Platon : La République

PLATON

THÉÉTÈTE, OU DE LA SCIENCE.

 

170e-186e

 

157e-170d - 187a-197e

Traduction française · Victor COUSIN.

VOLUME II

Autre traduction

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

PLATON

 

 

 

33 THÉÉTÈTE,

OU

DE LA SCIENCE.

 

Premiers interlocuteurs,

 

EUCLIDE, TERPSION, TOUS DEUX DE MÉGARE.

 

Seconds interlocuteurs,

 

SOCRATE, THÉODORE DE CYRÈNE, THÉÉTÈTE.

 

 

 

 

 

 

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[170e]  Θεόδωρος

Νὴ τὸν Δία, ὦ Σώκρατες, μάλα μυρίοι δῆτα, φησὶν Ὅμηρος, οἵ γέ μοι τὰ ἐξ ἀνθρώπων πράγματα παρέχουσιν.

Σωκράτης

Τί οὖν; Βούλει λέγωμεν ὡς σὺ τότε σαυτῷ μὲν ἀληθῆ δοξάζεις, τοῖς δὲ μυρίοις ψευδῆ;

Θεόδωρος

Ἔοικεν ἔκ γε τοῦ λόγου ἀνάγκη εἶναι.

Σωκράτης

Τί δὲ αὐτῷ Πρωταγόρᾳ; Ἆρ' οὐχὶ ἀνάγκη, εἰ μὲν μηδὲ αὐτὸς ᾤετο μέτρον εἶναι ἄνθρωπον μηδὲ οἱ πολλοί, ὥσπερ οὐδὲ οἴονται, μηδενὶ δὴ εἶναι ταύτην τὴν ἀλήθειαν [171a] ἣν ἐκεῖνος ἔγραψεν; Εἰ δὲ αὐτὸς μὲν ᾤετο, τὸ δὲ πλῆθος μὴ συνοίεται, οἶσθ' ὅτι πρῶτον μὲν ὅσῳ πλείους οἷς μὴ δοκεῖ ἢ οἷς δοκεῖ, τοσούτῳ μᾶλλον οὐκ ἔστιν ἢ ἔστιν.

Θεόδωρος

Ἀνάγκη, εἴπερ γε καθ' ἑκάστην δόξαν ἔσται καὶ οὐκ ἔσται.

Σωκράτης

Ἔπειτά γε τοῦτ' ἔχει κομψότατον· ἐκεῖνος μὲν περὶ τῆς αὑτοῦ οἰήσεως τὴν τῶν ἀντιδοξαζόντων οἴησιν, ᾗ ἐκεῖνον ἡγοῦνται ψεύδεσθαι, συγχωρεῖ που ἀληθῆ εἶναι ὁμολογῶν τὰ ὄντα δοξάζειν ἅπαντας.

Θεόδωρος

Πάνυ μὲν οὖν.

[171b] Σωκράτης

Οὐκοῦν τὴν αὑτοῦ ἂν ψευδῆ συγχωροῖ, εἰ τὴν τῶν ἡγουμένων αὐτὸν ψεύδεσθαι ὁμολογεῖ ἀληθῆ εἶναι;

Θεόδωρος

Ἀνάγκη.

Σωκράτης

Οἱ δέ γ' ἄλλοι οὐ συγχωροῦσιν ἑαυτοῖς ψεύδεσθαι;

Θεόδωρος

Οὐ γὰρ οὖν.

Σωκράτης

Ὁ δέ γ' αὖ ὁμολογεῖ καὶ ταύτην ἀληθῆ τὴν δόξαν ἐξ ὧν γέγραφεν.

Θεόδωρος

Φαίνεται.

Σωκράτης

Ἐξ ἁπάντων ἄρα ἀπὸ Πρωταγόρου ἀρξαμένων ἀμφισβητήσεται, μᾶλλον δὲ ὑπό γε ἐκείνου ὁμολογήσεται, ὅταν τῷ τἀναντία λέγοντι συγχωρῇ ἀληθῆ αὐτὸν δοξάζειν, [171c] τότε καὶ ὁ Πρωταγόρας αὐτὸς συγχωρήσεται μήτε κύνα μήτε τὸν ἐπιτυχόντα ἄνθρωπον μέτρον εἶναι μηδὲ περὶ ἑνὸς οὗ ἂν μὴ μάθῃ. Οὐχ οὕτως;

Θεόδωρος

Οὕτως.

Σωκράτης

Οὐκοῦν ἐπειδὴ ἀμφισβητεῖται ὑπὸ πάντων, οὐδενὶ ἂν εἴη ἡ Πρωταγόρου Ἀλήθεια ἀληθής, οὔτε τινὶ ἄλλῳ οὔτ' αὐτῷ ἐκείνῳ.

Θεόδωρος

Ἄγαν, ὦ Σώκρατες, τὸν ἑταῖρόν μου καταθέομεν.

Σωκράτης

Ἀλλά τοι, ὦ φίλε, ἄδηλον εἰ καὶ παραθέομεν τὸ ὀρθόν. Εἰκός γε ἄρα ἐκεῖνον πρεσβύτερον ὄντα σοφώτερον [171d] ἡμῶν εἶναι· καὶ εἰ αὐτίκα ἐντεῦθεν ἀνακύψειε μέχρι τοῦ αὐχένος, πολλὰ ἂν ἐμέ τε ἐλέγξας ληροῦντα, ὡς τὸ εἰκός, καὶ σὲ ὁμολογοῦντα, καταδὺς ἂν οἴχοιτο ἀποτρέχων. Ἀλλ' ἡμῖν ἀνάγκη οἶμαι χρῆσθαι ἡμῖν αὐτοῖς ὁποῖοί τινές ἐσμεν, καὶ τὰ δοκοῦντα ἀεὶ ταῦτα λέγειν. Καὶ δῆτα καὶ νῦν ἄλλο τι φῶμεν ὁμολογεῖν ἂν τοῦτό γε ὁντινοῦν, τὸ εἶναι σοφώτερον ἕτερον ἑτέρου, εἶναι δὲ καὶ ἀμαθέστερον;

Θεόδωρος

Ἐμοὶ γοῦν δοκεῖ.

Σωκράτης

Ἦ καὶ ταύτῃ ἂν μάλιστα ἵστασθαι τὸν λόγον, ᾗ [171e] ἡμεῖς ὑπεγράψαμεν βοηθοῦντες Πρωταγόρᾳ, ὡς τὰ μὲν πολλὰ ᾗ δοκεῖ, ταύτῃ καὶ ἔστιν ἑκάστῳ, θερμά, ξηρά, γλυκέα, πάντα ὅσα τοῦ τύπου τούτου· εἰ δέ που ἔν τισι συγχωρήσεται διαφέρειν ἄλλον ἄλλου, περὶ τὰ ὑγιεινὰ καὶ νοσώδη ἐθελῆσαι ἂν φάναι μὴ πᾶν γύναιον καὶ παιδίον, καὶ θηρίον δέ, ἱκανὸν εἶναι ἰᾶσθαι αὑτὸ γιγνῶσκον ἑαυτῷ τὸ ὑγιεινόν, ἀλλὰ ἐνταῦθα δὴ ἄλλον ἄλλου διαφέρειν, εἴπερ που;

Θεόδωρος

Ἔμοιγε δοκεῖ οὕτως.

[172a] Σωκράτης

Οὐκοῦν καὶ περὶ πολιτικῶν, καλὰ μὲν καὶ αἰσχρὰ καὶ δίκαια καὶ ἄδικα καὶ ὅσια καὶ μή, οἷα ἂν ἑκάστη πόλις οἰηθεῖσα θῆται νόμιμα αὑτῇ, ταῦτα καὶ εἶναι τῇ ἀληθείᾳ ἑκάστῃ, καὶ ἐν τούτοις μὲν οὐδὲν σοφώτερον οὔτε ἰδιώτην ἰδιώτου οὔτε πόλιν πόλεως εἶναι· ἐν δὲ τῷ συμφέροντα ἑαυτῇ ἢ μὴ συμφέροντα τίθεσθαι, ἐνταῦθ', εἴπερ που, αὖ ὁμολογήσει σύμβουλόν τε συμβούλου διαφέρειν καὶ πόλεως δόξαν ἑτέραν ἑτέρας πρὸς ἀλήθειαν, καὶ οὐκ ἂν πάνυ τολμήσειε [172b]  φῆσαι, ἃ ἂν θῆται πόλις συμφέροντα οἰηθεῖσα αὑτῇ, παντὸς μᾶλλον ταῦτα καὶ συνοίσειν· ἀλλ' ἐκεῖ οὗ λέγω, ἐν τοῖς δικαίοις καὶ ἀδίκοις καὶ ὁσίοις καὶ ἀνοσίοις, ἐθέλουσιν ἰσχυρίζεσθαι ὡς οὐκ ἔστι φύσει αὐτῶν οὐδὲν οὐσίαν ἑαυτοῦ ἔχον, ἀλλὰ τὸ κοινῇ δόξαν τοῦτο γίγνεται ἀληθὲς τότε, ὅταν δόξῃ καὶ ὅσον ἂν δοκῇ χρόνον. Καὶ ὅσοι γε ἂν μὴ παντάπασι τὸν Πρωταγόρου λόγον λέγωσιν, ὧδέ πως τὴν σοφίαν ἄγουσι. Λόγος δὲ ἡμᾶς, ὦ Θεόδωρε, ἐκ λόγου μείζων ἐξ ἐλάττονος [172c] καταλαμβάνει.

Θεόδωρος

Οὐκοῦν σχολὴν ἄγομεν, ὦ Σώκρατες;

Σωκράτης

Φαινόμεθα. Καὶ πολλάκις μέν γε δή, ὦ δαιμόνιε, καὶ ἄλλοτε κατενόησα, ἀτὰρ καὶ νῦν, ὡς εἰκότως οἱ ἐν ταῖς φιλοσοφίαις πολὺν χρόνον διατρίψαντες εἰς τὰ δικαστήρια ἰόντες γελοῖοι φαίνονται ῥήτορες.

Θεόδωρος

Πῶς δὴ οὖν λέγεις;

Σωκράτης

Κινδυνεύουσιν οἱ ἐν δικαστηρίοις καὶ τοῖς τοιούτοις ἐκ νέων κυλινδούμενοι πρὸς τοὺς ἐν φιλοσοφίᾳ καὶ τῇ [172d] τοιᾷδε διατριβῇ τεθραμμένους ὡς οἰκέται πρὸς ἐλευθέρους τεθράφθαι.

Θεόδωρος

Πῇ δή;

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[170e] THÉODORE.

Oui, par Jupiter, Socrate, il y a, comme dit Homère, mille (24) personnes qui me tourmentent à ce sujet.

SOCRATE.

Quoi! Veux-tu que nous disions qu'alors ton opinion est vraie pour toi et fausse pour ces mille personnes ?

THÉODORE.

C'est une nécessité, à ce qu'il paraît, dans le système de Protagoras.

SOCRATE.

Et pour lui-même, s'il n'avait pas pensé que l'homme est la mesure de toutes choses, et que le peuple ne le pensât pas non plus, comme en effet il ne le pense pas, ne serait-ce pas une nécessité que la vérité [171a] telle qu'il l'a définie n'existât pour personne ? Et s'il a été de ce sentiment, et que la multitude pense le contraire, tu vois d'abord qu'autant !e nombre de ceux qui ne sont pas de son avis surpasse celui de ses partisans, autant la vérité, telle qu'il l'en-  120  tend, a plus de chances pour n'exister pas que pour exister.

THÉODORE.

Cela est incontestable, si elle existe ou n'existe pas selon chaque opinion.

SOCRATE.

Mais, en second lieu, voici ce qu'il y a de plus plaisant. Protagoras, en reconnaissant que ce qui paraît tel à chacun est, accorde que l'opinion de ceux qui contredisent la sienne, et par laquelle ils croient qu'il se trompe, est vraie.

THÉODORE.

En effet.

[171b] SOCRATE.

Ne convient-il donc pas que son opinion est fausse, s'il reconnaît pour vraie l'opinion de ceux qui pensent qu'il est dans l'erreur ?

THÉODORE.

Nécessairement.

SOCRATE.

Et les autres ne conviennent pas qu'ils se trompent ?

THÉODORE.

Non, vraiment.

SOCRATE.

Eh bien, le voilà qui reconnaît aussi cette opinion pour véritable, d'après son système.

121 THÉODORE.

II le faut bien.

SOCRATE.

Par conséquent, c'est une chose révoquée en doute par tous, à commencer par Protagoras lui-même, ou plutôt lui-même avoue, en admettant que celui qui est d'un avis contraire au sien pense vrai, [171c] oui, Protagoras accorde que ni un chien, ni le premier homme venu n'est la mesure d'aucune chose qu'il n'a point étudiée. N'est-ce pas ?

THÉODORE.

Oui.

SOCRATE.

Donc, puisqu'elle est contestée par tout le monde, la vérité de Protagoras n'est vraie ni pour personne, ni pour lui-même.

THÉODORE.

Socrate, nous maltraitons bien mon ami.

SOCRATE.

Oui, mon cher; et je ne sais trop si c'est à bon droit. Car il y a apparence qu'étant plus âgé que nous, [171d] il est aussi plus habile ; et si à ce moment il sortait de terre seulement jusqu'au cou, il est probable qu'avant de rentrer sous terre et de disparaître, il nous convaincrait, moi, de ne savoir ce que je dis, et toi, d'avoir 122 accordé bien des choses mal à propos. Mais c'est une nécessité pour nous, je pense, d'user de nos lumières telles qu'elles sont, et de parler toujours conformément à nos idées. Et maintenant, pouvons-nous ne pas dire que tout le monde convient que tel homme est plus savant qu'un autre, et tel autre aussi plus ignorant?

THÉODORE.

Il me le paraît, du moins.

SOCRATE.

Dirons-nous aussi qu'elle puisse se soutenir cette partie du discours [171e] que nous avons mis dans la bouche de Protagoras en prenant sa défense, savoir, qu'en ce qui concerne le chaud, le sec, le doux, et les autres qualités de ce genre, les choses sont communément telles pour chacun qu'elles lui paraissent : que, s'il reconnaît qu'à certains égards il est des hommes qui l'emportent sur d'autres, c'est par rapport à ce qui est salutaire ou nuisible au corps ; et qu'il ne fera nulle difficulté de convenir que toute femmelette, tout enfant, tout animal n'est point en état de se guérir soi-même et ne connaît pas ce qui lui est salutaire ; mais que ce sont là particulièrement les choses où certains hommes ont l'avantage sur d'autres?

THÉODORE.

Je le crois ainsi.

123 [172a] SOCRATE.

Et sur les matières politiques, ne conviendra-t-il pas aussi que l'honnête et le déshonnête, le juste et l'injuste, le saint et l'impie, sont bien tels pour chaque cité qu'elle se les représente dans l'institution de ses lois, et qu'en tout cela un particulier n'est pas plus savant qu'un autre particulier, ni une cité qu'une autre cité; mais que dans le discernement des lois avantageuses ou nuisibles, c'est là surtout qu'un conseiller l'emporte sur un autre conseiller, et l'opinion d'une cité sur celle d'une autre cité? et il n'oserait pas avancer [172b] que les lois qu'un état se donne, croyant qu'elles lui sont utiles, le seront en effet infailliblement. Mais ici, pour le juste et l'injuste, le saint et l'impie, ses partisans assurent que rien de tout cela n'a par sa nature une essence qui lui soit propre, et que l'opinion que toute une ville s'en forme devient vraie par cela seul, et pour tout le temps qu'elle dure. Ceux même qui sur le reste ne sont pas tout à fait de l'avis de Protagoras, suivent ici sa philosophie. Mais, Théodore, un discours succède à un autre discours, et un plus important [172c] à un moindre.

THÉODORE.

Ne sommes-nous point de loisir, Socrate?

124 SOCRATE.

Il y paraît : et j'ai souvent fait réflexion en d'autres rencontres, mais surtout aujourd'hui, mon cher, combien il est naturel que ceux qui ont passé un temps considérable dans l'étude de la philosophie, fassent de ridicules orateurs lorsqu'ils se présentent devant les tribunaux.

THÉODORE.

Comment dis-tu?

SOCRATE.

Il me semble que les hommes élevés dès leur jeunesse dans les tribunaux et les affaires, comparés à ceux qui ont été nourris dans la philosophie, [172d] sont comme des esclaves vis-à-vis d'hommes libres.

THÉODORE.

Par quelle raison ?

Σωκράτης

Ἧι τοῖς μὲν τοῦτο ὃ σὺ εἶπες ἀεὶ πάρεστι, σχολή, καὶ τοὺς λόγους ἐν εἰρήνῃ ἐπὶ σχολῆς ποιοῦνται· ὥσπερ ἡμεῖς νυνὶ τρίτον ἤδη λόγον ἐκ λόγου μεταλαμβάνομεν, οὕτω κἀκεῖνοι, ἐὰν αὐτοὺς ὁ ἐπελθὼν τοῦ προκειμένου μᾶλλον καθάπερ ἡμᾶς ἀρέσῃ· καὶ διὰ μακρῶν ἢ βραχέων μέλει οὐδὲν λέγειν, ἂν μόνον τύχωσι τοῦ ὄντος· οἱ δὲ ἐν ἀσχολίᾳ [172e] τε ἀεὶ λέγουσικατεπείγει γὰρ ὕδωρ ῥέονκαὶ οὐκ ἐγχωρεῖ περὶ οὗ ἂν ἐπιθυμήσωσι τοὺς λόγους ποιεῖσθαι, ἀλλ' ἀνάγκην ἔχων ὁ ἀντίδικος ἐφέστηκεν καὶ ὑπογραφὴν παραναγιγνωσκομένην ὧν ἐκτὸς οὐ ῥητέον ἣν ἀντωμοσίαν καλοῦσιν· οἱ δὲ λόγοι ἀεὶ περὶ ὁμοδούλου πρὸς δεσπότην καθήμενον, ἐν χειρί τινα δίκην ἔχοντα, καὶ οἱ ἀγῶνες οὐδέποτε τὴν ἄλλως ἀλλ' ἀεὶ τὴν περὶ αὐτοῦ, πολλάκις δὲ καὶ περὶ ψυχῆς [173a] ὁ δρόμος· ὥστ' ἐξ ἁπάντων τούτων ἔντονοι καὶ δριμεῖς γίγνονται, ἐπιστάμενοι τὸν δεσπότην λόγῳ τε θωπεῦσαι καὶ ἔργῳ ὑπελθεῖν, σμικροὶ δὲ καὶ οὐκ ὀρθοὶ τὰς ψυχάς. Τὴν γὰρ αὔξην καὶ τὸ εὐθύ τε καὶ τὸ ἐλευθέριον ἡ ἐκ νέων δουλεία ἀφῄρηται, ἀναγκάζουσα πράττειν σκολιά, μεγάλους κινδύνους καὶ φόβους ἔτι ἁπαλαῖς ψυχαῖς ἐπιβάλλουσα, οὓς οὐ δυνάμενοι μετὰ τοῦ δικαίου καὶ ἀληθοῦς ὑποφέρειν, εὐθὺς ἐπὶ τὸ ψεῦδός τε καὶ τὸ ἀλλήλους ἀνταδικεῖν τρεπόμενοι [173b] πολλὰ κάμπτονται καὶ συγκλῶνται, ὥσθ' ὑγιὲς οὐδὲν ἔχοντες τῆς διανοίας εἰς ἄνδρας ἐκ μειρακίων τελευτῶσι, δεινοί τε καὶ σοφοὶ γεγονότες, ὡς οἴονται. Καὶ οὗτοι μὲν δὴ τοιοῦτοι, ὦ Θεόδωρε· τοὺς δὲ τοῦ ἡμετέρου χοροῦ πότερον βούλει διελθόντες ἢ ἐάσαντες πάλιν ἐπὶ τὸν λόγον τρεπώμεθα, ἵνα μὴ καί, ὃ νυνδὴ ἐλέγομεν, λίαν πολὺ τῇ ἐλευθερίᾳ καὶ μεταλήψει τῶν λόγων καταχρώμεθα;

Θεόδωρος

Μηδαμῶς, ὦ Σώκρατες, ἀλλὰ διελθόντες. Πάνυ [173c] γὰρ εὖ τοῦτο εἴρηκας, ὅτι οὐχ ἡμεῖς οἱ ἐν τῷ τοιῷδε χορεύοντες τῶν λόγων ὑπηρέται, ἀλλ' οἱ λόγοι ἡμέτεροι ὥσπερ οἰκέται, καὶ ἕκαστος αὐτῶν περιμένει ἀποτελεσθῆναι ὅταν ἡμῖν δοκῇ· οὔτε γὰρ δικαστὴς οὔτε θεατὴς ὥσπερ ποιηταῖς ἐπιτιμήσων τε καὶ ἄρξων ἐπιστατεῖ παρ' ἡμῖν.

Σωκράτης

Λέγωμεν δή, ὡς ἔοικεν, ἐπεὶ σοί γε δοκεῖ, περὶ τῶν κορυφαίων· τί γὰρ ἄν τις τούς γε φαύλως διατρίβοντας ἐν φιλοσοφίᾳ λέγοι; Οὗτοι δέ που ἐκ νέων πρῶτον μὲν εἰς [173d] ἀγορὰν οὐκ ἴσασι τὴν ὁδόν, οὐδὲ ὅπου δικαστήριον ἢ βουλευτήριον ἤ τι κοινὸν ἄλλο τῆς πόλεως συνέδριον· νόμους δὲ καὶ ψηφίσματα λεγόμενα ἢ γεγραμμένα οὔτε ὁρῶσιν οὔτε ἀκούουσι· σπουδαὶ δὲ ἑταιριῶν ἐπ' ἀρχὰς καὶ σύνοδοι καὶ δεῖπνα καὶ σὺν αὐλητρίσι κῶμοι, οὐδὲ ὄναρ πράττειν προσίσταται αὐτοῖς. Εὖ δὲ ἢ κακῶς τις γέγονεν ἐν πόλει, ἤ τί τῳ κακόν ἐστιν ἐκ προγόνων γεγονὸς ἢ πρὸς ἀνδρῶν ἢ γυναικῶν, μᾶλλον αὐτὸν λέληθεν ἢ οἱ τῆς θαλάττης λεγόμενοι [173e] χόες. Καὶ ταῦτα πάντ' οὐδ' ὅτι οὐκ οἶδεν, οἶδεν· οὐδὲ γὰρ αὐτῶν ἀπέχεται τοῦ εὐδοκιμεῖν χάριν, ἀλλὰ τῷ ὄντι τὸ σῶμα μόνον ἐν τῇ πόλει κεῖται αὐτοῦ καὶ ἐπιδημεῖ, ἡ δὲ διάνοια, ταῦτα πάντα ἡγησαμένη σμικρὰ καὶ οὐδέν, ἀτιμάσασα πανταχῇ πέτεται κατὰ Πίνδαρον τᾶς τε γᾶς ὑπένερθε καὶ τὰ ἐπίπεδα γεωμετροῦσα, οὐρανοῦ θ' ὕπερ ἀστρονομοῦσα, [174a] καὶ πᾶσαν πάντῃ φύσιν ἐρευνωμένη τῶν ὄντων ἑκάστου ὅλου, εἰς τῶν ἐγγὺς οὐδὲν αὑτὴν συγκαθιεῖσα.

Θεόδωρος

Πῶς τοῦτο λέγεις, ὦ Σώκρατες;

Σωκράτης

Ὥσπερ καὶ Θαλῆν ἀστρονομοῦντα, ὦ Θεόδωρε, καὶ ἄνω βλέποντα, πεσόντα εἰς φρέαρ, Θρᾷττά τις ἐμμελὴς καὶ χαρίεσσα θεραπαινὶς ἀποσκῶψαι λέγεται ὡς τὰ μὲν ἐν οὐρανῷ προθυμοῖτο εἰδέναι, τὰ δ' ἔμπροσθεν αὐτοῦ καὶ παρὰ πόδας λανθάνοι αὐτόνν. Ταὐτὸν δὲ ἀρκεῖ σκῶμμα ἐπὶ πάντας [174b] ὅσοι ἐν φιλοσοφίᾳ διάγουσι. Τῷ γὰρ ὄντι τὸν τοιοῦτον ὁ μὲν πλησίον καὶ ὁ γείτων λέληθεν, οὐ μόνον ὅτι πράττει, ἀλλ' ὀλίγου καὶ εἰ ἄνθρωπός ἐστιν ἤ τι ἄλλο θρέμμα· τί δέ ποτ' ἐστὶν ἄνθρωπος καὶ τί τῇ τοιαύτῃ φύσει προσήκει διάφορον τῶν ἄλλων ποιεῖν ἢ πάσχειν, ζητεῖ τε καὶ πράγματ' ἔχει διερευνώμενος. Μανθάνεις γάρ που, ὦ Θεόδωρε· ἢ οὔ;

Θεόδωρος

Ἔγωγε· καὶ ἀληθῆ λέγεις.

Σωκράτης

Τοιγάρτοι, ὦ φίλε, ἰδίᾳ τε συγγιγνόμενος ὁ τοιοῦτος [174c] ἑκάστῳ καὶ δημοσίᾳ, ὅπερ ἀρχόμενος ἔλεγον, ὅταν ἐν δικαστηρίῳ ἤ που ἄλλοθι ἀναγκασθῇ περὶ τῶν παρὰ πόδας καὶ τῶν ἐν ὀφθαλμοῖς διαλέγεσθαι, γέλωτα παρέχει οὐ μόνον Θρᾴτταις ἀλλὰ καὶ τῷ ἄλλῳ ὄχλῳ, εἰς φρέατά τε καὶ πᾶσαν ἀπορίαν ἐμπίπτων ὑπὸ ἀπειρίας, καὶ ἡ ἀσχημοσύνη δεινή, δόξαν ἀβελτερίας παρεχομένη· ἔν τε γὰρ ταῖς λοιδορίαις ἴδιον ἔχει οὐδὲν οὐδένα λοιδορεῖν, ἅτ' οὐκ εἰδὼς κακὸν οὐδὲν οὐδενὸς ἐκ τοῦ μὴ μεμελετηκέναι· ἀπορῶν [174d] οὖν γελοῖος φαίνεται. Ἔν τε τοῖς ἐπαίνοις καὶ ταῖς τῶν ἄλλων μεγαλαυχίαις οὐ προσποιήτως ἀλλὰ τῷ ὄντι γελῶν ἔνδηλος γιγνόμενος ληρώδης δοκεῖ εἶναι. Τύραννόν τε γὰρ ἢ βασιλέα ἐγκωμιαζόμενον, ἕνα τῶν νομέων, οἷον συβώτην ἢ ποιμένα ἤ τινα βουκόλον, ἡγεῖται ἀκούειν εὐδαιμονιζόμενον πολὺ βδάλλοντα· δυσκολώτερον δὲ ἐκείνων ζῷον καὶ ἐπιβουλότερον ποιμαίνειν τε καὶ βδάλλειν νομίζει αὐτούς, ἄγροικον δὲ καὶ ἀπαίδευτον ὑπὸ ἀσχολίας οὐδὲν ἧττον τῶν [174e] νομέων τὸν τοιοῦτον ἀναγκαῖον γίγνεσθαι, σηκὸν ἐν ὄρει τὸ τεῖχος περιβεβλημένον. Γῆς δὲ ὅταν μυρία πλέθρα ἢ ἔτι πλείω ἀκούσῃ ὥς τις ἄρα κεκτημένος θαυμαστὰ πλήθει κέκτηται, πάνσμικρα δοκεῖ ἀκούειν εἰς ἅπασαν εἰωθὼς τὴν γῆν βλέπειν. Τὰ δὲ δὴ γένη ὑμνούντων, ὡς γενναῖός τις ἑπτὰ πάππους πλουσίους ἔχων ἀποφῆναι, παντάπασιν ἀμβλὺ καὶ ἐπὶ σμικρὸν ὁρώντων ἡγεῖται τὸν ἔπαινον, ὑπὸ [175a] ἀπαιδευσίας οὐ δυναμένων εἰς τὸ πᾶν ἀεὶ βλέπειν οὐδὲ λογίζεσθαι ὅτι πάππων καὶ προγόνων μυριάδες ἑκάστῳ γεγόνασιν ἀναρίθμητοι, ἐν αἷς πλούσιοι καὶ πτωχοὶ καὶ βασιλῆς καὶ δοῦλοι βάρβαροί τε καὶ Ἕλληνες πολλάκις μυρίοι γεγόνασιν ὁτῳοῦν· ἀλλ' ἐπὶ πέντε καὶ εἴκοσι καταλόγῳ προγόνων σεμνυνομένων καὶ ἀναφερόντων εἰς Ἡρακλέα τὸν Ἀμφιτρύωνος ἄτοπα αὐτῷ καταφαίνεται τῆς σμικρολογίας, ὅτι [175b] δὲ ὁ ἀπ' Ἀμφιτρύωνος εἰς τὸ ἄνω πεντεκαιεικοστὸς τοιοῦτος ἦν οἵα συνέβαινεν αὐτῷ τύχη, καὶ ὁ πεντηκοστὸς ἀπ' αὐτοῦ, γελᾷ οὐ δυναμένων λογίζεσθαί τε καὶ χαυνότητα ἀνοήτου ψυχῆς ἀπαλλάττειν. Ἐν ἅπασι δὴ τούτοις ὁ τοιοῦτος ὑπὸ τῶν πολλῶν καταγελᾶται, τὰ μὲν ὑπερηφάνως ἔχων, ὡς δοκεῖ, τὰ δ' ἐν ποσὶν ἀγνοῶν τε καὶ ἐν ἑκάστοις ἀπορῶν.

Θεόδωρος

Παντάπασι τὰ γιγνόμενα λέγεις, ὦ Σώκρατες.

Σωκράτης

Ὅταν δέ γέ τινα αὐτός, ὦ φίλε, ἑλκύσῃ ἄνω, καὶ [175c] ἐθελήσῃ τις αὐτῷ ἐκβῆναι ἐκ τοῦ « τί ἐγὼ σὲ ἀδικῶ ἢ σὺ ἐμέ;  » Εἰς σκέψιν αὐτῆς δικαιοσύνης τε καὶ ἀδικίας, τί τε ἑκάτερον αὐτοῖν καὶ τί τῶν πάντων ἢ ἀλλήλων διαφέρετον, ἢ ἐκ τοῦ εἰ βασιλεὺς εὐδαίμων, κεκτημένος τ' αὖ χρυσίον, βασιλείας πέρι καὶ ἀνθρωπίνης ὅλως εὐδαιμονίας καὶ ἀθλιότητος ἐπὶ σκέψιν, ποίω τέ τινε ἐστὸν καὶ τίνα τρόπον ἀνθρώπου φύσει προσήκει τὸ μὲν κτήσασθαι αὐτοῖν, τὸ δὲ ἀποφυγεῖν περὶ τούτων ἁπάντων ὅταν αὖ δέῃ λόγον [175d] διδόναι τὸν σμικρὸν ἐκεῖνον τὴν ψυχὴν καὶ δριμὺν καὶ δικανικόν, πάλιν αὖ τὰ ἀντίστροφα ἀποδίδωσιν· εἰλιγγιῶν τε ἀπὸ ὑψηλοῦ κρεμασθεὶς καὶ βλέπων μετέωρος ἄνωθεν ὑπὸ ἀηθείας ἀδημονῶν τε καὶ ἀπορῶν καὶ βατταρίζων γέλωτα Θρᾴτταις μὲν οὐ παρέχει οὐδ' ἄλλῳ ἀπαιδεύτῳ οὐδενί, οὐ γὰρ αἰσθάνονται, τοῖς δ' ἐναντίως ἢ ὡς ἀνδραπόδοις τραφεῖσι πᾶσιν. Οὗτος δὴ ἑκατέρου τρόπος, ὦ Θεόδωρε, ὁ [175e] μὲν τῷ ὄντι ἐν ἐλευθερίᾳ τε καὶ σχολῇ τεθραμμένου, ὃν δὴ φιλόσοφον καλεῖς, ᾧ ἀνεμέσητον εὐήθει δοκεῖν καὶ οὐδενὶ εἶναι ὅταν εἰς δουλικὰ ἐμπέσῃ διακονήματα, οἷον στρωματόδεσμον μὴ ἐπισταμένου συσκευάσασθαι μηδὲ ὄψον ἡδῦναι ἢ θῶπας λόγους· ὁ δ' αὖ τὰ μὲν τοιαῦτα πάντα δυναμένου τορῶς τε καὶ ὀξέως διακονεῖν, ἀναβάλλεσθαι δὲ οὐκ ἐπισταμένου ἐπιδέξια ἐλευθερίως οὐδέ γ' ἁρμονίαν λόγων [176a]  λαβόντος ὀρθῶς ὑμνῆσαι θεῶν τε καὶ ἀνδρῶν εὐδαιμόνων βίον ἀληθῆ.

Θεόδωρος

Εἰ πάντας, ὦ Σώκρατες, πείθοις ἃ λέγεις ὥσπερ ἐμέ, πλείων ἂν εἰρήνη καὶ κακὰ ἐλάττω κατ' ἀνθρώπους εἴη.

Σωκράτης

Ἀλλ' οὔτ' ἀπολέσθαι τὰ κακὰ δυνατόν, ὦ Θεόδωρε ὑπεναντίον γάρ τι τῷ ἀγαθῷ ἀεὶ εἶναι ἀνάγκηοὔτ' ἐν θεοῖς αὐτὰ ἱδρῦσθαι, τὴν δὲ θνητὴν φύσιν καὶ τόνδε τὸν τόπον περιπολεῖ ἐξ ἀνάγκης. Διὸ καὶ πειρᾶσθαι χρὴ ἐνθένδε [176b] ἐκεῖσε φεύγειν ὅτι τάχιστα. Φυγὴ δὲ ὁμοίωσις θεῷ κατὰ τὸ δυνατόν· ὁμοίωσις δὲ δίκαιον καὶ ὅσιον μετὰ φρονήσεως γενέσθαι. Ἀλλὰ γάρ, ὦ ἄριστε, οὐ πάνυ τι ῥᾴδιον πεῖσαι ὡς ἄρα οὐχ ὧν ἕνεκα οἱ πολλοί φασι δεῖν πονηρίαν μὲν φεύγειν, ἀρετὴν δὲ διώκειν, τούτων χάριν τὸ μὲν ἐπιτηδευτέον, τὸ δ' οὔ, ἵνα δὴ μὴ κακὸς καὶ ἵνα ἀγαθὸς δοκῇ εἶναι· ταῦτα μὲν γάρ ἐστιν ὁ λεγόμενος γραῶν ὕθλος, ὡς ἐμοὶ φαίνεται· τὸ δὲ ἀληθὲς ὧδε λέγωμεν. Θεὸς οὐδαμῇ [176c] οὐδαμῶς ἄδικος, ἀλλ' ὡς οἷόν τε δικαιότατος, καὶ οὐκ ἔστιν αὐτῷ ὁμοιότερον οὐδὲν ἢ ὃς ἂν ἡμῶν αὖ γένηται ὅτι δικαιότατος. Περὶ τοῦτο καὶ ἡ ὡς ἀληθῶς δεινότης ἀνδρὸς καὶ οὐδενία τε καὶ ἀνανδρία. Ἡ μὲν γὰρ τούτου γνῶσις σοφία καὶ ἀρετὴ ἀληθινή, ἡ δὲ ἄγνοια ἀμαθία καὶ κακία ἐναργής· αἱ δ' ἄλλαι δεινότητές τε δοκοῦσαι καὶ σοφίαι ἐν μὲν πολιτικαῖς δυναστείαις γιγνόμεναι φορτικαί, ἐν δὲ τέχναις [176d] βάναυσοι. Τῷ οὖν ἀδικοῦντι καὶ ἀνόσια λέγοντι ἢ πράττοντι μακρῷ ἄριστ' ἔχει τὸ μὴ συγχωρεῖν δεινῷ ὑπὸ πανουργίας εἶναι· ἀγάλλονται γὰρ τῷ ὀνείδει καὶ οἴονται ἀκούειν ὅτι οὐ λῆροί εἰσι, γῆς ἄλλως ἄχθη, ἀλλ' ἄνδρες οἵους δεῖ ἐν πόλει τοὺς σωθησομένους. Λεκτέον οὖν τἀληθές, ὅτι τοσούτῳ μᾶλλόν εἰσιν οἷοι οὐκ οἴονται, ὅτι οὐχὶ οἴονται· ἀγνοοῦσι γὰρ ζημίαν ἀδικίας, ὃ δεῖ ἥκιστα ἀγνοεῖν. Οὐ γάρ ἐστιν ἣν δοκοῦσιν, πληγαί τε καὶ θάνατοι, ὧν ἐνίοτε πάσχουσιν [176e] οὐδὲν ἀδικοῦντες, ἀλλὰ ἣν ἀδύνατον ἐκφυγεῖν.

Θεόδωρος

Τίνα δὴ λέγεις;

Σωκράτης

Παραδειγμάτων, ὦ φίλε, ἐν τῷ ὄντι ἑστώτων, τοῦ μὲν θείου εὐδαιμονεστάτου, τοῦ δὲ ἀθέου ἀθλιωτάτου, οὐχ ὁρῶντες ὅτι οὕτως ἔχει, ὑπὸ ἠλιθιότητός τε καὶ τῆς ἐσχάτης [177a] ἀνοίας λανθάνουσι τῷ μὲν ὁμοιούμενοι διὰ τὰς ἀδίκους πράξεις, τῷ δὲ ἀνομοιούμενοι. Οὗ δὴ τίνουσι δίκην ζῶντες τὸν εἰκότα βίον ᾧ ὁμοιοῦνται· ἐὰν δ' εἴπωμεν ὅτι, ἂν μὴ ἀπαλλαγῶσι τῆς δεινότητος, καὶ τελευτήσαντας αὐτοὺς ἐκεῖνος μὲν ὁ τῶν κακῶν καθαρὸς τόπος οὐ δέξεται, ἐνθάδε δὲ τὴν αὑτοῖς ὁμοιότητα τῆς διαγωγῆς ἀεὶ ἕξουσι, κακοὶ κακοῖς συνόντες, ταῦτα δὴ καὶ παντάπασιν ὡς δεινοὶ καὶ πανοῦργοι ἀνοήτων τινῶν ἀκούσονται.

Θεόδωρος

Καὶ μάλα δή, ὦ Σώκρατες.

SOCRATE.

Par la raison que les uns ont toujours ce que tu viens de dire, du loisir, et conversent ensemble en paix tout à leur aise ; et de même que nous changeons maintenant de discours pour la troisième fois, ils en font autant lorsque le propos qui survient leur plaît davantage, ainsi qu'à nous; et il leur est indifférent que leur discours 125 soit long ou court, pourvu qu'ils parviennent à la vérité. Les autres, au contraire, [172e] n'ont jamais de temps à perdre lorsqu'ils parlent; car l'eau qui coule les oblige à se hâter (25), et ne leur permet pas de parler de ce qu'ils aimeraient le mieux ; la partie adverse est là qui leur fait la loi, en faisant lire la formule d'accusation qu'ils appellent antomosie (26), du contenu de laquelle il est défendu de s'écarter. Leurs plaidoyers sont toujours pour ou contre un esclave comme eux, et s'adressent à un maître assis qui tient en sa main la justice. Leurs disputes ne sont jamais sans conséquence ; il y va toujours de quelque intérêt personnel, souvent même [173a] de la vie ; tout cela les rend âpres et ardents, habiles à gagner leur maître par des paroles flatteuses, et à lui complaire dans leurs actions : mais ils n'ont ni droiture, ni grandeur d'âme ; car la servitude où ils s'engagent dès leur jeunesse les empêche de se développer, leur ôte toute élévation et  126 toute noblesse, en les contraignant d'agir par des voies obliques; et comme elle expose leur âme encore tendre à de grands dangers et à de grandes craintes, qu'ils n'ont pas assez de force pour affronter au nom de la justice et de la vérité, ils ont recours de bonne heure au mensonge et à l'art de se nuire les uns aux autres; [173b] ils se plient et se rompent en mille manières, et passent de l'adolescence à l'âge mûr avec un esprit entièrement corrompu, s'imaginant avoir acquis beaucoup d'habileté et de sagesse. Voilà, Théodore, quels sont les habiles et les sages de ce monde. Quant à ceux qui composent notre chœur, veux-tu que,nous en parlions aussi, ou que, les laissant là, nous revenions à notre sujet, pour ne pas trop abuser de cette liberté de changer de propos, dont il était question tout à l'heure?

THÉODORE.

Point du tout, Socrate, parlons-en; [173c] tu as dit toi-même avec beaucoup de raison que nous qui faisons partie de ce chœur, ne sommes point les serviteurs des discours, mais qu'au contraire ce sont les discours qui sont comme nos serviteurs, et que chacun d'eux attend le moment où il nous plaira de le terminer. En effet, nous n'avons, comme les poètes, ni juge, ni specta-  127 leur qui préside à nos entretiens, nous réprimande et nous fasse la loi.

SOCRATE.

Parlons-en donc, puisque tu le trouves bon, mais des coryphées seulement : car qu'est-il besoin de faire mention de ceux qui s'appliquent à la philosophie sans génie et sans succès ? Le vrai philosophe ignore dès sa jeunesse [173d] le chemin de la place publique; il ne sait où est le tribunal, où est le sénat, et les autres lieux de la ville où se tiennent les assemblées. Il ne voit, ni n'entend les lois et les décrets prononcés ou écrits; les factions et les brigues pour parvenir au pouvoir, les réunions, les festins, les divertissements avec des joueuses de flûte, rien de tout cela ne lui vient à la pensée, même en songe. Vient-il de naître quelqu'un de haute ou de basse origine ? le malheur de celui-ci remonte-t-il jusqu'à ses ancêtres, hommes ou femmes? [173e] il ne le sait pas plus que le nombre des verres d'eau qui sont dans la mer, comme dit le proverbe. Il ne sait pas même qu'il ne sait pas tout cela ; car s'il s'abstient d'en prendre connaissance, ce n'est pas par vanité : mais, à vrai dire, il n'est présent que de corps dans la ville. Son âme, regardant tous ces objets comme indignes d'elle, se promène de tous côtés, me- 128 surant, selon l'expression de Pindare (27), et les profondeurs de la terre et l'immensité de sa surface ; s'élevant jusqu'aux cieux pour y contempler la course des astres, portant un œil curieux sur la nature intime de toutes [174a] les grandes classes d'êtres dont se compose cet univers, et ne s'abaissant à aucun des objets qui sont tout près d'elle.

THÉODORE.

Explique-toi un peu mieux, Socrate.

SOCRATE.

On raconte de Thalès, Théodore, que tout occupé de l'astronomie et regardant en haut, il tomba dans un puits (28), et qu'une servante de Thrace, d'un esprit agréable et facétieux, se moqua de lui, disant qu'il voulait savoir ce qui se passait au ciel, et qu'il ne voyait pas ce qui était devant lui et à ses pieds. Ce bon mot peut s'appliquer [174b] à tous ceux qui font profession de philosophie. En effet, non seulement un philosophe ne sait pas ce que fait son voisin, il ignore presque si c'est un homme ou un autre animal : mais ce que c'est que l'homme, et quel caractère le distingue des autres êtres pour l'action ou la  129 passion, voilà ce qu'il cherche, et ce qu'il se tourmente à découvrir. Comprends-tu ou non ma pensée, Théodore?

THÉODORE.

Oui, et je la partage entièrement.

SOCRATE.

C'est pourquoi, mon cher ami, dans les rapports particuliers ou publics qu'un tel homme [174c] a avec ses semblables, et, comme je le disais au commencement, lorsqu'il est forcé de parler devant les tribunaux ou ailleurs des choses qui sont à ses pieds et sous ses yeux, il apprête à rire, non seulement aux servantes de Thrace, mais à tout le peuple, son peu d'expérience le faisant tomber à chaque pas dans le puits de Thalès et dans mille perplexités ; et son embarras le fait passer pour un imbécile. Si on lui dit des injures, il ne peut en rendre, ne sachant de mal de personne, et n'y ayant jamais songé ; ainsi rien ne lui venant à la bouche, il fait un personnage [174d] ridicule. Lorsqu'il entend les autres se donner des louanges et se vanter, comme on le voit rire, non pour faire semblant, mais tout de bon, on le prend pour un extravagant. Fait-on devant lui l'éloge d'un tyran ou d'un roi, il se figure entendre exalter le bonheur de quelque pâtre, porcher, berger, ou bouvier, parce qu'il tire beaucoup de lait  130 de ses troupeaux ; seulement il pense que les rois ont à faire paître et à traire un animal plus difficile et moins sûr ; que d'ailleurs ils ne sont ni moins grossiers, ni moins ignorants que [174e] des pâtres, à cause du peu de loisir qu'ils ont de s'instruire, renfermés entre des murailles, comme dans un parc sur une montagne. Dit-on en sa présence qu'un homme a d'immenses richesses, parce qu'il possède en fonds de terre dix mille arpents ou davantage, cela lui paraît bien peu de chose, accoutumé qu'il est à considérer la terre entière. Si les admirateurs de la noblesse disent qu'un homme est bien né, parce qu'il peut prouver sept aïeux riches, il pense que de tels éloges viennent de gens qui ont la vue basse et courte, et n'ont pas l'habitude d'embrasser [175a] la suite des siècles, ni de calculer que chacun de nous a des milliers innombrables d'aïeux et d'ancêtres, parmi lesquels il se trouve une infinité de riches et de pauvres, de rois et d'esclaves, de Grecs et de Barbares. Quant à ceux qui se glorifient d'une liste de vingt-cinq ancêtres, et qui remontent jusqu'à Hercule [175b] fils d'Amphitryon, cela lui paraît d'une petitesse d'esprit inconcevable; il rit de ce que ce noble superbe n'a pas la force de faire réflexion que le vingt - cinquième ancêtre d'Amphitryon, et le cinquantième par rapport à lui, a été tel qu'il a plu à la fortune; il  131 rit de ce qu'il n'a pas la force de se délivrer d'aussi folles idées. Dans toutes ces occasions, le vulgaire se moque du philosophe, qui tantôt lui paraît plein d'orgueil et de hauteur, tantôt aveugle pour ce qui est à ses pieds, et embarrassé sur toutes choses.

THÉODORE.

Il faut bien l'avouer, Socrate.

SOCRATE.

Mais, mon cher, lorsque le philosophe [175c] peut à son tour attirer quelqu'un de ces hommes vers la région supérieure, et que celui-ci consent à passer de ces questions, Quelle injustice te fais-je? ou, Quelle injustice me fais-tu? à la considération de la justice et de l'injustice en elles-mêmes, de leur nature, du caractère qui les distingue l'une de l'autre et de tout le reste ; ou bien de la question si un roi est heureux ou celui qui possède de grands trésors, à l'examen de la royauté, et en général de ce qui fait le bonheur ou le malheur de l'homme, pour voir en quoi l'un et l'autre consiste, et de quelle manière il faut rechercher l'un et fuir l'autre : quand il faut [175d] que cet homme, dont l'âme est petite, âpre, exercée à la chicane, s'explique sur tout cela, c'est alors le tour de la philosophie. Suspendu en l'air, et n'étant pas accoutumé à regarder les choses de si haut, la tête 132 lui tourne; il est étonné, interdit; il ne sait ce qu'il dit, et il apprête à rire, non point aux servantes de Thrace ni aux ignorants, car ils ne s'aperçoivent de rien, mais à tous ceux qui n'ont pas été élevés comme des esclaves. Tel est, [175e] Théodore, le caractère de l'un et de l'autre sage. Le premier, celui que tu appelles philosophe, élevé dans le sein de la liberté et du loisir, ne tient point à déshonneur de passer pour un homme simple et qui n'est bon à rien, quand il s'agit de remplir certains ministères serviles, par exemple, d'arranger un bagage, d'assaisonner des mets ou des phrases. L'autre, au contraire, entend parfaitement l'art de s'acquitter de tous ces emplois avec dextérité et promptitude ; mais ne sachant point porter son manteau avec grâce et en homme libre, il est incapable de s'élever jusqu'à l'harmonie du discours, [176a] et de chanter dignement la véritable vie des dieux, et des hommes qui participent de leur félicité.

THÉODORE.

Si tu pouvais persuader à tous les autres, comme à moi, la vérité de ce que tu dis, Socrate, il y aurait plus de paix et moins de maux parmi les hommes.

SOCRATE.

Mais il n'est pas possible, Théodore, que le mal soit détruit, parce qu'il faut toujours qu'il 133 y ait quelque chose de contraire au bien ; on ne peut pas non plus le placer parmi les dieux : c'est donc une nécessité qu'il circule sur cette terre, et autour de notre nature mortelle. C'est pourquoi nous devons tâcher [176b] de fuir au plus vite de ce séjour à l'autre. Or, cette fuite, c'est la ressemblance avec Dieu, autant qu'il dépend de nous; et on ressemble à Dieu par la justice, la sainteté et la sagesse. Mais, mon cher ami, ce n'est pas une chose aisée à persuader, qu'on ne doit point s'attacher à la vertu et fuir le vice par le motif du commun des hommes : ce motif est d'éviter la réputation de méchant et de passer pour vertueux. Tout cela n'est, à mon avis, que contes de vieille, comme l'on dit. La vraie raison, la voici. Dieu n'est injuste [176c] en aucune circonstance, ni en aucune manière ; au contraire, il est parfaitement juste ; et rien ne lui ressemble davantage que celui d'entre nous qui est parvenu au plus haut degré de justice. De là dépend le vrai mérite de l'homme, ou sa bassesse et son néant. Qui connaît Dieu, est véritablement sage et vertueux : qui ne le connaît pas, est évidemment ignorant et méchant. Et pour les qualités que le vulgaire appelle talents et sagesse, elles ne font, dans le gouvernement politique, que des tyrans; et dans les arts, des mercenaires. Aussi on ne saurait mieux faire que 134 de refuser à l'homme injuste qui blesse la piété dans ses discours et dans ses actions le titre d'homme habile. [176d] Car c'est un reproche qui plaît à leur vanité; et ils se persuadent qu'on veut dire par là que ce ne sont point des gens méprisables, d'inutiles fardeaux de la terre, mais des hommes tels qu'on doit être pour se tirer d'affaire en cette vie. Il faut leur dire, ce qui est vrai, que moins ils croient être ce qu'ils sont, plus ils le sont en effet, dans leur ignorance déplorable de la vraie punition de l'injustice. Cette punition n'est pas celle qu'ils s'imaginent, les supplices, la mort, auxquels ils réussissent souvent à se soustraire, [176e] tout en faisant mal ; mais c'est une punition à laquelle il leur est impossible d'échapper.

THÉODORE.

Quelle est-elle?

SOCRATE.

Il y a, dans la nature des choses, mon cher ami, deux modèles, l'un divin et bien heureux, l'autre sans Dieu et misérable. Ils ne s'en doutent pas, et l'excès de leur folie [177a] les empêche de sentir que leur conduite pleine d'injustice les rapproche du second et les éloigne du premier; aussi en portent-ils la peine, menant une vie 135 conforme au modèle qu'ils ont choisi d'imiter. Et si nous leur disons que, s'ils ne renoncent à cette habileté prétendue, ils seront exclus après leur mort du séjour où les méchants ne sont point admis, et que pendant cette vie ils n'auront d'autre compagnie que celle qui convient à leurs mœurs, savoir, d'hommes aussi méchants qu'eux, dans le délire de leur sagesse, ils traiteront ces discours d'extravagances.

THÉODORE.

Il n'est que trop vrai, Socrate.

[177b] Σωκράτης

Οἶδά τοι, ὦ ἑταῖρε. Ἓν μέντοι τι αὐτοῖς συμβέβηκεν· ὅταν ἰδίᾳ λόγον δέῃ δοῦναί τε καὶ δέξασθαι περὶ ὧν ψέγουσι, καὶ ἐθελήσωσιν ἀνδρικῶς πολὺν χρόνον ὑπομεῖναι καὶ μὴ ἀνάνδρως φυγεῖν, τότε ἀτόπως, ὦ δαιμόνιε, τελευτῶντες οὐκ ἀρέσκουσιν αὐτοὶ αὑτοῖς περὶ ὧν λέγουσι, καὶ ἡ ῥητορικὴ ἐκείνη πως ἀπομαραίνεται, ὥστε παίδων μηδὲν δοκεῖν διαφέρειν. Περὶ μὲν οὖν τούτων, ἐπειδὴ καὶ πάρεργα τυγχάνει λεγόμενα, ἀποστῶμενεἰ δὲ μή, πλείω [177c] ἀεὶ ἐπιρρέοντα καταχώσει ἡμῶν τὸν ἐξ ἀρχῆς λόγονἐπὶ δὲ τὰ ἔμπροσθεν ἴωμεν, εἰ καὶ σοὶ δοκεῖ.

Θεόδωρος

Ἐμοὶ μὲν τὰ τοιαῦτα, ὦ Σώκρατες, οὐκ ἀηδέστερα ἀκούειν· ῥᾴω γὰρ τηλικῷδε ὄντι ἐπακολουθεῖν. Εἰ μέντοι δοκεῖ, πάλιν ἐπανίωμεν.

Σωκράτης

Οὐκοῦν ἐνταῦθά που ἦμεν τοῦ λόγου, ἐν ᾧ ἔφαμεν τοὺς τὴν φερομένην οὐσίαν λέγοντας, καὶ τὸ ἀεὶ δοκοῦν ἑκάστῳ τοῦτο καὶ εἶναι τούτῳ ᾧ δοκεῖ, ἐν μὲν τοῖς ἄλλοις ἐθέλειν διισχυρίζεσθαι καὶ οὐχ ἥκιστα περὶ τὰ δίκαια, ὡς [177d] παντὸς μᾶλλον ἃ ἂν θῆται πόλις δόξαντα αὑτῇ, ταῦτα καὶ ἔστι δίκαια τῇ θεμένῃ, ἕωσπερ ἂν κέηται· περὶ δὲ τἀγαθὰ οὐδένα ἀνδρεῖον ἔθ' οὕτως εἶναι ὥστε τολμᾶν διαμάχεσθαι ὅτι καὶ ἃ ἂν ὠφέλιμα οἰηθεῖσα πόλις ἑαυτῇ θῆται, καὶ ἔστι τοσοῦτον χρόνον ὅσον ἂν κέηται ὠφέλιμα, πλὴν εἴ τις τὸ ὄνομα λέγοι· τοῦτο δέ που σκῶμμ' ἂν εἴη πρὸς ὃ λέγομεν. Ἢ οὐχί;

Θεόδωρος

Πάνυ γε.

[177e] Σωκράτης

Μὴ γὰρ λεγέτω τὸ ὄνομα, ἀλλὰ τὸ πρᾶγμα τὸ ὀνομαζόμενον θεωρείτω.

Θεόδωρος

Μὴ γάρ.

Σωκράτης

Ἀλλ' ὃ ἂν τοῦτο ὀνομάζῃ, τούτου δήπου στοχάζεται νομοθετουμένη, καὶ πάντας τοὺς νόμους, καθ' ὅσον οἴεταί τε καὶ δύναται, ὡς ὠφελιμωτάτους ἑαυτῇ τίθεται· ἢ πρὸς ἄλλο τι βλέπουσα νομοθετεῖται;

[178a] Θεόδωρος

Οὐδαμῶς.

Σωκράτης

Ἦ οὖν καὶ τυγχάνει ἀεί, ἢ πολλὰ καὶ διαμαρτάνει ἑκάστη;

Θεόδωρος

Οἶμαι ἔγωγε καὶ ἁμαρτάνειν.

Σωκράτης

Ἔτι τοίνυν ἐνθένδε ἂν μᾶλλον πᾶς τις ὁμολογήσειεν ταὐτὰ ταῦτα, εἰ περὶ παντός τις τοῦ εἴδους ἐρωτῴη ἐν ᾧ καὶ τὸ ὠφέλιμον τυγχάνει ὄν· ἔστι δέ που καὶ περὶ τὸν μέλλοντα χρόνον. Ὅταν γὰρ νομοθετώμεθα, ὡς ἐσομένους ὠφελίμους τοὺς νόμους τιθέμεθα εἰς τὸν ἔπειτα χρόνον· τοῦτο δὲ μέλλον ὀρθῶς ἂν λέγοιμεν.

[178b] Θεόδωρος

Πάνυ γε.

Σωκράτης

Ἴθι δή, οὑτωσὶ ἐρωτῶμεν Πρωταγόραν ἢ ἄλλον τινὰ τῶν ἐκείνῳ τὰ αὐτὰ λεγόντων· πάντων μέτρον ἄνθρωπός ἐστιν, ὡς φατέ, ὦ Πρωταγόρα, λευκῶν βαρέων κούφων, οὐδενὸς ὅτου οὐ τῶν τοιούτων· ἔχων γὰρ αὐτῶν τὸ κριτήριον ἐν αὑτῷ, οἷα πάσχει τοιαῦτα οἰόμενος, ἀληθῆ τε οἴεται αὑτῷ καὶ ὄντα. Οὐχ οὕτω;

Θεόδωρος

Οὕτω.

Σωκράτης

Ἦ καὶ τῶν μελλόντων ἔσεσθαι, φήσομεν, ὦ Πρωταγόρα, [178c] ἔχει τὸ κριτήριον ἐν αὑτῷ, καὶ οἷα ἂν οἰηθῇ ἔσεσθαι, ταῦτα καὶ γίγνεται ἐκείνῳ τῷ οἰηθέντι; Οἷον θερμή· ἆρ' ὅταν τις οἰηθῇ ἰδιώτης αὑτὸν πυρετὸν λήψεσθαι καὶ ἔσεσθαι ταύτην τὴν θερμότητα, καὶ ἕτερος, ἰατρὸς δέ, ἀντοιηθῇ, κατὰ τὴν ποτέρου δόξαν φῶμεν τὸ μέλλον ἀποβήσεσθαι, ἢ κατὰ τὴν ἀμφοτέρων, καὶ τῷ μὲν ἰατρῷ οὐ θερμὸς οὐδὲ πυρέττων γενήσεται, ἑαυτῷ δὲ ἀμφότερα;

Θεόδωρος

Γελοῖον μεντἂν εἴη.

Σωκράτης

Ἀλλ' οἶμαι περὶ οἴνου γλυκύτητος καὶ αὐστηρότητος [178d] μελλούσης ἔσεσθαι ἡ τοῦ γεωργοῦ δόξα ἀλλ' οὐχ ἡ τοῦ κιθαριστοῦ κυρία.

Θεόδωρος

Τί μήν;

Σωκράτης

Οὐδ' ἂν αὖ περὶ ἀναρμόστου τε καὶ εὐαρμόστου ἐσομένου παιδοτρίβης ἂν βέλτιον δοξάσειεν μουσικοῦ, ὃ καὶ ἔπειτα αὐτῷ τῷ παιδοτρίβῃ δόξει εὐάρμοστον εἶναι.

Θεόδωρος

Οὐδαμῶς.

Σωκράτης

Οὐκοῦν καὶ τοῦ μέλλοντος ἑστιάσεσθαι μὴ μαγειρικοῦ ὄντος, σκευαζομένης θοίνης, ἀκυροτέρα ἡ κρίσις τῆς τοῦ ὀψοποιοῦ περὶ τῆς ἐσομένης ἡδονῆς. Περὶ μὲν γὰρ τοῦ [178e] ἤδη ὄντος ἑκάστῳ ἡδέος ἢ γεγονότος μηδέν πω τῷ λόγῳ διαμαχώμεθα, ἀλλὰ περὶ τοῦ μέλλοντος ἑκάστῳ καὶ δόξειν καὶ ἔσεσθαι πότερον αὐτὸς αὑτῷ ἄριστος κριτής, ἢ σύ, ὦ Πρωταγόρα, τό γε περὶ λόγους πιθανὸν ἑκάστῳ ἡμῶν ἐσόμενον εἰς δικαστήριον βέλτιον ἂν προδοξάσαις ἢ τῶν ἰδιωτῶν ὁστισοῦν;

Θεόδωρος

Καὶ μάλα, ὦ Σώκρατες, τοῦτό γε σφόδρα ὑπισχνεῖτο πάντων διαφέρειν αὐτός.

Σωκράτης

Νὴ Δία, ὦ μέλε· ἢ οὐδείς γ' ἂν αὐτῷ διελέγετο [179a] διδοὺς πολὺ ἀργύριον, εἰ μὴ τοὺς συνόντας ἔπειθεν ὅτι καὶ τὸ μέλλον ἔσεσθαί τε καὶ δόξειν οὔτε μάντις οὔτε τις ἄλλος ἄμεινον κρίνειεν ἂν ἢ αὐτός αὑτῷ.

Θεόδωρος

Ἀληθέστατα.

Σωκράτης

Οὐκοῦν καὶ αἱ νομοθεσίαι καὶ τὸ ὠφέλιμον περὶ τὸ μέλλον ἐστί, καὶ πᾶς ἂν ὁμολογοῖ νομοθετουμένην πόλιν πολλάκις ἀνάγκην εἶναι τοῦ ὠφελιμωτάτου ἀποτυγχάνειν;

Θεόδωρος

Μάλα γε.

Σωκράτης

Μετρίως ἄρα ἡμῖν πρὸς τὸν διδάσκαλόν σου εἰρήσεται [179b] ὅτι ἀνάγκη αὐτῷ ὁμολογεῖν σοφώτερόν τε ἄλλον ἄλλου εἶναι καὶ τὸν μὲν τοιοῦτον μέτρον εἶναι, ἐμοὶ δὲ τῷ ἀνεπιστήμονι μηδὲ ὁπωστιοῦν ἀνάγκην εἶναι μέτρῳ γίγνεσθαι, ὡς ἄρτι με ἠνάγκαζεν ὁ ὑπὲρ ἐκείνου λόγος, εἴτ' ἐβουλόμην εἴτε μή, τοιοῦτον εἶναι.

Θεόδωρος

Ἐκείνῃ μοι δοκεῖ, ὦ Σώκρατες, μάλιστα ἁλίσκεσθαι ὁ λόγος, ἁλισκόμενος καὶ ταύτῃ, ᾗ τὰς τῶν ἄλλων δόξας κυρίας ποιεῖ, αὗται δὲ ἐφάνησαν τοὺς ἐκείνου λόγους οὐδαμῇ ἀληθεῖς ἡγούμεναι.

[179c] Σωκράτης

Πολλαχῇ, ὦ Θεόδωρε, καὶ ἄλλῃ ἂν τό γε τοιοῦτον ἁλοίη μὴ πᾶσαν παντὸς ἀληθῆ δόξαν εἶναι· περὶ δὲ τὸ παρὸν ἑκάστῳ πάθος, ἐξ ὧν αἱ αἰσθήσεις καὶ αἱ κατὰ ταύτας δόξαι γίγνονται, χαλεπώτερον ἑλεῖν ὡς οὐκ ἀληθεῖς. Ἴσως δὲ οὐδὲν λέγω· ἀνάλωτοι γάρ, εἰ ἔτυχον, εἰσίν, καὶ οἱ φάσκοντες αὐτὰς ἐναργεῖς τε εἶναι καὶ ἐπιστήμας τάχα ἂν ὄντα λέγοιεν, καὶ Θεαίτητος ὅδε οὐκ ἀπὸ σκοποῦ εἴρηκεν [179d] αἴσθησιν καὶ ἐπιστήμην ταὐτὸν θέμενος. Προσιτέον οὖν ἐγγυτέρω, ὡς ὁ ὑπὲρ Πρωταγόρου λόγος ἐπέταττε, καὶ σκεπτέον τὴν φερομένην ταύτην οὐσίαν διακρούοντα εἴτε ὑγιὲς εἴτε σαθρὸν φθέγγεται· μάχη δ' οὖν περὶ αὐτῆς οὐ φαύλη οὐδ' ὀλίγοις γέγονεν.

Θεόδωρος

Πολλοῦ καὶ δεῖ φαύλη εἶναι, ἀλλὰ περὶ μὲν τὴν Ἰωνίαν καὶ ἐπιδίδωσι πάμπολυ. Οἱ γὰρ τοῦ Ἡρακλείτου ἑταῖροι χορηγοῦσι τούτου τοῦ λόγου μάλα ἐρρωμένως.

Σωκράτης

Τῷ τοι, ὦ φίλε Θεόδωρε, μᾶλλον σκεπτέον καὶ ἐξ [179e] ἀρχῆς, ὥσπερ αὐτοὶ ὑποτείνονται.

Θεόδωρος

Παντάπασι μὲν οὖν. Καὶ γάρ, ὦ Σώκρατες, περὶ τούτων τῶν Ἡρακλειτείων ἤ, ὥσπερ σὺ λέγεις, Ὁμηρείων καὶ ἔτι παλαιοτέρων, αὐτοῖς μὲν τοῖς περὶ τὴν Ἔφεσον, ὅσοι προσποιοῦνται ἔμπειροι, οὐδὲν μᾶλλον οἷόν τε διαλεχθῆναι ἢ τοῖς οἰστρῶσιν. Ἀτεχνῶς γὰρ κατὰ τὰ συγγράμματα φέρονται, τὸ δ' ἐπιμεῖναι ἐπὶ λόγῳ καὶ ἐρωτήματι καὶ ἡσυχίως [180a] ἐν μέρει ἀποκρίνασθαι καὶ ἐρέσθαι ἧττον αὐτοῖς ἔνι ἢ τὸ μηδέν· μᾶλλον δὲ ὑπερβάλλει τὸ οὐδ' οὐδὲν πρὸς τὸ μηδὲ σμικρὸν ἐνεῖναι τοῖς ἀνδράσιν ἡσυχίας. Ἀλλ' ἄν τινά τι ἔρῃ, ὥσπερ ἐκ φαρέτρας ῥηματίσκια αἰνιγματώδη ἀνασπῶντες ἀποτοξεύουσι, κἂν τούτου ζητῇς λόγον λαβεῖν τί εἴρηκεν, ἑτέρῳ πεπλήξῃ καινῶς μετωνομασμένῳ. Περανεῖς δὲ οὐδέποτε οὐδὲν πρὸς οὐδένα αὐτῶν· οὐδέ γε ἐκεῖνοι αὐτοὶ πρὸς ἀλλήλους, ἀλλ' εὖ πάνυ φυλάττουσι τὸ μηδὲν βέβαιον ἐᾶν εἶναι [180b] μήτ' ἐν λόγῳ μήτ' ἐν ταῖς αὑτῶν ψυχαῖς, ἡγούμενοι, ὡς ἐμοὶ δοκεῖ, αὐτὸ στάσιμον εἶναι· τούτῳ δὲ πάνυ πολεμοῦσιν, καὶ καθ' ὅσον δύνανται πανταχόθεν ἐκβάλλουσιν.

Σωκράτης

Ἴσως, ὦ Θεόδωρε, τοὺς ἄνδρας μαχομένους ἑώρακας, εἰρηνεύουσιν δὲ οὐ συγγέγονας· οὐ γὰρ σοὶ ἑταῖροί εἰσιν. Ἀλλ' οἶμαι τὰ τοιαῦτα τοῖς μαθηταῖς ἐπὶ σχολῆς φράζουσιν, οὓς ἂν βούλωνται ὁμοίους αὑτοῖς ποιῆσαι.

Θεόδωρος

Ποίοις μαθηταῖς, ὦ δαιμόνιε; Οὐδὲ γίγνεται τῶν [180c] τοιούτων ἕτερος ἑτέρου μαθητής, ἀλλ' αὐτόματοι ἀναφύονται ὁπόθεν ἂν τύχῃ ἕκαστος αὐτῶν ἐνθουσιάσας, καὶ τὸν ἕτερον ὁ ἕτερος οὐδὲν ἡγεῖται εἰδέναι. Παρὰ μὲν οὖν τούτων, ὅπερ ᾖα ἐρῶν, οὐκ ἄν ποτε λάβοις λόγον οὔτε ἑκόντων οὔτε ἀκόντων· αὐτοὺς δὲ δεῖ παραλαβόντας ὥσπερ πρόβλημα ἐπισκοπεῖσθαι.

Σωκράτης

Καὶ μετρίως γε λέγεις. Τὸ δὲ δὴ πρόβλημα ἄλλο τι παρειλήφαμεν παρὰ μὲν τῶν ἀρχαίων μετὰ ποιήσεως [180d] ἐπικρυπτομένων τοὺς πολλούς, ὡς ἡ γένεσις τῶν ἄλλων πάντων Ὠκεανός τε καὶ Τηθὺς ῥεύματα τυγχάνει καὶ οὐδὲν ἕστηκε, παρὰ δὲ τῶν ὑστέρων ἅτε σοφωτέρων ἀναφανδὸν ἀποδεικνυμένων, ἵνα καὶ οἱ σκυτοτόμοι αὐτῶν τὴν σοφίαν μάθωσιν ἀκούσαντες καὶ παύσωνται ἠλιθίως οἰόμενοι τὰ μὲν ἑστάναι, τὰ δὲ κινεῖσθαι τῶν ὄντων, μαθόντες δὲ ὅτι πάντα κινεῖται τιμῶσιν αὐτούς; Ὀλίγου δὲ ἐπελαθόμην, ὦ Θεόδωρε, ὅτι ἄλλοι αὖ τἀναντία τούτοις ἀπεφήναντο, [180e]

οἷον ἀκίνητον τελέθει τῷ παντὶ ὄνομ' εἶναι

καὶ ἄλλα ὅσα Μέλισσοί τε καὶ Παρμενίδαι ἐναντιούμενοι πᾶσι τούτοις διισχυρίζονται, ὡς ἕν τε πάντα ἐστὶ καὶ ἕστηκεν αὐτὸ ἐν αὑτῷ οὐκ ἔχον χώραν ἐν ᾗ κινεῖται. Τούτοις οὖν, ὦ ἑταῖρε, πᾶσι τί χρησόμεθα; Κατὰ σμικρὸν γὰρ προϊόντες λελήθαμεν ἀμφοτέρων εἰς τὸ μέσον πεπτωκότες, καὶ ἂν μή [181a] πῃ ἀμυνόμενοι διαφύγωμεν, δίκην δώσομεν ὥσπερ οἱ ἐν ταῖς παλαίστραις διὰ γραμμῆς παίζοντες, ὅταν ὑπ' ἀμφοτέρων ληφθέντες ἕλκωνται εἰς τἀναντία. Δοκεῖ οὖν μοι τοὺς ἑτέρους πρότερον σκεπτέον, ἐφ' οὕσπερ ὡρμήσαμεν, τοὺς ῥέοντας, καὶ ἐὰν μέν τι φαίνωνται λέγοντες, συνέλξομεν μετ' αὐτῶν ἡμᾶς αὐτούς, τοὺς ἑτέρους ἐκφυγεῖν πειρώμενοι· ἐὰν δὲ οἱ τοῦ ὅλου στασιῶται ἀληθέστερα λέγειν δοκῶσι, φευξόμεθα παρ' [181b] αὐτοὺς ἀπ' αὖ τῶν τὰ ἀκίνητα κινούντων. Ἀμφότεροι δ' ἂν φανῶσι μηδὲν μέτριον λέγοντες, γελοῖοι ἐσόμεθα ἡγούμενοι ἡμᾶς μὲν τὶ λέγειν φαύλους ὄντας, παμπαλαίους δὲ καὶ πασσόφους ἄνδρας ἀποδεδοκιμακότες. Ὅρα οὖν, ὦ Θεόδωρε, εἰ λυσιτελεῖ εἰς τοσοῦτον προϊέναι κίνδυνον.

Θεόδωρος

Οὐδὲν μὲν οὖν ἀνεκτόν, ὦ Σώκρατες, μὴ οὐ διασκέψασθαι τί λέγουσιν ἑκάτεροι τῶν ἀνδρῶν.

Σωκράτης

Σκεπτέον ἂν εἴη σοῦ γε οὕτω προθυμουμένου. Δοκεῖ [181c] οὖν μοι ἀρχὴ εἶναι τῆς σκέψεως κινήσεως πέρι, ποῖόν τί ποτε ἄρα λέγοντές φασι τὰ πάντα κινεῖσθαι. Βούλομαι δὲ λέγειν τὸ τοιόνδε· πότερον ἕν τι εἶδος αὐτῆς λέγουσιν ἤ, ὥσπερ ἐμοὶ φαίνεται, δύο; Μὴ μέντοι μόνον ἐμοὶ δοκείτω, ἀλλὰ συμμέτεχε καὶ σύ, ἵνα κοινῇ πάσχωμεν ἄν τι καὶ δέῃ. Καί μοι λέγε· ἆρα κινεῖσθαι καλεῖς ὅταν τι χώραν ἐκ χώρας μεταβάλλῃ ἢ καὶ ἐν τῷ αὐτῷ στρέφηται;

Θεόδωρος

Ἔγωγε.

Σωκράτης

Τοῦτο μὲν τοίνυν ἓν ἔστω εἶδος. Ὅταν δὲ ᾖ μὲν ἐν [181d] τῷ αὐτῷ, γηράσκῃ δέ, ἢ μέλαν ἐκ λευκοῦ ἢ σκληρὸν ἐκ μαλακοῦ γίγνηται, ἤ τινα ἄλλην ἀλλοίωσιν ἀλλοιῶται, ἆρα οὐκ ἄξιον ἕτερον εἶδος φάναι κινήσεως;

Θεόδωρος

Ἔμοιγε δοκεῖ ἀναγκαῖον μὲν οὖν.

Σωκράτης

Δύο δὴ λέγω τούτω εἴδει κινήσεως, ἀλλοίωσιν, τὴν δὲ φοράν.

Θεόδωρος

Ὀρθῶς γε λέγων.

Σωκράτης

Τοῦτο τοίνυν οὕτω διελόμενοι διαλεγώμεθα ἤδη τοῖς τὰ πάντα φάσκουσιν κινεῖσθαι καὶ ἐρωτῶμεν· πότερον πᾶν [181e] φατε ἀμφοτέρως κινεῖσθαι, φερόμενόν τε καὶ ἀλλοιούμενον, ἢ τὸ μέν τι ἀμφοτέρως, τὸ δ' ἑτέρως;

Θεόδωρος

Ἀλλὰ μὰ Δί' ἔγωγε οὐκ ἔχω εἰπεῖν· οἶμαι δ' ἂν φάναι ἀμφοτέρως.

Σωκράτης

Εἰ δέ γε μή, ὦ ἑταῖρε, κινούμενά τε αὐτοῖς καὶ ἑστῶτα φανεῖται, καὶ οὐδὲν μᾶλλον ὀρθῶς ἕξει εἰπεῖν ὅτι κινεῖται τὰ πάντα ἢ ὅτι ἕστηκεν.

Θεόδωρος

Ἀληθέστατα λέγεις.

Σωκράτης

Οὐκοῦν ἐπειδὴ κινεῖσθαι αὐτὰ δεῖ, τὸ δὲ μὴ κινεῖσθαι [182a] μὴ ἐνεῖναι μηδενί, πάντα δὴ πᾶσαν κίνησιν ἀεὶ κινεῖται.

Θεόδωρος

Ἀνάγκη.

Σωκράτης

Σκόπει δή μοι τόδε αὐτῶν· τῆς θερμότητος ἢ λευκότητος ἢ ὁτουοῦν γένεσιν οὐχ οὕτω πως ἐλέγομεν φάναι αὐτούς, φέρεσθαι ἕκαστον τούτων ἅμα αἰσθήσει μεταξὺ τοῦ ποιοῦντός τε καὶ πάσχοντος, καὶ τὸ μὲν πάσχον αἰσθητικὸν ἀλλ' οὐκ αἴσθησιν ἔτι γίγνεσθαι, τὸ δὲ ποιοῦν ποιόν τι ἀλλ' οὐ ποιότητα; Ἴσως οὖν ἡ ποιότης ἅμα ἀλλόκοτόν τε φαίνεται ὄνομα καὶ οὐ μανθάνεις ἁθρόον λεγόμενον· κατὰ [182b] μέρη οὖν ἄκουε. Τὸ γὰρ ποιοῦν οὔτε θερμότης οὔτε λευκότης, θερμὸν δὲ καὶ λευκὸν γίγνεται, καὶ τἆλλα οὕτω· μέμνησαι γάρ που ἐν τοῖς πρόσθεν ὅτι οὕτως ἐλέγομεν, ἓν μηδὲν αὐτὸ καθ' αὑτὸ εἶναι, μηδ' αὖ τὸ ποιοῦν ἢ πάσχον, ἀλλ' ἐξ ἀμφοτέρων πρὸς ἄλληλα συγγιγνομένων τὰς αἰσθήσεις καὶ τὰ αἰσθητὰ ἀποτίκτοντα τὰ μὲν ποι' ἄττα γίγνεσθαι, τὰ δὲ αἰσθανόμενα.

Θεόδωρος

Μέμνημαι· πῶς δ' οὔ;

[177b] SOCRATE.

Oui, mon cher. Mais voici ce qui leur arrive : lorsqu'on les presse dans un entretien particulier d'expliquer leur mépris pour certaines choses, et d'écouter les raisons d'autrui, pour peu qu'ils veuillent soutenir durant quelque temps la discussion et ne point quitter lâchement la partie, ils se trouvent à la fin, mon cher ami, dans un embarras extrême ; rien de ce qu'ils disent ne les satisfait, et toute cette rhétorique s'évanouit, au point qu'on les prendrait pour des enfants. Mais quittons ce propos, qui d'ailleurs n'est qu'un hors-d'œuvre ; sinon, [177c] les digressions venant sans cesse l'une après l'autre nous feront perdre de vue le premier 136 sujet de cet entretien. Revenons-y donc, si tu le veux bien.

THÉODORE.

Ce n'est pas, Socrate, ce que j'ai entendu avec le moins de plaisir. A mon âge, on suit plus aisément de pareils discours. Néanmoins, si tel est ton avis, reprenons notre premier propos.

SOCRATE.

L'endroit où nous en sommes restés, ce me semble, est celui où nous disions que ceux qui prétendent que tout est en mouvement, et que chaque chose est toujours pour chacun telle qu'elle lui paraît, sont résolus à soutenir en tout le reste, mais surtout par rapport à la justice, [177d] que ce qu'une cité érige en loi, comme lui paraissant juste, est tel pour elle, tant que la loi subsiste : mais qu'à l'égard de l'utile, personne n'est assez hardi pour oser soutenir que toute institution faite par une cité qui l'a jugée avantageuse, l'est en effet autant de temps qu'elle est en vigueur; à moins qu'on ne parle seulement du nom : ce qui serait une raillerie dans un sujet tel que celui que nous traitons. N'est-ce pas ?

THÉODORE.

Oui.

137 [177e] SOCRATE.

Ne parlons donc pas du nom, mais de la chose qu'il désigne.

THÉODORE.

Tu as raison.

SOCRATE.

Aussi bien ce n'est pas le nom, mais ce qu'il signifie, que toute cité se propose en se donnant des lois, les faisant toutes très utiles pour elle, à ce qu'elle pense, et autant qu'il est en son pouvoir. Crois -tu qu'elle ait quelque autre but dans sa législation ?

[178a] THÉODORE.

Aucun autre.

SOCRATE.

Chaque cité atteint- elle toujours ce but, ou ne le manque-t-elle pas en bien des points ?

THÉODORE.

Il me paraît qu'elle le manque souvent.

SOCRATE.

C'est ce dont tout le monde conviendra plus aisément encore, si la question est proposée par rapport à l'espèce entière à laquelle l'utile appartient. Or l'utile regarde le temps à venir; car quand nous faisons des lois, c'est dans l'espérance qu'elles seront utiles pour le temps qui suivra, c'est-à-dire pour l'avenir.

138 [178b] THÉODORE.

Sans doute.

SOCRATE.

Interrogeons donc de cette manière Protagoras, ou quelqu'un de ses partisans: L'homme, dis-tu, Protagoras, est la mesure de toutes les choses, blanches, pesantes, légères, et de toutes les autres semblables, parce qu'ayant en soi la règle pour en juger, et se les représentant telles qu'il les sent, son opinion est toujours vraie et réelle par rapport à lui. N'est-ce pas?

THÉODORE.

Oui.

SOCRATE.

Mais dirons-nous également, Protagoras, [178c] que l'homme a en lui la règle propre à juger les choses à venir, et qu'elles deviennent pour chacun telles qu'il se figure qu'elles seront? En fait de chaleur, par exemple, quand un homme pense que la fièvre le saisira et qu'il éprouvera cette espèce de chaleur, et qu'un médecin pense le contraire, suivant laquelle de ces deux opinions dirons-nous que la chose arrivera? ou bien sera-ce suivant toutes les deux, en sorte que pour le médecin cet homme n'aura ni chaleur ni fièvre, et que pour lui-même il aura l'une et l'autre?

139 THÉODORE.

Cela serait par trop ridicule.

SOCRATE.

A l'égard de la douceur et de l'aigreur future du vin, c'est, je pense, [178d] à l'opinion du vigneron qu'il faut s'en rapporter, et non à celle du joueur de lyre.

THÉODORE.

Sans contredit.

SOCRATE.

Le maître de gymnastique ne saurait non plus juger mieux que le musicien de ce qui sera ou ne sera pas d'accord et paraîtra ensuite d'accord au maître de gymnastique lui-même.

THÉODORE.

Non, assurément.

SOCRATE.

Le jugement de celui qui va faire un grand repas et ne s'entend point en cuisine, sur le plaisir qu'il aura, est moins sûr que celui du cuisinier : car nous ne parlons point du plaisir [178e] que chacun ressent actuellement ou qu'il a ressenti ; mais c'est sur celui que chacun compte ressentir et ressentira en effet que nous nous demandons si chacun est le meilleur juge par 140 rapport à soi-même. Est-ce que toi, Protagoras, tu ne jugeras pas d'avance mieux que le premier venu de ce qui sera propre à réussir devant un tribunal?

THÉODORE.

Très certainement, Socrate; et c'est en quoi il se vantait principalement de l'emporter sur tout le monde.

SOCRATE.

Par Jupiter, mon pauvre ami, je le crois bien. Personne assurément ne lui aurait donné [179a] tant d'argent pour ses leçons, s'il avait persuadé à ses élèves que nul homme, nul devin même n'était plus en état de juger de ce qui devait être que chacun ne l'était pour soi.

THÉODORE.

Il y a grande apparence.

SOCRATE.

Or, la législation et l'utile ne regardent-ils pas le temps à venir? Et tout le monde n'avouera-t-il point qu'il est impossible qu'une cité se donnant des lois ne manque souvent ce qui lui est le plus avantageux?

THÉODORE.

Sans doute.

SOCRATE.

Nous sommes donc fondés à dire à ton maître 141 qu'il ne peut se dispenser de reconnaître [179b] qu'un homme est plus savant qu'un autre; que celui-là est la vraie mesure, et que pour moi qui suis un ignorant, nulle raison ne m'oblige à l'être, comme le discours que j'ai prononcé pour sa défense voulait m'y contraindre malgré moi.

THÉODORE.

Il me paraît, Socrate, que le sentiment de Protagoras est convaincu de faux par cet endroit, et encore par celui où lui-même garantit la certitude des opinions des autres, quoique ces opinions, comme nous l'avons vu, rejettent précisément ce qu'il avance.

[179c] SOCRATE.

Il est aisé, Théodore, de démontrer par bien d'autres preuves que toutes les opinions de tout homme ne sont pas vraies. Mais quant aux impressions que chacun reçoit, impressions d'où naissent les sensations et les opinions qui en dérivent, il est plus difficile de prouver qu'elles ne sont pas vraies. Peut-être même y a-t-il une impossibilité absolue; peut-être ceux qui prétendent qu'elles contiennent la vérité de la science disent-ils la vérité, et Théétète ne s'est- il pas trompé en assurant que [179d] la sensation et la science sont une même chose. Il faut donc 142 serrer de plus près ce système, comme nous l'ordonnait le discours en faveur de Protagoras, examiner celte essence toujours en mouvement, et voir, en la frappant comme un vase, si elle rend un son bon ou mauvais. Il y a eu sur cette essence une dispute qui n'était pas petite, ni entre peu de personnes.

THÉODORE.

Il s'en faut bien qu'elle soit petite. Elle croît et s'étend tous les jours du côté de l'Ionie ; car les partisans d'Héraclite défendent avec beaucoup de vigueur le sentiment de leur maître.

SOCRATE.

C'est une raison de plus pour nous, mon cher Théodore, [179e] d'examiner de nouveau comment ils l'appuient.

THÉODORE.

Tu as tout-à-fait raison. En effet, Socrate, pour ce système d'Héraclite, ou, comme tu dis, d'Homère, ou de quelque autre plus ancien, ceux d'Éphèse, qui se donnent pour savants, sont comme des furieux avec lesquels il n'est pas possible de disputer. Ils sont aussi mobiles que leur doctrine. S'arrêter sur une matière, sur une question, répondre et interroger à son tour paisiblement, [180a] est une chose qui est en leur pouvoir moins que rien, et infiniment moins que 143 rien, tant ils ont peu de consistance. Si tu les interroges, ils tirent aussitôt comme d'un carquois quelques petits mots énigmatiques qu'ils te décochent; et si tu veux leur en demander raison, tu es sur-le-champ frappé d'un autre mot équivoque ; enfin, tu ne concluras jamais rien avec aucun d'eux. Ils n'avancent pas davantage entre eux; mais ce qu'ils veulent pardessus tout, c'est de ne laisser rien de fixe [180b] dans leurs discours ni dans leurs pensées : et persuadés, ce semble, que cette fixité de langage et de pensée serait déjà le repos lui-même, ils lui font la guerre, et l'excluent de partout autant qu'ils peuvent.

SOCRATE.

Peut-être, Théodore, as -tu vu ces hommes dans la chaleur de la dispute, et ne t'es-tu pas trouvé avec eux quand ils conversaient en paix ; aussi bien ne sont-ils pas de tes amis : mais ils expliquent, je crois, plus tranquillement leur système à ceux de leurs élèves qu'ils veulent rendre semblables à eux.

THÉODORE.

Quels élèves, mon cher? Parmi eux [180c] aucun n'est disciple d'un autre : chacun se forme de soi-même, du moment que l'enthousiasme s'empare de lui ; et ils se traitent d'ignorants les uns les autres. De gens semblables, je te le répète, 144 tu n'obtiendras jamais raison de rien, ni de gré ni de force : il nous faut prendre ce qu'ils disent comme un problème à examiner entre nous.

SOCRATE.

Fort bien. Mais est-ce donc un autre problème que celui que nous ont d'abord proposé les anciens, qui l'enveloppèrent du voile de la [180d] poésie aux yeux du vulgaire, savoir que l'Océan et Téthys, principes de toutes choses, sont des écoulements, et que rien n'est stable ? ensuite les modernes, comme plus éclairés, l'ont exposé à découvert, afin que tous, jusqu'aux cordonniers, apprissent d'eux la sagesse, et cessassent de croire sottement qu'une partie des êtres est en repos et l'autre en mouvement; mais qu'ayant appris que tout se meut, ils fussent pleins de respect pour leurs maîtres. Et j'ai presque oublié, Théodore, que d'autres ont soutenu le système opposé, comme, par exemple, [180eCe qu'on appelle l'univers est immobile (29), et tout ce que les Mélisse et les Parménide cherchent à établir contradictoirement à tous les autres, comme que tout est un, et que cet un ne sort pas de lui-même, n'ayant point d'espace 145 où il puisse se mouvoir. Quel parti prendrons-nous, mon ami, par rapport à tous ces gens-là? En avançant peu à peu, nous voilà tombés au milieu des uns et des autres, sans nous en apercevoir; et si nous [181a] ne leur échappons par une vigoureuse défense, nous en porterons la peine, comme ceux qui dans la palestre se trouvent en jouant sur la ligne qui sépare les deux partis sont pris par les uns et par les autres, et tirés à la fois vers les côtés opposés (30). Il me paraît donc qu'il nous faut commencer par ceux que nous avons déjà entrepris, les philosophes du mouvement perpétuel ; et si nous jugeons qu'ils ont raison, nous nous joindrons à eux, et tâcherons d'échapper aux autres. S'il nous semble au contraire que la vérité est pour les partisans du repos, nous nous mettrons de leur côté, et abandonnerons [181b] ceux qui mettent en mouvement jusqu'à l'immobile. Enfin, s'il nous paraît que ni les uns ni les autres ne disent rien de raisonnable, nous serions ridicules de croire que des petits esprits comme nous puissent trouver quelque chose de bon, quand nous aurons condamné des hommes vénérables par leur antiquité et leur sagesse. Vois donc, Théodore, s'il est bon de courir un si grand danger.

146 THÉODORE.

Il ne serait point pardonnable, Socrate, de ne pas discuter ce que disent les uns et les autres.

SOCRATE.

Puisque tu montres tant d'ardeur, il faut entrer dans cette discussion. Or, il me paraît [181c] naturel, dans une question sur le mouvement, de commencer par voir ce que veulent dire ceux qui prétendent que tout se meut. Je m'explique : je demande s'ils n'admettent qu'une espèce de mouvement, ou s'ils en reconnaissent deux, comme je pense qu'on le doit faire. Mais il ne suffit pas que je le pense seul; il faut que tu sois de la partie, afin que, quelque chose qu'il arrive, nous l'éprouvions en commun. Dis-moi : lorsqu'une chose passe d'un lieu à un autre, ou qu'elle tourne sur elle-même sans changer de place, appelles -tu cela se mouvoir?

THÉODORE.

Oui.

SOCRATE.

Que ce soit donc là une espèce de mouvement. Et lorsque, demeurant dans [181d] le même lieu, elle vieillit, ou de blanche devient noire, ou de molle dure, enfin qu'elle éprouve toute autre altération, ne doit - on pas dire que c'est là une seconde espèce de mouvement?

147 THÉODORE.

Il me paraît qu'oui.

SOCRATE.

On ne peut en disconvenir. Je compte donc deux sortes de mouvement, l'un d'altération, l'autre de translation.

THÉODORE.

Tu as raison.

SOCRATE.

Cette distinction faite, adressons maintenant la parole à ceux qui soutiennent que tout se meut, et faisons-leur cette question. : Dites-vous [181e] que toutes choses se meuvent de ce double mouvement de translation et d'altération, ou que quelques-unes se meuvent de ces deux façons, et d'autres de l'une des deux seulement ?

THÉODORE.

En vérité, je ne sais que répondre : il me semble pourtant qu'ils diront que tout a ce double mouvement.

SOCRATE.

S'ils ne le disaient pas, mon cher, ils seraient obligés de reconnaître que les mêmes choses sont en mouvement et en repos, et qu'il n'est pas plus vrai de dire que tout se meut, que de dire que tout est immobile.

148 THÉODORE.

Rien de plus vrai.

SOCRATE.

Ainsi, puisqu'il faut que tout se meuve, et que la négation de mouvement [182a] ne se rencontre nulle part, toutes choses sont toujours mues et de toute manière.

THÉODORE.

Nécessairement.

SOCRATE.

Fais-moi bien attention à ceci. Ne disions-nous pas qu'ils expliquent la génération de la chaleur et de la blancheur à peu près de cette manière : chacune se meut avec la sensation dans l'espace intermédiaire entre l'agent et le patient ; le patient devient sentant, et non pas encore sensation, et l'agent devient affecté de telle ou telle qualité, et non pas qualité en soi (31). Peut-être ce mot de qualité te paraît-il étrange, et ne conçois-tu point la chose sous cette expression générale? Écoute-la [182b] donc en détail. L'agent ne devient ni chaleur, ni blancheur, mais chaud, blanc, et ainsi du reste. Car tu te souviens sans doute de ce qui a été dit précé- 149 demment, que rien n'est en soi, ni ce qui agit, ni ce qui pâtit ; mais que de leur rapprochement mutuel naissent les sensations et les choses sensibles ; d'où résulte d'un côté ce qui a telle ou telle qualité, de l'autre ce qui est sentant.

THÉODORE.

Et comment ne m'en souviendrais-je pas?

[182c] Σωκράτης

Τὰ μὲν τοίνυν ἄλλα χαίρειν ἐάσωμεν, εἴτε ἄλλως εἴτε οὕτως λέγουσιν· οὗ δ' ἕνεκα λέγομεν, τοῦτο μόνον φυλάττωμεν, ἐρωτῶντες· Κινεῖται καὶ ῥεῖ, ὥς φατε, τὰ πάντα; Ἦ γάρ;

Θεόδωρος

Ναί.

Σωκράτης

Οὐκοῦν ἀμφοτέρας ἃς διειλόμεθα κινήσεις, φερόμενά τε καὶ ἀλλοιούμενα;

Θεόδωρος

Πῶς δ' οὔ; Εἴπερ γε δὴ τελέως κινήσεται.

Σωκράτης

Εἰ μὲν τοίνυν ἐφέρετο μόνον, ἠλλοιοῦτο δὲ μή, εἴχομεν ἄν που εἰπεῖν οἷα ἄττα ῥεῖ τὰ φερόμενα· ἢ πῶς λέγομεν;

Θεόδωρος

Οὕτως.

[182d] Σωκράτης

Ἐπειδὴ δὲ οὐδὲ τοῦτο μένει, τὸ λευκὸν ῥεῖν τὸ ῥέον, ἀλλὰ μεταβάλλει, ὥστε καὶ αὐτοῦ τούτου εἶναι ῥοήν, τῆς λευκότητος, καὶ μεταβολὴν εἰς ἄλλην χρόαν, ἵνα μὴ ἁλῷ ταύτῃ μένον, ἆρά ποτε οἷόν τέ τι προσειπεῖν χρῶμα, ὥστε καὶ ὀρθῶς προσαγορεύειν;

Θεόδωρος

Καὶ τίς μηχανή, ὦ Σώκρατες; Ἢ ἄλλο γέ τι τῶν τοιούτων, εἴπερ ἀεὶ λέγοντος ὑπεξέρχεται ἅτε δὴ ῥέον;

Σωκράτης

Τί δὲ περὶ αἰσθήσεως ἐροῦμεν ὁποιασοῦν, οἷον τῆς [182e] τοῦ ὁρᾶν ἢ ἀκούειν; Μένειν ποτὲ ἐν αὐτῷ τῷ ὁρᾶν ἢ ἀκούειν;

Θεόδωρος

Οὔκουν δεῖ γε, εἴπερ πάντα κινεῖται.

Σωκράτης

Οὔτε ἄρα ὁρᾶν προσρητέον τι μᾶλλον ἢ μὴ ὁρᾶν, οὐδέ τιν' ἄλλην αἴσθησιν μᾶλλον ἢ μή, πάντων γε πάντως κινουμένων.

Θεόδωρος

Οὐ γὰρ οὖν.

Σωκράτης

Καὶ μὴν αἴσθησίς γε ἐπιστήμη, ὡς ἔφαμεν ἐγώ τε καὶ Θεαίτητος.

Θεόδωρος

Ἦν ταῦτα.

Σωκράτης

Οὐδὲν ἄρα ἐπιστήμην μᾶλλον ἢ μὴ ἐπιστήμην ἀπεκρινάμεθα ἐρωτώμενοι ὅτι ἐστὶν ἐπιστήμη.

[183a] Θεόδωρος

Ἐοίκατε.

Σωκράτης

Καλὸν ἂν ἡμῖν συμβαίνοι τὸ ἐπανόρθωμα τῆς ἀποκρίσεως, προθυμηθεῖσιν ἀποδεῖξαι ὅτι πάντα κινεῖται, ἵνα δὴ ἐκείνη ἡ ἀπόκρισις ὀρθὴ φανῇ. Τὸ δ', ὡς ἔοικεν, ἐφάνη, εἰ πάντα κινεῖται, πᾶσα ἀπόκρισις, περὶ ὅτου ἄν τις ἀποκρίνηται, ὁμοίως ὀρθὴ εἶναι, οὕτω τ' ἔχειν φάναι καὶ μὴ οὕτω, εἰ δὲ βούλει, γίγνεσθαι, ἵνα μὴ στήσωμεν αὐτοὺς τῷ λόγῳ.

Θεόδωρος

Ὀρθῶς λέγες

Σωκράτης

Πλήν γε, ὦ Θεόδωρε, ὅτι « οὕτω » τε εἶπον καὶ « οὐχ οὕτω ». Δεῖ δὲ οὐδὲ τοῦτο « οὕτω » λέγειν οὐδὲ [183b] γὰρ ἂν ἔτι κινοῖτο « οὕτω » οὐδ' αὖ « μὴ οὕτω » οὐδὲ γὰρ τοῦτο κίνησισἀλλά τιν' ἄλλην φωνὴν θετέον τοῖς τὸν λόγον τοῦτον λέγουσιν, ὡς νῦν γε πρὸς τὴν αὑτῶν ὑπόθεσιν οὐκ ἔχουσι ῥήματα, εἰ μὴ ἄρα τὸ « οὐδ' οὕτως » μάλιστα δ' οὕτως ἂν αὐτοῖς ἁρμόττοι, ἄπειρον λεγόμενον.

Θεόδωρος

Οἰκειοτάτη γοῦν διάλεκτος αὕτη αὐτοῖς.

Σωκράτης

Οὐκοῦν, ὦ Θεόδωρε, τοῦ τε σοῦ ἑταίρου ἀπηλλάγμεθα, καὶ οὔπω συγχωροῦμεν αὐτῷ πάντ' ἄνδρα πάντων [183c] χρημάτων μέτρον εἶναι, ἂν μὴ φρόνιμός τις ᾖ· ἐπιστήμην τε αἴσθησιν οὐ συγχωρησόμεθα κατά γε τὴν τοῦ πάντα κινεῖσθαι μέθοδον, ἢ εἰ μή τί πως ἄλλως Θεαίτητος ὅδε λέγει.

Θεόδωρος

Ἄριστ' εἴρηκας, ὦ Σώκρατες· τούτων γὰρ περανθέντων καὶ ἐμὲ ἔδει ἀπηλλάχθαι σοι ἀποκρινόμενον κατὰ τὰς συνθήκας, ἐπειδὴ τὸ περὶ τοῦ Πρωταγόρου λόγου τέλος σχοίη.

Θεαίτητος

Μὴ πρίν γ' ἄν, ὦ Θεόδωρε, Σωκράτης τε καὶ σὺ [183d] τοὺς φάσκοντας αὖ τὸ πᾶν ἑστάναι διέλθητε, ὥσπερ ἄρτι προύθεσθε.

Θεόδωρος

Νέος ὤν, ὦ Θεαίτητε, τοὺς πρεσβυτέρους ἀδικεῖν διδάσκεις ὁμολογίας παραβαίνοντας; Ἀλλὰ παρασκευάζου ὅπως τῶν ἐπιλοίπων Σωκράτει δώσεις λόγον.

Θεαίτητος

Ἐάνπερ γε βούληται. Ἥδιστα μεντἂν ἤκουσα περὶ ὧν λέγω.

Θεόδωρος

Ἱππέας εἰς πεδίον προκαλῇ Σωκράτη εἰς λόγους προκαλούμενος· ἐρώτα οὖν καὶ ἀκούσῃ.

Σωκράτης

Ἀλλά μοι δοκῶ, ὦ Θεόδωρε, περί γε ὧν κελεύει [183e] Θεαίτητος οὐ πείσεσθαι αὐτῷ.

Θεόδωρος

Τί δὴ οὖν οὐ πείσεσθαι;

Σωκράτης

Μέλισσον μὲν καὶ τοὺς ἄλλους, οἳ ἓν ἑστὸς λέγουσι τὸ πᾶν, αἰσχυνόμενος μὴ φορτικῶς σκοπῶμεν, ἧττον αἰσχύνομαι ἢ ἕνα ὄντα Παρμενίδην. Παρμενίδης δέ μοι φαίνεται, τὸ τοῦ Ὁμήρου, « αἰδοῖός τέ μοι εἶναι ἅμα δεινός τε ». Συμπροσέμειξα γὰρ δὴ τῷ ἀνδρὶ πάνυ νέος πάνυ πρεσβύτῃ, [184a] καί μοι ἐφάνη βάθος τι ἔχειν παντάπασι γενναῖον. Φοβοῦμαι οὖν μὴ οὔτε τὰ λεγόμενα συνιῶμεν, τί τε διανοούμενος εἶπε πολὺ πλέον λειπώμεθα, καὶ τὸ μέγιστον, οὗ ἕνεκα ὁ λόγος ὥρμηται, ἐπιστήμης πέρι τί ποτ' ἐστίν, ἄσκεπτον γένηται ὑπὸ τῶν ἐπεισκωμαζόντων λόγων, εἴ τις αὐτοῖς πείσεται· ἄλλως τε καὶ ὃν νῦν ἐγείρομεν πλήθει ἀμήχανον, εἴτε τις ἐν παρέργῳ σκέψεται, ἀνάξι' ἂν πάθοι, εἴτε ἱκανῶς, μηκυνόμενος τὸ τῆς ἐπιστήμης ἀφανιεῖ. Δεῖ δὲ οὐδέτερα, ἀλλὰ Θεαίτητον [184b] ὧν κυεῖ περὶ ἐπιστήμης πειρᾶσθαι ἡμᾶς τῇ μαιευτικῇ τέχνῃ ἀπολῦσαι.

Θεόδωρος

Ἀλλὰ χρή, εἰ δοκεῖ, οὕτω ποιεῖν.

Σωκράτης

Ἔτι τοίνυν, ὦ Θεαίτητε, τοσόνδε περὶ τῶν εἰρημένων ἐπίσκεψαι. Αἴσθησιν γὰρ δὴ ἐπιστήμην ἀπεκρίνω· ἦ γάρ;

Θεαίτητος

Ναί.

Σωκράτης

Εἰ οὖν τίς σε ὧδ' ἐρωτῴη· τῷ τὰ λευκὰ καὶ μέλανα ὁρᾷ ἄνθρωπος καὶ τῷ τὰ ὀξέα καὶ βαρέαα ἀκούει; Εἴποις ἂν οἶμαι ὄμμασί τε καὶ ὠσίν.

Θεαίτητος

Ἔγωγε.

[184c] Σωκράτης

Τὸ δὲ εὐχερὲς τῶν ὀνομάτων τε καὶ ῥημάτων καὶ μὴ δι' ἀκριβείας ἐξεταζόμενον τὰ μὲν πολλὰ οὐκ ἀγεννές, ἀλλὰ μᾶλλον τὸ τούτου ἐναντίον ἀνελεύθερον, ἔστι δὲ ὅτε ἀναγκαῖον, οἷον καὶ νῦν ἀνάγκη ἐπιλαβέσθαι τῆς ἀποκρίσεως ἣν ἀποκρίνῃ, ᾗ οὐκ ὀρθή. Σκόπει γάρ· ἀπόκρισις ποτέρα ὀρθοτέρα, ᾧ ὁρῶμεν τοῦτο εἶναι ὀφθαλμούς, ἢ δι' οὗ ὁρῶμεν, καὶ ᾧ ἀκούομεν ὦτα, ἢ δι' οὗ ἀκούομεν;

Θεαίτητος

Δι' ὧν ἕκαστα αἰσθανόμεθα, ἔμοιγε δοκεῖ, ὦ Σώκρατες, μᾶλλον ἢ οἷς.

[184d] Σωκράτης

Δεινὸν γάρ που, ὦ παῖ, εἰ πολλαί τινες ἐν ἡμῖν ὥσπερ ἐν δουρείοις ἵπποις αἰσθήσεις ἐγκάθηνται, ἀλλὰ μὴ εἰς μίαν τινὰ ἰδέαν, εἴτε ψυχὴν εἴτε ὅτι δεῖ καλεῖν, πάντα ταῦτα συντείνει, ᾗ διὰ τούτων οἷον ὀργάνων αἰσθανόμεθα ὅσα αἰσθητά.

Θεαίτητος

Ἀλλά μοι δοκεῖ οὕτω μᾶλλον ἢ ἐκείνως.

Σωκράτης

Τοῦδέ τοι ἕνεκα αὐτά σοι διακριβοῦμαι, εἴ τινι ἡμῶν αὐτῶν τῷ αὐτῷ διὰ μὲν ὀφθαλμῶν ἐφικνούμεθα λευκῶν τε [184e] καὶ μελάνων, διὰ δὲ τῶν ἄλλων ἑτέρων αὖ τινῶν· καὶ ἕξεις ἐρωτώμενος πάντα τὰ τοιαῦτα εἰς τὸ σῶμα ἀναφέρειν; Ἴσως δὲ βέλτιον σὲ λέγειν αὐτὰ ἀποκρινόμενον μᾶλλον ἢ ἐμὲ ὑπὲρ σοῦ πολυπραγμονεῖν. Καί μοι λέγε· θερμὰ καὶ σκληρὰ καὶ κοῦφα καὶ γλυκέα δι' ὧν αἰσθάνῃ, ἆρα οὐ τοῦ σώματος ἕκαστα τίθης; Ἢ ἄλλου τινός;

Θεαίτητος

Οὐδενὸς ἄλλου.

 

[182c] SOCRATE.

Laissons tout le reste de leur système, sans nous mettre en peine de quelle manière ils l'expliquent: tenons-nous-en au seul point qui nous intéresse, et demandons-leur : Tout se meut, dites-vous; tout s'écoule? N'est-ce pas?

THÉODORE.

Oui.

SOCRATE.

Sans doute du double mouvement que nous avons distingué, de translation et d'altération ?

THÉODORE.

Sans contredit, si l'on veut que tout se meuve complètement.

SOCRATE.

Si les choses changeaient de lieu et qu'elles ne s'altérassent point, on pourrait déterminer par la parole quelles sont les choses qui changent de lieu dans leur mouvement. N'est-il pas vrai?

150 THÉODORE.

Oui.

[182d] SOCRATE.

Mais comme ce n'est pas même une chose fixe que ce qui coule coule blanc ; mais qu'au contraire, il y a du changement à cet égard, en sorte que la blancheur elle-même s'écoule et devient une autre couleur, de peur qu'on ne la surprenne dans un état fixe; est-il jamais possible de donner à quelque couleur un nom convenable ?

THÉODORE.

Quel moyen, Socrate, et pour la couleur, et pour toute autre qualité semblable, puisqu'en s'écoulant elle échappe sans cesse à la parole qui veut la saisir?

SOCRATE.

Et que dirons-nous des sensations, par exemple, [182e] de celles de la vue ou de l'ouïe ? assurerons-nous qu'elles demeurent dans l'état de vision ou d'audition ?

THÉODORE.

Il ne le faut pas, s'il est vrai que tout se meut.

SOCRATE.

Par conséquent, tout étant dans un mouvement universel, on ne doit dire de quoi que ce 151 soit, qu'il voit plutôt qu'il ne voit pas, ou qu'il a telle sensation plutôt qu'il ne l'a pas.

THÉODORE.

Non, sans doute.

SOCRATE.

Or la sensation est la science, avons-nous dit Théétète et moi.

THÉODORE.

Il est vrai.

SOCRATE.

Lors donc qu'on nous a demandé ce qu'est la science, nous avons répondu que c'est une chose qui n'est pas plus science qu'elle ne l'est pas.

[183a] THÉODORE.

Je le crains.

SOCRATE.

Ne voilà-t-il pas notre réponse justifiée d'une belle manière ! Pour en montrer la justesse, nous nous sommes efforcés de prouver que tout se meut, tandis que, si tout se meut en effet, il en résulte que toute réponse, sur quelque chose que ce soit, est également juste, qu'on dise que cela est ainsi ou que cela n'est pas ainsi, ou, si tu aimes mieux, que cela devient ou ne devient pas ainsi, pour n'imposer aucune fixité à nos adversaires.

152 THÉODORE.

A merveille.

SOCRATE.

Oui, Théodore, si ce n'est que je me suis servi des expressions, ainsi, pas ainsi. Or, il ne faut point dire ainsi ; [183b] car ainsi serait un point fixe : ni pas ainsi non plus ; car il n'y a pas là de mouvement. Mais les partisans de ce système doivent chercher quelque autre terme ; et jusqu'ici, dans leur hypothèse, ils n'en ont pas dont ils puissent se servir, hormis celui-ci : en aucune manière. Cette expression indéfinie est celle qui va le mieux avec leur sentiment.

THÉODORE.

Oui, cette façon de parler leur sied tout-à-fait.

SOCRATE.

Nous voilà donc, Théodore, délivrés de ton ami : nous ne lui accordons point que tout homme soit la mesure [183c] de toutes choses, s'il n'est pas habile ; et jamais nous n'avouerons que la sensation soit la science, du moins sur ce principe que tout est en mouvement; pourvu que Théétète ne soit pas d'un autre avis.

THÉODORE

Très bien dit, Socrate.  Ce point achevé, se suis pareillement quitte de l'obligation de te 153 répondre, comme nous en sommes convenus, lorsque l'examen du sentiment de Protagoras serait fini.

THÉÉTÈTE.

Non pas encore, Théodore, jusqu'à ce que vous ayez discuté, Socrate et toi, [183d] l'opinion de ceux qui disent que tout est en repos, comme vous vous êtes tout à l'heure proposé de le faire.

THÉODORE.

Quoi ! si jeune, Théétète, tu donnes aux vieillards des leçons d'injustice, leur apprenant à violer leurs conventions ! Apprête- toi à faire raison à Socrate sur ce qui reste.

THÉÉTÈTE.

Je le veux bien, s'il y consent. Je vous aurais pourtant entendus tous les deux avec le plus grand plaisir.

THÉODORE.

Inviter Socrate à disputer, c'est inviter les cavaliers à courir dans la plaine. Interroge-le donc, et tu l'entendras.

SOCRATE.

Je ne pense pas, Théodore, que je me rende à l'invitation [183e] de Théétète.

THÉODORE.

Et pourquoi pas ?

154 SOCRATE.

Je crains que nous n'ayons assez mauvaise grâce à critiquer Mélisse et ceux qui soutiennent que tout est un et immobile; mais je l'appréhende moins pour eux tous ensemble que pour le seul Parménide. Parménide me paraît tout à la fois respectable et redoutable (32), pour me servir des termes d'Homère. Je l'ai fréquenté moi fort jeune, lui étant fort vieux; et il m'a semblé qu'il y avait dans ses discours [184a] une profondeur tout-à-fait extraordinaire. J'ai donc grand'peur que nous ne comprenions point ses paroles, et encore moins sa pensée; et plus que tout cela, j'ai peur que les digressions qui viennent se jeter à la traverse, si nous les écoutons, ne nous fassent perdre de vue l'objet principal de cet entretien, qui est de connaître la nature de la science. D'ailleurs le sujet que nous réveillons ici est immense : ce serait lui faire tort de ne l'examiner qu'en passant ; et si nous lui donnons toute l'étendue qu'il mérite, c'en est fait de la question qui nous occupe. Or il ne faut pas que ni l'un ni l'autre arrive ; et il vaut mieux que nous essayions avec l'art des sages-femmes de délivrer Théétète [104b] de ses conceptions sur la science.

155 THÉODORE.

A la bonne heure, si tel est ton avis.

SOCRATE.

Fais donc encore, Théétète, sur ce qui a été dit, l'observation suivante. Tu as répondu que la sensation et la science sont une même chose. N'est - ce pas ?

THÉÉTÈTE.

Oui.

SOCRATE.

Si on te demandait avec quoi l'homme voit le blanc et le noir, et entend l'aigu et le grave, tu dirais apparemment que c'est avec les yeux et les oreilles.

THÉÉTÈTE.

Sans doute.

[104c] SOCRATE.

Quoique, pour l'ordinaire, il convienne assez à un homme bien élevé de ne pas être trop difficile sur l'emploi des mots, et de ne pas les prendre trop à la rigueur, et que le contraire soit plutôt même étroit et mesquin, cependant cela est quelquefois nécessaire : par exemple, je ne puis me dispenser de relever dans ce que tu viens de dire quelque chose de défectueux. Vois en effet quelle est la meilleure de ces deux réponses : L'œil est ce avec quoi nous voyons ; ou 156 bien, ce par quoi nous voyons : L'oreille est ce avec quoi nous entendons; ou, ce par quoi nous entendons.

THÉÉTÈTE.

Il me paraît mieux de dire, Socrate, que c'est par eux plutôt qu'avec eux que nous sentons.

[184c] SOCRATE.

Effectivement, il serait étrange, mon enfant, qu'il y eût en nous plusieurs sens, comme dans des chevaux de bois, et que nos sens ne se rapportassent pas tous à une seule essence, qu'on l'appelle âme ou autrement, avec laquelle, par les sens comme autant d'instruments, nous sentons tout ce qui est sensible.

THÉÉTÈTE.

Il me semble qu'en effet la chose est plutôt ainsi.

SOCRATE.

La raison qui me fait exiger ici de toi tant d'exactitude, c'est que je voudrais savoir s'il est en nous un seul et même principe, avec lequel nous atteignons, par les yeux, ce qui est blanc [184e] ou noir, et les autres objets par les autres sens; et si à chaque espèce de sensations correspondent des organes corporels. Mais peut-être vau-t-il mieux que tu dises tout cela de toi-même,  157 que de me donner cette peine pour toi. Réponds donc : Ne rapportes-tu pas au corps les organes par lesquels tu sens ce qui est chaud, sec, léger, doux ?

THÉÉTÈTE.

Au corps.

Σωκράτης

Ἦ καὶ ἐθελήσεις ὁμολογεῖν ἃ δι' ἑτέρας δυνάμεως [185a] αἰσθάνῃ, ἀδύνατον εἶναι δι' ἄλλης ταῦτ' αἰσθέσθαι, οἷον ἃ δι' ἀκοῆς, δι' ὄψεως, ἢ ἃ δι' ὄψεως, δι' ἀκοῆς;

Θεαίτητος

Πῶς γὰρ οὐκ ἐθελήσω;

Σωκράτης

Εἴ τι ἄρα περὶ ἀμφοτέρων διανοῇ, οὐκ ἂν διά γε τοῦ ἑτέρου ὀργάνου, οὐδ' αὖ διὰ τοῦ ἑτέρου περὶ ἀμφοτέρων αἰσθάνοι' ἄν.

Θεαίτητος

Οὐ γὰρ οὖν.

Σωκράτης

Περὶ δὴ φωνῆς καὶ περὶ χρόας πρῶτον μὲν αὐτὸ τοῦτο περὶ ἀμφοτέρων ἦ διανοῇ, ὅτι ἀμφοτέρω ἐστόν;

Θεαίτητος

Ἔγωγε.

Σωκράτης

Οὐκοῦν καὶ ὅτι ἑκάτερον ἑκατέρου μὲν ἕτερον, ἑαυτῷ δὲ ταὐτόν;

[185b]  Θεαίτητος

Τί μήν;

Σωκράτης

Καὶ ὅτι ἀμφοτέρω δύο, ἑκάτερον δὲ ἕν;

Θεαίτητος

Καὶ τοῦτο.

Σωκράτης

Οὐκοῦν καὶ εἴτε ἀνομοίω εἴτε ὁμοίω ἀλλήλοιν, δυνατὸς εἶ ἐπισκέψασθαι;

Θεαίτητος

Ἴσως.

Σωκράτης

Ταῦτα δὴ πάντα διὰ τίνος περὶ αὐτοῖν διανοῇ; Οὔτε γὰρ δι' ἀκοῆς οὔτε δι' ὄψεως οἷόν τε τὸ κοινὸν λαμβάνειν περὶ αὐτῶν. Ἔτι δὲ καὶ τόδε τεκμήριον περὶ οὗ λέγομεν· εἰ γὰρ δυνατὸν εἴη ἀμφοτέρω σκέψασθαι ἆρ' ἐστὸν ἁλμυρὼ ἢ οὔ, [185c] οἶσθ' ὅτι ἕξεις εἰπεῖν ᾧ ἐπισκέψῃ, καὶ τοῦτο οὔτε ὄψις οὔτε ἀκοὴ φαίνεται, ἀλλά τι ἄλλο.

Θεαίτητος

Τί δ' οὐ μέλλει, ἥ γε διὰ τῆς γλώττης δύναμις;

Σωκράτης

Καλῶς λέγεις. Ἡ δὲ δὴ διὰ τίνος δύναμις τό τ' ἐπὶ πᾶσι κοινὸν καὶ τὸ ἐπὶ τούτοις δηλοῖ σοι, ᾧ τὸ ἔστιν ἐπονομάζεις καὶ τὸ οὐκ ἔστι καὶ ἃ νυνδὴ ἠρωτῶμεν περὶ αὐτῶν; Τούτοις πᾶσι ποῖα ἀποδώσεις ὄργανα δι' ὧν αἰσθάνεται ἡμῶν τὸ αἰσθανόμενον ἕκαστα;

Θεαίτητος

Οὐσίαν λέγεις καὶ τὸ μὴ εἶναι, καὶ ὁμοιότητα καὶ ἀνομοιότητα, καὶ τὸ ταὐτόν τε καὶ τὸ ἕτερον, ἔτι δὲ [185d] ἕν τε καὶ τὸν ἄλλον ἀριθμὸν περὶ αὐτῶν. Δῆλον δὲ ὅτι καὶ ἄρτιόν τε καὶ περιττὸν ἐρωτᾷς, καὶ τἆλλα ὅσα τούτοις ἕπεται, διὰ τίνος ποτὲ τῶν τοῦ σώματος τῇ ψυχῇ αἰσθανόμεθα.

Σωκράτης

Ὑπέρευ, ὦ Θεαίτητε, ἀκολουθεῖς, καὶ ἔστιν ἃ ἐρωτῶ αὐτὰ ταῦτα.

Θεαίτητος

Ἀλλὰ μὰ Δία, ὦ Σώκρατες, ἔγωγε οὐκ ἂν ἔχοιμι εἰπεῖν, πλήν γ' ὅτι μοι δοκεῖ τὴν ἀρχὴν οὐδ' εἶναι τοιοῦτον οὐδὲν τούτοις ὄργανον ἴδιον ὥσπερ ἐκείνοις, ἀλλ' [185e]  αὐτὴ δι' αὑτῆς ἡ ψυχὴ τὰ κοινά μοι φαίνεται περὶ πάντων ἐπισκοπεῖν.

Σωκράτης

Καλὸς γὰρ εἶ, ὦ Θεαίτητε, καὶ οὐχ, ὡς ἔλεγε Θεόδωρος, αἰσχρός· ὁ γὰρ καλῶς λέγων καλός τε καὶ ἀγαθός. Πρὸς δὲ τῷ καλῷ εὖ ἐποίησάς με μάλα συχνοῦ λόγου ἀπαλλάξας, εἰ φαίνεταί σοι τὰ μὲν αὐτὴ δι' αὑτῆς ἡ ψυχὴ ἐπισκοπεῖν, τὰ δὲ διὰ τῶν τοῦ σώματος δυνάμεων. Τοῦτο γὰρ ἦν ὃ καὶ αὐτῷ μοι ἐδόκει, ἐβουλόμην δὲ καὶ σοὶ δόξαι.

[186a] Θεαίτητος

Ἀλλὰ μὴν φαίνεταί γε.

Σωκράτης

Ποτέρων οὖν τίθης τὴν οὐσίαν; Τοῦτο γὰρ μάλιστα ἐπὶ πάντων παρέπεται.

Θεαίτητος

Ἐγὼ μὲν ὧν αὐτὴ ἡ ψυχὴ καθ' αὑτὴν ἐπορέγεται.

Σωκράτης

Ἦ καὶ τὸ ὅμοιον καὶ τὸ ἀνόμοιον καὶ τὸ ταὐτὸν καὶ ἕτερον;

Θεαίτητος

Ναί.

Σωκράτης

Τί δέ; Καλὸν καὶ αἰσχρὸν καὶ ἀγαθὸν καὶ κακόν;

Θεαίτητος

Καὶ τούτων μοι δοκεῖ ἐν τοῖς μάλιστα πρὸς ἄλληλα σκοπεῖσθαι τὴν οὐσίαν, ἀναλογιζομένη ἐν ἑαυτῇ τὰ [186b] γεγονότα καὶ τὰ παρόντα πρὸς τὰ μέλλοντα.

Σωκράτης

Ἔχε δή· ἄλλο τι τοῦ μὲν σκληροῦ τὴν σκληρότητα διὰ τῆς ἐπαφῆς αἰσθήσεται, καὶ τοῦ μαλακοῦ τὴν μαλακότητα ὡσαύτως;

Θεαίτητος

Ναί.

Σωκράτης

Τὴν δέ γε οὐσίαν καὶ ὅτι ἐστὸν καὶ τὴν ἐναντιότητα πρὸς ἀλλήλω καὶ τὴν οὐσίαν αὖ τῆς ἐναντιότητος αὐτὴ ἡ ψυχὴ ἐπανιοῦσα καὶ συμβάλλουσα πρὸς ἄλληλα κρίνειν πειρᾶται ἡμῖν.

Θεαίτητος

Πάνυ μὲν οὖν.

Σωκράτης

Οὐκοῦν τὰ μὲν εὐθὺς γενομένοις πάρεστι φύσει [186c] αἰσθάνεσθαι ἀνθρώποις τε καὶ θηρίοις, ὅσα διὰ τοῦ σώματος παθήματα ἐπὶ τὴν ψυχὴν τείνει· τὰ δὲ περὶ τούτων ἀναλογίσματα πρός τε οὐσίαν καὶ ὠφέλειαν μόγις καὶ ἐν χρόνῳ διὰ πολλῶν πραγμάτων καὶ παιδείας παραγίγνεται οἷς ἂν καὶ παραγίγνηται;

Θεαίτητος

Παντάπασι μὲν οὖν.

Σωκράτης

Οἷόν τε οὖν ἀληθείας τυχεῖν, ᾧ μηδὲ οὐσίας;

Θεαίτητος

Ἀδύνατον.

Σωκράτης

Οὗ δὲ ἀληθείας τις ἀτυχήσει, ποτὲ τούτου ἐπιστήμων ἔσται;

[186d] Θεαίτητος

Καὶ πῶς ἄν, ὦ Σώκρατες;

Σωκράτης

Ἐν μὲν ἄρα τοῖς παθήμασιν οὐκ ἔνι ἐπιστήμη, ἐν δὲ τῷ περὶ ἐκείνων συλλογισμῷ· οὐσίας γὰρ καὶ ἀληθείας ἐνταῦθα μέν, ὡς ἔοικε, δυνατὸν ἅψασθαι, ἐκεῖ δὲ ἀδύνατον.

Θεαίτητος

Φαίνεται.

Σωκράτης

Ἦ οὖν ταὐτὸν ἐκεῖνό τε καὶ τοῦτο καλεῖς, τοσαύτας διαφορὰς ἔχοντε;

Θεαίτητος

Οὔκουν δὴ δίκαιόν γε.

Σωκράτης

Τί οὖν δὴ ἐκείνῳ ἀποδίδως ὄνομα, τῷ ὁρᾶν ἀκούειν ὀσφραίνεσθαι ψύχεσθαι θερμαίνεσθαι;

[186e] Θεαίτητος

Αἰσθάνεσθαι ἔγωγε· τί γὰρ ἄλλο;

Σωκράτης

Σύμπαν ἄρ' αὐτὸ καλεῖς αἴσθησιν;

Θεαίτητος

Ἀνάγκη.

Σωκράτης

Ὧι γε, φαμέν, οὐ μέτεστιν ἀληθείας ἅψασθαι· οὐδὲ γὰρ οὐσίας.

Θεαίτητος

Οὐ γὰρ οὖν.

Σωκράτης

Οὐδ' ἄρ' ἐπιστήμης.

Θεαίτητος

Οὐ γάρ.

Σωκράτης

Οὐκ ἄρ' ἂν εἴη ποτέ, ὦ Θεαίτητε, αἴσθησίς τε καὶ ἐπιστήμη ταὐτόν.

Θεαίτητος

Οὐ φαίνεται, ὦ Σώκρατες. Καὶ μάλιστά γε νῦν καταφανέστατον γέγονεν ἄλλο ὂν αἰσθήσεως ἐπιστήμη.

suite

 

SOCRATE.

Et voudras-tu aussi m'accorder que ce que tu sens par un organe, [185a] il t'est impossible de le sentir par un autre; comme par la vue ce que tu sens par l'ouïe, ou par l'ouïe ce que tu sens par la vue?

THÉÉTÈTE.

Comment ne le voudrais-je pas?

SOCRATE.

Si donc tu as quelque idée sur les objets de ces deux sens pris ensemble, ce ne peut être ni par l'un ni par l'autre organe que te vient cette idée collective?

THÉÉTÈTE.

Non, sans doute.

SOCRATE.

Or, la première idée que tu as à l'égard du son et de la couleur pris ensemble, c'est que tous les deux sont ?

158 THÉÉTÈTE.

Oui.

SOCRATE.

Et aussi que l'un est différent de l'autre, et identique à lui-même?

[185b] THÉÉTÈTE.

Sans contredit.

SOCRATE.

Et encore que pris conjointement ils sont deux, et que chacun pris à part est un ?

THÉÉTÈTE.

Je le crois.

SOCRATE.

N'es-tu pas aussi en état d'examiner s'ils sont semblables ou dissemblables entre eux?

THÉÉTÈTE.

Peut-être.

SOCRATE.

Or, toutes ces idées, par quel organe les acquiers -tu sur ces deux objets? Car ce n'est ni par l'ouïe, ni par la vue que l'on peut saisir ce qu'ils ont de commun. Voici une nouvelle preuve de ce que nous disons : suppose qu'on examine s'ils sont salés l'un et l'autre, ou non, [185c] il te serait aisé de dire, n'est-il pas vrai, avec quoi tu ferais cet examen? et ce n'est ni avec 159 la vue, ni l'ouïe, mais avec quelque autre sens.

THÉÉTÈTE.

Assurément; avec celui qui s'exerce par l'organe de la langue.

SOCRATE.

Tu as raison. Mais par quel organe s'exerce cette faculté qui te fait connaître ce qui est commun à ces deux objets et à tous les autres, et ce que tu appelles en eux être et n'être pas ; sur quoi je t'interrogeais tout à l'heure ? Quels organes destines-tu à ces perceptions, par où ce qui sent en nous acquiert le sentiment de toutes ces choses ?

THÉÉTÈTE.

Tu parles de l'être et du non être, de la ressemblance et de la dissemblance, de l'identité et de la différence, et encore [185d] de l'unité et des autres nombres ; tu parles du pair et de l'impair et de tout ce qui en dépend ; et il est évident que tu me demandes par quels organes du corps l'âme sent tout cela.

SOCRATE.

Admirablement bien, Théétète ; c'est cela même que je demande.

THÉÉTÈTE.

En vérité, Socrate, je ne sais que dire, sinon 160 qu'il me paraît que nous n'avons point d'organe particulier pour ces sortes de choses, ainsi que pour les autres ; mais [185e] que notre âme examine immédiatement par elle-même ce que tous les objets ont de commun.

SOCRATE.

Tu es beau, Théétète, et non pas laid, comme disait Théodore; car celui qui répond bien est bon et beau. Mais, outre ta beauté, tu es encore le plus obligeant des hommes de m'avoir exempté d'une très longue discussion, si tu juges qu'il y a des objets que l'âme connaît par elle-même, et d'autres qu'elle connaît par les organes du corps. C'était en effet ce qu'il me semblait, et je souhaitais que ce fût aussi ton avis.

[186a] THÉÉTÈTE.

Eh bien, je pense comme toi.

SOCRATE.

Dans laquelle de ces deux classes ranges-tu l'être? car c'est ce qui est le plus généralement commun à toutes choses.

THÉÉTÈTE.

Dans la classe des objets avec lesquels l'âme se met en rapport immédiatement et par elle-même.

SOCRATE.

En est-il de même de la ressemblance et la dissemblance, de l'identité et de la différence ?

161 THÉÉTÈTE.

Oui.

SOCRATE.

Et du beau et du laid, du bien et du mal ?

THÉÉTÈTE.

Il me paraît que ces objets surtout sont du nombre de ceux dont l'âme examine l'essence relative, en combinant en elle-même [186b] le passé et le présent avec le futur.

SOCRATE.

Arrête. N'est-ce point par le toucher, que l'âme sent la dureté de ce qui est dur, et par la même voie la mollesse de ce qui est mou?

THÉÉTÈTE.

Oui.

SOCRATE.

Mais pour leur essence, leur opposition et la nature de cette opposition, c'est l'âme qui, les examinant à plusieurs reprises et les confrontant ensemble, essaie de nous les juger par elle-même.

THÉÉTÈTE.

Sans doute.

SOCRATE.

Il est donc des choses qu'il est donné [186c] aux hommes et aux bêtes de sentir, dès qu'ils sont 162 nés, celles qui passent jusqu'à l'âme par l'organe du corps ; tandis que les réflexions sur ces sensations, par rapport à leur essence et à leur utilité, on n'y arrive qu'à la longue, quand on y arrive, avec beaucoup de peine, de soins et d'étude.

THÉÉTÈTE.

Tout-à-fait.

SOCRATE.

Est-il possible que ce qui ne saurait atteindre à l'essence, atteigne à la vérité?

THÉÉTÈTE.

Non.

SOCRATE.

Aura-t-on jamais la science quand on ignore la vérité?

[186d] THÉÉTÈTE.

Le moyen, Socrate ?

SOCRATE.

La science ne réside donc point dans les sensations, mais dans la réflexion sur les sensations, puisqu'il paraît que c'est par la réflexion qu'on peut saisir l'essence et la vérité, et que cela est impossible par l'autre voie.

THÉÉTÈTE.

Il y a toute apparence.

SOCRATE.

Diras-tu donc que ces deux choses sont la 163 même chose, tandis qu'il y a entre elles une si grande différence?

THÉÉTÈTE.

Cela ne serait pas juste.

SOCRATE.

Quel nom donnes -tu à la première, comme voir, entendre, flairer, se refroidir, s'échauffer?

[186e] THÉÉTÈTE.

Sentir : car de quel autre nom l'appeler ?

SOCRATE.

Tu comprends donc tout cela sous le nom général de sensation ?

THÉÉTÈTE.

Il le faut bien.

SOCRATE.

Sensation à laquelle il n'appartient pas, disons-nous, d'atteindre à la vérité, puisqu'elle n'atteint pas à l'essence.

THÉÉTETE.

 Il est vrai.

SOCRATE.

Ni par conséquent à la science.

THÉÉTÈTE.

Non plus.

SOCRATE.

La sensation et la science ne sauraient donc jamais être la même chose, Théétète.

164 THÉÉTÈTE.

Il paraît que non, Socrate.

suite

 

(24) Odyss. liv. XVI, v. 121.

(25) A Athènes le temps que devait parler chaque orateur était réglé; et pour le mesurer, on se servait d'une clepsydre ou horloge d'eau.

(26) On l'appelait ainsi (ἀντωμοσία), parce que l'accusateur jurait que les griefs contenus dans cette formule ou précis d'accusation étaient vrais, et que l'accusé jurait qu'ils étaient faux. Il n'était point permis, soit en accusant, soit en défendant, de dire rien d'étranger à cette formule.

(27) Voyez les fragments de PINDARE. Heyne, t. III, p. 82, 83.

(28) DIOG. LAERC. I, 24.

(29) Vers de Parménide, dans Simplicius, sur la Physique d'Aristote, pag. 19, 21, 31.

(30) Jeu que Pollux appelle ἑλκυστίνδα. IX, 112.

(31) Ποιόν τι, οὐ ποιότητα, quale, non qualitas.  C'est le premier exemple du mot ποιότης en Grec.

(32) Iliad., III, v. 172