MAXIME DE TYR

DISSERTATIONS

DISSERTATION XIII.

Quelles sont les plus fâcheuses maladies, celles du corps, ou celles de l'âme (26) ?

Πότερα χαλεπώτερα νοσήματα, τὰ τοῦ σώματος, ἢ τὰ τῆς ψυχῆς.

 

 [1] I. Ἄιδεταί τι ἐξ ἀρχαίου ᾆσμα ἐν εὐχῆς μέρει,

ὑγεία πρεσβίστα μακάρων,
μετὰ σοῦ ναίοιμι τὸ λειπόμενον βιοτᾶς.

Ἐρωτῶ δὴ τὸν ποιητὴν τοῦ ᾄσματος, τίνα καὶ οὖσαν τὴν ὑγείαν ταύτην ξύνοικον αὐτῷ ἐλθεῖν παρακαλεῖ κατὰ τὴν εὐχήν. Ἐγὼ μὲν γὰρ ὑποπτεύω δαιμόνιόν τι εἶναι χρῆμα καὶ εὐχῆς ἄξιον· οὐ γὰρ ἂν εἰκῇ οὐδὲ ἐκ τοῦ προστυχόντος κατηξιώθη ᾠδῆς, καὶ ἔμεινεν ᾀδόμενον.  Εἰ δὲ καὶ τοιοῦτόν ἐστιν, ὁποῖον αὐτὸ ὑποπτεύω εἶναι, ἀποκρινάσθω ἡμῖν ὑπὲρ τοῦ ποιητοῦ ὁ λόγος αὐτός· δύο γὰρ ὄντοιν ἐν τῇ τοῦ ἀνθρώπου ἁρμονίᾳ, ψυχῆς καὶ σώματος, εἰ μὲν οὐ πέφυκεν ψυχὴ νοσεῖν, ἦν ἂν δήπου τὸ ᾆσμα τοῦτο εὐχὴ σώματος, τοῦ καὶ πεφυκότος  νοσεῖν καὶ ὑγείαν στέργοντος· εἰ δὲ ἀμφοῖν ὁμοίως συγκεκραμένων μὲν πρὸς τὸ κάλλιστον ὑπὸ τῆς φύσεως, ταραττομένων δὲ ὑπὸ τῆς παροινίας τῶν μερῶν, ἐπειδὰν πλεονεκτήσῃ τὶ ἐν αὐτοῖς, ὡς ἐν πόλει δῆμος ἢ τύραννος, κωλύει τὰ ἄλλα καὶ λυμαίνεται αὐτῶν τῇ συμμετρίᾳ, καλοῦμεν δὲ ἑκατέραν τὴν πλεονεξίαν,  τὴν μὲν ψυχῆς, τὴν δὲ σώματος, καὶ πρὸς μὲν αὐτὸ ἑκάτερον ὁμοίως ὑγείας ἐνδεές, πρὸς δὲ τὸ πλησίον οὐ κατ´ ἰσηγορίαν τάττεται· τὴν ποτέρου αὐτοῖν συμμετρίαν καὶ σωτηρίαν, πρεσβίσταν μακάρων ὀνομάζωμεν;  Ἵνα δὴ καὶ τὴν ἑκατέρου νόσον ἐκ τοῦ ἐναντίου θεασώμεθα, ποτέρᾳ τῷ ἀνθρώπῳ μεῖζον κακόν, φέρε δὴ οὑτωσὶ τὸ πᾶν διαιτήσωμαι.

ON chante dans une hymne antique, en guise de prière, « O Santé! la plus ancienne des Déesses! puissé-je passer avec toi les jours qui me restent (27) » ! Je voudrais bien que l'auteur de cette hymne daignât me dire quelle est cette santé qu'il invoque, avec laquelle il puisse habiter. J'imagine que c'est quelque Divinité, digne qu'on lui adresse un semblable vœu. Car ce n'est, ni sans sujet, ni au hasard, que le poète lui a consacré ces vers, et que l'on continue de les chanter. Or, si cette Divinité est telle que je l'imagine, la saine raison va nous répondre pour justifier le poète. II y a deux choses dans l'harmonique organisation de l'homme, l'âme et le corps. Si l'âme n'était point naturellement susceptible d'être malade, le vœu en question ne concernerait que le corps, destiné à être tantôt malade, tantôt bien portant. Mais si la nature a combiné l'âme et le corps ensemble, de manière qu'étant l'un et l'autre dans le meilleur état, ils puissent néanmoins éprouver réciproquement le désordre que chacun d'eux peut éprouver par le dérèglement de son voisin; ce qui arrive, lorsque l'un prend le dessus sur l'autre, comme le peuple sur le chef du Gouvernement, ou le chef du Gouvernement sur le peuple, dans une Cité, (car nous distinguons ces deux genres de prépondérance, et nous appelons l'une, prépondérance de l'âme sur le corps, et l'autre, prépondérance du corps sur l'âme, lesquels considérés l'un et l'autre, en eux-mêmes, ont également besoin de santé, égalité de condition qui n'a pas lieu lorsqu'on les envisage dans leurs rapports respectifs) entre les puissances conservatrices de l'harmonie et de la santé du corps et de l'âme, quelle sera celle à laquelle nous donnerons le nom de la plus ancienne des Déesses (28) ? Afin donc que du contraste de la maladie du corps, et de la maladie de l'âme, puisse sortir la solution de notre question, savoir, quelle est celle des deux qui est le plus grand mal pour l'homme, nous la discuterons sous le point de vue que voici.

[2] Ψυχὴ καὶ σῶμα ὁ ἄνθρωπος, τὸ μὲν αὐτοῦ ἄρχον, τὸ δὲ ἀρχόμενον, ὡς ἐν πόλει ἄρχων καὶ ἀρχόμενος· καὶ ἐστὶν καὶ ὁ ἄρχων πόλεως μέρος, καὶ οἱ ἀρχόμενοι παραπλησίως· πότερον δὴ τῶν μερῶν τούτων πράττον κακῶς λυμαίνεται τῇ πόλει; Νοσείτω δῆμος ἐν δημοκρατίᾳ,  ἀλλὰ Περικλῆς ὑγιαίνων, ἄρχων ἀγαθός, ἐπανορθοῖ  τὴν τοῦ δήμου νόσον· νοσείτω Συρακοσίοις Διονύσιος τυραννικὴν νόσον, ἀλλ´ ὁ δῆμος ὑγιαίνων ἐξασθενεῖ πρὸς τὴν σωτηρίαν. Βούλει δὴ τὸ μὲν σῶμα εἶναι σοι οἷον δῆμον, τὴν δὲ ψυχὴν ὥσπερ δυνάστην; θέασαι τοίνυν, καὶ παράβαλε τὴν εἰκόνα. Ὁ δῆμος πλέον ἢ ὁ ἄρχων, καὶ τὸ σῶμα πλέον ἢ ἡ ψυχή· δῆμος  ἔμπληκτον, καὶ τὸ σῶμα ὅμοιον· δῆμος πολυμερὲς καὶ πολύφωνον καὶ πολυπαθές, καὶ τὸ σῶμα πολυμερὲς  καὶ πολύφωνον καὶ πολυπαθές· δῆμος ἐξ ἀνομοίων πολλῶν καὶ παντοδαπῶν συγκεκραμένον, καὶ τὸ σῶμα ἐξ ἀνομοίων πολλῶν καὶ παντοδαπῶν συγκεκραμένον·  δῆμος χρῆμα ὀξὺ ἐν ὀργαῖς, ἰσχυρὸν ἐν ἐπιθυμίαις, ὑγρὸν ἐν ἡδοναῖς, δύσθυμον ἐν λύπαις,  χαλεπὸν ἐν θυμοῖς· ταὐτὰ καὶ σώματος πάθη, καὶ γὰρ ἐπιθυμητικόν, καὶ αἰτητικόν, καὶ φιλήδονον, καὶ ὁρμητικόν.  Φέρε, καὶ τὸν ἄρχοντα τῷ ἄρχοντι εἰκάζωμεν Ἄρχων ἐν πόλει προστακτικώτατον, καὶ τιμιώτατον, καὶ ἰσχυρότατον, ψυχὴ ἀνθρώπῳ προστακτικώτατον, καὶ τιμιώτατον, καὶ ἰσχυρότατον· ἄρχων τῇ φύσει φροντιστικώτατον, καὶ λογιστικώτατον, τὸ δὲ αὐτὸν καὶ ἡ ψυχή· ὁ ἄρχων αὐτεξούσιον, καὶ ἡ ψυχή. Τούτων τοίνυν οὕτως ἐχόντων, τὴν ποτέρου νόσον χαλεπωτέραν φήσομεν, καὶ ἐν ἀνθρώπῳ, καὶ ἐν πόλει; οὐ τὸ κρεῖττον νοσοῦν ἀνιαρότερον τῷ ὅλω; δῆμος μὲν γὰρ κάμνων, ὑγιαίνοντος ἄρχοντος, ἐν ἐλευθέρᾳ τῇ πόλει νοσεῖ· ἄρχοντος δὲ νοσοῦντος, δουλεία πόλεως. Συνελόντι δ´ εἰπεῖν, ψυχὴ σώματος τιμιώτερον· τὸ δὲ τοῦ τιμιωτέρου ἀγαθόν, μεῖζον· τὸ δὲ τῷ μείζονι ἀγαθῷ ἐναντίον, μεῖζον κακόν· ἀγαθὸν δὲ μεῖζον ὑγεία ψυχῆς ὑγείας σώματος· μεῖζον οὖν κακὸν νόσος ψυχῆς νόσου σώματος. Ὑγεία μὲν σώματος τέχνης ἔργον, ὑγεία δὲ ψυχῆς, ἀρετῆς ἔργον· νόσος ψυχῆς μοχθηρία, νόσος σώματος δυστυχία· ἑκούσιον ἡ μοχθηρία, ἀκούσιον ἡ δυστυχία· ἐλεεῖται τὰ ἀκούσια, μισεῖται τὰ ἑκούσια·  τὰ ἐλεούμενα βοηθεῖται, τὰ μισούμενα κολάζεται· τὰ βοηθούμενα μέτρια, τὰ κολαζόμενα χείρω.

II. L'âme et le corps composent l'homme. L'un des deux commande, l'autre obéit. Il en est comme dans une Cité, où les uns ont l'autorité, et les autres doivent l'obéissance. Les uns et les autres font également partie de la Cité. Quelle est celle de ces deux parties dont la maladie nuit à la Cité ? Que le peuple d'Athènes soit malade de démagogie; mais que Périclès, habile dans la science de gouverner, entreprenne de les guérir, il relèvera les Athéniens de leur maladie (29). Qu'à Syracuse, Denis soit malade de tyrannie, quoique le peuple soit sain en ce qui le concerne lui-même, il manquera de moyens pour rendre la santé à Denis. Veut-on que le corps joue le rôle du peuple, et l'âme celui du chef du Gouvernement ? Qu'on voie, qu'on compare. Les gouvernés ont plus de masse que les gouvernails, le corps a plus de masse que l'âme. Le peuple n'a point de bon sens. Il eu est de même du corps. Le peuple n'a aucune tenue, ni dans son opinion, ni dans son langage, ni dans ses affections (30). Le corps est encore à cet égard comme le peuple. Le peuple est une agrégation d'éléments nombreux et de qualités diverses. Le corps est encore un assemblage, un mélange du même genre. Le peuple est véhément dans ses transports, impétueux dans ses désirs, sans retenue dans la volupté, désespéré dans la douleur, insupportable dans son exaspération. Telles sont les passions du corps; il est continuellement en proie à des désirs, à des appétits, aux amorces de la volupté, à l'ardeur que les passions inspirent. D'un autre côté, comparons la partie qui commande dans la Cité, avec la partie qui commande dans l'homme. Dans la Cité, le chef du Gouvernement a la suprême autorité, les suprêmes honneurs, le suprême pouvoir. Dans l'homme, la suprême autorité, les suprêmes honneurs, le suprême pouvoir appartiennent à l'âme. Le chef du Gouvernement est celui qui, par la nature de ses fonctions, a le plus de sollicitude, le plus à penser. Il en est de même de l'âme. Le chef du Gouvernement, comme l'âme, est pleinement indépendant. Cela posé, de laquelle de ces deux parties dans la Cité, comme dans l'homme, dirons-nous que la maladie est la plus nuisible ? Lorsque la partie la plus importante est malade, n'est-ce pas ce qui peut le plus nuire au tout? Que le peuple soit malade, pendant que le chef du Gouvernement est en pleine santé, la liberté de la Cité n'en souffrira point. Que le chef du Gouvernement soit malade, la Cité tombe dans la servitude. En un mot, l'âme est plus importante que le corps. Or, le bien de la partie la plus importante est le plus grand bien, et ce. qui est contraire au plus grand bien, est le plus grand mal. La santé de l'âme est donc un plus grand bien que la santé du corps; et la maladie de l'âme un plus grand mal que la maladie du corps. La santé du corps est l'ouvrage de l'art, la santé de l'âme est l'ouvrage de la vertu. La maladie de l'âme est le vice (31). La maladie du corps est l'effet de quelque accident physique. Le vice est volontaire ; les accidents physiques sont involontaires. Ce qui est involontaire, excite la commisération; ce qui est volontaire, provoque la haine. On vient au secours de ce qui excite la commisération; on s'arme du châtiment contre ce qui provoque la haine. Il vaut mieux être dans le premier cas, que dans le second (32).

 [3] Πάλιν αὖ τὴν ὑγείαν ἐφ´ ἑκατέρου σκόπει. Ἡ μὲν πάντων ἀδεής, ἡ δὲ πάντων ἐνδεής· ἡ μὲν εὐδαιμονίαν χορηγεῖ, ἡ δὲ ποθίζεται· ἡ μὲν ἄμοιρος κακοῦ, ἡ δὲ ἐπισφαλὴς εἰς μοχθηρίαν· τῇ μὲν ἀέναος ὑγεία, τῷ δὲ ἐφήμερος· τῇ μὲν βέβαιος, τῷ δὲ ἄστατος· τῇ μὲν ἀθάνατος, τῷ δὲ θνητή. Σκόπει καὶ τὰς νόσους· νόσος σώματος εὐαπάλλακτος τῇ τέχνῃ, νόσος ψυχῆς δυσμετάβλητος τῷ νόμῳ· ἡ μὲν τὸν ἔχοντα ἀνιῶσα ποιεῖ πρὸς τὴν ἴασιν εἰκτικώτερον, ἡ δὲ ἐξαναλοῦσα τὸν ἔχοντα, ὑπερορᾶν τῶν νόμων παρασκευάζει· τῇ μὲν βοηθοῦσιν θεοί, τὴν δὲ μισοῦσιν· πόλεμον οὐ κινεῖς διὰ νόσον σώματος, διὰ δὲ ψυχῆς νόσον οἱ πολλοὶ πόλεμοι· οὐδεὶς νοσῶν τὸ σῶμα συκοφαντεῖ, ἢ τυμβωρυχεῖ, ἢ ληΐζεται,  ἤ τι ἄλλο δρᾷ κακὸν μέγα· νόσος σώματος ἀνιαρὸν τῷ ἔχοντι· νόσος ψυχῆς ἀνιαρὸν καὶ τῷ πλησίον.

III. Considérons la santé de l'âme et la santé du corps sous un autre point de vue. La santé de l'âme n'a besoin de rien ; la santé du corps a besoin de tout. La santé de l'âme produit le bonheur; la santé du corps mène à l'infortune. La santé de l'âme ne connaît peint les vices; la santé du corps en fraye le chemin. La santé de l'âme n'est point périssable; la santé du corps ne dure qu'un jour. La santé de l'âme est ferme et solide; la santé du corps n'a nulle stabilité. La santé de l'âme est immortelle ; la santé du corps a son terme. Considérons à présent les maladies. Les maladies du corps sont faciles à guérir avec les secours de l'art ; les maladies de l'âme cèdent difficilement aux remèdes de la morale. Les maladies du corps, par la douleur qu'elles causent, rendent les malades plus dociles à la guérison ; les maladies de l'âme, par la satisfaction avec laquelle le malade s'y complaît, ne font que le disposer davantage à braver les lois. Les Dieux viennent au secours des premières. Les autres sont l'objet de leur haine. Les maladies du corps n'allument point le feu de la guerre ; les maladies de l'âme l'ont très-souvent allumé. Pendant qu'on est attaqué d'une maladie corporelle, on ne fait point le métier de Sycophante, on ne fouille point les tombeaux, on ne brigande point, on ne commet nul autre grand attentat de cette nature (33). Dans les maladies du corps, le malade seul souffre de son mal; dans les maladies de l'âme, le prochain souffre aussi du mal du malade.

[4] Θέασαι τὸ λεγόμενον ὡδὶ σαφέστερον ἐπὶ πολιτικῆς εἰκόνος. Ἀθήνησιν ἐν δημοκρατουμένῃ πόλει, καὶ ἀκμαζούσῃ πλήθει ἀνδρῶν καὶ μεγέθει ἀρχῆς καὶ δυνάμει χρημάτων καὶ εὐπορίᾳ στρατηγῶν, ὑπὸ Περικλεῖ δυναστεύοντι, λοιμὸς ἐμπεσών, ἐξ Αἰθιοπίας ἀρξάμενος, καὶ καταβὰς διὰ τῆς βασιλέως γῆς, καὶ τελευτήσας ἐκεῖ, καὶ ἱδρυθεὶς αὐτόθι, ἔφθειρε τὴν πόλιν. συνεπελάμβανεν δὲ τῇ τοῦ κακοῦ ἐπιδημίᾳ καὶ ἐκ Πελοποννήσου πόλεμος. Δῃουμένης δὲ τῆς γῆς, καὶ φθειρομένης τῆς πόλεως, καὶ ἀναλισκομένων τῶν σωμάτων, καὶ μαραινομένης τῆς δυνάμεως, καὶ ἀπαγορεύοντος τῇ πόλει τοῦ σώματος, εἷς ἀνήρ, οἷον ψυχὴ πόλεως, ὁ Περικλῆς ἐκεῖνος, ἄνοσος καὶ ὑγιὴς μένων, ἐξώρθου τὴν πόλιν καὶ ἀνίστη, καὶ ἀνεζωπύρει, καὶ ἀντετάττετο τῷ λοιμῷ καὶ τῷ πολέμῳ. Θέασαι δὴ καὶ τὴν δευτέραν εἰκόνα. Ὅτε μὲν ὁ λοιμὸς ἐπέπαυτο, καὶ τὸ πλῆθος ἔρρωτο, καὶ ἡ δύναμις ἤκμαζεν· τότε δὴ τὸ ἀρχικὸν μέρος τῆς πόλεως ἐνόσει νόσον δεινὴν καὶ ἐγγύτατα μανίᾳ, καὶ κατελάμβανεν τὸ πλῆθος, καὶ τὸν δῆμον συννοσεῖν προσηνάγκαζεν. Ἦ γὰρ οὐχ οὗτος ὁ δῆμος καὶ Κλέωνι συνεμαίνετο, καὶ Ὑπερβόλῳ συνενόσει, καὶ Ἀλκιβιάδῃ συνεφλέγετο, καὶ τελευτῶν τοῖς δημαγωγοῖς συνετήκετο, καὶ συνεσφάλλετο, καὶ συναπωλλύετο, ἄλλου ἄλλοσε τὴν δειλαίαν καλοῦντος,

δεῦρ´ ἴθι, νύμφα φίλη, ἵνα θέσκελα ἔργα ἴδηαι;

Καὶ δείκνυσι μὲν Ἀλκιβιάδης Σικελίαν, δείκνυσι δὲ Κλέων Σφακτηρίαν, καὶ ἄλλος ἄλλην γῆν ἢ θάλατταν, ὡς πυρετιῶντι πηγὰς καὶ φρέατα. Ταῦτά ἐστιν ὑμῶν, ὦ πονηροί, τὰ θέσκελα ἔργα; φθορὰ καὶ ἀνάστασις, καὶ κακῶν ἀκμή, καὶ φλεγμονὴ νόσου; Τοῦτο δύναται καὶ ψυχῆς νόσος πρὸς σώματος νόσον παραβαλλομένη. Νοσεῖ σῶμα, καὶ ταράττεται, καὶ φθείρεται· ἀλλ´ ἐὰν ἐπιστήσῃς αὐτῷ ψυχὴν ἐρρωμένην, ἀμελεῖ τῆς νόσου, καὶ ὑπερφρονεῖ τοῦ κακοῦ· ὡς Φερεκύδης ὑπερεφρόνει ἐν Σύρῳ κείμενος, τῶν μὲν σαρκῶν αὐτῷ φθειρομένων, τῆς δὲ ψυχῆς ἑστώσης ὀρθῆς, καὶ παραδοκούσης  τὴν ἀπαλλαγὴν τοῦ δυσχρήστου τούτου περιβλήματος.

IV. Ce que nous venons de dire deviendra plus frappant dans un développement politique. À Athènes, dans le temps que son Gouvernement avait les formes démocratiques, dans le temps qu'elle avait une brillante population, que son empire s'étendait au loin, qu'elle possédait beaucoup de richesses, qu'elle abondait en habiles Généraux, et que Périclès la gouvernait, la peste survint. Née dans l'Éthiopie (34), elle avait parcouru les états du grand Roi, elle avait fini par se jeter dans l'Attique, où elle s'enracina. Elle fit un grand ravage à Athènes. À ce fléau vint se joindre la guerre du Péloponnèse. Pendant que les campagnes étaient dévastées par le fer ennemi, que la pestilence régnait dans la ville, que les citoyens y périssaient, que le marasme attaquait l'empire extérieur de la république, et que le corps entier de la Cité paraissait près de succomber, un seul homme, comme s'il eût été l'âme de la Cité, ce célèbre Périclès, inaccessible à toute maladie, conservant sa pleine santé, soutint les forces expirantes de la République, les lui fit recouvrer par degrés, lui rendit insensiblement sa vigueur, et fit face à la peste et à la guerre (35). Remarquez un second exemple. Lorsque la peste eut disparu, lorsque les pertes de la population eurent été réparées, lorsque la République eut repris son éclat au dehors, une maladie grave attaqua la partie qui avait le gouvernement de la Cité. Ce fut une maladie voisine de la démence. Elle se répandit dans la multitude, et rendit nécessairement le peuple malade de la maladie de ses chefs.

En effet, le peuple d'Athènes ne partagea-t-il point la frénésie de Cléon, la démence d'Hyperbolus, l'exaltation d'Alcibiade ? Ne finit-il point par se dessécher, par succomber, par périr avec ces insensés démagogues, qui entraînaient cette infortunée République, les uns d'un côté, les autres de l'autre? « Venez, belle Nymphe, et vous verrez des merveilles (36) ». Alcibiade lui montre la Sicile. Cléon lui montre Sphactérie (37). Un troisième lui montre telle ou telle expédition sur mer ou sur terre, comme qui montre des fontaines ou des bains à quelqu'un qui a la fièvre. Malheureux, telles sont vos merveilles ! Des désastres, des renversements, le comble des calamités, l'exaspération de la maladie. Tels sont les résultats des maladies de l'âme, mises en parallèle avec les maladies du corps. Que le corps soit malade, qu'on le mutile, qu'on le déchire : attachez-lui une âme vigoureuse et robuste ; il méprise la maladie, il brave toutes les souffrances. C'est ainsi que les brava Phérécyde de Scyros. Tandis que les chairs de son corps étaient déchirées, son âme conserva sa fermeté, son courage, dans l'attente d'être délivrée de cette malheureuse enveloppe (38).

[,5] Φαίην δ´ ἂν ἔγωγε, οὐδὲ ἀκούσῃ εἶναι τῇ γενναίᾳ ψυχῇ φθορὰν σώματος· οἷον εἰ καὶ δεσμώτην ἐννοήσαις ὁρῶντα σηπόμενον καὶ διαρρέον τὸ τειχίον τοῦ δεσμωτηρίου, ἀναμένοντα τὴν ἔκδυσιν καὶ τὴν ἐλευθερίαν τοῦ Ἑρμοῦ, ἵνα ἐκ πολλοῦ καὶ ἀφεγγοῦς ζόφου, οὗ τέως κατορώρυκτο, ἀναβλέψῃ πρὸς τὸν αἰθέρα, καὶ ἐμπλησθῇ λαμπροῦ φωτός· ἢ οἴει ἄνδρα ἠσκημένον καλῶς καὶ διαπεπονημένον τῷ σώματι ταραχθῆναι ἂν τῶν χλανιδίων αὐτῷ διαρρηγνυμένων· ἀλλ´ οὐκ ἂν ἀπορρίψαι αὐτὰ ἄσμενον, καὶ παραδοῦναι τὸ σῶμα τῷ ἀέρι, γυμνὸν γυμνῷ, φίλον φίλῳ, ἐλεύθερον ἐλευθέρῳ; Τί οὖν ἄλλο ἡγεῖ τῇ ψυχῇ εἶναι τὸ δέρμα τοῦτο καὶ τὰ ὀστᾶ καὶ τὰς σάρκας; χλανίδια ἐφήμερα, καὶ ῥακία ἀσθενῆ καὶ τρύχινα· ταῦτα καὶ σίδηρος διαρρήγνυσιν, καὶ πῦρ τήκει, καὶ ἕλκη ἐπινέμεται. Ἡ μὲν οὖν ἀγαθὴ ψυχὴ καὶ διαπεπονημένη καὶ ἠσκημένη ἀμελεῖ, καὶ ὡς τάχιστα ἐφίεται γυμνωθῆναι· ὥστε κἂν ἐπιφθέγξαιτό τις τῷ γενναίῳ ἀνδρί, νοσοῦντα τῷ σώματι θεασάμενος, τὸ τοὐ Ὀδυσσέως ἐκεῖνο, οἵην ἐκ ῥακέων ὁ γέρων ἐπιγουνίδα φαίνει· Ἡ δὲ δειλὴ ψυχὴ κατορωρυγμένη ἐν σώματι, ὡς ἑρπετὸν νωθὲς εἰς φωλεόν, φιλεῖ τὸν φωλεόν, καὶ οὐδεπώποτε θέλει ἀπαλλαγῆναι αὐτοῦ, οὐδὲ ἐξερπύσαι, ἀλλὰ καιομένῳ συγκάεται, καὶ σπαραττομένῳ συσπαράττεται, καὶ ἀλγοῦντι τῷ σώματι συναλγεῖ, καὶ βοῶντι συμβοᾷ.

Ὦ ποῦς, ἀφήσω σε;

ὁ Φιλοκτήτης λέγει. Ἄνθρωπε, ἄφες, καὶ μὴ βόα, μηδὲ λοιδοροῦ τοῖς φιλτάτοις, μηδὲ ἐνόχλει τὴν Λημνίων γῆν.

Ὦ θάνατε παιάν·

εἰ μὲν ταῦτα λέγεις ἀλλαττόμενος κακὸν κακοῦ, οὐκ ἀποδέχομαι τῆς εὐχῆς· εἰ δὲ ἡγεῖ τῷ ὄντι τὸν θάνατον παιᾶνα εἶναι καὶ ἀπαλλακτὴν κακοῦ καὶ ἀπλήστου καὶ νοσεροῦ θρέμματος, ἡγεῖ καλῶς· εὔχου, καὶ κάλει τὸν παιᾶνα.

V. J'oserai même dire que c'est sans répugnance qu'une grande âme voit la dissolution du corps. Qu'on se figure un prisonnier qui voit crouler et tomber en ruine les murs pourris de sa prison, dans l'impatience où il est d'être dégagé de sa gêne, de recouvrer sa liberté, et de passer des épaisses et profondes ténèbres, où il a été plongé jusqu'alors, au grand air, et à la brillante contemplation de la lumière. Pensera-t- on qu'un homme qui se serait parfaitement exercé, et dont le corps aurait acquis l'habitude des plus pénibles fatigues, trouvât mauvais de voir tomber ses vêtements en lambeaux; et qu'au contraire, il ne se fît pas un plaisir de les mettre à bas, et de présenter son corps nu et libre à un air libre aussi, au milieu duquel il n'éprouverait aucun obstacle, aucune contrainte, dans ses mouvements (39) ? Que croira-t-on donc que soient, à l'égard de l'âme, cette peau, ces os, ces chairs, qui la recèlent, sinon un vêtement éphémère, un faible tissu de guenilles et de haillons? Le fer les met en pièces, le feu les consume, les plaies les dévorent. Une grande âme qui a su se donner de l'énergie et de la vigueur, méprise un pareil vêtement. Elle désire d'en être au plutôt dépouillée. C'est à l'homme qui possède une âme de cette trempe, que l'on peut appliquer, lorsqu'on voit son corps attaqué d'une maladie, ces paroles de l'Odyssée : « O le vigoureux genou que montre ce vieillard, au travers de ces haillons (40) » ! Une âme lâche, au contraire, est enterrée dans le corps, ainsi qu'un paresseux reptile est enterré dans son trou. Elle s'y complaît. Elle ne veut point qu'on l'en fasse sortir. Elle n'en sort jamais d'elle-même. Qu'on applique au corps le fer et le feu, elle supporte le fer et le feu. Qu'il soit en proie à la douleur, elle la partage. Qu'il pousse des cris, elle en pousse avec lui. « O mon pied, me séparerai-je de toi» ! s'écrie Philoctète (41). Homme! sépare-toi de ton pied, et ne crie point. N'invective point contre tes amis. Ne tourmente point l'île de Lemnos. « O mort, médecin de nos maux (42)» ! si tu n'entends par-là que passer d'un mal à un autre, je n'admets point le vœu que tu fais. Mais si tu penses que la mort est vraiment notre médecin, qu'elle nous délivre de cette malheureuse hospitalité, où nous sommes perpétuellement assaillis par les besoins et les maladies, à la bonne heure. Invoque la mort : appelle ton médecin.

[6] Καὶ δὴ φέρων με ὁ λόγος εἰς παράδειγμα ἐμβέβληκεν σαφέστερον οὗ πάλαι ποθῶ ἐνδείξασθαι ὑμῖν. Ἐν γὰρ τοῖς Ἀχαιοῖς τότε ἦν που σώματα μυρία,

- - - ὅσσα τε φύλλα καὶ ἄνθεα γίνεται ὥρῃ,

ὑγιῆ πάντα, ἄνοσα, καὶ ἰσχυρά, καὶ ἄρτια, τῷ τῶν πολεμίων τείχει περιχεόμενα ἐν δεκαέτει χρόνῳ ἐπέραινεν οὐδέν, οὐχ ὁ Ἀχιλλεὺς διώκων, οὐχ ὁ Αἴας μένων, οὐχ ὁ Διομήδης ἀναιρῶν, οὐχ ὁ Τεῦκρος τοξεύων, οὐχ ὁ Ἀγαμέμνων βουλευόμενος, οὐχ ὁ Νέστωρ λέγων, οὐχ ὁ Κάλχας μαντευόμενος, οὐχ ὁ Ὀδυσσεὺς σοφιζόμενος. Ἀλλ´ ὁ θεὸς λέγει· ‘Ὦ καλὰ καὶ γενναῖα γῆς Ἑλλάδος θρέμματα, μάτην πονεῖτε, μάτην διώκετε, κενὰ τοξεύετε, κενὰ βουλεύεσθε· οὐ γὰρ ἂν ἄλλως ἕλοιτε τουτὶ τὸ τεῖχος, πρὶν ὑμῖν ἐπίκουρος ἔλθῃ ψυχὴ μὲν ἐρρωμένη, σῶμα δὲ νοσοῦν, ὀδωδὸς καὶ χωλεῦον,  καὶ διαβεβρωμένον ὑπὸ τῆς νόσου.’ Οἱ δὲ ἐπείσθησαν τῷ θεῷ, καὶ ἤγαγον ἐκ Λήμνου σύμμαχον, ψυχὴν μὲν ὑγιᾶ, σῶμα δὲ νοσοῦν.

VI. Mon sujet me conduit à un exemple encore plus sensible, dont je désire depuis longtemps avoir occasion de faire usage. Les Grecs avaient autrefois une armée nombreuse. Elle était composée d'autant de guerriers, «que le printemps produit de fleurs et de feuilles (43) ». Tous étaient bien portails, en pleine santé, vigoureux, intacts. Ils campaient autour des murailles de leurs ennemis. Pendant le cours de dix années, il ne résulta rien, ni des prouesses d'Achille, ni des exploits d'Ajax, ni du carnage fait par Diomède, ni du sang versé par les flèches de Teucer, ni des ordres d'Agamemnon, ni des discours de Nestor, ni des prophéties de Calchas, ni des sages conseils d'Ulysse. Jupiter leur dit : « O magnanimes et illustres nourrissons de la Grèce, vous vous tourmentez en vain, vous livrez en vain des batailles. Vous lancez en vain des flèches. En vain vous tenez des conseils. Vous ne vous rendrez jamais maîtres de ces remparts, avant que vous n'ayez pour auxiliaire un homme dont l'âme est pleine de vigueur et d'énergie, mais dont le corps malade répand une mauvaise odeur, ne se traîne qu'en boitant, et s'épuise chaque jour par ses souffrances (44) ». Les Grecs entendirent le langage de Jupiter, et ils allèrent chercher à Lemnos le compagnon d'armes qui leur était désigné (45).

[7] Εἰ δὲ βούλει, σκέψαι μεταλαβὼν τῆς ψυχῆς νόσον ἐν σώματι ὑγιεινῷ. Νοσεῖ ψυχὴ τὴν ἡδονῆς νόσον, τήκεται, καὶ μαραίνεται· τί χρήσῃ τῷ νοσοῦντι; τίς ὄνησις σώματος τοιαύτῃ ψυχῇ; Σαρδανάπαλλος νοσεῖ· οὐχ ὁρᾷς ὡς καὶ ἐπὶ τὸ σῶμα αὐτῷ τὸ κακὸν ἔρχεται; ἐντρίβεται ὁ δύστηνος, καὶ λεαίνεται, καὶ τὼ ὀφθαλμὼ συντήκεται, καὶ οὐκ ἀνεχόμενος τὴν νόσον, ἐπὶ πῦρ ἦλθεν. Νοσεῖ Ἀλκιβιάδης· πῦρ αὐτὸν ἐπινέμεται  πολὺ καὶ ἄγριον, καὶ τοὺς λογισμοὺς ἐπιταράττει ἐγγύτατα μανίας, καὶ περιφέρει πανταχοῦ, ἀπὸ μὲν Λυκείου ἐπὶ τὴν ἐκκλησίαν, ἀπὸ δὲ τῆς ἐκκλησίας ἐπὶ τὴν θάλατταν, ἀπὸ δὲ τῆς θαλάττης ἐπὶ Σικελίαν, κἀκεῖθεν εἰς Λακεδαίμονα, εἶτα παρὰ τοὺς Πέρσας, καὶ ἀπὸ Περσῶν ἐπὶ Σάμον, καὶ ἀπὸ Σάμου ἐπὶ τὰς Ἀθήνας, καὶ ἐπὶ τὸν Ἑλλήσποντον αὖθις, καὶ πανταχοῦ. Νοσεῖ  Κριτίας νόσον πικρὰν καὶ παντοδαπήν, καὶ οὐκ ἰάσιμον, οὐδὲ ἀνασχετὴν τῇ πάσῃ πόλει. Καίτοι τούτοις τὰ σώματα ὑγιῆ καὶ ἄρτια· ἁβρὸς μὲν γὰρ ὁ Σαρδανάπαλλος,  καλὸς δὲ ὁ Ἀλκιβιάδης, ἰσχυρὸς δὲ ὁ Κριτίας· ἀλλὰ τὴν ὑγείαν ἐπὶ τούτων μισῶ. Νοσείτω Κριτίας, ἵνα μὴ τυραννῇ· νοσείτω Ἀλκιβιάδης, ἵνα μὴ ἐπὶ Σικελίαν Ἀθηναίους ἄγῃ· νοσείτω Σαρδανάπαλλος (βέλτιον γὰρ αὐτῷ διὰ νόσον κεῖσθαι μᾶλλον ἢ διὰ ἡδονήν), μᾶλλον δὲ φθειρέσθω πᾶς, ὅτῳ ἐπιρρεῖ  ἀέναος πονηρία. Ὥσπερ γὰρ τὰ ἑρπηστικὰ τῶν ἑλκῶν τοῖς σώμασιν ἐμπεσόντα πρόσω νέμεται, καὶ τοῦ ὑγιαίνοντός τι ἀεὶ προαπόλλυσιν, καὶ πρὸς τὰς ἰάσεις ἀγριαίνει, ἕως ἂν ἡ τέχνη τὴν κρηπῖδα καὶ τὴν ἕδραν τοῦ νοσήματος ἐκτέμῃ· ὡς δὲ καὶ ὅτῳ ὕπουλος καὶ διαβεβρωμένη καὶ σαθρὰ οὖσα ἡ ψυχὴ ἐπινέμεται πρόσω τὲ καὶ τὰ πλησίον ἀεὶ καταλαμβάνει, ἐκτμητέον δὴ αὐτῆς καὶ ἀφαιρετέον τὰς δυνάμεις τῶν σωμάτων, ὡς λῃστοῦ χεῖρας, ὡς ἀκολάστου ὀφθαλμούς, ὡς λίχνου  γαστέρα. Κἂν γὰρ ἐπιστήσῃς τῇ νόσῳ δικαστὰς καὶ δεσμωτήρια καὶ δημίους, τὸ κακὸν φθάνει, καὶ ἕρπει, καὶ προλαμβάνει· ἀμήχανος γὴρ ἡ πονηρίας ὀξύτης, ἐπειδὰν ἅπαξ ἤθει ψυχῆς ἐμπεσοῦσα ἐπιλάβηται ὕλης πονηρᾶς, καὶ ἐξουσίας ἀδεοῦς, καὶ ἀνεπιτιμήτου τόλμης.

VII. Veut-on à présent contempler les maladies de l'âme dans un corps sain? L'âme est malade de la maladie de la volupté. Elle en est consumée. Elle en est dans le marasme. Quel avantage le malade en retire-t-il ? Quel bien peut faire au corps une âme pareille? Sardanapale est atteint de cette maladie. Voyez-vous comme le mal attaque toutes les parties de son corps? Le malheureux ! Il se laisse épuiser, exténuer; ses yeux en deviennent creux et livides. Il ne peut plus résister à l'excès de sa maladie. Il se précipite dans les flammes. Alcibiade est malade aussi. Un feu ardent et cruel le dévore. Il trouble sa raison au point de le rendre fou. Cette aliénation le jette tantôt d'un côté, tantôt d'un autre; du Lycée dans les comices d'Athènes, des comices sur les flots, des flots en Sicile, de la Sicile à Lacédémone, de Lacédémone chez les Perses, de chez les Perses à Samos, de Samos à Athènes, d'Athènes il retourne sur l'Hellespont et ailleurs. Critias (46) aussi est attaqué d'une maladie funeste sous plusieurs rapports, maladie incurable et qu'on ne saurait supporter dans une Cité quelconque (47). Cependant Sardanapale, Alcibiade et Critias, avaient un corps sain, et jouissaient d'une santé parfaite. Sardanapale avait un tempérament robuste (48), Alcibiade était un très beau garçon, et Critias était d'une force extraordinaire. Mais malheur à la santé de Sardanapale, d' Alcibiade et de Critias. Que Critias soit malade, et qu'Athènes respire de sa tyrannie. Qu'Alcibiade soit malade, et que les Athéniens n'entreprennent point leur expédition de Sicile. Que Sardanapale soit malade : il lui vaut mieux mourir par la maladie que par la volupté. Périsse plutôt quiconque reçoit les continuelles influences d'une méchanceté incurable. Car, de même que les ulcères qui rampent, font chaque jour des progrès dans les corps auxquels ils s'attachent, en corrodant continuellement les parties saines, et résistent à. tous les remèdes, jusqu'à ce que les gens de l'art aient porté le scalpel à l'endroit même, dans le siège même de la maladie; de même, chez ceux qui ont une âme virulente, putride, gangrenée, l'ulcère moral s'enracine toujours davantage, et ronge par degrés les parties voisines. Il faut donc leur amputer, leur arracher les parties du corps qui en sont les puissances physiques, savoir, les mains à celui qui vole, les yeux à celui qui croupit dans le libertinage, le ventre à celui qui se vautre dans la crapule. On aurait beau, d'ailleurs, employer contre la maladie, des juges, des prisons; des bourreaux, elle irait son train, elle cheminerait, elle gagnerait sans cesse. Car il n'y a point de remède contre les progrès de la méchanceté, lorsqu'une fois imprégnée dans l'âme, elle trouve pour se nourrir un aliment homogène, avec une puissance sans bornes, et une impudeur qui n'a point de frein (49).

NOTES.

(26) Reiske remarque que cette Dissertation est dirigée contre les Cyrénaïques, qui prétendaient que les maladies de l'âme étaient moins graves que les maladies du corps.

(27) C'est le début d'une Hymne ancienne en l'honneur de la Santé, composée par Ariphron de Sicyone. Cette Hymne est en entier dans les Dipnosophistes d'Athénée, liv. 15. Lucien cite le même fragment de cette Hymne, dans son Traité, pro lapso inter salut. Tom I, p. 493.

(28) Cette phrase est vraiment d'une longueur à faire perdre haleine à l'esprit, si je peux m'exprimer ainsi; mais les idées y sont enchâssées de manière, qu'il m'a paru impossible de la couper sans altérer le sens du texte.

(29)  N'est-ce pas le cas d'appliquer ici au peuple François ce mot d'Horace :

... Mutato nomine, de te
Fabula narratur.

Que serait il, en effet, devenu, au milieu de son marasme démagogique, sans le secours de son Périclès ?

(30) Le lecteur curieux de voir le portrait du Peuple, sons le rapport politique, dessiné en miniature de main de maître, le trouvera dans le livre de la Sagesse de Charron, chapitre intitulé, du Peuple.

(31)  Il faut entendre ici ce mot dans un sens générique, et le prendre pour l'humeur peccante de l'âme, si l'on peut s'exprimer ainsi, qui provoque et détermine toutes les actions réprouvées par les règles de la morale.

(32) Le texte porte littéralement, « La chose au secours de laquelle on vient est la meilleure, celle qu'on punit est la pire ».

(33)  Le texte offre ici une lacune évidente. C'est celle d'une phrase où notre Auteur avait placé l'antithèse de la phrase précédente. Cette remarque n'a point échappé à la sagacité de Markland. Post hæc quoque, dit-il, clare deest integra =°siw, in qua homo animae morbo laborans describebatur σικοφαντῶν vel τιμβοριχῶν, etc. prout in pracedenti et subsequenti commate factum, sensus facile perspicitur. Verba non nisi ex manuscriptis expectanda. Sed defectus est manifestissimus.

(34) On voit qu'anciennement, comme aujourd'hui, cette contrée de l'Afrique qui tient à l'Égypte, a été sujette à la peste.

(35) Voyez ci-dessus la note 4.

(36) C'est dans le 3e chant de l'Iliade, vers 130, un mot d'Iris à Hélène, qu'elle invite à venir voir le coup-d'oeil des deux camps des Troyens et des Grecs, pendant que les deux armées se reposent.

(37) Sphactérie était une île, dont Pausanias fait mention à la fin du quatrième livre de sa Description de la Grèce. Cet Auteur dit à cet endroit-là, que dans cette île était un monument en mémoire des succès que les Athéniens y avaient obtenus contre les Lacédémoniens. Suidas rapporte que les Athéniens, impatients de la longueur d'un siège formé par leurs troupes dans Pile de Sphactérie, y envoyèrent Cléon. Il est donc probable que Maxime de Tyr a pris ici un nom pour un autre, et qu'au lien de Sphactérie, où Cléon eut des succès, il a eu en vue Amphipolis, ville de Macédoine, sur les frontières de la Thrace, où Cléon périt en combattant contre Brasidas, Général de Lacédémone. Voyez Thucydide, au commencement du cinquième livre.

(38) Diogène-Laërce rapporte plusieurs versions sur le genre de mort de Phérécyde. Il raconte, sur la foi d'Hermippus, que la guerre ayant été déclarée entre les Éphésiens et les Magnésiens, notre philosophe prit parti pour les premiers. Il rencontra quelqu'un sur son chemin, et lui demanda d'où il était. Le passant lui répondit qu'il était d'Éphèse. « Eh bien, lui dit-il, prends-moi par les jambes, traîner moi jusque sur le territoire des Messéniens, et tu diras à tes concitoyens, de m'enterrer à l'endroit où tu m'auras laissé, après qu'ils auront remporté la victoire sur leurs ennemis.» Ce qui eut lieu. D'autres prétendent qu'il mourut de la maladie pédiculaire, maladie affreuse, et qui produit d'horribles souffrances. C'est probablement au dernier de ces deux genres de mort que Maxime de Tyr fait allusion. Car le premier, n'en déplaise à Hermippus, me paraît un peu apocryphe. Ménage doit en avoir eu la même opinion, puisqu'il ne s'y est point arrêté dans ses savantes observations sur le Biographe Grec.

(39)  La fin de cette phrase est très difficile à rendre. Le grec porte littéralement, nu à nu, ami à ami, libre à libre. Les interprètes Latins ont traduit, nudum nudo, amicum amico, liberum libero. Le français ne comportait point cette tournure. Si je ne me trompe, ii y a ici une faute de copiste, dont je ne vois pas qu'aucun annotateur se soit douté. Si, au lieu de φίλον φίλῳ, on lisait ψίλον ψίλῳ, le sens en vaudrait mieux, d'autant que l'adjectif ψίλον a une acception de synonymie avec γυμνός qui le précède.

(40) Pacci a traduit, quale femur; Heinsius a traduit, quantos genuum orbes, ce qui est correct; et Formey, je ne sais pourquoi, a laissé-là le fémur et le genou, pour parler des reins. J'ai cru devoir rendre la lettre du grec, principalement parce que Camérarius a observé sur ce vers d'Homère, sunt intelligendi tori qui circa genu in robustis corporibus apparent, bonae constitutionis indices. Au surplus, Davies remarque avec raison, qu'Homère n'a point mis ce vers dans la bouche d'Ulysse, comme Maxime de Tyr semble l'insinuer. C'est un des amants de Pénélope qui parle ainsi d'Ulysse lui-même, en le voyant se préparer à combattre Irus.

(41) Cette exclamation est empruntée du Philoctète d'Eschyle.

(42) Suivant Heinsius, cette apostrophe appartient, comme la précédente, au Philoctète d'Eschyle. Cette idée d'envisager la mort comme le suprême remède des maux de l'humanité, a fourni de très beaux lieux communs aux poètes de l'ancienne Grèce. Stobée nous en a conservé une précieuse collection, à la tête du 119e de ses Discours. 

(43) C'est une comparaison dont se sert Homère, au 468e vers du second chant de l'Iliade, en parlant de l'armée des Grecs.

(44) N'en déplaise à Maxime de Tyr, l'exemple me paraît assez mal choisi. Ce n'était à rien qui fût propre et personnel à Philoctète, que le destin avait attaché la prise de Troie. C'était, comme on le verra dans la note suivante, aux flèches d'Hercule, dont ce Prince Grec était possesseur. Comment concilier d'ailleurs ce que notre Auteur dit ici de la vigueur, de l'énergie de l'âme de Philoctète, avec le reproche qu'il lui a fait, dans la section précédente, de pousser des«ris, de maudire sen pied, et d'appeler la mort à son secours. 

(45) Hercule, en reconnaissance de ce que Philoctète avait construit le bûcher qui devait consumer son corps, lui fit présent de ses flèches. Il était dans les Décrets du destin que la ville de Troie ne pourrait être prise, si les flèches d'Hercule n'étaient employées à combattre les Troyens. Hélénus fit connaître cet arrêt du destin; et alors ces mêmes Grecs qui avaient abandonné Philoctète dans l’île de Lemnos, furent forcés de lui envoyer une ambassade, pour l'inviter à venir les joindre. Ulysse et Diomède furent chargés de la commission, et ils enlevèrent Philoctète, qui refusait de les suivre. Le Scholiaste de Pindare nous apprend de quelle manière fut guérie cette morsure de couleuvre qui lit souffrir ce Prince pendant si longtemps. « Denis, » dit-il, sans spécifier lequel, « raconte qu'Apollon, consulté sur le compte de Philoctète, répondit qu'il devait prendre un bain. Le bain pris, il s'endormit. Machaon profita de ce moment pour couper toutes les chairs que l'ulcère avait rongées. Il bassina la plaie avec du vin. Il y appliqua une plante, dont Chiron avait fait connaître la propriété à Esculape; et le héros fut guéri. » Voy. le Scholiaste de Pindare, sur la première des Pythiques, au 109e vers. Voy. aussi Hyginus, fable 102.

(46) Critias, c'est celui des trente Tyrans établis à Athènes, qui se rendit le plus odieux par son despotisme et ses cruautés.

(47) J'ai suivi la correction de Markland, qui lit tout court πάσῃ πόλει  , au lieu de τῇ πάσῃ πόλει ll est évident que l'article a été mal à propos inséré paries copistes.

(48) Markland aime mieux lire ἀδρός, validus, que ἀβρός, mollis. Cette conjecture m'a paru judicieuse, et je l'ai adoptée.

(49) C'est à la lettre l'hidropisie dont parle Horace :

Crescit, indulgens sibi, dirus hydrops,
Paris, le 14 floréal an IX. (4 mai 1801.)