Plotin, Ennéades, traduit par Bouillet

PLOTIN

SIXIEME ENNÉADE.

LIVRE SEPTIÈME. DE LA MULTITUDE DES IDÉES. DU BIEN (chapitres XXI à XLII) (chapitres I à XX)

Tome troisième

Traduction française : M.-N. BOUILLET.

Enneade VI, livre VI - Ennéade VI, livre VIII

 

 

 

 

LES ENNÉADES

 

 SIXIÈME ENNÉADE.

LIVRE SEPTIÈME. (deuxième partie)

DE LA MULTITUDE DES IDÉES. DU BIEN

 

 

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XXI. Τί οὖν ἓν ὂν ἐν πᾶσι τούτοις ποιεῖ ἀγαθὸν ἕκαστον; Ὧδε τοίνυν τετολμήσθω· εἶναι μὲν τὸν νοῦν καὶ τὴν ζωὴν ἐκείνην ἀγαθοειδῆ, ἔφεσιν δὲ εἶναι καὶ τούτων, καθόσον ἀγαθοειδῆ· ἀγαθοειδῆ δὲ λέγω τῷ τὴν μὲν τἀγαθοῦ εἶναι ἐνέργειαν, μᾶλλον δὲ ἐκ τἀγαθοῦ ἐνέργειαν, τὸν δὲ ἤδη ὁρισθεῖσαν ἐνέργειαν. Εἶναι δ´ αὐτὰ μεστὰ μὲν ἀγλαΐας καὶ διώκεσθαι ὑπὸ ψυχῆς, ὡς ἐκεῖθεν καὶ πρὸς ἐκεῖνα αὖ· ὡς τοίνυν οἰκεῖα, ἀλλ´ οὐχὶ ἀγαθά· ἀγαθοειδῆ δὲ ὄντα οὐδὲ ταύτῃ ἀπόβλητα εἶναι. Τὸ γὰρ οἰκεῖον, εἰ μὴ ἀγαθὸν εἴη, οἰκεῖον μέν ἐστι, φεύγει δέ τις αὐτό· ἐπεὶ καὶ ἄλλα πόρρω ὄντα καὶ κάτω κινήσειεν ἄν. Γίνεται δὲ πρὸς αὐτὰ ἔρως ὁ σύντονος οὐχ ὅταν ᾖ ἅπερ ἐστίν, ἀλλ´ ὅταν ἐκεῖθεν ἤδη ὄντα ἅπερ ἐστὶν ἄλλο προσλάβῃ. Οἷον γὰρ ἐπὶ τῶν σωμάτων φωτὸς ἐμμεμιγμένου ὅμως δεῖ φωτὸς ἄλλου, ἵνα καὶ φανείη τὸ ἐν αὐτοῖς χρῶμα τὸ φῶς, οὕτω τοι δεῖ καὶ ἐπὶ τῶν ἐκεῖ καίπερ πολὺ φῶς ἐχόντων φωτὸς κρείττονος ἄλλου, ἵνα κἀκεῖνα καὶ ὑπ´ αὐτῶν καὶ ὑπ´ ἄλλου ὀφθῇ.

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XXI. Quelle est donc la chose une et identique dont la présence dans la Vie, l'Intelligence et l'Idée fait que ce sont des biens? — Ne craignons pas de le dire : l'Intelligence et la Vie première portent la forme du Bien ; c'est à ce titre seul qu'elles sont désirables : elles portent la forme du Bien sous ce rapport que la Vie première est l'acte du Bien, ou plutôt l'acte qui procède du Bien, et que l'Intelligence est cet acte déjà déterminé. Elles sont pleines d'éclat, et l'âme les recherche parce qu'elles viennent du Bien; cependant, si l'âme aspire à elles, c'est parce qu'elles lui sont propres, ce n'est pas qu'elles soient des biens par elles-mêmes. D'un autre côté, l'âme ne saurait les dédaigner, parce qu'elles portent en elles la forme du Bien : car lorsqu'une chose nous est seulement propre, qu'elle n'est pas en outre un bien, nous pouvons la dédaigner (76). Nous nous laissons attirer il est vrai par des objets éloignés et inférieurs; nous éprouvons même pour eux un amour passionné; mais c'est lorsqu'ils ne sont pas seulement ce qu'il est dans leur nature d'être, et qu'ils y joignent encore quelque perfection qui leur vient d'en haut. De même que les corps, tout en contenant une lumière mêlée à leur substance, ont cependant besoin d'être éclairés par une autre lumière pour que leur couleur devienne visible (77), de même les intelligibles, malgré la lumière qu'ils contiennent, ont besoin de recevoir une autre lumière plus puissante afin de devenir visibles soit pour eux-mêmes, soit pour d'autres êtres.

XXII. Ὅταν οὖν τὸ φῶς τοῦτό τις ἴδῃ, τότε δὴ καὶ κινεῖται ἐπ´ αὐτὰ καὶ τοῦ φωτὸς τοῦ ἐπιθέοντος ἐπ´ αὐτοῖς γλιχόμενος εὐφραίνεται, ὥσπερ κἀπὶ τῶν ἐνταῦθα σωμάτων οὐ τῶν ὑποκειμένων ἐστὶν ὁ ἔρως, ἀλλὰ τοῦ ἐμφανταζομένου κάλλους ἐπ´ αὐτοῖς. Ἔστι γὰρ ἕκαστον ὅ ἐστιν ἐφ´ αὑτοῦ· ἐφετὸν δὲ γίνεται ἐπιχρώσαντος αὐτὸ τοῦ ἀγαθοῦ, ὥσπερ χάριτας δόντος αὐτοῖς καὶ εἰς τὰ ἐφιέμενα ἔρωτας. Καὶ τοίνυν ψυχὴ λαβοῦσα εἰς αὑτὴν τὴν ἐκεῖθεν ἀπορροὴν κινεῖται καὶ ἀναβακχεύεται καὶ οἴστρων πίμπλαται καὶ ἔρως γίνεται. Πρὸ τοῦδε οὐδὲ πρὸς τὸν νοῦν κινεῖται, καίπερ καλὸν ὄντα· ἀργόν τε γὰρ τὸ κάλλος αὐτοῦ, πρὶν τοῦ ἀγαθοῦ φῶς λάβῃ, ὑπτία τε ἀναπέπτωκεν ἡ ψυχὴ παρ´ αὐτῆς καὶ πρὸς πᾶν ἀργῶς ἔχει καὶ παρόντος νοῦ ἐστι πρὸς αὐτὸν νωθής. Ἐπειδὰν δὲ ἥκῃ εἰς αὐτὴν ὥσπερ θερμασία ἐκεῖθεν, ῥώννυταί τε καὶ ἐγείρεται καὶ ὄντως πτεροῦται καὶ πρὸς τὸ παρακείμενον καὶ πλησίον καίπερ ἐπτοημένη ὅμως πρὸς ἄλλο οἷον τῇ μνήμῃ μεῖζον κουφίζεται. Καὶ ἕως τί ἐστιν ἀνωτέρω τοῦ παρόντος, αἴρεται φύσει ἄνω αἰρομένη ὑπὸ τοῦ δόντος τὸν ἔρωτα. Καὶ νοῦ μὲν ὑπεραίρει, οὐ δύναται δὲ ὑπὲρ τὸ ἀγαθὸν δραμεῖν, ὅτι μηδέν ἐστι τὸ ὑπερκείμενον. Ἐὰν δὲ μένῃ ἐν νῷ, καλὰ μὲν καὶ σεμνὰ θεᾶται, οὔπω μὴν ὃ ζητεῖ πάντη ἔχει. Οἷον γὰρ προσώπῳ πελάζει καλῷ μέν, οὔπω δὲ ὄψιν κινεῖν δυναμένῳ, ᾧ μὴ ἐμπρέπει χάρις ἐπιθέουσα τῷ κάλλει. Διὸ καὶ ἐνταῦθα φατέον μᾶλλον τὸ κάλλος τὸ ἐπὶ τῇ συμμετρίᾳ ἐπιλαμπόμενον ἢ τὴν συμμετρίαν εἶναι καὶ τοῦτο εἶναι τὸ ἐράσμιον. Διὰ τί γὰρ ἐπὶ μὲν ζῶντος προσώπου μᾶλλον τὸ φέγγος τοῦ καλοῦ, ἴχνος δ´ ἐπὶ τεθνηκότος καὶ μήπω τοῦ προσώπου ταῖς σαρξὶ καὶ ταῖς συμμετρίαις μεμαρασμένου; Καὶ τῶν ἀγαλμάτων δὲ τὰ ζωτικώτερα καλλίω, κἂν συμμετρότερα τὰ ἕτερα ᾖ; Καὶ αἰσχίων ζῶν καλλίων τοῦ ἐν ἀγάλματι καλοῦ; Ἢ ὅτι τοδὶ ἐφετὸν μᾶλλον· τοῦτο δ´ ὅτι ψυχὴν ἔχει· τοῦτο δ´ ὅτι ἀγαθοειδέστερον· τοῦτο δ´ ὅτι ἀγαθοῦ ἀμῃγέπῃ φωτὶ κέχρωσται καὶ χρωσθεῖσα ἐγήγερται καὶ ἀνακεκούφισται καὶ ἀνακουφίζει ὃ ἔχει, καὶ ὡς οἷόν τε αὐτῷ ἀγαθοποιεῖ αὐτὸ καὶ ἐγείρει.

XXII. Quand l'âme aperçoit la lumière que le Bien répand ainsi sur les intelligibles, elle se porte vers eux, et elle éprouve une jouissance délicieuse en contemplant la lumière qui les revêt (78). De même ici-bas, nous n'aimons pas les corps pour eux-mêmes, mais pour la beauté qui reluit en eux (79). Chaque intelligible est par lui-même ce qu'il est; mais il ne devient désirable que quand le Bien l'illumine et le colore en quelque sorte, donnant à ce qui est désiré les grâces et à ce qui désire les amours. Dès que l'âme ressent l'influence du Bien, elle s'émeut, elle entre en délire, elle est aiguillonnée par le désir, et l'amour naît en elle (80). Avant de ressentir l'influence du Bien, elle n'éprouve aucun transport devant la beauté de l'Intelligence : car cette beauté est morte tant qu'elle n'est pas illuminée par le Bien. Aussi l'âme reste-t-elle alors affaissée sur elle-même; elle demeure froide et engourdie, même en présence de l'Intelligence. Mais dès qu'elle ressent la douce chaleur du Bien, elle prend des forces, elle s'éveille et elle ouvre ses ailes ; et, au lieu de s'arrêter à admirer l'Intelligence qui est devant elle, elle s'élève à l'aide de la réminiscence à un principe plus haut encore [au Premier]. Tant qu'il y a quelque chose de supérieur à ce qu'elle possède, elle monte entraînée par l'attrait naturel qu'a pour elle Celui qui inspire l'amour; elle franchit la région de l'Intelligence, et elle s'arrête au Bien parce qu'il n'y a plus rien au delà (81). Tant qu'elle contemple l'Intelligence, elle jouit assurément d'un noble et magnifique spectacle, mais elle ne possède pas encore pleinement ce qu'elle cherche. Tel est un visage qui ne peut attirer les regards malgré sa beauté, parce qu'il n'y joint pas le charme de la grâce. Le beau est en effet plutôt l'éclat dont brille la proportion que la proportion même, et c'est proprement cet éclat qui se fait aimer. Pourquoi la beauté brille-t-elle de tout son éclat sur la face d'un vivant, et n'en voit-on après la mort que le vestige, alors même que les chairs et les traits ne sont pas encore altérés? Pourquoi, entre plusieurs statues, les plus vivantes paraissent-elles plus belles que d'autres mieux proportionnées? Pourquoi un animal vivant, fût-il laid, est-il plus beau qu'un animal en peinture, ce dernier eût-il d'ailleurs une forme plus parfaite? C'est que la forme vivante nous parait plus désirable, c'est qu'elle a une âme, c'est qu'elle est plus conforme au Bien; c'est enfin que l'âme est colorée par la lumière du Bien, qu'éclairée par lui elle en est comme plus éveillée et plus légère, et qu'à son tour elle allège, elle éveille et fait participer du Bien, autant qu'il en est capable, le corps dans lequel elle réside.

XXIII. Ἐκεῖ δή, ὃ ψυχὴ διώκει, καὶ ὃ νῷ φῶς παρέχει καὶ ἐμπεσὸν αὐτοῦ ἴχνος κινεῖ, οὔτοι δεῖ θαυμάζειν, εἰ τοιαύτην δύναμιν ἔχει ἕλκον πρὸς αὑτὸ καὶ ἀνακαλούμενον ἐκ πάσης πλάνης, ἵνα πρὸς αὐτὸν ἀναπαύσαιτο. Εἰ γὰρ ἔκ του τὰ πάντα, οὐδέν ἐστι κρεῖττον αὐτοῦ, ἐλάττω δὲ πάντα. Τὸ δὴ ἄριστον τῶν ὄντων πῶς οὐ τὸ ἀγαθόν ἐστι; Καὶ μὴν εἰ δεῖ τὴν τοῦ ἀγαθοῦ φύσιν αὐταρκεστάτην τε εἶναι αὐτῇ καὶ ἀνενδεᾶ ἄλλου ὁτουοῦν παντός, τίνα ἂν ἄλλην ἢ ταύτην οὖσαν εὕροι τις, ἣ πρὸ τῶν ἄλλων ἦν ὅπερ ἦν, ὅτε μηδὲ κακία πω ἦν; Εἰ δὲ τὰ κακὰ ὕστερον ἐν τοῖς μηδὲ καθ´ ἓν τούτου μετειληφόσι καὶ ἐν τοῖς ἐσχάτοις καὶ οὐδὲν ἐπέκεινα τῶν κακῶν πρὸς τὸ χεῖρον, ἐναντίως ἂν ἔχοι τὰ κακὰ πρὸς αὐτὸ οὐδὲν ἔχοντα μέσον πρὸς ἐναντίωσιν. Τὸ ἄρα ἀγαθὸν τοῦτο ἂν εἴη· ἢ γὰρ οὐκ ἔστιν ὅλως ἀγαθόν, ἤ, εἰ ἀνάγκη εἶναι, τοῦτο ἂν καὶ οὐκ ἄλλο εἴη. Εἰ δέ τις λέγοι μὴ εἶναι, οὐδὲ κακὸν ἂν εἴη· ἀδιάφορα ἄρα πρὸς αἵρεσιν τῇ φύσει· τοῦτο δ´ ἀδύνατον. Ἃ δ´ ἄλλα λέγουσιν ἀγαθά, εἰς τοῦτο, αὐτὸ δὲ εἰς οὐδέν.

Τί οὖν ποιεῖ τοιοῦτον ὄν; Ἢ ἐποίησε νοῦν, ἐποίησε ζωήν, ψυχὰς ἐκ τούτου καὶ τὰ ἄλλα, ὅσα λόγου ἢ νοῦ ἢ ζωῆς μετέχει. Ὃ δὴ τούτων πηγὴ καὶ ἀρχή, τίς ἂν εἴποι, ὅπως ἀγαθὸν καὶ ὅσον; Ἀλλὰ τί νῦν ποιεῖ; Ἢ καὶ νῦν σῴζει ἐκεῖνα καὶ νοεῖν ποιεῖ τὰ νοοῦντα καὶ ζῆν τὰ ζῶντα, ἐμπνέον νοῦν, ἐμπνέον ζωήν, εἰ δέ τι μὴ δύναται ζῆν, εἶναι.

XXIII. Puisque c'est ce Principe que poursuit l'âme, qui illumine l'Intelligence, et que la vue d'une simple trace de lui nous cause tant d'émotion, il ne faut pas s'étonner s'il possède la puissance d'attirer à lui les êtres, et si tous se reposent en lui sans chercher rien au delà. Si tout en effet procède de ce principe, il n'y a rien de meilleurque lui, et tout est au-dessous de lui. Or, comment le meilleur des êtres ne serait-il pas le Bien ? Si le Bien doit se suffire pleinement à lui-même, n'avoir besoin de rien autre, que pourrait-il être si ce n'est Celui qui était ce qu'il est avant toutes les autres choses, quand le mal n'existait pas encore ? Si les maux lui sont postérieurs, s'ils ne se trouvent que dans les objets qui ne participent en rien du Bien et qui occupent le dernier rang, s'il n'existe enfin aucun mal dans les intelligibles, et s'il n'y a rien de pire que le mal [comme il n'y a rien de meilleur que le Bien], les maux sont en opposition complète avec ce principe, sans qu'il y ait entre eux aucun intermédiaire. Ce principe est donc le Bien: car, ou le Bien n'existe pas, ou, s'il existe nécessairement, il est ce principe et il ne saurait être rien d'autre. Pour nier l'existence du Bien, il faudrait nier aussi celle du mal; il enrésulterait qu'il serait indifférent de préférer telle chose à telle autre; or cela est impossible. Toutes les autres choses qu'où nomme des hiens se rapportent à lui, tandis que lui il ne se rapporte à rien (82).

Si telle est la nature du Bien, qu'a-t-il fait? — II a fait l'Intelligence, il a fait la Vie; il a fait par l'intermédiaire de l'Intelligence les âmes et tous les autres êtres qui participent à l'intelligence, ou à la raison, ou à la vie. Quant à Celui qui est leur source et leur principe, qui pourrait exprimer quelle est sa bonté? — Mais que fait-il maintenant? — Il conserve ce qu'il a engendré, il fait penser ce qui pense, il fait vivre ce qui vit, il envoie aux êtres par son souffle (83) et l'intelligence et la vie, tout au moins l'existence, quand ils ne peuvent recevoir la vie.

XXIV. Ἡμᾶς δὲ τί ποιεῖ; Ἢ πάλιν περὶ τοῦ φωτὸς λέγωμεν τί τὸ φῶς, ᾧ καταλάμπεται μὲν νοῦς, μεταλαμβάνει δὲ αὐτοῦ ψυχή. Ἢ τοῦτο νῦν εἰς ὕστερον ἀφέντες εἰκότως ἐκεῖνα πρότερον ἀπορήσωμεν. Ἆρά γε τὸ ἀγαθόν, ὅτι ἐστὶν ἄλλῳ ἐφετόν, ἔστι καὶ λέγεται ἀγαθόν, καί τινι μὲν ὂν ἐφετόν τινι ἀγαθόν, πᾶσι δὲ ὂν τοῦτο λέγομεν εἶναι τὸ ἀγαθόν; Ἢ μαρτύριον μὲν ἄν τις τοῦτο ποιήσαιτο τοῦ εἶναι ἀγαθόν, δεῖ δέ γε φύσιν αὐτὸ τὸ ἐφετὸν ἔχειν τοιαύτην, ὡς δικαίως ἂν τυχεῖν τῆς τοιαύτης προσηγορίας. Καὶ πότερα τῷ τι δέχεσθαι τὰ ἐφιέμενα ἐφίεται ἢ τῷ χαίρειν αὐτῷ; Καὶ εἰ μέν τι δέχεται, τί τοῦτο; Εἰ δὲ τῷ χαίρειν, διὰ τί τούτῳ, ἀλλὰ μὴ ἄλλῳ τινί; Ἐν ᾧ δὴ καὶ πότερα τῷ οἰκείῳ τὸ ἀγαθὸν ἢ ἄλλῳ τινί. Καὶ δὴ καὶ πότερα τὸ ἀγαθὸν ὅλως ἄλλου ἐστίν, ἢ καὶ αὐτῷ τὸ ἀγαθὸν ἀγαθόν ἐστιν· ἢ ὃ ἂν ᾖ ἀγαθόν, αὐτῷ μὲν οὐκ ἔστιν, ἄλλου δὲ ἐξ ἀνάγκης; Καὶ τίνι φύσει ἀγαθόν ἐστιν; Ἔστι δέ τις φύσις, ᾗ μηδὲν ἀγαθόν ἐστι;

Κἀκεῖνο δὲ οὐκ ἀφετέον, ὃ τάχ´ ἄν τις δυσχεραντικὸς ἀνὴρ εἴποι, ὡς «ὑμεῖς, ὦ οὗτοι, τί δὴ ἀποσεμνύνετε τοῖς ὀνόμασιν ἄνω καὶ κάτω ζωὴν ἀγαθὸν λέγοντες καὶ νοῦν ἀγαθὸν λέγοντες καί τι ἐπέκεινα τούτων; Τί γὰρ ἂν καὶ ὁ νοῦς ἀγαθὸν εἴη; Ἢ τί ὁ νοῶν τὰ εἴδη αὐτὰ ἀγαθὸν ἔχοι αὐτὸ ἕκαστον θεωρῶν; Ἠπατημένος μὲν γὰρ ἂν καὶ ἡδόμενος ἐπὶ τούτοις τάχα ἂν ἀγαθὸν λέγοι καὶ τὴν ζωὴν ἡδεῖαν οὖσαν· στὰς δ´ ἐν τῷ ἀνήδονος εἶναι διὰ τί ἂν φήσειεν ἀγαθά; Ἢ τὸ αὐτὸν εἶναι; Τί γὰρ ἂν ἐκ τοῦ εἶναι καρπώσαιτο; Ἢ τί ἂν διαφέροι ἐν τῷ εἶναι ἢ ὅλως μὴ εἶναι, εἰ μή τις τὴν πρὸς αὐτὸν φιλίαν αἰτίαν τούτων θεῖτο; Ὥστε διὰ ταύτην τὴν ἀπάτην φυσικὴν οὖσαν καὶ τὸν φόβον τῆς φθορᾶς τὴν τῶν ἀγαθῶν νομισθῆναι θέσιν.»

XXIV. Et que fait-il pour nous?— Pour répondre à cette question, il faudrait expliquer encore quelle est la lumière dont l'Intelligence est illuminée et à laquelle l'Ame participe. Mais, remettant à plus tard la discussion de ce point, il vaut mieux examiner d'abord les questions suivantes : Le Bien esl-il bien et reçoit-il ce nom parce qu'il est désirable pour quelque être? Ce qui est désirable pour un être est-il le bien de cet être, et ce qui est désirable pour tous les êtres est-il ce que nous appelons le Bien? Être désirable n'est-il pas plutôt un simple caractère du Bien, et ne fautil pas que ce qui est désirable ait une nature telle qu'il mérite le nom de Bien (84)? En outre, les êtres qui désirent le Bien le désirent-ils parce qu'ils reçoivent de luiquelque chose ou parce que sa possession fait leur joie (85)? S'ils reçoivent de lui quelque chose, en quoi cela consiste-t-il? Si la possession du Bien fait leur joie, pourquoi la possession du Bien faitelle leur joie plutôt que ne le ferait la possession de toute autre chose (86)? Le Bien est-il tel par ce qui lui est propre ou par quelque autre chose? Le Bien est-il un attribut d'un autre être, ou le Bien est-il bon pour lui-même? Ne faut-il pas plutôt que ce qui est bon soitbon pour autrui sans l'être pour lui-même (87)? Pour qui d'ailleurs le Bien est-il bon? Car il y a une certaine nature pour laquelle rien n'est bon [telle est la matière].

Ne passons pas non plus sous silence une objection que pourrait nous adresser un adversaire difficile à convaincre : « Eh! mes amis, quelle est donc cette chose que vous célébrez ainsi en termes pompeux (88), en répétant sans cesse que la vie et l'intelligence sont des biens, quoique vous disiez que le Bien est au-dessus d'elles? Pourquoi donc appelez-vous bien l'intelligence? Pourquoi celui qui pense les formes intelligibles posséderait-il le bien en contemplant chacune d'elles? Quand il les qualiiie de biens, n'est-il pas trompé par le plaisir que lui cause leur contemplation? N'est-ce pas aussi parce que la vie lui est agréable qu'il lui donne le nom de bien? S'il ne trouvait aucun plaisir dans la contemplation des intelligibles, pourquoi les appellerait-il des biens? En outre, ferait-il consister le bien à exister simplement? Mais quelle jouissance pourrait-il recueillir de la simple existence? Quelle différence y aurait-il pour lui entre exister et ne pas exister, s'il ne s'aimait lui-même? C'est donc dans une erreur naturelle [sur l'essence des intelligibles] et dans la crainte de la mort qu'il faut chercher la cause pour laquelle on qualifie de biens l'intelligence et la vie (89). »

XXV.  Ὁ μὲν οὖν Πλάτων ἡδονὴν τῷ τέλει μιγνὺς καὶ τὸ ἀγαθὸν οὐχ ἁπλοῦν οὐδὲ ἐν νῷ μόνῳ τιθέμενος, ὡς ἐν τῷ Φιλήβῳ γέγραπται, τάχα ἂν αἰσθόμενος ταύτης τῆς ἀπορίας οὔτε παντάπασιν ἐπὶ τὸ ἡδὺ τίθεσθαι τὸ ἀγαθὸν ἐτράπετο, ὀρθῶς ποιῶν, οὔτε τὸν νοῦν ἀνήδονον ὄντα ᾠήθη δεῖν θέσθαι ἀγαθὸν τὸ κινοῦν ἐν αὐτῷ οὐχ ὁρῶν. Τάχα δὲ οὐ ταύτῃ, ἀλλ´ ὅτι ἠξίου τὸ ἀγαθὸν ἔχον φύσιν ἐν αὐτῷ τοιαύτην δεῖν ἐξ ἀνάγκης χαρτὸν εἶναι, τό τε ἐφετὸν τῷ τυγχάνοντι καὶ τυχόντι πάντως ἔχειν τὸ χαίρειν, ὥστε, ᾧ μὴ τὸ χαίρειν, ἀγαθὸν μηδὲ εἶναι, καὶ ὥστε, εἰ τὸ χαίρειν τῷ ἐφιεμένῳ, τῷ πρώτῳ μὴ εἶναι· ὥστε μηδὲ τὸ ἀγαθόν. Καὶ οὐκ ἄτοπον τοῦτο· αὐτὸς γὰρ οὐ τὸ πρῶτον ἀγαθὸν ἐζήτει, τὸ δὲ ἡμῶν, καὶ ὅλως ἑτέρου ὄντος ἔστιν αὐτῷ ἕτερον ὂν αὐτοῦ, ἐλλειποῦς ὄντος αὐτοῦ καὶ ἴσως συνθέτου· ὅθεν καὶ τὸ ἔρημον καὶ μόνον μηδὲν ἔχειν ἀγαθόν, ἀλλ´ εἶναι ἑτέρως καὶ μειζόνως.

Ἐφετὸν μὲν οὖν δεῖ τὸ ἀγαθὸν εἶναι, οὐ μέντοι τῷ ἐφετὸν εἶναι ἀγαθὸν γίγνεσθαι, ἀλλὰ τῷ ἀγαθὸν εἶναι ἐφετὸν γίγνεσθαι. Ἆρ´ οὖν τῷ μὲν ἐσχάτῳ ἐν τοῖς οὖσι τὸ πρὸ αὐτοῦ, καὶ ἀεὶ ἡ ἀνάβασις τὸ ὑπὲρ ἕκαστον διδοῦσα ἀγαθὸν εἶναι τῷ ὑπ´ αὐτό, εἰ ἡ ἀνάβασις οὐκ ἐξίσταιτο τοῦ ἀνάλογον, ἀλλὰ ἐπὶ μεῖζον ἀεὶ προχωροῖ; Τότε δὲ στήσεται ἐπ´ ἐσχάτῳ, μεθ´ ὃ οὐδέν ἐστιν εἰς τὸ ἄνω λαβεῖν, καὶ τοῦτο τὸ πρῶτον καὶ τὸ ὄντως καὶ τὸ μάλιστα κυρίως ἔσται, καὶ αἴτιον δὲ καὶ τοῖς ἄλλοις. Τῇ μὲν γὰρ ὕλῃ τὸ εἶδος—εἰ γὰρ αἴσθησιν λάβοι, ἀσπάσαιτ´ ἄν—τῷ δὲ σώματι ψυχή—καὶ γὰρ οὐδ´ ἂν εἴη οὐδ´ ἂν σῴζοιτο—ψυχῇ δὲ ἀρετή. Ἤδη δὲ καὶ ἀνωτέρω νοῦς καὶ ἐπὶ τούτῳ ἣν δή φαμεν πρώτην φύσιν. Καὶ δὴ καὶ τούτων ἕκαστον ποιεῖν τι εἰς τὰ ὧν ἀγαθά ἐστι, τὰ μὲν τάξιν καὶ κόσμον, τὰ δ´ ἤδη ζωήν, τὰ δὲ φρονεῖν καὶ ζῆν εὖ, τῷ δὲ νῷ τὸ ἀγαθόν, ὅ φαμεν καὶ εἰς τοῦτο ἥκειν, καὶ ὅτι ἐνέργεια ἐξ αὐτοῦ, καὶ ὅτι καὶ νῦν δίδωσι φῶς λεγόμενον· ὃ δὴ τί ποτ´ ἐστίν, ὕστερον.

XXV. Platon songeait sans doute à cette objection quand il mélangeait le plaisir à la fin [de l'âme, au bien], quand il établissait, ainsi qu'il l'a écrit dans le Philèbe (90), que le bien n'est point simple et ne consiste pas dans l'intelligence seule. C'est pour cela qu'il n'a pas fait consister le bien dans le plaisir seul (et en cela il avait parfaitement raison), et qu'il n'a pas cru devoir non plus placer le bien dans l'intelligence qui n'admettrait aucun mélange déplaisir, parce qu'il ne voyait pas quelle chose pourrait en elle exciter notre désir. Peut-être Platon avait-il encore un autre motif, et a-t-il fait consister le bien dans un mélange parce qu'il pensait qu'ayant une pareille nature le bien est nécessairement plein de charme, désirable pour celui qui le cherche, et plein de charme pour celui qui l'a trouvé; d'où il résulte que celui qui n'est point charmé n'a point trouvé le bien, et que, si celui qui désire n'est pas joyeux, c'est qu'il ne jouit pas encore du bien. Ce n'est pas sans raison que Platon s'est formé cette conception du bien : car il ne cherchait point là à déterminer le Bien par excellence, mais le bien de l'homme ; or ce bien appartient à un être différent du Bien et est autre que lui ; il est d'ailleurs défectueux et paraît composé. C'est pourquoi [selon Platon] ce qui est seul et unique n'a aucun bien, mais est bon dans un autre sens et d'une manière plus relevée.

Il faut donc que le bien soit désirable ; mais ce n'est pas parce qu'il est désirable qu'il est le bien, c'est parce qu'il est le bien qu'il est désirable (91). Ainsi, dans l'ordre des êtres, en remontant du dernier au premier, on trouve que le bien de chacun d'eux est dans celui qui le précède immédiatement, pourvu que dans cette marche ascendante on ne s'écarte pas de la proportion et que l'on aide toujours en augmentant (92). Alors on s'arrêtera à Celui qui occupe le rang suprême, au delà duquel il n'y a plus rien à chercher. C'est le premier, le véritable, le souverain Bien, l'auteur de toute bonté dans les autres êtres. Le bien de la matière, c'est la forme : car la matière la recevrait avec plaisir si elle devenait sensible. Le bien du corps, c'est l'âme : car sans elle il ne saurait ni exister ni durer. Le bien de l'âme, c'est la vertu ; puis, plus haut, l'Intelligence. Le bien de l'Intelligence enfin, c'est le principe que nous nommons la Nature première (πρώτη φύσις). Chacun de ces biens produit quelque chose dans l'objet dont il est le bien : il lui donne soit l'ordre et la beauté [comme la forme le fait à la matière], soit la rie [comme l'âme le fait au corps], soit la sagesse et le bonheur [comme l'Intelligence le fait à l'âme]. Enfin, le Bien communique à l'Intelligence ce que nous disons passer de lui en elle : il lui donne d'être un acte émané du Bien et il répand sur elle ce que nous appelons sa lumière. Quelle est cette chose ? Nous le déterminerons dans la suite.

XXVI.  Καὶ δὴ τὸ πεφυκὸς αἰσθάνεσθαι, παρ´ αὐτὸν εἰ ἥκοι αὐτῷ τὸ ἀγαθόν, γινώσκειν καὶ λέγειν ἔχειν. Τί οὖν, εἰ ἠπάτηται; Δεῖ ἄρα τινὰ εἶναι ὁμοίωσιν, καθ´ ἣν ἠπάτηται. Εἰ δὲ τοῦτο, ἐκεῖνο ἀγαθὸν ἂν αὐτῷ εἴη [ἀφ´ οὗ ἠπάτηται]· ἐπεὶ καί, ὅταν ἐκεῖνο ἥκῃ, ἀφίσταται ἀφ´ οὗ ἠπάτηται. Καὶ ἡ ἔφεσις δ´ αὐτοῦ ἑκάστου καὶ ἡ ὠδὶς μαρτυρεῖ, ὅτι ἔστι τι ἀγαθὸν ἑκάστου. Τοῖς μὲν γὰρ ἀψύχοις παρ´ ἄλλου τοῦ ἀγαθοῦ αὐτοῖς ἡ δόσις, τῷ δὲ ψυχὴν ἔχοντι ἡ ἔφεσις τὴν δίωξιν ἐργάζεται, ὥσπερ καὶ τοῖς νεκροῖς γεγενημένοις σώμασι παρὰ τῶν ζώντων ἡ ἐπιμέλεια καὶ ἡ κήδευσις, τοῖς δὲ ζῶσι παρ´ αὐτῶν ἡ πρόνοια.

Ὅτι δ´ ἔτυχε, πιστοῦται, ὅταν βέλτιόν τι γίνηται καὶ ἀμετανόητον ᾖ καὶ πεπληρῶσθαι αὐτῷ γίγνηται καὶ ἐπ´ ἐκείνου μένῃ καὶ μὴ ἄλλο ζητῇ. Διὸ καὶ ἡ ἡδονὴ οὐκ αὔταρκες· οὐ γὰρ ἀγαπᾷ ταὐτόν· οὐ γάρ, ὅτι ἡδονὴν πάλιν, ταὐτόν· ἄλλο γὰρ ἀεὶ τὸ ἐφ´ ᾧ ἥδεται. Δεῖ δὴ τὸ ἀγαθόν, ὃ αἱρεῖταί τις, εἶναι οὐ τὸ πάθος τὸ ἐπὶ τῷ τυχόντι· ὅθεν καὶ κενὸς μένει ὁ τοῦτο ἀγαθὸν νομίζων, τὸ πάθος μόνον ἔχων, ὃ ἔσχεν ἄν τις ἀπὸ τοῦ ἀγαθοῦ. Διὸ οὐκ ἂν ἀνάσχοιτό τις τοῦ πάθους, ἐφ´ ᾧ οὐκ ἔχων, οἷον ἐπὶ τῷ παιδί, ὅτι πάρεστιν, ἥδεσθαι οὐ παρόντος· οὐδέ γε οἶμαι οἷς ἐν τῷ πληροῦσθαι σωματικῶς τὸ ἀγαθὸν ἥδεσθαι ὡς ἐσθίοντα μὴ ἐσθίοντα, ὡς ἀφροδισίοις χρώμενον μὴ συνόντα ᾗ ἐβούλετο, ἢ ὅλως μὴ δρῶντα.

XXVI. Quand l'être qui a reçu de la nature la faculté de sentir jouit de la présence du bien, il sait que c'est le bien et il dit qu'il le possède. Comment se fait-il donc .qu'il puisse se trompera ce sujet? Pour qu'il se trompe, il faut qu'il y ait quelque chose qui ressemble au bien: dans ce cas, ce qui a causé l'erreur de cet être, c'est ce qui ressemble à son bien : car, dès que ce bien se présente, cet être s'éloigne de ce qui l'avait trompé. Le désir et le penchant qu'on trouve dans chaque être attestent qu'il y a pour lui un bien propre. L'être inanimé reçoit sans doute son bien d'autrui ; mais, dans l'être animé, le désir se met de lui-même à la poursuite du bien : c'est ainsi que les corps privés de la vie sont l'objet de la sollicitude et des soins des êtres vivants, tandis que les êtres vivants veillent sur eux-mêmes.

Maintenant, lorsqu'un être a atteint le bien qu'il poursuivait, il est sûr de le posséder dès qu'il se trouve meilleur, qu'il n'éprouve aucun repentir, qu'il est satisfait, qu'il se complaît dans ce bien et ne cherche rien au delà. Ce qui montre l'insuffisance du plaisir, c'est qu'on n'aime pus toujours la même chose; sans doute le plaisir charme toujours, mais l'objet qui le produit n'est point le même ; c'est toujours un nouvel objet qui nous plaît. Or le bien auquel on aspire ne doit pas être une simple affection, n'ayant d'existence que dans celui qui l'éprouve : car celui qui prend cette affection pour le bien reste vide ; il n'a rien qu'une affection qu'un autre peut ressentir également en présence du bien. Aussi, nul ne souhaite-t-il d'éprouver, sans posséder un bien, le plaisir qu'éprouvé celui qui le possède (93), de se réjouir de la présence d'un fils, par exemple, quand ce fils n'est pas présent ; de même, celui qui aime à faire bonne chère ne regarde point comme un bien de croire manger quand il ne mange pas, celui qui recherche les plaisirs de l'amour ne considère pas non plus comme un bien de s'imaginer qu'il jouit de la présence de celle qu'il aime quand il n'en jouit pas, ou qu'il se livre aux œuvres de Vénus quand il ne s'y livre point.

XXVII. Ἀλλὰ τίνος γενομένου ἑκάστῳ τὸ αὐτῷ προσῆκον ἔχει; Ἢ εἴδους τινὸς φήσομεν· καὶ γὰρ τῇ ὕλῃ εἶδος, καὶ ψυχῇ ἡ ἀρετὴ εἶδος. Ἀλλὰ τὸ εἶδος τοῦτο ἆρά γε τῷ οἰκεῖον εἶναι ἀγαθόν ἐστιν ἐκείνῳ, καὶ ἡ ἔφεσις πρὸς τὸ οἰκεῖον; Ἢ οὔ· καὶ γὰρ τὸ ὅμοιον οἰκεῖον, κἂν ἐθέλῃ αὐτὸ καὶ χαίρῃ τῷ ὁμοίῳ, οὔπω τὸ ἀγαθὸν ἔχει. Ἀλλ´ οὐκ οἰκεῖον φήσομεν ἀγαθὸν εἰπόντες εἶναι; Ἢ φατέον τοῦ οἰκείου τῷ κρείττονι κρίνειν δεῖ καὶ τῷ βελτίονι αὐτοῦ, πρὸς ὃ δυνάμει ἐστίν. Ὂν γὰρ δυνάμει πρὸς ὅ ἐστιν, ἐνδεές ἐστιν αὐτοῦ, οὗ δὲ ἐνδεές ἐστι κρείττονος ὄντος, ἀγαθόν ἐστιν αὐτῷ ἐκεῖνο. Ἡ δὲ ὕλη πάντων ἐνδεέστατον καὶ τὸ ἔσχατον εἶδος προσεχὲς αὐτῇ· μετ´ αὐτὴν γὰρ πρὸς τὸ ἄνω. Εἰ δὲ δὴ καὶ αὐτὸ αὐτῷ ἀγαθόν ἐστι, πολὺ μᾶλλον ἂν εἴη ἀγαθὸν αὐτῷ ἡ τελειότης αὐτοῦ καὶ τὸ εἶδος καὶ τὸ κρεῖττον αὐτοῦ, καὶ τῇ ἑαυτοῦ φύσει ὂν τοιοῦτον καὶ αὖ τῷ, ὅτι καὶ αὐτὸ ἀγαθὸν ποιεῖ. Ἀλλὰ διὰ τί αὐτῷ ἀγαθὸν ἔσται; Ἆρ´ ὅτι οἰκειότατον αὐτῷ; Ἢ οὔ· ἀλλ´ ὅτι ἐστί τις ἀγαθοῦ μοῖρα. Διὸ καὶ μᾶλλον οἰκείωσις πρὸς αὐτοὺς τοῖς εἰλικρινέσι καὶ τοῖς μᾶλλον ἀγαθοῖς. Ἄτοπον δὴ τὸ ζητεῖν, διὰ τί ἀγαθὸν ὂν αὑτῷ ἀγαθόν ἐστιν, ὥσπερ δέον πρὸς αὐτὸ ἐξίστασθαι τῆς αὐτοῦ φύσεως καὶ μὴ ἀγαπᾶν ἑαυτὸ ὡς ἀγαθόν. Ἀλλ´ ἐπὶ τοῦ ἁπλοῦ τοῦτο σκεπτέον, εἰ, ὅπου μηδαμῶς ἔνι ἄλλο, τὸ δὲ ἄλλο, ἔστιν ἡ οἰκείωσις πρὸς αὐτό, 〈καὶ εἰ αὐτὸ〉 ἀγαθόν ἐστιν ἑαυτῷ.

Νῦν δέ, εἰ ταῦτα ὀρθῶς λέγεται, καὶ ἡ ἐπανάβασις ἔχει τὸ ἀγαθὸν ἐν φύσει τινὶ κείμενον, καὶ οὐχ ἡ ἔφεσις ποιεῖ τὸ ἀγαθόν, ἀλλ´ ἡ ἔφεσις, ὅτι ἀγαθόν, καὶ γίνεταί τι τοῖς κτωμένοις καὶ τὸ ἐπὶ τῇ κτήσει ἡδύ. Ἀλλὰ τὸ μὲν «εἰ μὴ ἕποιτο ἡδονή, αἱρετέον τὸ ἀγαθόν», καὶ αὐτὸ ζητητέον.

XXVII. Que doit posséder chaque être pour avoir ce qui lui convient? — Une forme, répondrons-nous. Il convient à la matière d'avoir une forme ; il convient également à l'âme d'avoir sa forme, qui est la vertu (94). — Cette forme est-elle un bien pour un être par cela seul qu'elle lui est propre? Le désir recherche-t-il ou non ce qui lui est propre? — Non. Ce qui est le semblable d'un être lui est propre ; or, quoiqu'un être recherche et aime son semblable (95), en le possédant il ne possède pas encore le bien. — En admettant qu'une chose soit le bien d'un être, nous n'accorderons donc pas qu'elle lui soit propre? — La détermination de ce qui est propre à un être appartient à l'être supérieur par rapport auquel cet être est en puissance (96). Quand un être est en puissance par rapport à un autre, il en a besoin; or l'être dont il a besoin parce que cet être lui est supérieur est par cela même son bien. La matière est de toutes les choses celle qui est la plus indigente, et la forme qui lui convient est la dernière de toutes ; mais, au-dessus d'elle, on s'élève graduellement. Par conséquent, si un être est bon pour lui-même , à plus forte raison il trouve bon ce qui est sa perfection et sa forme, savoir l'être qui est meilleur que lui parce qu'il a une nature supérieure et qu'il lui donne son bien. — Mais pourquoi ce qu'un être reçoit d'un être supérieur est-il son bien? N'est-ce pas parce que cela lui est éminemment propre? — Non. C'est parce que c'est une portion du bien. Voilà pourquoi les êtres les plus purs et les meilleurs sont ceux qui ont plus d'intimité avec eux-mêmes (97). Il est absurde d'ailleurs de chercher pourquoi ce qui est bon est bon pour lui-même, comme si, par cela même qu'il est bon, il devait sortir de sa nature et ne pas s'aimer lui-même. Cependant, au sujet d'un être simple, on peut demander si un être dans lequel il n'y a pas plusieurs choses différentes entre elles a de l'intimité avec lui-même, est bon pour lui-même.

Maintenant, si ce que nous venons de dire est juste, il s'ensuit que c'est par une élévation graduelle que l'on trouve le bien propre à la nature d'un être, que le désir ne fait pas le bien, mais qu'il naît de sa présence, que ceux qui acquièrent le bien en reçoivent quelque chose, et que le plaisir est ce qui accompagne l'acquisition du bien ; mais, lors même que le plaisir n'accompagnerait pas le bien, celui-ci n'en devrait pas moins être choisi et recherché pour lui-même.

XXVIII. Τὸ δ´ ἐκ τοῦ λόγου συμβαῖνον νῦν ὀπτέον. Εἰ γὰρ πανταχοῦ τὸ παραγινόμενον ὡς ἀγαθὸν εἶδος, καὶ τῇ ὕλῃ δὲ εἶδος ἓν τὸ ἀγαθόν, πότερον ἠθέλησεν ἂν ἡ ὕλη, εἴπερ ἦν αὐτῇ τὸ θέλειν, εἶδος μόνον γενέσθαι; Ἀλλ´ εἰ τοῦτο, ἀπολέσθαι θελήσει· τὸ δ´ ἀγαθὸν αὑτῷ πᾶν ζητεῖ. Ἀλλ´ ἴσως οὐχ ὕλη εἶναι ζητήσει, ἀλλὰ εἶναι, τοῦτο δ´ ἔχουσα ἀφεῖναι αὐτῆς θελήσει τὴν κάκην. Ἀλλὰ τὸ κακὸν πῶς ἔφεσιν ἕξει τοῦ ἀγαθοῦ; Ἢ οὐδὲ τὴν ὕλην ἐν ἐφέσει ἐτιθέμεθα, ἀλλ´ ὑπόθεσιν ἐποιεῖτο ὁ λόγος αἴσθησιν δούς, εἴπερ οἷόν τε ἦν δοῦναι ὕλην τηροῦσιν· ἀλλὰ τοῦ εἴδους ἐπελθόντος, ὥσπερ ὀνείρατος ἀγαθοῦ, ἐν καλλίονι τάξει γεγονέναι.

Εἰ μὲν οὖν τὸ κακὸν ἡ ὕλη, εἴρηται· εἰ δ´ ἄλλο τι, οἷον κακία, εἰ αἴσθησιν λάβοι τὸ εἶναι αὐτῆς, ἆρ´ οὖν ἔτι τὸ οἰκεῖον πρὸς τὸ κρεῖττον τὸ ἀγαθὸν ἔσται; Ἢ οὐχ ἡ κακία ἦν ἡ αἰρομένη, ἀλλὰ τὸ κακούμενον. Εἰ δὲ ταὐτὸν τὸ εἶναι καὶ τὸ κακόν, πῶς τοῦτο τὸ ἀγαθὸν αἱρήσεται; Ἄλλ´ ἆρά γε, εἰ αἴσθησιν αὐτοῦ λάβοι τὸ κακόν, ἀγαπήσει αὑτό; Καὶ πῶς ἀγαπητὸν τὸ μὴ ἀγαπητὸν ἔσται; οὐ γὰρ δὴ τῷ οἰκείῳ ἐθέμεθα τὸ ἀγαθόν. Καὶ ταῦτα μὲν ταύτῃ.

Ἀλλ´ εἰ εἶδος τὸ ἀγαθὸν πανταχοῦ καὶ μᾶλλον ἐπαναβαίνουσι μᾶλλον εἶδος — μᾶλλον γὰρ ψυχὴ εἶδος ἢ σώματος εἶδος, καὶ ψυχῆς τὸ μὲν μᾶλλον, τὸ δ´ ἐπιμᾶλλον, καὶ νοῦς ψυχῆς—τὸ ἀγαθὸν ἂν προσχωροῖ τῷ τῆς ψυχῆς ἐναντίῳ καὶ οἷον καθαιρομένῳ καὶ ἀποτιθεμένῳ κατὰ δύναμιν μὲν ἑκάστῳ, τὸ δὲ μάλιστα πᾶν ὅ τι ὕλης ἀποτιθεμένῳ. Καὶ δὴ καὶ ἡ τοῦ ἀγαθοῦ φύσις πᾶσαν ὕλην φυγοῦσα, μᾶλλον δὲ οὐδαμῇ οὐδαμῶς πλησίον γενομένη, ἀναπεφευγυῖα ἂν εἴη εἰς τὴν ἀνείδεον φύσιν, ἀφ´ ἧς τὸ πρῶτον εἶδος. Ἀλλὰ περὶ τούτου ὕστερον.

XXVIII. Voyons quelles sont les conséquences des principes que nous venons d'exposer. Si ce qu'un être reçoit en qualité de bien est partout une forme, si le bien de la matière est une forme, la matière, en supposant qu'elle eût la faculté de vouloir, voudrait-elle être seulement une forme? Mais si elle le voulait, elle voudrait être détruite; [or elle ne saurait le vouloir : ] car tout être recherche son bien (98). Peut-être la matière ne souhaiterait-elle pas d'être matière, mais simplement d'être; possédant ainsi l'être, elle voudrait s'affranchir de ce qu'il y a de mauvais en elle. Mais comment ce qui est le mal [car telle est la nature de la matière (99)] pourrait-il avoir le désir du bien? Au reste, nous n'attribuons pas le désir à la matière même. C'était seulement pour le besoin de la discussion que par hypothèse nous accordions la sensibilité à la matière, si l'on peut toutefois l'accorder à la matière en lui conservant sa nature. Nous avons montré du moins que lorsque la forme est venue, comme un rêve du bien (100), s'unir à la matière, celle-ci s'est trouvée dans une meilleure condition.

Si la matière est le mal, nous venons de dire ce qui a lieu. Si la matière était autre chose, la méchanceté (101), par exemple, et que l'essence de la matière reçût la sensibilité, l'intimité avec ce qui est meilleur serait-elle encore le bien de la matière? — Mais ce n'était pas la méchanceté même de la matière qui choisissait le bien, c'était ce qui était devenu mauvais dans la matière. Si l'essence de la matière était identique au mal, comment la matière souhaiterait elle posséder ce bien? Est-ce que, si le mal avait le sentiment de lui-même, il s'aimerait? Mais comment ce qui n'est pas aimable serait-il aimé? Car nous avons établi que le bien ne consiste pas pour un être dans ce qui lui est propre. En voici assez sur ce point.

Mais si le bien est partout une forme, si, à mesure que l'on monte [dans l'échelle des êtres], il y a progression dans la forme (car l'âme est plus forme que la forme du corps ; il y a dans l'âme elle-même des formes graduées ; l'intelligence enfin est plus l'orme que l'âme), le bien suit évidemment une progression inverse de celle de la matière ; il se trouve dans ce qui est purifié et affranchi de la matière, et il s'y trouve en proportion même de la pureté ; il se trouve au plus haut degré dans ce qui s'est affranchi de la matière le plus qu'il est possible; enfin le Bien en soi, étant éloigné de toute matière, ou plutôt n'ayant jamais eu aucun point de contact avec elle, constitue une nature qui n'a aucune espèce de forme et de laquelle procède la première forme [l'Intelligence]. Mais nous traiterons ce point plus loin (102).

XXIX.  Ἀλλ´ εἰ μὴ ἕποιτο ἡδονὴ τῷ ἀγαθῷ, γίνοιτο δὲ πρὸ τῆς ἡδονῆς τι, δι´ ὃ καὶ ἡ ἡδονή, διὰ τί οὐκ ἀσπαστόν; Ἢ εἰπόντες ἀσπαστὸν ἡδονὴν ἤδη εἴπομεν. Ἀλλ´ εἰ ὑπάρξει μέν, ὑπάρξαντος δὲ δυνατὸν μὴ ἀσπαστὸν εἶναι; Ἀλλ´ εἰ τοῦτο, παρόντος τοῦ ἀγαθοῦ αἴσθησιν ἔχον τὸ ἔχον οὐ γνώσεται, ὅτι. Ἢ τί κωλύει καὶ γιγνώσκειν καὶ μὴ κινεῖσθαι ἄλλως μετὰ τὸ αὐτὸ ἔχειν; Ὃ μᾶλλον ἂν τῷ σωφρονεστέρῳ ὑπάρχοι καὶ μᾶλλον τῷ μὴ ἐνδεεῖ. Διὸ οὐδὲ τῷ πρώτῳ, οὐ μόνον ὅτι ἁπλοῦν, ἀλλ´ ὅτι ἡ κτῆσις δεηθέντος ἡδεῖα.

 Ἀλλὰ καὶ τουτὶ καταφανὲς ἔσται τὰ ἄλλα ὅσα λοιπὰ προανακαθηραμένοις καὶ ἐκεῖνον τὸν ἀντίτυπον λόγον ἀπωσαμένοις. Ἔστι δὲ οὗτος, ὃς ἀπορεῖ, τί ἂν καρπώσαιτο ὁ νοῦν ἔχων εἰς ἀγαθοῦ μοῖραν οὐδὲν πληττόμενος, ὅταν ταῦτα ἀκούῃ, τῷ μὴ σύνεσιν αὐτῶν ἴσχειν, ἢ ὄνομα ἀκούων ἢ ἄλλο τι ἕκαστον αὐτῶν ὑπολαμβάνων ἢ αἰσθητόν τι ζητῶν καὶ τὸ ἀγαθὸν ἐν χρήμασιν ἤ τισι τοιούτοις τιθέμενος. Πρὸς ὃν λεκτέον, ὡς, ὅταν ταῦτα ἀτιμάζῃ, ὁμολογεῖ τίθεσθαί τι παρ´ αὐτῷ ἀγαθόν, ἀπορῶν δ´ ὅπῃ, τῇ ἐννοίᾳ τῇ παρ´ αὐτῷ ταῦτα ἐφαρμόττει. Οὐ γὰρ ἔστι λέγειν «μὴ τοῦτο» πάντη ἄπειρον καὶ ἀνεννόητον ὄντα τούτου. Τάχα δὲ καὶ τὸ ὑπὲρ νοῦν ἀπομαντεύεται. Ἔπειτα δέ, εἰ τῷ ἀγαθῷ ἢ τῷ ἐγγὺς τούτου προσβάλλων ἀγνοεῖ, ἐκ τῶν ἀντικειμένων εἰς ἔννοιαν ἴτω. Ἢ οὐδὲ κακὸν τὴν ἄνοιαν θήσεται· καίτοι πᾶς αἱρεῖται νοεῖν καὶ νοῶν σεμνύνεται. Μαρτυροῦσι δὲ καὶ αἱ αἰσθήσεις εἰδήσεις εἶναι θέλουσαι. Εἰ δὴ νοῦς τίμιον καὶ καλὸν καὶ νοῦς ὁ πρῶτος μάλιστα, τί ἂν φαντασθείη τις, εἴ τις δύναιτο, τὸν τούτου γεννητὴν καὶ πατέρα; Τὸ δὲ εἶναι καὶ τὸ ζῆν ἀτιμάζων ἀντιμαρτυρεῖ ἑαυτῷ καὶ τοῖς ἑαυτοῦ πάθεσι πᾶσιν. Εἰ δέ τις δυσχεραίνει τὸ ζῆν, ᾧ θάνατος μέμικται, τὸ τοιοῦτο δυσχεραίνει, οὐ τὸ ἀληθῶς ζῆν.

XXIX. Supposons que le plaisir n'accompagne pas le bien, mais qu'avant le plaisir il existe une chose qui le fasse naître ordinairement [parce qu'elle est bonne], pourquoi le bien ne serait-il pas alors aimable?—Mais en disant que le bien est aimable, nous avons déjà admis qu'il est accompagné de plaisir. — Supposons cependant que le bien puisse exister sans être aimable [par conséquent sans être accompagné de plaisir]. — Dans ce cas, même en présence du bien, l'être qui possède la sensibilité ne saura pas que le bien est présent. — Qui empêche cependant qu'un être ne connaisse la présence du bien sans éprouver aucune émotion lorsqu'il le possède, ce qui convient parfaitement à celui qui est tempérant et qui ne manque de rien? Il résulte de là que le plaisir ne saurait convenir au Premier, non-seulement parce qu'il est simple, mais encore parce que le plaisir a pour cause l'acquisition de ce qui manque.

Mais, pour que cette vérité apparaisse dans tout son jour, il faut que nous ayons auparavant écarté toutes les autres opinions, et surtout que nous ayons réfuté la doctrine qui nous est opposée. Voici la question qu'on nous pose : « Quel fruit recueillera celui qui a l'intelligence nécessaire pour acquérir un de ces biens [tels que l'existence et la vie], si, en les entendant nommer, il n'en est pas frappé parce qu'il ne les comprend pas, soit qu'il n'entende que des mots, soit qu'il regarde chacune de ces choses comme tout autre [que nous ne l'affirmons], soit qu'il cherche le bien et le fasse consister dans un objet sensible, les richesses par exemple, ou quelque autre objet de ce genre? » — Nous répondrons à celui qui tient un pareil langage que, lorsqu'il méprise ces choses [l'existence et la vie], il reconnaît par là implicitement qu'il y en a lui un certain bien, mais que, sans savoir en quoi il consiste, il n'en juge pas moins de ces choses d'après la notion qu'il a du bien : car il est impossible dédire: «Cela n'est pas le bien, » si l'on n'a aucune espèce de connaissance et de conception du bien (103). Celui qui tient un pareil langage indique peut-être par une espèce de divination que le Bien en soi est au-dessus de l'intelligence. En outre, si en considérant le Bien en soi ou le bien qui en approche le plus il ne le discerne pas, il arrivera du moins à le concevoir par les contraires ; sans cela, il ne saura même pas que le défaut d'intelligence est un mal, quoique tout homme désire être intelligent et se glorifie de l'être, comme on le voit par les sensations qui aspirent à devenir des notions. Si l'intelligence, et surtout l'Intelligence première, est belle et vénérable, quelle admiration ne ressentirait donc pas celui qui pourrait contempler le principe générateur, le Père de l'Intelligence (104)? Par conséquent celui qui prétend mépriser l'existence et la vie reçoit un démenti de lui-même et de toutes affections qu'il éprouve. Si quelqu'un se dégoûte de la vie, c'est qu'il ne considère que celle à laquelle la mort est mêlée et non la vie véritable.

XXX. Ἀλλὰ εἰ δεῖ τῷ ἀγαθῷ τὴν ἡδονὴν μεμίχθαι καὶ μὴ τέλεόν ἐστι τὸ ζῆν, εἴ τις τὰ θεῖα θεῷτο καὶ μάλιστα τὴν τούτων ἀρχήν, νῦν ἰδεῖν ἐφαπτομένους τοῦ ἀγαθοῦ πάντως προσήκει.

Τὸ μὲν οὖν οἴεσθαι τὸ ἀγαθὸν ἔκ τε τοῦ νοῦ ὡς ὑποκειμένου ἔκ τε τοῦ πάθους τῆς ψυχῆς ὃ γίνεται ἐκ τοῦ φρονεῖν, οὐ τὸ τέλος οὐδ´ αὐτὸ τὸ ἀγαθὸν τὸ συναμφότερόν ἐστι τιθέντος, ἀλλὰ νοῦς ἂν εἴη τὸ ἀγαθόν, ἡμεῖς δὲ χαίροντες τῷ τὸ ἀγαθὸν ἔχειν. Καὶ εἴη ἂν αὕτη τις δόξα περὶ ἀγαθοῦ. Ἑτέρα δὲ εἴη ἂν παρὰ ταύτην, ἣ μίξασα τῷ νῷ τὴν ἡδονὴν ὡς ἕν τι ἐξ ἀμφοῖν ὑποκείμενον τοῦτο τίθεται εἶναι, ἵν´ ἡμεῖς τὸν τοιοῦτον νοῦν κτησάμενοι ἢ καὶ ἰδόντες τὸ ἀγαθὸν ἔχωμεν· τὸ γὰρ ἔρημον καὶ μόνον οὔτε γενέσθαι οὔτε αἱρετὸν εἶναι δυνατὸν ὡς ἀγαθόν. Πῶς ἂν οὖν μιχθείη νοῦς ἡδονῇ εἰς μίαν συντέλειαν φύσεως; Ὅτι μὲν οὖν τὴν σώματος ἡδονὴν οὐκ ἄν τις οἰηθείη νῷ δυνατὴν εἶναι μίγνυσθαι, παντὶ δήπου δῆλον· ἀλλ´ οὐδ´ ὅσαι χαραὶ ψυχῆς ἂν ἄλογοι γένοιντο.

Ἀλλ´ ἐπειδὴ πάσῃ ἐνεργείᾳ καὶ διαθέσει δὲ καὶ ζωῇ ἕπεσθαι δεῖ καὶ συνεῖναι οἷόν τι ἐπιθέον, καθὸ τῇ μέν ἐστι κατὰ φύσιν ἰούσῃ τὸ ἐμποδίζον καί τι τοῦ ἐναντίου παραμεμιγμένον, ὃ οὐκ ἐᾷ τὴν ζωὴν ἑαυτῆς εἶναι, τῇ δὲ καθαρὸν καὶ εἰλικρινὲς τὸ ἐνέργημα καὶ ἡ ζωὴ ἐν διαθέσει φαιδρᾷ, τὴν τοιαύτην τοῦ νοῦ κατάστασιν ἀσμενιστὴν καὶ αἱρετωτάτην εἶναι τιθέμενοι ἡδονῇ μεμίχθαι λέγουσιν ἀπορίᾳ οἰκείας προσηγορίας, οἷα ποιοῦσι καὶ τὰ ἄλλα ὀνόματα παρ´ ἡμῖν ἀγαπώμενα μεταφέροντες, τὸ «μεθυσθεὶς ἐπὶ τοῦ νέκταρος» καὶ «ἐπὶ δαῖτα καὶ ἑστίασιν» καὶ τὸ «μείδησε δὲ πατὴρ» οἱ ποιηταὶ καὶ ἄλλα τοιαῦτα μυρία. Ἔστι γὰρ καὶ τὸ ἄσμενον ὄντως ἐκεῖ καὶ τὸ ἀγαπητότατον καὶ τὸ ποθεινότατον, οὐ γινόμενον οὐδ´ ἐν κινήσει, αἴτιον δὲ τὸ ἐπιχρῶσαν αὐτὰ καὶ ἐπιλάμψαν καὶ φαιδρῦναν. Διὸ καὶ ἀλήθειαν τῷ μίγματι προστίθησι καὶ τὸ μετρῆσον πρὸ αὐτοῦ ποιεῖ καὶ ἡ συμμετρία καὶ τὸ κάλλος ἐπὶ τῷ μίγματι ἐκεῖθέν φησιν εἰς τὸ καλὸν ἐλήλυθεν. Ὥστε κατὰ τοῦτο ἂν ἡμεῖς καὶ ἐν τούτῳ μοίρας· τὸ δὲ ὄντως ὀρεκτὸν ἡμῖν ἄλλως μὲν ἡμεῖς αὐτοῖς εἰς τὸ βέλτιστον ἑαυτῶν ἀνάγοντες ἑαυτούς, τοῦτο δὴ τὸ σύμμετρον καὶ καλὸν καὶ εἶδος ἀσύνθετον καὶ ζωὴν ἐναργῆ καὶ νοερὰν καὶ καλήν.

XXX. Maintenant, nous élevant au bien par la pensée, nous devons examiner s'il faut que le plaisir soit mêlé au bien, pour que la vie ne demeure pas imparfaite, contemplât-on d'ailleurs les choses divines et même Celui qui est leur principe.

Quand Platon paraît croire que le bien est composé de l'intelligence, qui en est la substance, et de l'affection que la sagesse fait éprouver à l'âme (105), il n'affirme pas que ce composé [de l'intelligence et du plaisir] soit la fin [de l'âme] ni le Bien en soi ; il veut seulement dire que l'intelligence est le bien et que nous nous réjouissons de la posséder. Voilà une première manière de concevoir l'opinion [de Platon] sur le bien. Une autre manière de l'interpréter, c'est de mélanger le plaisir à l'intelligence en faisant de ces deux choses une seule substance, de telle sorte qu'en acquérant ou en contemplant une pareille intelligence nous possédions le bien : car [disent les partisans de cette opinion] une de ces deux choses ne saurait exister dans l'isolement, ni, supposé qu'elle existât, être désirable à titre de bien. Comment donc [leur demanderons-nous] l'intelligence peut-elle être mêlée au plaisir de manière à ne plus former avec lui qu'une seule nature? Personne ne saurait croire que le plaisir du corps puisse être mélangé à l'intelligence ; ce plaisir est incompatible même avec les joies de l'âme.

Ce qui est vrai, c'est qu'à toute action, à toute disposition, à toute vie, vient toujours se joindre et s'unir ce qui en est l'accessoire, [le plaisir ou la peine] : en effet, il est des fois que l'action rencontre un obstacle à son accomplissement naturel, et qu'à la vie vient se mêler un peu de son contraire, qui altère son indépendance; mais, d'autres fois, l'action se produit sans que rien en trouble la pureté et la sérénité, et la vie alors a un cours tranquille. Ceux qui regardent cet état de l'intelligence comme désirable et comme préférable à tout disent qu'il est mêlé de plaisir, dans l'impuissance où ils se trouvent de mieux rendre leur pensée. Tel est également le sens des expressions employées par ceux qui appliquent aux choses divines les termes destinés à désigner la joie ici-bas, et qui disent : « Enivré de nectar (106) ; On se rend au festin; Jupiter sourit, etc. » Cet heureux état de l'intelligence est ce qu'il y a de plus agréable, de plus digne de nos souhaits et de notre amour; il n'est pas d'ailleurs passager, et ne consiste pas dans un mouvement; son principe est ce qui colore l'intelligence, l'illumine et la fait jouir d'une douce sérénité. C'est pourquoi Platon ajoute la vérité au mélange, et met au-dessus ce qui donne la mesure (107). Il dit encore que la proportion et la beauté qui sont dans le mélange passent de là dans le beau (108). Voilà le bien qui nous appartient, voilà le lot qui nous est propre. C'est là l'objet suprême du désir, objet que nous atteindrons à condition que nous nous ramenions nous mêmes à ce qu'il y a de meilleur en nous. Or cette chose pleine de proportion et de beaulé, cette l'orme composée [des éléments dont nous venons de parler] n'est autre qu'une vie pleine d'éclat, d'intelligence et de beauté.

XXXI.  Ἀλλ´ ἐπεὶ ἐκαλλύνθη τὰ πάντα ἐκείνῳ τῷ πρὸ τούτων καὶ φῶς ἔσχε, νοῦς μὲν τὸ τῆς ἐνεργείας τῆς νοερᾶς φέγγος, ᾧ τὴν φύσιν ἐξέλαμψε, ψυχὴ δὲ δύναμιν ἔσχεν εἰς τὸ ζῆν ζωῆς πλείονος εἰς αὐτὴν ἐλθούσης. Ἤρθη μὲν οὖν ἐκεῖ καὶ ἔμεινεν ἀγαπήσας τὸ περὶ ἐκεῖνον εἶναι· ἐπιστραφεῖσα δὲ καὶ ψυχὴ ἡ δυνηθεῖσα, ὡς ἔγνω καὶ εἶδεν, ἥσθη τε τῇ θέᾳ καὶ ὅσον οἵα τε ἦν ἰδεῖν ἐξεπλάγη. Εἶδε δὲ οἷον πληγεῖσα καὶ ἐν αὐτῇ ἔχουσά τι αὐτοῦ συνῄσθετο καὶ διατεθεῖσα ἐγένετο ἐν πόθῳ, ὥσπερ οἱ ἐν τῷ εἰδώλῳ τοῦ ἐρασμίου κινούμενοι εἰς τὸ αὐτὸ ἰδεῖν ἐθέλειν τὸ ἐρώμενον. Ὥσπερ δὲ ἐνταῦθα σχηματίζονται εἰς ὁμοιότητα τῷ ἐραστῷ οἳ ἂν ἐρῶσι, καὶ τὰ σώματα εὐπρεπέστερα καὶ τὰς ψυχὰς ἄγοντες εἰς ὁμοιότητα, ὡς μὴ λείπεσθαι κατὰ δύναμιν θέλειν τῇ τοῦ ἐρωμένου σωφροσύνῃ τε καὶ ἀρετῇ τῇ ἄλλῃ—ἢ ἀπόβλητοι ἂν εἶεν τοῖς ἐρωμένοις τοῖς τοιούτοις—καὶ οὗτοί εἰσιν οἱ συνεῖναι δυνάμενοι, τοῦτον τὸν τρόπον καὶ ψυχὴ ἐρᾷ μὲν ἐκείνου ὑπ´ αὐτοῦ ἐξ ἀρχῆς εἰς τὸ ἐρᾶν κινηθεῖσα. Καὶ ἡ πρόχειρον ἔχουσα τὸν ἔρωτα ὑπόμνησιν οὐ περιμένει ἐκ τῶν καλῶν τῶν τῇδε, ἔχουσα δὲ τὸν ἔρωτα, καὶ ἂν ἀγνοῇ ὅτι ἔχει, ζητεῖ ἀεὶ καὶ πρὸς ἐκεῖνο φέρεσθαι θέλουσα ὑπεροψίαν τῶν τῇδε ἔχει, καὶ ἰδοῦσα τὰ ἐν τῷδε τῷ παντὶ καλὰ ὑποψίαν ἔχει πρὸς αὐτά, ὅτι ἐν σαρξὶ καὶ σώμασιν ὁρᾷ αὐτὰ ὄντα καὶ μιαινόμενα τῇ παρούσῃ οἰκήσει καὶ τοῖς μεγέθεσι διειλημμένα καὶ οὐκ αὐτὰ τὰ καλὰ ὄντα· μὴ γὰρ ἂν τολμῆσαι ἐκεῖνα οἷά ἐστιν εἰς βόρβορον σωμάτων ἐμβῆναι καὶ ῥυπᾶναι ἑαυτὰ καὶ ἀφανίσαι. Ὅταν δὲ καὶ παραρρέοντα ἴδῃ, ἤδη παντελῶς γιγνώσκει, ὅτι ἄλλοθεν ἔχει, ὃ ἦν αὐτοῖς ἐπιθέον. Εἶτ´ ἐκεῖ φέρεται δεινὴ ἀνευρεῖν οὗπερ ἐρᾷ οὖσα, καὶ οὐκ ἂν πρὶν ἑλεῖν ἀποστᾶσα, εἰ μή πού τις αὐτῆς καὶ τὸν ἔρωτα ἐξέλοι. Ἔνθα δὴ εἶδε μὲν καλὰ πάντα καὶ ἀληθῆ ὄντα, καὶ ἐπερρώσθη πλέον τῆς τοῦ ὄντος ζωῆς πληρωθεῖσα, καὶ ὄντως ὂν καὶ αὐτὴ γενομένη καὶ σύνεσιν ὄντως λαβοῦσα ἐγγὺς οὖσα αἰσθάνεται οὗ πάλαι ζητεῖ.

XXXI. Puisque toutes choses ont été embellies par Celui qui est au-dessus d'elles et qu'elles reçoivent de lui leur lumière; quel' Intelligence tient de lui l'éclat de son acte intellectuel, éclat par lequel elle illumine la Nature; que l'Ame tient également de lui sa puissance vitale, parce qu'elle trouve enfin une source abondante de vie; il en résulte que l'Intelligence s'est élevée à lui et lui est restée attachée, satisfaite de jouir de sa présence, que l'âme s'est aussi tournée vers lui autant qu'elle le pouvait, que, dès qu'elle l'a connu et qu'elle l'a vu, elle a été remplie de joie par sa contemplation, et, qu'autant qu'elle pouvait le voir, elle a été frappée d'admiration. Elle n'a pu le voir sans être frappée, elle a senti qu'elle avait en elle quelque chose de lui ; c'est cette disposition qui l'a portée à désirer sa vue, comme l'image d'un objet aimable fait souhaiter de pouvoir le contempler lui-même. Ici-bas, les amants tâchent de ressemblera l'objet aimé, de rendre leur corps plus gracieux, de conformer leur âme à leur modèle, de rester le moins possible inférieurs pour la tempérance et les autres vertus à celui qu'ils aiment, sous peine d'être méprisés par lui, et ils parviennent ainsi à jouir de son intimité (109); de même, l'âme aime le Bien parce qu'elle est dès le commencement provoquée par lui à l'aimer. Quand elle est prête à aimer, elle n'attend pas que les beautés d'ici-bas lui donnent la réminiscence du Bien ; pleine d'amour, même quand elle ignore ce qu'elle possède, elle cherche toujours, et, enflammée du désir de s'élever au Bien, elle dédaigne les choses d'ici-bas : en considérant les beautés que lui présente notre univers, elle les soupçonne d'être trompeuses, parce qu'elle les voit revêtues de chair et unies à nos corps, souillées par la matière où elles résident, divisées par l'étendue, et qu'elle ne les reconnaît pas comme de véritables beautés (car elle ne saurait croire que celles-ci puissent se plonger dans ce bourbier des corps, se souiller et s'obscurcir (110) ; enfin, quand l'âme remarque que les beautés d'ici-bas sont dans un flux perpétuel, elle reconnaît clairement qu'elles tiennent d'ailleurs cet éclat dont elles brillent (111). Alors elle s'élève au monde intelligible : étant capable de découvrir ce qu'elle aime, elle ne s'arrête pas avant de l'avoir trouvé, à moins qu'on ne lui fasse perdre son amour. Arrivée là, elle contemple toutes les vraies beautés, les vraies réalités (112) ; elle se fortifie en se remplissant de la vie propre à l'Être ; elle devient elle-même être véritable ; elle est intimement unie à l'intelligible qu'elle possède réellement, et en sa présence elle a le sentiment de ce qu'elle cherchait depuis longtemps.

 

XXXII. Ποῦ οὖν ὁ ποιήσας τὸ τοσοῦτον κάλλος καὶ τὴν τοσαύτην ζωὴν καὶ γεννήσας οὐσίαν; Ὁρᾷς τὸ ἐπ´ αὐτοῖς ἅπασι ποικίλοις οὖσιν εἴδεσι κάλλος. Καλὸν μὲν ὡδὶ μένειν· ἀλλ´ ἐν καλῷ ὄντα δεῖ βλέπειν, ὅθεν ταῦτα καὶ ὅθεν καλά. Δεῖ δ´ αὐτὸ εἶναι τούτων μηδὲ ἕν· τὶ γὰρ αὐτῶν ἔσται μέρος τε ἔσται. Οὐ τοίνυν οὐδὲ τοιαύτη μορφὴ οὐδέ τις δύναμις οὐδ´ αὖ πᾶσαι αἱ γεγενημέναι καὶ οὖσαι ἐνταῦθα, ἀλλὰ δεῖ ὑπὲρ πάσας εἶναι δυνάμεις καὶ ὑπὲρ πάσας μορφάς. Ἀρχὴ δὲ τὸ ἀνείδεον, οὐ τὸ μορφῆς δεόμενον, ἀλλ´ ἀφ´ οὗ πᾶσα μορφὴ νοερά. Τὸ γὰρ γενόμενον, εἴπερ ἐγίνετο, ἔδει γενέσθαι τι καὶ μορφὴν ἰδίαν ἔσχεν· ὃ δὲ μηδεὶς ἐποίησε, τίς ἂν ποιήσειεν; Οὐδὲν οὖν τοῦτο τῶν ὄντων καὶ πάντα· οὐδὲν μέν, ὅτι ὕστερα τὰ ὄντα, πάντα δέ, ὅτι ἐξ αὐτοῦ. Πάντα δὲ ποιεῖν δυνάμενον τί ἂν μέγεθος ἔχοι; Ἢ ἄπειρος ἂν εἴη, ἀλλ´ εἰ ἄπειρος, μέγεθος ἂν ἔχοι οὐδέν. Καὶ γὰρ μέγεθος ἐν τοῖς ὑστάτοις· καὶ δεῖ, εἰ καὶ τοῦτο ποιήσει, αὐτὸν μὴ ἔχειν. Τό τε τῆς οὐσίας μέγα οὐ ποσόν· ἔχοι δ´ ἂν καὶ ἄλλο τι μετ´ αὐτὸν τὸ μέγεθος. Τὸ δὲ μέγα αὐτοῦ τὸ μηδὲν αὐτοῦ εἶναι δυνατώτερον παρισοῦσθαί τε μηδὲν δύνασθαι· τίνι γὰρ τῶν αὐτοῦ εἰς ἴσον ἄν τι ἔλθοι μηδὲν ταὐτὸν ἔχον; Τό τε εἰς ἀεὶ καὶ εἰς πάντα οὐ μέτρον αὐτῷ δίδωσιν οὐδ´ αὖ ἀμετρίαν· πῶς γὰρ ἂν τὰ ἄλλα μετρήσειεν; Οὐ τοίνυν αὖ οὐδὲ σχῆμα.

Καὶ μήν, ὅτου ἂν ποθεινοῦ ὄντος μήτε σχῆμα μήτε μορφὴν ἔχοις λαβεῖν, ποθεινότατον καὶ ἐρασμιώτατον ἂν εἴη, καὶ ὁ ἔρως ἂν ἄμετρος εἴη. Οὐ γὰρ ὥρισται ἐνταῦθα ὁ ἔρως, ὅτι μηδὲ τὸ ἐρώμενον, ἀλλ´ ἄπειρος ἂν εἴη ὁ τούτου ἔρως, ὥστε καὶ τὸ κάλλος αὐτοῦ ἄλλον τρόπον καὶ κάλλος ὑπὲρ κάλλος. Οὐδὲν γὰρ ὂν τί κάλλος; Ἐράσμιον δὲ ὂν τὸ γεννῶν ἂν εἴη τὸ κάλλος. Δύναμις οὖν παντὸς καλοῦ ἄνθος ἐστί, κάλλος καλλοποιόν. Καὶ γὰρ γεννᾷ αὐτὸ καὶ κάλλιον ποιεῖ τῇ παρ´ αὐτοῦ περιουσίᾳ τοῦ κάλλους, ὥστε ἀρχὴ κάλλους καὶ πέρας κάλλους. Οὖσα δὲ κάλλους ἀρχὴ ἐκεῖνο μὲν καλὸν ποιεῖ οὗ ἀρχή, καὶ καλὸν ποιεῖ οὐκ ἐν μορφῇ· ἀλλὰ καὶ αὐτὸ τὸ γενόμενον ἀμορφεῖν, ἄλλον δὲ τρόπον ἐν μορφῇ. ἡ γὰρ λεγομένη αὐτὸ τοῦτο μόνον μορφὴ ἐν ἄλλῳ, ἐφ´ ἑαυτῆς δὲ οὖσα ἄμορφον. Τὸ οὖν μετέχον κάλλους μεμόρφωται, οὐ τὸ κάλλος.

XXXII. Où donc est Celui qui a créé cette admirable beauté et cette vie parfaite, Celui qui a engendré l'Essence? Voyez vous la beauté qui brille dans toutes ces formes si diverses ? Il est beau de fixer là son séjour; mais quand on est ainsi arrivé à la beauté, il faut chercher d'où procèdent ces essences et d'où vient leur beauté. Leur auteur ne peut être aucune d'elles : car alors il serait seulement quelqu'une d'entre elles et une partie dans le tout. Il n'est donc ni telle ou telle forme, ni une puissance particulière, ni toutes les formes et toutes les puissances qui sont ou qui deviennent dans l'univers ; il doit être supérieur à toutes les formes et à toutes les puissances. Le Principe suprême n'a donc pas de forme (ἀνείδεον) : ce n'est pas qu'il en manque ; c'est qu'il est le Principe dont dérive toute forme intellectuelle. Ce qui est né (si toutefois il est né quelque chose) a dû en naissant être tel ou tel être, avoir sa forme propre; mais Celui que nul n'a fait ne saurait avoir été fait telle ou telle chose. Il est donc tous les êtres sans être aucun d'eux : il n'est aucun être parce qu'il est antérieur à tous; il est tous les êtres parce qu'il en est l'auteur. Quelle grandeur attribuer au Principe qui peut tout faire? Sera-t-il regardé comme infini? S'il est infini, il n'aura cependant pas de grandeur : car la grandeur ne se trouve que dans les êtres placés au dernier rang. Le créateur de la grandeur ne saurait avoir lui-même de grandeur; et même ce qu'on nomme grandeur dans l'Essence n'est pas une quantité. La grandeur ne peut se trouver que dans quelque chose de postérieur au Bien. La grandeur du Bien, c'est qu'il n'y a rien qui soit plus puissant que lui, rien qui l'égale. Comment quelqu'un des êtres qui dépendent de lui pourrait-il jamais l'égaler, n'ayant pas une nature identique à la sienne? Si l'on dit que Dieu est toujours et partout, on ne lui attribue ni une mesure, ni un défaut de mesure (sinon il ne pourrait mesurer le reste) ; on ne lui donne pas non plus de figure.

Ainsi Dieu, étant l'objet du désir, doit être le plus désiré et le plus aimé, précisément parce qu'il n'a aucune figure ni aucune forme. L'amour qu'il inspire est immense : cet amour est sans bornes, parce que son objet n'en a pas ; il est infini, parce que la beauté de son objet dépasse toute beauté. N'étant aucun être, comment Dieu pourrait-il être une beauté déterminée? Comme objet suprême de l'amour, il est le créateur de la beauté (113). Puissance génératrice de tout ce qui est beau, il est en même temps la fleur où s'épanouit la beauté (114) : car il la produit et la rend plus belle encore par la surabondance de beauté qu'il verse sur elle. II est donc à la fois le principe et le terme de la beauté (115). Principe de la beauté, il rend beau ce dont il est le principe ; mais ce n'est pas par la forme qu'il le rend beau; ce qu'il produit n'a pas de forme, ou, pour mieux dire, a une forme dans un autre sens que le sens habituel de ce mot : car la forme qui n'est que forme est un simple attribut d'une substance, tandis que la Forme qui subsiste en elle-même est quelque chose de supérieur à la forme. Ainsi, ce qui participe à la beauté a une forme; la Beauté même n'en a pas.

XXXIII.  Διὸ καὶ ὅταν κάλλος λέγηται, φευκτέον μᾶλλον ἀπὸ μορφῆς τοιαύτης, ἀλλ´ οὐ πρὸ ὀμμάτων ποιητέον, ἵνα μὴ ἐκπέσῃς τοῦ καλοῦ εἰς τὸ ἀμυδρᾷ μετοχῇ καλὸν λεγόμενον. Τὸ δὲ ἄμορφον εἶδος καλόν, εἴπερ εἶδός ἐστι, καὶ ὅσῳ ἂν ἀποσυλήσας εἴης πᾶσαν μορφήν, οἷον καὶ τὴν ἐν λόγῳ, ᾗ διαφέρειν ἄλλο ἄλλου λέγομεν, ὡς δικαιοσύνην καὶ σωφροσύνην ἀλλήλων ἕτερα, καίτοι καλὰ ὄντα. Ἐπειδὴ ὁ νοῦς ἴδιόν τι νοεῖ, ἠλάττωται, κἂν ὁμοῦ πάντα λάβῃ ὅσα ἐν τῷ νοητῷ· κἂν ἕκαστον, μίαν μορφὴν νοητὴν ἔχει·

ὁμοῦ δὲ πάντα οἷον ποικίλην τινά, ἔτι ἐν δεήσει, οἷον δεῖ θεάσασθαι ὂν ὑπὲρ ἐκεῖνο τὸ πάγκαλον καὶ ποικίλον καὶ οὐ ποικίλον, οὗ ὀρέγεται μὲν ψυχὴ οὐ λέγουσα διὰ τί τοιοῦτον ποθεῖ, ὁ δὲ λόγος λέγει, ὅτι τοῦτο τὸ ὄντως, εἴπερ ἐν τῷ πάντη ἀνειδέῳ ἡ τοῦ ἀρίστου φύσις καὶ ἡ τοῦ ἐρασμιωτάτου. Διὸ ὅ τι ἂν εἰς εἶδος ἀνάγων τῇ ψυχῇ δεικνύῃς, ἐπὶ τούτῳ ἄλλο τὸ μορφῶσαν ζητεῖ. Λέγει δὴ ὁ λόγος, ὅτι τὸ μορφὴν ἔχον καὶ ἡ μορφὴ καὶ τὸ εἶδος μεμετρημένον πᾶν, τοῦτο δὲ οὐ πᾶν οὐδὲ αὔταρκες οὐδὲ παρ´ αὐτοῦ καλόν, ἀλλὰ καὶ τοῦτο μέμικται. Δεῖ τοίνυν ταῦτα μὲν καλά, τὸ δὲ ὄντως ἢ τὸ ὑπέρκαλον μὴ μεμετρῆσθαι· εἰ δὲ τοῦτο, μὴ μεμορφῶσθαι μηδὲ εἶδος εἶναι. Ἀνείδεον ἄρα τὸ πρώτως καὶ πρῶτον καὶ ἡ καλλονὴ ἐκεῖνο ἡ τοῦ ἀγαθοῦ φύσις. Μαρτυρεῖ δὲ καὶ τὸ τῶν ἐραστῶν πάθος, ὡς, ἕως ἐστὶν ἐν ἐκείνῳ τῷ τύπον αἰσθητὸν ἔχοντι, οὔπω ἐρᾷ· ὅταν δ´ ἀπ´ ἐκείνου αὐτὸς ἐν αὑτῷ οὐκ αἰσθητὸν γεννήσῃ τύπον ἐν ἀμερεῖ ψυχῇ, τότε ἔρως φύεται.

Βλέπειν δὲ ζητεῖ τὸ ἐρώμενον, ἵν´ ἐκεῖνο ἐπάρδοι μαραινόμενον. Εἰ δὲ σύνεσιν λάβοι, ὡς δεῖ μεταβαίνειν ἐπὶ τὸ ἀμορφότερον, ἐκείνου ἂν ὀρέγοιτο· καὶ γὰρ ὃ ἐξ ἀρχῆς ἔπαθεν, ἐκ σέλαος ἀμυδροῦ ἔρως φωτὸς μεγάλου. Τὸ γὰρ ἴχνος τοῦ ἀμόρφου μορφή· τοῦτο γοῦν γεννᾷ τὴν μορφήν, οὐχ ἡ μορφὴ τοῦτο, καὶ γεννᾷ, ὅταν ὕλη προσέλθῃ. Ἡ δὲ ὕλη πορρωτάτω ἐξ ἀνάγκης, ὅτι μηδὲ τῶν ὑστάτων μορφῶν παρ´ αὐτῆς τινα ἔχει. Εἰ οὖν ἐράσμιον μὲν οὐχ ἡ ὕλη, ἀλλὰ τὸ εἰδοποιηθὲν διὰ τὸ εἶδος, τὸ δ´ ἐπὶ τῇ ὕλῃ εἶδος παρὰ ψυχῆς, ψυχὴ δὲ μᾶλλον εἶδος καὶ μᾶλλον ἐράσμιον καὶ νοῦς μᾶλλον ταύτης εἶδος καὶ ἔτι μᾶλλον ἐρασμιώτερον, ἀνείδεον δεῖ τὴν καλοῦ τίθεσθαι φύσιν τὴν πρώτην.

XXXΙΙΙ. Quand nous parlons de Beauté absolue, il faut donc nous éloigner de toute forme déterminée, ne nous en mettre aucune sous les yeux ; sinon, nous nous exposerions à descendre delà Beauté absolue à une chose qui ne mérite le nom de belle qu'en vertu d'une obscure et faible participation (116), tandis que la Beauté absolue est une idée sans forme (εἶδος ἄμορφον), si l'on admet toutefois qu'elle soit une idée. Ainsi, c'est par l'abstraction que vous vous rapprocherez de la Forme universelle (117); retranchez même la forme qui se trouve dans la raison [dans l'essence] et par laquelle nous distinguons un objet d'un autre, retranchez, par exemple, la différence qui sépare la tempérance de la justice (quoique toutes deux soient belles) : car, par cela seul que l'intelligence conçoit un objet comme quelque chose de propre, l'objet qu'elle conçoit est amoindri, cet objet fût-il l'ensemble des intelligibles; et, d'un autre côté, si chacun d'eux pris à part a une forme unique, tous pris ensemble offrent une certaine variété.

Il reste à considérer comment il faut concevoir Celui qui est supérieure l'Intelligence si pleine de beauté et de variété, mais qui lui-même n'est pas varié. L'âme aspire à lui sans savoir pourquoi elle désire le posséder; mais la raison nous dit qu'il est la Beauté essentielle (118), puisque la nature de Celui qui est excellent et souverainement aimable doit n'avoir absolument aucune forme. C'est pourquoi, quel que soit l'objet que vous montriez à l'âme en ramenant cet objet à une forme, elle cherche toujours au delà le principe qui a donné la forme (τὸ μορφῶσαν). Or la raison enseigne que ce qui a une forme, que la forme ou l'idée est quelque chose de mesuré, que par conséquent elle n'est pas une chose véritablement universelle, absolue, belle par elle-même, et que sa beauté est mélangée. Les intelligibles sont donc beaux [mais ils ont une mesure], tandis que Celui qui est la Beauté essentielle (τὸ ὄντως) ou plutôt la Beauté transcendante (τὸ ὑπέρκαλον} doit n'être pas quelque chose de mesuré, doit par conséquent n'avoir pas de forme, n'être pas une idée. Ainsi Celui qui est la Beauté au premier degré, la Beauté première, est supérieur à l'idée, et la splendeur de l'intelligible n'est qu'un reflet de la nature du Bien.

On en trouve la preuve dans ce qui arrive aux amants : tant que leurs yeux restent attachés sur un objet sensible, ils n'aiment pas encore véritablement; mais dès qu'ils s'élèvent au-dessus de l'objet sensible et qu'ils arrivent à s'en représenter dans l'âme, qui est indivisible, une image qui n'a plus rien de sensible, alors l'amour nait en eux. Ils souhaitent encore contempler l'objet aimé pour calmer l'ardeur qui les dévore ; mais s'ils comprennent qu'il faut s'élever à quelque chose qui soit plus éloigné de toute forme, ils le désirent aussitôt: car ce qu'il y a en eux dès le commencement, c'est l'amour qu'une faible clarté leur inspire pour une grande lumière. La forme est en effet le vestige de Celui qui n'a pas de forme. Celui-ci engendre donc la forme sans avoir lui-même de forme, et il l'engendre quand la matière s'approche de lui. Or la matière est nécessairement fort éloignée de lui, puisqu'elle n'a pas même une des formes du dernier degré. Ainsi, puisque ce qui nous parait aimable n'est pas la matière qui a été façonnée par la forme, puisque la forme qui est dans la matière vient de l'âme, que l'âme est une forme supérieure, mais inférieure encore à l'Intelligence et moins aimable qu'elle, il faut admettre que la nature première du Beau est supérieure à toute forme.

XXXIV. Καὶ οὐκέτι θαυμάσομεν τὸ τοὺς δεινοὺς πόθους παρέχον εἰ πάντη ἀπήλλακται καὶ μορφῆς νοητῆς· ἐπεὶ καὶ ψυχή, ὅταν αὐτοῦ ἔρωτα σύντονον λάβῃ, ἀποτίθεται πᾶσαν ἣν ἔχει μορφήν, καὶ ἥτις ἂν καὶ νοητοῦ ᾖ ἐν αὐτῇ. Οὐ γάρ ἐστιν ἔχοντά τι ἄλλο καὶ ἐνεργοῦντα περὶ αὐτὸ οὔτε ἰδεῖν οὔτε ἐναρμοσθῆναι. Ἀλλὰ δεῖ μήτε κακὸν μήτ´ αὖ ἀγαθὸν μηδὲν ἄλλο πρόχειρον ἔχειν, ἵνα δέξηται μόνη μόνον. Ὅταν δὲ τούτου εὐτυχήσῃ ἡ ψυχὴ καὶ ἥκῃ πρὸς αὐτήν, μᾶλλον δὲ παρὸν φανῇ, ὅταν ἐκείνη ἐκνεύσῃ τῶν παρόντων καὶ παρασκευάσασα αὑτὴν ὡς ὅτι μάλιστα καλὴν καὶ εἰς ὁμοιότητα ἐλθοῦσα—ἡ δὲ παρασκευὴ καὶ ἡ κόσμησις δήλη που τοῖς παρασκευαζομένοις—ἰδοῦσα δὲ ἐν αὐτῇ ἐξαίφνης φανέντα—μεταξὺ γὰρ οὐδὲν οὐδ´ ἔτι δύο, ἀλλ´ ἓν ἄμφω· οὐ γὰρ ἂν διακρίναις ἔτι, ἕως πάρεστι· μίμησις δὲ τούτου καὶ οἱ ἐνταῦθα ἐρασταὶ καὶ ἐρώμενοι συγκρῖναι θέλοντες—καὶ οὔτε σώματος ἔτι αἰσθάνεται, ὅτι ἐστὶν ἐν αὐτῷ, οὔτε ἑαυτὴν ἄλλο τι λέγει, οὐκ ἄνθρωπον, οὐ ζῷον, οὐκ ὄν, οὐδὲ πᾶν—ἀνώμαλος γὰρ ἡ τούτων πως θέα—καὶ οὐδὲ σχολὴν ἄγει πρὸς αὐτὰ οὔτε θέλει, ἀλλὰ καὶ αὐτὸ ζητήσασα ἐκείνῳ παρόντι ἀπαντᾷ κἀκεῖνο ἀντ´ αὐτῆς βλέπει· τίς δὲ οὖσα βλέπει, οὐδὲ τοῦτο σχολάζει ὁρᾶν. Ἔνθα δὴ οὐδὲν πάντων ἀντὶ τούτου ἀλλάξαιτο, οὐδ´ εἴ τις αὐτῇ πάντα τὸν οὐρανὸν ἐπιτρέποι, ὡς οὐκ ὄντος ἄλλου ἔτι ἀμείνονος οὐδὲ μᾶλλον ἀγαθοῦ· οὔτε γὰρ ἀνωτέρω τρέχει τά τε ἄλλα πάντα κατιούσης, κἂν ᾖ ἄνω. Ὥστε τότε ἔχει καὶ τὸ κρίνειν καλῶς καὶ γιγνώσκειν, ὅτι τοῦτό ἐστιν οὗ ἐφίετο, καὶ τίθεσθαι, ὅτι μηδέν ἐστι κρεῖττον αὐτοῦ. Οὐ γάρ ἐστιν ἀπάτη ἐκεῖ· ἢ ποῦ ἂν τοῦ ἀληθοῦς ἀληθέστερον τύχοι; Ὃ οὖν λέγει, ἐκεῖνό ἐστι, καὶ ὕστερον λέγει, καὶ σιωπῶσα δὲ λέγει καὶ εὐπαθοῦσα οὐ ψεύδεται, ὅτι εὐπαθεῖ· οὐδὲ γαργαλιζομένου λέγει τοῦ σώματος, ἀλλὰ τοῦτο γενομένη, ὃ πάλαι, ὅτε εὐτύχει. Ἀλλὰ καὶ τὰ ἄλλα πάντα, οἷς πρὶν ἥδετο, ἀρχαῖς ἢ δυνάμεσιν ἢ πλούτοις ἢ κάλλεσιν ἢ ἐπιστήμαις, ταῦτα ὑπεριδοῦσα λέγει οὐκ ἂν εἰποῦσα μὴ κρείττοσι συντυχοῦσα τούτων· οὐδὲ φοβεῖται, μή τι πάθῃ, μετ´ ἐκείνου οὖσα οὐδ´ ὅλως ἰδοῦσα· εἰ δὲ καὶ τὰ ἄλλα τὰ περὶ αὐτὴν φθείροιτο, εὖ μάλα καὶ βούλεται, ἵνα πρὸς τούτῳ ᾖ μόνον· εἰς τόσον ἥκει εὐπαθείας.

XXXIV. Ne nous étonnons donc pas que les plus vives ardeurs soient excitées par Celui qui n'a absolument aucune forme, même intelligible, puisque l'âme elle-même, dès qu'elle brûle d'amour pour lui, dépouille toute forme, quelle qu'elle soit, même intelligible : car il est impossible d'approcher de lui tant que l'on considère quelque autre chose. L'âme doit donc écarter d'elle tout mal, tout bien même, en un mol toute chose, quelle qu'elle soit, pour recevoir Dieu seule à seul (119). Quand l'âme obtient ce bonheur et que Dieu  vient à elle, ou plutôt, qu'il manifeste sa présence, parce que l'âme s'est détachée des autres choses présentes, qu'elle s'est embellie le plus possible, qu'elle est devenue semblable à lui par les moyens connus de ceux-là seuls qui sont initiés, elle le voit tout à coup apparaître en elle : plus d'intervalle, plus de dualité, tous deux ne font qu'un ; impossible de distinguer l'âme d'avec Dieu, tant qu'elle jouit de sa présence; c'est l'intimité de cette union qu'imitent ici-bas ceux qui aiment et qui sont aimés en cherchant à se fondre en un seul être. Dans cet état, l'âme ne sent plus son corps : elle ne sent plus si elle vit, si elle est homme, si elle est essence, être universel, ou quoi que ce soit au monde : car ce serait déchoir que de considérer ces choses, et l'âme n'a pas alors le temps ni la volonté de s'en occuper ; quand, après avoir cherché Dieu, elle se trouve en sa présence, elle s'élance vers lui et elle le contemple au lieu de se contempler elle-même (120). Quel est son état en ce moment? Elle n'a pas le temps de le considérer; mais elle ne l'échangerait contre aucune chose que ce fût, lui offrît-on le ciel entier, parce qu'il n'y a rien de supérieur, rien de meilleur; elle ne saurait monter plus haut. Quant aux autres choses, quelque élevées qu'elles soient, elle ne peut alors s'abaisser à les considérer. C'est en ce moment que l'âme juge et reconnaît qu'elle possède réellement là ce qu'elle désirait; elle affirme enfin qu'il n'y arien de meilleur que Lui. Elle ne saurait être dupe d'une illusion : car il n'y a rien de plus vrai que la vérité même. L'âme est alors ce qu'elle affirme, ou plutôt elle n'affirme rien que plus tard, et elle n'affirme alors qu'en gardant le silence. Tant qu'elle goûte cette béatitude, elle ne saurait se tromper en affirmant qu'elle la goûte. Si elle affirme qu'elle la goûte, ce n'est pas que son corps éprouve un agréable chatouillement, c'est qu'elle est redevenue ce qu'elle était jadis quand elle jouissait de la béatitude. Toutes les choses qui la charmaient auparavant, commandement, pouvoir, richesses, beauté, science, lui paraissent alors méprisables (121); elle ne pouvait pas les dédaigner auparavant, puisqu'elle n'avait encore rencontré rien de meilleur. Enfin, tant qu'elle est avec Lui et qu'elle le contemple, elle ne craint rien. Tout périrait autour d'elle qu'elle le verrait avec plaisir, parce qu'elle resterait seule avec Lui : tant est grande la félicité qu'elle goûte !

XXXV.  Οὕτω δὲ διάκειται τότε, ὡς καὶ τοῦ νοεῖν καταφρονεῖν, ὃ τὸν ἄλλον χρόνον ἠσπάζετο, ὅτι τὸ νοεῖν κίνησίς τις ἦν, αὕτη δὲ οὐ κινεῖσθαι θέλει. Καὶ γὰρ οὐδ´ ἐκεῖνόν φησιν, ὃν ὁρᾷ, καίτοι νοῦς γενόμενος αὕτη θεωρεῖ οἷον νοωθεῖσα καὶ ἐν τῷ τόπῳ τῷ νοητῷ γενομένη· ἀλλὰ γενομένη μὲν ἐν αὐτῷ καὶ περὶ αὐτὸν ἔχουσα τὸ νοητὸν νοεῖ, ἐπὴν δ´ ἐκεῖνον ἴδῃ τὸν θεόν, πάντα ἤδη ἀφίησιν, οἷον εἴ τις εἰσελθὼν εἰς οἶκον ποικίλον καὶ οὕτω καλὸν θεωροῖ ἔνδον ἕκαστα τῶν ποικιλμάτων καὶ θαυμάζοι, πρὶν ἰδεῖν τὸν τοῦ οἴκου δεσπότην, ἰδὼν δ´ ἐκεῖνον καὶ ἀγασθεὶς οὐ κατὰ τὴν τῶν ἀγαλμάτων φύσιν ὄντα, ἀλλ´ ἄξιον τῆς ὄντως θέας, ἀφεὶς ἐκεῖνα τοῦτον μόνον τοῦ λοιποῦ βλέποι, εἶτα βλέπων καὶ μὴ ἀφαιρῶν τὸ ὄμμα μηκέτι ὅραμα βλέποι τῷ συνεχεῖ τῆς θέας, ἀλλὰ τὴν ὄψιν αὐτοῦ συγκεράσαιτο τῷ θεάματι, ὥστε ἐν αὐτῷ ἤδη τὸ ὁρατὸν πρότερον ὄψιν γεγονέναι, τῶν δ´ ἄλλων πάντων ἐπιλάθοιτο θεαμάτων. Καὶ τάχα ἂν σῴζοι τὸ ἀνάλογον ἡ εἰκών, εἰ μὴ ἄνθρωπος εἴη ὁ ἐπιστὰς τῷ τὰ τοῦ οἴκου θεωμένῳ, ἀλλά τις θεός, καὶ οὗτος οὐ κατ´ ὄψιν φανείς, ἀλλὰ τὴν ψυχὴν ἐμπλήσας τοῦ θεωμένου. Καὶ τὸν νοῦν τοίνυν τὴν μὲν ἔχειν δύναμιν εἰς τὸ νοεῖν, ᾗ τὰ ἐν αὐτῷ βλέπει, τὴν δέ, ᾗ τὰ ἐπέκεινα αὐτοῦ ἐπιβολῇ τινι καὶ παραδοχῇ, καθ´ ἣν καὶ πρότερον ἑώρα μόνον καὶ ὁρῶν ὕστερον καὶ νοῦν ἔσχε καὶ ἕν ἐστι. Καὶ ἔστιν ἐκείνη μὲν ἡ θέα νοῦ ἔμφρονος, αὕτη δὲ νοῦς ἐρῶν,

ὅταν ἄφρων γένηται μεθυσθεὶς τοῦ νέκταρος· τότε ἐρῶν γίνεται ἁπλωθεὶς εἰς εὐπάθειαν τῷ κόρῳ· καὶ ἔστιν αὐτῷ μεθύειν βέλτιον ἢ σεμνοτέρῳ εἶναι τοιαύτης μέθης. Παρὰ μέρος δὲ ὁ νοῦς ἐκεῖνος ἄλλα, τὰ δὲ ἄλλοτε ἄλλα ὁρᾷ; Ἢ οὔ· ὁ δὲ λόγος διδάσκων γινόμενα ποιεῖ, τὸ δὲ ἔχει τὸ νοεῖν ἀεί, ἔχει δὲ καὶ τὸ μὴ νοεῖν, ἀλλὰ ἄλλως ἐκεῖνον βλέπειν.

Καὶ γὰρ ὁρῶν ἐκεῖνον ἔσχε γεννήματα καὶ συνῄσθετο καὶ τούτων γενομένων καὶ ἐνόντων· καὶ ταῦτα μὲν ὁρῶν λέγεται νοεῖν, ἐκεῖνο δὲ ᾗ δυνάμει ἔμελλε νοεῖν. Ἡ δὲ ψυχὴ οἷον συγχέασα καὶ ἀφανίσασα μένοντα τὸν ἐν αὐτῇ νοῦν, μᾶλλον δὲ ὁ νοῦς αὐτῆς ὁρᾷ πρῶτος, ἔρχεται δὲ ἡ θέα καὶ εἰς αὐτὴν καὶ τὰ δύο ἓν γίνεται. Ἐκταθὲν δὲ τὸ ἀγαθὸν ἐπ´ αὐτοῖς καὶ συναρμοσθὲν τῇ ἀμφοτέρων συστάσει ἐπιδραμὸν καὶ ἑνῶσαν τὰ δύο ἔπεστιν αὐτοῖς μακαρίαν διδοὺς αἴσθησιν καὶ θέαν, τοσοῦτον ἄρας, ὥστε μήτε ἐν τόπῳ εἶναι, μήτε ἔν τῳ ἄλλῳ, ἐν οἷς πέφυκεν ἄλλο ἐν ἄλλῳ εἶναι· οὐδὲ γὰρ αὐτός που· ὁ δὲ νοητὸς τόπος ἐν αὐτῷ, αὐτὸς δὲ οὐκ ἐν ἄλλῳ. Διὸ οὐδὲ κινεῖται ἡ ψυχὴ τότε, ὅτι μηδὲ ἐκεῖνο. Οὐδὲ ψυχὴ τοίνυν, ὅτι μηδὲ ζῇ ἐκεῖνο, ἀλλὰ ὑπὲρ τὸ ζῆν. Οὐδὲ νοῦς, ὅτι μηδὲ νοεῖ· ὁμοιοῦσθαι γὰρ δεῖ. Νοεῖ δὲ οὐδ´ ἐκεῖνο, ὅτι οὐδὲ νοεῖ.

XXXV. Tel est alors l'état de l'âme qu'elle n'attache plus de prix même à la pensée, qui excitait auparavant son admiration : caria pensée est un mouvement, et l'âme souhaite de n'en avoir aucun. Elle n'affirme même pas que c'est l'Intelligence qu'elle voit, quoiqu'elle ne contemple que parce qu'elle est devenue intelligence, qu'elle est en quelque sorte intellectualisée (ωοωθεῖσα) et établie dans le lieu intelligible. Arrivée à l'Intelligence, établie en elle, l'âme possède l'Intelligible et pense; mais dès qu'elle a l'intuition du Dieu suprême, elle abandonne tout le reste. Elle fait comme le visiteur qui, en entrant dans un palais, admire d'abord les diverses beautés qui en ornent l'intérieur, mais qui ne les regarde plus dès qu'il aperçoit le maître : car le maître, supérieur par sa nature à toutes les statues qui ornent le palais (122) absorbe l'admiration et mérite seul d'être vraiment contemplé ; aussi le spectateur, l'œil attaché sur lui, le considère-t-il seul désormais. A force de contempler continuellement le spectacle qu'il a devant lui, il ne le voit plus; la vision se confond en lui avec l'objet visible ; ce qui était d'abord l'objet visible pour le spectateur passe en lui à l'état de vision, et lui fait oublier tout ce qu'il voyait autour de lui. Pour que cette comparaison soit juste, il faut que le maître qui se présente ici au visiteur ne soit pas un homme, mais un Dieu, et que ce Dieu ne se contente pas d'apparaître aux yeux de celui qui le contemple, mais qu'il pénètre son âme et la remplisse tout entière.

L'intelligence a deux puissances : par l'une, qui est la puissance propre de penser, elle voit ce qui est en elle; par l'autre, elle aperçoit ce qui est au-dessus d'elle à l'aide d'une sorte d'intuition et de perception : par cette intuition, elle voyait d'abord simplement ; puis, en voyant, elle a reçu l'intellection et elle s'est identifiée à l'Un. Le premier mode de contemplation est propre à l'intelligence qui possède encore la raison, le second est l'intelligence transportée d'amour.

Or, c'est quand le nectar l'enivre (123) et lui ôte la raison que l'âme est transportée d'amour et qu'elle s'épanouit dans une félicité qui comble tous ses vœux. Mieux vaut pour elle alors s'abandonner à cette ivresse que de demeurer plus sage. Dans cet état, l'intelligence voit-elle successivement une chose, puis une autre? Non : la parole, quand elle enseigne, énonce tout successivement ; mais c'est éternellement que l'intelligence possède la puissance de penser, aussi bien que la puissance de ne pas penser, c'est-à-dire de voir Dieu autrement que par la pensée. En le contemplant en effet, elle a reçu en elle-même des germes, elle les a sentis lorsqu'ils ont été produits et déposés en son sein ; quand elle les voit, on dit qu'elle pense ; mais quand elle voit Dieu, c'est par cette puissance supérieure en vertu de laquelle elle devait plus tard penser.

Quant à l'âme, elle ne voit Dieu qu'en confondant, en faisant évanouir en quelque sorte l'intelligence qui réside en elle ; ou plutôt, c'est son intelligence première qui voit ; mais la vision que celle-ci a de Dieu arrive jusqu'à l'âme, qui alors s'identifie à l'intelligence. C'est le Bien qui, s'étendant sur l'intelligence et sur l'âme et se mettant à leur portée, se répand sur elles et les fond ensemble ; placé au-dessus d'elles, il leur donne l'heureuse vision et l'ineffable sentiment de lui-même; il les élève si haut qu'elles ne sont plus en aucun lieu, ni en quoi que ce soit (dans aucun des sens où l'on dit qu'une chose est dans une autre) : car lui-même n'est en rien; le lieu intelligible est en Lui, mais Lui il n'est en nulle chose autre. Alors l'âme ne se meut plus, parce que Dieu n'est pas en mouvement ; à proprement parler, elle n'est plus âme, parce que Dieu ne vit pas, mais est au-dessus de la vie ; elle n'est pas non plus intelligence, parce que Dieu est au-dessus de l'intelligence : car il doit y avoir assimilation complète [entre l'âme et Dieu]. Enfin l'âme ne pense même pas Dieu, parce que dans cet état elle ne pense pas du tout.

XXXVI. Τὰ μὲν γὰρ ἄλλα δῆλα, εἴρηται δέ τι καὶ περὶ τούτου. Ἀλλ´ ὅμως καὶ νῦν ἐπ´ ὀλίγον λεκτέον ἀρχομένοις μὲν ἐκεῖθεν, διὰ λογισμῶν δὲ προϊοῦσιν.

Ἔστι μὲν γὰρ ἡ τοῦ ἀγαθοῦ εἴτε γνῶσις εἴτε ἐπαφὴ μέγιστον, καὶ μέγιστόν φησι τοῦτ´ εἶναι μάθημα, οὐ τὸ πρὸς αὐτὸ ἰδεῖν μάθημα λέγων, ἀλλὰ περὶ αὐτοῦ μαθεῖν τι πρότερον. Διδάσκουσι μὲν οὖν ἀναλογίαι τε καὶ ἀφαιρέσεις καὶ γνώσεις τῶν ἐξ αὐτοῦ καὶ ἀναβασμοί τινες, πορεύουσι δὲ καθάρσεις πρὸς αὐτὸ καὶ ἀρεταὶ καὶ κοσμήσεις καὶ τοῦ νοητοῦ ἐπιβάσεις καὶ ἐπ´ αὐτοῦ ἱδρύσεις καὶ τῶν ἐκεῖ ἑστιάσεις. Ὅστις γένηται ὁμοῦ θεατής τε καὶ θέαμα αὐτὸς αὑτοῦ καὶ τῶν ἄλλων καὶ γενόμενος οὐσία καὶ νοῦς καὶ ζῷον παντελὲς μηκέτι ἔξωθεν αὐτὸ βλέποι—τοῦτο δὲ γενόμενος ἐγγύς ἐστι, καὶ τὸ ἐφεξῆς ἐκεῖνο, καὶ πλησίον αὐτὸ ἤδη ἐπὶ παντὶ τῷ νοητῷ ἐπιστίλβον. Ἔνθα δὴ ἐάσας τις πᾶν μάθημα, καὶ μέχρι του παιδαγωγηθεὶς καὶ ἐν καλῷ ἱδρυθείς, ἐν ᾧ μέν ἐστι, μέχρι τούτου νοεῖ, ἐξενεχθεὶς δὲ τῷ αὐτοῦ τοῦ νοῦ οἷον κύματι καὶ ὑψοῦ ὑπ´ αὐτοῦ οἷον οἰδήσαντος ἀρθεὶς εἰσεῖδεν ἐξαίφνης οὐκ ἰδὼν ὅπως, ἀλλ´ ἡ θέα πλήσασα φωτὸς τὰ ὄμματα οὐ δι´ αὐτοῦ πεποίηκεν ἄλλο ὁρᾶν, ἀλλ´ αὐτὸ τὸ φῶς τὸ ὅραμα ἦν. Οὐ γὰρ ἦν ἐν ἐκείνῳ τὸ μὲν ὁρώμενον, τὸ δὲ φῶς αὐτοῦ, οὐδὲ νοῦς καὶ νοούμενον, ἀλλ´ αὐγὴ γεννῶσα ταῦτα εἰς ὕστερον καὶ ἀφεῖσα εἶναι παρ´ αὐτῷ· αὐτὸς δὲ αὐγὴ μόνον γεννῶσα νοῦν, οὔτι σβέσασα αὐτῆς ἐν τῷ γεννῆσαι, ἀλλὰ μείνασα μὲν αὐτή, γενομένου δ´ ἐκείνου τῷ τοῦτο εἶναι. Εἰ γὰρ μὴ τοῦτο τοιοῦτον ἦν, οὐκ ἂν ὑπέστη ἐκεῖνο.

XXXVI. Le reste est clair. Quant au dernier point, il en a été déjà parte. Cependant il est bon d'y ajouter encore quelque chose en partant du degré où nous sommes parvenus et en nous avançant par des raisonnements.

La connaissance, ou, si l'on peut s'exprimer ainsi, le tact du Bien (ἡ τοῦ ἀγαθοῦ ἐπαφή) est ce qu'il y a de plus grand (124). C'est ce que Platon nomme la plus grande des sciences (125); et encore appelle-t-il ici science, non la vision même du Bien, mais la science que l'on a du Bien avant cette vision. Cette science est obtenue par l'étude des analogies (126), par les négations [qu'on fait au sujet du Bien (127)], par la connaissance des choses qui procèdent de lui (128), enfin par les degrés que l'on parcourt pour monter jusqu'à lui (129). Or voici les degrés qui conduisent à Dieu : les purifications, les vertus qui ornent l'âme, l'élévation à l'intelligible, l'édification dans l'intelligible, puis le festin ou se nourrit de nectar celui qui devient à la fois spectateur et spectacle, soit pour lui-même, soit pour les autres (130). Étant devenu Essence, Intelligence, Animal universel, il ne considère plus ces choses comme étant hors de lui ; arrivé à cet état, il approche de Celui qui est immédiatement au-dessus de tous les intelligibles et qui répand déjà sur eux sa splendeur. Il laisse alors toute la science qui l'a conduit jusque-là : édifié dans le Beau, il pense, tant qu'il ne va pas au delà de l'essence dans laquelle il se trouve. Mais là , soulevé en quelque sorte parle flot même de l'intelligence, et emporté par la vague qui se gonfle, il voit tout à coup, sans savoir comment. La contemplation qui remplit ses yeux de lumière ne lui fait pas voir une chose extérieure ; c'est la lumière même qu'il voit. Il n'y a pas là d'un côté la lumière, de l'autre l'objet visible ; il n'y a pas non plus, d'un côté, l'intelligence, et, de l'autre, l'intelligible ; il n'y a que la clarté qui engendre postérieurement ces choses, et leur permet de subsister dans son sein. Pour Dieu, il est seulement la clarté qui engendre l'Intelligence, qui ne se consume pas en engendrant et demeure en soi. Cette clarté est, et par cela seul naît une autre chose. Si cette clarté n'était pas telle, cette autre chose ne subsisterait pas.

XXXVII.  Οἱ μὲν οὖν νόησιν αὐτῷ δόντες τῷ λόγῳ τῶν μὲν ἐλαττόνων καὶ τῶν ἐξ αὐτοῦ οὐκ ἔδοσαν· καίτοι καὶ τοῦτο ἄτοπον τὰ ἄλλα, φασί τινες, μὴ εἰδέναι· ἀλλ´ οὖν ἐκεῖνοι ἄλλο τιμιώτερον αὐτοῦ οὐχ εὑρόντες τὴν νόησιν αὐτῷ αὐτοῦ εἶναι ἔδοσαν, ὥσπερ τῇ νοήσει σεμνοτέρου αὐτοῦ ἐσομένου καὶ τοῦ νοεῖν κρείττονος ἢ κατ´ αὐτὸν ὅ ἐστιν ὄντος, ἀλλ´ οὐκ αὐτοῦ σεμνύνοντος τὴν νόησιν. Τίνι γὰρ τὸ τίμιον ἕξει, τῇ νοήσει ἢ αὐτῷ; Εἰ μὲν τῇ νοήσει, αὐτῷ οὐ τίμιον ἢ ἧττον, εἰ δὲ αὐτῷ, πρὸ τῆς νοήσεώς ἐστι τέλειος καὶ οὐ τῇ νοήσει τελειούμενος. Εἰ δ´ ὅτι ἐνέργειά ἐστιν, ἀλλ´ οὐ δύναμις, δεῖ νοεῖν, εἰ μὲν οὐσία ἐστὶν ἀεὶ νοοῦσα καὶ τούτῳ ἐνέργειαν λέγουσι, δύο ὅμως λέγουσι, τὴν οὐσίαν καὶ τὴν νόησιν, καὶ οὐχ ἁπλοῦν λέγουσιν, ἀλλά τι ἕτερον προστιθέασιν αὐτῷ, ὥσπερ ὀφθαλμοῖς τὸ ὁρᾶν κατ´ ἐνέργειαν, κἂν ἀεὶ βλέπωσιν. Εἰ δ´ ἐνεργείᾳ λέγουσιν, ὅτι ἐνέργειά ἐστι καὶ νόησις, οὐκ ἂν οὖσα νόησις νοοῖ, ὥσπερ οὐδὲ κίνησις κινοῖτο ἄν. Τί οὖν; οὐ καὶ αὐτοὶ λέγετε οὐσίαν καὶ ἐνέργειαν εἶναι ἐκεῖνα; Ἀλλὰ πολλὰ ταῦτα ὁμολογοῦμεν εἶναι καὶ ταῦτα ἕτερα, τὸ δὲ πρῶτον ἁπλοῦν, καὶ τὸ ἐξ ἄλλου δίδομεν νοεῖν καὶ οἷον ζητεῖν αὐτοῦ τὴν οὐσίαν καὶ αὐτὸ καὶ τὸ ποιῆσαν αὐτό, καὶ ἐπιστραφὲν ἐν τῇ θέᾳ καὶ γνωρίσαν νοῦν ἤδη δικαίως εἶναι· τὸ δὲ μήτε γενόμενον μήτ´ ἔχον πρὸ αὐτοῦ, ἀλλ´ ἀεὶ 〈ὂν〉 ὅ ἐστι — τίς αἰτία τοῦ νοεῖν ἕξει;

Διὸ ὑπὲρ νοῦν φησιν ὁ Πλάτων εἶναι ὀρθῶς. Νοῦς μὲν γὰρ μὴ νοῶν ἀνόητος· ᾧ γὰρ ἡ φύσις ἔχει τὸ νοεῖν, εἰ μὴ τοῦτο πράττοι, ἀνόητον· ᾧ δὲ μηδὲν ἔργον ἐστί, τί ἂν τούτῳ τις ἔργον προσάγων κατὰ στέρησιν αὐτοῦ κατηγοροῖ τοῦτο, ὅτι μὴ πράττει; Οἷον εἰ ἀνίατρον αὐτόν τις λέγοι. Μηδὲν δὲ ἔργον εἶναι αὐτῷ, ὅτι μηδὲν ἐπιβάλλει αὐτῷ ποιεῖν· ἀρκεῖ γὰρ αὐτὸς καὶ οὐδὲν δεῖ ζητεῖν παρ´ αὐτὸν ὑπὲρ τὰ πάντα ὄντα· ἀρκεῖ γὰρ αὐτῷ καὶ τοῖς ἄλλοις ὢν αὐτὸς ὅ ἐστιν.

XXXVII. Ceux qui ont attribué la pensée au Premier principe ne lui ont pas attribué du moins la pensée des choses qui lui sont inférieures ou qui procèdent de lui  (131); cependant quelques-uns ont prétendu qu'il est absurde de croire que Dieu ne connaisse pas les autres choses. Quant aux premiers, ne trouvant rien de plus grand que le Bien, ils lui ont attribué la pensée de soi-même (132), comme si celle-ci pouvait ajoutera sa majesté, comme si penser valait mieux pour lui qu'être ce qu'il est, comme si ce n'était pas le Bien lui-même qui donne à l'Intelligence sa majesté. De qui donc le Bien tiendra-t-il-sa grandeur? Sera-ce de la pensée, sera-ce de lui-même? S'il la tient de la pensée (133), il n'est pas grand par lui-même, ou du moins il n'est plus souverainement grand. S'il tient sa grandeur de lui-même, il est parfait antérieurement à la pensée, et ce n'est pas la pensée qui le rend parfait. Doit-il penser parce qu'il est acte et non simple puissance (134)? S'il est une essence qui pense toujours et que ce soit là ce qu'on entend par acte (135), on attribue au Bien deux choses à la fois, l'essence et la pensée; au lieu de le reconnaître pour un principe simple, on lui ajoute quelque chose d'étranger, comme on ajoute aux yeux la vue en acte (136), en admettant même qu'ils voient toujours.—Dieu, dit-on, est en acte, en ce sens qu'il est acte et pensée (137). — Mais, étant la pensée même, il ne doit pas penser, comme le mouvement même ne doit pas se mouvoir (138). — Cependant ne dites-vous pas vous-mêmes que Dieu est essence et acte? — Selon nous, l'essence et l'acte sont choses multiples et différentes, tandis que le Premier est simple. C'est seulement au principe qui procède du Premier qu'il appartient de penser, de saisir son essence, de se saisir lui-même, ainsi que Celui qui l'a fait ; c'est en se tournant vers lui dans la contemplation et en le connaissant qu'il arrive à mériter vraiment le nom d'Intelligence. Quant au Principe qui n'a pas été engendré, qui n'a rien au-dessus de lui, qui est éternellement ce qu'il est, quelle raison pourrait-il avoir de penser ?

C'est pourquoi Platon dit avec raison que le Bien est au-dessus de l'Intelligence (139). L'intelligence qui ne penserait pas cesserait d'être intelligente : carie principe dont la nature est dépenser cesse nécessairement d'être intelligent s'il ne pense pas. Mais au Principe qui n'a point de fonction on ne peut assigner une fonction, et venir ensuite, parce qu'il ne la remplit pas, l'accuser de ne rien faire; ce serait comme si on lui reprochait de ne pas posséder l'art de guérir. Or, on ne doit assigner au Premier aucune fonction, parce qu'il n'y en a aucune qui lui convienne. Il suffit, et il n'y a rien à chercher hors de Celui qui est au-dessus de tout : car, en étant ce qu'il est, il se suffit à lui-même et à tout le reste.
 

XXXVIII.  Ἔστι δὲ οὐδὲ τὸ «ἔστιν»· οὐδὲν γὰρ οὐδὲ τούτου δεῖται· ἐπεὶ οὐδὲ τὸ «ἀγαθός ἐστι» κατὰ τούτου, ἀλλὰ καθ´ οὗ τὸ «ἔστι»· τὸ δὲ «ἔστιν» οὐχ ὡς κατ´ ἄλλου ἄλλο, ἀλλ´ ὡς σημαῖνον ὅ ἐστι. Λέγομεν δὲ τἀγαθὸν περὶ αὐτοῦ λέγοντες οὐκ αὐτὸ οὐδὲ κατηγοροῦντες, ὅτι αὐτῷ ὑπάρχει, ἀλλ´ ὅτι αὐτό· εἶτα οὐδ´ «ἔστιν ἀγαθὸν» λέγειν ἀξιοῦντες οὐδὲ τὸ «τὸ» προτιθέναι αὐτοῦ, δηλοῦν δὲ οὐ δυνάμενοι, εἴ τις αὐτὸ παντάπασιν ἀφέλοι, ἵνα μὴ ἄλλο, τὸ δὲ ἄλλο ποιῶμεν, ὡς μὴ δεῖσθαι τοῦ «ἔστιν» ἔτι, οὕτω λέγομεν «τἀγαθόν».

Ἀλλὰ τίς παραδέξεται φύσιν οὐκ οὖσαν 〈ἐν〉 αἰσθήσει καὶ γνώσει αὐτῆς; Τί οὖν γνώσεται; «ἐγώ εἰμι»; Ἀλλ´ οὐκ ἔστι. Διὰ τί οὖν οὐκ ἐρεῖ τὸ «ἀγαθόν εἰμι»; Ἢ πάλιν τὸ «ἔστι» κατηγορήσει αὐτοῦ. Ἀλλὰ τὸ «ἀγαθὸν» μόνον ἐρεῖ τι προσθείς· «ἀγαθὸν» μὲν γὰρ νοήσειεν ἄν τις ἄνευ τοῦ «ἔστιν», εἰ μὴ κατ´ ἄλλου κατηγοροῖ· ὁ δὲ αὐτὸ νοῶν ὅτι ἀγαθὸν πάντως νοήσει τὸ «ἐγώ εἰμι τὸ ἀγαθόν»· εἰ δὲ μή, ἀγαθὸν μὲν νοήσει, οὐ παρέσται δὲ αὐτῷ τὸ ὅτι αὐτός ἐστι τοῦτο νοεῖν. Δεῖ οὖν τὴν νόησιν εἶναι, ὅτι «ἀγαθόν εἰμι». Καὶ εἰ μὲν νόησις αὐτὴ τὸ ἀγαθόν, οὐκ αὐτοῦ ἔσται νόησις, ἀλλ´ ἀγαθοῦ, αὐτός τε οὐκ ἔσται τὸ ἀγαθόν, ἀλλ´ ἡ νόησις. Εἰ δὲ ἑτέρα τοῦ ἀγαθοῦ ἡ νόησις τοῦ ἀγαθοῦ, ἔστιν ἤδη τὸ ἀγαθὸν πρὸ τῆς νοήσεως αὐτοῦ. Εἰ δ´ ἔστι πρὸ τῆς νοήσεως τὸ ἀγαθὸν αὔταρκες, αὔταρκες ὂν αὐτῷ εἰς ἀγαθὸν οὐδὲν ἂν δέοιτο τῆς νοήσεως τῆς περὶ αὐτοῦ· ὥστε ᾗ ἀγαθὸν οὐ νοεῖ ἑαυτό.

XXXVIII. On ne doit même pas dire du Premier : il est (il n'en a pas besoin), puisque nous ne disons pas non plus de lui: II est bon. On dit Il est bon du même principe dont on dit Il est. Or Il est ne convient à Dieu qu'à la condition qu'on ne lui donne pas quelque attribut, mais qu'on se borne à indiquer ce qu'il est. Nous disons de lui : le Bien, non pour lui assigner une qualité, un attribut, mais pour faire connaître qu'il est le Bien même. Ensuite, comme nous n'approuvons même pas cette expression : II est le Bien, que nous ne croyons pas qu'on doive énoncer quoi que ce soit avant ce terme de Bien, que d'ailleurs nous ne pouvons exprimer le Bien complètement, nous retranchons tout afin de ne pas introduire en lui quelque diversité, et comme il n'y a plus même besoin qu'on dise : II est, nous l'appelons simplement le Bien.

Comment, dira-t-on, admettre une nature qui n'ait ni sentiment ni connaissance d'elle-même? —Quelle connaissance, répondrons-nous, Dieu peut-il avoir de lui-même? Dira-t-il : Je suis ? Mais il n'est pas [dans le sens où nous venons de l'expliquer] (140). Dira-t-il: Je suis le Bien? Alors il dira encore de lui-même : Je suis [et nous venons d'expliquer qu'on ne peut dire du Bien : II est]. — Qu'ajoutera-t-il donc [à sa simplicité] s'il se borne à dire : le Bien? Car on peut penser le Bien sans dire qu'il est, si l'on n'affirme pas le bien d'un autre être en qualité d'attribut. — Mais, pour se penser comme le Bien, il dira : Je suis le Bien ; sinon, il pensera le Bien, il ne pensera pas qu'il est le Bien. Ainsi, la pensée du Bien implique cette pensée : Je suis le Bien. Si cette pensée est elle-même le Bien, elle ne sera pas la pensée de Lui, mais celle du Bien, et Lui, il sera non plus le Bien, mais la pensée (141). Si la pensée du Bien est différente du Bien même, le Bien sera antérieur à la pensée du Bien. Si le Bien se suffit à lui-même avant la pensée, il se suffit ainsi à lui-même pour être le Bien ; il n'a donc sous ce rapport nul besoin delà pensée qu'il est le Bien.

XXXIX.  Ἀλλὰ ᾗ τί; Ἢ οὐδὲν ἄλλο πάρεστιν αὐτῷ, ἀλλ´ ἁπλῆ τις ἐπιβολὴ αὐτῷ πρὸς αὐτὸν ἔσται. Ἀλλὰ οὐκ ὄντος οἷον διαστήματός τινος οὐδὲ διαφορᾶς πρὸς αὐτὸ τὸ ἐπιβάλλειν ἑαυτῷ τί ἂν εἴη ἢ αὐτό;

Διὸ καὶ ὀρθῶς ἑτερότητα λαμβάνει, ὅπου νοῦς καὶ οὐσία. Δεῖ γὰρ τὸν νοῦν ἀεὶ ἑτερότητα καὶ ταὐτότητα λαμβάνειν, εἴπερ νοήσει. Ἑαυτόν τε γὰρ οὐ διακρινεῖ ἀπὸ τοῦ νοητοῦ τῇ πρὸς αὐτὸ ἑτέρου σχέσει τά τε πάντα οὐ θεωρήσει, μηδεμιᾶς ἑτερότητος γενομένης εἰς τὸ πάντα εἶναι· οὐδὲ γὰρ ἂν οὐδὲ δύο. Ἔπειτα, εἰ νοήσει, οὐ δήπου ἑαυτὸν μόνον νοήσει, εἴπερ ὅλως νοήσει· διὰ τί γὰρ οὐχ ἅπαντα; Ἢ ἀδυνατήσει; Ὅλως δὲ οὐχ ἁπλοῦς γίνεται νοῶν ἑαυτόν, ἀλλὰ δεῖ τὴν νόησιν τὴν περὶ αὐτοῦ ἑτέρου εἶναι, εἴ τι ὅλως δύναιτο νοεῖν αὐτό. Ἐλέγομεν δέ, ὅτι οὐ νόησις τοῦτο, οὐδ´ εἰ ἄλλον αὐτὸν ἐθέλοι ἰδεῖν. Νοήσας δὲ αὐτὸς πολὺς γίνεται, νοητός, νοῶν, κινούμενος καὶ ὅσα ἄλλα προσήκει νῷ. Πρὸς δὲ τούτοις κἀκεῖνο ὁρᾶν προσήκει, ὅπερ εἴρηται ἤδη ἐν ἄλλοις, ὡς ἑκάστη νόησις, εἴπερ νόησις ἔσται, ποικίλον τι δεῖ εἶναι, τὸ δὲ ἁπλοῦν καὶ τὸ αὐτὸ πᾶν οἷον κίνημα, εἰ τοιοῦτον εἴη οἷον ἐπαφή, οὐδὲν νοερὸν ἔχει. Τί οὖν; οὔτε τὰ ἄλλα οὔτε αὐτὸν εἰδήσει; Ἀλλὰ σεμνὸν ἑστήξεται. Τὰ μὲν οὖν ἄλλα ὕστερα αὐτοῦ, καὶ ἦν πρὸ αὐτῶν ὃ ἦν, καὶ ἐπίκτητος αὐτῶν ἡ νόησις καὶ οὐχ ἡ αὐτὴ ἀεὶ καὶ οὐχ ἑστηκότων; κἂν τὰ ἑστῶτα δὲ νοῇ, πολύς ἐστιν. Οὐ γὰρ δὴ τὰ μὲν ὕστερα μετὰ τῆς νοήσεως καὶ τὴν οὐσίαν ἕξει, αἱ δὲ τούτου νοήσεις θεωρίαι κεναὶ μόνον ἔσονται. Ἡ δὲ πρόνοια ἀρκεῖ ἐν τῷ αὐτὸν εἶναι, παρ´ οὗ τὰ πάντα. Τὸ δὲ πρὸς αὐτὸν πῶς, εἰ μὴ αὐτόν; Ἀλλὰ σεμνὸν ἑστήξεται. Ἔλεγε μὲν οὖν ὁ Πλάτων περὶ τῆς οὐσίας λέγων, ὅτι νοήσει, ἀλλ´ οὐ σεμνὸν ἑστήξοιτο ὡς τῆς οὐσίας μὲν νοούσης, τοῦ δὲ μὴ νοοῦντος σεμνοῦ ἑστηξομένου, τὸ μὲν «ἑστήξοιτο» τῷ μὴ ἄλλως ἂν δεδυνῆσθαι ἑρμηνεῦσαι, σεμνότερον δὲ καὶ ὄντως σεμνὸν νομίζων εἶναι τὸ ὑπερβεβηκὸς τὸ νοεῖν.

XXXIX. Il résulte de là que le Bien ne se pense lui-même ni en tant que bien, ni sous aucun autre rapport : car il ne possède rien de différent de lui-même. Il a seulement une intuition simple de lui-même par rapport à lui-même (ἁπλῆ τίς ἐπιβολὴ αὑτῷ πρὸς αὑτόν]  ; mais comme il n'y a aucune distance, aucune différence dans cette intuition qu'il a de lui-même, que peut-être cette intuition sinon Lui ?

Voilà pourquoi il n'y a proprement différence que là où il y a Essence et Intelligence. Pour penser, l'Intelligence doit admettre à la Ibis identité et différence (142). En effet, elle ne peut ni se distinguer de l'intelligible en le considérant comme différent d'elle, ni contempler toutes choses, s'il n'y a pas en elle une différence en vertu de laquelle elle est toutes les essences; sans cela, elle ne serait pas même dyade. Ensuite, puisque l'Intelligence pense, elle ne doit pas se penser elle seule, si elle pense réellement. Pourquoi en effet ne penserait-elle pas toutes choses? Serait-ce par impuissance? En un mot, le principe qui se pense cesse d'être simple, parce qu'en se pensant il doit se penser comme quelque chose de différent; c'est la condition nécessaire pour se penser soi-même (143). Nous avons dit que l'Intelligence ne peut se penser sans se contempler comme quelque chose de différent. Or, en se pensant, elle devient multiple, elle devient objet intelligible et sujet intelligent, mouvement (144) et toutes les choses qui sont le partage de l'Intelligence. En outre, il faut remarquer, comme nous l'avons fait ailleurs, que toute pensée, pour être pensée, doit offrir une variété (145); mais [en Dieu] ce mouvement simple et identique, qu'on peut comparer à une espèce de tact (οἷον ἐπαφή)}, n'a rien d'un acte intellectuel [il ne faut donc pas attribuer à Dieu la pensée]. — Quoi! Dieu ne connaîtra ni les autres ni lui-même, et il demeurera immobile dans sa majesté? — [Oui, sans doute.] Toutes choses sont après lui ; il était ce qu'il est avant elles. La pensée de ces choses est adventice, n'est pas toujours la même, ne s'applique pas à des objets permanents; et, s'appliquât-elle à des objets permanents, elle serait encore multiple : car on ne saurait admettre que dans les êtres inférieurs la pensée fût jointe à l'essence, tandis que les pensées de l'Intelligence ne seraient que des notions vides. Pour l'existence de la Providence, il suffit que Dieu soit celui dont procèdent tous les êtres. Quant aux êtres qui se rapportent à lui, comment Dieu pourrait-il les penser, puisqu'il ne se pense pas lui-même, qu'il demeure immobile dans sa majesté? C'est pourquoi Platon dit, en parlant de l'Essence, qu'elle pense, mais qu'elle ne demeure pas immobile dans sa majesté (146). Il veut faire entendre par là que l'Essence pense, sans doute, mais que ce qui ne pense pas demeure immobile dans sa majesté, expression qu'il emploie dans l'impossibilité où il est de rendre autrement sa conception. Ainsi Platon regarde comme possédant plus de majesté, comme possédant la majesté souveraine, le principe qui est supérieur à la pensée.

XL.  Καὶ ὅτι μὲν μὴ δεῖ νόησιν περὶ αὐτὸν εἶναι, εἰδεῖεν ἂν οἱ προσαψάμενοι τοῦ τοιούτου· δεῖ γε μὴν παραμύθια ἄττα πρὸς τοῖς εἰρημένοις κομίζειν, εἴ πῃ οἷόν τε τῷ λόγῳ σημῆναι. Δεῖ δὲ τὴν πειθὼ μεμιγμένην ἔχειν τὴν ἀνάγκην.

 Δεῖ τοίνυν γιγνώσκειν ἐπιστήσαντα, ὡς νόησις πᾶσα ἔκ τινός ἐστι καὶ τινός. Καὶ ἡ μὲν συνοῦσα τῷ ἐξ οὗ ἐστιν ὑποκείμενον μὲν ἔχει τὸ οὗ ἐστι νόησις, οἷον δὲ ἐπικείμενον αὐτὴ γίνεται ἐνέργεια αὐτοῦ οὖσα καὶ πληροῦσα τὸ δυνάμει ἐκεῖνο οὐδὲν αὐτὴ γεννῶσα· ἐκείνου γάρ ἐστιν, οὗ ἐστι, μόνον, οἷον τελείωσις. Ἡ δὲ οὖσα νόησις μετ´ οὐσίας καὶ ὑποστήσασα τὴν οὐσίαν οὐκ ἂν δύναιτο ἐν ἐκείνῳ εἶναι, ἀφ´ οὗ ἐγένετο· οὐ γὰρ ἂν ἐγέννησέ τι ἐν ἐκείνῳ οὖσα. Ἀλλ´ οὖσα δύναμις τοῦ γεννᾶν ἐφ´ ἑαυτῆς ἐγέννα, καὶ ἡ ἐνέργεια αὐτῆς ἐστιν οὐσία, καὶ σύνεστι καὶ ἐν τῇ οὐσίᾳ, καὶ ἔστιν οὐχ ἕτερον ἡ νόησις καὶ ἡ οὐσία αὕτη καὶ αὖ ᾗ ἑαυτὴν νοεῖ ἡ φύσις, οὐχ ἕτερον, ἀλλ´ ἢ λόγῳ, τὸ νοούμενον καὶ τὸ νοοῦν, πλῆθος ὄν, ὡς δέδεικται πολλαχῇ. Καὶ ἔστιν αὕτη πρώτη ἐνέργεια ὑπόστασιν γεννήσασα εἰς οὐσίαν, καὶ ἴνδαλμα ὂν ἄλλου οὕτως ἐστὶ μεγάλου τινός, ὥστε ἐγένετο οὐσία. Εἰ δ´ ἦν ἐκείνου καὶ μὴ ἀπ´ ἐκείνου, οὐδ´ ἂν ἄλλο τι ἢ ἐκείνου ἦν, καὶ οὐκ ἂν ἐφ´ ἑαυτῆς ὑπόστασις ἦν. Πρώτη δὴ οὖσα αὕτη ἐνέργεια καὶ πρώτη νόησις οὐκ ἂν ἔχοι οὔτε ἐνέργειαν πρὸ αὐτῆς οὔτε νόησιν. Μεταβαίνων τοίνυν τις ἀπὸ ταύτης τῆς οὐσίας καὶ νοήσεως οὔτε ἐπὶ οὐσίαν ἥξει οὔτ´ ἐπὶ νόησιν, ἀλλ´ ἐπέκεινα ἥξει οὐσίας καὶ νοήσεως ἐπί τι θαυμαστόν, ὃ μήτε ἔχει ἐν αὐτῷ οὐσίαν μήτε νόησιν, ἀλλ´ ἔστιν ἔρημον αὐτὸ ἐφ´ ἑαυτοῦ τῶν ἐξ αὐτοῦ οὐδὲν δεόμενον. Οὐ γὰρ ἐνεργήσας πρότερον ἐγέννησεν ἐνέργειαν· ἤδη γὰρ ἂν ἦν, πρὶν γενέσθαι· οὐδὲ νοήσας ἐγέννησε νόησιν· ἤδη γὰρ ἂν νενοήκει, πρὶν γενέσθαι νόησιν. Ὅλως γὰρ ἡ νόησις, εἰ μὲν ἀγαθοῦ, χεῖρον αὐτοῦ· ὥστε οὐ τοῦ ἀγαθοῦ ἂν εἴη· λέγω δὲ οὐ τοῦ ἀγαθοῦ, οὐχ ὅτι μὴ ἔστι νοῆσαι τὸ ἀγαθόν — τοῦτο γὰρ ἔστω — ἀλλ´ ὅτι ἐν αὐτῷ τῷ ἀγαθῷ οὐκ ἂν εἴη νόησις· ἢ ἓν ἔσται ὁμοῦ τὸ ἀγαθὸν καὶ τὸ ἔλαττον αὐτοῦ, ἡ νόησις αὐτοῦ. Εἰ δὲ χεῖρον ἔσται, ὁμοῦ ἡ νόησις ἔσται καὶ ἡ οὐσία.

Εἰ δὲ κρεῖττον ἡ νόησις, τὸ νοητὸν χεῖρον ἔσται. Οὐ δὴ ἐν τῷ ἀγαθῷ ἡ νόησις, ἀλλὰ χεῖρον οὖσα καὶ διὰ τοῦτο τὸ ἀγαθὸν ἀξιωθεῖσα ἑτέρωθι ἂν εἴη αὐτοῦ, καθαρὸν ἐκεῖνο ὥσπερ τῶν ἄλλων καὶ αὐτῆς ἀφεῖσα. Καθαρὸν δὲ ὂν νοήσεως εἰλικρινῶς ἐστιν ὅ ἐστιν, οὐ παραποδιζόμενον τῇ νοήσει παρούσῃ, ὡς μὴ εἰλικρινὲς καὶ ἓν εἶναι. Εἰ δέ τις καὶ τοῦτο ἅμα νοοῦν καὶ νοούμενον ποιεῖ καὶ οὐσίαν καὶ νόησιν συνοῦσαν τῇ οὐσίᾳ καὶ οὕτως αὐτὸ νοοῦν θέλει ποιεῖν, ἄλλου δεήσεται καὶ τούτου πρὸ αὐτοῦ, ἐπείπερ ἡ ἐνέργεια καὶ ἡ νόησις ἢ ἄλλου ὑποκειμένου τελείωσις ἢ συνυπόστασις οὖσα πρὸ αὐτῆς καὶ αὐτὴ ἄλλην ἔχει φύσιν, ᾗ καὶ τὸ νοεῖν εἰκότως. Καὶ γὰρ ἔχει ὃ νοήσει, ὅτι ἄλλο πρὸ αὐτῆς· καὶ ὅταν αὐτὴ αὐτήν, οἷον καταμανθάνει ἃ ἔσχεν ἐκ τῆς ἄλλου θέας ἐν αὐτῇ. Ὧι δὲ μήτε τι ἄλλο πρὸ αὐτοῦ μήτε τι σύνεστιν αὐτῷ ἐξ ἄλλου, τί καὶ νοήσει ἢ πῶς ἑαυτόν; Τί γὰρ ἐζήτει ἢ τί ἐπόθει; Ἢ τὴν δύναμιν αὐτοῦ ὅση, ὡς ἐκτὸς οὔσης αὐτοῦ, καθὸ ἐνόει; Λέγω δέ, εἰ ἄλλη μὲν ἡ δύναμις αὐτοῦ, ἣν ἐμάνθανεν, ἄλλη δέ, ᾗ ἐμάνθανεν· εἰ δὲ μία, τί ζητεῖ;

XL. Que la pensée ne puisse convenir au Premier principe, c'est ce que savent ceux qui se sont élevés jusqu'à lui (147). Ajoutons cependant quelques raisons à ce que nous avons déjà dit (si toutefois la parole peut ici exprimer notre idée) : car il faut à la persuasion joindre une démonstration rigoureuse (148).

Remarquons d'abord que toute pensée est dans un sujet et provient d'un objet. Celle qui est unie à l'objet dont elle provient a pour sujet l'être auquel elle appartient; inhérente à lui, elle est son acte, elle complète sa puissance, sans cependant rien engendrer elle-même : car elle appartient au sujet seul dont elle est le complément. La Pensée qui est unie à l'Essence et qui la fait subsister ne saurait être dans l'objet dont elle provient : car étant en lui, elle n'eût rien engendré. Or, ayant la puissance d'engendrer, elle a engendré en elle-même (149) : elle a pour acte l'Essence et elle lui est unie. Ainsi la Pensée n'est pas une chose différente de l'Essence ; en tant que cette nature se pense elle-même, elle ne se pense pas comme étant une chose différente : car la seule multiplicité qu'il y ait en elle est celle qui résulte de la distinction logique du sujet intelligent et de l'objet intelligible, comme nous l'avons souvent montré. C'est là le premier acte qui a engendré une hypostase en constituant l'Essence ; et cet acte est l'image d'un principe si grand qu'il est devenu lui-même Essence. Si la Pensée appartenait au Bien au lieu d'en provenir, elle ne serait qu'un attribut, elle ne serait pas une hypostase en elle-même. Étant le premier acte et la première pensée, cette Pensée n'a ni acte ni pensée au-dessus d'elle. Donc, en s'élevant au-dessus de cette Essence et de cette Pensée, on ne rencontrera plus au delà une autre essence ni une autre pensée; mais on arrivera au Principe supérieur à l'essence et à la pensée, Principe admirable, qui n'a en lui ni pensée ni essence, qui habite solitaire eu lui-même et n'a nul besoin des choses qui procèdent de lui. Il n'a pas agi d'abord, puis engendré un acte [il n'a pas commencé par penser pour engendrer ensuite la Pensée] ; sinon, il aurait pensé avant que la Pensée fût née. En un mot la Pensée, étant la pensée du Bien, est au-dessous de lui, par conséquent elle ne lui appartient pas. Je dis : ne lui appartient pas, non que je nie que le Bien puisse être pensé (car je l'admets), mais parce que la Pensée ne saurait exister dans le Bien ; sinon, le Bien et ce qui est au-dessous du Bien (c'est-à-dire la pensée du Bien) ne feraient qu'un. Or, si le Bien est une chose inférieure, il sera à la fois la Pensée et l'Essence ; si au contraire le Bien est supérieur à la Pensée, il doit l'être également à l'Intelligible (150).

Puis donc que la Pensée n'existe pas dans le Bien, qu'elle est au contraire inférieure au Bien et qu'elle doit ainsi en vénérer la majesté, elle constitue un principe différent, et elle laisse le Bien pur et dégagé d'elle comme des autres choses. Indépendant delà Pensée, le Bien est sans mélange ce qu'il est. La présence de la Pensée ne l'empêche pas d'être pur et un. Si l'on suppose que le Bien est à la fois sujet pensant el objet pensé, Essence et Pensée unie à l'Essence, si on le fait ainsi se penser lui-même (151), il aura besoin d'une autre chose, et cette chose sera au-dessus de lui. Comme l'Acte et la Pensée sont le complément ou l'hypostase consubstantielle d'un autre sujet, la Pensée suppose au-dessus d'elle une autre nature à laquelle elle doit le pouvoir de penser : car pour que la Pensée pense quelque chose, il faut qu'elle ait quelque chose au-dessus d'elle. Quand elle se connaît elle-même, elle connaît ce qu'elle a reçu par la contemplation de cette autre nature. Quant à Celui qui n'a rien au-dessus de lui, qui ne tient rien d'un autre principe, que pourrait-il penser, et comment pourrait-il se penser lui-même? Que chercherait-il, et que souhaiterait-il? Voudrait-il connaître la grandeur de sa puissance? Mais elle lui serait extérieure par cela même qu'il la penserait : je dis extérieure, si la puissance qui connaissait en lui différait de celle qui serait connue; si au contraire les deux ne font qu'un, qu'a-t-il à chercher?
 

XLI. Κινδυνεύει γὰρ βοήθεια τὸ νοεῖν δεδόσθαι ταῖς φύσεσι ταῖς θειοτέραις μέν, ἐλάττοσι δὲ οὔσαις, καὶ οἷον αὐταῖς τυφλαῖς οὔσαις ὄμμα. Ὁ δ´ ὀφθαλμὸς τί ἂν δέοιτο τὸ ὂν ὁρᾶν φῶς αὐτὸς ὤν; Ὃ δ´ ἂν δέηται, δι´ ὀφθαλμοῦ σκότον ἔχων παρ´ αὐτῷ φῶς ζητεῖ. Εἰ οὖν φῶς τὸ νοεῖν, τὸ δὲ φῶς φῶς οὐ ζητεῖ, οὐκ ἂν ἐκείνη ἡ αὐγὴ φῶς μὴ ζητοῦσα ζητήσειε νοεῖν, οὐδὲ προσθήσει αὐτῇ τὸ νοεῖν· τί γὰρ καὶ ποιήσει; Ἢ τί προσθήσει δεόμενος καὶ αὐτὸς ὁ νοῦς, ἵνα νοῇ; Οὐκ αἰσθάνεται οὖν ἑαυτοῦ—οὐ γὰρ δεῖται—οὐδ´ ἔστι δύο, μᾶλλον 〈οὐ〉δὲ πλείω, αὐτός, ἡ νόησις —οὐ γὰρ δὴ ἡ νόησις αὐτός—δεῖ δὲ τρίτον καὶ τὸ νοούμενον εἶναι. Εἰ δὲ ταὐτὸν νοῦς, νόησις, νοητόν, πάντη ἓν γενόμενα ἀφανιεῖ αὐτὰ ἐν αὐτοῖς· διακριθέντα δὲ τῷ ἄλλο πάλιν αὖ οὐκ ἐκεῖνο ἔσται. Ἐατέον οὖν τὰ ἄλλα πάντη ἐπὶ φύσεως ἀρίστης οὐδεμιᾶς ἐπικουρίας δεομένης· ὃ γὰρ ἂν προσθῇς, ἠλάττωσας τῇ προσθήκῃ τὴν οὐδενὸς δεομένην. Ἡμῖν μὲν γὰρ ἡ νόησις καλόν, ὅτι ψυχὴ δεῖται νοῦν ἔχειν, καὶ νῷ, ὅτι τὸ εἶναι αὐτῷ ταὐτόν, καὶ ἡ νόησις πεποίηκεν αὐτόν·

συνεῖναι οὖν δεῖ τῇ νοήσει τοῦτον καὶ σύνεσιν αὐτοῦ λαμβάνειν ἀεί, ὅτι τοῦτο τοῦτο, ὅτι τὰ δύο ἕν· εἰ δ´ ἓν ἦν μόνον, ἤρκεσεν ἂν αὐτῷ καὶ οὐκ ἂν ἐδεήθη λαβεῖν. Ἐπεὶ καὶ τὸ «γνῶθι σαυτὸν» λέγεται τούτοις, οἳ διὰ τὸ πλῆθος ἑαυτῶν ἔργον ἔχουσι διαριθμεῖν ἑαυτοὺς καὶ μαθεῖν, ὅσα καὶ ποῖα ὄντες οὐ πάντα ἴσασιν ἢ οὐδέν, οὐδ´ ὅ τι ἄρχει οὐδὲ κατὰ τί αὐτοί. Εἰ δέ τί ἐστιν αὐτό, μειζόνως ἐστὶν ἢ κατὰ γνῶσιν καὶ νόησιν καὶ συναίσθησιν αὐτοῦ· ἐπεὶ οὐδὲ ἑαυτῷ οὐδέν ἐστιν· οὐδὲν γὰρ εἰσάγει εἰς αὐτόν, ἀλλὰ ἀρκεῖ αὐτό. Οὐ τοίνυν οὐδ´ ἀγαθὸν αὐτῷ, ἀλλὰ τοῖς ἄλλοις· ταῦτα γὰρ καὶ δεῖται αὐτοῦ, αὐτὸ δὲ οὐκ ἂν δέοιτο ἑαυτοῦ· γελοῖον γάρ· οὕτω γὰρ ἂν καὶ ἐνδεὲς ἦν αὐτοῦ. Οὐδὲ βλέπει δὴ ἑαυτό· δεῖ γάρ τι εἶναι καὶ γίνεσθαι αὐτῷ ἐκ τοῦ βλέπειν. Τούτων γὰρ ἁπάντων παρακεχώρηκε τοῖς μετ´ αὐτό, καὶ κινδυνεύει μηδὲν τῶν προσόντων τοῖς ἄλλοις ἐκείνῳ παρεῖναι, ὥσπερ οὐδὲ οὐσία· οὐ τοίνυν οὐδὲ τὸ νοεῖν, εἴπερ ἐνταῦθα ἡ οὐσία καὶ ὁμοῦ ἄμφω ἡ νόησις ἡ πρώτη καὶ κυρίως καὶ τὸ εἶναι. Διὸ οὔτε λόγος οὔτε αἴσθησις οὔτε ἐπιστήμη, ὅτι μηδὲν ἔστι κατηγορεῖν αὐτοῦ ὡς παρόν.

XLI. La pensée semble n'être qu'un secours accordé aux natures qui, tout en étant divines, ne tiennent cependant pas le premier rang; c'est un œil donné à des aveugles (152). Mais quel besoin l'œil aurait-il de voir l'être s'il était lui-même la lumière? Chercher la lumière est le propre de celui qui en a besoin parce qu'il ne trouve en lui-même que ténèbres (153). Puisque la pensée cherche la lumière, tandis que la lumière ne cherche pas la lumière, la nature première, ne cherchant pas la lumière [puisqu'elle est la lumière même], ne saurait chercher davantage la pensée [puisque c'est la pensée qui cherche la lumière] ; penser ne saurait donc lui convenir. Quelle utilité, quel avantage lui procurerait la pensée, qui elle-même a besoin d'aide pour penser? Le Bien n'a donc pas conscience de lui-même (il n'en a pas besoin) ; il n'est pas dualité, ou plutôt il n'est pas multiple comme la Pensée qui suppose [outre l'Intelligence] un troisième terme, savoir l'Intelligible. Si la Pensée, le Sujet pensant et l'Objet pensé sont absolument identiques, ils ne font plus qu'un et ils sont absolument indiscernables; s'ils sont distincts, ils diffèrent et ne peuvent plus être le Bien. Ainsi, il faut tout mettre de côté quand on songe à cette nature excellente (φύσις ἀρίστη), qui n'a besoin d'aucun secours. Quelle que soit la chose que vous attribuiez à cette nature, vous la diminuez d'autant, puisqu'elle n'a besoin de rien. Pour nous, au contraire, la pensée est une belle chose, parce que notre âme a besoin de l'Intelligence ; elle est également une belle chose pour l'Intelligence, parce que la Pensée est identique à l'Être, et que c'est elle qui a fait exister l'Intelligence.

Il faut donc que l'Intelligence soit unie à la Pensée, qu'elle ait toujours conscience d'elle-même, en sachant que chacun des deux éléments qui la constituent est identique à l'autre, que tous les deux ne font qu' un. Si elle était seulement unité, elle se suffirait à elle-même et n'aurait plus besoin de rien recevoir. Le précepte : Connais-toi lui-même, ne s'applique qu'aux natures qui, à cause de leur multiplicité, ont besoin de se rendre compte d'elles-mêmes, de savoir le nombre et la qualité des éléments qui les composent, parce qu'elles ne les connaissent pas complètement ou même pas du tout, qu'elles ignorent quelle puissance occupe en elles le premier rang et constitue leur essence (154). Mais s'il y a un principe qui soit un par lui-même, il est trop grand pour se connaître, pour se penser, pour avoir conscience de soi, parce qu'il n'est rien de déterminé même pour lui-même (155). Il ne reçoit rien en lui, il se suffit. Il est donc le Bien non pour lui-même, mais pour les autres natures : celles-ci ont en effet besoin du Bien, mais le Bien n'a pas besoin de lui-même; ce serait ridicule, et il se ferait ainsi défaut à lui-même. Il ne se regarde pas non plus lui-même : car, de ce regard, il y aurait, il naîtrait quelque chose pour lui. Il a laissé toutes ces choses aux êtres inférieurs, et rien de ce qui est en eux ne se trouve en lui : c'est ainsi qu'il n'est pas même essence. Il ne possède donc pas non plus la pensée, puisque la pensée est unie à l'essence, que la Pensée première et suprême existe en même temps que l'Essence. On ne peut donc pas [dit Platon (156) ] exprimer Dieu par la parole, en avoir la perception ni la science, puisqu'on ne peut en affirmer aucun attribut.

 

XLII. Ἀλλ´ ὅταν ἀπορῇς ἐν τῷ τοιούτῳ καὶ ζητῇς, ὅπου δεῖ ταῦτα θέσθαι, λογισμῷ ἐπ´ αὐτὰ στελλόμενος, ἀπόθου ταῦτα, ἃ νομίζεις σεμνὰ εἶναι, ἐν τοῖς δευτέροις, καὶ μήτε τὰ δεύτερα προστίθει τῷ πρώτῳ μήτε τὰ τρίτα τοῖς δευτέροις, ἀλλὰ τὰ δεύτερα περὶ τὸ πρῶτον τίθει καὶ τὰ τρίτα περὶ τὸ δεύτερον. Οὕτω γὰρ αὐτὰ ἕκαστα ἐάσεις, ὡς ἔχει, καὶ τὰ ὕστερα ἐξαρτήσεις ἐκείνων ὡς ἐκεῖνα περιθέοντα ἐφ´ ἑαυτῶν ὄντα. Διὸ καὶ ὀρθῶς καὶ ταύτῃ λέγεται περὶ τὸν πάντων βασιλέα πάντα ἐστὶ κἀκείνου ἕνεκα πάντα, τὰ πάντα ὄντα λέγοντος αὐτοῦ καὶ τὸ ἐκείνου ἕνεκα, ἐπειδὴ καὶ τοῦ εἶναι αἴτιος αὐτοῖς καὶ οἷον ὀρέγεται ἐκείνου ἑτέρου ὄντος τῶν πάντων καὶ οὐδὲν ἔχοντος, ὃ ἐκείνοις πάρεστιν· ἢ οὐκ ἂν εἴη ἔτι τὰ πάντα, εἴ τι ἐκείνῳ τῶν ἄλλων τῶν μετ´ αὐτὸν παρείη. Εἰ οὖν καὶ νοῦς τῶν πάντων, οὐδὲ νοῦς ἐκείνῳ. Αἴτιον δὲ λέγων πάντων καλῶν τὸ καλὸν ἐν τοῖς εἴδεσι φαίνεται τιθέμενος, αὐτὸ δὲ ὑπὲρ τὸ καλὸν πᾶν τοῦτο. Ταῦτα δὴ δεύτερα τιθεὶς εἰς 〈αὐτὰ〉 τὰ τρίτα φησὶν ἀνηρτῆσθαι τὰ μετὰ ταῦτα γενόμενα, καὶ περὶ τὰ τρίτα δὲ τιθεὶς εἶναι, δῆλον ὅτι τὰ γενόμενα ἐκ τῶν τρίτων, κόσμον τόνδε, εἰς ψυχήν. Ἀνηρτημένης δὲ ψυχῆς εἰς νοῦν καὶ νοῦ εἰς τἀγαθόν, οὕτω πάντα εἰς ἐκεῖνον διὰ μέσων, τῶν μὲν πλησίον, τῶν δὲ τοῖς πλησίον γειτονούντων, ἐσχάτην δ´ ἀπόστασιν τῶν αἰσθητῶν ἐχόντων εἰς ψυχὴν ἀνηρτημένων.

XLII, Quand vous êtes embarrassé à ce sujet, et que vous cherchez ce que vous devez faire de ces attributs auxquels le raisonnement vous amène, rejetez ce que vous regardez comme vénérable dans les choses du second ordre; n'attribuez ainsi au Premier rien de ce qui appartient aux choses du second ordre; n'attribuez pas non plus à celles du second ordre [à l'Intelligence] ce qui appartient à celles du troisième [à l'Ame] ; mais rapportez au Premier principe les choses du second ordre, et au second principe les choses du troisième ordre. C'est le vrai moyen de laisser chaque être garder sa nature, et de marquer en même temps le lien qui unit les choses inférieures aux choses supérieures, en montrant que les choses inférieures dépendent des supérieures, tandis que les supérieures demeurent en elles-mêmes. Voilà pourquoi Platon a eu raison de dire: «Toutes choses » sont autour du Roi de tout et existent à cause de lui (157) ; » toutes choses, c'est-à-dire : tous les êtres; toutes choses existent à cause de lui, c'est-à-dire : il est la cause de leur existence et l'objet de leur désir parce qu'il est d'une autre nature qu'elles, qu'il n'a en lui rien de ce qui se trouve en elles, puisqu'elles ne sauraient exister si le Premier possédait quelque attribut de ce qui lui est inférieur. Donc, si l'Intelligence est comprise dans ce qui est appelé toute choses, elle ne saurait appartenir au Premier. Quand Platon appelle Dieu la cause de toute beauté (158), il paraît placer le Beau dans les Idées, et le Bien au-dessus du Beau universel (159). Après avoir ainsi assigné le second rang aux Intelligibles, il fait dépendre de ceux-ci les choses du troisième ordre, qui ne viennent qu'après eux. Enfin, à ce qui occupe le troisième rang, à l'Ame universelle, il rapporte le monde qui en naît. Comme l'Ame dépend de l'Intelligence, et que l'Intelligence dépend du Bien, toutes choses dépendent ainsi du Bien à des degrés divers, immédiatement ou médiatement. A cet égard, les choses lupins éloignées du Bien sont les choses sensibles, lesquelles se rapportent à l'Ame.

 

NOTES

LIVRE SEPTIÈME.

DE LA MULTITUDE DES IDEES.  DU BIEN

Ce livre est le trente-huitième dans l'ordre chronologique.

Les paragraphes 32, 37, 41, 42, ont été traduits par M. Barthélémy Sainl-Hilaire : De l'École d'Alexandrie, p. 281-289.

Dans ce livre, Plotin s'est proposé de résoudre toutes les questions que soulève la doctrine de Platon sur les idées et de montrer en même temps quel est le lien qui rattache les idées elles-mêmes au Bien absolu (a). Les dialogues où il a le plus puisé sont le Timée (Voy. p. 407, 409, 414, 429, 431, 433, 462, notes), le Philèbe (b) (p. 457, 466-467), le Phèdre (p. 428, 452, 470), la République (p. 442, 460, 464, 477, 482, 484, 487, 489), le Banquet (p. 451, 460, 467-470, 473, 477-478), l'Alcibiade (p. 420).

Mais PIotin ne s'est pas borné à commenter servilement la doctrine du maître. Il s'est appliqué à la mettre à l'abri des objections d'Aristote en la complélant et en la réformant à l'aide des emprunts qu'il a faits à l'auteur même de la Métaphysique. Il ne s'est pas seulement inspiré du système de ce philosophe; il a reproduit même quelquesunes de ses formules les plus importantes, ainsi que nous l'avons indiqué dans les notes (p. 410-412,  416-420 (c)). — Quant à la théorie d'Aristote sur le bien, Plotin la combat le plus souvent (p. 447-450). Cependant la gradation qu'il établit entre les biens est conforme à la marche que suit Aristote dans le livre XII de sa Métaphysique pour s'élever progressivement au premier principe, au souverain Bien (p. 458) ; mais, pour notre auteur, le souverain Bien est supérieur à l'Intelligence même (p. 479-481).

On retrouve dans le morceau suivant d'Ibn-Gébirol le principe important développé ci-dessus par Plotin (p. 410-415) que, dans le inonde intelligible, chaque essence ou idée contient sa raison d'être :

« Les substances simples n'ont pas de pourquoi en dehors de leur essence; mais elles ont un pourquoi qui est identique avec leur essence: car elles sont simples et unes. C'est pourquoi on dit de la matière première, de la forme première, et en général de toutrs les substances simples, que leur être n'a pas de cause, si ce n'est le Très-Haut, qui les a créées... Je dirai que l'être, depuis son extrémité supérieure jusqu'à son extrémité inférieure, occupe quatre degrés différents qui sont le que, le quoi, le comment et le pourquoi. Le degré supérieur est le que qui n'a ni quoi, ni comment, ni pourquoi, et c'est l'un véritable, le Très-Haut; au-dessous est le quoi qui n'a ni comment ni pourquoi, comme l'Intellect; audessous est le quoi qui a le comment et le pourquoi, comme la nature et ce qui naît. » (Ibn-Gébirol, Source de la Vie, liv. V; trad. de M. Munk, Mélanges de philosophie juive et arabe, p. 111.)

Ce livre de Plotin a été longuement cité par Jean Philopon (Voy. p. 410, note) et par Nicéphore Grégoras (Voy. p.481, note).

Michel Psellus, dans la compilation intitulée Διδασκαλία παντοδαπή (§ 27), cite en ces termes les paragraphes 3-6 (p. 414-423) : « Pour »Plotin, il y a trois hommes : l'homme intellectuel, qui est un ; l'homme rationnel, qui est doué de trois facultés; l'homme sensitlif, qui est multiple et composé de plusieurs principes. Nous sommes le principe qui raisonne et conlcmple : car nous et l'âme nous ne faisons qu'une seule et même chose. »

Le P. Thomassin a exposé quelques-unes des idées fondamentales de ce livre dans ses Dogmata theologica, comme ou peut le voir par les notes (p. 452-453, 470, 472).

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(a) Voy. ci-dessus le résumé de la doctrine de Plotin sur les idées, p. 575-576.

(b) On peut rapprocher de l'interprétation que Plotin donne de la théorie exposée par Platon dans le Philèbe le passage suivant d'Olympiodore : « Qui a raison de Porphyre qui préfère la vie de l'intelligence, ou de Jamblique qui préfère la vie mélangée [le mélange de la vie intellectuelle et de la vie sensible] ? Ils ne sont pas au fond en désaccord. Car Porphyre entend par intelligence l'intelligence parfaite, et par plaisir le plaisir irrationnel. Jamblique au contraire entend par plaisir le plaisir conformée l'intelligente et par l'intelligence la simple faculté de connaître. C'est la la pensée de Platon. De cette manière Porphyre veut bien de la vie mélangée (car c'est la vie spéculative), qui jouit d'elle même et des choses qui lui sont supérieures, mais surtout de ses opérations qui s'accomplissent sans obstacle. Il appelle cette vie intellectuelle à cause de son caractère dominant. » (Commentaire du Philébe, p. 239; dans le Philèbe de Platon publié par Stallbaum.)

(c) Voy. aussi sur ce point le passage de M. Ravaisson que nous avons cité dans notre tome I, p. 321, note 2.



 

(76)  Plotin fait ici allusion à un passage de Platon : « Ce n'est pas ce qui est nôtre que nous aimons, je pense ; à moins que l'on n'appelle sien et personnel tout ce qui est bon, et étranger tout ce qui est mauvais: car ce qu'aiment les hommes, c'est uniquement le bon. » (Banquet, trad. de M. Cousin, t. VI, p. 305.)

(77)  Voy. Enn. IV, liv. v, § 7 ; t. II. p. 422.

(78) — Le P. Thomassin cite ce passage et le commente en ces termes: « Quin imo quidquid amant animae:, seu mentem, seu sapientiam, etc., ut bona amant, hoc est, ut superno summi boni splendore superfusa. Ut enim quœcunque videntur, non suo tantum nativo colore aut lumine, sed super affulgente solari luce colltistrari opus est, ita quaecunque amantur infuso supcrne summi Boni fulgore vestiri et venustari necesse est, ut non tam ipsa quam emicans in ipsis summum Bonum ametur; anima autem summi olim Boni deliciis inebriata, veterisque nunc subobscure memor et cupidissima voluptatis, arcano instinctu venatur ejusdem Boni sublucentes in rebus imis radios, et, ubicunque invenit, allambit et osculatur. » (Dogmala theologica, t. I, p. 3.)

(79) Voy. Enn. I, liv. vi ; t. I, p. 98.

(80) Les expressions de Plotin rappellent ici un célèbre passage de Platon: « C'est ici qu'en voulait venir tout ce discours sur la quatrième espèce de délire. L'homme, en apercevant la beauté sur la terre, se ressouvient de la beauté véritable, prend des ailes et brûle de s'envoler vers elle; mais dans son impuissance il lève, comme l'oiseau, ses yeux vers le ciel ; et négligeant les affaires d'ici-bas, il passe pour un insensé. » (Phèdre, trad. de M. Cousin, t. VI, p. 56.)

(81) Le P. Thomassin cite ce passage et le commente en ces termes : « In tam luculento contextu praestantissimi philosophi non possum non aliqua annotare, quae perfunctorie legi et praeteriri non debent. Ex illius ergo sententia, 1° exislit quodlibet hoc ipsum quod est in se ipso ; ut amabile autem fiat, operce pretium est aspergi ei aliquod superne lumen a summo Bono, quod (si licentia fiat hujus vocis) omnium amabilissimum ipsaque amabilitas est. 2° Quin imo, ut quod pulchrum a summi Pulchri pulchritudine, et amabile a summo Bono factum est ametur, necessarium adhuc est ut amanti amor ipse a summo Bono infundatur. 3° Summi ergo Boni patles sunt et pulchris omnibus radios illos appingere, quibus amabilia fiant, et amores praeterea ipsos aspirare omnibus pulchri amatoribus. Quo non video quid pulchrius, quid magnificentius dici possit ad summi Boni laudem ; per quod naturœ  omnes, pro suo quaeque modo et amabiles et amantes, aureis his beatisque inter se vinculis connectuntur. 4° Quin nec prima Mens,quanquam ipsa sit Pulchritudo, amaretur, nisi ad ejus amorem animae nationales a summo Bono attraherentur, quod et Verbum ipsum in carne assumpta conflrmavit : Nemo venit ad me, nisi Pater qui misit me, traxerit eum ; trahit autem Pater ad Verbum non aliis vinculis quam charitutis. 5° In inferioribus vero pulchris quum defigilur amor, non tain corpus, non animus, non ars, non virtus tantopere diligitur, quam lumen ilhid summi Boni et splendor summi Pulchri quo rutilant. 6° Fastidium vero quo afficiuntur mox imorum pulchrorum amatores hinc oritur, quod meminit aut quod attendit tandem animus superiora his esse pulchra alia magis amabilia, et supra omnia pulchra ipsum Pulchriludinem, et denique summœ ipsius Pulchritudinis parentem, ipsum Bonum.» (Dogmata theologica, t. I, p. 167-168.)

(82) Cette phrase a été développée en ces termes par Salluste (Des Dieux et du Monde, ch. v) : « Si les êtres existaient seulement et qu'ils ne fussent pas bons, cette raison serait vraie. Mais si c'est par la bonté que les ëlres existent, si de plus ils participent au bien, il faut absolument que le Premier soit à la fois et supérieur à l'essence et bon par excellence. »

(83) Voy. une expression analogue ci-dessus Enn. V, liv. i,  §  2, p. 5, note 2.

(84 Voy. ci-après § 25, p. 458.

(85) Voy. ci-après § 27, p. 460.

(86)  Voy. ci-après § 29, p. 463.

(87) Voy. ci-après § 32, p. 469.

(88) II y a dans le texte : τί δὴ ἀποσεμνύνετε τοῖς ὀνόμασιν, ἆνω καὶ κάτω ζωὴν ἀγαθὸν λέγοντες. Ficin traduit: « Quidnam, o viri, dicet, sursum dcorsumque spectando rem vestram exornatis? Vitam bonum dicitis, etc » Creuzer rend cette phrase avec plus d'exactilude: «Vos, o viri, quid igitur magnifice celebratis verbis ultroque citroque vitam bonum dictitantes? » Nous avons suivi l'interprétation de Creuzer.

(89) C'est la théorie développée par Philèbe dans le dialogue qui porte ce nom : « Philèbe soutenait que le plaisir est la fin légitime de tous les êtres animés, le but auquel ils doivent tendre; qu'il est le bien de tous, et que ces deux mots, bon et agréable, apparitiennent, à parler exactement, à une seule et même idée. Socrate, au contraire, prétendait que cela n'est point; que, comme le bon et l'agréable sont deux noms différents, ils expriment aussi deux choses d'une nature différente, et que la sagesse participe davantage à la condition du bien que le plaisir. » (Platon, Philèbe; trad. de M. Cousin, t. II, p. 447.) Voy. aussi le Gorgias.

(90) « Ne sommes-nous pas convenus et ne convenons-nous pas encore que la nature du bien a l'avantage sur toute autre chose en ce point que l'être animé qui en a la possession pleine, entière, non interrompue pendant toute sa vie, n'a plus besoin d'aucune autre chose et que le bien lui suffît parfaitement? N'avons-nous pas tâché d'établir deux espèces de vie absolument distinctes l'une de l'autre, où régnât, d'une part, le plaisir sans aucun mélange de sagesse; et, de l'autre, la sagesse, sans aucun mélange de plaisir? L'une ou l'autre de ces conditions a-t-elle paru suffisante à aucun de nous?... Ainsi ni le plaisir ni la sagesse ne sont le bien parfait, le bien désirable pour tous, le souverain bien... La raison nous a fait connaître qu'il ne faut pas chercher le bien dans une vie sans mélange, mais dans celle qui est mélangée [de plaisir et de sagesse]. » (Platon, Philèbe; trad. de M. Cousin, t. II, p. 448-450.)

(91)  Aristote dit également: «L'objet du désir, c'est ce qui paraît beau, et l'objet premier de lu volonté, c'esi ce qui est beau. Nous désirons une cliose parce qu'elle nous sembla bonne, plutôt qu'elle ne nous semble telle parce que nous la désirons. » (Aristote. Métaphysique, liv. XII, ch. 7; trad. de MM. Pierron et Zévort, t. Il, p. 231.)

(92)  Cette gradation est conforme à la marche que suit Aristote dans le livre XII de sa Métaphysique pour s'élever progressivement au premier principe, au souverain Bien.

(93) Celte pensée parait empruntée à Platon: « Lorsqu'il s'agit du bien, les apparences ne satisfont personne, et l'on s'attache à trouver quelque chose de réel sans se soucier de l'apparence.  » (République, liv. VI; trad. de H. Cousin, t. X, p. 49.)

(94) Voy. Enn. I, liv. ιι, § 2; t. I, p. 54.

(95) Plotin fait ici allusion au proverbe ὁμοίῳ ἀεὶ πελάζει. Voy. Platon, Banquet, p. 195, éd. H. Etienne.

(96)  Voy. sur ce point ci-dessus § 17, p. 439.

(97) Voy. Platon, Gorgias, p. 507, éd. H. Etienne.

(98)  Nous lisons avec Kirchhoff : τὸ ἀγαθὸν ἑαυτῷ.

(99)   Voy. Enn. i, liv. viii, § 5; l. I, p. 124.

(100)   Cette expression rappelle une autre expression analogue employée par Platon dans le Timée (p. 52, éd. H. Etienne) : « Cette troisième espèce est à peine connue d'une manière certaine ; nous ne faisons que l'entrevoir comme dans un songe. »

(101)  Voy. Enn. I, liv. viii,  § 8; t.1, p. 129.

(102)  Voy. ci-après § 32, p. 469.

(103) « Ce bien que toute âme poursuit, en vue duquel elle fait tout, ce bien dont elle soupçonne l'existence, mais avec beaucoup d'incertitude, et dans l'impuissance de comprendre nettement ce qu'il est et d'y croire de cette foi inébranlable qu'elle a en d'autres choses, d'où il résulte que toutes ces autres choses qui pourraient lui servir sont comme perdues pour elle; etc.» (Platon, République, liv. VI; trad. de M. Cousin, t. X, p. 49.)

(104) « Le Fils a une parfaite analogie avec le Père. Ce que le Bien est dans la sphère intelligible, par rapport à l'Intelligence et à ses objets, le soleil l'est dans la sphère visible, par rapport à la vue et à ses objets... Quelque belles que soient la science et la vérité, tu ne le tromperas pas en pensant que l'idée du Bien en est distincte et les surpasse en beauté. » (Platon, ibid.; trad. fr., p. 55.)

(105)  Voy. ci-dessus § 25, p. 457.

(106) Voy. Enn. III. liv. v, § 9;  t. II, p. 120.

(107) « Toute chose où » nous ne ferons pas entrer la vérité n'existera jamais et n'a jamais existé d'une manière réelle Dans tout mélange, quel qu'il soit, et de quelque manière qu'il soit formé, si la mesure et la proportion ne s'y rencontrent, c'est une nécessité que les choses dont il est composé, et que le mélange lui-même tout le premier, » périssent. » (Platon, Philèbe, trad. de M. Cousin, I. Il, p 459-461.

(108) « L'essence du bien nous est donc échappée, el s'est allée jeter dans celle du beau: car en toute chose la mesure et la proportion constituent la beauté comme la vertu... Mais nous tirons dit aussi que la vérité entrait avec elles dans le mélange. Par conséquent, si  nous ne pouvons saisir le bien sous une seule idée, saisissons-le sous trois idées, celles de la beauté, de la proportion, de la vérité; et disons que ces trois choses réunies sont la véritable cause de l'excellence de ce mélange, et que cette cause étant bonne, c'est par elle que le mélange est bon. » (Platon, Philèbe, trad. dn M. Cousin, t. Il, p. 461.)

(109)  Plotin paraît faire allusion au passage suivant de Platon : « Il faut que l'amour se traite comme la philosophie et la vertu.... ... Si l'amant est véritablement capable d'inspirer la sagesse et la vertu à ce qu'il aime, et que l'aimé ait un véritable désir de se faire instruire ; si, dis-je, toutes ces conditions se rencontrent, c'est alors uniquement qu'il est honnête de se donnera qui nous  aime. » (Banquet, trad, de M. Cousin, t. VI, p. 262.)

(110)  Voy. Enn. l, liv. vi, § 5; t. I, p. 106.

(111)  Voy. Enn. I, liv. vi, §  7;  t. I, p. 108.

(112) Ce passage rappelle ces lignes de Platon: « Lancé sur l'océan de la beauté, et tout entier à ce spectacle, il enfante avec une inépuisable fécondité les pensées et les discours les plus magnifiques et les plus sublimes de la philosophie ; jusqu'à ce que, grandi et affermi dans ces régions supérieures, il n'aperçoive plus qu'une science, celle du beau. » (Banquet, trad. de M. Cousin, t. VI, p. 815.)

(113)  « Seule la beauté a reçu en partage d'élre à la fois la chose la plus manifeste comme la plus aimable. » (Platon, Phèdre, trad. de M. Cousin, l. VI, p. 58.) — Voy. Enn. I, liv. vi, § 8; t. I, p. HO.

(114) Cette phrase rappelle celte expression de Platon : « Dès que la fleur de la beauté qu'il aimait est pas» sèe, vous le voyez qui s'envole ailleurs. » (Banquet, trad. de M. Cousin, t. VI, p. 261.)

(115) Voy. Enn. I, liv. vi, § 9;  t. I, p. 112-113. Ce passage de Plotin est cité et commenté par le P. Thomassin, Dogmata theologica, 1.1, p. 168.

(116) Voy. Enn. I, liv. vi, § 8; t. I, p. 110.

(117) Ficin nous paraît n'avoir pas bien compris cette phrase.

(118)  II y a dans le grec : ὅτι τοῦτο τὸ ὄντως. Nous sous-rntendons κὰλον après τὸ ὄντως, comme il y a dix lignes plus loin. Ficin traduit d'une manière inexacte : « Ratio vero dictat hoc esse revera nobis amandum. » Creuzer s'est contenté de mettre les mots revera nobis amandum entre crochets sans rétablir le vrai sens.

(119) Ce passage est cité par le P. Thomassin, qui le commente en ces termes : « Informitate seu abdicatione formarum [mens fruitur summo Bono], qua fit ut ipsi Uni summo summeque informi, formas nempe largienti et nullam in se habenti, assimiletur et adaptetur mens, et permisceatur, et informis ab informi quodam modo informetur. Ut igitur Deus, quia super omnes formas est, ideo informis est ; ita anima informis evadat necesse est ut super omnia sit, eique tum, qui super omnia est, informi per suam informitatem ita coaptetur, ut unum cum ipso evadat. Non ergo exteriores tantum formœ beatae animae exuendœ sunt, sed et suae et innatœ, et ipsa sibi abscindenda et excutienda est, ut jam nec moveatur, nec vivat, nec anima sit, nec intellectus, nihilque horum sit, quia et Deus nihil horum est; suum itaque esse formatum abdicabit, ut esse divino et superessentiali informitate posthac induatur et potiatur. » (Dogmata theologica, t. I, p. 336).

(120) « Quelle ne serait pas la destinée d'un mortel à qui il serait donné de contempler le beau sans mélange, dans sa pureté et sa simplicité, non plus revêtu de chairs et de couleurs humaines, et de tous ces vains agréments condamnés à périr, à qui il serait donné de voir face à face, sous sa forme unique, la beauté  divine! » (Platon, Banquet, trad. de M. Cousin, t. VI, p. 317.)

(121) « Pour nous, mes enfants, nous croyons que la vie présente n'est rien ; nous ne regardons comme un bien aucune des choses dont l'utililé se borne à cette vie. L'éclat de la naissance, la force du corps, la beauté, la taille, les honneurs, l'empire même, (nul ce qu'il y a de plus grand dans ce monde nous paraît peu désirable; nous n'envions pas le bonheur de ceux qui possèdent ces avantages, mais nous portons plus loin nos espérances, et dans toutes nos actions nous avons pour but une autre vie. » (S. Basile, Discours aux jeunes gens sur la Lecture des auteurs profanes, § 3.)

(122)  Le palais est le monde intelligible; les statues figurent les idées, et le maître, c'est Dieu.

(123)  Voy. Enn. III, liv. v, § 9;  t. II, p. 119.

(124) Ce passage est cité par le P. Thomassin, qui le commente en ces termes: « Tactu quodam arcano et intestinο praesentissimum et intimis medullis animœ incubantem Deum contrectamus; sed hujus contaclus incorporet, imo divini, occultissima disciplina est, et experiendo magis quam disserendo comprobanda. Mens enim ut nullo intermedio manat a summo principe Deo, ejusque manu, ut ita dicam, opifice contingitur et tractatur et formatur;  ita et ipsa, quoniam contactas neccssario reciprocus est, sentit illum et tangit, si modo nullo rerum exteriorum amoris visco inhœrentium quasi cortice obvolvatur. » (Dogmata theologica, t.1, p. 335.)

(125) « Tu m'as souvent entendu dire que l'idée du bien est l'objet de la plus sublime des connaissances (ῆ τοῦ ἀγαθοῦ ἐδέα μέγιστον μάθημα)... C'est là, tu le sais bien, tout ce que j'ai à te dire maintenant, en ajoutant que nous ne connaissons pas suffisamment cette idée, et que, si nous ne la connaissons pas, il ne nous servira de rien de savoir tout le reste ; de même que, sans la possession du bien, celle de toute autre chose nous est inutile. » (Platon, République, liv. VI ; trad. de M. Cousin, t. X, p. 47.)

(126 Voy. Enn. III, liv. iii, § 6; t. II, p. 84-85.

(127) Voy. ci-dessus, § 32, p. 469.

(128) Voy. ci-dessus, § 18, p. 445.

(129) « Le vrai chemin de l'amour, qu'on l'ait trouvé soi-même ou qu'on y soit guidé par un autre, c'est de commencer parles beautés d'ici-bas, et, les yeux attachés sur la beauté suprême, de s'y élever sans cesse en passant pour ainsi dire par tous les degrés de l'échelle, d'un seul beau corps à deux, de deux à tous les autres, des beaux corps aux beaux sentiments, des beaux sentiments aux belles connaissances, jusqu'à ce que, de connaissances eu connaissances, on arrive à la connaissance par excellence, qui n'a d'autre objet que le beau lui-même, et qu'on finisse par le connaître tel qu'il est en soi. » (Platon, Banquet, trad. de M. Cousin, t. VI, p. 317.)

(130) Πορεύουσι δὲ καθάρσαις πρὸς αὐτὸ, καὶ ἀρεταὶ καὶ  κοσμήσεις, καὶ τοῦ νοητοῦ ἐπιβάσεις, καὶ ἐπ' αὐτοῦ ἰδρύσεις, καὶ τῶν ἐκεῖ ἑστιάσεις. Au lieu d'ἀρεταί, que portent plusieurs manuscrits et que M. Kirchhoff garde avec raison, Creuzer a itroduit dans son texte ἀραίτε, se fondant sur ce que la traduction de Ficin porte precibus. Celle correction est tout à fait inadmissible pour qui connaît un peu la doctrine de Plotin. Que l'on se reporte au livre Des Vertus : on y retrouvera les degrés indiqués ici par Plotin; on y verra que les vertus purifient l'âme, l'ornent en lui donnant la forme du bien, l'élèvent à la contemplation des essences que possède l'intelligence et l'y unissent intimement (Enn. l, liv. ii, § 4 et § 6; t. I, p. 66-57 et p. 60). Nulle part il n'est question de la prière. Voy. encore ci-après liv. ix, § 11. Il est nécessaire de comparer et: dernier passage avec la phrase que nous examinons, parce qu'ici Plotin fait évidemment allusion aux divers degrés de l'initiation, comme Platon le fait lui-méme dans le passage suivant : « Celui qui dans les mystères de l'amour s'est avancé jusqu'au point où nous en sommes par une contemplation progressive et bien conduite, parvenu au dernier degré de l'intuition, verra tout à coup apparaître une beauté merveilleuse, celle qui est la fin de tous ses travaux précédents. » (Banquet, trad. de M. Cousin, t. VI, p. 316.)

(131)  Cette discussion est dirigée contre Aristote : « L'Intelligence est, ce semble, la plus divine des choses que nous connaissons. Mais pour être telle en effet, quel doit être son élat habituel ? Il y a là des difficultés. Si elle ne pensait rien, si elle était comme un homme endormi, où serait sa dignité? Et si elle pense, mais que sa pensée dépende d'un autre principe, son essence n'étant plus alors la pensée, mais un simple pouvoir de penser, elle ne saurait être l'essence la meilleure : car ce qui lui donne son prix, c'esl le penser. Enfin, que son essence suit l'intelligence, ou qu'elle soil la pensée, que pense-t-elle? car, ou elle se pense elle-même, ou bien elle pense quelque autre objet. Et si elle pense un aulre objet, ou c'est toujours le même, ou son objet varie. Importe-t-il donc, oui ou non, que l'objet du sa pensée soit le Bien, ou la première chose venue? ou plutôt ne serait-il pas absurde que telles et telles choses fussent l'objet de sa pensée? Ainsi il est clair qu'elle pense ce qu'il y a de plus divin et de plus excellent, et qu'elle ne change pas d'objet. » (Métaphysique, liv. XII, ch. 9 ; trad. de MM. Pierron et Zévorl, I. II, p. 233.) . encore ci-dessus Enn, V, liv. i, § 9 ; p. 21.

(132) « La pensée en soi est la pensée de ce qui est en soi le meilleur, et la pensée par excellence est la pensée de ce qui est le Bien par excellence, etc. » (Aristote, Métaphysique, liv. XII, en. 7; trad. IV., p. 223.)

(133) « La contemplation est la jouissance suprême et le souverain bonheur. Si Dieu jouit éternellement de cette félicité que nous ne connaissons que par instants, il est digne de notre admiration, etc. » (Aristote, ibid.)

(134) « II y a donc identité entre l'intelligence et l'intelligible : car la faculté de percevoir l'intelligible et l'essence, voilà l'intelligence; et l'actualité de l'intelligence, c'est la possession de l'intelligible... La vie est en Dieu : car l'action de l'intelligence est une vie, et Dieu est l'actualité même de l'intelligence ; cette actualité prise en soi, telle est sa vie parfaite et éternelle. Aussi appelons-nous Dieu un animal éternel, parfait. La vie et la durée continue et éternelle appartiennent donc à Dieu : car cela même, c'est Dieu. » (Aristote, ibid.)

(135) « La pensée éternelle, qui saisit aussi son objet [le Bien] dans un instant indivisible, se pense elle-même durant toute l'éternité. » (Aristote, Métaphysique, liv. XII, en. 9 ; trad. fr.. t. 11, p. 235.)

(136)  Voy. Enn. IV, liv. vi, § 3; t. II, p. 430. Ce passage est cité par Nicéphore Grégoras, Histoire de Constantinople, liv. XXII, p. 688, éd. de Paris.

(137) Voy. le passage cité ci-dessus, p. 480,  note 3.

(138)  « Le principe des êtres, l'être premier, n'est, selon nous, susceptible d'aucun mouvement, ni essentiel, ni accidentel, et c'est lui qui imprime le mouvement premier, mouvement éternel et unique. » (Aristote, Métaphysique, liv. XII, ch. 8; trad. fr., t. II, p. 226.)

(139)  Nous lisons : διὸ ὑπὲρ νοῦν, que Creuzer propose dans ses notes (t. III, p. 395), au lieu de : διόπερ νοῦν, dont le sens est en contradiction avec tout ce passage. Cette phrase est citée en abrégé par Nicéphore Grégoras, Histoire de Constantinople, liv. XXII, p. 552.

(140) « De même tu peux dire que les êtres intelligibles ne tiennent pas seulement du bien ce qui les rend intelligibles, mais encore leur être et leur essence, quoique le bien lui-même ne soit pas essence, mais quelque chose fort au dessus de l'essence en dignité et en puissance. » (Platon, République, liv. VI; trad. de M. Cousin, t. X, p. 57.)

(141) Voy. le passage d'Aristote cité ci-dessus, p. 480, note 3.

(142) Sur la Différence et l'Identité considérées comme genres de l'Être intelligible, Voy. ci-dessus, liv. II, §8, p, 217-219.

(143) Voy. ci-dessus Enn. V, liv. iii, § 10. p. 50.

(144)  Voy. ci-dessus liv. ii, § 7, p. 215-216.

(145)  Voy. ci-dessus Enn. V, liv. iii, § 11, p. 51.

(146) Plotin ne cite pas ici Platon, mais se borne à faire allusion au passage de la République que nous avons cité ci-dessus, p. 482, note 1

(147)  Voy. la même pensée, Enn. III, liv. ix, n° 6; t. II, p. 245.

(148) Voy. la même pensée ci-dessus, liv. v, § 11, p. 359.

(149) Ficin commente ce passage en ces termes : « Actionem omnem et alicujus existere et versari circa aliquid aliud Plotinus arbitratur; mox intelligentiam esse vult actionem; deinde essentiam existimat actionis et intelligentiœ fundamentum. Merito igitur aclionem, intelligentiam Principio negat, quod quidem neque subest actui, neque circa aliud ullo modo versatur. »

(150) Voy. ci-dessus Enn. V, liv. iii, § 13, p. 55.

(151) Ceci se rapporte à l'opinion d'Aristote. Voy. ci-dessus, p. 480, note 3.

(152)  Plotin fait ici allusion aux lignes suivantes de Platon : « De tous les organes de nos sens, l'œil est, je crois, celui qui tient le plus du soleil. La faculté qu'il a de voir, ne la possède-t-il pas comme une émanation dont le soleil est la source? Et le soleil, qui n'est pas la vue, mais qui en est le principe, est-il aperçu par elle?... Apprends-le, c'est le soleil que je veux dire quand je parle de la production du bien. Le fils a une parfaite analogie avec le père. Ce que le bien est dans la sphère intelligible, par rapport à l'intelligence et à ses objets, le soleil l'est dans la sphère visible, par rapport à la vue et à ses objets. » (République, liv. VI, trad. de M. Cousin, t. X, p. 65.)

(153)  « Quand l'âme fixe ses regards sur ce qui est éclairé par la vérité et par l'être, elle comprend et connaît; elle montre qu'elle est douée d'intelligence. Mais lorsqu'elle  tourne son regard sur ce qui est mêlé d'obscurité, sur ce qui naît et périt, sa vue se trouble et s'obscurcit, elle n'a plus que des opinions, et passe sans cesse de l'une à l'autre. Tiens donc pour certain que ce qui répand sur les objets de la connaissance la lumière de la vérité, ce qui donne à l'âme qui connaît la faculté de connaître, c'est l'idée du bien. » (Platon, ibid.; tr. fr., p. 56.)

(154) Voy. Enn. IV, liv. iii, § 1; t. II, p. 262.

(155)  « Si quis ex nobis quœrat quid inter utriusque philosophi doclrinam intersit, quum Plotinus Plutonem servili fere modo videatur sectari, respondere possumus in maximo illo placitorum consensu etiam discrimen esse maximum : nam quum et Plato et alii omnes philosophi id potissimum spectassent ut se ipsi recte cognoscerent, Plotinus id tum demumfieri rite monuit, si Deum studeamus cognoscere. Itaque verc dicere possumus Platonem docuisse quomodo divinœ rationes ubique in mundo appareant, Plotinum vero, quomodo omnia in Deo sint; et quum Plato praecepisset ut secundum Deum hommes viverent, Plotinus eos in Deo vivere jussit. » (Steinharl, Meletetnata plotiniana, p. 22.)

(156) Voy, le passage de Platon cité ci-dessus, p. 482, note 1.

(157) Voy. le passage de Platon cité ci-dessus, p. 18, note 1.Ce passage est longuement commenté par Proclus, Théologie selon Platon II, 4, p. 103.

(158) Voy. ibid.

(159) Voy. Enn. l. liv. vi, fin.