Le temps des généraux : Pompée

Spartacus

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73 - 71

Résumé de la révolte

EUTROPE : Eutrope est un historien mineur. Il participa à l'expédition de l'Empereur Julien dit l'Apostat contre les Perses en 363. Nous avons gardé de lui un Abrégé d'histoire romaine qui traite des évènements de 735 A.C.N. à 378 P.C.N.(empereur Valens).

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Après la mort de Sylla, le gouvernement des sénateurs s'essouffle et le parti populaire essaie de se reconstituer. En 73, des gladiateurs se révoltent.
Anno urbis Romae DCLXXVIII in Italia novum bellum subito commotum est. Septuaginta enim quattuor gladiatores, ducibus Spartaco, Crixo et OEnomao, effracto Capuae ludo, effugerunt, et, per Italiam vagantes, paene non levius bellum in ea, quam Hannibal, moverunt. Nam multis ducibus, et duobus simul Romanorum consulibus victis, sexaginta fere milium armatorum exercitum congregaverunt, victisque sunt in Apulia a M. Licinio Crasso proconsule; et, post multas calamitates Italiae, tertio anno, bello huic finis impositus.

EUTROPE, VI, VI.

  vocabulaire

En l'année six cent septante-huit de la fondation de Rome, une nouvelle guerre éclata soudain en Italie. En effet septante-quatre gladiateurs, sous la conduite de Spartacus, de Crixus et d'OEnomaüs brisèrent les portes de leur école à Capoue et prirent la fuite. Ils errèrent à travers l'Italie et entamèrent une guerre presque aussi grave que celle d'Hannibal. Ils remportèrent la victoire sur plusieurs généraux et sur deux consuls romains en même temps. Ils rassemblèrent presque soixante mille hommes mais furent vaincus en Apulie par le proconsul Crassus. Cette guerre fut la cause de nombreux malheurs pour l'Italie. Elle se termina au bout de trois ans.

EUTROPE, VI, VI.

 

L'histoire racontée par Appien

A cette même époque, parmi les gladiateurs destinés aux spectacles de ce nom, que les Romains entretenaient à Capoue, il y avait un Thrace du nom de Spartacus, qui avait auparavant servi dans quelque légion, et qui, fait prisonnier de guerre et vendu, se trouvait depuis lors au nombre des gladiateurs. Il persuada soixante-dix de ses camarades de braver la mort pour recouvrer la liberté, plutôt que de se voir réduits à servir de spectacle dans les arènes des Romains ; et forçant ensemble la garde chargée de veiller sur eux, ils s'échappèrent. Spartacus s'arma, lui et sa bande avec les armes de tout genre dont ils dépouillèrent quelques voyageurs, et ils se retirèrent sur le Vésuve. Là, plusieurs esclaves fugitifs et quelques hommes libres des campagnes vinrent se joindre à lui. Il répandit ses brigandages dans les environs, ayant comme lieutenants OEnomaüs et Crixus, deux gladiateurs. La justice rigoureuse qu'il mit dans la distribution et dans le partage du butin lui attira rapidement beaucoup de monde. Rome fit marcher d'abord contre lui Varinius Glaber, et ensuite Publius Valérius, non pas avec une armée romaine, mais avec un corps de troupes ramassées à la hâte, et comme en courant ; car les Romains ne pensaient pas que cela devait être une guerre en bonne et due forme. Ils croyaient que contre ces brigands il suffisait d'entrer en campagne. Varinius Glaber et Publius Valérius furent successivement vaincus. Spartacus tua de sa propre main le cheval de Glaber ; peu s'en fallut que le général des Romains ne fût lui-même fait prisonnier par ce gladiateur. Après ce succès, le nombre des adhérents de Spartacus s'accrut encore davantage, et déjà il était à la tête d'une armée de soixante et dix mille hommes. Alors il se mit à fabriquer des armes, et à faire des dispositions militaires dans toutes les règles.
Rome, de son côté, fit marcher les consuls avec deux légions. L'un d'eux livra bataille à Crixus qui commandait trente mille hommes dans le voisinage du mont Garganus. Ce chef des gladiateurs périt dans cette action avec les deux tiers de son armée. Cependant Spartacus filait le long des Apennins, vers les Alpes et la Gaule, lorsqu'un des consuls arriva pour lui barrer le chemin, ,tandis que l'autre le pressait dur ses arrières. Spartacus les attaque tour à tour, les vainquit l'un après l'autre, et ils furent obligés tous les deux de battre en retraite dans le désordre. Spartacus immola aux mânes de Crixus trois cents prisonniers romains ; et son armée s'étant élevée à cent vingt mille hommes d'infanterie, il prit à toute vitesse le chemin de Rome, après avoir mis le feu à tout les bagages qui ne lui étaient pas nécessaires, après avoir fait passer au fil de l'épée tous ses prisonniers, et assommer toutes ses bêtes de charge, afin d'aller plus rapidement. Beaucoup d'autres se déclarèrent en sa faveur, et vinrent grossir son armée ; mais il ne voulut plus admettre personne. Les consuls retournèrent à la charge contre lui dans le pays de Picènes. Une grande bataille y fut donnée ; mais les consuls furent vaincus encore une fois. Malgré ce succès, Spartacus renonça à son premier projet de marcher sur Rome, parce qu'il sentit qu'il n'était pas encore assez habile dans le métier de la guerre et que toutes ses troupes n'étaient pas convenablement armées, car nulle cité ne le secondait. Toutes ses forces consistaient en esclaves fugitifs ou aventuriers. Il s'empara des montagnes qui avoisinent Thurium ; il prit la ville elle-même. Il défendit aux marchands d'y rien apporter à vendre en matière d'or ou d'argent, et aux siens de rien acheter en ce genre. Ils n'achetaient en effet que du fer ou du bronze, qu'ils payaient cher, et ils faisaient bon accueil à ceux qui leur en apportaient. De sorte qu'ils se munirent de tout ce qui leur était nécessaire ; et bien armés, ils faisaient de côté et d'autre des incursions chez les peuples du voisinage. Ils en vinrent encore une fois aux mains avec les légions romaines, qu'ils vainquirent, et aux dépens desquelles ils firent un riche butin.
Il y avait déjà trois ans que durait cette guerre, dont on s'était moqué d'abord, dont on n'avait parlé qu'avec mépris, comme d'une guerre de gladiateurs. Lorsqu'il fut question d'en donner le commandement à d'autres chefs, tout le monde se tint à l'écart ; nul ne se mit sur les rangs, jusqu'à ce que Licinius Crassus, citoyen également distingué par sa naissance et par sa fortune, s'offrit pour cette expédition. Il marcha contre Spartacus, à la tête de six nouvelles légions. A son arrivée au camp de ses prédécesseurs, les deux légions qui avaient combattu, la campagne précédente, sous les deux consuls, passèrent sous ses ordres. Pour les punir de s'être si souvent laissé vaincre, il les fit décimer. D'autres disent, qu'ayant donné une première bataille avec toutes ses forces et ayant été battu, il fit décimer son armée entière, et fit égorger quatre mille de ses soldats, sans aucun égard au nombre. Quoi qu'il en soit, cet acte de vigueur rendit sa sévérité plus redoutable que le fer de l'ennemi. En conséquence, ayant incontinement attaqué une division de dix mille hommes de l'armée de Spartacus, il en tua les deux tiers, et se dirigea, plein de courage, sur Spartacus lui-même. Il le vainquit avec éclat, et le poursuivit, avec beaucoup d'activité, du côté de la mer, vers laquelle il prit la fuite, dans la vue de s'embarquer pour la Sicile. Il l'atteignit, et le cerna de retranchements, de lignes de circonvallation et de palissades.
Pendant que Spartacus s'efforçait de faire une percée pour gagner le pays des Samnites, Crassus lui tua six mille hommes environ dans la matinée et le même nombre le soir, sans avoir plus de trois Romains tués et sept blessés ; tant l'exemple de ceux qui avaient été décimés inspira la fureur de vaincre ! Cependant Spartacus, qui attendait de la cavalerie de quelque part, s'abstenait d'en venir à une action générale. Mais il harcelait, par diverses escarmouches, l'armée qui le cernait. Il lui tombait continuellement dessus à l'improviste, jetant dans les fossés des torches enflammées qui brûlaient les palissades ; ce qui donnait beaucoup d'embarras aux Romains. Il fit pendre un prisonnier romain dans l'espace de terrain qui le séparait des troupes de Crassus, afin d'apprendre aux siens à quel genre de représailles ils devaient s'attendre, s'ils se laissaient battre. Sur ces entrefaites on apprit à Rome que Spartacus était cerné. Mais comme on n'aimait pas l'incertitude où l'on était, si cette guerre de gladiateurs se prolongerait encore, on adjoignit à cette expédition Pompée, qui venait d'arriver d'Ibérie, persuadé qu'on était enfin que Spartacus n'était pas si facile à réduire. Tandis que l’on conférait ce commandement, Crassus qui ne voulait pas laisser à Pompée cette palme à cueillir, resserra Spartacus de plus en plus, et se disposait à l’attaquer, lorsque Spartacus, jugeant qu’il fallait prendre Pompée de vitesse, proposa à Crassus de négocier. Mais Crassus ayant méprisé cette proposition, Spartacus décida de courir sa chance et, aidé du renfort de cavalerie qu’il attendait, força avec toute son armée, les retranchements de Crassus, et se sauva du côté de Brindes, où Crassus le poursuivit. Mais lorsque Spartacus fut instruit que Lucullus, qui retournait de la guerre contre Mithridate, qu’il avait vaincu, était dans Brindes, dénué de toute espérance, il en vint aux mains avec Crassus, fort de la nombreuse armée qu’il avait encore. Le combat fut long et acharné tant qu’il y avait au cambat de milliers d’hommes désespérés. Mais Spartacus fut enfin blessé à la cuisse d’un coup de flèche. Il tomba sur son genou, et, se couvrant de son bouclier, il lutta contre ceux qui le chargèrent jusqu’à ce que lui, et un grand nombre d’hommes autour de lui, encerclés, succombassent. Le reste de son armée, en désordre, fut mis en pièces en masse. Le nombre des morts, du côté des gladiateurs, fut incalculable. Il périt environ mille Romains. Il fut impossible de retrouver le corps de Spartacus. Les nombreux fuyards qui se sauvèrent de la bataille allèrent chercher un asile dans les montagnes : Crassus les y poursuivit. Ils se distribuèrent en quatre bandes, qui se battirent jusqu’au moment où ils furent totalement exterminés ; à l’exception de six mille, qui faits prisonniers, furent crucifiés tout le long de la route de Capoue à Rome.

Appien, Gerres civiles, I, XIV, traduction de Jean-Isaac COMBES-DOUNOUS

a, prép. : + Abl. : à partir de, après un verbe passif = par
annus, i
, m. : l'année
annus, i,
m. : l'année
Apulia, ae,
f. : l'Apulie
armatus, a, um
: en armes, armé
bellum, i,
n. : la guerre
calamitas, atis
, f. : 1 - la perte des récoltes à cause de la grêle, la maladie des tiges de blé. - 2 - le fléau, la calamité, le malheur, la perte, le désastre, la défaite, le revers, la ruine.
Capua, ae,
f. : Capoue
commoveo, es, ere, movi, motum
: 1 - mettre en mouvement, déplacer, remuer. - 2 - secouer, agiter, ébranler (le corps ou l'esprit), émouvoir, impressionner, troubler. - 3 - exciter, faire naître (un sentiment).
congrego, as, are
: tr. - rassembler (en troupeau), réunir, joindre, associer.
consul, is,
m. : le consul
crassus, a, um
: épais, grossier (Crassus, i, m. : Crassus)
Crixus, i
, m. : Crixus
DCLXXVIII
, inv. : 678
duo, ae, o
: deux
dux, ducis,
m. : le chef, le guide
ea
, 1. ablatif féminin singulier, nominatif ou accusatif neutres pluriels de is, ea, id (ce, cette, le, la...) 2. adv. : par cet endroit
effringo, is, ere, fregi, fractum
: briser, saccager, enlever en brisant, faire sauter, forcer
effugio, is, ere, fugi, fugiturus
: intr. - s'éloigner en fuyant, s’enfuir, sortir, s'échapper. - tr. - échapper à, se soustraire à, éviter.
enim
, conj. : car, en effet
et
, conj. : et. adv. aussi
fere
, adv. : presque
finis, is
, f. : la limite, la fin ; pl., les frontière, le territoire
gladiator, oris
, m. : le gladiateur
Hannibal, alis
, m. : Hannibal
hic
, adv. : ici
hic, haec, hoc
: adj. : ce, cette, ces, pronom : celui-ci, celle-ci
impono, is, ere, sui, situm
: 1 - mettre sur, déposer sur, appliquer. - 2 - mettre à la tête, préposer, imposer. - 3 - mettre dans, déposer dans; au fig. jeter dans. - 4 - imposer, infliger; porter (un coup). - 5 - confier (un soin), charger de, prescrire. - 6 - avec dat. en imposer à, tromper.
in
, prép. : (acc. ou abl.) dans, sur, contre
Italia, ae
, f. : l'Italie
levius
, comparatif neutre ou adverbial de levis, e : léger
Licinius, a, um
: de Licinius (lex Licinia) ; Licinius, i, m. : Licinius Licinia, ae, f. : Licinia
ludus, i,
m. : le jeu, l'école, la troupe de gladiateurs
M
, inv. : abréviation de Marcus
mille, ium
: mille
moveo, es, ere, movi, motum
: déplacer, émouvoir
multus, a, um
: en grand nombre (surtout au pl. : nombreux)
nam
, conj. : de fait, voyons, car
non
, neg. : ne...pas
novus, a, um
: nouveau
Oenomaus, i,
m. : Oenomaus
paene
, adv. : presque
per
, prép. : + Acc. : à travers, par
post
, adv. : en arrière, derrière; après, ensuite; prép. : + Acc. : après
proconsul, is,
m. : proconsul
quam
, 1. accusatif féminin du pronom relatif = que 2. accusatif féminin sing de l'interrogatif = quel? qui? 3. après si, nisi, ne, num = aliquam 4. faux relatif = et eam 5. introduit le second terme de la comparaison = que 6. adv. = combien
quattuor
, adj. num. : quatre
Roma, ae
, f. : Rome
Romanus, a, um
: Romain (Romanus, i, m. : le Romain)
septuaginta
, inv. : septante, soixante-dix
sexaginta
, inv. : soixante
simul
, inv. : adv. en même temps, conj : dès que
Spartacus, i,
m. : Spartacus
subito
, inv. : subitement, soudain
sum, es, esse, fui
: être
tertius, a, um
: troisième
urbs, urbis
, f. : la ville
vagor, aris, ari
: aller à l'aventure, errer, se répandre en tous sens
vinco, is, ere, vici, victum
: vaincre
texte
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