Manou

MÂNAVA DHARMA ÇÂSTRA - LOIS DE MANOU

 

TRADUITES DU SANSKRIT PAR G. STREHLY

Oeuvre numérisée et traduite par Marc Szwajcer

LIVRE I

 

INTRODUCTION - LIVRE II

 

 

 

 

 

 

 

MÂNAVA DHARMA ÇÂSTRA

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LOIS DE MANOU

TRADUITES DU SANSKRIT

PAR

G. STREHLY

ANCIEN ÉLÈVE DE L'ÉCOLE NORMALE SUPÉRIEURE

PROFESSEUR AU LYCÉE MONTAIGNE

ERNEST, LEROUX, ÉDITEUR

28, RUE BONAPARTE, 28

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1893

 

LOIS DE MANOU

 

TRADUITES DU SANSKRIT

PAR

G. STREHLY

 

 

 

LIVRE PREMIER

La Création. Résumé des matières contenues dans l'ouvrage.

NOTES EXPLICATIVES

1. Manou était assis, absorbé dans la méditation; les Grands Sages s'approchèrent de lui, et l'ayant dûment salué, lui tinrent ce langage :

2. « Bienheureux ! Daigne nous exposer exactement et par ordre les devoirs de toutes les castes (principales) et des castes intermédiaires.

3. Toi seul en effet, ô Seigneur, tu connais les effets, la vraie nature et le but de cet ordre universel (établi par) l'Être existant de lui-même, inconcevable et insondable. »

4. Ainsi dûment interrogé par eux, Celui dont le pouvoir est sans bornes, après avoir rendu à tous ces Sages magnanimes leurs salutations, répondit : « Écoutez ! »

5. Ce (monde) était obscurité, inconnaissable, sans rien de distinctif, échappant au raisonnement et à la perception, comme complètement dans le sommeil.

6. Alors l'auguste Être existant par lui-même, lui qui n'est pas développé, développant cet (univers) sous la forme des grands éléments et autres, ayant déployé son énergie, parut pour dissiper les ténèbres.

7. Cet (Être) que l'esprit seul peut percevoir, subtil, sans parties distinctes, éternel, renfermant en soi toutes les créatures, incompréhensible, parut spontanément.

8. Voulant tirer de son corps les diverses créatures, il produisit d'abord par la pensée les eaux, et y déposa sa semence.

9. Cette (semence) devint un œuf d'or, aussi brillant que le soleil, dans lequel il naquit lui-même „(sous la forme de) Brahmâ, le père originel de tous les mondes.

10. Les eaux sont appelées Nârâs, car elles sont filles de Nara; comme elles ont été son premier séjour (ayana), il en a pris le nom de Nârâyana.

11. De cette cause (première) indistincte, éternelle, renfermant en soi l'être et le non-être, est issu ce Mâle connu dans le monde sous le nom de Brahmâ.

12. Dans cet œuf le bienheureux demeura toute une année; puis, de lui-même, par l'effort de sa seule pensée, il divisa l'œuf en deux.

13. De ces deux moitiés il fit le ciel et la terre, et entre les deux l'atmosphère, et les huit points cardinaux, et l'éternel séjour des eaux.

14. De lui-même il tira l'Esprit, renfermant en soi l'être et le non-être, et de l'Esprit il tira le sentiment du moi qui a conscience de la personnalité et qui est maître ;

15. Et aussi le grand (principe), l'âme, et tous les (objets) qui possèdent les trois qualités, et successivement les cinq organes des sens qui perçoivent les.choses matérielles.

16. (Prenant) des particules subtiles de ces six (principes) dont le pouvoir est illimité, (et les) combinant avec des éléments (tirés) de lui-même, il en créa tous les êtres.

17. Et parce que ces six (sortes de) particules subtiles (émanées) du corps de Brahmâ entrent (cri) dans ces (créatures), les Sages ont appelé sa forme visible corps (çarîra).

18. C'est ce (corps) que pénètrent les grands éléments avec (leurs) fonctions, ainsi que l'Esprit par (ses) particules subtiles, lui qui perpétuellement crée tous les êtres.

19. Des particules constitutives subtiles de ces sept principes tout-puissants naît ce (monde) périssable (sorti) de l'impérissable.

20. Chacun d'eux acquiert la qualité de celui qui le précède immédiatement et possède, dit-on, un nombre de qualités proportionnel à son rang dans la série.

21. Dans le commencement il régla d'après les paroles du Véda le nom, la fonction et la condition de chaque chose individuellement.

22. Et le Seigneur créa la troupe subtile des dieux doués de vie, dont la nature consiste dans l'action et des Sâdhyas, ainsi que le sacrifice éternel.

23. Du feu, du vent et du soleil, il exprima pour l'accomplissement du sacrifice les trois Védas éternels, appelés le Rig-Véda, le Yadjour-Véda et le Sâma-Véda,

24. Le temps, les divisions du temps, les stations lunaires, les planètes, les fleuves, les mers, les montagnes, les plaines, les lieux accidentés.

25. L'ascétisme, la parole, le plaisir, le désir, la colère ; et dans son désir de donner l'existence à ces êtres, il créa cette création.

26. Mais pour distinguer les actions, il sépara le juste de l'injuste, et donna aux créatures ces conditions opposées deux à deux, telles que le plaisir et la peine, etc.

27. Mais avec les atomes périssables des cinq (éléments) dont on a parlé, tout cet (univers) a été formé dans l'ordre régulier.

28. La fonction à laquelle le Seigneur a attaché chaque (être) à l'origine est aussi celle que cet (être) a spontanément prise au fur et à mesure qu'il était de nouveau créé.

29. Le caractère nuisible ou inofîensif, doux ou cruel, vertueux ou méchant, vrai ou faux, qu'il a assigné à chaque (être) lors de la création, s'est imprimé spontanément en celui-ci (lors des créations subséquentes).

30. De même que dans la succession des saisons celles-ci prennent d'elles-mêmes leurs attributs distinctifs, ainsi (dans la succession des existences) les (êtres) doués d'un corps (prennent) chacun leurs fonctions propres.

31. Mais pour la multiplication des individus il fit sortir de sa bouche, de ses bras, de ses cuisses et de ses pieds le Brahmane, le Kchatriya, le Vaisya et le Soudra.

32. Divisant son propre corps en deux, le Seigneur devint moitié mâle, moitié femelle; dans cette (femelle) il engendra Virâdj.

33. Mais sachez, ô les meilleurs des Dvidjas, que ce mâle Virâdj, après avoir pratiqué les austérités, me créa spontanément, moi le créateur de tout cet (univers).

34. A mon tour, désireux de produire des êtres, après avoir pratiqué de très rudes austérités, je créai d'abord dix Grands Sages seigneurs des créatures,

35. Marîtchi, Atri, Anguiras, Poulastya, Poulaha, Kratou, Pratchétas, Vasichtha, Bhrigou et Nârada.

36. Ceux-ci créèrent sept autres Manous pleins de splendeur, les dieux, les demeures des dieux et les Grands Sages doués d'une puissance illimitée,

37. Les Yakchas, les Râkchasas, les Pisâtchas, les Gandharvas, les Apsarâs, les Asouras, les Nâgas et les Sarpas, les Souparnas et les diverses classes des Mânes.

38. Les éclairs, le tonnerre et les nuages, les arcs-en-ciel incomplets et les arcs-en-ciel complets, les météores, les tourbillons, les comètes et les apparitions lumineuses de toutes sortes,

39. Les Kinnaras, les singes, les poissons, les divers oiseaux, le bétail, les bêtes sauvages, les hommes et les carnassiers pourvus d'une double rangée de dents,

40. Les vermisseaux, les vers, les sauterelles, les poux, mouches et punaises, tous les insectes ailés qui piquent et toutes les espèces d'êtres privés de mouvement.

41. C'est ainsi que, sur mon ordre, ces Sages magnanimes créèrent par la vertu de leurs austérités tout cet ensemble d'êtres animés et inanimés, chacun selon ses actes.

42. Je vais vous dire maintenant quel est l'acte propre assigné ici-bas à chacune des créatures ainsi que leur classement d'après leur mode de naissance.

43. Le bétail, les bêtes sauvages, les carnassiers pourvus d'une double rangée de dents, les Râkchasas, les Pisâtchas et les hommes naissent d'une matrice.

44. Naissent d'un œuf les oiseaux, les serpents, les crocodiles, les poissons, les tortues et autres espèces qui vivent sur terre ou dans l'eau.

45. De l'humidité chaude proviennent les insectes ailés qui piquent, les poux, mouches et punaises ; ils sont engendrés par la chaleur ainsi que tous les autres de même espèce.

46. Toutes les plantes proviennent par germination de graines ou de boutures : (il en est ainsi) des plantes annuelles (qui) périssent avec la maturité de leurs fruits, et portent en abondance fleurs et fruits.

47. Les (végétaux) qui ont des fruits sans avoir de fleurs sont appelés princes des forêts ; ceux qui ont à la fois fleurs et fruits sont appelés arbres.

48. Mais les diverses sortes de broussailles et de buissons, les (diverses) espèces de graminées, les plantes rampantes et grimpantes proviennent aussi de graines ou de boutures.

49. Enveloppées d'une obscurité multiforme en punition de leurs actes (antérieurs), ces (créatures) ont une conscience interne et sont sensibles au plaisir ou à la peine.

50. Telles sont les (diverses) conditions (des êtres), commençant à Brahmâ et aboutissant aux (végétaux), dans cette succession d'existences toujours terrible et perpétuellement changeante.

51. Après avoir ainsi créé tout cet (univers) et moi-même, celui dont le pouvoir est incompréhensible se résorba de nouveau en lui-même, remplaçant une période par une autre.

52. Quand le Divin s'éveille le monde se meut : quand il dort en repos, alors tout (l'univers) sommeille.

53. Or quand il dort en repos, les êtres corporels, dont la nature consiste dans l'action, suspendent leurs fonctions et l'Esprit tombe dans l'inertie.

54. Quand tous en même temps s'absorbent dans cette grande âme, alors cette âme de tous les êtres repose dans une douce quiétude.

55. Mais quand cette (âme) est retournée dans l'obscurité, elle demeure longtemps unie aux organes des sens sans accomplir sa fonction ; alors elle se dépouille de sa forme corporelle.

56. Lorsque, devenant revêtue d'éléments subtils, elle entre dans une semence végétale ou animale, alors unie (à ceux-ci) elle reprend une forme corporelle.

57. Ainsi en s'éveillant et en dormant (tour à tour) l'Éternel anime et détruit perpétuellement toute cette (collection d'êtres) mobiles et immobiles.

58. Après avoir composé ce Livre (des lois) il me l'enseigna lui-même d'abord, selon la règle, et moi je l'ai enseigné (à mon tour) à Maritchi et aux autres Sages.

59. Bhrigou que voici vous récitera ce livre d'un bout à l'autre, car ce Sage l'a appris en entier de moi. »

60. Ainsi interpellé par Manou, Bhrigou le grand Sage, charmé dans son cœur, dit à tous ces Sages : « Écoutez !

61. De ce Manou issu de l'Être existant par lui-même descendent six autres Manous magnanimes et très puissants, qui ont chacun produit des créatures,

62. Svârotchicha, Auttami, Tâmasa, Raivata, le glorieux Tchâkchoucha et le fils de Vivasvat.

63. Ces sept Manous tout-puissants, Svâyambhouva et les autres, ont, chacun pendant sa période, produit et protégé tout ce (monde d'êtres) mobiles et immobiles.

64. Dix-huit niméchas (clins d'œil) font une kâchthâ, trente kâchthâs font une kalâ, trente kalâs font un mouhoûrta, et autant de mouhoûrtas font l'espace d'un jour et d'une nuit.

65. Le soleil marque la division du jour et de la nuit pour les dieux et pour les hommes ; la nuit est pour le sommeil des êtres, le jour pour l'accomplissement de leurs fonctions.

66. Pour les Mânes, un mois (humain) représente un jour et une nuit; et il se divise en deux quinzaines (lunaires) : la (quinzaine) noire est (pour eux) le jour destiné aux actions, et la (quinzaine) blanche la nuit réservée au sommeil.

67. Pour les dieux, une année (humaine) représente une nuit et un jour, et voici quelle en est la division : la marche du soleil vers le Nord fait le'jour, la marche du soleil vers le Sud fait la nuit.

68. Maintenant apprenez en peu de mots quelle est la durée d'une nuit et d'un jour de Brahmâ et de chaque âge du monde, suivant l'ordre :

69. Quatre mille années (divines) forment, dit-on, l'âge Krita : le crépuscule (qui le précède) est d'autant de centaines d'années, et pareillement le crépuscule (qui le suit).

70. Dans les trois autres âges, précédés et suivis chacun d'un crépuscule, il y a une diminution progressive de un sur le chiffre des mille et des cents.

71. Les quatre âges (humains) qui viennent d'être mentionnés, formant un total de douze mille ans, s'appellent un âge des dieux.

72. Mais sachez que mille âges des dieux additionnés ensemble font un jour de Brahmâ, et que sa nuit est d'égale durée.

73. Ceux qui savent que le saint jour de Brahmâ finit avec mille âges (des dieux), et que sa nuit est d'égale durée, ceux-là (seuls) connaissent la (véritable division) des jours et des nuits.

74. A l'expiration de ce jour, et de cette nuit, Lui, qui était endormi, se réveille, et en se réveillant il crée l'Esprit renfermant en soi l'être et le non-être.

75. Poussé par le désir de créer (qui est en Brahmâ), l'Esprit opère la création et produit l'éther auquel on reconnaît la propriété du son.

76. L'éther en se transformant donne naissance à l'air, pur, puissant, véhicule de toutes les odeurs, auquel on attribue la propriété de la tangibilité.

77. Puis l'air en se transformant donne naissance à la lumière brillante, qui éclaire et dissipe les ténèbres : on lui reconnaît la propriété de la couleur.

78. La lumière en se transformant (donne naissance à) l'eau qui a pour propriété la saveur; de l'eau (provient) la terre qui a pour propriété l'odeur : telle est la création à l'origine.

79. Cet âge des dieux, dont il a été parlé plus haut, (soit) douze mille (années divines), multiplié par soixante-onze, est ce qu'on appelle ici-bas une période de Manou.

80. Innombrables (sont) les périodes de Manou, les créations et les destructions (du monde) : comme en se jouant, l'Etre suprême les répète indéfiniment.

81. Dans l'âge Krita, la Justice a quatre pieds et elle est entière, la Vérité aussi; aucun bien pour les hommes ne dérive de l'injustice.

82. Mais dans les autres (âges) par suite du gain (illicite), la Justice est successivement privée d'un pied : par le vol, le mensonge et la fraude, la Justice est graduellement diminuée d'un quart (dans chacun d'eux).

83. (Les hommes), exempts de maladies, obtiennent l'accomplissement de tous leurs vœux, et vivent quatre cents ans dans l'âge Krita : dans l'âge Tretâ et les suivants, leur vie est successivement diminuée d'un quart.

84. La vie des mortels, telle qu'elle est mentionnée dans le Véda, les bénédictions (résultant) des (bonnes) œuvres, et le pouvoir (surnaturel) des êtres corporels, portent en ce monde des fruits en rapport avec les âges.

85. Autres sont les devoirs des hommes dans l'âgé Krita, autres dans l'âge Tretâ et l'âge Dvâpara, autres dans l'âge Kali, en raison de la décroissance de ces âges.

86. Dans l'âge Krita, l'austérité est considérée comme (la vertu) suprême; dans l'âge Tretâ, (c'est) la science (divine); dans l'âge Dvâpara, on dit que c'est le sacrifice, et dans l'âge Kali, la libéralité seule.

87. Pour la conservation de toute cette création, le Très Resplendissant assigna des occupations distinctes aux (êtres) sortis de sa bouche, de ses bras, de ses cuisses et de ses pieds.

88. Aux Brahmanes il assigna renseignement et l'étude (du Véda), (le droit) de sacrifier et de diriger le sacrifice d'autrui, de donner et de recevoir (les aumônes);

89. Aux Kchatriyas il assigna la protection des peuples, le don (des aumônes), le sacrifice, l'étude (du Véda) et le détachement des plaisirs sensuels;

90. Aux Vaisyas (il assigna) la garde des troupeaux, le don (des aumônes), le sacrifice, l'étude (du Véda), le commerce, le prêt d'argent et l'agriculture.

91. Mais le seul devoir que le Seigneur ait imposé aux Soudras, c'est de servir humblement ces (trois autres) castes.

92. L'homme est déclaré plus pur (dans les parties situées) au-dessus du nombril : voilà pourquoi l'Être existant par lui-même a dit que sa bouche est ce qu'il y a de plus pur en lui.

93. Parce qu'il est sorti delà partie supérieure (de Brahmâ), parce qu'il est l'aîné, et parce qu'il possède le Véda, le Brahmane est de droit seigneur de toute cette création.

94. Car c'est lui que l'Être existant par lui-même, après s'être livré aux austérités, créa d'abord de sa propre bouche, pour faire parvenir les offrandes aux Dieux et aux Mânes et pour (assurer) la conservation de tout cet (univers).

95. Quel être serait supérieur à celui par la bouche duquel les habitants des cieux et les Mânes consomment sans cesse les offrandes destinées aux uns et aux autres?

96. Parmi les êtres, on considère comme supérieurs ceux qui sont animés, parmi les (êtres) animés, ceux qui subsistent par l'intelligence, parmi les intelligents les hommes, parmi les hommes les Brahmanes,

97. Parmi les Brahmanes ceux qui sont instruits (dans le Véda), parmi ceux qui sont instruits, ceux qui connaissent leur devoir, parmi ceux qui connaissent leur devoir, ceux qui l'accomplissent, parmi ceux qui l'accomplissent, ceux qui annoncent la Sainte-Écriture.

98. La naissance même du Brahmane est une éternelle incarnation de la Loi sacrée : car il est né pour (l'accomplissement de) la Loi sacrée et il est destiné à l'absorption en Brahme.

99. Car un Brahmane en naissant naît au premier rang sur cette terre, seigneur de toutes les créatures, (préposé) à la garde du trésor de la Loi sacrée.

100. Tout ce qui existe dans le monde est la propriété du Brahmane : en effet par l'excellence de son origine il a droit à tout.

101. C'est de son propre (bien) que le Brahmane se nourrit, s'habille et fait l'aumône : c'est par la générosité du Brahmane que les autres hommes subsistent.

102. Pour déterminer les devoirs du Brahmane et ceux des autres (castes) suivant leur ordre, le sage Manou, issu de l'Être existant par lui-même, composa ce livre.

103. Un Brahmane instruit doit l'étudier avec soin et l'enseigner exactement à ses disciples, mais nul autre (n'a ce droit).

104. Un Brahmane qui étudie ce livre et qui est fidèle à ses vœux, n'est jamais souillé d'aucun péché en pensée, en parole ou en action.

105. Il sanctifie l'assemblée (où il se trouve), sept de ses ancêtres et sept de ses descendants et mérite seul (la possession de) toute la terre.

106. Ce (livre) est une excellente (source de) bénédictions, il accroît l'intelligence, il donne gloire et longue vie, il (assure) la délivrance suprême.

107. Dans ce (livre) est exposée en entier la Loi, ainsi que le bien et le mal des actions, et la règle éternelle de conduite des quatre castes.

108. La règle de conduite est la loi suprême, (elle est) enseignée par la Révélation et ia Tradition: aussi un Dvidja qui désire le bien de son âme doit-il toujours y être attentif.

109. Un Brahmane qui s'écarte de la règle de conduite ne recueille pas le fruit du Véda; mais celui qui observe la règle de conduite, obtient une récolte complète.

110. Ainsi les Sages, voyant que la Loi dérive de la règle de conduite, ont pris la règle de conduite pour base principale de toute austérité.

111. L'origine du monde, la règle des Sacrements, l'observance des vœux, la conduite (du disciple envers le maître) et l'excellente prescription du bain,

112. Le choix d'une épouse, la description (des diverses sortes) de mariages, le rituel des (cinq) grands sacrifices et les rites éternels des sacrifices funéraires,

113. La description des (divers) moyens d'existence, les devoirs du Snâtaka, les aliments permis et défendus, la purification des personnes et celle des objets,

114. Les règlements concernant les femmes, la condition d'ascète, (les moyens d'arriver à) la délivrance finale, le renoncement au monde, tous les devoirs d'un roi, la décision des procès,

115. La règle pour interroger les témoins, les devoirs du mari et de la femme, la loi de partage (des successions), (les lois sur) le jeu et l'éloignement des êtres nuisibles,

116. (Les règlements concernant) la conduite des Vaisyas et des Soudras, l'origine des castes mixtes, la loi pour toutes les castes en cas de calamité, et la règle des pénitences,

117. Les trois sortes de transmigrations, résultant des actions (bonnes ou mauvaises), (les moyens d'arriver à) la délivrance finale "et l'examen du bien et du mal dans les actions,

118. Les lois éternelles des (diverses) contrées, des castes, des familles, les lois des hérétiques et (celles) des associations (de marchands ou autres), (voilà ce que) Manou a exposé dans ce livre.

119. Comme Manou jadis, à ma demande, a exposé le contenu de ce livre, à votre tour maintenant apprenez-le de moi-même.

1. Manou : ce nom désigne quatorze ancêtres mythologiques de l'humanité, dont chacun gouverne la terre pendant une période de 308.720.000 ans, dite Manvantara (un âge de Manou). Le plus ancien de ces Manous est Svàyambhuva issu de Svayambhû (l'être existant par lui-même). C'est à ce premier de tous les Manous qu'est attribué le Livre des Lois. — Absorbé dans la méditation : mot à mot « ayant une seule fin », qui est l'identité du moi avec l'âme suprême. — Les Grands Sages : le nom de rshi (sage) désigne les personnages inspirés auxquels les hymnes védiques ont été révélés. Il y en a plusieurs classes parmi lesquels on distingue les Grands Sages ou Maharshis au nombre de sept. — Dûment : on peut aussi rattacher cet adverbe au verbe suivant. — Avant ce premier verset, certains manuscrits en insèrent un autre dont voici le sens : « Ayant adoré le Brahme existant par lui-même, dont le pouvoir est sans bornes, je vais dire les diverses lois éternelles promulguées par Manou. » J'emploie la forme Brahme pour traduire brahman, mot neutre qui désigne le dieu suprême impersonnel, l'absolu, et Brahmâpour traduire brahman, mot masculin qui désigne le créateur de l'univers.

2. Les castes principales : c'est-à-dire Brahmanes, Kchatriyas, Vaisyas et Soudras. Les castes intermédiaires sont celles qui sont issues du mélange des autres. Les trois premières castes sont appelées doija, deux fois nées, c'est-à-dire régénérées par le sacrement de l'initiation. Cette qualification désigne quelquefois plus particulièrement la caste brahmanique.

3. On peut aussi faire de Svayambhuvah un adjectif se rapportant à vidhânasya : le sens est alors « ce système universel existant par lui-même ». C'est ainsi que traduit Loiseleur. [Je désignerai par L. la traduction de Loiseleur, par B. celle de Bühler et par B. H. celle de Burnell et Hopkins; par Kull. le commentaire de Kullüka.] L'Être existant par lui-même: c'est-à-dire Brahmâ.

4. L'adverbe dûment peut aussi être rapporté au verbe qui signifie vénérer.

5. Tamobhutam : « consistant en ténèbres ». Les commentateurs s'accordent à expliquer tamas par mùlaprakrti, la nature comme cause primordiale de tout ce qui est, conformément au système Sankhya. Ce dernier représente une des six écoles philosophiques de l'Inde et a été fondé par le sage Kapila. Sur les doctrines philosophiques des Hindous, consulter les Essais de Colebrooke.

6. On peut aussi réunir mahâbhûtàdi à vrttaujàh et en faire un seul composé de dépendance : le sens serait alors : « Ayant déployé son énergie sur les grands éléments et les autres (principes) » — par « grands éléments » il faut entendre les cinq suivants : terre, eau, feu, air, éther.

7. Parut « sous la forme du monde sensible ». Svayam udbabhau (que L. traduit par « déploya sa propre splendeur ») semble un jeu de mots étymologique pour expliquer Svayambhû, par une confusion volontaire des racines bhâ briller et bhù être.

8. Par la pensée, c'est-à-dire « rien qu'en le voulant ». — On peut aussi entendre abhidhyàya par « après avoir médité ». L. traduit : « Ayant résolu dans sa pensée de faire émaner, etc. ». — Sa semence ou bien d'une façon plus générale « une semence, un germe ».

9. Lui-même ou encore « spontanément ». Svayam fait allusion au nom de Svayambhû dont Brahmâ est l'incarnation première. On peut aussi traduire « dans lequel naquit spontanément Brahmâ ». — Tous les mondes ou suivant L. « tous les êtres ».

10. Explication par un jeu de mots du nom de Nârâyana (qui a pour séjour les eaux). Nara, l'homme, désigne ici l'homme par excellence, le prototype de l'humanité, Brahmâ. Dans les anciennes légendes théogoniques connues sous le nom de Purânas, ce surnom désigne ordinairement Vichnou.

11. Ce mâle, Purusha : allusion à l'hymne Purusha attribué à Nârâyana, Rig Véda, 10, 90. — Suivant les commentateurs, la cause première c'est l'Ame suprême, le Paramâtman.

12. Le bienheureux : terme de vénération d'un emploi fort général : il s'applique non seulement aux divinités telles que Vichnou, etc., mais aussi à des mortels ayant un caractère de sainteté. Suivant Kull. il faut entendre ici par le mot année une année de Brahmâ. Sur la durée de celle-ci cf. le v. 72 du même livre.

13. Les huit points cardinaux: c'est-à-dire les quatre principaux, N., E., S., O., et les quatre intermédiaires N.-E., S.-E., N.-O., S.-O.

14. De lui-même: toujours le double sens de âtman qui est à la fois un substantif signifiant « l'âme, le moi » et un pronom réfléchi, ipse. L. traduit ici par l'âme suprême (?) — L'épithète de sadasadâtmakam, déjà employée au v. 11 est obscure ; suivant B. « qui est à la fois réel et non réel ». B. H. « qui est et qui n'est pas ». L. « qui existe par sa nature et n'existe pas (pour les sens) ». — Abhimantar est traduit dans le Dictionnaire de Saint-Pétersbourg par « celui qui désire ». B. H. traduit « gouverneur ». L. « moniteur ».

15. Le grand principe, le mahat est appelé aussi l'intelligence (buddhi). Du reste on pourrait rapporter mahàntam à âtmânam, « le grand âtman ». Suivant Kull. le mahat est appelé l'âme « parce qu'il est produit par l'âme ou bien parce qu'il rend service à l'âme ». — Les trois qualités sont celles qui sont ênumérées au livre XII, v. 24: sattva, la bonté, rajas la passion, et tamas l'obscurité.

16. Ces six principes sont, suivant Kull., l'ahankâra ou sentiment du moi et les cinq tanmâtra ou éléments subtils qui produisent en se transformant les éléments plus grossiers, tels que l'éther, l'air, le feu, l'eau et la terre. Peut-être, comme le remarque B. H., ces six principes sont-ils tout simplement le manas ou sens interne combiné aux cinq grands éléments.

17. Jeu de mots étymologique sans aucune valeur, comme tous ceux qui émaillent le texte de Manou : çri et çarîra n'ont aucun rapport. — La forme visible mûrti. Je traduis par cette périphrase à défaut d'un synonyme de corps. B. H. traduit : « Comme les éléments subtils des formes corporelles de cet un dépendent de ces six, les sages... etc. ». L. : « Et parce que ces six molécules imperceptibles émanées de la substance de cet Être suprême, pour prendre une forme, se joignent à ces éléments et à ces organes des sens ».

18. Les grands éléments ou tout bonnement « les éléments ».

19. Les sept principes : le texte porte purusha « mâle ou esprit », c'est-à-dire ici principe créateur. Ces sept purusha sont d'après le commentaire: le manas ou sens interne, l'ahaùkâra ou sentiment du moi et les cinq tanmâtra ou éléments subtils, cf. v. 16.

20. Chacun d'eux : c'est-à-dire « de ces éléments »; ce vers signifie que dans la série des éléments, le premier a une qualité, le second la même qualité plus une autre, etc. Ainsi l'éther n'a qu'une qualité, le son; l'air a deux qualités, le son et la tangibilité; le feu en a trois, son, tangibilité, couleur; l'eau en a quatre, son, tangibilité, couleur, saveur; la terre enfin, les quatre précédentes, plus l'odeur.

22. Subtile, c'est-à-dire « qu'on ne peut percevoir parles sens, invisible ». — Karmâtmanâm, expression obscure. Peut-être faut-il prendre karman au sens de sacrifice, ainsi que le remarque B.; le composé signifierait alors « dont la nature est le sacrifice », ou « dont la divinité dépend de l'accomplissement du sacrifice, qui ne subsistent que par le sacrifice ». — Les Sâdhyas sont une classe de divinités inférieures ; ils personnifient les rites et prières des Védas et habitent avec les dieux ou dans la région intermédiaire entre le ciel et la terre. Leur nombre varie suivant les autorités : il est de douze ou de dix-sept.

23. Il exprima : dudoha signifie littéralement « traire ». — Les trois Védas; il y en a un quatrième qui n'est pas mentionné ici, l'Atharva-Véda ; ce dernier est d'origine plus récente. On voit que les Védas sont des espèces d'entités divines. Suivant un autre mythe, ils sont éternels et sortis de la bouche de Brahmâ à chacun des âges successifs (kalpa) de la création.

26. Le juste et l'injuste: dharma, adharma, ou si on préfère, le devoir et le non-devoir, la vertu et le vice. — La plaisir et la peine, etc. rémunération complète comporterait encore l'amour et la haine, la faim et la soif, le froid et le chaud, et ainsi de suite.

27. Périssables. Suivant Kull. cette épithète fait allusion à la transformation des éléments subtils (tanmàtra) en éléments grossiers ou grands éléments (mahàbhûta) : c'est à cause de ce changement qu'ils sont appelés périssables.

30. Doués d'un corps (dehin), c'est-à-dire les créatures animées ; — les fonctions (karman), c'est-à-dire que chacun accomplit les actes ou les fonctions qui conviennent spécialement à la forme sous laquelle il renaît.

31. La multiplication des individus : c'est-à-dire » pour propager l'espèce humaine », à moins qu'il ne faille entendre avec B. « pour la prospérité des mondes ». — La subordination des castes hindoues a pour fondement cette provenance des diverses parties du corps de Brahmâ.

32. Moitié mâle : c'est-à-dire qu'une des moitiés du corps devint un mâle, l'autre moitié une femelle.

36. Devanikâyân : B. entend par là les « classes des dieux ». On pourrait aussi en faire un composé possessif : « ceux qui ont leur demeure parmi les dieux. » — Les sept Manous. Les Manous, c'est-à-dire les créateurs successifs dans les divers manvantaras sont au nombre de quatorze, et celui qui règne actuellement est le septième. Sur la période dite Manvantara, cf. v. 79.

37. Yakchas, sortes de génies au service du dieu des richesses Kouvera. Les Râkchasas et les Pisâtchas sont des démons qui hantent les cimetières, troublent les sacrifices, tourmentent les ermites et se repaissent de chair humaine. Les Gandharvas sont les musiciens célestes. Les Apsarâs sont les nymphes du paradis d'Indra, leur nom qui signifie « qui se meut dans les eaux » rappelle le mythe grec d'Aphrodite. D'après le Râmâyana et les Pourânas, elles sortirent de la mer que les dieux et les démons barattaient pour obtenir l'ambroisie ; elles jouent souvent le rôle de tentatrices auprès des ascètes que leurs austérités ont rendus redoutables aux dieux mêmes. Les Asouras sont les démons ennemis des dieux, comparables aux Titans des Grecs. Les Nâgas et les Sarpas sont des demi-dieux ayant la face d'un homme, la coiffe et le corps d'un serpent, qui peuplent la région infernale appelée Pâtâla. Leur roi est Vasouki. Les Souparnas, sortes d'oiseaux mythiques dont le chef est Garouda. Les Mânes ou Pitris sont les ancêtres des dieux, des génies et du genre humain (cf. III, 192). mais ce nom désigne aussi les ancêtres décédés (les Mânes des Latins) auxquels on offre des sacrifices funéraires consistant en boulettes de riz et libations d'eau.

38. Rohitendradhanûnshi : les commentateurs voient dans ce mot un composé copulatif et distinguent deux sortes d'arc-en-ciel. Rien n'empêcherait d'ailleurs de prendre rohita comme une épithète de remplissage appliquée à l'arc-en-ciel et de traduire simplement par « les arcs-en-ciel ».

39. Les Kinnaras sont des musiciens célestes habitant le paradis de Kouvera : ils sont représentés avec un corps d'homme surmonté d'une tête de cheval.

41. Yathâkarma veut dire, suivant le commentaire de Medhâtithi, « conformément à ses actes dans une autre existence ». C'est en vertu de ses actes antérieurs que tel ou tel être naît parmi les dieux, les hommes ou les animaux. On pourrait aussi entendre cette expression dans un autre sens : « ayant telle ou telle forme selon l'œuvre à laquelle ils sont destinés ».

44. La distinction entre les animaux nés d'une matrice et ceux nés d'un œuf est purement superficielle, puisque « omne animal nascitur ex ovo ». D'une manière générale on peut remarquer que toute cette classification naturelle est sans valeur scientifique.

46. Au lieu de taravah du texte de Jolly, L. a adopté la leçon sthàvarâh « les corps privés de mouvement ». Boutures, proprement tiges (kàrida) mises, en terre pour repousser, opposées aux graines (bîja).

47. Distinction entre vanaspati et vrksha : tels par exemple le sapin opposé au pommier. — Ubhayatah, littéralement « des deux côtés », par suite « à la fois », sens autorisé par le commentaire. B. H. traduit : « ceux qui ont des fleurs et aussi ceux qui portent des fruits (sont) tous deux appelés arbres », et L. « soit qu'ils portent aussi des fleurs ou seulement des fruits, ils reçoivent le nom d'arbres sous ces deux formes. »

48. Guccha, gulma : distinction encore plus artificielle que la précédente. Le désaccord des commentateurs entre eux justifie le vague de ma traduction « buissons et broussailles ». Peut-être l'auteur en employant deux termes synonymes, a-t-il voulu simplement désigner toute espèce de broussailles. Je ne saisis pas bien la nuance marquée par L. « les arbrisseaux croissant soit en buisson soit en touffe ». B. H. « les plantes à une tige et à plusieurs tiges ». Suivant Medhâtithi, il s'agit « de plantes à une ou plusieurs racines ». B. traduit : « les plantes à plusieurs tiges croissant d'une ou plusieurs racines ».

49. Ces créatures : suivant B. le démonstratif ete désigne seulement les plantes : mais je crois qu'il vaut mieux l'entendre des plantes et des animaux. — Multiforme : l'explication de ce terme se trouve au livre XII, v. 42 sqq. Les existences inférieures sont le produit de l'obscurité, une des trois qualités fondamentales de la matière, et cette obscurité se manifeste sous plusieurs formes.

51. En lui-même : Je ne puis admettre le sens de L. « absorbé dans l'Ame suprême ». — Une période par une autre : c'est-à-dire la période de création srshtikâla par la période de destruction pralayakâla.

52. Sommeille : nimîlati signifie littéralement « ferme les yeux ». L. traduit, « se dissout ».

55. Obscurité: Voici en quels termes Kull. commente ce vers : « Entrant dans l'obscurité (c'est-à-dire) la cessation de la connaissance, pendant longtemps elle reste unie aux organes des sens, mais sans accomplir ses fonctions propres, telles que l'expiration et l'inspiration (de l'air) et autres : alors elle sort de sa forme corporelle (c'est-à-dire) de son premier corps pour aller dans un autre. »

56. Revêtue d'éléments subtils : anumàtrika. Suivant Sananda cité par Kull. ces éléments subtils consistent dans le puryashtaka, mot qui désigne les huit parties constituantes, à savoir bhûta, les principes élémentaires, indriya les organes des sens, manas l'esprit ou sens interne, buddhi l'intelligence, vâsanâ les idées, karma les actes, vàyu le souffle vital, avidyà l'ignorance.

62. Vivasvat est le nom du Soleil : le septième Manou est appelé vaivas. vata, c'est-à-dire « fils du Soleil ».

63. Cette période est ce qu'on appelle un manvantara ou âge de Manou.

65. Pour les dieux et pour les hommes : mot à mot : « le jour et la nuit divins et humains ».

66. Le mois lunaire des Hindous est divisé en deux quinzaines (paksha, littér. aile) : la quinzaine blanche finit avec le jour de la pleine lune, et la quinzaine noire avec le jour de la nouvelle lune.

68. Les âges du monde (yuga) sont au nombre de quatre, krta, tretâ, dvâpara, kali, et correspondent aux quatre âges de la mythologie classique.

69. Dit-on : on représente l'autorité des Sages qui ont révélé la loi. — Autant de centaines, c'est-à-dire quatre.

72. Voici en chiffres le tableau comparatif de ces diverses durées :

Age krta : 400 + 4.000 + 400 = 4.800 ans.

Age tretâ : 300 + 3.000 + 300 = 3.600 ans.

Age dvâpara : 200 + 2.000 + 200 = 2.400 ans.

Age kali : 100 + 1.000 + 100 = 1.200 ans.

12.000 ans.

Ces 12.000 années divines représentent 4.320.000 années humaines, puisque l'année humaine est 1/360e de l'année divine. Un jour de Brahmâ se compose donc de 4.320.000.000 d'années humaines au bout desquelles commence la nuit de Brahmâ, c'est-à-dire la dissolution (pralaya) du monde.

74. Suivant Kull. manas peut s'entendre ici de deux manières : ou bien Brahmâ fait émaner son propre esprit (svîyam nianah srjati) et l'applique à la création du monde ; ce manas n'avait pas cessé d'exister (anashta) pendant la destruction intermédiaire du monde (avântara pralaya) ; — ou bien le mot manas désigne le grand principe intellectuel, le mahat.

75. On comme au v. 69 désigne les Sages.

81. Quatre pieds : il est dit au livre VIII, v. 16, que la Justice, Dharma, est un taureau. Ces quatre pieds sont une allégorie : ils désignent suivant le commentaire, soit les quatre vertus fondamentales (tapojûânayajnadânam) : austérité, science, sacrifice et libéralité, ou bien les quatre castes.

82. D'un quart : pàda signifie à la fois pied et quart. Le mot dharma signifie tout ensemble la justice, le devoir, la loi sacrée, la vertu, les mérites spirituels : nous n'avons pas d'équivalent en français.

84. Mentionnée dans le Véda, veut dire suivant Kull. « une vie de cent années ». — Des œuvres, c'est-à-dire l'accomplissement des sacrifices. — En rapport avec les âges, veut dire que ces fruits sont soumis à une décadence graduelle comme les âges du monde eux-mêmes.

89. Au lieu de samâdiçat « il assigna », une autre leçon porte samâsatah « en un mot. »

91. Humblement, sans murmurer. L. « sans déprécier leur mérite. »

95. Les offrandes destinées aux dieux s'appellent havya, celles destinées aux Mâneskavya : les deux mots sont souvent liés ensemble. — Par la bouche duquel : quand le prêtre sacrificateur mange le beurre clarifié de l'offrande aux dieux, ces derniers sont censés le manger par sa bouche.

97. Qui connaissent leur devoir : krlabuddhayah signifie proprement « qui ont pris une ferme résolution » (Dictionnaire de Saint-Pétersbourg) ; mais le commentaire autorise l'interprétation que nous avons suivie. — Ceux qui annoncent la Sainte-Ecriture, traduit brahmavâdinah (texte de Jolly) : mais il y a une autre leçon qui porte vedinah, suivie par B. et B. H. « ceux qui connaissent le Véda. » L. traduit : « ceux que l'étude des livres saints conduit à la béatitude. »

98. L'absorption en Brahme ou délivrance finale (moksha) est le but suprême où l'âme arrive après une série de transmigrations : le suicide religieux usité dans l'Inde a pour but de hâter cette délivrance.

100. Il a droit à tout : Kull. ajoute « sarvagrahanayogyo bhavati », il est autorisé à tout prendre, — ce qui semble impliquer que le vol n'existe pas pour le Brahmane.

104. Samçitavratah est traduit.par B. « qui accomplit fidèlement les devoirs (prescrits en ce livre). » Mais le sens ordinaire de vrata est « vœu religieux ». Il faut lire, je crois, samçita de la racine çâ + sam et non çamsita de la racine çams (leçon adoptée par Jolly).

105. La pensée contenue dans ce vers est développée au livre III, v. 183 sqq. De même que la présence de certaines personnes est une souillure pour une assemblée, ainsi celle d'un Brahmane instruit efface la souillure contractée par l'admission de personnes indignes. — Par assemblée il faut entendre une réunion de gens à l'occasion d'une solennité, d'un repas funéraire, d'un sacrifice.

106. On peut rapporter excellent à livre.

107. Le bien et le mal des actions : Kull. explique ainsi : « Le fruit bon ou mauvais des actions suivant qu'elles sont permises ou défendues. » Pour les Hindous, la récompense des actions est inséparable de leur caractère moral.

108. La règle de conduite (âcâra) comprend un ensemble d'usages et de pratiques, tels que rincement de la bouche, onctions avec du beurre, etc., dont il sera question plus loin. — Au livre II, v. 10, ces termes de Révélation et de Tradition sont expliqués : la Çruti c'est le Véda, la Smrti c'est le Code des Lois. — Àtmavân « qui désire le bien de son âme ». cette traduction est justifiée par le commentaire « àtmahitecchuh ».

111. L'élève en théologie contracte des vœux, est astreint à certains devoirs envers le maître spirituel, et son temps d'études terminé, prend un bain religieux après lequel il est dit snâtaka (qui s'est baigné).

115. L. traduit : « Les statuts qui concernent le témoignage et l'enquête ». Mais c'est plus naturel, comme le fait d'ailleurs le commentaire, de considérer sâkshipraçna comme un composé de dépendance. — Êtres nuisibles : littér. « les épines » ; « l'éloignement des épines » est une métaphore pour dire « le châtiment des criminels ».

117. Les trois sortes de transmigrations sont expliquées tout au long dans le livre XII : après la mort, les âmes suivant les qualités dont elles sont douées (bonté, passion, obscurité), passent dans une existence supérieure, intermédiaire ou inférieure.

118. Cette énumération du v. 111 au v. 119 forme un sommaire des questions traitées dans l'ouvrage de Manou. Elle eût été mieux placée au début même du livre.

 

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