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TABLE DES MATIÈRES DE LA MÉTÉOROLOGIE

table des matières de l'œuvre d'Aristote

ARISTOTE

 

 

MÉTÉOROLOGIE. (Météorologiques)

 

LIVRE I

 

DISSERTATION SUR LA COMPOSITION DE LA MÉTÉOROLOGIE ET DU PETIT TRAITÉ DU MONDE.- livre II

 

texte grec

 

 

 

 

LIVRE I.
CHAPITRE PREMIER.
Récapitulation de travaux précédents sur la science de la nature. Objet et étendue de la Météorologie. Indication de travaux ultérieurs sur les animaux et les plantes.

§ 1. 338a Dans des ouvrages antérieurs, nous avons traité des premiers principes de la nature, du mouvement physique dans toutes ses parties, des astres dont la marche si bien ordonnée s'accomplit dans la sphère supérieure, des éléments des corps dont nous avons indiqué le nombre, la qualité et les permutations réciproques, et enfin de la génération et de la destruction des choses considérées dans leur ensemble.
§ 2. De toute cette étude, il ne nous reste plus qu'à examiner une seule partie, celle que nos devanciers ont ordinairement nommée la météorologie. Elle 339 comprend tous ces phénomènes qui, bien que se produisant suivant des lois naturelles, ont cependant des conditions moins régulières que celles de l'élément premier des corps, et qui ont lieu dans l'espace le plus rapproché de la révolution des astres ; je veux dire, par exemple, la voie lactée, les comètes, les météores ignés et à mouvement rapide, que nous pouvons regarder comme des accidents communs de l'air et de l'eau. Enfin cette science comprend l'étude de toutes les espèces de la terre, de ses parties, ou des propriétés de ces parties, qui nous peuvent servir à expliquer les causes des vents et des tremblements de terre 339a, et de toutes les circonstances qui accompagnent les mouvements qu'ils provoquent. Parmi ces phénomènes, les uns nous sont inexplicables; les autres nous sont accessibles dans une certaine mesure. Nous traiterons aussi de la chute de la foudre, des ouragans, des tempêtes, et de toute cette série de phénomènes qui par leur combinaison deviennent des modifications de ces mêmes corps.
§ 3. Après avoir parcouru tous ces sujets, nous essayerons, suivant notre méthode habituelle, de traiter des animaux et des plantes, soit en général, soit à part et en détail; car cette étude une fois faite, nous aurons à peu près achevé la totalité des recherches que dès le début nous nous étions proposé de faire.
Ayant donc ainsi commencé, il nous faut étudier d'abord les phénomènes dont nous venons de parler.

Livre I, Ch. 1, § 1. Dans des ouvrages antérieurs, d'après les explications qui suivent et d'après les commentateurs grecs, Alexandre d'Aphrodisée ou d'Égée, Olympiodore et Philopon, les ouvrages antérieurs dont il est ici question sont au nombre de trois : La Physique, Le Traité du ciel et Le Traité de la génération et de la corruption. - Des premiers principes de la nature, ce sujet a été traité dans la Physique. - Du mouvement physique dans toutes les parties, id. ibid. - Des astres, dans le Traité du ciel. - Des éléments des corps, au second livre du Traité de la génération et de la corruption. - Et les permutations réciproques, ceci semblerait se rapporter plus particulièrement au IVe livre de la Météorologie elle-même. - De la génération et de la destruction des choses, dans le traité de ce nom, et spécialement dans le premier livre de et traité.

§ 2. De toute cette étude, c'est-à-dire l'étude générale de la nature. - Nos devanciers, les commentateurs grecs n'indiquent pas à qui s'applique précisément cette désignation. Elle prouve qu'avant le temps d'Aristote, on avait essayé de réunir en une science régulière l'étude de certains phénomènes qui se passent dans l'atmosphère; et Aristote lui-même cite dans son ouvrage une foule de théories antérieures aux siennes. - L'élément premier des corps, selon Alexandre, l'élément premier signifie ici le corps éthéré, qui enveloppe tous les astres, et qui se meut circulairement. Dans les théories d'Aristote et de l'antiquité, ce cinquième élément a une marche plus régulière qu'aucun des quatre autres. - Le plus rapproché de la résolution des astres, ceci n'est pas exact si on l'applique même aux planètes; ce l'est bien moins encore si on l'applique aux étoiles fixes. Mais aujourd'hui même on ne sait pas précisément à quelle distance de la terre se passent les phénomènes météorologiques. - La voie lactée, l'étude de la voie lactée ne fait plus partie de la météorologie depuis qu'on sait que c'est un amas innombrables d'étoiles fixes très rapprochées entre elles. Aristote lui-même s'occupe plus loin de la voie lactée, dans le ch. 8 du premier livre. - Les comètes, l'étude des comètes fait aujourd'hui partie de l'astronomie. Au XVIIe siècle, Roberval les compte encore parmi les météores, et Descartes le lui reproche, tome IX, p. 557, édit. de V. Cousin. - Les météores ignés, par exemple, les aurores boréales, les étoiles filantes, les bolides etc. - Des accidents communs de l'air et de l'eau, c'est ce qui ressortira des explications et des théories qui seront exposées plus loin. L'air et l'eau exercent une action constante l'un sur l'autre, soit pour la vaporisation des liquides, soit pour la rétraction de la lumière; et c'est à l'aide de l'air et de l'eau combinés avec la chaleur et le froid qu'Aristote essaiera d'expliquer tous les phénomènes de la météorologie. - De toutes les espèces de la terre, la géologie forme maintenant une science à part. - Les causes des vents, on verra plus loin que les vents sont très étroitement rattachés aux tremblements de terre. Aujourd'hui ces phénomènes sont parfaitement distingués les uns des autres; au temps d'Aristote, il étaient encore confondus. - Les uns sont inexplicables, de nos jours même et malgré les progrès de la science, la météorologie est bien loin de pouvoir expliquer tout ce qu'elle observe; et il faut ajouter qu'elle ne s'en flatte pas. - Dans une certaine mesure, cet aveu est plein de modestie et de justesse. - La foudre, les ouragans, les tempêtes, ce sont toujours là des sujets traités par la météorologie.

§ 3. Des animaux et des plantes, pour les animaux, il reste d'Aristote plusieurs traités admirables qui font une des meilleures parts du sa gloire; mais quant aux plantes, si Aristote a fait réellement quelque ouvrage, il ne nous en est rien parvenu, la traité Des Plantes compris dans ses œuvres étant apocryphe. Les commentateurs grecs ne citent aucun ouvrage spécial de lui sur cette matière. Diogène Laërce, dans son catalogue, mentionne deux livres sur les plantes (livre V, ch. 1, p. 116, ligne 49, édit. Firmin Didot) Mais si Aristote n'a pas écrit personnellement sur la botanique, il n'y a pas de doute que c'est lui qui a inspiré et guidé Théophraste, son disciple. Voir plus loin le IVe livre, ch. 12, § 13, où il est encore question des études sur les animaux et les plantes. - Dès le début, c'est-à-dire quand il a commencé l'étude générale de la nature. - Dont nous venons de parler, c'est-à-dire des phénomènes particuliers dont l'étude constitue la météorologie. On voit d'ailleurs que dans ce assumé ne figure que très obscurément l'indication des théories qui forment le lVe livre de la Météorologie. Voir la Dissertation préliminaire sur la composition de cet ouvrage d'Aristote.

CHAPITRE II.
Principes et éléments généraux du monde terrestre; ses rapports avec le reste de l'univers.

§ 1. Nous avons antérieurement établi qu'il n'y a qu'un seul principe pour les corps dont se compose la nature des corps soumis au mouvement circulaire. Nous avons établi aussi qu'il y a quatre autres corps formés par les quatre principes, dont le mouvement, avons-nous dit, est double, l'un partant du centre, l'autre se dirigeant vers le centre. Ces quatre éléments sont le feu, l'air, l'eau et la terre. Parmi eux l'un, le feu, est à la surface de tous les autres; et l'autre, la terre, leur sert de base. Les deux autres ont beaucoup de rapport chacun en soi avec ceux-là; l'air se rapproche davantage du feu, de même que l'eau se rapproche de la terre. Le monde entier de la terre se compose de ces quatre corps, et c'est pour ce monde ainsi composé que nous devons étudier tous les phénomènes qui y font sentir leur influence.
§ 2. D'abord, il faut de toute nécessité que ce monde se rattache sans discontinuité de quelque façon que ce puisse être, aux révolutions supérieures, de telle sorte que toute sa puissante ordonnance soit gouvernée par ces révolutions. C'est qu'en effet le principe qui donne le mouvement à toutes choses doit être considéré comme la cause première. De plus, cette cause est éternelle; elle n'a pas de fin pour le mouvement qui s'accomplit dans l'espace; mais elle en est éternellement à finir. Quant à tous ces corps, ils ont des lieux séparés les uns des autres et limités, de telle manière qu'il faut regarder comme causes des phénomènes qui se produisent dans le monde, le feu, la terre et les éléments analogues, qui servent à ces phénomènes comme d'une espèce de matière; car c'est du nom de matière que nous appelons le sujet et ce qui souffre les phénomènes, tandis que ce qui est cause, en ce sens que c'est de là que part le principe du mouvement, doit être regardé comme la puissance propre aux corps dont le mouvement est éternel.

Ch. II, § 1. Antérieurement établi, dans le Traité du Ciel, et dans le Traité de la génération et de la corruption. - Pour les corps... la nature des corps, la répétition est dans le texte, et je n'ai pas cru devoir l'éviter. - Soumis au mouvement circulaire, c'est l'éther, qui est considéré à la fois comme étant un cinquième élément, et comme l'élément supérieur et premier. - Nous avons établi, dans les deux traités qui viennent d'être cités au début de ce paragraphe. - Est double, ce sont les deux forces appelées plus tard chez les modernes centrifuge et centripète. Le feu et l'air semblaient aux anciens obéir à la première; la terre et l'eau, obéir à la seconde. - Le feu à la surface de tous les autres, si l'on excepte l'éther, qui est encore au-dessus du feu. - La terre leur sert de base, c'est vrai dans le sens restreint où l'on peut entendre ceci; mais cette opinion est fausse si l'on fait de la terre le centre du monde, comme l'a toujours fait Aristote. - Le monde entier de la terre, on verra plus loin dans le IVe livre que l'auteur essaie d'expliquer la formation de toutes les substances que la terre renferme par la combinaison des quatre éléments primitifs.

§ 2. Ce monde se rattache, cette assertion est vraie, si on la prend dans toute sa généralité; mais ceci ne veut pas dire que notre monde soit soumis aux influences chimériques qu'avait imaginées l'astrologie. - Le principe... la cause première, il semble qu'il y a ici quelque redondance. La cause première est unique; dès lors l'ordonnance de l'univers entier relève de cette cause, et l'ensemble du système, quelque immense qu'il soit, atteste l'unité du plan. Voir le Vllle livre de la Physique, dernier chapitre. - Pour le mouvement qui accomplit dans l'espace, c'est le sens que donne Alexandre, et qui est en effet le plus acceptable. - Elle en est éternellement à finir, et à commencer, à cause du mouvement circulaire, où l'on ne saurait trouver ni commencement ni fin, contrairement au mouvement en ligne droite, qui part d'un point pour aboutir à un autre. - Tous ces corps, la terre, l'eau, l'air, le feu. - Dans le monde, ou plutôt dans notre atmosphère. - D'une espèce de matière, ceci est vrai en ce sens que dans les quatre éléments les phénomènes météorologiques ne pourraient avoir lieu. - Que nous appelons le sujet, la substance, quelle qu'elle soit, dont les modifications nous frappent par les phénomènes qu'elles causent. - Le principe du mouvement, en termes plus simples, la cause motrice. - Dont le mouvement est éternel, les corps célestes.

CHAPITRE III.
Arrangement et nature des quatre éléments. - Opinion d'Anaxagore sur l'éther. - De la nature particulière du corps qui remplit l'espace entre la terre et les astres. - Double nature de l'exhalaison. De la formation et de la hauteur des nuages. Des régions supérieures de l'air.

§ 1. Ainsi donc, après avoir rappelé les principes que nous avons posés au début et les définitions antérieurement données, parlons ici de la voie lactée telle qu'elle nous apparaît, des comètes, et de tous les autres phénomènes qui se rapprochent de ceux-là, Nous avons dit que le feu, l'air, l'eau et la terre viennent les uns des autres, et que chacun d'eux étaient 339b en puissance dans chacun des autres, comme il en est d'ailleurs pour toutes les, choses qui ont un sujet un et identique dans lequel elles se résolvent en dernière analyse.
§ 2. On pourrait d'abord se demander pour ce corps qu'on appelle l'air, quelle en est an juste la nature dans le monde qui entoure la terre, et quel est son ordre relativement aux autres éléments, nominés les éléments des corps. On sait d'une manière certaine quel est le rapport de la masse terrestre aux grandeurs dont elle est entourée; car nous avons déjà appris par des observations d'astronomie qu'elle est beaucoup plus petite que certains astres. Quant à la nature de l'eau constituée et limitée comme elle l'est, nous ne l'avons jamais vue et il est impossible de la voir jamais, séparée du corps que forme la terre, tant pour les eaux qui sont à découvert, la mer par exemple et les fleuves, que pour l'eau qui pourrait se dérober à nous par la profondeur où l'eau serait cachée. Or, l'espace compris entre la terre et les plus rapprochés des astres, doit-il être regardé comme un corps unique par sa nature? Est-ce plusieurs corps? Et s'il y en a plusieurs, quel en est le nombre, et jusqu'où s'étendent les lieux divers qu'ils occupent?
§ 3. Nous avons dit antérieurement, en parlant du premier élément, quelles en sont les propriétés, et nous avons ajouté que le monde des révolutions supérieures était rempli entièrement par ce corps. Nous pouvons dire d'ailleurs que cette opinion ne nous est pas du tout personnelle, et que c'est une vieille idée qu'ont eue même des philosophes fort anciens.
§ 4. Ainsi ce qu'on appelle l'éther a reçu très anciennement cette dénomination, qu'Anaxagore, ce me semble, a voulu identifier avec celle du feu ; car pour lui les régions supérieures étaient pleines de feu, et il pensa devoir appeler éther la force qui les remplit. En ceci il a bien vu; car on a pu avec toute raison regarder comme divin le corps qui jouit d'un mouvement éternel et appeler par conséquent ce corps Ether, à cause de cette propriété qui le fait si différent de tous les corps que nous voyons. C'est qu'il faut bien le dire : ce n'est pas une fois, deux fois, ni même un petit nombre de fois que les mêmes opinions se reproduisent périodiquement dans l'humanité ; c'est un nombre de fois infini.
§ 5. Ceux qui prétendent que l'enveloppe du monde est un feu pur, qu'il y a autre chose que les corps lumineux qui circulent, et que tout ce qui est compris entre la terre et les astres est de l'air, ne soutiendraient pas sans doute une opinion si puérile, s'ils examinaient les démonstrations tout à fait incontestables que de notre temps les mathématiques ont données. C'est qu'en effet il serait par trop simple de croire que chacun des corps qui se meuvent dans l'espace a des dimensions aussi petites qu'il nous le parait, quand nous les considérons d'ici-bas.
§ 6. Nous avons déjà, dit dans nos considérations sur le lieu supérieur, et nous pouvons bien répéter ici dans les mêmes termes, 340a que, si les espaces étaient remplis de feu et que les corps fussent composés de cet élément, c'en serait fait dès longtemps de tous les autres.
§ 7. Les espaces ne peuvent pas davantage être remplis d'air tout seul ; car ce serait dépasser complètement l'égalité de proportion générale qui doit régner entre des corps de même ordre, si deux éléments suffisaient à remplir tout l'espace compris entre le ciel et la terre. La masse totale de la terre, en y comprenant et toute la terre et la quantité de l'eau qui y est renfermée, n'est rien pour ainsi dire en comparaison de la grandeur qui l'environne. Or nous ne voyons pas qu'il y ait une différence d'une grandeur aussi prodigieuse entre les volumes, lorsque l'air se produit de l'eau sécrétée, ou lorsque le feu se produit de l'air. Il faut donc nécessairement que le même rapport que cette petite quantité d'eau soutient avec l'air qui en est formé, se retrouve aussi de tout l'air à toute l'eau.
§ 8. D'ailleurs peu importe de dire que ces corps ne sont pas produits les uns par les autres, mais qu'ils ont cependant des propriétés tout à fait égales; car de cette façon il faut toujours nécessairement que l'égalité de puissance reste à leurs masses, absolument comme s'ils étaient en effet issus les uns des autres. Il est donc évident que ni l'air ni le feu ne remplissent à eux seuls tout l'espace intermédiaire.
§ 9. Reste une dernière question à se faire : c'est de savoir dans quel ordre sont placés ces deux éléments relativement à la position du premier corps, l'air et le feu j'entends, et par quelle cause la chaleur des astres qui sont en haut descend dans les lieux qui entourent la terre. Ainsi donc, après avoir parlé d'abord de l'air, suivant le plan que nous nous sommes tracé, nous parlerons ensuite des autres éléments de la même façon.
§ 10. Si l'eau vient de l'air, et l'air de l'eau, pourquoi les nuages ne se forment-ils pas dans la région supérieure? Et ceci semblerait d'autant mieux devoir être que l'espace est plus éloigné que la terre et plus froid qu'elle, par ces deux raisons qu'il n'est point assez voisin des astres qui sont chauds, ni des rayons réfléchis par la terre, lesquels empêchent les nuages de se former dans son voisinage, en divisant par leur chaleur ceux qui se forment. Les nuages ne peuvent donc se condenser que là où cessent les rayons réfléchis, parce qu'ils se dispersent dans l'immensité.
§ 11. Ainsi donc, ou bien l'eau ne peut pas venir de toute la masse de l'air, ou si elle vient également de toute la masse, il faut que l'air qui environne la terre ne soit pas seulement de l'air, mais comme une espèce de vapeur, ce qui fait qu'il peut ensuite se convertir en eau. Mais si l'air tout entier, tel qu'il est, n'était qu'une vapeur, la quantité de l'air et de l'eau semblerait alors l'emporter de beaucoup sur les autres éléments, si les espaces des régions supérieures sont remplis 341 d'un certain corps, et que ce corps ne puisse être le feu parce qu'alors il dessécherait tout le reste. Reste donc que ces espaces soient pleins d'air et d'eau autour de toute la terre; car la vapeur n'est pas autre chose qu'une sécrétion de l'eau.
§ 12. Ne poussons pas du reste ces considérations plus loin que nous ne venons de le faire; mais ajoutons pourtant, afin de bien éclaircir ce qui sera dit plus tard et ce qui vient d'être dit, que pour nous ce qui est au-dessus de la terre et jusqu'à la lune est un corps différent du feu et de l'air, qu'il y a dans ce corps une partie plus pure, et une partie moins subtile, et que ce corps a des différences là surtout où il aboutit à l'air et au inonde qui environne la terre.
§ 13. Comme le premier élément et les corps qu'il renferme se meuvent circulairement, la partie du monde inférieur et de l'élément qui lui est éternellement contiguë, se trouvant divisée par le mouvement, s'enflamme et produit la chaleur. Nous devons croire qu'il en est ainsi, en nous appuyant sur ce principe que le corps au-dessous de la révolution supérieure, comme une sorte de matière qui en puissance est chaude, froide, sèche, humide, et douée de toutes les autres propriétés conséquences de celles–là, devient et est tout cela par le mouvement et l'immobilité, dont nous avons ailleurs étudié la cause elle principe.
§ 14. C'est donc au centre et autour du centre que le plus lourd et le plus froid, la terre et l'eau, se place sécrété comme il l'est; autour de la terre et de l'eau, et de tout ce qui y tient, se trouve l'air, et ce que par habitude nous appelons le feu, bien que ce ne soit pas du feu; car le feu est un excès de la chaleur et comme un bouillonnement.
§ 15. Mais il faut distinguer aussi, dans ce que nous appelons l'air, la partie qui environne la terre, laquelle est humide et chaude parce qu'elle renferme les vapeurs et les exhalaisons terrestres, et la partie supérieure à celle-là, laquelle est chaude et sèche. La nature de la vapeur est humide et chaude; mais celle de l'exhalaison est chaude et sèche. La vapeur est par ses propriétés une sorte d'eau, tandis que l'exhalaison au contraire est par ses propriétés une sorte de feu.
§ 16. Ainsi donc, si les nuages ne se forment pas dans la région supérieure, c'est, il faut le supposer, parce que dans cette région il y a non pas seulement de l'air, mais plutôt une espèce de feu. D'ailleurs il se peut fort bien que ce soit le mouvement circulaire qui empêche la formation des nuages dans les parties supérieures; car nécessairement l'air circulaire doit s'écouler tout entier, ou du moins toute cette partie de l'air qui n'est pas comprise en dedans de cette circonférence, dont la disposition fait que toute la terre est sphérique.
§ 17. En effet, comme on le sait bien maintenant, les vents se forment dans les lieux marécageux de la terre, et ils ne soufflent pas au-dessus des montagnes les plus élevées. C'est qu'ils s'écoulent circulairement, parce qu'ils sont emportés avec la révolution de l'univers. Le 341a feu est en effet continu à l'élément supérieur, et l'air est continu au feu, de sorte que c'est le mouvement même qui l'empêche de se convertir en eau.
§ 18. Mais chaque particule qui vient à s'alourdir, dans l'air pressé qui s'est échappé vers le lieu supérieur de la chaleur, est toujours portée en bas; et une autre vient à sa place, apportée par l'exhalaison du feu; et ainsi de suite continuellement, l'une restant pleine d'air, et l'autre pleine de feu, et chacune d'elles changeant perpétuellement de l'un à l'autre état.
§ 19. Voilà donc ce que nous avions à dire pour montrer que les nuages ne se forment pas dans la région supérieure non plus qu'aucune concrétion d'eau, et pour expliquer ce que semble être l'espace compris entre les astres et la terre et de quel corps il doit être rempli.
Quant à la chaleur que produit le soleil, il convient davantage d'en parler spécialement et en détail dans les traités sur la sensation ; car la chaleur n'est qu'une affection de la sensibilité. Mais nous devons dire ici par quelle cause elle est produite, bien que les astres qui la produisent ne soient pas chauds eux-mêmes.
§ 20. Nous voyons certainement que le mouvement peut diviser l'air et l'enflammer, à tel point que les corps emportés par un mouvement rapide paraissent souvent se liquéfier. La révolution seule du soleil suffit donc pour que la sécheresse et la chaleur se produisent; car il faut que ce mouvement soit rapide et ne soit point éloigné. La révolution des astres est rapide ; mais elle est à grande distance ; celle de la lune est inférieure, mais elle est lente. Celle du soleil réunit les deux caractères en une juste proportion. Ce qui peut nous faire croire avec pleine raison que la chaleur se produit surtout par le soleil même, c'est ce que nous apprend l'observation de phénomènes tout pareils qui se passent près de nous. Ainsi nous voyons sur notre terre que l'air devient très chaud là où il est en contact avec des corps mus très violemment; et c'est tout simple, puisqu'alors le mouvement du corps solide divise l'air extrêmement.
§ 21. C'est donc encore pour cette cause que la chaleur arrive dans le lieu que nous habitons, et aussi parce que le feu ambiant est déchiré continuellement par le mouvement, et qu'il est violemment projeté en bas. Ce qui prouve de reste que la région supérieure n'est ni chaude ni enflammée, ce sont les courses que les astres fournissent; car ce n'est pas là qu'ils font leurs révolutions, mais c'est en bas, bien que les corps dont le mouvement est le plus rapide soient aussi les plus prompts à s'enflammer. Il faut ajouter que le soleil qui est surtout chaud parait être blanc et n'a pas la couleur du feu.

Ch.III, § 1. Posés au début, il serait plus exact de dire: « Les ouvrages cités plus haut au début du chapitre premier.» - Les définitions antérieurement données, dans d'autres ouvrages, plutôt que dans celui-ci, où l'auteur n'a pu encore donner de longues définitions. Celles dont il est question ici se rapportent surtout au cinquième élément, l'éther, dont la translation est éternelle et circulaire. - La voie lactée, Voir plus haut, ch. 1, § 8. Cette phrase, qui interrompt la série des pensées, n'est peut-être qu'une interpolation; car malgré: cette assertion, il ne sera question de la voie lactée que dans le chapitre 8, après la théorie des comètes. - Nous avons dit, Traité du ciel, livre 1, ch. 8, édit. de Berlin. - Étaient en puissance, ceci se comprend assez bien pour trois des éléments: l'eau se change en air par la vaporisation; l'air se change en feu; mais on comprend moins que la terre se change en eau, et il faudrait faire exception pour ce quatrième élément.

§ 2. Dans le monde qui entoure la terre, il faut entendre par là notre atmosphère et l'espace qui s'étend fort au-delà. - On sait d'une manière certaine, ceci ne veut pas dire que dès le temps d'Aristote on eût essayé de mesurer des degrés terrestres. - Nous avons déjà vu, les observations astronomiques dont il est ici question sont résumées dans le Traité du ciel, livre, II, ch. 13, p. 297, b, 32, éd. de Berlin. Voir plus loin, ch. 8 § 6, une expression pareille. - Certains astres, le soleil, par exemple, et peut-être aussi quelques planètes et même les étoiles fixes.  - Constituée et limitée comme elle l'est, c'est-à-dire formant une partie considérable du globe de la terre, dont elle ne peut être séparée. - Celle qui pourrait se dérober, ce sont les nappes d'eau qui gisent et circulent sous la terre; au temps d'Aristote, on eu pouvait très bien soupçonner l'existence, quoique la géologie. fût alors très peu avancée. Une foule de phénomènes naturels et aisément observables attestaient la présence de l'eau dans le sein de la terre. - Comme un corps unique, aujourd'hui la question est encore posée d'une manière analogue; et en admettant que tout l'espace entre la terre et les plantes les plus rapprochées soit rempli d'air, les diverses couches de cet air ne sont pas homogènes, puisqu'il y a plus de pression dans les unes que dans les autres. - Jusqu'où s'étendent les lieux divers qu'ils occupent, c'est une question à laquelle la science ne pourrait guère mieux répondre de nos jours que du temps d'Aristote.
§ 3. Nous avons dit antérieurement, Voir le Traité du ciel, livre ll, ch. 4, p. 287, a, 3, édit. de Berlin, et aussi, a, 33. - Des philosophes fort anciens, il faut lire pour tout ce passage le Traité du ciel, loc. cit.

§ 4. Ce qu'on appelle l'éther, si cette expression n'avait été employée plus haut en parlant de l'air, on pourrait croire qu'elle s'applique très spécialement à l'éther, élément qu'on suppose bien plutôt qu'on ne l'observe comme les quatre autres éléments. - Anaxagore, Voir sur une opinion toute pareille prêtée à Anaxagore le Traité du ciel, livre 1, ch. 3, p. 270, b, 21, édition de Berlin. - Le corps qui jouit d'un mouvement éternel, l'étymologie du met Éther, telle qu'Aristote semble l'accepter ici, signifie : « Qui court éternellement. » Elle est déjà donnée par Platon dans le Cratyle, p. 77, trad. de M. V. Cousin; mais elle n'en est pas meilleure, et l'on voit qu'on peut la faire remonter jusqu'au temps d'Anaxagore tout au moins. - Ce n'est par une fois, la même pensée est reproduite presque dans les mêmes termes, Traité du ciel, livre I, ch. 3, p. 270, b, 19, édition de Berlin.

§ 5. L'enveloppe du monde, l'expression grecque est aussi vague. - Est un feu pur, c'est l'opinion d'Anaxagore et d'Héraclite. - Est de l'air, c'est un point qui est encore aujourd'hui fort douteux, et l'on ne sait pas précisément quel est le corps qui remplit les espaces célestes. - C'est qu'en effet, ces idées ne semblent pas très bien se suivre, quoique d'ailleurs elles soient fort juste. - Des dimensions aussi petites, ces opinions n'étaient pas seulement admises par le vulgaire, et des philosophes les avaient soutenues.

§ 6. Nous avons déjà dit, Traité du ciel, livre II, ch. 7, a, 10-35, édit. de Berlin. Mais dans le Traité du ciel, la pensée n'est pas aussi précise qu'elle l'est dans le résumé donné ici.

§ 7. Si deux éléments suffisaient, en y ajoutant l'éther, ce serait trois éléments au lieu de deux; mais il semble que la raison qu'Aristote allègue n'en est pas meilleure. II est certain du reste que l'espace entre te ciel, et la terre n'est pas rempli du même air que celui que nous respirons. - N'est rien pour ainsi dire, idée fort juste et très avancée pour le temps d'Aristote. - Or nous ne voyons pas, la pensée est un peu embarrassée dans le texte aussi bien que dans la traduction. La voici sous terme plus simple : « Lorsque nous voyons l'eau se changer en air et l'air se changer en feu, il y a bien une différence de volume, causée par ces transformations; mais cette différence de volume n'est pas aussi grande qu'elle devrait l'être si l'on suppose qu'il n'y a que de l'air entre l'air et le ciel. Donc il y a autre chose dans cet immense espace. » - Il faut donc nécessairement, cet argument est purement logique. - De tout l'air à toute l'eau, il faut entendre la masse d'air qui environne la terre, et la masse d'eau qui entre dans la composition de la masse terrestre.

§ 8. Produits les uns par les autres, c'était une opinion soutenue par Empédocle et par d'autres philosophes, qui essayaient de démontrer par là l'homogénéité de la matière. - Il est évident, cette conclusion n'est pas aussi évidente que l'auteur semble le croire. - L'espace intermédiaire, entre la terre et le ciel.

§ 9. Du premier corps, c'est-à-dire de l'éther, si l'on prend le terme employé par Anaxagore; ou l'enveloppe du monde, pour prendre le terme péripatéticien. - La chaleur des astres, et spécialement celle du soleil, qui est à peu près la seule que nous sentions. - Suivant le plan que nous nous sommes tracé, pour la présente étude aussi bien que pour les études antérieures.

§ 10. Si donc l'eau vient de l'air, c'est sans doute le phénomène de la pluie qui aura inspiré cette théorie; l'air en effet semble produire de l'eau, par la condensation des vapeurs qui s'y trouvent. - Et l'air de l'eau, l'air semble tenir de l'eau par le phénomène de la vaporisation. - Dans la région supérieure, c'est-à-dire la partie de l'espace où l'on suppose qu'est l'éther. Les nuages se forment en effet à une assez petite distance de la terre, comme on le voit très nettement quand ils circulent sur le flanc des montagnes. - Plus éloigné que la terre, par rapport aux nuages. - Assez voisin des astres qui sont chauds, c'est-à-dire assez voisin du soleil pour en éprouver la chaleur. - Des rayons réfléchis par la terre, c'est en effet la réflexion sur la terre, qui rend les rayons solaires plus chauds et capables d'échauffer fortement notre atmosphère. Plus on s'élève dans les airs, plus le froid est intense. - Empêchent les nuages de se former, cette explication est vraie. - Les rayons réfléchis, j'ai ajouté ce dernier mot que le contexte semble autoriser. - Dans l'immensité, il semble que les rayons parlant du soleil, devraient se perdre dans l'immensité plus encore que les rayons réfléchis par la terre. Seulement il est vrai que les rayons solaires ne sont chauds qu'en traversant notre atmosphère ; et renvoyés par la terre, ils perdent bien vite la chaleur qu'ils ont contractée en s'en approchant.

§ 11. De toute la masse de l'air, en supposant qu'il n'y a que de l'air dans l'espace entre la terre et les astres. - Mais comme une espèce de vapeur, cette observation est vraie, puisque cette vapeur se résout souvent en eau, ainsi que l'ajoute le texte. - N'était qu'une vapeur, on distingue aujourd'hui les gaz des vapeurs ; et cette distinction n'était que soupçonnée très vaguement en temps d'Aristote. - L'emporter de beaucoup, cette nécessité de l'équilibre entre les quatre éléments n'a rien de réel ; et c'est une simple hypothèse que ne démontrent pas les phénomènes. - D'un certain corps, qui serait l'éther selon Anaxagore, ou l'enveloppe du monde selon Aristote. - Pleins d'air et d'eau, ceci semble contredire ce qui précède.

§ 12. Au-dessus de la terre, il faut entendre sans doute non seulement la terre, mais aussi l'atmosphère dont elle est entourée. - Différent du feu et de l'air, la science actuelle pourrait approuver cette théorie. Seulement de la terre jusqu'à la lune, il y a de grandes différences de densité dans le corps, quel qu'il soit, qui remplit cet espace. - Une partie plus pure, c'est-à-dire moins dense. - Des différences, ce corps est plus épais là où il confine à l'air qui compose notre atmosphère.

§ 13. Le premier élément, éther ou enveloppe du monde. - Les corps qu'il renferme, le soleil, les étoiles fixes et sans doute aussi les planètes. - Et de l'élément.... contiguë, c'est la partie supérieure de notre atmosphère. - S'enflamme et produit la chaleur, explication fausse, mais qui était assez ingénieuse à l'époque où elle s'est produite. - Au-dessous de la révolution supérieure, celle qui se fait dans l'éther. - Devient et est tout cela, c'est-à-dire, chaud, froid, sec et humide. - Par le mouvement et l'immobilité, le mouvement produisant la chaleur, et le repos produisant le froid. - Nous avons ailleurs étudié, Voir la Physique, et spécialement le livre VIII, pp. 453 et suiv. de ma traduction.

§ 14. C'est donc au centre, on voit par quelle méthode Aristote est arrivé à placer la terre au centre du monde; c'est surtout en la considérant comme un élément dont la densité était plus grande que celle de tous les autres. Ceci est vrai dans une certaine mesure; et la terre est en effet plus lourde que l'eau, et la plus forte raison que l'air et le feu; mais il ne s'ensuit pas que la terre comparée aux corps célestes, par rapport auxquels elle est si peu de chose, comme le reconnaît Aristote, soit le centre entour duquel ils se meuvent. - Se trouve l'air, ceci est vrai encore si l'on prend l'air pour l'atmosphère. Nous appelons le feu, Aristote semble bien douter qu'au-delà de l'air il y ait une région ignée; mais il se conforme au langage ordinaire et aux opinions reçues. - Un excès de la chaleur et comme un bouillonnement, il vaudrait mieux dire : « un résultat de la combustion.»

§ 15. Il faut distinguer, la distinction très juste qu'Aristote ne fait qu'entrevoir, est celle des gaz et des vapeurs. Les vapeurs sont en effet plus humides et plus froides que les gaz, à cause de l'eau quelles renferment. On peut dire des gaz qu'ils sont plus secs et plus chauds. - La partie qui environne la terre, c'est l'atmosphère proprement dite. - Celle de l'exhalaison, ou pour parler plus exactement : « du gaz. » - Une sorte d'eau... une sorte de feu, c'est une distinction qu'il ne faut pas perdre de vue, parce qu'elle se représentera souvent dans les théories qui vent suivre.
§ 16. Les nuages ne se forment pas dans la région supérieure, le phénomène est vrai; mais l'explication qu'on en donne ici n'est pas bonne. La vapeur est plus légère que l'air, et une fois qu'elle est arrivée à une certaine hauteur où l'air ambiant n'est pas plus lourd qu'elle, elle s'arrête; mais il y a si peu de feu dans la région supérieure, comme le dit le texte, qu'au contraire il y fait froid, et que ce froid condense les vapeurs qui retombent sous forme de pluie. - Le mouvement circulaire, est aussi bien à la surface de la terre, même en la supposant immobile, que dans la région supérieure. - L'air circulaire, il faut entendre par là non pas l'air qui repose directement sur la terre et ses inégalités, mais celui qui est assez haut pour former un cercle régulier auteur de la terre, qui est elle-même sphérique. - En dedans de cette circonférence, et qui subit toutes les irrégularités que présente la surface de la terre. - Dont la disposition fait, l'expression du texte n'est pas plus claire que ma traduction; mais la pensée se comprend d'après les explications précédentes, qui sont fidèlement empruntées au commentaire excellent d'Alexandre d'Aphrodisée ou d'Egée.

§ 17. Comme on le sait bien maintenant, il paraît donc que cette théorie avait été antérieurement contestée. - Dans les lieux marécageux, c'est à-dire dans les lieux bas. - Ils ne soufflent pas au-dessus des montagnes, le phénomène n'est pas exact. Depuis les expériences des ballons, on sait que les vents soufflent fort au-dessus des montagnes les plus élevées qu'on connaissait du temps d'Aristote. - Ils s'écoulent circulairement, explication inadmissible. - Continu à l'élément supérieur, ou l'éther. - C'est le mouvement qui l'empêche de se convertir en eau, il faut admettre alors que le mouvement circulaire n'atteint pas jusqu'à la région des nuages; car dans cette région, l'air se convertit en eau d'après les théories d'Aristote, s'il ne peut s'y convertir plus haut.

§ 18. Qui vient à s'alourdir, il aurait fallu essayer de dire par quelle cause. - Une autre vient à sa place, cette explication ne répond pas à des phénomènes observables.

§ 19. Dans la région supérieure, j'ai ajouté ces mots, que le contexte indique, et qui sont indispensables pour le compléter. - Aucune concrétion d'eau, c'est-à-dire du la pluie qui se forme par la condensation des vapeurs. - Ce que semble être, réserve très sage, qui ne serait pas moins nécessaire aujourd'hui que du temps d'Aristote; car on ne sait pas au juste la nature du corps qui remplit l'espace, et dans lequel les astres se meuvent. - Dans tes traités sur la sensation, il est peu probable que ce passage se rapporte au traité spécial de la Sensation et des choses sensibles. Voyez ce traité, ch. 2, § 11, p. 34 de ma traduction. - N'est qu'une affection de la sensibilité, on peut en dire autant du froid; mais indépendamment de l'impression faite sur nos organes et la seule que nous ressentions, les corps n'en ont pas moins des qualités propres. - Ne soient pas chauds, c'est encore une question qui n'a pu être résolue jusqu'à présent. Aristote expliquera la chaleur uniquement par le mouvement; le mouvement y contribue sans doute ; mais il n'en est pas la seule cause.

§ 20. Le mouvement peut diviser l'air, le fait est incontestable; mais il n'est pas aussi évident que le mouvement enflamme l'air. - Les corps emportés par un mouvement rapide, il eût été convenable de citer des faits précisément, et peut-être en avait-on déjà observé du temps d'Aristote. Voir le Traité du ciel, livre Il, ch. 7, p. 289, a, 22, édit. de Berlin. - La révolution du soleil, le soleil se meut sur lui-même; mais il ne se meut pas autour de la terre, et cette explication tombe par cela seul. - Ne soit point éloigné, de la terre. -  Des astres, autres sans doute que les planètes. - A une très grande distance, l'expression est bien vague; mais le fait est exact, bien que l'antiquité n'eût aucun mayen de se rendre un compte un peu approximatif de la distance des étoiles fixes. - Surtout par le soleil même, ceci semblerait se rapporter plus encore à la nature substantielle de la matière solaire qu'à son mouvement. Mais la suite preuve cependant que c'est surtout un mouvement qu'il s'agit. - Ce que nous apprend l'observation, il faut remarquer cette judicieuse méthode : on observe exactement certains faits, et on en tire des inductions régulières. - L'air devient très chaud, il eût été utile de spécifier les observations; et l'on pourrait citer le mouvement rapide d'une roue qui s'échauffe, et qui échauffe tout ce qui l'environne.

§ 21. Dans le lieu que nous habitons, le texte dit simplement : «dans ce lieu. » - Le feu ambiant, qui enveloppe la sphère du monde, au-dessous de l'élément premier ou éther. - Projeté en bas, et jusque sur notre terre. - Les astres, il est assez probable qu'il s'agit uniquement des planètes. - Mais c'est en bas, c'est-à-dire dans une région inférieure. - Bien que les corps, on ne voit pas bien comment cette pensée se relie à celle qui précède. - Et n'a pas la couleur du feu, Alexandre fait observer que le soleil a cette couleur au moment de son lever et au moment de son coucher, où il paraît rougeâtre à cause des vapeurs qui sont interposées entre lui et la terre. Aristote a fait la même remarque, Traité de la Sensation, ch. 3, § 12, p. 43, de ma traduction.

CHAPITRE IV.
Des flammés ardentes, des étoiles filantes et de leur cause.

§ 1. 342 Ceci posé, disons par quelle cause apparaissent dans le ciel les flammes ardentes, les étoiles qui filent et les phénomènes qu'on appelle aussi quelquefois des torches, et des chèvrons. Tous ces phénomènes sont identiques et se produisent par la même cause. Ils ne diffèrent que du plus ou moins. En voici du reste le principe, ainsi que de beaucoup d'autres.
§ 2. La terre étant échauffée par le soleil, il faut nécessairement que l'exhalaison soit, non pas simple, comme l'affirment quelques-uns, mais double : l'une qui tient plutôt de la vapeur, l'autre qui tient davantage du vent. La première qui vient de l'humide répandu dans la terre et sur la terre, est comme de la vapeur; la seconde qui vient de la terre même, laquelle est sèche, est comme de la fumée. De ces deux émanations, celle qui se rapproche du vent reste à la surface parce qu'elle est légère, l'autre qui est plus humide reste en dessous par son poids même.
§ 3. C'est là ce qui fait que l'enveloppe est arrangée de cette façon : d'abord au-dessous de la révolution circulaire se trouvent le chaud et le sec que nous appelons le feu ; car nous n'avons pas de terme commun qui exprime toutes les espèces de cette sécrétion fumeuse. Mais comme de tous les corps c'est celui qui naturelle ment est le plus inflammable, il faut nécessairement se servir pour le désigner des mots reçus. Puis au-dessous de cette nature ignée, se trouve l'air.
§ 4. Il faut penser que, comme une matière inflammable, ce que nous appelons ici le feu s'étend jusqu'à l'extrémité de la sphère qui entoure la terre, de telle sorte que le moindre mouvement qu'il reçoit lui suffit, comme à la fumée, pour s'enflammer perpétuellement; car la flamme n'est que l'incandescence d'un air sec.
§ 5. Quand cette composition se trouve dans les conditions les plus convenables, elle s'enflamme du moment qu'elle vient à être mise en un mouvement quelconque par la circonférence. Il n'y a donc ici de différence que pour la situation et la quantité de la matière inflammable. Si cette matière inflammable a longueur et largeur, on voit souvent la flamme qui brûle comme celle du chaume dans un sillon. Si elle n'a que longueur, on voit alors se produire ce qu'on nomme torches, chèvrons, étoiles filantes.
§ 6. Si la matière inflammable a plus de longueur que de largeur, et qu'elle jette cantine des étincelles en brûlant, ce qui arrive parce qu'elle est consumée à fond bien que petit à petit, c'est ce qu'on nomme une chèvre ou chèvron; et quand cette circonstance ne se produit pas, c'est une torche. Si au contraire l'exhalaison est divisée dans sa longueur en petites et nombreuses parties et qu'elle soit égale en largeur et profondeur, ce sont alors ces étoiles qui semblent traverser le ciel et filer.
§ 7. Parfois donc l'exhalaison enflammée par le mouvement produit ces phénomènes; parfois la chaleur est repoussée et chassée par l'air 342a condensé à cause du froid ; et c'est ce qui fait que leur mouvement ressemble plutôt à une chose qu'on jette qu'à une chose qui brûle, à un jet qu'à une combustion.
§ 8. Ici l'on pourrait se faire une question. Une évaporation placée sous des lampes fait descendre la flamme supérieure à la lampe inférieure, qui s'allume sur le champ ; et l'on peut remarquer que la rapidité de ce mouvement est étonnante et ressemble à une sorte de jet, sans que d'ailleurs les choses se passent comme si les feux de l'une et de l'autre étaient différents; de même, peut-on se demander, les courses des météores ignés ne sont-elles pas des jets d'un même corps?
§ 9. Ces phénomènes, à ce qu'il semble, peuvent être produits par ces deux causes. Ainsi, ou il arrive parfois que les choses se passent comme dans le fait de la lampe, ou parfois les phénomènes ignés sont lancés par une sorte de répulsion, comme des noyaux que l'on presse entre les doigts; et il semble alors qu'ils tombent soit dans la mer, soit sur la terre, de jour, de nuit et par un temps serein.
§ 10. S'ils sont lancés en bas, c'est parce que la condensation qui les pousse tend toujours à aller en bas. C'est aussi la même cause qui fait que la foudre tombe; car si tous ces phénomènes se produisent, ce n'est pas une combustion qui les cause, c'est une division par compression, puisque tout ce qui est chaud tend naturellement à se porter en haut.
§ 11. Ainsi donc tous les phénomènes qui se forment dans la région supérieure, plus que partout ailleurs, viennent de ce que l'exhalaison s'enflamme ceux qui se forment plus bas viennent de ce qu'elle se divise, parce que l'exhalaison plus humide se réunit et se refroidit. Se réunissant ainsi et tendant vers le bas, elle pousse par sa condensation la chaleur en bas et la projette en ce sens.
§ 12. Mais la position de l'exhalaison, selon qu'elle est en largeur ou en profondeur, fait qu'elle est portée, soit en haut, soit en bas, soit obliquement. La plupart du temps la direction est oblique, parce que les directions sont doubles, l'une violente en bas, l'autre naturelle en haut; car tous ces phénomènes suivent une marche diagonale, et c'est là ce qui fait que la direction des étoiles filantes est presque toujours oblique.
§ 13. On peut donc dire que la cause de tous ces phénomènes, c'est l'exhalaison comme matière; et que comme moteur, c'est tantôt la révolution supérieure et tantôt la contraction de l'air condensé. Tous d'ailleurs se passent au-dessous de l'orbite de la lune; et ce qui le prouve bien, c'est leur rapidité, qui nous paraît toute pareille à celle des objets que nous lançons ici-bas, et qui, rapprochés de nous comme ils le sont, nous semblent l'emporter de beaucoup en vitesse sur les étoiles, la lune et le soleil.

Ch. IV, § 1. Les flammes ardentes, les bolides. - Les étoiles qui filent, de nos jours ce phénomène a été curieusement observé; mais on voit que les anciens ne l'ont pas ignoré. - Des torches et des chèvrons, j'ai conservé les dénominations mêmes d'Aristote; il est probable que ces phénomènes se rapportent aux aurores boréales. Le mot de chèvrons est employé souvent par Descartes, Principes de la Philosophie, 3e partie. - Ces phénomènes sont identiques... la même cause, de nos jours on les ramène tous au principe unique de l'électricité, qu'Aristote ne connaissait pas.
§ 2. Mais double, de nos jours on distingue fréquemment les gaz et les vapeurs; ou voit qu'Aristote soupçonnait aussi cette distinction, sans d'ailleurs s'en rendre bien compte. - De la vapeur, sous-entendu d'eau; cette exhalaison est par conséquent humide. - Du vent, cette exhalaison est sèche comme le vent lui-même. - Est comme de la vapeur, répétition de ce qui précède. - Comme de la fumée, et par conséquent réelle comme le feu. - Reste à la surface, c'est-à-dire à la partie la plus élevée de notre atmosphère, et non point à la surface de la terre. - En dessous, de la première; mais la vapeur d'eau est plus légère que l'air, puisqu'elle s'y élève.

§ 3. L'enveloppe, il faut entendre non pas seulement l'enveloppe qui touche immédiatement la terre; mais tout l'espace compris entre la terre et le premier corps ou éther. - Au-dessous de la révolution circulaire, ou éther placé autour et au-delà de toute notre atmosphère, et ayant un mouvement éternel de rotation circulaire. - Que nous appelons le feu, le feu comprenant à la fois le chaud et le sec. - Cette nature ignée, j'ai ajouté ce dernier mot.

§ 4. Jusqu'à l'extrémité de la sphère qui entoure la terre, dans le langage cartésien ce serait l'extrémité du tourbillon terrestre; c'est le point le plus éloigné où se fasse sentir l'attraction terrestre. - Le moindre mouvement, le mouvement ne suffit pas pour expliquer les phénomènes ignés qui se passent dans notre atmosphère. - L'incandescence d'un air sec, cette explication de la combustion était assez exacte avant les découvertes de la chimie moderne.

§ 5. Elle s'enflamme, répétition de l'explication qui précède. - Longueur et largeur, ceci peut se rapporter aux aurores boréales. - Torches, chèvrons, étoiles filantes, voir plus haut § 1.

§ 6. Et qu'elle jette comme des étincelles, ceci peut se rapporter à la fois et aux aurores boréales, et à certains bolides qui pétillent en brûlant. - Quand cette circonstance ne se produit pas, c'est-à-dire quand il n'y a pas d'étincelles qui jaillissent du bolide. - Divisée dans sa longueur, ceci ne semble pas se bien rapporter aux étoiles filantes, où le jet lumineux est continu et non pas  intermittent.

§ 7. Parfois la chaleur, qui se précipite de haut en bas, et qui dans la région intérieure rencontre l'air, lequel est plus froid que le feu de la région supérieure. - A une chose qu'on jette, j'ai dû ici paraphraser le texte pour le rendre plus clair.

§ 8. Une question, la question n'est pas très- claire telle qu'elle est posée dans le texte. En voici l'explication : « Quand une lampe vient de s'éteindre, il suffit d'en approcher une autre lampe qui brûle pour qu'aussitôt la flamme de la seconde lampe descende à la première qui se rallume. De même, peut-on se demander, la flamme des météores ignés n'est-elle que le jet d'un autre corps en combustion qui lance ces flammes dans le sens où elles sont attirées? » Le phénomène des lampes est exact ; et cette comparaison est une manière comme une autre d'expliquer les météores. Mais quel est le corps qui brûle, et où est-il? - De l'une et l'autre, lampe. Le sens de ce passage n'est pas très net.

§ 9. Par ces deux causes, que l'on va dire dans ce qui suit. - Le fait de la lampe, rappelé dans le § précédent. - Comme des noyaux, celle comparaison a quelque chope d'assez étrange. - Et par un temps serein, la sérénité du temps ne fait rien au phénomène; mais dans le jour on ne peut le voir à cause de l'éclat de la lumière solaire.

§ 10. La condensation qui les pousse, ceci ne rend pas bien compte du phénomène, et l'on ne voit pas où et comment se forme cette condensation. II faudrait dire aussi de quelle nature elle est. - La même cause qui fait que la foudre tombe, on dirait que c'est à cause de son poids que la foudre tombe à terre. On sait aujourd'hui qu'il n'en est rien, et que c'est la simple accumulation de l'électricité qui détermine l'explosion. En ce sens ce serait bien aussi une sorte de condensation. - C'est une division par compression, ces explications ont pu paraître suffisantes tant qu'on n'a pas su que les nuages contenaient de l'électricité. - Tout ce qui est chaud tend naturellement à se porter en haut, et comme au contraire tous les météores se portent en bas, il fallait trouver une cause spéciale à ce phénomène extraordinaire.

§ 11. L'exhalaison s'enflamme, il faut sans doute entendre l'exhalaison sortie de la terre ou tout au moins de l'atmosphère terrestre. Elle s'enflamme dans la région supérieure où est le feu. - Plus bas, dans la région de l'air et au-dessous de celle du feu. - Elle pousse par sa condensation, si l'explication était juste, il y aurait toujours des éclairs et des tonnerre dès qu'il y a des nuages ; mais cela n'est pas.

§ 12. La direction est oblique, il serait peut-être difficile même aujourd'hui de rendre raison de l'obliquité habituelle des météores ; je ne dis pas que l'explication d'Aristote soit bien exacte, mais on peut du moins le louer de s'être posé la question, sans d'ailleurs la bien résoudre. - L'une violente en bas, le phénomène étant igné devrait remonter au lieu de descendre : la force qui le projette en bas lutte avec celle qui le porte naturellement en haut; et de là la diagonale que suit le phénomène et l'obliquité de ta marche.

§ 13. C'est l'exhalaison, le système entier d'Aristote, comme on peut le voir, est au moins très conséquent, si ce n'est très exact; et pour qu'il le fût, il suffirait presque uniquement de substituer l'électricité à l'exhalaison. - La révolution supérieure, Voir plus haut § 4. - La contraction de l'air condensé, Voir plus haut § 7. - Au-dessous de l'orbite de la lune, on ne sait pas aujourd'hui à quelle hauteur précise les météores se produisent dans l'atmosphère; mais c'est certainement beaucoup plus près de la terre que de la lune. - Nous semblent l'emporter de beaucoup, cette tournure de phrase semble indiquer que peur Aristote ce ne sont là que des apparences trompeuses mais il est vrai que la marche des corps qui se meuvent nous parait d'autant plus rapide qu'ils sont plus près de nous.

CHAPITRE V.
De quelques autres phénomènes célestes et de leurs causes.

§ 1. On voit assez souvent se former dans le ciel pendant les nuits sereines, des apparitions de divers genres, qui ressemblent à des gouffres, à des trous, à des couleurs de sang. La cause en est tout à fait 343 la même; en effet puisqu'évidemment dans la région supérieure l'air est fait de telle sorte qu'il peut s'enflammer, et que sa combustion ressemble tantôt à une simple flamme tantôt à des torches qu'on agite, tantôt à des étoiles filantes, il n'y a rien d'étonnant que ce même air puisse par sa composition prendre toute espèce de couleurs.
§ 2. Ainsi la lumière paraît beaucoup plus faible quand elle est vue à travers un corps plus dense; et l'air, en recevant une réfraction, formera toute espèce de couleurs mais surtout de l'écarlate et du pourpre, couleurs qui naissent le plus ordinairement de la couleur de feu et de celle du blanc, quand on les mêle et qu'on les superpose en les rapprochant l'une de l'autre ; de même que les astres, soit à leur lever soit à leur coucher, paraissent écarlates quand il fait très chaud ou qu'on les regarde à travers la fumée. C'est aussi ce que produira l'air par la réfraction, quand il fait miroir de telle sorte qu'il reçoive non pas la figure mais la couleur. Mais la combinaison est si rapide qu'elle est cause que ces phénomènes ne durent pas longtemps.
§ 3. Quand la lumière vient à se briser par la rupture du bleu et du noir, il se forme comme des abîmes qui semblent avoir une sorte de profondeur. Souvent aussi il sort de ces abîmes des torches, surtout quand la masse se resserre ; et l'abîme semble surtout se former quand elle se rétrécit. En général, le blanc sur le noir produit les effets les plus variés, tout comme la flamme dans la fumée. Durant le jour, le soleil empêche de les voir ; et la nuit, les autres teintes, si l'on en excepte l'écarlate, ne se voient pas à cause de l'uniformité de leur couleur.
§ 4. Telles sont donc, à ce qu'on peut croire, les causes des étoiles filantes, des météores ignés, et de tous les autres phénomènes analogues qui font de si rapides apparitions.

Ch. V, § 1. Des apparitions de divers genres, le mot d'apparitions est pris ici dans le sens propre; ce ne sont que des apparences et des jeux de lumière. - La cause en est tout à fait la même, ceci n'est pas tout à fait exact, même au point de vue où l'auteur se place ; et la cause de ces phénomènes n'est pas identique à celle des phénomènes précédents. - Par sa composition, il est certain que c'est par suite de la nature diverse des substances que l'air contient que la lumière s'y décompose de tant de façons.

§ 2. A travers un corps plus dense, comme l'air par exemple épaissi per le brouillard. - De la couleur de feu et... du blanc, cette combinaison de couleurs est inexacte. - Paraissent écarlates, le phénomène est vrai ; et c'est à cause des vapeurs de l'atmosphère, qui décomposent la lumière. - Quand il fait très chaud, et qu'il y a par conséquent beaucoup de vapeurs dans l'atmosphère. - Non pas la figure mais la couleur, il n'y a pas à proprement parler un effet de miroir; il n'y a qu'une réfraction de la lumière.

§ 3. Par la rupture du bleu et du noir, c'est-à-dire quand le bleu et le noir se réfractent plus particulièrement que les autres couleurs. - Des torches, c'est ce qu'on remarque entrent dans les aurores boréales. - Quand la masse, le texte n'est pas aussi précis. - Tout comme la flamme dans la fumée, cette observation n'est pas très frappante. - Le soleil empêche de les voir, Voir au chapitre précédent, § 9. - L'uniformité de leur couleur, ceci n'est pus très exact.

§ 4. A ce qu'on peul croire, réserve fort louable et fort modeste. - De si rapides apparitions, c'est là ce qui rend l'observation si difficile et si délicate.

CHAPITRE VI.
Des comètes. Opinions et explications d'Anaxagore, de Démocrite, d'Hippocrate de Céos, d'Eschyle. Réfutations de ces opinions erronées.

§ 1. Parlons maintenant des comètes et de ce qu'on appelle la voie lactée, après avoir d'abord discuté les opinions de nos devanciers.
Anaxagore et Démocrite prétendent que les comètes sont une conjonction de planètes ou d'astres errants, quand ils semblent se toucher les uns les autres par la proximité où ils sont.
§ 2. Quelques philosophes Italiques et quelques-uns de ceux qu'on appelle Pythagoriciens assurent que la comète est une des planètes, laquelle n'apparaît qu'à un très long intervalle et dont l'ascension est fort petite ; ce qu'on voit aussi pour la planète de Mercure; comme elle ne s'élève que fort peu sur l'horizon, elle souffre de très fréquentes éclipses, ce qui fait qu'on ne l'aperçoit que de loin à loin.
§ 3. Hippocrate de Chios et son disciple Eschyle ont avancé une opinion qui se rapproche beaucoup 343a de celle-là. Seulement, ils ajoutent que la queue ne vient pas de la comète elle-même, mais qu'elle la prend quelquefois dans sa course à travers l'espace, parce que notre vue se réfracte vers le soleil par l'humidité même que la comète a entraînée avec elle.
§ 4. Suivant eux, c'est parce que sa révolution est très lente qu'elle paraît à de plus grands intervalles de temps que les autres astres; car lorsqu'elle paraît, c'est que son cercle entier est accompli. Elle l'accomplit soit vers le nord soit vers le sud. Dans l'espace compris entre les tropiques, elle ne peut attirer d'eau vers elle, parce que le mouvement du soleil y a consumé toute l'humidité. Mais quand elle est portée vers le sud, elle y trouve abondance de cette humidité; et comme la partie supérieure du cercle est petite, et que celle du bas est considérable, la vue des hommes ne peut se porter en se réfractant vers le soleil, ni lorsque le soleil s'approche du sud, ni lorsqu'il est dans les tropiques méridionaux ou le solstice d'été.
§ 5. C'est là ce qui fait, ajoutent ces philosophes, que la comète ne se montre jamais dans ces lieux. Mais lorsque dans sa course elle se trouve au nord, elle y prend une chevelure, parce qu'alors la circonférence qui est au-dessus de l'horizon est considérable, tandis que la partie inférieure du cercle est petite; ce qui fait que la vue des hommes peut alors se diriger facilement vers le soleil.
§ 6. Toutes ces opinions présentent des impossibilités, dont quelques-unes sont communes à tous ces systèmes, et dont les autres sont spéciales. Ainsi d'abord ceux-là se trompent qui prétendent que la comète est un des astres errants, c'est-à-dire une planète; car tous les astres errants accomplissent leur révolution dans le cercle du zodiaque, et l'on a vu beaucoup de comètes en dehors de ce cercle. En outre, on en a vu souvent plus d'une à la fuis.
§ 7. Il faut ajouter que si c'est la réfraction qui produit la chevelure, comme le veulent Eschyle et Hippocrate, il faudrait qu'on vit aussi quelquefois cette espèce d'astre sans chevelure, puisqu'elle parcourt aussi d'autres lieux, et qu'elle ne retient pas une chevelure partout. Or, on ne connaît maintenant que cinq astres ou planètes: et souvent ils ont été visibles tous les cinq au-dessus de l'horizon en même temps ; et soit qu'ils fussent tous visibles, soit que tous étant au-dessus de l'horizon quelques-uns fussent trop près du soleil pour être vus, on a pu observer souvent que les comètes ne s'en montraient pas moins.
§ 8. Il n'est même pas vrai, comme on le dit, que la comète ne se fasse voir qu'au nord, et quand en même temps le soleil est au tropique 344 d'été. Ainsi la grande comète qui a été vue à l'époque du tremblement de terre en Achaïe, et de l'inondation maritime, commença sa course ascensionnelle à partir du coucher des équinoxes; et l'on en a déjà observé plusieurs au sud. Sous l'archontat d'Euclès, fils de Molon, à Athènes, une comète parut au nord dans le mois de Gamélion, quand le soleil était au tropique d'hiver; et pourtant ces mêmes astronomes reconnaissent qu'il est impossible qu'il y ait réfraction à une aussi grande distance.
§ 9. Ce qu'il y a encore à dire de commun contre eux, et contre ceux qui prétendent que la comète n'est qu'une conjonction d'astres qui se touchent, c'est qu'il y a des étoiles fixes qui parfois prennent une queue. Et ceci, nous n'avons pas à l'affirmer uniquement sur la foi des Égyptiens, qui rendent aussi ce témoignage ; nous l'avons observé nous-même. Une des étoiles placées dans la cuisse du Chien avait une chevelure, peu brillante il est vrai, et l'éclat en devenait peu visible quand on fixait longtemps les regards ; mais elle l'était davantage quand on la regardait un peu de côté.
§ 10. Il faut dire encore que toutes celles que nous avons vues ont disparu sans se coucher, au-dessus de l'horizon, s'éteignant petit à petit, de telle sorte qu'il ne restait le corps ni d'un astre ni de plusieurs; et c'est ainsi que ce grand astre dont nous venons de parler parut en hiver pendant la gelée et par un temps serein à l'occident, sous l'archontat d'Astéïus. Le premier jour on ne le vit pas, parce qu'il se couchait avant le soleil ; mais on le vit le lendemain. Sa révolution fut aussi courte que possible, et il se coucha sur le champ. Son éclat s'étendait, comme un jet, jusqu'au tiers du ciel, et c'est ce qui fit qu'on l'appela le Chemin. Il monta jusqu'à la ceinture d'Orion, et là il s'évanouit.
§ 11. Pourtant Démocrite n'en défend pas moins avec ardeur et complaisance son opinion. Il prétend qu'on a vu quelques planètes quand les comètes se dissolvent. Mais il faudrait que cette apparition se produisit toujours, et non pas que tantôt elle se produisit et tantôt ne se produisit pas. Les Égyptiens prétendent à ce sujet qu'il y a des planètes qui entrent en conjonction soit entre elles soit aussi avec les étoiles fixes; et. nous-mêmes nous avons vu deux fois déjà la planète de Jupiter entrer en conjonction avec une des étoiles qui sont dans les Gémeaux, et la cacher, sans que d'ailleurs il se formât de comète.
§ 12. Ceci d'ailleurs est évident rien que par le raisonnement. Les planètes, soit qu'elles paraissent plus grandes, soit qu'elles paraissent plus petites, n'en doivent pas moins être indivisibles en elles-mêmes. De même donc que si elles étaient réellement indivisibles, elles ne formeraient point de grandeur en se touchant et en se réunissant, de même, puisqu'elles ne sont pas indivisibles mais ne font que le paraître 344a, elles ne peuvent pas paraître même en se réunissant avoir une grandeur plus considérable.
§ 13. Ainsi donc que les causes indiquées par les astronomes soient fausses, c'est ce que montre suffisamment ce que nous avons dit, bien qu'on eût pu développer davantage ces objections.

Ch. VI, § 1. Des comètes, l'étude des comètes ne fait plus partie de la météorologie, et on la laisse à l'astronomie. Ce changement a eu lieu vers la fin du XVIe siècle, quand on a commencé à mieux connaître la nature des comètes. Mais Roberval les comprenait encore parmi les météores ignés, et Descartes lui en fait une critique, tome IX, p. 557 de l'éd. de M. V. Cousin. Voir plus haut, ch. 1, § 2, n. - Les opinions de nos devanciers, c'est un soin qu'Aristote a toujours pris, comme on peut le voir dans la Politique, dans le Traité de l'Ame, dans les Opuscules, dans la Physique, dans la Métaphysique, etc. A ce titre, il peut être classé parmi les historiens de la philosophie. - Anaxagore et Démocrite, avant Aristote il n'y avait pas dans la science de noms plus grands que ces deux là. - De conjonction de planètes, l'explication était bien insuffisante, soit qu'il s'agisse des cinq planètes connues des anciens, Saturne, Jupiter, Vénus, Mars et Mercure, soit qu'il s'agisse d'autres astres qu'on supposait errant dans l'espace. - Quand ils semblent se toucher, et que leur lumières se confondant produit le grand éclat des comètes.

§ 2. Italiques.... Pythagoriciens, Aristote a souvent réuni ces deux classes de philosophes; et les Pythagoriciens sont à peu près les seuls philosophes Italiotes dont on ait conservé le souvenir. - Est une des planètes, c'était augmenter le nombre des planètes; et comme les comètes sont différentes, ce nombre s'accroissait indéfiniment. - N'apparaît qu'il un très long intervalle, l'astronomie moderne admet aussi des comètes qui reviennent périodiquement à des intervalles plus ou moins longs. - Et dont l'ascension est fort petite, ceci n'est pas applicable à toutes les comètes, et il y en a quelques-unes dont l'ascension est considérable. - De très fréquentes éclipses, c'est-à-dire qu'elle disparaît fort souvent sous l'horizon.

§ 3. Hippocrate de Chios, ou de Céos; Aristote a parlé de lui plusieurs fois, se bornant à l'appeler Hippocrate, sans indiquer sa patrie: Réfutations des sophistes, ch. 11, § 3 de ma traduction. Ce géomètre était fameux pour avoir essayé de donner une démonstration de la quadrature du cercle. - Eschyle, cet Eschyle n'est pu autrement connu comme astronome. - La queue ne vient pas de la comète elle-même, je ne sais si la science contemporaine est bien fixée à cet égard. - Notre vue se réfracte vers le soleil, la queue de la comète ne serait alors qu'un effet d'optique, et ce serait une simple réfraction de la lumière solaire dans les vapeurs que contient l'atmosphère.

§ 4. Suivant eux, Hippocrate et Eschyle son disciple. - Sa révolution est très lente, ce qui n'empêche pas que les comètes ne marchent très vite; seulement l'orbite qu'elles décrivent peut être immense; et leur révolution ne se ferait qu'à de très longs intervalles de temps. - Les autres astres, c'est-à-dire les planètes. - Lorsqu'elle paraît, alors c'est supposer que c'est toujours la même comète qui revient. - Attirer d'eau, c'est-à-dire l'humidité qui est dans l'air. - Entre les tropiques, c'est-à-dire à 23 degrés de l'équateur terrestre. - Ou le solstice d'été, j'ai ajouté ces mots qui ne vont que la paraphrase de ceux qui précédent.

§ 5. Ajoutent ces philosophes, cette parenthèse est implicitement comprise dans le texte. - Dans ces lieux, c'est-à-dire entre les tropiques. - Elle y prend une chevelure, parce qu'alors la réfraction de la lumière peut avoir lieu par rapport à la terre où est l'observateur. - La circonférence qui est au-dessus, c'est supposer que la comète suit une ligne régulière comme les planètes.

§ 6. Est un des astres errants, la réfutation semble péremptoire et les comètes ne seraient pas des planètes. -  On en a vu plus d'une à la fois, il semble que ceci soit une glose, qui ne tient pas très bien à ce qui précède; car ce n'est pas parce que les comètes sont deux à la fois qu'elles sent eu dehors du zodiaque. Cependant la science moderne paraît eu être revenue à considérer les mouvements des comètes comme soumis aux mêmes lois que celui des planètes. Pour les unes comme tour les autres, les orbites sont elliptiques.

§ 7. C'est la réfraction qui produit la chevelure, c'est toujours là ce que l'on croit. - Eschyle et Hippocrate, Ideler aimerait mieux dire Hippocrate et Eschyle, puisque le premier est le maître de l'autre. - Elle parcourt aussi d'autres lieux, il faut sous-entendre : « où elle ne trouve plus l'humidité nécessaire à la réfraction. » - Ou planètes, j'ai ajouté cette paraphrase. Plus haut, au § 1, j'ai nommé les cinq planètes connues des anciens. Depuis un demi-siècle, la science contemporaine a fait les plus riches découvertes, et le nombre des planètes, petites et grandes, se monte dès aujourd'hui à plus de soixante. II est probable qu'on n'en restera pas là. - Les comètes ne s'en montraient pas moins, ceci n'est point une preuve que les comètes ne fassent point partie des planètes.

§ 8. Comme on dit, c'est Hippocrate et son disciple Eschyle; voir plus haut, § 4. - Du tremblement de terre en Achaïe et de la grande inondation, nous avons perdu la trace et les dates de ces grands phénomènes, qui n'avaient pas pour nous le même intérêt que pour des Grecs. Selon Strabon, Livre VIlI, ch. 7, p.330, ligne 28, édit. de F. Didot, ce tremblement de terre eut lieu deux ans avant la bataille de Leuctres, en 373. - Du coucher des équinoxes; c'est-à-dire qu'elles avaient paru à l'ouest, à peu près à la place où le soleil se couche à l'époque de l'équinoxe. - Euclès, fils de Molon, ou peut-être Euclide, vers l'an 350 avant notre ère. - Au tropique d'hiver, vers le milieu du mois de décembre. - Ces mêmes astronomes, Hippocrate et son disciple Eschyle.

§ 9. Et contre ceux qui prétendent, Anaxagore et Démocrite; voir plus haut, § 1. - Il y a des étoiles fixes, Descartes cite ce passage dans les Principes de la philosophie, 3e partie, § 199; mais il croit que ce sont les planètes de Saturne et de Jupiter qui peuvent avoir parfois cette apparence, et non pas les étoiles fixes. Quant à la chevelure de l'étoile placée dans la cuisse du Chien, Descartes croit que l'observation d'Aristote n'est pas exacte. Selon lui, il y aura eu quelque réfraction extraordinaire qui se faisait dans l'air; ou plutôt les yeux de l'observateur auront été indisposés au moment où il s'en servait. - Sur la foi des Egyptiens voir le Traité du ciel, Livre II, ch. 12, p. 292, a, 8, édit. de Berlin sur les Égyptiens; voir aussi un article de M. Biot sur quelques points de l'astronomie égyptienne, Journal des Savants, cahier de mai 1855, p. 269 et suiv. - Dans la cuisse ou la hanche du Chien. - Peu brillante, il est vrai, ceci rend d'autant plus vraisemblable l'explication de Descartes. - Peu visible quand on finit, même observation. - Un peu de côté, c'est à M. Biot que je dois rapporter cette interprétation. Voir le Journal des Savants, cahier de mai 1855, p. 218 en note. M. Biot trouve que cette remarque de l'auteur, quel qu'il soit, de la Météorologie, atteste une pratique astronomique très délicate et très intelligente. Le milieu de la rétine, qui agit surtout quand on observe, est aussi plus fatigué que le reste de l'organe. En regardant de côté, on voit mieux, parce que la partie de la rétine où la vision se fait alors, est plus sensible.

§ 10. Toutes celles que nous avons vues, cette remarque ainsi que celles qui précèdent, attestent que l'auteur de la Météorologie avait beaucoup observé. - Ont disparu sans se coucher, cette observation est parfaitement exacte, et on a pu la vérifier sur toutes les comètes de notre temps. - S'éteignant petit à petit, même remarque. - Il ne restait le corps, ceci répond péremptoirement aux théories d'Anaxagore et de Démocrite rapportées plus haut, § 1. - Le grand astre, la grande comète vue à l'époque du tremblement de terre d'Achaïe. - Dont nous venons de parler, plus haut § 8. - A l'occident, au § 8, il est dit qu'elle parut à l'occident, vers le point où le soleil se couche à l'époque des Équinoxes. - Sous l'archontat d'Astéïus, il paraît bien que c'est là te nom exact de l'archonte Athénien. Alexandre et Philopon donnent Aristée au lieu d'Astéïus, ainsi que quelques manuscrits. Astéïus était archonte dans la 4e année de la 101e olympiade, l'an 372 avant J.-C. - Il se couchait avant le soleil, et par conséquent l'éclat de la lumière solaire l'empêchait d'être visible durant toute la journée. - Le lendemain, et dans la nuit, parce qu'il se coucha plus tard. - Sa révolution, c'est-à-dire son apparition au-dessus de l'horizon après Io coucher du soleil. - Jusqu'au tiers du ciel, c'est-à-dire 30 degrés environ au-dessus de l'horizon; parfois, la lumière des comètes tient encore plus de place. -  La ceinture d'Orion, Orion est une des trente-cinq constellations du midi. Comme cette comète parut l'ouest, il faut entendre qu'elle disparut vers le sud-ouest.

§ 11. On a vu quelques planètes, Voir plus haut, § 1, l'opinion de Démocrite, qui croit, ainsi qu'Anaxagore, que les comètes ne sont qu'une conjonction et une occultation de planètes. - Cette apparition, des planètes après les comètes. - Se produisit toujours, argument décisif contre la théorie de Démocrite. - Les Égyptiens. Voir plus haut, § 9. - Nous avons vu deux fois déjà, M. Biot rapporte ce phénomène astronomique à l'an 350 avant J-C. - Et la cacher, précisément: l'occulter; les Gémeaux sont une des constellations du milieu, et la troisième à partir du Bélier.

§ 12. Rien que par le raisonnement, après les faits, qu'on peut observer directement, vient le raisonnement, qui a une autorité égale et même supérieure. - Les planètes, ou les étoiles; mais ici il s'agit des planètes puisque c'est un argument contre le système de Démocrite. - Elles paraissent plus grandes, les apparences peuvent différer; mais au fond, toutes les planètes, dans la théorie d'Aristote, sont indivisibles et sans parties. - Elles ne formeraient point de grandeur, c'est ainsi qu'Aristote a toujours soutenu que la ligne ne se composait pas de points. Voir la Physique, livre VI, ch. 1, § 1, p. 331, tome ll de ma traduction. - Ne font que le paraître, telles que nous les voyons au ciel. - En se réunissant, comme le veut Démocrite. Voir plus haut § 1.

§ 13. Les causes indiquées, pour expliquer la nature des comètes. - Par les astronomes, prédécesseurs d'Aristote. - On eût pu développer davantage ces objections, pour nous il est très regrettable que l'auteur ait cru devoir être si concis.

CHAPITRE VII.
De la nature et de la cause des comètes.

§ 1. Comme pour les choses qui échappent à nos sens, nous croyons les avoir démontrées d'une manière suffisante pour notre raison, quand nous sommes arrivés à faire voir qu'elles sont possibles, on doit croire qu'il peut en être surtout ainsi pour les phénomènes que nous étudions maintenant.
§ 2. En effet, nous avons supposé que pour le monde qui enveloppe la terre et qui est au–dessous de la révolution circulaire, la première partie se compose d'une exhalaison sèche et chaude. Or cette exhalaison elle-même, et une grande partie de l'air inférieur qui lui est continu, sont emportés autour de la terre par la révolution et le mouvement circulaire. Entraînée et mue de cette sorte, là où elle est convenablement mélangée, elle s'enflamme souvent; et c'est là ce qui nous fait croire aux courses des astres errants.
§ 3. Lors donc que, par suite du mouvement des substances d'en haut, un principe igné vient à tomber dans une telle condensation, sans que ce principe soit assez considérable pour qu'il cause aussitôt une inflammation rapide et forte, ni tellement faible qu'il s'éteigne rapidement, mais qu'il soit suffisamment puissant et suffisamment étendu et lorsqu'en même temps une exhalaison bien mélangée vient à s'élever d'en bas, alors cette coïncidence produit une comète, un astre chevelu, qui prend d'ailleurs la forme quelle qu'elle soit de cette exhalaison. Si l'exhalaison est partout également répandue, c'est une comète simple; si elle est étendue en longueur, on l'appelle une comète à queue.
§ 4. De même donc que la révolution de la comète paraît être la révolution d'un astre, de même aussi son état stationnaire semble être tout à fait celui d'un astre également. Ce qui se produit alors est à peu près comme si l'on jetait une torche dans un grand tas de paille, ou si l'on y mettait simplement une petite étincelle de feu. La course de ces astres ressemble absolument à ce phénomène de combustion; et suivant la bonne disposition des combustibles, l'inflammation s'étend bien vite en longueur. Si le phénomène subsistait et ne s'éteignait pas si tôt dans son passage, la fin de sa course serait le début même de sa révolution, là surtout où le combustible est plus dense. Ainsi une comète est un astre, on pourrait dire la course d'un astre, qui a en soi sa fin et son origine.
§ 5. Lors donc que c'est sous la région inférieure elle-même que se forme la concrétion, la comète apparaît par elle seule. Mais lorsque c'est au-dessous d'un des astres, soit fixe soit planète, que l'exhalaison se condense par le 345 mouvement, alors c'est une de ces étoiles qui devient comète. Car la chevelure ne tient pas aux astres eux-mêmes; mais elle est pareille aux halos qui paraissent autour du soleil et de la lune et qui les accompagnent, bien que ces astres se déplacent quand l'air est tellement condensé que ce phénomène se forme au-dessous de la marche du soleil. De même aussi la chevelure est pour ces sortes d'étoiles, comme une sorte de halo.
§ 6. La seule différence, c'est que le halo n'a sa couleur qu'à cause de la réfraction, tandis que pour les comètes la couleur paraît être en elles. Lors donc qu'une semblable concrétion se fait autour d'une étoile, il faut nécessairement que la comète semble animée du même mouvement qu'a cette étoile elle-même. Quand au contraire la comète se forme d'elle seule, alors elle paraît être distancée et rester en arrière. Car telle est la marche du monde qui environne la terre.
§ 7. Ce qui prouve surtout que la comète n'est pas une réfraction de la lumière, qui comme le halo se produit relativement à l'astre lui-même dans le combustible pur, et que ce n'est pas relativement au soleil, comme le prétend Hippocrate, c'est que la comète se forme souvent toute seule et plus souvent qu'elle ne se forme autour de certains astres spéciaux. Nous nous réservons de dire plus tard la cause du halo.
§ 8. Mais ce qui doit faire croire que la composition des comètes est ignée, c'est que leur apparition annonce le plus souvent des vents et des sécheresses. II est évident qu'elles se produisent, parce qu'une sécrétion considérable de ce genre a lieu et rend l'air nécessairement plus sec, et que par la quantité même de l'exhalaison chaude, l'humide qui s'évapore, se divise et se dissout à ce point qu'il ne peut plus se convertir facilement en eau. Nous expliquerons d'ailleurs plus clairement ce phénomène, quand le moment sera arrivé de parler aussi des vents.
§ 9. Lors donc que les comètes sont grosses et fréquentes, les années, comme nous venons de le dire, sont manifestement sèches et venteuses. Quand elles sont plus rares et d'une moindre grandeur, ces changements atmosphériques ne se présentent pas aussi complètement ; mais pourtant il y a toujours une augmentation de vent, soit pour la durée soit pour la violence. Ainsi, la pierre qui tomba de l'air à Aegospotamos avait été enlevée durant le jour par la force du vent; et une comète apparaissait aussi à l'occident.
§ 10. Et à l'époque de la grande comète, l'hiver était sec, le vent au nord; et ce fut la lutte des vents qui causa l'inondation dans le golfe 345a. C'était le vent du nord qui soufflait sans interruption, et hors du golfe c'était un grand vent du sud. Il y a plus : sous l'archontat de Nicomaque, à Athènes, une comète se montra, durant quelques jours, dans le voisinage du cercle équinoxial ; elle ne s'était point levée au couchant; et elle coïncida avec le fameux vent de Corinthe.
§ 11. Ce qui fait que les comètes ne sont ni très nombreuses ni très fréquentes entre les tropiques, et qu'elles se montrent en dehors des tropiques plutôt qu'en dedans, c'est le mouvement du soleil et des astres, qui non seulement divise la chaleur, mais qui de plus dissipe celle qui s'est agglomérée. Mais la cause principale, c'est que la plus grande partie va se rassembler dans la voie lactée.

Ch. Vll, § 1. Après avoir exposé les opinions des autres, Aristote va exposer les siennes. - Qu'elles sont possibles, c'est ce que Descartes lui-même a voulu faire dans les Principes de la Philosophie; c'est une sorbe de construction toute rationnelle du système du monde. Aussi Descartes a-t-il invoqué l'autorité d'Aristote et spécialement ce passage de la Météorologie, qu'il traduit pour se justifier d'avoir procédé par hypothèse. Voir les Principes de la Philosophie, 4e, partie, § 204, p. 521, édit. de M. V. Cousin. Descartes rappelant cette citation dans une de ses lettres, tome VI, p. 50, dit que c'est la seule qu'il ait jamais empruntée au philosophe grec. C'est un oubli de Descartes, puisqu'il a cité aussi le ch. 6 de la Météorologie. Voir plus haut ch. 6, § 9. lI a cité en outre le Traité de l'âme, à propos de l'Eucharistie, tome II, p. 82, édit. de M. V. Cousin. Voir aussi le Traité de l'âme, livre III, ch. 13, 1, n., p. 349 de ma traduction. - Il peut en être surtout ainsi, les explications que donne la science contemporaine ne sont bien souvent aussi que des conjectures en métrologie, plus encore que pour tout le reste. - Que nous étudions maintenant. Voir plus haut livre 1, ch. 1, § 2.

§ 2. Nous avons supposé, d'après l'observation des phénomènes. - Le monde qui enveloppe la terre, cette expression assez singulière appartient au texte même. On l'a déjà vue plus haut, ch. 3, § 12. - Au-dessous de la révolution circulaire, voir plus haut, ch. 3, § 3. - Sont emportés autour de la terre, c'est ce qui forme l'atmosphère terrestre, et, comme dirait Descartes, le tourbillon de la terre. - Elle s'enflamme souvent, si c'était le mouvement qui fût cause de la combustion, cet effet devrait toujours se produire, et non pas seulement souvent. Il est vrai que l'auteur ajoute : « Là ou elle est convenablement mélangée; » mais cette restriction détruit en partie l'explication donnée. - Aux courses des astres errants, ceci se rapporte évidemment aux comètes d'abord et aussi aux météores ignés, aux étoiles filantes et aux aurores boréales. Dans le système d'Aristote, ce sont des combustions imprévues qui se produisent dans l'atmosphère terrestre, par le mouvement circulaire et par la combinaison fortuite de l'exhalaison sèche, « là où elle est convenablement mélangée.»

§ 3. Du mouvement des substances en haut, c'est en effet des parties du ciel supérieures à l'atmosphère terrestre que part le principe du phénomène, qui descend plus ou moins bas dans notre atmosphère, et qui arrive enfin jusqu'à nous. - Une telle condensation, ou combinaison. - Vient à s'élever d'en bas, il ne paraît pas possible que les exhalaisons, soit de la terre, soit de l'atmosphère terrestre, puissent avoir de l'influence sur les comètes. - Un astre chevelu, j'ai ajouté cette paraphrase du mot grec. - Une comète simple, j'ai ajouté ce dernier mot pour marquer la différence entre les comètes qui ont une longue queue et celles qui n'en ont presque pas, et que les Grecs appelaient d'un nom spécial. - Comète à queue, le texte dit précisément : « Un astre barbu. » C'est lorsque la queue est au-dessous du noyau. M. Ideier a proposé une variante ingénieuse pour distinguer ces deux espèces de comètes; mais cette variante ne s'appuie pas sur les manuscrits. - M. Ideler remarque avec raison que cette explication des comètes, telle que la donne ici Aristote, a joui d'une autorité incontestable jusqu'au temps de Newton. Aujourd'hui même la science est fort embarrassée pour se rendre compte de ce phénomène. Ce qu'il y a de plus certain, c'est que la matière des comètes est une sorte de vapeur très subtile et très transparente. En ce sens, la théorie d'Aristote n'est pas tout à fait aussi fausse qu'elle le paraît. La comète ne se forme pas, si l'on veut, dans notre atmosphère; mais parfois elle la traverse, puisque notre terre peut passer et être enveloppée dans sa queue, sans qu'elle en subisse aucune modification grave.

§ 4. Son état stationnaire, c'est le sens qu'adoptent Alexandre d'Aphrodisée et les autres commentateurs grecs; mais je crois qu'il s'agit ici de ce qu'on appelle le noyau de la comète; et le mot du texte se prête assez bien à ce sens, qui n'est pas cependant habituel. - Comme si l'on jetait une torche, la comparaison n'est pas exacte si on la rapporte à la réalité des phénomènes; mais elle est assez frappante si l'on admet la théorie péripatéticienne. - Une torche... une petite étincelle de feu, il y a évidemment une intention d'opposer ces deux modes de combustion, dont l'un serait beaucoup plus rapide que l'autre. - A ce phénomène de combustion, le texte n'est pas aussi précis. - Du combustible, c'est-à-dire de la vapeur qui s'enflamme, et qui, selon Aristote, compose la comète. - La fin de sa course, ceci n'est pas très clair, et il semble que par la course il faut entendre ici l'inflammation successive et rapide des vapeurs donc la comète est formée. - Le début même de sa révolution, Aristote semble admettre que la comète a un mouvement de rotation sur elle-même. - La comète est un astre, ceci est vrai plus que sans doute ne le pensait l'auteur lui-même; et comme il y a des comètes dont on a pu constater le retour, on en a conclu que ce sont en effet des astres et non pas des météores. Telle est en particulier celle de 1531, 1607, 1662, 1759, 1835, dont le période est de 76 ans. Il est admis que les comètes ont un mouvement elliptique comme les planètes; mais ce mouvement peut avoir lieu soit d'Orient en Occident, soit d'Occident en Orient, et à peu prés dans tous les sens relativement au plan de l'écliptique. - Sa fin et son origine, c'est le résumé de toute la théorie péripatéticienne; les faits aujourd'hui reconnus la contredisent.

§ 5. La comète apparaît par elle seule, c'est-à-dire que c'est la comète véritable telle qui Aristote la suppose: « une exhalaison de la région intérieure qui s'enflamme en haut, par le mouvement circulaire qui emporte le monde. » - C'est une de cet étoiles, ou planètes. - Qui devient comète, c'est-à-dire qui prend une chevelure. On sait que cette théorie est tout à fait fausse, et que ce n'est jamais ni une planète ni une étoile fixe qui se change en comète, quoique Descartes ait soutenu aussi cette doctrine, Principes de la philosophie, 3e partie, § 119. La vraie nature des comètes, c'est d'être des astres errante dans le sens le plus strict de du mot, puisqu'elles ont dans l'espace des courses qui semblent sortir de toutes les lois imposées aux autres corps célestes. Voir Descartes, ibid. § 128. - Ne tient pat aux astres eux-mêmes, au contraire la queue tient aux comètes et les accompagne. - Elle est pareille aux halos, la comète ne serait pu alors une vapeur qui s'enflamme; ce ne serait qu'une apparence et un phénomène optique de l'atmosphère. - Pour cet sortes d'étoiles qui deviennent des comètes, comme on l'a dit quelques lignes plus haut.

§ 6. La seule différence, cette différence est considérable, puisque d'un côté il y a une substance spéciale, tandis que de l'autre, il n'y a qu'une réfraction de lumière. - La couleur paraît être, et est en effet en elles. - Animée du même mouvement, au contraire, la comète a un mouvement qui lui est propre. - Etre distancée et rester en arrière, c'est le sens adopté par Alexandre d'Aphrodisée. Dans la théorie d'Aristote, le mouvement circulaire qui règne dans les régions supérieures est d'autant plus fort qu'on s'éloigne davantage de la terre. Les comètes qui sont dans notre atmosphère, comme les autres météores, ont un mouvement moins rapide que les planètes ou les étoiles qui sont placées fort au-dessus.

§ 7. Ce qui prouve surtout, ceci semble contredire un peu ce qui vient d'être dit plus haut. - Une réfraction de la lumière, le texte dit simplement : « une réfraction. » - A l'astre lui-même, qui semble prendre une chevelure. - Ce n'est pas relativement au soleil, il semble au contraire que la queue des comètes n'est pas due à une autre cause que la lumière solaire. - Souvent toute seule, c'est-à-dire sans être en conjonction avec un antre astre, planète ou étoile fixe. - Plus tard, Voir plus loin, livre Ill, ch. 2, § 2.

§ 8. La composition des comètes, le texte n'est pas tout à fait aussi précis. - Des vents et des sécheresses, l'observation n'est peut-être pas exacte pour les vents; mais elle l'est certainement pour les sècheresses et les grandes chaleurs. Toutes les comètes que noua avons pu voir de notre temps ont toujours paru dans des années très chaudes. Mais il reste toujours à savoir si c'est la chaleur qui cause les comètes ou si ce sont les comètes qui causent la chaleur. L'opinion vulgaire et celle d'Aristote inclinent à cette dernière explication. - De parler aussi des vents, Voir plus loin dans ce livre, ch. 13, et surtout livre II, ch. 4 et suiv.

§ 9. Sont nombreuses et fréquentes, il suffit même d'une seule comète. - Ces changements atmosphériques, le texte n'est pas aussi précis. - Il y a toujours une augmentation de vent, cette observation n'est peut-être pas très exacte. Mais il est vrai que pour juger jusqu'à quel point elle l'est, il faudrait observer les faits sous le même climat et dans les mêmes lieux que l'auteur de la Météorologie. - Qui tomba de l'air à Aegospotamos, les tables de Paros ou d'Arundel parlent de ce phénomène qui avait été fort remarqué de ce temps, et qui devait en effet causer une grande surprise. C'était sous l'archontat de Théagénide à Athènes, la 1ere année de la 78e olympiade, l'an 487 av. J.-C., vers l'époque de la mort de Xerxès. La science moderne est encore fort embarrassée pour expliquer l'origine des Aérolithes. - Avait été enlevée, il semble résulter de là que cette pierre n'était pas tombée réellement du ciel; mais qu'elle avait été enlevée de terre par un vent violent, et qu'elle était allée tomber à une grande distance. - Une comète apparaissait alors, c'était une simple coïncidence.

§ 10. Et à l'époque de la grande comète, Voir plus haut, ch. 6, § 8. Cette comète est celle qui coïncida avec un tremblement de terre en Achaïe. - Qui causa l'inondation, Voir plus haut, ch. 6, § 8. - Dans le golfe, Alexandre d'Aphrodisée semble comprendre par là le golfe de Corinthe ; et la fin du § prouverait qu'il a raison. - L'archontat de Nicomaque, dans la 4e année de la 109e olympiade, l'an 340 av. J.-C., vingt ans environ avant la mort d'Aristote lui-même. - Du cercle équinoxial, c'est peut-être une constellation qu'on distingue ainsi; ou bien c'est la partie du ciel comprise entre les deux points où se lève et se couche le soleil au temps des Équinoxes.

§ 11. Entre les tropiques, j'ai ajouté ces mots que n'a pas le texte précisément, mais qui me semblent résulter nécessairement de ce qui suit, et de toute la construction de la phrase. - Du soleil et des astres soit planètes, soit étoiles. - La plus grande partie, de la chaleur, sous-entendu. - On peut remarquer que les théories de Descartes sur les comètes ont encore, et à son insu, plus d'un point de ressemblance arec celles d'Aristote.

CHAPITRE VIII.
De la voie lactée. - Opinions des Pythagoriciens, d'Anaxagore et de Démocrite : autre explication. Réfutation de ces opinions. - Théorie nouvelle de la voie lactée.

§ 1. C'est ici qu'il faut dire comment se forme la voie lactée, par quelle cause elle se forme et ce qu'elle est. Mais auparavant, parcourons encore pour cette question les explications données par les autres.
§ 2. Quelques-uns des philosophes appelés Pythagoriciens prétendent, ceux-ci, que c'est la route d'un des astres qui sont tombés suivant la direction appelée la Chute de Phaéton; ceux-là, que c'est le soleil même qui suivait jadis cette route, tellement que cet espace a été en quelque sorte brûlé et affecté d'une façon analogue par le passage de cet astre.
§ 3. Mais il est absurde de ne pas voir que si c'était là la cause de la voie lactée, il faudrait à bien plus forte raison encore que le cercle du Zodiaque fût en cet état; car toutes les planètes se meuvent dans ce cercle et non le soleil tout seul. Or, le cercle tout entier nous est visible, puisque dans la nuit nous en voyons toujours la moitié; pourtant il ne nous présente aucune modification de ce genre, si ce n'est dans sa très-faible partie qui touche le cercle de la voie lactée.
§ 4. Anaxagore et Démocrite assurent que la voie lactée n'est que la lumière de quelques étoiles. Selon eux, le soleil dans sa course sous la terre n'éclaire pas certaines étoiles. Celles qu'il éclaire perdent leur éclat et ne peuvent plus être visibles à cause de ses rayons resplendissants ; celles au contraire qui par suite de l'interposition de la terre ne sont plus éclairées par le soleil, produisent par leur lumière propre ce qu'on appelle la voie lactée.
§ 5. Il est tout aussi évident que cette explication n'est pas plus possible que l'autre. La voie lactée se montre toujours dans les mêmes étoiles et la même, et elle se montre comme un très grand cercle. Mais les astres qui ne sont pas visibles à cause du soleil, sont toujours différents, parce qu'ils ne restent pas dans le même lieu. Il faudrait par conséquent que la voie lactée se déplaçât quand le soleil se déplace; et nous n'observons rien de pareil.
§ 6. De plus 346, si comme on le démontre dans les théorèmes d'astronomie, la grandeur du soleil est beaucoup plus considérable que celle de la terre, et la distance des étoiles à la terre beaucoup plus grande que celle du soleil, de même que celle du soleil à la terre est plus grande que celle de la lune, le cône lumineux qui vient du soleil ne doit pas réunir ses rayons bien loin de la terre, et l'ombre de la terre que l'on appelle la nuit ne peut pas aller jusqu'aux astres. Mais il faut nécessairement dans cette hypothèse que le soleil éclaire tous les astres, et que la terre ne s'interpose pour aucun d'eux.
§ 7. Reste une troisième opinion sur la voie lactée. C'est celle de quelques astronomes qui prétendent que la voie lactée n'est pas autre chose qu'une réfraction de notre vue à l'égard du soleil, tout comme cela est pour la comète.
§ 8. Cette explication est tout aussi insoutenable que les autres. En effet, si l'on suppose en repos et l'œil qui voit, et le miroir et l'objet lui-même qui est vu, il faut que la même partie de l'image se montre dans le même point du miroir. Mais si le miroir et l'objet visible viennent à se mouvoir, en restant toujours à la même distance de l'œil qui demeure en place, et que le miroir et l'objet ne se meuvent point l'un par rapport à l'autre avec la même vitesse ni avec le même intervalle, il est impossible que la même image paraisse dans la même partie du miroir.
§ 9. Or les astres qui font leurs révolutions dans le cercle de la voie lactée, sont en mouvement, comme y est le soleil, relativement auquel a lieu la réfraction de notre œil qui reste immobile. Ces astres restent toujours également et semblablement éloignés de nous, bien qu'ils ne conservent pas entre eux une distance toujours égale. Ainsi c'est tantôt au milieu de la nuit, et tantôt le matin que le Dauphin se lève, et les diverses parties de la voie lactée restent les mêmes à chacun de ses levers. Et cependant c'est ce qui ne devrait point arriver, si la voie lactée n'était qu'une image et une apparence, et si ce phénomène n'était pas quelque modification propre aux lieux eux-mêmes. Il faut ajouter que durant la nuit on peut observer la voie lactée se réfléchissant dans l'eau et dans d'autres miroirs de ce genre; et comment est-il possible alors que la vue se réfracte vers le soleil?
§ 10. Tout ceci prouve donc que la voie lactée n'est ni la route d'aucune planète, ni la lumière d'astres que nous ne verrions pas, ni une réfraction. Ce sont à peu près là toutes les opinions qui jusqu'ici ont été émises par les autres philosophes.
§ 11. Maintenant exposons la nôtre, en reprenant le principe que nous avons posé antérieurement, à savoir, que l'extrémité de ce qu'on appelle l'air a la puissance et la propriété du feu, de sorte que par le mouvement de l'air divisé se forme cette combinaison séparée que nous nommons les comètes.
§ 12. On doit supposer que ce qui arrive pour les comètes, se représente aussi lorsque cette division 346a ne se produit pas par elle seule, mais qu'elle est causée par quelqu'un des astres soit fixes soit errants. C'est alors que se forment les comètes, parce qu'elles viennent à la suite du mouvement des astres, comme à la suite du soleil se produit cette combinaison d'où vient par réfraction le halo, ainsi que nous l'avons dit, toutes les fois que l'air est ainsi mélangé.
§ 13. Or, ce qui se passe pour un seul astre, a lieu aussi, du moins on peut le supposer, pour le ciel tout entier et pour toute la révolution supérieure ; car il est rationnel de croire que si le mouvement d'un seul astre peut amener ce phénomène, à plus forte raison le mouvement de tous peut-il causer cet effet, et produire de la flamme, et très particulièrement dans ce lieu où se trouvent réunis les plus grands des astres, les plus pressés et les plus nombreux.
§ 14. Le lieu du Zodiaque par le mouvement du soleil et des planètes dissout cette combinaison; et voila pourquoi la plupart des comètes se forment en dehors des tropiques. C'est là aussi ce qui fait que le soleil et la lune n'ont jamais de chevelure; car ils dissolvent la combinaison avant que la concrétion n'ait pu se former.
§15. Mais le cercle dans lequel se montre à nos observations la voie lactée est immense; et sa position est telle qu'il dépasse de beaucoup les tropiques.
§ 16. De plus ce lieu est rempli des astres les plus grands et les plus brillants, et de ceux qu'on appelle parsemés ou errants, et cela même est parfaitement visible à nos yeux, de telle sorte que c'est à cause de ces astres que continûment et toujours s'accumule toute cette combinaison.
§ 17. En voici la preuve. La plus vive lumière de ce cercle se montre dans celle des deux demi-circonférences qui contient la bifurcation ; or dans cette partie, il y a beaucoup plus d'astres, et ils sont plus pressés que dans l'autre, comme si le mouvement même des astres était peut-être la seule cause de l'éclat de la voie lactée ; car si cet éclat est dans le cercle où se présente le plus grand nombre des astres, et dans cette partie même du cercle où les astres les plus grands et les plus nombreux se réunissent et se condensent, il est naturel de supposer que c'est là la cause la plus probable et la plus directe du phénomène.
§ 18. On peut étudier ce cercle et les astres qu'il renferme d'après le dessin ci-joint ; mais quant aux astres qu'on appelle parsemés ou errants, on n'a pu les marquer ainsi dans la sphère, parce qu'aucun d'eux n'a une place parfaitement évidente et définitive; mais les choses sont de toute évidence pour peu qu'on jette les yeux sur le ciel.
§ 19. C'est dans ce cercle tout seul en effet que les espaces intermédiaires sont remplis d'astres de ce genre, tandis que dans les autres cercles ces astres manquent 347 évidemment; et par conséquent, si nous admettons comme suffisante la cause que nous avons assignée à la formation des comètes, nous devons aussi penser que les choses se passent à peu près de même pour la voie lactée.
§ 20. En effet le phénomène que la chevelure produit pour un seul astre, se répète, nous pouvons le croire, de la même façon pour tout un cercle; et la voie lactée, est, pour en donner une sorte de définition, la chevelure d'un très grand cercle causée par la sécrétion. C'est là ce qui fait, ainsi que nous l'avons dit antérieurement, que les comètes ne sont ni nombreuses ni fréquentes, parce que la combinaison qui les forme a été séparée continûment et est toujours séparée à chaque période dans cette partie du ciel.
§ 21. Nous avons donc traité des phénomènes qui se manifestent dans le monde qui entoure la terre et qui fait suite aux révolutions supérieures, c'est-à-dire de la marche des étoiles, de la flamme qui y brûle, des comètes, et de ce qu'on nomme la voie lactée; car ce sont là tous les phénomènes à peu près qui se passent dans ce lieu.

Ch. VIll, § 1. Encore, c'est ce qu'Aristote a toujours fait dans tous ses autres ouvrages comme dans celui-ci. Ideler lui a fait un reproche, peu justifié selon moi, en croyant qu'il avait oublié dans ce chapitre les théories de Métrodore, le pythagoricien, et de quelques autres philosophes.

§ 2. Quelques-uns des philosophes appelés Pythagoriciens, Métrodore peut y être compris comme les autres. - Qui sont tombés, ou bien : « qui seront tombés.  » - La direction... la Chute, il n'y a qu'un seul mot dans le texte ; mais il y a des variantes dont j'ai cru devoir conserver la trace par ce changement d'expressions. - Ceux-ci.... ceux-là, ces deux explications ont ceci de commun, qu'elles font de la voie lactée une simple apparence; un phénomène quelconque a changé la couleur du ciel dans cette partie de l'espace. Aujourd'hui, et grâce au télescope, on sait précisément que cette lumière blanche appelée voie lactée est formée par une multitude d'étoiles, dont l'éclat se confond, comme l'avaient conjecturé quelques philosophes de l'antiquité. Voir plus bas § 4. Aristote, d'ailleurs, réfute l'opinion insoutenable de ses devanciers, sans en donner une qui soit plus admissible.

§ 3. A bien plus forte raison encore, cet argument est péremptoire; et en effet, le cercle du Zodiaque devrait laisser des traces dans le ciel, si la voie lactée était en effet ce qu'on la suppose. - Dans la nuit nous en voyons toujours la moitié, ceci est difficile à comprendre. L'auteur veut peut-être dire que dans la nuit, la moitié du cercle du Zodiaque est toujours au-dessus de l'horizon. - Le cercle de la voie lactée, l'idée de cercle n'est peut-être pas très exacte, appliquée à la voie lactée.

§ 4. La lumière de quelques étoiles, cette théorie prise dans sa généralité est exacte; mais elle semblerait fausse si l'on s'en tient à l'explication détaillée qui en est donnée dans ce §. Du reste Aristote paraît avoir mal représente la pensée, si ce n'est d'Anaxagore au moins de Démocrite. Stobée, (Eclogae, I, 28, p. 574,) atteste que Démocrite regardait la voie lactée comme produite par la réunion d'une foule de petites étoiles, qui s'éclairaient mutuellement les unes les autres par leur multitude même. Macrobe dans le Songe de Scipion, Manilius dans son poème sur l'Astronomie, et Achille Tatius dans ses Prolégomènes aux phénomènes d'Aratus, confirment cette même assertion. On peut donc regarder comme certain que Démocrite, tout au moins, a entrevu la véritable nature de la voie lactée. Pour Anaxagore, c'est plus douteux. Voir la note de M. Ideler sur ce passage de la Météorologie, où il défend aussi Aristote d'avoir altéré sciemment les opinions de ses devanciers. - N'éclaire pas certaines étoiles, il semble bien que c'est là le système d'Anaxagore; mais ce n'est pas celui de Démocrite, comme le prouve le passage de Stobée.

§ 5. Cette explication, donnée par Anaxagore et attribuée faussement à Démocrite. - N'est pas plus possible que l'autre, celle des Pythagoriciens; voir plus haut, § 2. - Dans les mêmes étoiles, c'est-à-dire dans les mêmes constellations. - Comme un très grand cercle, la voie lactée fait le tour du ciel; mais on ne peut pas dire que ce soit un cercle. - Parce qu'ils ne restent pas dans le même lieu, ceci ne s'applique bien qu'aux planètes et non plus aux étoiles fixes. - Quand le soleil se déplace, ceci ne peut se comprendre que du jour; et dans le jour, la voie lactée n'est pas visible. Ou bien l'auteur admettant que le soleil, tout en passant sous la terre, éclaire encore diverses parties du ciel, pense-t-il aussi que la voie lactée devrait changer au fur et à mesure que le soleil avance dans sa course.

§ 6. Dans les théorèmes ou observations d'astronomie, Voir plus haut, ch. 3, § 2, une expression pareille. On pourrait croire qu'il s'agit ici encore du Traité du Ciel; mais il n'en est rien, comme le remarque M. Ideler, parce que dans le Traité du Ciel, (Livre Il, ch. 10, p. 291, a, 31, édit. de Berlin), Aristote renvoie aussi à son Traité d'Astronomie. C'est peut-être celui dont fait mention Diogène Laërce dans son catalogue. Il est certain, quoi qu'il eu soit, qu'Aristote s'était occupé d'astronomie d'une manière très sérieuse. - La grandeur du soleil, théorie exacte. - La distance des étoiles, théorie non moins exacte que la précédente. Ceci est fait pour donner une haute idée des connaissances d'Aristote en astronomie. - Celle du soleil à la terre, même remarque. - N'irait pas jusqu'aux astres, ou étoiles. C'est ce qui est en effet; et la lumière du soleil n'arrive pas jusqu'aux étoiles; car autrement elles n'auraient pas de lumière propre. C'est beaucoup aussi d'avoir compris que la nuit n'est que l'ombre de la terre. - Dans cette hypothèse, j'ai cru devoir ajouter ces mots qui me semblent nécessaires pour que la pensée ait toute la netteté désirable.

§ 7. Quelques astronomes, Aristote ne nomme pas ces astronomes; mais la fin du § peut faire supposer qu'il s'agit ici d'Hippocrate de Chios, qui avait donné une explication analogue pour la comète; voir plus haut, ch. 8, § 3. - A l'égard du soleil, c'est l'expression même du texte; mais elle n'est pas très juste; ce n'est pas notre vue qui est réfractée, mais bien la lumière du soleil que nous apercevons après cette réfraction.

§ 8. Que les autres, que l'on vient de passer successivement en revue, celle des Pythagoriciens, d'Anaxagore et de Démocrite. - Si l'on suppose en repos, cette supposition n'est pas applicable au phénomène, puisque les étoiles et le soleil sont censés se mouvoir.  - Le miroir et l'objet visible, ici le miroir est le soleil, et l'objet visible est représenté par les étoiles. - Qui demeure en place, en effet, l'observateur ne change pas de position. - Avec la même vitesse, le soleil et les étoiles de la voie lactée ne saut pas animés d'un même mouvement, et la distance où ces corps sont les uns des autres varie selon le mouvement même qu'on support au soleil.

§ 9. Les astres ou les constellations. - Dans le cercle de la voie lactée, même observation que plus haut, § 3. - Le Dauphin, est une des trente constellations septentrionales. - N'était qu'une image et une apparence, il n'y a qu'un seul mot dans le texte. - Propre aux lieux mêmes, c'est-à-dire que la voie lactée doit avoir quelque chose de substantiel, et qu'elle ne doit pas être simplement un phénomène optique. - Il faut ajouter, ce nouvel argument pourrait bien n'être qu'une interpolation de quelque glossateur; mais Alexandre d'Aphrodisée commente ce passage comme le reste. - Comment est-i! possible alors, l'argument n'est peut-être pas très fort; car on pourrait supposer que la lumière de la voie lactée, quelle qu'en soit l'origine, se réfracte dans l'eau, comme le ferait celle du soleil; mais l'auteur admettant que c'est la vue qui se réfracte et non pas la lumière, ne peut pas concevoir qu'il y ait de l'eau jusqu'à la voie lactée, et delà jusqu'au, soleil, trois ou quatre réfractions successives. C'est là du moins le seul que donne Alexandre d'Aphrodisée.

§ 10. La route d'aucune planète, comme le croyaient les Pythagoriciens. - Ni la lumière d'astres, comme le croyaient Démocrite et peut-être Anaxagore. - Ni une réfraction, comme le croyait sans doute Hippocrate de Chios. Voir plus haut, §§ 3 et 4. - Qui jusqu'ici, c'est-à-dire jusqu'au temps d'Aristote de 350 à 322 av. J.-C.

§ 11. Exposons la nôtre, celle théorie ne vaudra pas celle de Démocrite. - Posé antérieurement, Voir plus haut, chap. 2 et 3. - De ce qu'on appelle l'air, Voir une expression toute pareille plus haut, ch. 3, § 2; voir aussi ch. 3, § 12. - Que nous nommons les comètes, Voir plus haut, ch. 7, § 3, la théorie spéciale d'Aristote sur le comètes.

§ 12. Que ce qui arrive pour les comètes, les comètes ne sont pas des météores; la voie lactée n'est pas plus un météore, et à bien plus forte raison, que les comètes. - Par elle seule, c'est-à-dire par une combustion spontanée qui se produit dans l'espace. - Soit fixes soit errants, les étoiles fixes et les planètes. - Ainsi que nous l'avons dit, Voir plus haut, ch. 7, § 5.

§ 13. Pour un seul astre, soit le soleil, soit la lune autour duquel se forme le halo. - Toute la révolution supérieure, Voir plus haut, ch. 2 et 3. - Peut amener ce phénomène, de la comète ou du halo. - Produire de la flamme, ceci ne s'applique pas bien à la voie lactée. - Dans ce lieu où se trouvent réunis, ceci non plus ne s'applique pas à la voie lactée très exactement.

§ 14. Le lieu du Zodiaque, c'est-à-dire cette partie du ciel où sont les constellations qui forment le Zodiaque. - Cette combinaison, d'où pourrait naître des apparences analogues à celles de la queue des comètes. - De chevelure, l'explication n'est pas très bonne, puisque le soleil et la lune ont des halos, et que par conséquent ils ne dissolvent pas les exhalaisons atmosphériques aussi complètement que l'auteur semble le croire. - La combinaison.... la concrétion, ce sont là des expressions bien vagues, même dans le système de l'auteur.

§ 15. Il dépasse de beaucoup les tropiques, l'observation est juste sans être très précise.

§ 16. De ceux qu'on appelle parsemés, ce sont sans doute les étoiles qui n'ont pas été comprises dans les diverses constellations. Ce sont peut-être aussi les planètes. - Ou errants, il n'y a qu'un seul mot dans le texte. - Visible à nos yeux, il semblerait résulter de cette phrase que l'auteur avait peut-être aussi quelques instruments d'astronomie à sa disposition ; et pour dire qu'un phénomène est visible aux veux, il faut qu'il y en ait d'autres ab le secours ordinaire des yeux no suffit pu, et pour l'observation desquels on doit emprunter un secours étranger.

§ 17. En voici la preuve, cette preuve est fort ingénieuse quoiqu'elle ne soit pas vraie; mais le système étant admis, il est évident qu'on pouvait tirer un excellent argument de cette circonstance de la réunion des plus grands astres dans la partie la plus brillante de la voie lactée. - La plus probable et la plus directe, il n'y a qu'un seul mot dans le texte.

§ 18. D'après le dessin ci-joint, nous ne pouvons nous risquer à reproduire ce dessin; mais ce n'est pas le seul passage d'Aristote où il soit parlé de dessins explicatifs qui étaient joints au texte, pour le faire mieux comprendre et l'illustrer comme nous le dirions aujourd'hui. Dans tous ses traités d'histoire naturelle, notamment dans l'Histoire des animaux, Aristote mentionne fréquemment les dessins qui complètent les explications qu'il vient de donner. Il se servait même de tableaux pour un usage analogue, et l'un peut eu voir des exemples dans la logique, toutes les fois que l'ordre des idées peut être représenté par des arrangements graphiques. Voir les Premiers analytiques, livre 1, ch. 2, § 6, n., p. 7 de ma traduction; et ibid. ch. 46, § 7, n., p. 189. - Parsemés ou errants, il n'y a qu'un seul mot dans le texte. Voir aussi plus haut § 16. - Dans la sphère, représentée dans ce dessin qui était annexé au texte. Voir plus loin, livre III, ch. 5, toute l'explication du phénomène de l'arc-en-ciel avec des ligures géométriques.

§ 19. Dans ce cercle tout seul, le cercle de la voie lactée. - D'astres de ce genre, d'astres aussi nombreux et aussi brillants. - Si nous admettons comme suffisante, Ideler remarque avec raison cette modestie d'Aristote; mais cette réserve prouve elle-même qu'Aristote n'était pas absolument satisfait de sa théorie des comètes. - A peu près de même, la différence cependant est considérable, puisque la voie lactée est constante et immobile, tandis que les comètes sont passagères et sont animées d'une course, rapide.

§ 20. Pour tout un cercle, celui de la voie lactée, qui fait le tour entier du ciel, quoiqu'elle le fasse irrégulièrement. - La chevelure d'un très grand cercle, l'explication de Démocrite valait beaucoup mieux, et Aristote aurait dû s'y tenir. - Nous l'avons dit antérieurement, Voir plus haut, ch. 7, § 11. - Ni fréquentes, ceci peut s'entendre d'une manière générale pour toute l'étendue du ciel ; mais au ch. 7, § 11, l'auteur a dit seulement que les comètes ne sont ni nombreuses ni fréquentes en dedans des tropiques. - Dans cette partie du ciel, c'est-à-dire que les matières aériformes qui composent les comètes sont attirées surtout dans cette partie du ciel où est la voie lactée. Philopon a réfuté par de très bons arguments toute cette théorie d'Aristote sur la voie lactée. Voir son commentaire.

§ 21. Dans le monde qui entoure la terre. Voir plus haut, ch. 2 et ch. 3. - Aux révolutions supérieures, c'est l'éther, placé à l'extrémité de toutes les révolutions qui se rapportent à notre globe, et les enveloppant toutes dans son orbe immense et son mouvement éternel. - De la marche des étoiles, ou des astres. - De la flamme qui y brille, par les causes qui ont été indiquées, ch. 3, §§ 15, 16, et ch. 4, §§ 2 et suiv. - Dans ce lieu, qui est fort au-delà de notre atmosphère, et qui appartient aux régions supérieures du ciel.

CHAPITRE IX.
De la formation des nages, et du brouillard.

§ 1. Parlons maintenant du lieu qui par sa position est le second après celui-là, mais qui est le premier autour de la terre.
C'est le lieu commun de l'eau et de l'air et des phénomènes qui accompagnent la formation de l'air et de l'eau dans la région supérieure. Il faut chercher également les principes et les causes de tous ces phénomènes.
§ 2. Le premier de ces principes, comme moteur et comme supérieur, c'est le cercle dans lequel évidemment la révolution du soleil, divisant et réunissant selon qu'il est plus rapproché ou plus loin, est cause de la génération et de la destruction des choses. La terre étant immobile, le liquide qui l'entoure vaporisé par les rayons du soleil et par toute la chaleur qui vient d'en haut, est porté vers le haut.
§ 3. Quand la chaleur qui l'a élevé vient à manquer, soit qu'elle se disperse dans la région supérieure, soit même qu'elle s'éteigne parce qu'elle est emportée plus loin dans l'air qui est au-dessus de la terre, la vapeur refroidie par la disparition de la chaleur et par le lieu se réunit de nouveau, et redevient eau, d'air qu'elle était; l'eau ainsi reformée est portée de rechef vers la terre.
§ 4. L'exhalaison qui vient de l'eau est de la vapeur ; et l'exhalaison de l'air changée en eau, est un nuage. Le brouillard est le résidu de la conversion du nuage en eau ; et c'est là ce qui fait qu'il annonce du beau temps plutôt que de la pluie; car le brouillard est comme une sorte de nuage qui n'est pas formé.
§ 5. Du reste le cercle de ces phénomènes imite le cercle du soleil; car en même temps que le soleil poursuit sa course oblique et changeante, en même temps 347a l'autre cercle va aussi tour à tour en haut et en bas : et il faut le regarder comme un fleuve qui coule en haut et en bas circulairement, et qui est tout à la fois composé d'eau et d'air.
§ 6. Ainsi quand le soleil est proche, le fleuve de la vapeur coule en haut; quand il est éloigné, le fleuve de l'eau coule en bas ; et cela semble se faire sans interruption avec une certaine régularité, de telle sorte que cet Océan dont les anciens ont dit quelques mots, pourrait bien être pris pour ce fleuve qui circule autour de la terre.
§ 7. Le liquide étant toujours élevé par la puissance de la chaleur, et étant précipité de nouveau par le refroidissement vers la terre, on a donné des noms fort convenables à ces phénomènes et à quelques-unes de leurs variétés; quand les parties qui tombent sont très ténues, on les appelle ondée, et quand les parties sont plus grosses, on les appelle de la pluie.

Ch. IX, § 1. Du lieu qui est le second, c'est, à proprement parler, l'atmosphère terrestre où se passent en effet la plupart des phénomènes météoriques. - De l'air et de l'eau, j'ai adopté une leçon indiquée par un des manuscrits qu'a consultés Ideler, et qui consiste à mettre le pronom démonstratif au pluriel au lieu du singulier. - Les principes et les causes, les deux idées sont fort voisines l'une de l'autre; mais on peut distinguer avec Ideler le principe de la cause, en faisant du principe la cause première et la plus éloignée de l'effet, tandis que la cause proprement dite est celle qui est la plus rapprochée de l'effet produit.

§ 2. La révolution du soleil, il est  incontestable que l'action du soleil sur notre atmosphère est une des principales causes de tous les phénomènes qui s'y passent, par les alternatives de chaleur et de froid qu'il y produit, selon qu'il est plus proche ou plus distant de la terre au-dessus ou au-dessous de notre horizon. - La terre étant immobile, c'est l'erreur commune et continuelle d'Aristote; mais le phénomène qu'il indique n'en est pas mois réel; il y a à la surface de la terre une immense évaporation. - Le liquide qui l'entoure, ou qui se trouve à sa surface. Aristote admettait la sphéricité de la terre tout en admettant son immobilité. On pourrait aussi traduire L'humide, au lieu du Liquide.
§ 3. Quand la chaleur, le phénomène est exactement décrit. Le liquide se vaporise et se convertit en une espèce d'air; arrivé dans la région froide sous forme de vapeur, il se condense, redevient liquide et retombe sur les lieux d'où il s'était élevé, c'est-à-dire sur la terre. - Et par ce lieu, Voir plus haut, ch. 3, § 10. Ce lieu est froid, parce qu'il est trop éloigné des astres qui lancent de la chaleur selon Aristote, et de la terre qui est échauffée par la réfraction des rayons solaires.

§ 4. L'exhalaison qui vient de l'eau, cette définition de la vapeur est acceptable aussi bien que tant d'autres; mais on comprend moins ce que c'est que l'exhalaison de l'air; et il semble que le nuage vient de l'eau bien plutôt que de l'air. Les vapeurs en se réunissant et en se condensant forment les nuages. La science moderne distingue les corps normes en deux classes, les gaz et les vapeurs. Les premiers restent toujours au même état; les secondes peuvent passer à l'état liquide dans certaines circonstances déterminées. Cette distinction est aussi simple que réelle. - Le brouillard est le résidu, aujourd'hui on ne fait entre le nuage et le brouillard aucune différence si ce n'est que le brouillard est un nuage à la surface de la terre; et un nuage, un brouillard dans les hautes parties de l'atmosphère. C'est toujours de la vapeur d'eau qui s'est précipitée dans notre atmosphère, et qui s'y maintient plus ou moins haut sous forme de vésicules qui sont creuses selon toute apparence. - Une sorte de nuage qui n'est pas formé, c'est une erreur; le brouillard est tout aussi formé que le nuage; seulement il est à la surface de la terre au lieu d'être à une certaine distance. Le brouillard annonce le beau temps quand il tombe, parce qu'il n'y a plus d'humidité dans l'atmosphère ; il annonce la pluie quand il s'élève, parce qu'il doit retomber plus tard après qu'il s'est refroidi et converti en eau. Au lieu de « Qui n'est pas formé, » le texte dit précisément: « Stérile, ou infécond. »

§. 5. Ce cercle de phénomènes, j'ai ajouté ces deux derniers mots pour compléter la pensée. - Imite le cercle du soleil, cette comparaison n'est pas très juste ; ou peut-être l'auteur veut-il dire seulement que la formation et la dissolution du brouillard accompagnent le cours du soleil; ce qui ne serait pas fort exact. - Va tour à tour en haut et en bas, C'est-à-dire que la vapeur s'élève dans l'atmosphère et retombe ensuite sur la terre sous forme de pluie. - Comme un fleuve, cette comparaison est plus juste que la précédente.

§ 6. Quand le soleil est proche, cette théorie ne répond pas aux phénomènes. Il y a des brouillards et de la pluie à toutes les époques de l'année, et à tous les moments du jour et de la nuit. II est vrai cependant que le soleil exerce une très grande influence sur ces météores; mais son action n'est pas aussi régulière que l'auteur le dit ici. - Une certaine régularité, la théorie ainsi restreinte est beaucoup plus vraie qu'à la prendre dans toute sa généralité. - Cet océan, qui entoure la terre et forme son atmosphère, océan de vapeur et non pas d'eau. - Dont les anciens, Héraclite sans doute et quelques autres. - Ce fleuve, de vapeurs qui circulent sous diverses formes.

§ 7. Le liquide, ou l'Humide, qui s'est vaporisé et qui peut alors élever dans l'atmosphère.  - Des noms fort convenables, il ne semble pas cependant que l'étymologie grecque des deux mots suivants reproduise en rien une idée spéciale du phénomène. - Et à quelques-unes de leurs variétés, comme la rosée et la gelée blanche, dont il va être question dans le chapitre suivant. - Les parties sont très ténues, les gouttes de pluies sont en effet quelquefois très petites, et d'autres fois beaucoup plus grosses. - On les appelle ondée, nous n'avons pas d'autre mot dans notre langue; mais celui-ci ne répond pas tout à fait ni aussi bien que je l'aurais voulu à la définition donnée dans le texte.

CHAPITRE X.
De la rosée et de la gelée blanche.

§ 1. Cette partie de la vapeur qui se forme dans le jour, mais qui n'étant pas portée dans les hautes régions, parce qu'il y a une trop petite quantité de feu pour l'enlever comparée à la masse de l'eau qu'il enlève, retombe sur la terre de nouveau durant la nuit après s'être refroidie, est ce qu'on appelle la rosée et la gelée blanche.
§ 2. C'est de la gelée blanche, quand la vapeur se gèle avant d'être changée en eau; et elle se produit surtout l'hiver et dans les lieux froids. C'est de la rosée, quand la vapeur se convertit en eau, et qu'il ne fait ni assez chaud pour qu'elle se sèche dans son ascension, ni assez froid, pour que la vapeur elle-même se gèle, parce que le lieu ou bien la température est plus chaude.
§ 3. La rosée se produit dans les temps sereins et les lieux calmes ; la gelée blanche tout au contraire, comme je viens de le dire; car il est évident que la vapeur est plus chaude que l'eau, puisqu'elle contient encore le feu qui l'a élevée, et qu'il faut plus de froid pour la faire geler.
§ 4. Toutes les deux se forment par un temps pur et quand il n'a a pas de vent ; car si le temps n'était pas pur, elles ne pourraient s'élever en l'air, et elles ne pourraient se former si le vent soufflait; et ce qui prouve bien qu'elles se produisent parce que la vapeur n'a pas été élevée très haut, c'est qu'on ne voit jamais la gelée blanche sur les montagnes.
§ 5. Une première cause de ce phénomène, c'est que la vapeur s'élève des lieux profonds et humides, de telle sorte que la chaleur qui la transporte, comme si elle se chargeait d'un fardeau au-dessus de ses forces, ne peut l'élever à une grande hauteur, mais la laisse bientôt retomber. Une seconde cause, c'est que l'air qui s'écoule et qui détruit cette espèce de combinaison, s'écoule surtout dans les lieux élevés.
§ 6. La rosée se forme en tous lieux par les vents du sud et jamais par les vents du nord, si ce n'est dans le Pont, où le phénomène se passe à l'inverse : toujours avec les vents du nord, jamais 348 avec les vents du midi. C'est absolument la même cause qui fait qu'elle se produit par le beau temps et non par le mauvais; car le vent du sud amène le beau temps, et le vent du nord le mauvais; et ce dernier vent est assez froid pour éteindre par le mauvais temps la chaleur de l'exhalaison.
§ 7. Dans le Pont au contraire, le vent du midi ne produit pas assez décidément le beau temps pour que la vapeur se forme; et le vent du nord par sa froideur accumule la chaleur qu'il enveloppe, de manière à former bien plutôt davantage d'évaporation.
§ 8. C'est ce qu'on peut voir aussi dans les contrées en dehors du Pont. Les puits exhalent plus de vapeur par les vents du nord que par les vents du sud. Mais les vents du nord éteignent la chaleur avant qu'il ne s'en soit accumulé une grande quantité; les vents du sud, au contraire, laissent l'évaporation s'accumuler tant qu'elle veut.

Ch. X, § 1. Cette partie de la vapeur, la théorie d'Aristote sur la rosée est fort exacte, et elle tient encore sa place dans la science moderne, bien qu'on l'ait complétée depuis. Voir la météorologie de Kaemtz, traduction de M. Ch. Martins, p. 98. - Une trop petite quantité de feu, c'est le mot précis du texte; il vaudrait mieux dire: « de la chaleur » au lieu du feu. - La rosée et la gelée blanche, il n'y a en effet qu'une simple différence de température entre les deux produits.

§ 2. Avant d'être changée en eau, les météorologistes modernes semblent aussi admettre que la gelée se forme avant que l'eau ne soit produite, et que c'est la vapeur qui se congèle. - L'hiver et dans les lieux froids, bien quelle se forme assez souvent aussi au printemps. - Se sèche, et disparaisse au moins pour quelque temps. - Le lieu ou bien la température, la position des lieux a en effet une très grande influence sur la quantité plus ou moins forte de rosée qui se forme.

§ 3. Dans les temps sereins, cette observation est très exacte; et l'on sait aujourd'hui que le rayonnement du sol qui refroidit les couches voisines de l'atmosphère, est d'autant plus fort que le ciel est plus serein et l'air plus calme. - Comme je viens de le dire, § 2. - Est plus chaude que l'eau, le fait est exact. - Qui l'a élevée, dans l'atmosphère.  - Et il faut plus de froid, la gelée blanche indique un abaissement de température plus grand que la rosée.

§ 4. Par un temps pur, c'est-à-dire quand il n'y a pas de nuages au ciel. - Et quand il n'y a pas de vent, observation fort exacte. - Jamais la gelée blanche sur les montagnes, je ne sais si le fait est parfaitement vrai; et il me semble avoir vu plus d'une fois de la gelée blanche sur les montagnes. Je ne trouve pas d'observation spéciale sur ce point dans les auteurs contemporains, bien qu'Ideler paraisse être tout à fait de l'avis d'Aristote.

§ 5. Une première cause, cette explication n'est pas tout à fait exacte, puisqu'elle ne tient aucun compte du rayonnement du sol, qui Aristote ne connaissait pas. La chaleur a bien enlevé la vapeur; mais la vapeur retombe, parce que les couches d'air qui avoisinent le sol se sont refroidies successivement. - La laisse bientôt retomber, le fait est vrai; mais il se produit par une autre cause que celle qui est indiquée. - L'air qui s'écoule, c'est-à-dire qui est en mouvement et qui circule autour de la terre. Voir plus haut, ch. 9, § 5. - S'écoule surtout dans les lieux élevés, et l'action de l'air dessèche la vapeur avant qu'elle ne se résolve en eau.

§ 6. Par les vents du sud, le fait peut être vrai, et il est assez facile à constater; mais depuis Aristote, je ne vois pas qu'on l'ait observé de très près et spécialement. Il faudrait d'ailleurs faire les observations dans les pays mêmes où Aristote faisait les siennes. - Dans le Pont, c'est-à-dire sur les bords du Pont-Euxin, ou Mer Noire. - Se passe à l'inverse, il serait curieux de vérifier sur les rives de la Mer Noire et dans les pays circonvoisins ce singulier phénomène et l'exactitude de l'assertion émise ici. - Le vent du sud amène le beau temps, il est probable alors que dans les pays du Pont, le vent du sud amène au contraire le mauvais temps. En général le vent du sud amène la chaleur; et le vent du nord amène le froid.

§ 7. Dans le Pont au contraire, les Grecs au temps d'Aristote connaissaient mieux le Pont et le pratiquaient plus que nous ne le faisons aujourd'hui. - Pour que la vapeur se forme, c'est-à-dire pour que l'évaporation soit considérable, et porte dans l'atmosphère une grande quantité d'eau. - Accumule la chaleur, c'est sur les lieux mêmes qu'il faudrait observer l'action diverse des vents du nord et du midi.

 §8 . En dehors du Pont, j'ai cru devoir ajouter ces deux derniers mots, qu'autorisent les commentateurs. - Exhalent plus de vapeur, quand les puits semblent fumer à cause des différences de température. - Les vents du nord éteignent la chaleur, ceci semble contredire le § précédent. - Les vents du sud, au contraire, même observation. - Tant qu'elle veut, cette locution qui peut paraître assez singulière, quand on l'applique à de la vapeur, répond à l'expression du texte, qui ne l'est pas moins en grec.

CHAPITRE XI.
De la pluie, de la neige, de la grêle et de leurs rapports à la gelée blanche.

§ 1. L'eau elle-même ne se congèle pas sur la terre, comme dans la région des nuages; car c'est de cette région que nous viennent trois corps composés par le refroidissement : la pluie, la neige et la grêle. Deux de ces corps sont tout à fait analogues à ceux d'ici-bas et se forment par les mêmes causes; et ils n'en diffèrent que du plus au moins, et par la grandeur ou la petitesse.
§ 2. Ainsi la neige et la gelée blanche sont la même chose, comme le sont la pluie et la rosée; mais l'une est considérable, et l'autre est en petite quantité. La pluie vient d'une masse de vapeur refroidie; et la cause en est et l'étendue du lieu et la durée du temps dans lesquels elle s'accumule, et l'élément dont elle se forme. La rosée, au contraire, est peu considérable; sa composition ne dure qu'un jour, et le lieu où elle se forme est très petit, et ce qui le prouve, c'est la rapidité même avec laquelle elle se forme, et sa petite quantité.
§ 3. Mêmes rapports de la neige à la gelée blanche. Ainsi, quand c'est un nuage qui se gèle, c'est de la neige; quand c'est une vapeur, c'est seulement de la gelée blanche. Aussi est-ce toujours l'indice soit d'une température soit d'une région froide. En effet la congélation ne se serait pas faite, puisqu'il y a encore beaucoup de chaleur dans l'évaporation, si le froid ne l'eût emporté. C'est qu'en effet dans le nuage, il reste encore beaucoup de la chaleur venant du feu qui a vaporisé le liquide enlevé de la terre.
§ 4. C'est dans la région des nuages que se forme la grêle, et elle ne se forme jamais dans ce qui se vaporise près de la terre. Car, ainsi que nous l'avons dit, de même que dans le nuage se forme la neige, et qu'à terre se produit la gelée blanche, de même la pluie se produit dans le nuage aussi, et la rosée se produit à terre; mais si la grêle se forme dans les nuages, il n'y a pas sur terre de corps analogue à lui opposer. La cause en sera évidente quand nous aurons parlé de la grêle.

Ch. XI, § 1. L'eau elle-même, il y a des éditions, celle de Berlin par exemple, qui laissent cette phrase au chapitre précédent; M. Ideler a cru avec raison qu'elle était mieux placée an début du ch. 11. Il voudrait aussi que ce même chapitre se confondit avec le ch. 10. Il a bien fait cependant de les séparer, comme on paraît l'avoir toujours fait, afin de ne pas changer les traditions. - Sur la terre, j'ai ajouté ces mots pour compléter la pensée, à laquelle ils sont indispensables. - Car, cette liaison des deux idée ne paraît pas suffisante. - Trois corps, c'est l'expression même du texte. - Deux de ces corps, la pluie et la neige, comme le prouve ce qui suit. - Tout à fait analogues, cette ressemblance n'est pas aussi forte que le dit Aristote. La rosée n'est pas précisément de la pluie; et ce qui aurait pu l'en avertir, c'est la remarque qu'il fait lui-même plus haut, (ch. 10, § 3) à savoir que la rosée se produit par des temps sereins et calmes. II faut au contraire des nuages pour former la pluie. - Par les mêmes causes, ceci n'est pas tout à fait exact ; la rosée se forme par le rayonnement du sol, qui refroidit assez les couches voisines de l'atmosphère pour que la vapeur se condense en gouttelettes; la pluie se forme, lorsque l'atmosphère est saturée d'humidité. - Du plus au moins, les circonstances diverses des phénomènes auraient dû faire voir à Aristote qu'il ne pouvait les identifier à ce point.

§ 2. La neige et la gelée blanche, ne sont pas la même chose en ce que la pluie se forme dans les parties élevées de l'atmosphère, tandis que la gelée blanche se faune à la surface du sol. - La pluie et la rosée, diffèrent également. - L'une est considérable, cette différence est vraie; mais elle tient de part et d'autre à des causes diverses. - D'une masse de vapeur refroidie, et d'en haut. - Et l'élément dont elle se forme, l'élément de la rosée est le même que celui de la pluie; c'est de part et d'autre de la vapeur flottant dans l'atmosphère et refroidie. - Est peu considérable, le fait est vrai; mais la cause qu'on assigne ne l'est pas. - Ne dure qu'un jour, même remarque. - Est très petit, ceci n'est pas très clair dans les théories d'Aristote ; ce le serait tout à fait dans les théories modernes, puisque la couche d'air sur laquelle agit le rayonnement du sol est très peu épaisse. Aristote veut dire seulement que la surface de pays sur laquelle la rosée se forme n'est pas très étendue; ce qui n'est peut-être pas fort exact.

§ 3. Mêmes rapports de la neige à la gelée blanche, les différences entre la neige et la gelée blanche sont attribuables aux mêmes causes que les différences entre la pluie et la rosée. - Quand c'est un nuage qui se gèle, ce n'est pas tout à fait le nuage, mais la pluie qui se gèle. - Quand c'est une vapeur, cette distinction du nuage et de la vapeur n'est pas exacte. - D'une région froide, le fait est vrai. - Si le froid ne l'eût emporté, le froid causé par le rayonnement du sol, d'après les théories modernes. - Le liquide, ou l'humide.

§ 4. C'est dans la région des nuages, le texte n'est pas aussi précis; et l'expression dont il se sert est très vague. Mais le sens ne peut pas être douteux. - Se forme la grêle, la formation de la grêle est fort compliquée; et pour la comprendre, il a fallu connaître le rôle important que l'électricité joue dans notre atmosphère. Les anciens n'en ont jamais eu la moindre idée. - Près de la terre, l'observation est très exacte. - Ainsi que nous l'avons dit, Voir plus haut, §§ 1 et 2. - Dans le nuage,... à terre, le texte n'en pas tout à fait aussi précis; mais le sens ne peut pas faire le moindre doute. - Dans les nuages..., sur terre, même remarque. - La cause en sera évidente, la théorie de la grêle telle qu'Aristote va la donner n'est pas exacte, et je viens de dire pourquoi elle ne devait pas l'être. Mais c'est déjà une preuve de sagacité bien extraordinaire d'avoir séparé la grêle de tous les autres phénomènes météoriques.

CHAPITRE XII.
De la grêle; phénomènes singuliers qui l'accompagnent. - Opinion d'Anaxagore réfutée par les faits.

§ 1. En même temps qu'on étudie les circonstances qui accompagnent la formation de la grêle, il faut tenir compte aussi de faits parfaitement certains et qui paraissent répugner à la raison. La grêle est de la glace, et l'eau ne gèle qu'en hiver. Or, la grêle est surtout fréquente au printemps 348a et à l'automne, puis ensuite à la fin de l'été, elle est rare en hiver ; et même alors, c'est toujours quand il fait moins froid.
§ 2. En général aussi, les grêles se produisent dans les lieux plus tempérés; les neiges, dans les lieux plus froids. En outre, il semble étrange que l'eau se congèle dans la région supérieure ; car il n'est pas possible qu'il y ait de la gelée avant qu'il n'y ait de l'eau; et il n'est pas possible que de l'eau reste, un seul instant, à la hauteur où elle serait alors élevée.
§ 3. Ce n'est pas non plus comme les gouttelettes des ondées, qui, grâce à leur ténuité, flottent en haut et reposent sur l'air; car de même qu'on voit souvent de la terre et de l'or, réduits en très petites parcelles, nager aussi sur l'eau, de même dans ce cas l'eau est portée sur l'air; mais quand beaucoup de petits particules se sont réunies, elles tombent en fortes ondées.
§ 4. Or, cela ne peut pas se passer ainsi pour la grêle; car les corps gelés ne se continuent pas et ne se réunissent pas entre eux comme les liquides. Il faut donc évidemment que toute cette eau soit restée en haut; car une si grande quantité n'aurait pu se geler.
§ 5. Aussi quelques-uns ont expliqué de la manière suivante la cause de ce phénomène et de sa production. Quand le nuage s'est retiré dans la région supérieure, qui est plus froide, parce que là cesse la réfraction des rayons solaires renvoyés de la terre, l'eau qui y parvient s'y congèle; et ils ajoutent que ce qui fait que la grêle est plus fréquente en été et dans les lieux chauds, c'est que la chaleur repousse alors les nuages plus loin de la terre.
§ 6. Un fait certain, c'est qu'il n'y a jamais de grêle dans les lieux très élevés; or, il le faudrait cependant d'après cette théorie, de même que nous voyons la neige tomber surtout sur les lieux les plus hauts.
§ 7. De plus, on a vu souvent des nuées portées près de la terre, produire un tel bruit qu'elles épouvantaient ceux qui les entendaient et les voyaient, par la crainte de quelque malheur plus grand.
§ 8. Parfois même sans que les nuées de ce genre fassent de bruit, on a vu la grêle tomber en abondance, et incroyablement grosse, et sans avoir du tout les formes arrondies, parce qu'elle n'avait pas été portée beaucoup de temps ; on aurait dit que la congélation s'était faite près de la terre, et non point du tout comme le prétendent les philosophes dont nous parlons.
§ 9. Il n'en est pas moins nécessaire que ce qui est cause d'une plus forte gelée, produise aussi des grêles considérables ; car la grêle est de la glace, ce qui ne peut faire évidemment de doute pour personne. Les fortes grêles sont celles qui n'ont pas du tout la forme ronde; et cette disposition même prouve que la congélation s'est faite non loin de la terre ; car les grêles qui sont apportées de grandes distances, et précisément parce qu'elles ont été longtemps fracassées de mille manières, prennent une forme arrondie et des dimensions moindres.
§10. Ainsi 349 donc, il est parfaitement certain que la congélation ne se forme pas parce le nuage est poussé dans la région supérieure et froide.
§ 11. Mais de même que nous voyons qu'il y a une répercussion réciproque du chaud et froid, l'un par l'autre, puisque dans les temps chauds, les excavations souterraines paraissent froides, et chaudes au contraire dans les temps froids, de même nous devons croire que les choses se passent semblablement dans la région supérieure ; là aussi, durant les saisons plus chaudes, le froid répercuté en dedans par la chaleur circulaire, fait sortir vivement du nuage tantôt de la pluie et tantôt de la grêle.
§ 12. C'est là encore ce qui fait que les ondées sont beaucoup plus considérables dans les jours chauds qu'en hiver, et les pluies, beaucoup plus violentes; car on dit qu'elles sont plus violentes quand elles sont plus épaisses, et ce qui les rend plus épaisses c'est la rapidité de la condensation.
§ 13. Or, c'est là une circonstance tout à fait contraire à l'explication d'Anaxagore ; car il prétend que ce phénomène se produit quand le nuage monte dans l'air froid; et nous, nous soutenons que c'est quand il descend dans l'air chaud, et que ce phénomène est d'autant plus fort que l'air est plus chaud. Lorsque le froid est encore davantage répercuté en dedans par la chaleur du dehors, il gèle l'eau qu'il vient de produire et la grêle se forme; et c'est ce qui a lieu toutes les fois que la congélation est plus rapide que la chute de l'eau en bas.
§ 14. Car quelque court que soit le temps de cette chute, si le froid, par sa violence, la congèle encore plus vite, il se peut fort bien que l'eau soit gelée en l'air ; alors la congélation est plus rapide que le mouvement de descente.
§ 15. Il faut dire encore que plus la congélation est proche de la terre et épaisse, et les pluies violentes, ainsi que les ondées, plus les grêles sont considérables, parce que l'espace où elles sont portées est très petit. Et c'est aussi la même cause qui fait que les larges gouttes des ondées ne tombent pas serrées.
§ 16. La grêle se produit moins en été qu'au printemps et à l'automne, plus cependant qu'en hiver, parce que l'air est plus sec en été ; au printemps, il est humide encore, et à l'automne il le redevient.
§ 17. C'est là ce qui fait encore, comme on l'a dit, que les grêles ont lieu quelquefois à la fin de l'été. Ce qui contribue alors à la rapidité de la congélation, c'est que l'eau a été antérieurement échauffée ; et cela fait aussi qu'elle se refroidit plus vite.
§ 18. Voilà pourquoi bien des gens, quand ils veulent avoir promptement de l'eau fraîche, la mettent d'abord au soleil. C'est encore ainsi que les habitants du Pont, quand ils établissent leurs tentes sur la glace, pour se livrer à la chasse aux poissons, car ils les chassent en brisant la glace, versent de l'eau chaude 349a autour des perches pour qu'elle gèle plus vite ; et la glace leur sert comme de plomb pour consolider et arrêter leurs pieux.
§ 19. L'eau qui se forme dans les pays chauds et dans les saisons chaudes, devient bien vite tiède elle-même. C'est ainsi qu'en Arabie et en Éthiopie, les pluies tombent l'été et non point l'hiver ; elles y tombent par torrents et plusieurs fois le jour, et la cause en est la même. C'est que le froid se produit très vite par la répercussion, qui est d'autant plus violente que le pays est excessivement chaud.
§ 20. Voilà ce que nous avions à dire sur la pluie, la rosée, la neige, la gelée blanche et la grêle, pour en expliquer la cause et la nature.

Ch. XII, § 1. De faits parfaitement certains, et qui sont en effet très exactement observés. - Paraissent répugner à la raison, c'est parfaitement vrai; et les phénomènes que cite Aristote semblent tout à fait contraires à ce qu'on devait supposer rationnellement. La grêle est de la glace, et rependant elle tombe en été, et il y en a rarement en hiver. - Ne gèle qu'en hiver, il faut se rappeler qu'Aristote vit sous le climat de la Grèce et de l'Asie mineure. - Puis ensuite à la fin de l'été, il y a parfois de la grêle au cœur même de l'été.  - C'est toujours quand il fait moins froid, le fait est parfaitement exact.
§ 2. Dans les lieux plus tempérés, le fait est bans doute exact; mais je ne vois pas que la science moderne s'en soit spécialement occupée. - Il semble étrange, ou absurde à la raison. - L'eau se congèle dans la région supérieure, parce que l'eau une fois formée serait retombée par son propre poids sous forme de pluie, avant d'être gelée. - A la hauteur où elle serait alors élevée, le texte n'est pas tout à fait aussi précis.

§ 3. Les gouttelettes des ondées, il n'y a qu'un seul mot en grec. - Et reposent sur l'air, c'est-à-dire quelles sont assez légères pour rester en suspension dans l'atmosphère, comme le prouve ce qui suit. - En fortes ondées, le texte a le même mot que quelques lignes plus haut.

§ 4. Les corps gelée ne se combinent pas, la remarque est fort ingénieuse; et Aristote sent bien qu'il y a ici quelque cause particulière qui forme les grêlons. Seulement cette cause lui échappe. Mais c'est déjà beaucoup d'en avoir soupçonné l'existence. - Toute cette eau soit restée en haut, l'eau est bien en haut comme le dit Aristote; seulement elle n'y est pas sous forme liquide; elle y est sous forme de vapeur; et, par l'action d'une force particulière, elle se congèle et prend les dimensions que présente la grêle. - Car une si grande quantité, il y a ici une idée sous-entendue : « car, si cette masse d'eau n'était pas en haut comme on le suppose,  » une si grande quantité, etc.

§ 5. Quelques-uns, il paraît que cette désignation vague s'adresse à Anaxagore, selon la conjecture des commentateurs grecs; voir plus bas, § 13. - Dans la région supérieure qui est plus froide, le fait est exact; et tous les observateurs modernes l'ont constaté. - L'eau qui y parvient, sous forme de vapeur qui se condense d'abord en gouttelettes. - Plus fréquente en été, le fait est exact; il tombe aussi de la grêle en hiver, mais le fait est assez rare.

§ 6. Dans les lieux très élevés, c'est un fait qui n'est pas très exact et qui n'est pas généralement admis par les observateurs. De Saussure et d'autres savant, out vu tomber de la grêle sur des montagnes à 3,428 mètres et même 4,550 mètres de hauteur au-dessus du niveau de la mer; voir la Météorologie de Kaemtz, traduction française, p. 351. - D'après cette théorie, qui n'est pas aussi fausse qu'Aristote semble le croire.

§ 7. Produire un tel bruit, le fait est incontestable, et l'on suppose que ce bruit est causé par le choc des grêlons entre eux ou par la rencontre de deux vents opposés. - Et les voyaient, et effet, les nuages chargés de grêle ont un aspect tout différent que les autres nuages. Ils sont d'une couleur grise toute particulière.

§ 8. Fassent du bruit, ce n'est pas toujours eu effet que ce bruit est produit, et il a lieu sans doute quand les nuages contiennent plus d'électricité ou que les vents opposés sont plus violents. - Incroyablement grosse, les grêlons atteignent parfois des dimensions et des poids énormes qui vont jusqu'à 500 grammes ou même 1 ou 2 kilos. On a constaté aussi la chute de véritables blocs de glace qui ne sont que des grêlons accumulés. - Sans avoir les former arrondies, les grêlons ont d'ordinaire la forme d'une poire terminée par une surface arrondie. - Près de la terre, Voir plus haut, § 6. - Les philosophes dont nous parlons, le texte n'est pas tout à fait aussi explicite.

§ 9. Ce qui est cause d'une plus forte gelée, le phénomène n'est pas absolument le même quoiqu'il ait beaucoup de rapport, et le grêlon n'est pas précisément ni de la glace ni de la neige. - Ce qui ne peut faire de doute, en examinant les grêlons de plus près, on voit que c'est tout au moins une sorte de glace toute particulière. - Qui n'ont pas du tout la forme ronde, ce détail du phénomène n'a pas été spécialement étudié par les observateurs modernes. - Non loin de ta terre, le fait n'est pas certain, et les grêlons pourraient être ballotés longtemps entre les nuages qui les produisent, sans que ces nuages fussent dans les hautes parties de l'atmosphère. - Fracassées de mille manières, ceci se rapproche davantage des explications que donne la science moderne. - Et des dimensions moindres, ceci n'est pas aussi exact. Ce qui est vrai c'est que les grêlons se fondent à mesure qu'ils approchent de la terre.

§ 10. II est parfaitement certain, la démonstration ne résulte pas des arguments qui précèdent, comme l'auteur semble le croire. - Dans la région supérieure et froide, il paraît au contraire que les nuages se forment dans une région qui est assez élevée et qui est relativement assez froide.

§ 11. Une répercussion réciproque, sans que les détails soient aussi précis que pourrait les demander la science moderne, on soit qu'Aristote a compris en partie le phénomène, en reconnaissant qu'il devait être le résultat d'une influence réciproque de deux forces l'une sur l'autre. - Les excavations souterraines, les caves sont un exemple frappant; elles gardent une température à peu près toujours égale. Il en résulte qu'elles soit chaudes en hiver et froides en été. - Le froid répercuté, il y a aussi dans le phénomène de la grêle une autre cause que le froid. - Par la chaleur circulaire, c'est-à-dire celle qui est causée par le mouvement rapide et incessant de l'éther dans la région la plus haute du ciel. Ideler n'accepte pas ce sens; et il croit qu'il s'agit uniquement de la chaleur qui environne les nuages. Voir plus haut, ch. 2 et 3. - Tantôt de la pluie, tantôt de la grêle, il n'est pas probable que ces deux phénomènes ne tiennent qu'à une seule et même cause.

§ 12. Dans les jours chauds qu'en hiver, il est possible que le fait soit exact pour les climats où observait Aristote; et. il s'agit ici de ce qu'on appelle les averses. - Les pluies beaucoup plus violentes, l'observation est exacte. - C'est la rapidité de la condensation, c'est moins la rapidité que la grande quantité d'eau suspendue dans l'atmosphère.

§ 13. A l'explication d'Anaxagore, Voir plus haut, § 5. - Le nuage monte... il descend, les deux explications ne sont pas contraires autant qu'Aristote le suppose. II faut nécessairement une succession de froid et de chaleur pour que ce phénomène se produise. - Par la chaleur du dehors, Voir plus haut, § 2; la chaleur du dehors se confond sans doute avec la chaleur circulaire. - Il gèle l'eau qu'il vient de produire, le froid condense d'abord la vapeur sous forme d'eau; et ensuite il la gèle sous forme de grêlons. - Que la congélation est plus rapide, il faut en effet dans le système d'Aristote que l'action du froid soit plus rapide que celle de la pesanteur; mais il doit y avoir une autre cause encore que la température.

§ 14. Car quelque court... Ce paragraphe n'est guère qu'une répétition de celui qui précède et qui suffisait.

§ 15. La congélation, ou la condensation selon qu'il s'agit de la grêle et de la neige, ou de la pluie et des averses. - L'espace... est très petit, souvent en effet la zone où tombe la grêle est très longue et très étroite. - Et c'est aussi la même cause, ce passage n'est pas très clair, et il aurait fallu ici un peu plus de développements. L'auteur veut dire sans doute que c'est le froid qui a condensé plusieurs gouttes en une seule; et par là elles ne peuvent être serrées comme si elles étaient plus fines.

§ 16. Moins en été, l'observation est très juste pour l'été, mais elle ne l'est pas autant pour l'automne. Il y a en été plus de grêle qu'en automne, si l'on eu croit les observateurs modernes; mais il ne faut jamais perdre de vue qu'on devrait répéter les observations d'Aristote dans les climats même où il les faisait. - Plus cependant qu'en hiver, l'hiver est la saison où il se produit le moins souvent de la grêle.

§ 17. Comme on l'a dit, sans doute quelque prédécesseur d'Aristote qu'il désigne ainsi sans le nommer. On pourrait croire aussi qu'il rappelle une de ses propres théories.

§ 18. La mettent d'abord au soleil, le fait est vrai, et on peut toujours le vérifier dans les climats chauds, en Espagne, en Italie, en Égypte; mais il fallait ajouter que l'on met l'eau au soleil dans certaines conditions. Le vase qui la renferme est clos, et de plus il est poreux. C'est par ses pores que se fait l'évaporation qui abaisse la température et rafraîchit le liquide. - A la chasse aux poissons, c'est l'expression même du texte. - Comme de plomb, on verse en effet du plomb dans certaines constructions pour souder des pierres ou des métaux. La comparaison est exacte et ingénieuse.

§ 19. L'eau qui se forme, l'expression du texte n'est pas plus précise; il s'agit évidemment de l'eau qui se forme dans l'atmosphère et tombe en pluie. - Les pluies tombent l'été, le fait est très exact pour les régions intertropicales. - Plusieurs fois le jour, ceci n'en peut-être pas aussi exact tout à fait. En général les pluies dans ces climats ne tombent qu'une fois le jour, et principalement l'après-midi. - Par la répercussion, le froid dont il s'agit ici est celui qui est nécessaire à la condensation de l'eau destinée à former la pluie. La répercussion est celle de la chaleur par le froid des régions plus élevées de l'atmosphère.
§ 20. Sur la pluie, la rosée, ces différentes matières n'ont pas été traitées dans l'ordre qui est indiqué ici. Voir pins haut, ch. 9 et suiv.

CHAPITRE XIII.
Des vents. Opinions erronées sur ce sujet. - De la formation des rivières; réfutation des théories fausses. Théorie vraie de la formation des rivières; détails géographiques.

§ 1. Parlons maintenant des vents et de tous les souffles, puis des fleuves et de la mer. Ici aussi nous proposerons d'abord nos propres doutes ; car, pour ces matières, pas plus que pour les autres, nous n'avons rien trouvé dans tout ce qui a été dit avant nous, que ne pourrait dire tout aussi bien le vulgaire et le premier venu.
§ 2. Quelques philosophes prétendent que ce qu'on nomme l'air, quand il est en mouvement et qu'il s'écoule est le vent, et que, quand ce même air se condense, il forme le nuage et l'eau, de sorte que l'eau et le vent sont de même nature, et que le vent n'est que le mouvement de l'air.
§ 3. C'est là aussi ce qui fait dire à ceux qui veulent parler doctement, que tous les vents ne sont qu'un seul et même vent, parce que l'air bien qu'en mouvement n'est tout entier qu'un seul et même air, et que s'il paraît avoir quelque différence, ce n'est qu'à cause de la différence des lieux d'où il s'écoule en tout sens. Cette théorie vaut bien celle qui soutiendrait que toutes les rivières ne sont qu'une seule rivière.
§ 4. Aussi l'opinion du vulgaire qui parle de ces choses sans aucune étude, semble-t-elle de beaucoup préférable à celle des gens qui en parlent d'après des études pareilles.
§ 5. Car si tous les fleuves coulent réellement d'une même source, et que les vents soient soumis à la même uniformité, ceux qui avancent ce système disent quelque chose de spécieux ; mais s'il en est pour les vents, comme nous voyons qu'il en est pour les fleuves, cette belle explication n'est évidemment qu'une erreur; et il nous reste toujours à savoir ce qu'est le vent, comment il se forme, quel est son moteur et quelle en est la cause originelle. Faut-il croire que le vent s'écoule comme d'un vase, et qu'il s'écoule jusqu'à ce que le vase soit vide, comme s'il sortait d'une outre? Ou bien faut-il croire, 350 comme nous les représentent les peintres, que les vents tirent leur principe d'eux-mêmes?
§ 6. Quelques-uns se font sur la formation des fleuves des idées tout à fait analogues. Selon eux, l'eau soulevée par le soleil et retombée en pluie se réunit sous la terre, d'où elle s'écoule comme d'un grand trou, unique pour tous les fleuves, ou de divers trous pour chacun d'eux; dans le sein de la terre il ne se forme pas d'eau; mais c'est l'eau qui, réunie par suite du mauvais temps dans ces réservoirs, forme la foule nombreuse des fleuves.
§ 7. C'est là aussi ce qui fait, ajoutent-ils, que les rivières sont toujours plus abondantes l'hiver que l'été, que les unes sont continuelles et les autres non continuelles. Celles pour qui la grandeur du trou a réuni une grande masse d'eau, qui suffit à les alimenter et à les entretenir jusqu'à ce que les pluies d'hiver reviennent, sont perpétuelles et coulent sans fin ; celles dont les réservoirs sont moindres, sont bientôt mises à sec à cause de la petite quantité d'eau, avant que la pluie du ciel n'arrive de nouveau, comme si le vase s'était vidé.
§ 8. Pourtant si quelqu'un veut, en faisant sous ses propres yeux comme un réservoir à l'eau qui tombe tous les jours continuellement, en connaître au juste la quantité, il est évident que cette quantité surpasserait la masse entière de la terre, ou du moins que toute l'eau reçue dans le cours de l'année ne serait pas loin de l'égaler.
§ 9. Or il est clair aussi que ce phénomène se reproduit sur bien des points de la terre à la fois; et il n'en serait pas moins absurde de croire que ce n'est pas la même cause qui produit l'eau venant de l'air et celle qui est sur la terre et dans la terre. Par conséquent, si dans l'atmosphère en effet c'est le froid qui change l'air vaporisé en eau, il faut bien aussi penser que c'est encore le froid renfermé dans la terre qui sous la terre produit le même effet, et que non seulement l'eau qui est divisée s'y infiltre et y coule, mais encore que ce phénomène a lieu sans interruption.
§ 10. Sans même que l'eau arrive dans la terre chaque jour, et en supposant qu'elle y est toute faite, l'origine des fleuves ne peut pas être telle qu'il y ait sous terre des lacs qui y ont filtré, comme le prétendent quelques-uns; mais de même que dans l'espace au-dessus de la terre de petites gouttes se réunissant ente elles, puis celles-là à d'autres, il en résulte à la fin une quantité considérable d'eau de pluie, de même aussi sous terre ce sont d'abord de petites parcelles qui se réunissent, et puis la terre s'égouttant en un seul point pour ainsi dire, c'est de là que sortent les fleuves.
§ 11. Le fait d'ailleurs le prouve bien. Quand on fait des conduites d'eau 350a , c'est par des fossés et des excavations qu'on la réunit, comme si la terre suait, à partir des points les plus élevés. Voilà pourquoi aussi les eaux des fleuves découlent des montagnes comme on le voit; la plupart des fleuves, et les plus grands fleuves descendent des montagnes les plus grandes; de même encore que la plupart des sources sont dans le voisinage des montagnes et des lieux élevés.
§ 12. Il n'y en a presque pas dans les plaines qui n'ont pas de fleuves; car les lieux montagneux et élevés, comme une énorme éponge suspendue, filtrent et réunissent l'eau peu à peu, mais sur une foule de points à la fois.
§ 13. Les montagnes reçoivent une grande quantité d'eau qui descend; car qu'importe que la circonférence de la terre soit creuse et plane ou inclinée et convexe? Des deux façons, elle n'en recevra pas moins la même masse dans l'épaisseur du corps qu'elle forme. De plus, les montagnes refroidissent la vapeur qui s'élève, et la convertissent de nouveau en eau.
§ 14. C'est ce qui fait, ainsi que nous venons de le dire, qu'on voit toujours les plus grands fleuves descendre des plus grandes montagnes; et c'est ce qui est parfaitement évident, quand on regarde les descriptions de la terre que l'on a tracées d'après les récits des autres, quand ceux qui en parlent n'ont pas pu observer les choses de leurs propres yeux.
§ 15. C'est ainsi qu'en Asie la plupart des fleuves et les plus grands descendent de la montagne qu'on appelle le Parnase, et qui est, comme tout le monde en convient, la plus haute de toutes les montagnes qui sont situées à l'orient d'hiver; en effet quand on l'a franchie, on découvre enfin la mer extérieure dont les limites ne sont pas très-connues aux habitants de ce pays.
§ 16. C'est de cette montagne aussi que découlent, entre autres fleuves, le Bactre, le Choaspe et l'Araxe, dont le Tanaïs n'est qu'une branche qui va se jeter dans le Palus Méotide. C'est de là aussi que sort l'Indus, qui est le plus considérable de tous les fleuves.
§ 17. Du Caucase sortent aussi beaucoup de fleuves d'une grandeur et d'une abondance énormes, et le Phase particulièrement. Le Caucase est de toutes les montagnes qui sont à l'orient d'été la plus importante par son étendue et sa hauteur.
§ 18. Ce qui prouve bien cette hauteur, c'est qu'on la découvre même du lieu appelé les Creux ou les gouffres, quand on navigue vers le Palus Méotide, et que les sommets sont éclairés par les rayons du soleil jusqu'au tiers de la nuit tant le matin que le soir; et ce qui prouve son étendue, c'est qu'ayant sur ses flancs beaucoup de contrées où habitent des nations nombreuses, et ayant, dit-on aussi, de vastes lacs, on peut encore jusqu'au dernier sommet apercevoir toutes ces contrées.
§ 19. De 351 la Pyrène (des monts Pyrénées), qui est la plus haute montagne dans la Celtique à l'occident équinoxial, découlent l'Ister et le Tartesse. Ce dernier se jette en dehors des colonnes d'Hercule; mais l'Ister, après avoir traversé toute l'Europe, vient se jeter dans le Pont-Euxin.
§ 20. La plupart des autres fleuves qui sont au nord descendent des monts Arcyniens, qui dans ce lieu sont les plus hautes et les plus vastes des montagnes. Sous la constellation même de l'Ourse, au-delà de l'externe Scythie, sont les monts appelés Rhipées, dont nous ne connaissons la grandeur que par des récits trop évidemment fabuleux. Et c'est aussi de ces monts que sortent la majeure partie et les plus grands de tous les fleuves après l'lster, à ce qu'on assure.
§ 21. Il en est tout à fait de même en Libye, où l'Aegon et le Nysès sortent des montagnes de l'Éthiopie ; et les plus grands cours d'eau parmi ceux qui ont reçu des noms, celui qu'on appelle le Chrémétés, qui se jette dans la mer extérieure, et en premier lieu le fleuve du Nil, sortent de la montagne appelée Argyre.
§ 22. Parmi les fleuves des contrées Helléniques, l'Achéloüs descend du Pinde, ainsi que l'Inachus. Le Strymon, le Nestus et l'Hébre descendent tous les trois du Scombros ; il y a aussi beaucoup de cours d'eau qui viennent du Rhodope.
§. 23. On pourrait se convaincre que tous les autres fleuves ont une origine toute pareille, et nous n'avons nommé ceux-là que comme exemples à l'appui de notre opinion. Quant aux rivières qui sortent de lacs, il faut dire que ces lacs se sont presque tous formés par degrés successifs au-dessous des montagnes et des lieux élevés.
§ 24. On voit donc bien clairement qu'il ne faut pas croire que les fleuves se forment à leur origine en sortant de certains creux ; car l'espace de la terre n'y suffirait pas, pour ainsi dire, pas plus que l'espace même des nuages, s'il fallait que l'eau qui y est, fût seule à couler, sans qu'une partie s'en allât tandis qu'une autre se reforme, et qu'elle dût toujours sortir tout entière comme d'une source inépuisable.
§ 25. Cette circonstance que les fleuves ont leurs sources sous les montagnes, prouve bien que l'eau s'y réunit, et que le lieu l'accumule peu à peu par une multitude de rigoles ; et c'est ainsi que se forment les sources des rivières.
§ 26. Il n'y a rien d'ailleurs d'absurde à supposer qu'il existe aussi certains lieux qui, comme des lacs, renferment d'immenses quantités d'eau ; seulement il ne faut pas croire que ces lacs soient assez considérables pour alimenter des fleuves, pas plus qu'il ne faut prendre pour les sources totales des fleuves celles qu'on leur voit ; car la masse la plus forte des fleuves sort de sources. Cela reviendrait absolument à croire que ces lacs et ces sources forment à elles seules la masse totale de l'eau.
§ 27. Ce qui prouve qu'il y a bien des cavernes et des trous de ce genre dans la terre, 351a c'est l'absorption de certains fleuves. C'est un fait qu'on voit dans plusieurs parties de la terre, et l'on en trouve plus d'un exemple dans l'Arcadie du Péloponnèse.
§ 28. La cause de ce phénomène particulier, c'est que le pays qui est montagneux ne peut pas faire écouler les eaux des bas-fonds vers la mer. La contrée se remplit d'eau qui, n'ayant pas d'écoulement, se fraie un passage dans le sein de la terre, par la violence même de la masse liquide qui survient d'en haut.
§ 29. Il y a d'ailleurs peu de faits de ce genre dans toute la Grèce. Mais le lac qui est au pied du Caucase et que les habitants du lieu appellent la Mer, en offre des exemples évidents. En effet il reçoit des fleuves nombreux et considérables ; et comme il n'a pas d'écoulement, il est clair qu'il s'épanche sous terre par les Coraxes, aux environs des lieux appelés les Gouffres du Pont. Dans ces gouffres, la mer a une immense profondeur ; et la sonde n'a jamais pu en trouver le fond.
§ 30. Ce lac, à trois cents stades à peu près de la terre, donne de l'eau potable sur une vaste étendue qui n'est pas toute continue, mais qui se reproduit en trois endroits.
§ 31. Dans la Ligystique, un certain fleuve qui n'est pas moindre que le Rhône, est absorbé en terre, et il reparaît en un autre lieu ; or le fleuve du Rhône est navigable aux vaisseaux.

Ch. Xlll, § 1. Des vents et de tout les souffles, d'après Alexandre d'Aphrodisée, les souffles désignent les vents qui n'ont pas reçu de noms particuliers. - Puis des fleuves, y compris les rivières et tous les cours d'eau. - Nous proposeront d'abord nos propres doutes, en général Aristote commence au contraire par exposer les opinions de ses devanciers. Il est vrai qu'il peut faire connaître ses doutes personnels tout en critiquant les théories antérieures. - Le vulgaire et le premier venu, il n'y a qu'un seul mot en grec.

§ 2. Quelques philosophes, d'après Alexandre d'Aphrodisée et Olympiodore, Aristote veut indiquer ici Hippocrate. En effet, on trouve cette théorie du vent rappelée dans le petit traité des Vents. Voir l'édition et la traduction de M. E. Littré, tome VI, p. 95, et aussi dans le traité du Régime, Livre II, tome VI, p. 531. Il est certain cependant que ces deux traités ne sont pas authentiques; mais ils étaient peut-être déjà compris dans la collection Hippocratique du temps d'Aristote. - Et qu'il s'écoule, Hippocrate se sert d'un mot analogue dans le traité précité. - Se condense, sous forme do gouttelettes. - Et l'eau, c'est le mot exact du texte; mais on voit qu'il s'agit plus spécialement de la pluie. - L'eau et le vent sont de même nature, c'est une théorie qu'Aristote n'accepte pas et qu'il combattra un peu plus loin.

§ 3. Ceux qui veulent parler doctement, il y a peut-être quelque ironie dans cette tournure de phrase. Des manuscrits portent Clairement au lieu de Doctement, par le changement d'une seule lettre. - Un seul et même vent, c'est une confusion purement théorique; car, en fait, les vents différent beaucoup entre eux par les circonstances mêmes qui sont énoncées un peu plus bas. - Un seul et même air, c'est vrai ; mais il n'y a pas dans l'air les distinctions qu'on peut constater dans les vents. - Celte opinion vaut bien, tournure ironique comme un peu plus haut. Les §§ suivants présentent aussi la même nuance.

§ 4. L'opinion du vulgaire, Voir plus haut, § 1. - D'après des études pareilles, autre nuance de critique et de moquerie.

§ 5. Si tous les fleuves, il est évident que les fleuves sortent chacun d'une source différente; donc les vents qu'on assimile aux fleuves doivent avoir des sources différentes comme eux. - S'il en est pour les vents, Ideler voudrait introduire dans cette phrase une négation qui n'est pas nécessaire. - Cette belle explicitation, le mot grec a quelque analogie avec le mot suivant qui signifie Erreur; il y a donc dans le texte une sorte de jeu de mots que je n'ai pu rendre dans notre langue. - S'écoule comme d'un vase, il est probable que cette théorie avait été proposée par quelque philosophe antérieur. - D'une outre, c'est la tradition mythologique et qu'on retrouve dans Homère, Odyssée, chant 10, vers 20. -  Comme nous les représentent les peintres, voir la même indication dans le Traité du mouvement des animaux, ch. 2, § 5, p. 243 de ma traduction.

§ 6. Quelques-uns, il paraît que cette théorie appartenait à Anaxagore. - Soulevée par le soleil, sous forme de vapeur. - Se réunit sous la terre, le fait est exact, comme le prouve la géologie. - Comme d'un grand trou, ceci n'est pas exact en ce sens qu'il y a dans ce lieu de la terre des amas d'eau en très grand nombre, et non une masse unique dans une seule excavation. - Dans le sein de la terre, j'ai ajouté ces mots qui m'ont paru indispensables pour compléter la pensée. - Par suite du mauvais temps, le texte dit précisément : « De l'hiver. »

§ 7. Ajoutent-ils, ces mots ne sont pas dans le texte; mais cette idée accessoire résulte de la tournure même de la phrase. - Plus abondantes l'hiver, c'est le fait le plus habituel; mais ce n'est pas un fait constant. Parfois les eaux tout très basses en hiver.

§ 8. Comme un réservoir, il est difficile, d'après une indication aussi sommaire, de se rendre compte de la méthode employée par les anciens pour constater la quantité d'eau tombée. Ideler semble blâmer ici Aristote; quant à moi, je le louerais bien plutôt d'avoir eu cette pensée qu'il était possible de mesurer la quantité de la pluie annuelle. Je doute certainement que ses méthodes valussent les nôtres. Mais pour être équitable, il faut se reporter à ces tempe reculés et se rappeler combien les premiers pas de la science sont toujours difficiles. Même aujourd'hui, nos instruments pour mesurer la pluie ne sont pas irréprochables. - Surpasserait la mesure entière de la terre, il serait presqu'impossible de se prononcer sur ce point. - Ne serait pas loin de l'égaler, même remarque; tout cela est purement conjectural.

§ 9. Que ce n'est pas le même cause, il est clair que l'eau est partout formée de la même manière; et l'eau qui est sous terre est composée des mêmes éléments que celle qui est sur terre; mais les glaciers jouent un très grand rôle dans la formation des eaux souterraines, et il ne paraît pas qu'on en tienne ici aucun compte. - Venant de l'air, par la condensation des vapeurs. - Le froid renfermé dans la terre, il faut ajouter aussi qu'il doit y avoir des vapeurs dans le sein de la terre pour que le froid puisse les condenser en eau. - Que ce phénomène, c'est-à-dire la condensation des vapeurs souterraines. - Sans interruption, et la terre forme de l'eau à peu près comme l'atmosphère en forme continuellement.

§ 10. Chaque jour, on ne comprend pas ceci très clairement. - Qu'elle y est toute faite, j'ai ajouté ces deux derniers mots pour rendre toute la force de l'expression grecque. - Qui y ont filtré, et qui seraient uniquement le produit des eaux tombées à la surface de la terre. - Dans l'espace au-dessus de la terre, c'est, à-dire dans l'atmosphère du même à le surface du sol. - De même aussi sous terre, la différence entre la première théorie, et la théorie d'Aristote, c'est qu'il pense que l'eau peut se former de toutes pièces dans le sein de la terre, sans qu'il soit besoin qu'elle vienne de l'atmosphère par la pluie. - De petites parcelles, l'expression grecque est tout à fait indéterminée. - S'égouttant, c'est le sens le plus probable qu'on puisse donner au mot du texte.

§ 11. Comme si la terre suait, c'est l'expression même du texte. - Des montagnes les plus grandes, ce n'est pas parce que la montagne est haute que l'eau s'y accumule et s'y réunit davantage; mais les hautes montagnes sont couvertes de neiges éternelles et forment des glaciers qui alimentent les fleuve. - La plupart des sources, ceci est vrai d'une manière générale sans l'être absolument.

§ 12. Dans les plaines qui n'ont pas de fleuves, il s'agit de sources jaillissantes; car à l'intérieur de la terre on trouve souvent des eaux dans les lieux dont la surface est tout à fait aride; témoins les puits artésiens creusés dans les déserts de l'Algérie. - Comme une énorme éponge, la comparaison est aussi juste que frappante. Mais la véritable éponge, ce sont les glaciers plus encore que les montagnes elles-mêmes. - Sur une foule de points à la fois c'est-à-dire sur toute leur surface.

§ 13. Qui descend, les montagnes absorbent aussi une grande quantité d'eau qui ne descend pas, et c'est eu proportion de leur surface, à peu près comme le sol. - La circonférence de la terre, j'ai ajouté ces derniers mots d'après le commentaire d'Alexandre d'Aphrodisée. D'ailleurs ce mot du Surface aurait été plus convenable que celui de circonférence; mais c'est ce dernier qu'emploie le texte. - Refroidissent la vapeur, le fait est exact; mais de plus, les montagnes attirent aussi les vapeur flottant dans l'atmosphère.

§ 14. Nous venons de le dire, Voir plus haut, § 11. - Les descriptions, et les contours, pour rendre toute la force de l'expression grecque. Il est clair qu'il s'agit ici du cartes de géographie qu'on dressait d'après la récits des voyageurs, quand les voyageurs eux-mêmes n'étaient pas capables de les dessiner.

§ 15. Le Parnase, c'est la leçon que donnent la plupart des manuscrits; quelques-uns disent le Parnasse; mais il est de toute évidence qu'il ne s'agit point ici de la montagne de ce nom qui est eu Grèce, puisqu'Aristote place le Parnase en Asie. C'est peut-être la montagne appelée par les anciens Paropamisus, et qui répond eu partie à l'Hindoukoush et aux premières chaînes de l'Himalaya. L'indication aurait alors plus d'exactitude. - A l'orient d'hiver, c'est-à-dire au nord-est, ce qui est assez exact par rapport à la situation de la Grèce, où écrivait l'auteur. - Enfin la mer extérieure, celle qui, dans les croyances des anciens, taisait le tour de la terre en ferme de circonférence régulière. Cette opinion sans fondement a subsisté bien longtemps, et elle n'a guère été détruite que sen la fin du XVe siècle. - De ce pays, cette expression peut désigner à la fois la Grèce et le pays où se trouve le Parnase selon Aristote. Le premier une est le plus probable.

§ 16. Le Bactre, d'où la Bactriane a tiré son nom. - Le Choaspe et l'Araxe, ces fleuves coulent en effet dans des contrées qui correspondent assez bien à l'Hindoukoush des modernes, le Paropamisus des anciens. L'Araxe est le Iaxarte actuel. - Dont le Tanaïs n'est qu'une branche, c'est une erreur; le Tanaïs, le Don actuel, n'a aucun rapport avec les fleuves sortis de l'Hindoukoush; il appartient à un tout autre bassin et il se jette dans la mer d'Azof après un cours de 350 lieues. - Que sort l'Indus, en effet, l'Indus sort de l'Himmalaya. - Le plus considérable de tous les fleuves, il est évident que l'auteur ne connaît pas le Gange. Les connaissances géographiques des anciens ne s'étendaient pas alors jusque-là.

§ 17. Du Caucase, situé entre la mer Caspienne et le Pont-Euxin. - D'une grandeur et d'une abondance énormes, ceci n'est pas très exact, même en son tenant aux notions qu'avaient alors les anciens sur les différents fleuves de la terre. - Le Phase, le Fazi actuel, qui se jette dans le Pont-Euxin et qui n'a pas un cours considérable. - A l'orient d'été, c'est-à-dire à peu près nord-est.  - La plus importante par son étendue, ceci ne contredit pas ce qui a été dit un peu plus haut sur le Parnase, placé à l'orient d'hiver, c'est-à-dire un peu plus au sud et à l'est que le Caucase.

§ 18. Appelé les Creux, il serait difficile du dire où sont au juste situés les points qu'on désignait ainsi du temps d'Aristote; il est évident d'ailleurs que les Creux devaient être placés sur la ligne qu'on peut tirer de l'Hellespont ou d'un point de la côte de l'Asie-Mineure au Palus Méotide ou mer d'Azof. Voir plus loin, § 29. - Au tiers de la nuit, la durée de la nuit varie nécessairement avec les saisons; mais la proportion établie dans le texte n'en est pas affectée. - Le matin et le soir, tant avant le lever du soleil qu'après son coucher. - Jusqu'au dernier sommet, ceci n'est pas très clair; et la pensée exigeait plus de précision.

§19. De la Pyrène, j'ai conservé le mot grec autant que je l'ai pu, et il est parfaitement reconnaissable. Mais on voit quelle énorme erreur commet Aristote en faisant sortir des Monts Pyrénées le Danube et le Tartesse, qu'on peut identifier soit avec le Tage, soit avec le Guadalquivir, puisqu'il se jette en dehors des colonnes d'Hercule. Dans Hérodote, (livre II, ch. 33, p.83, ligne 2, édit. de Firmin Didot), Pyrène est une ville dans la Celtique et lister ou Danube y prend aussi sa source. - L'Ister, le Danube des modernes. - En dehors des colonnes d'Hercule, à l'occident et au nord du détroit de Gibraltar. Mais il n'y a pas de fleuve qui ait ce cours; et l'on ne peut pas dire du Tage qu'il sorte des Pyrénées. - Après avoir traversé toute l'Europe, ce n'est exact qu'en partie; mais d'après les connaissances géographiques qu'avaient les anciens, ils s'imaginaient que l'Ister prenait sa source dans la Celtique, qui pour eux s'étendait jusqu'à l'Océan occidental. - Dans le Pont-Euxin, ou la Mer Noire; ce qui est exact.

§ 20. Des monts Arcyniens, quelques manuscrits portent des « monts Hercyniens », et de là on s'est cru autorisé à conjecturer que les monts Arcyniens d'Aristote répondent à la contrée où fut placée plus tard la forêt Hercynie. Ce sont sans doute les montagnes du Hartz et de l'Erzgebirge. - Sont les monts Rhipées, ce sont peut-être les Karpathes. Il paraît qu'Aristote est le premier qui, dans l'antiquité, ait parlé de ces montagnes encore fort peu connues de son temps. - Des récits trop évidement fabuleux, ceux qui viennent d'être rappelés un peu plus haut, sur le cours du Danube et du Tartesse, ne le sont pas moins. - les pus grands de tous les fleuves, il est à regretter que ces fleuves ne soient pas nommés. Il est bien possible d'ailleurs que cette phrase ne soit qu'une glose et une interpolation.

§ 21. L'Aegon et le Nysès, on ne peut savoir à quels fleuves correspondent ces deux noms. Comme au nord de l'Afrique, il n'y a pas d'autre fleuve que le Nil, il ne resterait plus qu'à placer l'Aegon et le Nysès sur les côtes occidentales de l'Afrique. Mais au temps d'Aristote aucun navigateur n'était allé jusqu'au Sénégal ou au Niger. On peut croire aussi que l'Aegon et le Nysès correspondent à des fleuves, d'ailleurs peu considérables, qui sortis des montagnes d'Éthiopie, se jetteraient soit dans la Mer Rouge, soit dans le canal de Mozambique, à l'est et au sud-est de l'Afrique. - Le Chrémétès, il faut renoncer également à savoir que est ce fleuve. - Le Nil sortant de la montagne appelée Argyre, ou d'argent. C'est ce qu'on a nommé plus tard les Monts de la Lune. De nos, jours, c'est-à-dire deux mille deux cents ans après Aristote, on ne sait rien encore de positif sur les sources du Nil. Il est probable que ce problème sera heureusement résolu par quelques-unes des courageuses expéditions qui ont été récemment entreprises.

§ 22. L''Achéloüs descend du Pinde, il y avait en Grèce plusieurs fleuves de ce nom; celui dont il s'agit ici séparait l'Acarnanie de l'Étolie. - L'Inachus, il ne faut pas confondre cet Inachus avec celui qui coulait dans l'Argolide; car il n'est pas probable que l'auteur pat commettre une si grossière erreur sur la géographie de son propre pays. - Le Strymon, fleuve de Thrace qui se jetait dans la mer Égée. - Le Nestus ou, selon quelques manuscrite : « Le Nessus. » II serait difficile d'identifier ce fleuve. - L'Hèbre, qu'il ne faut pas confondre avec l'Ébre qui coule en Espagne. Il n'y a que le son de pareil. Quelques manuscrits donnent « Eurus » au lieu de « l'Hèbre. » - Du Scombros, on ne sait peint précisément quelle est cette montagne. - Du Rhodope, montagne qui faisait partie de l'Hémus en Thrace, au nord de la Macédoine et de la Thessalie.

§ 23. Tous les autres fleuves, il y a des cours d'eau qui ne sortent pas des montagnes; et celle assertion est trop générale. - Qui sortent de lacs, il y a bon nombre de rivières qui ont eu effet des lacs pour origine; et ces lacs eux-mêmes sont formés par des eaux descendues des montagnes voisines.

§ 24. En sortant de certains creux, idée fort juste; car il faut pour expliquer la formation des fleuves admettre que l'humidité répandue dans l'atmosphère y contribue pour une très grande part. - Pas plus que l'espace même des nuages, c'est-à-dire qu'il faut que l'action de l'évaporation dans l'atmosphère se combine avec la présence des eaux dans le sein de la terre. A l'influence den nuages, il faut joindre celle des sources naturelles. II y a un échange perpétuel entre la terni et l'atmosphère qui l'environne. L'eau se vaporise et ensuite se condense de nouveau, et de ce cercle sort l'équilibre hydrostatique du monde. Le texte d'ailleurs ne s'exprime pas très clairement, quoique la pensée n'ait rien de douteux.

§ 25. C'est ainsi que se forment les sources, il est probable que si l'auteur ne tient pas compte des glaciers dans la formation des rivières, c'est qu'il n'en avait pu vu lui-même, et qu'il n'en avait pas non plus entendu parler.

§ 26. Certains lieux, dans les entrailles de la terre. - Soient assez considérables, c'est-à-dire que selon l'auteur les eaux souterraines ne suffiraient pu à alimenter les fleuves; ce qui est vrai. - Les sources totales, j'ai ajouté ce dernier mot pour compléter la pensée. - Car la masse la plus forte des fleuves, le texte n'est pas ici très clair; mais je n'ai pu lui trouver un autre sens. Les commentateurs grecs ne m'ont offert aucun secours. - Sort de pierres, le mot du texte n'est pas ici le même pour signifier sources que relui qui a été employé plus haut. Ce serait plutôt fontaines que sources.

§ 27. L'absorption de certains fleuves, c'est un phénomène assez fréquent; et le Rhône en offre un exemple non loin de sa sortie du lac de Genève, entre Seyssel et l'Ecluse. - Dans l'Arcadie du Péloponnèse, le fait serait facile à vérifier.

§ 28. La cause de ce phénomène, il doit y avoir aussi une autre cause dans la constitution géologique du sol; car autrement il se formerait des lacs qui seraient stagnants.

§ 29. Le lac au pied du Caucase... la Mer, c'est évidemment la mer Caspienne. - Des fleuves nombreux et considérables, le Volga, et l'Oural entre autres. - Il s'épanche sous la terre, ceci n'est pas prouvé, bien qu'il paraisse certain que la mer Caspienne décroît constamment. - Les Gouffres du Pont, voir plus haut § 18.

§ 30. - A trois cents stades de la terre, l'indication est bien vague, et il aurait fallu désigner en même temps le point précis de la côte d'où l''on faisait partir cette mesure. - Donne de l'eau potable, je ne sais pas si les observations modernes pour la mer Caspienne ont confirmé ce fait, qui est sans doute fort extraordinaire, mais qui n'a rien cependant d'impossible. On en voit un exemple dans le golfe de la Spezzia, et sur la côte méridionale de Cuba dans la la baie de Xagus. - En trois endroits, ce détail est fait pour donner plus d'authenticité à ce singulier phénomène. Ce qui parait certain, c'est que les eaux de la mer Caspienne sont douces près de l'embouchure des fleuves, mais qu'elles sont salées dans toutes les autres parties, bien que cette salure ne soit pas très forte.

§ 31. Dans la Ligystique, ou Ligurie. L'indication n'est pas très précise; et l'Italie était bien peu connue des anciens dans sa partie septentrionale au temps d'Aristote. - Un certain fleuve, on a cru qu'il s'agissait du Pô, qui dans la partie la plus reculée de son cours disparaît, dit-on, quelque temps au milieu des montagnes où il coule. - Pas moindre que le Rhône, comme le Rhône disparaît en effet sous terre, il est probable qu'Aristote aura fait ici quelque confusion d'après les récits très incertains des voyageurs, et que c'est du Rhône lui-même qu'il veut parler. - Et il reparaît, c'est le phénomène qu'offre le Rhône; mais il n'est pas impossible que quelqu'autre rivière offrit la même particularité. - Est navigable, l'auteur aurait dû ajouter sur quelle étendue de son cours le Rhône était navigable; car il ne l'est pas à l'endroit où il est absorbé en terre; et à l'embouchure, presque tous les fleuves le sont.

CHAPITRE XIV.
Changements perpétuels et révolutions réciproques des mers et des continents par .l'attérissement des fleuves. Exemples divers et particulièrement de l'Égypte. - Considérations générales sur les émigrations des peuples. - Cataclysmes périodiques.

§ 1. Les mêmes lieux de la terre ne sont pas toujours humides ou secs ; mais leur constitution varie selon la formation ou la disparition des cours d'eau. C'est là ce qui fait que le continent et la mer changent aussi de rapport, et que les mêmes lieux ne sont pas toujours de la terre ou toujours de la mer. La mer vient là où était jadis la terre ferme ; et la terre reviendra là où nous voyons la mer aujourd'hui.
§ 2. Il faut croire d'ailleurs que ces phénomènes se succèdent, selon un certain ordre et une certaine périodicité. Le principe et la cause de ces mouvements, c'est que l'intérieur de la terre, tout comme les corps des plantes et des animaux, a ses époques de vigueur et de dépérissement.
§ 3. La seule différence c'est que dans les plantes et les animaux ces changements n'ont pas lieu en partie seulement, mais c'est l'être tout entier qui par une loi nécessaire fleurit, ou se meurt, tandis qu'au contraire pour la terre, ces changements ne se font que partiellement par le froid et par la chaleur.
§ 4. Le froid et la chaleur eux-mêmes s'accroissent ou diminuent par le soleil, et par le mouvement de révolution ; et c'est par le chaud et le froid que les diverses régions de la terre prennent une propriété différente, pouvant, durant un certain temps, rester humides, puis se desséchant et vieillissant ensuite. D'autres lieux revivent et redeviennent par portions successivement humides
§ 5. Or il y a nécessité, quand les lieux se dessèchent 352, que les sources en disparaissent, qu'à la suite de ce changement les fleuves de grands qu'ils étaient deviennent d'abord petits, puis, qu'ils finissent par se dessécher tout à fait, et par conséquent que ce déplacement des fleuves, disparaissant ici pour aller se reproduire proportionnellement ailleurs, change aussi la mer elle-même.
§ 6. En effet, là où gonflée par les fleuves, elle était toute pleine, il faut bien nécessairement quand elle se retire qu'elle laisse la terre à sec ; et là où remplie par les cours d'eau, elle s'était desséchée, il faut bien quand elle revient qu'il se forme de nouveau des lacs.
§ 7. Ce qui fait que ces phénomènes nous échappent, c'est que toute cette formation naturelle de la terre ne se fait que par additions successives et dans des temps immensément longs, si on les compare à notre existence; des nations tout entières disparaissent et périssent avant qu'on ne puisse conserver le souvenir de ces grands changements, de l'origine jusqu'à la fin.
§ 8. Les destructions des peuples sont les plus considérables et les plus rapides dans les guerres ; d'autres tiennent à des épidémies, d'autres à des famines ; et ces causes tantôt détruisent les peuples tout à coup, tantôt petit à petit. Aussi ne se rend-on pas compte des transmigrations de ces populations ; car tandis que les uns abandonnent la contrée, d'autres persistent à y rester jusqu'à ce que le sol ne puisse plus absolument y nourrir personne.
§ 9. Entre la première observation et la dernière, on doit croire qu'il s'est écoulé des temps si considérables que personne n'en a conservé le souvenir, et que ceux qui avaient pu être sauvés et qui sont restés ont tout oublié par la longueur même du temps. C'est de la même façon que nous échappe, à ce qu'on doit croire, l'époque du premier établissement des nations sur ces terrains qui changent et qui deviennent secs après avoir été marécageux et inondés.
§ 10. C'est qu'en effet cet accroissement du sol habitable, ne se fait que petit à petit et après de longs siècles, de sorte qu'on ne sait plus ni quels ont été les premiers occupants, ni à quelle époque ils sont venus, ni quel était l'état de la contrée quand ils y vinrent.
§ 11. C'est là justement ce qui est arrivé pour l'Égypte. Cette contrée semble avoir été toujours sèche, et le sol tout entier ne parait qu'une alluvion du Nil ; mais comme ce n'est qu'après le dessèchement successif des marais que les peuples voisins ont pu les habiter, l'éloignement des temps a fait perdre tout souvenir de l'origine.
§ 12. Aussi toutes les bouches du fleuve, si l'on en excepte une seule, celle de Canobe, paraissent-elles faites de main d'homme et non par le fleuve lui-même. Autrefois l'Égypte était ce qu'on appelle Thèbes aujourd'hui ; et c'est ce que prouve bien le témoignage d'Homère, qui était un témoin assez rapproché de ces changements. Il parle de 352a ce lieu comme si Memphis n'y existait point encore, ou du moins comme n'ayant point alors le développement qu'elle eut depuis. Et les choses doivent s'être vraisemblablement passées ainsi ; car les contrées du bas n'ont dû être habitées qu'après les contrées du haut.
§ 13. En effet les lieux plus rapprochés de l'alluvion ont dû nécessairement rester marécageux plus longtemps, parce que les eaux séjournent toujours davantage dans les lieux les plus bas. Puis cette disposition change, et le sol se rétablit ensuite.
§ 14. Car les lieux qui se sont séchés deviennent de plus en plus commodes, et les lieux qui jadis étaient les plus habitables, se desséchant outre mesure, le deviennent d'autant moins.
§ 15. C'est ce qui s'est produit dans la Grèce pour le pays des Argiens et celui des Mycéniens. En effet à l'époque de la guerre de Troie, la terre des Argiens qui était toute marécageuse, ne pouvait nourrir qu'un petit nombre d'habitants ; la Mycénie au contraire était alors en excellent état; et c'est là ce qui lui assurait plus de gloire. Aujourd'hui il en est précisément tout le contraire, par la cause que nous venons de dire. La Mycénie est devenue tout à fait stérile et sèche ; et les parties de l'Argolide qui jadis étaient stérilisées par l'inondation sont devenues extrêmement fertiles.
§ 16. Or ce qui est arrivé pour ce petit coin de terre, arrive précisément de la même façon, selon toute apparence, pour des lieux très étendus et pour des contrées tout entières.
§ 17. Ceux donc qui n'observent qu'imparfaitement, croient que la cause de ces phénomènes et de ces modifications réside dans le changement de l'univers et du ciel entier. Aussi affirment-ils que la mer diminue parce qu'elle se dessèche, et qu'on voit aujourd'hui plus de lieux ainsi changés qu'on n'en voyait autrefois.
§ 18. Il y a dans ces assenions du vrai et du faux. Il est bien vrai que plus de lieux sont à découvert aujourd'hui et changés en terre ferme, qui jadis étaient couverts par les eaux ; mais le contraire arrive aussi ; et en y regardant bien, on trouvera beaucoup de lieux que la mer a envahis.
§ 19. Ce n'est pas au principe même du monde qu'il convient d'attribuer ces phénomènes ; car il serait ridicule de croire que l'univers se meut par des changements si petits et si mesquins. La masse de la terre et sa grandeur est nulle si on la compare au ciel tout entier, absolument nulle.
§ 20. La cause que l'on pourrait peut-être assigner à tous ces faits, c'est que de même qu'à certaines époques fixes, l'hiver se produit dans les saisons de l'année, de même aussi se produit un grand hiver qui relève de quelque immense période, et qui amène une excessive abondance de pluies.
§ 21. Ce n'est pas du reste toujours dans les mêmes contrées que ce phénomène se manifeste, et c'est comme ce qu'on appelle le déluge de Deucalion. Ce déluge s'est étendu surtout sur les contrées helléniques, et parmi elles sur la vieille Hellade.
§ 22. La vieille Hellade est près de Dodone et de l'Achéloûs 353; car ce fleuve a souvent changé son cours. Les peuples qui habitaient jadis ces lieux étaient les Selles, et ceux qu'on appelait alors Grecs et qui on nomme aujourd'hui Hellènes.
§ 23. Lors donc qu'arrivent ces pluies énormes, il faut croire qu'elles suffisent pour très longtemps. C'est quelque chose d'analogue à ce qu'on observe pour les fleuves dans l'état présent des choses. Si les uns sont perpétuels et si les autres ne le sont pas, la cause en est, selon quelques philosophes, la dimension des cavernes souterraines, et selon nous, la grandeur des lieux élevés, leur densité et leur température froide, qui fait qu'ils reçoivent, gardent et produisent beaucoup d'eau, tandis que les pays qui n'ont au-dessus d'eux que de petits systèmes de montagnes, spongieuses, pleines de pierres et d'argile, sont les premiers desséchés. De même aussi il faut croire que les lieux qui reçoivent cet énorme amas d'eau en conservent comme une sorte d'humidité perpétuelle.
§ 24. Avec le temps, tel lieu se dessèche davantage, tel autre se dessèche moins, quand il a été bien inondé, jusqu'à ce qu'arrive de nouveau la révolution de cette grande période.
§ 25. Comme il y a nécessairement quelque changement de l'univers, sans qu'il y ait cependant pour lui ni naissance ni destruction, puisqu'il subsiste toujours, il y a une nécessité égale, ainsi que nous le soutenons, que les mêmes lieux ne soient pas toujours inondés par la mer ou les fleuves, et que les mêmes lieux ne soient pas toujours secs. Les faits sont là pour le prouver.
§ 26. Ainsi les Égyptiens, que nous reconnaissons pour les plus anciens des peuples, occupent un pays qui parait être et qui est tout entier l'œuvre du fleuve. C'est ce dont on peut se convaincre en observant leur contrée; et les bords de la Mer Rouge en sont un témoignage incontestable.
§ 27. Un de leurs rois essaya de creuser un canal ; car si toute la contrée était devenue navigable, les avantages qu'elle en aurait tirés eussent été considérables; et c'est Sésostris, dit-on, qui le premier parmi les anciens rois tenta cette entreprise. Mais il trouva que la nier était plus haute que la terre. Il cessa donc de faire creuser le canal, comme dut le faire plus tard aussi Darius, de peur que la mer, en venant à se mêler au fleuve, n'en supprimât complètement le cours.
§ 28. Il est donc évident que tous ces lieux n'étaient jadis qu'une mer continue. Et c'est là ce qui fait que la Libye et la contrée d'Ammon paraissent plus basses et plus creuses qu'elles ne devraient l'être relativement à la contrée inférieure. Mais il est clair que l'alluvion se formant, il y a eu stagnation des eaux et terre ferme, et qu'avec le temps l'eau qui était restée et qui avait fait marais, 353a est venue à se dessécher entièrement.
§ 29. Dans le Marais Méotide, les alluvions des fleuves ont été si considérables que les navires dont on s'y sert aujourd'hui, sont beaucoup plus petits qu'il y a soixante ans. Delà, on peut aisément conclure que dans l'origine ce marais a été comme beaucoup d'autres le produit des rivières, et qu'à la fin il deviendra sec tout entier.
§ 30. De plus, le Bosphore a toujours un courant à cause des alluvions; et l'on peut observer sans peine de ses propres yeux la façon dont les choses se passent. Lorsque le courant avait fait un rivage à partir de l'Asie, ce qui restait derrière devenait d'abord un petit marais, et ensuite se desséchait ; puis il se formait un autre rivage après celui-ci, et encore un autre marais après le premier. Et les choses ont eu lieu perpétuellement de la même manière. Ceci se répétant plusieurs fois, il a bien fallu qu'avec le temps, il se formât une sorte de fleuve, qui lui-même finira par se dessécher.
§ 31. II est clair par conséquent, comme le temps ne s'arrête pas et que l'Univers est éternel, que le Tanaïs et le Nil n'ont pas toujours coulé, et que le lieu où coulent aujourd'hui leurs eaux a jadis été sec; car leur action a une fin et le temps n'en a pas, et l'on peut appliquer cette même observation à tous les autres fleuves.
§ 32. Mais si les fleuves naissent et périssent, et si les mêmes lieux de la terre ne sont pas toujours couverts par les eaux, il faut nécessairement que la mer subisse les mêmes changements. Du moment que la mer abandonne certains lieux, et qu'elle revient en certains autres, il est bien clair que sur la terre ce ne sont pas toujours les mêmes contrées qui sont mers, ou qui sont continents , mais que toutes changent d'état avec les siècles.
§ 33. Ainsi donc nous avons prouvé que ce ne sont pas toujours les mêmes parties de la terre qui sont à sec, les mêmes qui sont navigables, et nous avons dit la cause de ces phénomènes. Enfin nous avons dit aussi pourquoi parmi les fleuves les uns sont perpétuels, et les autres ne le sont pas.

Ch. XIV. Ce chapitre est certainement un des plus remarquables de toute la Météorologie, et la justesse des considérations qu'il présente est à peu près irréprochable. - § 1. Humides ou liquides. - Leur constitution varie, les exemples sont fort nombreux en Europe et sur toute la surface du globe. - Toujours de la terre ou toujours de la mer, les grands déserts de sables ont été, selon toute apparence, le fond de quelque mer dans des temps très reculés. - La mer vient, Aristote pouvait en avoir va lui-même plus d'un exemple sur les côtes de la Grèce et de l'Asie mineure.

§ 2. Selon un certain ordre, jusqu'à présent il a été impossible de fixer une loi générale à ce phénomène ; il paraîtrait plutôt que ces grands bouleversements sont instantanés, produits par des causes qui échappent à nos observations. - La cause de ces mouvements, la cause indiquée ici par Aristote est toute conjecturale; et les volcans auraient pu lui fournir une explication plus vraisemblable. - Comme les corps des plantes et des animaux, rien n'atteste la justesse de cette comparaison.

§ 3. La seule différence, l'auteur sent bien que sa comparaison n'est pas suffisants ; mais il y a bien d'autres différences encore que celle qu'il indique. Dans l'antiquité, la terre était regardée comme une sorte de grand animal qui a sa vie propre; et cette opinion se retrouve dans le Timée de Platon, p. 120, trad. de M. V. Cousin. - Par le froid et par la chaleur, ces causes sont sans doute très puissantes; mais il y en a d'autres aussi.

§ 4. Par le soleil, la chaleur du soleil est certainement un fait considérable ; mais celle du feu central ne l'est pas moins, et les volcans en sont un indice manifeste. - Et par le mouvement de révolution, Voir plus haut chap. 2 et 3. Il n'est pas probable d'ailleurs que le mouvement de révolution ait la moindre Influence sur le degré plus ou moins grand de la chaleur. - Une propriété différente, le texte dit Puissance. - Se desséchant et vieillissant, il semble que l'auteur compare la terre au corps humain, que la vieillesse en effet dessèche peu à peu. - Humides, ou liquides. j'ai préféré le premier mot comme répondant mieux au système général d'Aristote : le froid et le chaud, le sec et l'humide.

§ 5. Que les sources en disparaissent, elles peuvent être entretenues par d'autres causes que les eaux de la surface. - Les fleuves de grands qu'ils étaient, l'observation ne confirme pas ces théories. - Change aussi la mer elle-même, il semble qu'il faut des causes bien autrement puissantes que celles qui sont énumérées ici.

§ 6. Gonflée par les fleuves.... remplie par les cours d'eau, l'opposition des idées n'est pas ce qu'elle devrait être; et il serait très facile de refaire le texte dans le sens où le logique l'exige. Mais les manuscrits ne donnent pas de variante; et je n'ai pu me permettre aucune modification ; la pensée d'ailleurs est fort claire.

§ 7. Ce qui fait que ces phénomènes nous échappent, cette raison est en partie vraie; mais aujourd'hui que nous avons deux mille ans d'observation de plus, nous n'en savons guère davantage sur ces immenses phénomènes, dont l'action n'est pas tout à fait et uniquement successive comme Aristote le pense. - Des nations tout entières, c'est exact ; mais des centaines de générations accumulées les unes sur les autres n'en ont pas plus appris, et en savent peut-être moins sur ces changements prodigieux que les hommes des premiers jours.

§ 8. Dans les guerres, ceci était vrai dès le temps d'Aristote, et ce l'est encore de nos jours. Les guerres de notre révolution ont fait périr trois ou quatre millions d'hommes en sus de ce qu'aurait enlevé la loi de la nature, en moins de vingt-cinq ans. - A des épidémies, cette cause avait été longuement étudiée par Hippocrate, un siècle à peu près avant Aristote. - A des famines, beaucoup plus fréquentes dans les temps passés qu'elles ne le font de nos jours. - Des transmigrations, et aussi des transportations. - Abandonnent la contrée, les émigrations dans l'antiquité étaient relativement bien plus importantes qu'elles ne le sont du nos jours. - Le sol ne puisse plus nourrir, par suite des causes naturelles qui le dessèchent et le rendent tout à fait impropre à l'habitation des hommes.

§ 9. Entre la première observation et la derrière, voir plus haut, §7. - Que personne n'en a conservé le souvenir, d'autant plus quo de nombreuses générations se sont succédé, et les traditions mêmes ont péri. - Qui avaient pu être sauvés des accidents naturels où les autres avaient péri. - L'époque du premier établissement, tous ces souvenirs ont à peu prés disparu des annales de l'humanité; et c'en encore la Bible qui en a conservé les plus lointains souvenirs.

§ 10. Cet accroissement du sol habitable, par les atterrissements des fleuves et par la retraite des eaux de la mer. Ces réflexions d'ailleurs sont admirables de justesse et de simplicité.

§ 11. Dans 'Égypte, c'est là en effet que le phénomène semble avoir été à la fois plus récent et plus visible. - Toujours sèche, en effet, toute l'Egypte n'est qu'un désert là où le Nil ne la féconde pas. - Une alluvion du Nil, c'est parfaitement vrai pour le Delta et la Basse-Égypte. - Le desséchement successif des marais, c'est vrai; mais la réciproque ne l'est pas moins; et les marais ont regagné les espaces que les travaux des hommes leur avaient ravi. Toute la côte de Péluse, jadis si florissante sous les Ptolémées et les Romains, est aujourd'hui redevenue inhabitable par suite de la négligence des siècles et des révolutions politiques du pays.

§12. Canobe ou Canope, la branche de Damiette aujourd'hui. - Faites de main d'homme, les boghas actuels qui laissent passer dans la mer les eaux du lac Menzaleh, ont été ouverts ainsi. - Et non par le fleuve lui-même, le fleuve aura bien pu se frayer à lui-même plus d'une embouchure, quand son cours aura été trop embarrassé. - Ce qu'on appelle Thèbes aujourd'hui, Thèbes est à peu près à 200 lieues de l'embouchure du Nil. - Le témoignage d'Homère, Iliade, chant IX, vers 381. Homère ne parle que de Thèbes en effet; mais cela ne prouve pas, que même de son temps, il n'y eût en Égypte d'autre ville que Thèbes. - Memphis n'y existait point, c'est une simple conjecture d'Aristote; et du texte même d'Homère, on ne peut tirer cette conclusion rigoureusement. Homère, d'ailleurs antérieur de 8 ou 700 ans à Aristote, n'était pas non plus un témoin assez rapproché des grandes révolutions. - Doivent s'être vraisemblablement passées ainsi, la vraisemblance est en effet très acceptable, et il paraît même, d'après toutes les découvertes qu'a faites de nos jours l'Égyptologie, que c'est la partie haute de Égypte qui a été d'abord habitée. La civilisation, venue peut-être du centre de l'Afrique, a descendu peu à peu avec le cours même du fleuve.

§ 13. Rester marécageux plus longtemps, le fait peut être regardé comme évident. - Cette disposition, le texte n'est pas tout à fait aussi précis. - Le sol se rétablit, on bien encore : « Les choses s'améliorent. »

§ 14. Se desséchant outre mesure, Voir plus haut, § 5.

§ 15. Des Argiens et des Mycéniens, tous les deux à l'est du Péloponnèse. - A l'époque de la guerre de Troie, Homère, Iliade, ch. IV, vers 171, semble dire le contraire en qualifiant Argos d'une épithète qui signifie: « très altérée. » Mais il est possible aussi que les eaux potables y fussent très rares, précisément parce que les marais y étaient fort étendus. - Plus de gloire, il ne semble pas, d'après toute l'Iliade, que la Mycénie eût plus de gloire qu'Argos à l'époque d'Agamemnon et de la guerre de Troie.

§ 16. Selon toute apparence, mais ces changements ne s'étendent pas aussi loin que l'auteur semble le croire.

§ 17. Qu'imparfaitement, ou encore : « Sur de petite espaces. » - Dans le changement de l'univers, c'est aller trop loin; mais si ce n'eut pas un changement du monde entier, c'est au moins toute une révolution du globe terrestre. - Que la mer diminue, il ne paraît pas que cette observation fût exacte ; car aujourd'hui, après plus de deux mille ans, le desséchement général de la mer devrait avoir fait les progrès les plus sensibles.

§ 18. Qui jadis étaient couverts par les eaux, la géologie moderne confirme cette observation; les continents actuels ont été jadis submergés; mais il serait difficile de dire si la proportion générale des terres et des eaux a changé. - Que la mer a envahis, on pourrait citer beaucoup de lieux qui se trouvent dans ce cas, suit sur les côtes d'Italie, soit sur les côtes de Grèce et d'Asie-Mineure.

§ 19. Ce n'est pas un principe même du monde, je ne vois pas pourquoi on ne remonterait pas jusque là, et les bouleversements qu'a éprouvés notre globe peuvent bien tenir à quelques changements immenses qu'auraient subis les grands corps qui l'environnant. - Sa grandeur est nulle, cette observation est profondément juste, et du temps d'Aristote elle était très neuve.

§ 20. L'hiver se produit, cette comparaison n'est pas absolument à rejeter par la géologie moderne; il y a eu certainement plusieurs déluges; mais on ne sait pas s'ils sont périodiques et s'ils tiennent à quelque cause régulière. - Un grand hiver, nous dirions plutôt un déluge, comme Aristote lui-même le dit au § suivant. - Une abondance excessive de pluies, il est probable qu'il y a quelqu'autre cause aussi qua la pluie qui détermine ces prodigieux changements.

§ 21. Dans les mêmes contrées, l'observation est très juste, et il est probable que toutes les parties de notre globe auront été visitées par des déluges successifs. - Le déluge de Deucalion, qui n'est pas purement mythologique et qui répond certainement à quelques faits naturels. - Sur les contrées helléniques, ceci implique que d'après les traditions, le déluge de Deucalion s'était fait sentir aussi eu dehors de la Grèce. - Sur la vieille Hellade, j'ai conservé à dessein le mot de Hellade, qui représente pour nous quelque chose de plus ancien que le nom de Grecs; bien que le nom de Grecs soit en réalité plus vieux que celui d'Hellènes, comme l'atteste le § qui suit. D'ailleurs le même § indique ce qu'il faut entendre par la vieille Hellade.

§ 22. Près de Dodone et de l'Achéloüs, sur les côtes de Épire. - Les Selles, Homère connaît aussi ces peuples, Iliade, chant XVI, vers 234. II semble que pour lui les Selles, qui mènent une vie sauvage et rude près de Dodone, sont un peuple très pieux consacré particulièrement au culte de Jupiter Pélasgique.

§ 23. Ces pluies énormes, causées par le grand hiver et amenant des déluges. - Elles suffisent pour très longtemps, c'est-à-dire qu'elles ne recommencent qu'à de très longs intervalles. - A ce qu'un observe pour les fleuves, la comparaison n'est pas très juste. - Selon quelques philosophes, Voir plus haut, ch,. 13, §§ 6 et 10. - La grandeur des lieux élevés, c'est-à-dire des montagnes, d'où sortent la plupart des fleuves. - Leur densité, cette idée n'est pas assez claire; il est possible qu'il s'agisse ici des forêts épaisses dont bien des montagnes sont couvertes. Les manuscrits n'offrent pu de variantes. - De petits systèmes de montagnes, c'est l'expression même du texte. - Cet énorme amas d'eau quand le déluge a lieu. - Une sorte d'humidité perpétuelle, ceci n'est pas tout à fait d'accord avec ce qui précède, sur les variations perpétuelles de la sécheresse et de l''humidité des lieux à la surface de la terre.

§ 24. De cette grande période, qu'on suppose, mais qu'on ne prouve pas. L'idée de ces révolutions empruntée déjà à Platon, est passée aux Stoïciens, qui ont insisté surtout sur celle de la combustion périodique du monde. De nos jours, les deux systèmes Neptunien et Volcanique sont encore en présence, et il est bien probable en effet que l'eau et le feu ont exercé tour à tour une immense influence sur notre pauvre globe. Voir le Timée de Platon, p. 120, trad. de M. V. Cousin.

§ 25. Quelque changements de l'univers, le mouds est en effet dans un changement perpétuel. - Ni naissance ni destruction, Aristote a cru toujours à l'éternité du monde. Voir la Physique, livre VIII, tome Il, p. 453 de ma traduction. - Ainsi que nos le soutenons, contre les systèmes différents qui canent à une stabilité constante des lieux, tels qu'on les observe actuellement. - Les faits sont là pour le prouver, on peut voir en effet qu'Aristote a observé les choses avec la plus grande attention.

§ 26. Les plus anciens des peuples, Voir le Timée de Platon, et la conversation de Solon avec les prêtres de Saïs, traduction de M. V. Cousin, p. 119. - L'œuvre du fleuve, Voir plus haut § II. Les alluvions du Nil ont peu à peu formé le Delta de la basse Égypte; et dans tout le reste du pays, c'est le fleuve qui seul donne la fécondité partout où ses eaux bienfaisantes peuvent arriver. - En observant leur contrée, le limon du Nil se reconnaît en effet de la manière la plus facile; et ses couches successives forment des stratifications régulières fort distinctes quand les eaux commencent à baisser. - Et les bords de le Mer Rouge, qui sont en général d'une sécheresse qui les rend presque inhabitables.

§ 27. Un de leurs rois, Sésostris, auquel ce canal est attribué quelques lignes plus bas, régnait quinze cents ans au moins avant l'ère chrétienne, si l'on en croit les inscriptions de Thèbes. - Etait devenue navigable, la contrée tout entière n'est navigable que par le Nil; mais il est certain qu'une communication avec la Mer Rouge eût été d'un avantage immense pour tout le pays. - Que la mer était plus haute, cette erreur a été admise jusqu'à nos jours. La commission d'Égypte de 1709 la partages également, et elle crut que la Mer Rouge était de 10 mètres au-dessus de la Méditerranée et du Nil. Aujourd'hui, c'est-à-dire depuis 15 ans à peine, la science s'est assurée que les deux mers sont de niveau, et que l'Égypte n'avait pu à craindre d'être submergée par les eaux de la Mer Rouge. Les nivellements pour les chemins de fer et pour le canal de Suez ont démontré définitivement cette vérité. - Darius, roi de Perse, vers la fin du Ve siècle avant J.- C. - En venant à se mêler au fleuve, une surélévation de la Mer Rouge aurait amené en effet une effroyable inondation, si on l'avait mise en communication avec le cours du Nil, qui y aurait disparu.

§ 28. N'étaient jadis qu'une mer continue, avec cette idée, qui est vraie, il est difficile de comprendre comment on pouvait croire à une surélévation de la Mer Rouge; elle s'était retirée, et par conséquent elle ne pouvait pas être plus haute. - La Libye et la contrée d'Ammon, à l'ouest de Égypte. - A la contrée inférieure, c'est-à-dire telle qui avoisine l'embouchure du fleuve dans la Méditerranée. - Stagnation des eaux et terre ferme , c'est la traduction exacte du texte; mais l'expression est trop concise; et il aurait fallu dire qu'il y avait eu d'abord stagnation des eaux, et que les eaux se dessèchent, la terre ferme avait reparu. Ces idées sont bleu ajoutées quelques ligues plus bas ; mais c'était ici qu'elles devaient être d'abord placées.

§ 29. Dans le Marais Méotide, c'est-à-dire la Mer Noire et particulièrement la mer dAzof. - Sont beaucoup plus petits, observation fort simple, mais décisive. - A la fin il deviendra sec tout entier, il ne paraît pas que depuis deux mille ans la prédiction se soit réalisée mais il est certain qu'il y a des parties de la mer d'Azof qui sont de plus en plus encombrées; et l'on peut maintenir toujours la prophétie en la rejetant à une époque plus éloignée.

§ 30. A cause des alluvions, ceci n'est pas très clair; il faut comprendre que les alluvions resserrant de plus en plus l'espace où les eaux ont leur mouvement naturel, il s'est formé un courant d'autant plus rapide que l'ouverture était pins étroite. - Avait fait..., ce qui restait.... devenait, dans le texte tous let verbes sont au passé comme dans la traduction ; peut-être eût-il mieux vain mettre le présent. - Qui lui-même finira par se dessécher, le texte n'est peut-être pas tout à fait aussi précis.

§ 31. Que le Tanaïs et le Nil n'ont pas toujours coulé, c'est bien probable; mais on peut croire aussi que l'état actuel des choses une fois établi peut se maintenir éternellement. - A jadis été sec, c'est une simple conjecture; et il ne semble pas qu'elle s'appuie même sur la tradition. - Et le temps n'en a pas, Voir la Physique, livre IV, cp. 14, tome Il, p. 224 de ma traduction. - On peut appliquer cette même observation, il n'y a pas de changements considérables dans le système général des eaux à la surface de la terre, depuis que les hommes peuvent observer.

§ 32. Naissent et périssent, c'est là une hypothèse que rien ne confirme, bien qu'elle ne soit pas sans vraisemblance. - Ne sont pas toujours couverts par les eaux, les découvertes de la géologie moderne se joignent aux observations des anciens pour confirmer la vérité de ce fait. - La mer subisse les mêmes changements, ces grandes modifications dans l'emplacement des mers sont un des faits les moins contestables de la géologie. - Toutes changent d'état, c'est encore ce que la géologie atteste, au moins pour le passé.

§ 33. Ainsi donc, résumé assez exact de tout ce chapitre. - Qui sont navigables, c'est l'expression même du texte que j'ai dû conserver; il eût été préférable d'en prendre une qui aurait été moins spéciale, et plus directement opposée à l'idée de sécheresse et de terre ferme. Un marais n'est pas navigable.

FIN DU LIVRE I DU TRAITÉ DE LA Météorologie.