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Les flamines

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En second lieu, aux deux prêtres de Jupiter et de Mars, il en ajouta un troisième pour Romulus, et l'appela flamine Quirinal. (Plutarque, vie de Numa)

C’est le nom donné à tout prêtre romain qui est consacré au service d'un dieu particulier. Cicéron dit dans son de legibus : DIVISQUE ALIIS ALII SACERDOTES, OMNIBUS PONTIFICES, SINGULIS FLAMINES SUNTO. Ils ont comme épithète la distinction de la divinité qu’ils servent (Horum singuli cognomina habent ab eo deo quoi sacra faciunt ). Les plus important sont ceux qui sont attachés à Diiovis, à Mars et à Quirinus : le Flamen Dialis, le Flamen Martialis et le Flamen Quirinalis. Plutarque dit que les deux premiers sont créés par Romulus mais la plupart des auteurs conviennent que c’est Numa qui les a créés tous les trois en créant une religion d’Etat. Par la suite le nombre monte jusque quinze: les trois flamines originaux sont toujours choisis chez les patriciens et s’appellent maiores; les autres sont plébéiens et appelés minores. Deux lignes rudimentaires d'Ennius donnent les noms de six de ces derniers, désignés, dit le poète, par Numa, 

Volturnalem, Palatualem, Furinalem,
Floralemque, Falacrem et Pomonalem fecit
Hic idem .....

auxquel on peut ajouter le Flamen Volcanalis et le Flamen Carmentalis. On trouve dans des livres la mention du Virbialis, du Laurentialis, du Lavinialis et du Lucullaris, qui complètent la liste; mais rien ne prouve que ces quatre prêtres sont des prêtres romains et pas simplement des prêtres provinciaux.  

2. Le grand pontife Métellus, voyant Postumius qui était à la fois consul et flamine de Mars, prêt à partir pour faire la guerre en Afrique, ne le laissa pas s'éloigner du sanctuaire et, par la menace d'une amende, l'empêcha de sortir de Rome.  (Valère-Maxime, I, I, 2)

Il est généralement établi, sur l'autorité d'Aulu-Gelle, que les flamines sont élus par les Comitia Curiata. C’est sans doute le cas dans les temps anciens, mais en examinant le passage en question, on voit que le grammairien parle seulement de leur installation dans leur charge et donc on peut conclure que plus tard lors du vote de la Lex Domitia ils sont choisis par les Comitia Tributa, d'autant plus que bon nombre d'entre eux sont des plébéiens. Après être nommés par le peuple, ils sont reçus (capti) et installés (inaugurabantur) par le Pontifex Maximus : c’est de son autorité qu’ils dépendent.  

Les flamines sont nommés à vie; mais un flamine peut être obligé de démissionner (flaminio abire) pour une infraction dans sa fonction ou même en cas d’arrivée d’un événement de mauvais augure pendant sa fonction.  

Les anciens prêtres avaient déjà le nom de flamines, à cause des bonnets qu'ils portaient, et que les Grecs appellent pilamines ; les mots grecs étaient alors beaucoup plus communs dans la langue latine qu'ils ne le sont aujourd'hui. Les manteaux que les rois portaient, et qu'ils appelaient lenas, sont, suivant Juba, les mêmes que ceux qu'on nomme en Grèce clenas. (Plutarque, vie de Numa, 7)

Leur habillement caractéristique est l'apex [ APEX ], la laena [ LAENA ] et une couronne de laurier. Le nom, selon Varron et Festus, provient de la bande de laine blanche (filum, filamen, flaxmen) qui s’enroule autour de l'apex et qu’ils portent , sans apex, quand la chaleur est accablante. Cet étymologie est plus vraisemblable que la transformation de pileamines (de pileus) en flamines. Le plus distingué de tous les flamines est le flamen Dialis; le plus bas dans l’échelle est le flamen Pomonalis.  

Le flamen dialis

Le flamen dialis jouit de beaucoup d'honneurs particuliers. Quand il y a vacance, trois personnes de descendance patricienne, dont les parents sont mariés par confarreatio [ MARIAGE ], sont choisis par les Comitia. Un de ceux-ci est choisi (captus) et consacré (inaugurabatur) par le Pontifex Maximus. A ce moment il est émancipé de l’autorité de son père et devient sui iuris. Il est le seul prêtre à porter l'albogalerus [ APEX ]; il a le droit à un lictor, à la toga praetexta, à la sella curulis et à un siège au sénat en vertu de sa charge. Ce dernier privilège tombe en désuétude pendant une longue période. C. Valerius Flaccus le réclame en 209 et on lui donne, dit Tite-Live, plus par respect pour l’élévation de son caractère personnel que par conviction sur le bon droit de la demande. Le Rex Sacrificulus est le seul à être autorisé à être couché au-dessus de lui lors d’un banquet. Si quelqu’un d’enchaîné trouve refuge dans sa maison, les chaînes sont immédiatement retirées de chez lui et transportées par l'impluvium sur le toit : elles sont jetées dans la rue. S’il rencontre sur son chemin un criminel qu’on emmène au supplice et que celui-ci se jette à ses pieds, on lui accorde un sursis pour ce jour-là. Cet usage rappelle le droit de sanctuaire attaché aux personnes et aux logements des cardinaux du pape.  

Pour contrebalancer ces privilèges élevés, le Dialis est soumis à une multitude de restrictions et des privations : c’est Aulu-Gelle qui nous les énumère d’après les travaux de Fabius Pictor et de Masurius Sabinus, alors que Plutarque dans ses questions romaines, essaye d'expliquer leur signification. Les voici :  

Texte d'Aulu-Gelle :   http://pot-pourri.fltr.ucl.ac.be/files/AClassFTP/Textes/Aulu-Gelle/francais/nuitsatt_10_fr.txt


1.Le flamine de Jupiter était obligé à un grand nombre de cérémonies et de rites, que nous trouvons dans les livres qui traitent du sacerdoce public, et dans le premier livre de Fabius Pictor. 
2.Voici à peu près ce que je me souviens d'avoir lu dans cet auteur: 
3."Le flamine de Jupiter ne peut sans crime monter à cheval; 
4.il ne peut voir "classem procinctam", c'est-à-dire l'armée sous les armes, hors de l'enceinte des murs. Aussi fut-il rarement nommé consul, lorsqu'il fallait que le consul prît le commandement des armées. 
5.Il ne lui est jamais permis de jurer. 
6.L'anneau qu'il porte doit être ouvert et creux. 
7.On ne peut prendre dans sa maison d'autre feu que le feu sacré. 
8.Si un homme lié entre dans sa maison , il faut qu'il soit délié, que les liens soient montés par la gouttière sur le toit, et de là jetés dans la rue. 
9.Il n'a aucun noeud sur lui, ni à la tête, ni à la ceinture, ni en aucun endroit de son corps. 
10.Si un homme qu'on va battre de verges tombe à ses pieds en suppliant, il ne peut sans crime être frappé ce jour-là. 
11.Un homme libre peut seul couper les cheveux du flamine. 
12.Une chèvre, de la chair crue, des feuilles de lierre, des fèves, sont des objets qu'il ne peut toucher; il n'en prononce pas même le nom. 
13.Il ne doit pas couper les provins des vignes qui s'élèvent trop haut. 
14.Les pieds de son lit doivent être enduits d'une légère couche de boue, et il ne peut en découcher trois nuits consécutives. Personne que lui ne doit y coucher. Il ne doit point placer près du bois de son lit un gâteau dans une cassette. 
15.Les rognures de ses ongles, et les cheveux qu'on lui a coupés, sont cachés dans la terre sous un arbre heureux. 
16.Tous les jours sont pour lui jours de fête. 
17.Il ne doit jamais être sans son bonnet en plein air : il peut rester nu-tête sous son toit ; mais il y a peu de temps que les pontifes l'ont ainsi établi. " (Massurius Sabinus nous apprend qu'on s'était relâché aussi sur d'autres points, 
18.et qu'on avait fait grâce aux flamines de plusieurs prescriptions). " 
19.Il ne peut toucher à la farine fermentée; 
20.Il ne dépouille sa tunique de dessous que dans les lieux couverts, pour ne point paraître nu sous le ciel , c'est-à-dire sous les yeux de Jupiter. 
21.Dans les repas, le roi seul des sacrifices se place avant lui. 
22.S'il perd sa femme, il quitte ses fonctions; 
23.son mariage ne peut se dissoudre que par la mort. 
24.Il n'entre pas dans les lieux où on brûle les morts. Il ne touche jamais un mort. 
25.Il peut cependant assister à un convoi.


Il est interdit par la loi qu'il soit hors de la ville pendant une seule nuit : ce règlement semble avoir été modifié par Auguste, il lui autorise deux nuits. 
On lui interdit de dormir hors de son propre lit pendant trois nuits de suite. Ainsi, il lui est impossible de devenir gouverneur de province. 
Il ne peut pas monter à cheval, ni toucher même un cheval, ni regarder une armée rassemblée à l’extérieur du pomoerium et par conséquent il ne peut être choisi pour le consulat.  Il semble donc qu’à l'origine on l’ait tout à fait tout pour l’empêcher de rechercher ou d'accepter une magistrature civile; mais cette dernière interdiction n’est certainement pas imposée dans les périodes postérieures. L'objet de ces règles a pour but manifestement de faire de lui littéralement le Iovi assiduum sacerdotem, de le contraindre à une attention constante pour ses fonctions de prêtre et de ne pas lui laisser un moment de tentation pour les négliger. L'origine des superstitions suivantes n'est pas aussi claire, mais leur bizarrerie donne à Plutarque une abondance de spéculations. On ne lui permet pas de faire un serment ni de porter un anneau "nisi pervio et casso", c.-à-d., comme il l'explique, sauf s’il est plat et sans pierres. Il ne peut se mettre nu en plein air, ni sortir tête nue, ni avoir un noeud sur son vêtement, ni marcher le long d'un chemin recouvert de vignes. Il ne peut pas toucher de la farine, ni du levain, ni du pain fait avec du levain, ni un corps mort: il ne peut pas entrer dans un bustum [ FUNUS ], mais on ne l’empêche pas d'assister à un enterrement. On lui interdit de toucher ou d’appeler un chien, une chèvre, du lierre, des haricots ou la chair crue. Personne d’autre qu’un homme libre ne peut lui couper les cheveux; les cheveux coupés ainsi que les rognures de ses ongles sont un felix arbor. Personne ne peut dormir dans son lit : les pieds de celui-ci sont enduits d’une légère couche de boue. Il est interdit de placer une boîte contenant les gâteaux sacrificatoires en contact avec son lit.

La flaminica

Texte d'Aulu-Gelle :   http://pot-pourri.fltr.ucl.ac.be/files/AClassFTP/Textes/Aulu-Gelle/francais/nuitsatt_10_fr.txt

26.Les rites imposés aux prêtresses de Jupiter sont à peu près les mêmes. Elles ont un vêtement de couleur ; elles portent à leur voile un rameau d'un arbre heureux ; elles ne doivent monter que trois degrés des échelles appelées échelles grecques; et lorsqu'elles vont aux Argées, elles ne doivent point peigner ni orner leur chevelure. "(Aulu-Gelle, X, 15)

Flaminica est le nom donné à l'épouse du flamen dialis. On lui demande d’épouser une vierge selon les cérémonies de la confarreatio : règlement également appliqué aux deux autres flamines maiores. Il ne peut se marier une seconde fois. Comme son aide est essentielle dans l'exécution de certaines tâches, un divorce n'est pas autorisé. Si elle meurt, le dialis doit démissionner. Les restrictions imposées à la flaminica sont les mêmes que celles de son mari. Elle est habillée d’une robe longue teinte (venenato operitur); ses cheveux sont tressés vers le haut avec un bonnet pourpre de forme conique (tutulus). Elle porte un petit manteau carré avec un voile (rica), auquel est attaché un rameau d’un felix arbor. Il est difficile de déterminer ce qu'est vraiment la rica : un manteau court, comme c’est probable ou un voile posé sur la tête. Elle ne peut monter une échelle de plus de trois degrés (le texte d'Aulu-Gelle est incertain, mais c’est sans doute pour empêcher qu’on voie ses dessous). Quand elle va aux Argées [ ARGEI ] elle ne doit ni se peigner ni orner sa chevelure. A chacune des nundinae la flaminica sacrifie un bélier à Jupiter dans la regia.

Eclipse du flamen dialis

Mais Cinna promit aux nouveaux citoyens de les répartir entre toutes les tribus. Cette raison avait attiré à Rome une foule immense venue de l'Italie entière. Il fut chassé de Rome par les forces de son collègue et du parti aristocratique et, comme il se dirigeait vers la Campanie, un sénatus-consulte décida qu'il était déchu de son consulat et nomma à sa place Lucius Cornélius Mérula, flamine de Jupiter...  Quant à Mérula qui s'était démis de son consulat peu avant l'arrivée de Cinna, il s'ouvrit les veines, en répandit le sang sur les autels, invoqua une dernière fois les dieux qu'il avait souvent invoqués, comme prêtre de Jupiter, pour le salut de la patrie, leur demanda de maudire Cinna et son parti et mit fin à une vie qui avait si bien servi l'État. (Velleius Paterculus, II, 20, 22) 

Déçu de l'espérance d'un commandement, César brigua le souverain pontificat, et répandit l'argent avec une telle profusion, qu'effrayé lui-même de l'énormité de ses dettes, il dit à sa mère, en l'embrassant avant de se rendre aux comices, qu'il ne rentrerait pas chez lui, sinon comme pontife. (2) Il l'emporta sur deux compétiteurs bien redoutables, bien supérieurs à lui par l'âge et par la dignité; et il eut même sur eux cet avantage, de réunir plus de suffrages dans leurs propres tribus, qu'ils n'en eurent ensemble dans toutes les autres. (Suétone, César, 13)

Après la mort du flamine Merula, choisi comme consul suffectus après l’expulsion de Cinna qui, lors de la restauration de la faction de Marius, jette son propre sang dans le sanctuaire (B.c. 87), appelant la malédiction sur ses ennemis en mourant, le sacerdoce demeure vacant jusqu'à la consécration de Servius Maluginensis en 11 PCN par Auguste, alors Pontifex Maximus. Jules César fut en effet nommé à dix-sept ans mais n’entra jamais en fonction. Pendant toute cette période la charge est reprise par le Pontifex Maximus

Les municipes ont également leurs flamines. Ainsi la bagarre célèbre entre Milon et Clodius a lieu tandis que Milon est sur le chemin de Lanuvium, où il est alors dictateur, pour présider l'élection d’un flamine (ad flaminenm prodendum). Après la déification des empereurs, des flamines sont nommés pour superviser leur culte à Rome et dans toutes les provinces : on trouve constamment dans les inscriptions des titres tels que FLAMEN AUGUSTALIS; FLAMEN TIBERII CAESARIS; FLAMEN D. JULII, &c., et parfois FLAMEN DIVORUM OMNIUM.

Flaminia

Flaminia, selon Festus et Aulu-Gelle est la maison du Flamen Dialis : il est interdit d’y faire du feu sauf pour des raisons sacrées.

Flaminia, selon Festus, est également un nom donné à une petite prêtresses (sacerdotula), qui aide la flaminica dans ses fonctions.