Vitruve
de
l'architecture
LIVRE
NEUVIÈME.
INTRODUCTION.
1. LEs
célèbres athlètes qui sortaient victorieux des jeux Olympiques,
Pythiens, Isthmiques et Néméens, recevaient autrefois des Grecs de
magnifiques honneurs. La palme et la couronne dont on les décorait au
milieu de l'assemblée, n'étaient pas les seules récompenses qu'on
leur accordait : lorsqu'ils retournaient dans leur patrie, c'était sur
des chars de triomphe qu'ils étaient portés, et le trésor public
pourvoyait à leurs besoins pendant toute leur vie. A la vue de telles
distinctions, je suis étonné qu'on n'ait pas rendu les mêmes
honneurs, et de plus grands encore, à ceux dont les écrits rendent
d'immenses services dans tous les temps et chez tous les peuples. Et il
y eût eu certes plus de justice, puisque l'athlète se borne à donner
par l'exercice plus de force à son corps, tandis que l'écrivain, tout
en perfectionnant son esprit, dispose celui des autres à la science par
les leçons utiles qu'il répand dans ses ouvrages.
2. Milon le
Crotoniate ne fut jamais vaincu! Quel avantage les hommes en ont-ils
retiré ? Et tous ceux qui, comme lui, furent vainqueurs, ont-ils fait
autre chose que de jouir pendant leur vie d'une glorieuse réputation au
milieu de leurs concitoyens? Mais il n'en est pas de même des
préceptes de Pythagore, de Démocrite, de Platon, d'Aristote et des
autres sages : journellement lus et mis eu pratique, ils produisent sans
cesse des fruits toujours nouveaux, non seulement pour leurs concitoyens, mais encore pour tous les peuples. Ceux qui, dès leur jeunesse,
puisent à la source de leur doctrine, possèdent les excellents
principes de la sagesse, et dotent les villes de bonnes moeurs, de
droits basés sur la justice, de sages lois, sans lesquelles il n'est
point d'État qui puisse subsister.
3. Puisque,
grâce à leurs connaissances, les écrivains peuvent procurer à tous
les hommes de si grands avantages, ce n'est pas seulement par des palmes
et des couronnes qu'il convient, à mon avis, de les honorer, il
faudrait encore leur décerner des triomphes, et les mettre au rang des
dieux. Ils ont fait un grand nombre de découvertes dont les hommes ont
profité pour agrandir leur savoir : je vais à quelques-uns d'entre eux
en emprunter une que je proposerai comme exemple ; on sera forcé de
reconnaître et d'avouer qu'on doit des honneurs à de tels hommes.
4.
Commençons
par Platon, et suivons-le dans le développement qu'il donne d'un de ses
si nombreux et si utiles raisonnements. Une place, ou un champ, est
parfaitement carrée : on veut en doubler la grandeur, en lui donnant
une forme également carrée. Comme on ne peut le faire par la
multiplication des nombres, il faut avoir recours à la règle et au
compas. Voici la démonstration qu'il emploie. Le carré qui aura dix
pieds de longueur et autant de largeur, donnera une surface de cent
pieds; on veut doubler cette surface, lui donner deux cents pieds, en
lui conservant sa forme carrée : il faut chercher quelle sera la
grandeur de chaque côté du carré, pour que la multiplication de ces
côtés produise les deux cents pieds que doit avoir la superficie; ce
qu'il est impossible de trouver par des nombres : car si nous prenons le
nombre quatorze, la multiplication donnera cent quatre-vingt-seize. Si
nous recourons au nombre quinze, nous obtiendrons deux cent vingt-cinq.
5.
Ce
problème ne pouvant être résolu par des nombres, il faut tirer dans
ce carré de dix pieds de longueur sur autant de largeur, une ligne
diagonale pour le diviser en deux triangles égaux, ayant chacun
cinquante pieds de surface, et sur la longueur de cette diagonale
tracer un carré dont les côtés soient égaux à cette ligne. Par ce
moyen, on aura dans le grand carré quatre triangles aussi grands et
ayant le même nombre de pieds que les deux triangles qui ont pour base
la diagonale du petit carré, et qui contiennent chacun cinquante
pieds. C'est par ces lignes que Platon a expliqué la manière de
doubler le carré. Voyez la figure tracée ci-dessous.
6.
Pythagore
a de même inventé et fait connaître la manière de tracer un angle
droit, sans employer l'équerre dont se servent les ouvriers; et cet
instrument qui sort si rarement juste des fabriques, malgré tout se
qu'on se donne de peine pour le faire, Pythagore nous a expliqué et
appris le moyen de le tracer avec justesse et certitude. On prend trois
règles qui ont de longueur, l'une trois pieds, l'autre quatre, la
troisième cinq. On les dispose de manière que, se joignant par leurs
extrémités, elles présentent un triangle qui donnera une équerre
juste. Si la longueur de chacune de ces règles sert de base pour tracer
trois carrés équilatéraux, celui dont le côté sera de trois pieds, aura neuf pieds de surface; celui dont le côté sera de quatre, en
aura seize ; celui dont le côté sera de cinq, en aura vingt-cinq.
7.
De cette manière les deux carrés, dont l'un présente trois pieds et
l'autre quatre sur chacun de leurs côtés, donnent ensemble une surface
égale à celle du troisième carré, qui a cinq pieds de chaque côté.
Dès qu'il eut fait cette découverte, Pythagore ne doutant point qu'il
ne la dût à une inspiration des Muses, leur rendit de très grandes
actions de grâces, et leur immola, dit-on, des victimes. Or, ce
procédé si utile dans beaucoup d'applications, surtout quand il s'agit
de mesurer, est aussi d'un immense avantage dans les édifices pour la
construction des escaliers, afin d'en bien proportionner les degrés.
8.Si,
en effet, la hauteur comprise entre le premier étage et le
rez-de-chaussée est divisée en trois parties, il suffit de donner cinq
de ces parties au limon de l'échiffre, pour que la pente ait une
grandeur convenable : car si le potelet qui se trouve entre le premier
étage et le rez-de-chaussée comprend une hauteur divisée en trois
parties, le patin qui s'en éloignera horizontalement devra en avoir
quatre à l'endroit où viendra s'emboîter le pied de l'échiffre; par
ce moyen, les degrés et l'ensemble de l'escalier seront bien
proportionnés. On en peut juger par la figure tracée ci-dessous.
9.
Archimède a fait une foule de découvertes aussi admirables que
variées. Parmi elles, il en est une surtout dont je vais parler, qui
porte le cachet d'une grande intelligence. Hiéron régnait à Syracuse.
Après une heureuse expédition, il voua une couronne d'or aux dieux
immortels, et voulut qu'elle fût placée dans un certain temple. Il
convint du prix de la main d'oeuvre avec un artiste, auquel il donna au
poids la quantité d'or nécessaire. Au jour fixé, la couronne fut
livrée au roi, qui en approuva le travail. On lui trouva le poids de
l'or qui avait été donné.
10.
Plus tard, on eut quelque indice que l'ouvrier avait soustrait une
partie de l'or, et l'avait remplacée par le même poids en argent
mêlé dans la couronne. Hiéron, indigne d'avoir été trompé, et ne
pouvant trouver le moyen de convaincre l'ouvrier du vol qu'il avait
fait, pria Archimède de penser à cette affaire. Un jour que, tout
occupé de cette pensée, Archimède était entré dans une salle de
bains, il s'aperçut par hasard qu'à mesure que son corps s'enfonçait
dans la baignoire, l'eau passait par-dessus les bords. Cette découverte
lui donna l'explication de son problème. Il s'élance immédiatement
hors du bain, et, dans sa joie, se précipite vers sa maison, sans
songer à s'habiller. Dans sa course rapide, il criait de toutes ses
forces qu'il avait trouvé ce qu'il cherchait, disant en grec :
Εὕρηκα, Εὕρηκα.
11.
Aussitôt après cette première découverte, il fit faire, dit-on, deux
masses de même poids que la couronne, l'une d'or, l'autre d'argent;
ensuite il remplit d'eau jus-qu'aux bords un grand vase, et y plongea la
masse d'argent qui, à mesure qu'elle enfonçait, faisait sortir un
volume d'eau égal à sa grosseur. Ayant ensuite ôté cette masse, il
mesura l'eau qui manquait, et en remit un setier dans le vase pour
qu'il fût rempli jusqu'aux bords, comme auparavant. Cette expérience
lui fit connaître quel poids d'argent répondait à une certaine mesure
d'eau.
12.
Il plongea aussi de même la masse d'or dans le vase plein d'eau; et
après l'en avoir retirée et avoir également mesuré l'eau qui en
était sortie, il reconnut qu'il n'en manquait pas autant, et que le
moins répondait à celui qu'avait le volume de la masse d'or comparé
avec le volume de la masse d'argent qui était de même poids. Le vase
fut rempli une troisième fois, et la couronne elle-même y ayant été
plongée, il trouva qu'elle en avait fait sortir plus d'eau que la
massé d'or, qui avait le même poids, n'en avait fait sortir; et,
calculant d'après le volume d'eau que la couronne avait fait sortir de
plus que la masse d'or, il découvrit la quantité d'argent qui avait
été mêlée à l'or, et fit voir clairement ce que l'ouvrier avait
dérobé.
13.
Transportons maintenant notre attention sur les travaux d'Architas de
Tarente et d'Eratosthène le Cyrénéen. Les mathématiques leur doivent
un grand nombre de belles découvertes. Quoiqu'elles soient toutes
intéressantes, il en est une surtout, à laquelle ils ont travaillé
tous deux, qui mérite toute notre admiration. Chacun d'eux est parvenu,
par des moyens différents, à résoudre le problème qu'Apollon avait
proposé dans sa réponse aux habitants de Délos : il s'agissait de
faire un cube qui fût le double de celui de son autel ; la solution
devait délivrer les habitants de l'île des maux que faisait peser sur
eux la colère des dieux.
14.
Architas y arriva par le moyen des hémicylindres, et Ératosthène par
celui du mésolabe. Bien que ce soit avec tout le plaisir qu'inspirent
les sciences que je suis ces découvertes, et que chacune d'elles,
considérée dans ses effets, excite naturellement notre enthousiasme,
portant mon attention sur d'autres objets, j'admire aussi les livres de
Démocrite sur la nature, et son commentaire qu'il a intitulé Χειροκμήτων
(recueils d’expériences), où il s'est servi de cire rouge empreinte
de son cachet pour marquer les choses qu'il avait expérimentées
lui-même.
15.
Les ouvrages de ces grands hommes ne servent pas seulement à corriger
les mœurs, ils seront dans tous les temps d'une grande utilité pour
tous les hommes, tandis que les athlètes voient bientôt leur
célébrité s'affaiblir avec leurs forces; et ce n'est ni dans le temps
de leur plus grande vigueur, ni après leur mort, ni par les préceptes
de leur art, qu'ils peuvent procurer aux hommes les avantages qu'on
retire des oeuvres des savants.
16.
Mais comme on n'accorde point d'honneurs au génie ni aux talents
supérieurs des écrivains, s'élançant eux-mêmes par leur
intelligence dans les régions de l'air, ils s'élèvent par la suite
des temps jusqu'au ciel, et imposent pour toujours à la postérité non
seulement la con-naissance de leurs pensées, mais encore celle de leurs
traits. Aussi quiconque se sent entraîner par le charme des
belles-lettres, ne peut manquer d'avoir l'image du poète Ennius gravée
dans son coeur, comme celle des dieux. Et ceux qui aiment les vers
d'Accius, ne croient pas seulement avoir sous les yeux les grâces de
son style, ils s'imaginent encore qu'ils possèdent l'image vivante du
poète.
17.
Il en sera de même de ceux qui naîtront après nous, ils croiront
s'entretenir avec Lucrèce lui-même sur la nature des choses, et avec
Cicéron sur la rhétorique. Beaucoup de nos descendants discourront
avec Varron sur la langue latine; et combien d'érudits, consultant sur
beaucoup de sujets les sages de la Grèce, s'imagineront avoir avec eux
des entretiens secrets! En un mot, lorsque les anciens philosophes,
malgré leur absence, sont invoqués dans les conseils et dans les
discussions, ils doivent tous à l'ancienneté de leur gloire une
autorité plus grande que n'est celle des philosophes vivants.
18.
C'est appuyé sur le crédit de ces illustres écrivains, c'est guidé
par leurs lumières et leurs conseils, que j'ai écrit ces livres, ô
César! Les sept premiers ont traité des édifices, et le huitième des
eaux; dans celui-ci, je vais expliquer les règles de la gnomonique,
dire comment, par le moyen des ombres du gnomon, on arrive à
connaître la hauteur du soleil, et dans quelle proportion elles
s'allongent et se raccourcissent.
I.
Des douze signes du zodiaque, et des sept astres qui ont un mouvement contraire à celui de ces
signes.
1. Il y a
des découvertes qui semblent avoir été faites par un esprit divin, et
qui excitent au plus haut point l'admiration de ceux qui les examinent.
On a vu, par exemple, que l'ombre du gnomon équinoxial avait une
grandeur différente à Athènes, à Alexandrie, à Rome, à Plaisance
et dans les autres lieux de la terre. Voilà pourquoi les cadrans
présentent de si grandes différences dans leur plan, selon le
changement des lieux. C'est en effet d'après la grandeur des ombres
équinoxiales qu'on décrit la figure des analèmes au moyen desquels on
tire, suivant la situation des lieux et l'ombre du gnomon, les lignes
qui indiquent les heures. L'analème est un instrument réglé d'après
le cours du soleil, et dû à l'observation des ombres qui décroissent
à partir du solstice d'hiver; il sert, à l'aide de l'équerre et du
compas, à décrire les effets de cet astre dans le monde.
2. Le monde
est l'ensemble qui comprend toutes les parties de la nature, le ciel et
les étoiles. Le ciel tourne sans cesse autour de la terre et de la mer
sur un axe dont les extrémités servent de pivots : car, dans ces
endroits, la puissance qui gouverne la nature a construit et placé deux
pivots semblables à deux centres : l'un, partant de la terre et de la
mer, va aboutir au plus haut du ciel, auprès des étoiles du
septentrion; l'autre, diamétralement opposé, se trouve sous la terre
dans les parties méridionales. Là, autour de ces pivots, comme autour
de deux centres semblables à ceux d'un tour, elle a placé deux petits
cercles appelés en grec πόλοι, sur
lesquels le ciel tourne sans cesse : la terre, placée au milieu avec la
mer, en est naturellement le centre.
3. La
nature a disposé les pôles de manière que celui qui est dans la
partie septentrionale est élevé sur notre horizon, et que l'autre, qui
est dans la partie méridionale, se trouve placé au-dessous de la
terre, qui le cache. De plus, entre ces deux pôles, le ciel est
traversé par une large zone sphérique, qui est inclinée vers le midi
; elle se compose de douze signes que la nature a représentés par la
disposition des étoiles divisées en douze parties égales. Ces
étoiles, aussi bien que les autres astres qui tournent autour de la
terre et de la mer, suivent dans leur cours la circonférence du ciel.
4. Toutes
ces étoiles sont nécessairement tantôt visibles et tantôt
invisibles. Il y a toujours six de ces constellations qui se promènent
au-dessus de l'horizon, quand les six autres se trouvent au-dessous,
cachées par l'ombre de la terre. Or, s'il y a toujours six de ces
signes qui soient au-dessus de la terre, c'est parce que, à mesure que
le dernier signe, emporté par le mouvement de rotation, s'abaisse d'un
côté pour disparaître entièrement au-dessous de la terre, du côté
opposé un autre signe, entraîné par le même mouvement circulaire,
s'élève de la même quantité des lieux où il était caché, pour
paraître à nos yeux : car l'orient et l'occident sont tous deux soumis
à la même force et à la même nécessité.
5. Ces
signes, au nombre de douze, et occupant chacun la douzième partie du
ciel, tournent perpétuellement d'orient en occident, tandis
qu'au-dessous d'eux, par un mouvement contraire, la lune, l'étoile de
Mercure, celle de Vénus, le soleil lui-même, les étoiles de Mars, de
Jupiter et de Saturne, s'élevant comme par des degrés et parcourant
une ligne plus ou moins grande, se transportent d'occident en orient.
La lune fait le tour du ciel en vingt-huit jours et environ une heure de
plus. Le temps qu'elle emploie à revenir au même point du zodiaque
d'où elle était partie, forme le mois lunaire.
6. Le
soleil, dans l'espace d'un mois, parcourt un signe qui est la douzième
partie du ciel. Ainsi, traversant en douze mois les douze signes,
lorsqu'il est revenu au point du zodiaque d'où il était parti, il a
accompli une année; de sorte que le cercle que parcourt la lune treize
fois en douze mois, le soleil met le même temps à le parcourir une
fois. L'étoile de Vénus et celle de Mercure, faisant leur révolution
autour du soleil qui leur sert de centre, reviennent sur leurs pas et
retardent dans certains cas; dans d'autres même elles restent
stationnaires au milieu des signes, par l'effet de leur marche
circulaire.
7. C'est
une remarque qu'il est très-facile de faire sur l'étoile de Vénus :
tantôt elle suit le soleil, et, après le coucher de cet astre, elle
brille encore dans le ciel d'un vif éclat; alors on la nomme Vesperugo
(qui amène le soir : vesperum agere). A
d'autres époques, elle le précède et se lève avant le jour; alors on
l'appelle Lucifer (qui apporte la lumière - lucem
ferre). De là vient que quelquefois ces deux étoiles restent
plusieurs jours dans un signe, que quelque-fois elles passent plus
rapidement dans un autre. Mais, bien qu'elles ne mettent pas le même
nombre de jours à parcourir chaque signe, en regagnant le temps
qu'elles ont perdu dans un signe par un passage plus rapide à travers
un autre, elles trouvent moyen, lorsqu'elles se sont débarrassées de
la cause qui semble les forcer à s'arrêter dans certains signes, de
toujours fournir leur carrière dans le même espace de temps.
8. Quant à
l'étoile de Mercure, ses mouvements alternatifs dans le ciel
s'exécutent de telle sorte au travers des signes, qu'au bout de trois
cent soixante jours elle revient au point du zodiaque d'où elle était
partie pour commencer sa course, et sa marche se trouve balancée de
manière qu'elle reste environ trente jours dans chaque signe.
9. Pour
l'étoile de Vénus, lorsqu'elle se dégage des rayons du soleil qui
empêchent de la voir, elle ne met que trente jours à parcourir
l'espace d'un signe; mais le nombre de jours de moins que quarante
qu'elle met ainsi à parcourir chacun de ces signes, lorsqu'elle fait
une station, elle le regagne en s'arrêtant plus longtemps dans un autre
signe ; de sorte que c'est en quatre cent quatre-vingt-cinq jours
qu'elle fait sa révolution complète, et qu'elle revient au signe
d'où elle était partie au commencement de son cours.
10.
L'étoile de Mars met environ six cent quatre-vingt-trois jours à
parcourir tous les signes et à revenir au point d'où elle était
antérieurement partie; et si, dans quelques signes, sa marche est plus
rapide, s'arrêtant dans d'autres, elle arrive à compléter ce nombre
de jours. Jupiter, plus lent dans sa marche, qui est opposée au
mouvement général du ciel, parcourt chaque signe en trois cent
soixante-cinq jours environ. Il met onze ans et trois cent
soixante-trois jours à revenir au signe d'où il était parti douze ans
auparavant. Saturne est vingt-neuf mois quelques jours à parcourir un
signe, et revient au bout de vingt-neuf ans et cent soixante jours
environ au signe où il était trente ans auparavant; et moins il est
éloigné des limites du ciel, plus le cercle qu'il a à parcourir est
grand, plus son mouvement paraît lent.
11. Lorsque
les étoiles qui décrivent leur tour au-dessus du soleil sont en trine
aspect avec lui, elles n'avancent plus, mais s'arrêtent et
rétrogradent jusqu'à ce que le soleil quitte cet aspect, en passant
dans un autre signe. Voici comment quelques auteurs expliquent ce
phénomène. Lorsque le soleil est éloigné d'elles par de grandes
distances, il ne les éclaire plus dans leur marche; l'obscurité les
empêche d'avancer; elles s'arrêtent. Tel n'est pas notre sentiment :
car l'éclat du soleil resplendit et pénètre dans toute l'étendue du
ciel, sans que rien puisse l'obscurcir, puisqu'il brille même à nos
yeux lorsque ces étoiles font ce mouvement rétrograde et s'arrêtent.
Or si, à une si grande distance du soleil, nous, chétifs mortels, nous
pouvons en voir la lumière, comment croire que ces astres, qui sont des
êtres divins et lumineux, puissent se trouver dans l'obscurité?
12. Voici
une raison qui aurait plus de poids auprès de nous : c'est que, de
même que la chaleur fait pousser et attire à elle toutes choses, comme
nous le voyons par les fruits qui, grâce à la force de la chaleur,
sont élevés à une certaine hauteur de la terre, et par les vapeurs
qui montent des fontaines jusqu'aux nues par le moyen de l'arc-en-ciel,
de même l'ardeur puissante du soleil, lorsque ses rayons s'étendent
en trigone, attire à elle les étoiles qui le suivent, modère celles
qui le devancent, les arrête, les empêche d'avancer, les fait revenir
et rentrer dans le signe d'un autre trigone.
13.
Peut-être désirera-t-on savoir pourquoi le soleil exerce l'action
coercitive de sa chaleur plutôt dans le cinquième signe que dans le
deuxième et le troisième, qui sont plus rapprochés de lui? Voici, ce
me semble, comment ce phénomène se produit. Les rayons du soleil,
pour former un triangle équilatéral, ne doivent s'étendre dans le
ciel ni plus ni moins que jusqu'au cinquième signe. Si ces rayons
actifs se répandaient en cercles par tout le monde, s'ils n'étaient
pas retenus dans la forme d'un trigone par leur extension au loin, les
corps les plus rapprochés seraient embrasés. C'est ce que semble avoir
remarqué le poète grec Euripide : car il dit que les objets les plus
éloignés du soleil éprouvent une chaleur violente, tandis que les
plus rapprochés n'en éprouvent qu'une modérée. Voici son vers; il se
trouve dans la tragédie de Phaétlion :
Καίει τὰ πόρρω, δ'εὔκρατ' ἔχει.
sa chaleur est brûlante pour les objets éloignés; pour ceux
qui sont rapprochés, elle est tempérée
14.
Si le fait, le raisonnement, le témoignage de cet ancien poète
s'accordent ainsi, je ne pense pas qu'on puisse avoir une autre opinion
que celle que je viens de faire connaître. Jupiter, qui fait son cours
entre Mars et Saturne, décrit un cercle plus grand que Mars, plus
petit que Saturne. Il en est de même des autres étoiles : plus elles
sont éloignées de l'extrémité du ciel, plus la ligne qu'elles
suivent est rapprochée de la terre, plus leur marche semble rapide,
puisque celles de ces planètes qui décrivent un cercle plus étroit,
devancent celles qui sont plus éclairées en passant plusieurs fois
au-dessous.
15.
Supposons une de ces roues dont se servent les potiers. Vous y faites,
dans l'espace compris entre le centre et les extrémités, sept canaux
circulaires : vous y placez autant de fourmis, que vous forcez à
marcher dans le sens opposé à celui dans lequel tourne la roue; il est
certain que, malgré le mouvement contraire de la roue, elles
achèveront leur tour; que celle qui sera la plus rapprochée du centre
le fera le plus promptement, et que la fourmi qui aura à parcourir le
plus grand cercle de la roue, bien qu'elle marche aussi vite que les
autres, mettra beaucoup plus de temps à fournir sa carrière, à cause
de la grandeur du cercle. C'est ainsi que les planètes gravitent contre
le cours général du ciel, et font chacune leur mouvement de rotation
; mais dans la révolution universelle de chaque jour, elles ne
s'avancent pas également vers leur point de départ.
16.
Les étoiles sont les unes tempérées, les autres chaudes, les autres
froides; cela vient sans doute de ce que tout feu pousse sa flamme vers
les parties supérieures. Voilà pourquoi le soleil brûle, embrase la
partie de l'air qui se trouve au-dessus de lui, et que traverse Mars
dans son cours; sa chaleur lui vient donc des feux du soleil. Saturne,
au contraire, qui est voisin des extrémités de l'espace, et qui touche
aux régions glacées du ciel, est extrêmement froid. Et Jupiter qui
dirige son cours entre les lignes suivies par ces deux planètes, se
trouvant à égale distance du froid et du chaud, doit offrir un état
doux et tempéré.
Après avoir expliqué, selon les principes de mes maîtres, la zone
des douze signes, la marche des sept planètes contraires au mouvement
universel du ciel, et avoir dit de quelle manière et en combien de
temps, passant d'un signe dans un autre, elles achèvent leur cours,
je vais parler de ce que j'ai appris des anciens sur le croissant et le
décours de la lune.
II. Du croissant et du décours
de la lune.
Bérose ayant quitté la ville ou le pays des Chaldéens pour aller
en Asie, y professa la science chaldéenne. Il y enseigna que la lune
était un globe dont la moitié est d'une éclatante lumière, tandis
que l'autre a une cou-leur bleue ; que, lorsque faisant sa révolution
dans son orbe, elle se trouve sous le soleil, attirée alors par ses
rayons et par la force de sa chaleur, elle tourne vers lui sa partie
brillante, à cause de la sympathie que ces deux lumières ont entre
elles; que, tandis que sa partie supérieure est ainsi tournée par
attraction vers le disque du soleil, la partie inférieure, qui ne
reçoit point ses rayons, paraît obscure, à cause de sa ressemblance
avec l'air; que, se trouvant perpendiculairement exposée à l'action
des rayons du soleil, elle en réunit tout l'éclat sur sa face
supérieure, et s'appelle alors première lune.
2. Il ajoute que, poursuivant sa marche en se dirigeant vers l'orient,
elle est moins soumise à l'action vive du soleil, et que l'extrémité
de sa partie brillante apparaît à la terre comme un filet de lumière;
qu'alors on l'appelle seconde lune; que s'éloignant ensuite de plus en
plus du soleil par son mouvement journalier de rotation, elle prend
successivement le nom de troisième et de quatrième lune; qu'au
septième jour, lorsque le soleil est vers l'occident, la lune se
trouvant au milieu du ciel, entre l'orient et l'occident, laisse voir
à la terre la moitié de sa partie éclairée, parce qu'elle est alors
éloignée du soleil de la moitié du ciel ; qu'enfin, lorsque entre le
soleil et la lune s'étend tout l'espace du ciel, lorsque le soleil
regardant en arrière du fond de l'occident, aperçoit à l'orient le
globe de la lune, cette planète étant alors dans le plus grand
éloignement où elle puisse être des rayons du soleil, montre, le
quatorzième jour, à la terre, toute sa partie éclairée sous la forme
d'un disque entier; qu'ensuite diminuant chaque jour, et s'avançant par
ses mouvements successifs de rotation, vers l'accomplissement du mois
lunaire, soumise de nouveau à l'action du soleil, et se retrouvant
au-dessous de ses rayons, elle complète alors le nombre de jours qui
constituent son mois.
3. Comme le
mathématicien Aristarque, de Samos, a laissé un système lunaire basé
sur de fortes raisons qu'il a puisées dans la variété de ses
connaissances, je vais aussi l'exposer. Il est évident, dit-il, que la
lune n'a point de lumière qui lui soit propre; qu'elle ressemble à un
miroir; qu'elle reçoit son éclat du soleil. Car des sept planètes la
lune est celle dont l'orbite est la plus rapprochée de la terre, et la
moins longue à parcourir. Aussi, chaque mois, passe-t-elle sous le
soleil ; le premier jour de sa course, elle se trouve cachée sous son
disque radieux, et reste obscurcie, parce qu'il n'y a que la partie qui
regarde le soleil qui soit éclairée; comme elle est en conjonction
avec le soleil, on l'appelle nouvelle. Le jour suivant on l'appelle
seconde lune : elle laisse apercevoir une petite partie de l'extrémité
de son disque. Le troisième jour, comme elle se trouve plus éloignée
du soleil, sa partie éclairée s'est encore agrandie. S'éloignant
ainsi de plus en plus jusqu'au septième jour, elle se trouve alors
distante du soleil couchant d'environ la moitié du ciel, et fait voir
la moitié de sa partie éclairée.
4. Le
quatorzième jour, lorsque la lune est diamétralement opposée au
soleil, elle se montre pleine, et se lève au moment où le soleil se
couche, parce que, séparée de cet astre par tout l'espace du ciel,
elle se trouve en opposition avec lui, et tout son disque en reçoit les
rayons qui le rendent brillant de lumière. Le dix-septième jour, quand
le soleil se lève, elle est abaissée au couchant. Le vingt-unième
jour, au moment du lever du soleil, la lune se trouve à peu près au
milieu du ciel, et la partie qui regarde le soleil est éclairée, le
reste est obscur. Continuant toujours sa course, elle arrive vers le
vingt-huitième jour sous le soleil et achève ainsi son mois. Je vais
maintenant expliquer comment le soleil, traversant chaque mois l'espace
d'un signe, allonge ou raccourcit les jours et les heures.
III.
Comment le soleil, parcourant les douze signes du zodiaque, allonge ou
diminue les jours et les heures.
1. Lorsque
le soleil entre dans le Bélier, et arrive à la huitième partie de ce
signe, il produit l'équinoxe du printemps. Lorsqu'il se dirige vers la
queue du Taureau et les Pléiades, à partir desquelles commence la
moitié antérieure du Taureau, il a ainsi parcouru plus de la moitié
du ciel en s'avançant vers le septentrion. Passant du Taureau dans les
Gémeaux, au lever des Pléiades, il s'élève davantage au-dessus de la
terre, et augmente la longueur des jours; sortant ensuite des Gémeaux
pour entrer dans le Cancer, qui occupe au ciel le moins d'espace, quand
il arrive à la huitième partie de ce signe, il marque le solstice
d'été, et, continuant son cours, il parvient jusqu'à la tête et
jusqu'à la poitrine du Lion, qui sont des parties attribuées au
Cancer.
2. Depuis
la poitrine du Lion et les extrémités du Cancer, le soleil
franchissant les autres parties du Lion, diminue la longueur des jours
en diminuant la grandeur de sa courbe, et décrit une ligne égale à
celle qu'il suivait dans les Gémeaux. Passant ensuite du Lion dans la
Vierge, et s'avançant jusqu'au pan de sa robe qui occupe la première
partie de la Balance, il arrive à la huitième partie de ce signe et
fait l'équinoxe d'automne; les arcs qu'il décrit alors sont égaux à
ceux qu'il faisait dans le signe du Bélier.
3. Après
cela le soleil entre dans le Scorpion, au coucher des Pléiades, et
diminue la longueur des jours en s'approchant des parties méridionales.
Lorsque, quittant le Scorpion, il continue sa marche pour entrer dans le
Sagittaire et s'avancer jusqu'aux cuisses de ce signe, il raccourcit
encore la courbe qu'il décrit pendant le jour. Quand, des cuisses du
Sagittaire, qui font partie du Capricorne, il s'avance jusqu'à la
huitième partie de ce signe, alors il parcourt le plus petit espace du
ciel. C'est cette brièveté des jours qui les a fait appeler solstice
d'hiver, et jours du solstice d'hiver. Du Capricorne passant dans le
Verseau, il rallonge les jours, et les rend égaux à ceux du
Sagittaire. Sortant du Verseau pour entrer dans les Poissons, quand
souffle le favonius, il fournit une course égale à celle qu'il faisait
dans le Scorpion. C'est ainsi que le soleil, en parcourant les signes
dans des temps déterminés, augmente ou diminue la durée des jours et
des heures. Il me reste à parler des autres constellations qui se
trouvent à droite et à gauche du zodiaque, et qui sont placées et
représentées dans les régions méridionales et septentrionales du
ciel.
IV.
Des constellations qui sont placées à la droite de l'orient, entre le
zodiaque et le septentrion.
1. Après
la constellation septentrionale que les Grecs appellent ῎Αρκτος
(l’Ourse) ou ῾Ελίκη
(l’Hélice), est placé le Bouvier. Non loin de lui a été figurée
la Vierge. Sur son épaule droite s'appuie une étoile très brillante
que les Latins appellent Provindemia (la Vendangeuse) et les Grecs Προτρυγητής
(la Vendangeuse). Vis-à-vis brille, entre les genoux du gardien de
l'Ourse, une autre étoile qui est appelée Arcture.
2. Près de
là, dans la direction de la tête de l'Ourse, vers les pieds des
Gémeaux, se trouve le Cocher, dont les pieds s'étendent à
l'extrémité de la corne gauche du Taureau, et qui tient dans la main
gauche des étoiles qu'on appelle les Chevreaux ; la Chèvre brille à
son épaule gauche. Au-dessus du Taureau et du Bélier se montre
Persée, qui, à droite, passe sur les Pléiades, et, à gauche, sur la
tête du Bélier, s'appuyant de la main droite sur Cassiopée, au-dessus
du Cocher, tenant de la main gauche la tête de Méduse, et la mettant
sous les pieds d'Andromède.
3. On voit
les Poissons à côté d'Andromède, le long de son ventre et de celui
de Pégase; ils s'étendent jusqu'au dos de ce cheval, au ventre duquel
se trouve une étoile très-brillante qui le termine et forme la tête
d'Andromède. La main droite d'Andromède s'étend au-dessus de
Cassiopée, et sa gauche au-dessus du Poisson septentrional. Le Verseau
est sur la tête de Pégase, dont les oreilles se dirigent vers les
genoux du Verseau. Au milieu de la constellation du Verseau est une
étoile qui fait partie de celle du Capricorne. Au-dessus, en montant,
se rencontrent l'Aigle et le Dauphin, près desquels est la Flèche.
Dans le voisinage de celle-ci est le Cygne, dont l'aile droite touche la
main de Céphée et son sceptre, tandis que la gauche s'étend au-dessus
de Cassiopée. Sous la queue de l'Aigle sont placés les pieds de
Pégase.
4.
Au-dessus du Sagittaire, du Scorpion, de la Balance, s'allonge le
Serpent, qui de l'extrémité de sa tête touche la Couronne; le
Serpentaire tient par le milieu le Serpent dans ses mains, et appuie le
pied gauche sur le milieu du front du Scorpion. A droite et auprès de
la tête du Serpentaire se trouve la tête de celui qu'on appelle
l'Agenouillé ; les sommets de leurs têtes sont très-faciles à
reconnaître, parce qu'ils sont formés d'étoiles assez brillantes.
5. Le
pied de l'Agenouillé s'appuie sur la tête du Dragon, qui est entre les
Ourses qu'on appelle Septentriones. Un peu en avant de la tête du
Cheval se courbe le Dauphin. Devant le bec du Cygne brille la Lyre.
Entre les épaules du Bouvier et celles de l'Agenouillé a été placée
la Couronne. Dans le cercle septentrional sont groupées les deux Ourses
: elles sont dos à dos, ayant la poitrine tournée dans un sens
contraire; la petite s'appelle en grec Κυνόσσουρα
(Cynosure), la grande῾Ελίκη
(Hélice) ; leurs têtes sont disposées de manière à regarder deux
points opposés, la queue de l'une étant placée au droit de la tête
de l'autre; et leurs queues sont toutes deux levées.
6. Entre
elles s'allonge, dit-on, le Dragon ; et cette étoile, qu'on appelle
polaire, brille à l'opposé, et au droit de la tête de la grande Ourse
: car la partie du Dragon qui en est voisine se courbe auprès de sa
tête, tandis qu'une autre partie s'arrondit autour de celle de la
petite Ourse, et s'étend jusqu'auprès de ses pieds, où, s'enroulant
et se repliant, elle se redresse et s'élance de la tête de la petite
Ourse vers le grand Oiseau (le Cygne), dans la direction de son bec et
de la tempe droite de sa tête. Au-dessus de la queue de la petite Ourse
s'abaissent aussi les pieds de Céphée; et là, tout en haut, au-dessus
du Bélier, on voit les étoiles qui composent un Triangle qui a deux
côtés égaux. Il y a confusion dans un assez grand nombre d'étoiles
de la petite Ourse et de Céphée. Après avoir parlé des
constellations qui sont placées à la droite de l'orient, entre le
zodiaque et le septentrion, il me reste à expliquer celles que la
nature a distribuées vers la partie gauche de l'orient, dans les
régions méridionales.
V.
Des constellations qui sont placées à la gauche de l'orient, entre le
zodiaque et le midi.
1.
Premièrement sous le Capricorne est placé le Poisson austral, la tête
tournée vers la queue de la Baleine ; entre le Poisson et le
Sagittaire, il y a un vide. L'Autel est au-dessous de l'aiguillon du
Scorpion. Tout près de la Balance et du Scorpion se trouve la partie
antérieure du Centaure, qui tient dans ses mains la constellation que
les astronomes appellent la Bête. Sous la Vierge, le Lion et le Cancer,
l'Hydre s'enroule, se déployant sur une bande d'étoiles, dressant la
tête dans la région du Cancer, soutenant la Coupe sur le milieu de son
corps, dans la direction du Lion, et étendant sous la main de la Vierge
sa queue, sur laquelle est posé le Corbeau. Les étoiles qui sont
au-dessus de ses épaules brillent tout à fait du même éclat.
2.
Auprès de la partie inférieure du ventre de l'Hydre, sous sa queue,
est placé le Centaure. En regard de la Coupe et du Lion se trouve le
Navire, qu'on appelle Argo, dont on ne voit pas la proue; mais le mât
et les parties qui entourent le gouvernail brillent sur notre horizon.
La poupe du Navire touche au bout de la queue du grand Chien. Les
Gémeaux sont suivis par le petit Chien, qui est auprès de la tête de
l'Hydre, et le grand Chien suit le petit. Orion est en face du Taureau,
qui le presse d'un pied ; de la main gauche il tient un bouclier, et de
l'autre une massue qu'il élève vers les Gémeaux.
3.
Il a sous les pieds le Lièvre, qui suit de près le grand Chien. Sous
le Bélier et les Poissons est la Baleine. A partir de sa crête, des
étoiles disposées avec ordre forment entre les Poissons un étroit
ruban que les Grecs appellent ἁρπεδόναι
(Cordeau). A un grand intervalle se replie en dedans le nœud des
Poissons qui tombe de l'extrémité de la tête de la Baleine. L'Éridan
semble une rivière d'étoiles qui prend sa source au pied gauche
d'Orion. Quant à l'eau que l'on dit être répandue par le Verseau,
elle coule entre la tête du Poisson austral et la queue de la Baleine.
4.
Je viens d'exposer le système du philosophe Démocrite sur les formes
que la nature et l'esprit divin ont données aux constellations ; mais
je n'ai parlé que de celles dont nous pouvons voir le lever et le
coucher. Car de même que les sept étoiles de la grande Ourse, en
tournant autour du pôle, ne se couchent point et ne passent jamais sous
la terre, de même les constellations, dont le cours se fait autour du
pôle méridional, qui, à cause de l'inclinaison du ciel, est
au-dessous de notre globe, nous restent cachées, sans jamais se lever
sur la terre. Aussi la terre empêche-t-elle qu'on en connaisse les
figures. Nous en avons une preuve dans l'étoile de Canope, invisible
dans nos régions, qui ne nous est connue que par ce qu'en disent les
marchands qui ont voyagé dans les contrées les plus éloignées de l'Égypte,
et jusqu'aux extrémités de la terre.
VI.
De l'astronomie employée pour prédire les changements de temps, et ce
qui doit arriver aux hommes, d'après l'aspect des astres au moment de
leur naissance.
1.J’ai
démontré avec exactitude quel était le mouvement rapide du ciel
autour de la terre, et la disposition des douze signes du zodiaque, et
des constellations qui sont au septentrion et au midi, parce que c'est
de ce mouvement de rotation du ciel, c'est de la marche du soleil en
sens contraire à travers les signes, c'est de l'ombre équinoxiale des
gnomons, que dépend la construction des analèmes.
2.
Quant à l'astronomie consistant à rechercher quelle est l'influence
des douze signes, des cinq planètes, du soleil et de la lune sur les
phases de la vie humaine, c'est aux calculs des Chaldéens qu'il faut
s'en rapporter, parce qu'ils se sont particulièrement occupés de la
généthliologie, afin de pouvoir, par le moyen des astres, expliquer le
passé et l'avenir. Les découvertes qu'ils nous ont transmises dans
leurs écrits font voir quels étaient le savoir et le talent des grands
hommes qui sont sortis de la nation des Chaldéens. Le premier fut
Bérose, qui vint s'établir dans l'île et la cité de Cos et y ouvrir
une école. Puis cette science fut l'objet des études d'Antipater et
aussi d'Achinapolus, qui ont démontré que la généthliologie était
plutôt fondée sur la conception que sur la naissance.
3.
Mais si l'on veut connaître le principe des choses, il faut lire les
savants ouvrages des Thalès de Milet, des Anaxagore de Clazomène, des
Pythagore de Samos, des Xénophane de Colophon, des Démocrite
d'Abdère, qui nous font connaître les lois qui gouvernent la nature,
et les effets qu'elles produisent. Sans s'écarter de leur système,
Eudoxe, Euchémon, Callippe, Méton, Philippe, Hipparque, Aratus et tous
les autres philosophes ont fait, à l'aide des parapegmes, les
observations les plus exactes sur le lever et le coucher des étoiles,
ainsi que sur les saisons de l'année; observations qu'ils ont
transmises à la postérité. Leurs connaissances sont bien dignes de
l'admiration des hommes, puisque, à force d'études, ils sont
parvenus, comme par inspiration divine, à prédire les changements du
temps. Rapportons-nous-en donc à leurs lumières sur des choses qu'ils
ont étudiées avec le plus grand soin.
VII.
Manière de faire un analème.
1.
Pour moi, je vais me contenter de donner la manière de décrire les
cadrans, et d'expliquer la longueur des jours dans chaque mois, et
l'inégalité de l'ombre projetée par le gnomon. Si, lorsque le soleil
est à l'équinoxe, faisant son cours dans le Bélier ou dans la
Balance, le gnomon est divisé en neuf parties, l'ombre en aura huit
sous le parallèle de Rome. Si à Athènes le gnomon est divisé en
quatre parties, l'ombre en aura trois ; s'il est divisé en sept à
Rhodes, elle en aura cinq ; s'il l'est en onze à Tarente, elle en aura
neuf; en cinq à Alexandrie, trois. Dans tous les autres lieux, les
ombres équinoxiales des gnomons présentent des longueurs naturellement
différentes.
2.
Aussi, dans quelque lieu qu'on veuille faire un cadran, faudra-t-il
qu'on prenne la longueur de l'ombre équinoxiale de ce lieu; et si,
comme à Rome, le gnomon ayant neuf parties, l'ombre en a huit, on
tirera sur un plan une ligne au milieu de laquelle on en élèvera une
autre à angle droit, afin qu'elle soit d'équerre avec la première.
Cette ligne est appelée gnomon. A partir de cette première ligne
tirée sur le plan, on mesurera avec un compas, sur celle du gnomon,
neuf parties égales, et au point où aboutira la neuvième partie, on
établira un centre qui sera marqué A ; puis ouvrant le compas appuyé
sur ce centre jusqu'à la ligne du plan où l'on mettra la lettre B, on
décrira un cercle appelé méridien.
3.
Ensuite, sur les neuf parties qui s'étendent depuis la ligne du plan
jusqu'au centre qui forme l'extrémité du gnomon, on prendra la
longueur de huit, qu'on marquera sur la ligne du plan au point de la
lettre C. Ce sera l'ombre équinoxiale du gnomon. De ce point C, par le
centre où est la lettre A, tirez une ligne qui indiquera le rayon du
soleil à l'équinoxe. Cela fait, on ouvrira le compas depuis le centre
jusqu'à la ligne du plan, et aux extrémités de la ligue de
circonférence, on fera deux marques à égale distance, l'une en F du
coté gauche, l'autre en I du côté droit; puis on tirera par le centre
une ligne qui coupera le cercle en deux parties égales : cette ligne
est appelée horizon par les mathématiciens.
4.
Ensuite on prendra la quinzième partie de tout le cercle, et plaçant
la branche centrale du compas sur la ligne circulaire, au point où elle
est coupée par le rayon équinoxial, où sera la lettre F, on fera à
droite et à gauche deux points marqués par les lettres G et H. Puis de
ces points on conduira, en les faisant passer par le centre, deux lignes
jusque sur celle du plan où seront les lettres T et R ; l'une
représentera le rayon du soleil d'hiver, l'autre celui du soleil
d'été. Du côté opposé à la lettre E sera la lettre I, au point
où le cercle est coupé par la ligne qui passe par le centre; en face
de G et de H seront les lettres K et L, et en face de C, de F et de A
sera la lettre N.
5.
On tirera alors deux lignes diamétrales, l'une depuis G jusqu'à L, et
l’'autre depuis H jusqu'à K; celle d'en bas sera pour l'été et
celle d'en haut pour l'hiver. Ces deux lignes diamétrales doivent être
également divisées par le milieu aux points M et 0; on en fera deux
centres par lesquels, aussi bien que par le centre A, on fera passer
une ligne qui ira d'une extrémité de la circonférence à l'autre,
où seront les lettres P et Q. Cette ligne sera perpendiculaire à la
ligne équinoxiale, et s'appellera, mathématiquement parlant, axe. De
ces deux centres M et O, où l'on appuiera une des branches du compas,
en étendant l'autre jusqu'à l'extrémité des lignes diamétrales, on
décrira deux demi-cercles, dont l'un sera pour l'été et l'autre pour
l'hiver.
6.
Aux points où les lignes parallèles coupent la ligne appelée horizon,
on mettra à droite la lettre S, à gauche !a lettre V, et depuis
l'extrémité du demi-cercle, où se trouve la lettre G, on tirera une
ligne parallèle à l'axe jusqu'à l'autre demi-cercle qui est à
gauche, oit est la lettre H. Cette ligne parallèle s'appelle lacotome.
Enfin on placera une branche du compas au point de section de cette
ligne avec la ligne équinoxiale, marqué X, et l'on étendra l'autre
jusqu'à l'endroit où le cercle est coupé par le rayon d'été, au
point marqué H. Puis du centre qui est sur la ligne équinoxiale, on
mènera, par l'intervalle du rayon d'été, un cercle pour les mois,
appelé manacus. Cette dernière opération complétera la figure de
l'analème.
7.
Après cette description et cette explication, qu'on prenne pour plan
ou le tropique d'hiver, ou le tropique d'été, ou l'équateur, ou
l'écliptique, on devra se servir de l'analème pour tracer les lignes
horaires. On peut faire plusieurs espèces de cadrans solaires; tous se
décrivent d'après cette méthode; la seule chose à observer dans
leurs figures et descriptions, c'est que les jours de l'équinoxe, et
ceux des tropiques d'hiver et d'été, soient divisés en douze parties
égales. Si je n'entre pas dans plus de détails, ce n'est point devant
le travail que je recule, mais devant la crainte de devenir fastidieux
en devenant trop long. Il me reste maintenant à dire quels sont ceux
qui ont inventé et décrit les différentes espèces de cadrans. Je ne
puis en inventer de nouvelles, et je ne veux point proclamer comme
miennes les inventions d'autrui. Je vais donc parler des inventeurs de
celles que nous connaissons.
VIII.
De l'invention des horloges d'été ou cadrans solaires; des clepsydres
et des horloges d'hiver ou anaphoriques.
1.
L'hémicycle creusé dans un carré et construit sur un plan réclinant,
est, dit-on, de l'invention de Bérose le Chaldéen. Le scaphé ou
hémisphère est d'Aristarque de Samos, aussi bien que le disque
horizontal. L'araignée appartient à l'astronome Eudoxe; quelques-uns
disent à Apollonius. Le plinthe ou brique, celui-là même qui a été
placé dans le cirque de Flaminius, a été inventé par Scopinas de
Syracuse; le πρὸς τὰ ἱστορούμανα
(Pour les endroits dont on parle dans l'histoire) par Partnénion ; le πρὸς πᾶν κλῖμα
(Pour tous les climats.) par Theodosius et Andreas. Patrocle a inventé
le pelecinon; Dionysiodore, le cône; Apollonius, le carquois. Les
auteurs cités plus haut, et quelques autres, nous ont encore laissé un
certain nombre d'horloges de leur invention, comme le gonarque,
l'engonate, l'antiborée. Nous trouvons aussi dans quelques auteurs la
manière de rendre quelques-uns de ces cadrans portatifs, pour les
voyages On en pourra consulter, si l'on veut, des modèles dans leurs
ouvrages, pourvu qu'on sache la description de l'analème.
2. Ces
mêmes auteurs sont aussi parvenus à trouver le moyen de faire des
horloges avec l'eau, et la première fut inventée par Ctesibius
d'Alexandrie, qui, de plus, a découvert le parti qu'on pouvait tirer de
la force des vents, soit naturels, soit artificiels. La manière dont
cette découverte fut faite est digne de l'attention de ceux qui
cultivent les sciences. Ctesibius était fils d'un barbier d'Alexandrie.
Il se faisait remarquer par son esprit inventif et une grande adresse,
et la mécanique avait, dit-on, pour lui beaucoup d'attrait. Il eut un
jour envie de suspendre un miroir dans la boutique de son père, de
manière à ce qu'on pût le faire descendre et monter à l'aide d'une
corde cachée soutenant un poids. Voici le mécanisme qu'il imagina.
3. Il
attache un canal de bois sous une poutre et y met des poulies. Il fait
ensuite passer une corde dans ce canal jusqu'à l'angle formé par le
mur qui portait la poutre, et là il établit un tuyau clans lequel il
fait descendre au bout de la corde une boule de plomb. Cette boule, en
allant et en venant dans ce tuyau étroit, y comprimait l'air, et, par
l'impulsion de son mouvement, faisait sortir avec force, par les deux
bouts, l'air condensé par la compression dont la rencontre et le choc
avec l'air extérieur rendait un son clair.
4.
Ctesibius s'étant donc aperçu du bruit que produisait le choc de l'air
comprimé contre l'air libre, partit de ce principe pour inventer les
machines hydrauliques. Ce fut aussi par l'impulsion de l'eau qu'il fit
mouvoir des automates et plusieurs autres machines récréatives, entre
autres la clepsydre. Et d'abord il perça une lame d'or, ou une pierre
précieuse, pour l'écoulement de l'eau ; ces matières, en effet, ne
s'usent pas par le frottement de l'eau, et ne produisent point de
rouille qui puisse en, boucher l'ouverture.
5. L'eau,
coulant d'une manière égale par cette ouverture, soulève une nacelle
renversée que les ouvriers appellent phellos ou tympanum. On ajuste
dessus une règle dentelée qui fait tourner une roue dentelée de la
même manière. Ces dents se poussant l'une l'autre impriment à la roue
un léger mouvement de rotation. On fait encore d'autres règles et
d'autres tambours, dentelés de la même manière, qui, soumis à un
seul et même mouvement, produisent en tournant différents effets de
petites figures s'agitent, des pyramides tournent; on voit lancer de
petits cailloux, qui en retombant forment des sons; des trompettes
sonnent. Il y a encore d'autres combinaisons étrangères à notre
matière.
6. On trace
encore sur des colonnes ou sur des pilastres les heures, qu'une petite
figure vient, pendant tout le jour, montrer avec le bout d'une baguette.
Pour les rendre plus courtes ou plus longues, on ajoute ou on ôte des
coins tous les jours et tous les mois dans une proportion voulue. Voici
comment on organise l'orifice pour modérer l'écoulement de l'eau. On
fait deux cônes, l'un solide, l'autre creux, assez bien façonnés
sur le tour, pour qu'ils puissent entrer juste l'un dans l'autre, et
pour que, par le moyen d'une même règle, lâchant ces coins ou les
serrant, on puisse donner à l'écoulement de l'eau dans le vase plus ou
moins de rapidité. C'est par ces moyens mécaniques qu'on arrive à
composer des horloges pour l'hiver.
7. S'il se
fait que par le jeu de ces coins on n'arrive point exactement à
raccourcir et à rallonger les jours, à cause des dérangements qui
surviennent très souvent aux coins, on pourra employer cette autre
manière. Sur une petite colonne on marquera les heures au moyen de
l'analème, par des lignes transversales, et l'on en tracera un
système spécial pour chaque mois; cette petite colonne sera mobile,
afin que, en tournant sur elle-même- uniformément, sans s'arrêter
devant la petite figure qui, par son mouvement d'ascension, indique les
heures avec sa baguette, elle lui présente les heures plus ou moins
longues qui conviennent à chaque mois.
8. On
fabrique encore une autre espèce d'horloges d'hiver qu'on appelle
anaphoriques. Voici la manière de les construire. On dispose les heures
sur des baguettes d'airain, selon la description de l'analème, dans la
direction du centre à la circonférence. On trace tout autour des
cercles déterminant l'espace consacré à chaque mois. Derrière ces
baguettes on place une roue sur laquelle est décrit et peint le ciel
avec le zodiaque et ses douze signes, dont l'espace plus ou moins grand
est déterminé par des lignes qui partent du centre. A la partie
postérieure de cette roue et au milieu, on emboîte un essieu mobile
autour duquel s'enroule une chaîne flexible de cuivre, à laquelle
pend, d'un côté, le phellos ou tympanum, que l'eau soutient, et, de
l'autre, un sac de sable du même poids que le phellos.
9. A mesure
que le phellos monte soutenu par l'eau, le poids du sable en descendant
fait tourner l'essieu, et l'essieu, la roue. Le mouvement imprimé à
cette roue fait que c'est tantôt la plus grande partie du zodiaque et
tantôt la plus petite qui marque, en tournant, les heures avec les
différences propres à chaque temps. Car dans le signe de chaque mois,
on fait autant de trous qu'il y a de jours, et dans l'un de ces trous on
met un clou dont la tête représente le soleil et marque les heures. Ce
clou placé successivement d'un trou dans un autre achèvera son tour
tous les mois.
10. De
même que le soleil en parcourant les espaces des signes agrandit ou
diminue les jours et les heures, de même dans les horloges, le clou
avançant de trou en trou dans un sens opposé au mouvement de la roue,
et changeant de place tous les jours, franchissant tantôt des espaces
plus larges, tantôt des espaces plus étroits, représente les heures
et les jours avec la longueur qu'ils doivent avoir chaque mois. Si par
le moyen de l'eau on veut arriver au même résultat, voici comment on
en réglera l'usage.
11.
Derrière le cadran, à l'intérieur de l'horloge, on placera un
réservoir dans lequel l'eau tombera par un robinet. Au bas de ce
réservoir se trouvera un conduit, dont le bout sera fixé à un tambour
de cuivre également percé pour recevoir l'eau qui y communique du
réservoir. Dans ce tambour en est renfermé un plus petit, comme un
pivot dans une crapaudine. Ces deux pièces, appelées l'une mâle,
l'autre femelle, sont si bien ajustées, que la plus petite, semblable
à la clef d'un robinet, tourne dans la plus grande avec un mouvement
doux et régulier.
12. Le
rebord du grand tambour sera marqué de 365 points également espacés,
et à l'extrémité de la circonférence du petit tambour il faut fixer
une languette dont la pointe servira à diriger vers chacun des points
du grand tambour. Le petit tambour aura une rainure disposée de
manière à ne laisser passer que la quantité d'eau nécessaire, parce
que c'est cette eau qui coule dans le réceptacle où est le tympanum,
qui en règle la hauteur. Quand on aura représenté les signes
célestes au rebord du grand tambour, il devra être immobile, ayant en
haut le signe de l'Écrevisse; en bas, au point diamétralement opposé,
le Capricorne; à droite du spectateur, la Balance; à gauche, le
Bélier. Les autres signes occuperont aussi la place qu'ils ont dans le
ciel.
13. Lors
donc que le soleil est dans le Capricorne, la languette du petit
tambour, qui chaque jour doit avancer d'un point, se place au droit de
ce signe marqué sur le grand tambour. L'ouverture de ce grand tambour
se trouve perpendiculairement au-dessus de la partie la plus large de la
rainure du petit, et donne un libre passage à l'eau, qui coule avec
toute la rapidité qu'elle peut avoir dans le réceptacle, qui se
remplit en peu de temps, et diminue, abrège la longueur des jours et
des heures. Quand, après avoir parcouru de point en point la région du
Capricorne, la languette du petit tambour est arrivée au Verseau, la
partie la plus large de la rainure, en s'inclinant, s'éloigne de la
perpendiculaire, et laisse nécessairement au cours de l'eau un passage
plus étroit; le réceptacle se remplit moins vite, ce qui rend les
jours plus longs.
14. Après
avoir successivement franchi, comme des degrés, tous les points du
Verseau et des Poissons, la languette du petit tambour se présente à
la huitième partie du Bélier. La rainure offre alors au passage de
l'eau une ouverture qui tient le milieu entre sa plus grande largeur et
sa plus petite ; ce qui donne les heures équinoxiales. Puis, quittant
le Bélier pour traverser les régions du Taureau et des Gémeaux, la
languette du petit tambour monte, par suite de son mouvement de
rotation, jusqu'à la huitième partie de l'Écrevisse; là elle a
atteint les points les plus élevés. L'eau ne peut plus passer que par
la partie la plus resserrée de la rainure ; elle coule très lentement
; les heures sont arrivées à leur plus grande longueur dans le signe
de l'Écrevisse, au solstice d'été. Descendant de l'Écrevisse pour
traverser les signes du Lion et de la Vierge, la languette arrive à la
huitième partie de la Balance; la rainure devient insensiblement plus
étroite; les heures raccourcissent. Parvenue au droit de la Balance,
elle redonne aux heures la longueur qu'elles doivent avoir à
l'équinoxe.
15.
Descendant de plus en plus à travers les espaces du Scorpion et du
Sagittaire, la languette du petit tambour est ramenée par son mouvement
circulaire à la huitième partie du Capricorne, et l'eau, sortant avec
abondance, reproduit les heures si courtes du solstice d'hiver.Je suis
entré avec toute l'exactitude dont je suis capable dans tous les
détails de la confection des horloges, afin d'en faciliter l'usage; il
me reste à parler des machines et de leurs principes : aussi, pour
donner un corps complet d'architecture, vais-je consacrer le livre
suivant à cette matière. |