MAXIME DE TYR
DISSERTATIONS
DISSERTATION
XII.
Qu'est-ce
que la Science (1) ?
Τί ἐπιστήμη.
[1] Τί ποτ´ ἐστὶν τοῦτο, ᾧ διαφέρει
ἄνθρωπος θηρίου; καὶ τί ποτέ ἐστιν, ᾧ διαφέρει ἀνθρώπου θεός· Ἐγὼ
μὲν οἶμαι θηρίων μὲν ἀνθρώπους ἐπιστήμῃ κρατεῖν, θεῶν δὲ ἐλαττοῦσθαι
μοχθηρίᾳ· θεὸς μὲν γὰρ ἀνθρώπου σοφώτερον, ἄνθρωπος δὲ θηρίου
ἐπιστημονέστερον. Ἄλλό τι οὖν ἐπιστήμην σοφίας ἡγεῖ; Οὐ μὰ τὸν Δία,
οὐ μᾶλλον ἢ ζωὴν ζωῆς· ἀλλὰ κοινὸν ὑπάρχον τὸ τῆς ζωῆς θνητῇ φύσει
πρὸς τὸ ἀθάνατον, κατὰ μὲν τὴν ποιότητα ἰσομοιρεῖ· κατὰ δὲ τὴν
βραχύτητα τοῦ βίου σχίζεται· θεοῦ μὲν γὰρ ζωὴ αἰώνιος, ἀνθρώπου δὲ
ἐφήμερος. Ὥσπερ οὖν εἴ τις ἦν δύναμις ὀφθαλμοῖς ὁρᾶν ἀεὶ, καὶ
ἀποτείνειν διηνεκῶς τὴν ὄψιν καὶ δέχεσθαι τὴν προσβολὴν τοῦ φωτός,
καὶ μηδὲν αὐτῇ δεῖν καλυπτόντων βλεφάρων, μηδὲ ὕπνου πρὸς ἀνάπαυλαν,
μηδὲ νυκτὸς πρὸς ἠρεμίαν· κοινὸν μὲν ἦν τὸ ὁρᾶν ἐκείνοις τοῖς
ὀφθαλμοῖς πρὸς ταυτηνὶ τὴν τῶν πολλῶν ὄψιν, διέφερεν δὲ τῷ διηνεκεῖ·
οὕτως ἀμέλει καὶ ἡ ἐπιστήμη, κοινόν τι οὖσα, διαφορὰν ὅμως ἔχει ἡ
θεία πρὸς τὴν ἀνθρωπίνην. Καὶ τὴν μὲν θείαν τάχα καὶ αὖθις εἰσόμεθα·
νῦν δὲ δὴ ἐπὶ τὰ γνωριμώτατα ἴωμεν· τί ποτ´ ἐστὶν τῷ ἀνθρώπῳ τὸ
ἐπίστασθαι, καὶ εἰδέναι, καὶ μανθάνειν, καὶ ὅσα τοιαυτὶ λέγοντες
ἕξιν τινὰ θεωρίας τῇ ψυχῇ προστίθεμεν. |
EN
quoi consiste ce qui constitue la différence entre l'homme et la brute?
En quoi consiste, d'un autre côté, ce qui constitue la différence entre les
Dieux (2) et l'homme ? Quant à moi, je pense que
c'est par la science que l'homme est au-dessus de la brute, et que c'est par les
vices qu'il est au-dessous des Dieux. Car, sous le rapport de la vertu (3),
les Dieux valent mieux que les hommes; sous le rapport de la science, l'homme
vaut mieux que la brute. Est-ce une raison de penser que la science soit autre
chose que la sagesse ? Non, par Jupiter, pas plus que de penser que la vie soit
autre chose que la vie. Elle est quelque chose de commun à tous les êtres,
soit mortels, soit immortels ; mais si, envisagée sous ce point de vue de
qualité, elle est une seule et même chose; envisagée sous le rapport de son
plus ou moins de durée, elle se divise en deux espèces. Car les Dieux ne
meurent jamais, et l'homme n'a qu'une existence éphémère. De même que s'il
était possible à certains yeux de demeurer toujours ouverts, d'avoir la vue
dans une activité continuelle, et de recevoir perpétuellement l'impression de
la lumière, sans avoir besoin que des paupières vinssent les envelopper, que
le sommeil vînt leur donner du repos, et que la nuit leur apportât du
relâche, l'action de la vue serait commune sous ce rapport, et à ces yeux, et
aux yeux ordinaires, en différant sous le rapport de la durée : de même, sans
doute, la science, qui est quelque chose de commun aux Dieux et aux hommes, a
néanmoins quelque rapport de différence eu égard aux uns et aux autres.
Peut-être ailleurs traiterons-nous de la science en ce qui concerne le Dieux.
Quant à présent, occupons-nous d'une question plus ordinaire et plus connue;
et recherchons ce que c'est, pour l'homme, que savoir, que connaître,
qu'apprendre; et toutes autres expressions de ce genre, par lesquelles on place
l'âme dans un état de contemplation.
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[2] Ἆρα πᾶν ὅπερ ἡ αἴσθησις ἀθροίσασα
τῇ κατὰ βραχὺ θεωρίᾳ, ἐμπειρίαν τοῦτο ὀνομάζουσα, προσαγάγῃ τῇ ψυχῇ,
καὶ μετὰ τοῦτο ἐπισφραγίσηται ὁ λογισμὸς τῇ ἐμπειρίᾳ, τοῦτο φῶμεν
ἐπιστήμην εἶναι; οἷον τὸ τοιόνδε λέγω. Οἱ πρῶτοι ἄνθρωποι οὔπω ναῦν
εἰδότες, ἐρῶντες ἐπιμιξίας, ἀγόμενοι μὲν ὑπὸ τῆς χρείας, εἰργόμενοι
δὲ ὑπὸ τῆς θαλάττης, εἶδον ὄρνιν ἐξ ἀέρος καταπτάντα νηχόμενον,
εἶδον δὲ καὶ φόρτον φερόμενον κούφως ὑπὲρ τοῦ κύματος, ἤδη δέ που
καὶ δένδρον ἀπενεχθὲν ἐκ ποταμοῦ εἰς κλύδωνα· καὶ τάχα μέν τις καὶ
ἄκων κατενεχθείς, κινῶν τὰ ἄρθρα, ἐξενήξατο, τάχα δὲ καὶ ἑκὼν ἐν
παιδιᾶς μέρει· ἀθροίσασα δὲ ἡ πεῖρα τὴν ἔννοιαν τοῦ πλοῦ σχεδίαν
τινὰ φαύλην τὸ πρῶτον ἐξειργάσατο, ὕλην κούφην ξυνδεόντων,
αὐτοσχέδιον ναῦν· κατὰ βραχὺ δὲ προϊοῦσα ἡ αἴσθησις ὁμοῦ τῷ λογισμῷ
ἐσοφίσατο καὶ ἐξεῦρεν ὄχημα κοῖλον, ἐρεσσόμενόν τε, καὶ ἐξ ἱστίων
πλέον, καὶ ὑπὸ ἀνέμων φερόμενον καὶ ὑπὸ οἰάκων εὐθυνόμενον, καὶ
ἐπέτρεψεν αὐτοῦ τὴν σωτηρίαν ἐπιστήμῃ μιᾷ τῇ κυβερνητικῇ. Φασὶν δὲ
καὶ ἰατρικὴν εὑρῆσθαι τὸ ἀρχαῖον ὡδί· κομίζοντες οἱ οἰκεῖοι τὸν
κάμνοντα εἰς τῶν ἀγυιῶν τὴν ἐντριβῆ, κατετίθεντο· ἐφιστάμενοι δὲ οἱ
ἄνθρωποι, καὶ ἀνερωτῶντες τὸ ἄλγος ὅτῳ τὸ αὐτὸ ξυμπεσόν, ἔπειτα
ὤνατο ἢ ἐδωδῇ τινι, ἢ καύσας, ἢ τεμών, ἢ διψήσας, παρετίθεντο
ἕκαστοι ταῦτα τῷ κάμνοντι οἱ πεπονθότες πρότερον καὶ ὠφελημένοι· ἡ
δὲ ὁμοιότης τοῦ πάθους συναθροίσασα τὴν τοῦ ὠφελήσαντος μνήμην τῇ
κατ´ ὀλίγον ἐντεύξει ἐπιστήμην ἐποίησεν τὸ πᾶν. Οὕτω καὶ τεκτονικὴ
συνέστη, καὶ χαλκευτική, καὶ ὑφαντική, καὶ γραφική, ὑπὸ τῆς πείρας
ἑκάστη χειραγωγουμένη. |
II. Ce que les sens rassemblent dans un cadre étroit de contemplation, (à quoi
l'on donne le nom d'expérience), ce qu'ils soumettent aux yeux de l'âme, et
sur quoi la raison applique son cachet, après l'avoir examiné,
appellerons-nous cela Science? Comme lorsque je dis : les premiers hommes ne
savaient point encore ce que c'était qu'un vaisseau. Ils désiraient
communiquer ensemble. Le besoin les y portait, mais la mer y mettait obstacle.
Ils virent un oiseau descendre des airs et nager. Ils virent quelque chose de
pesant, d'ailleurs, flotter légèrement sur les ondes. Peut-être virent-ils
quelque part un arbre porté par un fleuve dans la mer. Peut-être quelqu'un
d'entre eux tomba-t-il dans l'eau sans le vouloir, et en remuant ses membres
parvint-il à surnager et à se sauver; peut-être même s'exerça-t-il à la
nage par amusement. Quoi qu'il en soit, l'expérience recueillit la première
pensée de la navigation, et construisit d'abord une méchante barque des
premiers, des plus légers matériaux, qui lui tombèrent sous la main. Cet
aperçu ne tarda pas à être perfectionné par les combinaisons du raisonnement
; et l'on eut bientôt une espèce de char creux que des rames firent mouvoir,
que des voiles et les vents poussèrent, qu'un gouvernail dirigea, et auquel on
s'abandonna uniquement sur la foi de la science acquise dans cet art-là. Voici
comme on raconte que la médecine a été jadis inventée. Les parents d'un
malade allaient le déposer dans un des passages les plus fréquentés (4),
les passants s'approchaient, faisaient des questions sur la maladie, et selon
qu'ils avaient été atteints du même mal, et qu'ils avaient été guéris, ou
en avalant quelque chose, ou en se cautérisant, ou en faisant une amputation,
ou en se mettant à la diète, chacun de ceux qui avaient été malades,
indiquait le remède qui lui avait rendu la santé. L'identité des maladies
fixa dans la mémoire l'identité des médicaments qui les avaient guéries; et
une courte habitude de l'ensemble de ce résultat fut la mère de la science.
C'est ainsi que les autres arts, celui du charron, celui de l'armurier, celui du
tisserand, celui du peintre, naquirent de l'expérience.
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[3] Εἶεν· τοῦτο ἐπιστήμην φῶμεν,
ἐθισμὸν ψυχῆς πρὸς ὁτιοῦν τῶν ἀνθρωπίνων ἔργων καὶ ἐπιτηδευμάτων· ἢ
τοῦτο μὲν διατείνει καὶ ἐπὶ τὰ θηρία; καὶ αἴσθησις γὰρ καὶ πεῖρα οὐκ
ἀνθρώπου ἴδιον· ἀλλὰ καὶ τὰ θηρία αἰσθάνεται, καὶ ἐκμανθάνει τὶ ὑπὸ
τῆς πείρας, ὥστε καὶ τούτοις ὥρα μεταποιεῖσθαι σοφίας. Αἱ γέρανοι ἐξ
Αἰγύπτου ὥρᾳ θέρους ἀνιστάμεναι, οὐκ ἀνεχόμεναι τὸ θάλπος, τείνασαι
τὰς πτέρυγας ὥσπερ ἱστία, φέρονται διὰ τοῦ ἀέρος εὐθὺ τῆς Σκυθῶν
γῆς· ἅτε δὲ οὐκ ἐν ῥυθμῷ ὂν τὸ ζῷον, ἀλλὰ ἐμβριθὲς μὲν τὰ μέσα,
μακρὸν δὲ κατὰ τὸν αὐχένα, κοῦφον δὲ κατὰ τὸ οὐραῖον, ἀραιὸν δὲ κατὰ
τὰς πτέρυγας, ἐσχισμένον δὲ κατὰ τὰ κῶλα, κλυδάζεται τὴν πτῆσιν,
ὥσπερ ναῦς χειμαζομένη. Τοῦτο γνοῦσα ἡ γέρανος, ἢ αἰσθανομένη ἢ
πειραθεῖσα, οὐ πρότερον ἀνίπταται, πρὶν ξυλλάβῃ λίθον τῷ στόματι
ἕρμα εἶναι αὐτῇ πρὸς τὴν πτῆσιν. Ἔλαφοι ἐκ Σικελίας ἐπὶ Ῥηγίου
περαιοῦνται, νηχόμεναι ὥρα θέρους ἐπιθυμίᾳ καρπῶν· ἅτε δὲ ἐν μακρῷ
πλῷ, ἐξασθενεῖ ἡ ἔλαφος ἀνέχουσα τὴν κορυφὴν ὑπὲρ τοῦ ὕδατος·
κουφίζονται δὴ τὸν κάματον ὧδέ πως· νήχονται ἐπὶ μιᾶς τεταγμέναι,
ἀλλήλαις ἑπόμεναι, ὥσπερ στρατόπεδον ἐπικέρως βαδίζον· νήχονται δὲ
ἐπιθεῖσα ἑκάστη τὴν κορυφὴν τῇ τῆς ἡγουμένης ἰξύϊ· ἡ δὲ στρατηγοῦσα
τῆς τάξεως, ἐπειδὰν κάμῃ, ἐπὶ οὐραῖον μεθίσταται, καὶ ἡγεῖται ἄλλη,
καὶ οὐραγεῖ ἄλλη· ὡς ἐν τοῖς στρατοπέδοις Ξενοφῶν μὲν οὐραγεῖ,
ἡγεῖται δὲ Χειρίσοφος· ὥστε καὶ στρατηγίας τακτικῆς μεταποιεῖται
ταυτὶ τὰ θηρία. |
III.
À la bonne heure, appelons Science l'habitude de l'âme appliquée aux
ouvrages, aux opérations quelconques de l'homme. Mais cette science,
s'étend-elle jusqu'aux brutes? Sans doute, car le sens interne (5)
et l'expérience ne sont pas exclusivement propres à l'homme. Les brutes
reçoivent dès sensations, apprennent certaines choses par l'expérience, de
manière qu'il est une sorte de sagesse qu'elles ont soin d'acquérir. En été,
les grues quittent l'Égypte (6) dont elles ne
peuvent supporter les chaleurs. Elles étendent leurs ailes comme des voiles, et
les vents les portent tout droit dans la Scythie. La structure de ces animaux
n'est point d'ailleurs régulière. Ils ont le milieu du corps lourd ; le col
long ; le côté de la queue léger ; la partie, où les ailes sont attachées,
grêle; les jambes écarquillées. Dans leur vol, ils sont ballottés, comme
l'est un vaisseau par les vagues. Instruite de cet inconvénient, la grue ne
s'envole point qu'elle n'ait pris dans, son bec une pierre, qui lui sert comme
de lest, au milieu des airs ; soit qu'elle ait imaginé cet expédient
d'elle-même, soit qu'elle le doive à l'expérience (7).
Les biches de la Sicile traversent, en été, la mer, à la nage, pour aller
pâturer dans la campagne de Reggio (8). Ce long
trajet épuise la force des biches, qui sont forcées de tenir la tête toujours
au-dessus de l'eau. Voici le moyen à l'aide duquel elles s'épargnent cette
fatigue. Elles nagent, rangées sur une seule ligne, l'une à la queue de
l'autre, comme une armée qui marche en colonne. Elles nagent, ayant chacune
leur tête appuyée sur le flanc de celle qui la précède. Celle qui fait le
chef de file, lorsqu'elle est fatiguée, se détache pour se placer la dernière
; et c'est ainsi qu'alternativement elles passent de la tête à la queue. C'est
ainsi que, dans son expédition (9), Xénophon
commandait l'arrière-garde, et Chirisophe l'avant-garde; de manière que les
brutes ont des notions de la tactique militaire.
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[4] Μήποτε οὖν αἴσθησις μὲν καὶ πεῖρα
οὐκ ἀνθρώπινον, λόγος δὲ ἀνθρώπου ἴδιον· καὶ οὐδὲν ἂν εἴη ἄλλο
ἐπιστήμη πλὴν βεβαιότης λόγου, ὁδεύοντος κατὰ τὰ αὐτά, ἐκθηρωμένου
τὰ συγγενῆ τῶν πραγμάτων, καὶ διακρίνοντος τὰ ἀνόμοια, καὶ τὰ ὅμοια
συγκρίνοντος, καὶ τὰ οἰκεῖα συντιθέντος, καὶ τὰ συγκεχυμένα
διαιροῦντος, καὶ τὰ ἀλλότρια χωρίζοντος, καὶ τὰ ἄτακτα συντάττοντος,
καὶ τὰ ἀνάρμοστα ἁρμοζομένου. Τοιοῦτον γὰρ ἀμέλει καὶ ἀριθμητική,
καὶ γεωμετρία, καὶ μουσική, καὶ ὅσαι ἄλλαι χειρουργίας ἀδεεῖς τῇ τοῦ
λόγου ῥώμῃ ἐπεξῆλθον τοῖς αὐτῶν νοήμασιν καὶ ἐξειργάσαντο. Καὶ μὴν
Ὅμηρος οὐ ταύτας πρεσβυτάτας ἐπιστημῶν λέγει, παλαιὸς ἀνήρ, καὶ
ἀξιόχρεως δήπου πιστεύεσθαι, ἀλλὰ θαυμάζει τούτους μόνους, ὡς
σοφούς, μάντιν, ἢ ἰητῆρα κακῶν, ἢ τέκτονα δούρων, καὶ ‘θέσπιν
ἀοιδόν.’ Ὢ τῆς ἰσοτιμίας. Ὁ μάντις σοφός, καὶ ὁ τέκτων σοφός, καὶ ὁ
Ἀπόλλων δήπου, καὶ ὁ ἰατρός, καὶ ὁ Ἀσκληπιὸς δήπου ὁμοίως τίμιος,
καὶ ὁ Φήμιος. Μήποτ´ οὖν Ὅμηρος μὲν ταῖς ἐπιστήμαις τὰς τιμὰς νέμει
κατὰ τὴν εὕρεσιν μᾶλλον ἢ κατὰ τὴν χρείαν αὐτῶν, ἡμῖν δὲ οὐ ταύτῃ
θηρατέον, ἀλλὰ ὡδὶ λέγωμεν· ὅτι ἡ τοῦ ἀνθρώπου ψυχὴ τὸ εὐκινητότατον
οὖσα τῶν ὄντων καὶ ὀξύτατον, κεκραμένη ἐκ θνητῆς καὶ ἀθανάτου
φύσεως, κατὰ μὲν τὸ θνητὸν αὐτῆς ξυντάττεται τῇ θηριώδει φύσει, καὶ
γὰρ τρέφει, καὶ αὔξει, καὶ κινεῖ, καὶ αἰσθάνεται· κατὰ δὲ τὸ
ἀθάνατον τῷ θείῳ καὶ ξυνάπτει, καὶ γὰρ νοεῖ, καὶ λογίζεται, καὶ
μανθάνει, καὶ ἐπίσταται· καθὸ δὲ ξυμβάλλουσιν αὐτῆς αἱ θνηταὶ φύσεις
τῷ ἀθανάτῳ, τοῦτο πᾶν καλεῖται φρόνησις, διὰ μέσου οὖσα ἐπιστήμης
πρὸς αἴσθησιν. Καὶ ἐστὶν ἔργον ψυχῆς, ὡς μὲν ἀλόγου, αἴσθησις· ὡς δὲ
θείας, νοῦς· ὡς δὲ ἀνθρωπίνης, φρόνησις· ἀθροίζει δὲ αἴσθησις μὲν
ἐμπειρίαν, φρόνησις δὲ λόγον, νοῦς δὲ βεβαιότητα· τὴν δὲ ἐξ ἁπάντων
ἁρμονίαν ἐπιστήμην καλῶ· εἰ δέ τοι δεῖ καὶ εἰκόνος τῷ λόγῳ, ἔστω ἡ
μὲν αἴσθησις κατὰ τὴν ἐν τεκτονικῇ χειρουργίαν, ὁ δὲ νοῦς κατὰ
γεωμετρίαν, ἡ δὲ φρόνησις οἵα καὶ τῶν ἀρχιτεκτόνων ἤδη τέχνη, διὰ
μέσου οὖσα γεωμετρίας καὶ τεκτονικῆς, πρὸς μὲν τὴν χειρουργίαν
ἐπιστήμη τὶς οὖσα, πρὸς δὲ γεωμετρίαν ἐλλαττουμένη κατὰ τὴν
βεβαιότητα. |
IV. Que le sens interne donc, et que l'expérience ne soient pas
exclusivement propres à l'homme, l'homme a du moins cet avantage, en
ce qui concerne la raison ; et, sous ce point de vue, la science
n'est autre chose que la raison qui soumet, longtemps, et sans
distraction, les mêmes objets à ses opérations; qui cherche dans les
choses les rapprochements divers, qui sépare ce qu'elles ont de
dissemblable, qui réunit ce qu'elles ont d'identique, qui met
ensemble celles qui ont de l'affinité, qui distingue celles qui sont
confondues, qui divise celles qui sont hétérogènes, qui met en ordre
celles qui sont désordonnées, qui fait concorder celles qui n'ont
entre elles aucune harmonie. Telles sont, sans doute,
l'Arithmétique, la Géométrie, la Musique, et toutes les autres
parties des connaissances humaines, étrangères à toute action
mécanique, et qui, enfantées par la force de la raison, n'ont eu
d'autre berceau, d'autre moule, que l'intelligence humaine. Et
cependant, ces sciences ne passent pas pour les plus anciennes aux
yeux d'Homère, cet homme recommandable par son antiquité, et qui
d'ailleurs mérite pleine confiance. Il admire uniquement, il regarde
comme seuls Sages (10), « Les Devins,
les Médecins, les Charpentiers, ou les divins Chanteurs ». Ô quel
parallèle ! Un devin, un médecin, un charpentier, un chanteur, dans
le nombre des Sages ! Apollon et Esculape sur la même ligne
d'honneur et de recommandation, qu'Epéus et que Phémius (11)
! Mais Homère, dans ce passage, ne dispense-t-il point l'éloge aux
sciences dont il parle, - plutôt en considérant l'époque de leur
origine, que leur utilité réelle? Quant à nous, nous ne prendrons
point cette route. Mais nous dirons : l'âme de l'homme est de tous
les êtres celui qui se meut avec le plus de facilité, et le plus de
vélocité. Elle est un mélange de substance mortelle et de substance
immortelle (12). Sous le rapport de la
première substance, elle tient de la brute. Car elle se nourrit,
elle croît, elle se meut, elle a de l'instinct. Sous le rapport de
la substance immortelle, elle tient de la Divinité. Car elle est
intelligente, raisonnable, susceptible d'apprendre, de savoir.
Lorsque chez elle la substance mortelle s'accorde avec la substance
immortelle, cet accord s'appelle prudence, et il tient le milieu
entre la science et l'instinct. En tant que l'âme est dénuée de
raison, elle agit par instinct. En tant que la substance divine la
dirige, son action est de l'intelligence. En tant que ces deux
mobiles sont combinés comme ils le sont dans la nature humaine,
l'action de l'âme est de la prudence. L'instinct recueille
l'expérience; la prudence recueillie la raison; l'intelligence
recueille l'évidence immuable ; et j'appelle science, la combinaison
harmonique de ces trois éléments. S'il faut une comparaison pour
nous faire mieux entendre (13) ; que
l'on considère l'instinct comme la partie mécanique dans l'art de la
construction, l'intelligence comme la géométrie ou la partie
ordonnatrice, la prudence comme la personne même des architectes. La
partie qui tient le milieu entre la partie géométrique et la partie
mécanique est une sorte de science, eu égard à cette dernière ; mais
eu égard à la partie géométrique, elle lui est inférieure sous le
rapport de l'évidence immuable.
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[5] Διείληχε δὴ καὶ τὰς τῶν ἀνθρώπων
δυνάμεις ἐπιστήμη, καὶ φρόνησις, καὶ ἐμπειρία. Καὶ ἡ μὲν ἐμπειρία,
περὶ πῦρ καὶ σίδηρον καὶ ἄλλας ὕλας πραγματευομένη παντοδαπάς,
ἐρανίζει τὰς χρείας τοῦ βίου ταῖς εὐπορίαις τῶν τεχνῶν. Ἡ δὲ
φρόνησις ἐπιτεταγμένη τοῖς τῆς ψυχῆς παθήμασιν, καὶ οἰκονομοῦσα
ταῦτα τῷ λογισμῷ, πρὸς μὲν ἐμπειρίαν ἐπιστήμης ἔχει λόγον,
ἀπολείπεται δὲ ἐπιστήμης, καθόσον περὶ πρᾶγμα οὐχ ἑστὸς οὐδὲ
ὡμολογημένον πραγματευομένη σχηματίζεται τῇ τούτου φύσει. Ὁ δὲ νοῦς
τὸ τιμιώτατον ἐν ψυχῇ καὶ ἀρχικώτατον, καθάπερ ἐν πόλει νόμος, οὐκ
ἐπ´ ἀξόνων γεγραμμένος, οὐδὲ ἐπὶ στήλης ἐγκεχαραγμένος, οὐδὲ ὑπὸ
ψηφισμάτων κεκυρωμένος, οὐδ´ ὑπ´ ἐκκλησίας κεχειροτονημένος, οὐδ´
ὑπὸ δήμου ἐπῃνημένος, οὐδ´ ὑπὸ δικαστηρίου δεδοκιμασμένος, οὐδ´ ὑπὸ
Σόλωνος ἢ Λυκούργου τεθείς· ἀλλὰ θεὸς μὲν ὁ νομοθέτης, ἄγραφος δὲ ὁ
νόμος, ἀχειροτόνητος δὲ ἡ τιμή, ἀνυπεύθυνος δὲ ἡ ἐξουσία. Καὶ μόνος
ἂν εἴη οὗτος νόμος· οἱ δὲ ἄλλως, οἱ καλούμενοι, δόξαι ψευδεῖς καὶ
διημαρτημέναι καὶ σφαλλόμεναι. Κατ´ ἐκείνους τοὺς νόμους καὶ
Ἀριστείδης ἔφευγεν, καὶ Περικλῆς ἐζημιοῦτο, καὶ Σωκράτης ἀπέθνησκεν·
κατὰ δὲ τὸν θεῖον τοῦτον νόμον καὶ Ἀριστείδης δίκαιος ἦν, καὶ
Περικλῆς ἀγαθὸς ἦν, καὶ Σωκράτης φιλόσοφος. Ἐκείνων τῶν νόμων ἔργον
δημοκρατία, καὶ δικαστήρια, καὶ ἐκκλησίαι, καὶ δήμου ὁρμαί, καὶ
δημαγωγῶν δωροδοκίαι, καὶ τύχαι παντοδαπαί, καὶ συμφοραὶ ποικίλαι·
τούτου τοῦ νόμου ἔργον ἐλευθερία, καὶ ἀρετή, καὶ βίος ἄλυπος, καὶ
ἀσφαλὴς εὐδαιμονία. Ὑπ´ ἐκείνων τῶν νόμων ἀθροίζεται μὲν τὰ
δικαστήρια, πληροῦνται δὲ αἱ τριήρεις, ἐκπέμπονται δὲ οἱ στόλοι,
τέμνεται γῆ, πολεμεῖται θάλαττα, Αἴγινα ἀνίσταται, Δεκέλεια
τειχίζεται, Μῆλος ἀπόλλυται, Πλαταιαὶ ἁλίσκονται, Σκιώνη
ἀνδραποδίζεται, Δῆλος καθαιρεῖται· ὑπὸ τούτων τῶν νόμων ἀρετὴ
ἀθροίζεται, πληροῦται ψυχὴ μαθημάτων, οἰκεῖται οἶκος καλῶς,
εὐνομεῖται πόλις, εἰρήνην ἄγει γῆ καὶ θάλαττα, οὐδὲν σκαιόν, οὐδὲ
ἀπάνθρωπον, οὐδὲ βαρβαρικόν, πάντα εἰρήνης μεστά, καὶ ἐκεχειρίας,
καὶ ἐπιστήμης, καὶ φιλοσοφίας, καὶ λόγων μουσικῶν. |
V.
Or, les facultés de l'homme se partagent entre la science ; la prudence, et
l'expérience. Cette dernière, en s'exerçant sur le feu, sur le fer, et sur
tous les autres objets physiques, les approprie à tous les besoins de la vie,
à l'aide du parti que les arts en tirent. La prudence a l'empire des passions
de l'âme, et les gouverne, à l'aide du raisonnement. Considérée dans son
rapport avec l'expérience, elle tient lieu de science, mais elle est
inférieure à la science proprement dite, en tant que s'appliquant à une
nature d'objet, qui n'a ni consistance, ni uniformité ; elle prend, si l'on
peut s'exprimer ainsi, la forme de sa manière d'être. Quant à l'intelligence
(14), elle est la partie la plus importante de
l'âme. C'est elle qui a le suprême droit à l'empire, ainsi que la loi dans la
Cité ; non pas la loi qui est écrite sur des tables, qui est imprimée sur des
colonnes, qui est votée par des suffrages, qui est délibérée dans des
comices, qui est sanctionnée par le peuple ; non pas celle qui est consacrée
dans les tribunaux; non pas celle qui est l'ouvrage de Solon ou de Lycurgue ;
mais la loi que Dieu lui-même a promulguée; loi, qui n'a jamais été écrite
; qui ne doit son autorité à aucun vote ; qui ne doit aucun compte de son
empire. Cette loi est la seule qui en mérite le nom. Celles d'ailleurs qui le
portent, ne sont que des opinions, fausses, erronées, trompeuses. Ce furent ces
lois qui condamnèrent Aristide au bannissement, Périclès à une amende,
Socrate à la mort. Et néanmoins, aux yeux de cette loi divine, Aristide était
un homme juste, Périclès un grand homme, et Socrate un philosophe. Les effets
de ces lois sont des Gouvernements démocratiques, des tribunaux, des comices,
des fermentations populaires, de la vénalité parmi les démagogues, des
révolutions de toute espèce, des calamités de tout genre. Les résultats de
l'autre loi sont, au contraire, la liberté, la vertu, une vie exempte de maux,
une félicité immuable. Les premières lois assemblent les tribunaux, équipent
des galères, mettent des flottes à la voile, ravagent les terres, portent la
guerre sur mer, détruisent Aegine, entourent Dékélie de murailles,
entraînent la perte de Mélos (15), la prise de
Platée, la servitude de Skione (16), et le
bouleversement de Délos. L'autre loi, au contraire, fait devenir vertueux ;
elle remplit l'âme d'instruction et de connaissances ; elle fait régner le bon
ordre dans les familles, l'harmonie dans les Cités; elle entretient la paix sur
mer et sur terre; elle ne produit rien de sinistre, rien de funeste à l'espèce
humaine, rien qui appartienne aux Barbares. On ne voit partout que les fruits de
la paix, de la concorde, de la science, de la philosophie, et des arts
libéraux.
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[6] Ὦ νόμοι νόμων πρεσβύτεροι, καὶ
νομοθέται νομοθετῶν ἡμερώτεροι· οἷς ὁ μὲν ἑκὼν ὑπορρίψας ἑαυτόν,
ἐλεύθερος, καὶ εὔπορος, καὶ ἀδεὴς ἐφημέρων νόμων καὶ ἀνοήτων
δικαστῶν· εἰ δέ τινες παράνομοι ἐν τούτοις καὶ ὑβρισταὶ ἄνδρες,
ἔχουσιν τὴν δίκην, οὐκ Ἀθηναίων καταψηφιζομένων, οὐδὲ τῶν ἕνδεκα
ἀπαγόντων, οὐδὲ τοῦ δημίου προσφέροντος τὸ φάρμακον, ἀλλ´ αὐτόθεν ἐξ
αὐτοφυοῦς καὶ ἑκουσίου μοχθηρίας· αὐτῶν γὰρ σφετέρῃσιν ἀτασθαλίῃσιν
ὄλοντο. Τοῦτον παραβὰς τὸν νόμον Ἀλκιβιάδης ἐδυστύχει, οὐχ ὁπότε
αὐτὸν Ἀθηναῖοι ἐκ Σικελίας ἐκάλουν, οὐδ´ ὁπότε ἐπηράσαντο αὐτῷ
κήρυκες καὶ Εὐμολπίδαι, οὐδ´ ὁπότε ἔφευγεν ἔξω τῆς Ἀττικῆς· μικρὰ
ταῦτα, καὶ καταδίκη εὐκαταφρόνητος· κρείττων γὰρ ἦν καὶ φεύγων
Ἀλκιβιάδης τῶν οἴκοι μενόντων· οὗτος παρὰ Λακεδαιμονίοις φεύγων
εὐδοκίμει, οὗτος Δεκέλειαν ἐπετείχισεν, οὗτος Τισσαφέρνῃ φίλος, καὶ
Πελοποννησίων ἡγεῖτο· ἀλλ´ ἡ ἀληθὴς Ἀλκιβιάδου δίκη πρεσβυτέρα
μακρῷ, πρεσβυτέρου νόμου καὶ πρεσβυτέρων δικαστῶν. Ἡνίκα ἐξῆλθεν
Λυκείου, καὶ ὑπὸ Σωκράτους κατεγινώσκετο, καὶ ὑπὸ φιλοσοφίας
ἐξεκηρύττετο· τότε φεύγει Ἀλκιβιάδης, τότε ἁλίσκεται. Ὢ καταδίκης
πικρᾶς, καὶ ἀμειλίκτου ἀρᾶς, καὶ ἐλεεινῆς πλάνης. Τοιγαροῦν Ἀθηναῖοι
μὲν αὐτὸν καὶ δεηθέντες κατεδέξαντο· φιλοσοφία δέ, καὶ ἐπιστήμη, καὶ
ἀρετὴ τοῖς ἅπαξ φεύγουσιν ἄβατος μένει καὶ ἀδιάλλακτος. Τοιοῦτον ἡ
ἐπιστήμη, τοιοῦτον ἡ ἀμαθία. |
VI.
Ô Loi, plus ancienne que les autres Lois ! Ô Législateur, plus pacifique que
les autres Législateurs ! Celui qui s'abandonne spontanément à vous, conserve
sa liberté, reste à son aise, sans avoir aucun besoin, ni de ces lois
éphémères, ni de leurs insensés ministres. S'il est des hommes capables de
vous offenser, de commettre contre vous quelques attentats, ils sont punis ; non
qu'ils soient traduits devant les tribunaux des Athéniens (17),
non que les onze les conduisent eu prison (18), non
que le bourreau leur présente la ciguë, mais ils trouvent leur châtiment en
eux-mêmes (19), dans leurs vices innés, dans leur
méchanceté spontanée; « Car les malheurs qu'ils éprouvent, ils les doivent
à leurs propres forfaits (20) ». Ce fut à la
transgression de cette loi qu'Alcibiade dut ses malheurs, non point lorsque les
Athéniens le rappelèrent de la Sicile, ni lorsqu'il fut dévoué aux Dieux
infernaux par les hérauts et les Eumolpides (21),
ni lorsqu'il se sauva de l'Attique. Tout cela était peu de chose ; un jugement
et une condamnation assez méprisables. Car Alcibiade fugitif joua un plus grand
rôle que ceux de ses concitoyens qui restaient à Athènes ; il fut accueilli
avec distinction par les Lacédémoniens : il fortifia Dékélie; il devint
l'ami de Tissapherne, et obtint le commandement d'une année de
Péloponnésiens. Mais le châtiment d'Alcibiade remontait bien plus haut. Il
était l'œuvre d'une bien plus ancienne loi, de juges bien plus anciens. Ce fut
lorsqu'il abandonna le Lycée, lorsqu'il fut condamné par Socrate, lorsqu'il
fut éconduit par la philosophie. C'est de là. que date son bannissement. C'est
là que remonte sa condamnation. Ô le cruel anathème ! Ô les irrévocables
imprécations ! Ô l'erreur digne de commisération ! Que les Athéniens aient
dans la suite sollicité le retour d'Alcibiade. Mais la Philosophie ! mais la
Science ! mais la Vertu ! Elles demeurent à jamais implacables et
inaccessibles, vis-à-vis de ceux qu'elles ont une fois réprouvés. Telle est
la science. Telle est l'ignorance.
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[7] Ἐγὼ δὲ καὶ τοὺς Μίνω νόμους
ἐπιστήμην καλῶ, ἣν ἐδίδασκεν μὲν ὁ Ζεὺς ἐν ἐνναετεῖ χρόνῳ, ἐμάνθανεν
δὲ ὁ Μίνως, εὐδαιμόνει δὲ τὸ Κρητῶν γένος. Καὶ τὴν Κύρου ἐπιστήμην,
ἀρετήν καλῶ βασιλικήν, ἣν ἐδίδασκεν μὲν Κῦρος, Καμβύσης δὲ οὐκ
ἐμάνθανεν, οὐδὲ Ξέρξης ἐμάνθανεν. Κῦρος μὲν γὰρ ἡγεῖτο Περσῶν, ὡς
ποιμὴν θρεμμάτων, σώζων τὸ αἰπόλιον καὶ τρέφων, καὶ Μήδοις πολεμῶν,
καὶ Βαβυλωνίους λαμβάνων, καὶ μηδενὶ ἐφιεὶς λύκῳ βαρβάρῳ καὶ ἀργίᾳ
ἀναμιχθῆναι τῇ ἀγέλῃ. Καμβύσης δ´ ἦν καὶ αὖθις Ξέρξης ἐκ ποιμένων
ἀγαθῶν πονηροὶ λύκοι, κείροντες τὴν ἀγέλην, καὶ τῆς ἐπιστήμης
ἀπεληλαμένοι. Ἐγὼ καὶ τοὺς Λυκούργου νόμους ἐπιστήμην καλῶ μουσικήν. |
VII.
Quant à moi, je donne le nom de science aux lois de Minos, qui furent
enseignées par Jupiter à ce Prince, pendant neuf ans, lois dans lesquelles
Minos se rendit habile, et avec lesquelles il fit le bonheur des Crétois.
J'appelle aussi science digne d'un Roi, la vertu de Cyrus, de laquelle, à la
vérité, il donna des leçons, mais des leçons que Cambyse et Xerxès ne
surent point mettre à profit. Cyrus gouverna les Perses, comme un berger
gouverne son troupeau (22). Il veilla sur leur
conservation, sur leur nourriture. Il fit la guerre aux Mèdes. Il s'empara de
Babylone. Il ne permit à aucun loup barbare et ravisseur, de faire sur son
bercail aucune incursion. Tandis que (23) Cambyse
et Xerxès ne furent que des loups dévastateurs, au lieu de bons bergers qu'ils
auraient dû être. Ils exterminèrent leur troupeau de leurs propres mains (24).
Ils se montrèrent tout à fait étrangers à la science dont Cyrus leur avait
donné l'exemple. J'appelle aussi les lois de Lycurgue une science harmonique et
musicale (25). |
NOTES.
(1) Tel
est le sujet du Traité de Platon, intitulé, le Théaetète. Socrate
d'ailleurs n'y détermine, n'y statue rien. Il se contente de combattre les
définitions de son interlocuteur.
(2) Des Dieux du second ordre, selon la théologie de
Platon, cela s'en va sans dire.
(3) Le texte porte littéralement, car DIEU est
plus sage que l'homme, et l'homme est plus savant que la brute.
(4) Servius, dans son Commentaire sur
l'Énéide, chant 12, vers 395, s'exprime ainsi : Apud veteres consuetudo
erat ut desperati ante januas suas collocarentur, ut possent a transeuntibus,
forte curari, qui aliquanda simili laboraverant morbo. Isidore n'a fait que
copier ce passage dans le liv. X de ses Origines. Strabon, liv. III, p.
234, liv. XVI, p. 1082, et Hérodote, liv. I, n°. 197, attribuent la même
origine à la médecine, chez les Lusitaniens, les Égyptiens et les
Babyloniens.
(5) Il faut prendre cette expression dans une
acception parfaitement synonyme de ce qu'on appelle instinct.
(6) Ceux qui désireront avoir des détails sur
ce fait de l'Histoire naturelle des Anciens ne peuvent mieux faire que de
consulter le savant Bochard, dans sa Hierozologie, part. II, liv. I.
chap. II.
(7) Bochard, dans l'ouvrage que nous venons de
citer, parle de cette industrieuse précaution de la grue, sur la foi de
plusieurs Auteurs. Mais Aristote la regarde comme une fable. Pline, le
Naturaliste, dit, au sujet de ces volatiles, quelque chose qui n'est pas moins
merveilleux : Excubias habent nocturnis temporibus, lapillum pede
sustinentes, qui laxatus somno et decidens in diligentiam coarguit, lib. X,
§. 30.
(8) Élien, dans son Histoire des
Animaux, liv. V, chap. 56, parle d'un semblable phénomène qui a lieu de la
Cilicie à l'île de Chypre, et par le même motif, πόθῳ
πόας.
(9) Voy. Xénophon, Expédition de Cyrus,
liv. III, chap. 11, n°. 25 et 26.
(10) Dans le IVe. chant de l'Odyssée,
Aicinoüs reproche à Eumée, d'avoir amené chez lui un de ces pauvres hères,
qui obsèdent partout les gens aisés. Eumée répond à Alcinoüs : « Eh,
envers qui l'hospitalité doit-elle être plutôt exercée qu'envers ceux qui
travaillent pour leurs semblables, qu'envers un Devin, ou un Médecin, ou un
Charpentier, ou un divin Poète » Homère n'avait garde, sans doute, d'omettre
dans cette nomenclature de privilégiés, ceux qui professaient son art, les
poètes.
(11) Ce passage est évidemment altéré dans
le texte. Davies et Markland ont fait de leur mieux pour le restaurer. J'ai
suivi la correction du dernier. Voyez les notes de ces deux critiques sur ce
passage 2 dans leur édition.
(12) Selon que d'âme de l'homme était
considérée par les Platoniciens, dans le corps, ou hors du corps, elle était
un être composé, ou un être simple. Dans le corps humain , l'âme était
amalgamée à deux parties, à deux éléments matériels, et par conséquent
périssables, l'un, τὸ
θυμικόν,
l'autre, τὸ
ἐπιθυμητικόν, avec
lesquels elle était incorporée, et qui avaient chacun son siège distinct et
séparé dans l'individu qu'elle animait. Hors du corps, l'âme redevenait ce
qu'elle était avant d'y entrer, un être simple, immatériel, une émanation de
l'essence divine, une substance ayant en soi le principe de sa vie et de son
mouvement, et par conséquent indestructible et immortelle. Voy. Alcinoüs, Introduction
à la philosophie de Platon, chap. 23.
(13) Et ce n'est pas sans besoin. Car, jusque
là, on n'a que de grands mots scientifiques, et point d'idées nettes. Tel
était le défaut prédominant de la philosophie des Anciens, sur certaines
matières. Ils se donnaient carrière dans les régions de la métaphysique,
avec une confiance qui étonne, lorsqu'on ne rencontre que du phébus. Souvent
ils avaient l'air de croire convaincre l'esprit de leurs auditeurs, lorsqu'il
était douteux et très douteux qu'ils s'entendissent eux-mêmes.
(14) Pourquoi l'intelligence ? la marche de la
pensée, la distribution des idées, ne semblent-elles pas appeler la science,
au lieu de l'intelligence? à moins que Maxime de Tyr ne les prenne ici l'une
pour l'autre.
(15) Selon Étienne de Byzance, Mélos était
une des Cyclades ayant une ville de même nom. Suidas parle de l'une et de
l'autre. Isocrate, dans son Oraison panégyrique, raconte comment ces
insulaires furent réduits en servitude. On peut consulter Thucydide, liv. V, et
Strabon, liv. X.
(16) C'était une ville de Thrace, dont Étienne de
Byzance fait mention Σκιώνη
πόλις Θράκας.
Davies a corrigé le texte qui offre Σικυώνη Sicyone, dans les éditions vulgaires.
(17) Maxime de
Tyr fait allusion ici au jugement de Socrate.
(18) Voyez
ci-dessus Dissertation IX, sect. II, ce que nous avons dit dans le notes
touchant ces magistrats d'Athènes.
(19) Comme
elle est belle cette pensée dans ces paroles de Juvénal :
Cui frigide mens est
Criminibus, tacita sudant praerordia culpa.
Qu'il me soit permis de placer ici quelques vers d'une pièce que des motifs de
prudence m'ont empêché jusqu'à ce moment de publier, et qui renferment la
paraphrase de la même idée :
Et vous, tyrans affreux, Décemvirs éphémères,
Artisans effrénés des publiques misères,
Vil ramas de brigands de la fange sortis ,
Monstres couverts d'horreurs et de crimes nourris,
Sous le fer des Licteurs que votre sang ruisselle ;
Ou, pour mieux accomplir la justice éternelle,
De terreurs assaillis, et d'opprobre abreuvés,
Qu'à souffrir mille morts vous soyez réservés :
Peu m'importe ; il suffit: la vengeance céleste,
Par des signes certains sur vous se manifeste;
Vous avez beau montrer un front calme et serein :
Votre coeur est pour vous votre taureau d'airain.
(20) Ces
mots sont empruntés du premier chant de l'Odyssée, septième vers.
Homère s'exprime ainsi, en parlant des compagnons d'Ulysse.
(21) C’est
à Alcibiade que s'appliquent ces paroles de Suidas, sous le mot ᾿Επηράσαντο
δὲ αὐτῷ Εὐμολπίδαι καὶ κήρυκες.
Voy. Cornelius Nepos, Vie d'Alcibiade, chap. 4; Plutarque, Vie
d'Alcibiade, et Meursius, dans ses Éleusines, chap. 2.
(22) Xénophon,
dans sa Cyropédie, liv. 8, n°18, attribue à Cyrus d'avoir assimilé
les fonctions d'un bon Roi à celles d'un bon berger.
(23) La
transition m'a paru exiger ce mot, qui n'est pas dans le texte.
(24) Formey
a traduit : « Ils tondirent impitoyablement leur troupeau », parce qu'il a lu
dans le latin d'Heinsius, gregem totondere. J'avais senti que le mot
tondre ne convenait point en cet endroit, et qu'il fallait y suppléer par
l'équivalent, détruire , exterminer, lorsque j'ai lu dans la note de Markland
qu'Hésychius et Suidas donnent au verbe grec κείρειν,
l'acception que je lui donnais moi-même. Témoin le vers 56 de l'Ajax de
Sophocle, où ce verbe est employé dans ce sens :
᾿Ενθ' εἰσπεσὼν ἔκειρε πολυκέρων φόνον
Κύλκῳ ῥαχίζων
(25) Markland
pense, et je pense comme lui, que la fin de cette Dissertation a été
tronquée. « Il n'est pas vraisemblable», dit ce judicieux critique, « que
notre Auteur ait mentionné les lois de Lycurgue, sans leur distribuer les
mêmes éloges qu'il a décernés. aux lois de Minos et à l'administration de
Cyrus ». Il avait, en effet, un si beau champ. Mais le temps a probablement
oblitéré les dernières lignes du manuscrit primordial; et, à moins qu'on
n'en retrouve un jour un qui n'ait point éprouvé d'atteinte, la vérité du
texte ne sera jamais rétablie.
D'ailleurs, Maxime de Tyr donne aux lois de Lycurgue le nom de science musicale,
ἐπιστήμην
μουσικήν.
Or, le mot musique a, dans le langage de Platon, des acceptions particulières.
Tantôt les Platoniciens prennent ce mot pour l'assemblage de toutes les
connaissances qui ornent et embellissent l'esprit. C'est en ce sens qu'il est
pris au second livre de la République. D'autres fois, ils lui donnent
une acception plus auguste, si l'on peut s'exprimer ainsi, ils lui font
embrasser tout ce qu'embrasse la philosophie : c'est dans ce sens qu'il est pris
dans le Phédon, ὡς
φιλοσοφίας μὲν οὔσης μεγίστης μουσικῆς, « comme
si la philosophie était, ou la musique transcendante, ou la musique par
excellence » En effet, la philosophie est aux moeurs, ce que l'art musical, ou
la musique dans un sens restreint, est aux sons. Elle a pour objet de régler
les actions, de les mettre en tel ordre, en telle concordance, en telle
harmonie, avec les principes de la morale, que le bon et le beau moral, qui sont
les synonymes de la vertu, en résultent. C'est dans ce sens que les Songes de
Socrate lui ordonnaient de s'exercer à la musique. Voyez le Phédon,
vers le commencement.
Paris, le 10 floréal an IX. (30 avril 1801. )
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