Aristote : Topiques

ARISTOTE

LOGIQUE. TOME QUATRE

TOPIQUES : LIVRE III : SUITE DES LIEUX COMMUNS DE L'ACCIDENT.

Traduction française : BARTHÉLEMY SAINT-HILAIRE.

LIVRE II - LIVRE IV

 

 

 

TOPIQUES.

LIVRE TROISIÈME.

SUITE DES LIEUX COMMUNS DE L'ACCIDENT.

 

 

 

 

TOPIQUES.

LIVRE TROISIÈME.

SUITE DES LIEUX COMMUNS DE L'ACCIDENT.

CHAPITRE PREMIER.

Dix-huit lieux tirés delà supériorité d'un accident sur un autre.

 [116b] § 1. Πότερον δ´ αἱρετώτερον ἢ βέλτιον δυεῖν ἢ πλειόνων, ἐκ τῶνδε σκεπτέον.

§ 2. Πρῶτον δὲ διωρίσθω ὅτι τὴν σκέψιν ποιούμεθα οὐχ ὑπὲρ τῶν πολὺ διεστώτων καὶ μεγάλην πρὸς ἄλληλα διαφορὰν ἐχόντων (οὐδεὶς γὰρ ἀπορεῖ πότερον ἡ εὐδαιμονία ἢ ὁ πλοῦτος αἱρετώτερον), ἀλλ´ ὑπὲρ τῶν σύνεγγυς, καὶ περὶ ὧν ἀμφισβητοῦμεν ποτέρῳ δεῖ προσθέσθαι μᾶλλον, διὰ τὸ μηδεμίαν ὁρᾶν τοῦ ἑτέρου πρὸς τὸ ἕτερον ὑπεροχήν. Δῆλον οὖν ἐπὶ τῶν τοιούτων ὅτι δειχθείσης ὑπεροχῆς ἢ μιᾶς ἢ πλειόνων συγκαταθήσεται ἡ διάνοια ὅτι τοῦτ´ ἐστὶν αἱρετώτερον, ὁπότερον τυγχάνει αὐτῶν ὑπερέχον.

§ 3. Πρῶτον μὲν οὖν τὸ πολυχρονιώτερον ἢ βεβαιότερον αἱρετώτερον τοῦ ἧττον τοιούτου. §  4. Καὶ ὃ μᾶλλον ἂν ἕλοιτο ὁ φρόνιμος ἢ ὁ ἀγαθὸς ἀνὴρ ἢ ὁ νόμος ὁ ὀρθὸς ἢ οἱ σπουδαῖοι περὶ ἕκαστα αἱρούμενοι ᾗ τοιοῦτοί εἰσιν ἢ οἱ ἐν ἑκάστῳ γένει ἐπιστήμονες, ἢ οἱ πλείους ἢ πάντες, οἷον ἐν ἰατρικῇ ἢ τεκτονικῇ ἃ οἱ πλείους τῶν ἰατρῶν ἢ πάντες, ἢ ὅσα ὅλως οἱ πλείους ἢ πάντες ἢ πάντα, οἷον τἀγαθόν· πάντα γὰρ τἀγαθοῦ ἐφίεται. Δεῖ δ´ ἄγειν πρὸς ὅ τι ἂν ᾖ χρήσιμον τὸ ῥηθησόμενον. Ἔστι δ´ ἁπλῶς μὲν βέλτιον καὶ αἱρετώτερον τὸ κατὰ τὴν βελτίω ἐπιστήμην, τινὶ δὲ τὸ κατὰ τὴν οἰκείαν.

§ 5. Ἔπειτα δὲ τὸ ὅπερ τόδε τι τοῦ μὴ ἐν γένει, οἷον ἡ δικαιοσύνη τοῦ δικαίου· τὸ μὲν γὰρ ἐν γένει τῷ ἀγαθῷ, τὸ δ´ οὔ, καὶ τὸ μὲν ὅπερ ἀγαθόν, τὸ δ´ οὔ. Οὐδὲν γὰρ λέγεται ὅπερ τὸ γένος ὃ μὴ τυγχάνει ἐν τῷ γένει ὄν· οἷον ὁ λευκὸς ἄνθρωπος οὐκ ἔστιν ὅπερ χρῶμα. Ὁμοίως δὲ καὶ ἐπὶ τῶν ἄλλων.

§ 6. Καὶ τὸ δι´ αὑτὸ αἱρετὸν τοῦ δι´ ἕτερον αἱρετοῦ αἱρετώτερον, οἷον τὸ ὑγιαίνειν τοῦ γυμνάζεσθαι· τὸ μὲν γὰρ δι´ αὑτὸ αἱρετόν, τὸ δὲ δι´ ἕτερον. Καὶ τὸ καθ´ αὑτὸ τοῦ κατὰ συμβεβηκός, οἷον τὸ τοὺς φίλους δικαίους εἶναι τοῦ τοὺς ἐχθρούς. Τὸ μὲν γὰρ καθ´ αὑτὸ αἱρετόν, τὸ δὲ κατὰ συμβεβηκός· τὸ γὰρ τοὺς ἐχθροὺς δικαίους εἶναι κατὰ συμβεβηκὸς αἱρούμεθα, ὅπως μηδὲν ἡμᾶς βλάπτωσιν. Ἔστι δὲ τοῦτο ταὐτὸ τῷ πρὸ αὐτοῦ, διαφέρει δὲ τῷ τρόπῳ· τὸ μὲν γὰρ τοὺς φίλους δικαίους εἶναι δι´ αὑτὸ αἱρούμεθα, καὶ εἰ μηδὲν ἡμῖν μέλλει ἔσεσθαι, κἂν ἐν Ἰνδοῖς ὦσιν· τὸ δὲ τοὺς ἐχθροὺς δι´ ἕτερον, ὅπως μηθὲν ἡμᾶς βλάπτωσιν.

[117a] § 8 Καὶ τὸ αἴτιον ἀγαθοῦ καθ´ αὑτὸ τοῦ κατὰ συμβεβηκὸς αἰτίου, καθάπερ ἡ ἀρετὴ τῆς τύχης (ἡ μὲν γὰρ καθ´ αὑτήν, ἡ δὲ κατὰ συμβεβηκός, αἰτία τῶν ἀγαθῶν) καὶ εἴ τι ἄλλο τοιοῦτον. Ὁμοίως δὲ καὶ ἐπὶ τοῦ ἐναντίου· τὸ γὰρ καθ´ αὑτὸ κακοῦ αἴτιον φευκτότερον τοῦ κατὰ συμβεβηκός, οἷον ἡ κακία καὶ ἡ τύχη· τὸ μὲν γὰρ καθ´ αὑτὸ κακόν, ἡ δὲ τύχη κατὰ συμβεβηκός.

§ 9. Καὶ τὸ ἁπλῶς ἀγαθὸν τοῦ τινὶ αἱρετώτερον, οἷον τὸ ὑγιάζεσθαι τοῦ τέμνεσθαι· τὸ μὲν γὰρ ἁπλῶς ἀγαθόν, τὸ δὲ τινί, τῷ δεομένῳ τομῆς. § 10. Καὶ τὸ φύσει τοῦ μὴ φύσει, οἷον ἡ δικαιοσύνη τοῦ δικαίου· τὸ μὲν γὰρ φύσει, τὸ δ´ ἐπίκτητον. § 11. Καὶ τὸ τῷ βελτίονι καὶ τιμιωτέρῳ ὑπάρχον αἱρετώτερον, οἷον θεῷ ἢ ἀνθρώπῳ, καὶ ψυχῇ ἢ σώματι. § 12. Καὶ τὸ τοῦ βελτίονος ἴδιον βέλτιον ἢ τὸ τοῦ χείρονος, οἷον τὸ τοῦ θεοῦ ἢ τὸ τοῦ ἀνθρώπου· κατὰ μὲν γὰρ τὰ κοινὰ ἐν ἀμφοτέροις οὐδὲν διαφέρει ἀλλήλων, τοῖς δ´ ἰδίοις τὸ ἕτερον τοῦ ἑτέρου ὑπερέχει. § 13. Καὶ τὸ ἐν βελτίοσιν ἢ προτέροις ἢ τιμιωτέροις βέλτιον, οἷον ὑγίεια ἰσχύος καὶ κάλλους· ἡ μὲν γὰρ ἐν ὑγροῖς καὶ ξηροῖς καὶ θερμοῖς καὶ ψυχροῖς, ἁπλῶς δ´ εἰπεῖν ἐξ ὧν πρώτων συνέστηκε τὸ ζῷον, τὰ δ´ ἐν τοῖς ὑστέροις. Ἡ μὲν γὰρ ἰσχὺς ἐν τοῖς νεύροις καὶ ὀστοῖς, τὸ δὲ κάλλος τῶν μελῶν τις συμμετρία δοκεῖ εἶναι. § 14. Καὶ τὸ τέλος τῶν πρὸς τὸ τέλος αἱρετώτερον δοκεῖ εἶναι, § 15. καὶ δυοῖν τὸ ἔγγιον τοῦ τέλους. § 16. Καὶ ὅλως τὸ πρὸς τὸ τοῦ βίου τέλος αἱρετώτερον μᾶλλον ἢ τὸ πρὸς ἄλλο τι, οἷον τὸ πρὸς εὐδαιμονίαν συντεῖνον ἢ τὸ πρὸς φρόνησιν. § 17. Καὶ τὸ δυνατὸν τοῦ ἀδυνάτου. § 18. Ἔτι δύο ποιητικῶν οὗ τὸ τέλος βέλτιον· § 19. ποιητικοῦ δὲ καὶ τέλους ἐκ τοῦ ἀνάλογον, ὅταν πλείονι ὑπερέχῃ τὸ τέλος τοῦ τέλους ἢ ἐκεῖνο τοῦ οἰκείου ποιητικοῦ, οἷον εἰ ἡ εὐδαιμονία πλείονι ὑπερέχει ὑγιείας ἢ ὑγίεια ὑγιεινοῦ, τὸ ποιητικὸν εὐδαιμονίας βέλτιον ὑγιείας. Ὅσῳ γὰρ ἡ εὐδαιμονία ὑγιείας ὑπερέχει, τοσούτῳ καὶ τὸ ποιητικὸν τὸ τῆς εὐδαιμονίας τοῦ ὑγιεινοῦ ὑπερέχει· ἡ δὲ ὑγίεια τοῦ ὑγιεινοῦ ἐλάττονι ὑπερεῖχεν· ὥστε πλείονι ὑπερέχει τὸ ποιητικὸν εὐδαιμονίας τοῦ ὑγιεινοῦ ἢ ἡ ὑγίεια τοῦ ὑγιεινοῦ. Δῆλον ἄρα ὅτι αἱρετώτερον τὸ ποιητικὸν εὐδαιμονίας τῆς ὑγιείας· τοῦ γὰρ αὐτοῦ πλείονι ὑπερέχει.

§ 20. Ἔτι τὸ κάλλιον καθ´ αὑτὸ καὶ τιμιώτερον καὶ ἐπαινετώτερον, οἷον φιλία πλούτου καὶ δικαιοσύνη ἰσχύος· τὰ μὲν γὰρ καθ´ αὑτὰ τῶν τιμίων καὶ ἐπαινετῶν, τὰ δ´ [117b] οὐ καθ´ αὑτὰ ἀλλὰ δι´ ἕτερον. Οὐδεὶς γὰρ τιμᾷ τὸν πλοῦτον δι´ ἑαυτόν, ἀλλὰ δι´ ἕτερον· τὴν δὲ φιλίαν καθ´ αὑτό, καὶ εἰ μηδὲν μέλλει ἡμῖν ἕτερον ἀπ´ αὐτῆς ἔσεσθαι.
 

[116b] § 1. Pour savoir de deux ou plusieurs choses laquelle est préférable ou meilleure, voici comment il faut procéder :

§ 2. Et d'abord disons bien que notre examen ne portera pas sur des choses fort éloignées les unes des autres et ayant de grandes différences entre elles; personne ne doutant, par exemple, s'il doit préférer le bonheur à la richesse. Mais il portera sur des choses rapprochées et entre lesquelles on peut douter de celles à qui il faut accorder la préférence, parce qu'on ne voit pas distinctement la supériorité de l'une sur l'autre. Evidemment, dans ces choses, dès qu'on aura démontré la supériorité de l'une en un point ou en plusieurs, l'esprit calmé accordera de suite que celle de toutes ces choses qui est supérieure est aussi préférable.

§ 3. D'abord donc, ce qui est plus durable, plus stable, mérite la préférence sur, ce qui l'est moins. § 4. On l'accordera de même à ce qu'un homme sage ou vertueux choisirait, à ce qu'une loi juste ordonne, à ce que les gens habiles dans chaque chose préféreraient, en tant que tels, ou bien à ce que prendraient les gens éclairés dans chaque genre. On préférera ce que la majorité ou l'unanimité voudraient; par exemple, dans la médecine ou l'architecture, ce que la plupart des médecins ou tous les médecins penseraient. En un mot, on préférera ce que la majorité des hommes ou tous les hommes ou même toutes les choses désirent, comme par exemple le bien ; car toutes choses tendent au bien. Il faut d'ailleurs diriger la discussion vers l'un de ces points, selon le besoin qu'on en aura. Mais absolument parlant le meilleur et le préférable est ce qui relève de la science la meilleure. Si par exemple la philosopnie est une science meilleure que l'architecture, les choses de philosophie valent mieux que les choses d'architecture; et pour tel individu donne, le préférable est ce qui relève de la science spéciale qu'il possède.

§ 5. Ensuite ce qui est essentiellement telle chose est préférable à ce qui n'est pas dans le genre : par exemple la justice est préférable à l'homme juste; car la justice est dans le genre qui est le bien, et l'autre n'y est pas : l'une est essentiellement le bien, et l'autre ne l'est pas. C'est que jamais une chose n'est dite être essentiellement le genre quand elle ne se trouve pas dans le genre; ainsi l'homme blanc n'est pas essentiellement la couleur : et de même pour le reste.

§ 6. Et ce qui est désirable en soi est préférable à ce qui n'est désirable que pour une autre chose: par exemple la santé est préférable à l'avarice; car l'une est désirable en soi, l'autre à cause d'une autre chose; § 7. et ce qui est en soi est préférable à ce qui est accidentel: par exemple on doit préférer que les amis soient justes à ce que les ennemis le soient : car l'un est bon en soi, l'autre ne l'est qu'accidentellement. Nous ne pouvons désirer que par accident que nos ennemis soient justes, afin qu'ils ne nous nuisent pas. Mais ce lieu se confond avec celui qui précède et n'en diffère que par la forme. En effet, nous désirons en soi que nos amis soient justes, et quand même il n'en devrait rien résulter pour nous, quand même ils seraient aux Indes : mais pour la justice de nos ennemis, nous la désirons en vue d'autre chose, en vue de notre propre intérêt.

[117a] § 8. Et ce qui cause le bien par soi-même est préférable à ce qui ne le cause que par accident : ainsi la vertu est préférable à la fortune ; car l'une en soi est cause du bien, l'autre ne Test que par accident. Et de même pour les choses de cet ordre. Et de même encore pour le contraire ; car ce qui en soi est cause du mal est plus à fuir que ce qui ne cause le mal que par accident, par exemple le vice et la fortune; car l'un est mauvais en soi, la fortune ne l'est que par accident.

§ 9. Ce qui est absolument bon est préférable à ce qui ne l'est que pour certain cas, par exemple la santé à l'amputation; car l'un est absolument bon, et l'autre ne l'est que pour celui qui a besoin d'être amputé. § 10. Ce qui est naturel est préférable à ce qui ne Test pas, par exemple la justice est préférable à l'homme juste; car l'une est naturelle, l'autre est en quelque  sorte acquis. § 11. Ce qui est au plus honorable et au meilleur est préférable, par exemple on doit préférer ce qui est à Dieu à ce qui est à l'homme, ce qui est à l'âme à ce qui est au corps. §  12. Ce qui est propre au meilleur est préférable à ce qui est propre à l'inférieur, par exemple ce qui est propre à Dieu est préférable à ce qui est propre à l'homme ; car sous le rapport de ce qu'ils ont de commun tous les deux, il n'y a entre eux aucune différence : mais pour les choses qui leur sont propres l'un l'emporte sur l'autre. § 13. Ce qui est dans les choses plus précieuses, antérieures, meilleures, est meilleur aussi, par exemple la santé est meilleure que la force et la beauté; car la santé réside dans les parties humides, sèches, chaudes et froides, en un mot, dans les éléments essentiels dont l'être est composé : la force et la beauté ne résident que dans des choses postérieures à celles-là; car la force est dans les muscles et dans les os, et la beauté est une certaine harmonie des membres. § 14. La fin parait préférable à ce qui contribue seulement à cette fin. § 15. De deux choses, celle-là est préférable qui est la plus proche de la fin  § 16 et en général ce qui se rapporte au but même de la vie est préférable à ce qui se rapporte à toute autre partie de la vie : par exemple ce qui contribue au bonheur est préférable à ce qui contribue à la prudence. § 17. Ce qui est possible est préférable à l'impossible. § 18. De deux choses qui produisent des effets, celle dont la fin est la meilleure est aussi la meilleure. § 19. Pour décider la préférence entre ce qui produit une fin et une autre fin, il faut établir une sorte de proportion et préférer des deux fins celle qui surpasse l'autre plus que la fin elle-même ne surpasse ce qui la produit : par exemple, si le bonheur surpasse la santé plus que la santé ne surpasse le sain, ce qui fait le bonheur est préférahle à la santé; car autant le bonheur l'emporte sur la santé, autant ce qui fait le bonheur surpasse ce qui fait la santé; mais la santé surpassait moins le sain que le bonheur ne surpasse la santé : donc ce qui fait le bonheur l'emporte plus sur le sain que la santé sur le sain. Donc aussi il est évident que ce qui fait le bonheur est préférable à la santé; car il surpasse plus le même objet.

§ 20. Il faut encore préférer ce qui en soi est plus beau, plus précieux et plus louable, par exemple l'amitié à la richesse, la justice à la santé et à la force; car les unes sont en soi précieuses et louables;  [117b] les autres ne sont pas en soi, mais pour une autre chose qu'elles. Ainsi, personne n'estime la richesse en elle-même: mais on estime l'amitié pour elle-même, quoiqu'il n'en doive résulter rien autre chose pour nous.

 

 

§ 1. Laquelle est préférable ou meilleure, il a dit plus haut, liv. 1, ch. 6, § 10, que les comparaisons des choses rentraient dans les lieux de l'accident; et ceci est évident, puisque l'accident seul peut être susceptible de plus ou de moins. Le propre, le genre, la définition, sont à ce à quoi ils s'appliquent, mais d'une manière absolue et non avec possibilité de plus et de moins. Du reste, pour comparer les choses entre elles, Aristote s'arrête d'abord à l'idée du préférable, parce qu'en effet c'est celle qui a le plus d'importance en philosophie, en morale, comme le fait remarquer Alexandre. Plus tard il en viendra, sans cette idée de préférence, à comparer les accidents entre eux. Voir plus loin, ch. 5. C'est qu'elle n'est pas nécessaire à la comparaison.

§ 4. La majorité ou l'unanimité des gens habiles.

Car toutes choses tendent au bien, c'est le principe de Platon» comme ie fait observer Alexandre : il pouvait ajouter aussi, et de Socrate.

§ 7. Quand même ils seraient aux Indes, il me semble que ce passage se rapporte à l'expédition du disciple d'Aristote, et à sa conduite injuste et atroce envers Callisthène, neveu de son précepteur. Voir mon Mémoire sur la Logique, tom. 1, pag. 125 et 360.

§ 18. Est aussi la meilleure, l'édition de Berlin supprime cette phrase, bien qu'elle soit indiquée par un manuscrit cité au bas même de la page et que toutes les éditions la donnent. Elle n'est pas indispensable au sens, mais elle le complète et l'éclaircit.

 

CHAPITRE II.

Vingt-six autres lieux tirés de la supériorité d'un accident sur un autre.

§ 1. Ἔτι ὅταν δύο τινὰ ᾖ σφόδρα αὑτοῖς παραπλήσια καὶ μὴ δυνώμεθα ὑπεροχὴν μηδεμίαν συνιδεῖν τοῦ ἑτέρου πρὸς τὸ ἕτερον, ὁρᾶν ἀπὸ τῶν παρεπομένων. ᾯ γὰρ ἕπεται μεῖζον ἀγαθόν, τοῦθ´ αἱρετώτερον· ἂν δ´ ᾖ τὰ ἑπόμενα κακά, ᾧ τὸ ἔλαττον ἀκολουθεῖ κακόν, τοῦθ´ αἱρετώτερον· ὄντων γὰρ ἀμφοτέρων αἱρετῶν οὐδὲν κωλύει δυσχερές τι παρέπεσθαι. Διχῶς δ´ ἀπὸ τοῦ ἕπεσθαι ἡ σκέψις· καὶ γὰρ πρότερον καὶ ὕστερον ἕπεται, οἷον τῷ μανθάνοντι τὸ μὲν ἀγνοεῖν πρότερον, τὸ δ´ ἐπίστασθαι ὕστερον. Βέλτιον δ´ ὡς ἐπὶ πολὺ τὸ ὕστερον ἑπόμενον. Λαμβάνειν οὖν τῶν ἑπομένων ὁπότερον ἂν ᾖ χρήσιμον.

§ 2. Ἔτι τὰ πλείω ἀγαθὰ τῶν ἐλαττόνων, ἢ ἁπλῶς ἢ ὅταν τὰ ἕτερα ἐν τοῖς ἑτέροις ἐνυπάρχῃ, τὰ ἐλάττω ἐν τοῖς πλείοσιν. (Ἔνστασις, εἴ που θάτερον θατέρου χάριν· οὐδὲν γὰρ αἱρετώτερα τὰ ἄμφω τοῦ ἑνός, οἷον τὸ ὑγιάζεσθαι καὶ ἡ ὑγίεια τῆς ὑγιείας, ἐπειδὴ τὸ ὑγιάζεσθαι τῆς ὑγιείας ἕνεκεν αἱρούμεθα.) Καὶ μὴ ἀγαθὰ δὲ ἀγαθῶν οὐδὲν κωλύει εἶναι αἱρετώτερα, οἷον εὐδαιμονίαν καὶ ἄλλο τι ὃ μὴ ἔστιν ἀγαθὸν δικαιοσύνης καὶ ἀνδρείας. § 3. Καὶ ταὐτὰ μεθ´ ἡδονῆς μᾶλλον ἢ ἄνευ ἡδονῆς. § 4. Καὶ ταὐτὰ μετ´ ἀλυπίας ἢ μετὰ λύπης.

§ 5. Καὶ ἕκαστον ἐν ᾧ καιρῷ μεῖζον δύναται, ἐν τούτῳ καὶ αἱρετώτερον, οἷον τὸ ἀλύπως ἐν τῷ γήρᾳ μᾶλλον ἢ ἐν τῇ νεότητι· μεῖζον γὰρ ἐν τῷ γήρᾳ δύναται. Κατὰ ταῦτα δὲ καὶ ἡ φρόνησις ἐν τῷ γήρᾳ αἱρετώτερον· οὐδεὶς γὰρ τοὺς νέους αἱρεῖται ἡγεμόνας, διὰ τὸ μὴ ἀξιοῦν φρονίμους εἶναι. Ἡ δ´ ἀνδρεία ἀνάπαλιν· ἐν τῇ νεότητι γὰρ ἀναγκαιοτέρα ἡ κατὰ τὴν ἀνδρείαν ἐνέργεια. Ὁμοίως δὲ καὶ ἡ σωφροσύνη· μᾶλλον γὰρ οἱ νέοι τῶν πρεσβυτέρων ὑπὸ τῶν ἐπιθυμιῶν ἐνοχλοῦνται.

§ 6. Καὶ ὃ ἐν παντὶ καιρῷ ἢ ἐν τοῖς πλείστοις χρησιμώτερον, οἷον δικαιοσύνη καὶ σωφροσύνη ἀνδρείας· αἱ μὲν γὰρ ἀεί, ἡ δὲ ποτὲ χρησίμη. § 7. Καὶ ὃ πάντων ἐχόντων μηδὲν θατέρου δεόμεθα ἢ ὃ ἐχόντων προσδεόμεθα τοῦ λοιποῦ, καθάπερ ἐπὶ δικαιοσύνης καὶ ἀνδρείας· δικαίων μὲν γὰρ πάντων [118a] ὄντων οὐδὲν χρήσιμος ἡ ἀνδρεία, ἀνδρείων δὲ πάντων ὄντων χρήσιμος ἡ δικαιοσύνη.

§ 8. Ἔτι ἐκ τῶν φθορῶν καὶ τῶν ἀποβολῶν, καὶ τῶν γενέσεων καὶ τῶν λήψεων, καὶ τῶν ἐναντίων. Ὧν γὰρ αἱ φθοραὶ φευκτότεραι, αὐτὰ αἱρετώτερα. Ὁμοίως δὲ καὶ ἐπὶ τῶν ἀποβολῶν καὶ τῶν ἐναντίων· εἰ γὰρ ἡ ἀποβολὴ ἢ τὸ ἐναντίον φευκτότερον, αὐτὸ αἱρετώτερον. Ἐπὶ δὲ τῶν γενέσεων καὶ τῶν λήψεων ἀνάπαλιν· ὧν γὰρ αἱ λήψεις καὶ αἱ γενέσεις αἱρετώτεραι, καὶ αὐτὰ αἱρετώτερα.

§ 9. Ἄλλος τόπος, τὸ ἐγγύτερον τἀγαθοῦ βέλτιον καὶ αἱρετώτερον, § 10. καὶ τὸ ὁμοιότερον τἀγαθῷ, οἷον ἡ δικαιοσύνη δικαίου. § 11. Καὶ τὸ τῷ βελτίονι αὑτοῦ ὁμοιότερον, καθάπερ τὸν Αἴαντα τοῦ Ὀδυσσέως φασὶ βελτίω τινὲς εἶναι, διότι ὁμοιότερος τῷ Ἀχιλλεῖ. (Ἔνστασις τούτου ὅτι οὐκ ἀληθές· οὐδὲν γὰρ κωλύει μὴ ᾗ βέλτιστος ὁ Ἀχιλλεύς, ταύτῃ ὁμοιότερον εἶναι τὸν Αἴαντα, τοῦ ἑτέρου ὄντος μὲν ἀγαθοῦ μὴ ὁμοίου δέ.) Σκοπεῖν δὲ καὶ εἰ ἐπὶ τὰ γελοιότερα εἴη ὅμοιον, καθάπερ ὁ πίθηκος τῷ ἀνθρώπῳ, τοῦ ἵππου μὴ ὄντος ὁμοίου· οὐ γὰρ κάλλιον ὁ πίθηκος, ὁμοιότερον δὲ τῷ ἀνθρώπῳ. § 12. Πάλιν ἐπὶ δυοῖν, εἰ τὸ μὲν τῷ βελτίονι τὸ δὲ τῷ χείρονι ὁμοιότερον, εἴη ἂν βέλτιον τὸ τῷ βελτίονι ὁμοιότερον. (Ἔχει δὲ καὶ τοῦτο ἔνστασιν· οὐδὲν γὰρ κωλύει τὸ μὲν τῷ βελτίονι ἠρέμα ὅμοιον εἶναι, τὸ δὲ τῷ χείρονι σφόδρα, οἷον εἰ ὁ μὲν Αἴας τῷ Ἀχιλλεῖ ἠρέμα, ὁ δ´ Ὀδυσσεὺς τῷ Νέστορι σφόδρα. Καὶ εἰ τὸ μὲν τῷ βελτίονι ἐπὶ τὰ χείρω ὅμοιον εἴη, τὸ δὲ τῷ χείρονι ἐπὶ τὰ βελτίω, καθάπερ ἵππος ὄνῳ καὶ πίθηκος ἀνθρώπῳ.)

§ 13. Ἄλλος, τὸ ἐπιφανέστερον τοῦ ἧττον τοιούτου, § 14. καὶ τὸ χαλεπώτερον· μᾶλλον γὰρ ἀγαπῶμεν ἔχοντες ἃ μὴ ἔστι ῥᾳδίως λαβεῖν. § 15. Καὶ τὸ ἰδιαίτερον τοῦ κοινοτέρου. § 16. Καὶ τὸ τοῖς κακοῖς ἀκοινωνητότερον· αἱρετώτερον γὰρ ᾧ μηδεμία δυσχέρεια ἀκολουθεῖ ἢ ᾧ ἀκολουθεῖ.

§ 17. Ἔτι εἰ ἁπλῶς τοῦτο τούτου βέλτιον, καὶ τὸ βέλτιστον τῶν ἐν τούτῳ βέλτιον τοῦ ἐν τῷ ἑτέρῳ βελτίστου· οἷον εἰ βέλτιον ἄνθρωπος ἵππου, καὶ ὁ βέλτιστος ἄνθρωπος τοῦ βελτίστου ἵππου βελτίων. § 18. Καὶ εἰ τὸ βέλτιστον τοῦ βελτίστου βέλτιον, καὶ ἁπλῶς τοῦτο τούτου βέλτιον· οἷον εἰ ὁ βέλτιστος ἄνθρωπος τοῦ βελτίστου ἵππου βελτίων, καὶ ἁπλῶς ἄνθρωπος ἵππου βελτίων.

[118b] § 19. Ἔτι ὧν ἔστι τοὺς φίλους μετασχεῖν, αἱρετώτερα ἢ ὧν μή. § 20. Καὶ ἃ πρὸς τὸν φίλον πρᾶξαι μᾶλλον βουλόμεθα ἢ ἃ πρὸς τὸν τυχόντα, ταῦτα αἱρετώτερα, οἷον τὸ δικαιοπραγεῖν καὶ εὖ ποιεῖν μᾶλλον ἢ τὸ δοκεῖν· τοὺς γὰρ φίλους εὖ ποιεῖν βουλόμεθα μᾶλλον ἢ δοκεῖν, τοὺς δὲ τυχόντας ἀνάπαλιν.

§ 21. Καὶ τὰ ἐκ περιουσίας τῶν ἀναγκαίων βελτίω, ἐνίοτε δὲ καὶ αἱρετώτερα· βέλτιον γὰρ τοῦ ζῆν τὸ εὖ ζῆν, τὸ δὲ εὖ ζῆν ἐστιν ἐκ περιουσίας, αὐτὸ δὲ τὸ ζῆν ἀναγκαῖον. Ἐνίοτε δὲ τὰ βελτίω οὐχὶ καὶ αἱρετώτερα· οὐ γὰρ εἰ βελτίω, ἀναγκαῖον καὶ αἱρετώτερα· τὸ γοῦν φιλοσοφεῖν βέλτιον τοῦ χρηματίζεσθαι, ἀλλ´ οὐχ αἱρετώτερον τῷ ἐνδεεῖ τῶν ἀναγκαίων. Τὸ δ´ ἐκ περιουσίας ἐστὶν ὅταν ὑπαρχόντων τῶν ἀναγκαίων ἄλλα τινὰ προσκατασκευάζηταί τις τῶν καλῶν. Σχεδὸν δὲ ἴσως αἱρετώτερόν ἐστι τὸ ἀναγκαῖον, βέλτιον δὲ τὸ ἐκ περιουσίας.

§ 22. Καὶ ὃ μὴ ἔστι παρ´ ἄλλου πορίσασθαι ἢ ὃ ἔστι καὶ παρ´ ἄλλου, οἷον πέπονθεν ἡ δικαιοσύνη πρὸς τὴν ἀνδρείαν. § 23. Καὶ εἰ τόδε μὲν ἄνευ τοῦδε αἱρετόν, τόδε δὲ ἄνευ τοῦδε μή· οἷον δύναμις ἄνευ φρονήσεως οὐχ αἱρετόν, φρόνησις δ´ ἄνευ δυνάμεως αἱρετόν. § 24. Καὶ δυοῖν εἰ θάτερον ἀρνούμεθα, ἵνα τὸ λοιπὸν δόξῃ ἡμῖν ὑπάρχειν, ἐκεῖνο αἱρετώτερον ὃ βουλόμεθα δοκεῖν ὑπάρχειν· οἷον φιλοπονεῖν ἀρνούμεθα, ἵν´ εὐφυεῖς εἶναι δόξωμεν. § 25. Ἔτι οὗ τῇ ἀπουσίᾳ ἧττον ἐπιτιμητέον δυσφοροῦσι, τοῦτο αἱρετώτερον. § 26.Καὶ οὗ τῇ ἀπουσίᾳ μὴ δυσφοροῦσι μᾶλλον ἐπιτιμητέον, τοῦτο αἱρετώτερον.


 

§ 1. Quand deux choses sont fort proches l'une de l'autre, et que nous ne pouvons du tout discerner la supériorité de celle-ci sur celle-là, il faut alors regarder aux conséquents; car celle des deux qui a pour conséquent un plus grand bien est préférable. Mais si les conséquents sont mauvais, il faut préférer la chose qui entraîne encore le moins de mal ; car les deux choses ont beau être désirables, il est fort possible qu'elles impliquent quelque chose de mal. Or, l'examen des conséquents peut être double; car le conséquent peut être antérieur ou postérieur : par exemple, quand un homme apprend le conséquent antérieur, c'est qu'il ignore :1e conséquent postérieur, c'est qu'il sait : le plus souvent, c'est le conséquent postérieur qui est préférable. Il faut donc prendre parmi les conséquents celui qui est utile pour la thèse qu'on soutient.

§ 2. Les biens plus nombreux sont préférables aux: moins nombreux, soit absolument, soit lorsque les uns sont dans les autres, c'est-à-dire les moins nombreux dans les plus nombreux. On objecte et l'on dit: mais si l'un des biens, par exemple, est à cause de l'autre, les deux ne sont plus préférables à un seul : par exemple, se guérir et la santé ne sont pas préférables à la santé toute seule, puisque nous ne désirons nous bien guérir que pour la santé. Mais rien n'empêche que certaines choses qui ne sont pas bonnes, réunies à des choses bonnes ne soient préférables : par exemple, que le bonheur et quelque autre chose qui n'est pas bonne, ne soit préférable à la justice et au courage. § 3. Les mêmes choses accompagnées de plaisir sont préférables à ces mêmes choses sans plaisir. § 4. Et les mêmes sans douleur le sont aux mêmes avec douleur.

§ 5. Chaque chose est surtout désirable dans le moment où elle a le plus d'importance : par exemple, la tranquillité est désirable dans la vieillesse plus encore que dans la jeunesse, et elle a plus d'importance dans la vieillesse. C'est pour cela aussi que la prudence est préférable dans la vieillesse; personne, en effet, ne prend des jeunes gens pour chefs parce qu'on ne les croit pas prudents. Pour le courage, c'est l'opposé : l'énergie nécessaire au courage se trouve plutôt dans la jeunesse; mais il en est de même pour la sagesse ; car les jeunes gens sont aveuglés par leurs passions plutôt que les vieillards.

§ 6. Il faut préférer aussi ce qui est plus utile, soit en tout temps, soit dans la plupart des cas : par exemple, la justice et la sagesse sont préférables au courage; car les deux premières sont toujours utiles, l'autre ne l'est que dans certains cas. § 7. Il faut préférer de deux choses celle qui, si tout le monde l'avait, nous ôterait le besoin de l'autre, à celle qui, si tout le monde l'avait, nous laisserait le besoin de l'autre encore : ainsi, la justice est préférable au courage; car tout le monde [118a] étant juste, le courage ne servirait plus à rien, tandis que tout le monde étant courageux, la justice n'en serait pas moins utile.

§ 8. Il faut aussi tirer des arguments des destructions et des pertes, des générations et des acquisitions, aussi bien que des contraires de toutes les choses. Les choses en effet dont la destruction est le plus à craindre sont préférables. Et de même pour la perte et les contraires; car ce dont la perte ou le contraire est le plus à fuir est préférable. Mais c'est à l'inverse pour les générations et l'acquisition des choses; car ce dont la génération et l'acquisition sont préférables, est également préférable.

§ 9.  Autre lieu : ce qui est le plus rapproché du bien est meilleur et préférable, § 10. ainsi que ce qui est le plus semblable au bien, comme la justice est plus semblable au bien que l'homme juste. § 11 . On doit préférer de deux êtres celui qui est plus semblable à un être meilleur que tous deux. Par exemple, quelques-uns disent qu'Ajax était supérieur à Ulysse, parce qu'il ressemblait plus à Achille. On objecte que ce n'est pas vrai ; car rien n'empêche qu'Achille ne soit pas Îe meilleur du côté où Ajax lui est le plus semblable, tandis qu'Ulysse peut être bon, sans être d'ailleurs semblable à Achille. Il faut examiner encore si le semblable ne l'est point du côté ridicule ; ainsi, le singe ressemble à l'homme, le cheval ne lui ressemble pas : mais le singe n'est pas plus beau que le cheval, bien qu'il soit semblable à l'homme, § 12. De deux choses, si l'une est plus pareille au meilleur et l'autre au pire, la meilleure sera la plus pareille au meilleur. Mais ici, encore, on peut faire une objection. En effet, rien n'empêche que l'une ne soit que légèrement semblable au meilleur, et que l'autre ne le soit très fortement au moins bon ; par exemple, Ajax ressemble légèrement à Achille, mais Ulysse ressemble beaucoup à Nestor. Il faut de plus examiner si le semblable au meilleur ne lui ressemble pas dans ses côtés les moins bons, si le semblable au pire ne lui ressemble pas dans ses côtés les meilleurs; c'est ainsi que le cheval ressemble à l'âne, et le singe à l'homme.

§ 13. Un autre lieu, c'est que le plus évident est préférable à ce qui l'est moins; § 14. et le plus difficile à ce qui l'est moins ; car on a plus de plaisir à posséder ce qu'on acquiert plus difficilement. § 15. Ce qui est plus spécial est préférable à ce qui est plus commun. § 16. On doit préférer aussi ce qui est le moins sujet à causer du mal ; car on choisit de préférence ce qui n'entraîne aucune difficulté à ce qui peut en amener quelqu'une.

§ 17. Si d'une manière absolue une chose est préférable à une autre, la meilleure de toutes les choses qui sont du genre de celle-là est préférable à la meilleure de celles qui sont du genre de l'autre : par exemple, si l'homme est meilleur que le cheval, le meilleur homme sera meilleur que le meilleur cheval. § 18. Si le meilleur est meilleur que le meilleur, c'est que la chose d'une manière absolue sera meilleure que l'autre. Par exemple, si le meilleur homme est meilleur que le meilleur cheval, l'homme absolument parlant est meilleur que le cheval absolument parlant.

[118b] § 19. Il faut préférer les choses où les amis peuvent avoir part à celles où ils ne le peuvent pas. § 20. Les choses aussi que nous préférons faire pour un ami plutôt que pour un étranger, sont préférables : par exemple, faire du bien ou rendre service plutôt que de paraître le faire; car pour nos amis nous aimons mieux leur rendre service en réalité que de paraître le faire : c'est le contraire pour les étrangers.

§ 21. Les choses superflues sont meilleures que les choses nécessaires, et parfois leur sont préférables : vivre heureux est meilleur que vivre: mais vivre heureux est du superflu, vivre absolument est du nécessaire. Quelquefois cependant les choses meilleures ne sont pas les plus désirables; car de ce qu'elles sont meilleures, elles ne sont pas pour cela nécessairement préférables; ainsi philosopher vaut mieux que s'enrichir, mais ce n'est pas là une chose préférable pour celui qui manque du nécessaire. Le superflu c'est, quand on a d'ailleurs tout ce qui est nécessaire, d'acquérir en sus quelque belle chose. Presque toujours le nécessaire est préférable, bien que le superflu soit meilleur.

§ 22. Il faut encore préférer ce qu'on ne peut pas se procurer par autrui à ce qu'on peut se procurer par un autre; et c'est là le rapport de la justice à la valeur. § 23. De deux choses, il faut préférer celle qui est désirable sans l'autre, à celle qui sans l'autre ne l'est pas. Ainsi, la puissance n'est pas désirable sans la sagesse; la sagesse, au contraire, est désirable même sans la puissance. § 24. Et si de deux choses nous nions avoir l'une afin de paraître avoir l'autre, celle que nous voudrions paraître avoir est préférable : par exemple, nous nions travailler beaucoup, afin de paraître bien doués naturellement. § 25. Il faut encore préférer ce dont l'absence se ferait moins reprocher dans un malheur : § 26. et réciproquement, il faut préférer ce dont l'absence se fait reprocher davantage, quand on n'est pas dans le malheur.

§ 1. Il faut alors regarder aux conséquents, voir la théorie des conséquents et des antécédents, Premiers Analytiques, liv. 1, ch. 27, § 5, et suiv. Le conséquent peut être antérieur ou postérieur, comme Aristote l'explique très clairement un peu plus bas.

§ 2.. Se guérir, ou se bien porter: du reste le grec peut employer le même mot pour se guérir et pour la santé. Le rapport est alors plus évident qu'en français.

§ 5. La prudence est préférable dans la vieillesse, cependant on en a plus besoin quand on est jeune.

§ 7. Tout le monde étant juste.., c'est le mot d'Agésilas, comme le remarque Pacius. Voir Plutarque, Apophthegmes des Lacédémoniens, 55e apophth.

§ 8. Tirer des arguments des destructions, voir une théorie pareille plus haut, liv. 2, ch. 9.

§ 12. Le cheval ressemble à l'âne, il semble qu'il faudrait dire plutôt l'âne ressemble au cheval, comme le singe ressemble à l'homme ; car on ne peut pas faire de consécution inverse ; mais il n'y a pas de manuscrit qui autorise ce changement que je n'ai pas voulu faire.

 

 

CHAPITRE III.

Vingt autres lieux tirés de la supériorité d'un accident sur un autre.

§ 1. Ἔτι τῶν ὑπὸ τὸ εἶδος τὸ ἔχον τὴν οἰκείαν ἀρετὴν τοῦ μὴ ἔχοντος· § 2. ἄμφω δ´ ἐχόντων τὸ μᾶλλον ἔχον. § 3. Ἔτι εἰ τὸ μὲν ποιεῖ ἀγαθὸν ἐκεῖνο ᾧ ἂν παρῇ, τὸ δὲ μὴ ποιεῖ, τὸ ποιοῦν αἱρετώτερον, καθάπερ καὶ θερμότερον τὸ θερμαῖνον τοῦ μή. § 4. Εἰ δ´ ἄμφω ποιεῖ, τὸ μᾶλλον ποιοῦν· ἢ εἰ τὸ βέλτιον καὶ κυριώτερον ποιεῖ ἀγαθόν, οἷον εἰ τὸ μὲν τὴν ψυχὴν τὸ δὲ τὸ σῶμα.

§ 5. Ἔτι ἀπὸ τῶν πτώσεων καὶ τῶν χρήσεων καὶ τῶν πράξεων καὶ τῶν ἔργων. Καὶ ταῦτα δὲ ἀπ´ ἐκείνων· ἀκολουθεῖ γὰρ ἀλλήλοις. Οἷον εἰ τὸ δικαίως αἱρετώτερον τοῦ ἀνδρείως, καὶ ἡ δικαιοσύνη τῆς ἀνδρείας αἱρετώτερον· καὶ εἰ ἡ δικαιοσύνη τῆς ἀνδρείας αἱρετώτερον, καὶ τὸ δικαίως τοῦ ἀνδρείως. Παραπλησίως δὲ καὶ ἐπὶ τῶν ἄλλων.

[119a] § 6. Ἔτι εἴ τινος τοῦ αὐτοῦ τὸ μὲν μεῖζον ἀγαθόν ἐστι τὸ δὲ ἔλαττον, αἱρετώτερον τὸ μεῖζον. § 7. Ἢ εἰ μείζονος μεῖζον θάτερον. § 8. Ἀλλὰ καὶ εἰ δύο τινὰ ἑνός τινος εἴη αἱρετώτερα, τὸ μᾶλλον αἱρετώτερον τοῦ ἧττον αἱρετωτέρου αἱρετώτερον. § 9. Ἔτι οὗ ἡ ὑπερβολὴ τῆς ὑπερβολῆς αἱρετωτέρα, καὶ αὐτὸ αἱρετώτερον· οἷον φιλία χρημάτων· αἱρετωτέρα γὰρ ἡ τῆς φιλίας ὑπερβολὴ τῆς τῶν χρημάτων. § 10. Καὶ οὗ μᾶλλον ἂν ἕλοιτο αὐτὸς αὑτῷ αἴτιος εἶναι ἢ οὗ ἕτερον, οἷον τοὺς φίλους τῶν χρημάτων.

§ 11. Ἔτι ἐκ τῆς προσθέσεως, εἰ τῷ αὐτῷ προστιθέμενόν τι τὸ ὅλον αἱρετώτερον ποιεῖ. Εὐλαβεῖσθαι δὲ δεῖ προτείνειν ἐφ´ ὧν τῷ μὲν ἑτέρῳ τῶν προστιθεμένων χρῆται τὸ κοινὸν ἢ ἄλλως πως συνεργόν ἐστι, τῷ δὲ λοιπῷ μὴ χρῆται μηδὲ συνεργόν ἐστιν, οἷον πρίονα καὶ δρέπανον μετὰ τεκτονικῆς· αἱρετώτερον γὰρ ὁ πρίων συνδυαζομένοιν, ἁπλῶς δὲ οὐχ αἱρετώτερον. § 12. Πάλιν εἰ ἐλάττονι προστεθέν τι τὸ ὅλον μεῖζον ποιεῖ. § 13. Ὁμοίως δὲ καὶ ἐκ τῆς ἀφαιρέσεως· οὗ γὰρ ἀφαιρεθέντος ἀπὸ τοῦ αὐτοῦ τὸ λειπόμενον ἔλαττον, ἐκεῖνο μεῖζον ἂν εἴη, ὅ ποτε ἀφαιρεθὲν τὸ λειπόμενον ἔλαττον ποιεῖ.

§ 14. Καὶ εἰ τὸ μὲν δι´ αὑτὸ τὸ δὲ διὰ τὴν δόξαν αἱρετόν, οἷον ὑγίεια κάλλους. Ὃρος δὲ τοῦ πρὸς δόξαν τὸ μηδενὸς συνειδότος μὴ ἂν σπουδάσαι ὑπάρχειν. Καὶ εἰ τὸ μὲν δι´ αὑτὸ καὶ διὰ τὴν δόξαν αἱρετόν, τὸ δὲ διὰ θάτερον μόνον. § 15. Καὶ ὁπότερον μᾶλλον δι´ αὑτὸ τίμιον, τοῦτο καὶ βέλτιον καὶ αἱρετώτερον. § 16. Τιμιώτερον δ´ ἂν εἴη καθ´ αὑτὸ ὃ μηδενὸς ἄλλου μέλλοντος ὑπάρξειν δι´ αὑτὸ αἱρούμεθα μᾶλλον.

§ 17. Ἔτι διελέσθαι ποσαχῶς τὸ αἱρετὸν λέγεται καὶ τίνων χάριν, οἷον τοῦ συμφέροντος ἢ τοῦ καλοῦ ἢ τοῦ ἡδέος· τὸ γὰρ πρὸς ἅπαντα ἢ πρὸς τὰ πλείω χρήσιμον αἱρετώτερον ἂν ὑπάρχοι τοῦ μὴ ὁμοίως. § 18. Τῶν δ´ αὐτῶν ἀμφοτέροις ὑπαρχόντων, ὁποτέρῳ μᾶλλον ὑπάρχει σκεπτέον, οἷον πότερον ἥδιον ἢ κάλλιον ἢ συμφορώτερον. § 19. Πάλιν τὸ τοῦ βελτίονος ἕνεκεν αἱρετώτερον, οἷον τὸ ἀρετῆς ἕνεκεν ἢ ἡδονῆς. Ὁμοίως δὲ καὶ ἐπὶ τῶν φευκτῶν· φευκτότερον γὰρ τὸ μᾶλλον ἐμποδιστικὸν τῶν αἱρετῶν, οἷον νόσος αἴσχους· καὶ γὰρ ἡδονῆς καὶ τοῦ σπουδαῖον εἶναι κωλυτικώτερον ἡ νόσος. § 20. Ἔτι ἐκ τοῦ ὁμοίως δεικνύναι φευκτὸν καὶ αἱρετὸν τὸ προκείμενον· ἧττον γὰρ αἱρετὸν τὸ τοιοῦτον ὃ καὶ ἕλοιτ´ ἄν τις ὁμοίως καὶ φύγοι, τοῦ ἑτέρου ὄντος αἱρετοῦ μόνον. [119b] § 21. Τὰς μὲν οὖν πρὸς ἄλληλα συγκρίσεις καθάπερ εἴρηται ποιητέον.

§ 1. Parmi les choses comprises sous la même espèce, il faut préférer celle qui a la vertu spéciale de l'espèce à celle qui ne l'a pas; § 2 et si toutes les deux l'ont, celle qui l'a davantage. § 3. Et si de deux choses l'une fait du bien à ce à quoi elle est, et que l'autre n'eu fasse pas, il faut préférer celle qui en fait : par exemple, ce qui échauffe est plus chaud que ce qui n'échauffe pas ; § 4. et si toutes les deux font du bien, il faut préférer celle qui en fait davantage, ou qui en fait au meilleur et au principal : par exemple, si l'une fait du bien au corps el l'autre à l'âme.

§ 5. Il faut encore prendre garde et aux cas des mots et aux usages et à l'action, et à la réalité des choses, et à tout ce dont elles procèdent; car toutes ces choses se suivent mutuellement : par exemple, si justement est préférable à courageusement, la justice aussi sera préférable au courage : et si la justice est préférable au courage, justement le sera de même à courageusement. Il en serait ainsi pour tous les autres exemples.

[119a] § 6. Et, en outre, si, pour une même chose, l'un des attributs est un plus grand bien, et l'autre un moindre, le plus grand est préférable; § 7. ou bien, si l'un appartient à un être plus grand, c'est qu'il est aussi plus grand. § 8. De plus, si deux choses quelconque sont préférables à une seule autre, la plus préférable est préférable à celle qui l'est moins. § 9. La chose dont l'abondance est préférable à l'abondance d'une autre, est aussi préférable à cette autre : en ce sens, l'amitié est préférable aux richesses ; car l'abondance de l'amitié est préférable à celle de la richesse. § 10. On doit préférer aussi la chose dont on voudrait être cause personnellement pour soi-même plutôt que de la recevoir d'un autre. Et c'est ainsi que les amis sont préférables aux richesses.

§ 11. On peut encore tirer des lieux de l'adjonction, si une chose ajoutée à une même chose rend le tout préférable. Il faut du reste prendre garde d'étendre ceci jusqu'aux choses dans lesquelles le terme commun peut se servir de l'une des choses ajoutées, ou du moins en tirer quelque secours d'une façon quelconque, sans se servir de l'autre, ni tirer d'elle aucun secours. Par exemple, la scie et la faulx réunies à l'architecture. Il faut préférer la scie quand on la réunit à l'architecture ; mais par elle-même elle n'est pas absolument préférable. § 12. En outre, il faut préférer la chose qui, ajoutée au plus petit, rend le tout plus grand. § 13. Même remarque pour le cas où l'on retranche au lieu d'ajouter; car ce qui étant retranché d'une même chose rend le reste plus petit est plus grand, puisqu'il suffît qu'on l'enlève pour que le reste soit plus petit.

§ 14. Il faut voir si l'une des choses est désirable en soi et l'autre seulement par vanité : ainsi, par exemple, la santé comparée à la beauté. Une chose de pure vanité signifie celle que nous ne prendrions aucune peine d'avoir, si personne ne devait savoir que nous l'avons. § 15. Et si l'un est désirable en soi et par vanité, tandis que l'autre n'est désirable que de l'une des deux façons, § 16. ce qui est plus précieux en soi, est aussi préférable et meilleur; et j'entends par plus précieux en soi ce qu'au choix nous prendrions plus volontiers, sans que rien d'ailleurs dût l'accompagner.

§ 17. Il faut de plus examiner les sens divers que peut recevoir le mot préférer et les objets auxquels il peut s'appliquer, par exemple à l'utile, au bien, au plaisir; car ce qui procure toutes ces choses ou du moins le plus grand nombre de ces choses, est préférable à ce qui n'en procure pas également. §18. Mais quand les deux choses ont les mêmes avantages, il faut regarder celle qui les a le plus, par exemple quelle est la plus agréable, la plus belle ou la plus utile. § 19. Il faut aussi préférer ce qui se fait en vue du meilleur : ainsi il faut préférer ce qui se fait en vue de la vertu à ce qui ne se fait qu'en vue du plaisir. Et de même pour les choses qu'il faut éviter; car il faut éviter davantage ce qui doit davantage empêcher les choses désirables: par exemple il faut éviter la maladie plus que la honte ; car la maladie empêche davantage et le plaisir et la vertu. § 20.Οn peut encore tirer des arguments de ce que le sujet en question est également à fuir ou à rechercher. En effet, on doit moins désirer une chose qu'on peut également fuir ou désirer que celle qui est uniquement désirable. [119b] § 21. Les comparaisons des choses entre elles doivent donc être faites ainsi qu'on vient de le dire.

 

 

§ 5. Et aux cas des mots, cas étant pris ici comme il l'a été plus haut. Voir liv. 2, chap. 9, § 1, la définition des conjugués et des cas.

§ 11. N'est pas absolument préférable, à la faulx.

§ 19. Il faut éviter la maladie plus que la honte, le précepte sous cette forme parait tout au moins singulier; mais il ne faut pas l'étendre au-delà des limites même où Aristote le prend ici.

CHAPITRE IV.

Les lieux qui précèdent sont utiles aussi pour juger des choses sans d'ailleurs les mettre au comparatif.

§ 1. Οἱ αὐτοὶ δὲ τόποι χρήσιμοι καὶ πρὸς τὸ δεικνύναι ὁτιοῦν αἱρετὸν ἢ φευκτόν· ἀφαιρεῖν γὰρ μόνον δεῖ τὴν πρὸς ἕτερον ὑπεροχήν. Εἰ γὰρ τὸ τιμιώτερον αἱρετώτερον, καὶ τὸ τίμιον αἱρετόν, καὶ εἰ τὸ χρησιμώτερον αἱρετώτερον, καὶ τὸ χρήσιμον αἱρετόν. Ὁμοίως δὲ καὶ ἐπὶ τῶν ἄλλων, ὅσα τοιαύτην ἔχει τὴν σύγκρισιν. § 2. Ἐπ´ ἐνίων γὰρ εὐθέως κατὰ τὴν πρὸς ἕτερον σύγκρισιν καὶ ὅτι αἱρετὸν ἑκάτερον ἢ τὸ ἕτερον λέγομεν, οἷον ὅταν τὸ μὲν φύσει ἀγαθὸν τὸ δὲ μὴ φύσει λέγωμεν· τὸ γὰρ φύσει ἀγαθὸν δῆλον ὅτι αἱρετόν ἐστιν.


 

§ 1 .Ces mêmes lieux sont utiles pour prouver qu'une chose quelconque est absolument parlant à désirer ou à fuir ; car il suffit alors de faire disparaître le caractère de supériorité qu'on donne à l'une des deux. En effet si une chose plus précieuse est plus désirable, une chose précieuse est désirable : et si une plus utile est plus désirable, l'utile est désirable. Et de même pour toutes les autres choses entre lesquelles l'on peut établir ainsi la comparaison. § 2. Pour quelques-unes, aussitôt que nous avons fait la comparaison de l'une à l'autre, nous pouvons dire sur-le-champ, que toutes deux sont désirables, ou dire laquelle des deux est désirable: par exemple, quand nous disons que l'une est bonne par sa nature et que l'autre ne l'est pas ; car évidemment ce qui est bon par sa nature est désirable.

§ 1. Ces lieux, qui sont utiles pour connaître la supériorité d'un accident sur un autre, peuvent l'être également pour estimer à sa juste valeur chacun des accidents, pris à part, et sans aucune idée de comparaison ni de supériorité dans l'un des deux.

CHAPITRE V.

Il faut faire les lieux communs de l'accident le plus universels possible

§ 1. Ληπτέον δ´ ὅτι μάλιστα καθόλου τοὺς τόπους περὶ τοῦ μᾶλλον καὶ τοῦ μείζονος· ληφθέντες γὰρ οὕτως πρὸς πλείω χρήσιμοι ἂν εἴησαν. § 2. Ἔστι δ´ αὐτῶν τῶν εἰρημένων ἐνίους καθόλου μᾶλλον ποιεῖν μικρὸν παραλλάσσοντα τῇ προσηγορίᾳ, § 3. οἷον τὸ φύσει τοιοῦτο τοῦ μὴ φύσει τοιούτου μᾶλλον τοιοῦτο. § 4. Καὶ εἰ τὸ μὲν ποιεῖ τὸ δὲ μὴ ποιεῖ τὸ ἔχον τοιόνδε ᾧ ἂν ὑπάρχῃ, μᾶλλον τοιοῦτο ὅ ποτε ποιεῖ ἢ ὃ μὴ ποιεῖ, § 5. εἰ δ´ ἄμφω ποιεῖ, τὸ μᾶλλον ποιοῦν τοιοῦτο. § 6. Ἔτι εἰ τοῦ αὐτοῦ τινος τὸ μὲν μᾶλλον τὸ δὲ ἧττον τοιοῦτο· καὶ εἰ τὸ μὲν τοιούτου μᾶλλον τοιοῦτο, τὸ δὲ μὴ τοιούτου, δῆλον ὅτι τὸ πρῶτον μᾶλλον τοιοῦτο. § 7. Ἔτι ἐκ τῆς προσθέσεως, εἰ τῷ αὐτῷ προστιθέμενον τὸ ὅλον μᾶλλον ποιεῖ τοιοῦτο, § 8. ἢ εἰ τῷ ἧττον τοιούτῳ προστιθέμενον τὸ ὅλον μᾶλλον ποιεῖ τοιοῦτο. § 9. Ὁμοίως δὲ καὶ ἐκ τῆς ἀφαιρέσεως· οὗ γὰρ ἀφαιρεθέντος τὸ λειπόμενον ἧττον τοιοῦτο, αὐτὸ μᾶλλον τοιοῦτο. § 10. Καὶ τὰ τοῖς ἐναντίοις ἀμιγέστερα μᾶλλον τοιαῦτα, οἷον λευκότερον τὸ τῷ μέλανι ἀμιγέστερον.

§ 11. Ἔτι παρὰ τὰ εἰρημένα πρότερον τὸ μᾶλλον ἐπιδεχόμενον τὸν οἰκεῖον τοῦ προκειμένου λόγον· οἷον εἰ τοῦ λευκοῦ ἐστι λόγος χρῶμα διακριτικὸν ὄψεως, λευκότερον ὅ ἐστι μᾶλλον χρῶμα διακριτικὸν ὄψεως.

 

§ 1. Pour ces lieux, relatifs au plus et au moins, au plus grand et au plus petit, il faut les prendre le plus universels possible; car pris ainsi, ils sont applicables a plus de questions. § 2. Et l'on peut même parmi ceux qu'on a exposés en faire quelques-uns plus universels, en ne changeant que fort peu de chose à l'expression : § 3. par exemple, ce qui est de cette façon par nature est plus tel que ce qui n'est pas tel par nature. § 4. Et si l'un des accidents rend de telle façon, et que l'autre ne rende pas de telle façon, le sujet qui le possède, ou dont il est l'attribut, celui qui modifie le sujet est plus tel que celui qui ne le modifie pas. § 5. Et si tous les deux le modifient, c'est celui qui le modifie davantage qui a le plus telle qualité. § 6. De plus, si relativement à une même chose l'un est plus tel et l'autre l'est moins, et que l'un soit plus tel que telle autre chose, tandis que l'autre ne l'est pas, il est évident que la première est plus telle que l'autre. § 7. Et de même, en supposant que le terme est ajouté, si ajouté à la même chose il fait que le tout est davantage tel; § 8. ou encore si ajouté à ce qui est moins tel, il fait que le tout est davantage tel. § 9. Même remarque encore, si l'on retranche au lieu d'ajouter; car ce qui fait par cela seul qu'on le retranche que le reste est moins tel, est lui-même plue tel. § 10. Les choses qui se mêlent moins aux contraires sont aussi plus telles, par exemple le plus blanc se mêle moins au noir.

§ 11. Pour compléter ce qui a été dit plus haut, il faut préférer ce qui reçoit le plus la définition propre de l'objet; par exemple, si la définition du blanc est: couleur qui fiait que la vue distingue les objets, on appellera plus blanc ce qui sera plus couleur qui fait que la vue distingue les objets.

 

§ 1. Pour les lieux relatifs au plus et au moins, après avoir étudié les lieux qui indiquent la supériorité d'un accident sur un autre, et la préférence qu'on doit donner à l'un des deux, il passe aux lieux qui ne concernent que la comparaison des accidents quelconques, qu'ils soient d'ailleurs a rechercher ou à fuir. Voir plus haut, ch. 1, § 1; et il commence ici par les lieux du plus et du moins.

§ 2. Parmi ceux que l'on a exposés dans les chapitres précédents, depuis le commencement de ce livre.

§ 3. Est plus tel, est doué à un plus haut degré de telle qualité. J'ai cru devoir garder celte expression, quoique assez bizarre, parce qu'elle est plus concise et plus rapprochée du grec. Ce lieu a déjà été donné sous forme particulière, ch. 1, § 10, au lieu d'être présenté avec la généralité qu'il a ici comme le fait observer Pacius.

§ 4.  Et si l'un des accidents, lieu déjà présenté sous forme particulière, ch. 3, § 3.

§ 5. Qui le modifie davantage, lieu déjà présenté sons forme particulière, ch. 3, § 4.

§ 6. De plus si relativement à une même chose, lieu déjà présenté sous forme particulière, ch. 3,§ 7.

§ 7. En supposant que le terme est ajouté, lieu déjà présenté sous forme particulière, ch. 3, § 11.

§ 8. Si ajouté à ce qui est moins tel, lieu déjà présenté sous forme particulière, ch. 3, §18.

§ 9. Si l'on retranche au lieu d'ajouter, lieu déjà présenté sous forme particulière, ch. 3, § 13.

§ 10. Les choses qui se mêlent moins aux contraires, lieu déjà présenté sous forme particulière, ch. 2, §  16. — Sauf cette différence tous ces lieux sont semblables.


 

CHAPITRE VI.

De l'accident particulier : application des lieux précédents à l'accident particulier

Ἂν δ´ ἐπὶ μέρους καὶ μὴ καθόλου τὸ πρόβλημα τεθῇ, πρῶτον μὲν οἱ εἰρημένοι καθόλου κατασκευαστικοὶ ἢ ἀνασκευαστικοὶ τόποι πάντες χρήσιμοι. Καθόλου γὰρ ἀναιροῦντες ἢ κατασκευάζοντες καὶ ἐπὶ μέρους δείκνυμεν· εἰ γὰρ παντὶ ὑπάρχει, καὶ τινί, καὶ εἰ μηδενί, οὐδὲ τινί. Μάλιστα δ´ ἐπίκαιροι καὶ κοινοὶ τῶν τόπων οἵ τ´ ἐκ τῶν ἀντικειμένων καὶ τῶν συστοίχων καὶ τῶν πτώσεων. Ὁμοίως γὰρ ἔνδοξον τὸ ἀξιῶσαι, εἰ πᾶσα ἡδονὴ ἀγαθόν, καὶ λύπην πᾶσαν εἶναι κακόν, [XXa] τῷ εἴ τις ἡδονὴ ἀγαθόν, καὶ λύπην εἶναί τινα κακόν. ἔτι εἴ ..Τις αἴσθησις μὴ ἔστι δύναμις, καὶ ἀναισθησία τις οὐκ ἔστιν ἀδυναμία. Καὶ εἴ τι ὑποληπτὸν ἐπιστητόν, καὶ ὑπόληψίς τις ἐπιστήμη. Πάλιν εἴ τι τῶν ἀδίκων ἀγαθόν, καὶ τῶν δικαίων τι κακόν· πάλιν εἴ τι τῶν δικαίως κακόν, καὶ τῶν ἀδίκως τι ἀγαθόν. Καὶ εἴ τι τῶν ἡδέων φευκτόν, ἡδονή τις φευκτόν. Κατὰ ταὐτὰ δὲ καὶ εἴ τι τῶν ἡδέων ὠφέλιμον, ἡδονή τις ὠφέλιμον. Καὶ ἐπὶ τῶν φθαρτικῶν δὲ καὶ τῶν γενέσεων καὶ φθορῶν ὡσαύτως. Εἰ γάρ τι φθαρτικὸν ἡδονῆς ἢ ἐπιστήμης ὂν ἀγαθόν ἐστιν, εἴη ἄν τις ἡδονὴ ἢ ἐπιστήμη τῶν κακῶν. Ὁμοίως δὲ καὶ εἰ φθορά τις ἐπιστήμης τῶν ἀγαθῶν ἢ γένεσις τῶν κακῶν, ἔσται τις ἐπιστήμη τῶν κακῶν· οἷον εἰ τὸ ἐπιλανθάνεσθαι ἅ τις αἰσχρὰ ἔπραξε τῶν ἀγαθῶν, ἢ τὸ ἀναμιμνήσκεσθαι τῶν κακῶν, εἴη ἂν τὸ ἐπίστασθαι ἅ τις αἰσχρὰ ἔπραξε τῶν κακῶν. Ὡσαύτως δὲ καὶ ἐπὶ τῶν ἄλλων· ἐν ἅπασι γὰρ ὁμοίως τὸ ἔνδοξον.

Ἔτι ἐκ τοῦ μᾶλλον καὶ ἧττον καὶ ὁμοίως. Εἰ γὰρ μᾶλλον μὲν τῶν ἐξ ἄλλου γένους τι τοιοῦτο, ἐκείνων δὲ μηδέν ἐστιν, οὐδ´ ἂν τὸ εἰρημένον εἴη τοιοῦτον· οἷον εἰ μᾶλλον μὲν ἐπιστήμη τις ἀγαθὸν ἢ ἡδονή, μηδεμία δ´ ἐπιστήμη ἀγαθόν, οὐδ´ ἂν ἡδονὴ εἴη. Καὶ ἐκ τοῦ ὁμοίως δὲ καὶ ἧττον ὡσαύτως· ἔσται γὰρ καὶ ἀναιρεῖν καὶ κατασκευάζειν, πλὴν ἐκ μὲν τοῦ ὁμοίως ἀμφότερα, ἐκ δὲ τοῦ ἧττον κατασκευάζειν μόνον, ἀνασκευάζειν δὲ οὔ. Εἰ γὰρ ὁμοίως δύναμίς τις ἀγαθὸν καὶ ἐπιστήμη, ἔστι δέ τις δύναμις ἀγαθόν, καὶ ἐπιστήμη ἐστίν· εἰ δὲ μηδεμία δύναμις, οὐδ´ ἐπιστήμη. Εἰ δ´ ἧττον δύναμίς τις ἀγαθὸν ἢ ἐπιστήμη, ἔστι δέ τις δύναμις ἀγαθόν, καὶ ἐπιστήμη. Εἰ δὲ μηδεμία δύναμις ἀγαθόν, οὐκ ἀνάγκη καὶ ἐπιστήμην μηδεμίαν εἶναι ἀγαθόν. Δῆλον οὖν ὅτι κατασκευάζειν μόνον ἐκ τοῦ ἧττον ἔστιν.

Οὐ μόνον δ´ ἐξ ἄλλου γένους ἔστιν ἀνασκευάζειν, ἀλλὰ καὶ ἐκ τοῦ αὐτοῦ, λαμβάνοντα τὸ μάλιστα τοιοῦτον· οἷον εἰ κεῖται ἐπιστήμη τις ἀγαθόν, δειχθείη δ´ ὅτι φρόνησις οὐκ ἀγαθόν, οὐδ´ ἄλλη οὐδεμία ἔσται, ἐπεὶ οὐδ´ ἡ μάλιστα δοκοῦσα. Ἔτι ἐξ ὑποθέσεως, ὁμοίως ἀξιώσαντα, εἰ ἑνί, καὶ πᾶσιν ὑπάρχειν ἢ μὴ ὑπάρχειν, οἷον εἰ ἡ τοῦ ἀνθρώπου ψυχὴ ἀθάνατος, καὶ τὰς ἄλλας, εἰ δ´ αὕτη μή, μηδὲ τὰς ἄλλας. Εἰ μὲν οὖν ὑπάρχειν τινὶ κεῖται, δεικτέον ὅτι οὐχ ὑπάρχει τινί· ἀκολουθήσει γὰρ διὰ τὴν ὑπόθεσιν τὸ μηδενὶ ὑπάρχειν. Εἰ δὲ [XXb] τινὶ μὴ ὑπάρχειν κεῖται, δεικτέον ὅτι ὑπάρχει τινί· καὶ γὰρ οὕτως ἀκολουθήσει τὸ πᾶσιν ὑπάρχειν. Δῆλον δ´ ἐστὶν ὅτι ὁ ὑποτιθέμενος ποιεῖ τὸ πρόβλημα καθόλου, ἐπὶ μέρους τεθέντος· τὸν γὰρ ἐπὶ μέρους ὁμολογοῦντα καθόλου ἀξιοῖ ὁμολογεῖν, ἐπειδή, εἰ ἑνί, καὶ πᾶσιν ὁμοίως ἀξιοῖ ὑπάρχειν.

Ἀδιορίστου μὲν οὖν ὄντος τοῦ προβλήματος μοναχῶς ἀνασκευάζειν ἐνδέχεται, οἷον εἰ ἔφησεν ἡδονὴν ἀγαθὸν εἶναι ἢ μὴ ἀγαθὸν καὶ μηδὲν ἄλλο προσδιώρισεν. Εἰ μὲν γὰρ τινὰ ἔφησεν ἡδονὴν ἀγαθὸν εἶναι, δεικτέον καθόλου ὅτι οὐδεμία, εἰ μέλλει ἀναιρεῖσθαι τὸ προκείμενον· ὁμοίως δὲ καὶ εἰ τινὰ ἔφησεν ἡδονὴν μὴ εἶναι ἀγαθόν, δεικτέον καθόλου ὅτι πᾶσα. Ἄλλως δ´ οὐκ ἐνδέχεται ἀναιρεῖν· ἐὰν γὰρ δείξωμεν ὅτι ἐστὶ τὶς ἡδονὴ οὐκ ἀγαθὸν ἢ ἀγαθόν, οὔπω ἀναιρεῖται τὸ προκείμενον. Δῆλον οὖν ὅτι ἀναιρεῖν μὲν μοναχῶς ἐνδέχεται, κατασκευάζειν δὲ διχῶς· ἄν τε γὰρ καθόλου δείξωμεν ὅτι πᾶσα ἡδονὴ ἀγαθόν, ἄν τε ὅτι ἐστὶ τὶς ἡδονὴ ἀγαθόν, δεδειγμένον ἔσται τὸ προκείμενον. Ὁμοίως δὲ κἂν δέῃ διαλεχθῆναι ὅτι ἐστὶ τὶς ἡδονὴ οὐκ ἀγαθόν, ἐὰν δείξωμεν ὅτι οὐδεμία ἀγαθὸν ἢ ὅτι τὶς οὐκ ἀγαθόν, διειλεγμένοι ἐσόμεθα ἀμφοτέρως, καὶ καθόλου καὶ ἐπὶ μέρους, ὅτι ἐστὶ τὶς ἡδονὴ οὐκ ἀγαθόν. Διωρισμένης δὲ τῆς θέσεως οὔσης, διχῶς ἀναιρεῖν ἔσται, οἷον εἰ τεθείη τινὶ μὲν ὑπάρχειν ἡδονῇ ἀγαθῷ εἶναι, τινὶ δ´ οὐχ ὑπάρχειν· εἴτε γὰρ πᾶσα δειχθείη ἡδονὴ ἀγαθὸν εἴτε μηδεμία, ἀνῃρημένον ἔσται τὸ προκείμενον. Εἰ δὲ μίαν ἡδονὴν μόνην ἀγαθὸν ἔθηκεν εἶναι, τριχῶς ἐνδέχεται ἀναιρεῖν· δείξαντες γὰρ ὅτι πᾶσα ἢ ὅτι οὐδεμία ἢ ὅτι πλείους μιᾶς ἀγαθόν, ἀνῃρηκότες ἐσόμεθα τὸ προκείμενον. Ἐπὶ πλεῖον δὲ τῆς θέσεως διορισθείσης, οἷον ὅτι ἡ φρόνησις μόνη τῶν ἀρετῶν ἐπιστήμη, τετραχῶς ἔστιν ἀναιρεῖν· δειχθέντος γὰρ ὅτι πᾶσα ἀρετὴ ἐπιστήμη ἢ ὅτι οὐδεμία ἢ ὅτι καὶ ἄλλη τις, οἷον ἡ δικαιοσύνη, ἢ ὅτι αὐτὴ ἡ φρόνησις οὐκ ἐπιστήμη, ἀνῃρημένον ἔσται τὸ προκείμενον.

Χρήσιμον δὲ καὶ τὸ ἐπιβλέπειν ἐπὶ τὰ καθ´ ἕκαστα, ἐν οἷς ὑπάρχειν τι ἢ μὴ εἴρηται, καθάπερ ἐν τοῖς καθόλου προβλήμασιν. Ἔτι δ´ ἐν τοῖς γένεσιν ἐπιβλεπτέον διαιροῦντα κατ´ εἴδη μέχρι τῶν ἀτόμων, καθάπερ εἴρηται πρότερον· ἄν τε γὰρ παντὶ φαίνηται ὑπάρχον ἄν τε μηδενί, πολλὰ προενέγκαντι ἀξιωτέον καθόλου ὁμολογεῖν ἢ φέρειν ἔνστασιν ἐπὶ τίνος οὐχ οὕτως. Ἔτι ἐφ´ ὧν ἔστιν ἢ εἴδει ἢ ἀριθμῷ διορίσαι τὸ συμβεβηκός, σκεπτέον εἰ μηδὲν τούτων ὑπάρχει, οἷον ὅτι ὁ χρόνος [XXIa] οὐ κινεῖται οὐδ´ ἐστὶ κίνησις, καταριθμησάμενον πόσα εἴδη κινήσεως· εἰ γὰρ μηδὲν τούτων ὑπάρχει τῷ χρόνῳ, δῆλον ὅτι οὐ κινεῖται οὐδ´ ἐστὶ κίνησις. Ὁμοίως δὲ καὶ ὅτι ἡ ψυχὴ οὐκ ἀριθμός, διελόμενον ὅτι πᾶς ἀριθμὸς ἢ περιττὸς ἢ ἄρτιος· εἰ γὰρ ἡ ψυχὴ μήτε περιττὸν μήτε ἄρτιον, δῆλον ὅτι οὐκ ἀριθμός.

Πρὸς μὲν οὖν τὸ συμβεβηκὸς διὰ τῶν τοιούτων καὶ οὕτως ἐπιχειρητέον.
 

§ 1. Si la question est particulière et non pas universelle, tous les lieux indiqués plus haut, soit constructifs, soit destructifs, sont applicables. Il suffit en effet d'avoir universellement établi ou réfuté la thèse pour avoir prouvé par cela seul la proposition particulière; car du moment que l'attribut est à tout le sujet, il est aussi à quelque partie du sujet: et s'il n'est à aucune partie du sujet, il n'est pas non plus à quelque partie du sujet. § 2. Les plus commodes et les plus communs de ces lieux, ce sont ceux qu'on tire des opposés, des conjugués et des cas. Ainsi ce sont deux propositions également probables, que si tout plaisir est bon, toute douleur est mauvaise, et que si quelque plaisir est bon quelque douleur aussi est mauvaise: que si quelque sensation n'est pas puissance, quelque insensibilité n'est pas non plus impuissance ; et que si quelque chose de perçu est su, quelque perception est science: déplus, que si quelque chose d'injuste est bon, quelque chose de juste est mauvais, et que si quelque chose de fait injustement est mauvais, quelque chose de fait justement est bon : que si quelque chose d'agréable est à fuir, quelque plaisir est à fuir, et que si quelque chose d'agréable est utile, quelque plaisir est utile.

§ 3. Il en est tout à fait de même pour les choses qui détruisent, pour les générations et les destructions des choses. En effet si ce qui détruit le plaisir ou la science est fyra, il faut que quelque plaisir, quelque science soit mauvaise ; et de même si la destruction de la science est bonne, ou si la génération en est mauvaise, il y aura quelque science mauvaise; par exemple, s'il est bon d'oublier ce que quelqu'un a fait de honteux, ou bien si se le rappeler est mal, savoir ce qu'il a fait de mal ce sera chose mauvaise. Et de même pour tous les autres cas : car le probable s'y établit dans tous de la même manière.

§ 4. En outre, il faut voir à ce qui est de telle façon plus ou moins ou semblablement. En effet si d'une chose on dit qu'elle est plus telle parmi des choses tirées d'un • autre genre, et que ces choses ne soient point telles, le sujet en question ne le sera pas non plus ; par exemple, si l'on dit que la science est plus un bien que le plaisir, et qu'aucune science ne soit un bien, il n'y aura pas non plus de plaisir qui en soit un. Et de même pour sembla-blement et pour moins; c'est-à-dire qu'on pourra, soit établir la thèse, soit la renverser. Seulement les deux argumentations se tirent de semblablement : mais avec moins on ne peut qu'établir la thèse, on ne peut la renverser. En effet si l'on peut dire également que quelque faculté étant bonne, la science est bonne, du moment que quelque faculté est bonne la science l'est aussi : et s'il n'y a aucune faculté de bonne, il n'y a pas non plus de scieuce qui le soit. Au contraire, si l'on dit que quelque faculté est moins bonne que la science, et que quelque faculté soit bonne, la science l'est aussi ; mais si aucune faculté n'est bonne, il n'eu résulte pas nécessairement qu'aucune science ne le soit. On voit donc clairement que par le moins, on ne peut qu'établir la thèse.

§ 5. Non seulement on peut renverser la thèse, en partant d'un autre genre, mais aussi en partant du même et en y prenant ce qui est le plus tel ; par exemple, s'il a été posé que la science est un bien et qu'on prouve que la sagesse même n'est pas bonne, aucune autre science ne le sera certainement, puisque celle qui le paraît le plus ne l'est pas. § 6. Et de même, si l'on pose cette hypothèse que, du moment qu'un attribut est ou n'est pas à un sujet, il est ou n'est pas également à tous; par exemple, si l'on suppose que l'âme de l'homme étant immortelle, toutes les autres aussi le seront, et que celle-là ne l'étant pas, les autres ne le seront pas davantage. Si donc l'on pose que cet attribut est à quelque sujet, il faudra montrer qu'il n'est pas à quelque sujet; car il s'en suivra, à cause de l'hypothèse même, qu'il n'esta aucun ; et si l'on pose qu'il n'est pas à quelque sujet, il faut montrer qu'il est à quelque sujet; car, par cette hypothèse aussi, il s'ensuivra qu'il est à tous. Il est évident qu'au moyen de l'hypothèse, on a fait universelle la question qui avait été posée particulière. En effet ou est convenu que celui qui accorde le particulier, accorde aussi l'universel, puisqu'il accorde que du moment que l'attribut est à un sujet il est aussi à tous.  § 7. Quand la question reste indéterminée, on ne peut réfuter que d'une seule manière : par exemple, s'il a été dit que le plaisir est un bien ou n'est pas un bien, sans ajouter aucune détermination. En effet, si l'interlocuteur a dit que quelque plaisir est un bien, il faut montrer universellement qu'aucun plaisir n'est un bien, quand on veut détruire l'assertion avancée. Et de même, s'il a dit que quelque plaisir n'est pas un bien, il faut montrer universellement que tout plaisir est un bien. De toute autre façon,, on ne peut détruire la proposition; car si nous montrons que quelque plaisir est on n'est pas un bien, la proposition avancée n'est pas encore détruite. Il est donc évident qu'on ne peut la détruire que d'une seule façon, tandis qu'on peut l'établir de deux. Il suffit, en effet, de montrer universellement que tout plaisir est bon, ou bien que quelque plaisir est bon, pour montrer ce qu'on se propose. Et de même, s'il faut discuter cette question, que quelque plaisir n'est pas bon, nous pourrons montrer qu'aucun plaisir n'est bon, ou bien que quelque plaisir ne l'est pas; et nous aurons montré des deux manières, universellement et particulièrement, que quelque plaisir n'est pas bon. § 8. Quand la proposition est déterminée, on peut la renverser de deux façons: par exemple, si l'adversaire a soutenu que quelque plaisir est bon et que quelque autre ne l'est pas; car, soit que l'on prouve que tout plaisir est bon ou qu'aucun plaisir n'est bon, la thèse est également détruite. § 9. S l'adversaire a supposé qu'il n'y a qu'un seul plaisir de bon, on peut détruire cette supposition de trois manières : ainsi l'on peut montrer que tout plaisir est bon, ou qu'aucun plaisir n'est bon, ou que plus d'un plaisir est bon; et l'on aura toujours détruit la proposition.

§ 10. Si l'on détermine encore davantage la proposition, et qu'on dise, par exemple, que la prudence seule parmi les vertus est une science, on peut renverser l'assertion de quatre façons. Ainsi, l'on pourra montrer que toute vertu est science ou qu'aucune n'est science, ou que quelqu'autre l'est aussi, par exemple, la justice; ou bien enfin que la prudence elle-même n'est pas science ; et alors la proposition avancée sera détruite.

§ 11. Il est utile aussi de considérer les individus dont on a affirmé ou dont on a nié quelque attribut, comme on l'a fait dans les questions universelles. §12. Il faut encore regarder aux genres, en divisant les espèces jusqu'aux individus,ainsi qu'on l'a dit plus haut: car, soit que l'accident paraisse être à tous les individus ou n'être à aucun, quand on compare plusieurs exemples, il faut demander à l'adversaire qu'il accorde que l'accident est universel, ou bien qu'il indique dans sa réfutation le sujet qui n'est point ainsi qu'on l'a dit. § 13. Dans les choses où l'on peut déterminer l'accident, soit par le nombre, soit par l'espèce, il faut regarder s'il n'est pas de nature à ne recevoir aucune de ces déterminations ; par exemple, ou peut soutenir que le temps ne se meut pas ou qu'il n'est pas du mouvement, après qu on a compté toutes les espèces du mouvement. En effet, si aucune d'elles n'est au temps, il est évident qu'il ne se meut pas et qu'il n'est pas un mouvement. Et de même, on peut soutenir que l'âme n'est pas un nombre, après qu'on a divisé tout nombre en .pair ou impair: car si l'âme n'est ni paire ni impaire, il est clair qu'elle n'est pas un nombre.

§  14. C'est ainsi qu'il faut procéder relativement à l'accident et par les lieux qu'on vient de dire.

§ 1. Si la question est particulière, tous les lieux indiqués jusqu'à présent dans le second livre et dans celui-ci, supposaient que la proposition était universelle. Mais ces mêmes lieux sont applicables également, quand la proposition est particulière.

Soit constructifs, soit destructifs, on pourrait dire aussi soit aftirmatifs, soit négatifs ; mais l'expression serait à la fois moins fidèle et moins juste. On peut réfuter, détruire une thèse par l'affirmation ; on peut l'établir, la construire par la négation.

§ 2. Du moment que l'attribut est à tout le sujet, même théorie, Premiers Analytiques, liv. 2, ch. 1, et plus haut, liv. 2 des Topiques, § S.

quelque plaisir est utile, les manuscrits donnent habituellement est bon au lieu d'utile; le plus petit nombre donne utile, leçon meilleure, et qu'a préférée l'édition de Berlin, sans d'ailleurs indiquer les variantes.

§ 3. Les générations et les destructions des choses, voir plus haut, liv. 2, ch. 9, § 3.

Le probable, que poursuit la dialectique, sans pousser d'ailleurs jusqu'au vrai comme la philosophie.

§ 4. Plus ou moins ou semblablement, Voir plus haut, liv. 2, ch. 10.

Les deux argumentations, en sens opposé, pour établir ou pour renverser la thèse selon le besoin de la discussion.

§. 5. Pacius remarque que dans le 6e livre de la Morale à Nicomaque, ch. 8 (1141, b. 11), Aristote semble distinguer la sagesse de la science ; ce qui contredirait la doctrine présentée ici.

§ 6. On pose cette hypothèse, par convention faite entre les deux interlocuteurs; ce qui donne lieu aux syllogismes hypothétiques. Voir plus haut, liv. 1, ch. 18, § 9,et liv. 2, ch. 3,  § 2.

§ 7. Reste indéterminé, sans aucun signe d'universalité ou de particularité. Voir les Première Analytiques, liv. 1, ch. 1, §  5 et suiv., et dans l'Herménéa, ch. 7, § 3, où ceci est expliqué.

§ 8. Quand la proposition est déterminée, quand elle a un signe spécial d'universalité ou de particularité : tout ou quelque.

§ 10. De quatre façons, il semble, d'après le Commentaire d'Alexandre, qu'il aurait eu pour variante cinq au lieu de quatre. Il ajoute aussi que Tbéophraste traitait la question ici indiquée à la lin de son Traité sur l'affirmation, qui n'est pas venu jusqu'à nous.

§ 11. Comme on l'a fait dans les questions universelles, liv. a, cb. 2, § 2. Il faut, du reste, entendre ici l'expression individus dans le sens qui lui était donné pour cet autre passage, c'est-à-dire , d'espèces qui ne peuvent plus être divisées qu'en individus proprement dits.

§ 12. Ainsi qu'on l'a dit plus haut, liv. 2, ch. 2,  § 2.

§ 13. Après qu'on a compté toutes les espèces de mouvement, Voir les catégories, ch. 14.

L'âme n'est pas un nombre, contre l'opinion de Xénocrate. Voir plus haut, liv. 3, ch. 4, § 3.

§ 14. Qu'on vient de dire, dans le second et le troisième livres.