'est pas fiction, et que le plus souvent (cela est vrai surtout d'Homère) les poètes ne font qu'ajouter des fables à une tradition historique, quiconque soumet les anciens mythes poétiques à la critique n'a pas à rechercher si ces fictions accessoires elles-mêmes ont eu et ont encore quelque fondement réel, la question pour lui n'est point là, et c'est plutôt sur les lieux, sur les personnages qui ont inspiré ces fictions des poètes, qu'il doit chercher à connaître la vérité : il recherchera, par exemple, si le fait des erreurs d'Ulysse est vrai historiquement et quel en a été le théâtre. 20. En général, Ératosthène a le tort de confondre les œuvres d'Homère dans la même catégorie que celles des autres poètes, sans vouloir lui reconnaître de supériorité d'aucune sorte, même sous le rapport de l'exactitude géographique, qui est ce qui nous occupe présentement. Et, pourtant, n'y eût-il que cela, il suffirait encore de parcourir le Triptolème de Sophocle ou le prologue des Bacchantes d'Euripide et de mettre en regard le soin qu'apporte Homère aux descriptions du même genre pour sentir aussitôt la supériorité ou tout au moins la différence : partout où il y a besoin d'ordre dans l'énumération des lieux, Homère observe rigoureusement cet ordre géographique, et cela non pas seulement pour la Grèce, mais même pour les pays les plus éloignés : « Et déjà, dans leur rage, ils voulaient entasser Ossa sur Olympe, et Pélion sur Ossa, Pélion aux cimes ombragées et perpétuellement agitées par le vent (58), » et ailleurs, « Cependant Junon s'est élancée; elle quitte les sommets de l'Olympe, foule le sol de la Piérie et de la riante Aemathie et atteint dans sa course les montagnes neigeuses des Thraces, nourrisseurs de chevaux; puis, du haut de l'Athos, se précipite au sein de la mer (59) » Dans le Catalogue aussi, il énumère suivant leur ordre non pas les villes, la chose n'était point nécessaire, mais bien les peuples. Il procède de même pour les nations lointaines : « Après avoir erré longtemps en Cypre, en Phénicie et jusque en Égypte, je visitai encore les terres des Éthiopiens, celles des Sidoniens et des Érembes et finalement la Libye tout entière (60). » Hipparque, du reste, avait déjà fait cette remarque. Les deux tragiques, au contraire, dans les occasions où l'ordre géographique était le plus de rigueur, quand il s'agissait, par exemple, pour l'un, de faire dire à Bacchus le nom de tous les peuples qu'il avait visités, et, pour l'autre, de mettre dans la bouche de Triptolème l'énumération des différentes parties de la terre ensemencées par ses mains, ne se sont pas fait faute et de rapprocher les contrées les plus distantes et d'en séparer d'autres tout à fait contiguës : « Quittant alors les champs aurifères de la Lydie, et traversant les plaines de la Phrygie et celles de la Perse, que frappent sans cesse les rayons du soleil, je visitai tour à tour et l'enceinte de Bactres et la froide Médie et l'heureuse Arabie (61). » Même défaut d'ordre dans l'énumération de Triptolème. Ce n'est pas tout : par la manière dont Homère parle des climats et des vents, on peut juger encore de l'étendue de ses connaissances géographiques; car il lui arrive très souvent de joindre cette double indication à ses descriptions topographiques: « Ithaque, la basse Ithaque, est en même temps de toutes ces îles celle qui est située le plus haut dans la mer vers le sombre couchant; les autres, au contraire, s'écartent du côté de l'aurore et du soleil levant (62) ; » et ailleurs : « Il s'y trouve deux portes : l'une s'ouvre au vent du nord l'autre au vent du midi » (63) ou bien encore : « Soit qu'ils volent à droite du côté de l'aurore et du soleil levant, soit qu'ils gagnent à gauche la région du sombre occident (64). » L'ignorance sur ce point est même, aux yeux d'Homère, le signe de la suprême confusion : « Amis, puisque nous ignorons et le côté du couchant et le côté de l'aurore, et le côté de la nuit et le côté du soleil (65). » Dans un autre passage, maintenant, et avec toute raison, Homère avait dit : « Et Borée et Zéphyr, tous deux soufflant de la Thrace (66). » Ératosthène pourtant s'y trompe encore et nous dénonce le poète comme s'il eût dit, absolument parlant, que le Zéphyr souffle de la Thrace ; mais, loin de parler en thèse générale, le poète ne fait allusion ici qu'au cas où l'un et l'autre vents viennent à se rencontrer dans la mer de Thrace (laquelle est, comme on sait, une partie de l'Égée), aux environs du golfe Mélos. La Thrace, effectivement, vers les confins de la Macédoine, se détourne vers le sud et s'avance en forme de pointe ou de promontoire dans la mer, d'où vient que pour Thasos, Lemnos, Imbros, Samothrace et en général pour tous ces parages, les Zéphyrs paraissent souffler de la Thrace même, comme ils semblent, pour l'Attique, souffler des roches Scironides, ce qui a fait quelquefois appeler Scirônes les Zéphyrs et surtout les Argestes- C'est ce que n'a point vu Ératosthène (bien qu'il en ait peut-être entrevu quelque chose, puisque lui-même signale cette brusque déviation, dont je parle, de la côte de Thrace vers le sud), et, partant de l'idée que l'expression d'Homère a un sens général, il vous le traite d'ignorant, lui rappelant que le Zéphyr souffle du couchant et de l'Ibérie et que la Thrace ne se prolonge point jusqu'à la hauteur de cette dernière contrée. Mais se peut-il, nous le demandons, qu'Homère ait ignoré que le Zéphyr souffle du couchant? Lui qui, dans des vers comme ceux-ci, assigne exactement à ce vent le rang qui lui appartient : « Ensemble se précipitent et l'Eurus et le Notus et le malin Zéphyr, et Borée lui-même (67).» Se peut-il qu'il ait ignoré que la Thrace ne dépasse point les monts de la Paeonie et de la Thessalie, lui qui connaissait et qui a expressément nommé dans leur ordre, après les Thraces, tous les peuples du littoral et ceux de l'intérieur, à savoir, d'une part, cette fraction de la nation Magnète, puis les Maliens et les différents peuples de la Grèce jusqu'aux Thesprotes, et, d'autre part, les Dolopes, limitrophes des Paeoniens, et les Selles de Dodone, jusqu'à l'Achelotis, sans plus faire mention des Thraces passé ces limites? - En revanche, il est bien vrai, [comme le dit Ératosthène], qu'Homère a un penchant marqué à toujours nommer de préférence la mer la plus voisine de sa patrie et qu'il connaissait le mieux; en voici un exemple : « Déjà l'assemblée s'agitait pareille aux longues vagues de la mer Icarienne (68). »
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ΚΕΦ. Β' 1. Εἰ δὲ πολλῶν προειπόντων ἐπιχειροῦμεν καὶ αὐτοὶ λέγειν περὶ τῶν αὐτῶν, οὔπω μεμπτέον, ἂν μὴ καὶ τὸν αὐτὸν τρόπον διελεγχθῶμεν ἐκείνοις ἅπαντα λέγοντες. Ὑπολαμβάνομεν δ' ἄλλων ἄλλο τι κατορθωσάντων ἄλλο πολὺ μέρος ἔτι τοῦ ἔργου λείπεσθαι· πρὸς οἷς ἂν καὶ μικρὸν προσλαβεῖν δυνηθῶμεν, ἱκανὴν δεῖ τίθεσθαι πρόφασιν τῆς ἐπιχειρήσεως. Καὶ γὰρ δὴ πολύ τι τοῖς νῦν ἡ τῶν Ῥωμαίων ἐπικράτεια καὶ τῶν Παρθυαίων τῆς τοιαύτης ἐμπειρίας προσδέδωκε· καθάπερ τοῖς μετὰ τὴν Ἀλεξάνδρου στρατείαν, ὥς φησιν Ἐρατοσθένης. Ὁ μὲν γὰρ τῆς Ἀσίας πολλὴν ἀνεκάλυψεν ἡμῖν καὶ τῶν βορείων τῆς εὐρώπης ἅπαντα μέχρι τοῦ Ἴστρου· οἱ δὲ ῥωμαῖοι τὰ ἑσπέρια τῆς Εὐρώπης ἅπαντα μέχρι Ἄλβιος ποταμοῦ τοῦ τὴν Γερμανίαν δίχα διαιροῦντος τά τε πέραν Ἴστρου τὰ μέχρι Τύρα ποταμοῦ· τὰ δὲ ἐπέκεινα μέχρι Μαιωτῶν καὶ τῆς εἰς Κόλχους τελευτώσης παραλίας Μιθριδάτης ὁ κληθεὶς Εὐπάτωρ ἐποίησε γνώριμα καὶ οἱ ἐκείνου στρατηγοί· οἱ δὲ Παρθυαῖοι τὰ περὶ τὴν Ὑρκανίαν καὶ τὴν Βακτριανὴν καὶ τοὺς ὑπὲρ τούτων Σκύθας γνωριμωτέρους ἡμῖν ἐποίησαν, ἧττον γνωριζομένους ὑπὸ τῶν πρότερον· ὥστε ἔχοιμεν ἄν τι λέγειν πλέον τῶν πρὸ ἡμῶν. Ὁρᾶν δ' ἔσται τοῦτο μάλιστα ἐν τοῖς λόγοις τοῖς πρὸς τοὺς πρὸ ἡμῶν, ἧττον μὲν τοὺς πάλαι, μᾶλλον δὲ τοὺς μετ' Ἐρατοσθένη καὶ αὐτὸν ἐκεῖνον· οὓς εἰκὸς ὅσῳπερ πολυμαθέστεροι τῶν πολλῶν γεγόνασι, τοσούτῳ δυσελεγκτοτέρους εἶναι τοῖς ὕστερον, ἄν τι πλημμελῶς λέγωσιν. Εἰ δ' ἀναγκασθησόμεθά που τοῖς αὐτοῖς ἀντιλέγειν, οἷς μάλιστα ἐπακολουθοῦμεν κατ' ἄλλα, δεῖ συγγνώμην ἔχειν. Οὐ γὰρ πρόκειται πρὸς ἅπαντας ἀντιλέγειν, ἀλλὰ τοὺς μὲν πολλοὺς ἐᾶν, οἷς μηδὲ ἀκολουθεῖν ἄξιον· ἐκείνους δὲ διαιτᾶν, οὓς ἐν τοῖς πλείστοις κατωρθωκότας ἴσμεν. Επεὶ οὐδὲ πρὸς ἅπαντας φιλοσοφεῖν ἄξιον, πρὸς Ἐρατοσθένη δὲ καὶ Ποσειδώνιον καὶ Ἵππαρχον καὶ Πολύβιον καὶ ἄλλους τοιούτους καλόν. 2. Πρῶτον δ' ἐπισκεπτέον Ἐρατοσθένη, παρατιθέντας ἅμα καὶ τὴν Ἱππάρχου πρὸς αὐτὸν ἀντιλογίαν ἔστι δ' ὁ Ἐρατοσθένης οὔχ οὕτως εὐκατατρόχαστος, ὥστε μηδ' Ἀθήνας αὐτὸν ἰδεῖν φάσκειν, ὅπερ Πολέμων ἐπιχειρεῖ δεικνύναι· οὔτ' ἐπὶ τοσοῦτον πιστὸς, ἐφ' ὅσον παρεδέξαντό τινες, καίπερ πλείστοις ἐντυχών, ὡς εἴρηκεν αὐτός, ἀγαθοῖς ἀνδράσιν. Ἐγένοντο γάρ, φησίν, ὡς οὐδέποτε, κατὰ τοῦτον τὸν καιρὸν ὑφ' ἕνα περίβολον καὶ μίαν πόλιν οἱ ( καὶ ) κατ' Ἀρίστωνα καὶ Ἀρκεσίλαον ἀνθήσαντες φιλόσοφοι. Οὐχ ἱκανὸν δ' οἶμαι τοῦτο, ἀλλὰ τὸ κρίνειν καλῶς οἷς μᾶλλον προσιτέον. Ὁ δὲ Ἀρκεσίλαον καὶ Ἀρίστωνα τῶν καθ' αὑτὸν ἀνθησάντων κορυφαίους τίθησιν, Ἀπελλῆς τε αὐτῷ πολύς ἐστι καὶ Βίων, ὅν φησι πρῶτον ἀνθινὰ περιβαλεῖν φιλοσοφίαν· ἀλλ' ὅμως πολλάκις εἰπεῖν ἄν τινα ἐπ' αὐτοῦ τοῦτο· Οἵην ἐκ ῥακέων ὁ Βίων. Ἐν αὐταῖς γὰρ ταῖς ἀποφάσεσι ταύταις ἱκανὴν ἀσθένειαν ἐμφαίνει τῆς ἑαυτοῦ γνώμης· ᾗ τοῦ Ζήνωνος τοῦ Κιτιέως γνώριμος γενόμενος Ἀθήνησι τῶν μὲν ἐκεῖνον διαδεξαμένων οὐδενὸς μέμνηται, τοὺς δ' ἐκείνῳ διενεχθέντας καὶ ὧν διαδοχὴ οὐδεμία σώζεται, τούτους ἀνθῆσαί φησι κατὰ τὸν καιρὸν ἐκεῖνον. Δηλοῖ δὲ καὶ ἡ περὶ τῶν ἀγαθῶν ἐκδοθεῖσα ὑπ' αὐτοῦ πραγματεία καὶ μελέται καὶ εἴ τι ἄλλο τοιοῦτο τὴν ἀγωγὴν αὐτοῦ· διότι μέσος ἦν τοῦ τε βουλομένου φιλοσοφεῖν καὶ τοῦ μὴ θαρροῦντος ἐγχειρίζειν ἑαυτὸν εἰς τὴν ὑπόσχεσιν ταύτην, ἀλλὰ μόνον μέχρι τοῦ δοκεῖν προιιόντος, ἢ καὶ παράβασίν τινα ταύτην ἀπὸ τῶν ἄλλων τῶν ἐγκυκλίων πεπορισμένου πρὸς διαγωγὴν ἢ καὶ παιδιάν· τρόπον δέ τινα καὶ ἐν τοῖς ἄλλοις ἐστὶ τοιοῦτος. Ἀλλ' ἐκεῖνα ἐάσθω· πρὸς δὲ τὰ νῦν ἐπιχειρητέον, ὅσα δύναιτ' ἂν ἐπανορθοῦν τὴν γεωγραφίαν, καὶ πρῶτον ὅπερ ἀρτίως ὑπερεθέμεθα. 3. Ποιητὴν γὰρ ἔφη πάντα στοχάζεσθαι ψυχαγωγίας, οὐ διδασκαλίας. Τοὐναντίον δ' οἱ παλαιοὶ φιλοσοφίαν τινὰ λέγουσι πρώτην τὴν ποιητικήν, εἰσάγουσαν εἰς τὸν βίον ἡμᾶς ἐκ νέων καὶ διδάσκουσαν ἤθη καὶ πάθη καὶ πράξεις μεθ' ἡδονῆς· οἱ δ' ἡμέτεροι καὶ μόνον ποιητὴν ἔφασαν εἶναι τὸν σοφόν. Διὰ τοῦτο καὶ τοὺς παῖδας αἱ τῶν Ἑλλήνων πόλεις πρώτιστα διὰ τῆς ποιητικῆς παιδεύουσιν, οὐ ψυχαγωγίας χάριν δήπουθεν ψιλῆς, ἀλλὰ σωφρονισμοῦ· ὅπου γε καὶ οἱ μουσικοὶ ψάλλειν καὶ λυρίζειν καὶ αὐλεῖν διδάσκοντες μεταποιοῦνται τῆς ἀρετῆς ταύτης· παιδευτικοὶ γὰρ εἶναί φασι καὶ ἐπανορθωτικοὶ τῶν ἠθῶν. Ταῦτα δ' οὐ μόνον παρὰ τῶν Πυθαγορείων ἀκούειν ἐστὶ λεγόντων, ἀλλὰ καὶ Ἀριστόξενος οὕτως ἀποφαίνεται. Καὶ Ὅμηρος δὲ τοὺς ἀοιδοὺς σωφρονιστὰς εἴρηκε, καθάπερ τὸν τῆς Κλυταιμνήστρας φύλακα,
Ὦ
πόλλ' ἐπέτελλεν τόν τε αἴγισθον οὐ πρότερον αὐτῆς περιγενέσθαι πρὶν ἢ
Τὸν μὲν
ἀοιδὸν ἄγων ἐς
νῆσον ἐρήμην
κάλλιπεν· Χωρὶς δὲ τούτων ὁ Ἐρατοσθένης ἑαυτῷ μάχεται· μικρὸν γὰρ πρὸ τῆς λεχθείσης ἀποφάσεως ἐναρχόμενος τοῦ περὶ τῆς γεωγραφίας λόγου φησὶν ἅπαντας κατ' ἀρχὰς φιλοτίμως ἔχειν εἰς τὸ μέσον φέρειν τὴν ὑπὲρ τῶν τοιούτων ἱστορίαν. Ὅμηρον γοῦν ὑπέρ τε τῶν Αἰθιόπων ὅσα ἐπύθετο καταχωρίσαι εἰς τὴν ποίησιν καὶ περὶ τῶν κατ' Αἴγυπτον καὶ Λιβύην· τὰ δὲ δὴ κατὰ τὴν Ἑλλάδα καὶ τοὺς σύνεγγυς τόπους καὶ λίαν περιέργως ἐξενηνοχέναι, πολυτρήρωνα μὲν τὴν Θίσβην λέγοντα, Ἁλίαρτον δὲ ποιήεντα, ἐσχατόωσαν δὲ Ἀνθηδόνα, Λίλαιαν δὲ πηγῇς ἔπι Κηφισσοῖο, καὶ οὐδεμίαν προσθήκην κενῶς ἀπορρίπτειν. Πότερον οὖν ὁ ποιῶν ταῦτα ψυχαγωγοῦντι ἔοικεν ἢ διδάσκοντι; Νὴ Δία, ἀλλὰ ταῦτα μὲν οὕτως εἴρηκε; τὰ δ' ἔξω τῆς αἰσθήσεως καὶ οὗτος καὶ ἄλλοι τερατολογίας μυθικῆς πεπληρώκασιν. Οὐκοῦν ἐχρῆν οὕτως εἰπεῖν, ὅτι ποιητὴς πᾶς τὰ μὲν ψυχαγωγίας χάριν μόνον ἐκφέρει, τὰ δὲ διδασκαλίας· ὁ δ' ἐπήνεγκεν, ὅτι ψυχαγωγίας μόνον, διδασκαλίας δ' οὔ. Καὶ προσεξεργάζεταί γε, πυνθανόμενος τί συμβάλλεται πρὸς ἀρετὴν ποιητοῦ πολλῶν ὑπάρξαι τόπων ἔμπειρον ἢ στρατηγίας ἢ γεωργίας ἢ ῥητορικῆς ἢ οἷα δὴ περιποιεῖν αὐτῷ τινες ἐβουλήθησαν; Τὸ μὲν οὖν ἅπαντα ζητεῖν περιποιεῖν αὐτῷ προεκπίπτοντος ἄν τις θείη τῇ φιλοτιμίᾳ· ὡς ἂν εἴ τις, φησὶν ὁ Ἵππαρχος, Ἀττικῆς εἰρεσιώνης κατηγοροίη καὶ ἃ μὴ δύναται φέρειν μῆλα καὶ ὄγχνας, οὕτως ἐκείνου πᾶν μάθημα καὶ πᾶσαν τέχνην. Τοῦτο μὲν δὴ ὀρθῶς ἂν λέγοις, ὦ Ἐρατόσθενες· ἐκεῖνα δ' οὐκ ὀρθῶς, ἀφαιρούμενος αὐτὸν τὴν τοσαύτην πολυμάθειαν καὶ τὴν ποιητικὴν γραώδη μυθολογίαν ἀποφαίνων, ᾗ δέδοται πλάττειν, φησίν, ὃ ἂν αὐτῇ φαίνηται ψυχαγωγίας οἰκεῖον. Ἆρα γὰρ οὐδὲ τοῖς ἀκροωμένοις τῶν ποιητῶν οὐδὲν συμβάλλεται πρὸς ἀρετήν; Λέγω δὲ τὸ πολλῶν ὑπάρξαι τόπων ἔμπειρον ἢ στρατηγίας ἢ γεωργίας ἢ ῥητορικῆς, ἅπερ ἡ ἀκρόασις, ὡς εἰκός, περιποιεῖ. 4. Ἀλλὰ μὴν ταῦτά γε πάντα ὁ ποιητὴς Ὀδυσσεῖ προσῆψεν, ὃν τῶν πάντων μάλιστα ἀρετῇ πάσῃ κοσμεῖ· οὗτος γὰρ αὐτῷ Πολλῶν ἀνθρώπων ἴδεν ἄστεα καὶ νόον ἔγνω, οὗτος δ' ὁ πτολίπορθος ἀεὶ λεγόμενος καὶ τὸ Ἴλιον ἑλὼν
Βουλῇ
καὶ μύθοισι
καὶ
ἠπεροπηίδι
τέχνῃ· φησὶν ὁ Διομήδης. Καὶ μὴν ἐπί γε τῇ γεωργίᾳ σεμνύνεται· καὶ γὰρ ἐν ἀμητῷ,
Ἐν ποίῃ
δρέπανον μὲν
ἐγὼν εὐκαμπὲς
ἔχοιμι, καὶ ἐν ἀρότῳ, Τῷ κέ μ' ἴδοις, εἰ ὦλκα διηνεκέα προταμοίμην. Καὶ οὐχ Ὅμηρος μὲν οὕτω φρονεῖ περὶ τούτων, οὐχὶ δὲ πάντες οἱ πεπαιδευμένοι μάρτυρι χρῶνται τῷ ποιητῇ, ὡς ὀρθῶς λέγοντι περὶ τοῦ τὴν τοιαύτην ἐμπειρίαν εἰς φρόνησιν συντείνειν μάλιστα. 5. Ἡ δὲ ῥητορικὴ φρόνησίς ἐστι δήπου περὶ λόγους· ἣν ἐπιδείκνυται παρ' ὅλην τὴν ποίησιν Ὀδυσσεὺς ἐν τῇ διαπείρᾳ, ἐν ταῖς λιταῖς, ἐν τῇ πρεσβείᾳ, ἐν ᾗ φησίν·
Ἀλλ'
ὅτε δὴ ὄπα τε
μεγάλην ἐκ
στήθεος εἵη Τίς ἂν οὖν ὑπολάβοι τὸν δυνάμενον ποιητὴν εἰσάγειν ῥητορεύοντας ἑτέρους καὶ στρατηγοῦντας καὶ τὰ ἄλλα ἐπιδεικνυμένους τὰ τῆς ἀρετῆς ἔργα, αὐτὸν εἶναι τῶν φλυάρων ἕνα καὶ τῶν θαυματοποιῶν, γοητεύειν μόνον καὶ κολακεύειν τὸν ἀκροατὴν δυνάμενον, ὠφελεῖν δὲ μηδέν; Προτέραν δ' (οὐδ') ἀρετὴν ποιητοῦ λέγοιμεν ἂν ἡντινοῦν ἄλλην, ἢ τὴν μιμητικὴν τοῦ βίου διὰ λόγων. Πῶς ἂν οὖν μιμοῖτο ἄπειρος ὢν τοῦ βίου καὶ ἄφρων; Οὐ γὰρ οὕτω φαμὲν τὴν τῶν ποιητῶν ἀρετὴν ὡς ἢ τεκτόνων ἢ χαλκέων· ἀλλ' ἐκείνη μὲν οὐδενὸς ἔχεται καλοῦ καὶ σεμνοῦ, ἡ δὲ ποιητοῦ συνέζευκται τῇ τοῦ ἀνθρώπου, καὶ οὐχ οἷόν τε ἀγαθὸν γενέσθαι ποιητὴν μὴ πρότερον γενηθέντα ἄνδρα ἀγαθόν. 6. Τὸ δὲ δὴ καὶ τὴν ῥητορικὴν ἀφαιρεῖσθαι τὸν ποιητὴν τελέως ἀφειδοῦντος ἡμῶν ἐστι. Τί γὰρ οὕτω ῥητορικὸν, ὡς φράσις; Τί δ' οὕτω ποιητικόν; Τίς δ' ἀμείνων Ὁμήρου φράσαι; Νὴ Δία, ἀλλ' ἑτέρα φράσις ἡ ποιητική. Τῷ γε εἴδει, ὡς καὶ ἐν αὐτῇ τῇ ποιητικῇ ἡ τραγικὴ καὶ ἡ κωμική, καὶ ἐν τῇ πεζῇ ἡ ἱστορικὴ καὶ ἡ δικανική. Ἆρα γὰρ οὐδ' ὁ λόγος ἐστὶ γενικός, οὗ εἴδη ὁ ἔμμετρος καὶ ὁ πεζός; Ἢ λόγος μέν, ῥητορικὸς δὲ λόγος οὐκ ἔστι γενικὸς καὶ φράσις καὶ ἀρετὴ λόγου; Ὡς δ' εἰπεῖν, ὁ πεζὸς λόγος, ὅ γε κατεσκευασμένος, μίμημα τοῦ ποιητικοῦ ἐστι. Πρώτιστα γὰρ ἡ ποιητικὴ κατασκευὴ παρῆλθεν εἰς τὸ μέσον καὶ εὐδοκίμησεν· εἶτα ἐκείνην μιμούμενοι, λύσαντες τὸ μέτρον, τἆλλα δὲ φυλάξαντες τὰ ποιητικά, συνέγραψαν οἱ περὶ Κάδμον καὶ Φερεκύδη καὶ Ἑκαταῖον· εἶτα οἱ ὕστερον ἀφαιροῦντες ἀεί τι τῶν τοιούτων, εἰς τὸ νῦν εἶδος κατήγαγον ὡς ἂν ἀπὸ ὕψους τινός· καθάπερ ἄν τις καὶ τὴν κωμῳδίαν φαίη λαβεῖν τὴν σύστασιν ἀπὸ τῆς τραγῳδίας, καὶ τοῦ κατ' αὐτὴν ὕψους καταβιβασθεῖσαν εἰς τὸ λογοειδὲς νυνὶ καλούμενον. Καὶ τὸ ἀείδειν δὲ ἀντὶ τοῦ φράζειν τιθέμενον παρὰ τοῖς πάλαι ταὐτὸ τοῦτο ἐκμαρτυρεῖ, διότι πηγὴ καὶ ἀρχὴ φράσεως κατεσκευασμένης καὶ ῥητορικῆς ὑπῆρξεν ἡ ποιητική. Αὕτη γὰρ προσεχρήσατο τῷ μέλει κατὰ τὰς ἐπιδείξεις· τοῦτο δ' ἦν ᾦδὴ ἢ λόγος μεμελισμένος, ἀφ' οὗ δὴ ῥαψῳδίαν τ' ἔλεγον καὶ τραγῳδίαν καὶ κωμῳδίαν. ὥστ' ἐπειδὴ τὸ φράζειν πρώτιστα ἐπὶ τῆς ποιητικῆς ἐλέγετο φράσεως, αὕτη δὲ μετ' ᾦδῆς [ ἦν], τὸ ἀείδειν [ αὐτοῖς] τὸ αὐτὸ τῷ φράζειν ὑπῆρξε παρ' ἐκείνοις. Καταχρησαμένων δ' αὐτῶν θατέρῳ καὶ ἐπὶ τοῦ πεζοῦ λόγου, καὶ ἐπὶ θάτερον ἡ κατάχρησις διέβη. Καὶ αὐτὸ δὲ τὸ πεζὸν λεχθῆναι τὸν ἄνευ τοῦ μέτρου λόγον ἐμφαίνει τὸν ἀπὸ ὕψους τινὸς καταβάντα καὶ ὀχήματος εἰς τοὔδαφος. 7. Ἀλλ' οὐδὲ τὰ σύνεγγυς μόνον, ὥσπερ Ἐρατοσθένης εἴρηκε, καὶ τὰ ἐν τοῖς Ἕλλησιν, ἀλλὰ καὶ τῶν πόρρω πολλὰ λέγει καὶ δι' ἀκριβείας Ὅμηρος καὶ μᾶλλόν γε τῶν ὕστερον μυθολογεῖται, οὐ πάντα τερατευόμενος, ἀλλὰ καὶ πρὸς ἐπιστήμην ἀλληγορῶν ἢ διασκευάζων ἢ δημαγωγῶν ἄλλα τε καὶ τὰ περὶ τὴν Ὀδυσσέως πλάνην· περὶ ἧς πολλὰ διαμαρτάνει τούς τ' ἐξηγητὰς φλυάρους ἀποφαίνων καὶ αὐτὸν τὸν ποιητήν· περὶ ὧν ἄξιον εἰπεῖν διὰ πλειόνων. 8. Καὶ πρῶτον ὅτι τοὺς μύθους ἀπεδέξαντο οὐχ οἱ ποιηταὶ μόνον, ἀλλὰ καὶ αἱ πόλεις πολὺ πρότερον καὶ οἱ νομοθέται τοῦ χρησίμου χάριν, βλέψαντες εἰς τὸ φυσικὸν πάθος τοῦ λογικοῦ ζῴου· φιλειδήμων γὰρ ἅνθρωπος, προοίμιον δὲ τούτου τὸ φιλόμυθον· ἐντεῦθεν οὖν ἄρχεται τὰ παιδία ἀκροᾶσθαι καὶ κοινωνεῖν λόγων ἐπὶ πλεῖον. Αἴτιον δ', ὅτι καινολογία τίς ἐστιν ὁ μῦθος, οὐ τὰ καθεστηκότα φράζων ἀλλ' ἕτερα παρὰ ταῦτα· ἡδὺ δὲ τὸ καινὸν καὶ ὃ μὴ πρότερον ἔγνω τις· τοῦτο δ' αὐτό ἐστι καὶ τὸ ποιοῦν φιλειδήμονα. Ὅταν δὲ προσῇ καὶ τὸ θαυμαστὸν καὶ τὸ τερατῶδες, ἐπιτείνει τὴν ἡδονήν, ἥπερ ἐστὶ τοῦ μανθάνειν φίλτρον. Κατ' ἀρχὰς μὲν οὖν ἀνάγκη τοιούτοις δελέασι χρῆσθαι, προιιούσης δὲ τῆς ἡλικίας ἐπὶ τὴν τῶν ὄντων μάθησιν ἄγειν, ἤδη τῆς διανοίας ἐρρωμένης καὶ μηκέτι δεομένης κολάκων. Καὶ ἰδιώτης δὲ πᾶς καὶ ἀπαίδευτος τρόπον τινὰ παῖς ἐστι φιλομυθεῖ τε ὡσαύτως· ὁμοίως δὲ καὶ ὁ πεπαιδευμένος μετρίως· οὐδὲ γὰρ οὗτος ἰσχύει τῷ λογισμῷ, πρόσεστι δὲ καὶ τὸ ἐκ παιδὸς ἔθος. Ἐπεὶ δ' οὐ μόνον ἡδὺ ἀλλὰ καὶ φοβερὸν τὸ τερατῶδες, ἀμφοτέρων ἐστὶ τῶν εἰδῶν χρεία πρός τε τοὺς παῖδας καὶ τοὺς ἐν ἡλικίᾳ· τοῖς τε γὰρ παισὶ προσφέρομεν τοὺς ἡδεῖς μύθους εἰς προτροπήν, εἰς ἀποτροπὴν δὲ τοὺς φοβερούς. Ἥ τε γὰρ Λάμια μῦθός ἐστι καὶ ἡ Γοργὼ καὶ ὁ Ἐφιάλτης καὶ ἡ Μορμολύκη. Οἵ τε πολλοὶ τῶν τὰς πόλεις οἰκούντων εἰς μὲν προτροπὴν ἄγονται τοῖς ἡδέσι τῶν μύθων, ὅταν ἀκούωσι τῶν ποιητῶν ἀνδραγαθήματα μυθώδη διηγουμένων, οἷον Ἡρακλέους ἄθλους ἢ Θησέως, ἢ τιμὰς παρὰ θεῶν νεμομένας, ἢ νὴ Δία ὁρῶσι γραφὰς ἢ ξόανα ἢ πλάσματα τοιαύτην τινὰ περιπέτειαν ὑποσημαίνοντα μυθώδη· εἰς ἀποτροπὴν δέ, ὅταν κολάσεις παρὰ θεῶν καὶ φόβους καὶ ἀπειλὰς ἢ διὰ λόγων ἢ διὰ τύπων ἀοράτων τινῶν προσδέχωνται, ἢ καὶ πιστεύωσι περιπεσεῖν τινας. Οὐ γὰρ ὄχλον γε γυναικῶν καὶ παντὸς χυδαίου πλήθους ἐπαγαγεῖν λόγῳ δυνατὸν φιλοσόφῳ καὶ προσκαλέσασθαι πρὸς εὐσέβειαν καὶ ὁσιότητα καὶ πίστιν, ἀλλὰ δεῖ καὶ διὰ δεισιδαιμονίας· τοῦτο δ' οὐκ ἄνευ μυθοποιίας καὶ τερατείας. Κεραυνὸς γὰρ καὶ αἰγὶς καὶ τρίαινα καὶ λαμπάδες καὶ δράκοντες καὶ θυρσόλογχα, τῶν θεῶν ὅπλα, μῦθοι καὶ πᾶσα θεολογία ἀρχαιική· ταῦτα δ' ἀπεδέξαντο οἱ τὰς πολιτείας καταστησάμενοι μορμολύκας τινὰς πρὸς τοὺς νηπιόφρονας. Τοιαύτης δὲ τῆς μυθοποιίας οὔσης καὶ καταστρεφούσης εἰς τὸ κοινωνικὸν καὶ τὸ πολιτικὸν τοῦ βίου σχῆμα καὶ τὴν τῶν ὄντων ἱστορίαν, οἱ μὲν ἀρχαῖοι τὴν παιδικὴν ἀγωγὴν ἐφύλαξαν μέχρι τῶν τελείων ἡλικιῶν, καὶ διὰ ποιητικῆς ἱκανῶς σωφρονίζεσθαι πᾶσαν ἡλικίαν ὑπέλαβον· χρόνοις δ' ὕστερον ἡ τῆς ἱστορίας γραφὴ καὶ ἡ νῦν φιλοσοφία παρελήλυθεν εἰς μέσον. Αὕτη μὲν οὖν πρὸς ὀλίγους, ἡ δὲ ποιητικὴ δημωφελεστέρα καὶ θέατρα πληροῦν δυναμένη· ἡ δὲ δὴ τοῦ Ὁμήρου ὑπερβαλλόντως. Καὶ οἱ πρῶτοι δὲ ἱστορικοὶ καὶ φυσικοὶ μυθογράφοι.
9.
Ἅτε
δὴ πρὸς τὸ
παιδευτικὸν
εἶδος τοὺς
μύθους
ἀναφέρων ὁ
ποιητὴς
ἐφρόντισε
πολὺ μέρος
τἀληθοῦς·
« ἐν δ' ἐτίθει
καὶ ψεῦδος» Ὡς δ' ὅτε τις χρυσὸν περιχεύεται ἀργύρῳ ἀνήρ, οὕτως ἐκεῖνος ταῖς ἀληθέσι περιπετείαις προσεπετίθει μῦθον, ἡδύνων καὶ κοσμῶν τὴν φράσιν· πρὸς δὲ τὸ αὐτὸ τέλος τοῦ ἱστορικοῦ καὶ τοῦ τὰ ὄντα λέγοντος βλέπων. Οὕτω δὴ τόν τε Ἰλιακὸν πόλεμον γεγονότα παραλαβὼν ἐκόσμησε ταῖς μυθοποιίαις, καὶ τὴν Ὀδυσσέως πλάνην ὡσαύτως· ἐκ μηδενὸς δὲ ἀληθοῦς ἀνάπτειν κενὴν τερατολογίαν οὐχ Ὁμηρικόν. Προσπίπτει γάρ, ὡς εἰκός, ὡς πιθανώτερον ἂν οὕτω τις ψεύδοιτο, εἰ καταμίσγοι τι καὶ αὐτῶν τῶν ἀληθινῶν· ὅπερ καὶ Πολύβιός φησι περὶ τῆς Ὀδυσσέως πλάνης ἐπιχειρῶν· τοιοῦτο δ' ἐστὶ καὶ τό Ἱσκε ψεύδεα πολλὰ λέγων ἐτύμοισιν ὁμοῖα. Οὐ γὰρ πάντα ἀλλὰ πολλά, ἐπεὶ οὐδ' ἂν ἦν ἐτύμοισιν ὁμοῖα. Ἔλαβεν οὖν παρὰ τῆς ἱστορίας τὰς ἀρχάς. Καὶ γὰρ τὸν αἰόλον δυναστεῦσαί φασι τῶν περὶ τὴν Λιπά ραν νήσων, καὶ τῶν περὶ τὴν αἴτνην καὶ Λεοντίνην Κύκλωπας καὶ Λαιστρυγόνας ἀξένους τινάς· διὸ καὶ τὰ περὶ τὸν πορθμὸν ἀπροσπέλαστα εἶναι τοῖς τότε, καὶ τὴν Χάρυβδιν καὶ τὸ Σκύλλαιον ὑπὸ λῃστῶν κατέχεσθαι. Οὕτω δὲ καὶ τοὺς ἄλλους τῶν ὑπὸ Ὁμήρου λεγομένων ἐν ἄλλοις τόποις ἱστοροῦμεν· οὕτω δὲ καὶ τοὺς Κιμμερίους εἰδὼς οἰκοῦντας τὸν Κιμμερικὸν Βόσπορον πρὸς βορρᾶν καὶ ζοφώδη μετήγαγεν οἰκείως εἰς σκοτεινόν τινα τόπον τὸν καθ' ᾅδην, χρήσιμον ὄντα πρὸς τὴν μυθοποιίαν τὴν ἐν τῇ πλάνῃ. Ὅτι δ' οἶδεν αὐτούς, οἱ χρονογράφοι δηλοῦσιν, ἢ μικρὸν πρὸ αὐτοῦ τὴν τῶν Κιμμερίων ἔφοδον ἢ κατ' αὐτὸν ἀναγράφοντες. 10. Ὡς δ' αὕτως καὶ τοὺς Κόλχους εἰδὼς καὶ τὸν Ἰάσονος πλοῦν τὸν εἰς Αἶαν καὶ τὰ περὶ Κίρκης καὶ Μηδείας μυθευόμενα καὶ ἱστορούμενα περὶ τῆς φαρμακείας καὶ τῆς ἄλλης ὁμοιοτροπίας, συγγενείας τε ἔπλασε τῶν οὕτω διῳκισμένων, τῆς μὲν ἐν τῷ μυχῷ τοῦ Πόντου, τῆς δ' ἐν τῇ Ἰταλίᾳ, καὶ ἐξωκεανισμὸν ἀμφοῖν, τάχα καὶ τοῦ Ἰάσονος μέχρι τῆς Ἰταλίας πλανηθέντος· δείκνυται γάρ τινα καὶ περὶ τὰ Κεραύνια ὄρη καὶ περὶ τὸν Ἀδρίαν καὶ ἐν τῷ Ποσειδωνιάτῃ κόλπῳ καὶ ταῖς πρὸ τῆς Τυρρηνίας νήσοις τῆς τῶν Ἀργοναυτῶν πλάνης (σημεῖα). Προσέδοσαν δέ τι καὶ αἱ Κυάνεαι, ἅσπερ Συμπληγάδας καλοῦσι πέτρας τινές, τραχὺν ποιοῦσαι τὸν διέκπλουν τὸν διὰ τοῦ Βυζαντιακοῦ στόματος· ὥστε παρὰ μὲν τὴν Αἶαν ἡ Αἰαίη, παρὰ δὲ τὰς Συμπληγάδας αἱ Πλαγκταὶ, καὶ ὁ δι' αὐτῶν πλοῦς τοῦ Ἰάσονος πιθανὸς ἐφάνη· παρὰ δὲ τὴν Σκύλλαν καὶ τὴν Χάρυβδιν ὁ διὰ τῶν σκοπέλων πλοῦς. Ἁπλῶς δ' οἱ τότε τὸ πέλαγος τὸ Ποντικὸν ὥσπερ ἄλλον τινὰ ὠκεανὸν ὑπελάμβανον, καὶ τοὺς πλέοντας ἐκεῖσε ὁμοίως ἐκτοπίζειν ἐδόκουν ὥσπερ τοὺς ἔξω στηλῶν ἐπὶ πολὺ προιιόντας· καὶ γὰρ μέγιστον τῶν καθ' ἡμᾶς ἐνομίζετο, καὶ διὰ τοῦτο κατ' ἐξοχὴν ἰδίως πόντον προσηγόρευον, ὡς ποιητὴν Ὅμηρον. Ἴσως οὖν καὶ διὰ τοῦτο μετήνεγκε τὰ ἐκ τοῦ Πόντου πρὸς τὸν ὠκεανὸν ὡς εὐπαράδεκτα διὰ τὴν κατέχουσαν δόξαν. Οἶμαι δὲ καὶ τῶν Σολύμων τὰ ἄκρα τοῦ Ταύρου τὰ περὶ τὴν Λυκίαν ἕως Πισιδίας κατεχόντων τὰ ὑψηλότατα καὶ τὰς ἀπὸ τῆς μεσημβρίας ὑπερβολὰς ἐπιφανεστάτας παρεχόντων τοῖς ἐντὸς τοῦ Ταύρου, καὶ μάλιστα τοῖς περὶ τὸν Πόντον, καθ' ὁμοιότητά τινα καὶ τούτους ἐξωκεανισθῆναι· φησὶ γὰρ ἐπὶ τοῦ πλέοντος ἐν τῇ σχεδίᾳ
Τὸν
δ' ἐξ
αἰθιόπων
ἀνιὼν κρείων
Ἐνοσίχθων Τάχα δὲ καὶ τοὺς μονομμάτους Κύκλωπας ἐκ τῆς Σκυθικῆς ἱστορίας μετενήνοχε· τοιούτους γάρ τινας τοὺς Ἀριμασπούς φασιν, οὓς ἐν τοῖς Ἀριμασπείοις ἔπεσιν ἐνδέδωκεν Ἀριστέας ὁ Προκοννήσιος. 11. Δεῖ δὲ ταῦτα προυποθέμενον σκοπεῖν, τί λέγουσιν οἱ φήσαντες περὶ Σικελίαν ἢ Ἰταλίαν γενέσθαι τῷ Ὀδυσσεῖ τὴν πλάνην καθ' Ὅμηρον· ἔστι γὰρ ἀμφοτέρως τοῦτο δέξασθαι, καὶ βέλτιον καὶ χεῖρον. Βέλτιον μέν, ἂν οὕτω δέχηται [τις], ὅτι πεισθεὶς ἐκεῖ τὴν πλάνην τῷ Ὀδυσσεῖ γενέσθαι, λαβὼν ἀληθῆ ταύτην τὴν ὑπόθεσιν ποιητικῶς διεσκεύασε· τοῦτο γὰρ οἰκείως ἂν λέγοιτο περὶ αὐτοῦ· καὶ οὐ μόνον γε περὶ Ἰταλίαν, ἀλλὰ καὶ μέχρι τῶν ἐσχάτων τῆς Ἰβηρίας ἐστὶν εὑρεῖν ἴχνη τῆς ἐκείνου πλάνης καὶ ἄλλων πλειόνων. Χεῖρον δέ, ἐάν τις καὶ τὴν διασκευὴν ὡς ἱστορίαν δέχηται, ἐκείνου ὠκεανὸν καὶ ᾋδην καὶ Ἡλίου βόας καὶ παρὰ θεαῖς ξενίας καὶ μεταμορφώσεις καὶ μεγέθη Κυκλώπων καὶ Λαιστρυγόνων καὶ μορφὴν Σκύλλης καὶ διαστήματα πλοῦ καὶ ἄλλα πλείω τοιαῦτα τερατογραφοῦντος φανερῶς. Οὔτε δὲ πρὸς τοῦτον ἄξιον ἀντιλέγειν οὕτω φανερῶς καταψευδόμενον τοῦ ποιητοῦ, καθάπερ οὐδ', εἰ φαίη, τοῦτον τὸν τρόπον γενέσθαι τὸν εἰς τὴν Ἰθάκην κατάπλουν τοῦ Ὀδυσσέως καὶ τὴν μνηστηροφονίαν καὶ τὴν ἐπὶ τοῦ ἀγροῦ συστᾶσαν μάχην τοῖς Ἰθακησίοις πρὸς αὐτόν· οὔτε πρὸς τὸν δεξάμενον οἰκείως προσπλέκεσθαι δίκαιον. 12. Ὁ Ἐρατοσθένης δὲ πρὸς ἀμφοτέρας τὰς ἀποφάσεις ἀπήντηκεν οὐκ εὖ. Πρὸς μὲν τὴν δευτέραν, ὅτι πειρᾶται διαβάλλειν φανερῶς ψευδῆ καὶ οὐκ ἄξια λόγου διὰ μακρῶν· πρὸς δὲ τὴν προτέραν, ποιητήν τε ἅπαντα ἀποφήνας φλύαρον, καὶ μήτε τόπων ἐμπειρίαν μήτε τεχνῶν πρὸς ἀρετὴν συντείνειν νομίσας· τῶν τε μύθων τῶν μὲν ἐν τόποις οὐ πεπλασμένοις πεφημισμένων, οἷον ἐν Ἰλίῳ καὶ Ἴδῃ καὶ Πηλίῳ, τῶν δὲ ἐν πεπλασμένοις, καθάπερ ἐν οἷς αἱ Γοργόνες ἢ ὁ Γηρυόνης, ταύτης φησὶ τῆς ἰδέας εἶναι καὶ τοὺς κατὰ τὴν Ὀδυσσέως πλάνην λεγομένους, τοὺς δὲ μὴ πεπλάσθαι λέγοντας ἀλλ' ὑποκεῖσθαι ἐξ αὐτοῦ τοῦ μὴ συμφωνεῖν ἐλέγχεσθαι ψευδομένους· τὰς γοῦν Σειρῆνας τοὺς μὲν ἐπὶ τῆς Πελωριάδος καθιδρύειν, τοὺς δὲ ἐπὶ τῶν Σειρηνουσσῶν πλείους ἢ δισχιλίους διεχουσῶν σταδίους· εἶναι δ' αὐτὰς σκόπελον τρικόρυφον διείργοντα τὸν Κυμαῖον καὶ Ποσειδωνιάτην κόλπον. Ἀλλ' οὔθ' ὁ σκόπελος οὗτος ἐστὶ τρικόρυφος οὔθ' ὅλως κορυφοῦται πρὸς ὕψος, ἀλλ' ἀγκών τις ἔκκειται μακρὸς καὶ στενὸς ἀπὸ τῶν κατὰ Συρρεντὸν χωρίων ἐπὶ τὸν κατὰ Καπρίας πορθμόν, ἐπὶ θάτερα μὲν τῆς ὀρεινῆς τὸ τῶν Σειρήνων ἱερὸν ἔχων, ἐπὶ θάτερα δὲ πρὸς τῷ Ποσειδωνιάτῃ κόλπῳ νησίδια τρία προκείμενα ἔρημα πετρώδη, ἃ καλοῦσι Σειρῆνας· ἐπ' αὐτῷ δὲ τῷ πορθμῷ τὸ Ἀθήναιον, ᾧπερ ὁμωνυμεῖ καὶ ὁ ἀγκὼν αὐτός. 13. Ἀλλ' οὐδ' εἰ μὴ συμφωνοῦσιν οἱ τὴν ἱστορίαν τῶν τόπων παραδιδόντες, εὐθὺς ἐκβάλλειν δεῖ τὴν σύμπασαν ἱστορίαν· ἀλλ' ἔσθ' ὅτε καὶ πιστοῦσθαι τὸ καθόλου μᾶλλόν ἐστιν. Οἷόν τι λέγω, ζητουμένου εἰ κατὰ Σικελίαν καὶ Ἰταλίαν ἡ πλάνη γέγονε καὶ εἰ αἱ Σειρῆνες ἐνταῦθά που λέγονται, ὁ μὲν φήσας ἐν τῇ Πελωριάδι πρὸς τὸν ἐν ταῖς Σειρηνούσσαις διαφωνεῖ, ἀμφότεροι δὲ πρὸς τὸν περὶ Σικελίαν καὶ Ἰταλίαν λέγοντα οὐ διαφωνοῦσιν, ἀλλὰ καὶ μείζω πίστιν παρέχουσιν· ὅτι καίπερ μὴ τὸ αὐτὸ χωρίον φράζοντες ὅμως οὐκ ἐκβεβήκεσάν γε τοῦ κατὰ τὴν Ἰταλίαν ἢ Σικελίαν. Ἐὰν δὲ προσθῇ τις ὅτι ἐν Νεαπόλει Παρθενόπης δείκνυται μνῆμα μιᾶς τῶν Σειρήνων, ἔτι πλείων προσεγένετο πίστις, καίτοι τρίτου τινὸς λεχθέντος τούτου τοῦ τόπου. Ἀλλ' ὅτι ἐν τούτῳ τῷ κόλπῳ τῷ ὑπὸ Ἐρατοσθένους λεχθέντι Κυμαίῳ, ὃν ποιοῦσιν αἱ Σειρηνοῦσσαι, καὶ ἡ Νεάπολις ἵδρυται, βεβαιοτέρως πιστεύομεν τὸ περὶ τούτους τοὺς τόπους γεγονέναι τὰς Σειρῆνας· οὔτε γὰρ τὸν ποιητὴν ἀκριβῶς ἕκαστα πυθέσθαι, οὔθ' ἡμεῖς παρ' ἐκείνου ζητοῦμεν τὸ ἀκριβές· οὐ μὴν οὐδ' οὕτως ἔχομεν ὡς ὑπολαμβάνειν καὶ μηδὲν πεπυσμένον περὶ τῆς πλάνης, μήθ' ὅπου μήθ' ὅπως γεγένηται, ῥαψῳδεῖν. 14. Ἐρατοσθένης δὲ Ἡσίοδον μὲν εἰκάζει πεπυσμένον περὶ τῆς Ὀδυσσέως πλάνης ὅτι κατὰ Σικελίαν καὶ Ἰταλίαν γεγένηται, πιστεύσαντα τῇ δόξῃ μὴ μόνον τῶν ὑφ' Ὁμήρου λεγομένων μεμνῆσθαι, ἀλλὰ καὶ αἴτνης καὶ Ὀρτυγίας τοῦ πρὸς Συρακούσαις νησίου καὶ Τυρρηνῶν· Ὅμηρον δὲ μήτε εἰδέναι ταῦτα, μήτε βούλε σθαι ἐν γνωρίμοις τόποις ποιεῖν τὴν πλάνην. Πότερον οὖν αἴτνη μὲν καὶ Τυρρηνία γνώριμα, Σκύλλαιον δὲ καὶ Χάρυβδις καὶ Κίρκαιον καὶ Σειρηνοῦσσαι οὐ πάνυ; Ἢ καὶ Ἡσιόδῳ μὲν ἔπρεπε μὴ φλυαρεῖν, ἀλλὰ ταῖς κατεχούσαις δόξαις ἀκολουθεῖν, Ὁμήρῳ δὲ πᾶν, ὅ τι ἂν ἐπ' ἀκαιρίμαν γλῶσσαν ἴῃ, κελαδεῖν; Χωρὶς γὰρ τῶν λεχθέντων περὶ τοῦ τρόπου τῆς πρεπούσης Ὁμήρῳ μυθοποιίας, καὶ τὸ πλῆθος τῶν συγγραφέων τῶν ταὐτὰ θρυλούντων, καὶ τῆς κατὰ τοὺς τόπους ἐπιχωριαζούσης φήμης διδάσκειν δύναται, διότι ταῦτα οὐ ποιητῶν πλάσματά ἐστιν οὐδὲ συγγραφέων, ἀλλὰ γεγενημένων ἴχνη καὶ προσώπων καὶ πράξεων. 15. Καὶ Πολύβιος δ' ὀρθῶς ὑπονοεῖ τὰ περὶ τῆς πλάνης· τὸν γὰρ αἰόλον τὸν προσημαίνοντα τοὺς ἔκπλους ἐν τοῖς κατὰ τὸν πορθμὸν τόποις ἀμφιδρόμοις οὖσι καὶ δυσέκπλοις διὰ τὰς παλιρροίας ταμίαν τε εἰρῆσθαι τῶν ἀνέμων καὶ βασιλέα νενομίσθαι φησί· καθάπερ Δαναὸν μὲν, τὰ ὑδρεῖα τὰ ἐν Ἄργει παραδείξαντα, Ἀτρέα δὲ, τοῦ ἡλίου τὸν ὑπεναντίον τῷ οὐρανῷ δρόμον, μάντεις τε καὶ ἱεροσκοπουμένους ἀποδείκνυσθαι βασιλέας· τούς θ' ἱερέας τῶν Αἰγυπτίων καὶ Χαλδαίους καὶ Μάγους, σοφίᾳ τινὶ διαφέροντας τῶν ἄλλων ἡγεμονίας καὶ τιμῆς τυγχάνειν παρὰ τοῖς πρὸ ἡμῶν, οὕτω δὲ καὶ τῶν θεῶν ἕνα ἕκαστον τῶν χρησίμων τινὸς εὑρετὴν γενόμενον τιμᾶσθαι. Ταῦτα δὲ προοικονομησάμενος οὐκ ἐᾷ τὸν Αἰόλον ἐν μύθου σχήματι ἀκούεσθαι, οὐδ' ὅλην τὴν Ὀδυσσέως πλάνην, ἀλλὰ μικρὰ μὲν προσμεμυθεῦσθαι καθάπερ καὶ τῷ Ἰλιακῷ πολέμῳ, τὸ δ' ὅλον περὶ Σικελίαν καὶ τῷ ποιητῇ πεποιῆσθαι καὶ τοῖς ἄλλοις συγγραφεῦσιν, ὅσοι τὰ περιχώρια λέγουσι τὰ περὶ τὴν Ἰταλίαν καὶ Σικελίαν. Οὐκ ἐπαινεῖ δὲ οὐδὲ τὴν τοιαύτην τοῦ Ἐρατοσθένους ἀπόφασιν, διότι φησὶ τότ' ἂν εὑρεῖν τινα ποῦ Ὀδυσσεὺς πεπλάνηται, ὅταν εὕρῃ τὸν σκυτέα τὸν συρράψαντα τὸν τῶν ἀνέμων ἀσκόν. Καὶ τοῦτο δ' οἰκείως εἰρῆσθαι τοῖς συμβαίνουσι περὶ τὸ Σκύλλαιον καὶ τὴν θήραν τῶν γαλεωτῶν τὸ ἐπὶ τῆς Σκύλλης·
Αὐτοῦ δ'
ἰχθυάᾳ σκόπελον
περιμαιμώωσα Τοὺς γὰρ θύννους ἀγεληδὸν φερομένους παρὰ τὴν Ἰταλίαν, ἐπειδὰν ἐμπέσωσι καὶ κωλυθῶσι τῆς Σικελίας ἅψασθαι, περιπίπτειν τοῖς μείζοσι τῶν ζῴων, οἷον δελφίνων καὶ κυνῶν καὶ ἄλλων κητωδῶν· ἐκ δὲ τῆς θήρας αὐτῶν πιαίνεσθαι τοὺς γαλεώτας, οὓς καὶ ξιφίας λέγεσθαι καὶ κύνας φησί. Συμβαίνειν γὰρ ταὐτὸν ἐνθάδε καὶ κατὰ τὰς ἀναβάσεις τοῦ Νείλου καὶ τῶν ἄλλων ὑδάτων, ὅπερ ἐπὶ πυρὸς καὶ ὕλης ἐμπιπραμένης· ἀθροιζόμενα γὰρ τὰ θηρία φεύγειν τὸ πῦρ ἢ τὸ ὕδωρ, καὶ βορὰν γίνεσθαι τοῖς κρείττοσι. 16. Ταῦτα δ' εἰπὼν διηγεῖται τῶν γαλεωτῶν θήραν, ἣ συνίσταται περὶ τὸ Σκύλλαιον· σκοπὸς γὰρ ἐφέστηκε κοινὸς ὑφορμοῦσιν ἐν δικώποις σκαφιδίοις πολλοῖς, δύο καθ' ἕκαστον σκαφίδιον· καὶ ὁ μὲν ἐλαύνει, ὁ δ' ἐπὶ τῆς πρώρας ἕστηκε δόρυ ἔχων, σημήναντος τοῦ σκοποῦ τὴν ἐπιφάνειαν τοῦ γαλεώτου· φέρεται δὲ τὸ τρίτον μέρος ἔξαλον τὸ ζῷον. Συνάψαντος δὲ τοῦ σκάφους, ὁ μὲν ἔπληξεν ἐκ χειρός, εἶτ' ἐξέσπασεν ἐκ τοῦ σώματος τὸ δόρυ χωρὶς τῆς ἐπιδορατίδος· ἀγκιστρώδης τε γάρ ἐστι καὶ χαλαρῶς ἐνήρμοσται τῷ δόρατι ἐπίτηδες, καλώδιον δ' ἔχει μακρὸν ἐξημμένον. Τοῦτ' ἐπιχαλῶσι τῷ τρωθέντι τέως ἕως ἂν κάμῃ σφαδάζον καὶ ὑποφεῦγον· τότε δ' ἕλκουσιν ἐπὶ τὴν γῆν, ἢ εἰς τὸ σκάφος ἀναλαμβάνουσιν, ἐὰν μὴ μέγα ᾖ τελέως τὸ σῶμα. Κἂν ἐκπέσῃ δὲ εἰς τὴν θάλατταν τὸ δόρυ, οὐκ ἀπόλωλεν· ἔστι γὰρ πηκτὸν ἔκ τε δρυὸς καὶ ἐλάτης, ὥστε βαπτιζομένου τοῦ δρυίίνου βάρει μετέωρον εἶναι τὸ λοιπὸν καὶ εὐανάληπτον. Συμβαίνειν δέ ποτε καὶ τιτρώσκεσθαι διὰ τοῦ σκαφιδίου τὸν κωπηλάτην διὰ τὸ μέγεθος τοῦ ξίφους τῶν γαλεωτῶν καὶ τὸ τὴν ἀκμὴν τοῦ ζῴου συαγρώδη εἶναι καὶ τὴν θήραν. Ἔκ τε δὴ τῶν τοιούτων εἰκάζοι τις ἄν, φησί, περὶ Σικελίαν γενέσθαι τὴν πλάνην κατὰ τὸν Ὅμηρον, ὅτι τῇ Σκύλλῃ προσῆψε τὴν τοιαύτην θήραν, ἣ μάλιστ' ἐπιχώριός ἐστι τῷ Σκυλλαίῳ· καὶ ἐκ τῶν περὶ τῆς Χαρύβδεως λεγομένων ὁμοίων τοῖς τοῦ πορθμοῦ πάθεσι. Τὸ δέ Τρὶς μὲν γάρ τ' ἀνίησιν, ἀντὶ τοῦ δίς, γραφικὸν εἶναι ἁμάρτημα ἢ ἱστορικόν. 17. Καὶ τὰ ἐν τῇ Μήνιγγι δὲ τοῖς περὶ τῶν Λωτοφάγων εἰρημένοις συμφωνεῖν. Εἰ δέ τινα μὴ συμφωνεῖ, μεταβολὰς αἰτιᾶσθαι δεῖν ἢ ἄγνοιαν ἢ καὶ ποιητικὴν ἐξουσίαν, ἣ συνέστηκεν ἐξ ἱστορίας καὶ διαθέσεως καὶ μύθου. Τῆς μὲν οὖν ἱστορίας ἀλήθειαν εἶναι τέλος, ὡς ἐν Νεῶν καταλόγῳ τὰ ἑκάστοις τόποις συμβεβηκότα λέγοντος τοῦ ποιητοῦ, τὴν μὲν πετρήεσσαν τὴν δὲ ἐσχατόωσαν πόλιν, ἄλλην δὲ πολυτρήρωνα, τὴν δ' ἀγχίαλονΝ τῆς δὲ διαθέσεως ἐνέργειαν εἶναι τὸ τέλος, ὡς ὅταν μαχομένους εἰσάγῃ, μύθου δὲ ἡδονὴν καὶ ἔκπληξιν. τὸ δὲ πάντα πλάττειν οὐ πιθανόν, οὐδ' Ὁμηρικόν· τὴν γὰρ ἐκείνου ποίησιν φιλοσόφημα πάντας νομίζειν, οὐχ ὡς Ἐρατοσθένης φησί, κελεύων μὴ κρίνειν πρὸς τὴν διάνοιαν τὰ ποιήματα, μηδ' ἱστορίαν ἀπ' αὐτῶν ζητεῖν. Πιθανώτερόν τε τό Ἔνθεν δ' ἐννῆμαρ φερόμην ὀλοοῖς ἀνέμοισιν ἐν βραχεῖ διαστήματι δέχεσθαι ( οἱ γὰρ ὀλοοὶ οὐκ εὐθύδρομοι) ἢ ἐξωκεανίζειν, ὡς ἂν οὐρίων πνεόντων συνεχῶς. Συνθεὶς δὲ τὸ διάστημα τὸ ἐκ Μαλεῶν ἐπὶ στήλας σταδίων δισμυρίων καὶ δισχιλίων πεντακοσίων, εἰ, φησί, τοῦτο θείημεν ἐν ταῖς ἐννέα ἡμέραις διηνύσθαι ἰσοταχῶς, ἑκάστης ἂν ἡμέρας ὁ πλοῦς συμβαίνοι σταδίων δισχιλίων πεντακοσίων. Τίς οὖν ἱστόρηκεν ἐκ Λυκίας ἢ Ῥόδου δευτεραῖόν τινα ἀφιγμένον εἰς Ἀλεξάνδρειαν, ὄντος τοῦ διαστήματος σταδίων τετρακισχιλίων; Πρὸς δὲ τοὺς ἐπιζητοῦντας πῶς τρὶς εἰς Σικελίαν ἐλθὼν οὐδ' ἅπαξ διὰ τοῦ πορθμοῦ πέπλευκεν Ὀδυσσεύς, ἀπολογεῖται διότι καὶ οἱ ὕστερον ἔφευγον ἅπαντες τὸν πλοῦν τοῦτον. 18. Τοιαῦτα μὲν εἴρηκεν. Ἔστι δὲ τἆλλα μὲν εὖ λεγόμενα· ὅταν δ' ἀνασκευάζῃ τὸν ἐξωκεανιζόμενον καὶ πρὸς ἀκριβῆ μέτρα τὸν τῶν ἡμερῶν πλοῦν ἀνάγῃ καὶ διαστήματα, ὑπερβολὴν οὐκ ἀπολείπει τῆς ἀνομολογίας· ἅμα μὲν γὰρ παρατίθησι τὰ τοῦ ποιητοῦ ἔπη· Ἔνθεν δ' ἐννῆμαρ φερόμην ὀλοοῖς ἀνέμοισιν, ἅμα δ' ἐπικρύπτεται· καὶ γὰρ ταῦτα τοῦ ποιητοῦ,
Αὐτὰρ
ἐπεὶ ποταμοῖο
λίπεν ῥόον
ὠκεανοῖο καὶ τὸ Νήσῳ ἐν Ὠγυγίῃ, ὅθι τ' ὀμφαλός ἐστι θαλάσσης· καὶ ὅτι ἐνταῦθα οἰκεῖ Ἄτλαντος θυγάτηρ· καὶ τὸ περὶ τῶν Φαιάκων,
Οἰκέομεν δ'
ἀπάνευθε
πολυκλύστῳ
ἐνὶ πόντῳ Ταῦτα γὰρ πάντα φανερῶς ἐν τῷ Ἀτλαντικῷ πελάγει πλαττόμενα δηλοῦται. Ὁ δὲ ταῦτ' ἐπικρυπτόμενος τὰ φανερῶς λεγόμενα ἀναιρεῖ. Τοῦτο μὲν οὖν οὐκ εὖ· τὸ δὲ περὶ Σικελίαν καὶ Ἰταλίαν γεγονέναι τὴν πλάνην ὀρθῶς, ἐπεὶ τίς ἔπεισε ποιητὴς ἢ συγγραφεὺς Νεαπολίτας μὲν λέγειν μνῆμα Παρθενόπης τῆς Σειρῆνος, τοὺς δὲ ἐν Κύμῃ καὶ Δικαιαρχείᾳ καὶ Οὐεσουίῳ Πυριφλεγέθοντα καὶ Ἀχερουσίαν λίμνην καὶ νεκυομαντεῖον τὸ ἐν τῷ Ἀόρνῳ καὶ Βάιον καὶ Μισηνὸν τῶν Ὀδυσσέως ἑταίρων τινάς; Οὕτω δὲ καὶ τὰ περὶ Σειρηνούσσας καὶ τὰ περὶ τὸν πορθμὸν καὶ Σκύλλαν καὶ Χάρυβδιν καὶ Αἰόλον· ἅπερ οὔτ' ἀκριβῶς ἐξετάζειν δεῖ οὔτ' ἄρριζα καὶ ἀνέστια ἐᾶν, ἀληθείας μηδὲν προσαπτόμενα μηδ' ὠφελείας ἱστορικῆς. 19. Καὶ αὐτὸς δὲ ὑπονοήσας τοῦτο ὁ Ἐρατοσθένης, ὑπολάβοι τις ἄν, φησί, τὸν ποιητὴν βούλεσθαι μὲν ἐν τοῖς προσεσπερίοις τόποις τὴν πλάνην τῷ Ὀδυσσεῖ ποιεῖν, ἀποστῆναι δ' ἀπὸ τῶν ὑποκειμένων, τὰ μὲν οὐκ ἀκριβῶς πεπυσμένον, τὰ δὲ οὐδὲ προελόμενον οὕτως, ἀλλ' ἐπὶ τὸ δεινότερον καὶ τὸ τερατωδέστερον ἕκαστα ἐξάγειν. Τοῦτο μὲν αὐτὸ εὖ, τὸ δ' οὗ χάριν τοῦτ' ἐποίει κακῶς δεξάμενος· οὐ γὰρ φλυαρίας, ἀλλ' ὠφελείας χάριν. Ὥστε δίκαιός ἐστιν ὑπέχειν λόγον καὶ περὶ τούτου καὶ διότι φησὶ τὰ πόρρω τερατολογεῖσθαι μᾶλλον διὰ τὸ εὐκατάψευστον. Πολλοστὸν γὰρ μέρος ἐστὶ τὰ πόρρω τερατολογούμενα τῶν ἐν τῇ Ἑλλάδι καὶ ἐγγὺς τῆς Ἑλλάδος· οἷα δὴ τὰ κατὰ τοὺς Ἡρακλέους ἄθλους καὶ Θησέως καὶ τὰ ἐν Κρήτῃ καὶ Σικελίᾳ μυθευόμενα καὶ ταῖς ἄλλαις νήσοις, καὶ τὰ περὶ τὸν Κιθαιρῶνα καὶ Ἑλικῶνα καὶ Παρνασσὸν καὶ Πήλιον καὶ τὴν Ἀττικὴν ὅλην καὶ Πελοπόννησον· οὐδείς τε ἐκ τῶν μύθων ἄγνοιαν αἰτιᾶται τῶν μυθοποιῶν. Ἔτι δὲ, ἐπεὶ οὐ πάντα μυθεύουσιν, ἀλλὰ πλείω προσμυθεύουσι, καὶ μάλιστα Ὅμηρος, [ὁ] ζητῶν τί οἱ παλαιοὶ προσμυθεύουσιν οὐ ζητεῖ, εἰ τὰ προσμυθευόμενα ὑπῆρξεν ἢ ἐστίν, ἀλλὰ καὶ μᾶλλον οἷς προσμυθεύεται τόποις ἢ προσώποις, περὶ ἐκείνων ζητεῖ τἀληθές· οἷον τὴν Ὀδυσσέως πλάνην, εἰ γέγονε, καὶ ποῦ. 20. Τὸ δ' ὅλον οὐκ εὖ, τὸ τὴν Ὁμήρου ποίησιν εἰς ἓν συνάγειν τῇ τῶν ἄλλων ποιητῶν εἴς τε τἆλλα καὶ εἰς αὐτὰ τὰ νῦν προκείμενα, τὰ τῆς γεωγραφίας, καὶ μηδὲν αὐτῷ πρεσβεῖον ἀπονέμειν. Καὶ γὰρ εἰ μηδὲν ἄλλο, τόν γε Τριπτόλεμον τὸν Σοφοκλέους ἢ τὸν ἐν ταῖς Βάκχαις ταῖς Εὐριπίδου πρόλογον ἐπελθόντα καὶ παραβαλόντα τὴν Ὁμήρου περὶ τὰ τοιαῦτα ἐπιμέλειαν, ῥᾷον ἦν αἰσθέσθαι τὴν ὑπερβολὴν ἢ τὴν διαφοράν· Ὅπου γὰρ χρεία τάξεως ὧν μέμνηται τόπων, φυλάττει τὴν τάξιν ὁμοίως μὲν τῶν Ἑλληνικῶν, ὁμοίως δὲ τῶν ἄπωθεν·
Ὅσσαν ἐπ' Οὐλύμπῳ
μέμασαν θέμεν,
αὐτὰρ ἐπ'
Ὄσσῃ Καὶ ἐν τῷ Καταλόγῳ τὰς μὲν πόλεις οὐκ ἐφεξῆς λέγει· οὐ γὰρ ἀναγκαῖον· τὰ δὲ ἔθνη ἐφεξῆς. Ὁμοίως δὲ καὶ περὶ τῶν ἄπωθεν·
Κύπρον
Φοινίκην
τε καὶ
αἰγυπτίους
ἐπαληθεὶς Ὅπερ καὶ Ἵππαρχος ἐπισημαίνεται. Οἱ δ' ἐφ' ὧν τάξεως χρεία, ὁ μὲν τὸν Διόνυσον ἐπιόντα τὰ ἔθνη φράζων, ὁ δὲ τὸν Τριπτόλεμον τὴν κατασπειρομένην γῆν, τὰ μὲν πολὺ διεστῶτα συνάπτουσιν ἐγγύς, τὰ δὲ συνεχῆ διασπῶσι·
Λιπὼν δὲ
Λυδῶν τὰς
πολυχρύσους
γύας Τοιαῦτα δὲ καὶ ὁ Τριπτόλεμος ποιεῖ. Κἀν τοῖς κλίμασι δὲ κἀν τοῖς ἀνέμοις διαφαίνει τὸ πολυμαθὲς τὸ περὶ τὴν γεωγραφίαν Ὅμηρος, ἐν ταῖς τοποθεσίαις λέγων ἅμα καὶ ταῦτα πολλαχοῦ·
Αὐτὴ δὲ
χθαμαλὴ
πανυπερτάτη
εἰν ἁλὶ κεῖται Καὶ μὴν τὴν ἄγνοιάν γε τῶν τοιούτων τελείαν ἡγεῖται σύγχυσιν τῶν ἁπάντων·
Ὦ φίλοι,
οὐ γάρ τ'
ἴδμεν, ὅπῃ
ζόφος οὐδ'
ὅπῃ ἠώς,
Κἀνταῦθα δ' εἰπόντος εὖ τοῦ ποιητοῦ, Βορέης καὶ Ζέφυρος, τώ τε Θρῄκηθεν ἄητον, οὐκ εὖ δεξάμενος [ ὁ] αὐτὸς συκοφαντεῖ ὡς καθόλου λέγοντος, ὅτι ὁ ζέφυρος ἐκ Θρᾴκης πνεῖ, ἐκείνου λέγοντος οὐ καθόλου, ἀλλ' ὅταν κατὰ τὴν Θρᾳκίαν θάλατταν συμπέσωσι περὶ τὸν Μέλανα κόλπον αὐτοῦ τοῦ Αἰγαίου μέρος οὖσαν. Ἐπιστροφὴν γὰρ λαμβάνει πρὸς νότον ἀκρωτηριάζουσα ἡ Θράάκη καθ' ἃ συνάπτει τῇ Μακεδονίᾳ, καὶ προπίπτουσα εἰς τὸ πέλαγος, τοὺς Ζεφύρους ἐντεῦθεν πνέοντας ἀποφαίνει τοῖς ἐν Θάσῳ καὶ Λήμνῳ καὶ Ἴμβρῳ καὶ Σαμοθράάκῃ καὶ τῇ περὶ αὐτὰς θαλάττῃ, καθάπερ καὶ τῇ Ἀττικῇ ἀπὸ τῶν Σκειρωνίδων πετρῶν, ἀφ' ὧν καὶ Σκείρωνες καλοῦνται οἱ Ζέφυροι, καὶ μάλιστα οἱ Ἀργέσται. Οὐκ ἐνόησε δὲ τοῦτο Ἐρατοσθένης, ὑπενόησε δ' ὅμως. Αὐτὸς γοῦν ἐξηγεῖται τὴν ἐπιστροφὴν ἣν λέγω τῆς χώρας· ὡς καθόλου οὖν δέχεται, εἶτ' ἀπειρίαν αἰτιᾶται τοῦ ποιητοῦ, ὡς τοῦ Ζεφύρου μὲν ἀπὸ τῆς ἑσπέρας πνέοντος καὶ τῆς Ἰβηρίας, τῆς δὲ Θρακης ἐκεῖσε μὴ διατεινούσης. Πότερον οὖν τὸν Ζέφυρον ἀγνοεῖ ἀπὸ ἑσπέρας πνέοντα; Ἀλλ' ὅταν οὕτω φῇ, φυλάττει τὴν οἰκείαν αὐτοῦ τάξιν·
Σὺν
δ' Εὖρός
τε Νότος τε
πέσον Ζέφυρός
τε δυσαὴς ἢ τὴν Θρᾴκην οὐκ οἶδε μὴ προπίπτουσαν πέραν τῶν Παιονικῶν καὶ Θετταλικῶν ὀρῶν; Ἀλλὰ καὶ ταύτην τὴν ἐφεξῆς κατὰ τοὺς Θρᾷκας εἰδὼς καὶ κατονομάζων τήν τε παραλίαν καὶ τὴν μεσόγαιαν Μάγνητας μέν τινας καὶ Μαλιεῖς καὶ τοὺς ἐφεξῆς Ἕλληνας καταλέγει μέχρι Θεσπρωτῶν, ὁμοίως δὲ καὶ τοῖς Παίοσι τοὺς ὁμόρους Δόλοπας καὶ Σελλοὺς περὶ Δωδώνην μέχρις Ἀχελώου· Θρᾳκῶν δ' οὐ μέμνηται περαιτέρω. Εὐεπιφόρως δὲ ἔχει πρὸς τὴν ἐγγυτάτην καὶ γνωριμωτάτην ἑαυτῷ θάλατταν, ὡς καὶ ὅταν φῇ·
Κινήθη δ'
ἀγορὴ ὡς
κύματα μακρὰ
θαλάσσης |
21. Suivant certains auteurs, il n'y aurait que deux vents principaux, Borée (le vent du Nord) et Notus (le vent du Sud); quant aux autres vents, à savoir Eurus, qui souffle du levant d'été (N.-E.), Apéliote, qui souffle du levant d'hiver (S.-E.), Zéphyr, qui souffle du couchant d'été (N-O.) et Argeste, qui souffle du couchant d'hiver (N-E..), ils ne différeraient de ces deux vents principaux que parce que, comme on le voit, ils s'écartent légèrement de leur direction. Pour réduire ainsi le nombre des vents à deux seulement, ces auteurs s'appuient du témoignage de Thrasyalcès et de celui d'Homère lui-même, qu'ils nous montrent rattachant dans ses vers l'Argeste au Notus : « De l'Argeste-Notus (69) , » et le Zéphyr à Borée : « Borée et Zéphyr, tout deux soufflant de la Thrace (70). » Mais Posidonius, de son côté, affirme qu'aucun des maîtres, qui font autorité dans la matière, ni Aristote, ni Timosthène, ni Bion, l'astrologue, n'ont jamais rien enseigné de pareil au sujet des vents, qu'ils nomment, eux, Caecias, le vent qui souffle du levant d'été, et Libs, le vent diamétralement opposé, celui par conséquent qui souffle du couchant d'hiver, Eurus, celui qui souffle du levant d'hiver et Argeste, celui qui souffle à l'opposite, enfin Apéliote et Zéphyr les vents intermédiaires (le vent d'est et le vent d'ouest), que dans le Zéphyr malin d'Homère, maintenant, il faut reconnaître notre Argeste, et dans son doux et harmonieux Zéphyr notre Zéphyr proprement dit, comme il faut reconnaître dans son Argeste-Notus notre LeucoNotus, ainsi nommé de ce qu'il forme seulement quelques légers nuages et par opposition au Notus proprement dit, lequel est toujours accompagné au contraire de nuages sombres et épais. Dans les vers suivants, par exemple : « De même, quand le Zéphyr, sous les coups de ses irrésistibles tourbillons, dissipe les Nuages d'Argeste-Notus (71), » Homère, au dire de Posidonius, veut parler du malin Zéphyr, qui disperse en effet les faibles nuages amassés par le LeucoNotus, et c'est à titre d'épithète seulement qu'il a joint le nom d'Argeste à celui du Notus. Telles sont les corrections ou rectifications, qui nous ont paru devoir être faites à ce que dit Ératosthène au commencement du Ier livre de sa Géographie. 22. Mais, persistant dans ses préventions, Ératosthène accuse plus loin Homère d'avoir ignoré que le Nil a plus d'une bouche, il veut même qu'il n'ait point connu ce nom de Nil, qu'Hésiode, lui, connaissait, puisqu'il l'a cité. Qu'Homère ait ignoré ce nom, soit : il est assez vraisemblable que de son temps on ne s'en servait pas encore. On pourrait de même admettre qu'il n'a point connu l'existence des différentes bouches du fleuve, s'il était vraisemblable que de son temps ces bouches fussent encore inexplorées et que peu de personnes seulement fussent instruites qu'il y en avait plus d'une. Si, au contraire, de son temps déjà, comme de nos jours, la plus connue, la plus surprenante des merveilles de l'Égypte, celle qui méritait le plus d'être observée et décrite, était le fleuve lui-même, avec le double phénomène de ses crues et de ses bouches multiples, comment supposer que ceux, dont les récits avaient fait connaître au poète et le fleuve Ægyptus et la contrée de même nom, et Thèbes d'Égypte et l'île de Pharos, eussent eux-mêmes ignoré le fait en question, ou que, le connaissant, ils eussent négligé de lui en parler, si ce n'est en raison de cette notoriété même? Quand on songe d'ailleurs qu'Homère lui-même a parlé de l'Éthiopie, des Sidoniens et des Erembes, de la mer Extérieure et de la division des Éthiopiens en deux corps de nation, on s'explique encore bien moins comment il aurait pu ne rien savoir de choses beaucoup plus proches, de choses universellement connues. Qu'il n'en ait rien dit, peu importe : le silence n'est point signe d'ignorance (Homère n'a point parlé davantage du lieu de sa naissance ni de mainte autre circonstance qu'assurément il connaissait) : la cause en est bien plutôt qu'il aura jugé hors de propos de rappeler des faits trop connus à des gens qu'il savait déjà instruits. 23. Cette autre imputation d'ignorance qu'on élève parfois contre Homère au sujet de Pharos, et pour l'avoir qualifiée d'île pélagienne (comme qui dirait île de la haute mer), n'est pas mieux fondée. Peut-être même y a-t-il lieu de voir dans cette circonstance la preuve qu'Homère n'a rien ignoré des particularités que nous signalions tout à l'heure au sujet de l'Égypte. Jugez-en plutôt. Ceux qui aiment à narrer leurs voyages sont tous volontiers hâbleurs: Ménélas était du nombre. Ayant remonté jusqu'au pays des Éthiopiens, il avait naturellement entendu parler des crues du Nil et savait aussi comment les atterrissements du fleuve ajoutent sans cesse à l'étendue de l'Égypte; il savait notamment ce que, par suite de ces dépôts successifs, le continent avait déjà gagné sur le canal situé en avant des bouches du fleuve, circonstance qui a donné lieu à ce mot si juste d'Hérodote, que l'Égypte tout entière est un présent du Nil, ou sinon l'Égypte tout entière, du moins la région qui s'étend au- dessous du Delta et qu'on nomme la Basse-Égypte. Mais on avait dû lui dire en même temps que l'île de Pharos se trouvait primitivement en pleine mer. Or, c'en était assez pour qu'il imaginât, par un mensonge gratuit, et, bien qu'il n'en fût plus ainsi de son temps, de représenter cette île toujours aussi éloignée des côtes d'Égypte qu'elle avait pu l'être dans l'origine. - Oui, mais qui fait mentir Ménélas de la sorte? Le poète. Le poète n'ignorait donc, à ce qu'il semble, ni le phénomène des crues du Nil, ni cette autre circonstance qu'il compte plusieurs bouches. 24. Même erreur de prétendre qu'Homère a ignoré l'existence de l'isthme qui sépare la mer d'Égypte du golfe Arabique et qu'il a menti grossièrement en représentant « Les Éthiopiens, aux derniers confins de la terre, partagés en deux nations (72). » L'expression d'Homère est au contraire parfaitement juste, et c'est à tort que les modernes l'ont critiquée; loin d'avoir, ainsi qu'ils le prétendent, ignoré l'existence de cet isthme, Homère, je ne crains pas de l'affirmer, en avait pleine connaissance; je dis plus, il a, dans le passage en question, désigné l'isthme en termes exprès, et ce sont les grammairiens mêmes, à commencer par Aristarque et Cratès, ces coryphées de la critique, qui n'ont point su comprendre le sens de ses paroles. Voici déjà qui le prouve : pour compléter le sens de ce vers, « Les Éthiopiens, qui habitent aux derniers confins de la terre, partagés en deux nations », Homère en ajoute un autre, sur le texte duquel Aristarque et Cratès ne s'accordent même point, Aristarque voulant qu'on écrive : Οἱ μὲν δυσομένου Ὑπερίονος, οἱ δ' ἀνίοντος « L'une au couchant, l'autre au levant », et Cratès proposant de lire Ἠ μέν δυσομένου Ὑπερίονος. Ἠ δ' ἀνίοντος « A la fois au couchant et au levant », sans que, du reste, pour leurs thèses respectives, il importe le moins du monde qu'on adopte une leçon plutôt que l'autre. Voici en effet quelles sont ces thèses : affectant, comme toujours, de raisonner en mathématicien, Cratès commence par poser en principe que la zone torride est occupée par l'Océan et se trouve bornée de part et d'autre par la zone tempérée, tant la portion que nous habitons que la portion qui se trouve dans l'hémisphère opposé; puis, s'appuyant sur ce que le nom d'Éthiopiens désigne pour nous toutes les populations méridionales, répandues le long de l'Océan, et qui semblent former la bordure extrême de la terre habitée, il conclut que, par analogie, on doit concevoir au delà de l'Océan l'existence d'autres Éthiopiens, occupant par rapport aux différents peuples de cette seconde zone tempérée et sur les bords dudit Océan la même situation extrême. Et de la sorte, ajoute-t-il, il y a bien effectivement deux nations d'Éthiopiens séparées l'une de l'autre par l'Océan. Pour expliquer maintenant l'addition de ce second vers : « A la fois au couchant et au levant », il fait remarquer que, comme le zodiaque céleste est toujours directement placé au-dessus du zodiaque terrestre, et que celui-ci, dans son obliquité, ne dépasse jamais l'une ou l'autre Éthiopie, il faut nécessairement aussi concevoir que le soleil accomplit sa révolution tout entière dans l'intervalle céleste correspondant aux mêmes limites, s'y levant et s'y couchant en différents points et avec des apparences diverses pour les différents peuples. Telle est l'explication que propose Cratès, et qu'il juge la plus conforme aux principes astronomiques; mais il aurait pu dire plus simplement, sans abandonner pour cela sa thèse sur le fait même de la division des Éthiopiens en deux nations, que les Éthiopiens s'étendent du levant au couchant, et habitent tout le long de l'Océan sur l'un et l'autre rivages. Et alors qu'importe, pour le sens, qu'on lise le vers en question tel que Cratès le donne, ou comme l'écrit Aristarque : « L'une au couchant, l'autre au levant », ce qui revient bien à dire que les Éthiopiens habitent tant au couchant qu'au levant des deux côtés de l'Océan? Aristarque, lui, rejette l'explication de Cratès et veut que cette division en deux nations distinctes se soit, dans la pensée d'Homère, appliquée uniquement aux Éthiopiens de notre hémisphère, à ceux-là même, qui, pour nous autres Grecs, représentent l'extrémité méridionale de la terre; et comme en fait cette division n'existe pas, qu'il n'y a point là deux Éthiopies, l'une occidentale, l'autre orientale, mais bien une seule située au midi par rapport à la Grèce et contiguë à l'Égypte, il en conclut que, sur ce point comme sur tant d'autres, signalés par Apollodore dans le second livre de son Commentaire sur le catalogue des vaisseaux, Homère a ignoré la vérité, et, par ignorance, substitué à la géographie réelle une géographie fantastique. 25. Pour répondre à Cratès, il faudrait s'engager dans une discussion fort longue, qui n'aurait peut-être pas grand rapport avec l'objet qui nous occupe. Quant à Aristarque, s'il mérite qu'on le loue d'abord pour avoir rejeté l'hypothèse de Cratès, laquelle en effet prête à mille objections, et pour avoir entrevu qu'il s'agissait, dans le passage d'Homère, de notre Éthiopie et non point d'une autre, sur le reste, en revanche, il nous paraît, lui aussi, donner prise à la critique. Premièrement, il n'avait que faire de disserter si minutieusement sur la leçon à adopter, l'une et l'autre leçon pouvant également bien s'ajuster à son sens. Y a-t-il, en effet, la moindre différence à dire : « On compte dans notre hémisphère deux nations d'Éthiopiens, l'une à l'orient, l'autre à l'occident, ou ceci : « On compte dans notre hémisphère deux nations d'Éthiopiens, car il y a de ces Éthiopiens tant à l'orient qu'à l'occident? » En second lieu, l'opinion qu'il soutient repose sur certains faits matériellement faux. Supposons avec lui que le poète a effectivement ignoré l'existence de l'isthme et que c'est bien des Éthiopiens limitrophes de l'Égypte qu'il a voulu parler dans ce vers, « Les Éthiopiens divisés en deux nations, » ne le sont-ils pas en effet? Et est-ce vraiment par ignorance que le poète s'est exprimé ainsi? L'Égypte et les Égyptiens, depuis le Delta jusqu'à Syène, ne sont-ils pas divisés, partagés en deux par le Nil, « Ceux-ci au couchant, ceux-là au levant? » Et l'Égypte est-elle autre chose que la vallée même du fleuve, autrement dit le terrain inondé par ses eaux ? Ne s'étend-elle point des deux côtés du Nil, au levant et au couchant? Mais l'Éthiopie, à son tour, est le prolongement direct de l'Égypte, elle offre avec ce pays de grandes analogies et par sa situation relativement au cours du Nil et par la disposition générale des lieux : comme l'Égypte, elle est étroite, longue et sujette à des inondations périodiques, et tout l'espace situé en dehors de la limite des débordements du fleuve, tant sur la rive orientale que sur la rive occidentale, n'y est de même qu'un désert aride, presque partout inhabitable : cela étant, pourquoi donc ne serait-elle pas, elle aussi, divisée en deux régions distinctes? Le Nil, par la longueur de son cours, lequel s'étend à plus de mille stades au midi, et par la largeur de son lit, capable d'enserrer des îles peuplées de plusieurs milliers d'hommes, comme voilà Méroé, la plus grande de toutes, Méroé, résidence des rois d'Éthiopie et métropole de la contrée, le Nil, dis-je, a pu paraître à ceux qui veulent à toute force séparer l'Asie de la Libye une ligne de démarcation suffisante, et il n'aurait pas suffi à partager en deux l'Éthiopie ! Quelle est pourtant la principale objection de ceux qui s'élèvent contre cette délimitation des deux continents par le fleuve ? Que l'Égypte et l'Éthiopie se trouvent par là en quelque sorte démembrées et divisées en deux parties, l'une libyque et l'autre asiatique, inconvénient très grand en effet, et qu'on ne peut éviter qu'en renonçant tout à fait à délimiter les deux continents, ou en leur cherchant une autre ligne de démarcation que le fleuve. 26. En dehors de ces explications, du reste, on pourrait concevoir encore d'autre façon la division de l'Éthiopie en deux parties. Tous les navigateurs qui ont, dans l'Océan, longé les côtes de la Libye, soit à partir de la mer Érythrée, soit à partir des colonnes d'Hercule, après s'être avancés plus ou moins loin, se sont trouvés arrêtés par différents obstacles et ont dû rétrograder, ce qui a donné lieu de croire, en général, que le passage était intercepté par un isthme, bien que la mer Atlantique, surtout dans sa partie australe, ne forme qu'un seul et même courant continu. Mais tous s'étaient accordés à appeler Éthiopie les points ou contrées extrêmes, terme de leur navigation, et à les faire connaître sous cette dénomination. Qu'y aurait-il donc de déraisonnable à admettre qu'Homère, sur la foi de semblables récits, a cru devoir partager les Éthiopiens en deux groupes, l'un oriental, l'autre occidental, en attendant qu'on sût s'ils occupaient aussi ou n'occupaient point tout l'espace intermédiaire? Éphore, enfin, rapporte une autre tradition fort ancienne, qu'on peut supposer sans invraisemblance avoir été connue d'Homère : suivant cette tradition, qui avait cours, dit-il, parmi les Tartessiens, les Éthiopiens auraient poussé leurs incursions dans l'intérieur de l'Afrique jusqu'au Dyris [ou Atlas] (73) et y auraient laissé une partie des leurs, tandis que le reste se serait répandu tout le long du littoral; or Éphore conjecture que c'est le fait de cette séparation qui a suggéré à Homère l'expression suivante : « Les Éthiopiens divisés en deux nations aux extrémités de la terre. » 27. Voilà déjà ce qu'on pourrait répondre à Aristarque et à ses partisans; mais il y a maint autre argument plus plausible encore à faire valoir, pour achever de décharger le poète de l'imputation de grossière ignorance qui pèse sur lui. Ainsi, en me reportant aux opinions des anciens Grecs, en voyant comment ils comprenaient tout ce qu'ils connaissaient de peuples septentrionaux sous le seul et même nom de Scythes, ou sous celui de nomades qu'emploie Homère, et comment plus tard, avec le progrès des découvertes dans l'Occident, ils adoptèrent aussi pour cette partie de la terre des dénominations générales, soit les noms simples de Celtes et d'ibères, soit les noms mixtes de Celtibères et de Celloscythes, étant réduits par ignorance à ranger ainsi sous une seule et même dénomination des peuples séparés et distincts, je crois pouvoir affirmer que le nom d'Éthiopie désignait de même pour eux toute la région méridionale de la terre baignée par l'Océan. Et voici qui le prouve. C'est d'abord un passage du Prométhée déchaîné d'Eschyle (74): « [Là tu verras] l'Érythrée rouler ses flots sacrés sur un sable rougi, et s'étendre non loin de l'Océan, ce lac aux reflets d'airain, ce lac, source de richesses pour l'Éthiopien, où le soleil, qui voit toute chose, vient plonger sans cesse son corps immortel et par les chaudes ablutions d'une eau doucement pénétrante retremper l'ardeur de ses coursiers fatigués. » Comme c'est, en effet, dans toute la longueur du climat méridional que l'Océan rend au soleil le service dont parle le poète et se trouve avoir par rapport à l'astre du jour la position indiquée dans ces vers, on peut en conclure, ce semble, qu'Eschyle croyait les Éthiopiens répandus réellement sur toute la longueur du climat méridional. On lit maintenant dans le Phaéthon d'Euripide que Clymène avait été donnée à Mérops, « Mérops, souverain maître de cette terre que, du haut de son rapide quadrige, le soleil levant frappe d'abord de ses feux dorés : ses noirs voisins l'appellent l'étincelante étable où se reposent les coursiers de l'aurore et du soleil (75) » Dans le présent passage, à la vérité, le poète attribue « l'étincelante étable » en commun aux coursiers de l'Aurore et à ceux du Soleil ; mais dans tout ce qui suit il se borne à dire qu'elle est placée non loin du palais de Mérops. Or, cette donnée géographique, par la façon du moins dont elle est liée à l'ensemble du drame, ne saurait s'entendre exclusivement de notre Éthiopie, limitrophe de l'Égypte, et elle nous paraît embrasser plutôt toute l'étendue des côtes de l'Océan, d'une extrémité à l'autre du climat méridional. 28. Éphore explique aussi dans le même sens l'opinion des anciens au sujet de l'Éthiopie. Voici en effet ce qu'on lit dans sa Description de l'Europe : « Supposons le ciel et la terre divisés en quatre régions : les Indiens occuperont celle d'où souffle l'Apéliote ; les Éthiopiens, celle d'où souffle le Notus ; les Celtes, la région du Couchant ; et les Scythes, la région boréale. » A quoi il ajoute que l'Éthiopie et la Scythie sont plus étendues que les deux autres régions, l'Éthiopie se prolongeant depuis le levant d'hiver jusqu'à l'extrême occident, et la Scythie se trouvant située juste à l'opposite. Qu'Homère, maintenant, ait partagé ces idées, la chose ressort clairement et de la position qu'il assigne à Ithaque, « VERS LA SOMBRE RÉGION (autrement dit vers le Nord), tandis que les autres ils s'écartent davantage vers l'AURORE ET LE SOLEIL (76) » (expression qui, pour lui, désigne tout le côté méridional de la terre), et de cet autre passage, « Soit qu'ils volent à droite du côté de l'aurore et du soleil, soit qu'ils gagnent à gauche la région ténébreuse du ciel (77), » et de celui-ci encore, « Allons, amis, puisque nous ignorons et le côté de la nuit et le côté de l'aurore, et le point de l'horizon où le soleil, ce flambeau des humains, descend au-dessous de la terre et le point d'où son char remonte et s'élève au-dessus. (78) » tous passages, du reste, sur lesquels nous revenons dans notre description d'Ithaque pour les mieux éclaircir. Conséquemment dans ce vers, « Car Jupiter s'en fut hier vers l'Océan peur visiter les vertueux Éthiopiens (79), » il nous faut généraliser le sens et entendre que l'Océan se déploie sur toute la longueur du climat méridional et l'Éthiopie pareillement, puisque, sur quelque point dudit climat que vous arrêtiez votre pensée, c'est toujours sur l'Océan et sur l'Éthiopie que vous tombez. C'est dans un sens général aussi que le poète a dit ailleurs, « Mais il fut aperçu de Neptune, qui revenant alors des rivages de l'Éthiopie, du haut des monts Solymes, le découvrit au loin (80), » cette double expression « des rivages de l'Éthiopie, du haut des monts Solymes » étant l'équivalent de celle-ci « des régions du Midi » ; car ce n'est point des Solymes de Pisidie que le poète parle ici, mais d'un peuple imaginaire, avons-nous dit, portant le même nom, et qu'il suppose placé par rapport à l'esquif sur lequel erre son héros et par rapport aux peuples situés au sud de ce point (lesquels ne sauraient être que ses Éthiopiens) juste dans la même position où les Solymes de Pisidie se trouvaient être par rapport au Pont et à l'Éthiopie proprement dite, sise au-dessus de l'Égypte. Ce qu'Homère enfin dit des grues doit être pris également en thèse générale : « Fuyant l'hiver et les pluies torrentielles, elles s'envolent en criant vers les rivages de l'Océan, et leurs cris annoncent « à la nation des Pygmées et la guerre et le trépas (81). » Car ce n'est pas en Grèce seulement qu'on voit ainsi les grues émigrer vers le Midi ; les choses ne se passent pas autrement en Italie, en Ibérie, aux environs de la mer Caspienne et dans la Bactriane. Mais, comme il est constant que l'Océan règne tout le long du littoral méridional, et que les grues se portent sur tous les points de l'Océan indifféremment pour y chercher un abri contre les frimas, il faut admettre en même temps que, dans la pensée d'Homère, les Pygmées étaient répandus sur toute la longueur de ses rivages. Que si, maintenant, il a plu aux modernes de restreindre le nom d'Éthiopiens aux seuls voisins de l'Égypte et de circonscrire dans les mêmes limites la tradition relative aux Pygmées, ceci ne saurait réagir sur les opinions des Anciens: les noms d'Achéens et d'Argiens ne désignent plus aujourd'hui pour nous la totalité des peuples ayant pris part naguère à l'expédition contre Ilion, mais il est avéré qu'Homère leur prêtait cette signification. Or c'est à peu près là ce que je dis, quand, pour expliquer le partage que fait Homère des Éthiopiens en deux nations, je prétends qu'il faut entendre, ce nom de l'ensemble des populations répandues depuis le levant jusqu'au couchant, le long des rivages de l'Océan. En effet, du moment qu'on l'entend de la sorte, il saute aux yeux que les Éthiopiens se trouvent naturellement partagés en deux groupes par le golfe Arabique, lequel se peut comparer à un grand arc de méridien, à le voir s'étendre, semblable à un fleuve, sur une longueur de près de quinze mille stades et sur une largeur dont le maximum n'excède point mille stades, avec cet autre avantage à ajouter à celui de son extrême longueur, que le fond dudit golfe n'est séparé de la mer de Péluse que par un trajet de trois à quatre journées de marche à travers l'isthme. Les mieux avisés d'entre ceux qui prétendent séparer rigoureusement l'Asie de la Libye ont bien reconnu cet avantage, et, dans leurs essais de délimitation, ils ont préféré le golfe au Nil, comme offrant une ligne de démarcation plus convenable à établir entre les deux continents, puisque le golfe s'étend presque d'une mer à l'autre, tandis que le Nil, à la grande distance où il est encore de l'Océan, ne saurait séparer qu'imparfaitement l'Asie de la Libye. Eh bien ! J'en suis convaincu pour ma part, Homère concevait, lui aussi, toute la région méridionale de la terre partagée en deux par le golfe Arabique; seulement, si cela est, comment admettre qu'il ait pu ignorer l'existence de l'isthme que forme ce golfe avec la mer d'Égypte? 29. II serait en effet de la dernière invraisemblance, qu'instruit, comme il l'était, de la situation exacte de Thèbes, de la Thèbes d'Égypte, laquelle est distante des bords de notre mer de 5000 stades (82) ou peu s'en faut, Homère n'eût connu ni le fond du golfe Arabique, ni l'existence de l'isthme qui le prolonge et qui se trouve n'avoir en largeur que mille stades tout au plus. Et ce qui devra paraître plus invraisemblable encore, c'est qu'Homère ait pu savoir que le Nil portait le nom, le nom même d'une contrée aussi vaste que l'est l'Égypte, sans en avoir deviné la cause, vu que le mot d'Hérodote (83) que l'Égypte est un présent du fleuve et qu'elle avait dû à ce titre recevoir le nom du fleuve lui-même, semble devoir s'offrir tout naturellement à l'esprit de chacun. Quelles sont d'ailleurs, entre toutes les particularités d'un pays, les particularités les plus universellement connues? Celles-là toujours qui offrent en soi quelque chose d'étrange et qui se trouvent en outre placées de façon à frapper tous les regards. Or le double phénomène des crues du Nil et de ses atterrissements est précisément dans ce cas. Et de même que le voyageur, qui aborde en Égypte, apprend avant tout à connaître la nature du Nil, les indigènes n'ayant rien à dire qui puisse étonner davantage un étranger et lui donner une plus haute idée de leur pays (car il suffit d'être instruit du régime de ce fleuve pour concevoir aussitôt ce que peut être la contrée tout entière qu'il arrose), de même, loin de l'Égypte et dans les récits qui nous viennent de ce pays, le nom du Nil est encore le premier qui frappe notre oreille. Ajoutez à ce qui précède la curiosité du poète et son amour des voyages attestés par tous ses biographes et directement par maints passages ou allusions de ses poèmes : que de preuves réunies pour établir qu'Homère a toujours bien su et bien dit ce qui était à dire et que ce sont uniquement les faits notoires qu'il a tus ou indiqués par de simples épithètes! 30. N'est-il pas étrange après cela de voir des Égyptiens, des Syriens (les mêmes contre qui nous disputons présentement), qui n'entendent même pas Homère dans ce qu'il dit des choses de leur pays, et que notre discussion vient de convaincre d'ignorance, oser traiter Homère d'ignorant! D'abord, règle générale, le silence n'est point une preuve d'ignorance : Homère n'a rien dit des courants contraires de l'Euripe, ni du défilé des Thermopyles ni de mainte autre curiosité de la Grèce connue de tout le monde, et assurément ce n'est point par ignorance. Mais ce qui est plus fort, il lui arrive quelquefois de parler des choses sans que ces sourds de parti pris le daignent entendre, auquel cas naturellement toute la faute est à eux. Chacun sait qu'Homère, sous le nom d'enfants du ciel, désigne non seulement les torrents, mais encore tous les autres cours d'eau, et cela apparemment parce qu'il savait que tous sont grossis par les pluies. Mais toute qualification générale appliquée à ce qui est hors ligne devient par cela même qualification particulière : l'épithète enfant du ciel notamment ne saurait avoir la même valeur, attribuée au torrent ou bien au fleuve ordinaire qui ne tarit jamais. Or, dans le cas présent, il y a, si l'on peut dire, double degré de supériorité; et, de même qu'il existe des hyperboles d'hyperboles, celles-ci par exemple, « être plus léger que l'ombre d'un liège », « être plus timide qu'un lièvre phrygien », « avoir moins de terre (il s'agit d'un champ) qu'une épître laconienne [n'a de mots] », de même, appliquée au Nil, la qualification d'enfant du ciel semble un superlatif ajouté au superlatif. Car, si le torrent déjà a plus de droit que les autres cours d'eau à cette qualification d'enfant du ciel, le Nil y a plus de droit encore que tous les torrents, quels qu'ils soient, les surpassant tous tellement par le volume et la durée de ses crues. Et, comme nous avons d'ailleurs victorieusement démontré qu'Homère n'ignorait aucune des particularités du régime de ce fleuve, s'il lui a appliqué l'épithète en question, ce ne peut être que dans le sens que nous venons de dire. Voici maintenant une particularité, celle d'avoir plusieurs bouches ou embouchures, qui se trouvait être commune à une infinité de fleuves, Homère ne l'a point jugée digne d'être signalée, à des gens surtout qu'il savait déjà instruits du fait. Mais Alcée lui-même n'en a point parlé davantage, et cependant, s'il faut l'en croire, il avait fait, lui, le voyage d'Égypte. Quant au phénomène des atterrissements du Nil, lequel pourrait déjà se déduire du seul fait des crues du fleuve, la mention s'en trouve implicitement contenue dans ce que dit le poète de l'île de Pharos. Qu'un informateur quelconque, que la commune renommée, pour mieux dire, ait pu représenter à Homère l'île de Pharos comme étant encore aussi éloignée du continent qu'il le marque, à savoir d'une journée de navigation tout entière, la chose est inadmissible, le mensonge aurait été par trop flagrant. En revanche, il était tout simple que des renseignements sur la nature des crues du Nil et de ses atterrissements fussent plus vagues, plus généraux ; or, de tels renseignements Homère aura pu conclure que l'île, à l'époque où Ménélas la visitait, se trouvait plus éloignée de la terre ferme qu'elle ne l'était de son temps, et, pour donner à cette circonstance une couleur fabuleuse, il aura pris sur lui de faire la distance plus grande encore. Mais l'emploi des fables, avons-nous dit, ne saurait être considéré comme un indice d'ignorance : ainsi, ni la fable de Protée, ni le mythe des Pygmées, ni ces prodigieux effets attribués aux breuvages magiques, ni tant d'autres fictions analogues n'accusent l'ignorance géographique ou historique du poète, et si elles prouvent quelque chose c'est uniquement l'envie de plaire et d'amuser. - « Comment se fait-il pourtant, dira-t-on, qu'Homère ait pu parler de l'aiguade de Pharos, quand il est avéré que Pharos manque d'eau? » « Là s'ouvre un port, excellent mouillage, d'où les vaisseaux rapides s'élancent à la mer chargés de l'eau limpide des sources profondes (84). » D'abord, répondrons-nous, il ne serait pas impossible qu'avec le temps l'aiguade de l'île se fût tarie; en second lieu Homère ne dit pas formellement qu'on tirât l'eau des sources mêmes de Pharos, mais seulement que le chargement des navires se faisait en ce lieu à cause de l'excellence de son port; et il était facile apparemment d'aller puiser l'eau sur la côte vis-à-vis. Ajoutons que par cette façon de s'exprimer le poète semble en quelque sorte avouer que, lorsqu'il a fait ailleurs de Pharos une île de pleine mer, il n'a point dit vrai, mais qu'il a amplifié et exagéré à la façon des poètes.
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21. Εἰσὶ δέ τινες, οἵ φασιν εἶναι δύο τοὺς κυριωτάτους ἀνέμους Βορέαν καὶ Νότον, τοὺς δὲ ἄλλους κατὰ μικρὰν ἔγκλισιν διαφέρειν· τὸν μὲν ἀπὸ θερινῶν ἀνατολῶν Εὖρον χειμερινῶν δὲ Ἀπηλιώτην· δύσεων δὲ θερινῶν μὲν Ζέφυρον χειμερινῶν δὲ Ἀργέστην. Τοῦ δὲ δύο εἶναι τοὺς ἀνέμους ποιοῦνται μάρτυρας Θρασυάλκην τε καὶ τὸν ποιητὴν αὐτὸν [ τῷ] τὸν μὲν Ἀργέστην τῷ Νότῳ προσνέμειν· ἀργεστᾶο Νότοιο, τὸν δὲ Ζέφυρον τῷ Βορέᾳ· Βορέης καὶ Ζέφυρος, τώ τε Θρῄκηθεν ἄητον. Φησὶ δὲ Ποσειδώνιος, μηδένα οὕτως παραδεδωκέναι τοὺς ἀνέμους τῶν γνωρίμων περὶ ταῦτα, οἷον Ἀριστοτέλη, Τιμοσθένη, Βίωνα τὸν ἀστρολόγον· ἀλλὰ τὸν μὲν ἀπὸ θερινῶν ἀνατολῶν Καικίαν, τὸν δὲ τούτῳ κατὰ διάμετρον ἐναντίον Λίβα, ἀπὸ δύσεως ὄντα χειμερινῆς· πάλιν δὲ τὸν μὲν ἀπὸ χειμερινῆς ἀνατολῆς Εὖρον, τὸν δ' ἐναντίον Ἀργέστην· τοὺς δὲ μέσους Ἀπηλιώτην καὶ Ζέφυρον. Τὸν δὲ ποιητὴν δυσαῆ μὲν Ζέφυρον λέγειν τὸν ὑφ' ἡμῶν καλούμενον Ἀργέστην, λίγα δὲ πνέοντα Ζέφυρον τὸν ὑφ' ἡμῶν Ζέφυρον, Ἀργέστην δὲ Νότον τὸν Λευκόνοτον· οὗτος γὰρ ὀλίγα τὰ νέφη ποιεῖ, τοῦ λοιποῦ Νότου ὀλεροῦ πως ὄντος.
Ὡς
ὁπότε Ζέφυρος
νέφεα
στυφελίξῃ, Τὸν γὰρ δυσαῆ Ζέφυρον νῦν λέγει, ὃς εἴωθε διασκιδνάναι τὰ ὑπὸ τοῦ Λευκονότου συναγόμενα ἀσθενῆ ὄντα, ἐπιθέτως τοῦ Νότου νῦν ἀργέστου λεγομένου. Ταῦτα μὲν δὴ ἐν ἀρχῇ τοῦ πρώτου τῶν γεωγραφικῶν εἰρημένα τοιαύτην τινὰ τὴν ἐπανόρθωσιν ἔχει. 22. Ἐπιμένων δὲ τοῖς περὶ Ὁμήρου ψευδῶς ὑποληφθεῖσι καὶ ταῦτά φησιν, ὅτι οὐδὲ τὰ τοῦ Νείλου στόματα οἶδε πλείω ὄντα οὐδ' αὐτὸ τοὔνομα, Ἡσίοδος δὲ οἶδε· μέμνηται γάρ. τὸ μὲν οὖν ὄνομα εἰκὸς μήπω λέγεσθαι κατ' αὐτόν· τὰ δὲ στόματα εἰ μὲν ἦν ἀφανῆ καὶ ὀλίγοις γνώριμα, ὅτι πλείω καὶ οὐχ ἕν, δοίη τις ἂν [ μὴ] πεπύσθαι αὐτόν· εἰ δὲ τῶν κατ' Αἴγυπτον τὸ γνωριμώτατον καὶ παραδοξότατον καὶ μάλιστα πάντων μνήμης ἄξιον καὶ ἱστορίας ὁ ποταμὸς καὶ ἦν καὶ ἐστίν, ὡς δ' αὕτως αἱ ἀναβάσεις αὐτοῦ καὶ τὰ στόματα, τίς ἂν ἢ τοὺς ἀγγέλλοντας αὐτῷ ποταμὸν αἴγυπτον καὶ χώραν καὶ Θήβας Αἰγυπτίας καὶ Φάρον ὑπολάβοι μὴ γνωρίζειν ταῦτα, ἢ γνωρίζοντας μὴ λέγειν, πλὴν εἰ μὴ διὰ τὸ γνώριμον; Ἔτι δ' ἀπιθανώτερον, εἰ τὴν μὲν αἰθιοπίαν ἔλεγε καὶ Σιδονίους καὶ Ἐρεμβοὺς καὶ τὴν ἔξω θάλατταν καὶ τὸ διχθὰ δεδάσθαι τοὺς Αἰθίοπας, τὰ δ' ἐγγὺς καὶ γνώριμα μή. Εἰ δὲ μὴ ἐμνήσθη τούτων, οὐ τοῦτο σημεῖον τοῦ ἀγνοεῖν ( οὐδὲ γὰρ τῆς αὐτοῦ πατρίδος ἐμνήσθη οὐδὲ πολλῶν ἄλλων) ἀλλὰ μᾶλλον τὰ λίαν γνώριμα ὄντα φαίη τις ἂν δόξαι μὴ ἄξια μνήμης εἶναι πρὸς τοὺς εἰδότας. 23. Οὐκ εὖ δὲ οὐδὲ τοῦτο προφέρουσιν αὐτῷ τὸ περὶ τῆς νήσου τῆς Φαρίας, ὅτι φησὶ πελαγίαν, ὡς κατ' ἄγνοιαν λέγοντι. Τοὐναντίον γὰρ κἂν μαρτυρίῳ χρήσαιτό τις τούτῳ πρὸς τὸ μὴ ἀγνοεῖσθαι μηδὲν ὑπὸ τοῦ ποιητοῦ τῶν εἰρημένων ἀρτίως περὶ τὴν Αἴγυπτον. Γνοίης δ' ἂν οὕτως· ἀλαζὼν δὴ πᾶς ὁ πλάνην αὑτοῦ διηγούμενος· τούτων δ' ἦν καὶ ὁ Μενέλαος, ὃς ἀναβεβηκὼς μέχρις Αἰθιόπων ἐπέπυστο τὰς ἀναβάσεις τοῦ Νείλου καὶ τὴν χοῦν ὅσην ἐπιφέρει τῇ χώρᾳ, καὶ τὸν πρὸ τῶν στομάτων πόρον ὅσον ἤδη προσχώσας τῇ ἠπείρῳ προστέθεικεν, ὥστε εἰκότως ὑπὸ τοῦ Ἡροδότου καὶ τὴν ὅλην Αἴγυπτον τοῦ ποταμοῦ δῶρον λέγεσθα· κἂν εἰ μὴ τὴν ὅλην, τήν γε ὑπὸ τῷ Δέλτα τὴν κάτω χώραν προσαγορευομένην. Ἱστόρησε δὲ καὶ τὴν Φάρον πελαγίαν οὖσαν τὸ παλαιόν· προσεψεύσατο δὴ καὶ τὸ πελαγίαν εἶναι, καίπερ μηκέτι πελαγίαν οὖσαν. Ὁ δὲ ταῦτα διασκευάζων ὁ ποιητὴς ἦν· ὥστ' ἐκ τούτων εἰκάζειν, ὅτι καὶ τὰς ἀναβάσεις ᾖδει καὶ τὰ στόματα τοῦ Νείλου. 24. Ἡ δ' αὐτὴ ἁμαρτία καὶ περὶ τοῦ ἀγνοεῖν τὸν ἰσθμὸν τὸν μεταξὺ τοῦ Αἰγυπτίου πελάγους καὶ τοῦ Ἀραβίου κόλπου καὶ περὶ τοῦ ψευδῶς λέγεσθαι Αἰθίοπες, τοὶ διχθὰ δεδαίαται ἔσχατοι ἀνδρῶν. Καὶ γὰρ τοῦτο ἐκείνου λέγοντος καλῶς, ἐπιτιμῶσιν οἱ ὕστερον οὐκ εὖ. Τοσούτου γὰρ δεῖ τοῦτ' ἀληθὲς εἶναι τὸ ἀγνοεῖν Ὅμηρον τὸν ἰσθμὸν τοῦτον, ὥστε ἐκεῖνον μέν φημι μὴ εἰδέναι μόνον, ἀλλὰ καὶ ἀποφαίνεσθαι ἄντικρυς, τοὺς δὲ γραμματικοὺς μηδὲ λέγοντος ἐκείνου αἰσθάνεσθαι ἀπὸ Ἀριστάρχου καὶ Κράτητος τῶν κορυφαίων ἐν τῇ ἐπιστήμῃ ταύτῃ. Εἰπόντος γὰρ τοῦ ποιητοῦ· Αἰθίοπας, τοὶ διχθὰ δεδαίαται, ἔσχατοι ἀνδρῶν, περὶ τοῦ ἐπιφερομένου ἔπους διαφέρονται, ὁ μὲν Ἀρίσταρχος γράφων, Οἱ μὲν δυσομένου Ὑπερίονος, οἱ δ' ἀνιόντος, ὁ δὲ Κράτης, Ἠμὲν δυσομένου Ὑπερίονος, ἠδ' ἀνιόντος,
οὐδὲν
διαφέρον πρὸς
τὴν ἑκατέρου
ὑπόθεσιν
οὕτως ἢ
ἐκείνως
γράφειν. Ὁ μὲν γὰρ,
ἀκολουθῶν
τοῖς
μαθηματικῶς
λέγεσθαι
δοκοῦσι, τὴν
διακεκαυμένην
ζώνην
κατέχεσθαί
φησιν ὑπὸ τοῦ
ὠκεανοῦ· παρ' ἑκάτερον δὲ
ταύτης εἶναι
τὴν εὔκρατον, τήν τε καθ'
ἡμᾶς καὶ τὴν
ἐπὶ θάτερον
μέρος. Ὥσπερ
οὖν οἱ παρ' ἡμῖν Αἰθίοπες οὗτοι
λέγονται οἱ
πρὸς
μεσημβρίαν κε
κλιμένοι παρ' ὅλην τὴν οἰκουμένην
ἔσχατοι τῶν
ἄλλων
παροικοῦντες
τὸν ὠκεανόν, οὕτως οἴεται
δεῖν καὶ πέραν
τοῦ ὠκεανοῦ
νοεῖσθαί
τινας Αἰθίοπας ἐσχάτους τῶν
ἄλλων τῶν ἐν τῇ
ἑτέρᾳ εὐκράτῳ,
παροικοῦντας
τὸν αὐτὸν
τοῦτον
ὠκεανόν· διττοὺς δὲ
εἶναι καὶ
διχθὰ
δεδάσθαι ὑπὸ
τοῦ ὠκεανοῦ. Προσκεῖσθαι
δὲ τὸ 25. Πρὸς μὲν οὖν Κράτητα μακροῦ λόγου δεῖ, καὶ ἴσως οὐδὲν ὄντος πρὸς τὰ νῦν. Ἀριστάρχου δὲ τοῦτο μὲν ἐπαινῶμεν, διότι τὴν Κρατήτειον ἀφεὶς ὑπόθεσιν, δεχομένην πολλὰς ἐνστάσεις περὶ τῆς καθ' ἡμᾶς Αἰθιοπίας ὑπονοεῖ γεγονέναι τὸν λόγον· τὰ δ' ἄλλα ἐπισκοπῶμεν. Καὶ πρῶτον ὅτι καὶ αὐτὸς μικρολογεῖται μάτην περὶ τῆς γραφῆς. Καὶ γὰρ ἂν ἑκατέρως γράφηται, δύναται ἐφαρμόττειν τοῖς νοήμασιν αὐτοῦ. τί γὰρ διαφέρει λέγειν ἢ οὕτως, δύο εἰσὶ καθ' ἡμᾶς Αἰθίοπες, οἱ μὲν πρὸς ἀνατολὰς, οἱ δὲ πρὸς δύσεις· ἢ οὕτως, καὶ γὰρ "πρὸς ἀνατολὰς καὶ πρὸς δύσει ς; Ἔπειθ' ὅτι ψευδοῦς προίίσταται δόγματος. Φέρε γὰρ τὸν ποιητὴν ἀγνοεῖν μὲν τὸν ἰσθμόν, τῆς δὲ κατ' Αἴγυπτον Αἰθιοπίας μεμνῆσθαι ὅταν φῇ· Αἰθίοπας, τοὶ διχθὰ δεδαίαται· Πῶς οὖν; Οὐ διχθὰ δεδαίαται οὕτω, ἀλλ' ἀγνοῶν οὕτως εἴρηκεν ὁ ποιητής; Πότερ' οὐδ' ἡ Αἴγυπτος, οὐδ' οἱ Αἰγύπτιοι ἀπὸ τοῦ Δέλτα ἀρξάμενοι μέχρι πρὸς Συήνην ὑπὸ τοῦ Νείλου δίχα διῄρηνται, Οἱ μὲν δυσομένου Ὑπερίονος, οἱ δ' ἀνιόντος; Τί δ' ἄλλο ἡ Αἴγυπτός ἐστι πλὴν ἡ ποταμία, ἣν ἐπικλύζει τὸ ὕδωρ; Αὕτη δ' ἐφ' ἑκάτερα τοῦ ποταμοῦ κεῖται πρὸς ἀνατολὴν καὶ δύσιν. Ἀλλὰ μὴν ἡ Αἰθιοπία ἐπ' εὐθείας ἐστὶ τῇ Αἰγύπτῳ καὶ παραπλησίως ἔχει πρός τε τὸν Νεῖλον καὶ τὴν ἄλλην φύσιν τῶν τόπων. Καὶ γὰρ αὕτη στενή τέ ἐστι καὶ μακρὰ καὶ ἐπίκλυστος. τὰ δ' ἔξω τῆς ἐπικλύστου ἔρημά τε καὶ ἄνυδρα καὶ σπανίως οἰκεῖσθαι δυνάμενα, τὰ μὲν πρὸς ἕω τὰ δὲ πρὸς δύσιν κεκλιμένα. Πῶς οὖν οὐχὶ καὶ δίχα διῄρηται; Ἢ τοῖς μὲν τὴν Ἀσίαν ἀπὸ τῆς Λιβύης διαιροῦσιν ἀξιόλογον τοῦθ' ὅριον ἐφάνη ὁ Νεῖλος, μῆκος μὲν ἀνατείνων ἐπὶ τὴν μεσημβρίαν πλειόνων ἢ μυρίων σταδίων, πλάτος δέ, ὥστε καὶ νήσους ἀπολαμβάνειν μυριάνδρους, ὧν μεγίστη ἡ Μερόη τὸ βασίλειον καὶ μητρόπολις τῶν Αἰθιόπων, αὐτὴν δὲ τὴν Αἰθιοπίαν οὐχ ἱκανὸς ἦν διαιρεῖν δίχα; Καὶ μὴν οἵ γε ἐπιτιμῶντες τοῖς τὰς ἠπείρους τῷ ποταμῷ διαιροῦσι τῶν ἐγκλημάτων τοῦτο μέγιστον προφέρουσιν αὐτοῖς, ὅτι τὴν αἴγυπτον καὶ τὴν Αἰθιοπίαν διασπῶσι καὶ ποιοῦσι τὸ μέν τι μέρος ἑκατέρας αὐτῶν Λιβυκόν, τὸ δ' Ἀσιατικόν· ἢ εἰ μὴ βούλονται τοῦτο, ἢ οὐ διαιροῦσι τὰς ἠπείρους ἢ οὐ τῷ ποταμῷ. 26. Χωρὶς δὲ τούτων ἐστὶ καὶ ἄλλως διαιρεῖν τὴν Αἰθιοπίαν. Πάντες γὰρ οἱ παραπλεύσαντες τῷ ὠκεανῷ τὴν Λιβύην, οἵ τε ἀπὸ τῆς Ἐρυθρᾶς καὶ οἱ ἀπὸ τῶν Στηλῶν, μέχρι ποσοῦ προελθόντες εἶτα ἀνέστρεψαν ὑπὸ πολλῶν ἀποριῶν κωλυόμενοι, ὥστε καὶ πίστιν κατέλιπον τοῖς πολλοῖς, ὡς τὸ μεταξὺ διείργοιτο ἰσθμῷ· καὶ μὴν σύρρους ἡ πᾶσα Ἀτλαντικὴ θάλαττα, καὶ μάλιστα ἡ κατὰ μεσημβρίαν. Ἅπαντες δὲ οὗτοι τὰ τελευταῖα χωρία, ἐφ' ἃ πλέοντες ἦλθον, Αἰθιοπικὰ προσηγόρευσαν καὶ ἀπήγγειλαν οὕτως. Τί οὖν ἄλογον, εἰ καὶ Ὅμηρος ὑπὸ τοιαύτης ἀκοῆς ἀχθεὶς δίχα διῄρει, τοὺς μὲν πρὸς ἀνατολὴν λέγων, τοὺς δὲ πρὸς δύσιν, τῶν μεταξὺ οὐ γινωσκομένων εἴτε εἰσὶν εἴτε μὴ εἰσίν; Ἀλλὰ μὴν καὶ ἄλλην τινὰ ἱστορίαν εἴρηκεν παλαιὰν Ἔφορος, ᾗ οὐκ ἄλογον ἐντυχεῖν καὶ Ὅμηρον. Λέγεσθαι γάρ φησιν ὑπὸ τῶν Ταρτησσίων Αἰθίοπας τὴν Λιβύην ἐπελθόντας μέχρι αὐάσεως τοὺς μὲν αὐτοῦ μεῖναι, τοὺς δὲ καὶ τῆς παραλίας κατασχεῖν πολλήν· τεκμαίρεται δ' ἐκ τούτου καὶ Ὅμηρον εἰπεῖν οὕτως· Αἰθίοπες, τοὶ διχθὰ δεδαίαται, ἔσχατοι ἀνδρῶν. 27. Ταῦτά τε δὴ πρὸς τὸν Ἀρίσταρχον λέγοι ἄν τις καὶ πρὸς τοὺς ἀκολουθοῦντας αὐτῷ καὶ ἄλλα τούτων ἐπιεικέστερα, ἀφ' ὧν τὴν πολλὴν ἄγνοιαν ἀφαιρήσεται τοῦ ποιητοῦ. Φημὶ γὰρ κατὰ τὴν τῶν ἀρχαίων Ἑλλήνων δόξαν, ὥσπερ τὰ πρὸς βορρᾶν μέρη τὰ γνώριμα ἑνὶ ὀνόματι Σκύθας ἐκάλουν ἢ Νομάδας, ὡς Ὅμηρος, ὕστερον δὲ καὶ τῶν πρὸς ἑσπέραν γνωσθέντων Κελτοὶ καὶ Ἴβηρες ἢ μικτῶς Κελτίβηρες καὶ Κελτοσκύθαι προσηγορεύοντο, ὑφ' ἓν ὄνομα τῶν καθ' ἕκαστα ἐθνῶν ταττομένων διὰ τὴν ἄγνοιαν, οὕτω τὰ μεσημβρινὰ πάντα Αἰθιοπίαν καλεῖσθαι τὰ πρὸς ὠκεανῷ. μαρτυρεῖ δὲ τὰ τοιαῦτα. Ὅ τε γὰρ Αἰσχύλος ἐν Προμηθεῖ τῷ λυομένῳ φησὶν οὕτω·
Φοινικόπεδόν
τ' ἐρυ"θρᾶς
ἱερὸν Παρ' ὅλον γὰρ τὸ μεσημβρινὸν κλίμα τοῦ ὠκεανοῦ ταύτην πρὸς τὸν ἥλιον ἴσχοντος τὴν χρείαν καὶ τὴν σχέσιν, παρ' ὅλον καὶ τοὺς Αἰθίοπας τάττων φαίνεται. Ὅτ' Εὐριπίδης ἐν τῷ Φαέθοντι τὴν Κλυμένην δοθῆναί φησι
Μέροπι τῆσδ' ἄνακτι
γῆς, Νῦν μὲν δὴ κοινὰς ποιεῖται τὰς ἱπποστάσεις τῇ τε Ἠοῖ καὶ τῷ Ἡλίῳ, ἐν δὲ τοῖς ἑξῆς πλησίον αὐτάς φησιν εἶναι τῇ οἰκήσει τοῦ Μέροπος· καὶ ὅλῃ γε τῇ δραματουργίᾳ τοῦτο παραπέπλεκται, οὐ δή που τῆς κατ' Αἴγυπτον ἴδιον ὄν, μᾶλλον δὲ τῆς παρ' ὅλον τὸ μεσημβρινὸν κλίμα διηκούσης παραλίας. 28. Μηνύει δὲ καὶ Ἔφορος τὴν παλαιὰν περὶ τῆς Αἰθιοπίας δόξαν, ὅς φησιν ἐν τῷ περὶ τῆς Εὐρώπης λόγῳ, τῶν περὶ τὸν οὐρανὸν καὶ τὴν γῆν τόπων εἰς τέτταρα μέρη διῃρημένων, τὸ πρὸς τὸν ἀπηλιώτην Ἰν δοὺς ἔχειν, πρὸς νότον δὲ Αἰθίοπας, πρὸς δύσιν δὲ Κελτούς, πρὸς δὲ βορρᾶν ἄνεμον Σκύθας. Προστίθησι δ', ὅτι μείζων ἡ Αἰθιοπία καὶ ἡ Σκυθία· δοκεῖ γάρ, φησί, τὸ τῶν Αἰθιόπων ἔθνος παρατείνειν ἀπ' ἀνατολῶν χειμερινῶν μέχρι δυσμῶν, ἡ Σκυθία δ' ἀντίκειται τούτῳ. Ὅτι δ' ὁ ποιητὴς ὁμόλογος τούτοις, καὶ ἐκ τῶνδε δῆλον ὅτι ἡ μὲν Ἰθάκη κεῖται
Πρὸς ζόφον (ὅπερ ἐστὶ πρὸς
ἄρκτον) αἱ δέ
τ' ἄνευθε Ὅλον τὸ νότιον πλευρὸν οὕτω λέγων·. καὶ ἔτι, ὅταν φῇ·
Εἴτ'
ἐπὶ δέξι' ἴωσι
πρὸς ἠῶ τ' ἠέλιόν τε, Καὶ πάλιν·
Ὦ
φίλοι, οὐ γάρ τ'
ἴδμεν, ὅπῃ
ζόφος, οὐδ' ὅπῃ
ἠώς, Περὶ ὧν λέγεται καὶ ἐν τοῖς περὶ τῆς Ἰθάκης λόγοις σαφέστερον. Ὁταν οὖν φῇ·
Ζεὺς
γὰρ ἐς ὠκεανὸν
μετ' ἀμύμονας Αἰθιοπῆας κοινότερον δεκτέον καὶ τὸν ὠκεανὸν τὸν καθ' ὅλον τὸ μεσημβρινὸν κλίμα τεταμένον καὶ τοὺς Αἰθίοπας· ᾧ γὰρ ἂν τόπῳ τοῦδε τοῦ κλίματος προσβάλῃς τὴν διάνοιαν, καὶ ἐπὶ τῷ ὠκεανῷ ἔσῃ καὶ ἐπὶ τῇ Αἰθιοπίᾳ. Οὕτω δὲ λέγει καὶ τὸ
Τὸν δ'
ἐξ Αἰθιόπων
ἀνιὼν ἴσον τῷ ἀπὸ μεσημβρινῶν τόπων, Σολύμους λέγων οὐ τοὺς ἐν τῇ Πισιδίᾳ, ἀλλ' ὡς ἔφην πρότερον πλάσαι τινὰς ὁμωνύμους, τοὺς ἀναλόγως ἔχοντας πρός τε τὸν πλέοντα ἐν τῇ σχεδίᾳ καὶ τοὺς ἐκεῖ μεσημβρινούς, ὡς ἂν Αἰθίοπας, ὡς οἱ Πισιδικοὶ πρός τε τὸν Πόντον καὶ τοὺς ὑπὲρ τῆς Αἰγύπτου Αἰθίοπας. Οὕτω δὲ καὶ τὸν περὶ τῶν γεράνων λόγον κοινὸν ποιούμενός φησιν·
Αἵ τ' ἐπεὶ "οὖν
χειμῶνα φύγον
καὶ ἀθέσφατον
ὄμβρον, Οὐ γὰρ ἐν μὲν τοῖς κατὰ τὴν Ἑλλάδα τόποις ὁρᾶται φερομένη ἡ γέρανος ἐπὶ τὴν μεσημβρίαν, ἐν δὲ τοῖς κατὰ τὴν Ἰταλίαν ἢ Ἰβηρίαν οὐδαμῶς ἢ τοῖς κατὰ τὴν Κασπίαν καὶ Βακτριανήν. Κατὰ πᾶσαν οὖν τὴν μεσημβρινὴν παραλίαν τοῦ ὠκεανοῦ παρατείνοντος, ἐφ' ἅπασαν δὲ καὶ χειμοφυγούντων, δέχεσθαι δεῖ καὶ τοὺς Πυγμαίους μεμυθευμένους κατὰ πᾶσαν. Εἰ δ' οἱ ὕστερον τοὺς Αἰθίοπας ἐπὶ τοὺς κατ' Αἴγυπτον μόνους μετήγαγον καὶ τὸν περὶ τῶν Πυγμαίων λόγον, οὐδὲν ἂν εἴη πρὸς τὰ πάλαι. Καὶ γὰρ Ἀχαιοὺς καὶ Ἀργείους οὐ πάντας μὲν νῦν φαμεν τοὺς στρατεύσαντας ἐπὶ Ἴλιον, Ὅμηρος δὲ καλεῖ πάντας. παραπλήσιον δέ ἐστιν ὃ λέγω καὶ περὶ τῶν δίχα διῃρημένων Αἰθιόπων, ὅτι δεῖ δέχεσθαι τοὺς παρ' ὅλην διατείνοντας τὴν ὠκεανῖτιν ἀφ' ἡλίου ἀνιόντος μέχρι ἡλίου δυομένου. Οἱ γὰρ οὕτω λεγόμενοι Αἰθίοπες δίχα διῄρηνται φυσικῶς τῷ Ἀραβίῳ κόλπῳ, ὡς ἂν μεσημβρινοῦ κύκλου τμήματι ἀξιολόγῳ, ποταμοῦ δίκην ἐν μήκει σχεδόν τι καὶ πεντακισχιλίων σταδίων ἐπὶ τοῖς μυρίοις, πλάτει δ' οὐ πολὺ τῶν χιλίων μείζονι τῷ μεγίστῳ· πρόσεστι δὲ τῷ μήκει καὶ τὸ τὸν μυχὸν τοῦδε τοῦ κόλπου διέχειν τῆς κατὰ Πηλούσιον θαλάττης τριῶν ἢ τεττάρων ἡμερῶν [ὁδόν], ἣν ἐπέχει ὁ ἰσθμός. Καθάπερ οὖν οἱ χαριέστεροι τῶν διαιρούντων τὴν Ἀσίαν ἀπὸ τῆς Λιβύης ὅρον εὐφυέστερον ἡγοῦνται τοῦτον τῶν ἠπείρων ἀμφοῖν τὸν κόλπον, ἢ τὸν Νεῖλον ( τὸν μὲν γὰρ διήκειν παρ' ὀλίγον παντελῶς ἀπὸ θαλάττης ἐπὶ θάλατταν, τὸν δὲ Νεῖλον πολλαπλάσιον ἀπὸ τοῦ ὠκεανοῦ διέχειν, ὥστε μὴ διαιρεῖν τὴν Ἀσίαν πᾶσαν ἀπὸ τῆς Λιβύης)· τοῦτον ὑπολαμβάνω τὸν τρόπον κἀγὼ τὰ μεσημβρινὰ μέρη πάντα καθ' ὅλην τὴν οἰκουμένην δίχα διῃρῆσθαι νομίσαι τὸν ποιητὴν τῷ κόλπῳ τούτῳ. Πῶς οὖν ἠγνόει τὸν ἰσθμόν, ὃν οὗτος ποιεῖ πρὸς τὸ Αἰγύπτιον πέλαγος; 29. Καὶ γὰρ δὴ καὶ τελέως ἄλογον, εἰ τὰς μὲν Αἰγυπτίους Θήβας ᾖδει σαφῶς, αἳ διέχουσι τῆς καθ' ἡμᾶς θαλάττης σταδίους μικρὸν ἀπολείποντας ἀπὸ τῶν πεντακισχιλίων, τὸν δὲ μυχὸν τοῦ Ἀραβίου κόλπου μὴ ᾖδει, μηδὲ τὸν ἰσθμὸν τὸν κατ' αὐτόν, πλάτος ἔχοντα οὐ πλειόνων ἢ χιλίων σταδίων. Πολὺ δ' ἂν ἀλογώτερον δόξειεν, εἰ τὸν μὲν Νεῖλον ᾖδει ὁμωνύμως τῇ τοσαύτῃ χώρᾳ λεγόμενον, τὴν δ' αἰτίαν μὴ ἑώρα τούτου· μάλιστα γὰρ ἂν προσπίπτοι τὸ ῥηθὲν ὑφ' Ἡροδότου, διότι δῶρον ἦν ἡ χώρα τοῦ ποταμοῦ, καὶ διὰ τοῦτο ἠξιοῦτο τοῦ αὐτοῦ ὀνόματος. Ἄλλως τε τῶν παρ' ἑκάστοις ἰδίων ταῦτ' ἐστὶ γνωριμώτατα, ἃ καὶ παραδοξίαν ἔχει τινά, καὶ ἐν τῷ φανερῷ πᾶσίν ἐστι· τοιοῦτον δ' ἐστὶ καὶ ἡ τοῦ Νείλου ἀνάβασις καὶ ἡ πρόσχωσις τοῦ πελάγους. Καὶ καθάπερ οἱ προσαχθέντες πρὸς τὴν Αἴγυπτον οὐδὲν πρότερον ἱστοροῦσι περὶ τῆς χώρας, ἢ τὴν τοῦ Νείλου φύσιν διὰ τὸ τοὺς ἐπιχωρίους μήτε καινότερα τούτων λέγειν ἔχειν πρὸς ἄνδρας ξένους, μήτ' ἐπιφανέστερα περὶ τῶν παρ' αὐτοῖς ( τῷ γὰρ ἱστορήσαντι περὶ τοῦ ποταμοῦ κατάδηλος καὶ ἡ χώρα γίνεται πᾶσα ὁποία τίς ἐστιν)· οὕτω καὶ οἱ πόρρωθεν ἀκούοντες οὐδὲν πρότερον ἱστοροῦσι τούτου. Προστίθει οὖν τούτῳ καὶ τὸ φιλείδημον τοῦ ποιητοῦ καὶ τὸ φιλέκδημον, ὅπερ αὐτῷ μαρτυροῦσιν ὅσοι τὸν βίον ἀναγράφουσι, καὶ ἐξ αὐτῶν δὲ λαμβάνεται τῶν ποιημάτων πολλὰ παραδείγματα τοῦ τοιούτου. Οὗτος μὲν οὖν ἐκ πλεόνων ἐλέγχεται καὶ εἰδὼς καὶ λέγων ῥητῶς τὰ ῥητὰ καὶ σιγῶν τὰ λίαν ἐκφανῆ ἢ ἐπιθέτως λέγων. 30. Θαυμάζειν δὲ δεῖ τῶν Αἰγυπτίων καὶ Σύρων, πρὸς οὓς νῦν ἡμῖν ὁ λόγος, εἰ μηδ' ἐκείνου λέγοντος τὰ παρ' αὐτοῖς ἐπιχώρια συνιᾶσιν, ἀλλὰ καὶ ἄγνοιαν αἰτιῶνται, ᾗ αὐτοὺς ἐνόχους δείκνυσιν ὁ λόγος. Ἁπλῶς δὲ τὸ μὴ λέγειν οὐ τοῦ μὴ εἰδέναι σημεῖόν ἐστιν· οὐδὲ γὰρ τὰς τροπὰς τοῦ Εὐρίπου λέγει οὐδὲ τὰς Θερμοπύλας οὐδ' ἄλλα πλείω τῶν γνωρίμων παρὰ τοῖς Ἕλλησιν, οὐ μὴν ἠγνόει γε. Ἀλλὰ καὶ λέγει, οὐ δοκεῖ δὲ τοῖς ἐθελοκωφοῦσιν, ὥστε ἐκείνους αἰτιατέον. Ὁ ποιητὴς τοίνυν διιπετέας καλεῖ τοὺς ποταμούς, οὐ τοὺς χειμάρρους μόνους, ἀλλὰ καὶ πάντας κοινῶς, ὅτι πληροῦνται πάντες ἀπὸ τῶν ὀμβρίων ὑδάτων· ἀλλὰ τὸ κοινὸν ἐπὶ τῶν κατ' ἐξοχὴν ἴδιον γίνεται. Ἄλλως γὰρ ἂν τὸν χειμάρρουν ἀκούοι τις διιπετῆ καὶ ἄλλως τὸν ἀέναον· ἐνταῦθα δὲ διπλασιάζει πως ἡ ἐξοχή. Καὶ καθάπερ εἰσί τινες ὑπερβολαὶ ἐπὶ ὑπερβολαῖς, ὡς τὸ κουφότερον εἶναι φελλοῦ σκιᾶς, δειλότερον δὲ λαγὼ Φρυγός, ἐλάττω δ' ἔχειν γῆν τὸν ἀγρὸν ἐπιστολῆς Λακωνικῆς· οὕτως ἐξοχὴ ἐπὶ ἐξοχῇ συντρέχει ἐπὶ τοῦ διιπετῆ τὸν Νεῖλον λέγεσθαι. ὁ μὲν γὰρ χειμάρρους ὑπερβέβληται τοὺς ἄλλους ποταμοὺς τῷ διιπετὴς εἶναι· Ὀ δὲ Νεῖλος καὶ τοὺς χειμάρρους, ἐπὶ τοσοῦτον πληρούμενος καὶ πλήθους καὶ χρόνου. Ὥστ' ἐπεὶ καὶ γνώριμον ἦν τὸ πάθος τοῦ ποταμοῦ τῷ ποιητῇ, ὡς παραμεμυθήμεθα, καὶ κέχρηται τῷ ἐπιθέτῳ τούτῳ κατ' αὐτοῦ, οὐκ ἄλλως δεκτέον ἢ ὡς εἰρήκαμεν. Τὸ δὲ πλείοσι στόμασιν ἐκδιδόναι κοινὸν καὶ πλειόνων, ὥστ' οὐκ ἄξιον μνήμης ὑπέλαβε, καὶ ταῦτα πρὸς εἰδότας· καθάπερ οὐδ' Ἀλκαῖος, καίτοι φήσας ἀφῖχθαι καὶ αὐτὸς εἰς Αἴγυπτον. Αἱ δὲ προσχώσεις καὶ ἐκ τῶν ἀναβάσεων μὲν δύνανται ὑπονοεῖσθαι καὶ ἐξ ὧν δὲ εἶπε περὶ τῆς Φάρου. Ὁ γὰρ ἱστορῶν αὐτῷ περὶ τῆς Φάρου, μᾶλλον δὲ ἡ κοινὴ φήμη, διότι μὲν τότε τοσοῦτον ἀπεῖχεν ἀπὸ τῆς ἠπείρου, ὅσον φησί, δρόμον νεὼς ἡμερήσιον, οὐκ ἂν εἴη διατεθρυλημένη ἐπὶ τοσοῦτον ἐψευσμένως. Ὅτι δ' ἡ ἀνάβασις καὶ αἱ προσχώσεις τοιαῦταί τινες, κοινότερον πεπύσθαι εἰκὸς ἦν· ἐξ ὧν συνθεὶς ὁ ποιητὴς, ὅτι πλέον ἢ τότε ἀφειστήκει τῆς γῆς ἡ νῆσος κατὰ τὴν Μενελάου παρουσίαν, προσέθηκε παρ' ἑαυτοῦ πολλαπλάσιον διάστημα τοῦ μυθώδους χάριν. Αἱ δὲ μυθοποιίαι οὐκ ἀγνοίας (χ άριν) σημεῖον ( γὰρ) δή που· οὐδὲ ( γὰρ) τὰ περὶ τοῦ Πρωτέως καὶ τῶν Πυγμαίων, οὐδ' αἱ τῶν φαρμάκων δυνάμεις, οὐδ' εἴ τι ἄλλο τοιοῦτον οἱ ποιηταὶ πλάττουσιν· οὐ γὰρ κατ' ἄγνοιαν τῶν τοπικῶν λέγεται, ἀλλ' ἡδονῆς καὶ τέρψεως χάριν. πῶς οὖν καὶ ἄνυδρον οὖσαν φησὶν ὕδωρ ἔχειν;
Ἐν
δὲ λιμὴν
εὔορμος, ὅθεν τ'
ἀπὸ νῆας
ἐίσας Ἀλλ' οὔτε τὸ ὑδρεῖον ἐκλιπεῖν ἀδύνατον, οὔτε τὴν ὑδρείαν ἐκ τῆς νήσου γενέσθαι φησίν, ἀλλὰ τὴν ἀναγωγὴν μόνην διὰ τὴν τοῦ λιμένος ἀρετήν, τὸ δ' ὕδωρ ἐκ τῆς περαίας ἀρύσασθαι παρῆν, ἐξομολογουμένου πως τοῦ ποιητοῦ δι' ἐμφάσεως, ὅτι πελαγίαν εἶπεν οὐ πρὸς ἀλήθειαν, ἀλλὰ πρὸς ὑπερβο λὴν καὶ μυθοποιίαν.
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31. Du reste, comme tout ce récit des erreurs de Ménélas, dans Homère, semble au premier abord donner raison à ceux qui lui reprochent d'avoir absolument ignoré la géographie de ces contrées, le mieux que nous ayons à faire est de commencer par exposer une à une les critiques que ce récit a soulevées, pour les soumettre ensuite elles-mêmes à un examen sérieux et pour rendre ainsi la justification du poète plus complète et plus claire. Ménélas dit à Télémaque, en l'entendant s'extasier sur la somptuosité de sa royale demeure : « Oui, mais pour rapporter tous ces trésors, j'ai dû beaucoup souffrir et longtemps errer sur mes vaisseaux ; et quand, après huit ans, je revins dans ma patrie, j'avais parcouru Chypre, la Phénicie, l'Égypte et visité tour à tour les Éthiopiens, les Sidoniens et les Erembes et la Libye tout entière (85). » Or, on se demande d'abord quels sont ces Éthiopiens, chez qui Ménélas put se rendre ainsi d'Égypte en naviguant? Car, il n'y a point d'Éthiopiens sur les rivages de notre mer, et, d'autre part, les vaisseaux de Ménélas n'auraient jamais pu franchir les cataractes du Nil. Quels sont aussi ces Sidoniens? Ce ne sont pas ceux de Phénicie assurément : le poète n'avait que faire, ayant préalablement nommé le genre, de mentionner en outre l'espèce. Qui sont enfin ces Erembes, dont le nom paraît là pour la première fois? Chacune de ces questions a donné lieu à un grand nombre de solutions différentes que le grammairien Aristonic, de nos jours, a, dans son Commentaire sur les erreurs de Ménélas, relatées tout au long. Nous nous bornerons, nous, à les reproduire ici en abrégé. Il y a d'abord certains auteurs qui veulent que ce soit par mer que Ménélas a gagné l'Éthiopie : parmi ceux-là même, les uns introduisent l'idée d'un périple, que Ménélas aurait exécuté en faisant le tour par Gadira jusqu'aux rivages de l'Inde, et cela sans doute pour essayer de proportionner la longueur du trajet à la durée si prolongée de l'absence du héros, absence que Ménélas lui-même dit avoir été de huit années; suivant d'autres, les vaisseaux du héros auraient franchi directement l'isthme attenant au golfe Arabique; d'autres enfin les font passer par quelqu'un des canaux [dérivés du Nil]. Or, d'une part, le périple que Cratès introduit ici, n'est nullement nécessaire, non qu'il soit d'une exécution impossible (les errances mêmes d'Ulysse n'offrent pas d'impossibilité absolue), mais parce qu'Il n'ajoute rien à la vraisemblance des hypothèses mathématiques de cet auteur et n'explique pas davantage la longue durée des errances de Ménélas : il dut y avoir en effet, pour retenir si longtemps le héros éloigné de ses foyers, et des retards involontaires occasionnés par les difficultés mêmes de la navigation, puisque Ménélas avoue n'avoir sauvé que cinq vaisseaux sur soixante, et des retards volontaires utilisés au profit de son avarice. Nestor ne dit-il point : « C'est ainsi qu'en parcourant les mers Ménélas entassait sur ses vaisseaux tant d'or et tant d'objets précieux (86) » [Et Ménélas lui-même ne rappelle-t-il point tout ce qu'il avait amassé de richesses] « En parcourant Chypre, la Phénicie, l'Égypte (87) » Quant à ce passage direct à travers l'isthme ou par un des canaux dérivés du Nil, si le poète en eût parlé, personne à coup sûr n'y eût vu autre chose qu'une fiction poétique; mais il n'en a dit mot, et ne serait-ce pas alors introduire gratuitement et contre toute vraisemblance une nouvelle difficulté dans le débat que de l'invoquer? Je dis contre toute vraisemblance, puisque avant la guerre de Troie aucun de ces canaux n'existait encore : Sésostris qui passe pour avoir entrepris d'en creuser un, avait de lui-même renoncé à son projet, présumant le niveau de la mer par trop élevé. Et pour ce qui est de l'isthme même, on ne voit pas qu'il ait pu être navigable davantage. Ératosthène, qui suppose le contraire, se trompe évidemment : il conjecture que l'ouverture du détroit des colonnes d'Hercule n'avait pas encore eu lieu, de telle sorte que la mer intérieure, privée de toute communication avec la mer extérieure, couvrait alors l'isthme entier, lequel se trouvait être d'un niveau sensiblement inférieur au sien, mais qu'une fois la rupture de la barrière effectuée, le niveau de ladite mer s'étant naturellement abaissé, ses eaux laissèrent à découvert tout le terrain aux environs du mont Casius et de Péluse jusqu'à la mer Érythrée. Mais quelle autorité avons-nous qui nous atteste qu'avant l'expédition des Grecs contre Ilion l'ouverture du détroit n'avait pas encore eu lieu ? — Dira-t-on par hasard que, si Homère, pour faire entrer Ulysse dans l'Océan du côté de l'occident, a supposé le détroit déjà ouvert, en faisant d'autre part naviguer Ménélas d'Égypte en Éthiopie, il avait dû le supposer fermé encore? — On oublie qu'in fait dire aussi par Protée à Ménélas, à Ménélas lui-même « Les dieux te conduiront vers les Champs Élyséens à l'extrémité de la terre (88). » Or, de quelle extrémité peut-il être ici question, si ce n'est de l'extrémité occidentale de la terre, de quelque lieu extrême situé de ce côté, comme le prouve la mention du zéphyr, placée à dessein par le poète dans les vers qui, suivent : « Toujours du sein de l'Océan s'élève le souffle harmonieux du zéphyr (89). » Il faut en convenir, tout ce système d'Ératosthène n'est qu'un tissu d'énigmes. 32. D'ailleurs, s'il est vrai qu'Homère d'une ou d'autre façon ait été instruit qu'anciennement la mer couvrait de ses eaux l'isthme tout entier, ce serait une raison de plus pour nous de croire à cette division des Éthiopiens en deux corps de nation, puisque, dans ce cas-là, la ligne de démarcation aurait été représentée par un bras de mer aussi considérable. Quelles richesses, en outre, Ménélas eût-il pu rapporter de chez les Éthiopiens de la mer extérieure et des bords de l'Océan? Quand Télémaque s'extasie sur la somptuosité de son palais, que distingue-t-il dans cette quantité infinie d'objets précieux? « L'or, l'électre, et l'argent, et l'ivoire (90). » Or, de ces différentes substances, aucune, si ce n'est l'ivoire, n'abonde chez ces peuples, extrêmement pauvres pour la plupart, et tous encore nomades. - Soit, dira-t- on; mais près de là était l'Arabie et tout le pays jusqu'à l'Inde, l'Arabie, qui, seule entre toutes les contrées de la terre, a reçu le nom d' Heureuse, et l'Inde, qui sans porter expressément le même nom, n'en est pas moins réputée et représentée aussi comme une très heureuse contrée. - A quoi nous répondrons à notre tour qu'Homère n'a point connu l'Inde, car autrement il n'eût point manqué d'en parler; et, en ce qui concerne l'Arabie, l'Arabie heureuse, comme on l'appelle aujourd’hui, tout en convenant qu'il l'a connue, nous ferons remarquer que, de son temps, elle était loin d'être riche encore, qu'elle manquait même du nécessaire et n'était guère peuplée que de scénites. Quant au canton, qui produisait les parfums ou aromates, et d'où est venu ce nom d'aromatophore, étendu plus tard à l'Arabie entière à cause de la rareté de cette denrée et du prix qu'on y attache en nos contrées, il n'en formait que la moindre partie. Aujourd'hui, à la vérité, les Arabes ne manquent de rien ; l'activité, le développement de leur commerce les enrichit sans cesse, mais dans ce temps-là en était-il déjà ainsi? La chose est peu probable. Si le commerce des aromates, d'ailleurs, suffisait à enrichir un marchand, un simple chamelier, ce qu'il fallait à l'avide Ménélas, c'étaient ou les profits de la guerre, ou les présents de rois et de chefs ayant le moyen et en même temps la volonté de donner à proportion de l'illustration de sa race et de la gloire de son nom; et, comme en effet les Égyptiens, voire même ceux des Éthiopiens et des Arabes qui confinent à l'Égypte, possédaient déjà un certain degré de civilisation et pouvaient avoir entendu quelque chose du retentissement de la gloire des Atrides, surtout après l'heureuse issue de la guerre de Troie, Ménélas avait tout lieu d'espérer en leur munificence. Qu'on se rappelle ce que dit Homère à propos de cette fameuse cuirasse d'Agamemnon : « Cinyras la lui avait donnée naguère, comme gage d'hospitalité; car le grand renom du héros avait pénétré jusqu'à Chypre (91). » Ajoutons que Ménélas, dans ses longues erreurs, avait passé la plus grande partie du temps dans les parages de la Phénicie, de la Syrie, de l'Égypte et de la Libye ainsi que dans les eaux de Chypre, sur les côtes en un mot et parmi les îles de notre mer intérieure, tous pays en effet où il lui était facile soit d'obtenir de ces précieux gages d'hospitalité, soit de s'enrichir par la violence et la piraterie aux dépens surtout des anciens alliés des Troyens, tandis que les populations barbares, les populations lointaines des bords de la mer extérieure n'auraient guère pu offrir au héros une perspective semblable. Cela étant, quand le poète nous dit que Ménélas était venu jusqu'en Éthiopie, [le mieux n'est-il point d'entendre que ce héros n'avait pas pénétré au cœur même du pays], mais qu'il s'était contenté d'en toucher la frontière du côté de l'Égypte? D'autant qu'il n'est pas impossible que cette frontière fût alors plus rapprochée de Thèbes qu'elle ne l'est aujourd'hui, bien que la frontière actuelle en soit déjà, assez rapprochée, puisqu'elle passe près de Syène et de Philae, la première de ces deux villes, Syène, appartenant à l'Égypte, et l'autre, Philae, ayant une population mixte d'Éthiopiens et d'Égyptiens. Or, une fois arrivé à Thèbes, Ménélas aura bien pu, surtout à la faveur de l'hospitalité royale, atteindre ces premières limites de l'Éthiopie, voire même les dépasser un peu : cette supposition n'a rien qui choque la raison. C'est ainsi qu'Ulysse dit être venu dans le pays des Cyclopes, pour s'être avancé seulement depuis la mer jusqu'à l'antre de Polyphème, situé, comme il le marque lui-même, tout à l'entrée du pays; pour l'Aeolie et le pays des Lestrygons la même chose. En général, il lui suffit d'avoir un jour abordé en tel ou tel point d'un pays pour dire qu'il l'a visité. Voilà donc comment Ménélas sera venu en Éthiopie; en Libye pareillement, il lui aura suffi de toucher à quelques points de la côte, comme est ce port voisin d'Ardanie, au-dessus de Paraetonium, qui a retenu le nom de Ménélas. 33. Si maintenant, après avoir nominé les Phéniciens, Homère mentionne aussi les Sidoniens, dont la ville était proprement la métropole ou capitale de la Phénicie, il ne fait en cela qu'user une fois de plus d'une figure de mots qui lui était familière, témoin ce vers : « Il guide jusqu'aux vaisseaux LES TROYENS ET HECTOR (92); » et ceux-ci : « LES FILS du magnanime Oeneus n'étaient plus au nombre des vivants; lui-même n'existait plus; ET MÉLÉAGRE, le héros à la blonde chevelure, était mort (93); » celui-ci encore : « Il vint jusqu'à l'IDA ET JUSQU'AU GARGARE (94); » et ce dernier passage : « Les habitants de L'EUBEE, DE CHALCIS et D'ÉRÉTRIE (95). » Sapho, du reste, a dit aussi « Soit que tu aies pour patrie CYPRE , PAPHOS, ou PANORME. » Toutefois, Homère a dû avoir quelque autre raison encore pour que, dans une énumération générale comme celle-là, et après avoir nommé la Phénicie, il ait ajouté la mention particulière de Sidon. S'il n'eût voulu qu'énumérer dans leur ordre les différents pays où Ménélas avait été, il pouvait se borner à lui faire dire : « Ayant parcouru tour à tour Cypre, la Phénicie l'Égypte, je passai jusqu en Éthiopie. » Mais pour qu'on sût que le séjour du héros chez les Sidoniens avait été de longue durée, il était bon que leur nom revînt souvent, soit directement dans les souvenirs de Ménélas, soit indirectement dans les récits du poète. Et voilà pourquoi celui-ci ne manque pas une occasion de vanter les richesses et l'industrie des Sidoniens, pourquoi il rappelle l'hospitalité donnée par eux plus anciennement à Hélène en compagnie de son ravisseur, pourquoi encore il nous montre les appartements de Pâris tout remplis de précieux ouvrages sidoniens, « On y voyait étalés les riches tissus aux mille couleurs, ouvrage des femmes sidoniennes, que le divin Pâris avait naguère ramenées de Sidon, sur le même vaisseau qui emportait Hélène (96); » et le palais de Ménélas également, car ce héros dit à Télémaque : « Je veux te donner cette coupe ciselée; elle est d'argent massif, l'or en couronne les lèvres; c'est l'oeuvre de Vulcain, elle me fut offerte en présent par l'illustre roi des Sidoniens, lorsque, regagnant ma patrie, je m'arrêtai sous son toit hospitalier (97). » Et nul doute qu'ici l'expression « c'est l'oeuvre de Vulcain » ne doive être prise dans un sens figuré, comme une hyperbole analogue à ce qu'on dit tous les jours des belles choses, qu'elles sont l'oeuvre de Minerve, l'oeuvre des Grâces et des Muses ; c'est qu'en effet les Sidoniens étaient de très-habiles artistes, le poète le dit formellement dans le passage où il parle de la beauté du vase qu'Eunée avait donné pour racheter Lycaon : « Il n'était rien sur la terre qu'il n'effacât par sa beauté : les Sidoniens avaient mis tout leur art à le décorer et des marchands phéniciens l'avaient apporté sur leur vaisseau (98). » 34. Sur les Erembes maintenant que n'a-t-on point dit ! Mais de toutes les opinions émises la plus vraisemblable est celle qui veut que sous ce nom le poète ait désigné les Arabes. Zénon, notre Zénon, va plus loin, et corrigeant le texte d'Homère il lit le vers ainsi : « Tour à tour je visitai Éthiopiens, Sidoniens, ARABES [au lieu d'Erembes] ». Il n'est pas nécessaire pourtant de changer cette leçon, qui est assurément fort ancienne ; mieux vaut croire que c'est le nom lui-même qui a éprouvé quelqu'une de ces altérations si fréquentes, si communes dans toutes les langues; et c'est précisément ce que certains grammairiens cherchent à mettre en lumière par la comparaison des lettres dans l'une et dans l'autre forme. Pour nous, nous serions tenté de préférer, comme plus sûr encore, le procédé de Posidonius, qui, même dans le cas présent, a cru devoir consulter la parenté et l'affinité primordiale des peuples pour retrouver l'étymologie du nom. Il est constant, en effet, que les nations arménienne, syrienne, arabe ont entre elles beaucoup de cette affinité et comme un air de famille qui se manifeste dans leurs langues, leurs genres de vie et leurs caractères physiques, là surtout où elles se trouvent être proches voisines, en Mésopotamie par exemple, pays dont la population appartient précisément à ces trois nations et où naturellement la ressemblance entre elles éclate davantage. Car, en admettant même que, par le fait des climats ou de la position géographique, il y ait quelque différence sensible des populations plus septentrionales aux populations méridionales et des unes et des autres aux populations intermédiaires, les caractères communs ne laissent pas que de prédominer. Ajoutons que les Assyriens et les Ariens offrent avec ces mêmes peuples, aussi bien qu'entre eux, une grande ressemblance. Eh bien ! De cette ressemblance entre les peuples, Posidonius conclut la ressemblance des noms eux-mêmes. Or, il est de fait que les peuples, que nous appelons Syriens, portent en syriaque le nom d'Arammæens, et qu'il y a de la ressemblance entre ce nom et ceux d'Arméniens, d'Arabes et d'Erembes, ce dernier nom n'étant peut-être bien qu'une épithète ou qualification particulière dont se servaient les anciens Grecs pour désigner les Arabes comme le sens étymologique du mot semblerait le donner à entendre. On s'accorde en effet généralement à dériver l'étymologie du mot d'Erembes des mots εἰς τἠν ἔραν ἐμβαίνειν (pénétrer, habiter sous terre). Seulement, avec le temps on aura à cette dénomination d'Erembes substitué la traduction plus claire de Troglodytes, nom qui désigne, comme on sait, la partie de la nation arabe établie sur le côté du golfe arabique attenant à l'Égypte et à l'Éthiopie. Ce sont donc ces Arabes, suivant toute vraisemblance, que le poète a voulu désigner sous le nom d'Erembes et ce qu'il dit du voyage de Ménélas en leur pays doit s'entendre sans doute comme ce qu'il dit du voyage d'Éthiopie, car les Erembes, ainsi que les Éthiopiens, étaient proches voisins de la Thébaïde. Ajoutons qu'en rappelant ce voyage et celui d'Éthiopie le héros ne pouvait avoir en vue les avantages commerciaux ou les riches présents qu'il en avait retirés (ces profits ayant été apparemment peu de chose), mais uniquement la longueur et le prestige même du voyage, car c'était alors une gloire réelle d'avoir pénétré aussi loin, témoin ce vers : « Il a de beaucoup d'hommes visité les cités et observé les mœurs (99); » et ceux-ci encore : « Mais j'ai dû beaucoup souffrir et longtemps errer sur mes vaisseaux pour rapporter tous ces trésors (100). » Hésiode, il est vrai, dans son Catalogue, mentionne une certaine « Fille d'Arabus, fils lui-même du bienfaisant Hermès et de Thronia, fille du roi Belus (101). » Stésichore la nomme également, mais s'il est permis d'inférer de ce double témoignage que, du temps de ces poètes. la contrée en question avait déjà reçu en mémoire d'Arabus le nom d'Arabie, il peut bien se faire aussi que du temps des héros il n'en fût pas encore de même. 35. Quant à ceux qui ont imaginé de faire des Erembes soit une tribu particulière de la nation éthiopienne, soit une tribu de Céphènes, voire en troisième lieu une tribu de Pygmées, sans parler de mille autres fictions du même genre, s'ils nous paraissent mériter moins de confiance, c'est qu'indépendamment du peu de vraisemblance qu'offre la chose en soi ils font là une sorte de confusion de l'histoire et de la fable. Nous retrouvons cette même confusion chez ceux qui, voulant faire de l'Océan extérieur le théâtre des erreurs de Ménélas, placent les Sidoniens et naturellement aussi les Phéniciens sur les bords de la mer Persique ou sur tel autre rivage de l'Océan. A vrai dire, la façon dont ces auteurs se contredisent entre eux n'entre pas pour peu de chose dans l'incrédulité qu'ils rencontrent. Tandis que les uns, en effet, regardent les Sidoniens de notre mer intérieure comme une colonie des Sidoniens de l'Océan, ajoutant, qui plus est, que le nom de Phéniciens leur est venu de la couleur rouge des eaux de la mer extérieure, les autres affirment précisément l'inverse. Il en est aussi qui transportent l'Éthiopie dans notre Phénicie et font de Jopé le théâtre des aventures d'Andromède, non qu'ils ignorent la véritable situation des lieux en question, mais ils prétendent user des licences du genre mythique, comme ont fait Hésiode et tant d'autres que cite Apollodore. Seulement, en comparant aux fictions d'Homère les fictions de ces auteurs, Apollodore ne sait pas tenir la balance égale. Citant, par exemple, comme terme de comparaison, ce qu'Homère raconte et du Pont et de l'Égypte, il en tire contre le poète une accusation en règle d'ignorance : suivant lui, le poète a voulu dire la vérité, mais, loin de la dire, il a, faute de savoir, donné le faux pour le vrai. Or, nous le demandons, jamais personne se serait-il avisé d'accuser Hésiode d'ignorance, pour avoir parlé d'Hérnicynes, de Macrocéphales et de Pygmées (102), quand Homère a pu user impunément de fictions semblables, et entre autres précisément de ce même mythe des Pygmées, quand en outre Alcman nous parle de Stéganopodes et Eschyle de Cynocéphales, de Sternophthalmes et de Monommates (103), quand surtout nous tolérons tant d'ouvrages en prose, écrits soi-disant dans le genre historique, et qui contiennent, sans que leurs auteurs l'avouent, tant de mythes véritables. C'est qu'en effet il saute aux yeux d'abord que c'est de propos délibéré et nullement par ignorance historique que les auteurs de ces ouvrages ont entremêlé de fables leurs récits, imaginant ainsi l’impossible afin de flatter le goût du public pour le merveilleux. Seulement, ce qui peut faire croire à leur ignorance, c'est qu'en général, et pour trouver plus aisément créance, ils ont choisi de préférence comme théâtre de leurs fictions les parties de la terre les plus mystérieuses et les plus ignorées. Au moins Théopompe a-t-il la bonne foi d'avouer ce qui en est : il déclare hautement qu'il mêlera plus d'une fois la fable à l'histoire, mieux seulement que n'ont su le faire Hérodote, Ctésias, Hellanicus et les différents historiens qui ont écrit sur l'Inde. 36. Pour ce qui est, maintenant, des phénomènes de l'Océan, il est bien vrai, [comme le marque Ératosthène], qu'Homère les a décrits sous la forme d'un mythe, car, en thèse générale, c'est là la forme que tout poète doit chercher à donner à sa pensée, et, dans le cas présent, c'est évidemment le double phénomène du flux et du reflux qui lui a suggéré l'idée de sa fable de Charybde; mais cela ne veut point dire que cette fable en elle-même ait été créée de toutes pièces par l'imagination d'Homère; loin de là, Homère n'a fait qu'arranger et mettre en œuvre certaines notions positives concernant le détroit de Sicile. Que si, maintenant, il a parlé de trois reflux au lieu de deux pour les vingt-quatre heures : « car TROIS FOIS par jour elle vomit l'onde amère, et TROIS FOIS la ravale (104), » voici, à ce qu'il semble, ce qu'on pourrait dire pour le justifier : d'abord, il n'y a pas à supposer un instant que ce soit par ignorance du phénomène lui-même que le poète s'est exprimé de la sorte, mais il fallait qu'il ménageât un effet tragique, un effet de terreur : Circé ayant besoin de terrifier le héros pour le détourner plus sûrement de son fatal projet, on conçoit qu'elle appelle le mensonge à son aide. Que dit-elle, en effet, dans le passage en question? « Trois fois par jour Charybde vomit l'onde amère et trois fois elle la ravale avec un bruit terrible. Évite alors, évite de te trouver à sa portée au moment du reflux : autrement Neptune lui-même ne pourrait te soustraire à la mort. » Et pourtant Ulysse assiste sans périr à ce terrible reflux; lui-même raconte la scène en ces termes : « Et voilà que le monstre engloutit de nouveau l'onde amère. Mais moi, me suspendant aux branches élevées d'un figuier sauvage, comme la chauve-souris, j'y demeurai attaché (105). » Il attend de la sorte que les débris de son vaisseau reparaissent, les saisit au passage et se sauve; et par le fait Circé se trouve avoir menti. Mais l'ayant fait mentir sur un point, Homère a bien pu la faire mentir sur un autre, et dans ce vers : « Car trois fois par jour elle vomit », lui faire dire exprès trois fois au lieu de deux ; d'autant qu'il existe dans le langage ordinaire une hyperbole toute pareille, « trois fois heureux et trois fois malheureux », dont tout le monde se sert, et qu'Homère lui-même a souvent employée, dans ce vers-ci par exemple : « Trois fois heureux les Grecs (106); » dans cet autre également, « Nuit charmante et TROIS FOIS désirée (107), » et dans cet autre encore, « [Fendue] en TROIS et quatre (108). » Peut-être d'ailleurs serait-on fondé à voir dans l'heure marquée par le héros comme un moyen adroit du poète pour laisser au moins pressentir la vérité. Car il est certain que le double reflux dans l'espace d'un jour et d'une nuit ferait mieux comprendre que le reflux triple comment les débris du naufrage ont pu rester si longtemps engloutis et reparaître si tard, au gré du héros toujours cramponné aux branches de son figuier : « Aux rameaux du figuier sans relâche attaché, j'attendais que le monstre revomît le mât et la carène; mais ce moment tarda longtemps au gré de mon impatience : ce fut à l'heure où, pressé par la faim, le juge se lève et quitte l'assemblée, après avoir entre les citoyens aux prises décidé maints procès, à cette heure seulement que du sein de Charybde ces précieux débris reparurent à mes yeux (109). » Toutes ces circonstances effectivement indiquent un laps de temps considérable, celle-ci surtout, « que déjà le soir étendait son voile sur la terre », sans compter que le poète, au lieu de dire simplement et d'une manière générale « à l'heure où le juge se lève », a ajouté, « ayant décidé maints procès », ce qui implique une heure encore plus avancée. Enfin, Homère n'aurait offert au héros naufragé qu'un moyen de salut bien peu vraisemblable, si, avant qu'il eût eu le temps d'être emporté au loin, un nouveau reflux eût pu tout à coup le ramener en arrière. 37. Apollodore, à son tour, en partisan décidé d'Eratosthène, reproche à Callimaque d'avoir nommé, lui, un grammairien consommé, d'avoir nommé, dis-je, contrairement à la donnée homérique, qui consiste à transporter dans l'Océan le théâtre des errances d'Ulysse, Gaudos et Corcyre parmi les lieux où le héros aborda. Mais de deux choses l'une : ou les errances d'Ulysse n'ont eu lieu nulle part et ne sont de tout point qu'une fiction d'Homère, auquel cas le reproche est légitime, ou bien, elles ont eu lieu réellement, seulement en d'autres parages, et alors il faudrait le dire nettement, en précisant surtout quels sont ces parages, pour que la prétendue erreur pût être rectifiée. Or, comme on ne saurait dire avec vraisemblance, nous l'avons démontré plus haut, que tout ici est pure fiction, et que d'autre part on ne désigne aucune localité qui paraisse répondre mieux [que Gaudos et Corcyre] aux descriptions du poète, Callimaque nous semble devoir être renvoyé de la plainte. 38. Démétrius de Scepsis n'a pas raison davantage dans ses critiques, et, qui plus est, on pourrait s'en prendre à lui souvent des erreurs qu'a commises Apollodore. Ainsi, en voulant réfuter certaine assertion de Néanthès de Cyzique, qui avait signalé comme un des incidents de la navigation des Argonautes vers le Phase (navigation attestée et par Homère et par maint autre écrivain) l'érection de ces temples ou autels de la Mère Idéenne qui se voient près de Cyzique, Démétrius s'emporte jusqu'à nier qu'Homère ait même eu connaissance de cette expédition de Jason vers le Phase. Or, en niant cela, Démétrius fait plus que de contredire le témoignage formel d'Homère, il se contredit lui-même, car il a lui-même raconté, [d'après Homère apparemment], comment Achille, après avoir dévasté Lesbos et tant d'autres lieux, épargna Lemnos et les îles voisines, à cause de la parenté qui l'unissait à Jason et au fils de Jason, Euneôs, alors maître de Lemnos Quoi donc! Le poète aurait su qu'Achille et Jason étaient parents, compatriotes ou simplement voisins, qu'en un mot un lien quelconque existait entre eux (lien du reste se réduisant à ceci, que tous deux se trouvaient être Thessaliens de nation, mais originaires l'un d'Iolcos, l'autre de la Phthiotide-Achaeide), et il aurait cependant ignoré comment Jason, bien que Thessalien et natif d'Iolcos, en était venu à ne laisser de postérité nulle part en Thessalie, notamment à Iolcos, et avait placé son fils sur le trône de Lemnos! Il aurait connu Pélias et les Péliades, notamment la plus belle d'entre elles, ainsi que son fils, « Eumélus, né des amours d'Admète et d'Alceste, d'Alceste, la plus belle entre toutes les femmes, comme elle était déjà la plus belle entre les filles de Pélias (110); » et pas une des aventures, j'entends des aventures authentiques de Jason, d'Argo et des Argonautes, ne serait parvenue à sa connaissance, si bien qu'il ne faudrait voir dans la navigation de Jason au sein de l'Océan, après sa séparation d'avec Aeétès qu'une pure fiction de l'imagination du poète sans le moindre fondement historique ! 39. Non ; et puisque tout le monde convient que la première partie de l'expédition des Argonautes, leur départ pour le Phase, sur l'ordre de Pélias, leur retour, leur prise de possession chemin faisant de telle et telle île, sont des faits dont on peut admettre l'authenticité, nous ne voyons pas, en vérité, pourquoi la seconde partie de leur voyage, devenu pour eux comme pour Ulysse et pour Ménélas une suite d'erreurs sans fin, serait accueillie avec plus d'incrédulité, quand ces erreurs sont attestées de même et par des monuments encore debout aujourd'hui, et par la mention formelle d'Homère. La ville d'Aea, par exemple, se voit encore sur les bords du Phase, personne ne doute qu'Aeétès n'ait réellement régné en Colchide, son nom même est demeuré pour le pays une sorte de nom national, on parle toujours de la magicienne Médée, et les richesses que la Colchide tire actuellement de ses mines d'or, d'argent et de fer, laissent assez deviner quel a dû être le vrai motif de l'expédition des Argonautes, le même apparemment qui avait, dès auparavant, poussé Phrixus vers les rives du Phase. Il existe en outre des monuments de l'une et de l'autre expédition, témoin ce Phrixeum, qui s'élève sur la frontière même de la Colchide et de l'Ibérie, et cette foule de Jasonium, qu'on trouve répandus partout en Arménie, en Médie et dans les pays environnants. De même, autour de Sinope et sur toute cette côte, dans la Propontide aussi, dans l'Hellespont, et jusque dans les eaux de Lemnos, on signale maint vestige du passage de Jason et de celui de Phrixus ; on retrouve, qui plus est, les traces de Jason et des Colchidiens envoyés à sa poursuite en Crète, en Italie, dans l'Adriatique même, ce que rappelle, en partie du moins Callimaque, quand il nomme « Et le temple d'Aeglète et l'île d'Anaphé, proche voisine de Théra, cette noble fille de Lacédémone (111) », dans l'élégie dont voici le début, « Je dirai d'abord comment du séjour d'Aeétès le Cyté une troupe de héros put à travers les mers regagner les rivages de l'antique Haemonie, » et qu'il ajoute à propos de ces Colkhes ou Colchidiens : « A peine entrés dans la mer d'Illyrie, ils suspendent le mouvement de leurs rames; et non loin de la pierre qui recouvre la dépouille de la blonde Harmonie, ils fondent une humble cité : c'est pour le Grec LA VILLE DES PROSCRITS, mais, d'un mot de leur langue, ils l'ont nommée POLAE (112). » Enfin, suivant certains auteurs, Jason aurait remonté la plus grande partie du cours de l'Ister; mais d'autres se bornent à le faire pénétrer par cette voie jusqu'à l'Adriatique, et, si les premiers ont montré qu'ils ignoraient complètement la géographie de ces contrées, ceux-ci, du moins, en supposant l'existence d'un second fleuve Ister, qui sorti-rait du grand Ister pour aller se jeter dans l'Adriatique, n'ont pas avancé quelque chose de tout à fait invraisemblable et absurde. 40. Or, ce sont des données de ce genre que le poète a eues à sa disposition et qu'il a mises en oeuvre, tantôt suivant rigoureusement l'histoire, et tantôt ajoutant à l'histoire les fictions de son imagination, conformément à la méthode générale des poètes et à la sienne en particulier: il suit l'histoire par exemple, quand il nomme Aeétès, qu'il parle de Jason et du navire Argo, qu'il crée son Aeea à l'image de la réelle Aea, qu'il place Euneôs sur le trône de Lemnos et fait de cette île une alliée d'Achille , tout comme il fait une autre Médée de la magicienne Circé, « Propre soeur de l'homicide Aeétés (113). » Au contraire, il ajoute et mêle la fiction à l'histoire, quand il transporte en plein Océan le théâtre des erreurs qui suivirent l'expédition de Colchide; car l'expression « Argo, nom chéri, nom connu de tous les mortels (114), » très juste quand on admet la précédente distinction et qu'on conçoit l'expédition du navire Argo dirigée dans le principe vers des lieux connus et abondamment peuplés, ne se comprend plus, si, comme l'affirme Démétrius de Scepsis d'après l'autorité de Mimnerme, lequel plaçait la résidence d'Aeétès sur les bords mêmes de l'Océan, c'est dans la mer extérieure et vers les derniers confins de l'Orient que Jason se vit de prime abord envoyé par Pélias pour chercher la Toison d'or : l'expédition ainsi dirigée vers des lieux inconnus, ignorés, devient invraisemblable, sans compter qu'une navigation, comme celle-là, dans des parages absolument déserts et inhabités, et qui nous semblent aujourd'hui encore le dernier degré de l'éloignement, n'était pas de nature à procurer grande gloire ni « à intéresser tous les coeurs (115). »
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31. Ἐπεὶ δὲ καὶ τὰ περὶ τῆς πλάνης τῆς Μενελάου λεχθέντα συνηγορεῖν δοκεῖ τῇ ἀγνοίᾳ τῇ περὶ τοὺς τόπους ἐκείνους, βέλτιον ἴσως ἐστὶ τὰ ἐν τοῖς ἔπεσι τούτοις ζητούμενα προεκθεμένους ἅμα ταῦτά τε διαστεῖλαι καὶ περὶ τοῦ ποιητοῦ ἀπολογήσασθαι καθαρώτερον. Φησὶ δὴ πρὸς Τηλέμαχον ὁ Μενέλαος θαυμάσαντα τὸν τῶν βασιλείων κόσμον·
Ἦ γὰρ
πολλὰ παθὼν
καὶ πόλλ' ἐπαληθεὶς Ζητοῦσι δὲ, πρὸς τίνας ἦλθεν αἰθίοπας, πλέων ἐξ Αἰγύπτου· οὔτε γὰρ ἐν τῇ καθ' ἡμᾶς θαλάττῃ οἰκοῦσί τινες Αἰθίοπες, οὔτε τοῦ Νείλου τοὺς καταράκτας ἦν διελθεῖν ναυσί· τίνες τε οἱ Σιδόνιοι· οὐ γὰρ οἵ γε ἐν Φοινίκῃ· οὐ γὰρ ἂν τὸ γένος προθεὶς τὸ εἶδος ἐπήνεγκε· τίνες τε οἱ Ἐρεμβοί· καινὸν γὰρ τὸ ὄνομα. Ἀριστόνικος μὲν οὖν ὁ καθ' ἡμᾶς γραμματικὸς ἐν τοῖς περὶ τῆς Μενελάου πλάνης πολλῶν ἀναγέγραφεν ἀνδρῶν ἀποφάσεις περὶ ἑκάστου τῶν ἐκκειμένων κεφαλαίων· ἡμῖν δ' ἀρκέσει κἂν ἐπιτέμνοντες λέγωμεν. Οἱ μὲν δὴ πλεῦσαι φήσαντες εἰς τὴν Αἰθιοπίαν, οἱ μὲν περίπλουν τῶν διὰ Γαδείρων μέχρι τῆς Ἰνδικῆς εἰσάγουσιν, ἅμα καὶ τὸν χρόνον τῇ πλάνῃ συνοικειοῦντες, ὅν φησιν, ὅτι ὀγδοάτῳ ἔτει ἦλθον· οἱ δὲ διὰ τοῦ ἰσθμοῦ τοῦ κατὰ τὸν Ἀράβιον κόλπον· οἱ δὲ διὰ τῶν διωρύγων τινός. Οὔτε δ' ὁ περίπλους ἀναγκαῖος, ὃν Κράτης εἰσάγει, οὐχ ὡς ἀδύνατος εἶναι ( καὶ γὰρ [ οὐδ'] ἡ Ὀδυσσέως πλάνη ἀδύνατος), ἀλλ' ὅτι οὔτε πρὸς τὰς ὑποθέσεις τὰς μαθηματικὰς χρήσιμος, οὔτε πρὸς τὸν χρόνον τῆς πλάνης. Καὶ γὰρ ἀκούσιοι διατριβαὶ κατέσχον αὐτὸν ὑπὸ δυσπλοίας, φήσαντος ὅτι ἀπὸ ἑξήκοντα νεῶν πέντε ἐλείφθησαν αὐτῷ, καὶ ἑκούσιοι χρηματισμοῦ χάριν· φησὶ γὰρ ὁ Νέστωρ·
Ὣς
ὁ μὲν, ἔνθα
πολὺν βίοτον
καὶ χρυσὸν
ἀγείρων, Ὅ τε διὰ τοῦ ἰσθμοῦ πλοῦς ἢ τῶν διωρύγων λεγόμενος μὲν ἠκούετο ἂν ἐν μύθου σχήματι, μὴ λεγόμενος δὲ περιττῶς καὶ ἀπιθάνως εἰσάγοιτο ἄν. Ἀπιθάνως δὲ λέγω, ὅτι πρὸ τῶν Τρωικῶν οὐδεμία ἦν διῶρυξ· τὸν δὲ ἐπιχειρήσαντα ποιῆσαι Σέσωστριν ἀποστῆναί φασι, μετεωροτέραν ὑπολαβόντα τὴν τῆς θαλάττης ἐπιφάνειαν. ἀλλὰ μὴν οὐδ' ὁ ἰσθμὸς ἦν πλόιμος· ἀλλ' εἰκάζει ὁ Ἐρατοσθένης οὐκ εὖ. Μὴ γάρ πω τὸ ἔκρηγμα τὸ κατὰ τὰς Στήλας γεγονέναι νομίζει· ὥστε ἐνταῦθα [ μὴ] συνάπτειν τὴν εἴσω θάλατταν τῇ ἐκτὸς καὶ καλύπτειν τὸν ἰσθμὸν μετεωροτέραν οὖσαν, τοῦ δ' ἐκρήγματος γενομένου ταπεινωθῆναι καὶ ἀνακαλύψαι τὴν γῆν τὴν κατὰ τὸ Κάσιον καὶ τὸ Πηλούσιον μέχρι τῆς Ἐρυθρᾶς. Τίνα οὖν ἔχομεν ἱστορίαν περὶ τοῦ ἐκρήγματος τούτου διότι πρὸ τῶν Τρωικῶν οὔπω ὑπῆρχεν; Ἴσως δ' ὁ ποιητὴς ἅμα μὲν τὸν Ὀδυσσέα ταύτῃ διεκπλέοντα εἰς τὸν ὠκεανὸν πεποίηκεν, ὡς ἤδη ἐκρήγματος γεγονότος, ἅμα δὲ εἰς τὴν Ἐρυθρὰν τὸν Μενέλαον ἐκ τῆς Αἰγύπτου ναυστολεῖ ὡς οὔπω γεγονότος. ἀλλὰ καὶ τὸν Πρωτέα εἰσάγει λέγοντα αὐτῷ,
Ἀλλά
σ' ἐς Ἠλύσιον πεδίον καὶ
πείρατα γαίης Ποῖα οὖν; Καὶ ὅτι ἑσπέριόν τινα λέγει τόπον τοῦτον ἔσχατον, ὁ Ζέφυρος παρατεθεὶς δηλοῖ·
Ἀλλ' αἰεὶ Ζεφύροιο
λιγυπνείοντας
ἀήτας Ταῦτα γὰρ αἰνίγματος πλήρη. 32. Εἰ δ' οὖν καὶ σύρρουν ποτὲ ὑπάρξαντα τὸν ἰσθμὸν τοῦτον ὁ ποιητὴς ἱστορήκει, πόσῳ μείζονα ἂν ἔχοιμεν πίστιν τοῦ τοὺς Αἰθίοπας διχθὰ διῃρῆσθαι, πορθμῷ τηλικούτῳ διειργομένους; Τίς δὲ καὶ χρηματισμὸς παρὰ τῶν ἔξω καὶ κατὰ τὸν ὠκεανὸν Αἰθιόπων; Ἅμα μὲν γὰρ θαυμάζουσι τοῦ κόσμου τῶν βασιλείων οἱ περὶ Τηλέμαχον τὸ πλῆθος ὅ ἐστι Χρυσοῦ τ' ἠλέκτρου τε καὶ ἀργύρου ἠδ' ἐλέφαντος. Τούτων δ' οὐδενὸς πλὴν ἐλέφαντος εὐπορία παρ' ἐκείνοις ἐστίν, ἀπορωτάτοις τῶν ἁπάντων οὖσι τοῖς πλείστοις καὶ νομάσι. Νὴ Δία, ἀλλ' ἡ Ἀραβία προσῆν καὶ τὰ μέχρι τῆς Ἰνδικῆς· τούτων δ' ἡ μὲν εὐδαίμων κέκληται μόνη τῶν ἁπασῶν, τὴν δέ, εἰ καὶ μὴ ὀνομαστὶ καλοῦσιν, οὕτως ὑπολαμβάνουσί γε καὶ ἱστοροῦσιν ὡς εὐδαιμονεστάτην· τὴν μὲν οὖν Ἰνδικὴν οὐκ οἶδεν Ὅμηρος, εἰδὼς δὲ ἐμέμνητο ἄν· τὴν δ' Ἀραβίαν, ἣν εὐδαίμονα προσαγορεύ ουσιν οἱ νῦν, τότε δ' οὐκ ἦν πλουσία, ἀλλὰ καὶ αὐτὴ ἄπορος καὶ ἡ πολλὴ αὐτῆς σκηνιτῶν ἀνδρῶν· ὀλίγη δ' ἡ ἀρωματοφόρος, δι' ἣν καὶ τοῦτο τοὔνομα εὕρετο ἡ χώρα διὰ τὸ καὶ τὸν φόρτον εἶναι τὸν τοιοῦτον ἐν τοῖς παρ' ἡμῖν σπάνιον καὶ τίμιον. Νυνὶ μὲν οὖν εὐποροῦσι καὶ πλουτοῦσι διὰ τὸ καὶ τὴν ἐμπορίαν εἶναι πυκνὴν καὶ δαψιλῆ, τότε δ' οὐκ εἰκός. Αὐτῶν δὲ χάριν τῶν ἀρωμάτων ἐμπόρῳ μὲν καὶ καμηλίτῃ γένοιτ' ἄν τις ἐκ τῶν τοιούτων φορτίων εὐπορία· Μενελάῳ δὲ λαφύρων ἢ δωρεῶν ἔδει παρὰ βασιλέων καὶ δυναστῶν, ἐχόντων τε ἃ δώσουσι καὶ βουλομένων [διδόναι] διὰ τὴν ἐπιφάνειαν αὐτοῦ καὶ εὔκλειαν. Οἱ μὲν οὖν Αἰγύπτιοι καὶ οἱ πλησίον Αἰθίοπες καὶ Ἄραβες οὔθ' οὕτω τελέως ἄβιοι, οὔτ' ἀνήκοοι τῆς τῶν Ἀτρειδῶν δόξης, καὶ μάλιστα διὰ τὴν κατόρθωσιν τοῦ Ἰλιακοῦ πολέμου, ὥστ' ἐλπὶς ἦν τῆς ἐξ αὐτῶν ὠφελείας· καθάπερ ἐπὶ τοῦ θώρακος τοῦ Ἀγαμέμνονος λέγεται,
Τόν ποτέ οἱ Κινύρης δῶκε ξεινήιον εἶναι·
Καὶ δὴ καὶ τὸν πλείω χρόνον τῆς πλάνης λεκτέον μὲν ἐν τοῖς κατὰ Φοινίκην καὶ Συρίαν καὶ
33. Εἰ δὲ Φοίνικας εἰπὼν ὀνομάζει καὶ Σιδωνίους, τὴν μητρόπολιν αὐτῶν σχήματι συνήθει χρῆται, ὡς Τρῶάς τε καὶ Ἕκτορα νηυσὶ πέλασσε· καί
Οὐ γὰρ
ἔτ' οἰνῆος μεγαλήτορος υἱέες ἦσαν, καὶ Ἴδην δ' ἵκανεν - καὶ Γάργαρον· καί Οἳ δ' εὔβοιαν ἔχον - καὶ Χαλκίδα τ' εἰρέτριάν τε· καὶ Σαπφώ Ἤ σε Κύπρος ἢ Πάφος ἢ Πάνορμος. Καίτοι καὶ ἄλλο τι ἦν τὸ ποιῆσαν, καίπερ ἤδη μνησθέντα τῆς Φοινίκης, ἰδίως πάλιν καὶ τὴν Σιδῶνα συγκαταλέξαι. πρὸς μὲν γὰρ τὸ τὰ ἐφεξῆς ἔθνη καταλέξαι ἱκανῶς εἶχεν οὕτως εἰπεῖν,
Κύπρον Φοινίκην τε καὶ Αἰγυπτίους ἐπαληθεὶς Ἵνα δ' ἐμφήνῃ καὶ τὴν παρὰ τοῖς Σιδωνίοις ἀποδημίαν τὴν ἐπὶ πλέον γενομένην, καλῶς εἶχεν εἴτ' ἀναλαβεῖν εἴτε καὶ παραλαβεῖν· ἐμφαίνει [ δὲ] διὰ τῶν ἐπαίνων τῆς παρ' αὐτοῖς εὐτεχνίας [ καὶ] τοῦ τὴν Ἑλένην προεξενῶσθαι τοῖς ἀνθρώποις μετὰ Ἀλεξάνδρου· διόπερ παρὰ τῷ Ἀλεξάνδρῳ πολλὰ τοιαῦτα ἀποκείμενα λέγει·
Ἔνθ' ἔσαν οἱ πέπλοι παμποίκιλοι, ἔργα γυναικῶν Καὶ παρὰ τῷ Μενελάῳ· λέγει γὰρ πρὸς Τηλέμαχον,
Δώσω τοι κρητῆρα τετυγμένον· ἀργύρεος δὲ Δεῖ δὲ δέξασθαι πρὸς ὑπερβολὴν εἰρημένον τὸ Ἡφαίστου ἔργον, ὡς λέγεται Ἀθηνᾶς ἔργα τὰ καλὰ καὶ Χαρίτων καὶ Μουσῶν. Ἐπεὶ ὅτι γε οἱ ἄνδρες ἦσαν καλλίτεχνοι, δηλοῖ τὸν κρατῆρα ἐπαινῶν, ὃν ὁ εὔνεως ἔδωκεν ἀντὶ Λυκάονος· φησὶ γάρ,
Κάλλει ἐνίκα πᾶσαν ἐπ' αἶαν 34. Περὶ δὲ τῶν Ἐρεμβῶν πολλὰ μὲν εἴρηται, πιθανώτατοι δ' εἰσὶν οἱ νομίζοντες τοὺς Ἄραβας λέγεσθαι. Ζήνων δ' ὁ ἡμέτερος καὶ γράφει οὕτως· Αἰθίοπάς θ' ἱκόμην καὶ Σιδονίους Ἄραβάς τε. Τὴν μὲν οὖν γραφὴν οὐκ ἀνάγκη κινεῖν παλαιὰν οὖσαν· αἰτιᾶσθαι δὲ βέλτιον τὴν τοῦ ὀνόματος μετάπτωσιν πολλὴν καὶ ἐπιπολαίαν οὖσαν ἐν πᾶσι τοῖς ἔθνεσιν. Ἀμέλει δὲ καὶ ποιοῦσί τινες παραγραμματίζοντες. ἄριστα δ' ἂν δόξειεν εἰπεῖν ὁ Ποσειδώνιος κἀνταῦθα ἀπὸ τῆς τῶν ἐθνῶν συγγενείας καὶ κοινότητος ἐτυμολογῶν. Τὸ γὰρ τῶν Ἀρμενίων ἔθνος καὶ τὸ τῶν Σύρων καὶ Ἀράβων πολλὴν ὁμοφυλίαν ἐμφαίνει κατά τε τὴν διάλεκτον καὶ τοὺς βίους καὶ τοὺς τῶν σωμάτων χαρακτῆρας, καὶ μάλιστα καθὸ πλησιόχωροί εἰσι. Δηλοῖ δ' ἡ Μεσοποταμία ἐκ τῶν τριῶν συνεστῶσα τούτων ἐθνῶν· μάλιστα γὰρ ἐν τούτοις ἡ ὁμοιότης διαφαίνεται. Εἰ δέ τις παρὰ τὰ κλίματα γίνεται διαφορὰ τοῖς προσβόρροις ἐπὶ πλέον πρὸς τοὺς μεσημβρινοὺς καὶ τούτοις πρὸς μέσους τοὺς ὅρους, ἀλλ' ἐπικρατεῖ γε τὸ κοινόν. Καὶ οἱ Ἀσσύριοι δὲ καὶ οἱ Ἀριανοὶ παραπλησίως πως ἔχουσι καὶ πρὸς τούτους καὶ πρὸς ἀλλήλους. Εἰκάζει γε δὴ καὶ τὰς τῶν ἐθνῶν τούτων κατονομασίας ἐμφερεῖς ἀλλήλαις εἶναι. τοὺς γὰρ ὑφ' ἡμῶν Σύρους καλουμένους ὑπ' αὐτῶν τῶν Σύρων Ἀραμμαίους καλεῖσθαι· τούτῳ δ' ἐοικέναι τοὺς Ἀρμενίους καὶ τοὺς Ἄραβας καὶ Ἐρεμβούς, τάχα τῶν πάλαι Ἑλλήνων οὕτω καλούντων τοὺς Ἄραβας, ἅμα καὶ τοῦ ἐτύμου συνεργοῦντος πρὸς τοῦτο. Ἀπὸ γὰρ τοῦ εἰς τὴν ἔραν ἐμβαίνειν τοὺς Ἐρεμβοὺς ἐτυμολογοῦσιν οὕτως οἱ πολλοί, οὓς μεταλαβόντες οἱ ὕστερον ἐπὶ τὸ σαφέστερον Τρωγλοδύτας ἐκάλεσαν· οὗτοι δέ εἰσιν Ἀράβων οἱ ἐπὶ θάτερον μέρος τοῦ Ἀραβίου κόλπου κεκλιμένοι, τὸ πρὸς Αἰγύπτῳ καὶ Αἰθιοπίᾳ. Τούτων δ' εἰκὸς μεμνῆσθαι τὸν ποιητὴν καὶ πρὸς τούτους ἀφῖχθαι λέγειν τὸν Μενέλαον, καθ' ὃν τρόπον εἴρηται καὶ πρὸς τοὺς Αἰθίοπας· τῇ γὰρ Θηβαίδι καὶ οὗτοι πλησιάζουσιν· ὁμοίως οὐκ ἐργασίας οὐδὲ χρηματισμοῦ χάριν τούτων ὀνομαζομένων ( οὐ πολὺ γὰρ ἦν τοῦτο), ἀλλὰ τοῦ μήκους τῆς ἀποδημίας καὶ τοῦ ἐνδόξου· ἔνδοξον γὰρ τοσοῦτον ἐκτοπίσαι. Τοιοῦτον δὲ καὶ τὸ Πολλῶν ἀνθρώπων ἴδεν ἄστεα καὶ νόον ἔγνω· καὶ τὸ
Ἦ
γὰρ πολλὰ παθὼν καὶ πόλλ' ἐπαληθεὶς Ἡσίοδος δ' ἐν Καταλόγῳ φησί
Καὶ κούρην Ἀράβοιο, τὸν
Ἑρμάων ἀκάκητα Οὕτω δὲ καὶ Στησίχορος λέγει. Εἰκάζειν οὖν ἐστιν, ὅτι ἀπὸ τούτου καὶ ἡ χώρα Ἀραβία ἤδη τότε ὠνομάζετο· κατὰ δὲ τοὺς ἥρωας τυχὸν ἴσως οὔπω. 35. Οἱ δὲ πλάττοντες Ἐρεμβοὺς ἴδιόν τι ἔθνος Αἰθιο πικὸν καὶ ἄλλο Κηφήνων καὶ τρίτον Πυγμαίων καὶ ἄλλα μυρία ἧττον ἂν πιστεύοιντο, πρὸς τῷ μὴ ἀξιοπίστῳ καὶ σύγχυσίν τινα ἐμφαίνοντες τοῦ μυθικοῦ καὶ ἱστορικοῦ σχήματος. ὅμοιοι δ' εἰσὶ τούτοις καὶ οἱ Σιδονίους ἐν τῇ κατὰ Πέρσας θαλάττῃ διηγούμενοι ἢ ἄλλοθί που τοῦ ὠκεανοῦ, καὶ τὴν τοῦ Μενελάου πλάνην ἐξωκεανίζοντες· ὁμοίως δὲ καὶ τοὺς Φοίνικας. Τῆς δ' ἀπιστίας αἴτιον οὐκ ἐλάχιστόν ἐστι τὸ ἐναντιοῦσθαι ἀλλήλοις τοὺς λέγοντας. Οἱ μὲν γὰρ καὶ τοὺς Σιδονίους τοὺς καθ' ἡμᾶς ἀποίκους εἶναι τῶν ἐν τῷ ὠκεανῷ φασί, προστιθέντες καὶ διὰ τί Φοίνικες ἐκαλοῦντο, ὅτι καὶ ἡ θάλαττα ἐρυθρά· οἱ δ' ἐκείνους τούτων. Εἰσὶ δ' οἳ καὶ τὴν Αἰθιοπίαν εἰς τὴν καθ' ἡμᾶς Φοινίκην μετάγουσι, καὶ τὰ περὶ τὴν Ἀνδρομέδαν ἐν Ἰόπῃ συμβῆναί φασιν· οὐ δήπου κατ' ἄγνοιαν τοπικὴν καὶ τούτων λεγομένων, ἀλλ' ἐν μύθου μᾶλλον σχήματι· καθάπερ καὶ τῶν παρ' Ἡσιόδῳ καὶ τοῖς ἄλλοις, ἃ προφέρει ὁ Ἀπολλόδωρος, οὐδ' ὃν τρόπον παρατίθησι τοῖς Ὁμήρου ταῦτα εἰδώς. Τὰ μὲν γὰρ Ὁμήρου τὰ περὶ τὸν Πόντον καὶ τὴν Αἴγυπτον παρατίθησιν ἄγνοιαν αἰτιώμενος, ὡς λέγειν μὲν τὰ ὄντα βουλομένου, μὴ λέγοντος δὲ τὰ ὄντα, ἀλλὰ τὰ μὴ ὄντα ὡς ὄντα κατ' ἄγνοιαν. Ἡσιόδου δ' οὐκ ἄν τις αἰτιάσαιτο ἄγνοιαν, Ἡμίκυνας λέγοντος καὶ Μακροκεφάλους καὶ Πυγμαίους· οὐδὲ γὰρ αὐτοῦ Ὁμήρου ταῦτα μυθεύοντος, ὧν εἰσι καὶ οὗτοι οἱ Πυγμαῖοι, οὐδ' Ἀλκμᾶνος Στεγανόποδας ἱστοροῦντος, οὐδ' Αἰσχύλου Κυνοκεφάλους καὶ Στερνοφθάλμους καὶ Μονομμάτους, ὅπου γε οὐδὲ τοῖς πεζῇ συγγράφουσιν ἐν ἱστορίας σχήματι προσέχομεν περὶ πολλῶν, κἂν μὴ ἐξομολογῶνται τὴν μυθογραφίαν. Φαίνεται γὰρ εὐθὺς ὅτι μύθους παραπλέκουσιν ἑκόντες οὐκ ἀγνοίᾳ τῶν ὄντων, ἀλλὰ πλάσει τῶν ἀδυνάτων τερατείας καὶ τέρψεως χάριν. δοκοῦσι δὲ κατ' ἄγνοιαν, ὅτι μάλιστα καὶ πιθανῶς τὰ τοιαῦτα μυθεύουσι περὶ τῶν ἀδήλων καὶ τῶν ἀγνοουμένων. Θεόπομπος δὲ ἐξομολογεῖται φήσας ὅτι καὶ μύθους ἐν ταῖς ἱστορίαις ἐρεῖ, κρεῖττον ἢ ὡς Ἡρόδοτος καὶ Κτησίας καὶ Ἑλλάνικος καὶ οἱ τὰ Ἰνδικὰ συγγράψαντες. 36. Περὶ δὲ τῶν τοῦ ὠκεανοῦ παθῶν εἴρηται μὲν ἐν μύθου σχήματι· καὶ γὰρ τούτου στοχάζεσθαι δεῖ τὸν ποιητήν. Ἀπὸ γὰρ τῶν ἀμπώτεων καὶ τῶν πλημμυρίδων ἡ Χάρυβδις αὐτῷ μεμύθευται, οὐδ' αὐτὴ παντάπασιν Ὁμήρου πλάσμα οὖσα, ἀλλ' ἀπὸ τῶν ἱστορουμένων περὶ τὸν Σικελικὸν πορθμὸν διεσκευασμένη. εἰ δὲ δὶς τῆς παλιρροίας γινομένης καθ' ἑκάστην ἡμέραν καὶ νύκτα ἐκεῖνος τρὶς εἴρηκε· Τρὶς μὲν γάρ τ' ἀνίησιν ἐπ' ἤματι, τρὶς δ' ἀναροιβδεῖ, λέγοιτ' ἂν καὶ οὕτως· οὐ γὰρ κατ' ἄγνοιαν τῆς ἱστορίας ὑποληπτέον λέγεσθαι τοῦτο, ἀλλὰ τραγῳδίας χάριν καὶ φόβου, ὃν ἡ Κίρκη πολὺν τοῖς λόγοις προστίθησιν ἀποτροπῆς χάριν, ὥστε καὶ τὸ ψεῦδος παραμίγνυσθαι. Ἐν αὐτοῖς γοῦν τοῖς ἔπεσι τούτοις εἴρηκε μὲν οὕτως ἡ Κίρκη·
Τρὶς μὲν γάρ τ' ἀνίησιν ἐπ' ἤματι, τρὶς δ' ἀναροιβδεῖ Καὶ μὴν παρέτυχέ τε τῇ ἀναρροιβδήσει ὁ Ὀδυσσεὺς καὶ οὐκ ἀπώλετο, ὥς φησιν αὐτός·
Ἡ μὲν ἀνερροίβδησε
θαλάσσης ἁλμυρὸν ὕδωρ· Εἶτα περιμείνας τὰ ναυάγια καὶ λαβόμενος πάλιν αὐτῶν σώζεται, ὥστ' ἐψεύσατο ἡ Κίρκη. ὡς οὖν τοῦτο, κἀκεῖνο τὸ « τρὶς μὲν γάρ τ' ἀνίησιν ἐπ' ἤματι » ἀντὶ τοῦ δίς, ἅμα καὶ τῆς ὑπερβολῆς τῆς τοιαύτης συνή θους πᾶσιν οὔσης, τρισμακαρίους καὶ τρισαθλίους λεγόντων· καὶ ὁ ποιητής· Τρισμάκαρες Δαναοί, καί Ἀσπασίη τρίλλιστο, [ καί ] Τριχθά τε καὶ τετραχθά. Ἴσως δ' ἄν τις καὶ ἀπὸ τῆς ὥρας τεκμήραιτο, ὅτι ὑπαινίττεταί πως τὸ ἀληθές· μᾶλλον γὰρ [ ἂν] ἐφαρμόττοι τῷ δὶς γενέσθαι τὴν παλίρροιαν κατὰ τὸν συνάμφω χρόνον, τὸν ἐξ ἡμέρας καὶ νυκτός, ἢ τῷ τρὶς τοσοῦτον χρόνον μεῖναι τὰ ναυάγια ὑποβρύχια, ὀψὲ δὲ ἀναβληθῆναι ποθοῦντι. Καὶ συνεχῶς προσισχομένῳ τοῖς κλάδοις·
Νωλεμέως δ' ἐχόμην, ὄφρ' ἐξεμέσειεν ὀπίσσω Πάντα γὰρ ταῦτα χρόνου τινὸς ἔμφασιν ἀξιολόγου δίδωσι, καὶ μάλιστα τὸ τὴν ἑσπέραν ἐπιτεῖναι, ( καὶ) μὴ κοινῶς εἰπόντα, ἡνίκα ὁ δικαστὴς ἀνίσταται, ἀλλ' ἡνίκα κρίνων νείκεα πολλά, ὥστε βραδῦναι πλέον τι καὶ ἄλλως δὲ οὐ πιθανὴν ἂν ὑπέτεινε τῷ ναυαγῷ τὴν ἀπαλλαγήν, εἰ πρὶν ἀποσπασθῆναι πολὺ καὶ αὐτίκα εἰς τοὐπίσω παλίρρους μετέπιπτεν. 37. Ἀπολλόδωρος δὲ ἐπιτιμᾷ Καλλιμάχῳ, συνηγορῶν τοῖς περὶ τὸν Ἐρατοσθένη, διότι καίπερ γραμματικὸς ὢν παρὰ τὴν Ὁμηρικὴν ὑπόθεσιν καὶ τὸν ἐξωκεανισμὸν τῶν τόπων, περὶ οὓς τὴν πλάνην φράζει, Γαῦδον καὶ Κόρκυραν ὀνομάζει. Ἀλλ' εἰ μὲν μηδαμοῦ γέγονεν ἡ πλάνη, ἀλλ' ὅλον πλάσμα ἐστὶν Ὁμήρου τοῦτο, ὀρθὴ ἡ ἐπιτίμησις· ἢ, εἰ γέγονε μέν, περὶ ἄλλους δὲ τόπους, δεῖ λέγειν εὐθὺς καὶ περὶ τίνας, ἐπανορθούμενον ἅμα τὴν ἄγνοιαν. Μήτε δὲ ὅλου πλάσματος εἶναι πιθανῶς λεγομένου, καθάπερ ἐπεδείκνυμεν, μήτ' ἄλλων τόπων κατὰ πίστιν μείζω δεικνυμένων, ἀπολύοιτ' ἂν τῆς αἰτίας ὁ Καλλίμαχος. 38. Οὐδ' ὁ Σκήψιος δὲ Δημήτριος εὖ, ἀλλὰ καὶ τῷ Ἀπολλοδώρῳ τῶν ἁμαρτιῶν ἐνίων αἴτιος ἐκεῖνος κατέστη. Πρὸς γὰρ Νεάνθη τὸν Κυζικηνὸν φιλοτιμοτέρως ἀντιλέγων εἰπόντα ὅτι οἱ Ἀργοναῦται πλέοντες εἰς Φᾶσιν τὸν ὑφ' Ὁμήρου καὶ τῶν ἄλλων ὁμολογούμενον πλοῦν, ἱδρύσαντο τὰ τῆς Ἰδαίας μητρὸς ἱερὰ περὶ Κύζικον, ἀρχὴν φησὶ μηδ' εἰδέναι τὴν εἰς Φᾶσιν ἀποδημίαν τοῦ Ἰάσονος Ὅμηρον. Τοῦτο δ' οὐ μόνον τοῖς ὑφ' Ὁμήρου λεγομένοις μάχεται, ἀλλὰ καὶ τοῖς ὑπ' αὐτοῦ. Φησὶ γὰρ τὸν Ἀχιλλέα Λέσβον μὲν πορθῆσαι καὶ ἄλλα χωρία, Λήμνου δ' ἀποσχέσθαι καὶ τῶν πλησίον νήσων διὰ τὴν πρὸς Ἰάσονα καὶ τὸν υἱὸν Εὔνεων συγγένειαν τότε τὴν νῆσον κατέχοντα. Πῶς οὖν ὁ ποιητὴς τοῦτο μὲν ᾖδει, διότι συγγενεῖς ἢ ὁμοεθνεῖς ἢ γείτονες ἢ ὁπωσοῦν οἰκεῖοι ὑπῆρχον ὅ τε Ἀχιλλεὺς καὶ ὁ Ἰάσων ( ὅπερ οὐδαμόθεν ἄλλοθεν, ἀλλ' ἐκ τοῦ Θετταλοὺς ἀμφοτέρους εἶναι συνέβαινε, καὶ τὸν μὲν Ἰώλκιον, τὸν δ' ἐκ τῆς Φθιώτιδος Ἀχαιίδος ὑπάρχειν), τοῦτο δ' ἠγνόει, πόθεν ἦλθε τῷ Ἰάσονι, Θετταλῷ καὶ Ἰωλκίῳ ὑπάρχοντι, ἐν μὲν τῇ πατρίδι μηδεμίαν καταλιπεῖν διαδοχήν, Λήμνου δὲ καταστῆσαι κύριον τὸν υἱόν; Καὶ Πελίαν μὲν ᾖδει καὶ τὰς Πελιάδας καὶ τὴν ἀρίστην αὐτῶν καὶ τὸν υἱὸν αὐτῆς
Εὔμηλον, τὸν ὑπ'
Ἀδμήτῳ τέκε δῖα γυναικῶν τῶν δὲ περὶ τὸν Ἰάσονα συμβάντων καὶ τὴν Ἀργὼ καὶ τοὺς Ἀργοναύτας, τῶν ὁμολογουμένων παρὰ πᾶσιν, ἀνήκοος ἦν, ἐν δὲ τῷ ὠκεανῷ τὸν παρ' αἰήτου πλοῦν ἔπλαττεν, ἀρχὴν μηδεμίαν ἐξ ἱστορίας λαβών;
39. Ὡς μὲν γὰρ ἅπαντες λέγουσιν, ὅτι ἐξ ἀρχῆς ὁ πλοῦς ἐπὶ Φᾶσιν ἔχει πιθανόν τι τοῦ Πελίου στείλαντος, καὶ ἡ ἐπάνοδος καὶ ἡ ἐν τῷ παράπλῳ νήσων ὁσηδὴ ἐπικράτεια καὶ νὴ Δία ἡ ἐπὶ πλέον γενηθεῖσα πλάνη, καθάπερ καὶ τῷ Ὀδυσσεῖ καὶ τῷ Μενελάῳ, ἐκ τῶν ἔτι νῦν δεικνυμένων καὶ πεπιστευμένων ἐστὶν ἐκ τῆς Ὁμήρου φωνῆς.
Ἥ τε γὰρ αἶα δείκνυται περὶ Φᾶσιν πόλις· καὶ ὁ
Αἰήτης πεπίστευται βασιλεῦσαι τῆς Κολχίδος, καὶ ἔστι τοῖς ἐκεῖ τοῦτ' ἐπιχώριον τοὔνομα.
Ἥ
τε Μήδεια φαρμακὶς ἱστορεῖται, καὶ ὁ πλοῦτος τῆς ἐκεῖ χώρας ἐκ τῶν χρυσείων καὶ ἀργυρείων καὶ σιδηρείων
( καὶ) δικαίαν τινὰ ὑπαγορεύει πρόφασιν τῆς στρατείας, καθ' ἣν καὶ Φρίξος πρότερον ἔστειλε τὸν πλοῦν τοῦτον· καὶ ἔστιν ὑπομνήματα τῆς ἀμφοῖν στρατείας τό τε Φρίξειον τὸ ἐν τοῖς μεθορίοις τῆς τε Κολχίδος καὶ τῆς Ἰβηρίας, καὶ τὰ Ἰασόνεια,
[ ἃ] πολλαχοῦ καὶ τῆς Ἀρμενίας καὶ τῆς Μηδίας καὶ τῶν πλησιοχώρων αὐταῖς τόπων δείκνυται.
Καὶ μὴν καὶ περὶ Σινώπην καὶ τὴν ταύτης παραλίαν καὶ τὴν Προποντίδα καὶ τὸν Ἑλλήσποντον μέχρι τῶν κατὰ τὴν Λῆμνον τόπων λέγεται πολλὰ τεκμήρια τῆς τε Ἰάσονος στρατείας καὶ τῆς Φρίξου· τῆς δ' Ἰάσονος καὶ τῶν ἐπιδιωξάντων Κόλχων καὶ μέχρι τῆς Κρήτης καὶ τῆς Ἰταλίας καὶ τοῦ Ἀδρίου, ὧν ἔνια καὶ ὁ Καλλίμαχος ἐπισημαίνεται, τοτὲ μὲν
Ἄρχμενος, ὡς ἥρωες ἀπ' αἰήταο Κυταίου, τοτὲ δὲ περὶ τῶν Κόλχων,
Οἳ μὲν ἐπ' Ἰλλυριοῖο πόρου σχάσσαντες ἐρετμὰ Τινὲς δὲ καὶ τὸν Ἴστρον ἀναπλεῦσαί φασι μέχρι πολλοῦ τοὺς περὶ τὸν Ἰάσονα, οἱ δὲ καὶ μέχρι τοῦ Ἀδρίου· οἱ μὲν κατὰ ἄγνοιαν τῶν τό πων, οἱ δὲ καὶ ποταμὸν Ἴστρον ἐκ τοῦ μεγάλου Ἴστρου τὴν ἀρχὴν ἔχοντα ἐκβάλλειν εἰς τὸν Ἀδρίαν φασί· τάδε οὐκ ἀπιθάνως οὐδ' ἀπίστως λέγοντες. 40. Τοιαύταις δή τισιν ἀφορμαῖς ὁ ποιητὴς χρησάμενος τὰ μὲν ὁμολογεῖ τοῖς ἱστορουμένοις, προσμυθεύει δὲ τούτοις, ἔθος τι φυλάττων καὶ κοινὸν καὶ ἴδιον. Ὁμολογεῖ μέν, ὅταν αἰήτην ὀνομάζῃ, καὶ τὸν Ἰάσονα καὶ τὴν Ἀργὼ λέγῃ, καὶ παρὰ [ τὴν Αἶαν] τὴν Αἰαίην πλάττῃ, καὶ τὸν Εὔνεων ἐν Λήμνῳ καθιδρύῃ, καὶ ποιῇ τῷ Ἀχιλλεῖ φίλην τὴν νῆσον, καὶ παρὰ τὴν Μήδειαν τὴν Κίρκην φαρμακίδα ποιῇ, Αὐτοκασιγνήτην ὀλοόφρονος Αἰήταο· προσμυθοποιεῖ δὲ τὸν ἐξωκεανισμὸν τὸν κατὰ τὴν πλάνην συμβάντα τὴν ἀπ' ἐκείνου τοῦ πλοῦ. Ἐπεὶ κἀκεῖνο ὑποκειμένων μὲν τούτων εὖ λέγεται, Ἀργὼ πασιμέλουσα, ὡς ἐν γνωρίμοις τόποις καὶ εὐανδροῦσι τῆς ναυστολίας γενομένης· εἰ δ', ὥσπερ ὁ Σκήψιός φησι παραλαβὼν μάρτυρα Μίμνερμον, ὃς ἐν τῷ ὠκεανῷ ποιήσας τὴν οἴκησιν τοῦ αἰήτου πρὸς ταῖς ἀνατολαῖς ἐκτὸς πεμφθῆναί φησιν ὑπὸ τοῦ Πελίου τὸν Ἰάσονα καὶ κομίσαι τὸ δέρος, οὔτ' ἂν ἡ ἐπὶ τὸ δέρος ἐκεῖσε πομπὴ πιθανῶς λέγοιτο εἰς ἀγνῶτας καὶ ἀφανεῖς τόπους, οὔθ' ὁ δι' ἐρήμων καὶ ἀοίκων [ καὶ] καθ' ἡμᾶς τοσοῦτον ἐκτετοπισμένων πλοῦς οὔτ' ἔνδοξος οὔτε πασιμέλων.
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CHAPITRE III. 1. Un autre tort d'Ératosthène est de citer trop souvent, soit qu'il les réfute, soit qu'il accepte leur témoignage et qu'il s'en serve, des écrivains qui ne méritent au fond que l'oubli, un Damaste, par exemple, et ses pareils, tous gens que, même pour ce qu'il y a de vrai dans leurs livres, on ne devrait jamais ni citer ni croire. Les seuls témoignages, en effet, qui puissent faire autorité, sont ceux d'écrivains recommandables, habituellement exacts, ou qui, s'il leur arrive parfois de passer les choses sous silence ou d'en parler trop brièvement, ne cherchent du moins jamais à tromper. Mais le témoignage de Damaste ! Autant vaudrait citer celui du Bergéen [ou celui du Messénien (116)] Evhémère et de tant d'autres comme lui, dont Ératosthène tout le premier dénonce et raille le bavardage frivole. Lui-même nous fait connaître un des sots contes que ce Damaste a débités, quand il nous le montre faisant un lac du golfe Arabique, et racontant comme quoi Diotime, fils de Strombichos, à la tête d'une ambassade athénienne, avait pu, en remontant le Cydnus depuis la Cilicie jusqu'au Choaspe, fleuve qui passe à Suses, atteindre cette ville en quarante jours : il tenait le fait soi-disant de Diotime en personne, et là-dessus il s'extasiait que le Cydnus pût ainsi couper et l'Euphrate et le Tigre pour aller se jeter dans le Choaspe ! 2. Mais cette critique n'est pas la seule qu'on puisse adresser ici à Ératosthène : on peut lui reprocher encore d'avoir, en parlant des différentes mers, présenté comme encore inexplorés de son temps des parages qui, au contraire, avaient été déjà visités et décrits avec une minutieuse exactitude; d'avoir aussi, lui qui nous engage à ne pas accepter trop aisément la première autorité venue, et qui nous déduit tout au long les motifs d'une pareille défiance en citant comme exemple tout ce qui se débite de fables sur le Pont et l'Adriatique, d'avoir, dis-je, plus d'une fois lui-même accepté de confiance le témoignage du premier venu. N'admet-il pas ainsi, sur la foi d'autrui, que le golfe d'Issus représente le point le plus oriental de notre mer, quand Dioscurias, au fond du Pont-Euxin, est d'après lui-même, d'après le Stadiasme, qu'il a lui-même dressé et calculé, de près de trois mille stades plus avancé vers l'est? Et dans sa description de la partie septentrionale ou partie extrême de l'Adriatique n'admet-il pas également toutes les fables imaginables? Ne se montre-t-il pas tout aussi crédule pour ce qu'on a pu dire de la région située au delà des colonnes d'Hercule, signalant dans ces parages lointains une île Cerné et mainte autre terre, qui ne se retrouvent plus aujourd'hui nulle part, comme on le verra, quand nous en reparlerons dans 1a suite? Autre critique : après avoir dit en certain endroit que, dès les temps les plus anciens, les hommes naviguaient, soit comme pirates, soit comme marchands, non pas il est vrai en pleine mer, mais le long des côtes, témoin Jason, que nous voyons à un moment donné quitter ses vaisseaux et des rivages de la Colchide s'en aller guerroyer au fond de l'Arménie et de la Médie, il nie plus loin que jamais les anciens aient osé naviguer dans l'Euxin ni longer les côtes de la Libye, de la Syrie et de la Cilicie. Or, si par le nom d'anciens Ératosthène a entendu désigner des générations antérieures à tous nos souvenirs, dans ce cas-là vraiment je me soucie assez peu de savoir si les anciens ont navigué ou non et de dire d'une façon plutôt que de l'autre; mais a-t-il voulu parler de générations dont nous ayons gardé mémoire chacun alors dira sans hésiter que les anciens, tout au contraire, paraissent avoir accompli et par terre et par mer de plus longs voyages que les modernes, s'il faut s'en rapporter du moins à ce que la tradition nous apprend de Bacchus, d'Hercule, de Jason lui-même et aussi des héros qu'Homère a chantés, tels qu'Ulysse et Ménélas. Il y a lieu de croire également que Pirithoüs et Thésée avaient accompli quelque lointaine et pénible expédition, pour que la tradition leur ait attribué l'honneur d'avoir visité l'Hadès ou sombre empire, et les Dioscures aussi, pour qu'ils aient mérité d'être appelés les Gardiens de la mer et les Sauveurs du marin. Tout le monde connaît en outre la thalassocratie de Minos et le grand périple des Phéniciens qui, peu de temps après la guerre de Troie, franchirent les colonnes d'Hercule, en explorèrent les abords et la côte de Libye jusqu'à moitié environ de sa longueur, fondant partout des villes sur leur passage. Et le Troyen Énée, et Anténor, et tant d'autres héros que l'issue de la guerre de Troie dispersa par toute la terre, peut-on raisonnablement ne pas les comprendre au nombre des anciens? Il était arrivé aux Grecs, aussi bien qu'aux barbares, par suite de la prolongation des hostilités, de perdre et ce qu'ils possédaient chez eux et ce que la guerre elle-même leur avait rapporté, si bien qu'après la chute d'Ilion les vainqueurs avaient dû définitivement se tourner vers la piraterie, et plus encore que les vainqueurs ceux des vaincus que la guerre avait épargnés. De là le grand nombre de villes fondées, dit-on, par ceux-ci sur tout le littoral et parfois même dans l'intérieur des terres situées par delà la Grèce. 3. Autre chose encore : de l'exposé des progrès faits dans la connaissance de la terre habitée postérieurement à Alexandre et de son vivant déjà, Ératosthène passe à la discussion scientifique de la figure de la Terre, mais non plus seulement de la terre habitée, ce qui eût été pourtant plus rationnel dans un traité dont la terre habitée était l'objet spécial: la figure qu'il entreprend de décrire embrasse la terre entière. Nous ne voulons pas dire que ce côté général de la question dût être absolument négligé, mais il fallait ne le traiter qu'en son lieu et place. Ératosthène nous montre donc la Terre, la Terre entière, affectant la forme d'une sphère, non pas à vrai dire d'une sphère faite au tour : il constate que sa surface présente mainte inégalité sensible. Mais à ce propos il allègue la quantité infinie d'altérations partielles que ladite figure éprouve par le fait des eaux, du feu, des tremblements ou secousses intérieures, des exhalaisons de vapeurs et d'autres causes analogues. Or, ici encore, il méconnaît l'ordre logique, car la forme sphéroïdale pour la terre entière résulte de la constitution même de l'univers, et les changements partiels qu'il cite ne sauraient altérer en rien la figure générale de la terre, de si imperceptibles accidents disparaissant naturellement dans une si grande masse : tout ce qu'ils peuvent faire, c'est de modifier dans sa disposition telle ou telle partie de notre terre habitée, les différentes causes qui les produisent étant toujours purement locales. 4. [Relativement à ces changements], une question se présente, qui a, suivant lui, particulièrement exercé la sagacité des philosophes, c'est comment il se peut faire qu'à deux et trois mille stades de la mer, dans l'intérieur même des terres, on rencontre en maints endroits quantité de coquilles, de valves, de chéramides, ainsi que des lacs d'eau saumâtre, notamment aux environs du temple d'Ammon et sur toute la route qui y mène, laquelle n'a pas moins de trois mille stades de longueur. « Il y a là en effet, dit il, comme un immense dépôt de coquilles ; le sel aujourd'hui encore s'y trouve en abondance et l'eau de la mer elle-même à l'état de sources jaillissantes; on y rencontre en outre force débris d'embarcations ayant évidemment tenu la mer, mais que les gens du pays prétendent avoir été vomis là par quelque fissure ou déchirement du sol, et jusqu'à de petites stèles surmontées de figures de dauphins et portant l'inscription suivante: DES THÉORES DE CYRÈNE. » Puis à ce propos il cite, et même avec éloge, l'opinion émise par Straton, le philosophe physicien, ainsi que celle de Xanthus de Lydie. Xanthus, lui, rappelait qu'au temps d'Artaxerxès une grande sécheresse était survenue, qui avait tari les fleuves, les lacs et les puits, qu'en maints endroits, tous situés fort avant dans les terres, et par conséquent bien loin de la mer, il avait pu observer de ses yeux des gisements de pierres ayant, la forme de coquillages ou portant l'empreinte de pétoncles et de chéramides, ainsi que des lacs d'eau saumâtre, en pleine Arménie chez les Matiènes et dans la basse Phrygie, et de ces différents faits il concluait que la mer avait dû se trouver naguère à la place où sont aujourd’hui ces plaines. Quant à Straton, qui, au jugement d'Ératosthène avait poussé plus loin encore l'explication ou étiologie du phénomène, il commençait par émettre le doute que l'Euxin eût eu primitivement cette ouverture près de Byzance : suivant lui, c'étaient les eaux des fleuves, ses tributaires, qui avaient forcé le passage et ouvert cette communication de l'Euxin avec la Propontide et l'Hellespont; puis le même effet s'était produit dans notre mer : là aussi le passage entre les colonnes d'Hercule avait été frayé violemment, le tribut des fleuves ayant grossi la mer outre mesure, et, par suite de l'écoulement des eaux, toutes les parties basses de ladite mer étaient restées découvertes, ce que Straton expliquait en faisant remarquer, d'abord, que le fond de la mer extérieure et celui de la mer intérieure n'ont pas le même niveau, et, en second lieu, qu'il existe présentement encore une espèce de chaîne ou de bande sous-marine, s'étendant des côtes d'Europe à celles de Libye, comme pour prouver qu'anciennement les deux mers ne faisaient point un seul et même bassin. Il ajoutait que le Pont est tout parsemé de bas-fonds, et que les mers de Crète, de Sicile et de Sardaigne, au contraire, sont extrêmement profondes, et il attribuait cette différence au grand nombre et à l'importance des fleuves qui débouchent précisément du nord et à l'est et envasent les parages du Pont, tandis que les autres mers n'ont rien qui altère leur profondeur. La même cause, à l’entendre, expliquait comment les eaux dans la mer du Pont sont moins salées qu'ailleurs et comment s'est formé le courant qui les emporte dans le sens naturellement de la pente ou inclinaison du fond. Il lui semblait même qu'avec le temps ces atterrissements des fleuves, ses tributaires, devaient finir par combler le Pont tout entier. « Car déjà, dit-il, sur la rive gauche, près de Salmydessus notamment, et des points que les marins désignent sous le nom de Stéthé, dans le voisinage de l'Ister et du désert de Scythie, cette mer tend à se convertir en bas-fonds marécageux. » Il pouvait se faire aussi, suivant lui, que le temple d'Ammon s'élevât primitivement sur le bord de la mer et que l'écoulement ou le retrait de celle-ci l'eût rejeté dans l'intérieur des terres, là où nous le voyons actuellement. Straton conjecturait même à ce propos que l'oracle d'Ammon n'avait dû qu'à sa situation maritime d'être devenu si célèbre et si universellement connu : « Autrement, disait-il, et avec l'extrême éloignement où se trouve ce temple aujourd'hui de la mer, comment concevoir raisonnablement le degré d'illustration et de gloire attachées à son nom? » L'Égypte, elle aussi, avait dû être primitivement couverte par la mer jusqu'aux marais qui bordent aujourd'hui Péluse, le mont Casius et le lac Sirbonis, et la preuve qu'il en donnait, c'est que, de son temps encore, quand on creusait dans les salines naturelles qui se trouvent en Égypte, le fond des excavations était toujours sablonneux et rempli de débris de coquilles, comme si effectivement cette contrée eût été naguère couverte par la mer et qu'il fallût voir dans tout le canton du Casius et dans celui des Gerrhes d'anciens bas-fonds contigus par le fait au golfe Érythréen et que la mer, en se retirant, aurait découverts, n'y laissant subsister que le lac Sirbonis, lequel même, avec le temps, aurait aussi rompu ses digues et commencé à dégénérer en marais. De même enfin les bords du lac Moeris, par leur aspect, lui rappelaient plutôt les côtes d'une mer que les rives d'un fleuve. Or, que la mer ait anciennement et pendant des périodes plus ou moins longues couvert, puis laissé à sec en se retirant une bonne partie des continents, le fait en soi n'a rien d'inadmissible. On peut admettre également que toute la partie de la surface terrestre aujourd'hui encore cachée sous les mers présente des inégalités de relief ou de niveau ni plus ni moins, en vérité, que la partie aujourd'hui découverte et que nous habitons, et qu'elle se trouve, comme celle-ci, sujette à tous les changements, à toutes les révolutions signalées par Ératosthène. Et, cela étant, on ne voit pas qu'il y ait, dans le raisonnement de Xanthus du moins, rien d'absurde à relever. 5. En revanche, ne pourrait-on pas objecter à Straton que, libre de choisir entre beaucoup de causes réelles, il a négligé celles-ci pour en invoquer de chimériques? La première, en effet, qu'il reconnaisse, c'est que le lit de la mer intérieure et celui de la mer extérieure ne sont point de niveau et partant que les deux mers n'ont pas la même profondeur. Or, si la mer s'élève, puis s'abaisse, si elle inonde certains lieux et qu'ensuite elle s'en retire, cela ne tient pas à ce que ses différents fonds sont les uns plus bas, les autres plus élevés, mais à ce que les mêmes fonds tantôt s'élèvent et tantôt s'abaissent, et à ce que la mer en même temps se soulève ou s'affaisse aussi, puisque, une fois soulevée, elle déborde nécessairement, et que baissant ensuite elle rentre naturellement dans son lit primitif. Autrement, il faudrait que tout accroissement subit de la mer donnât lieu à une inondation, qu'il y en eût une, par exemple, à chaque marée ou à chaque crue des fleuves, ses tributaires, la masse de ses eaux éprouvant dans le premier cas un déplacement total, et, dans le second, une augmentation de volume. Mais ces augmentations [causées par les crues des fleuves] ne sont ni fréquentes ni subites, et, quant aux marées, elles ne durent guère, leur mouvement d'ailleurs est réglé, et l'on ne voit pas, dans notre mer, non plus qu'ailleurs, qu'elles causent des inondations. Reste donc à s'en prendre à la nature même du fond, soit du fond sous-marin, soit du fond temporairement submergé, mais plutôt du fond sous-marin, parce qu'il est plus mobile et qu'en général ce qui est humide est sujet à éprouver des changements plus rapides, comme offrant moins de résistance à l'action des vents, cause première de tous ces changements. Mais, je le répète, ce qui produit l'effet en question, c'est que les mêmes fonds tantôt s'élèvent et tantôt s’affaissent, et non pas que les différends fonds sont les uns plus élevés, les autres moins. Que si, maintenant, Straton s'y est laissé tromper, c'est qu'il croyait apparemment que ce qui arrive pour les fleuves se produit aussi dans la mer, à savoir que le courant qu'on y observe dépend aussi de l'élévation du point de départ. Sans quoi il n'a pas attribué le courant du détroit de Byzance à la disposition du fond, qui se trouve plus élevé, suivant lui, dans l'Euxin que dans la Propontide et dans la mer qui lui fait suite, et cela, soi-disant, parce que le limon, que charrient les fleuves, comble peu à peu le lit de l'Euxin, et qu'à mesure qu'il convertit cette mer en bas-fond il précipite ses eaux plus violemment vers les mers extérieures. Sans compter que, comme il applique ou transporte le même raisonnement à notre mer, prise dans son ensemble, et comparée à cette autre mer qu'on nomme extérieure [par rapport à elle], et qu'il conclut l'exhaussement du fond de la Méditerranée au-dessus du fond de la mer Atlantique de cette circonstance que la Méditerranée reçoit un grand nombre de tributaires et une quantité proportionnelle de limon, il faudrait, ce semble, qu'on eût observé qu'aux Colonnes d'Hercule et près de Calpé le courant est absolument le même qu'auprès de Byzance. Mais je ne veux pas insister sur cet argument, car on ne manquerait pas de me dire que le même courant effectivement se produit aux colonnes d'Hercule, seulement qu'il s'y perd dans le mouvement en sens contraire du flux et du reflux et échappe ainsi à l'observation. 6. En revanche, je demanderai si rien n'empêchait, avant l'ouverture du détroit de Byzance, que le fond de l'Euxin, alors plus bas apparemment que celui de la Propontide et de la mer qui y fait suite, ne s'exhaussât par le fait des atterrissements des fleuves, soit que l'Euxin formât déjà une mer proprement dite ou simplement un lac plus grand que le Mæotis. Que si l'on m'accorde ce premier point, je poserai une autre question : je demanderai s'il n'est pas probable qu'entre les deux surfaces adjacentes du Pont-Euxin et de la Propontide les choses se sont passées de la façon suivante, que , tant que le niveau a été le même, l'équilibre parfait des eaux et l'égalité de pression ont rendu impossible toute irruption violente d'un bassin dans l’autre; mais qu'une fois le niveau exhaussé dans le bassin intérieur la barrière a été forcée et le trop-plein des eaux dudit bassin expulsé hors de son sein, après quoi la mer extérieure s'est trouvée ne plus former avec ce bassin intérieur qu'un seul et même courant et a pris naturellement son niveau, tandis que ce bassin lui-même (que ses eaux fussent auparavant déjà celles d'une mer proprement dite ou encore celles d'un lac) devenait, par le fait de son mélange avec les eaux de la mer et à cause de la prédominance naturelle de celles-ci, devenait mer à son tour? Et si l'on m'accorde ce second point comme le premier, n'est-ce pas la preuve que rien n'aurait pu empêcher le courant actuel de se former et qu'il ne provient par conséquent ni de l'élévation relative ni de la pente ou inclinaison du fond, comme le prétendait Straton? 7. Appliquons maintenant le même raisonnement à l'ensemble de notre mer et à la mer extérieure et n'attribuons plus aux fonds mêmes et à leur inclinaison, mais bien au tribut des fleuves, la cause du courant ou écoulement en question. Rien n'empêcherait, à la rigueur, et comme le veulent Straton et Ératosthène, dans le cas même où toute notre mer n'aurait été primitivement qu'un lac, rien n'empêcherait que, grossi par les fleuves, ses tributaires, ledit lac n'eût fini par déborder et par faire irruption à travers le détroit des colonnes d'Hercule, comme du haut d'une cataracte, dans la mer extérieure, qui, grossie à son tour et accrue incessamment par ses eaux, en serait venue par la suite des temps à ne plus former avec lui qu'un seul et même courant, une seule et même surface, lui communiquant en revanche, et par l'effet d'une prépondérance toute naturelle, sa propre qualité de mer. En revanche, il est absolument contraire aux principes de la physique d'assimiler la mer aux fleuves, ceux-ci coulant suivant la pente de leur lit, tandis que la mer, elle, n'a point de pente. Les détroits, qui plus est, n'ont point un courant uniforme, et c'est là une circonstance qui ne saurait tenir à l'exhaussement du fond de la mer par suite des atterrissements des fleuves. Ces atterrissements, en effet, ne se produisent qu'aux bouches des fleuves, témoin les Stéthé aux bouches de l'Ister, le désert des Scythes et les terrains de Salmydessus, que d'autres torrents du reste concourent à former; témoin encore la côte de Colchide, terrain sablonneux, bas et mou, aux bouches du Phase, et, dans le voisinage des bouches du Thermodon et de l'Iris, tout le territoire de Thémiscyre, autrement dit la plaine des Amazones, ainsi que la plus grande partie de la Sidène, pour ne point parler d'autres alluvions fluviales. Car tous les fleuves, à l'imitation du Nil, tendent à combler le bras de mer situé en avant de leur embouchure, plus ou moins vite seulement : moins vite, quand leurs eaux ne charrient qu'une faible quantité de limon; plus vite, quand ils ont un long parcours, que le sol du pays qu'ils traversent est naturellement mou et qu'ils se grossissent d'un grand nombre de torrents, ce qui est le cas, par exemple, du Pyrame, lequel a, comme on sait, considérablement accru le territoire de la Cilicie et a donné lieu à ce fameux oracle : « Les générations qui verront ces choses verront aussi le Pyrame au cours impétueux, à force d'avoir reculé les limites du continent, atteindre enfin les bords sacrés de Chypre (117). »
8. Une circonstance, maintenant, empêche que le limon ainsi charrié par les fleuves ne soit emporté tout d'abord au sein de la pleine mer : c'est que la mer, dans le mouvement de va-et-vient qui lui est propre, le repousse toujours en arrière. La mer, en effet, ressemble aux créatures animées, et, comme celles-ci ne vivent qu'en aspirant et en expirant sans cesse l'air atmosphérique, de même la mer, par un mouvement alternatif, semble sans cesse arrachée, puis rendue à elle-même. Pour s'en convaincre, on n'a qu'à se tenir sur le rivage à l'heure du flot: dans le même moment, vous voyez la mer vous baigner les pieds, les laisser à sec, puis les baigner encore et ainsi de suite sans interruption. Mais avec ce mouvement oscillatoire le flot ne laisse pas que d'avancer, et, même quand il est le plus paisible, il acquiert en avançant une force plus grande, qui lui permet de rejeter sur le rivage tous les corps étrangers : « Du sein de la mer il expulse les algues, dont l'amas bientôt jonche au loin le rivage (118). » A vrai dire, par un fort vent de mer, l'effet est plus sensible, mais il se produit également par les temps de calme et avec les vents de terra : même quand il a le vent contraire, le flot n'en continue pas moins à se porter vers la terre, parce qu'il obéit en cela à un certain mouvement, inhérent à la nature même de la mer. C'est là du reste l'effet que le poète a décrit dans le passage suivant, « Le flot se recourbe, et, couronnant l'extrémité du rivage, rejette au loin l'écume salée (119), » ainsi que dans cet autre vers, « Les rivages retentissent des efforts de la mer vomissant son écume (120). » 9. Le flot, dans son mouvement progressif, acquiert donc la force suffisante pour expulser hors de son sein tout corps étranger, et l'on appelle proprement épuration de la mer cet effort par lequel elle jette à la côte les cadavres et les débris, quels qu'ils soient, des navires naufragés. En revanche, dans son mouvement de retraite, la mer n'a plus assez de force pour que les cadavres, le bois, voire ce qu'il y a de plus léger, le liège, rejetés sur le rivage par ce premier effort du flot, soient, par un effort contraire, remportés au large, même des parties du rivage les moins reculées où le flot aura atteint (121). Eh bien! Le limon des fleuves et les eaux qui en sont chargées se trouvent repoussés absolument de la même façon par le flot, sans compter que leur propre poids contribue encore à les précipiter plus vite contre la terre, au pied de laquelle ils se déposent avant d'avoir pu atteindre le large, parce qu'à une faible distance au delà de son embouchure le courant d'un fleuve perd toute sa force. Et c'est ce qui fait qu'un jour la mer peut se trouver comblée tout entière à partir de ses rivages, pour peu qu'elle continue à recevoir ainsi sans interruption les alluvions des fleuves : dans ce cas-là, en effet, rien ne pourrait empêcher un tel résultat de se produire, supposions-nous le Pont plus profond encore que la mer de Sardaigne, qui, avec les mille orgyes que lui prête Posidonius, passe pour la mer la plus profonde qu'on ait mesurée jusqu'ici. 10. On peut donc, en somme, se montrer moins empressé qu'Ératosthène d'adopter l'explication de Straton; et peut-être vaudrait-il mieux rattacher le phénomène en question à un ordre de faits plus sensibles, du genre de ceux, si l'on peut dire, auxquels nous assistons tous les jours. Les inondations, par exemple, les tremblements de terre, les éruptions, les soulèvements du sol sous-marin, d'une part, et d'autre part les affaissements ou éboulements subits sont autant de causes qui peuvent avoir également pour effet les unes d'exhausser, les autres d'abaisser le niveau de la mer. Et comme on ne s'expliquerait point que ces sortes de soulèvements fussent possibles pour des masses ou matières volcaniques et pour de petites îles, sans l'être aussi pour des îles de grande étendue, possibles pour les îles en général, sans l'être aussi pour les continents, de même on devra admettre la possibilité des grands comme des petits affaissements; d'autant mieux que la tradition parle de cantons entiers et de villes, comme voilà Bura, Bizoné et plusieurs autres, qui auraient été abîmées et complètement englouties à la suite de tremblements de terre. Ajoutons qu'on n'est pas plus autorisé à voir dans la Sicile un fragment détaché de l'Italie qu'une masse soulevée par les feux de l'Etna, et qu'il en est de même pour les îles des Lipariens et les Pithèkuses. 11. N'est-il pas divertissant, maintenant, de voir Ératosthène, un mathématicien, refuser de ratifier le principe posé par Archimède dans son traité des Corps portés sur un fluide, à savoir que « la surface de tout liquide à l'état de repos affecte la forme d'une sphère ayant même centre que la terre », proposition admise pourtant par quiconque a la moindre notion des mathématiques? Lui, tout en reconnaissant que notre mer intérieure est une et continue, nie que ses eaux soient de niveau, même sur des points très rapprochés les uns des autres. Et qui appelle-t-il en garantie d'une si grossière erreur? Des architectes, bien que les mathématiciens aient toujours proclamé l'architecture partie intégrante des mathématiques. Il raconte à ce propos comment Démétrius, ayant entrepris de couper l'isthme du Péloponnèse pour ouvrir une route nouvelle à la navigation, en fut empêché par ses architectes qui, après avoir bien tout mesuré et relevé, vinrent lui déclarer que le niveau de la mer dans le golfe de Corinthe se trouvait surpasser le niveau de la mer à Cenchrées et que, s'il coupait l'isthme intermédiaire, les eaux du golfe de Corinthe faisant irruption dans tout le détroit d'Égine, Égine elle-même et les îles voisines seraient submergées, sans que la navigation d'ailleurs retirât un grand profit du nouveau passage. Or, cette inégalité de niveau est, suivant Ératosthène, ce qui explique le courant des euripes en général, et en particulier celui du détroit de Sicile, dont il compare les effets à ceux du flux et du reflux de l'Océan : « Deux fois en effet, dit-il, dans l'espace d'un jour et d'une nuit, ce courant change de direction, tout comme les eaux de l'Océan montent et baissent deux fois dans le même espace de temps, il correspond au flux de l'Océan, quand de la mer Tyrrhénienne il se porte vers celle de Sicile, et, comme on dirait alors qu'il passe d'un niveau plus élevé à un niveau plus bas, on le désigne sous le nom de courant descendant, et ce qui constitue la correspondance en question, c'est qu'il prend et quitte cette direction juste aux mêmes heures où commence et cesse le flux, la prenant au lever et au coucher de la lune pour la quitter avec le passage soit supérieur soit inférieur de cet astre au méridien; il correspond au reflux, maintenant, quand il suit la direction contraire, dite courant remontant, laquelle commence, ainsi que le reflux, avec l'un ou l'autre des passages de la lune au méridien, pour finir quand cet astre atteint l'un ou l'autre des points où il se lève et se couche. » 12. La question du flux et du reflux de l'Océan a été traitée tout au long par Posidonius et par Athénodore. Pour ce qui est des courants alternatifs des détroits, autre question qui demande à être traitée plus scientifiquement que nous ne pouvons le faire dans le présent ouvrage, il nous suffira de dire qu'il n'y a rien d'uniforme dans la manière dont ces courants se comportent au sein des différents détroits, à en juger du moins par l'apparence : autrement, comment expliquer que, dans l'espace d'un jour, le courant du détroit de Sicile, ainsi que le marque Ératosthène, change deux fois de direction et celui de l'euripe de Chalcis sept fois, tandis que le courant du détroit de Byzance n'en change pas du tout et poursuit invariablement sa marche de la mer du Pont vers la Propontide, sauf de temps à autre quelques interruptions, pendant lesquelles, au dire d'Hipparque, il demeurerait complètement stationnaire? Du reste, fût-il uniforme, ce phénomène ne saurait encore avoir pour cause la prétendue inégalité qu'indique Ératosthène dans le niveau des mers situées de l'un et de l'autre côté du détroit, inégalité qui n'existerait même pas dans les fleuves, sans leurs cataractes. Encore les fleuves à cataractes n'ont-ils pas de courant alternatif, mais bien un courant constant dirigé vers le fond le plus bas, et cela uniquement parce que leur lit est en pente et que leur surface est inclinée. On voit donc que pour les détroits il n'y a plus non seulement de courant alternatif, mais de suspension et de stagnation possible, du moment qu'on admet qu'ils puissent faire communiquer deux mers de niveaux différents, l'une plus élevée, l'autre plus basse. Peut-on bien dire, maintenant, que la surface de la mer soit inclinée, surtout avec l'hypothèse généralement admise de la sphéricité des quatre corps dits élémentaires? Car autre chose est la terre, qui, par suite de sa constitution solide, peut offrir à sa surface des cavités et des saillies permanentes, autre chose est l'eau, qui, mise en mouvement par son seul poids, se répand également à la surface de la terre et y prend effectivement son niveau suivant la loi marquée par Archimède. 13. Ératosthène revient ensuite sur ce qu'il a déjà dit au sujet d'Ammon et de l'Égypte, il ajoute qu'à en juger par les apparences la mer a dû couvrir anciennement les environs même du mont Casius, tout le canton actuel des Gerrhes formant alors une suite de bas-fonds, qui joignaient le grand golfe de la mer Érythrée, jusqu'au moment où, l'autre mer s'étant comme qui dirait resserrée, lesdits bas-fonds furent laissés à découvert. Mais cette expression que « les bas-fonds joignaient le golfe de la mer Érythrée » est amphibologique, puisque le mot joindre donne à la fois l'idée de la simple proximité et celle de la contiguïté même, c'est-à-dire, quand il est question d'eaux, l'idée d'un confluent ou de la réunion de deux courants en un seul. Pour moi, le vrai sens de l'expression est que ces bas-fonds s'étendaient jusque dans le voisinage de la mer Érythrée, quand le détroit des Colonnes se trouvait encore fermé, mais qu'une fois ce détroit ouvert, ils commencèrent à se retirer, le niveau de notre mer ayant naturellement baissé par suite de l'écoulement de ses eaux à travers le détroit des Colonnes Hipparque, lui, entend le mot joindre dans le sens d'un confluent véritable, qui se serait opéré entre notre mer, grossie et débordée, et la mer Érythrée, et partant de là il se demande pourquoi notre mer, du moment qu'elle se déplaçait par le fait de l'écoulement de ses eaux à travers le détroit, ne déplaçait pas du même coup et n'entraînait pas à sa suite la mer Érythrée désormais confondue avec elle, comment il a pu se faire au contraire que l'Érythrée ait conservé son même niveau sans baisser. « Car, ajoute-t-il, de l'aveu même d'Ératosthène, toute la mer extérieure ne forme qu'un seul et même courant, ou en d'autres termes la mer Hespérienne ou occidentale et la mer Érythrée ne font qu'une, ce qui implique comme conséquence forcée une hauteur de niveau égale à la fois dans la mer située par delà les Colonnes d'Hercule, dans l'Érythrée et aussi dans notre mer intérieure du moment qu'elle se trouve réunie avec l'Érythrée en un courant continu ». 14. Malheureusement Ératosthène peut répondre à cela qu'il n'a jamais rien dit de pareil, qu'il n'a jamais parlé d'un confluent véritable entre notre mer grossie du tribut des fleuves et la mer Érythrée, qu'il a parlé seulement d'une proximité plus grande entre ces deux mers; que, d'ailleurs, parce qu'une mer est une et continue, il ne s'ensuit pas qu'elle ait partout même hauteur et même niveau, témoin notre mer intérieure, qui n'est assurément pas la même au Léchée qu'à Cenchrées. Et notez qu'Hipparque pressentait déjà l'objection dans le traité qu'il a composé contre Ératosthène. Mais alors, dirons-nous, puisqu'il sait si bien à quoi s'en tenir sur la vraie pensée de son adversaire, qu'il le prenne donc sur ses propres allégations au lieu d'établir ainsi en thèse générale que quiconque fait une seule et même mer de toute la mer extérieure admet implicitement pour ladite mer un seul et même niveau partout. 15. Quand Hipparque, maintenant, déclare fausse l'inscription des théores cyrénéens trouvée sur ces figures de dauphins, la raison qu'il allègue ne nous semble guère convaincante : à l'entendre, bien que la fondation de Cyrène appartienne aux temps proprement historiques, nul historien n'a constaté la présence à aucune époque du temple d'Ammon sur le bord même de la mer. Qu'importe cependant qu'aucun historien n'ait mentionné le fait, si des indices certains, et, entre autres, l'érection votive de ces dauphins et l'inscription commémorative d'une théorie cyrénéenne, nous donnent lieu de conjecturer qu'il y eut un temps où le temple occupait effectivement une situation maritime. Autre chose : Hipparque admet que le fond de la mer en se soulevant a pu du même coup soulever la mer elle-même, assez pour qu'elle couvrît tout le pays intermédiaire jusqu'au temple, c'est-à-dire un espace de plus de 3000 stades; mais ailleurs il refuse d'admettre que la mer ait jamais pu s'exhausser assez pour que l'île de Pharos tout entière et une bonne partie de l'Égypte aient été cachées sous ses eaux, comme si le degré d'exhaussement [qu'il accordait tout à l'heure] n'eût pas suffi de reste pour que ces lieux-là aussi fussent complètement submergés. - « S'il était vrai, dit-il encore, que notre mer, avant l'ouverture du détroit des Colonnes d'Hercule, eût été par l'effet du tribut des fleuves aussi fort grossie que le prétend Ératosthène, il faudrait aussi qu'avant la rupture dudit détroit la Libye tout entière, avec la plus grande partie de l'Europe et de l'Asie, eussent disparu complètement sous les eaux; le Pont lui-même, ajoute-t-il, se serait par quelques points réuni à l'Adriatique, puisque l'Ister, à son point de départ dans la région du Pont, se divise en deux bras, et que, par suite d'une disposition particulière des lieux, il se déverse à la fois dans l'une et dans l'autre mers. » - Mais d'abord, l'Ister n'a pas sa source dans la région pontique, il part d'un point tout opposé situé dans les montagnes au-dessus de l'Adriatique ; en second lieu, il ne se déverse pas à la fois dans l'une et dans l'autre mer, mais seulement dans le Pont, et il ne se bifurque qu'à son embouchure même. Hipparque a donc reproduit là une erreur commune à quelques-uns de ses prédécesseurs, lesquels supposaient l'existence d'un fleuve, portant ce même nom d'Ister, qui se serait jeté dans l'Adriatique après s'être séparé de l'autre Ister, qui aurait même donné à toute cette partie de son bassin la dénomination d'Istrie et que Jason aurait descendu tout entier lors de son retour de Colchide. 16. Du reste, pour qu'on ne s'étonne plus autant de ces sortes de changements ou de révolutions, causes, avons-nous dit, de déluges et de cataclysmes du genre de ceux dont il a été question ci-dessus pour la Sicile, les îles d'Eole et les Pithèkuses, il convient de citer encore plusieurs faits analogues qui se produisent actuellement même ou qui se sont produits anciennement en des lieux différents de ceux-là. Tant d'exemples de même nature, mis à la fois sous les yeux du public, ne peuvent manquer en effet de mettre un terme au mélange de surprise et d'effroi qu'il éprouve. Actuellement, tout fait insolite le trouble et met en évidence l'ignorance profonde où il est encore des phénomènes naturels et des conditions générales de la vie; il se troublera par exemple au récit du phénomène observé naguère dans les parages des îles Théra et Thérasia, situées toutes deux dans ce bras de mer qui sépare la Crète de la Cyrénaïque, dont le chef-lieu, Cyrène, a même l'une d'elles, Théra, pour métropole, ou de tel autre phénomène observé dans des conditions toutes pareilles soit en Égypte, soit dans mainte localité de la Grèce. Entre Théra et Thérasia on vit jaillir du sein des flots, quatre jours durant, si bien que la mer bouillait à gros bouillons et que toute sa surface en paraissait embrasée, des flammes, dont l'effort, comparable à celui d'un levier, souleva peu à peu hors de l'abîme une île toute formée de matières ignées, et qui pouvait bien mesurer douze stades de circuit. L'éruption une fois calmée, les Rhodiens (c'était le temps où leur marine dominait dans ces parages) s'aventurèrent les premiers sur cette terre nouvelle et y construisirent même un temple en l'honneur de Neptune Asphalien. En Phénicie, d'autre part, Posidonius nous signale certain tremblement de terre, à la suite duquel une des villes au-dessus de Sidon fut engloutie tout entière, tandis que Sidon elle-même avait les deux tiers de ses maisons renversées, mais heureusement pas toutes à la fois, de sorte qu'on n'eut pas une grande perte d'hommes à déplorer. Les mêmes secousses, relativement assez faibles, furent ressenties dans toute la Syrie et s'étendirent même à plusieurs des Cyclades et jusqu'en Éubée : on vit là les eaux d'Aréthuse (il s'agit d'une des fontaines de Chalcis) tarir tout à coup, puis recommencer à sourdre quelques jours après, mais par une ouverture différente, et tout ce temps-là le sol ne cessa de trembler sur un point ou sur un autre, puis il finit par s'entrouvrir et vomit dans la plaine de Lélante un torrent de boue enflammée. 17. Il existe plus d'un recueil de faits de ce genre ; mais celui de Démétrius de Scepsis nous suffira amplement, pour peu que nous sachions y puiser avec discernement. Or, à propos de ces vers d'Homère : « Ils atteignirent tous deux les limpides fontaines d'où s'échappe par une double source l'impétueux Scamandre : des deux sources, l'une est chaude, l'autre jaillit, en été, aussi froide que la grêle (122). » Démétrius nie qu'il y ait lieu de s'étonner si aujourd'hui, tandis que la source d'eau froide subsiste encore, celle d'eau chaude a disparu. « La cause en est, dit-il, que l'eau chaude naturellement s'épuise et se perd. » Et, partant de là, il rappelle ce que Démoclès, dans ses Histoires, a dit des terribles tremblements de terre ressentis anciennement en Lydie, en Ionie et jusqu'en Troade, lesquels engloutirent des villages entiers, bouleversèrent le mont Sipyle (c'était du temps du roi Tantale)..., convertirent de simples marécages en lacs et submergèrent Troie sous les eaux de la mer. Par une cause analogue l'île de Pharos, la Pharos d'Égypte, située naguère en pleine mer, n'est plus aujourd'hui à proprement parler qu'une presqu'île, et Tyr et Clazomène pareillement. Nous-même enfin, lors de notre voyage à Alexandrie, en Egypte, nous avons vu la mer, aux environs de Péluse et du mont Casius, se soulever tout à coup, inonder ses rivages et faire de la montagne une île, si bien qu'on allait en bateau sur la route qui passe au pied du Casius et mène en Phénicie. Il n'y aurait donc rien d'étonnant, qu'un jour l'isthme, qui sépare la mer d'Égypte de la mer Érythrée, vint, en se rompant ou en s'affaissant, à se changer en détroit et à mettre ainsi en communication directe les deux mers intérieure et extérieure, comme il est arrivé pour le détroit des Colonnes d'Hercule. Nous avons bien déjà, au début de notre livre, touché quelques mots des phénomènes de ce genre, mais il convient de réunir le tout ensemble pour que les esprits fortifiés ainsi contre le doute croient dorénavant à certaines œuvres de la nature et aux changements de toute sorte que celle-ci opère à la surface du globe. 18. Si ce qu'on dit est vrai, le Pirée, dans le principe, aurait été aussi une île, et de cette situation par delà le rivage (πέραν τῆς ἀκτῆς) lui serait venu le nom qu'il porte encore. Leucade, au contraire, qui formait primitivement une presqu'île, un promontoire, ne serait devenue une île que parce que les Corinthiens coupèrent l'isthme dudit promontoire : on prétend, en effet, que c'est Leucade que désignent ces paroles de Laërte : « Tel que j'étais, quand j'escaladai les forts remparts de NÉRITE, promontoire d'Épire [autrement dit de terre ferme (123)].» Il y a donc eu ici une coupure pratiquée de main d'homme, c'est-à-dire l'inverse de ce que la main de l'homme a fait ailleurs, en élevant des môles ou en jetant des ponts comme celui qui relie aujourd'hui au continent l'île située en avant de Syracuse, et qui a remplacé l'ancien môle, dont parle Ibycus, fait de cailloux ramassés au hasard, ou d'eclectes, pour nous servir de l'expression même du poète. Ou cite encore le fait de ces deux villes, Bura et Hélicé, qui disparurent un jour en s'abîmant l'une dans les entrailles de la terre, et l'autre au sein des flots, et, par opposition, cet autre fait survenu dans le voisinage de Méthone, au fond du golfe Hermionique, d'une montagne de sept stades de hauteur (124), qui surgit brusquement à la suite d'une éruption ignée : inaccessible tout le jour à cause de son extrême chaleur et de l'odeur de soufre qu'elle exhalait, elle répandait, au contraire, la nuit, une odeur agréable (125), et, avec de vives clartés qui rayonnaient au loin, une chaleur tellement intense que la mer jusqu'à une distance de cinq stades bouillait à gros bouillons, et qu'à vingt stades ses eaux étaient encore troubles et agitées, sans compter que tout cet espace intermédiaire demeura comme comblé de fragments de rochers aussi hauts que des tours. Ailleurs, c'est le lac Copals qui engloutit Arné et Midée, deux villes que le poète a nommées dans son Catalogue des vaisseaux : « Et ceux qui habitaient Arné aux riches vignobles et ceux qui occupaient Midée (126). » Tout porte à croire aussi que le lac Bistonis et celui qu'on nomme aujourd'hui l'Aphnitis submergèrent jadis différentes villes attribuées par les uns à la Thrace, mais par les autres au pays des Trères, par la raison sans doute que ce peuple a longtemps vécu mêlé aux Thraces. Nommons encore Artemita, qui, après avoir fait partie notoirement des îles Echinades, s'est rattachée au continent, comme ont fait de leur côté, et par suite des atterrissements du fleuve sur ce point, certains îlots du groupe voisin de l'Achéloüs, et comme, au dire [d'Hérodote (127)], les derniers îlots du même groupe tendent chaque jour à le faire. L'Etolie compte pareillement plusieurs caps ou promontoires, qui ont commencé par être des îles. D'autre part, dans l'île actuelle d'Asteria on aurait peine aujourd'hui à reconnaître l'Asteris d'Homère, « Cette île rocheuse, au milieu de la mer, cette petite Actérie, avec son double port, abri sûr ouvert aux vaisseaux (128), » car aujourd'hui elle n'offre pas même un bon ancrage. Et l'on ne retrouve pas davantage à Ithaque l'Antre et le Nymphée, tels que le poète les a décrits. Mais ne vaut-il pas mieux, je le répète, croire à un changement opéré par la nature que d'accuser le poète d'avoir ignoré ou altéré volontairement l'état réel des lieux en vue du merveilleux. Du reste, la chose est incertaine, et je l'abandonne comme telle au libre examen de chacun. 19. Antissa aussi était primitivement une île, Myrsile le dit positivement, et d'ailleurs, Lesbos en ce temps-là s'appelant Issa, on n'avait pu donner ce nom d'Antissa qu'à une île située vis-à-vis : aujourd'hui Antissa est une des villes de Lesbos. Quelques auteurs vont plus loin, ils affirment que Lesbos n'est elle-même qu'un fragment arraché de l'Ida, tout comme Prochyta et Pithécusse ont pu être arrachées du cap Misènes, et Caprées de l'Athenæum, tout comme la Sicile a pu être arrachée du territoire de Rhegium et l'Ossa de l'Olympe. Sur d'autres points, il s'est produit des changements analogues : ainsi naguère, en Arcadie, le Ladon a suspendu son cours; en Médie, la ville de Mages, s'il faut en croire Douris, a reçu le nom qu'elle porte en souvenir d'un tremblement de terre, à la suite duquel, le sol s'étant déchiré (δαγεῖσα) aux environs des Pyles Caspiennes, un grand nombre de villes et de bourgades furent détruites, en même temps que le cours de plusieurs rivières s'en trouvait plus ou moins changé. Touchant l'Eubée aussi, que lit-on dans son drame satyrique d'Omphale (129)? « Les flots de l'étroit Euripe ont séparé la terre Eubéenne de la Béotie, en s'ouvrant un passage à travers les rochers a avancés du rivage. » 20. Démétrius de Callatis, à son tour, dans le relevé qu'il a fait de tous les tremblements de terre ressentis anciennement sur les divers points de la Grèce, nous apprend qu'une portion notable des îles Lichades et du Cenaeum fut engloutie, et que les sources chaudes d'Aedepse et des Thermopyles, après s'être arrêtées trois jours durant, recommencèrent à couler, mais que celles d'Aedepse dans l'intervalle avaient changé d'ouvertures ou d'issues; qu'à Echinos, à Phalares, à Héraclée de Trachis, il y eut aussi un nombre considérable de maisons renversées; que Phalares même fut en quelque sorte rasée tout entière jusqu'au niveau du sol; qu'un même désastre eut lieu à Lamia et à Larisse ; que Scarphée se vit arrachée de ses fondements et n'eut pas moins de dix-sept cents de ses habitants noyés; qu'à Thronium il périt aussi moitié et plus de ce nombre : les flots, débordés, s'étaient partagés en trois torrents, dont l'un s'était porté sur Scarphée et sur Thronium, l'autre vers les Thermopyles, et le troisième à travers la plaine jusqu'à Daphnés en Phocide ; puis les sources des fleuves avaient tari pendant quelques jours, le Sperchius avait changé de cours transformant les routes en canaux navigables; le Boagrius avait quitté son ancien lit et envahi une autre vallée ; Alopé, Cynûs, Opûs avaient eu plusieurs de leurs quartiers gravement endommagés; la citadelle d'Oeum, qui domine cette dernière ville, s'était écroulée, ainsi qu'une partie de l'enceinte d'Elatée; de plus, à Alpône, en pleine célébration des Thesmophories, vingt-cinq jeunes filles, qui étaient montées au haut d'une des tours du port pour mieux jouir du coup d'œil, avaient été entraînées dans la ruine de l'édifice et précipitées à la mer. Enfin, l'on rapporte que l'île d'Atalante, près de l'Eubée, s'ouvrit juste par le milieu et livra passage aux vaisseaux, qu'en certains endroits l'inondation y couvrit la plaine jusqu'à une distance de vingt stades, et qu'une trirème y fut enlevée du chantier où elle était et lancée par-dessus le rempart. 21. Ce n'est pas tout : aux changements qui précèdent, certains auteurs ont ajouté ceux qu'ont produits les migrations des peuples, dans l'intention apparemment de développer en nous encore davantage cette athaumastie ou insensibilité parfaite, que Démocrite et en général tous les philosophes préconisent comme l'accompagnement ordinaire d'une âme intrépide, imperturbable et sereine. Parmi ces migrations, ils citent tout d'abord celles des Ibériens de l'Occident vers les régions situées au-dessus du Pont et de la Colchide, où leurs possessions se trouvent séparées de l'Arménie par l'Araxe, au dire d'Apollodore, mais plutôt par le Cyrus et par les monts Moschiques (130) ; celles des Égyptiens vers l'Éthiopie et la Colchide; celles des Énètes des rivages de la Paphlagonie aux bords de l'Adriatique ; ou bien encore les migrations des Hellènes, Ioniens, Doriens, Achéens, Aeoliens; celles des Aaenianes, aujourd'hui limitrophes de l'Étolie mais qui, primitivement, habitaient aux environs de Dotium et au pied de l'Ossa, en compagnie des Perrhèbes, sans oublier celles des Perrhèbes eux-mêmes, qui, eux aussi, avaient quitté leur demeure première. Le présent ouvrage aussi est plein d'exemples de migrations semblables : il en est bien assurément, dans le nombre, que tout le monde connaît; mais l'histoire des migrations des Cariens, des Trères, des Teucriens et des Galates, non plus que l'histoire des expéditions lointaines des conquérants, tels que Madys le Scythe, Théarco l'Éthiopien et Cobus le Trère, ou de celles des rois d'Égypte Sésostris et Psammitichus, et des rois de Perse, depuis Cyrus jusqu'à Xerxès, n'est pas au même degré tombée dans le domaine public. Les Cimmériens, qu'on désigne quelquefois sous ce même nom de Trères (sinon toute la nation, au moins l'une de ses tribus), ont également à plusieurs reprises envahi les provinces qui s'étendent à la droite du Pont, soit la Paphlagonie soit même la Phrygie, l'une de leurs incursions en ce dernier pays coïncidant précisément avec l'époque où le roi Midas mit fin, dit-on, à ses jours en buvant du sang de taureau. Lygdamis, à la tête de ses bandes, pénétra, qui plus est, jusqu'en Lydie et en Ionie, où il prit Sardes, et alla mourir en Cilicie. Les Cimmériens et les Trères avaient renouvelé plus d'une fois leurs incursions dans ces pays, quand les Trères et leur roi Cobus en furent, dit-on, définitivement expulsés par les armes du roi scythe Madys. Du reste, si nous avons rappelé ici tous ces faits, ce n'est que parce qu'ils peuvent servir à l'histoire générale de la terre. 22. Reprenons maintenant la suite de notre discours au point où cette digression l'a interrompu. Hérodote ayant nié quelque part qu'il existe sur la terre des Hyperboréens, par la raison qu'il ne s'y trouve point d'Hypernotiens, Ératosthène juge l'argument risible et le compare au sophisme qui consisterait à nier qu'il y ait dans le monde des epichaerekaki, c'est-à-dire des gens heureux du mal d'autrui, par la raison qu'on n'y connaît point d'epichaeragathi ou de gens heureux du bonheur des autres, « sans compter, ajoute-t-il, qu'il n'est rien moins que prouvé qu'il n'existe pas réellement des Hypernotiens, témoin l'Éthiopie où le Notus ne souffle pas, tandis qu'il souffle dans les contrées situées plus bas (131). » - Mais ne serait-il pas étrange, quand les vents soufflent sous tous les climats, quand partout le vent qui vient du midi est appelé Notus, qu'il y eût une position sur la terre où ces conditions ne se vérifiassent pas? Non, la vérité est que l'Éthiopie, et, avec l'Éthiopie, toute la contrée située au-dessus jusqu'à l'équateur, doivent ressentir également le souffle de notre Notus. Le vrai reproche à faire à Hérodote était donc d'avoir supposé que le nom d'Hyperboréens pût désigner des peuples chez qui Borée ne souffle point; car, si les poètes avaient employé là une qualification un peu trop mythique, il appartenait à leurs commentateurs d'en démêler le vrai sens et de comprendre que ce nom d'Hyperboréens ne pouvait signifier autre chose que les nations les plus boréales, le pôle étant proprement la limite des nations boréales, tout comme l'équateur est la limite des nations notiennes ou australes, et cette double limite étant la même pour les vents. 23. Ératosthène prend ensuite à partie les auteurs qui, soit sous forme de fables, soit sous forme d'histoires, ont rapporté des faits notoirement imaginaires et impossibles, et qui, pour cette raison, ne méritent pas même d'être mentionnés : mais à ce compte, lui, tout le premier, aurait dû s'abstenir de mêler à un sujet tel que le sien la critique en règle de véritables sornettes. Voilà du reste tout ce que comprend la première série de ses Mémoires.
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ΚΕΦ. Γ'.
2. Οὐ μόνον δὲ ταῦτ' ἄν τις ἐπισημήναιτο, ἀλλ' ὅτι καὶ περὶ τῶν τόπων οὐδὲ καθ' ἑαυτόν πω γνώριμα εἶναί φησι τὰ καθ' ἕκαστα ἀκριβολογούμενα, καὶ κελεύσας ἡμῖν μὴ ῥᾳδίως τοῖς τυχοῦσι πιστεύειν, καὶ τὰς αἰτίας διὰ μακρῶν ἀποδοὺς δι' ἃς οὐδὲ πιστευτέον, οἷον περὶ τῶν κατὰ τὸν Πόντον καὶ τὸν Ἀδρίαν, αὐτὸς ἐπίστευσε τοῖς τυχοῦσι. Τοιγάρτοι τὸν μὲν Ἰσσικὸν κόλπον ἐπίστευσεν ἑωθινώτατον τῆς καθ' ἡμᾶς θαλάττης σημεῖον, τοῦ κατὰ Διοσκουριάδα τὴν ἐν τῷ τοῦ Πόντου μυχῷ σχεδόν τι καὶ τρισχιλίοις σταδίοις ἑωθινωτέρου ὄντος καὶ κατ' αὐτὸν ἐκ τοῦ σταδιασμοῦ οὗ φησί· τοῦ τε Ἀδρίου καὶ τὰ ἀρκτικὰ καὶ τὰ ἔσχατα διεξιὼν οὐδενὸς ἀπέχεται μυθώδους. Πεπίστευκε δὲ καὶ περὶ τῶν ἔξω στηλῶν Ἡρακλείων πολλοῖς μυθώδεσι, Κέρνην τε νῆσον καὶ ἄλλους τόπους ὀνομάζων τοὺς μηδαμοῦ νυνὶ δεικνυμένους, περὶ ὧν μνησθησόμεθα καὶ ὕστερον. Εἰπών τε τοὺς ἀρχαιοτάτους πλεῖν καὶ κατὰ λῃστείαν ἢ ἐμπορίαν, μὴ πελαγίζειν δέ, ἀλλὰ παρὰ γῆν, καθάπερ τὸν Ἰάσονα, ὅνπερ καὶ μέχρι τῆς Ἀρμενίας καὶ Μηδίας ἐκ τῶν Κόλχων στρατεῦσαι ἀφέντα τὰς ναῦς, ὕστερόν φησι τὸ παλαιὸν οὔτε τὸν Εὔξεινον θαρρεῖν τινα πλεῖν οὔτε παρὰ Λιβύην καὶ Συρίαν καὶ Κιλικίαν. Εἰ μὲν οὖν τοὺς πάλαι τοὺς πρὸ τῆς ἡμετέρας λέγει μνήμης, οὐδὲν ἐμοὶ μέλει περὶ ἐκείνων λέγειν, οὔτ' εἰ ἔπλεον, οὔτ' εἰ μή. Εἰ δὲ περὶ τῶν μνημονευομένων, οὐκ ἂν ὀκνήσαι τις εἰπεῖν ὡς οἱ παλαιοὶ μακροτέρας ὁδοὺς φανοῦνται καὶ κατὰ γῆν καὶ κατὰ θάλατταν τελέσαντες τῶν ὕστερον, εἰ χρὴ προσέχειν τοῖς λεγομένοις· οἷον Διόνυσος καὶ Ἡρακλῆς καὶ αὐτὸς ὁ Ἰάσων, ἔτι δ' οἱ ὑπὸ τοῦ ποιητοῦ λεγόμενοι Ὀδυσσεὺς καὶ Μενέλαος. Καὶ Θησέα δὲ καὶ Πειρίθουν μακρὰς εἰκός ἐστι στρατείας ὑπομείναντας καταλιπεῖν δόξαν περὶ ἑαυτῶν ὡς εἰς Ἅιδου καταβάντας, τοὺς δὲ Διοσκούρους ἐπιμελητὰς τῆς θαλάττης λεχθῆναι καὶ σωτῆρας τῶν πλεόντων. Ἥ τε Μίνω θαλαττοκρατία θρυλεῖται καὶ ἡ Φοινίκων ναυτιλία, οἳ καὶ τὰ ἔξω τῶν Ἡρακλείων στηλῶν ἐπῆλθον καὶ πόλεις ἔκτισαν κἀκεῖ καὶ περὶ τὰ μέσα τῆς Λιβύης παραλίας μικρὸν τῶν Τρωικῶν ὕστερον. Αἰνείαν δὲ καὶ Ἀντήνορα καὶ Ἐνετοὺς καὶ ἁπλῶς τοὺς ἐκ τοῦ Τρωικοῦ πολέμου πλανηθέντας εἰς πᾶσαν τὴν οἰκουμένην ἄξιον μὴ τῶν παλαιῶν ἀνθρώπων νομίσαι; Συνέβη γὰρ δὴ τοῖς τότε Ἕλλησιν ὁμοίως καὶ τοῖς βαρβάροις διὰ τὸν τῆς στρατείας χρόνον ἀποβαλεῖν τά τε ἐν οἴκῳ καὶ τῇ στρατείᾳ πορισθέντα· ὥστε μετὰ τὴν τοῦ Ἰλίου καταστροφὴν τούς τε νικήσαντας ἐπὶ λῃστείαν τραπέσθαι διὰ τὰς ἀπορίας καὶ πολὺ μᾶλλον τοὺς ἡττηθέντας καὶ περιγενομένους ἐκ τοῦ πολέμου. Καὶ δὴ καὶ πόλεις ὑπὸ τούτων πλεῖσται κτισθῆναι λέγονται κατὰ πᾶσαν τὴν ἔξω τῆς Ἑλλάδος παραλίαν, ἔστι δ' ὅπου καὶ τὴν μεσόγαιαν. 3. Εἰπὼν δὲ καὶ αὐτὸς, ὁπόσον προὔβη τὰ τῆς οἰκουμένης εἰς γνῶσιν τοῖς μετ' Ἀλέξανδρον καὶ κατ' αὐτὸν ἤδη, μεταβέβηκεν ἐπὶ τὸν περὶ τοῦ σχήματος λόγον, οὐχὶ περὶ τοῦ τῆς οἰκουμένης, ὅπερ ἦν οἰκειότερον τῷ περὶ αὐτῆς λόγῳ, ἀλλὰ τοῦ τῆς συμπάσης γῆς· δεῖ μὲν γὰρ καὶ τούτου μνησθῆναι, μὴ ἀτάκτως δέ. Εἰπὼν οὖν ὅτι σφαιροειδὴς ἡ σύμπασα, οὐχ ὡς ἐκ τόρνου δέ, ἀλλ' ἔχει τινὰς ἀνωμαλίας, ἐπιφέρει τὸ πλῆθος τῶν ἐν μέρει μετασχηματισμῶν αὐτῆς, οἳ συμβαίνουσιν ἔκ τε ὕδατος καὶ πυρὸς καὶ σεισμῶν καὶ ἀναφυσημάτων καὶ ἄλλων τοιούτων, οὐδ' ἐνταῦθα τὴν τάξιν φυλάττων. Τὸ μὲν γὰρ σφαιροειδὲς περὶ ὅλην τὴν γῆν ἀπὸ τῆς τοῦ ὅλου ἕξεως συμβαίνει, οἱ δὲ τοιοῦτοι μετασχηματισμοὶ τὴν μὲν ὅλην γῆν οὐδὲν ἐξαλλάττουσιν (ἐν γὰρ τοῖς μεγάλοις ἐναφανίζεται τὰ οὕτω μικρά), τῆς δὲ οἰκουμένης διαθέσεις ἑτέρας καὶ ἑτέρας τινὰς ἀπεργάζονται καὶ τὰς προσεχεῖς αἰτίας ἄλλας καὶ ἄλλας ἔχουσι. 4. Μάλιστα δέ φησι ζήτησιν παρασχεῖν, πῶς ἐν δισχιλίοις καὶ τρισχιλίοις ἀπὸ θαλάττης σταδίοις κατὰ τὴν μεσόγαιαν ὁρᾶται πολλαχοῦ κόγχων καὶ ὀστρέων καὶ χηραμύδων πλῆθος καὶ λιμνοθάλατται, καθάπερ φησὶ περὶ τὸ ἱερὸν τοῦ Ἄμμωνος καὶ τὴν ἐπ' αὐτῷ ὁδὸν τρισχιλίων σταδίων οὖσαν· πολλὴν γὰρ εἶναι χύσιν ὀστρίων, ἅλας τε καὶ νῦν ἔτι εὑρίσκεσθαι πολλούς, ἀναφυσήματά τε θαλάττης εἰς ὕψος ἀναβάλλειν, πρὸς ᾧ καὶ ναυάγια θαλαττίων πλοίων δείκνυσθαι, ἃ ἔφασαν διὰ τοῦ χάσματος ἐκβεβράσθαι, καὶ ἐπὶ στυλιδίων ἀνακεῖσθαι δελφῖνας ἐπιγραφὴν ἔχοντας Κυρηναίων θεωρῶν. Ταῦτα δ' εἰπὼν τὴν Στράτωνος ἐπαινεῖ δόξαν τοῦ φυσικοῦ, καὶ ἔτι Ξάνθου τοῦ Λυδοῦ· τοῦ μὲν Ξάνθου λέγοντος ἐπὶ Ἀρταξέρξου γενέσθαι μέγαν αὐχμὸν ὥστ' ἐκλιπεῖν ποταμοὺς καὶ λίμνας καὶ φρέατα· αὐτόν τε εἰδέναι πολλαχῆ πρόσω ἀπὸ τῆς θαλάττης λίθον τε κογχυλιώδη καὶ τὰ κτενώδεα καὶ χηραμύδων τυπώματα καὶ λιμνοθάλατταν ἐν Ἀρμενίοις καὶ Ματιηνοῖς καὶ ἐν Φρυγίᾳ τῇ κάτω, ὧν ἕνεκα πείθεσθαι τὰ πεδία ποτὲ θάλατταν γενέσθαι. Τοῦ δὲ Στράτωνος ἔτι μᾶλλον ἁπτομένου τῆς αἰτιολογίας, ὅτι φησὶν οἴεσθαι τὸν Εὔξεινον μὴ ἔχειν πρότερον τὸ κατὰ Βυζάντιον στόμα, τοὺς δὲ ποταμοὺς βιάσασθαι καὶ ἀνοῖξαι τοὺς εἰς αὐτὸν ἐμβάλλοντας, εἶτ' ἐκπεσεῖν τὸ ὕδωρ εἰς τὴν Προποντίδα καὶ τὸν Ἑλλήσποντον. Τὸ δ' αὐτὸ συμβῆναι καὶ περὶ τὴν καθ' ἡμᾶς θάλατταν· καὶ γὰρ ἐνταῦθα τὸν κατὰ Στήλας ἐκραγῆναι πόρον, πληρωθείσης ὑπὸ τῶν ποταμῶν τῆς θαλάττης, κατὰ δὲ τὴν ἔκρυσιν ἀνακαλυφθῆναι τὰ τεναγώδη πρότερον. Φέρει δ' αἰτίαν, πρῶτον μὲν ὅτι τῆς ἔξω θαλάττης καὶ τῆς ἐντὸς τοὔδαφος ἕτερόν ἐστιν, ἔπειθ' ὅτι καὶ νῦν ἔτι ταινία τις ὕφαλος διατέτακεν ἀπὸ τῆς Εὐρώπης ἐπὶ τὴν Λιβύην, ὡς ἂν [μὴ] μιᾶς οὔσης πρότερον τῆς τε ἐντὸς καὶ τῆς ἐκτός. Καὶ βραχύτατα μὲν εἶναι τὰ περὶ τὸν Πόντον, τὸ δὲ Κρητικὸν καὶ Σικελικὸν καὶ Σαρδῷον πέλαγος σφόδρα βαθέα. Τῶν γὰρ ποταμῶν πλείστων καὶ μεγίστων ῥεόντων ἀπὸ τῆς ἄρκτου καὶ τῆς ἀνατολῆς, ἐκεῖνα μὲν ἰλύος πληροῦσθαι, τὰ ἄλλα δὲ μένειν βαθέα. Διὸ καὶ γλυκυτάτην εἶναι τὴν Ποντικὴν θάλατταν τάς τ' ἐκρύσεις γίνεσθαι εἰς οὓς ἐγκέκλιται τόπους τὰ ἐδάφη. Δοκεῖν δὲ κἂν χωσθῆναι τὸν Πόντον ὅλον εἰς ὕστερον, ἂν μένωσιν αἱ ἐπιρρύσεις τοιαῦται· καὶ γὰρ νῦν ἤδη τεναγίζειν τὰ ἐν ἀριστερᾷ τοῦ Πόντου, τόν τε Σαλμυδησσὸν καὶ τὰ καλούμενα Στήθη ὑπὸ τῶν ναυτικῶν τὰ περὶ τὸν Ἴστρον καὶ τὴν Σκυθῶν ἐρημίαν. Τάχα δὴ καὶ τὸ τοῦ Ἄμμωνος ἱερὸν πρότερον ἐπὶ τῆς θαλάττης ὂν ἐκρύσεως γενομένης νῦν ἐν τῇ μεσογαίᾳ κεῖσθαι. Εἰκάζει τε τὸ μαντεῖον εὐλόγως ἐπὶ τοσοῦτον γενέσθαι ἐπιφανές τε καὶ γνώριμον ἐπὶ θαλάττῃ ὄν, τόν τε ἐπὶ πολὺ οὕτως ἐκτοπισμὸν ἀπὸ τῆς θαλάττης οὐκ εὔλογον ποιεῖν τὴν νῦν οὖσαν ἐπιφάνειαν καὶ δόξαν· τήν τε Αἴγυπτον τὸ παλαιὸν θαλάττῃ κλύζεσθαι μέχρι τῶν ἑλῶν τῶν περὶ τὸ Πηλούσιον καὶ τὸ Κάσιον ὄρος καὶ τὴν Σιρβωνίδα λίμνην· ἔτι γοῦν καὶ νῦν κατὰ τὴν Αἴγυπτον τῆς ἁλμυρίδος ὀρυττομένης ὑφάμμους καὶ κογχυλιώδεις εὑρίσκεσθαι τοὺς βόθρους, ὡς ἂν τεθαλαττωμένης τῆς χώρας καὶ τοῦ τόπου παντὸς τοῦ περὶ τὸ Κάσιον καὶ τὰ Γέρρα καλούμενα τεναγίζοντος, ὥστε συνάπτειν τῷ τῆς Ἐρυθρᾶς κόλπῳ· ἐνδούσης δὲ τῆς θαλάττης ἀνακαλυφθῆναι, μεῖναι δὲ τὴν Σιρβωνίδα λίμνην, εἶτ' ἐκραγῆναι καὶ ταύτην ὥστε ἑλώδη γενέσθαι. Ὡς δ' αὕτως καὶ τῆς Μοίριδος λίμνης τοὺς αἰγιαλοὺς αἰγιαλοῖς θαλάττης μᾶλλον ἢ ποταμοῦ προσεοικέναι. Τὸ μὲν οὖν ἐπικλύζεσθαί ποτε πολὺ μέρος τῶν ἠπείρων ἐπὶ καιρούς τινας καὶ πάλιν ἀνακαλύπτεσθαι δοίη τις ἄν· ὡς δ' αὕτως καὶ τὸ τοῖς ἐδάφεσιν ἀνώμαλον εἶναι τὴν γῆν ἅπασαν τὴν νῦν ὕφαλον, καθάπερ γε νὴ Δία καὶ τὴν ἔξαλον, ἐν ᾗ οἰκοῦμεν, τοσαύτας γε δεχομένην, ὅσας αὐτὸς Ἐρατοσθένης εἴρηκε μεταβολάς· ὥστε πρός γε τὸν Ξάνθου λόγον οὐδὲν ἂν ἔχοι τις προσφέρειν ἄτοπον. 5. Πρὸς δὲ τὸν Στράτωνα λέγοιτ' ἄν, ὅτι πολλῶν αἰτίων ὄντων ἀφεὶς ταῦτα τὰ μὴ ὄντα αἰτιᾶται. Πρώτην γὰρ αἰτίαν φησίν, ὅτι τῆς ἐντὸς θαλάττης καὶ τῆς ἐκτὸς οὐ ταὐτὸν τὸ ἔδαφος καὶ ὁ βυθός. Πρὸς γὰρ τὸ μετεωρίζεσθαι ταύτην καὶ ταπεινοῦσθαι καὶ ἐπικλύζειν τόπους τινὰς καὶ ἀναχωρεῖν ἀπ' αὐτῶν οὐ τοῦτό ἐστιν αἴτιον, τὸ ἄλλα καὶ ἄλλα ἐδάφη τὰ μὲν ταπεινότερα εἶναι τὰ δὲ ὑψηλότερα, ἀλλὰ τὸ τὰ αὐτὰ ἐδάφη ποτὲ μὲν μετεωρίζεσθαι, ποτὲ δ' αὖ ταπεινοῦσθαι καὶ συνεξαίρειν ἢ συνενδιδόναι τὸ πέλαγος· ἐξαρθὲν μὲν γὰρ ἐπικλύσαι ἄν, ταπεινωθὲν δὲ ἀναδράμοι ἂν εἰς τὴν ἀρχαίαν κατάστασιν. Εἰ γὰρ [οὐχ] οὕτω, δεήσει πλεονασμῷ τῆς θαλάττης αἰφνιδίῳ γενομένῳ τὴν ἐπίκλυσιν συμβαίνειν, καθάπερ ἐν ταῖς ἀναβάσεσι τῶν ποταμῶν, τοτὲ μὲν ἐπενεχθέντος ἑτέρωθεν, τοτὲ δ' αὐξηθέντος τοῦ ὕδατος. Ἀλλ' οὔθ' αἱ αὐξήσεις ἀθρόαι καὶ αἰφνίδιοι γίνονται, οὔθ' αἱ πλημμυρίδες τοσοῦτον ἐπιμένουσι χρόνον οὐδ' ἄτακτοί εἰσιν, οὔτε κατὰ τὴν ἡμετέραν ἐπικλύζουσι θάλατταν οὐδ' ὅπου ἔτυχε. Λοιπὸν οὖν αἰτιᾶσθαι τὸ ἔδαφος ἢ τὸ τῇ θαλάττῃ ὑποκείμενον ἢ τὸ ἐπικλυζόμενον, μᾶλλον δὲ τὸ ὕφαλον. πολὺ γὰρ εὐκινητότερον καὶ μεταβολὰς θάττους δέξασθαι δυνάμενον τὸ ἔνυγρον· καὶ γὰρ τὸ πνευματικὸν τὸ πάντων τῶν τοιούτων αἴτιον πλέον ἐνταῦθα. Ἀλλ', ὡς ἔφην, τῶν τοιούτων ἀπεργαστικόν ἐστι παθῶν τὸ τὰ αὐτὰ ἐδάφη ποτὲ μὲν ἐξαίρεσθαι ποτὲ δὲ ὑφίζησιν λαμβάνειν, οὐ τὸ τὰ μὲν εἶναι ὑψηλὰ τὰ δὲ ἧττον· ὁ δὲ τοῦτο λαμβάνει, νομίζων ὅπερ ἐπὶ τῶν ποταμῶν συμβαίνει, τοῦτο καὶ ἐπὶ τῆς θαλάττης ἀπαντᾶν, τὸ ἀπὸ τῶν μετεώρων τόπων εἶναι τὴν ῥύσιν. Οὐδὲ γὰρ ἂν τοῦ κατὰ Βυζάντιον ῥοῦ τὸ ἔδαφος ᾐτιᾶτο, λέγων ὑψηλότερον τὸ τοῦ Εὐξείνου ἢ τὸ τῆς Προποντίδος καὶ τοῦ ἑξῆς πελάγους, ἅμα καὶ αἰτίαν προστιθείς· ἀπὸ γὰρ τῆς ἰλύος τῆς ἀπὸ τῶν ποταμῶν καταφερομένης πληροῦσθαι τὸν βυθὸν καὶ βραχὺν γίνεσθαι, διὰ τοῦτο δὲ καὶ ῥεῖν εἰς τὰ ἐκτός. Τὸν δ' αὐτὸν λόγον καὶ ἐπὶ τὴν ἡμετέραν θάλατταν σύμπασαν μεταφέρει πρὸς τὴν ἐκτός, ὡς καὶ ταύτης μετεωρότερον τοὔδαφος ποιούσης τοῦ ὑποκειμένου τῷ Ἀτλαντικῷ πελάγει· καὶ γὰρ αὕτη ἐκ πολλῶν ποταμῶν πληροῦται καὶ τὴν ὑποστάθμην τῆς ἰλύος δέχεται τὴν ἀνάλογον. Ἐχρῆν οὖν καὶ τὸν εἴσρουν ὅμοιον γίνεσθαι τῷ κατὰ Βυζάντιον τὸν κατὰ Στήλας καὶ τὴν Κάλπην. Ἀλλὰ τοῦτο μὲν ἐῶ· ἐροῦσι γὰρ κἀκεῖ τοῦτο συμβαίνειν, περισπᾶσθαι δὲ ὑπὸ τῶν ἀμπώτεων καὶ τῶν πλημμυρίδων καὶ ἐπικρύπτεσθαι. 6. Ἐκεῖνο δὲ πυνθάνομαι, τί ἐκώλυε, πρὶν ἀνεῳγέναι τὸ στόμα τὸ κατὰ Βυζάντιον, ταπεινότερον ὂν τὸ τοῦ Εὐξείνου ἔδαφος τοῦ τῆς Προποντίδος καὶ τῆς ἑξῆς θαλάττης πληρωθῆναι ὑπὸ τῶν ποταμῶν, εἴτε θάλατταν οὖσαν καὶ πρότερον εἴτε λίμνην μείζω τῆς Μαιώτιδος; Εἰ γὰρ τοῦτο συγχωροῖτο, προσερήσομαι καὶ τοῦτο· ἆρά γε ἡ ἐπιφάνεια τοῦ ὕδατος ἐκείνου καὶ τοῦ τῆς Προποντίδος οὐχ οὕτως εἶχεν, ὥστε, μέχρι μὲν ἡ αὐτὴ ἦν, μὴ βιάζεσθαι πρὸς ἔκρυσιν διὰ τὴν ἐξ ἴσης ἀντέρεισιν καὶ θλῖψιν, ἐπειδὴ δὲ ὑπερεπόλασεν ἡ ἐντός, βιάσασθαι καὶ ἀπερᾶσαι τὸ πλεονάζον· ἐκ δὲ τούτου γενέσθαι σύρρουν τὸ ἔξω πέλαγος τῷ ἐντὸς καὶ τὴν αὐτὴν ἐπιφάνειαν ἐκείνῳ λαβεῖν, εἴτε θαλαττίῳ εἴτε λιμναίῳ μὲν πρότερον ὄντι, θαλαττίῳ δὲ ὕστερον, διὰ τὴν μῖξιν καὶ τὴν ἐπικράτειαν; Εἰ γὰρ καὶ τοῦτο δώσουσιν, ἡ μὲν ἔκρυσις οὐκ ἂν κωλύοιτο ἡ νῦν, οὐκ ἀπὸ ὑπερτέρου δὲ ἐδάφους οὐδὲ ἐπικλινοῦς, ὅπερ ἠξίου Στράτων. 7. Ταῦτα δὲ [ δεῖ] μεταφέρειν καὶ ἐπὶ τὴν ὅλην τὴν καθ' ἡμᾶς θάλατταν καὶ τὴν ἐκτός, μὴ ἐν τοῖς ἐδάφεσι καὶ ταῖς ἐπικλίσεσιν αὐτῶν τὴν αἰτίαν τοῦ ἔκρου τιθεμένους, ἀλλ' ἐν τοῖς ποταμοῖς· ἐπεὶ οὐκ ἀπίθανον κατ' αὐτούς, οὐδ' εἰ τὴν ὅλην θάλατταν τὴν ἡμετέραν λίμνην πρότερον εἶναι συνέβαινε, πληρουμένην ὑπὸ τῶν ποταμῶν, ἐπιπολάσασαν ἐκπεσεῖν ἔξω διὰ τῶν κατὰ στήλας στενῶν ὡς ἐκ καταράκτου· ἐπαυξομένην [ δ'] ἀεὶ καὶ μᾶλλον τὴν θάλατταν σύρρουν γενέσθαι ὑπ' αὐτῆς τῷ χρόνῳ καὶ συνδραμεῖν εἰς μίαν ἐπιφάνειαν, ἐκθαλαττωθῆναι δὲ διὰ τὴν ἐπικράτειαν. Οὐ φυσικὸν δ' ὅλως οὔ τε τοῖς ποταμοῖς εἰκάζειν τὴν θάλατταν· οἱ μὲν γὰρ φέρονται κατὰ ἐπικλινὲς ῥεῖθρον, ἡ δὲ ἀκλινὴς ἕστηκεν. Οἱ δὲ πορθμοὶ ῥευματίζονται κατ' ἄλλον τρόπον, οὐ διὰ τὸ τὴν ἰλὺν τὴν ἐκ τῶν ποταμῶν προσχοῦν τὸν τοῦ πελάγους βυθόν· Ἡ γὰρ πρόσχωσις περὶ αὐτὰ συνίσταται τὰ στόματα τῶν ποταμῶν, οἷον περὶ μὲν τὰ τοῦ Ἴστρου τὰ λεγόμενα Στήθη καὶ ἡ Σκυθῶν ἐρημία καὶ ὁ Σαλμυδησσός, καὶ ἄλλων χειμάρρων συνεργούντων πρὸς τοῦτο, περὶ δὲ τὰ τοῦ Φάσιδος ἡ Κολχικὴ παραλία, δίαμμος καὶ ταπεινὴ καὶ μαλακὴ οὖσα, περὶ δὲ τὸν Θερμώδοντα καὶ τὸν Ἶριν ὅλη Θεμίσκυρα, τὸ τῶν Ἀμαζόνων πεδίον, καὶ τῆς Σιδηνῆς τὸ πλέον· οὕτω δὲ καὶ ἐπὶ τῶν ἄλλων. Ἅπαντες γὰρ μιμοῦνται τὸν Νεῖλον, ἐξηπειροῦντες τὸν πρὸ αὐτῶν πόρον, οἱ μὲν μᾶλλον, οἱ δὲ ἧττον· ἧττον μὲν οἱ μὴ πολλὴν καταφέροντες τὴν ἰλύν, μᾶλλον δὲ οἱ πολλήν τε καὶ μαλακόγειον χώραν ἐπιόντες καὶ χειμάρρους δεχόμενοι πολλούς, ὧν ἐστι καὶ ὁ Πύραμος ὁ τῇ Κιλικίᾳ πολὺ μέρος προσθείς, ἐφ' οὗ καὶ λόγιον ἐκπέπτωκέ τι τοιοῦτον·
Ἔσσεται ἐσσομένοις, ὅτε Πύραμος
εὐροδίνης Ἐκ μέσων γὰρ τῶν τῆς Καταονίας πεδίων ἐνεχθεὶς πλωτὸς καὶ διεκπαισάμενος διὰ τῶν τοῦ Ταύρου στενῶν εἰς τὴν Κιλικίαν ἐκδίδωσιν εἰς τὸν πρὸ ταύτης τε καὶ τῆς Κύπρου πόρον. 8. Αἴτιον δὲ τοῦ μὴ φθάνειν τὴν χοῦν εἰς τὸ πέλαγος προιιοῦσαν τὴν ὑπὸ τῶν ποταμῶν καταφερομένην τὸ τὴν θάλατταν ἀνακόπτειν αὐτὴν εἰς τοὐπίσω, παλιρροοῦσαν φύσει. Ἔοικε γὰρ τοῖς ζῴοις, καὶ καθάπερ ἐκεῖνα συνεχῶς ἀναπνεῖ τε καὶ ἐκπνεῖ, τὸν αὐτὸν τρόπον καὶ αὐτὴ ἐξ αὑτῆς τε καὶ εἰς ἑαυτὴν συνεχῶς παλινδρομικήν τινα κινουμένη κίνησιν. Δῆλον δὲ τῷ ἐπὶ τοῦ αἰγιαλοῦ ἑστῶτι κατὰ τὴν κυμάτωσιν· ἅμα γὰρ κλύζονται οἱ πόδες καὶ γυμνοῦνται καὶ πάλιν κλύζονται, καὶ τοῦτο συνεχῶς. Τῷ δὲ κλύδωνι καὶ κῦμα ἐπιτρέχει, ὃ κἂν γαληνότατον ᾖ· ἐπιφερόμενον [δ'] ἔχει τινὰ βίαν πλείω, καὶ ἀπορρίπτει πᾶν τὸ ἀλλότριον εἰς τὴν γῆν, Πολλὸν δὲ παρὲξ ἅλα φῦκος ἔχευε. Μᾶλλον μὲν οὖν ἐν ἀνέμῳ συμβαίνει τοῦτο, ἀλλὰ καὶ ἐν νηνεμίᾳ καὶ ἐν ἀπογαίοις πνεύμασιν· οὐδὲν γὰρ ἧττον ἐπὶ γῆν φέρεται τὸ κῦμα ὑπεναντίως τῷ ἀνέμῳ, ὡς ἂν ἰδίαν 'τινὰ τῆς θαλάττης κίνησιν συγκινούμενον αὐτῇ. 9. Ἡ μὲν οὖν ἔφοδος τοῦ κύματος ἔχει τινὰ βίαν ὥστ' ἀπωθεῖσθαι τὸ ἀλλότριον. Καὶ δὴ καὶ κάθαρσίν τινα τῆς θαλάττης ταύτην φασί, καθ' ἣν καὶ τὰ νεκρὰ σώματα καὶ τὰ ναυάγια εἰς γῆν ἐκκυμαίνεται. Ἡ τ' ἀναχώρησις οὐκ ἔχει τοσαύτην βίαν, ὥστε νεκρὸν ἢ ξύλον ἢ τὸ κουφότατον, φελλόν, ὑπὸ τοῦ κύματος εἰς γῆν ἀναβληθῆναι, οὕτω δὲ καὶ τῶν πλησίον αὐτῆς τόπων εἰς τὸ πέλαγος προπεσεῖν ὑποληφθέντων ὑπὸ τοῦ κύματος. Οὕτω δὴ καὶ τὴν χοῦν καὶ τὸ σὺν αὐτῇ τεθολωμένον ὕδωρ ἐκκυμαίνεσθαι συμβαίνει, καὶ τοῦ βάρους ἅμα συνεργοῦντος, ὥστε θᾶττον κατενεχθῆναι πρὸς τὴν γῆν κάτω, πρὶν εἰς τὸ πρόσω πελαγίσαι. Καὶ γὰρ ἡ τοῦ ποταμοῦ βία παύεται, μικρὸν προελθοῦσα τοῦ στόματος. Οὕτω μὲν οὖν ἐνδέχεται προσχωσθῆναι τὸ πέλαγος πᾶν, ἀπὸ τῶν αἰγιαλῶν ἀρξάμενον, ἂν συνεχεῖς ἔχῃ τὰς ἐκ τῶν ποταμῶν ἐπιρρύσεις. Τοῦτο δ' ἂν συμβαίη, κἂν τοῦ Σαρδονίου πελάγους βαθύτερον ὑποθώμεθα τὸν Πόντον, ὅπερ λέγεται τῶν ἀναμετρηθέντων βαθύτατον χιλίων που ὀργυιῶν, ὡς Ποσειδώνιός φησι. 10. Τὴν μὲν οὖν τοιαύτην αἰτιολογίαν ἧττον ἄν τις ἀποδέξαιτο· μᾶλλον δ' ἀπὸ τῶν φανερωτέρων καὶ τῶν καθ' ἡμέραν τρόπον τινὰ ὁρωμένων ἀναπτέον τὸν λόγον· καὶ γὰρ κατακλυσμοὶ καὶ σεισμοὶ καὶ ἀναφυσήματα καὶ ἀνοιδήσεις τῆς ὑφάλου γῆς μετεωρίζουσι καὶ τὴν θάλατταν, αἱ δὲ συνιζήσεις ταπεινοῦσιν αὐτήν. Οὐ γὰρ μύδροι μὲν ἀνενεχθῆναι δύνανται καὶ μικραὶ νῆσοι, μεγάλαι δ' οὔ· οὐδὲ νῆσοι μέν, ἤπειροι δ' οὔ. Ὁμοίως δὲ καὶ συνιζήσεις καὶ μικραὶ καὶ μεγάλαι γένοιντ' ἄν, εἴπερ καὶ ( τὰ) χάσματα καὶ καταπόσεις χωρίων καὶ κατοικιῶν, ὡς ἐπὶ Βούρας τε καὶ Βιζώνης καὶ ἄλλων πλειόνων, ὑπὸ σεισμοῦ γενέσθαι φασί· καὶ τὴν Σικελίαν οὐδέν τι μᾶλλον ἀπορρῶγα τῆς Ἰταλίας εἰκάζοι τίς ἂν ἢ ἀναβληθεῖσαν ὑπὸ τοῦ αἰτναίου πυρὸς ἐκ βυθοῦ συμμεῖναι· ὡσαύτως δὲ καὶ τὰς Λιπαραίων νήσους καὶ Πιθηκούσσας. 11. Ὁ δ' οὕτως ἡδύς ἐστιν ὥστε καὶ (μὴ) μαθηματικὸς ὢν οὐδὲ τὴν Ἀρχιμήδους βεβαιοῖ δόξαν, ὅτι φησὶν ἐκεῖνος ἐν τοῖς περὶ τῶν ὀχουμένων, παντὸς ὑγροῦ καθεστηκότος καὶ μένοντος τὴν ἐπιφάνειαν σφαιρικὴν εἶναι, σφαίρας ταὐτὸ κέντρον ἐχούσης τῇ γῇ. Ταύτην γὰρ τὴν δόξαν ἀποδέχονται πάντες οἱ μαθημάτων πως ἁψάμενοι. Ἐκεῖνος δὲ τὴν ἐντὸς θάλατταν, καίπερ μίαν οὖσαν, ὥς φησιν, οὐ νομίζει ὑπὸ μίαν ἐπιφάνειαν τετάχθαι, ἀλλ' οὐδὲ τοῖς σύνεγγυς τόποις. Καὶ μάρτυράς γε τῆς τοιαύτης ἀμαθίας ἀρχιτέκτονας ἄνδρας ποιεῖται, καὶ τῶν μαθηματικῶν καὶ τὴν ἀρχιτεκτονικὴν μέρος τῆς μαθηματικῆς ἀποφηναμένων. Φησὶ γὰρ καὶ Δημήτριον διακόπτειν ἐπιχειρῆσαι τὸν τῶν Πελοποννησίων ἰσθμὸν πρὸς τὸ παρασχεῖν διάπλουν τοῖς στόλοις, κωλυθῆναι δ' ὑπὸ τῶν ἀρχιτεκτόνων ἀναμετρησάντων καὶ ἀπαγγειλάντων μετεωροτέραν τὴν ἐν τῷ Κορινθιακῷ κόλπῳ θάλατταν τῆς κατὰ Κεγχρεὰς εἶναι, ὥστε, εἰ διακόψειε τὸ μεταξὺ χωρίον, ἐπικλυσθῆναι ἂν ἅπαντα τὸν περὶ Αἴγιναν πόρον καὶ αὐτὴν αἴγιναν καὶ ( αὐ τὰς) τὰς πλησίον νήσους, καὶ μηδὲ τὸν διάπλουν ἂν γενέσθαι χρήσιμον. Διὰ δὲ τοῦτο καὶ τοὺς εὐρίπους ῥοώδεις εἶναι, μάλιστα δὲ τὸν κατὰ Σικελίαν πορθμόν, ὅν φησιν ὁμοιοπαθεῖν ταῖς κατὰ τὸν ὠκεανὸν πλημμυρίσι τε καὶ ἀμπώτεσι· δὶς γὰρ μεταβάλλειν τὸν ῥοῦν ἑκάστης ἡμέρας καὶ νυκτός, καθάπερ τὸν ὠκεανὸν δὶς μὲν πλημμυρεῖν δὶς δὲ ἀναχωρεῖν. Τῇ μὲν οὖν πλημμυρίδι (δεῖ) ὁμολογεῖν τὸν ἐκ τοῦ Τυρρηνικοῦ πελάγους εἰς τὸ Σικελικὸν καταφερόμενον ὡς ἂν ἐκ μετεωροτέρας ἐπιφανείας, ὃν δὴ καὶ κατιόντα ὀνομάζεσθαι, ὁμολογεῖν δ' ὅτι καὶ κατὰ τὸν αὐτὸν καιρὸν ἄρχεταί τε καὶ παύεται καθ' ὃν αἱ πλημμυρίδες· ἄρχεται μὲν γὰρ περὶ τὴν ἀνατολὴν τῆς σελήνης καὶ τὴν δύσιν, λήγει δ' ὅταν συνάπτῃ τῇ μεσουρανήσει ἑκατέρᾳ, τῇ τε ὑπὲρ γῆς καὶ τῇ ὑπὸ γῆς· τῇ δὲ ἀμπώτει τὸν ἐναντίον, [ ὃν] ἐξιόντα καλεῖσθαι, ταῖς μεσουρανήσεσι τῆς σελήνης ἀμφοτέραις ἐναρχόμενον, καθάπερ αἱ ἀμπώτεις, ταῖς δὲ συνάψεσι ταῖς πρὸς τὰς ἀνατολὰς καὶ δύσεις παυόμενον. 12. Περὶ μὲν οὖν τῶν πλημμυρίδων καὶ τῶν ἀμπώτεων εἰρήκασιν ἱκανῶς Ποσειδώνιός τε καὶ Ἀθηνόδωρος· περὶ δὲ τῆς τῶν πορθμῶν παλιρροίας, ἐχόντων καὶ αὐτῶν φυσικώτερον λόγον ἢ κατὰ τὴν νῦν ὑπόθεσιν, τοσοῦτον εἰπεῖν ἀπόχρη, ὅτι οὔτε εἷς τρόπος τοῦ ῥοώδεις εἶναι τοὺς πορθμούς, ὅ γε κατ' εἶδος οὐ γὰρ ἂν ὁ μὲν Σικελικὸς δὶς ἑκάστης ἡμέρας μετέβαλλεν, ὡς οὗτός φησιν, ὁ δὲ Χαλκιδικὸς ἑπτάκις, ὁ δὲ κατὰ Βυζάντιον οὐδὲ μετέβαλλεν, ἀλλὰ διετέλει τὸν ἔκρουν μόνον ἔχων τὸν ἐκ τοῦ Ποντικοῦ πελάγους εἰς τὴν Προποντίδα, ὡς δὲ Ἵππαρχος ἱστορεῖ, καὶ μονάς ποτε ἐποιεῖτο. Οὔτ' εἰ τρόπος εἷς εἴη, ταύτην ( γὰρ) ἂν ἔχοι τὴν αἰτίαν, ἥν φησιν ὁ Ἐρατοσθένης, ὅτι ἡ ἐφ' ἑκάτερα θάλαττα ἄλλην καὶ ἄλλην ἐπιφάνειαν ἔχει· οὐδὲ γὰρ ἐπὶ τῶν ποταμῶν τοῦτο γένοιτ' ἄν, εἰ μὴ καταράκτας ἔχοιεν· ἔχοντες δὲ οὐ παλιρροοῦσιν, ἀλλ' ἐπὶ τὸ ταπεινότερον ἀεὶ φέρονται. Καὶ τοῦτο δὲ συμβαίνει διὰ τὸ κεκλιμένον εἶναι τὸ ῥεῦμα καὶ τὴν ἐπιφάνειαν αὐτοῦ· * ὥστ' οὐχ ὅτι παλιρροοῦντας, ἀλλ' οὐδὲ καθεστῶτας καὶ μένοντας, συρροίας μὲν ἐν αὐτοῖς οὔσης, μὴ μιᾶς δὲ ἐπιφανείας, ἀλλὰ τῆς μὲν ὑψηλοτέρας τῆς δὲ ταπεινοτέρας. Πελάγους δὲ τίς ἂν φαίη κεκλιμένην ἐπιφάνειαν; Καὶ μάλιστα κατὰ τὰς σφαιροποιούσας ὑποθέσεις τὰ τέτταρα σώματα, ἃ δὴ καὶ στοιχεῖα φαμέν· οὐ γὰρ ὥσπερ ἡ γῆ κατὰ ἕξιν ἐσχημάτισται στερεὰ οὖσα, ὥστε καὶ κοιλάδας ἔχειν συμμενούσας καὶ ἀναστήματα, οὕτω καὶ τὸ ὕδωρ, ἀλλ' αὐτῇ τῇ κατὰ τὸ βάρος ῥοπῇ τὴν ὄχησιν ἐπὶ τῆς γῆς ποιεῖται καὶ τοιαύτην λαμβάνει τὴν ἐπιφάνειαν οἵαν ὁ Ἀρχιμήδης φησιν. 13. Ἐπιφέρει δὲ τοῖς περὶ τοῦ Ἄμμωνος καὶ τῆς Αἰγύπτου ῥηθεῖσιν, ὅτι δοκοίη καὶ τὸ Κάσιον ὄρος περικλύζεσθαι θαλάττῃ, καὶ πάντα [ τὸν] τόπον, ὅπου νῦν τὰ καλούμενα Γέρρα, + καθ' ἕκαστα τε τεναγίζειν συνάπτοντα τῷ τῆς Ἐρυθρᾶς κόλπῳ, συνελθούσης δὲ τῆς θαλάττης ἀποκαλυφθῆναι. Τὸ δὴ τεναγίζειν τὸν λεχθέντα τόπον συνάπτοντα τῷ τῆς Ἐρυθρᾶς κόλπῳ, ἀμφίβολόν ἐστιν, ἐπειδὴ τὸ συνάπτειν σημαίνει καὶ τὸ συνεγγίζειν καὶ τὸ ψαύειν, ὥστε, εἰ ὕδατα εἴη, σύρρουν εἶναι θάτερον θατέρῳ. Ἐγὼ μὲν οὖν δέχομαι καὶ τὸ συνεγγίζειν τὰ τενάγη τῇ Ἐρυθρᾶᾶ θαλάττῃ, ἕως ἀκμὴν ἐκέκλειστο τὰ κατὰ τὰς στήλας στενά, ἐκραγέντων δὲ τὴν ἀναχώρησιν γενέσθαι, ταπεινωθείσης τῆς ἡμετέρας θαλάττης διὰ τὴν κατὰ τὰς Στήλας ἔκρυσιν. Ἵππαρχος δὲ ἐκδεξάμενος τὸ συνάπτειν ταὐτὸν τῷ σύρρουν γενέσθαι τὴν ἡμετέραν θάλατταν τῇ Ἐρυθρᾶᾶ διὰ τὴν πλήρωσιν, αἰτιᾶται τί δή ποτε οὐχὶ τῇ κατὰ τὰς στήλας ἐκρύσει μεθισταμένη ἐκεῖσε ἡ καθ' ἡμᾶς θάλαττα συμμεθίστα καὶ τὴν σύρρουν αὐτῇ γενομένην τὴν Ἐρυθράν, καὶ ἐν τῇ αὐτῇ διέμεινεν ἐπιφανείᾳ, μὴ ταπεινουμένη· καὶ γὰρ κατ' αὐτὸν Ἐρατοσθένη τὴν ἐκτὸς θάλατταν ἅπασαν σύρρουν εἶναι, ὥστε καὶ τὴν ἑσπέριον καὶ τὴν Ἐρυθρὰν θάλατταν μίαν εἶναι. Τοῦτο δ' εἰπὼν ἐπιφέρει τὸ ἀκόλουθον, τὸ τὸ αὐτὸ ὕψος ἔχειν τήν τε ἔξω Στηλῶν θάλατταν καὶ τὴν Ἐρυθρὰν καὶ ἔτι τὴν ταύτῃ γεγονυῖαν σύρρουν. 14. Ἀλλ' οὔτ' εἰρηκέναι τοῦτό φησιν Ἐρατοσθένης, τὸ σύρρουν γεγονέναι κατὰ τὴν πλήρωσιν τῇ Ἐρυθρᾷ, ἀλλὰ συνεγγίσαι μόνον, οὔτ' ἀκολουθεῖν τῇ μιᾷ καὶ συνεχεῖ θαλάττῃ τὸ αὐτὸ ὕψος ἔχειν καὶ τὴν αὐτὴν ἐπιφάνειαν, ὥσπερ οὐδὲ τὴν καθ' ἡμᾶς, καὶ νὴ Δία τὴν κατὰ τὸ Λέχαιον καὶ τὴν περὶ Κεγχρεάς. Ὅπερ καὶ αὐτὸς ὁ Ἵππαρχος ἐπισημαίνεται ἐν τῷ πρὸς αὐτὸν λόγῳ· εἰδὼς οὖν τὴν δόξαν αὐτοῦ τοιαύτην ἰδίᾳ τι πρὸς αὐτὸν λεγέτω, καὶ μὴ ἐξ ἑτοίμου λαμβανέτω, ὡς ἄρα ὁ φήσας μίαν εἶναι τὴν ἔξω θάλατταν σύμφησι καὶ ὅτι μία ἐστὶν αὐτῆς ἡ ἐπιφάνεια. 15. Ψευδῆ δ' εἶναι φήσας τὴν ἐπὶ τοῖς δελφῖσιν ἐπιγραφὴν Κυρηναίων θεωρῶν αἰτίαν ἀποδίδωσιν οὐ πιθανήν, ὅτι ἡ μὲν τῆς Κυρήνης κτίσις ἐν χρόνοις φέρεται μνημονευομένοις, τὸ δὲ μαντεῖον οὐδεὶς μέμνηται ἐπὶ θαλάττῃ ποτὲ ὑπάρξαν. τί γάρ, εἰ μηδεὶς μὲν ἱστορεῖ, ἐκ δὲ τῶν τεκμηρίων, ἐξ ὧν εἰκάζομεν παράλιόν ποτε τὸν τόπον γενέσθαι, οἵ τε δελφῖνες ἀνετέθησαν καὶ ἡ ἐπιγραφὴ ἐγένετο ὑπὸ Κυρηναίων θεωρῶν; Ξυγχωρήσας δὲ τῷ μετεωρισμῷ τοῦ ἐδάφους συμμετεωρισθεῖσαν καὶ τὴν θάλατταν ἐπικλύσαι τοὺς μέχρι τοῦ μαντείου τόπους, πλέον (ἢ) ἀπὸ θαλάττης διέχοντας τῶν τρισχιλίων σταδίων, οὐ συγχωρεῖ τὸν μέχρι τοσούτου μετεωρισμὸν ὥστε καὶ τὴν Φάρον ὅλην καλυφθῆναι καὶ τὰ πολλὰ τῆς αἰγύπτου, ὥσπερ οὐχ ἱκανοῦ ὄντος τοῦ τοσούτου ὕψους καὶ ταῦτα ἐπικλύσαι. φήσας δέ, εἴπερ ἐπεπλήρωτο ἐπὶ τοσοῦτον ἡ καθ' ἡμᾶς θάλαττα πρὶν τὸ ἔκρηγμα τὸ κατὰ Στήλας γενέσθαι, ἐφ' ὅσον εἴρηκεν ὁ Ἐρατοσθένης, χρῆναι καὶ τὴν Λιβύην πᾶσαν καὶ τῆς Εὐρώπης τὰ πολλὰ καὶ τῆς Ἀσίας κεκαλύφθαι πρότερον, τούτοις ἐπιφέρει διότι καὶ ὁ Πόντος τῷ Ἀδρίᾳ σύρρους ἂν ὑπῆρξε κατά τινας τόπους, ἅτε δὴ τοῦ Ἴστρου ἀπὸ τῶν κατὰ τὸν Πόντον τόπων σχιζομένου καὶ ῥέοντος εἰς ἑκατέραν τὴν θάλατταν διὰ τὴν θέσιν τῆς χώρας. Ἀλλ' οὔτ' ἀπὸ τῶν κατὰ τὸν Πόντον μερῶν ὁ Ἴστρος τὰς ἀρχὰς ἔχει, ἀλλὰ τἀναντία ἀπὸ τῶν ὑπὲρ τοῦ Ἀδρίου ὀρῶν· οὔτ' εἰς ἑκατέραν τὴν θάλατταν ῥεῖ, ἀλλ' εἰς τὸν Πόντον μό νον, σχίζεταί τε πρὸς αὐτοῖς μόνον τοῖς στόμασι. κοινὴν δέ τινα τῶν πρὸ αὐτοῦ τισιν ἄγνοιαν ταύτην ἠγνόηκεν, ὑπολαβοῦσιν εἶναί τινα ὁμώνυμον τῷ Ἴστρῳ ποταμὸν ἐκβάλλοντα εἰς τὸν Ἀδρίαν ἀπεσχισμένον αὐτοῦ, ἀφ' οὗ καὶ τὸ γένος Ἴστρων, δι' οὗ φέρεται, λαβεῖν τὴν προσηγορίαν, καὶ τὸν Ἰάσονα ταύτῃ ποιήσασθαι τὸν ἐκ τῶν Κόλχων ἀνάπλουν. 16. Πρὸς δὲ τὴν ἀθαυμαστίαν τῶν τοιούτων μεταβολῶν, οἵας ἔφαμεν αἰτίας εἶναι τῶν ἐπικλύσεων καὶ τῶν τοιούτων παθῶν, οἷα εἴρηται τὰ κατὰ τὴν Σικελίαν καὶ τὰς αἰόλου νήσους καὶ Πιθηκούσσας, ἄξιον παραθεῖναι καὶ ἄλλα πλείω τῶν ἐν ἑτέροις τόποις ὄντων ἢ γενομένων ὁμοίων τούτοις. Ἀθρόα γὰρ τὰ τοιαῦτα παραδείγματα πρὸ ὀφθαλμῶν τεθέντα παύσει τὴν ἔκπληξιν. νυνὶ δὲ τὸ ἄηθες ταράττει τὴν αἴσθησιν καὶ δείκνυσιν ἀπειρίαν τῶν φύσει συμβαινόντων καὶ τοῦ βίου παντός, οἷον εἴ τις λέγοι τὰ περὶ Θήραν καὶ Θηρασίαν νήσους ἱδρυμένας ἐν τῷ μεταξὺ πόρῳ Κρήτης καὶ τῆς Κυρηναίας, ὧν ἡ Θήρα μητρόπολίς ἐστι τῆς Κυρήνης, καὶ τὴν αἴγυπτον καὶ πολλὰ μέρη τοιαῦτα τῆς Ἑλλάδος. ἀνὰ μέσον γὰρ Θήρας καὶ Θηρασίας ἐκπεσοῦσαι φλόγες ἐκ τοῦ πελάγους ἐφ' ἡμέρας τέτταρας, ὥστε πᾶσαν ζεῖν καὶ φλέγεσθαι τὴν θάλατταν, ἀνεφύσησαν κατ' ὀλίγον ἐξαιρομένην ὡς ἂν ὀργανικῶς συντιθεμένην ἐκ μύδρων νῆσον ἐπέχουσαν δώδεκα σταδίων τὴν περίμετρον. Μετὰ δὲ τὴν παῦλαν τοῦ πάθους ἐθάρρησαν πρῶτοι Ῥόδιοι θαλαττοκρατοῦντες ἐπιπροσπλεῦσαι τῷ τόπῳ καὶ Ποσειδῶνος Ἀσφαλίου ἱερὸν ἱδρύσασθαι κατὰ τὴν νῆσον. Ἐν δὲ τῇ Φοινίκῃ φησὶ Ποσειδώνιος γενομένου σεισμοῦ καταποθῆναι πόλιν ἱδρυμένην ὑπὲρ Σιδῶνος, καὶ αὐτῆς δὲ Σιδῶνος σχεδόν τι τὰ δύο μέρη πεσεῖν, ἀλλ' οὐκ ἀθρόως, ὥστε μὴ πολὺν φθόρον ἀνθρώπων γενέσθαι. τὸ δ' αὐτὸ πάθος καὶ ἐπὶ τὴν Συρίαν ὅλην διέτεινε, μετρίως δέ πως. Διέβη δὲ καὶ ἐπί τινας νήσους τάς τε Κυκλάδας καὶ τὴν εὔβοιαν, ὥστε τῆς Ἀρεθούσης ἔστι δ' ἐν Χαλκίδι κρήνη τὰς πηγὰς ἀποτυφλωθῆναι, συχναῖς δ' ἡμέραις ὕστερον ἀναβλύσαι κατ' ἄλλο στόμιον, μὴ παύεσθαι δὲ σειομένην τὴν νῆσον κατὰ μέρη πρὶν ἢ χάσμα γῆς ἀνοιχθὲν ἐν τῷ Ληλάντῳ πεδίῳ πηλοῦ διαπύρου ποταμὸν ἐξήμεσε. 17. Πολλῶν δὲ συναγωγὰς ποιησαμένων τοιαύτας, ἀρκέσει τὰ ὑπὸ τοῦ Σκηψίου Δημητρίου συνηγμένα οἰκείως παρατεθέντα. Μνησθεὶς γὰρ τῶν ἐπῶν τούτων,
Κρουνὼ δ' ἵκανον καλλιρρόω, ἔνθα τε πηγαὶ οὐκ ἐᾷ θαυμάζειν, εἰ νῦν ἡ μὲν τοῦ ψυχροῦ ὕδατος μένει πηγή, ἡ δὲ τοῦ θερμοῦ οὐχ ὁρᾶται. δεῖν γάρ φησιν αἰτιᾶσθαι τὴν ἔκλειψιν τοῦ θερμοῦ ὕδατος. μιμνήσκεται δὲ πρὸς ταῦτα τῶν ὑπὸ Δημοκλέους λεγομένων, σεισμούς τινας μεγάλους τοὺς μὲν πάλαι περὶ Λυδίαν γενομένους καὶ Ἰωνίαν μέχρι τῆς Τρωάδος ἱστοροῦντος, ὑφ' ὧν καὶ κῶμαι κατεπόθησαν καὶ Σίπυλος κατεστράφη κατὰ τὴν Ταντάλου βασιλείαν καὶ ἐξ ἑλῶν λίμναι ἐγένοντο, [**] τὴν δὲ Τροίαν ἐπέκλυσε κῦμα. Ἡ δὲ Φάρος ἡ κατ' Αἴγυπτον ἦν ποτε πελαγία, νῦν δὲ τρόπον τινὰ χερρόνησος γέγονεν· ὡς δ' αὕτως καὶ Τύρος καὶ Κλαζομεναί. Ἡμῶν δ' ἐπιδημούντων ἐν Ἀλεξανδρείᾳ τῇ πρὸς Αἰγύπτῳ, περὶ Πηλούσιον καὶ τὸ Κάσιον ὄρος μετεωρισθὲν τὸ πέλαγος ἐπέκλυσε τὴν γῆν καὶ νῆσον ἐποίησε τὸ ὄρος, ὥστε πλωτὴν γενέσθαι τὴν παρὰ τὸ Κάσιον ὁδὸν τὴν ἐς Φοινίκην. Οὐδὲν οὖν θαυμαστὸν οὐδ' εἴ ποτε διαστὰς ὁ ἰσθμὸς ἢ ἵζημα λα βὼν ὁ διείργων τὸ Αἰγύπτιον πέλαγος ἀπὸ τῆς Ἐρυθρᾶς θαλάττης ἀποφανεῖ πορθμὸν καὶ σύρρουν ποιήσει τὴν ἐκτὸς θάλατταν τῇ ἐντός, καθάπερ ἐπὶ τοῦ κατὰ τὰς Ἡρακλέους στήλας πορθμοῦ συνέβη. εἴρηται δὲ περὶ τῶν τοιούτων τινὰ καὶ ἐν ἀρχαῖς τῆς πραγματείας, ἃ δεῖ συμφέρειν εἰς ἓν καὶ τὴν πίστιν ἰσχυρὰν κατασκευάζειν τῶν τε τῆς φύσεως ἔργων καὶ τῶν ἄλλως γινομένων μεταβολῶν. 18. Τόν τε Πειραιᾶ νησιάζοντα πρότερον καὶ πέραν τῆς ἀκτῆς κείμενον οὕτως φασὶν ὀνομασθῆναι· ὑπεναντίως δ' ἡ Λευκὰς Κορινθίων τὸν ἰσθμὸν διακοψάντων νῆσος γέγονεν, ἀκτὴ πρότερον οὖσα· περὶ ταύτης γάρ φασι λέγειν τὸν Λαέρτην,
Οἷος Νήριτον
εἷλον ἐυκτίμενον πτολίεθρον, Ἐνταῦθα μὲν δὴ διακοπαὶ χειρότμητοι γεγόνασιν, ἀλλαχόθι δὲ προσχώσεις ἢ γεφυρώσεις, καθάπερ ἐπὶ τῆς πρὸς Συρακούσαις νήσου νῦν μὲν γέφυρά ἐστιν ἡ συνάπτουσα αὐτὴν πρὸς τὴν ἤπειρον, πρότερον δὲ χῶμα, ὥς φησιν Ἴβυκος, λογαίου λίθου, ὃν καλεῖ ἐκλεκτόν. Βοῦρα δὲ καὶ Ἑλίκη ἡ μὲν ὑπὸ χάσματος ἡ δ' ὑπὸ κύματος ἠφανίσθη. Περὶ Μεθώνην δὲ τὴν ἐν τῷ Ἑρμιονικῷ κόλπῳ ὄρος ἑπταστάδιον τὸ ὕψος ἀνεβλήθη γενηθέντος ἀναφυσήματος φλογώδους, μεθ' ἡμέραν μὲν ἀπρόσιτον ὑπὸ τοῦ θερμοῦ καὶ τῆς θειώδους ὀδμῆς, νύκτωρ δ' ἐκλάμπον πόρρω καὶ θερμαῖνον ὥστε ζεῖν τὴν θάλατταν ἐπὶ σταδίους πέντε, θολερὰν δ' εἶναι καὶ ἐπὶ εἴκοσι σταδίους, προσχωσθῆναι δὲ πέτραις ἀπορρῶξι πύργων οὐκ ἐλάττοσιν. Ὑπὸ δὲ τῆς Κωπαίίδος λίμνης ἥ τε Ἄρνη κατεπόθη καὶ Μίδεια, ἃς ὠνόμακεν ὁ ποιητὴς ἐν τῷ Καταλόγῳ· Οἵ τε πολυστάφυλον Ἄρνην ἔχον, οἵ τε Μίδειαν.
Καὶ ὑπὸ τῆς Βιστονίδος δὲ καὶ τῆς νῦν Ἀφνίτιδος λίμνης ἐοίκασι κα τακεκλύσθαι πόλεις τινὲς Θρᾳκῶν, οἱ δὲ καὶ Τρηρῶν, ὡς συνοίκων τοῖς Θρᾳξὶν ὄντων.
Καὶ ἡ πρότερον δὲ Ἀρτεμίτα λεγομένη μία τῶν Ἐχινάδων νήσων ἤπειρος γέγονε· καὶ ἄλλας δὲ τῶν περὶ τὸν Ἀχελῶον νησίδων
τὸ αὐτὸ πάθος φασὶ παθεῖν ἐκ τῆς ὑπὸ τοῦ ποταμοῦ προχώσεως τοῦ πελάγους, συγχοῦνται δὲ καὶ αἱ λοιπαί, ὡς Ἡρόδοτός φησι.
Καὶ
Αἰτωλικαὶ δέ τινες ἄκραι εἰσὶ νησίζουσαι πρότερον· καὶ ἡ Ἀστερία ἤλλακται, ἣν Ἀστερίδα φησὶν ὁ ποιητής· 19. Ἡ δὲ Ἄντισσα νῆσος ἦν πρότερον, ὡς Μυρσίλος φησί· τῆς [ δὲ] Λέσβου καλουμένης πρότερον Ἴσσης, καὶ τὴν νῆσον Ἄντισσαν καλεῖσθαι συνέβη· νῦν δὲ τῆς Λέσβου πόλις ἐστίν. Οἱ δὲ καὶ τὴν Λέσβον τῆς Ἴδης ἀπερρωγέναι πεπιστεύκασι, καθάπερ τὴν Προχύτην καὶ τὴν Πιθηκοῦσσαν τοῦ Μισηνοῦ, τὰς δὲ Καπρέας τοῦ Ἀθηναίου, τὴν Σικελίαν δὲ τῆς Ῥηγίνης, τὴν Ὄσσαν δὲ τοῦ Ὀλύμπου. γεγόνασι δὲ καὶ περὶ ταῦτα τοιαῦται μεταβολαί. Καὶ ὁ Λάδων δὲ ὁ ἐν Ἀρκαδίᾳ ἐπέσχε ποτὲ τὸ ῥεῦμα. Δοῦρις δὲ τὰς Ῥόγας τὰς κατὰ Μηδίαν ὠνομάσθαι φησὶν ὑπὸ σεισμῶν ῥαγείσης τῆς περὶ τὰς Κασπίους πύλας γῆς, ὥστε ἀνατραπῆναι πόλεις συχνὰς καὶ κώμας καὶ ποταμοὺς ποικίλας μεταβολὰς δέξασθαι. Ἴων δὲ περὶ τῆς εὐβοίας φησὶν ἐν Ὀμφάλῃ Σατύροις
Εὐβοίίδα μὲν γῆν λεπτὸς εὐρίπου κλύδων 20. Δημήτριος δ' ὁ Καλλατιανὸς τοὺς καθ' ὅλην τὴν Ἑλλάδα γενομένους ποτὲ σεισμοὺς διηγούμενος τῶν τε Λιχάδων νήσων καὶ τοῦ Κηναίου τὰ πολλὰ καταδῦναί φησι, τά τε θερμὰ τὰ ἐν αἰδηψῷ καὶ Θερμοπύλαις ἐπὶ τρεῖς ἡμέρας ἐπισχεθέντα πάλιν ῥυῆναι, τὰ δ' ἐν Αἰδηψῷ καὶ καθ' ἑτέρας ἀναρραγῆναι πηγάς· Ὠρεοῦ δὲ τὸ πρὸς θαλάττῃ τεῖχος καὶ τῶν οἰκιῶν περὶ ἑπτακοσίας συμπεσεῖν, Ἐχίνου τε καὶ Φαλάρων καὶ Ἡρακλείας τῆς Τραχῖνος, τῶν μὲν πολὺ μέρος πεσεῖν, Φαλάρων δὲ καὶ ἐξ ἐδάφους ἀνατραπῆναι τὸ κτίσμα. παραπλήσια δὲ συμβῆναι καὶ Λαμιεῦσι καὶ Λαρισαίοις· καὶ Σκάρφειαν δ' ἐκ θεμελίων ἀναρριφῆναι, καὶ καταδῦναι σώματα χιλίων καὶ ἑπτακοσίων οὐκ ἐλάττω, Θρονίους δ' ὑπὲρ ἥμισυ τούτων· κῦμά τε ἐξαρθὲν τριχῆ τὸ μὲν πρὸς Τάρφην ἐνεχθῆναι καὶ Θρόνιον, τὸ δὲ πρὸς Θερμοπύλας, ἄλλο δὲ εἰς τὸ πεδίον ἕως τοῦ Φωκικοῦ Δαφνοῦντος, πηγάς τε ποταμῶν ξηρανθῆναι πρὸς ἡμέρας τινάς· τὸν δὲ Σπερχειὸν ἀλλάξαι τὸ ῥεῖθρον καὶ ποιῆσαι πλωτὰς τὰς ὁδούς, τὸν δὲ Βοάγριον κατ' ἄλλης ἐνεχθῆναι φάραγγος, καὶ Ἀλόπης δὲ καὶ Κύνου καὶ Ὀποῦντος πολλὰ καταβλαβῆναι μέρη, οἶον δὲ τὸ ὑπερκείμενον φρούριον πᾶν ἀνατραπῆναι, Ἐλατείας δὲ τοῦ τείχους καταρραγῆναι μέρος, περὶ δὲ Ἄλπωνον θεσμοφορίων ὄντων πέντε καὶ εἴκοσι παρθένους ἀναδραμούσας εἰς πύργον τῶν ἐλλιμενίων κατὰ θέαν, πεσόντος τοῦ πύργου, πεσεῖν καὶ αὐτὰς εἰς τὴν θάλατταν. Λέγουσι δὲ καὶ τῆς Ἀταλάντης τῆς πρὸς εὐβοίᾳ τὰ μέσα ῥήγματος γενομένου διάπλουν δέξασθαι, μεταξὺ καὶ τῶν πεδίων ἔνια καὶ μέχρι εἴκοσι σταδίων ἐπικλυσθῆναι, καὶ τριήρη τινὰ ἐκ τῶν νεωρίων ἐξαιρεθεῖσαν ὑπερπεσεῖν τοῦ τείχους. 21. Προστιθέασι δὲ καὶ τὰς ἐκ τῶν μεταστάσεων μετα βολὰς ἐπὶ πλέον τὴν ἀθαυμαστίαν ἡμῖν κατασκευάζειν ἐθέλοντες, ἣν ὑμνεῖ Δημόκριτος καὶ οἱ ἄλλοι φιλόσοφοι πάντες· παράκειται γὰρ τῷ ἀθαμβεῖ καὶ ἀταράχῳ καὶ ἀνεκπλήκτῳ. Οἷον Ἰβήρων μὲν τῶν ἑσπερίων εἰς τοὺς ὑπὲρ τοῦ Πόντου καὶ τῆς Κολχίδος τόπους μετῳκισμένων οὓς ὁ Ἀράξης, ὥς φησιν Ἀπολλόδωρος, ἀπὸ τῆς Ἀρμενίας ὁρίζει, Κῦρος δὲ μᾶλλον καὶ τὰ ὄρη τὰ Μοσχικά, Αἰγυπτίων δ' εἴς τε αἰθίοπας καὶ Κόλχους, Ἑνετῶν δ' ἐκ Παφλαγονίας ἐπὶ τὸν Ἀδρίαν. Ἅπερ καὶ ἐπὶ τῶν Ἑλληνικῶν ἐθνῶν συνέβη, Ἰώνων καὶ Δωριέων καὶ Ἀχαιῶν καὶ αἰολέων· καὶ αἰνιᾶνες οἱ νῦν αἰτωλοῖς ὅμοροι περὶ τὸ Δώτιον ᾦκουν καὶ τὴν Ὄσσαν μετὰ Περραιβῶν· καὶ αὐτοὶ δὲ Περραιβοὶ μετανάσται τινές. πλήρης δέ ἐστι τῶν τοιούτων παραδειγμάτων ἡ νῦν ἐνεστῶσα πραγματεία. Τινὰ μὲν οὖν καὶ πρόχειρα τοῖς πολλοῖς ἐστιν· αἱ δὲ τῶν Καρῶν καὶ Τρηρῶν καὶ Τεύκρων μεταναστάσεις καὶ Γαλατῶν, ὁμοῦ δὲ καὶ τῶν ἡγεμόνων οἱ ἐπὶ πολὺ ἐκτοπισμοί, Μάδυός τε τοῦ Σκυθικοῦ καὶ Τεαρκὼ τοῦ αἰθίοπος καὶ Κώβου τοῦ Τρηρὸς καὶ Σεσώστριος καὶ Ψαμμιτίχου τῶν Αἰγυπτίων καὶ Περσῶν τῶν ἀπὸ Κύρου μέχρι Ξέρξου οὐχ ὁμοίως ἐν ἑτοίμῳ πᾶσίν εἰσιν. Οἵ τε Κιμμέριοι, οὓς καὶ Τρῆρας ὀνομάζουσιν, ἢ ἐκείνων τι ἔθνος, πολλάκις ἐπέδραμον τὰ δεξιὰ μέρη τοῦ Πόντου καὶ τὰ συνεχῆ αὐτοῖς, τοτὲ μὲν ἐπὶ Παφλαγόνας τοτὲ δὲ καὶ Φρύγας ἐμβαλόντες, ἡνίκα Μίδαν αἷμα ταύρου πιόντα φασὶν ἀπελθεῖν εἰς τὸ χρεών. Λύγδαμις δὲ τοὺς αὑτοῦ ἄγων μέχρι Λυδίας καὶ Ἰωνίας ἤλασε καὶ Σάρδεις εἷλεν, ἐν Κιλικίᾳ δὲ διεφθάρη. Πολλάκις δὲ καὶ οἱ Κιμμέριοι καὶ οἱ Τρῆρες ἐποιήσαντο τὰς τοιαύτας ἐφόδους· τοὺς δὲ Τρῆρας καὶ Κῶβον ὑπὸ Μάδυος τὸ τελευταῖον ἐξελαθῆναί φασι τοῦ τῶν Σκυθῶν βασιλέως. Ταῦτα μὲν εἰρήσθω πρὸς ἅπασαν κοινῇ τὴν περίοδον τῆς γῆς ἔχοντα οἰκείαν ἱστορίαν. 22. Ἐπάνιμεν δ' ἐπὶ τὰ ἑξῆς, ἀφ' ὧν παρέβημεν. Τοῦ γὰρ Ἡροδότου μηδένας ὑπερβορείους εἶναι φήσαντος, μηδὲ γὰρ ὑπερνοτίους, γελοίαν φησὶν εἶναι τὴν ἀπόδειξιν καὶ ὁμοίαν ὁ Ἐρατοσθένης τῷ σοφίσματι τούτῳ, εἴ τις λέγοι μηδένας εἶναι ἐπιχαιρεκάκους, μηδὲ γὰρ ἐπιχαιραγάθους. Κατὰ τύχην τε εἶναι καὶ ὑπερνοτίους· κατὰ γοῦν τὴν αἰθιοπίαν μὴ πνεῖν νότον, ἀλλὰ κατωτέρω. θαυμαστὸν δ' εἰ καθ' ἕκαστον κλίμα πνέοντος ἀνέμου καὶ πανταχοῦ τοῦ ἀπὸ μεσημβρίας νότου προσαγορευομένου, ἔστι τις οἴκησις ἐν ᾗ τοῦτο μὴ συμβαίνει. τοὐναντίον γὰρ οὐ μόνον Αἰθιοπία ἔχοι ἂν τὸν καθ' ἡμᾶς Νότον, ἀλλὰ [ κα]ὶ ἡ ἀνωτέρω πᾶσα μέχρι τοῦ ἰσημερινοῦ. Εἰ δ' ἄρα, τοῦ Ἡροδότου τοῦτ' ἐχρῆν αἰτιᾶσθαι, ὅτι τοὺς ὑπερβορείους τούτους ὑπέλαβε λέγεσθαι, παρ' οἷς ὁ βορέας οὐ πνεῖ. καὶ γὰρ εἰ οἱ ποιηταὶ μυθικώτερον οὕτω φασίν, οἵ γ' ἐξηγούμενοι τὸ ὑγιὲς ἂν ἀκούσαιεν, ὑπερβορείους τοὺς βορειοτάτους λέγεσθαι (φασι). Ὅρος δὲ τῶν μὲν βορείων ὁ πόλος, τῶν δὲ νοτίων ὁ ἰσημερινός· καὶ τῶν ἀνέμων δ' ὁ αὐτὸς ὅρος. 23. Ἑξῆς δὲ λέγει πρὸς τοὺς φανερῶς πεπλασμένα καὶ ἀδύνατα λέγοντας, τὰ μὲν ( γὰρ) ἐν μύθου σχήματι τὰ δ' ἱστορίας, περὶ ὧν οὐκ ἄξιον μεμνῆσθαι· οὐδ' ἐκεῖνον ἐχρῆν ἐν ὑποθέσει τοιαύτῃ φλυάρους ἐπισκοπεῖν. Ἡ μὲν οὖν πρώτη διέξοδος αὐτῷ τῶν ὑπομνημάτων τοιαύτη. |
CHAPITRE IV 1. Dans la seconde série, après avoir procédé en quelque sorte à une révision de toute la géographie, Ératosthène expose sur cette science ses vues ou opinions particulières ; mais celles-ci peuvent à leur tour avoir besoin qu'on les rectifie, au moins sur certains points, et c'est ce que nous essayerons de faire à l'occasion. Ce qu'il dit en commençant de la nécessité d'introduire dans la géographie les hypothèses reçues en mathématique et en physique est juste, et il a raison de poser en fait que, si la terre, comme l'univers lui-même, a réellement la forme sphérique, la partie habitée de la terre figurera aussi un cercle; sur mainte autre proposition semblable, il a raison également. En revanche, ce qu'il dit de la grandeur de la terre est contesté par les géographes venus après lui, et la mesure qu'il en a donnée n'a pas été généralement ratifiée, bien qu'Hipparque, dans le travail où il note les apparences célestes pour chaque lieu, se soit servi des distances mêmes mesurées par Ératosthène sur le méridien de Méroé, d'Alexandrie et du Borysthène, en déclarant qu'elles différaient peu de la vérité. Dans une autre question aussi (celle de la figure de la terre, qu'Ératosthène aborde ensuite), à voir les développements sans fin où il entre pour démontrer que la terre, y compris l'élément liquide, et de même que le ciel, affecte la forme sphérique, on peut trouver, ce semble, qu'il s'est tout à fait écarté de son sujet, car il lui suffisait de toucher quelques mots d'une question aussi générale. 2. De là passant à la détermination de la largeur de la terre habitée, il compte à partir de Méroé, et sur le méridien même de cette ville, 10 000 stades jusqu'à Alexandrie, de ce point-là maintenant jusqu'à l'Hellespont environ 8100 stades, 5000 encore jusqu'au Borysthène, enfin jusqu'au parallèle de Thulé, terre que Pythéas place à 6 journées de navigation au N. de la Bretagne et dans le voisinage même de la mer Glaciale, quelque chose encore comme 11 500 stades ; ajoutons nous-même à ces nombres, pour la région située au-dessus de Méroé, et de façon à y comprendre l'île des Égyptiens, la région Cinnamomifère et la Taprobane, 3400 stades, et la largeur totale sera, on le voit, de 38 000 stades. 3. Nous lui concéderons volontiers les autres distances sur lesquelles on s'accorde assez généralement, mais quel homme sensé pourra lui passer le nombre de stades qu'il indique pour la distance du Borysthène au parallèle de Thulé? Le seul auteur, en effet, qui parle de Thulé est Pythéas, que tout le monde connaît pour le plus menteur des hommes. Les autres voyageurs qui ont visité la Bretagne et Ierné ne disent mot de Thulé, bien qu'ils mentionnent différentes petites îles, groupées autour de la Bretagne. D'autre part, la Bretagne, dont la longueur, égale à peu de chose près à celle de la Celtique, laquelle lui fait face et par ses extrémités correspondantes aux siennes la détermine exactement, ne dépasse pas 5000 stades (dans les deux pays, en flet, les points extrêmes à l'orient et à l'occident sont situés juste vis-à-vis, et ceux de l'est, à savoir le Cantium et l'embouchure du Rhin, se trouvent même tellement rapprochés qu'ils sont en vue l'un de l'autre), la Bretagne, dis-je, aurait, au rapport de Pythéas, 20000 stades de longueur et la distance du Cantium à la côte de Celtique serait de plusieurs journées de navigation. Sur les Ostimii pareillement, et sur les contrées qui s'étendent au delà du Rhin et jusqu'à la Scythie, Pythéas n'a publié que des renseignements controuvés. Or, quiconque ment à ce point touchant des lieux connus n'a guère pu dire la vérité en parlant de contrées absolument ignorées. 4. Ajoutons que le parallèle qui coupe le Borysthène doit être le même que celui qui passe par la Bretagne, au jugement du moins d'Hipparque et d'autres auteurs, dont la conjecture se fonde sur l'identité du parallèle de Byzance et de celui de Massalia, identité résultant de ce fait que le rapport de l'ombre au gnomon qu'Ératosthène [d'après Pythéas] indique pour Massalia Hipparque dit l'avoir trouvé exactement pareil à Byzance dans des circonstances de temps homonymes. Or, de Massalia au centre de la Bretagne il n'y a pas plus de 5000 stades; avançons encore au delà de ce point d'une distance de 4000 stades au plus (ce qui nous porte à peu près à la hauteur d'Ierné), nous nous trouverons là sous un climat à peine habitable ; et plus loin par conséquent, c'est-à-dire dans ces parages où Ératosthène relègue Thulé, le climat sera absolument inhabitable pour l'homme. Quelles sont maintenant les données ou simplement les idées préconçues d'après lesquelles il a porté ainsi à 11 500 stades la distance entre le parallèle de Thulé et celui du Borysthène, c'est ce que je n'aperçois pas. 5. Mais, s'étant trompé sur la largeur de la terre habitée, Ératosthène devait forcément aussi se fourvoyer dans l'estimation qu'il a faite de sa longueur : une longueur double au moins de la largeur pour la partie connue de notre terre, telles sont, en effet, les dimensions admises et par les géographes modernes et par les plus éclairés d'entre les géographes anciens. J'ajoute que ces dimensions se prennent d'ordinaire depuis l'extrémité de l'Inde jusqu'à celle de l'Ibérie, pour la longueur, et pour la largeur, depuis le parallèle de l'Éthiopie jusqu'à celui d'Ierné. Au lieu de cela, ayant pris la largeur en question entre l'extrémité de l'Éthiopie et le parallèle de Thulé, Ératosthène a dû étendre outre mesure la longueur, pour que cette dimension restât toujours plus grande que le double de la largeur marquée. Il compte déjà, rien que pour l'Inde, 16 000 stades de longueur jusqu'à l'Indus, et notez qu'il n'a mesuré cette contrée que dans sa partie la plus étroite et sans comprendre dans son calcul ces promontoires ou pointes extrêmes qui prolongent le continent indien et qui lui eussent donné 3000 stades de plus; de l'Indus maintenant aux Pyles Caspiennes il compte 14 000 stades; plus 10000 jusqu'à l'Euphrate; 5000 de l'Euphrate au Nil; 1300 en plus jusqu'à la bouche Canopique; de là à Carthage 13 500 ; et jusqu'aux Colonnes d'Hercule, 8000 stades au minimum, en tout 70800 stades. Mais à ce qui précède il croit qu'on doit ajouter encore toute cette courbe que décrit la côte d'Europe, passé les Colonnes d'Hercule, juste en face de l'Ibérie et dans la direction du couchant (laquelle courbe ne mesure pas moins de 3000 stades) et qui plus est les différents caps ou promontoires qui prolongent cette côte, et parmi lesquels on distingue le Cabaeum dans le pays des Ostimii, avec les îles circonvoisines, avec Uxisamé, notamment, qui se trouve la plus reculée de tout le groupe, sa distance de la côte étant, au dire de Pythéas, de trois journées de navigation : effectivement, il a compris dans son calcul les dernières terres susnommées, à savoir les différents caps de cette côte, tout le territoire des Ostimii, et l'île d'Uxisamé avec les autres îles du même groupe, bien qu'elles ne pussent en aucune manière contribuer à la longueur cherchée, puisque, situées comme elles sont bien plus au nord, elles dépendent de la Celtique et non de l'Ibérie, si même elles existent et ne sont pas plutôt à considérer comme de pures inventions de Pythéas. Ce n'est pas tout, aux différentes longueurs partielles qu'il indique il a dû ajouter encore 2000 stades du côté de l'ouest, et autant du côté de l'est, pour conserver la proportion admise et empêcher que la largeur ne surpassât la moitié de la longueur. 6. Ératosthène entre ensuite dans de nouveaux développements pour nous convaincre que les lois générales de la physique veulent qu'on fasse toujours plus grand l'intervalle entre le levant et le couchant, et il en conclut que lesdites lois de la physique s'accordent avec ses précédents calculs pour prouver que la plus grande dimension de notre terre habitée, autrement dit sa longueur, doit être prise du levant au couchant. [Tel est le cas d'ailleurs, ajoute-t-il, de notre zone elle-même, c'est aussi dans ce sens qu'elle est le plus étendue], et, ses deux extrémités se rejoignant, elle forme ce que les mathématiciens appellent le cercle, si bien qu'on pourrait aller sur mer depuis l''Ibérie jusqu'à l'Inde eu suivant toujours le même parallèle, n'était l'immensité de l'Atlantique, qui représente le complément de la distance indiquée ci-dessus, c'est-à-dire plus du tiers du cercle total, le parallèle d'Athènes, sur lequel nous avons pris le précédent stadiasme entre l'Inde et l'Ibérie, ne mesurant pas tout à fait 200000 stades ». Mais ici encore Ératosthène s'est trompé ; car ce qui est vrai mathématiquement parlant et de la zone tempérée tout entière, de cette zone qui est la nôtre, et dont notre terre habitée n'est qu'une partie, peut ne pas l'être de la terre habitée prise isolément. Qu'appelons-nous en effet terre habitée? Uniquement cette portion de la terre que nous habitons et qu'à ce titre nous connaissons. Or il se peut faire que dans la même zone tempérée il y ait deux terres habitées, plus même, surtout à proximité de ce parallèle, qui, passant par Athènes, coupe toute la mer Atlantique. Ératosthène reprend alors sa démonstration de la sphéricité de la terre, et, comme il insiste sur ses mêmes arguments, nous pourrions, nous, répéter aussi nos mêmes critiques, le blâmant surtout de ce qu'il ne cesse d'attaquer Homère sur les mêmes choses. 7. A propos, maintenant, des continents, après avoir rappelé combien d'opinions différentes les géographes ont émises sur cette question, et comment la division des uns à l'aide de fleuves, tels que le Nil et le Tanaïs, fait des continents autant d'îles, tandis que la division des autres au moyen d'isthmes, soit de l'isthme qui sépare la Caspienne, de la mer du Pont, soit de cet autre isthme qui se trouve resserré entre la mer Érythrée et l'Ecregma, réduit les continents à l'état de presqu'îles ou de péninsules, Ératosthène ajoute qu'il n'est nullement frappé pour sa part de l'utilité pratique d'une pareille recherche, et qu'il ne saurait y voir qu'un de ces sujets de dispute si chers à l'école de Démocrite. « En effet, dit-il, quand il n'y a point de limites exactement marquées, comme c'est le cas pour Colyttus et pour Mélité, que ne séparent ni stèles, ni mur d'enceinte, on peut bien dire vaguement, ceci est Colyttus et ceci Milité, mais l'on ne peut point préciser le lieu où passe en réalité la ligne de démarcation commune, et voilà comme entre voisins il y a eu souvent contestation au sujet de telle ou telle localité, au sujet de Thyrées, par exemple entre les Argiens et les Lacédémoniens, et au sujet d'Oropos entre les Athéniens et les Béotiens. D'ailleurs, continue-t-il, en distinguant trois continents, les Grecs n'avaient pas en vue l'ensemble de la terre habitée, mais seulement la partie qu'eux-mêmes en occupaient et celle qui lui fait face, et qui, occupée alors par les Cariens, l'est aujourd'hui par les Ioniens et les populations limitrophes des Ioniens ; et ce n'est qu'avec le temps, quand ils eurent poussé plus avant, quand ils eurent acquis la connaissance d'un plus grand nombre de lieux, qu'ils généralisèrent ainsi leur division primitive. » - Halte-là! dirons-nous à notre tour (et en commençant par la fin nous n'entendons pas disputer à la façon de Démocrite, mais bien à la façon d'Ératosthène lui-même), voulez-vous dire que les premiers qui imaginèrent cette division des trois continents étaient les mêmes qui s'étaient proposé de tracer une simple ligne de démarcation entre leurs possessions et celles des Cariens situées vis-à-vis? Ou bien, entendez-vous (et ceci en effet nous paraît plus probable) qu'après ces Grecs qui n'avaient envisagé pour leur opération que la Grèce et la Carie, avec une faible portion peut-être des pays qui y touchent, sans penser ni à l'Europe, ni à l'Asie, non plus qu'à la Libye, il en vint d'autres qui, embrassant, autant du moins que la chose était possible, tout l'ensemble de la terre habitée, proposèrent cette nouvelle division en trois parties? - Soit, mais dans ce cas-là comment admettre que la première division ne portait pas déjà sur la terre habitée? Comment concevoir qu'à aucun moment on ait pu déterminer trois parties et désigner chacune de ces parties sous le nom de continent, sans avoir conçu, au préalable, l'idée nette du tout qu'il s'agissait de partager? Ou, si l'on veut absolument que, sans prétendre embrasser la terre habitée dans son ensemble, les auteurs de cette division se soient proposé uniquement d'en partager une des parties, que ne nous dit-on dans quelle partie de la terre habitée ils avaient entendu ranger l'Asie, l'Europe, ou ce qu'ils comprenaient sous la dénomination générale de continent? La bévue, on le voit, est un peu forte. 8. En voici une autre pourtant qui est plus forte encore : on commence par déclarer qu'on ne voit pas bien l'utilité pratique que peut offrir la recherche des limites, on cite à ce propos l'exemple de Colyttus et de Mélité, puis on fait tout à coup volte-face, et l'on dit juste le contraire : et en effet, si les guerres au sujet de Thyrées et d'Oropos sont nées de l'ignorance où l'on était des limites, c'est qu'il n'y a rien apparemment qui soit d'une utilité plus pratique que de délimiter exactement les territoires qui se touchent. - Mais peut-être a-t-on voulu dire simplement que si, pour de petites localités, voire même pour chaque Etat pris isolément, une délimitation rigoureuse paraît offrir de l'utilité, celle des continents est absolument superflue? — « Non, répondrons-nous encore, celle-ci pas plus que les autres, les continents eux-mêmes pouvant devenir un sujet de contestation, entre deux conquérants par exemple, qui, possédant l'un l'Asie et l'autre la Libye, se disputeraient l'Égypte, la basse Égypte s'entend. » Du reste sans insister autrement sur un cas aussi rare, disons qu'il importe, absolument parlant, d'établir de grandes divisions, qui, en servant à la délimitation exacte des continents, puissent encore au besoin s'étendre à l'ensemble de la terre habitée, et que, pour une opération de ce genre, il n'y a pas à s'inquiéter si, en séparant les continents par des fleuves, on laisse quelques parties de la limite indéterminées : [c’est là en effet un inconvénient inévitable] les fleuves ne remontant pas jusqu'à l'Océan, et ne pouvant par conséquent enfermer et envelopper les continents comme ils feraient des îles. 9. Pour terminer maintenant la présente série de ses Mémoires, Ératosthène rappelle que certains auteurs ont proposé une autre division du genre humain en deux groupes, à savoir les Grecs et les Barbares; mais, loin de l'adopter, il la compare à ce conseil donné naguère à Alexandre par quelques-uns de ses courtisans, de traiter tous les peuples grecs en amis et en ennemis tous les peuples barbares, et érige en principe que la seule division possible à établir entre les hommes est celle qui a pour base le bien et le mal : « Voyez, dit-il, même parmi les peuples grecs, beaucoup sont mauvais, tandis que parmi les Barbares, sans parler des Grecs et des Romains, ces peuples si admirablement constitués, on en compte plus d'un, le peuple indien par exemple et le peuple arien, dont les mœurs sont polies et civilisées. Alexandre du reste l'entendait bien de cette façon, aussi ne tint-il aucun compte de l'avis qu'on lui donnait, et on le vit partout et toujours accueillir les hommes de mérite quels qu'ils fussent et les combler de ses faveurs. » - Mais qu'ont donc fait, dirons-nous à notre tour, ceux qui prétendaient diviser le genre humain en deux groupes, comprenant l'un les peuples dignes de mépris, et l'autre les peuples dignes de louange, si ce n'est reconnaître qu'il est des hommes chez qui domine, avec le respect des lois, le goût des lettres et de la civilisation, tandis qu'il en est d'autres chez qui dominent les penchants contraires? De sorte qu'Alexandre, loin de négliger l'avis qui lui était donné, et loin d'en prendre le contre-pied, l'avait par le fait goûté et approuvé jusqu'à y conformer même toute sa conduite, n'en ayant considéré apparemment que l'intention. FIN DU PREMIER LIVRE.
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ΚΕΦ. Δ'. 1. Ἐν δὲ τῇ δευτέρᾳ πειρᾶται διόρθωσίν τινα ποιεῖσθαι τῆς γεωγραφίας καὶ τὰς ἑαυτοῦ λέγει ὑπολήψεις, πρὸς ἃς πάλιν εἰ ἔστι τις ἐπανόρθωσις, πειρατέον προσφέρειν. Τὸ μὲν οὖν τὰς μαθηματικὰς ὑποθέσεις [ εἰσ-]άγειν καὶ φυσικὰς εὖ λέγεται, καὶ ὅτι εἰ σφαιροειδὴς ἡ γῆ καθάπερ καὶ ὁ κόσμος, περιοικεῖται, καὶ τὰ ἄλλα τὰ τοιαῦτα. Εἰ δὲ τηλικαύτη ἡλίκην αὐτὸς εἴρηκεν, οὐχ ὁμολογοῦσιν οἱ ὕστερον, [ οὐ]δ' ἐπαινοῦσι τὴν ἀναμέτρησιν· ὅμως δὲ πρὸς τὴν σημείωσιν τῶν κατὰ τὰς οἰκήσεις ἑκάστας φαινομένων προσχρῆται τοῖς διαστήμασιν ἐκείνοις Ἵππαρχος ἐπὶ τοῦ διὰ Μερόης καὶ Ἀλεξανδρείας καὶ Βορυσθένους μεσημβρινοῦ, μικρὸν παραλλάττειν φήσας παρὰ τὴν ἀλήθειαν. Καὶ περὶ τοῦ σχήματος δ' ἐν τοῖς ἑξῆς διὰ πλειόνων [ λέγων] καὶ δει κνύς, ὅτι σφαιροειδὴς καὶ ἡ γῆ σὺν τῇ ὑγρᾷ φύσει καὶ ὁ οὐρανός, ἀλλοτριολογεῖν ἂν δόξειεν· ἀρκεῖ γὰρ τὸ ἐπὶ μικρόν. 2. Ἑξῆς δὲ τὸ πλάτος τῆς οἰκουμένης ἀφορίζων φησὶν ἀπὸ μὲν Μερόης ἐπὶ τοῦ δι' αὐτῆς μεσημβρινοῦ μέχρι Ἀλεξανδρείας εἶναι μυρίους, ἐνθένδε εἰς τὸν Ἑλλήσποντον περὶ ὀκτακισχιλίους ἑκατόν, εἶτ' εἰς Βορυσθένη πεντακισχιλίους, εἶτ' ἐπὶ τὸν κύκλον τὸν διὰ Θούλης ἥν φησι Πυθέας ἀπὸ μὲν τῆς Βρεττανικῆς ἓξ ἡμερῶν πλοῦν ἀπέχειν πρὸς ἄρκτον, ἐγγὺς δ' εἶναι τῆς πεπηγυίας θαλάττης ἄλλους ὡς μυρίους χιλίους πεντακοσίους. Ἐὰν οὖν ἔτι προσθῶμεν ὑπὲρ τὴν Μερόην ἄλλους τρισχιλίους τετρακοσίους, ἵνα τὴν τῶν Αἰγυπτίων νῆσον ἔχωμεν καὶ τὴν Κινναμωμοφόρον καὶ τὴν Ταπροβάνην, ἔσεσθαι σταδίους τρισμυρίους ὀκτακισχιλίους. 3. Τὰ μὲν οὖν ἄλλα διαστήματα δεδόσθω αὐτῷ· ὡμολόγηται γὰρ ἱκανῶς· τὸ δ' ἀπὸ τοῦ Βορυσθένους ἐπὶ τὸν διὰ Θούλης κύκλον τίς ἂν δοίη νοῦν ἔχων; Ὅ τε γὰρ ἱστορῶν τὴν Θούλην Πυθέας ἀνὴρ ψευδίστατος ἐξήτασται, καὶ οἱ τὴν Βρεττανικὴν [ καὶ] Ἰέρνην ἰδόντες οὐδὲν περὶ τῆς Θούλης λέγουσιν, ἄλλας νήσους λέγοντες μικρὰς περὶ τὴν Βρεττανικήν· αὐτή τε ἡ Βρετ τανικὴ τὸ μῆκος ἴσως πώς ἐστι τῇ Κελτικῇ παρεκτεταμένη, τῶν πεντακισχιλίων σταδίων οὐ μείζων καὶ τοῖς ἄκροις τοῖς ἀντικειμένοις ἀφοριζομένη. Ἀντίκειται γὰρ ἀλλήλοις τά τε ἑῷα ἄκρα τοῖς ἑῴοις καὶ τὰ ἑσπέρια τοῖς ἑσπερίοις, καὶ τά γε ἑῷα ἐγγὺς ἀλλήλων ἐστὶ μέχρις ἐπόψεως, τό τε Κάντιον καὶ αἱ τοῦ Ῥώνου ἐκβολαί. Ὁ δὲ πλειόνων ἢ δισμυρίων τὸ μῆκος ἀποφαίνει τῆς νήσου, καὶ τὸ Κάντιον ἡμερῶν τινων πλοῦν ἀπέχειν τῆς Κελτικῆς φησι· καὶ τὰ περὶ τοὺς Ὠστιμίους δὲ καὶ τὰ πέραν τοῦ Ῥώνου τὰ μέχρι Σκυθῶν πάντα κατέψευσται τῶν τόπων. Ὅστις οὖν περὶ τῶν γνωριζομένων τόπων τοσαῦτα ἔψευσται, σχολῇ γ' ἂν περὶ τῶν ἀγνοουμένων παρὰ πᾶσιν ἀληθεύειν δύναιτο. 4. Τὸν δὲ διὰ τοῦ Βορυσθένους παράλληλον τὸν αὐτὸν εἶναι τῷ διὰ τῆς Βρεττανικῆς εἰκάζουσιν Ἵππαρχός τε καὶ ἄλλοι ἐκ τοῦ τὸν αὐτὸν εἶναι καὶ τὸν διὰ Βυζαντίου τῷ διὰ Μασσαλίας· ὃν γὰρ λόγον εἴρηκε Πυθέας τοῦ ἐν Μασσαλίᾳ γνώμονος πρὸς τὴν σκιάν, τὸν αὐτὸν καὶ Ἵππαρχος κατὰ τὸν ὁμώνυμον καιρὸν εὑρεῖν ἐν τῷ Βυζαντίῳ φησίν. ἐκ Μασσαλίας δὲ εἰς μέσην τὴν Βρεττανικὴν οὐ πλέον τῶν πεντακισχιλίων ἐστὶ σταδίων. ἀλλὰ μὴν ἐκ μέσης τῆς Βρεττανικῆς οὐ πλέον τῶν τετρακισχιλίων προελθὼν εὕροις ἂν οἰκήσιμον ἄλλως πως τοῦτο δ' ἂν εἴη τὸ περὶ τὴν Ἰέρνην, ὥστε τὰ ἐπέκεινα, εἰς ἃ ἐκτοπίζει τὴν Θούλην, οὐκέτ' οἰκήσιμα. τίνι δ' ἂν καὶ στοχασμῷ λέγοι τὸ ἀπὸ τοῦ διὰ Θούλης ἕως τοῦ διὰ Βορυσθένους μυρίων καὶ χιλίων πεντακοσίων, οὐχ ὁρῶ. 5. Διαμαρτὼν δὲ τοῦ πλάτους ἠνάγκασται καὶ τοῦ μήκους ἀστοχεῖν. Ὅτι μὲν γὰρ πλέον ἢ διπλάσιον τὸ γνώριμον μῆκός ἐστι τοῦ γνωρίμου πλάτους, ὁμολογοῦσι καὶ οἱ ὕστερον καὶ τῶν παλαιῶν οἱ χαριέστατοι· λέγω δὲ τὸ ἀπὸ τῶν ἄκρων τῆς Ἰνδικῆς ἐπὶ τὰ ἄκρα τῆς Ἰβηρίας, τοῦ ἀπ' Αἰθιόπων ἕως τοῦ κατὰ Ἰέρνην κύκλου. Ὁρίσας δὲ τὸ λεχθὲν πλάτος, τὸ ἀπὸ τῶν ἐσχάτων Αἰθιόπων μέχρι τοῦ διὰ Θούλης ἐκτείνει πλέον ἢ δεῖ τὸ μῆκος, ἵνα ποιήσῃ πλέον ἢ διπλάσιον τοῦ λεχθέντος πλάτους. Φησὶ δ' οὖν τὸ μὲν τῆς Ἰνδικῆς μέχρι τοῦ Ἰνδοῦ ποταμοῦ τὸ στενώτατον σταδίων μυρίων ἑξακισχιλίων τὸ γὰρ ἐπὶ τὰ ἀκρωτήρια τεῖνον τρισχιλίοις εἶναι μεῖζον, τὸ δὲ ἔνθεν ἐπὶ Κασπίους πύλας μυρίων τετρακισχιλίων, εἶτ' ἐπὶ τὸν εὐφράτην μυρίων, ἐπὶ δὲ τὸν Νεῖλον ἀπὸ τοῦ εὐφράτου πεντακισχιλίων, ἄλλους δὲ χιλίους καὶ τριακοσίους μέχρι Κανωβικοῦ στόματος, εἶτα μέχρι τῆς Καρχηδόνος μυρίους τρισχιλίους πεντακοσίους, εἶτα μέχρι Στηλῶν ὀκτακισχιλίους τοὐλάχιστον· ὑπεραίρειν δὴ τῶν ἑπτὰ μυριάδων ὀκτακοσίους. Δεῖν δὲ ἔτι προσθεῖναι τὸ ἐκτὸς Ἡρακλείων στηλῶν κύρτωμα τῆς Εὐρώπης, ἀντικείμενον μὲν τοῖς Ἴβηρσι προπεπτωκὸς δὲ πρὸς τὴν ἑσπέραν, οὐκ ἔλαττον σταδίων τρισχιλίων, καὶ τὰ ἀκρωτήρια τά τε ἄλλα καὶ τὸ τῶν Ὠστιμίων, ὃ καλεῖται Κάβαιον, καὶ τὰς κατὰ τοῦτο νήσους, ὧν τὴν ἐσχάτην Οὐξισάμην φησὶ Πυθέας ἀπέχειν ἡμερῶν τριῶν πλοῦν. Ταῦτα δ' εἰπὼν τὰ τελευταῖα οὐδὲν πρὸς τὸ μῆκος συντείνοντα προσέθηκε τὰ περὶ τῶν ἀκρωτηρίων καὶ τῶν Ὠστιμίων καὶ τῆς Οὐξισάμης καὶ ὧν φησι νήσων· ταῦτα γὰρ πάντα προσάρκτιά ἐστι καὶ Κελτικά, οὐκ Ἰβηρικά, μᾶλλον δὲ Πυθέου πλάσματα. Προστίθησί [ τε] τοῖς εἰρημένοις τοῦ μήκους διαστήμασιν ἄλλους σταδίους δισχιλίους μὲν πρὸς τῇ δύσει, δισχιλίους δὲ πρὸς τῇ ἀνατολῇ, ἵνα σώσῃ τὸ [μὴ] πλέον ἢ διπλάσιον τὸ μῆκος τοῦ πλάτους εἶναι. 6. Παραμυθούμενος δ' ἐπὶ πλέον, ὅτι κατὰ φύσιν ἐστὶ τὸ ἀπὸ ἀνατολῆς ἐπὶ δύσιν διάστημα μεῖζον λέγειν, κατὰ φύσιν φησὶν εἶναι ἀπὸ τῆς ἕω πρὸς τὴν ἑσπέραν μακροτέραν εἶναι τὴν οἰκουμένην, καθάπερ εἰρήκαμεν· ... ὡς οἱ μαθηματικοί φασι, κύκλον συνάπτειν, συμβάλλουσαν αὐτὴν ἑαυτῇ, ὥστ' εἰ μὴ τὸ μέγεθος τοῦ Ἀτλαντικοῦ πελάγους ἐκώλυε, κἂν πλεῖν ἡμᾶς ἐκ τῆς Ἰβηρίας εἰς τὴν Ἰνδικὴν διὰ τοῦ αὐτοῦ παραλλήλου, τὸ λοιπὸν μέρος παρὰ τὸ λεχθὲν διάστημα ὑπὲρ τὸ τρίτον μέρος ὂν τοῦ ὅλου κύκλου· εἴπερ ὁ δι' Ἀθηνῶν ἐλάττων ἐστὶν εἴκοσι μυριάδων, ὅπου πεποιήμεθα τὸν εἰρημένον σταδιασμὸν ἀπὸ τῆς Ἰνδικῆς εἰς τὴν Ἰβηρίαν. Οὐδὲ ταῦτα οὖν εὖ λέγει. Οὗτος γὰρ ὁ λόγος (τὰ) περὶ μὲν τῆς εὐκράτου καὶ καθ' ἡμᾶς ζώνης λέγοιτ' ἂν κατὰ τοὺς μαθηματικούς, ἧς μέρος ἡ οἰκουμένη ἐστί, περὶ δὲ τῆς οἰκουμένης ... καλοῦμεν γὰρ οἰκουμένην ἣν οἰκοῦμεν καὶ γνωρίζομεν· ἐνδέχεται δὲ ἐν τῇ αὐτῇ εὐκράτῳ ζώνῃ καὶ δύο οἰκουμένας εἶναι ἢ καὶ πλείους, καὶ μάλιστα ἐγγὺς τοῦ δι' Ἀθηνῶν κύκλου τοῦ διὰ τοῦ Ἀτλαντικοῦ πελάγους γραφομένου. Πάλιν δὲ ἐπιμένων τῇ περὶ τοῦ σφαιροειδῆ τὴν γῆν εἶναι ἀποδείξει τῆς αὐτῆς ἐπιτιμήσεως ἂν τυγχάνοι. ὡς δ' αὕτως καὶ πρὸς τὸν Ὅμηρον οὐ παύεται περὶ τῶν αὐτῶν διαφερόμενος. 7. Ἑξῆς δὲ περὶ τῶν ἠπείρων εἰπὼν γεγονέναι πολὺν λόγον, καὶ τοὺς μὲν τοῖς ποταμοῖς διαιρεῖν αὐτὰς τῷ τε Νείλῳ καὶ τῷ Τανάιδι νήσους ἀποφαίνοντας, τοὺς δὲ τοῖς ἰσθμοῖς τῷ τε μεταξὺ τῆς Κασπίας καὶ τῆς Ποντικῆς θαλάσσης καὶ τῷ μεταξὺ τῆς Ἐρυθρᾶς καὶ τοῦ Ἐκρήγματος, τούτους δὲ χερρονήσους αὐτὰς λέγειν, οὐχ ὁρᾶν φησι πῶς ἂν εἰς πράγματα καταστρέφοι ἡ ζήτησις αὕτη, ἀλλὰ μόνον ἔριν διαιτώντων κατὰ Δημόκριτον εἶναι. Μὴ ὄντων γὰρ ἀκριβῶν ὅρων, καθάπερ Κολυττοῦ καὶ Μελίτης, οἷον στηλῶν ἢ περιβόλων, τοῦτο μὲν ἔχειν φάναι ἡμᾶς ὅτι τουτὶ μέν ἐστι Κολυττὸς τουτὶ δὲ Μελίτη, τοὺς ὅρους [ δὲ] μὴ ἔχειν εἰπεῖν. Διὸ καὶ συμβαίνειν κρίσεις πολλάκις περὶ χωρίων τινῶν, καθάπερ Ἀργείοις μὲν καὶ Λακεδαιμονίοις περὶ Θυρέας, Ἀθηναίοις δὲ καὶ Βοιωτοῖς περὶ Ὠρωποῦ. ἄλλως τε τοὺς Ἕλληνας τὰς τρεῖς ἠπείρους ὀνομάσαι οὐκ εἰς τὴν οἰκουμένην ἀποβλέψαντας, ἀλλ' εἴς τε τὴν σφετέραν καὶ τὴν ἀπαντικρὺ τὴν Καρικήν, ἐφ' ᾗ νῦν Ἴωνες καὶ οἱ ἑξῆς· χρόνῳ δὲ ἐπὶ πλέον προιιόντας ἀεὶ καὶ πλειόνων γνωριζομένων χωρῶν εἰς τοῦτο καταστρέψαι τὴν διαίρεσιν. Πότερον οὖν οἱ πρῶτοι διορίσαντες τὰς τρεῖς, ἵνα ἀπὸ τῶν ἐσχάτων ἄρξωμαι διαιτῶν τὴν ἔριν, μὴ κατὰ Δημόκριτον ἀλλὰ κατ' αὐτόν, οὗτοι ἦσαν οἱ πρῶτοι τὴν σφετέραν ἀπὸ ὸτμμτῆς ἀντικειμένης τῆς τῶν Καρῶν διορίσαι ζητοῦντες; Ἢ οὗτοι μὲν τὴν Ἑλλάδα ἐπενόουν μόνην καὶ τὴν Καρίαν καὶ ὀλίγην τὴν συνεχῆ, οὔτε δ' Εὐρώπην οὔτε Ἀσίαν ὡσαύτως οὔτε Λιβύην, οἱ δὲ λοιποὶ ἐπιόντες ὅση ἦν ἱκανὴ ὑπογράψαι τὴν τῆς οἰκουμένης ἐπίνοιαν, οὗτοί εἰσιν οἱ εἰς τρία [ μέρη ] διαιροῦντες; Πῶς οὖν οὐ τῆς οἰκουμένης ἐποιοῦντο διαίρεσιν; τίς δὲ τρία μέρη λέγων καὶ καλῶν ἤπειρον ἕκαστον τῶν μερῶν οὐ προσεπινοεῖ τὸ ὅλον, οὗ τὸν μερισμὸν ποιεῖται; Εἰ δ' ἐπινοοῖ μὲν μὴ τὴν οἰκουμένην, μέρους δέ τινος αὐτῆς τὸν μερισμὸν ποιοῖτο, τίνος ἄν τις μέρους τῆς οἰκουμένης μέρος εἶπε τὴν Ἀσίαν ἢ τὴν Εὐρώπην [ ἢ] ὅλως ἤπειρον; Ταῦτα γὰρ εἴρηται παχυμερῶς. 8. Ἔτι δὲ παχυμερέστερον τὸ φήσαντα μὴ ὁρᾶν εἰς τί πραγματικὸν καταστρέφει τὸ τοὺς ὅρους ζητεῖν, παραθεῖναι τὸν Κολυττὸν καὶ τὴν Μελίτην, εἶτ' εἰς τἀναντία περιτρέπεσθαι. Εἰ γὰρ οἱ περὶ Θυρεῶν καὶ Ὠρωποῦ πόλεμοι διὰ τὰς τῶν ὅρων ἀγνοίας ἀπέβησαν, εἰς πραγματικόν τι καταστρέφον τὸ διαχωρίζειν τὰς χώρας· ἢ τοῦτο λέγει, ὡς ἐπὶ μὲν τῶν χωρίων καὶ νὴ Δία τῶν καθ' ἕκαστα ἐθνῶν πραγματικὸν τὸ διορίζειν ἀκριβῶς, ἐπὶ δὲ τῶν ἠπείρων περιττόν; Καίτοι οὐδὲ ἐνταῦθα ἧττον οὐδέν· γένοιτο γὰρ ἂν καὶ ἐπὶ τούτων ἡγεμόσι μεγάλοις ἀμφισβήτησις, τῷ μὲν ἔχοντι τὴν Ἀσίαν, τῷ δὲ τὴν Λιβύην, ὁποτέρου δή ἐστιν ἡ Αἴγυπτος, δηλονότι ἡ κάτω λεγομένη τῆς αἰγύπτου χώρα. Κἂν ἐάσῃ δέ τις τοῦτο διὰ τὸ σπάνιον, ἄλλως φατέον διαιρεῖσθαι τὰς ἠπείρους κατὰ μέγαν διορισμὸν καὶ πρὸς τὴν οἰκουμένην ὅλην ἀναφερόμενον· καθ' ὃν οὐδὲ τούτου φροντιστέον, εἰ οἱ τοῖς ποταμοῖς διορίσαντες ἀπολείπουσί τινα χωρία ἀδιόριστα, τῶν ποταμῶν μὴ μέχρι τοῦ ὠκεανοῦ διηκόντων ( τὰς) μηδὲ νήσους ὡς ἀληθῶς ἀπολειπόντων τὰς ἠπείρους. 9. Ἐπὶ τέλει δὲ τοῦ ὑπομνήματος οὐκ ἐπαινέσας τοὺς δίχα διαιροῦντας ἅπαν τὸ τῶν ἀνθρώπων πλῆθος εἴς τε Ἕλληνας καὶ βαρβάρους, καὶ τοὺς Ἀλεξάνδρῳ παραινοῦντας τοῖς μὲν Ἕλλησιν ὡς φίλοις χρῆσθαι τοῖς δὲ βαρβάροις ὡς πολεμίοις, βέλτιον εἶναί φησιν ἀρετῇ καὶ κακίᾳ διαιρεῖν ταῦτα. Πολλοὺς γὰρ καὶ τῶν Ἑλλήνων εἶναι κακοὺς καὶ τῶν βαρβάρων ἀστείους, καθάπερ Ἰνδοὺς καὶ Ἀριανούς, ἔτι δὲ Ῥωμαίους καὶ Καρχηδονίους οὕτω θαυμαστῶς πολιτευομένους. Διόπερ τὸν Ἀλέξανδρον ἀμελήσαντα τῶν παραινούντων, ὅσους οἷόν τ' ἦν ἀποδέχεσθαι τῶν εὐδοκίμων ἀνδρῶν καὶ εὐεργετεῖν· ὥσπερ δι' ἄλλο τι τῶν οὕτω διελόντων τοὺς μὲν ἐν ψόγῳ τοὺς δ' ἐν ἐπαίνῳ τιθεμένων, ἢ διότι τοῖς μὲν ἐπικρατεῖ τὸ νόμιμον καὶ τὸ παιδείας καὶ λόγων οἰκεῖον, τοῖς δὲ τἀναντία. καὶ ὁ Ἀλέξανδρος οὖν οὐκ ἀμελήσας τῶν παραινούντων, ἀλλ' ἀποδεξάμενος τὴν γνώμην τὰ ἀκόλουθα, οὐ τὰ ἐναντία ἐποίει, πρὸς τὴν διάνοιαν σκοπῶν τὴν τῶν ἐπεσταλκότων. |
(1) Hom., Iliade, VII, 421. Voy. Sur cette citation d'Homère et les deux suivantes l'observation fort juste de M. Meineke : Vindicarium Strabonian. liber. p. 1. - (2) Hom., Iliade, 485 (3) Id. Ibid., V, 6. (4) Id., Odyssée, IV, 563. (5) Hom, Odyssée, I, 23. (6) Id., Iliade, I, 423. (7) Id, Iliade, XVIII, 489. Cf. Odyssée, V 275. (8) Phenom., 145. (9) Hom., Odyssée, V, 274. (10) Hom., Iliade, XIII, 5 et 6. (11) Id., Iliad, XIV, 200-201. (12) Id. Ibid, XVIII, 607. (13) Id., Iliade, 399. (14) Id., Odyssée, XII, 105. (15) Id, Iliade, VII, 422. (16) Voy. entre autre passages, Iliade, XIV, 245. (17) Hom., Odyssée, XII, 1. (18) Hom., Odyssée, XI, 15 et 19. (19) Ou, comme M Charles Müller propose de traduire : « de la comparaison avec l'autre ouvrage de cet auteur. » C'est à savoir ses Généalogies. Voy. Strab. Geogr. Index variae lectionis, p. 940, au bas de la 2e colonne. (20) Hom., Iliade. VIII, 16. (21) Id., Odyssée, I, 3. (22) Id , Iliade, I, 270. (23) Id., Odyssée, IV, 83. (24) Cf. Hom., Odyssée, IV, 229. M. Cramer voit dans cette citation une glose marginale insérée indûment dans le texte et M. Meineke l'a rejetée en note. (25) Hom., Iliade, I. 383. (26) Id., Odyss., XXI, 26. (27) Iliade, II, 496. (28) Odyssée, V, 303. (29) Hom., Odyssée, X, 190. (30) Nous avons suivi ici le texte de M. Meineke κατανοήσας τις ἀλλως πως δύναται παρακολουθεῖν τοῖς λεγομένοις ἐνταῦθα. Ὁ δὲ μήδ'... (31) A l'exemple de M. Meineke et sur l'indication donnée par Coray, nous avons transporté ici toute cette phrase, qui se trouve habituellement placée à la fin du chapitre suivant, mais qui n'est peut-être bien aussi qu'une glose marginale introduite indûment dans le texte de Strabon. (32) Odyssée, XVIII, 74. (33) Hom., Odyssée, III, 207. (34) Id , Ibid., 270. (35) Iliade, II, 502. (36) Ibid„ 503. (37) Ibid., 508. (38) Ibid., 523. (39) Hom., Odyssée, I. 3. (40) Id., Iliade, III. 202. (41) Id , Iliade, X, 246. (42) Id , Odyssée, XVIII, 368. (43) Id., 375 (44) Il s'agit du IIe livre de l'Iliade (45) Ce titre s'appliquait quelquefois dans l'antiquité au IXe livre de l'Iliade. (46) Casaubon a reconnu sous ce titre la députation de Ménélas et d'Ulysse, à Troie, pour réclamer Hélène, rappelée incidemment dans le IIIe livre de l'Iliade, 205 et suiv. (47) Hom., Iliade, III, 221. (48) Hom., Odyssée, VI, 232. (49) Hom., Odyssée, XIX, 203. (50) Hom., Odyssée, V, 232. (51) Hom., Odyssée, XII, 93. (52) Hom., Odyssée, XII, 105. (53) Hom., Odyssée, IX, 82. (54) Hom., Odyssée, IX, 82. (55) Id., Odyssée, XII, 1. (56) Cf. Iliade, I, 50. (57) Id., Odyssée, VI, 284. (58) Hom., Odyssée, XI, 315. (59) Id., Iliade, XIV, 225. (60) Id., Odyssée, 83. (61) Eurip., Bacch., V. 13. (62). Hom., Odyssée, IX, 25. (63). Id , Ibid., XIII, 109. (64) Hom., Iliade, XII, 239. (65) Id , Odyssée, X, 190. (66) Id., Iliade, IX, 5. (67) Hom., Odyssée, V, 295. (68) Id., Iliade, II, 144. (69) Hom, Iliade, XI, 306. (70) Id., ibid., IX, 5. (71). Hom., Iliade, XI, 305. (72) Hom., Odyssée, I, 23. (73) Nous avons cru pouvoir traduire ce passage d'après la correction si heureuse de M. Ch. Müller dusous en Dusous. Voy. son Index variae lectionis, p. 942, col. 2, 1. 2 et suiv. Cf. Hase, Journal des savants, 1858, p. 699. (74) Cf Ahrens : Aeschyli fragmenta (Paris, Didot, 1843), p. 190-191. (75) Cf. Wagner : Euripidis fragmenta (Paris, Didot, 1846), p. 801. (76). Hom., Odyssée, IX, 25. (77) Id., Iliade, XII 239. (78) Id., Odyssée, X, 190 (79) Id. Iliade, I, 423. (80). Hom. Odyssée, V, 282. (81). Id , Iliade, III, 4. (82) Lisez 4000 d'après la correction probable de Gossellin et de Groskurd, ratifiée par M. Ch. Müller : Syène en effet, d'après Strabon lui-même, n'est qu'à 5000 stades de la mer et de Syène à Thèbes il y a plus de 1000 stades. (83) II, 5 (84) Hom., Odyssée, IV, 358. (85). Hom., Odyssée, IV, 81. (86). Hom., Odyssée, III, 301. 87) Id., ibid., IV, 53 (88) Homère, Odyssée, IV, 561 (89) Homère, Odyssée, IV, 567. (90) Id., Odyssée, IV, 73. (91) Homère, Iliade, XI, 20. (92) Hom., Iliade, XIII, I, (93) Hom., Iliade, II, 641. (94) Id., ibid., VIII, 47. (95) Id. , ibid , II, 536. (96). Hom., Iliade, VI, 289. (97) Id., Odyssée, IV, 615. Cf. ibid., XV, 115. (98) Hom., Iliade, XXIII, 742. (99) Hom., Odyssée, I, 3. (100) Id , Ibid., IV, 81. (101) Cf. Hesiodi fragmenta (éd. Lehrs, Paris, 1840), n° 32. (102) Hesiodi fragmenta (éd. Lehrs), n° 42. (103). Cf. Aeschyli fragmenta (éd. Ahrens, Paris, 1843), n° 77. (104) Hom., Odyssée, XII, 105. (105) Hom., Odyssée, XII, 107. (106) Id., ibid., V, 306. (107) Hom., Iliade, VIII, 488. (108) Id, ibid., III, 363. (109) Hom., Odyssée, XII, 437. (110) Hom., Iliade, II, 714. (111) Cf. Caliimachi fragmenta a R. Bentleio collecta (ad. Ernesti, Lugd. Batav., 1761) n° 113.. (112) Cf. Ibid., n° 104. (113) Hom., Odyssée, X, 137. (114) Id., ibid., XII, 70.
(115). A
l'exemple de M. Meineke, nous croyons pouvoir rejeter en note les vers suivants,
qui paraissent bien les mêmes que citait Démétrius d'après Mimnerme, mais qu'on
s'accorde à considérer comme une docte interpolation faite au texte de Strabon
par quelque lecteur des anciens temps : (116) Voy. Meineke, Vindiciarum Strabonaniarum liber, p. 5. (117) Cf. Oracula Sibyllina (ed. C. Alexandre) lib. IV, v. 97, où on ἀργυροδίνης (aux flots d'argent, aux eaux transparentes) au lieu de εὐροδίνης (au cours large et impétueux). (118) Hom , Iliade, IX, 7 (119) Id., Ibid ., IV, 425. (120) Id., XVII, 265. M. Meineke a vu, non sans vraisemblance, dans cette double citation, une nouvelle interpolation Voy. Vindic. Strabonian. liber, p. 6. (121) Voy. la correction proposée par M. Ch. Müller pour tout ce passage, p. 943-44 de son Index variae lectionis. (122) Hom., Iliade, XXII, 147. (123).Hom., Odyssée, XXIV, 376. (124) Voy. C. Müller : Index variae lectionis, p. 944, col. 2, 1. 3 (125) Εὐῶδης. Ce mot a été retranché du texte de Strabon par Coray et M. Meineke; et à juste titre, suivant M. Müller. (126) Hom., Iliade, II, 507. (127) A l'exemple de Coray et de M. Meineke, nous avons remplacé ici le nom d'Hésiode par celui d'Hérodote. Cf. Hérodote, II, 10. (128). Hom. Odyssée, IV, 844. (129) Cf. Ionis fragmenta (ed. Frid. Guil. Wagner. Paris, 1846), n° 11. (130) Voy. ce que dit M. Ch. Müller (Index variae lectionis, p. 944, col. 2, 1. 48) à propos de ce passage qu'il considère comme une glose marginale indûment insérée dans lu texte même de Strabon. (131) Voy la note de M. Ch. Müller (Index variae lectionis, p. 945; col. 1, l. 5.)
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