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Texte numérisé et mis en page par Thierry Vebr

 

AUSONE

 

 

EXTRAITS DIVERS  

 

 lettres     sommaires pour l'Iliade et l'Odyssée  


 

. Définition de la Livre. - Emploi du mot Libra.

Toi qui admires ces vastes corps du monde suspendus dans la sphère sublime du ciel qui les enserre, masses immenses dont rien n’ébranle l’équilibre, voici qui te paraîtra plus admirable encore. Ces masses ont pour principes des molécules très-déliées qui échappent à nos regards, et qui se composent de l’assemblage d’une série de petits atomes. Mais ces infiniment petits sont des corps solides, ces divisions de la matière sont indivisibles. C’est ce qui conserve leur force et leur vigueur, et leur perpétuelle mobilité dont les âges ne pourront vaincre la durée. Il est permis de comparer aux choses célestes les choses d’ici-bas. Ainsi l’as est de même un solide, puisqu’il se compose de douze parties égales, et que séparément chacune des plus petites de ces parties égales conserve la même force. Car si on en retranche quelqu’une du nombre, le tout chancelle, et les parties se détachent et s’écroulent avec le corps. C’est comme si on arrachait d’une voûte la pierre du milieu sur laquelle tout repose : les autres la suivraient dans sa chute et entraîneraient dans une ruine commune le faîte de l’édifice. Il n’en est pas autrement de la livre. S’il y manque une once, l’as n’est plus un tout ; il n’aura plus alors que le vain nom de deunx. De même, le dextans ne peut garder son nom si on écarte le sextans. Le dodrans, par la perte du quadrans, perd sa valeur première. Le triens enlevé, le bes ne compte plus. Le quincunx est nul si on retire les premières parties du tout. Et le semis, sera-t-il encore le semis ; le septunx, qui n’a que sept parties de la livre, formera-t-il seul une livre, si les autres éléments de l’as disparaissent ? Ainsi la livre n’existe que si aucune de ses parties ne lui manque. Le mot libra s’emploie pour les poids, les nombres, la morale, les ouvrages et les eaux : il n’est pas de mesure que ce mot ne désigne. Libra, c’est le balancement régulier de la terre suspendue au milieu des airs ; libra détermine la marche du soleil et de la lune ; libra, c’est la balance qui rend égales les heures du jour et du sommeil ; libra, c’est le mouvement réglé qui contient, sans le secours du rivage, les vagues de la Calédonie. Demeure aussi pour moi, libra, la règle certaine de mes moeurs.

II. Explication d’un accouchement à terme.

Tous nos actes, dans les diverses carrières que nous parcourons en cette vie, sont dirigés par la puissance des astres ; l’homme n’a reçu de la terre que ses membres. La destinée et le souffle lui viennent d’en haut, et subissent l’influence du chœur des sept planètes, auxquelles préside le soleil doré, souverain maître de l’empire resplendissant des airs. Et le soleil ne gouverne pas seulement nos jours dans le temps que nous traversons le court espace d’une vie agitée ; on croit que son regard développe encore la conception secrète et la vie mystérieuse qui se forme dans le ventre maternel ; et qu’il règle les lois de cette existence intérieure. En effet, au moment où le germe est déposé dans le champ de la génération, il est certain que le soleil se trouve dans quelqu’un des signes. Il prend bientôt position dans le signe voisin, et ne verse encore aucune lumière sur le lieu de la conception, trop rapproché de lui, Mais quand, après un espace d’un mois, il tourne ses rênes, et que son char de pourpre s’élève vers la troisième constellation, une faible lueur glisse obliquement ses rayons sur l’inerte embryon dont elle éveille les premiers mouvements. Dans le quatrième signe, sa généreuse influence a plus de force : le soleil pénètre jusqu’au tendre fœtus dont il active la croissance ; car, au quadrat aspect, la pure et douce lumière dont il brille, épanche de vivifiantes clartés. Quand il touche au cinquième signe, l’enfant plus vigoureux tressaille dans le sein de sa mère étonnée. Le sixième signe n’a aucune influence, parce qu’alors le regard de Phébus ne peut suivre une ligne équilatérale. Mais dès que, parvenu au centre de la cohorte des signes, il atteint la septième section d’où son camp lumineux dirige d’aplomb ses dards enflammés, il échauffe de ses pleins rayons le développement du germe : il ne lui lance plus quelques éclairs d’une lumière avare, il l’embrase de tous les feux de sa couronne. De là vient que Lucine devance l’époque régulière de ses travaux, et que la mère, surprise avant le terme désiré, ressent les sourdes et douloureuses approches de sa délivrance. Mais si, dans le temps qu’il verse ses feux de la septième constellation, le soleil n’a point rompu les obstacles qui retardent l’enfantement, il ne peut ensuite ce qu’il pouvait d’abord. Est-ce parce que, pareil à celui du sixième signe, l’inutile aspect du huitième ne peut former de lignes équilatérales ? Mais, quand il envahit le neuvième signe, il accomplit bientôt les désirs impatients des mères, car le trine aspect alors lui prête un surcroît de puissance. Si enfin Ilithyia diffère encore une délivrance difficile, le quadrat brisera les derniers liens de ce douteux enfantement.

III. Les signes célestes.

Vers la région boréale, sont les deux Ourses et le Dragon. Après les Ourses, leur gardien, le Bouvier ; puis la Couronne, l’Agenouillé, la Lyre, le Cygne, Céphée, Cassiopée, le Cocher, Persée, le Triangle et la constellation d’Andromède, Pégase, le Dauphin, la Flèche, l’Aigle, le Serpentaire. Vient ensuite cette zone de signes que composent douze constellations : le Bélier, le Taureau, les Gémeaux, le Cancer, le Lion, la Vierge, la Balance, le Scorpion, le Sagittaire, le Capricorne, le Verseau, et les Poissons. Après eux et dans la région australe, Orion, Procyon, le Lièvre, l’ardent Sinus, Argo, l’Hydre, le Centaure, l’Encensoir et le grand Poisson, suivi de la Baleine et du fleuve Éridan. Il y a encore les sept planètes appelées errantes : la Lune et Mercure, Vénus, le Soleil, et Mars qui brille aussi ; puis Jupiter, l’astre éclatant par-dessus tous les astres ; Saturne enfin, plus élevé, mais plus lent que tous les autres.

IV. Calcul des jours compris dans la révolution d’une année.

Le soleil emploie quatre-vingt-quatorze jours et demi à passer d’un tropique dans un autre, quand il quitte le Bélier de Phryxus pour le Cancer aux huit pattes : c’est dans cet intervalle que l’été voit ses beaux jours s’écouler et finir. Il parcourt un autre trajet de quatre-vingt-douze jours et demi, pour passer du Cancer dans les Serres : c’est le temps où les jours et les nuits sont d’égale durée, où le soleil doré confond l’été qui s’achève avec l’automne qui commence. Puis il traverse successivement les mois de l’automne, et se dirige vers le tropique glacé du Capricorne en quatre-vingt-huit jours et un quart ; et ce quart, tous les cinq ans, forme un jour qui prend à la fin du mois de Numa le nom de jour intercalaire. S’élançant ensuite vers les cornes du Taureau d’Agénor, le soleil doré gravit le tropique du Bélier dans l’espace fixe de quatre-vingt-dix jours. Ainsi chaque révolution annuelle décrit toujours un cercle de trois cent soixante-cinq jours.

V. Sur les noms des sept jours.

Les noms appliqués dans l’année aux sept jours de chacune des révolutions hebdomadaires, sont dus à autant de planètes errantes entraînées dans la perpétuelle rotation du monde, et condamnées à parcourir sans cesse l’oblique région des signes. Le Soleil radieux occupe le premier jour qui est aussi le dernier. La Lune succède immédiatement au disque de son frère. Mars suit, le troisième, la lumière de Titan. Mercure revendique le quatrième jour. L’astre doré de Jupiter éclaire la cinquième zone de la semaine. La belle Vénus survient la sixième après l’astre bienfaisant de son père. La lumière de Saturne, qui domine toutes les lumières, est la septième, et le cercle révolu ramène au huitième jour le Soleil.

VI. Vers d’un auteur inconnu, qui désigne ce qu’on doit retrancher du corps en certains jours.

Coupe tes ongles le jour de Mercure, ta barbe le jour de Jupiter, et tes cheveux le jour de Cypris.

Ce vers doit se réfuter ainsi :

Mercure aime pour le larcin les ongles toujours crochus ; il ne permet pas qu’on ôte leur pointe aux doigts effilés. Jupiter est fier de sa barbe et Vénus de sa chevelure : ils ne peuvent donc vouloir qu’on enlève ce qui fait leur parure. Mars a aimé des mentons sans barbe, et la Lune des fronts chauves : ils ne défendent point de raser et la tête et les joues. Le Soleil et Saturne ne s’embarrassent guère des ongles. Ainsi supprimons ce monostique qui ne plaît point aux dieux.

VII. Sur les mois et les quatre saisons de l’année.

Les mois qui ramènent éternellement les quatre saisons de l’année sont désignés dans les quatre vers que tu vas lire. Mars, Avril et Mai sont les mois du printemps : Juillet, Août, et Juin avec eux, ceux de l’été : Septembre, Octobre et tout Novembre, ceux de l’automne : les mois d’hiver sont Janvier, Février et Décembre.

VIII. Monostiques sur les mois.

Le premier, ô Janus, tu commences les Calendes romaines. Numa institua dans le mois suivant les fêtes expiatoires (Februa). Mars ramenait le commencement de l’ancienne année. La belle Vénus revendique Avril, père des fruits. Mai a pris son nom de celui des ancêtres (majores), et Juin qui vient ensuite doit le sien au jeune âge. Juillet ajoute à Quintilis le prénom de Jules César : Auguste suit le mois que César a nommé. Ô Pomone, Septembre enrichit ton automne : Octobre dispense aux champs les trésors que le blé doit rendre avec usure. Tu précipites les astres dans la mer, infertile Novembre, et toi, joyeux Décembre, tu ramènes les plaisirs de l’hiver.

IX. Autres monostiques sur les mois.

Janus ouvre à Rome la redoutable porte de la guerre ; Février a des vœux expiatoires pour le dieu Dis. Commence, ô Mars, le cours heureux de l’année que tu ramènes. Le Bélier cueille à Vénus sa compagne des guirlandes dorées. Les doux essaims, ô Mai, reviennent avec tes nones. Voici Juin qui place les Gémeaux dans les hauteurs du ciel. Juillet rebrousse dans les airs embrasés les feux du soleil. Tout brûle quand le Lion répand ses flammes. La Vierge cueille les fruits savoureux qu’a mûris le soleil. Octobre emplit les cuves des vins de Falerne. Toute la surface du sol se dessèche endurcie sous les rigueurs du Scorpion. Décembre aviné, l’hiver t’a choisi pour ses fêtes.

X. Distiques sur les mois.

Ô Janus, tu parais pour donner ton nom au premier mois ; Janus au double front, tu vois deux années à la fois. Après le culte des dieux du ciel, Numa donne au mois suivant les Februa, hommage funèbre aux mânes des parents. Mars, qui présida jadis à l’origine de Rome et de son année, donnait aux consuls du Latium la date de leur entrée en fonctions. Le mois voisin, Avril, doit son nom à la mère des Romains, à Vénus ; car Aphrodite aime la compagnie de Mars. Est-ce la déesse Maïa ou l’âge des vieillards, ô Mai, qui t’a donné ton nom ? Je ne sais ; mais l’une et l’autre origine en est bonne. Juin vient ensuite, et mérite un double hommage, que ce soit Junon ou la Jeunesse qui l’ait ainsi nommé. Resplendissant des feux de l’astre de Dioné, Juillet a sa place marquée au milieu de l’été. Août, qui porte le nom d’un parent de César, est aussi rapproché de Juillet par son rang dans l’année que par son origine. Après eux se succèdent les mois qui paraissent dans l’ordre que leur nom désigne. Septembre arrose les pressoirs des présents de Bacchus. Octobre, qui sourit aux jours de la semaille, flatte l’avare laboureur de l’espoir du profit. Novembre précipite dans l’onde amère les astres accoutumés qui reparaîtront bientôt dans leur ciel. Décembre enfin, qui ferme la liste, met un terme aux fêtes joyeuses pour que l’année nouvelle commence avec l’hiver.

XI. Quatrains sur les mois.

JANVIER.

(Ce mois est représenté sous la forme d'un consul avec la loge ; il tient de la main gauche une fleur, ou une feuille de trèfle, et, de la droite, il jette de l’encens sur le foyer d’un autel)

Ce mois est consacré à Janus. Vois comme l’encens brûle sur les autels, comme les Lares reçoivent un pieux encens. C’est le commencement de l’année et des siècles ; c’est le mois qui voit naître les honneurs de ces magistrats que la pourpre inscrit dans les Fastes.

FÉVRIER.

(Une femme, revêtue d’une tunique relevée par une ceinture, tient une cane entre ses mains ; une urne, dans l’air, verse de l’eau en abondance : cette urne et cette cane désignent un mois pluvieux)

Mais ce mois qui porte un vêtement bleu serré par une ceinture, qui presse avec joie entre ses mains l’habitant ailé des marécages, et qu’une Iris bigarrée enveloppe de jets de pluie, est le mois où Rome célèbre les rites expiatoires.

MARS.

(Mars est représenté recouvert d’une peau de louve arrêtée par une ceinture. Il retient du bras gauche un jeune bouc pétulant, de la main droite il montre une hirondelle : deux vases de lait sont à ses pieds)

Ce mois ceint d’une peau de louve est facile à reconnaître : Mars lui a donné son nom, Mars lui a donné sa dépouille. Le chevreau qui bondit, l’hirondelle qui gazouille, le vase de lait, l’herbe verdoyante, tout indique le printemps.

AVRIL.

(Avril paraît sous la figure d’un homme qui danse devant la statue de Vénus dressée sous un berceau de myrte. Un cierge brûle devant la déesse)

Avril honore Vénus couverte de myrte. Il voit luire ce flambeau des campagnes qui échauffe la bienfaisante Cérès. A droite, un cierge jette des flammes odorantes. Les parfums que Vénus exhale ne manquent pas ici.

MAI.

(Habillé d’une robe de toile, Mai tient de la main gauche une corbeille de fleurs. De l’autre main il porte une fleur à son nez)

Tous les trésors du printemps et les rubis nuancés de la rose, voyez, Mai vêtu de lin les a dans ses corbeilles. Ce mois s’appelle ainsi du nom de Maïa, fille d’Atlas : il est, avec raison, bien aimé d’Uranie.

JUIN.

(Juin, tout nu, tenant de la main gauche un flambeau allumé, montre de la droite un cadran solaire. Devant lui, un lis dont les fleurs sont en partie tombées à terre)

Les membres nus, Juin regarde le cadran solaire, et nous montre que Phébus va détourner ses pas. Ce flambeau présage la maturité des épis de Cérès, et ces lis effeuillés nous apprennent que les fleurs passent vite.

JUILLET.

(Juillet, couronné d’épis, porte de la main gauche une corbeille pleine de raisins ou de mûres)

Voici Juillet qui montre ses membres hâlés et ses cheveux roux enlacés de tiges et d’épis. Le mûrier sanglant étale ses lourdes grappes, car il verdit joyeux sous le signe du Cancer.

AOÛT.

(Ce mois est représenté par un homme nu, cheveux épars, et qui tient sous son menton une tasse pleine d’eau, où il semble prêt à plonger ses lèvres)

Vers l’eau de la fontaine, vers ce vase au cristal transparent, vois comme, pour boire, il plonge sa bouche que brûle la soif, ce mois qui porte le nom éternel des empereurs, et qui dit-on, vit naître Hécate, fille de Latone.

SEPTEMBRE.

(Septembre tient de la main droite un lézard suspendu à un fil. A ses pieds sont deux cuves préparées pour la vendange)

Septembre cueille les grappes gonflées et les raisins divers : en ce mois tombent les fruits mûrs. Il est tout joyeux d’avoir attaché à un fil ce lézard captif, qui, suspendu à sa main, se démène et l’amuse.

OCTOBRE.

(Octobre tient un lièvre de la main droite. Au-dessus de sa tête est un oiseau perché sur une espèce de faisceau. A ses pieds est un vase plein de fruits)

Octobre donne le lièvre qu’il a pris, et le fruit avec la branche : il te donne l’oiseau gras des campagnes. Déjà on voit écumer les cuves de Bromius et le moût qui bouillonne. Voici un vase où fermente le vin nouveau.

NOVEMBRE.

(Novembre est couvert d’un vêtement de toile : c’est un homme chauve qui tient un plat rond, sur lequel est un serpent roulé qui dresse sa tête. Dans sa main droite est un sistre. On voit aussi une oie qui regarde ce prêtre d’Isis)

Celui qui vient ensuite vêtu d’un habit de lin, est un adorateur de la déesse et des mystères de l’antique Memphis. Il peut à peine contenir de son sistre une oie avide, habitante de tes bords, ô Memphis, et consacrée en tes mystères.

DÉCEMBRE.

(Décembre, vêtu d’une tunique fort courte et relevée par une ceinture, tient une torche allumée. Devant lui, des dés sur une table)

Déjà l’hiver nourrit les semences annuelles confiées aux sillons. De ses pluies, Jupiter inonde tout. C’est maintenant que Décembre ramène les fêtes de Saturne et de l’âge d’or ; c’est maintenant, esclave, que tu peux jouer avec ton maître.

XII. Combien de jours en chaque mois.

Trente jours complètent la durée de chacun des mois de Juin, Avril, Septembre et Novembre. Il faut à ces trente jours en ajouter un, pour sept autres mois, aux calendes de Janvier, de Mars, de Mai, de Juillet, d’Août, d’Octobre et de Décembre, qui finit l’année. Un seul mois sera de vingt-huit jours, c’est celui que la volonté de Numa fit succéder à Janvier. Ainsi, trois cent soixante-cinq jours et un quart forment le compte de l’année entière.

XIII. Sur les trois divisions du mois.

Junon renouvelle douze fois les Calendes dans l’année, et Jupiter fait courir douze fois aussi les Ides au milieu des mois. Le nombre qui suit le nombre huit désigne le jour des Nones. Tels sont les trois seuls noms du mois romain : on désigne les autres jours par des nombres.

XIV. Dates des Nones et des Ides dans le mois.

C’est tantôt le quatrième jour qui commence les Nones, tantôt le sixième qui les ramène. Le sixième les ramène au retour de Mai, d’Octobre, de Mars, et de Juillet, qui reparaît toujours avec le solstice. Les autres mois ont les Nones le quatrième jour. Quant aux Ides, elles reviennent toutes huit jours après.

XV. Combien les Calendes ont de jours dans le mois.

Après les Ides particulières à chacun des mois selon son rang, reviennent les Calendes, variables comme elles, avec un nombre de jours qui diffère lorsqu’on énumère ces jours l’un après l’autre, en remontant jusqu’à leur point de départ, qui offre le compte exact de leur durée. L’hiver qui commence prolonge pendant dix-neuf jours les divertissements et les fêtes, avant d’amener Janvier toujours lent à paraître. Les Calendes ont cette même durée quand revient le mois de Numa, et le nourrisson de Bacchus, Septembre, qui ramène le commencement de l’automne. Celles de Juillet, de Mai, d’Octobre et de Décembre qui finit l’année, sont réduites d’un jour. Les Calendes ont un jour de moins encore quand reparaissent les quatre mois dont l’énumération va suivre : Août, Juin, Avril et Novembre, l’avant-dernier des mois. Seize jours de Calendes suffisent, ô Mars, fils de Junon, pour te ramener et te rendre une vie nouvelle. Ce nombre atteint, l’année est au complet et sa révolution recommence.

XVI. En quels mois le soleil passe en chaque signe.

Le tropique du Capricorne marque le commencement de Janvier. Le signe du Verseau s’arrête et finit son cours au milieu du mois de Numa. Les deux Poissons traversent le mois de Mars. Tu vois derrière toi, Bélier de Phryxus, les Calendes d’Avril. Mai admire les cernes du Taureau d’Agénor. Juin voit les Gémeaux de Laconie marcher dans les cieux. Juillet subit les ardeurs du Cancer que le solstice enflamme. Le Lion brûlant embrase de ses feux le mois d’Août. Septembre nourrit Bacchus, ô Vierge, sous ton signe. Octobre, au temps des semailles, ajuste la Balance. Novembre, qui sent l’hiver, précipite la marche du Scorpion, et le Sagittaire achève sa course au milieu de Décembre.

Les vers suivants de Q. Cicéron ont pour but de nous faire connaître en quel temps chaque signe se montre : ce qu’on peut voir aussi dans nos vers qui précèdent.

Les Poissons à la lueur obscure gonflent les fleuves au printemps. Le Bélier rend la durée du jour égale à celle de la nuit ; il disparaît devant les cornes du Taureau qui nous annonce les fleurs. Les Gémeaux ouvrent l’aride carrière de l’été. Le Cancer éclatant diminue déjà la longueur des jours, et le Lion farouche exhale de sa gueule les chaleurs énervantes. La Vierge se lève ensuite, chassant peu à peu les vapeurs qui se dissipent. La Balance ouvre les portes de l’automne, et mesure un espace égal au jour et à la nuit. La flamme du Scorpion dépouille les rameaux qui ont porté leurs fruits. Le Sagittaire darde sur la terre le froid qui l’engourdit. Sous le signe du Capricorne, la bise souffle les gelées glaciales suivies des grandes ondées que le Verseau fait pleuvoir des nues, et qui donnent tant de force aux fleuves du monde pour déborder et pour s’étendre. Cependant, à droite et à gauche, la roue étincelante du soleil poursuit sa mobile carrière, et les phases variées de la lune se succèdent. L’écaille du Dragon tortueux brille de son éternelle clarté : près de lui, la Grande Ourse projette les feux de ses sept étoiles, et le Bouvier, qui la garde, se plonge le dernier, avec le jour, dans les hautes vagues de l’Océan.

XVII. Calcul des jours compris entre les solstices et les équinoxes.

Le soleil, parti du tiède équinoxe de printemps, secoue ses rênes brûlantes et achève en quatre-vingt-quatorze jours et demi le cours de l’été. Ensuite, l’automne, qui mesure également les heures du jour et de la nuit, accomplit sa révolution en quatre-vingt-huit jours et trois heures.

………………

Puis le printemps fleuri, détournant son char, revient à nous, en ajoutant deux jours de plus au nombre qui précède.

XVIII. Les fêtes romaines.

Maintenant je dirai les jeux Apollinaires célébrés aux bouches du Tibre, et les mystérieuses Mégalésies de la mère des dieux. Je parlerai des journées de Vulcain qui commencent l’automne, des Quinquatries de la déesse Pallas, des Ides qui reviennent au milieu de mai et d’août, et que Mercure et Diane se sont réservées ; du saint culte des matrones en l’honneur des héros, quand reparaissent les premiers jours de mars. Je rappellerai les fêtes célèbres des nones Caprotines, où les matrones quittent la longue robe pour en couvrir les esclaves ; et ces quatre divisions qui partagent l’année les solstices et les équinoxes. Il n’est pas permis de taire le Régifugium, ce jour où l’on chassa les tyrans de la ville, joyeux jour pour les Romains. Veux-tu que je chante d’abord Ops et son rite, ou bien les Saturnales, cette fête des esclaves où les maîtres servent à leur tour ? Et ces solennités qui ne reviennent jamais à jour fixe, où chacun par les rues offre son hommage aux dieux des carrefours ? Ou ce double culte rendu à Neptune, et dans les Neptunales et dans cette fête qui a pris son nom de Consus et des Conseils, célébrée sur des navires ou des quadriges en mémoire de l’alliance des chefs de Rome avec les peuplades voisines ? J’ajouterai le culte et les rites des dieux étrangers, la naissance d’Hercule, ou le vaisseau d’Isis ; puis les Florales, ces divertissements d’un théâtre lubrique, qu’on brûle de voir, mais qu’on n’avoue pas avoir vus. On fête encore aujourd’hui les Equiries, ces jeux antiques, les premiers que le cirque romain ait connus. Rome célèbre sous un surnom latin les jeux Dionysiaques, dont Liber revendique l’hommage. Les édiles plébéiens et les édiles curules observent le saint usage des rites Sigillaires. On sait que les gladiateurs ont exécuté des luttes funèbres dans le forum : maintenant l’arène réclame ces combattants qui, vers les derniers jours de décembre, apaisent avec du sang le fils de Coelus qui porte la faux.

XIX. Jeux qui reviennent par lustres.

L’Achaïe célébrait quatre jeux autrefois : deux en l’honneur des dieux, et deux en l’honneur des hommes. Ces fêtes étaient consacrées à Jupiter, à Phébus, à Palémon, à Archemorus ; les couronnes étaient de pin, de pommier, d’olivier, d’ache.

XX. Lieux où se célèbrent ces jeux.

Les premiers, les jeux Olyntpiques en l’honneur du grand Jupiter, se célèbrent à Pise ; le Parnasse a consacré les jeux Pythiques à Phébus, dieu de Claros. Le rivage de Corinthe aux deux mers a dédié les jeux Isthmiques à Portunus, et c’est Thèbes qui honore Archemorus de l’hommage funèbre des jeux Néméens.

XXI. Fondateurs de ces jeux.

Jupiter institua le premier la fête des couronnes Olympiques, dans le stade le plus long des cirques de la Grèce. Alcide, après lui, consacra les jeux Néméens. Ces solennités quinquennales servaient aussi à marquer les époques. On attribue les jeux Isthmiques à Neptune, et les Pythiques à Phébus : doubles honneurs rendus aux dieux et aux hommes après leur mort.

XXII. Que ces rites sacrés sont aussi des jeux funèbres.

L’Élide consacre un culte funèbre à Pélops, fils de Tantale. Thèbes honore tous les cinq ans de ses jeux Néméens la mémoire d’Archemorus. Les jeux Isthmiques se célèbrent depuis la mort de Palémon, on le sait ; et Delphes institua les jeux Pythiques pour apaiser les mânes du serpent Python.

 

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