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table des matières de l'œuvre d'Aristote

 

table des matières dU TRAITE DU CIEL

 

 

 

 

ARISTOTE

 

 

TRAITE DU CIEL

 

LIVRE DEUX

 

 

préface - livre I - livre III - livre IV

texte grec

 

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TRAITÉ DU CIEL.

LIVRE II.

CHAPITRE PREMIER.

Conformité des théories précédentes avec les traditions les plus antiques et les plus vénérables ; croyances unanimes de l'humanité, qui regarde le ciel comme le séjour des Dieux. Le ciel n'a pas besoin d'un Atlas pour le soutenir, ni d'une âme qui y maintienne l'ordre et la régularité: erreurs d'Empédocle. Le mouvement dont le ciel est doué doit être aussi facile que durable; il ne peut être le résultat d'aucune violence ni d'aucune force contre nature. Accord de ces théories avec la religion vulgaire.

§ 1. On peut donc, d'après tout ce qui précède, voir clairement que l'ensemble du ciel n'a pas été créé, qu'il ne peut pas davantage périr, comme le disent quelques philosophes, mais qu'il est un et éternel, et qu'il n'a ni commencement ni fin, durant toute l'éternité. C'est là une conviction certaine que l'on peut tirer, et de ce que nous avons dit ici, et des opinions, mêmes de ceux qui soutiennent un système différent, et qui supposent que le ciel a été créé. En effet si les choses peuvent être telles que nous les expliquons, et si elles ne peuvent pas être de la manière que ces philosophes l'indiquent, ce serait déjà là une bien grande présomption [284b] en faveur de l'immortalité et de l'éternité du ciel.

§ 2. Aussi est-il bon de se persuader que les traditions antiques, et surtout celles que nous avons reçues de nos pères, sont d'une incontestable vérité, quand elles nous apprennent qu'il y a quelque chose d'immortel et de divin, dans les choses qui ont le mouvement, mais qui l'ont de manière à ce que ce mouvement lui-même n'ait jamais de limite, et qu'il soit au contraire la limite de tout le reste. En effet, la limite est une de ces choses qui enveloppent les autres choses. Or comme le mouvement circulaire est parfait en lui-même, il enveloppe tous les mouvements incomplets qui ont une limite et un point d'arrêt, n'ayant lui-même ni commencement ni fin, et étant sans interruption ni repos, durant l'éternité tout entière. Il est pour les autres mouvements le principe d'où ils tirent leur origine, ou bien la fin dans laquelle ils s'arrêtent et cessent. Aussi les anciens ont-ils attribué aux Dieux le ciel et le lieu supérieur, comme étant le seul lieu qui soit éternel.

§ 3. La présente étude sera une preuve de plus que le ciel est impérissable, qu'il est incréé et qu'il est à l'abri de toute atteinte et de toute perturbation mortelle. Il faut ajouter que le ciel ne connaît pas de fatigue, parce qu'il n'est pas besoin qu'en dehors de lui, une nécessité violente le contraigne et lui imprime un mouvement contraire à celui qu'il aurait naturellement ; car tout mouvement contre nature est d'autant plus pénible et fatigant qu'il est plus durable, et qu'il n'est pas conforme à la meilleure disposition possible.

§ 4.  Voilà pourquoi il ne faut pas croire à cette vieille fable qui prétend que le monde, pour se conserver tel qu'il est, et en dehors de ses lois régulières, a besoin. de quelque Atlas. Ceux qui ont jadis imaginé cette idée étrange me semblent avoir eu des conceptions tout aussi fausses que ceux qui, venus plus tard, ont imaginé, non moins fabuleusement, qu'il y avait dans le monde une nécessité intérieure qui lui donnait la vie, de même qu'on l'imagine pour les corps de l'espace supérieure, quand on les suppose pesants et terrestres.

§ 5. Il ne faut pas plus admettre aveuglément ces hypothèses qu'on ne doit admettre que le monde ne se maintient, et ne dure depuis si longtemps, que parce qu'il reçoit, par la rotation qui lui est propre, un mouvement plus rapide que sa tendance à descendre, ainsi que le veut Empédocle.

§ 6. Il ne serait pas non plus rationnel de croire que le ciel ne demeure éternellement ce qu'il est que par l'action d'une âme qui l'y force nécessairement. L'âme ne pourrait pas avoir à ces conditions une existence tranquille et fortunée ; et dès l'instant que le mouvement s'accomplit avec violence, en emportant le corps qui aurait primitivement un autre mouvement naturel, et en l'emportant continuellement, il faut nécessairement que ce mouvement soit sans cesse agité, et qu'il n'ait rien de cette facilité que donne l'intelligence. Il n'y a pas pour cette âme, comme pour l'âme des animaux mortels, un repos, lequel est le délassement du corps dans le sommeil ; et il faut alors qu'il y ait dans le monde une âme éternelle et infatigable, qui subisse en quelque sorte la destinée d'un Ixion. Si donc, je le répète, [285a] il en peut être du mouvement primitif, ainsi que nous l'avons dit, non seulement il est plus sage de s'en tenir à l'opinion exprimée par nous par rapport à son éternité ; mais, en outre, c'est pour nous l'unique moyen de pouvoir exposer des théories qui soient en plein accord avec ce que la divination nous apprend de Dieu. Mais, ce que nous venons de dire ici sur un tel sujet, c'en doit être assez.




 

Livre II, Ch. 1, § 1. D'après tout ce qui précède, Simplicius regarde ce premier chapitre du second livre comme un simple résumé des théories du premier livre.

 -- L'ensemble du ciel n'a pas été créé, Alexandre d'Aphrodisée veut que par le Ciel on entende ici l'Univers. En effet, certaines parties du Ciel, en tant que le ciel renferme tous les êtres, sont créées, et elles sont périssables ; mais le tout n'est ni périssable ni créé.

Quelques philosophes, Simplicius semble croire que ceci s'applique à Empédocle et à Héraclite. Mais ces deux philosophes ont plutôt soutenu la transformation successive du monde que sa création proprement dite. L'idée vraie de la création se retrouverait davantage dans le Timée de Platon.

-- Qu'il n'a ni commencement ni fin, ces théories sont assez d'accord avec celles du VIIIe livre de la Physique, bien que ces dernières s'appliquent surtout à l'éternité du mouvement; mais l'éternité du mouvement suppose nécessairement l'éternité du monde.

De l'immortalité, c'est la traduction exacte de l'expression grecque.

§ 2. Celles que nous avons reçues de nos pères, cette pensée semble assez singulière dans la bouche d'Aristote; mais il faut se rappeler qu'il a toujours tenu le plus grand compte des opinions communes, de même qu'il a toujours discuté les théories de ses prédécesseurs, avant d'exposer les siennes.

Quelque chose d'immortel et de divin, cette dernière idée ne se comprend pas bien; et si Dieu est dans les choses, il les a précédées et il les a faites. Sur ce point essentiel, le système d'Aristote n'a pas toute la netteté désirable; et il semble qu'ici il s'accommode au langage vulgaire, plutôt qu'il n'exprime des sentiments qui lui soient propres.

Ce mouvement lui-même n'ait jamais de limite, voir le VIIIe livre de la Physique, sur l'éternité du monde, qui comprend aussi son infinité.

Le mouvement circulaire, voir la théorie du mouvement circulaire dans la Physique, chapp. 12 et suiv., pages 529 et suivantes de ma traduction.

Ni commencement ni fin, tout ceci est pleinement d'accord avec les principes développés dans la Physique, loc. cit.

-- Ni interruption ni repos, il n'y a qu'un seul mot dans le texte grec.

Ils s'arrêtent et cessent, même remarque.

Aussi les anciens, voir plus haut, livre I, ch. 3, § 6, les mêmes idées développées davantage.

§ 3. La présente étude, aussi bien celle qui précède que celle qui suit.

-- De toute atteinte et de toute perturbation, il n'y a qu'un seul mot dans le texte grec.

Ne connaît pas de fatigue, c'est-à-dire que le système du monde est éternellement immuable. L'expression dont se sert ici Aristote peut paraître assez singulière.

En dehors de lui, j'ai dû ajouter ceci pour rendre toute la force de l'expression grecque.

Tout mouvement contre nature, voir la Physique, livre IV, ch. II, § 7, page 202 de ma traduction ; et livre VIII, ch. 4, § 4, page 481.

§ 4. A cette vieille fable, ceci semble un peu contredire ce qui vient d'être dit plus haut, § 2, du respect qu'on doit aux traditions.

Tel qu'il est et en dehors de ses lois régulières, j'ai dû développer un peu ceci pour rendre toute la force des mots dont Aristote se sert.

De quelque Atlas, Simplicius fait remonter cette tradition à Homère ; mais il est peu probable que ce soit Homère qui l'ait inventée. Aristote repousse encore cette fable d'Atlas dans le Traité du mouvement dans les animaux, ch. 3, § 5, page 245 de ma traduction

Dans le monde, il semble, par toute la contexture des idées, que le Monde ici doit s'entendre de la terre et des éléments qui forment son atmosphère.

Quand on les suppose pesants et terrestres, Aristote ne s'est jamais expliqué directement sur la nature qu'il suppose aux grands corps célestes. Dans la Métaphysique, livre XII, ch. 8, page 203, traduction de M. V. Cousin, Aristote croit qu'il y a autant d'essences éternelles qu'il y a de corps célestes et d'astres dans l'espace ; mais il ne dit pas quelle est la nature propre de ces corps. Ici il ne semble pas croire que ces corps soient composés comme notre globe.

§ 5. Ainsi que le veut Empédocle, d'après Simplicius, cette opinion d'Empédocle serait aussi celle d'Anaxagore et de Démocrite, qui d'ailleurs admettaient l'immobilité de la terre. La théorie que critique Aristote se rapproche de la vérité plus que la sienne ; et Empédocle était dans la voie où la science moderne a découvert le système du monde. Tous les corps de l'espace ont ce double mouvement de rotation et de pesanteur. C'est la combinaison des deux forces centripète et centrifuge qui les maintient dans leur orbite, grâce à l'impulsion primitive que leur a imprimée le créateur.

§ 6. Non plus, c'est un second argument. Le premier s'applique au monde, qui n'aurait pu, selon Aristote, subsister si longtemps dans les conditions que suppose Empédocle; le second s'applique à l'âme, qui est censée régir l'univers.

Par l'action d'une âme qui l'y force, Simplicius pense que ceci se rapporte aux théories de Platon sur l'âme qui régit le monde, Lois, livre x, pages 248 à 251 de la traduction de M. V. Cousin.

-- Une existence tranquille et fortunée, que nécessairement ou suppose toujours à la divinité.

-- D'un Ixion, livré sans cesse à des efforts qu'il faut perpétuellement renouveler.

-- Ainsi que nous l'avons dit, soit dans tout ce qui précède, soit dans le VIIIe livre de la Physique, consacré à établir la théorie de l'éternité du mouvement.

-- La divination, Simpiicius veut qu'on entende par là l'opinion commune qu'on se fait du bonheur inaltérable et du calme éternel des Dieux.

C'en doit être assez, il semble qu'Aristote trouve ce sujet trop délicat, et qu'il a hâte de le quitter.

 

CHAPITRE II.

De la droite et de la gauche du monde; théories des Pythagoriciens; citation du Traité du mouvement des animaux; les trois dimensions, le haut et le bas, la droite et la gauche, le devant et le derrière; détermination de ces notions; leurs relations à nous et à nos organes. Critique de la théorie des Pythagoriciens, qui n'ont tenu compte que de la droite et de la gauche, et qui ont omis les autres principes. Le haut du monde est le pôle que nous ne voyons pas ; le bas est le pôle qui est au-dessus de nos têtes ; la droite est le point où se lèvent les astres autres que les planètes; la gauche est le point où ils se couchent. Le pôle invisible est à droite; le nôtre est à gauche ; renversement de ces positions par rapport aux planètes.

§ 1. Comme il y a des philosophes qui prétendent que le ciel a une droite et une gauche, et c'est là une opinion de ceux qu'on nomme Pythagoriciens, il faut examiner s'il en est bien ainsi qu'ils le disent, ou si plutôt il n'en est pas tout autrement, quand il s'agit d'appliquer ces principes au corps entier de l'univers. Et, tout d'abord, s'il y a, en effet, une droite et une gauche pour l'univers, il faut aussi supposer antérieurement en lui les principes qui sont antérieurs à ceux-là. Nous avons discuté déjà ces questions dans nos Théories sur les mouvements des animaux, parce que ce sont là des principes qui se rapportent particulièrement à leur nature. C'est, qu'en effet, l'existence de ces principes se montre avec toute évidence dans les animaux. Les uns ont tous ces principes sans exception ; je veux dire, par exemple, la droite et la gauche, etc. ; d'autres n'en ont que quelques-uns, tandis que les plantes n'ont uniquement que le haut et le bas.

§ 2. Mais, s'il convient aussi d'appliquer au ciel des notions de ce genre, il est rationnel de supposer que le principe primitif que nous avons trouvé dans les animaux, se retrouve aussi dans le monde. En ceci, il y a trois choses, dont chacune peut être considérée comme un principe. Ces trois choses sont les suivantes : le haut et le bas, le devant et le derrière, la droite et la gauche ; et ces dimensions doivent se retrouver naturellement, toutes sans exception, dans les corps complets. Le haut est le principe de la longueur ; la droite est le principe de la largeur ; et le devant le principe de la profondeur. J'ajoute encore une autre considération, et c'est celle des mouvements ; car j'appelle principes des mouvements les points d'où les mouvements partent et commencent primitivement, pour les êtres qui en sont doués. Par exemple, c'est d'en haut que vient le mouvement d'accroissement ; c'est de la droite que vient le mouvement dans l'espace ; et c'est de devant que vient le mouvement de nos sens; car j'entends par le devant l'endroit où les sens sont placés.

§ 3. Ainsi donc, il ne faudrait pas vouloir trouver dans tout corps quelconque le haut et le bas, la droite et la gauche, le devant et le derrière. Ces directions sont distinctes seulement dans les corps animés, qui ont en eux le principe du mouvement; car, dans aucun des corps inanimés, nous ne pourrions voir d'où leur vient le principe du mouvement. Il y a, en effet, des choses qui ne se meuvent pas du tout; d'autres qui se meuvent, mais non pas indifféremment en tous sens ; c'est ainsi que le feu ne va qu'en haut, et que la terre se dirige uniquement vers le centre.

§ 4. [285b] Si, cependant même dans ces choses inanimées, nous distinguons encore le haut et le bas, la droite et la gauche, c'est toujours en les rapportant à nous-mêmes. Ainsi, c'est tantôt relativement à notre droite personnelle, comme font les devins; tantôt t'est d'après la ressemblance à nos propres organes, comme on dit la droite et la gauche d'une statue ; ou bien, enfin, on désigne ainsi les choses qui ont une position contraire à la nôtre, leur droite se rapportant à notre gauche, leur gauche étant au contraire notre droite, et leur derrière étant opposé à notre devant. Dans tout cela, nous ne voyons d'ailleurs aucune différence réelle ; car, pour peu que l'on se trouve en sens inverse, ce seront les contraires que nous appellerons droite et gauche, haut et bas, devant et derrière.

§ 5. Aussi pourrait-on s'étonner, à bon droit, que les Pythagoriciens n'aient parlé que de deux principes, la droite et la gauche, et qu'ils aient négligé les quatre autres, qui n'ont pas moins d'importance. En effet le bas et le haut, le devant et le derrière, n'offrent pas moins de différences entr'eux, que n'en offre la droite par rapport à la gauche dans tous les animaux. C'est que, de tous ces principes les uns ne diffèrent entr'eux que par leur puissance ; les autres diffèrent en outre par leurs formes. Ainsi, le haut et le bas se retrouvent d'une façon identique dans tous les êtres doués de vie, les animaux et les plantes; mais les plantes n'ont pas de droite ni de gauche.

§ 6. De plus, comme la longueur est antérieure à la largeur, si le haut est, ainsi que nous l'avons dit, le principe de la longueur, et la droite le principe de la largeur ; et comme le principe d'une chose antérieure doit être antérieur également, il s'ensuit que le haut doit être antérieur à la droite, sous le rapport de la génération. Le mot d'Antérieur peut, comme on sait, se prendre dans plusieurs sens. Enfin, si le haut est le lieu d'où vient le mouvement, si la droite est l'endroit d'où il part, et le devant le lieu où il va, il s'ensuit qu'en ce sens encore, le haut pourrait avoir, en quelque sorte, la puissance d'un principe relativement aux autres notions qu'il précède. En résumé, on peut justement reprocher aux Pythagoriciens d'avoir laissé de côté des principes plus importants que ceux qu'ils adoptent, et d'avoir cru que les principes adoptés par eux se retrouvaient également en tout.

§ 7. Mais quant à nous, comme nous avons établi antérieurement que ces possibilités n'existent que dans les êtres qui ont en eux le principe du mouvement, et que le ciel, étant animé comme il l'est, possède le principe du mouvement en lui-même, il en résulte évidemment qu'il a un haut et un bas, une droite et une gauche. Il ne faut pas, parce que la forme de l'univers est sphérique, refuser de croire qu'il ait une droite et une gauche, attendu que toutes ses parties [286a] doivent être absolument semblables et en mouvement durant l'éternité; mais il faut penser au contraire que les choses se passent en ceci comme elles se passeraient si, dans les êtres où il y a réellement une différence même de formes, entre la droite et la gauche, on venait ajouter une sphère qui les envelopperait. La droite et la gauche garderaient toujours une puissance différente ; mais il n'y paraîtrait pas à cause de la ressemblance de la forme. De même encore pour le principe du mouvement; car, quoique le mouvement n'ait jamais commencé, il n'en faut pas moins, cependant, qu'il ait un principe d'où il pourrait partir, si l'univers, mis en mouvement, commençait jamais à se mouvoir, et d'où le mouvement pourrait recommencer de nouveau, s'il venait, par hasard, à s'arrêter jamais.

§ 8. J'entends par la longueur de l'univers, la distance qui sépare les pôles ; et j'ajoute que des deux pôles l'un est en haut, et l'autre, en bas. En effet la différence que nous voyons dans ces seuls points des hémisphères, c'est que les pôles ne sont jamais en mouvement. On peut remarquer aussi que même le langage ordinaire indique pour les côtés du monde, non pas le haut ni le bas, mais les parties qui environnent les pôles, comme si les pôles étaient le sens véritable de sa longueur; et ce qu'on prend pour le côté est précisément ce qui environne le haut et le bas du monde.

§ 9. Des deux pôles, celui qui est visible au-dessus de nous est la partie inférieure, tandis que celui que nous ne voyons pas est la partie supérieure de l'univers. C'est qu'en effet nous appelons la droite, pour chaque chose, le point d'où part le mouvement de translation dans l'espace. Le principe de la circonvolution du ciel étant le point où se lèvent les astres, c'est là aussi la droite; et la gauche est le point où les astres se couchent. Si donc les astres commencent à se lever à droite, et s'ils se dirigent dans leur circonvolution vers la gauche, il faut nécessairement que le pôle invisible soit le haut; car si c'était le pôle que nous voyons, ce mouvement serait dirigé à gauche ; ce que nous nions absolument.

§ 10. Il est donc certain que le pôle qui est invisible pour nous est le haut du ciel ; ceux qui y habitent sont dans l'hémisphère supérieur, et à droite, tandis que nous, nous sommes en bas et à gauche, contrairement à ce que disent les Pythagoriciens ; il nous placent en haut et dans la partie droite, tandis que les autres sont en bas et dans la partie gauche. Or, c'est tout le contraire. Mais par rapport à la seconde circonvolution, qui est celle des planètes, par exemple, nous sommes en haut et à droite, tandis que les habitants de l'autre pôle sont en bas et à gauche. C'est qu'en effet, pour ces corps secondaires, le principe du mouvement est placé à l'inverse, puisque leurs déplacements sont contraires ; et, par conséquent, nous sommes au commencement de cette révolution, et les autres sont à la fin. Voilà ce que nous avions à dire [286b] sur les parties du ciel, relativement aux dimensions, et sur les divisions de l'espace.











 

Ch. II, § 1. De ceux qu'on nomme Pythagoriciens, c'est la formule habituelle qu'Aristote emploie en parlant des Pythagoriciens; voir spécialement la Métaphysique, livre I, ch. 4, page 142 de la traduction de M. V. Cousin. Dans la liste des séries doubles des Pythagoriciens, le droit et le gauche occupent le quatrième rang ; Ibid., page 144.

Au corps entier de l'univers, il ne parait pas que les Pythagoriciens, du moins d'après la Métaphysique, aient fait cette application spéciale.

-- Les principes qui sont antérieurs à ceux-là, ces principes antérieurs sont, comme la suite le prouve, le haut et le bas, le devant et le derrière.

-- Sur les mouvements des animaux, voir le Traité sur le mouvement dans les animaux, ch. 9, § 1, page 269 de ma traduction.

-- La droite et la gauche, le texte ne dit pas davantage ; j'ai ajouté l'etc., parce qu'en effet, comme le dit Simplicius, il faut sous-entendre les deux autres couples, le bas et le haut, le devant et le derrière.

-- D'autres n'en ont que quelques-uns, ceci n'est pas très clair. Simplicius pense qu'Aristote veut désigner ici les zoophytes.

§ 2. Le devant et le derrière, le texte dit simplement : « le devant et l'opposé. »

--  Dans les corps complets, la suite prouve qu'il faut entendre par là les corps vivants et animés.

Le haut est le principe de la longueur, il aurait mieux valu dire : « De la profondeur. »

Le devant est le principe de la profondeur, cela ne se comprend pas bien; et le devant serait plutôt le principe de la longueur. Mais ceci n'a presqu'aucune importance.

Qui en sont doués, tous les êtres n'ont pu toutes les espèces de mouvements; les plantes, par exemple, n'ont que les mouvements d'accroissement et d'altération. -

- C'est d'en haut que vient le mouvement d'accroissement, il vaudrait mieux dire : « D'en bas, » au lieu « D'en haut. » Mais Aristote ne prend qu'un seul terme dans chacune des doubles séries.

-- Le mouvement de nos sens, j'ai conservé l'indécision et l'obscurité du texte. Ce troisième genre de mouvement devrait être l'altération, comme dans la Physique, livre V, ch. 3, §§ t et suiv., page 287 de ma traduction, et passlrn.

-- L'endroit où les sens sont placés, Simplicius n'a donné aucune explication de ce passage, qui cependant n'est pas assez clair.

§ 3. Dans tout corps quelconque, soit animé, soit inanimé. Qui ont en eux le principe du mouvement, c'est là le caractère propre qui fait qu'on les appelle Animés.

-- D'où leur vient le principe du mouvement, comme ils sont inanimés, le principe leur vient toujours du dehors, ne serait-ce que le mouvement déterminé. par l'action de la pesanteur.

Des choses qui ne se meuvent pas du tout, Aristote ne désigne pas spécialement des êtres de ce genre, dans ce qui suit.

La terre se dirige uniquement vers le centre, c'est-à-dire qu'une motte de terre, par exemple, abandonnée à elle-même tombe et se dirige vers le centre du globe. C'est Simplicius, qui cite cet exemple.

§ 4. Dans ces choses inanimées, j'ai ajouté ce dernier mot pour être plus clair.

Comme font les devins, qui disent que l'augure est à droite, parce qu'il est à la droite de la personne qui parle, c'est-à-dire d'eux-mêmes.

La ressemblance à nos propres organes, le texte n'est pas tout à fait aussi précis.

-- Une position contraire à la nôtre, Simplicius cite, pour exemple, les images qui se produisent dans les miroirs quand on s'y regarde, et dont les côtés, droite ou gauche, sont en effet renversés par rapport à nous.

--- Pour peu que l'on se tourne en  sens inverse, ceci est la conséquence de ce qui a été dit plus haut, à savoir que nous ne déterminons ces positions qu'en les rapportant à nous-mêmes.

§ 5. Les quatre autres, le haut et le bas, le devant et le derrière.

-- Par leur puissance, Simplicius entend ce passage en ce sens que, dans l'homme, par exemple, la main droite diffère de la main gauche en ce qu'elle est plus forte, quoiqu'elle ait la même forme.

-- Par leurs formes, ainsi la tète, qui est le haut, n'a pas la même forme que les pieds, qui représentent le bas.

§ 6. De plus, autre argument contre les Pythagoriciens : ils n'ont pas bien choisi leurs principes, et ils ont négligé d'autres principes qui, génériquement, sont antérieurs à ceux qu'ils adoptent.

-- Ainsi que nous l'avons dit, j'ai ajouté cette phrase incidente, dont le sens est compris implicitement dans le texte. Voir plus haut, § 2.

Le moi d'Antérieur, voir les différentes acceptions de ce mot dans les Catégories, ch. 12, page 123 de ma traduction.

-- Enfin, le texte dit précisément : « En outre ; » mais c'est là le dernier argument qu'Aristote oppose à la théorie des Pythagoriciens; et j'ai cru devoir l'indiquer par cette nuance de la traduction.

Les autres notions, dans le texte il y a Idées; j'ai préféré le mot de notions pour laisser celui d'Idées au Platonisme.

Que ceux qu'ils adoptent, j'ai ajouté ces mots pour plus de clarté.

§ 7. Antérieurement, peut-être dans le Traité du mouvement des animaux, chapp. X et suiv., pages 271 et suiv. de ma traduction.

-- Cet possibilités, ou « Ces puissances. »

Le principe du mouvement, de locomotion dans l'espace; ce sont les animaux proprement dits.

Étant animé comme il l'est, cette théorie mériterait d'être plus développée ; voir le XIle livre de la Métaphysique, ch. VIII, page 203 de la traduction de M. V. Cousin. Mais Aristote fait le Ciel animé, parce qu'il possède en lui-même le principe du mouvement, comme les animaux qui se meuvent eux-mêmes dans l'espace.

Un haut et un bas, une droite et une gauche, et, par une suite nécessaire, un devant et un derrière, comme les animaux. La forme de l'univers est sphérique, toutes ces idées sont à peu près celles du Timée de Platon, pages 123 et suiv. de la traduction de M. V. Cousin. On venait ajouter une sphère qui les envelopperait, j'ai ajouté ces trois derniers mois pour rendre toute la force du contexte. L'idée d'ailleurs est assez singulière, sans être obscure.

La droite et la gauche, le texte est tout à fait indéterminé. J'ai cru devoir le préciser.

-- De la ressemblance de la forme, le tout étant sphérique, toutes les parties extérieures se ressemblent et se confondent, bien qu'à l'intérieur, les parties puissent différer beaucoup entr'elles.

-- Quoique le mouvement n'ait jamais commencé, voir le V Ille livre de la Physique, sur l'éternité du mouvement, page 453 de ma traduction.

-- Qu'il y ait un principe, tout intérieur selon Aristote, et qui serait en quelque sorte comme l'âme dans les animaux, invisible, répandue partout, et donnant au corps entier le mouvement qu'elle porte en elle-même.

§ 8. Par la longueur de l'univers, le texte n'est pas tout à fait aussi précis.

Qui sépare les pôles, cette définition pourrait s'appliquer également à notre terre.

L'un est en haut, et l'autre en bas, ces distinctions ne sont jamais que relatives à. nous. Mais Aristote semble ici les croire absolues.

Les côtés du monde, le texte dit précisément : « Les parties obliques. » Simplicius y substitue le mot de Côtés, que j'ai cru devoir adopter dans ma traduction.

§ 9. Celui qui est visible.... est la partie inférieure, Simplicius remarque, avec raison, que cette théorie est absolument contraire à l'opinion commune; il en fait grand honneur à Aristote ; mais on ne voit pas que l'explication qui est donnée plus bas à l'appui de cette théorie, soit très satisfaisante. Le haut et le bas ne sont relatifs qu'à nous, et l'on ne peut faire réellement ces distinctions pour l'univers, qui n'a pas non plus de droite ni de gauche. — Nous appelons la droite, voir plus haut, § 6.

De la circonvolution du ciel, telle que nous la voyons dans notre hémisphère.

C'est là aussi la droite, Simplicius prétend que la droite doit être considérée comme le point de départ du mouvement, parce que les animaux, quand ils veulent courir, avancent toujours le pied droit. La raison n'est pas très sérieuse. Il est étonnant qu'au sixième siècle, les notions d'astronomie ne fussent pas plus précises.

Commencent à se lever à droite, du moment qu'on reconnaît une droite et une gauche, on est amené à reconnaître aussi un haut et un bas. Mais Aristote ne va pas plus loin, et il ne parle pas d'un devant et d'un derrière pour le Ciel. Saint Thomas l'excuse, en disant qu'il a omis ces détails, parce qu'ils sont trop évidents, et que le devant du Ciel est l'hémisphère supérieur, tandis que le derrière est l'hémisphère inférieur. Pour mieux expliquer tout ceci, saint Thomas suppose une figure humaine dont la tête est placée dans le pôle antarctique, et les pieds dans le pôle arctique.

§ 10. Il est donc certain, on peut trouver que cette conclusion n'est que très imparfaitement justifiée par tout ce qui précède.

--- Et à droite, l'expression est bien vague.

-- Les Pythagoriciens, voir plus haut, § 1.

Or, c'est tout le contraire, la théorie d'Aristote n'est pas plus démontrée que celle qu'il réfute. Mais c'était déjà beaucoup, de son temps, que d'élever de pareilles discussions.

A la seconde circonvolution qui est celle des planètes, les planètes, en effet, paraissent avoir un mouvement contraire au reste du Ciel; et c'est ce qu'Aristote appelle la seconde circonvolution, allant en sens opposé à celle des astres ou étoiles fixes.

-- Pour ces corps secondaires, le texte est beaucoup moins précis; et l'expression dont il se sert est tout indéterminée.

Au commencement de cette révolution, j'ai ajouté ces trois derniers mots, pour plus de précision.

-- Les parties du Ciel, le texte dit simplement : « Les parties. »

-- Les divisions de l'espace, le haut et le bu, la droite et la gauche, le devant et le derrière.

CHAPITRE III.

Difficulté des théories sur l'origine des choses. Éternité de Dieu et du mouvement qu'il donne au monde. Toutes les parties du ciel sont éternellement mobiles. Il n'y a que la terre qui puisse être au centre et en repos. Nécessité d'admettre cette première hypothèse. L'existence de la terre entrai ne celle du feu, son contraire, et celle de tous les autres éléments. Les éléments ont été nécessairement créés; et il sont subordonnés entr'eux.

§ 1. Comme le mouvement circulaire ne peut pas être contraire au mouvement circulaire, nous avons à examiner pourquoi, dans les corps célestes, il y a plusieurs révolutions, bien que cette recherche ne puisse jamais être faite par nous que de bien loin. Quand je dis de bien loin, je n'entends pas parler simplement de l'éloignement des lieux. Mais j'attribue bien plutôt la difficulté de cette étude à l'insuffisance de nos sens, qui ne peuvent nous révéler que très imparfaitement les conditions de ces phénomènes. Parlons-en cependant comme nous le pourrons, et voici le moyen d'arriver à comprendre la cause d'où ils proviennent.

Toute chose qui produit un certain acte est faite en vue de cet acte ; or l'acte de Dieu, c'est l'immortalité ; en d'autres termes, c'est une existence éternelle; donc il faut nécessairement que le Divin ait un mouvement éternel. Mais le ciel a cette qualité, puisqu'il est un corps divin ; et voilà pourquoi il a la forme sphérique, qui, par sa nature, se meut éternellement en cercle. Or comment se fait-il que le corps entier du ciel ne soit point ainsi en mouvement ? C'est qu'il faut nécessairement qu'une partie du corps qui se meut circulairement, reste en place et en repos ; et c'est la partie qui est au centre. Dans le ciel, il n'est pas possible qu'aucune partie demeure immobile, ni nulle part, ni au, centre ; car alors son mouvement naturel serait vers le centre ; et comme son mouvement naturel est circulaire, le mouvement, dès lors, ne serait plus éternel. Mais rien de ce qui est contre nature ne peut durer éternellement. Or, ce qui est contre la nature est postérieur à ce qui est selon la nature; et dans l'ordre de génération, ce qui est contre la nature n'est qu'une déviation de ce qui est naturel.

§ 2. Il faut donc nécessairement que la terre soit au centre, et qu'elle y demeure en repos; permettons-nous de poser ici cette hypothèse, en nous réservant d'en reparler plus tard. Mais si la terre existe, il faut nécessairement que le feu existe aussi ; car du moment que l'un des contraires existe naturellement, il faut que l'autre contraire existe aussi par les lois de la nature, si c'est un vrai contraire et qu'il y ait une nature pour le second comme pour le premier ; car les contraires ont une matière identique. En outre, l'affirmation est antérieure à la privation ; et, je veux dire, par exemple, que le chaud est antérieur au froid. Or, le repos et la pesanteur ne se comprennent que comme privation de la légèreté et du mouvement.

§ 3. Mais s'il y a de la terre et du feu, il faut nécessairement aussi que tous les corps intermédiaires entre ces deux là existent ainsi qu'eux ; car chacun des éléments doit avoir son contraire, qui lui est opposé. Admettons ici encore cette hypothèse, qu'on essayera également de démontrer plus tard. Mais ces éléments existant, il faut de toute nécessité qu'ils soient créés, parce qu'aucun d'eux ne peut être éternel, les contraires agissant et souffrant mutuellement les uns par les autres, et se détruisant réciproquement.

§ 4. On ne peut non plus rationnellement admettre qu'un mobile soit éternel, quand le mouvement de ce même mobile ne peut pas être naturellement éternel comme lui; [287a] et ces corps, que nous venons de nommer, sont doués de mouvement. On voit donc clairement d'après cela, la nécessité du mouvement de génération ; et du moment que la génération existe, il faut aussi qu'il y ait un autre genre de mouvement, soit un, soit plusieurs ; car il faut nécessairement que les éléments des corps aient, les uns par rapport aux autres, le même mouvement dont le tout est animé. On éclaircira, du reste, ce point, dans ce qui va suivre.

§ 5. Pour le moment, nous voyons évidemment par quelle cause, les corps soumis à un mouvement circulaire, sont plus d'un. C'est qu'il faut nécessairement qu'il y ait génération, et il y a génération parce qu'il y a du feu ; et le feu existe, ainsi que les autres éléments, parce que la terre existe aussi ; enfin la terre existe elle-même, parce qu'il faut un corps qui reste éternellement en repos, puisqu'il doit y avoir un mouvement éternel.




 

Ch. III, § 1. Ne peut pas dire contraire au mouvement circulaire, voir la Physique, livre VIII, ch. 12, § 41, page 547 de ma traduction.

Dans les corps célestes, j'ai ajouté ces mots, qui me semblent justifiés par tout ce qui suit, et qui sont nécessaires pour la clarté de la pensée.

-- Mais j'attribue la difficulté de cette étude, le texte est moins explicite que ma traduction.

Comme nous le pourrons, j'ai ajouté ces mots, pour rendre toute la force de l'expression grecque.

Est faite en vue de cet acte, voir la Morale à Nicomaque, livre I, ch. 1, § 5, page 3 de ma traduction, et ch. 4, § 10, page 28.

--- L'acte de Dieu, c'est l'immortalité, il faut entendre ici Immortalité, dans le sens d'Éternité.

Le Divin, l'expression du texte est aussi générale et indéterminée.

La forme sphérique, le texte dit le « Corps sphérique » j'ai voulu éviter la répétition, qui pouvait nuire à la clarté. La forme sphérique se confond, d'ailleurs, ici avec la forme circulaire ; car le mouvement circulaire est le seul qui, selon Aristote, puisse être éternel; voir la Physique, livre VIII, ch. 12.

Le corps entier du ciel, ceci comprend le ciel d'abord, et ensuite la terre. La terre étant immobile, il y a une partie du ciel qui n'est pas en mouvement. Mais ici le Ciel serait mieux appelé l'univers.

Il faut nécessairement, ceci a été démontré plus explicitement dans le Traité du mouvement des animaux, chapitres 3 et 4, pages 244 et suiv. de ma traduction. -

- Du corps qui se meut circulairement, c'est l'univers.

C'est la partie qui est au centre, c'est-à-dire, la Terre.

-- Dans le ciel, qui alors ne comprend pu la terre, laquelle est immobile.

Car alors son mouvement naturel, cet argument ne parait ni très fort, ni suffisamment développé.

-- Le mouvement dès lors ne serait plus éternel, parce que le mouvement en ligne droite est toujours déterminé et fini; voir la Physique, livre Vlll, ch. 12, § 4, page 530 de ma traduction.

-- Ne peut pas durer éternellement, voir la Physique, livre V, ch. 9, § i, et livre VIII, ch. 4, § 2. C'est un très grand principe, qui s'accorde parfaitement avec la réfutation qua faite Aristote de la théorie du hasard ; voir encore la Physique, livre Il, chapitres 4, 5 et 6, pages 29 et suiv.; et surtout ch. 6, § 42, page 46 de ma traduction.

§ 2. Il faut donc nécessairement, cette conclusion ne parait pas ressortir très directement de ce qui précède.

D'en reparler plus tard, voir plus loin, à la fin de ce livre, chap. 8, et spécialement ch. 13.

-- Si la terre existe, la terre représentant l'immobilité et la pesanteur.

Le feu existe aussi, le feu représentant la légèreté et le mouvement.

Si c'est un vrai contraire, le texte n'est pas tout à fait aussi précis.

-- Pour le second comme pour le premier, même remarque. On peut voir dans tout ce passage un abus frappant de la logique introduite dans la physique. Pour se convaincre de l'existence de la terre et du feu, il n'y avait qu'à en appeler au témoignage des sens; voir les Catégories, ch. 11, page 121 de ma traduction. La théorie développée dans les Catégories n'est pas tout à fait d'accord avec celle-ci.

L'affirmation .... à la privation, ces deux termes ne sont pas très expressément opposés entr'eux, comme le remarque Simplicius. Au lieu d'Affirmation il eût mieux valu dire : Possession.

Le chaud est antérieur au froid, le chaud est représenté par le feu, et le froid par la terre.

Le repos et la pesanteur, qualités attribuées à la terre. Il s'ensuivrait que le feu serait antérieur à la terre.

§ 3. Tous les corps intermédiaires, l'air et l'eau, avec tous les composés que forment ce deux éléments; voir la Météorologie, livre I, ch. 2, § 1, page 5 de ma traduction.

Plus tard, Simplicius renvoie au IV. livre de ce traité ; voir en effet le IVe livre, ch. 5, § 2.

-- Il faut de toute nécessité, c'est une démonstration purement logique.

Aucun d'eux ne peut titre éternel, ceci est tout le contraire de l'éternité de la matière, théorie si souvent attribuée à Aristote. Mais il n'a pas directement abordé ce problème, qui ne se présentait pas aux Anciens sous la forme où il se présente à nous.

--- Et se détruisant réciproquement, toutes ces théories ne sont qu'un abus de la logique. La nécessité de la création est bien mieux démontrée par le spectacle admirable du système du monde. Les lois qui y président supposent une intelligence toute puissante, qui a tout fait en même temps qu'elle a tout ordonné.

§ 4. Sont doués de mouvement, la pensée reste obscure, parce que l'expression n'est pas assez développée. Ces corps ont un mouvement qui ne peut pas être éternel, puisqu'il est en ligne droite, et qu'il a été démontré dans la Physique, (livre VIII, ch. 12, pages 529 et suiv.) que le mouvement circulaire est le seul qui puisse être éternel.

La nécessité du mouvement de génération, le texte dit simplement : « la nécessité de la génération. »

-- Un autre genre de mouvement, les commentateurs croient en général qu'il s'agit d'un autre mouvement circulaire, outre le mouvement circulaire de la première sphère. Je ne vois dans le texte rien qui autorise cette supposition, si ce n'est peut-être ce qui suit : « le même mouvement dont le tout est animé. » Alors il faudrait entendre cette phrase en ce sens que les changements des éléments, les uns dans les autres, forment une sorte de cercle, analogue à la translation circulaire de l'univers. Mais. cette interprétation me parait bien forcée. J'aime mieux m'en tenir à l'obscurité que l'auteur lui-même constate, en annonçant qu'il s'expliquera plus clairement ailleurs.

Dans ce qui va suivre, d'après Simplicius, ceci se rapporte au Traité de la production et de la destruction ; voir plus loin ce traité, livre II, ch. 3 et 4.

§ 5. Les corps soumis à un mouvement circulaire, soit que ces corps soient dans la région inférieure, soit qu'ils soient dans les régions supérieures, à la surface et autour de la terre, ou dans le ciel.

Il faut nécessairement qu'il y ait génération, c'est un fait attesté par l'observation plutôt qu'une nécessité logique.

Un corps qui reste éternellement en repos, dans la Physique comme dans la Métaphysique, Aristote déduit l'éternité du mouvement d'un moteur immobile ; voir la Physique, livre VIII, ch. 15, pages 558 et suiv. de ma traduction; voir aussi le Traité du mouvement des animaux, ch. 1, §§ 2 et suiv. pages 238 et suiv. de ma traduction. Alexandre d'Aphrodisée, à propos de ce passage, discutait la question de savoir ce que deviendrait le mouvement des éléments inférieurs, si le mouvement général du ciel venait à s'arrêter ; il répondait que le mouvement des éléments pourrait continuer. Simplicius combat cette théorie, et il soutient que le mouvement sur notre globe s'arrêterait, aussitôt que s'arrêterait aussi le mouvement universel. Saint Thomas parait être de l'avis de Simplicius.

CHAPITRE IV.

Sphéricité nécessaire du Ciel ; considérations générales sur les figures; supériorité du cercle parmi les surfaces planes, et de la sphère parmi les solides; méthode de division des corps en surfaces, application de ces principes à la sphère. Il n'y a que la sphéricité qui puisse supprimer le vide. Position respective et subordonnée des éléments, les uns à l'égard des autres; la surface des eaux est sphérique; démonstration graphique de cette proposition. Le monde est plus complètement sphérique que tout ce que l'homme peut faire.

§ 1. Le ciel doit nécessairement avoir une forme sphérique; car cette forme est celle qui convient le mieux à la substance du ciel, en même temps qu'elle est naturellement la première. Mais, d'abord, traitons d'une manière générale des formes et des figures ; et voyons quelle est celle qui est la première, soit dans les surfaces, soit dans les solides. Toute forme est une surface, soit que cette surface se compose de lignes droites, soit qu'elle se compose de lignes circulaires. La forme plane à lignes droites est circonscrite par plusieurs lignes, tandis que la forme circulaire l'est par une ligne unique. Mais, comme dans chaque genre, l'unité est naturellement antérieure à la multiplicité, de même que le simple l'est au composé, il faut considérer le cercle comme la première des figures parmi les surfaces.

§ 2. En outre, si une chose est parfaite, quand il n'y a plus moyen de prendre rien de ce qui la concerne en dehors d'elle, ainsi qu'on l'a dit antérieurement, et si l'on peut toujours ajouter quelque chose à la ligne droite, tandis qu'on ne peut rien ajouter à la ligne du cercle, il est évident que la ligne qui circonscrit le cercle est parfaite et. achevée. Par conséquent, si le parfait est antérieur à l'imparfait, cela suffit encore pour que le cercle doive être considéré comme la figure antérieure à toutes les autres. Il en est de même pour la sphère parmi les solides ; car, seule entre les solides, elle est enveloppée d'une surface unique, tandis que les solides terminés par des lignes droites ont plusieurs surfaces qui les enveloppent. La sphère tient, parmi les solides, le même rang que le cercle tient parmi les surfaces.

§ 3. Remarquez que ceux-là même des philosophes qui divisent les corps en surfaces, et qui les engendrent en quelque sorte ainsi, semblent avoir déposé en faveur de notre opinion. En effet, la sphère est le seul des solides qu'ils ne divisent point, parce qu'elle n'a pas plus d'une seule et unique surface; car la méthode de division des solides en surfaces ne les divise pas, comme on peut couper en diverses parties un tout que l'on sépare ; mais elle les divise en des parties qui sont spécifiquement différentes. On le voit donc évidemment : la sphère est la première des figures solides.

§ 4. Si même on veut classer les choses, non plus d'après la forme, mais d'après le nombre, l'opinion que nous venons d'exposer sera encore plus juste. Le cercle représentera l'unité ; le triangle [287b] répondra au nombre deux, parce qu'il équivaut à deux angles droits ; mais si l'on prenait le triangle pour type de l'unité, le cercle ne pourrait plus être une figure.

§ 5. Or, comme la première forme doit appartenir au premier corps, et que ce premier corps est celui qui est à la circonférence extrême, il en résulte que le corps, qui se meut d'un mouvement circulaire, doit être sphérique. Le corps, qui est continu à celui-là, est sphérique comme lui ; car, ce qui est continu au sphérique doit être sphérique lui-même. La même remarque s'applique à tout ce qui se rapproche du centre de ces corps; car, tout ce qui est enveloppé par le corps sphérique et est en contact avec lui, doit être nécessairement sphérique aussi. Mais, ce qui est au-dessous de la sphère des planètes, est continu à la sphère supérieure. Il faudrait donc conclure de ceci que toute révolution est sphérique, puisque tout est en contact avec les sphères et ne fait que les continuer.

§ 6. En second lieu, comme il semble, ou du moins comme on suppose que le tout se meut d'une révolution circulaire, et comme il a été démontré qu'il n'y a ni vide ni espace au-delà de la circonférence extrême, il faut bien nécessairement aussi, et par les mêmes raisons, que le ciel soit sphérique. En effet, s'il était terminé par des lignes droites, il y aurait en dehors de lui, de l'espace, un corps, et du vide ; car, un corps circonscrit par des lignes droites qui serait animé d'un mouvement circulaire, n'occuperait jamais la même place ; alors, là où il y avait antérieurement un corps, il n'y en aurait plus ; et là où il n'y en a pas actuellement, il y en aurait plus tard, à cause du changement perpétuel des angles. Même résultat, si l'on prend toute autre figure quelconque qui n'aurait pas des lignes égales menées du centre ; par exemple, une figure elliptique ou une figure ovoïde; car il arrivera, pour toutes ces figures, qu'il y aura, en dehors de la révolution, un certain espace et un certain vide, parce que le tout n'occupera pas toujours la même place.

§ 7. D'un autre côté, si la translation du ciel est la mesure des autres mouvements, parce qu'elle seule est continue, toujours uniforme et éternelle; et si, en chaque genre, c'est la plus petite quantité possible qui sert de mesure, le mouvement le plus rapide étant aussi le plus petit mouvement, il est évident que le mouvement du ciel doit être le plus rapide de tous les mouvements possibles.

§ 8. Mais de toutes les lignes qui vont du même au même, la plus courte c'est celle du cercle; et le mouvement le plus rapide est celui qui a lieu suivant la ligne la plus courte. Par conséquent, le ciel se meut circulairement; et s'il se meut le plus rapidement possible, il faut nécessairement aussi qu'il soit sphérique.

§ 9. On pourrait encore fortifier cette conviction en considérant les corps qui s'arrêtent et se fixent autour du centre. En effet, si l'eau est placée autour de la terre, l'air autour de l'eau, le feu autour de l'air, les corps supérieurs doivent être placés aussi dans le même rapport ; car on ne peut pas dire que ces éléments sont continus aux autres, et ils ne font que les toucher seulement. [288a] Or, la surface de l'eau est sphérique, et ce qui est continu au sphérique, ou est placé à l'entour du sphérique, doit être nécessairement sphérique lui-même, de sorte qu'évidemment, et par cette raison encore, le ciel doit être sphérique.

§ 10. Mais que la surface de l'eau soit sphérique, ainsi qu'on vient de le dire, c'est ce qu'on voit évidemment en remarquant que l'eau descend et se réunit toujours dans le lieu le plus bas ; et le plus bas est toujours plus rapproché du centre. Soient menées du centre les lignes A. B et A C, et qu'on les joigne par la ligne B C. La ligne A D abaissée sur la base est plus petite que les lignes qui partent du centre. Ainsi, cet endroit D est plus bas et plus creux; l'eau s'y écoulera donc, jusqu'à ce qu'elle se soit mise de niveau. Mais la ligne A E est égale à celles qui partent du centre; donc il faudra nécessairement que l'eau se rapproche des lignes tirées du centre, et c'est alors seulement qu'elle restera en repos. Mais la ligne qui passe par les lignes tirées du centre est circulaire ; et par conséquent, la surface de l'eau, B E C, est de forme sphérique.

§ 11. On voit donc évidemment, par tout cela, que le monde est sphérique, et qu'il est si exactement et si parfaitement tourné, qu'il n'y a rien, dans ce que fait la main de l'homme, qui puisse en approcher jamais, ni dans aucun de tous les phénomènes qui sont sous nos yeux. Car aucun des matériaux, dont le monde se compose, ne peut recevoir une égalité aussi absolue, ni une régularité aussi grande que la nature du corps primitif qui enveloppe tout. Donc, il est évident que le même rapport proportionnel qui se trouve de l'eau à la terre, doit aussi se retrouver entre les éléments, qui sont toujours de plus en plus éloignés dans l'espace.


 












 

Ch. IV, § 1. La forme sphérique, les raisons qui vont être données pour démontrer la sphéricité de la terre, peuvent ne pas paraître très fortes; mais il est bien remarquable qu'Aristote ait vu si nettement que la forme sphérique est la seule qui puisse convenir aux grands corps célestes; la pensée est très juste, bien que les arguments qui la soutiennent ne le soient pas.

Qui convient le mieux à la substance du ciel, j'ai ajouté ces deux derniers mots, qui ne sont pas dans le texte, mais qui m'ont paru indispensables pour la clarté de la pensée.

-- Qu'elle est naturellement la première, ou bien : « Qu'elle est la première en nature. »

Des formes et des figures, il n'y a qu'un seul mot dans le texte, signifiant aussi bien l'un que l'autre.

-- Qui est la première, dans l'ordre de la nature et de la perfection.

Soit dans les surfaces, soit dans les solides, la distinction est indispensable, parce qu'il y a quelques philosophes qui ne la font pas, comme Aristote le remarquera un peu plus bas, § 3.

Toute forme, ou « toute figure. »

-- La forme plane à lignes droites, le texte grec n'a qu'un seul mot.

La forme circulaire, soit purement superficielle, soit solide. Le cercle comme la première des figures, il faut voir, au début de la Mécanique, l'importance qu'Aristote attache aux propriétés du cercle.

§ 2. Si une chose est parfaite, ou « complète. »

Ainsi qu'on l'a dit antérieurement, voir un peu plus haut, livre i, ch 2, § 9, page 11 ; voir aussi la Physique, livre III, ch. 9, § 3, page 123 de ma traduction ; et la Métaphysique, livre IV, ch. 16 et 26, pagels 1021 et 4023 de l'édition de Berlin. — Ajouter quelque chose à la ligne droite, voir la comparaison de la ligne droite et du cercle, dans la Physique, livre VIII, ch. 14, page 533 de ma traduction.

Est parfaite et achevée, il n'y a qu'un seul mot dans le texte.

Si le parfait est antérieur à l'imparfait, raison purement logique, qui a grande valeur, comme le prouvent le Discours de la méthode, de Descartes, et ses Méditations.

La figure antérieure, en nature et en dignité.

A toutes les autres figures planes et purement superficielles.

-- Pour la sphère, parmi les solides, l'assimilation est exacte et très naturelle.

Les solides terminés par des lignes droites, tels que le cube, la pyramide, le cône, etc.

--- Ont plusieurs surfaces qui les enveloppent, le texte n'est pas tout à fait ainsi explicite.

Le même rang, c'est-à-dire qu'elle est antérieure à, tous les autres solides, comme le cercle est antérieur, ainsi qu'on vient de le dire, à toutes les autres surfaces.

§ 3. Ceux-là même des philosophes, il est probable qu'il s'agit des philosophes physiciens de l'école d'Ionie.

En quelque sorte, j'ai ajouté ces mots. Engendrer les corps par les surfaces, c'est croire que les corps ne se composent que de surfaces successives, les surfaces s'accumulant les unes sur les autres, pour former la substance solide du corps. Mais c'est donner ainsi une épaisseur à la surface ; ce qui est vrai dans la réalité, quoique les mathématiques dans leur définition de la surface aient bien soin d'éviter cette erreur.—Semblent avoir déposé, ceci parait indiquer que les philosophes dont il s'agit, sont antérieurs à Aristote.

-- Qu'ils ne divisent point, dans le sens qui va être expliqué un peu plus bas.

-- Un tout que l'on sépare, et où les parties pourraient être encore tout à fait pareilles au tout dont on les détache.

Qui sont spécifiquement différentes, soit les hémisphères, soit les segments, etc.

§ 4. Non plus d'après la forme, j'ai ajouté ces mots qui ne sont pas précisément dans le texte, mais qui éclaircissent et complètent la pensée.

-- D'après le nombre, à la manière des Pythagoriciens, qui essayaient en effet d'établir d'étroits rapporta entre les figures et les nombres.

Le cercle représentera l'unité, en tant que circonscrit par une seule ligne.

 -- Le triangle répondra au nombre deux, car c'est après le cercle la première figure, et par conséquent la seconde de toutes, bien qu'il soit nécessairement formé par trois lignes.

Parce qu'il équivaut à deux angles droits, cet argument n'est pas très bon ; et je préférerais attribuer le nombre deux au triangle, parce qu'il est la seconde figure après la sphère, qui est la première.

-- Pour type de l'unité, le texte n'est pas tout à fait aussi explicite.

§ 5. Or comme la première figure... au premier corps, raisonnement purement logique.

-- Qui est à la circonférence extrême, c'est-à-dire le plus éloigné de la terre, le ciel.

-- Le corps qui se meut d'un mouvement circulaire, c'est le ciel, animé d'un mouvement circulaire, le seul qu'il puisse avoir, et le seul que l'observation nous fasse connaître.

Le corps qui est continu à celui-là, ce serait la sphère des planètes, après la sphère des étoiles fixes.

-- Ce qui est continu au sphérique doit être sphérique, ce sont des sphères concentriques les unes aux autres.

-- A tout ce qui se rapproche, c'est-à-dire l'éther, le feu, l'air, l'eau, etc. -

-- Le centre de ces corps, c'est la terre, placée au centre de l'univers et y restant immobile.

Au-dessous, « ou en bas. »

-- A la sphère supérieure, celle des planètes, en même temps que la sphère des fixes, l'une et l'autre supérieures à ce qu'on appelle la sphère terrestre.

Que toute révolution c'est-à-dire tout le mouvement qui entraîne l'univers entier, depuis la terre jusqu'aux fixes.

Tout est en contact, il faut entendre par là les quatre éléments superposés les uns aux autres, comme il est expliqué dans la Météorologie, livre I, ch. 2, § 2, page 5 de ma traduction, et aussi ch. 3, pages 7 et suiv. Simplicius a rapproché de toutes ces théories d'Aristote, celles de Platon dans le Timée; elles ont en effet beaucoup de ressemblance entr'elles, comme on peut le voir dans le Timée, pages 123 et suiv. de la traduction de M. V. Cousin.

§ 6. En second lieu, le texte n'est pas aussi précis ; mais c'est en m'appuyant sur l'autorité de Simplicius, que je regarde cet argument comme le second en faveur de la sphéricité du ciel.

On suppose, c'est une hypothèse préalable qu'on essaiera de démontrer plus tard.

-- Comme il a été démontré, voir dans la Physique, livre IV, ch. 8 et suiv., toute la théorie du vide, dont Aristote s'efforce de démontrer l'impossibilité.

-- Un corps, c'est l'expression même du texte, que je n'ai pas cru devoir corriger.

Et du vide, Aristote a toujours fait une distinction entre l'espace et le vide.

Un corps circonscrit par des lignes droites, quelle que soit d'ailleurs sa figure.

-- A cause du changement perpétuel des angles, d'après Simplicius, Alexandre d'Aphrodisée combattait cet argument d'Aristote ; et il soutenait que, quelle que fût la forme du corps, il remplirait tout l'espace du moment qu'il aurait une rotation sur lui-même. Simplicius se range à l'avis d'Alexandre. Il cite eu outre Ptolémée, qui explique la sphéricité du ciel, par ce seul argument, très puissant, qu'il n'y a pas d'autre moyen que cette hypothèse, pour se rendre compte de tous les mouvements célestes, attestés par l'astronomie.

Des lignes égales, menées dis centre, la sphère est le seul solide où tous les rayons soient égaux,
comme ils le sont dans le cercle.

-- Elliptique, ou plutôt « lenticulaire. »

— Ovoïde, ce qui n'est pas. une ellipse régulière.

§ 7. D'un autre côté, selon Simplicius, c'est le troisième argument pour démontrer la sphéricité du ciel.

Est la mesure de tous les autres mouvements, c'est en effet par les révolutions du soleil, qu'on mesure d'abord le temps ; et c'est à cette mesure qu'on rapporte toutes les autres mesures du temps, en la subdivisant ou en la multipliant à l'infini. Voir la Physique, livre IV, ch. 20, § 9, page 270 de ma traduction.

Le mouvement du ciel, l'expression est bien vague et bien générale, parce qu'il y a dans le ciel une multitude de mouvements divers ; mais, au fond, il est vrai que les mouvements célestes sont les plus rapides de tous.

§ 8. Qui vont du même au même, c'est-à-dire toutes les lignes fermées, revenant sur elles-mêmes, comme la circonférence, l'ellipse, etc.

Est celle du cercle, parce qu'elle est régulière, et partout à égale distance du centre.

Se meut circulairement, les astres semblaient aux anciens décrire un cercle autour de la terre immobile.

-- Qu'il soit sphérique, la conclusion n'est pas très rigoureuse.

§ 9. On pourrait encore, quatrième argument pour prouver la sphéricité du ciel: l'eau est sphérique; donc les autres éléments le sont comme elle, et le ciel entier l'est également.

Qui s'arrêtent et se fixent, il n'y a qu'un seul mot dans le texte.

-- Autour du centre, c'est-à-dire des éléments qui se fixent concentriquement autour du centre de la terre, qui est aussi le centre du monde : d'abord, la terre elle-même, autour de son propre centre; puis, l'eau autour de la. terre ; puis, l'air autour de l'eau ; le feu, autour de l'air; l'éther, autour du feu ; le ciel enfin, autour de l'éther.

Les corps supérieurs, qui forment le ciel proprement dit.

Dans le même rapport, c'est-à-dire, toujours concentriquement les uns par rapport aux autres.

Sont continus, voir la définition du Continu, Physique, livre V, ch. 5, §§ 6 et 11, page 303 de ma traduction.

Que les toucher seulement, ils sont contigus et non pas continus.

La surface de l'eau est sphérique, cette démonstration sera donnée au § suivant.

--- Ce qui est continu au sphérique, ceci semble contredire ce qui vient d'être dit un peu plus haut.

§ 10. Ainsi qu'on vient de le dire, dans le § précédent.

C'est ce qu'on voit évidemment, la démonstration graphique, qui va suivre, n'est pas aussi claire que l'auteur semble le croire. Peut-être, cette obscurité vient-elle aussi de ce que la tradition ne nous aura pas très exactement conservé la figure géométrique sur laquelle s'appuie cette démonstration.

-- L'eau descend et se réunit, il n'y a qu'un seul mot dans le texte.

Dans le lieu le plus bas, ceci est un fait d'observation incontestable.

Le plus bas en toujours plus rapproché du centre, ceci est également de toute évidence ; mais ces deux hypothèses ne suffisent pas pour expliquer la sphéricité de la surface des eaux.

--- Soient menées du centre, la figure que donne saint Thomas est une demi-circonférence, où le centre est A ; les deux lignes AB et AC sont deux rayons, menés à égale hauteur sur chaque côté de la circonférence. La ligne qui joint ces deux points de la circonférence est BC. Sur le milieu de BC, on fait partir du point D une ligne qui va au centre, AD. Cette ligne AD est plus petite qu'un rayon. Le point D peut donc être considéré comme plue creux; et, par conséquent, l'eau s'y accumule jusqu'à ce qu'elle soit arrivée en E, à la hauteur des lignes AB et AC. Le point E est à l'extrémité d'un rayon et placé au sommet de la demi-circonférence. Ce qui embarrasse la démonstration, c'est que, dans la réalité, il s'agit toujours de solides et non de surfaces ; c'est-à-dire, d'une demi-sphère au lieu d'une demi-circonférence.

Cet endroit D, j'ai ajouté D pour plus de clarté, m'appuyant, en cela, sur le commentaire de Simplicius.

-- Plus bas et plus creux, il n'y a qu'un seul mot dans le texte grec.

Se soit mise de niveau, avec les points B et C, qui sont à l'extrémité des rayons.

-- Mais la ligne AE, E, placé au sommet de la demi-circonférence, est le point où l'eau devra s'arrêter, quand elle sera au niveau du reste de la demi-circonférence.

Égale à celles qui partent du centre, puisqu'elle est aussi un rayon, comme AB et AC.

Se rapproche, cette expression n'est pas très nette; mais j'ai craint de préciser davantage; le texte n'est pas plus clair. « Se rapprocher » signifie ici : « se soit mise à la même hauteur.»

Qu'elle restera en repos, car tant que le lieu serait plus bas et plus creux, l'eau tendrait toujours à s'y écouler.

-- Mais la ligne qui passe, c'est la circonférence elle-même.

La surface de l'eau BEC, ce sont les trois points par lesquels passe la circonférence.

Et par conséquent, conclusion de la démonstration. Simplicius, après l'avoir donnée tout entière, semble peu satisfait; car il en donne une autre plus simple et plus décisive. Ce qui prouve la sphéricité de l'eau, c'est le phénomène qu'on observe, en mer. Sur le pont du navire, on ne voit pu la terre, quand on est à quelque distance ; si l'on monte au sommet da mât, on découvre la terre très distinctement. Ce qui empêchait de la voir, dans le premier cas, c'était donc la surface sphérique de l'eau qui s'interposait. Cette explication, neuve sans doute au temps de Simplicius, a été, depuis lors, donnée mille fois. Le commentateur grec en ajoute une autre, qui n'est pas aussi bonne : c'est l'apparence sphérique que prend l'eau d'un vase dans lequel on laisse glisser doucement des pièces de monnaie, ou d'autres corps pesants. La surface de l'eau s'arrondit avant de déborder.

§ 11. Que le monde est sphérique, cette conclusion peut ne pas paraître découler très directement des démonstrations précédentes. C'est tout au plus la sphéricité de la terre, qui a été prouvée.

Si parfaitement tourné, c'est la traduction exacte de l'expression grecque ; c'est  aussi à peu près celle dont se sert Platon dans le Timée, pages 124 et 125 de la traduction de M. V. Cousin.

--- Dont le monde se compose, l'expression du texte est indéterminée : « Dont il se compose. »

-- La nature du corps primitif, c'est l'éther sans doute, ou plutôt le ciel.

 -- Dans l'espace, j'ai ajouté ces mots pour plus de clarté. Voir sur les rapports réciproques des quatre éléments, dans la composition générale de l'univers, le Timée, page 124, ibid.

CHAPITRE V.

Pourquoi le mouvement circulaire a-t-il lieu dans un sens plutôt que dans l'autre? Difficulté de cette question; réserve qu'il faut apporter dans certaines recherches; indulgence avec laquelle il faut les juger. Le principe du mieux explique beaucoup de phénomènes dans la nature; et si le mouvement universel a une certaine direction, c'est qu'il est mieux qu'il ait celle-là plutôt que toute autre.

§ 1. Le mouvement circulaire peut avoir lieu en un double sens ; et, par exemple, il peut, à partir de A, se diriger indifféremment, soit en B, soit en C.  Or, nous avons dit antérieurement que ces mouvements ne sont pas contraires l'un à l'autre. Mais si rien n'est fortuit ni arbitraire dans les choses éternelles, et si le ciel est éternel, ainsi que le mouvement circulaire dont il est animé, pourquoi est-il porté dans un des deux sens, et ne l'est-il pas dans l'autre ? Car il faut que ce phénomène même soit un principe, ou qu'il y ait un principe supérieur d'où il dérive.

§ 2. Mais essayer de discuter certaines questions et prétendre tout expliquer en se flattant de ne rien omettre, c'est peut-être faire preuve de beaucoup de naïveté, ou de beaucoup d'audace. Cependant il ne serait pas équitable de blâmer indistinctement toutes ces tentatives ; mais il faut aussi peser les motifs que chacun peut avoir de prendre la parole ; et ensuite, il faut voir jusqu'à quel point on mérite confiance, selon qu'on s'appuie sur des raisons admises par le vulgaire des hommes, ou sur des considérations plus relevées et plus fortes. [288b] Lors donc qu'on voit quelqu'un atteindre en ces matières une plus grande précision, et expliquer les lois nécessaires de la nature, on doit savoir bon gré à ceux qui font ces découvertes. C'est là ce qui nous encourage maintenant à dire, sur ce sujet, l'opinion que nous nous sommes formée. La nature fait toujours le mieux qu'elle peut ; or, comme parmi les mouvements en ligne droite, le mouvement qui se dirige vers le lieu supérieur est le plus noble, parce que le lieu qui est en haut est plus divin que celui qui est en bas, et que par la même raison, le mouvement en avant est supérieur au mouvement en arrière, le mouvement vers la droite également est supérieur au mouvement vers la gauche, ainsi qu'on l'a dit un peu plus haut. Cette question même que l'on vient de poser, montre bien qu'il y a dans le ciel quelque chose d'antérieur et quelque chose de postérieur. La cause même qui produit le phénomène résout la difficulté dont il s'agit. Si, en effet, les choses sont toujours le mieux possible, c'est là précisément la cause du fait qui nous occupe; car le mieux ici, c'est d'avoir un mouvement simple, un mouvement indéfectible, et qui se dirige vers le lieu le plus important et le plus noble.





 

Ch. V, § 1. Se diriger indifféremment,, le texte n'est pas tout à fait aussi précis.

Nous avons dit antérieurement, un peu plus haut dans ce livre, ch. 3, il a été établi qu'un mouvement circulaire n'est jamais contraire à un autre mouvement circulaire.

Mais si rien n'est fortuit, ni arbitraire, voir la réfutation de la théorie du hasard, Physique, livre II, ch. 4, page 29 de ma traduction.

Pourquoi est-il porté dans un des deux sens, c'est là une question éternelle et insoluble; la réponse qu'y fait Aristote est à peu près la seule qu'on y puisse faire. Si les choses sont ainsi, c'est qu'il est mieux qu'elles soient de cette façon, plutôt que de toute autre.

Soit un principe, c'est ce qui est le plus probable. Il suffit alors de constater le fait, sans pouvoir remonter jusqu'à sa cause.

Supérieur d'où il dérive, j'ai ajouté ces mots pour compléter la pensée.

§ 2. Mais essayer de discuter certaines questions, on voit qu'Aristote ne se fait pas illusion, et qu'il voit toute la difficulté de la question qu'il soulève.

De beaucoup de naïveté, « ou de sottise. »

Les motifs que chacun peut avoir, selon qu'on agit par simple vanité, ou selon qu'on apporte quelques explications nouvelles, après de sérieuses recherches.

-- Par le vulgaire des hommes, l'expression du texte est moins déterminée ; mais j'ai suivi l'explication de la plupart des commentateurs.

Plus relevées et plut fortes, il n'y a qu'un seul mot dans le texte.

-- Quelqu'un atteindre en ces matières, j'ai ici un peu paraphrasé le texte pour le rendre plus clair.

C'est là ce qui nous encourage, même remarque ; le sens d'ailleurs ne peut être douteux.

La nature fait toujours le mieux qu'elle peut, grand principe qu'Aristote a mis le premier en pleine lumière, et qu'il a toujours soutenu, sans en tirer d'ailleurs les conséquences qu'il renferme, et notamment celle de la providence divine.

Est plus divin que celui qui est en bas, voir ch. I, dans ce livre, § 2.

Le mouvement en avant, voir aussi dans ce livre, ch. 2, § 2 et suiv.

Un peu plus haut, id. ibid.

Que l'on vient de poser, un peu plus haut, § 1, à savoir pourquoi le mouvement circulaire va dans un sens plutôt que dans un autre.

-- Qu'il y a dans le ciel, le texte n'est pas tout à fait aussi formel.

-- Résout la difficulté dont il s'agit, c'est-à-dire que la cause du phénomène doit suffire à résoudre la question qui a été posée. Le mouvement de droite à gauche a lieu dans le ciel, parce qu'il est mieux qu'il en soit ainsi ; et il n'y a pas d'autre réponse à faire, quand on demande pourquoi le ciel se meut de droite à gauche, et non de gauche à droite.

Le plus important et le plus noble, il n'y a qu'un peul mot dans le texte.

CHAPITRE VI.

De l'uniformité du mouvement du ciel; impossibilité de supposer une irrégularité dans les mouvements célestes. Le moteur est immuable tout aussi bien que le mobile ; les astres ont toujours conservé leurs distances les uns par rapport aux autres, et l'on n'a pu observer aucune perturbation. Le mouvement est éternellement uniforme, sans accroissement ni diminution, et sans aucune alternative de vitesse ni de lenteur.

§ 1. Une suite de ce que nous venons d'exposer, c'est de faire voir que le mouvement du monde est uniforme, et qu'il n'est jamais irrégulier. D'ailleurs, je ne veux parler ici que du premier ciel et de la première révolution ; car pour les corps qui sont placés au-dessous, il arrive que déjà plusieurs mouvements se sont réunis et combinés en un seul. Si l'on supposait, en effet, que le ciel a un mouvement irrégulier, il est clair qu'il y aurait alors accroissement, maximum et décroissance de ce mouvement; car tout mouvement irrégulier présente accroissement, décroissance et maximum. Le maximum peut se trouver ou au point d'où part le mouvement, ou au point vers lequel il se dirige, ou bien au point intermédiaire. On peut dire, par exemple, que, pour les corps animés d'un mouvement naturel, le maximum est au point vers lequel ils sont portés ; que pour les corps qui sont mus contre nature, le maximum est au point d'où ils partent ; et qu'enfin pour les corps qu'on lance, c'est-à-dire pour les projectiles, c'est le point intermédiaire. Mais dans le mouvement circulaire, il n'y a ni point de départ, ni point d'arrivée, ni point intermédiaire; car pour ce mouvement, il n'y a vraiment ni commencement, ni fin, ni milieu, puisque ce mouvement est éternel, quant à la durée, puisqu'il se tient dans toute sa longueur, et qu'il n'a pas d'interruption qui le brise. Il s'ensuit que, s'il n'y a pas de maximum pour le mouvement du ciel, il n'y a pas non plus d'irrégularité ; car l'irrégularité ne vient que de l'accroissement et de la décroissance successive.

§ 2. Il faut ajouter que, comme tout mobile est mis en mouvement par quelque moteur, il est nécessaire que l'irrégularité du mouvement provienne, ou du moteur, ou du mobile, ou des deux à la fois. Si, en effet, le moteur ne meut plus avec la même force, ou si le mobile vient à changer et ne reste pas le même, ou si les deux changent à la fois, rien n'empêche alors que le mobile ne reçoive le mouvement d'une façon irrégulière. Mais rien de tout cela ne peut se produire pour le ciel ; car le mobile y est, comme on l'a démontré, primitif, simple, [289a] incréé, impérissable et absolument immuable. Le moteur, à plus forte raison, doit-il avoir toutes ces qualités ; car le moteur de ce qui est primitif, doit être primitif aussi ; il doit être simple pour le simple, comme il est impérissable et incréé pour l'impérissable et l'incréé. Or, si le mobile, qui est un corps, ne change pas, le moteur, qui est incorporel, peut encore moins changer que lui. Ainsi donc le mouvement de translation du ciel ne peut pas être irrégulier.

§ 3. Si le mouvement du ciel était irrégulier, ou le ciel changerait tout entier, ayant un mouvement tantôt plus rapide et tantôt plus lent ; ou bien ce seraient seulement quelques-unes de ses parties qui changeraient. Mais il est évident que ses parties ne présentent aucune irrégularité; car dans l'infinité des temps, les astres se seraient éloignés les uns des autres et se seraient distancés, l'un allant plus vite, et l'autre allant plus lentement. Or, il ne paraît pas qu'il y ait jamais eu la moindre modification dans les distances qui les séparent. Mais il n'est pas plus admissible que ce soit le mouvement tout entier, au lieu de ses parties, qui puisse changer. La décroissance en chaque chose ne peut venir que d'une impuissance ; or, l'impuissance est contre nature ; car dans les animaux toutes les impuissances sont antinaturelles, la vieillesse, par exemple, et la mort. C'est, qu'en effet, la constitution entière des animaux ne se compose guère que des éléments, qui diffèrent entr'eux par la position propre à chacun ; et il n'y a aucune des parties, dont les animaux sont formés, qui n'occupe la place qui lui appartient. Si donc dans les corps primitifs, il n'y a rien qui puisse être contre nature, parce qu'ils sont simples et sans mélange, parce qu'ils sont toujours à leur place spéciale, et qu'il n'y a rien qui leur suit contraire, il n'y a pas davantage d'impuissance pour eux. Par suite, il n'y a pas non plus décroissance, ni accroissement ; car s'il y avait accroissement, il y aurait décroissance à un moment donné.

§ 4. La raison se refuse également à croire que le moteur puisse rester impuissant pendant un temps infini, et qu'ensuite il devienne puissant durant un autre temps infini, parce qu'en effet rien de ce qui est contre nature ne peut subsister durant l'infinité du temps. Or, l'impuissance est contre nature. Il n'est pas possible davantage que ce qui est contre nature, et ce qui est selon la nature, durent l'un et l'autre pendant un temps égal ; non plus qu'en général ce qui peut, et ce qui ne peut pas, ne durent point le même temps. Si le mouvement détroit, il y a nécessité alors qu'il décroisse durant un temps infini. Mais il n'est pas plus possible qu'il s'accroisse toujours, ou qu'il se relâche ensuite également ; car alors le mouvement serait à la fois infini et indéterminé. Or, nous avons dit que tout mouvement était déterminé, et qu'il allait d'un certain point à un autre point.

§ 5. Il n'est pas plus possible d'admettre cette hypothèse, si l'on pense qu'il y a nécessairement un minimum de temps le plus petit possible, au-dessous duquel le ciel ne pourrait plus accomplir sa révolution ; car, de même qu'on ne peut, par exemple, ni marcher, ni jouer de la lyre dans un temps quelconque, mais qu'il y a pour accomplir chacune de ces actions un minimum de temps nécessaire, qu'il n'est pas possible de dépasser, de même il n'est pas possible davantage que le ciel se meuve [289b] dans un temps quelconque. Si donc ceci est exact et vrai, il s'ensuit qu'il ne peut pas y avoir un accroissement perpétuel de translation du ciel. S'il n'y a pas d'accroissement, il n'y a pas non plus de décroissance ; car ces deux changements sont soumis à des lois pareilles; et l'un s'accomplit comme l'autre, soit que leur rapidité soit égale ou plus grande, et que le mouvement dure un temps infini.

§ 6. Il ne resterait donc plus qu'à prétendre que le mouvement du ciel présente des alternatives d'accroissement et de ralentissement de vitesse ; mais c'est là une hypothèse tout à fait absurde, et ce n'est qu'une véritable rêverie. Il est bien plus raisonnable encore de supposer que ces alternatives ne pourraient pas échapper à notre observation ; et rapprochées les unes des autres, elles n'en seraient que plus sensibles.

Mais bornons-nous à ce que nous venons de dire pour montrer qu'il n'y a qu'un seul et unique ciel, qu'il est incréé, éternel, et de plus qu'il se meut d'une façon régulière et uniforme.






 

Ch. VI, § 1. Le mouvement du monde est uniforme, il est bien remarquable qu'Aristote ait cru aussi fermement à ce principe. Il l'avait emprunté lui-même au Timée de Platon ; mais il l'a davantage approfondi ; et tous ses travaux sur la nature n'avaient fait que le confirmer encore plus dans cette grande croyance.

Du premier ciel, c'est-à-dire de la sphère des étoiles fixes. Et de la première révolution, celle qui est la plus vaste, et qui enveloppe toutes les autres.

Réunis et combinés en un seul, et alors le mouvement n'est plus simple, comme pour la sphère supérieure. On peut entendre aussi, avec quelques commentateurs, que plusieurs mouvements se sont réunis et combinée pour mouvoir un seul corps. Les planètes, par exemple, semblent parfois animées d'un mouvement contraire à celui du monde ; mais ce n'est qu'en apparence, et le mouvement total n'en est pas moins parfaitement régulier.

Au point d'où part le mouvement, par exemple, pour les projectiles, dont la force initiale est toujours la plus grande.

Ou au point vers lequel il se dirige, comme dans la chute des graves, dont le mouvement s'accélère en approchant du terme.

Au point intermédiaire, ceci ne se comprend pas bien ; d'ailleurs, un peu plus bas, on cite le cas spécial où un corps en mouvement a plus de rapidité au milieu de sa course, qu'au début ou à la fin.

Animés d'un mouvement .naturel, par exemple, un, corps grave qui tombe.

Au point vers lequel ils sont portés, la chute des graves s'accélère à mesure qu'ils approchent du terme de leur course; voir la Physique, livre VII, ch. 14, § 4, page 555 de ma traduction.

Qui sont mus contre nature, il semble que ceci ne peut guère s'appliquer qu'aux projectiles; mais ce n'est pas du moins dans la pensée de l'auteur, puisque les projectiles sont spécialement nommés un peu plus bas.

-- C'est le point intermédiaire, ceci ne parait pas exact, et le projectile a toujours plus de force au moment où on le lance qu'il n'en a au milieu de sa course. On peut croire d'après Simplicius qu'Alexandre d'Aphrodisée n'approuvait pas non plus cet exemple. Il embarrasse également saint Thomas, qui n'admet pas, comme Simplicius, qu'Aristote ait entendu ici par projectiles, les corps des animaux animés d'un mouvement propre.

Dans le mouvement circulaire, voir les mêmes théories dans la Physique, livre lll, ch. 14, § 1, page 553 de ma traduction. D'ailleurs l'astronomie moderne a constaté que les mouvements célestes n'avaient pas tous cette constante uniformité qu'on leur suppose ici ; il y a des temps d'accélération et de ralentissement.

§ 2. Il faut ajouter, second argument en faveur de la régularité du mouvement du ciel.

Par quelque moteur, voir la Physique, livre Vil, ch. 1, § 1, page 411 de ma traduction.

Avec la même force, j'ai préféré ce dernier mot à celui de Puissance, qui, dans le Péripatétisme, a une signification spéciale.

Et ne reste pas le même, soit en poids, soit en volume.

Comme on l'a démontré, voir plus haut, livre 1, ch. 3, §§ 3 et 4; voir aussi la Physique, livre VIII, ch. 15, § 23, page 567 de ma traduction.

Le moteur, à plus forte raison, il s'agit ici du moteur éternel, c'est dire de Dieu lui-même, quoiqu'Aristote. ne le nomme pas expressément.

-- Le moteur qui est incorporel, c'est à cette grande théorie qu'ut consacré le dernier chapitre de la Physique, livre VIII, ch. 15, pages 558 et suiv.

-- Ainsi donc, conclusion de ce second argument, toute pareille à celle du premier.

§ 3. Si le mouvement du ciel était irrégulier, le texte n'est pas tout à fait aussi précis ; mais il est évident, par ce qui suit, qu'il s'agit du ciel, plus directement encore que de son mouvement.

Le ciel changerait tout entier, le texte dit précisément : « le mouvement changerait tout entier. » Il n'y a d'ailleurs aucun inconvénient à confondre ici les deux termes, et il semble que la clarté gagne à la traduction, telle que je l'ai modifiée.

Se seraient éloignés là uns des autres, saint Thomas fait remarquer que, du temps d'Aristote, les astronomes n'avaient pas encore constaté le mouvement propre qu'ont quelques-unes des étoiles fixes. La remarque est vraie ; mais elle ne contredit pas la théorie d'Aristote; et l'ordre de l'univers n'en reste pas moins parfaitement régulier.

-- Mais il n'est pas plus admissible, seconde partie de l'argument.. Le mouvement du ciel ne change pas plus dans sa totalité qu'il ne change dans ses parties.

Au lieu de ses parties, j'ai ajouté ces mots pour que la pensée fût complète; le sens en est implicitement compris dans le texte.

-- Ne peut venir que d'une impuissance, ce terme est un peu général.

-- Or l'impuissance est contre nature, généralité très vague et peu exacte.

La vieillesse, par exemple, et la mort, l'un et l'autre, malheureusement, sont dans l'ordre de la nature, aussi bien que la jeunesse et la vie ; et c'est là le destin de tous les êtres animés.

Que des éléments, les anciens croyaient que les animaux étaient formés des quatre éléments, terre, eau, air et feu ; et par conséquent, ces éléments, concourant à la vie animale, n'ont pas la position qu'ils occupent d'ordinaire dans la nature. C'est là une théorie étrange et très fausse ; mais c'est ainsi que les commentateurs ont compris ce passage; et il est difficile de l'interpréter autrement.

-- Dont les animaux sont formés, j'ai ajouté ces mots pour compléter et éclaircir la pensée.

 — Dans les corps primitifs, le texte dit simplement : « Dans les primitifs. » On pourrait traduire aussi : « Dans les premiers principes. « Le ciel et la sphère supérieure sont compris dans le nombre de ces primitifs, où l'on peut classer aussi le temps et l'espace.

Il n'y a pas davantage d'impuissance pour eux, ils sont éternels, immuables et indéfectibles.

§ 4. Que le moteur puisse rester impuissant, après avoir démontré que le mobile est immuable, Aristote démontre que le moteur l'est à bien plus forte raison.

Rester impuissant pendant un temps infini, voir la Physique, livre Vlll, ch. 1, § 23, page 463 de ma traduction.

Il n'est pas possible davantage, toutes ces démonstrations sont purement logiques; mais elles ne sont pas sans valeur, parce qu'en effet ces principes s'imposent à la raison comme des axiomes.

Ne durent point le même temps, le texte n'est pas tout à fait aussi explicite ; mais le sens ne peut faire le moindre doute. J'ai dit d'une manière générale : « ce qui peut et ce qui ne peut pas, » afin de rester aussi vague que le texte, qui, d'ailleurs, n'est pas obscur.

Si le mouvement décroît, ceci ne s'applique qu'au mouvement du ciel.

Qu'il décroisse durant un temps infini, puisque le mouvement du ciel dure infiniment, il faut que la décroissance soit également infinie.

A la fois, j'ai ajouté ces mots

Infini et indéterminé, le mouvement du ciel est infini par sa durée, et par la succession régulière et constante des révolutions diverses qui s'y accomplissent; mais il n'en est pas moins parfaitement déterminé, et c'est là ce qui constitue sa régularité éternelle.

Nous avons dit, voir la Physique, livre VI, ch. 6, § 1, page 357 de ma traduction.

-- D'un certain point à un autre point, ceci est applicable au mouvement circulaire, aussi bien qu'à tout autre mouvement.

§ 5. Il n'est pas plus possible d'admettre cette hypothèse, d'un changement quelconque dans l'intensité des mouvements célestes. Le texte, d'ailleurs, n'est pas aussi explicite.

Nécessairement, j'ai ajouté ce mot pour compléter la pensée.

-- Au-dessous duquel, et par conséquent, si la décroissance du mouvement céleste était infinie, il n'y aurait plus de minimum; car, alors, le mouvement serait toujours de plus en plus petit, ainsi que le temps qui le mesurerait.

Par exemple, j'ai ajouté ces mots.

Dans un temps quelconque, qui serait ou indéfiniment de plus en plus petit, ou indéfiniment de plus grand en plus grand.

Se meuve dans un temps quelconque, lequel ici deviendrait de plus en plus petit.

 — Est exact et vrai, il n'y a qu'un seul mot dans le texte.

-- Un accroissement perpétuel, car, alors, le minimum n'existerait plus, et la durée de la révolution céleste diminuerait sans cesse.

Il n'y a pas non plus de décroissance, l'accroissement et le décroissement ont été supposés également possibles dans le mouvement du ciel. S'il y a accroissement perpétuel de vélocité, il n'y a plus de minimum ; s'il y a décroissance perpétuelle, il n'y a plus de maximum; or, ce maximum est aussi nécessaire que le minimum, puisqu'autrement le mouvement serait encore indéterminé en ce sens, aussi bien que dans l'autre.

-- Les deux changements, soit d'accélération, soit de ralentissement. Le texte n'est pas aussi formel. — Leur rapidité, d'accroissement ou de décroissance.

§ 6. Il ne resterait donc plus, après avoir supposé que le mouvement du ciel s'accélère ou se ralentit, sans cesse, il ne reste plus qu'à supposer que tantôt il se ralentit et que tantôt il s'accélère. Mais cette dernière hypothèse est encore moins acceptable que les autres, et Aristote ne s'arrête pas à la discuter.

-- Que ces alternatives, le texte n'est pas tout à fait aussi explicite.

-- N'en seraient que plus sensibles, voir plus haut § 3 ; voir aussi la Physique, livre VIII, ch. 1, § 4, page 455 de ma traduction.

Mais bornons-nous, résumé exact de tout ce qui a été démontré dans ce livre, et dans les derniers chapitres (8 et suivants ) du livre qui précède. Sur ces hautes questions, que la science moderne peut se poser aussi bien que l'antiquité, et qui sont éternelles, l'opinion d'Aristote est d'un très grand poids, comme celle de Platon ; il s'agit ici de métaphysique bien plus que d'astronomie; et l'on voit que le disciple n'est pas moins partisan que son maître de l'immuabilité des lois de la nature. Il ne semble pas que les progrès de l'esprit humain depuis le temps des Grecs soient de nature à ébranler ces grandes croyances.

CHAPITRE VII.

De la composition et du mouvement des étoiles; théories qui les supposent formées de feu. Réfutation de cette théorie. La lumière et la chaleur venues des astres ne tiennent qu'au mouvement qu'ils impriment à l'air; le mouvement, quand il est rapide, suffit pour enflammer les corps; exemple des flèches volant en l'air. Les astres ne sont pas de feu; et ils ne se meuvent pas dans le feu non plus.

§ 1. Comme suite de ce qui précède, il faut parler des corps qu'on appelle les étoiles, et essayer d'expliquer de quels éléments ces corps sont constitués, quelles en sont les formes, et quels sont leurs mouvements. Certainement, la conséquence qui semble la plus rationnelle pour nous, après les théories que nous venons de présenter, c'est de composer chacun des astres de cette même matière dans laquelle ils ont leur mouvement de translation, puisque nous avons établi qu'il y a un corps qui, par sa nature propre, est doué d'un mouvement circulaire. De même, en effet, que ceux qui prétendent que les astres sont formés de feu, ne soutiennent cette opinion que parce qu'ils croient que le corps supérieur est du feu, et qu'il semble tout simple que chaque chose se compose des éléments dans lesquels elle existe ; de même, nous aussi, nous n'avons que ce motif pour avancer ce que nous disons.

§ 2. La chaleur et la lumière que les astres nous envoient, viennent du frottement de l'air déplacé et broyé par leur translation ; car on sait que le mouvement peut aller jusqu'à enflammer et liquéfier les bois, les pierres et le fer. Il est donc très rationnel de supposer que ce qui est le plus rapproché du feu, et qui en est le plus voisin, c'est-à-dire l'air, subit le même effet que les flèches qu'on lance ; car quelquefois elles s'échauffent à ce point que leur plomb vient à fondre ; et puisqu'elles en arrivent jusqu'à s'enflammer, il faut nécessairement aussi que l'air qui les entoure, et fait cercle autour d'elles, éprouve un effet semblable. Ainsi donc ces flèches s'échauffent par leur vol dans l'air, qui, sous le coup que le mouvement lui donne, devient du feu. Or chacun des corps supérieurs se meut dans la sphère, de telle sorte, non pas qu'ils s'enflamment directement eux-mêmes, mais que l'air, qui est au-dessous de la sphère du corps circulaire, s'échauffe nécessairement par le mouvement de cette sphère, et s'échauffe le plus vivement là où le soleil se trouve retenu et enchaîné. voilà pourquoi, quand le soleil s'approche de la terre, et quand il s'élève et qu'il est au-dessus de nous, la chaleur se produit. En un mot, nous soutenons que les étoiles ne sont pas de feu, et que ce n'est pas dans le feu non plus qu'elles se meuvent.

 

Ch. VII, § 1. Cette division par chapitres semble remonter au moins jusqu'à Simplicius, qui parle ici du chapitre septième, comme nous le faisons nous-mêmes. — Les étoiles, « ou les astres; » j'ai pris indifféremment l'un ou l'autre mot.

Et essayer d'expliquer, le texte n'est pas tout à fait aussi précis.

Que nous venons de présenter, pour expliquer la nature du ciel et de la sphère supérieure.

-- De cette même matière, l'expression du texte est précisément : « de ce corps. » J'ai cru que le mot de Matière était ici plus convenable.

Puisque nous avons établi, soit dans tout ce qui précède, soit dans le VIIIe livre de la Physique, sur l'éternité du mouvement.

-- Les astres sont formés de feu, voir la Physique, livre 1, eh. 7, § 12, page 470 de ma traduction, et livre III, ch. 7, § 12, page 105. Cette opinion était surtout celle d'Héraclite.

Pour avancer ce que nous disons, à savoir que les étoiles, sans être composées de feu, enflamment l'air où elles se meuvent par la prodigieuse rapidité de leur mouvement.

§ 2. Viennent du frottement de l'air déplacé et broyé, c'est la théorie propre d'Aristote ; voir la Météorologie, livre I, ch. 3, § 20, page 18 de ma traduction.

Jusqu'à enflammer et liquéfier, il n'y a qu'un seul mot dans le texte. Ce fait
d'ailleurs est exact ; et l'on sait de reste que le frottement, quand il est violent, développe de la chaleur et produit du feu.

-- Ce qui est le plus rapproché du feu, saint-Thomas veut qu'on entende ici, la proximité de nature plutôt que celle de lieu ; l'air se rapproche davantage du feu, parce qu'il y ressemble plus que l'eau à la terre. L'air alors s'enflamme d'autant plus aisément qu'il est déjà presque du feu. Ma traduction se prête aux deux sens, comme le texte lui-même. Les /lèches qu'on lance, et dont le mouvement est si rapide qu'elles en arrivent jusqu'à s'enflammer, comme il est dit un peu plus bas. -- Il faut nécessairement, le fait est réel, puisque sans l'air cette combustion ne serait pas possible.

-- Dans la sphère, le texte est aussi vague que ma traduction ; il s'agit évidemment de la sphère supérieure, où se passe le mouvement circulaire qui emporte le ciel entier.

--- Directement, j'ai ajouté ce mot pour éclaircir davantage la pensée.

Le soleil se trouve retenu et enchaîné, il n'y a qu'un seul mot dans le texte. L'expression d'ailleurs peut paraître assez singulière; elle se rapporte évidemment à la régularité immuable de la course apparente du soleil, dans les cieux ; il semble comme enchaîné dans la route qu'il suit, chaque jour et chaque année.

-- Quand le soleil s'approche de la terre, dans sa course quotidienne apparente.

-- Et qu'il est au-dessus de nous, dans les longs jours du solstice d'été.

La chaleur se produit, cette théorie a suscité dans l'antiquité des discussions dont on peut voir la trace dans le commentaire de Simplicius, et même dans celui de saint Thomas. Je n'en parie pas, parce que ces détails regardent plus particulièrement l'histoire de l'astronomie.

Les étoiles ne sont pas de feu, la science moderne serait sans doute d'un avis contraire ; car elle suppose que les étoiles doivent avoir de la chaleur comme notre soleil, ayant une lumière propre, ainsi que lui.

Dans le feu qu'elles se meuvent, Aristote inclinait à croire que les espaces célestes sont remplis d'éther; et la science moderne semble admettre aussi cette théorie. Voir sur l'éther la Météorologie, livre I, ch. 3, § 4 et § 13, page 9 et 14 de ma traduction.

CHAPITRE VIII.

Du mouvement des astres et du ciel ; hypothèses diverses à ce sujet; difficultés de la question. Le ciel, avec tous les astres, forme un ensemble continu. -- La figure des astres est sphérique: ils n'ont pas de mouvement propre comme le soleil ; leur scintillation est causée par l'éloignement; les astres n'ont pas de rotation sur eux-mêmes, non plus que la lune; la nature ne leur a pas donné d'organes de progression. Démonstration de la sphéricité des astres et du ciel entier.

§1. [290a] Comme il semble que les étoiles se meuvent et changent manifestement de place, ainsi que le ciel tout entier, il faut de toute nécessité, pour que le changement ait lieu, ou que ces astres et le ciel restent en place, ou que tous les deux soient en mouvement, ou qu'enfin l'un des deux systèmes reste en place, tandis que l'autre se meut. Mais il est impossible que ces systèmes restent en place tous les deux, la terre y étant aussi ; car alors aucun des phénomènes que noue observons ne pourrait se produire. Nous supposons d'ailleurs, pour le moment, que la terre est immobile.

§ 2. Reste donc à penser, ou que les deux systèmes sont en mouvement, ou que l'un se meut tandis que l'autre est immobile. Si les deux se meuvent, il n'est pas possible que les vitesses des astres soient identiques à celles des cercles ; car tout corps qui se meut aura toujours une vitesse égale à la circonférence suivant laquelle il accomplit son mouvement, puisque les astres paraissent revenir au même point, en même temps que les cercles. Il se trouverait donc tout à la fois et que l'astre aurait parcouru le cercle, et que le cercle aurait fourni la course de l'astre, après avoir parcouru la même circonférence que lui. Mais il n'est pas rationnel de croire que les vitesses des astres aient le même rapport que les dimensions des cercles ; car il n'y a rien d'absurde à supposer, et au contraire il faut nécessairement supposer, que les cercles ont leurs vitesses proportionnelles à leurs grandeurs. Ce qui ne serait pas naturel, ce serait de le croire pour chacun des astres qui sont dans ces cercles ; car si le corps qui parcourt un cercle plus grand doit avoir, de toute nécessité, un mouvement plus rapide, il est également évident que, si les étoiles pouvaient se déplacer les unes dans les cercles des autres, celle-ci serait plus rapide, et celle-là plus lente. Mais dans cette situation nouvelle, les étoiles n'auraient plus de mouvement qui leur fût propre ; et elles seraient emportées par les cercles.

§ 3. Que si l'on suppose que tout cela n'est qu'un effet du hasard, on ne peut pas davantage, dans cette hypothèse, admettre que, pour tous les cas, le cercle soit à la fois plus grand, et le mouvement de l'astre qui s'y meut, plus rapide. S'il n'y a rien d'absurde à croire qu'un ou deux astres pourraient. être, par le hasard, réglés ainsi, c'est pure rêverie que de supposer que tous les astres, sans exception, puissent être, par hasard, soumis à la même loi. Dans les phénomènes de la nature, il n'y a pas de place pour le hasard, pas plus qu'on ne peut attribuer à un hasard capricieux un fait qui est partout, et qui est toujours.

§ 4. D'autre part, si l'on suppose que les cercles restent immuables et que ce sont les astres eux-mêmes qui se meuvent, cette seconde théorie ne sera pas moins déraisonnable que l'autre. I1 arrivera dès lors que les étoiles qui sont extérieures, auront un mouvement plus rapide, et que leur vitesse sera proportionnelle à la grandeur des cercles. Par conséquent, puisque la raison ne peut croire ni que les deux systèmes sont en mouvement à la fois, ni que l'un des deux, celui des étoiles, soit en mouvement tout seul, il reste que les cercles se meuvent, et que les astres soient en repos, comme enchaînés dans les cercles qui les emportent. C'est seulement ainsi qu'il n'y aura rien qui choque la raison ; car il est rationnel de supposer que la vitesse d'un cercle plus grand est plus rapide, dans un système de corps retenus et enchaînés autour d'un même centre. [290b] Et de même que, dans tous les autres cas, le corps le plus grand a plus de rapidité dans le mouvement spécial dont il est animé, de même aussi ce rapport se retrouve dans les corps animés d'un mouvement circulaire, parce que la section d'un plus grand cercle est plus grande sur les parties de la circonférence interceptées par les lignes menées du centre.

§ 5. Ainsi donc, la raison comprend très bien que le plus grand cercle aura décrit sa circonférence dans le même temps. Avec cette hypothèse, le ciel n'est pas disloqué et divisé, et elle est conforme à ce que l'on a dit sur la continuité du ciel entier.

§ 6. Nous abordons une autre question. Les astres sont de forme sphérique, ainsi que d'autres l'ont cru avant nous, et ainsi que nous avons le droit de le répéter nous-mêmes, puisque nous les faisons naître du corps du ciel, qui est sphérique également ; or, tout sphéroïde peut en soi avoir deux mouvements distincts, la rotation et la translation. Si donc les astres avaient un mouvement propre, il faudrait nécessairement qu'ils eussent l'un ou l'autre ; mais, on ne voit pas qu'ils aient aucun des deux. S'ils avaient une rotation, ils demeureraient toujours à la même place, et ils ne changeraient pas de lieu, ainsi qu'on peut l'observer et que tout le monde en convient. De plus, la raison exige que tous les astres aient le même mouvement. Or, le soleil est le seul parmi les astres qui nous paraisse soumis à cette rotation, soit à son lever, soit à son coucher ; mais ce n'est pas par lui-même que le soleil a ce mouvement rotatoire ; c'est à cause de la distance d'où nous le voyons ; car notre vue, en se portant au loin, vacille et tourbillonne à cause de sa faiblesse. C'est là aussi peut-être ce qui fait que les étoiles fixes paraissent scintiller, et qu'au contraire les planètes ne scintillent pas ; car les planètes sont voisines de nous, et notre vue a dés lors la force suffisante pour arriver jusqu'à elles et pour les bien voir. Mais pour les astres qui sont fixes et qui restent en place, comme notre vue s'étend trop loin, elle se trouble à cause de l'éloignement; son tremblement est cause que nous attribuons un mouvement à l'astre lui-même ; car il n'y a pas de différence à supposer que ce soit, ou l'objet, ou la vue, qui change et se meut.

§ 7. Mais il est tout aussi évident que les astres n'ont pas non plus de translation ; car le corps qui a un mouvement de translation doit nécessairement se tourner. Mais pour la lune, c'est la partie qu'on appelle son visage qui est toujours visible à nos yeux. En résumé, comme les corps qui se meuvent eux-mêmes doivent nécessairement avoir les mouvements qui leur sont propres, et que les astres ne paraissent pas se mouvoir selon ces mouvements spéciaux, il est évident qu'ils ne se meuvent pas par eux-mêmes.

§ 8. J'ajoute qu'il serait bien peu raisonnable de croire que la nature ne leur eût point donné quelque organe approprié à leurs mouvements ; car la nature ne fait jamais rien au hasard, et l'on ne peut supposer .qu'après s'être occupée si soigneusement des animaux, elle ait oublié des êtres aussi importants que ceux là. Mais on pourrait presque dire, puisqu'elle leur a enlevé si complètement tout ce qui pouvait servir à leur progression particulière, qu'elle a voulu les éloigner le plus possible des êtres qui ont tous les organes indispensables au mouvement.

§ 9. Ainsi, la raison nous porte à penser que [291a] le ciel entier est de forme sphérique, ainsi que chacun des astres ; car la sphère est la plus convenable de toutes les formes pour le mouvement sur soi-même, et c'est ainsi qu'un corps peut à la fois et avoir le mouvement le plus rapide possible et conserver la place qui est la sienne. Mais la forme sphérique est aussi la moins bonne pour le mouvement en avant; car c'est elle qui ressemble le moins à la forme des êtres qui produisent le mouvement par eux-mêmes, puisqu'elle n'a rien de détaché ni de proéminent, comme la figure terminée par des lignes droites, et que c'est elle au contraire qui, sous le rapport de la forme, s'éloigne le plus possible des corps qui peuvent avancer. Puis donc qu'il faut que le ciel ait le mouvement sur soi-même, et que les autres astres soient par eux seuls hors d'état de faire un mouvement progressif, il est naturel de croire que de part et d'autre il y a un sphéroïde ; car c'est ainsi surtout que l'un des deux systèmes sera mis en mouvement, et que l'autre demeurera en repos.









 

Ch. Vlll, § 1. Comme les étoiles se meuvent et changent, il n'y a qu'un seul mot dans le texte.

Ainsi que le ciel tout entier, quelques commentateurs ont cru que le Ciel comprend ici les étoiles d'abord, et en outre les planètes ; mais la suite prouve qu'il ne peut s'agir de cette distinction entre les astres.

-- Ou que ces astres et le ciel restent en place, et par conséquent, que la terre seule se meuve ; c'était le système d'Héraclide de Pont et d'Aristarque de Samos, comme le rappelle Simplicius; c'est le système qu'a adopté et démontré la science moderne, depuis Copernic et Kepler. Héraclide de Pont a été disciple de Platon et d'Aristote ; Aristarque de Samos vivait un siècle environ plus tard.

Que tous les deux soient en mouvement, c'est le système qu'adopte Aristote, en faisant la terre seule immobile. -

-- Aucun des phénomènes..., ne pourrait se produire, la raison était très forte, du moment qu'on croyait le fait exact.

Nous supposons, plus loin, ch. 13, on démontrera l'immobilité de la terre.

D'ailleurs pour le moment, j'ai ajouté ces mots.

§ 2. Les deux systèmes, le texte n'est pas aussi précis.

A celles des cercles, l'expression grecque n'est pas plus déterminée que ma traduction ; mais évidemment il s'agit des cercles sur lesquels les étoiles se meuvent, ou semblent se mouvoir. Ces cercles, plus ou moins grands, selon que l'étoile est plus ou moins éloignée de l'axe du monde ou du pôle, sont parcourus en des temps qui sont proportionnels à leur étendue. Dans les théories d'Aristote, ces cercles font partie du ciel ; et alors il reconnaît à la fois, le mouvement général du ciel et le mouvement particulier des étoiles.

-- Tout corps qui se meut, le principe est bien général et bien vague.

Une vitesse égale à la circonférence, j'ai conservé fidèlement les expressions du texte; mais il est évident qu'elles sont incomplètes, et qu'il y a là un certain nombre de phénomènes astronomiques confondus les uns avec les autres; au temps d'Aristote les anciens n'avaient pas pu s'en rendre compte suffisamment.

Revenir au même point, tous les jours et toutes les années.

-- Et que le cercle aurait fourni la course de l'astre, le texte peut signifier aussi : « et que le cercle aurait parcouru sa propre course. » La différence tient à un simple accent.

Après avoir parcouru la même circonférence que lui, l'étoile parcourant à l'équateur un plus vaste cercle, et le cercle se rétrécissant à mesure que la position de l'étoile se rapproche du pôle.

-- Il n'est pas rationnel, Aristote sent bien toutes les difficultés de la théorie qu'il soutient; mais il ne s'aperçoit pas d'où viennent ces difficultés, c'est-à-dire de l'inexactitude des observations. Il a fallu bien des siècles pour que la vérité se fit jour, même pour les plus grands esprits.

Le même rapport que les dimensions des cercles, c'est-à-dire que les étoiles ont d'autant plus de vitesse qu'elles décrivent, par leur situation dans le ciel, un plus vaste cercle.

-- Les cercles ont leurs vitesses proportionnelles à leurs grandeurs, on ne voit pas alors pourquoi les étoiles ne seraient pas comme les cercles.

-- Ce qui ne serait pas naturel, parce qu'en effet, ou croit que le ciel est emporté d'un mouvement uniforme et circulaire ; et dans cette hypothèse, il est impossible de comprendre que tous les astres n'aient pas non plus une vitesse uniforme.

-- Qui parcourt un cercle plus grand, il est sous-entendu que c'est dans un même temps que le cercle est parcouru.

-- Celle-ci serait plus rapide, c'est-à-dire que chaque étoile conserverait la vitesse qui lui est propre.

-- Dans cette situation nouvelle, le texte n'est pu aussi précis.

-- Elles seraient emportées par les cercles, il faut entendre que les étoiles, ainsi déplacées, acquerraient une vitesse proportionnelle au cercle nouveau où elles seraient situées. Il est évident que, dans tout ce passage, il reste des obscurités nombreuses; mais je n'ai pu les lever, ni à l'aide de Simplicius, ni à l'aide de saint Thomas.

§ 3. Tout cela n'est qu'un effet du hasard, voir la réfutation de la théorie du hasard dans la Physique, livre II, ch. 4, pages 29 et suiv. de ma traduction.

-- Qu'un ou deux astres, ou d'une manière plus générale : « un ou deux phénomènes. »

--- Sans exception, j'ai ajouté ces mots pour compléter la pensée.

Soumis à la même loi, le texte ici n'est pas non plus aussi formel.

§ 4. D'autre part si l'on suppose, c'est la seconde partie de l'hypothèse posée plus haut, § 2. Un des deux systèmes est supposé se mouvoir, pendant que l'autre reste immobile.

-- Les astres eux-mêmes, « ou les étoiles. »

Cette seconde théorie, le texte n'est pas tout à fait aussi formel.

Les étoiles qui sont extérieures, c'est-à-dire qui décrivent un plus grand cercle, parce que leur mouvement est parallèle à l'équateur. Par Extérieures, Simplicius entend les étoiles qui sont les plus éloignées des pôles.

Leur vitesse sera proportionnelle, voir plus haut, § 2.

Ni que les deux systèmes, celui des cercles et celui des étoiles.

-- Ni que l'un des deux, j'ai préféré cette leçon qui est celle de Simplicius.

Celui des étoiles, j'ai cru devoir ajouter ces mots, pour qu'il n'y eût pas d'équivoque possible; ils s'accordent, d'ailleurs, parfaitement avec tout le contexte.

-- Que les cercles se meuvent, le ciel alors serait, en quelque sorte, composé de cercles concentriques où les étoiles seraient attachées, conservant entre elles leurs positions respectives, et suivant le mouvement général dans lequel elles seraient emportées.

---- Comme enchaînés dans les cercles, c'est ce que donne le premier aspect des phénomènes ; et il a fallu bien du temps pour que ces illusions pussent se dissiper.

--- Il n'y aura rien qui choque la raison, ce système développé et complété par l'École d'Alexandrie a suffi à l'intelligence humaine, jusqu'à la Renaissance.

-- Dans un système de corps, le texte n'est pas aussi formel.

-- Retenus et enchaînés, il n'y a qu'un seul mot en grec.

Dans tous les autres cas, par exemple, pour la chute des graves ; plus le corps est pesant, plus sa chute est rapide ; un rocher, par exemple, tombe beaucoup plus vite qu'un caillou.

-- Dans le mouvement spécial dont il est animé, tombant, par exemple, sur une pente où il roule.

Animés d'un mouvement circulaire, au lieu de se mouvoir en ligne droite, comme les graves, quand ils tombent.

Sur les parties de la circonférence interceptées, le texte n'est pas aussi formel.

-- Par des lignes menées du centre, c'est-à-dire, par des rayons. Le sens d'ailleurs est très clair : des cercles concentriques étant donnés, il est évident que plus le cercle est grand, plus l'arc de la circonférence intercepté par les mêmes rayons est grand aussi. Les arcs s'accroissent en proportion des cercles.

§ 5. Le plus grand cercle aura décrit sa circonférence, tous les cercles étant concentriques, et tous étant soumis au même mouvement, les plus grands et les plus petits se meuvent tous dans un temps égal ; et, par exemple, ils font leur révolution dans la durée d'un jour.

Dans le même temps, que le plus petit cercle.

Le ciel n'est pas disloqué et divisé, il n'y a qu'un seul mot dans le texte.

Divisé, comme il le serait, si chaque étoile avait un mouvement spécial.

A ce que l'on a dit, voir plus haut, livre 1, ch. 9. Le ciel se meut dans toute son étendue, et les étoiles y sont fixées comme des clous brillants, qui ne peuvent se détacher du fond où ils sont posés.

§ 6. Nous abordons une autre question, le texte dit seulement : « Encore. »

Nous les faisons naître, j'ai conservé, autant que je l'ai pu, la tournure- de la phrase grecque.

Du corps du ciel, je m'arrête à ce sens, qui est celui qu'ont adopté la plupart des commentateurs, d'après Simplicius.

Qui est sphérique également, j'ai Ajouté ces mots pour compléter la pensée.

La rotation et la translation, ce sont les deux mouvements qu'ont les grands corps célestes, à commencer par la terre que nous habitons.

Un mouvement propre, outre le mouvement général et commun que leur imprime le ciel, en les emportant dans sa course circulaire.

-- Ils demeureraient toujours à la même place, il n'y a aucune nécessité que les deux mouvements soient séparés ; et sans aller plus loin, Aristote pouvait voir, par un exemple vulgaire, les tour les des enfants, qu'un même corps peut, tout à la fois, tourner sur lui-même et se déplacer.

Ils ne changeraient pas de lieu, dans le mouvement apparent que le ciel accomplit tous les jours.

La raison exige, argument tout logique, qui n'est pas conforme aux faits autant qu'on pourrait le croire.

Le même mouvement, le mouvement est à la fois rotatoire et elliptique pour tous les corps célestes ; mais la rapidité de la rotation, et la grandeur de l'ellipse varient pour chacun d'eux ; la position n'est pas identique, etc., etc.

Qui nous paraisse soumis, c'est l'apparence qui trompe nos yeux ; le soleil ne se meut pas, et il ne fait pas exception aux autres astres, comme Aristote le croyait.

A cette rotation, le texte n'est pas aussi formel. Je ne vois pas, dans les livres modernes d'astronomie, que l'on ait observé ce mouvement oscillatoire du soleil, à son lever ou à son coucher.

A ce mouvement rotatoire, le texte n'est pas aussi formel.

Vacille et tourbillonne, il n'y a qu'un seul mot en grec.

-- Les étoiles fixes, le texte dit précisément « les astres enchaînés. »

Paraissent scintiller, voir les Derniers Analytiques, livre I, ch. 13, § 2, page 79 de ma traduction.

Car les planètes sont voisins de nous, l'observation avait dès longtemps révélé ce fait, qui aurait pu, à lui seul, mettre les philosophes sur la voie du vrai système du monde. Le mouvement propre des planètes indiquait assez que le ciel n'était pas emporté d'un mouvement uniforme et continu. Saint Thomas, discutant longuement ce passage d'Aristote, fait remarquer que, parmi les planètes, celle de Mercure scintille, ainsi que l'indique le nom même qu'elle a reçu en grec. Toute cette discussion de saint Thomas, comme celte de Simplicius, est fort importante pour l'histoire de l'astronomie.

Pour arriver jusqu'à elles, le texte n'est pas tout à fait aussi explicite.

Qui sont fixes et qui restent en place, il n'y a qu'un seul mot dans le texte grec.

Son tremblement est cause, la scintillation des étoiles tient, sans doute, à ce qu'elles ont une lumière propre, tandis que les planètes empruntent la leur au soleil.

Ou l'objet ou la vue, les illusions d'optique qu'on se fait si souvent, prouvent que cette théorie d'Aristote est juste.

Change et se meut, il n'y a qu'un seul mot dans le texte.

§ 7. Les astres, c'est-à-dire les étoiles fixes et les planètes.

De translation, peut-être faudrait-il ajouter : « circulaire. »

Doit nécessairement se tourner, ceci semble supposer le mouvement rotatoire, outre le mouvement de translation ; car autrement, il est facile de supposer, comme pour la lune, qu'un corps puisse très- bien faire le tour d'un autre corps, en lui montrant toujours la même face.

Qui est toujours visible à nos yeux, cette observation est parfaitement exacte.

En résumé, voir, un peu plus haut, le début du § 6.

Les mouvements qui leur sont propres, et il n'y a que deux mouvements de ce genre, la rotation et la translation, id. ibid.

Selon ces mouvements spéciaux, le texte n'est pas tout à fait aussi formel.

-- Qu'ils ne se meuvent pas par eux-mêmes, et qu'ils sont simplement emportés tous ensemble par le mouvement du ciel, où ils sont attachés, et comme « enchaînés» fixement.

§ 8. Ne leur eût point donné, sous-entendu : « s'ils avaient dû avoir un mouvement propre. » J'ai été sur le point de faire cette addition indispensable, dans le texte même.

-- Quelqu'organe approprié à leurs mouvements, dans le Timée, Platon s'arrête longtemps à cette idée que le monde, étant sphérique et tournant sur lui-même, n'a besoin ni de mains ni de pieds, pour avancer dans le mouvement qui lui est propre ; voir la traduction de M. V. Cousin, page 124. Il est probable qu'Aristote a ici des réminiscences des théories de son maître. Seulement, à la place de Dieu, créant le monde, c'est la nature intelligente et ne faisant rien au hasard.

Des êtres, j'ai dû prendre un terme très général, par-ce que le texte est tout à fait indéterminé.

Les éloigner, c'est-à-dire, « les rendre différents autant que possible. » C'est d'ailleurs une idée assez singulière d'assimiler les grand corps célestes aux animaux que nous connaissons, et qui sont si peu de chose.

§ 9. Ainsi la raison nous porte à penser, ceci est le résumé de tout ce chapitre. La sphère est la forme du ciel entier et de chacun des astres qui le peuplent, planètes ou étoiles fixes. On peut voir d'ailleurs comment l'antiquité procédait pour éclaircir ces problèmes ; c'était surtout par des arguments logiques, bien plus que par l'observation patiente et exacte des phénomènes. Aristote, néanmoins, est un des philosophes qui ont, le plus constamment, recommandé l'observation des faits, comme base de toute théorie solide; voir, sur ce point spécial, ma traduction de la Météorologie, préface, pages XLI!l et suiv.

La plus convenable de toutes les formes, c'est la théorie et presque les expressions du Timée, page 123 de la traduction de M. V. Cousin.

Le mouvement sur soi-même, c'est-à-dire la rotation, mouvement du ciel entier et auquel la terre seule peut échapper, parce qu'il faut que le centre soit immobile, d'après les idées d'Aristote.

C'est ainsi qu'un corps, l'expression du texte est tout à. fait indéterminée.

Pour le mouvement en avant, sans doute, s'il s'agit des animaux tels que nous les voyons ici-bas ; mais il n'en est pas de même pour les corps célestes.

-- Rien de détaché, comme le sont les jambes et les bras dans le corps humain, et les organes correspondants, pour le corps des animaux.

La figure terminée par des lignes droites, il faut entendre ceci d'une manière très générale et très large, comme je viens de le faire pour le corps des animaux, doués d'un mouvement de progression.

Le mouvement sur soi-même, la rotation d'un sphéroïde, De part et d'autre il y a un sphéroïde, j'ai conservé l'indétermination du texte, dont le sens d'ailleurs n'est pas douteux.

-- Des deux systèmes, j'ai ajouté ces mots pour compléter la pensée.

--- Et que l'autre, c'est-à-dire tout le système des astres, qui restent fixés au ciel, sans avoir un mouvement propre. Le ciel seul se meut, et tout est emporté dans son mouvement général, hormis la terre qui demeure toujours immobile.

-- Ce chapitre est un de ceux qui méritent le plus d'attention, à la fois parce qu'il présente l'ensemble des théories d'Aristote sur le système du monde, et aussi, parce que ces théories, complétées plus tard par les travaux astronomiques de l'École d'Alexandrie, ont universellement prévalu jusqu'au temps de Copernic et de Kepler.

CHAPITRE IX.

Fausseté et insuffisance des théories qui croient à une harmonie des sphères, et qui supposent que les astres doivent faire du bruit dans leur course. L'observation atteste que ce prétendu bruit n'existe pas; explication qu'on donne de ce silence; les forgerons; réfutation des Pythagoriciens. Causes ordinaires du bruit que font les corps ; conditions essentielles ; les astres ne les remplissent pas; prévoyance admirable de la nature.

§ 1. On doit voir évidemment, d'après tout ce qui précède, que, quand on nous parle d'une harmonie résultant du mouvement de ces corps pareille à l'harmonie de sons qui s'accorderaient entr'eux, on fait une comparaison fort brillante, sans doute, mais très vaine; ce n'est pas là du tout la vérité. Mais en effet il y a des gens qui se figurent que le mouvement de si grands corps doit produire nécessairement du bruit, puisque nous entendons autour de nous le bruit que font des corps qui n'ont ni une telle masse, ni une rapidité égale à celle du soleil et de la lune. Par là, on se croit autorisé à conclure que des astres aussi nombreux et aussi immenses que ceux qui ont ce prodigieux mouvement de translation, ne peuvent pas marcher sans faire un bruit d'une inexprimable intensité. En admettant d'abord cette hypothèse, et en supposant que ces corps, grâce à leurs distances respectives, sont pour leurs vitesses dans les rapports mêmes des harmonies, ces philosophes en arrivent à prétendre que la voix des astres, qui se meuvent en cercle, est harmonieuse. Mais comme il serait fort étonnant que nous n'entendissions pas cette prétendue voix, on nous en explique la cause, en disant que ce bruit date pour nos oreilles du moment même de notre naissance. Ce qui fait que nous ne distinguons pas le bruit, c'est que nous n'avons jamais eu le contraste du silence, qui y serait contraire ; car la voix et le silence, se font ainsi distinguer réciproquement l'un par l'autre. Or, de même que les forgerons, par l'habitude du bruit qu'ils font, n'en perçoivent plus la différence, de même aussi, dit-on, il en advient pour les hommes. Cette supposition, je le répète, est fort ingénieuse et fort poétique ; mais il est tout à fait impossible qu'il en soit ainsi.

§ 2. En effet, non seulement il serait absurde que l'on n'entendit rien, phénomène dont on essaye de nous donner l'explication que nous venons de rappeler; mais encore il serait bien impossible que l'on n'éprouvât pas quelque chose de plus, indépendamment même de cette simple sensation. Ainsi, les bruits, quand ils sont excessifs, disloquent et brisent les masses même des corps inanimés ; et, par exemple, le bruit du tonnerre fait rompre les pierres [291b] et les corps les plus durs. Or, avec ce nombre de corps qui se meuvent, et avec l'intensité du son qui se proportionnerait à la grandeur de tous ces corps en mouvement, le bruit devrait nécessairement arriver jusqu'à nous, énormément augmenté et avec une force tout à fait incalculable.

§ 3. Mais la raison comprend sans peine que nous ne devons rien entendre, et que les corps d'ici-bas ne doivent éprouver aucune action violente, attendu que les astres ne font pas de bruit. Nous allons voir en même temps, et la cause de ces phénomènes, et la confirmation de la parfaite vérité de ce que nous avons dit ; car ce doute même, qui a été soulevé par les Pythagoriciens, et qui leur a fait croire à une harmonie résultant du mouvement des sphères, va servir de preuve à nos théories. Oui, il est bien vrai que tous les corps qui ont un mouvement propre font du bruit, et qu'ils frappent un certain coup dans l'air ; mais les corps retenus et enchaînés dans un système qui est lui-même en mouvement, et qui y sont compris comme les parties diverses le sont dans un même bateau, ne peuvent jamais faire de bruit, non plus que le bateau n'en fait quand il est en mouvement sur la rivière.

§ 4. Ici néanmoins on pourrait bien faire les mêmes raisonnements, et trouver étonnant que, dans un si puissant navire, le mât qu'il transporte et la proue ne fissent pas un bruit considérable, ou que le bateau en naviguant n'en fit également aucun. Mais on peut répondre que sans doute un corps qui est mu dans un autre corps, qui ne l'est pas, peut bien faire du bruit; mais il est impossible qu'il en fasse dans un objet qui est mu d'une manière continue, et qui ne produit pas lui-même de percussion.

§ 5. Par conséquent, on doit dire, que si les corps des astres étaient emportés, au travers d'une masse d'air répandue dans tout l'univers, ou d'une masse de feu, comme tous ces philosophes le prétendent, le bruit que ces corps devraient faire serait nécessairement d'une force surnaturelle; et si ce bruit existait, il parviendrait bien jusqu'à la terre et la déchirerait en pièces. Ainsi donc, puisque nous n'observons rien de pareil, aucun des astres ne doit avoir un mouvement analogue à celui des êtres animés, ni ne doit subir un mouvement forcé et violent. On dirait que la nature a eu la prévision de ce qui en devrait résulter, et que, si le mouvement n'était pas ce qu'il est, rien de ce qui est ici-bas ne subsisterait tel que nous le voyons.

Nous avons donc prouvé que les astres sont sphéroïdes, et qu'ils n'ont pas un mouvement qui leur soit propre.









 

Ch. IX, § 1. Que, quand on nous parle, la suite prouve que cette théorie appartient aux Pythagoriciens. Platon a parlé aussi de l'harmonie du monde; mais c'est dans un autre sens ; voir le Timée, page 122, et aussi sur la marche des sphères, pages 134 et 135.

Ce n'est pas là du tout la vérité, c'est-à-dire que cette théorie séduisante n'est pas conforme aux faits qu'elle prétend expliquer.

Doit produire nécessairement du bruit, et comme ce bruit ne saurait être irrégulier, on en conclut qu'il est parfaitement harmonieux.

-- Nous entendons autour de nous, il est évident qu'on ne peut faire aucune assimilation raisonnable entre les corps que noua voyons ici-bas et les corps célestes.

-- Celle du soleil et de la lune, la marche de la lune est en effet très rapide; mais ceci doit être compris en un sens tout différent que ne le comprend Aristote. Le soleil décrivait, pour lui, l'immense tour que nos yeux croient lui voir faire chaque jour dans la voûte du ciel.

-- Dans les rapports mêmes des harmonies, les sons ont entr'eux des rapports qu'avaient fixés les Pythagoriciens; et dans l'École même d'Aristote, Aristoxéne avait fait faire de grands progrès à, la science de l'acoustique et de l'harmonie. La science moderne n'a pas trouvé que la loi des distances entre les grands corps célestes, et particulièrement les planètes, eût la régularité qu'on attendait. Ce sont peut-être les faits bien observés qui lui manquent.

-- La voix des astres, j'ai conservé l'expression grecque elle-même.

Le contraste du silence, le texte n'est pas tout à fait aussi précis.

-- Les forgerons, ou peut-être plutôt : « les planeurs en cuivre. »

-- Et fort poétique, le mot dont se sert Aristote, sans doute par ironie, signifie « musical » aussi bien que « poétique » ; et cette expression se réfère davantage à la prétendue harmonie des sphères.

 -- Il est tout à fait impossible qu'il en soit ainsi, c'est en interrogeant les faits qu'on pourra s'en convaincre.

§ 2. Que nous venons de rappeler, le texte n'est pas aussi formel.

Indépendamment même de cette simple sensation, l'expression grecque est très concise; mais le sens que j'ai adopté me semble le plus justifié par le contexte.

Le bruit du tonnerre, voir la Météorologie, livre III, ch. 1, § 11, page 220 de ma traduction.

--- Disloquent et brisent, il n'y a qu'un seul mot dans le texte.

Fait rompre les pierres, ce n'est pas le bruit seul du tonnerre qui produit ces effets étranges; c'est l'action de l'électricité, que les Anciens connaissaient très peu.

§ 3. Aucune action violente, du genre de celle qu'éprouvent les corps atteints par le bruit du tonnerre.

-- Attendu que les astres ne font pas de bruit, c'est résoudre la question par la question. Mais plus haut, chapp. 5 et suiv., il a été démontré, ou du moins on a essayé de démontrer que le ciel avait un mouvement général de translation, et que les étoiles (ch. 8) n'avaient pas un mouvement particulier. Elles sont attachées à. la voûte céleste, qui les emporte avec elle.

Oui, il est bien vrai, le texte n'est pas aussi formel.

-- Qui ont un mouvement propre, ce que n'ont pas les étoiles. La raison d'ailleurs que donne Aristote n'est pas très forte, et les corps célestes ont un mouvement propre, sans faire plus de bruit.

Retenus et enchaînés, il n'y a qu'un seul mot dans le texte.

Dans le système, le texte n'est pas tout à fait aussi précis.

-- Non plus que le bateau n'en fait, ceci n'est pas très exact, et le bateau sans faire beaucoup de bruit, en fait nécessairement toujours par son contact avec l'eau.

§ 4. Les mêmes raisonnements, qu'on vient de faire un peu plus haut, à la fin du § 2, pour démontrer que le bruit des astres devrait arriver jusqu'à nous.

-- Le mât qu'il transporte, sans que ce mât ait par lui-même un mouvement propre. C'est une pièce du bateau, et qui fait partie de tout son système, aussi bien que la proue.

Mais on peut répondre, le texte n'est pas aussi formel.

Qui ne produit pas lui-même de percussion, la raison alléguée ici n'est pas très décisive.

§ 5. Par conséquent, résumé de toute la discussion précédente : si les corps célestes avaient un mouvement propre, ils feraient du bruit, n'eussent-ils à traverser que de l'air ou du feu.

-- Comme tous ces philosophes le prétendent, ou bien : « comme tout le monde le prétend. »

Et la déchirerait en pièces, par les causes qui ont été dites plus haut, § 2,

Un mouvement analogue à celui des êtres animés, c'est-à-dire un mouvement qu'il se donnerait spontanément à lui-même, comme se le donnent les animaux. Le texte d'ailleurs n'est pas aussi précis.

La nature a eu la prévision, Simplicius et, après lui, saint Thomas disent qu'Aristote, en prêtant à la nature tant de prévoyance, la confond évidemment avec la providence même de Dieu. Voir plus haut, ch. 8, § 8.

-- Les astres sont sphéroïdes, volr plus haut, ch. 8, § 6.

Un mouvement qui leur soit propre, ibid., §§ 2 et suivants.

CHAPITRE X.

.Positions respectives des astres entr'eux : Citation de Traités d'astronomie. Distances des astres les uns relativement aux autres ; leurs vitesses proportionnelles à leurs distances. Démonstrations des mathématiques.

§ 1 Quant à l'ordre des astres entr'eux et à leur position respective, les uns étant les premiers et les autres ne venant qu'ensuite, et quant à ce qui concerne leurs distances réciproques, je renvoie aux Ouvrages d'Astronomie, où l'on pourra étudier ces questions, et où il en est traité avec des développements suffisants.

§ 2. C'est un fait que les mouvements de chacun des astres sont proportionnels à leurs distances, les uns parmi ces mouvements étant plus rapides, [292a] et les autres plus lents ; car on admet que la dernière et extrême circonférence du ciel est unique, simple, et la plus rapide de toutes, tandis que les mouvements des autres sphères sont plus lents et sont multiples, parce que chacun d'eux accomplit son mouvement selon le cercle qu'il fournit à l'inverse du ciel. Il est tout naturel d'ailleurs que l'astre qui est le plus rapproché de la sphère simple et primordiale, parcoure son cercle dans le temps le plus long ; que celui qui est le plus éloigné de cette même sphère, parcoure son cercle dans le temps le plus court; et que, pour les autres astres, ce soit toujours le plus proche qui mette le plus de temps, et le plus éloigné qui en mette le moins. C'est qu'en effet, l'astre plus rapproché est celui qui ressent le plus vivement l'action de la force qui le domine, et le plus éloigné de tous la ressent le moins, à cause même de la distance où il est, les intermédiaires l'éprouvant dans la proportion de leur éloignement, ainsi que le démontrent les mathématiciens.




 

Ch. X, § 1. Des astres, il ne s'agit plus ici que des planètes, et les observations ne pouvaient pas être assez avancées chez les Anciens, pour qu'on sût quoi que ce soit sur l'ordre et la distance des étoiles fixes entre elles. Il faut entendre que les Astres comprennent ici les planètes, la terre, la lune et le soleil.

-- Les uns venant les premiers, ceci peut s'entendre à la fois, et de ceux qui sont les plus proches de la terre, et de ceux qui sont les plus proches de la circonférence extrême du ciel.

-- Aux Ouvrages d'Astronomie, il est probable qu'Aristote veut s'en référer ici à ses propres ouvrages sur l'astronomie, comme plus loin, ch. II dans ce livre. Il en est encore question, sous une désignation plus suffisante, dans la Météorologie, livre I, ch. 3, § 2, page 8 de ma traduction, et ch. 8, § 6, page 46. Diogène de Laérte parle d'un Traité d'astronomie en un Livre, édition de Firmin Didot, livre V, ch. 1, page 416, ligne 50. Il est d'ailleurs évident par toutes les discussions qui remplissent le Traité du Ciel et la Météorologie, que les connaissances d'Aristote en astronomie devaient être aussi étendues que son temps le comportait.

§ 2. Les mouvements de chacun des astres, c'est-à-dire des planètes, placées en effet à des distances variables par rapport au soleil, qui leur sert, à toutes, de centre, comme Aristote croyait que la terre leur en servait.

Les uns plus rapides, les autres plus lents, c'est un fait démontré par la plus simple observation des planètes.

Unique, simple, il n'y a qu'un seul mot dans le texte.

Et sont multiples, ils sont plusieurs, précisément parce que les uns sont plus rapides, et les autres plus lents.

A l'inverse du ciel, les planètes allant d'occident en orient, tandis que le reste du ciel semble aller d'orient en occident.

-- Que l'astre, ou plutôt : « la planète. »

Simple et primordiale, la circonférence extrême du ciel, qui est la plus éloignée possible de la terre.

-- De cette même sphère, j'ai ajouté ces mots pour éclaircir tout à fait la pensée.

L'action de la force qui le domine, et qui ralentit en quelque sorte la course de la planète, selon qu'elle est plus ou moins éloignée. Le texte d'ailleurs n'est pas aussi explicite.

-- Ainsi que le démontrent les mathématiciens, Aristote en appelle aussi aux mathématiques dans la Météorologie, livre 1, ch. 3, § 5, page 10 de ma traduction.

CHAPITRE XI.

La forme des astres doit être sphérique; démonstration de ce principe; arguments métaphysiques; arguments tirés de la forme particulière de la lune. Citations de Traités d'optique et de Traités d'astronomie.

§ 1. La forme qu'on peut supposer avec le plus de raison à chacun des astres, c'est la forme sphérique ; car puisqu'il a été démontré qu'aucun d'eux ne peut naturellement avoir un mouvement propre, et comme la nature ne fait quoi que ce soit sans motif raisonnable ni en vain, il est évident aussi qu'elle a donné aux corps immobiles la forme qui est la moins mobile de toutes. Or, la sphère est le corps le moins mobile qu'on puisse imaginer, parce qu'elle n'a point d'organes pour le mouvement. Donc, évidemment la masse de chacun des astres doit être sphérique.

§ 2. J'ajoute que tous les astres ensemble, et un astre quelconque considéré isolément, doivent être tout pareils à cet égard. Or, il a été démontré dans les Traités d'optique, que la lune est sphérique ; car autrement elle n'aurait ni ces accroissements, ni ces décroissances, se présentant le plus souvent à nos yeux sous forme de disque ou de courbe tronquée, et ne se présentant qu'un seul instant à demi-pleine. D'autre part, on a démontré aussi dans les Traités d'astronomie, que les éclipses du soleil ne pourraient pas, sans cela, avoir l'apparence de disque. Par conséquent, un astre quelconque étant sphérique, il faut évidemment aussi que tous les autres astres le soient également.





 

Ch. §  1. C'est la forme sphérique, cette question a été déjà discutée plus haut, ch. 8, § 6, sans être aussi développée qu'elle l'est ici. Les commentateurs ont cru voir dans la démonstration d'Aristote un cercle vicieux ; tantôt il prouve que le astres sont de forme sphérique, parce qu'ils n'ont pas de mouvement, et tantôt il prouve qu'ils n'ont pas de mouvement parce qu'ils sont de forme sphérique. Alexandre d'Aphrodisée défendait Aristote contre cette critique, que renouvelle Simplicius. St Thomas est de l'avis d'Alexandre.

-- Il a été démontré, voir plus haut, ch. 8, §§ 6 et suiv. Les astres n'ont ni mouvement de rotation sur eux-mêmes, ni mouvement de translation dans l'espace.

Un mouvement propre, immobiles chacun à leur place, ils sont transportés circulairement avec l'ensemble du ciel.

La nature ne fait quoi que ce soit sans motif raisonnable, voir plus haut ch. 8, § 8, page 165, où le même axiome est invoqué.

Aux corps immobiles la moins mobile, cette opposition de mots est dans le texte. Cette raison a déjà été donnée plus haut, ch. 8, § 9. On peut voir aussi le Timée de Platon, page 124, traduction de M. V. Cousin.

Elle n'a point d'organes, comme il y en a dans les animaux, par exemple.

§ 2. J'ajoute, second argument pour démontrer la sphéricité des astres; celui-ci est tiré de l'observation des faits : la lune est certainement sphérique; donc tous les autres astres doivent l'être. Cette induction est parfaitement légitime dans toutes les oeuvres de la nature.

Tous les astres ensemble, et un astre quelconque, voir plus haut le même argument ch. 8, § 6.

Dans les Traités d'optique, le catalogue de Diogène de Laérte mentionne un Traité d'optique, en un livre, à côté d'un Traité d'astronomie, livre V, ch. 1, page 116, ligne 51, édition Firmin Didot.

-- Que la lune est sphérique, la conclusion était ingénieuse ; car si la lune n'était pas sphérique, il était impossible d'expliquer les phases qu'elle présente.

Qu'un seul instant, durant le cours de sa révolution mensuelle. Si la lune était toujours à demi-pleine, on ne pourrait pas juger si elle est ou non sphérique ; mais ses autres phases démontrent bien sa sphéricité, et elle n'est demi-pleine que durant un instant inappréciable.

Sans cela, j'ai ajouté ces mots qui m'ont paru tout à fait indispensables.

L'apparence de disque, l'expression est insuffisante; et ce ne sont pas précisément les éclipses qui ont cette apparence; mais la lune, en passant devant le soleil et en l'occultant pour nous paraît sous forme de disque, et on voit alors exactement quelle est sa forme.

-- Il faut évidemment, c'est une conclusion qui s'appuie à la fois sur la raison et sur les faits ; car les observations qui s'appliquent à la lune s'appliquent aussi aux autres planètes.

CHAPITRE XII.

Difficulté et grandeur des questions agitées dans ce traité. Anomalies apparentes dans le mouvement des astres ; observations personnelles de l'auteur; occultation de la planète de Mars par la lune. Témoignages des Égyptiens et des Babyloniens, les plus exacts des astronomes. — De la répartition irrégulière du mouvement dans les diverses orbites ; considérations métaphysiques sur la distribution de l'activité dans toute la nature : les animaux, les plantes et les astres. — Résumé sur le mouvement universel.

§ 1. Comme il se présente ici deux questions, où tout le monde peut se sentir embarrassé, nous essaierons d'exposer ce qu'il nous en semble, bien persuadé que le courage mérite d'être récompensé par le respect plutôt que d'être accusé de témérité, si, par un amour et une soif insatiable de la philosophie, on se satisfait même, de solutions incomplètes, en se livrant aux recherches les plus ardues. Voici l'une de ces questions ; c'est qu'au milieu de tant de merveilles du même genre, ce n' est pas la moins étonnante que de savoir comment il se fait que les corps qui sont le plus éloignés de la révolution primordiale, n'ont pas toujours le plus grand nombre de mouvements, et que ce sont parfois les corps intermédiaires qui en out un nombre plus grand. Cependant il semblerait tout naturel de supposer que le corps primitif ayant une révolution unique, le corps qui en est le plus proche devrait avoir aussi le moins de mouvements possibles après lui, c'est-à-dire deux mouvements ; le suivant en devrait avoir trois, et ainsi de suite, selon telle autre série analogue. Mais dans l'état actuel des choses, il en est tout le contraire ; et par exemple, le soleil et la lune ont moins de mouvements que quelques-uns des astres errants. [292b] Cependant il y a des astres qui, comparativement au soleil et à la lune, sont plus loin du centre, et sont plus rapprochés du corps primitif. Il en est même pour lesquels on peut s'en convaincre à la simple vue. Ainsi, nous avons nous-mêmes observé que la lune, étant à moitié pleine, est entrée dans l'astre de Mars ; et cet astre après avoir été caché par la partie obscure de la lune, en est sorti par le côté éclatant et lumineux. C'est là précisément aussi ce qu'attestent, pour bien d'autres astres, les Égyptiens et les Babyloniens, qui ont fait les plus minutieuses études depuis de bien longues années; et c'est d'eux que nous avons reçu un bon nombre de notions dignes de foi, sur chacun des astres.

§ 2. On peut se demander, en second lieu, avec non moins de droit, comment il se fait que, dans la première orbite, il y a une si grande quantité d'astres qu'ils paraissent être innombrables dans toute leur ordonnance, tandis que, pour les autres orbites, il n'y a qu»un seul astre dans chacune d'elles ; car on n'en voit pas deux ni plusieurs, enchaînés dans la même orbite.

§ 3. C'est une belle entreprise que de chercher à étendre même un peu davantage nos connaissances sur ces grands objets, quoique nous n'ayons que de bien rares occasions pour aborder ces problèmes, et que nous soyons placés à une prodigieuse distance du lieu où ces phénomènes s'accomplissent. Quoiqu'il en soit, en se mettant au point de vue que nous allons indiquer, on se convaincra que la question soulevée par nous ne dépasse pas la portée de la raison. Nous avons le tort de ne considérer les astres que comme de simples corps, et comme des unités ou monades, qui ont bien un certain ordre entr'elles, mais qui sont tout à, fait privées de vie et inanimées. Loin de là, il faut au contraire supposer que les astres ont une certaine action et une certaine vie ; car en faisant cette supposition, on voit que l'ordre présent des choses n'a rien dont la raison puisse se choquer.

Le bien suprême en effet, parait consister pour l'être souverainement parfait, à être sans action ; pour l'être qui en approche le plus, à n'avoir qu'une faible action et une action unique ; et enfin pour ceux qui en sont de plus en plus éloignés, à en avoir proportionnellement de plus en plus. Il en est ici comme pour le corps humain. Parmi les individus, l'un est bien portant, même sans aucun exercice ; l'autre n'a besoin que d'une petite promenade ; à tel autre, il faut de la lutte, de la course, et un mouvement énergique ; tel autre enfin pourrait avoir ce bien de la santé et quelqu'autre bien encore avec elle, sans prendre la moindre espèce de soin.

§ 4. Mais que tout réussisse à souhait, c'est fort difficile, soit pour plusieurs choses en une seule fois, soit à plusieurs reprises consécutives ; et par exemple, il serait très impossible de faire tomber sur les mêmes points mille osselets de Chios, tandis qu'il est bien plus aisé d'en faire tomber un ou deux. De même encore, quand il faut faire une première chose en vue de telle autre, puis celle-là pour une seconde, puis cette seconde pour une troisième, on peut plus aisément réussir deux ou trois fois ; mais plus il y a de moyens termes, plus le succès devient difficile et douteux. [293a] Aussi doit-on penser que l'action des astres est à peu près aussi comme celle des animaux et des plantes. Parmi les êtres de cet ordre, ce sont les actions de l'homme qui sont les plus nombreuses, puisque l'homme peut atteindre à beaucoup de biens ; et par conséquent, il fait beaucoup de choses, comme il fait aussi certaines choses en vue de certaines autres. Mais pour l'être qui est souverainement parfait, il n'a plus aucun besoin d'action ; car il est précisément à lui-même sa propre fin. Or, l'action suppose toujours deux termes, le but final qu'on poursuit, et le moyen qu'on emploie pour y parvenir. Les autres animaux ont moins d'action que l'homme ; et quant aux plantes, elles n'ont qu'une fort petite action, ou peut-être même n'en ont-elles qu'une seule.

§ 5. En effet, il peut y avoir ou une fin unique que l'on peut atteindre, ainsi que l'homme atteint la sienne ; ou bien même tous les intermédiaires, quelque nombreux qu'ils soient, sont indispensables pour mener au bien suprême. Ici on a ce bien parfait, et on le possède à plein ; là on y tend, et l'on en approche avec peu de peine et de moyens ; ailleurs, au contraire, il en faut beaucoup ; parfois on n'essaye même pas d'y parvenir, et l'on se contente d'approcher du dernier terme.

§ 6. Par exemple, si c'est la santé qui est le but qu'on se propose, il y a tel corps qui est toujours en pleine santé ; tel autre doit maigrir pour se bien porter ; tel autre doit courir et maigrir tout ensemble ; tel autre encore doit prendre quelque précaution préalable, en vue de cette course qu'il doit faire ; et par conséquent, il y a une grande multiplicité de mouvements. Il est tel autre moyen qui est tout à fait incapable d'aller jusqu'à procurer la santé ; mais il peut simplement contribuer à faire courir et à faire maigrir ; et c'est l'un de ces deux résultats qui est le but final de ces moyens préliminaires.

§ 7. Dans tous les cas, le mieux c'est d'atteindre le but poursuivi. Si l'on ne peut pas toujours y arriver infailliblement, c'est d'autant mieux qu'on se rapproche davantage de ce bien parfait. Voilà pourquoi la terre ne se meut pas du tout absolument ; et que les corps qui sont près d'elle n'ont que des mouvements très faibles ; car ces corps n'arrivent pas jusqu'à l'extrême limite. Mais ils vont aussi loin qu'ils le peuvent, selon la mesure où ils ressentent l'influence du principe le plus divin. Le premier ciel n'a besoin pour y parvenir que d'un seul mouvement. Les corps intermédiaires qui sont placés entre le premier ciel et les dernières limites, y arrivent bien aussi ; mais pour y arriver, ils ont besoin d'un plus grand nombre de mouvements.

§ 8. Ainsi, pour la question soulevée plus haut, à savoir qu'après la première orbite, qui est seule et unique, il y a une foule énorme d'astres divers, et qu'ensuite pour les autres orbites, chacun des corps y a des mouvements qui leur sont spéciaux et particuliers, on pourrait bien répondre d'abord que cette disposition des choses est tout à fait conforme à la raison, et que, dans tout ce qui regarde la vie et en général chaque principe, il faut penser que le premier terme l'emporte de beaucoup sur les autres.

§ 9. De cette façon, le principe qui nous occupe ici serait tout à fait rationnel ; car la première cause, qui est unique, communique le mouvement à une foule de corps divins, tandis que les autres causes secondaires, qui sont très nombreuses, [293b] ne meuvent chacune qu'un seul de ces corps. En effet, chaque planète prise à part, a un plus grand nombre de mouvements ; et de cette manière, la nature égalise les choses et met entr'elles un certain ordre, soumettant une multitudes de corps au mouvement qui est unique, et donnant un grand nombre de mouvements au corps qui est seul et unique en son espèce.

§ 10. En second lieu, si les autres orbites n'agissent que sur un seul corps, c'est que les orbites qui précèdent la dernière, et celle qui n'a plus qu'un seul astre, donnent le mouvement à plusieurs corps. La dernière sphère, en effet, se meut, retenue et enchaînée dans plusieurs autres sphères ; et chaque sphère se trouve être un corps. Ainsi donc, l'office de la sphère la plus éloignée est commun à toutes les autres ; car chacune des sphères spéciales est précisément l'orbite propre qu'elle décrit naturellement. Ce mouvement universel vient en quelque sorte s'y adjoindre ; et tout corps fini n'a qu'une puissance finie comme lui-même.

§ 11. En résumé, nous avons expliqué, pour les astres qui sont mus d'un mouvement circulaire, ce qu'ils sont dans leur essence, dans leur forme, dans leur translation et dans leur ordre respectif.












 

Ch. XII, § 1. Deux questions, elles sont énoncées un peu plus bas : 1° Pourquoi la multiplicité des mouvements pour les corps célestes ne va-t-elle pas en croissant régulièrement depuis la révolution extrême, qui est la plus simple de toutes, jusqu'à la terre qui est en repos; 2° Pourquoi y a-t-il tant de corps dans la dernière sphère, et n'y en a-t-il qu'un seul dans les sphères subséquentes, jusqu'au globe terrestre. Ces deux questions sont, en effet, de grande importance ; et la science moderne peut toujours se les poser, bien . que ce soit sous une autre forme. Le nombre des planètes s'est énormément accru de nos jours, et il est bien probable qu'on en découvrira encore.

Que le courage mérite d'être récompensé, le texte n'est pas aussi développé. — Un amour et une soif insatiable, il n'y a qu'un seul mot dans le texte.

--- Voici l'une de ces questions, le texte est beaucoup moins précis.

Le plus grand nombre de mouvements, le mot dont se sert ici le texte signifie, en effet, bien plutôt le nombre que l'intensité des mouvements. J'ai été sur le point cependant de me décider pour ce dernier sens, quoique la suite du contexte y soit contraire. Au temps d'Aristote, la science astronomique était assez avancée pour qu'on eût reconnu aux grands corps célestes plusieurs espèces de mouvements. Il m'aurait semblé plus naturel de comprendre ainsi la pensée d'Aristote, et le commentaire de Simplicius, d'ailleurs assez concis sur ce passage, aurait pu sembler donner raison à cette interprétation. Mais saint Thomas rappelle que les astronomes du temps de Platon et d'Aristote, Eudoxe et Callippe, avaient démontré que les corps des différentes sphères avaient plusieurs espèces de mouvements divers ; et cette citation de saint Thomas est tirée de la Métaphysique, ( livre XII, ch. 8, page 205 de la traduction de M. V. Cousin ), dont il faut rapprocher toutes les théories qui sont ex-posées ici. Dans la Métaphysique, le nombre total des sphères est porté à 55 ; ibid. page 210.

-- Les corps intermédiaires, parmi lesquels sont le soleil et la lune, comme il est dit plus bas.

-- Une révolution unique, celle qui semble s'accomplir tous les jours sous nos yeux, d'orient en occident

Que quelques-uns des astres errants, j'ai conservé toute l'expression grecque, au lieu de prendre la simple expression de planètes.

Plus loin du centre, c'est-à-dire de la terre, considérée comme le centre du monde.

Du corps primitif, c'est-à-dire la voûte du ciel, qui est la plus reculée et la dernière des sphères.

Ainsi, nous avons nous-même observé, la mention de cette observation est certainement fort curieuse, et elle atteste péremptoirement les travaux personnels d'Aristote en astronomie ; mais on ne voit pas assai nettement, en quoi elle contribue à la démonstration que l'on poursuit ici.

Dans l'astre de Mars, ou, en d'autres termes, dans la planète de Mars, qui est, après la terre, la plus rapprochée du soleil. Ceci prouve en effet que Mars est plus éloigné de la terre que la lune ; mais cela ne constate en rien le nombre des mouvements que Mars peut avoir relativement à la lune ; et il semble que c'est ici la seule question.

-- Les Égyptiens et les Babyloniens, ce témoignage d'Aristote est d'une grande importance, et il a été bien souvent allégué. Dans la Météorologie, livre 1, ch. 6, § 9, pages 33 et suiv. de ma traduction, Aristote invoque aussi l'autorité des astronomes Égyptiens, dont il paraît faire beaucoup de cas.

-- Nous avons reçu, il faut se rendre à une assertion aussi nette; et Aristote, mieux que personne, devait savoir précisément ce qu'il en était sur ce point.

§ 2. En second lieu, le texte n'est pas ici non plus aussi formel ; mais j'ai cru devoir préciser davantage.

-- Dans la première orbite, celle du ciel, à laquelle appartiennent, dans le système d'Aristote, toutes les étoiles fixes, qui sont en effet innombrables.

-- Il n'y a qu'un seul astre, c'est-à-dire que chaque planète a son orbite particulière, où elle est seule à faire sa révolution.

Enchaînés dans la même orbite, j'ai conservé l'expression grecque dans toute sa force.

§ 3. C'est une belle entreprise, Aristote se fait une haute idée de la science; mais on verra plus bas que la solution qu'il donne est bien peu scientifique. Je n'affirmerais pas d'ailleurs que ce qui va suivre soit parfaitement authentique. Le fond des idées est bien aristotélique ; mais l'exposition de cette singulière théorie est démesurément prolixe, et je ne reconnais pas la main du maître. C'est d'ailleurs un soupçon que je suis le premier à élever, et je ne vois pas que, parmi les commentateurs, personne l'ait conçu avant moi.

-- Que de bien rares occasions, ou peut-être aussi : « que de bien faibles ressources. » J'ai préféré le premier sens, à cause de l'observation consignée dans le § précédent. Il est rare qu'on puisse observer des phénomènes qui se reproduisent à de si longs intervalles.

A une prodigieuse distance, les anciens qui n'avaient pas nos instruments d'optique devaient sentir encore davantage leur faiblesse et leur impuissance. -- Que nous allons indiquer, le contexte me semble exiger ce sens ; mais l'expression grecque n'est pas aussi précise.

Ne dépasse pas la portée de la raison, le mot grec a ordinairement le sens « d'absurde »; mais j'ai cru devoir modifier quelque peu ce sens, tout habituel qu'il est. — Nous avons le tort, l'expression grecque n'est pas aussi précise.

Des unités ou monades, il n'y a qu'un seul mot en grec.

Privées de vie et inanimées, même remarque.

-- En faisant cette supposition, j'ai dû, dans tout ce passage, développer un peu le texte, pour qu'il fût plus clair.

Dont la raison puisse se choquer, dans la Métaphysique, les planètes sont chacune animées par autant d'essences, éternelles, immobiles et sans étendue, livre XII, ch. 8, page 203.

A être sans action, voir dans la Métaphysique, livre XII, ch. 7. page 200, ce que c'est que l'action propre de Dieu.

Il en est ici comme pour le corps humain, tout ce développement pourrait bien paraître une interpolation, quoique les observations physiologiques qui y sont rappelées soient assez exactes.

-- Énergique, j'ai ajouté ce mot pour compléter la pensée.

§ 4. Mais que tout réussisse à souhait, la digression continue, sans grand avantage pour la question, dont elle s'écarte de plus en plus

-- De faire tomber sur les mêmes points, le texte n'est pas aussi précis.

Mille osselets de Chios, ce passage semble incliner au système du hasard, qu'Aristote a toujours si vivement combattu, comme on peut le voir dans la Physique, livre II, ch. 4, pages 29 et suiv. de ma traduction.

Difficile et douteux, il n'y a qu'un seul mot en grec.

Comme celle des animaux et des plantes, voir plus haut, § 3.

Parmi les êtres de cet ordre, suite de la digression.

Les autres animaux, ceci semble une interpolation même au milieu de tout ce morceau.

Qu'une seule, celle de se nourrir.

§ 5. En effet, l'auteur semble de plus en plus perdre de vue la question qu'il essaie d'éclaircir; et tous ces développements paraissent tout à fait inutiles.

 -- Une fin unique, voir le début de la Morale à Nicomaque, où sont présentées des idées assez analogues à. celles-ci.

-- L'homme atteint la sienne, l'oeuvre propre de l'homme, c'est l'activité réglée par la raison et la vertu ; voir la Morale à Nicomaque, livre 1, ch. 4, page 28 de ma traduction.

§ 6. Par exemple, si c'est la santé, ceci est en partie une répétition de ce qui a été dit plus haut, à la fin du § 3.

Multiplicité de mouvements, et de moyens pour arriver au but qu'on poursuit.

L'un de ces deux résultats, le texte n'est pas tout à fait aussi formel.

§ 7. Voilà pourquoi la terre, voilà le véritable objet de la démonstration ; mais le détour qu'a pris l'auteur a été bien long, et le chemin est bien peu sûr.

Les corps qui sont près d'elle, c'est-à-dire les planètes, qui en paraissent les plus rapprochées.

Des mouvements très faibles, ou bien : « un petit nombre de mouvements. » Voir plus haut, § 1.

Du principe le plus divin, c'est-à-dire, sans doute, du moteur immobile.

Le premier ciel n'a besoin.... que d'un seul mouvement, il semblerait que ceci devrait encore mieux s'appliquer aux corps les plus voisins de la terre, qui est absolument sans mouvement. Il y a donc ici quelque contradiction.

Les dernières limites, il semble que ces mots désignent la terre, puisque les « dernières limites » sont opposées « au dernier ciel. »

§ 8. Soulevée plus haut, voir plus haut, § 2.

Après la première orbite, dans le § 2, il est dit dans la première orbite, au lieu de après la première orbite. Mais j'ai dû reproduire exactement cette modification.

Chacun des corps, les planètes, qui chacune se trouvent seules dans l'orbite qu'elles décrivent, au lieu de la multitude innombrable des étoiles dans le premier ciel.

 — Le premier terme, le texte est plus indéterminé.

L'emporte de beaucoup, l'idée est obscure, et elle aurait exigé plus de développements.

§ 9. Le principe qui nous occupe ici, j'ai dû développer la pensée pour la rendre plus précise; et plus claire.

-- La première cause, celle qui fait mouvoir tout le ciel, avec tous les astres qu'il entraîne dans son mouvement universel.

Les autres causes secondaires, j'ai ajouté ce dernier mot.

En effet, chaque planète prise à part, ce serait plutôt l'orbite de chaque planète.

A un plus grand nombre de mouvements, voir plus haut le § 1. Aristote n'a pas expliqué, dans ce chapitre, comment il entend que chaque planète peut avoir plusieurs mouvements à la fois ; et les explications qu'il a données dans la Métaphysique, livre XII, ch. 8, ne sont pas plus complètes ni plus satisfaisantes. Peut-être regardait-il qu'après les travaux d'Eudoxe et de Callippe, ces notions étaient trop connue, pour qu'il fût nécessaire de les développer. Tout ce § et le suivant ont fort embarrassé les commentateurs ; et Simplicius atteste qu'Alexandre d'Aphrodisée n'avait pas été embarrassé moins que les autres. Il donne lui-même de très longs détails astronomiques, et il parle, entr'autres, des observations des Babyloniens transmis« par Callisthène à son oncle Aristote (f° 123, recto) ; mais il ne s'arrête pas directement aux difficultés du texte, quelque grandes qu'elles soient.

§ 10. En second lieu, solution de la seconde question, exposée plus haut, dans le § 2.

Les autres orbites, inférieures à l'orbite du premier ciel.

N'agissent que sur un seul corps.... Le mouvement à plusieurs corps, je trouve que tout ce § est en contradiction avec ce qui précède. « La dernière orbite » me semble désigner le premier ciel; et l'orbite « qui n'a plus qu'un seul astre » me semble désigner l'orbite de chaque planète.

Donnent le mouvement à plusieurs corps, il résulte, au contraire, des théories antérieures, que la dernière orbite doit être la seule à renfermer et à mouvoir un grand nombre de corps. Tout ce passage est profondément obscur, et je ne trouve rien, dans les commentateurs, qui puisse l'éclaircir.

La dernière sphère en effet, il paraîtrait qu'ici « la dernière sphère » doit signifier celle qui est la plus rapprochée de la terre, tandis que, plus haut, cette même expression s'appliquait à la sphère du premier ciel.

Se trouve être un corps, j'ai traduit fidèlement ; mais le sens m'échappe, et je ne comprends pas ce que c'est qu'une sphère qui est un corps, à moins que ceci ne veuille dire que l'orbite des planètes se confond avec le corps même qui les forme.

La plus éloignée, j'ai dû ajouter ces mots pour éclaircir la pensée, sans être sûr d'ailleurs de l'avoir bien saisie.

--- Le mouvement universel, j'ai dû préciser ceci beaucoup plus que ne le fait le texte. Et tout corps fini, on peut traduire encore : « La puissance de tout corps qui est fini se rapporte aussi à quelque chose de fini » ; voir la Physique, livre VIII, ch. 15, § 2, pages 559 et suiv. de ma traduction.

§ 11. Nous avons expliqué, plus haut, chapitres 7, 8, 10 et lie Ce résumé ne parle pas de la réfutation du système Pythagoricien.

 

 

CHAPITRE XIII.

De l'immobilité et du mouvement de la terre : de sa forme. Systèmes divers : système des Pythagoriciens, qui placent le feu au centre du monde et croient au mouvement de la terre; insuffisance des raisons sur lesquelles ce système s'appuie. Autre théorie sur le mouvement de la terre; citation du Timée. -- De la forme de la terre; elle est sphérique. Explications diverses : Xénophane, Empédocle, Thalès de Milet; objections contre ces systèmes. Difficulté de la question. Anaximène, Anaxagore et Démocrite ont soutenu que la terre est immobile, parce qu'elle est plate : fausseté de cette théorie. Considérations générales sur le mouvement rotatoire des corps; opinion d'Empédocle; réfutation de cette opinion. Effets réels que produirait la rotation. Explication particulière d'Anaximandre sur l'immobilité de la terre; réponse à cette théorie. — Insuffisance évidente de toutes les théories antérieures.

§ 1. Il nous reste à parler de la terre, et nous avons à rechercher dans quel lieu elle est placée, si elle fait partie des corps en repos ou des corps en mouvement, et enfin quelle est sa forme. Quant à sa position, tout le monde n'a pas, à cet égard, la même opinion. En général, on admet qu'elle est au centre, et c'est le système des philosophes qui croient que le ciel est limité et fini dans sa totalité. Mais les sages d'Italie, que l'on nomme Pythagoriciens, sont d'un avis contraire. Pour eux, ils prétendent que le feu est au centre du monde, que la terre est un de ces astres qui font leur révolution autour de ce centre, et que c'est ainsi qu'elle produit le jour et la nuit. Ils inventent aussi une autre terre opposée à la nôtre, qu'ils appellent du nom d'Anti-terre, cherchant non pas à appuyer leurs explications et les causes qu'ils indiquent sur l'observation des phénomènes, mais, loin de là, pliant et arrangeant les phénomènes selon certaines opinions et explications qui leur sont propres, et essayant de faire concorder tout cela comme ils peuvent.

§ 2. Beaucoup de philosophes autres encore que les Pythagoriciens pourraient bien penser, comme eux, que la place du centre ne doit pas être attribuée à la terre, n'empruntant pas davantage cette conviction à l'examen des phénomènes, mais la demandant bien plutôt aussi à de simples raisonnements. Comme ils pensent que la place la plus considérable convient au corps le plus considérable de tous, et que le feu mérite plus de considération que la terre ; que la limite en veut plus aussi que les points intermédiaires, et que l'extrême et le centre sont les limites des choses, ils concluent, à l'aide de ces raisonnements, que la terre ne doit pas être au milieu de la sphère, et que cette place appartient de préférence au feu. [294a] Une autre raison des Pythagoriciens pour soutenir que le feu doit être au centre, c'est que la partie la plus importante de l'univers doit être surtout la plus soigneusement gardée ; or, cette partie est précisément le centre appelé par eux la Porte et la Garde de Jupiter ; et, voilà comment c'est le feu qui occupe cette place dominante.

§ 3. On peut remarquer que, dans ces théories, le mot de Centre est pris d'une manière absolue, bien qu'il puisse signifier à la fois, et le centre de la grandeur, et le centre de la chose et de sa nature. Cependant, de même que dans les animaux, le centre de l'animal et le centre de son corps ne sont pas une même chose, à bien plus forte raison doit-on supposer qu'il en est ainsi pour le ciel tout entier. Aussi, est-ce là ce qui fait que les Pythagoriciens devraient bien ne pas prendre toute cette peine, pour expliquer l'univers, ni introduire cette prétendue garde au centre. Mais il feraient mieux de chercher à nous dire, de ce milieu et de ce centre, ce qu'il est et où il est ; car c'est bien ce milieu qui est le principe et le point le plus important de tous. Or, quand il s'agit de l'espace, le centre ressemble bien plutôt à une fin qu'à un principe et à un commencement ; car ce qui est borné, c'est le centre, tandis que le bornant, c'est la limite. Or, le contenant et la limite sont plus considérables et plus importants que le contenu ; car l'un n'est que la matière, tandis que l'autre est l'essence du composé.

§ 4. Voilà l'opinion qu'ont adoptée quelques philosophes sur la place qu'occupe la terre. Mais il y a les mêmes dissentiments sur son immobilité et son mouvement ; car tout le monde non plus n'est pas d'accord sur ces points là. Ceux qui nient que la terre soit au centre prétendent qu'elle a un mouvement circulaire autour du centre, et que non seulement c'est la terre qui se meut ainsi, mais en outre l'Anti-terre, comme nous l'avons dit un peu plus haut. Quelques philosophes soutiennent qu'il peut y avoir plusieurs corps du même genre, qui se meuvent autour du centre, mais que nous ne les voyons pas, à cause de l'interposition de la terre. Voilà pourquoi, ajoutent-ils, les éclipses de lune sont bien plus fréquentes que celles de soleil, attendu que tous les corps qui sont en mouvement peuvent l'éclipser, et que ce n'est pas la terre toute seule qui l'éclipse. Mais du moment que la terre n'est pas le centre, et qu'il y a entre le centre et elle la distance de tout son hémisphère, ces philosophes ne voient plus rien qui s'oppose à ce que les phénomènes se passent, pour nous qui n'habiterions pas au centre, absolument comme si la terre était au milieu. Et, en effet, dans l'état actuel des choses, rien ne nous révèle non plus que nous soyons éloignés du centre de la terre à la distance de la moitié du diamètre. Il y a même d'autres philosophes qui, tout en admettant que la terre est placée au centre, la font tourner sur elle-même autour du pôle, qui traverse régulièrement l'univers, ainsi qu'on peut le lire dans le Timée.

§ 5. Les mêmes doutes, à peu près, se sont élevés sur la forme de la terre. Les uns la jugent sphérique; les autres la croient plane, et la représentent sous la figure d'une espèce de tambour. [294b] La preuve qu'ils en donnent, c'est qu'on observe que le soleil, quand il se couche ou qu'il se lève, a toute la partie qu'il cache sous la terre en ligne droite et non pas en ligne circulaire, tandis qu'il faudrait, au contraire, si la terre était sphérique comme on le prétend, que la section du soleil aussi fût circulaire comme elle. Mais dans cette explication là on ne tient compte, ni de la distance du soleil à la terre, ni de la prodigieuse grandeur de sa circonférence; et l'on ne songe pas que de loin, la ligne paraît entièrement droite, même pour des cercles qui semblent être tout petits. Par conséquent, cette même apparence ne doit pas du tout leur faire croire que la masse de la terre ne soit pas ronde. Mais ces philosophes insistent, et ils soutiennent que c'est parce que la terre est en repos, qu'elle doit nécessairement avoir la forme qu'ils lui donnent; car les opinions, dont nous venons de parler, sur le mouvement et le repos de la terre, sont aussi diverses que nombreuses.

§ 6. Il faut donc nécessairement que tout le monde trouve ces questions obscures et difficiles ; car ce serait montrer bien peu d'intelligence et de raison que de ne pas se demander, avec étonnement, comment il se fait que, quand la plus petite parcelle de la terre, si on la lâche après l'avoir élevée en l'air, tombe aussitôt sans vouloir rester un instant en place, descendant d'autant plus vite qu'elle est plus grosse, la masse même de terre, si on pouvait la lâcher après l'avoir soulevée, ne tomberait pas, mais qu'au contraire, un si énorme poids peut, dans l'état actuel des choses, rester en repos ; et que néanmoins, si pendant que quelques portions de la terre tombent par le mouvement qui les entraîne, on venait à supprimer la terre avant que ces portions n'y fussent tombées, elles continueraient toujours à tomber si aucun obstacle ne venait à s'y opposer.

§. 7. C'est donc à bon droit que tous les philosophes se sont occupés de ces questions et ont exposé leurs doutes. Mais l'on doit s'étonner peut-être que les solutions qu'ils ont données du problème, ne leur aient pas paru plus étranges encore que les doutes auxquels elles prétendaient répondre. Ainsi. les uns ont soutenu que le bas de la terre était infini, et ils ont donné à la terre des racines sans fin, comme le fait Xénophane de Colophon, afin de s'éviter la peine de rechercher la véritable cause. Aussi Empédocle lui-même n'a-t-il pas manqué de réfuter ces théories, quand il a dit :

» Les fondements du globe et l'éther impalpable,
» Dont on nous parle tant, ne sont que de vains mots,
» Répétés sans raison par la langue des sots. »

D'autres philosophes font reposer la terre sur l'eau. La plus ancienne opinion de ce genre que nous ait transmise la tradition, est celle de Thalès de Milet, qui a dit, assure-t-on, qu'elle restait immobile, parce qu'elle surnageait comme un morceau de bois flottant ou quelqu'autre matière analogue, attendu que dans l'ordre de la nature les corps ne flottent pas sur l'air, mais sur l'eau.

§ 8. Comme si l'on pouvait supposer que la loi qui s'applique à la terre, ne s'applique plus à l'eau, qui l'environne et la supporte. En effet, l'eau non plus ne saurait, par sa constitution naturelle, se tenir en suspens dans l'air ; et il faut qu'elle repose également sur quelque chose. [295a] Mais en outre, de même que l'air est plus léger que l'eau, l'eau est aussi plus légère que la terre ; et par suite, comment admettre qu'un corps qui naturellement est plus léger, soit placé et s'arrête au-dessous d'un corps plus lourd ? Ajoutez que, si toute la terre peut naturellement reposer sur l'eau, il faut évidemment aussi que chacune de ses parties isolées puissent y surnager également ; mais il n'en est point ainsi dans l'état présent des choses, et une partie quelconque de la terre mise sur l'eau descend aussitôt au fond, et elle y est portée d'autant plus vite qu'elle est plus grosse.

§ 9. Ainsi, nos philosophes me font l'effet de n'avoir avancé, dans la solution du problème, que jusqu'à un certain point ; mais il n'ont pas su aller jusqu'où l'on peut. C'est que nous avons tous en effet l'habitude assez mauvaise de nous appliquer moins à comprendre la chose en elle-même qu'à réfuter ceux qui nous contredisent ; et quand on ne fait de recherches qu'à soi seul, on va jusqu'à ce qu'on arrive à ne plus pouvoir se faire d'objections à soi-même. Aussi, pour faire une étude complète et vraiment sérieuse, on ne doit s'arrêter qu'aux objections qui naissent essentiellement du sujet lui-même ; et pour cela, il faut avoir bien observé tous les différents aspects qu'il présente.

§ 10. Anaximène, Anaxagore et Démocrite ont prétendu que la forme plate de la terre est cause de son repos ; car selon eux, elle ne coupe pas, mais elle recouvre comme un couvercle l'air qui est au-dessous d'elle. C'est aussi l'effet que paraissent produire tous les corps qui sont plats ; et c'est là ce qui fait encore que les vents peuvent difficilement les remuer, parce que ces corps ont des points d'appui qui offrent de la résistance. C'est précisément, disent-ils, ce que fait la terre par sa forme plate, relativement à l'air qui est dessous. Mais comme il n'y a pas assez de place pour que cet air puisse changer de lieu, il s'accumule et doit s'arrêter en bas, tout juste comme l'eau s'arrête dans les clepsydres; et pour montrer que l'air intercepté et ainsi arrêté peut supporter un très grand poids, ces philosophes allèguent une foule de preuves.

§ 11. Ainsi d'abord d'après eux, si la terre n'était pas de forme plate elle ne pourrait pas rester en repos comme elle le fait. Mais, d'après ces théories mêmes, la cause de l'immobilité de la terre, ce n'est pas seulement qu'elle est plate, c'est bien plutôt qu'elle est grande ; car l'air ne pouvant s'écouler et passer, parce que le lieu où il se presse est trop étroit, il demeure immobile par sa quantité même ; et si l'air s'accumule en si grande masse, c'est qu'il est intercepté et comprimé par l'immensité considérable de la terre. Par conséquent, cet effet se produirait, quand bien même la terre serait sphérique, et par cela seul qu'elle est si grande, puisque même alors, d'après l'hypothèse de ces philosophes, l'air est immobile.

§ 12. Mais d'une manière générale, pour répondre à des gens qui expliquent ainsi le mouvement, il faut dire que leur discussion s'adresse non pas à quelques-unes des parties du monde, mais à l'ensemble et à la totalité des choses. Ainsi, il faut s'attacher, en remontant au principe, à bien définir s'il y a ou s'il n'y a pas un mouvement naturel pour les corps, et, quand on admet qu'il n'y a pas pour eux de mouvement naturel, savoir s'il est possible qu'ils aient un mouvement forcé. Mais [295b] comme nous avons traité antérieurement toutes ces questions, il faut ici, autant que nous le pourrons pour la discussion actuelle, nous servir des principes précédemment admis et démontrés. S'il n'y a pas pour les corps de mouvement naturel, il n'y aura pas non plus de mouvement forcé ; et s'il n'y a ni de mouvement naturel ni de mouvement forcé, c'est qu'alors il n'y aura pas du tout de mouvement ; car on a démontré précédemment qu'il en devait être nécessairement ainsi.

§ 13. D'un autre côté, il a été également prouvé qu'il ne peut pas non plus y avoir alors de repos ; car le repos, tout aussi bien que le mouvement, est ou naturel ou forcé. Mais puisqu'il y a réellement un mouvement naturel, la translation non plus que le repos ne saurait être uniquement forcée.

§ 14. Si donc la terre est maintenant forcément en repos et immobile, c'est qu'elle a été portée aussi au centre, par la rotation. Du moins, c'est là la cause que tout le monde assigne à ce phénomène, en empruntant cette explication au mouvement des corps dans les liquides et aux faits qu'on observe dans l'air ; car toujours dans l'eau et dans l'air, les corps les plus gros et les plus lourds sont portés au centre du tourbillon. C'est là ce qui a conduit tous les philosophes qui croient que le monde a été créé, à soutenir que la terre s'est, par cette cause, portée vers le centre. Puis, recherchant la cause de son immobilité, les uns disent, de la façon que nous venons de voir, que c'est sa largeur et sa grosseur qui en sont causes ; les autres, comme Empédocle, prétendent que la révolution du ciel qui se fait circulairement et qui est beaucoup plus rapide, empêche le mouvement de la terre, qui est absolument retenue comme l'eau dans les vases ; car l'eau, quand on fait tourner le vase où elle est, va souvent au bas de l'airain sans tomber cependant, bien qu'elle y soit naturellement portée, et par la même cause.

§ 15. Toutefois, en supposant que la rotation n'empêche pas la terre de tomber et que sa largeur ne l'en empêche pas davantage, mais que l'air vienne à s'écouler en dessous, dans quel sens la terre sera-t-elle alors naturellement portée ? C'est par force qu'elle est poussée vers le centre ; c'est par force qu'elle y est retenue immobile. Mais il faut bien nécessairement qu'elle ait un mouvement naturel. Est-elle donc en haut, ou est-elle en bas ? En un mot, dans quels lieux peut-elle être ? Car de toute nécessité elle doit avoir quelque mouvement de ce genre. Or, si elle ne va pas plus en bas qu'en haut, et si l'air qui est en haut n'empêche pas l'ascension de la terre en haut, celui qui est sous la terre ne peut pas empêcher davantage le mouvement de la terre en bas ; car il faut que les mêmes causes produisent les mêmes effets pour les mêmes corps.

§16. On pourrait encore faire cette autre objection à Empédocle, et lui demander : «Lorsque les éléments se tenaient séparés et isolés par l'action de la Discorde, quelle a été la cause qui, pour la terre, lui a imposé l'immobilité qu'elle a?» Car Empédocle ne pourra pas dire qu'à cette époque c'était la rotation qui en fût cause. Une absurdité aussi, ce serait d'admettre que, dans un temps antérieur et par suite du mouvement de rotation, les parties de la terre ont dû être portées vers le centre, et de ne pas se demander quelle est aujourd'hui la cause qui fait que les corps graves se dirigent vers la terre. Certes, ce n'est plus la rotation qui peut actuellement les rapprocher de nous.

§ 17. [296a] De plus, le feu se dirige naturellement en haut, quelle en est la cause ? Ce n'est certes pas encore la rotation. Mais si le feu a un mouvement qui lui est naturel, il est de toute évidence aussi que la terre doit en avoir un comme lui.

§ 18. J'ajoute que ce n'est pas davantage la rotation qui produit et détermine le lourd et le léger ; mais seulement, parmi les corps graves et légers qui existaient préalablement, les uns se sont dirigés vers le centre, et les autres à la surface, par l'effet du mouvement qu'ils subissaient. Il y avait donc, même avant que la rotation ne commençât, un lourd et un léger, qui ont été déterminés par quelque chose, et qui, par leur propre nature, sont emportés d'une certaine façon et vers un certain lieu. Car du moment qu'on suppose le monde infini, il n'est pas possible qu'il y ait encore ni haut ni bas, puisque c'est par ces deux directions que le grave et le léger se reconnaissent et se déterminent.

§ 19. Voilà donc, pour la plupart des philosophes, les causes auxquelles ils attribuent l'immobilité de la terre. Mais il y a d'autres philosophes, qui prétendent que la terre reste en repos par son propre équilibre. Telle est, parmi les anciens, l'opinion d'Anaximandre ; selon lui, il n'y a pas de raison pour qu'un corps qui est placé au centre et est à une distance égale des extrémités, soit porté en haut plutôt qu'en bas, ou dans une direction oblique ; et comme il est impossible que le mouvement se fasse en même temps en des sens contraires, ce corps doit nécessairement demeurer immobile et en repos.

§ 20. Cette opinion est fort élégamment exprimée ; mais par malheur, elle n'est pas aussi vraie qu'élégante. Ainsi, d'après ce raisonnement, il faudrait que tout corps qui serait placé au centre y restât en repos, et par conséquent le feu lui-même y serait également immobile ; car cette théorie d'Anaximandre ne s'applique pas spécialement à la terre.

§ 21. Mais cette conclusion sur l'immobilité de la terre n'est pas aussi nécessaire qu'on le croit, puisque la terre ne semble pas seulement en repos et immobile au centre ; mais de plus on la voit aussi se diriger et se mouvoir vers le centre ; car le lieu où se porte une des parties quelconques de la terre doit être aussi le lieu où la terre doit se porter tout entière, et le point ou un corps se dirige naturellement est aussi le point où ce corps reste naturellement en repos et immobile. Donc, ce ne peut pas être parce que la terre est dans un rapport identique avec les extrémités, qu'elle reste immobile ; car c'est là une propriété commune à tous les corps sans exception, tandis que c'est une propriété exclusivement propre à la terre que d'être portée vers le centre.

§ 22. [296b] Il est en outre bien étrange de rechercher pourquoi la terre demeure immobile au centre, et de ne pas se demander pourquoi au contraire le feu est poussé vers les extrémités ; car si le lieu extrême est le lieu naturel du feu, il est clair que la terre aussi doit avoir un lieu qui lui sera également naturel. Si l'on prétend que la terre n'a pas de lieu de ce genre, et qu'elle demeure en repos uniquement par la nécessité qui tient à son équilibre, elle est alors comme ce célèbre cheveu qui est très fortement tendu, mais qui, l'étant partout d'une manière égale, ne peut plus se rompre jamais; ou bien encore comme cet homme qu'on suppose avoir tout ensemble une soif et une faim très vives, mais qui, éprouvant ces deux besoins avec une intensité égale, s'abstiendrait également de boire et de manger, parce qu'il serait nécessairement forcé de rester immobile et en repos entre ses deux besoins. Nos philosophes devraient donc rechercher aussi pourquoi le feu s'arrête aux extrémités. Mais on pourrait s'étonner encore qu'on cherchât la cause de l'immobilité de ces corps, et qu'on ne cherchât pas par quelle cause, dans la tendance naturelle des corps divers,- l'un est emporté en haut, tandis que l'autre se dirige vers le centre, du moment que rien ne les en empêche.

§ 23. En soi, cette théorie n'est donc pas vraie, ou du moins tout ce qu'elle a de vrai indirectement, c'est qu'il y a nécessité que tout corps reste immobile au centre, quand le mouvement ne lui convient pas plus dans un sens que dans l'autre. Mais d'après ce raisonnement même, le corps ne devrait pas demeurer immobile en place ; et il faudrait, au contraire, qu'il eût un mouvement, non pas il est vrai dans sa totalité, mais par fragments et par morceaux.

§ 24. C'est qu'en effet, la même théorie devrait être également applicable au feu, et si l'on suppose une fois qu'il est placé au centre, il faudra qu'il y demeure nécessairement immobile comme la terre ; car il sera dans un rapport parfaitement équilibré avec chacun des points extrêmes, quels qu'ils soient. Mais pourtant le feu sera toujours emporté loin du centre vers les extrémités, si rien ne l'en empêche, ainsi que l'expérience nous le prouve. Seulement, il ne sera pas porté tout entier vers un seul point ; car cela n'est nécessaire que dans l'hypothèse de l'équilibre. Mais une partie proportionnelle du feu sera portée vers la partie proportionnelle de l'extrémité : je veux dire, par exemple, que le quart du feu sera porté vers le quart de l'extrémité ; car il n'y a pas de corps qui soit précisément un point. Mais de même qu'une chose, en se condensant, peut, d'un grand espace qu'elle occupait, passer dans un espace moindre, de même, d'un petit espace, peut-elle en remplir un beaucoup plus grand, en se raréfiant. il s'ensuit donc que, même d'après la théorie de l'équilibre, la terre devrait aussi, de la même manière, s'éloigner du centre, si le centre n'était pas naturellement la place qu'elle doit occuper.

Telles sont à peu près toutes les conjectures que l'on a faites sur la forme de la terre, sur la place qu'elle occupe, sur son immobilité et sur son mouvement.


 





 

Ch. XIII, § 1. Il nous reste à parler, cette théorie de la terre forme, d'après Simplicius, le dixième et dernier chapitre de ce livre.

Dans quel lieu elle est placée, si c'est au centre, ou ailleurs qu'au centre.

 -- Si elle fait partie des corps... il eût été plus simple de dire : « si elle est en mouvement ou en repos. »

Quant à sa position, cette question est traitée jusqu'au § 4. -

-- Que le ciel est limité et fini, il semble que c'est aussi le système d'Aristote. — Les sages d'Italie, le texte n'est pas aussi formel.

Que le feu est au centre du monde, il ne paraît pas que les Pythagoriciens confondissent le feu avec le soleil ; car s'il en eût été ainsi, Aristote n'aurait pas manqué de le dire.

Que la terre est un de ces astres, cette opinion des Pythagoriciens est fameuse, et elle était sur la voie de la vérité. Plus approfondie par les astronomes et les philosophes de la Grèce, elle aurait pu conduire la science, quelques siècles plus tôt, à la connaissance du véritable système du monde.

Et que c'est ainsi qu'elle produit le jour et la nuit, en tournant sur elle-même, ce qui est vrai.

-- Anti-terre, ou Antichthôn, en conservant le moi grec. On a pris souvent l'Antichthôn pour les Antipodes ; on voit qu'il n'en est rien. Cette Contreterre fait en quelque sorte équilibre à notre terre. C'est un corps que les Pythagoriciens imaginent bien gratuitement, et dont rien n'atteste l'existence ; mais c'est peut-être la lune qu'ils désignent ainsi.

Sur l'observation des phénomènes, la critique n'est pas juste; mais la méthode que préconise Aristote est excellente ; voir la Météorologie, préface, pages XLII et suiv. de ma traduction.

Comme ils peuvent, cette ironie n'est pas aussi marquée dans le texte.

§ 2. Beaucoup de philosophes, Aristote ne les nomme pas, et je ne vois pas que les commentateurs aient essayé de les deviner.

A de simples raisonnements, j'ai ajouté le mot de « simples. »

Mérite plus de considération, comme ayant des qualités supérieures à celles de la terre.

-- De la sphère, c'est-à-dire de l'univers.

Une autre raison des Pythagoriciens, pour soutenir que le feu doit être au centre, du monde, le texte n'est pas tout à fait aussi formel.

La partie la plus importante, c'est là encore un argument purement logique ; et ce n'est guère que par des raisons de ce genre que l'on pouvait se décider, au temps des Pythagoriciens ; l'observation des phénomènes n'était pas encore assez avancée.

La Porte et la Garde, il n'y a qu'un seul mot dans le texte. D'ailleurs l'expression grecque peut signifier à la fois, et que Jupiter garde le feu au centre du monde, et que le feu y garde Jupiter.

-- Cette place dominante, j'ai ajouté ce dernier mot.

§ 3. D'une manière absolue, sans aucune détermination qui en précise le sens.

Et le centre de la grandeur, il faut sous-entendre : « purement matérielle,» tandis que le mot Centre, au lieu d'être pris matériellement, peut être pris encore au moral, pour signifier la partie essentielle de la chose.

Et de sa nature, en d'autres termes : » et de son essence. »

Le centre de l'animal, c'est-à-dire la partie essentielle et vitale.

Devraient bien ne pas prendre toute cette peine, l'ironie est aussi marquée dans le texte que dans ma traduction.

Cette prétendue garde, j'ai ajouté le mot » prétendue » pour que la pensée fût plus claire.

Car c'est bien ce milieu, argument purement logique, dans le genre de ceux qu'Aristote reprochait tout à l'heure aux Pythagoriciens. Je ne crois pas d'ailleurs que ces arguments soient sans valeur, bien qu'il faille en user sobrement.

Plus considérables et plus importants, il n'y a qu'un seul mot dans le texte. -- L'un c'est le contenu : l'autre, c'est le contenant, qui est la forme de la chose, et se confond avec son essence ; voir la Physique, livre II, ch. 1, § 20, et ch. 2, § 15, pages 8 et 18 de ma traduction. Les théories exposées ici sont tout à fait d'accord avec celles qui placent le premier moteur à la circonférence et non point au centre; Physique, livre Vlll, ch. 15, § 24, page 567 de ma traduction.

§ 4. La place qu'occupe la terre, c'est la première des trois questions indiquées plus haut, au § 1.

Sur son immobilité et son mouvement, seconde des, trois questions, qui sera traitée dans le chapitre 13 et dans le suivant, soit pour réfuter les théories antérieures, soit pour exposer la théorie nouvelle.

--- Qu'elle a un mouvement circulaire, ce mouvement ne serait plus simplement rotatoire, comme il est dit plus bas; mais ce serait un mouvement de translation, comme il a lieu en effet dans la réalité.

L'Anti-terre, ou l'antichthôn.

Un peu plus haut, voir plus haut, § 1.

Plusieurs corps du même genre, que notre terre ; et toutes les vraisemblances sont en faveur de cette théorie.

A cause de l'interposition de la terre, les Pythagoriciens supposaient ces corps cachés, afin que le nombre des grands corps célestes en mouvement, soleil, lune, terre et planètes, s'élevât jusqu'à dix.

-- Tous les corps qui sont en mouvement, saint Thomas rappelle avec raison que les éclipses de lune sont uniquement causées par l'interposition de la terre, entre cet astre et le soleil.

La terre n'est pas le centre, dans le système de ces philosophes, qui font circuler la terre autour du centre du monde, occupé par le feu.

Entre le centre et elle, j'ai ajouté ceci pour compléter la pensée.

De tout son hémisphère, c'est-à-dire que, circulant autour du centre, elle est toujours à la distance d'un rayon. Mais c'est supposer alors que l'orbite de la terre est exactement circulaire, tandis qu'au contraire il est elliptique.

Que nous soyons éloignés du centre, de la terre prise comme centre du monde, dans le système d'Aristote.

Dans le Timée, voir la traduction de M. V. Cousin, pages 124 et 135.

§ 5. Sur la forme de la terre, la troisième des questions indiquées au § 1 ; voir aussi, plus loin, le ch. 14.

Les uns la jugent sphérique, c'est l'opinion d'Aristote, comme celle de Platon, et de la meilleure partie de l'antiquité. Voir la Météorologie, livre II, ch. 7, § 3, page 180 de ma traduction.

Les autres la croient plane, c'était en général les philosophes de l'École d'lonie.

La preuve qu'ils en donnent, la preuve n'est pas bonne; mais du moins on essayait de l'emprunter à l'observation des faits.

A toute la partie qu'il cache sous la terre, le texte n'est pas tout à fait aussi précis.

Comme on le prétend, j'ai ajouté ces mots, qui sont impliqués dans le contexte.

De la distance du soleil à la terre, voir la Météorologie, livre I, ch. 8, § 6, page 47 de ma traduction.

-- De sa circonférence, c'est de la circonférence de la terre qu'il s'agit.

Qui semblent être tout petits, et qui sont par conséquent infiniment moins grands que celui de la terre.

-- Leur faire croire, aux philosophes dont Aristote critique les théories. La terre peut être ronde, bien que la section du soleil, disparaissant sous terre, paraisse une ligne droite et non une ligne courbe.

La forme qu'ils lui donnent, l'expression du texte est un peu plus vague.

Dont nous venons de parler, même remarque.

§ 6. Obscures et difficiles, le texte n'est pas aussi formel.

Que de ne pas se demander, avec étonnement, la question que se pose ici Aristote, est celle mémo que se posait Newton deux mille ans plus tard, et qu'il résolvait par la théorie de la gravitation universelle. Mais l'antiquité n'a jamais soupçonné cette grande loi de la nature matérielle, tout en la cherchant curieusement, comme ce passage le prouve.

Sans vouloir rester, c'est la traduction exacte de l'expression grecque.

Dans l'état actuel des choses, mot-à-mot : « maintenant.»

-- Et que néanmoins, il me semble que ceci devrait être mis, comme la phrase précédente, sous forme de question; et qu'on aurait aussi à se demander si la terre venant à disparaître, les graves descendraient toujours et continueraient à tomber sans fin. J'aurais pu donner cette tournure à tout ce passage ; mais j'ai dû rendre fidèlement le mouvement de la phrase grecque. Le sens d'ailleurs est évident.

§ 7. Se sont occupés : le texte n'est pas aussi explicite.

-- Plus étranges, le mot grec est précisément : «plus absurdes. »

Infini... sans fin, cette répétition est dans le texte, où elle est même encore plus marquée. — Xénophane de Colophon, Aristote a fait un traité spécial sur le système de Xénophane; et il y rappelle cette théorie sur la profondeur infinie de la terre; voir l'édition de Berlin, page 976, a, 32 ; voir aussi l'étude de M. V. Cousin sur Xénophane, pages 32 et 33, édition de 1847.

-- Empédocle lui-même, voir les fragments d'Empédocle, édition de Firmin Didot, page 53, colonne 1.

Font reposer la terre sur l'eau, il restait alors à savoir sur quoi reposait l'eau, comme il est dit un peu plus bas, au § 8.

Thalès de Milet, voir sur Thalès, le 1er livre de la Métaphysique, ch. 3, page 134, traduction de M. V. Cousin.

-- Ou quelqu'autre matière analogue, c'est-à-dire plus légère que l'eau.

§ 8. Qui l'environne et la supporte, il n'y a qu'un seul mot en grec.

 -- Se tenir en suspens dans l'air, et alors c'est ne rien expliquer, puisque la difficulté  reste la même, et plus forte encore pour l'eau que pour la terre.

 — Qu'elle repose également sur quelque chose, l'argument est irréfutable ; mais il vaut aussi contre la théorie d'Aristote, et il n'est pas facile de comprendre comment la terre peut se tenir en repos, ainsi qu'il le croit. Soit placé et s'arrête, il n'y a qu'un seul mot dans le texte grec.

Ajoutez, ce nouvel argument est aussi fort que les précédents.

§ 9. Nos philosophes, l'expression du texte est tout à fait indéterminée.

Assez mauvaise, j'ai ajouté ces mots, dont le sens est implicitement dans le contexte.

Complète et vraiment sérieuse, il n'y a qu'un seul mot dans le texte.

-- Essentiellement, ou mot-à-mot : » proprement. » Ces règles que pose Aristote sont d'ailleurs excellentes, bien qu'il ne les ait peut-être pas lui-même très bien suivies, dans sa théorie de l'immobilité de la terre.

§  10. Anaximène, Anaxagore et Démocrite, voir la Métaphysique, livre 1, ch 3, pages 134 et suiv. de la traduction de M. V. Cousin.

 — Elle recouvre comme un couvercle, c'est la force de l'expression grecque.

Par sa forme plate, je n'ai osé employer le mot de Platitude, qui, d'après le dictionnaire de l'Académie, ne s'applique qu'au figuré. Mais alors ce mot, pris au sens matériel, fait défaut à notre langue.

--- Comme l'eau s'arrête dans les clepsydres, lorsque l'air en s'accumulant à l'ouverture empêche l'eau de sortir et de tomber. Le phénomène est plus longuement décrit dans des vers d'Empédocle, que cite Aristote, Traité de la Respiration, ch. 7, § 5, page 368 de ma traduction.

Une foule de preuves, il est regrettable qu'Aristote n'ait pas cru devoir expliquer ces preuves en détail.

§ 11. Ainsi d'abord, première objection contre la théorie qui suppose que la terre est immobile, parce qu'étant plate l'air la soutient : elle serait également soutenue par l'air, quand bien même elle serait sphérique.

-- Demeure immobile, ou s'accumulant comme dans les clepsydres.

Intercepté et comprimé, il n'y a qu'un seul mot dans le texte.

Cet effet, c'est-à-dire l'accumulation de l'air assez pressé pour soutenir la terre et l'empêcher de descendre.

L'air est immobile, l'expression du texte est tout à fait indéterminée ; je l'ai comprise dans le sens que donne Simplicius: « L'air s'arrête et demeure immobile, aussi bien par la sphéricité de la terre que par sa forme plate. » C'est donc la grandeur de la terre, bien plutôt que sa forme, qui arrête et condense l'air en le resserrant.

§ 12. Qui expliquent ainsi le mouvement, et qui comprennent si mai comment la terre peut être privée de mouvement, et demeurer immobile au centre.

Nous avons traité antérieurement toutes ces questions, voir la Physique, livre IV, ch. 11, § 7, et livre VIII, ch. 4, §§ 2 et suiv., pages 202 et 481 de ma traduction.

Précédemment admis et démontrés, id. ibid.

Il n'y aura pat de mouvement du tout, l'existence des contraires est corrélative; et du moment que l'un des deux contraires n'est pas, l'autre n'est pas non plus.

-- On a démontré précédemment, ceci peut se rapporter au premier livre de ce traité, ch. 2, § 11, et ch. 3, § 2 ; et aussi aux passages de la Physique que je viens de citer.

§ 13. Il a été également prouvé, le texte n'est pas aussi formel ; voir la Physique, livre V, ch. 9, §§ 1 et suiv., page 329 de ma traduction.

Réellement, j'ai ajouté ce mot pour compléter la pensée.

Mais puisqu'il y a un mouvement naturel, voir dans la Physique, livre I, ch. 2, § 6, page 436 de ma traduction, l'affirmation du mouvement. Nier le mouvement, c'est détruire toute étude possible de la nature.

§ 14. En repos et immobile, il n'y a qu'un seul mot dans le texte grec.

Par la rotation, non pas sur elle-même, mais dans l'ensemble des choses, tourbillonnant dans l'espace comme des corps légers, à la surface d'un liquide qu'on agite.

Qu'on observe dans l'air, le fait est moins observable dans l'air que dans l'eau.

-- Les plus gros et les plus lourds, il ne semble pas que la terre dût, aux yeux d'Aristote, compter comme le plus lourd des corps parmi les astres ; car il a reconnu que la terre était infiniment plus petite que le soleil et les autres corps célestes ; voir plus loin, ch. 14, § 14, et dans la Météorologie, livre 1, ch. 3, § 2, page 8 de ma traduction.

Qui croient que le monde a été créé, le texte dit précisément : « qui créent le ciel. »

De la façon que nous venons de voir, le texte n'est pas tout à fait aussi précis.

-- Sa grosseur, ou sa grandeur.

-- Qui se fait circulairement, c'est l'expression même du texte, que j'ai cru devoir garder.

-- Qui est absolument retenue, ce serait donc par force que la terre serait immobile au centre.

-- Quand on fait tourner le vase, c'est une expérience qu'il est facile de vérifier, en mettant un verre d'eau sur la courbe intérieure d'un cerceau, et en faisant vivement mouvoir le cerceau à tours de bras. L'eau ne tombe pas, bien qu'elle soit souvent en bas, chaque fois qu'elle passe au-dessus de la tète de celui qui fait mouvoir le cerceau. Mais d'après ce phénomène très réel, on ne peut pas expliquer l'immobilité de la terre ; car alors la terre, en supposant qu'elle fût immobile sur elle-même, aurait du moins un immense mouvement de translation.
 

§ 15. Toutefois, en supposant, c'est une première objection au système d'Empédocle, et à celui d'Anaximène, d'Anaxagore et de Démocrite ; voir plus haut, § 10.

-- Naturellement, j'ai ajouté ce mot pour que la pensée fût plus claire.

-- C'est par force, dans les différentes théories qui ont été jusqu'à présent proposées.

-- Elle y est retenue, ou bien : « Elle y demeure. »

-- Est-elle donc en haut, c'est la traduction exacte du texte; peut-être eût-il mieux valu dire : « va-t-elle donc en haut? ou va-t-elle en bas ? »

Celui qui est sous la terre, voir plus haut, § 10.

Les mêmes corps, l'expression du texte est tout à fait indéterminée.

§ 16. Cette autre objection, le texte n'est pas tout à. fait aussi précis.

Par l'action de la Discorde, voir la Physique, livre VIII, ch. 1, § 4, page 455 de ma traduction, avec les citations de la Métaphysique, rappelées en note dans la même page.

Quelle a été la cause, il semble que, dans le système d'Empédocle, il n'y a que l'Amour qui puisse réunir les divers éléments de la terre, et lui donner le repos; mais Aristote eût bien fait d'exprimer cette idée intermédiaire.

-- Une absurdité aussi, ceci ne semble pas un nouvel argument contre Empédocle, mais plutôt la suite du précédent. La rotation du ciel a poussé la terre vers le centre; mais, dans l'état actuel des choses et après que la terre a été rendue immobile, on ne peut plus dire que ce soit la rotation du ciel qui porte les corps graves vers la terre.

— Toute cette réfutation des théories d'Empédocle est embarrassée, comme
le sont en général toutes les réfutations faites par Aristote. Alexandre d'Aphrodisée lui-même a trouvé de l'obscurité dans ce passage.

-- Actuellement, j'ai ajouté ce mot pour plus de clarté.

§ 17. De plus, argument nouveau, que Simplicius compte pour le troisième.

-- Ce n'est certes pas encore la rotation, puisque l'on a admis que la rotation du ciel a dirigé les corps vers le centre, et qu'au contraire le feu s'en éloigne.

La terre doit en avoir un, la terre étant considérée comme le contraire du feu, le lourd étant opposé au léger.

§ 18. J'ajoute, le texte n'est pu aussi explicite.

La rotation, du ciel et non pas de la terre, puisque la terre est supposée immobile.

Qu'ils subissaient, j'ai ajouté ces mots.

Par quelque chose, ma traduction est aussi vague que l'expression grecque; j'ai craint de la préciser davantage.

Qu'on suppose le monde infini, c'est le sens que donne Simplicius; mais le texte grec n'a pas de substantif.

Se reconnaissent et se déterminent, il n'y a qu'un seul mot dans le texte. Simplicius cite Anaximandre et Anaximène, comme ayant supposé que le monde est infini.

§ 19. Mais il y a d'autres philosophes, Aristote ne nomme ici qu'Anaximandre, qu'il range parmi les anciens; mais Simplicius pense que cette critique s'adresse également à Platon, qui, dans le Phédon, a soutenu cette même théorie. Cette dernière remarque est vraie ; et l'on peut consulter le Phédon, page 303 de la traduction de M. Victor Cousin : « Je suis persuadé, dit Socrate, que, si la terre est au milieu du ciel et de forme sphérique, elle n'a besoin ni de l'air, ni d'aucun appui pour l'empêcher de tomber, mais que le ciel même, qui l'environne également, et son propre équilibre suffisent pour la soutenir. »

Par son propre équilibre, l'expression du texte n'est pas aussi précise; il dit seulement : « par l'égalité. »

Parmi les anciens, ce qui laisse soupçonner que cette théorie peut bien aussi avoir été celle de quelques contemporains.

-- Qui est placé au centre, c'est presque résoudre la question par la question.

A une distance égale des extrémités, c'est aussi ce qu'il faudrait prouver. — Ce corps doit nécessairement, c'est la conclusion des théories d'Anaximandre.

§ 20. Par malheur, j'ai ajouté ces mots dont le sens est implicitement dans le contexte.

-- Aussi vraie qu'élégante, le texte dit simplement : » elle n'est pas vraie. »

Que tout corps, l'expression du texte est tout à fait indéterminée.

-- Le feu lui-même, sous-entendu : « si on le plaçait au centre. »

Cette théorie, ou si l'ou veut : « cette propriété ; » l'expression du texte étant tout à fait vague.

D'Anaximandre, j'ai ajouté ceci, pour que la pensée fût plus claire.

§ 21. N'est pas aussi nécessaire, cette expression m'a autorisé à préciser les choses un peu plus que ne le fait le texte. C'est la conclusion d'Anaximandre, et non l'immobilité de la terre, qui n'est pas nécessaire. Il y a d'ailleurs très peu de différence entre ces deux nuances.

Se mouvoir vers le centre, une motte de terre qu'on abandonne à elle-même, se dirige vers le centre de la terre en tombant. Donc, la terre entière doit avoir la même tendance naturelle que chacune de ses parties.

-- Une des parties quelconques de la terre, par exemple, une simple motte de terre.

Dans un rapport identique, l'expression du texte est tout aussi vague. Il faut entendre peut-être par là, ainsi que le dit Socrate, dans le Phédon, « que la terre qui est en équilibre, au milieu d'une atmosphère qui la presse également, ne saurait pencher d'aucun côté, et que par conséquent, elle demeure fixe et immobile ; » voir le Phédon, page 303 de la traduction de M. V. Cousin.

§ 22. Il est en outre bien étrange, nouvel argument contre les théories d'Anaximandre, et peut-être aussi contre celles de Platon.

La terre.. le feu, c'est-à-dire les deux contraires, l'un de pesanteur, et l'autre de légèreté.

Ce célèbre cheveu, c'est une ironie plutôt encore qu'un argument.

--- Comme cet homme qu'on suppose, on voit que le Moyen-Âge n'a pas eu beaucoup à faire pour inventer le fameux âne de Buridan.

-- Nos philosophes, l'expression du texte est moins précise.

-- S'arrête aux extrémités, il serait bien difficile de constater exactement ce phénomène.

L'un, le feu ; l'autre, la terre.

§ 23. En soi, j'ai ajouté ce mot, pour que la pensée fût plus claire, et pour que l'opposition qui suit fût plus évidente.

-- Indirectement, opposé à : « en soi. » Simplicius et d'autres commentateurs ont été obligés aussi de faire des additions analogues à celle que je me suis permise.

Quand le mouvement ne lui convient pas plus dans un sens que dans l'autre, ce qui n'est le cas ni de la terre ni du feu, parce que l'un et l'autre de ces corps ont des tendances naturelles.

-- Le corps ne devrait pas demeurer immobile, sous-entendu : « s'il avait quelque tendance naturelle qui l'éloignât du centre. »

Non pas dans sa totalité, comme le feu, dont l'exemple est cité plus bas.

§ 24. La même théorie, celle qui suppose que c'est l'équilibre et l'égale pression en tous sens qui maintiennent la terre au centre du monde ; voir plus haut, § 19. — Équilibré, ou « semblable. » J'ai préféré ce premier mot, afin de reproduire comme le texte, celui dont je me suis servi déjà.

Car cela n'est nécessaire que dans l'hypothèse de l'équilibre, la pensée reste obscure ; et j'ai craint de la préciser. Aristote semble vouloir dire que, dans la théorie d'Anaximandre, c'est le corps tout entier qui serait retenu au centre par l'égale pression ; et qu'une partie du corps pourrait être soustraite à cette égale influence. Mais il aurait fallu indiquer d'où pourrait venir cette différence.

Qui soit précisément un point, et qui n'ait pas de parties indéfiniment divisibles.

De la même manière, que le ferait le feu ; mais il semble que la terre est tellement différente du feu, qu'on ne peut pas supposer qu'elle soit sujette aux mêmes variations.

N'était pas naturellement, c'est à peu près la seule raison qu'Aristote donnera lui-même de l'immobilité de la terre. Elle est au centre par une loi de nature, et le centre eut toujours immobile.

--- Toutes les conjectures, et non pas précisément : «les systèmes.»

CHAPITRE XIV.

Théorie particulière de l'auteur contre le mouvement de la terre ; loi de la chute des graves; la terre est immobile au centre du monde. Cette doctrine est d'accord avec l'astronomie mathématique. — Théorie particulière de l'auteur sur la forme de la terre; cette forme est sphérique. Réponse à une objection contre cette théorie. Conjectures sur la constitution de la terre. Origine des éléments dont elle est composée. Preuve de la sphéricité de la terre, d'après les phases de la lune et les observations des astres. Petitesse relative de la terre; la dimension de sa circonférence est de de 440,000 stades.

§ 1. Quant à nous, notre premier soin sera de rechercher si la terre est en mouvement, ou si elle reste immobile. Ainsi que nous l'avons déjà dit, tantôt on la comprend au nombre des astres; tantôt on la place au centre du monde, et l'on prétend qu'elle y roule et qu'elle y tourne autour du pôle, qui est au milieu. Or, que cela soit impossible, c'est ce qu'on verra tout d'abord en remarquant que, dans l'hypothèse de son mouvement, soit qu'on la suppose hors du centre, soit qu'on la place au centre, il faut toujours nécessairement que ce mouvement soit pour elle un mouvement forcé ; car ce n'est pas là le mouvement propre de la terre elle-même, puisqu'alors chacune de ses parties devrait avoir aussi ce même mouvement. Or, on peut voir que, dans l'état présent des choses, tous les corps graves, sans exception, sont portés et descendent en ligne droite vers le centre. Il n'est donc pas possible que ce mouvement soit éternel, du moment qu'il est forcé et contre nature, tandis qu'au contraire l'ordre du monde est évidemment éternel. J'ajoute que tous les corps qui sont emportés par le mouvement circulaire, paraissent retarder dans leur course et avoir plus d'un mouvement de translation, [297a] si l'on en excepte la première sphère. Par suite, il faudrait nécessairement que la terre aussi eût au moins deux mouvements, soit qu'elle tourne autour du centre, soit qu'elle roule en étant au centre. Mais si ce phénomène était exact, il faudrait qu'il se produisit alors certains passages et certains retours des astres fixes ; or ce n'est pas là du tout ce qu'on observe, et les mêmes astres se lèvent et se couchent toujours aux mêmes endroits de la terre.

§ 2. D'autre part, le mouvement naturel des parties de la terre et celui de la terre dans sa masse totale, se font vers le centre de l'univers ; et c'est même là ce qui explique pourquoi la terre est maintenant immobile au centre.

§ 3. Mais on pourrait se demander, puisque le centre est le même pour le ciel et pour la terre, vers lequel de ces deux centres sont portés naturellement les corps graves et les parties de la terre ; et s'ils y sont portés parce que c'est le centre du monde, ou uniquement parce que c'est le centre de la terre. Je réponds, sans hésiter, qu'il faut absolument que ce soit le centre du monde ; car les corps légers et le feu, qui se dirigent en sens contraire des corps graves, sont portés à l'extrémité du lieu qui environne le centre.

§ 4. Or, c'est indirectement que le centre de la terre est le même que le centre du monde ; car les corps graves sont portés aussi vers le centre de la terre; mais c'est indirectement qu'ils sont portés vers elle, et seulement parce qu'elle a son centre au centre du monde. La preuve que les corps graves sont portés aussi vers le centre de la terre, c'est que les corps pesants qui tombent à sa surface ne suivent pas des lignes parallèles; mais ils descendent selon des angles égaux. Par conséquent, ces corps sont emportés vers un centre unique, qui est également le centre de la terre.

§ 5. Il est donc évident que la terre doit être nécessacrement au centre et y être immobile, soit d'après les causes que l'on vient d'expliquer, soit par cette autre cause que les corps graves lancés de force en l'air, une fois parvenus à leur niveau, reviennent au même point, quand bien même la force qui les aurait poussés les lancerait à l'infini. On voit donc bien évidemment, par tous ces motifs, que la terre ne se meut pas et qu'elle n'est pas en dehors du centre.

§ 6. Mais en outre, ce qu'on vient de dire doit nous expliquer du même coup la cause de son immobilité ; car si les corps, ainsi qu'on peut l'observer, sont portés de tous les points de la terre vers le centre, et que le feu soit porté, au contraire, du centre vers les extrémités, il est dès lors impossible qu'aucune des parties de la terre puisse s'écarter loin du centre, autrement que par force ; car il n'y a jamais qu'un mouvement unique pour un corps unique, un mouvement simple pour un corps simple ; et un même corps ne peut jamais avoir de mouvements contraires. Or, le mouvement qui part du centre est contraire à celui qui se dirige vers le centre. Si donc aucune partie de la terre ne peut être emportée loin du centre, à plus forte raison encore la terre entière ne peut-elle pas s'en éloigner; car là où va naturellement une partie d'un corps, là aussi va le corps tout entier. Par conséquent, comme [297b] il est impossible qu'elle soit mue et déplacée, si ce n'est par une force supérieure, il faut nécessairement qu'elle reste au centre.

§ 7. Les démonstrations que les mathématiciens donnent en astronomie, témoignent également en faveur de la théorie que nous venons de présenter ; car les phénomènes se produisent par le changement des formes qui constituent l'ordre des astres, comme si la terre était au centre. Voilà tout ce que nous avons à dire en ce qui concerne la place, le repos et le mouvement de la terre.

§ 8. Quant à sa forme, il faut nécessairement qu'elle soit sphérique ; car chacune de ses parties ont de la pesanteur jusqu'au centre ; et la partie la plus faible étant poussée par la plus forte, elle ne peut se soulever irrégulièrement comme les flots de la mer. Mais elle est plutôt comprimée, et l'une cède à l'autre jusqu'à ce que la pression arrive enfin au centre. D'ailleurs, il faut entendre ce que nous venons de dire comme si la terre s'était formée d'abord, et produite de la manière que le disent quelques naturalistes. Seulement, ces philosophes prétendent que c'est une force contre nature qui a causé le mouvement des corps graves en bas ; mais il vaut mieux admettre ce qui est réel, et affirmer simplement que ce mouvement tient à ce que tout corps pesant se porte naturellement vers le centre. Ainsi, le mélange des éléments n'existant encore qu'en puissance, les corps, en se séparant les uns des autres, se portèrent de tous côtés vers le centre avec une égale intensité. Du reste, le résultat serait tout à fait le même, soit que les corps ainsi divisés se portassent des extrémités vers le centre, soit qu'ils s'y dirigeassent de toute autre façon.

§ 9. Il est donc évident que, les corps se précipitant également de toutes parts des extrémités vers un seul centre, il a fallu nécessairement que la masse devint partout entièrement pareille ; car, l'addition qui était ainsi faite étant partout égale, il a bien fallu que l'extrémité de la surface fût partout aussi à égale distance du centre. C'est là précisément la forme de la sphère. Mais il n'importe même pas du tout, pour la vérité de cette théorie, que les différentes parties de la terre se soient portées également de tous côtés vers son centre ; car il fallait bien toujours nécessairement que la plus grande masse poussât la plus petite qui était devant elle, l'une et l'autre tendant au centre, où elles se dirigeaient, et le corps le plus lourd poussant le moins lourd jusque-là.

§ 10. Une objection qu'on pourrait élever ici, recevrait la même solution. « Si la terre, peut-on dire, étant au centre et étant de forme sphérique, le poids venait à s'augmenter considérablement dans l'un ou l'autre de ses deux hémisphères, le centre ne serait plus le même pour l'univers et pour la terre ; par conséquent, ou la terre n'est pas immobile au centre, comme on le prétend ; ou bien, si elle y est, elle y peut rester immobile même dans cette hypothèse, sans avoir le centre vers lequel elle est entraînée par son mouvement naturel. »

§ 11. [298a] Telle est bien l'objection qu'on peut faire ; mais, en étendant un peu la question et en la divisant, il n'est pas difficile de voir comment nous avons raison de soutenir qu'une grandeur quelconque, du moment qu'elle pèse, doit se diriger toujours vers le centre du monde; car il est évident que cela ne veut pas dire que ce soit jusqu'à ce point que l'extrémité du corps touche le centre ; mais cela veut dire que le corps le plus lourd doit l'emporter, jusqu'à ce qu'il ait pris le centre du monde pour son propre centre, puisque sa tendance naturelle le porte jusque-là. Ceci peut s'appliquer d'ailleurs, sans aucune différence, d'une motte de terre, et à la première partie venue de la terre et à la terre entière. Le phénomène dont on parle ne dépend pas de la grandeur ou de la petitesse du corps ; mais il s'applique à tout corps quelconque, dont la tendance a lieu vers le centre du monde. Par conséquent, de quelque côté que la terre se soit déplacée, ou toute entière ou seulement en partie, il faut nécessairement qu'elle se soit déplacée jusqu'à ce qu'elle eût pris également son centre de tous les côtés, les parties les plus légères s'étant équilibrées avec les plus pesantes, par le mouvement qui les poussait en avant.

§ 12. Si donc la terre a été un jour produite, c'est uniquement de cette façon qu'elle a dû se produire. Ainsi, l'on doit voir clairement qu'au moment de sa génération, la terre a dû être sphérique; ou bien en supposant même qu'étant incréée, elle ait été éternellement immobile, elle doit avoir la constitution qu'elle aurait eue tout d'abord et dès son origine, si en effet elle avait eu une origine nouvelle. D'après toute cette théorie, il faut que sa forme soit nécessairement sphérique, et que tous les corps graves se précipitent vers elle, suivant des angles semblables, et non pas parallèlement. C'est ce qui doit avoir lieu naturellement pour un corps qui est naturellement sphérique. Ainsi, ou bien la terre est sphérique, ou du moins sa nature est de l'être, puisqu'il faut, pour bien déterminer chaque chose, la prendre telle que naturellement elle doit être et subsister, et non pas telle qu'elle est par force et contre sa nature.

§ 13. On peut encore démontrer la sphéricité de la terre par les phénomènes qui frappent nos sens. Ainsi, si l'on supposait que la terre n'est pas sphérique, les éclipses de lune ne présenteraient par les sections qu'elles présentent, dans l'état actuel des choses ; car la lune, dans ses transformations mensuelles, affecte toutes les divisions possibles, tantôt demi-pleine, tantôt en croissant, tantôt pleine aux trois quarts ; mais dans les éclipses, la ligne qui la termine est toujours courbe. Par conséquent, comme la lune ne s'éclipse que par l'interposition de la terre, il faut bien que ce soit la circonférence de la terre, qui, étant sphérique, soit cause de cette forme et de cette apparence.

§ 14. Bien plus, d'après la manière même dont les astres se montrent à nous, il est prouvé que non seulement la terre est ronde, mais même qu'elle n'est pas très grande; car il nous suffit de faire un léger déplacement, soit au midi, soit au nord, pour que le cercle de l'horizon devienne évidemment tout autre. Ainsi les astres [298b] qui sont au-dessus de notre tète subissent un changement considérable, et ils ne nous semblent plus les mêmes, selon qu'on va au midi, ou au nord. Il y a certains astres qu'on voit en Égypte et à Chypre, et qu'on ne voit plus dans les contrées septentrionales. Certains astres, au contraire, qu'on voit constamment dans les contrées du nord, se couchent quand on les considère dans les contrées que je viens de nommer. Ceci prouve non seulement que la forme de la terre est sphérique, mais encore que sa sphère n'est pas grande; car autrement on ne verrait pas de tels changements pour un déplacement si petit.

§15. Ainsi, quand on suppose que le pays qui est aux colonnes d'Hercule va se rejoindre au pays qui est vers l'Inde, et qu'ainsi il n'y a qu'une seule et unique mer, on ne me parait pas faire une supposition par trop incroyable. On cite entr'autres preuves les éléphants, dont l'espèce se retrouve à ces deux extrémités du globe ; ce qui n'est possible que si ces deux extrémités se tiennent et se rejoignent en effet.

§ 16. Et les mathématiciens qui ont essayé de mesurer les dimensions de la circonférence, la portent à quarante fois dix mille stades. C'est d'après ces preuves péremptoires qu'on est nécessairement amené à penser que non seulement la masse de la terre est de forme sphérique, mais encore que cette masse n'est pas fort grande comparativement à celle des autres astres.




 

Ch. XIV, § 1. Ainsi que nous l'avons déjà dit, voir plus haut, ch. 13, § 1.

— On la comprend au nombre des astres, c'est la théorie des Pythagoriciens.

Qu'elle y roule et qu'elle y tourne, c'est la théorie de Platon; voir le Timée, page 135 de la traduction de M. V. Cousin.

Autour du pôle, qui est au milieu, c'est l'axe du monde, pour prendre les expressions mêmes de Timée.

C'est ce qu'on verra tout d'abord, premier argument contre le mouvement de la terre : la terre ne peut pas se mouvoir circulairement, puisque nous voyons toutes ses parties n'avoir qu'un mouvement en ligne droite.

Chacune de ses parties, par exemple, tous les corps graves qu'on laisse tomber à sa surface ; voir aussi plus loin, § 4.

-- Tous les corps graves sans exception, l'expression du texte est beaucoup plus vague.

En ligne droite, mais non pas selon des lignes parallèles; voir plus bas, § 4.

-- L'ordre du monde est évidemment éternel, admirable principe, dont Aristote a fait le plus grand usage.

-- J'ajoute, second argument : la terre aurait plusieurs mouvements, si elle avait le mouvement circulaire, comme les planètes.

Tous les corps, il ne s'agit que des planètes, puisque, quelques lignes plus bas, on excepte les étoiles fixes, qui appartiennent à la première sphère.

Retarder dans leur course, ceci indique les rétrogradations apparentes des planètes.

La première sphère, c'est-à-dire, celle des étoiles fixes et qui emporte le ciel entier autour de la terre.

Qu'elle tourne autour du centre, et dans une orbite qui lui serait propre.

Roule en étant au centre, comme Platon le dit dans le Timée.

Il faudrait qu'il se produisit alors, on voit par ce passage que l'antiquité était sur la bonne route pour découvrir le vrai système du monde. C'est en effet par l'observation de certains phénomènes astronomiques, qu'on est arrivé à se convaincre du mouvement de la terre, parce qu'il n'y a que ce mouvement qui puisse expliquer les apparences de ces phénomènes.

Et les mêmes astres, ceci n'est pas aussi exact qu'Aristote semble le croire. Mais il est digne de remarque que c'est en s'adressant à l'aspect du ciel qu'il essaye d'expliquer l'immobilité de la terre.

§ 2. Des parties de la terre, c'est-à-dire des corps graves qui tombent à sa surface.

-- Se font vers le centre de l'univers, puisque la terre est prise pour le centre du monde, son centre se confond avec le centre de l'univers.

Maintenant, c'est-dire dans l'état actuel du système du monde.

§ 3. Pour le ciel et pour la terre, le texte dit simplement : « pour les deux. » J'ai cru devoir être plus explicite.

-- De ces deux centres, qu'on peut distinguer, bien qu'ils soient réunis. J'ai d'ailleurs ajouté ces mots pour plus de clarté.

Je réponds sans hésiter, j'ai dû paraphraser ainsi la phrase grecque, pour en rendre toute la force.

-- A l'extrémité du lieu qui environne le centre, par conséquent, les graves et la terre doivent être portés à l'autre extrémité, c'est-à-dire au centre du monde.

§ 4. C'est indirectement, ou » accidentellement. »

Sont portés aussi vers le centre de la terre, comme ils sont portés également vers le centre du monde.

Qu'ils sont portés vers elle et seulement, le texte n'est pas tout à tait aussi précis.

-- Ne suivent pas des lignes parallèles, il n'est pas probable que les anciens eussent pu faire des expériences directes pour s'assurer de ce fait, qui est très exact; c'était seulement par le raisonnement qu'ils s'en étaient convaincus. Tous les corps tombant de la même manière à la surface de la terre, et la terre étant ronde, il faut que tous ces corps se dirigent vers son centre.

Selon des angles égaux, qui se dirigent tous vers le même point et convergent au centre, de la terre. Les angles sont formés de la ligne qui se dirige au centre et de la perpendiculaire à l'horizon. On a essayé dans les temps modernes de mesurer cet angle; mais il n'était pas possible que les anciens fissent des opérations de ce genre; voir le Cours élémentaire d'astronomie de M. Ch. Delaunay, § 313.

§ 5. Il est donc évident, la conclusion n'est pas rigoureuse, quoi qu'en pense Aristote.

Reviennent au même point, sur la terre; et par conséquent, la terre ne se meut pas; car si elle était en mouvement le corps retomberait sur un autre point, que ce-lui d'où on l'aurait lancé. On voit que cette preuve n'est pas très forte, bien qu'elle soit ingénieuse; et il faudrait que le mouvement de la terre fût prodigieusement rapide pour que la différence pût être sensible. Le corps lancé en l'air serait d'ailleurs entraîné dans le tourbillon de la terre.

Les lancerait à l'infini, ce ne peut être qu'une hypothèse, puisqu'il est interdit à l'homme de produire un pareil mouvement. Il est constaté an contraire que les graves ne tombent pas selon la verticale à partir de leur point de départ jusqu'à leur point d'arrivée à la surface de la terre.

On voit donc bien évidemment, même remarque qu'au début du §.

§ 6. La cause de son immobilité, après avoir constaté le fait de l'immobilité de la terre, l'auteur explique la cause de cette immobilité: « Toutes les parties de la terre et les corps graves tendent au centre; à plus forte raison, la terre elle-même doit-elle tout entière être fixée au centre. »

Et que le feu au contraire, cette pensée ne fait pas bien suite à la précédente, et elle pourrait bien n'être qu'une interpolation.

Autrement que par force, le fait est vrai; mais la conséquence qu'on en tire ne l'est pas.

Et un même corps, le texte n'est pas aussi formel.

-- Ne peut être emportée loin du centre, ce phénomène est exact.

Ne peut-elle pas s'en éloigner, on n'en voit pas aussi bleu la raison ; mais il faut se rappeler qu'un peu plus haut, Aristote a confondu le centre de la terre et le centre du monde.

Là où va naturellement une partie d'un corps, principe purement logique, qui ne se vérifie pas dans la réalité.

Si ce n'est par une force supérieure, Simplicius ne parait pas avoir connu cette phrase intercalaire ; ou du moins il n'y en a pu de trace dans son commentaire.

§ 7. Que les mathématiciens donnent, voir plus haut, ch. 10, §§ 1 et 2. Les Grecs avaient compris de très bonne heure que les mathématiques peuvent être appliquées très utilement à l'astronomie; et il est probable qu'à cet égard ils sont allés beaucoup plus loin que les Chaldéens et les Égyptiens, leurs maîtres.

Par le changement des formes, on voit que pour Aristote la question était posée absolument comme pour, la science moderne. Seulement on a mieux observé depuis lors les phénomènes célestes, et l'on a reconnu qu'on n'en pouvait rendre compte rigoureusement que par le mouvement de la terre, au lieu de son immobilité. Un peu plus bas, c'est encore par des observations astronomiques qu'Aristote essaiera d'expliquer la forme de la terre.

§ 8. Qu'elle soit sphérique, les arguments ne sont peut-être pas très bons; mais le fait est exact. Cette théorie de la sphéricité de la terre n'est pu d'ailleurs spéciale à Aristote; et elle est déjà dans le Timée de Platon, p. 123 et 135 de la traduction de M. V. Cousin.

-- Se soulever irrégulièrement comme les flots de la mer, il n'y a qu'un seul mot dans le texte.

-- Elle est plutôt comprimée, c'est l'action de la pesanteur.

Jusqu'à ce que la pression, le texte n'est pas tout à fait aussi formel. On peut entendre aussi que c'est la partie la plus faible qui est poussée jusqu'au centre. --S'était formée d'abord et produite, il n'y a qu'un seul mot dans le texte.

-- Quelques naturalistes, parmi lesquels Simplicius comprend Anaxagore.

Une force contre nature, l'expression du texte est un peu plus vague.

-- Simplement, j'ai ajouté ce mot.

N'existant encore qu'en puissance, tout étant encore dans la confusion et le chaos, avant que l'Intelligence n'intervint, d'après les théories d'Anaxagore.

Le résultat sera tout à fait le même, c'est-à-dire que le phénomène de la chute des graves restera toujours ce qu'il est, quelqu'explication qu'on en donne.

Ainsi divisés, selon le système d'Anaxagore.

§ 9. Les corps se précipitant, à l'origine des choses, et au moment où le monde est supposé avoir été organisé.

L'addition qui était ainsi faite, au noyau central vers lequel se précipitaient tous les corps.

De la surface, j'ai ajouté ces mots pour éclaircir la pensée.

C'est là précisément la forme de la sphère, car la sphère est un solide où tous les points de la surface sont à égale distance du centre.

Se soient portées également, pour cela, il aurait fallu que toutes les substances dont la terre est composée, fussent du même poids; ce qui n'est pas évidemment.

Que la plus grande masse, en admettant que la tendance de toutes les parties ne fût pas absolument égale.

§ 10. Qu'on pourrait élever ici,  le texte n'est pas tout à fait aussi formel.

--- Peut-on dire, j'ai ajouté ces mots, pour plus de clarté.

-- Le poids venait à s'augmenter, ceci est une pure hypothèse que rien ne justifie dans le système actuel du monde.

Pour l'univers et pour la terre, parce que le centre de gravité aurait changé pour la terre elle-même, par le déplacement intérieur de la masse.

Comme on le prétend, j'ai ajouté ces mots pour compléter la pensée; le sens en est implicitement compris dans le texte.

Même dans cette hypothèse, le texte dit précisément : » même maintenant. » On ne voit pas très nettement le but de cette objection. Elle semble tendre à prouver que le centre de la terre n'a pas besoin de se confondre avec le centre du monde, pour que la terre soit immobile. Aristote répond que, même en admettant que le centre de la terre ait pu jamais être séparé du centre du monde, il a dû nécessairement y revenir.

§ 11. Qu'on peut faire, j'ai ajouté ces mots.

Vers le centre du monde, le texte dit seulement : » Vers le centre. »

Que ce soit jusqu'à ce point, je n'ai pas cru devoir préciser davantage.

-- L'extrémité du corps touche le centre, c'est la traduction exacte du texte; mais ceci aurait pu être exprimé plus clairement. Il s'agit d'une simple disposition des matières selon leur densité réciproque; et il s'ensuit que chacune d'elles doit conserver sa substance propre et ne pas se réduire, par la compression, à une sorte de point mathématique, qui se confondrait avec le centre, vers lequel il se dirigerait.

Mais cela veut dire, l'expression du texte n'est pas aussi précise.

Le plus lourd, même remarque.

-- Le centre du monde, le texte dit seulement: « le centre.»

Sa tendance naturelle, ou peut-être : « sa chute. »

Le phénomène, l'expression du texte est tout à fait indéterminée.

Eût pris également son centre de tous les côtés, ceci est fort ingénieux. Mais ce n'est pas tout à fait exact; et la terre n'est pas une sphère parfaite; elle est renflée à l'équateur et aplatie aux pôles par le mouvement de rotation.

 --- Les plus légères.... les plus pesantes, le texte dit : « les plus petites.... les plus grandes. »

Par le mouvement qui les poussait en avant, et qui classait les matières selon leur pesanteur, les plus lourdes au centre et les plus légères à la surface.

§ 12. Si donc la terre a été un jour produite, c'est une hypothèse qu'Aristote n'admet pas, puisqu'il a soutenu l'éternité du monde; voir le VllIe livre de la Physique, p. 453 et suiv. de ma traduction.

Au moment de sa génération, le texte dit simplement : « que la génération de la terre a dû être sphérique. »

-- Si, en effet, elle avait eu une origine, ce qu'Aristote ne croit pas.

Suivant des angles semblables, qui se dirigent et convergent tous vers le centre de la terre, supposé le centre du monde.

C'est ce qui doit avoir lieu, conclusion purement logique, et qui n'en est pas moins certaine, bien qu'on ne puisse pas vérifier matériellement les faits.

Pour bien déterminer chaque chose, le texte n'est pas aussi formel. Cette maxime, d'ailleurs, est excellente; st c'est un argument puissant en faveur de l'optimisme, vers lequel Aristote penche toujours.

§ 13. La sphéricité de la terre, le texte dit simplement : « Ceci. »

-- Par les phénomènes qui frappent nos sens, c'est une excellente méthode d'étudier d'abord les phénomènes, pour établir ensuite des théories appuyées sur l'observation.

-- Si l'on supposait que la terre n'est pas sphérique, j'ai dit ici paraphraser le texte plutôt que de le traduire.

-- Les éclipses de lune, je ne vois pas que l'astronomie moderne ait fait usage des observations de ce genre pour déterminer la forme de la terre. La démonstration semble cependant excellente.

Demi-pleine, le texte dit précisément : « droite, creuse. »

De cette forme et de cette apparence, il n'y a qu'un mot dans le grec; sur les éclipses de lune, voir les Derniers Analytiques, livre II, ch. 16, § 1, p. 273 de ma traduction.

§ 14. Bien plus, nouvel argument aussi bon que le précédent, et emprunté aussi à l'observation des phénomènes.

-- Qu'elle n'est pas très grande, la même pensée se retrouve dans la Météorologie, livre 1, ch. 3, § 2 et 7, p. 8 et il de ma traduction; voir aussi id. ib. ch. 8, § 6, et ch. 14, § 19.

Un léger déplacement, ces observations sont exactes; et toutes simples qu'elles sont, elles n'ont pu venir qu'assez tard.

En Égypte et à Chypre, ceci ne veut pu dire qu'Aristote lui-même fût allé en Égypte; mais il se peut bien qu'il fût allé à Chypre, qui est assez près de l'Asie mineure, où il a résidé de longues années.

Que la sphère n'est pas grande, Sphère ne signifie ici que circonférence.

§ 15. Va se rejoindre au pays qui est vers l'Inde, voir sur une opinion tout à fait analogue, la Météorologie, livre II, ch. 5, § 15, p. 161 de ma traduction.

-- Il n'y a qu'une seule et unique mer, le fait est exact; mais cette mer n'est pas en ligne droite, comme sans doute le supposait Aristote.

--- Les éléphants dont l'espèce se retrouve, il est probable que du temps d'Aristote, il y avait plus d'éléphants dans cette partie de l'Afrique qu'il n'y en a aujourd'hui. La preuve d'ailleurs n'est pas très forte.

§ 16. Et les mathématiciens, il est regrettable que ces mathématiciens ne soient pas nommés ici ; voir la Météorologie, livre 1, ch. 3, § 5, p. 10 de ma traduction.

Quarante fois dix mille, j'ai conservé la formule du texte; c'est 440,000 stades.

Stades, il y a des éditions qui donnent Pas au lieu de Stades. La mesure de la circonférence terrestre serait alors beaucoup trop petite. Avec 440,000 stades, à 94 112 toises le stade, elle est à peu près le double de la réalité, comme le remarquent déjà Simplicius et saint Thomas; c'est 83 millions de mètres à peu près, au lieu de 40,000,000. Une autre mesure se trouve dans le petit traité apocryphe Du Monde, ch. 3, § 15, p. 371 de ma traduction; mais il ne s'agit que de la partie habitable de la terre, et non de la terre entière. Il faut lire dans Simplicius les détails qu'il donne sur les diverses mesures de la terre connues de son temps. Ces détails sont intéressants pour l'histoire de l'astronomie.

-- Comparativement à celle des autres astres, voir les passages de la Météorologie, cités sur le § 14, et qui peuvent éclaircir celui-ci.