Aristote : Hermeneia

ARISTOTE

 

HERMENEIA : ΠΕΡΙ ΕΡΜΗΝΕΙΑΣ : CHAPITRE ΧΙΙ

 chapitre ΧI - chapitre ΧΙΙΙ

 

 

HERMÉNEIA, ou TRAITÉ DE LA PROPOSITION.

 

 

 

CHAPITRE XII.
Des propositions modales : opposition de ces propositions : réfutation de quelques théories fausses à cet égard. - Règles de l'opposition des propositions modales, du possible, du nécessaire, de l'impossible, etc.

1 Τούτων δὲ διωρισμένων σκεπτέον ὅπως ἔχουσιν αἱ ἀποφάσεις καὶ καταφάσεις πρὸς ἀλλήλας αἱ τοῦ δυνατὸν εἶναι καὶ μὴ δυνατόν, καὶ ἐνδεχόμενον καὶ μὴ ἐνδεχόμενον, καὶ περὶ τοῦ ἀδυνάτου τε καὶ ἀναγκαίου· ἔχει γὰρ ἀπορίας τινάς.

2 Εἰ γὰρ τῶν συμπλεκομένων αὗται ἀλλήλαις ἀντίκεινται αἱ ἀντιφάσεις, ὅσαι κατὰ τὸ εἶναι καὶ μὴ εἶναι τάττονται, οἷον [21b] τοῦ εἶναι ἄνθρωπον ἀπόφασις τὸ μὴ εἶναι ἄνθρωπον, οὐ τὸ εἶναι μὴ ἄνθρωπον, καὶ τοῦ εἶναι λευκὸν ἄνθρωπον τὸ μὴ εἶναι λευκὸν ἄνθρωπον, ἀλλ´ οὐ τὸ εἶναι μὴ λευκὸν ἄνθρωπον, —εἰ γὰρ κατὰ παντὸς ἡ κατάφασις ἢ ἡ ἀπόφασις, τὸ ξύλον ἔσται ἀληθὲς εἰπεῖν εἶναι μὴ λευκὸν ἄνθρωπον· εἰ δὲ οὕτως, καὶ ὅσοις τὸ εἶναι μὴ προστίθεται, τὸ αὐτὸ ποιήσει τὸ ἀντὶ τοῦ εἶναι λεγόμενον, οἷον τοῦ ἄνθρωπος βαδίζει οὐ τὸ οὐκ ἄνθρωπος βαδίζει ἀπόφασις, ἀλλὰ τὸ οὐ βαδίζει ἄνθρωπος· οὐδὲν γὰρ διαφέρει εἰπεῖν ἄνθρωπον βαδίζειν ἢ ἄνθρωπον βαδίζοντα εἶναι·— ὥστε εἰ οὕτω πανταχοῦ, καὶ τοῦ δυνατὸν εἶναι ἀπόφασις τὸ δυνατὸν μὴ εἶναι, ἀλλ´ οὐ τὸ μὴ δυνατὸν εἶναι. 3 Δοκεῖ δὲ τὸ αὐτὸ δύνασθαι καὶ εἶναι καὶ μὴ εἶναι· πᾶν γὰρ τὸ δυνατὸν τέμνεσθαι ἢ βαδίζειν καὶ μὴ βαδίζειν καὶ μὴ τέμνεσθαι δυνατόν· λόγος δ´ ὅτι ἅπαν τὸ οὕτω δυνατὸν οὐκ ἀεὶ ἐνεργεῖ, ὥστε ὑπάρξει αὐτῷ καὶ ἡ ἀπόφασις· δύναται γὰρ καὶ μὴ βαδίζειν τὸ βαδιστικὸν καὶ μὴ ὁρᾶσθαι τὸ ὁρατόν. Ἀλλὰ μὴν ἀδύνατον κατὰ τοῦ αὐτοῦ ἀληθεύεσθαι τὰς ἀντικειμένας φάσεις· οὐκ ἄρα αὕτη ἀπόφασις· συμβαίνει γὰρ ἐκ τούτων ἢ τὸ αὐτὸ φάναι καὶ ἀποφάναι ἅμα κατὰ τοῦ αὐτοῦ, ἢ μὴ κατὰ τὸ εἶναι καὶ μὴ εἶναι τὰ προστιθέμενα γίγνεσθαι φάσεις καὶ ἀποφάσεις. Εἰ οὖν ἐκεῖνο ἀδύνατον, τοῦτ´ ἂν εἴη αἱρετόν. 4 Ἔστιν ἄρα ἀπόφασις τοῦ δυνατὸν εἶναι τὸ μὴ δυνατὸν εἶναι. Ὁ δ´ αὐτὸς λόγος καὶ περὶ τοῦ ἐνδεχόμενον εἶναι· καὶ γὰρ τούτου ἀπόφασις τὸ μὴ ἐνδεχόμενον εἶναι. Καὶ ἐπὶ τῶν ἄλλων δὲ ὁμοιοτρόπως, οἷον ἀναγκαίου τε καὶ ἀδυνάτου.  5 Γίγνεται γάρ, ὥσπερ ἐπ´ ἐκείνων τὸ εἶναι καὶ μὴ εἶναι προσθέσεις, τὰ δ´ ὑποκείμενα πράγματα τὸ μὲν λευκὸν τὸ δὲ ἄνθρωπος, οὕτως ἐνταῦθα τὸ μὲν εἶναι ὡς ὑποκείμενον γίγνεται, τὸ δὲ δύνασθαι καὶ ἐνδέχεσθαι προσθέσεις διορίζουσαι, ὥσπερ ἐπ´ ἐκείνων τὸ εἶναι καὶ μὴ εἶναι τὸ ἀληθές, ὁμοίως αὗται ἐπὶ τοῦ εἶναι δυνατὸν καὶ εἶναι οὐ δυνατόν. 6 Τοῦ δὲ δυνατὸν μὴ εἶναι ἀπόφασις τὸ οὐ δυνατὸν μὴ εἶναι. Διὸ καὶ ἀκολουθεῖν ἂν δόξαιεν ἀλλήλαις αἱ δυνατὸν εἶναι— δυνατὸν μὴ εἶναι· τὸ γὰρ αὐτὸ δυνατὸν εἶναι καὶ μὴ εἶναι· οὐ γὰρ ἀντιφάσεις ἀλλήλων αἱ τοιαῦται.

Ἀλλὰ τὸ δυνατὸν εἶναι καὶ μὴ [22a] δυνατὸν εἶναι οὐδέποτε ἅμα· ἀντίκεινται γάρ. Οὐδέ γε τὸ δυνατὸν μὴ εἶναι καὶ οὐ δυνατὸν μὴ εἶναι οὐδέποτε ἅμα.

7 Ὁμοίως δὲ καὶ τοῦ ἀναγκαῖον εἶναι ἀπόφασις οὐ τὸ ἀναγκαῖον μὴ εἶναι, ἀλλὰ τὸ μὴ ἀναγκαῖον εἶναι· 8 τοῦ δὲ ἀναγκαῖον μὴ εἶναι τὸ μὴ ἀναγκαῖον μὴ εἶναι. Καὶ τοῦ ἀδύνατον εἶναι οὐ τὸ ἀδύνατον μὴ εἶναι, ἀλλὰ τὸ μὴ ἀδύνατον εἶναι· τοῦ δὲ ἀδύνατον μὴ εἶναι τὸ οὐκ ἀδύνατον μὴ εἶναι.

9 — Καὶ καθόλου δέ, ὥσπερ εἴρηται, τὸ μὲν εἶναι καὶ μὴ εἶναι δεῖ τιθέναι ὡς τὰ ὑποκείμενα, κατάφασιν δὲ καὶ ἀπόφασιν ταῦτα ποιοῦντα πρὸς τὸ εἶναι καὶ μὴ εἶναι συνάπτειν. Καὶ ταύτας οἴεσθαι χρὴ εἶναι τὰς ἀντικειμένας φάσεις, δυνατόν—οὐ δυνατόν, ἐνδεχόμενον—οὐκ ἐνδεχόμενον, ἀδύνατον— οὐκ ἀδύνατον, ἀναγκαῖον—οὐκ ἀναγκαῖον, ἀληθές—οὐκ ἀληθές.

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§ 1. Ceci posé, il faut voir les rapports des affirmations et des négations entre elles, quand elles expriment le possible et le non possible, le contingent ou le non contingent, et enfin l'impossible et le nécessaire. Ce sujet offre plus d'une difficulté.

§ 2. Dans les propositions connexes, les contradictions opposées entre elles sont celles qui se forment par le verbe être et ne pas être. Par exemple, [21b] à cette proposition : L'homme est, la négation est : L'homme n'est pas, et non point: Le non-homme est. Et la négation de celle-ci : L'homme est blanc, est : L'homme n'est pas blanc, et non point: L'homme est non blanc. En effet puisque l'affirmation ou la négation doivent être vraies de toute chose, il s'ensuivrait qu'on pourrait dire, par; exemple Le bois est l'homme non blanc. Ceci s'applique également aux cas dans lesquels ce test pas le verbe Être qui est ajouté. Le mot mis à la place fera le même„ office: par exemple, à cette proposition : L'homme marche, la négation ne sera pas : Le non-homme marche, mais bien : L'homme ne marche pas. Il n'y a, en effet, aucune différence à dire que l'homme marche, ou que l'homme est marchant. Si donc cette règle s'applique à tous les cas, la négation de Pouvoir être sera Pouvoir ne pas être et non point Ne pas pouvoir être. § 3. Mais il semble qu'une même chose petit être et ne pas être; car tout ce qui peut être coupé, tout ce qui peut marcher, peut aussi ne pas être coupé, ne pas marcher. Et la raison, c'est que tout ce qui est possible ainsi, n'est pas toujours en acte, de sorte qu'il porte aussi en soi la négation. En effet, ce qui est capable de marcher, peut fort bien aussi ne pas marcher, ce qui est visible, ne pas être vu. Toutefois il est impossible que les affirmations et les négations contradictoires soient vraies par rapport à un seul et même objet : donc la négation de Pouvoir être n'est pas Pouvoir ne pas être. § 4. Car de là il résulte, ou que l'on affirme, et que l'on nie, une même chose en même temps d'un même objet, ou bien que les énonciations ajoutées d'Etre ou de Ne pas être ne forment ni affirmation ni négation. Mais si cela ne peut être, il faut choisir l'autre parti, et dire : Donc la négation de Pouvoir être est Ne pas pouvoir être, et non pas du tout Pouvoir ne pas être. Le même raisonnements s'applique à Être contingent et sa négation N'être pas contingent. Et de même pour les autres formes, Possible et Impossible. § 5. De même que dans les autres phrases, les modifications portent sur Être et ne pas être, et que blanc et homme restent les sujets de la phrase et parce que dans celle-là Être et Ne pas être deviennent des sujets Pouvoir et Être contingent deviennent des modifications, qui déterminent pour les phrases Être possible N'être pas possible, la vérité ou l'erreur, comme Etre et ne pas être la déterminaient pour les autres. § 6. En effet, la négation de cette proposition : Possible ne pas être, n'est point : Pas possible d'être, n'est point. Pas possible de ne pas être. Et de cette autre Possible d'être, la négation n'est point :Possible de ne pas être mais bien : Pas possible d'être. Ainsi les propositions Possible d'être, possible de ne pas être, sembleraient se suivre mutuellement. La même chose, en disant être et ne pas être; car ce ne sont pas des contradictoires que Possible d'être et Possible de ne pas être.

Pas Possible d'être et Pas possible d'être, ne peuvent jamais être deux propositions vraies à la fois pour un seul et même objet; car elles sont contradictoires. De même aussi, Possible de ne pas être et Pas possible de ne pas être, ne sont jamais deux propositions vraies à la fois d'un seul et même objet.

§ 7. Pareillement la négation de Nécessaire d'être, n'est pas, Nécessaire de ne pas être, mais bien, Pas nécessaire d'être. § 8. Même raisonnement pour Impossible d'être, la négation n'est pas : Impossible de ne pas être, mais bien : Pas impossible d'être. Et de celle-ci Impossible de ne pas être, la négation est : Pas impossible de ne pas être.

§ 9. En général, je le répète, il faut regarder Être et ne pas être comme sujets, et coordonner avec Etre et ne pas être, les mots qui font la négation ou l'affirmation: et il faut regarder comme affirmations et négations opposées les suivantes: Possible, - pas possible; Contingent, - pas contingent; Impossible, - pas possible; Nécessaire, - pas nécessaire; Vrai, - pas vrai.

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  § 1. Quand elles expriment le possible, C'est ce qu'on appelle les propositions modales : les autres sont les propositions pures, ou, comme on les a appelées plus tard, catégoriques, en prenant un mot qui dans Aristote a un tout autre sens. Voir Premiers Analytiques, liv. 1, ch. 2, § 1, et la note. Les modales sont donc les propositions où l'attribut est modifié d'une manière quelconque: les propositions pures ou absolues sont celles où l'attribut est pris d'une manière absolue et sans aucune limitation. Les modales et les absolues sont les deux grandes divisions posées par Aristote dans la théorie générale du syllogisme. Voir Premiers Analytiques, liv. 1, du ch. 8 au ch. 22 inclusivement.

- Le possible et la non possible, Aristote n'énonce ici que quatre modes principaux, et il les reproduit en partie dans la théorie du syllogisme. Il y en a bien davantage, et lui-même l'indique au § 9 de ce chapitre.

 - Le possible... le contingent, Le possible est ce qui n'est pas et pourrait être ; le contingent est ce qui est et pourrait ne pas être.

§ 2. Dans les propositions connexes, Qui forment les deux parties de la contradiction totale.

- Et non point le non-homme est, C'est-à-dire que la négation se met au verbe et non point au sujet.

- Le bois est l'homme non blanc, Cette rédaction trop concise laisse la pensée un peu obscure : la voici dans son développement et sous une autre forme. On soutient que d'une chose quelconque la négation ou l'affirmation doit être vraie. Cette affirmation est fausse: Le bois est l'homme blanc. Il faudrait donc que la négation Le bois est l'homme non blanc fût vraie, si la négation s'exprimait régulièrement, comme on le prétend, en la mettant devant l'attribut et non au verbe. Or il n'en est rien : donc ce n'est point là la forme régulière de la négation, et la négation doit se mettre au verbe.

- Ceci s'applique également, Aux propositions modales, et avant les propositions modales, à celles où le verbe substantif est remplacé par tout autre verbe adjectif.

- Ou que l'homme est marchant, Et par conséquent pour la négation, qu'il n'est pas marchant, c'est-à-dire qu'il ne marche pas.

- Si donc cette règle s'applique, Ce n'est qu'une simple hypothèse; elle ne s'applique pas aux modale comme le prouvera le paragraphe suivant.

- Pouvoir ne pas être, En mettant la négation au verbe être comme pour les propositions pures, soit de secundi, soit de tertii adjecentis.

§ 3. Tout ce qui est possible ainsi, La puissance n'est qu'une aptitude aux actes contraires.

 - Toutefois il est impossible, C'est ce qui a été démontré plus haut, ch. 7, § 5 et suiv.

 - N'est pas Pouvoir na pas être, Comme on le concluait du paragraphe qui précède.

§ 4. Ou que l'on affirme et que l'on nie, Ce qui ne se peut pas, et ce que l'on fait cependant, puis qu'une même chose peut être et ne pas être, du moment qu'elle n'est que possible.

- Ne forment ni affirmation ni négation, Pour les modales.

- Et non pas du tout, Comme on l'avait dit au § 3, où la discussion n'était pas complète.

§ 5. Dans les premières phrases, Dans les propositions pures du § 2.

 - Les modifications, Le texte dit : additions.

- Etre et ne pas être deviennent des sujets, C'est la toute la différence des modules aux absolues.

- Être et ne pas être avec ce qui y est joint est le dictum, pour prendre le langage des Scholastiques; possible, impossible, etc. est le mode, et c'est au mode qu'il faut mettre la négation on l'affirmation.

 - Etre possible, n'être pas possible, La négation ou l'affirmation jointe au mode.

§ 6. Possible de ne pas être, J'ai gardé cette forme qui est proche davantage du texte.

§ 7. D'être nécessaire, Même pour les modales du nécessaire pour les modales du possible.

 - Pas nécessaire d'être, Ou si l'on veut : Il n'est pas nécessaire que ce soit.

§ 8. Même raisonnement, Pour des modales d'impossible.

§ 9. En général, Règle générale de la contradiction des modales.

- Vrai, pas vrai, Aristote ne borne donc pas les modales aux quatre formes énoncées au § 1. Ces quatre formes sont les principales et jusqu'à un certain point comprennent toutes les autres, mais le nombre des modales est infini comme celui des mots eux-mêmes par lesquels on pout les exprimer. Voir M. Hamilton, p. 227, trad. de M. Peisse.

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