LES TRACHINIENNES
ΤΡΑΧΙΝΙΑΙ
(1 - 662) (663 - 1278)
Texte grec repris sur le site
Μικρός Απόπλους
Αρχαία Ελληνικά Κείμενα
Traduction française par R. PIGNARRE : GF.
LES TRACHINIENNES (01)
PERSONNAGES
DÉJANIRE, LA NOURRICE, HYLLOS, CHOEUR DE FEMMES TRACHINIENNES, UN MESSAGER, LICHAS, HÉRACLÈS, UN VIEILLARD.
Une place, à Trachis, devant le palais du roi Céyx.
Λόγος μέν ἐστ´ ἀρχαῖος ἀνθρώπων φανεὶς |
PROLOGUE DÉJANIRE. — C'est une sagesse vieille comme le monde qui dit que de toute vie mortelle il faut attendre le terme avant d'affirmer qu'elle fut heureuse ou malheureuse. Hélas! je n'ai pas besoin d'être allée chez Hadès pour savoir combien l'infortune aura pesé sur la mienne. J'habitais encore à Pleuron, dans le palais d'Œnée (02) mon père, lorsqu'un mariage se présenta pour moi tel qu'aucune femme d’Etolie n’en connut de plus affreux. Mon prétendant n'était autre que le fleuve Achélöos (03), et, pour demander ma main à mon père, il se rendait visible tour à tour sous la forme d'un taureau, d'un dragon aux replis chatoyants et d'un homme à tête de boeuf, dont le menton touffu laissait jaillir des fontaines d'eau vive! Pourvue d'un tel prétendant, pauvre fille que j'étais! je n'avais qu'un désir : être morte avant le jour de mes noces ! Quelque temps après, par bonheur, survint l'illustre fils de Zeus et d’Alcmène (04). Il provoque l'autre en combat singulier et me délivre. Les phases de ce combat, que ceux-là les retracent qui les ont suivies de sang-froid : je n'ai rien vu. J'étais assise, éperdue, tremblant que ma beauté ne fît mon malheur. Enfin, Zeus arbitre nous accorda une heureuse issue. Mais dois-je dire heureuse? Depuis le jour que sa victoire m'unit à Héraclès, je nourris crainte sur crainte, je vis à cause de lui dans une anxiété continuelle, et d'une nuit à l'autre les chagrins succèdent aux chagrins. Je lui ai donné des enfants; mais, comme un cultivateur qui possède un champ éloigné ne le visite qu'une fois pour les semailles, une fois pour la moisson, ainsi l'existence que mène mon mari le rend à son foyer et l'en éloigne sans cesse pour courir au service d'autrui. Aujourd'hui encore, bien qu'il ait glorieusement achevé ses fameux travaux, je tremble plus que jamais. Depuis qu'il a tué Iphitos (05), nous vivons en exil à Trachis (06), où l'on nous offre l'hospitalité; car Héraclès est parti, nul ne sait où. Je sais seulement que son absence me plonge en d'amères inquiétudes. Je suis presque certaine qu'il traverse quelque dure épreuve : voilà quinze mois qu'il n'a pas donné de ses nouvelles. Oui, il traverse quelque épreuve périlleuse. Je pense aux tablettes qu'il m'a laissées en partant, et dont je demande souvent aux dieux qu'elles ne me portent pas malheur.
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ΔΟΥΛΗ ΤΡΟΦΟΣ Δέσποινα Δῃάνειρα, πολλὰ μέν ς´ ἐγὼ |
LA NOURRICE. — Déjanire, ma maîtresse, que de fois je t'aurai vue tout en larmes te lamenter sur l'absence d'Héraclès ! Mais, voyons, s'il est permis à l'esclave de donner des conseils aux personnes libres, laisse-moi dire mon mot sur tes affaires. Tu as plusieurs enfants; pourquoi n'enverrais-tu pas l'un d'eux à la recherche de ton mari ? Hyllos me paraît tout désigné, pour peu que le bonheur de son père lui tienne à coeur. Le voici justement qui accourt... Si mon idée te semble bonne, il t'apporte l'occasion de la mettre à profit.(Paraît Hyllos.) |
ΔΗΙΑΝΕΙΡΑ Ὦ τέκνον, ὦ παῖ, κἀξ ἀγεννήτων ἄρα |
DÉJANIRE. — Mon enfant, mon fils, les humbles sont quelquefois bien inspirés. Vois cette esclave : elle vient de montrer un jugement digne d'une femme libre. |
ΥΛΛΟΣ Ποῖον; δίδαξον, μῆτερ, εἰ διδακτά μοι. |
HYLLOS. — Comment cela? Puis-je apprendre de quoi il s'agit, mère ? |
ΔΗΙΑΝΕΙΡΑ Σὲ πατρὸς οὕτω δαρὸν ἐξενωμένου 65 |
DÉJANIRE. — Elle dit que l'absence de ton père s'éternise et qu'un bon fils devrait s'inquiéter de savoir où il est. |
ΥΛΛΟΣ Ἀλλ´ οἶδα, μύθοις εἴ τι πιστεύειν χρεών. |
HYLLOS. — Mais je sais où il est, du moins s'il en faut croire les bruits qui courent. |
ΔΗΙΑΝΕΙΡΑ Καὶ ποῦ κλύεις νιν, τέκνον, ἱδρῦσθαι χθονός; |
DÉJANIRE. — Et où dit-on qu'il séjourne, mon enfant? |
ΥΛΛΟΣ Τὸν μὲν παρελθόντ´ ἄροτον ἐν μήκει χρόνου |
HYLLOS. — Toute l'année passée, il aurait travaillé aux gages d'une Lydienne (07). |
ΔΗΙΑΝΕΙΡΑ Πᾶν τοίνυν, εἰ καὶ τοῦτ´ ἔτλη, κλύοι τις ἄν. |
DÉJANIRE. — S'il s'est plié à pareille épreuve, à quoi ne faut-il pas s'attendre! |
ΥΛΛΟΣ Ἀλλ´ ἐξαφεῖται τοῦδέ γ´, ὡς ἐγὼ κλύω. |
HYLLOS. — Il aurait repris sa liberté, à ce que l'on rapporte. |
ΔΗΙΑΝΕΙΡΑ Ποῦ δῆτα νῦν ζῶν ἢ θανὼν ἀγγέλλεται; |
DÉJANIRE. — Mais enfin, vivant ou mort, où dit-on qu'il est? |
ΥΛΛΟΣ Εὐβοῖδα χώραν φασίν, Εὐρύτου πόλιν, |
HYLLOS. — En Eubée. Il assiège Eurytos dans sa capitale, ou se dispose à l'assiéger. |
ΔΗΙΑΝΕΙΡΑ Ἆρ´ οἶσθα δῆτ´, ὦ τέκνον, ὡς ἔλειπέ μοι |
DÉJANIRE. — Tu ignores peut-être, mon enfant, qu'il m'a laissé des oracles certains au sujet de ce pays? |
ΥΛΛΟΣ Τὰ ποῖα, μῆτερ; τὸν λόγον γὰρ ἀγνοῶ. |
HYLLOS. — Lesquels, mère? Je ne sais de quoi tu veux parler. |
ΔΗΙΑΝΕΙΡΑ Ὡς ἢ τελευτὴν τοῦ βίου μέλλει τελεῖν, |
DÉJANIRE. — Ou bien il périra au cours de cette campagne, ou bien sa victoire doit lui assurer une vieillesse paisible. Lorsque sa destinée est dans la balance, mon enfant, ne lui viendras-tu pas en aide? Notre salut est lié à sa vie; sa perte entraînerait la nôtre. |
ΥΛΛΟΣ Ἀλλ´ εἶμι, μῆτερ· εἰ δὲ θεσφάτων ἐγὼ |
HYLLOS. — J'irai donc, mère. Que ne m'a-t-on instruit de ces oracles ? Je l'aurais rejoint depuis longtemps. A vrai dire, sa fortune fidèle ne nous donnait guère lieu de trembler pour lui ni de craindre pour nous; mais aujourd'hui, mes yeux s'ouvrent, et je ne négligerai rien pour savoir exactement ce qu'il en est. |
ΔΗΙΑΝΕΙΡΑ Χώρει νυν, ὦ παῖ· καὶ γὰρ ὑστέρῳ τό γ´ εὖ |
DÉJANIRE. — Va, mon fils. Arriverais-tu après coup, apprendre une bonne nouvelle n'est jamais perdre son temps. (Sort Hyllos. Entrée du Choeur.) |
ΧΟΡΟΣ Ὃν αἰόλα νὺξ ἐναριζομένα |
CHANT
DU CHŒUR
O toi que dans son agonie
enfante la nuit diaprée |
ΔΗΙΑΝΕΙΡΑ Πεπυσμένη μέν, ὡς ἀπεικάσαι, πάρει |
PREMIER ÉPISODE DÉJANIRE. — On t'a sans doute appris ce qui me tourmente, puisque tu viens me voir. Ah ! puisses-tu ne jamais l'éprouver, la souffrance qui me ronge, toi qui ne sais pas encore ce que c'est! La jeunesse a ses parcs où elle pâture (12) à l'abri du grand soleil, de la pluie et des vents; elle croît, paisible, au sein des plaisirs, jusqu'à l'âge où la jeune fille prend le nom de femme et perd en une seule nuit son insouciance. Dès lors elle ne cessera plus de trembler pour un mari ou pour des enfants. Il faut avoir soi-même passé par là pour comprendre les maux qui m'oppressent. J'ai beaucoup souffert, déjà, beaucoup pleuré, mais ce n'était rien auprès d'aujourd'hui. Tu vas en juger. La dernière fois qu'Héraclès, mon seigneur, a quitté la maison, il m'a laissé une tablette où il avait écrit autrefois ses dernières volontés. Souvent il était parti pour le péril, mais il n'avait pas cru devoir encore me la remettre, car jamais il ne doutait ni de son succès ni de son retour. Cette fois-ci, comme s'il n'était déjà plus, il m'expliqua quels biens me revenaient à titre d'épouse et comment il entendait partager ses possessions entre ses enfants. Il ajouta que son absence durerait un an et trois mois, ce délai devant marquer le terme soit de ses jours, soit de ses maux. Telle est, m'expliquait-il, la fin assignée par les dieux aux travaux d'Héraclès : par la voix des deux tourterelles, le vieux chêne dodonéen l'avait jadis prophétisée (13). Or le temps marqué est venu. Dans quel sens les destins vont-ils s'accomplir? A peine goûtais-je un peu de sommeil que l'anxiété m'a chassée du lit : s'il me fallait demeurer veuve du plus noble des êtres ! |
ΧΟΡΟΣ Εὐφημίαν νῦν ἴσχ´, ἐπεὶ καταστεφῆ |
LE CORYPHÉE. — Fais trêve à tes paroles : je vois un homme s'avancer, — un porteur de bonne nouvelle, si j'en crois, sur son front, cette couronne. |
ΑΓΓΕΛΟΣ Δέσποινα Δῃάνειρα, πρῶτος ἀγγέλων 180 |
UN MESSAGER (accourant). — Déjanire, ma maîtresse, j'arrive le premier pour dissiper tes inquiétudes. Sache que le fils d'Alcmène est vivant et qu'il est vainqueur. Il consacre aux dieux indigènes des prémices (14) qu'il rapporte du combat. |
ΔΗΙΑΝΕΙΡΑ Τίν´ εἶπας, ὦ γεραιέ, τόνδε μοι λόγον; |
DÉJANIRE. — Quel discours me tiens-tu là, vieillard? |
ΑΓΓΕΛΟΣ Τάχ´ ἐς δόμους σοὺς τὸν πολύζηλον πόσιν
185 |
LE MESSAGER. — Bientôt, l'époux tant désiré franchira ce seuil, dans tout l'éclat de sa force victorieuse. |
ΔΗΙΑΝΕΙΡΑ Καὶ τοῦ τόδ´ ἀστῶν ἢ ξένων μαθὼν λέγεις; |
DÉJANIRE. — De qui tiens-tu cela? D'un homme du pays, ou d'un étranger? |
ΑΓΓΕΛΟΣ Ἐν βουθερεῖ λειμῶνι πρόσπολος θροεῖ, |
LE MESSAGER. — Au milieu d'un pré à boeufs, toute une foule se presse autour du courrier Lichas qui annonce la nouvelle. Dès que je l'ai sue, je n'ai fait qu'un bond jusqu'ici. Je voulais être bon premier à te l'apprendre, pensant que je trouverais mon profit à t'avoir fait plaisir. |
ΔΗΙΑΝΕΙΡΑ Αὐτὸς δὲ πῶς ἄπεστιν, εἴπερ εὐτυχεῖ; |
DÉJANIRE. — Mais Lichas, pourquoi n'est-il pas venu lui-même, s'il apporte une bonne nouvelle? |
ΑΓΓΕΛΟΣ Οὐκ εὐμαρείᾳ χρώμενος πολλῇ, γύναι· |
LE MESSAGER. — C'est qu'il n'avance pas comme-il-veut, femme. Tout le peuple Malien est là autour de lui à le questionner, tant qu'il ne peut plus mettre un pied devant l'autre. Chacun brûle de savoir, et les curieux ne le laissent point partir qu'il ne les ait satisfaits. C'est ainsi, malgré lui, qu'il s'attarde au gré des gens. Mais patience-: tu vas le voir bientôt paraître en personne. |
ΔΗΙΑΝΕΙΡΑ Ὦ Ζεῦ, τὸν Οἴτης ἄτομον ὃς λειμῶν´ ἔχεις,
200 |
DÉJANIRE. — O Zeus, seigneur des prairies vierges de l'Oeta (15), enfin tu nous as donné, après si longtemps, une joie! Chantez, femmes; sous le toit, sous le ciel, chantez l'apparition de la bonne nouvelle que je n'espérais plus. |
ΧΟΡΟΣ Ἀνολολύξεται δόμος ἐφεστίοι– 205 σιν ἀλαλαῖς ὁ μελλόνυμ– φος, ἐν δὲ κοινὸς ἀρσένων ἴτω κλαγγὰ τὸν εὐφαρέτραν Ἀπόλλω προστάταν· ὁμοῦ δὲ 210 παιᾶνα, παιᾶν´ ἀνάγετ´, ὦ παρθένοι, βοᾶτε τὰν ὁμόσπορον Ἄρτεμιν Ὀρτυγίαν, ἐλαφαβόλον, ἀμφίπυρον, γείτονάς τε Νύμφας. 215 Ἀείρομ´ οὐδ´ ἀπώσομαι τὸν αὐλόν, ὦ τύραννε τᾶς ἐμᾶς φρενός. Ἰδού μ´ ἀναταράσσει 〈εὐοῖ〉 εὐοῖ μ´ ὁ κισσὸς ἄρτι βακχίαν 220 ὑποστρέφων ἅμιλλαν. Ἰὼ ἰὼ Παιάν· ἴδ´, ὦ φίλα γύναι. τάδ´ ἀντίπρῳρα δή σοι βλέπειν πάρεστ´ ἐναργῆ. |
CHANT DU CHŒUR Éclatez, cris joyeux de nos
filles nubiles, |
ΔΗΙΑΝΕΙΡΑ Ὁρῶ, φίλαι γυναῖκες, οὐδέ μ´ ὄμματος
225 |
DEUXIÈME ÉPISODE DÉJANIRE. — Je le vois, mes amies, ce cortège; il n'a pas échappé à mes yeux qui le guettaient. Salut au courrier si longtemps attendu, s'il m'apporte un message de joie. |
ΛΙΧΑΣ Ἀλλ´ εὖ μὲν ἵγμεθ´, εὖ δὲ προσφωνούμεθα, |
LICHAS. — Oui, nous arrivons sous d'heureux auspices, et tes paroles de bon accueil, femme, conviennent à l'objet de notre mission : comment ne ferais-tu pas fête aux succès de ton mari ? |
ΔΗΙΑΝΕΙΡΑ Ὦ φίλτατ´ ἀνδρῶν, πρῶθ´ ἃ πρῶτα βούλομαι |
DÉJANIRE. — O le plus cher des hommes, apprends-moi d'abord ce que je désire savoir avant tout : recevrai-je ici Héraclès vivant ? |
ΛΙΧΑΣ Ἔγωγέ τοί σφ´ ἔλειπον ἰσχύοντά τε |
LICHAS. — Je l'ai quitté plein de force et de vie, tout florissant, ne souffrant d'aucun mal. |
ΔΗΙΑΝΕΙΡΑ Ποῦ γῆς; πατρῴας εἴτε βαρβάρου; λέγε. |
DÉJANIRE. - Mais en quel endroit de la terre? En pays grec ? à l'étranger ? Parle. |
ΛΙΧΑΣ Ἀκτή τις ἔστ´ Εὐβοιίς, ἔνθ´ ὁρίζεται |
LICHAS. — Il y a en Eubée un promontoire (18) où il consacre à Zeus Cénéen des autels et des offrandes de fruits. |
ΔΗΙΑΝΕΙΡΑ Εὐκταῖα φαίνων ἢ ´πὸ μαντείας τινός; |
DÉJANIRE. — Pour s'acquitter d'un voeu ou sur l'ordre d'un oracle? |
ΛΙΧΑΣ Εὐχαῖς, ὅθ´ ᾕρει τῶνδ´ ἀνάστατον δορὶ
240 |
LICHAS. — C'est un voeu qu'il avait fait, le jour qu'il conquit et ravagea le pays de ces femmes que tu vois. |
ΔΗΙΑΝΕΙΡΑ Αὗται δέ, πρὸς θεῶν, τοῦ ποτ´ εἰσὶ καὶ τίνες; |
DÉJANIRE. — Ces femmes, au nom des dieux, à qui sont-elles ? Et qui sont-elles ? Elles sont dignes de pitié, si leur détresse ne m'abuse. |
ΛΙΧΑΣ Ταύτας ἐκεῖνος Εὐρύτου πέρσας πόλιν |
LICHAS. — Quand il eut pillé la capitale du roi Eurytos, Héraclès les réserva pour sa part et pour les dieux. |
ΔΗΙΑΝΕΙΡΑ Ἦ κἀπὶ ταύτῃ τῇ πόλει τὸν ἄσκοπον |
DÉJANIRE. — A-t-il donc passé au siège de cette ville tout le temps de son interminable absence ? |
ΛΙΧΑΣ Οὔκ, ἀλλὰ τὸν μὲν πλεῖστον ἐν Λυδοῖς χρόνον |
LICHAS. — Nullement. Durant presque toute cette période, il fut retenu en Lydie. Il ne fait point mystère qu'il y avait été vendu comme esclave. Ce récit ne doit point éveiller la jalousie dans ton coeur, femme, car Zeus a tout conduit manifestement. Héraclès passa donc toute une année auprès d'Omphale, l'étrangère qui l'avait acheté. Il ne s'en cache point. Cependant il ressentait vivement cet affront, et il se jura de réduire un jour en esclavage l'auteur de ses disgrâces, ainsi que le fils et la femme de ce prince. Il a tenu parole. Dès qu'il se fut purifié (19), il rassembla une armée d'étrangers et marcha sur la ville où régnait Eurytos (20) — car c'est à ce roi très précisément qu'il imputait son humiliation. Recevant Héraclès à son foyer, le perfide, au mépris de l'hospitalité qui les unissait de longue date, ne l'avait-il pas harcelé de ses insultes ? « Avec ses flèches inévitables, disait-il, il est moins bon tireur que mes enfants! On sait de reste qu'il n'est qu'un esclave qui courbe le dos sous les brimades. » Et il l'avait chassé, un jour qu'après un bon dîner il l'avait trouvé dans les vapeurs du vin. Mon maître lui en garda rancune. A quelque temps de là, sur la hauteur de Tirynthe, Iphitos était allé à la recherche de ses chevaux nomades (21) . Comme le jeune homme marchait, l'oeil et la pensée occupés ailleurs, Héraclès le précipita du haut de la muraille rocheuse. Et voilà pourquoi, dans son courroux, Zeus Olympien, père de tous les êtres, exila son fils et le fit vendre comme esclave : ce qu'il ne lui pardonnait pas, c'était d'avoir, fût-ce une fois, tué un homme en traître. S'il avait pris sa vengeance ouvertement, Zeus ne lui en eût pas tenu rigueur, puisqu'il était dans son droit : pas plus que nous les divinités ne tolèrent les outrages. Aussi bien ces vantards à la langue pernicieuse, les voici à leur tour domiciliés chez Hadès, et leur pays est réduit en servitude. Quant à ces femmes sur qui s'attache ton regard, la route qui va du bonheur à l'infortune les a conduites vers toi : ainsi l'a voulu ton mari, dont j'exécute les ordres en serviteur fidèle. Dès qu'il aura consacré à Zeus paternel des victimes sans tache pour la prise de la ville, tu peux t'attendre à le voir paraître. De cette longue et belle histoire, n'est-ce pas là le plus agréable à entendre ? |
ΧΟΡΟΣ Ἄνασσα, νῦν σοι τέρψις ἐμφανὴς κυρεῖ, |
LE CORYPHÉE. — Reine, à ce beau spectacle, à ce beau récit, ne crains plus de te réjouir! |
ΔΗΙΑΝΕΙΡΑ Πῶς δ´ οὐκ ἐγὼ χαίροιμ´ ἄν, ἀνδρὸς εὐτυχῆ |
DÉJANIRE. — Oui, comment ne me réjouirais-je pas en apprenant cette heureuse fortune de mon époux ? Rien n'est plus légitime, et ma joie répond naturellement au bonheur de ses armes. Cependant, à bien voir les choses, on ne peut s'empêcher de craindre que l'homme heureux ne fasse un jour quelque faux pas. Pour tout dire, une étrange pitié me pénètre, mes amies, à la vue de ces captives qu'un destin cruel jette errantes Sur la terre d'exil, orphelines sans foyer, et qui, étant nées libres apparemment, n'ont plus devant elles qu'une vie d'esclavage. O Zeus tutélaire, épargne tes rigueurs à ceux de mon sang — ou attends, pour les frapper, que je ne sois plus là pour le voir! Tant le spectacle de ces jeunes femmes m'inspire d'appréhensions. Dis-moi, infortunée, mêlée à ces jeunesses, qui es-tu? Es-tu fille ou as-tu déjà des enfants ? Tu ne parais pas familiarisée avec toutes ces misères. Tu dois être de noble maison, en tout cas. Lichas, de quelle famille est-elle issue ? Quels sont ses parents ? Ne me cache rien. Entre toutes les autres, elle éveille mon intérêt, quand je la considère, car elle est la seule qui porte fièrement sa disgrâce. |
ΛΙΧΑΣ Τί δ´ οἶδ´ ἐγώ; τί δ´ ἄν με καὶ κρίνοις; ἴσως |
LICHAS. — Qu'en sais-je, moi ? A quoi bon m'interroger là-dessus ? je pense qu'elle appartient à l'une des meilleures familles du pays. |
ΔΗΙΑΝΕΙΡΑ Μὴ τῶν τυράννων; Εὐρύτου σπορά τις ἦν; |
DÉJANIRE. — A la famille royale, peut-être ? N'y avait-il pas une fille d'Eurytos ? |
ΛΙΧΑΣ Οὐκ οἶδα· καὶ γὰρ οὐδ´ ἀνιστόρουν μακράν. |
LICHAS. — Je l'ignore. Je n'ai pas cherché à en savoir si long. |
ΔΗΙΑΝΕΙΡΑ Οὐδ´ ὄνομα πρός του τῶν ξυνεμπόρων ἔχεις; |
DÉJANIRE. — N'as-tu pas même appris son nom par une de ses compagnes ? |
ΛΙΧΑΣ Ἥκιστα· σιγῇ τοὐμὸν ἔργον ἤνυτον. |
LYCHAS. - Non, j'ai accompli ma mission en silence. |
ΔΗΙΑΝΕΙΡΑ Εἴπ´, ὦ τάλαιν´, ἀλλ´ ἡμὶν ἐκ σαυτῆς· ἐπεὶ
320 |
DÉJANIRE. — Tu peux te confier à moi, pauvre jeune femme. Tu ne peux qu'aggraver ton malheur en nous cachant qui tu es. |
ΛΙΧΑΣ Οὔ τἄρα τῷ γε πρόσθεν οὐδὲν ἐξ ἴσου |
LICHAS. — Elle aura bien changé si sa langue se délie; un mot, elle n'a pas proféré un seul mot ! Gardant renfermée dans son sein la douleur qui l'oppresse, elle n'a cessé de pleurer, la malheureuse, depuis qu'elle a quitté sa patrie dévastée. Certes, elle subit un triste sort, et cela dispose en sa faveur. |
ΔΗΙΑΝΕΙΡΑ Ἡ δ´ οὖν ἐάσθω, καὶ πορευέσθω στέγας |
DÉJANIRE. — Eh bien, laissons-la tranquille. Qu'on la conduise dans le palais, et qu'elle y soit bien traitée, car je ne veux pas ajouter à ses maux en irritant son chagrin : c'est assez de ce qu'elle souffre. D'ailleurs, il est temps que nous rentrions, les uns et les autres. Toi, je te donne congé pendant que je prépare tout ce qu'il faut dans la maison. (Les captives entrent dans le palais.) |
ΑΓΓΕΛΟΣ Αὐτοῦ γε πρῶτον βαιὸν ἀμμείνας´, ὅπως
335 |
LE MESSAGER (à Déjanire.) — S'il te plaît, demeure quelques instants : je voudrais, loin de ces gens-là, t'apprendre qui tu introduis chez toi et te découvrir tout ce qu'on t'a dissimulé. Cela t'importe à connaître, et je sais le fin mot de la chose. |
ΔΗΙΑΝΕΙΡΑ Τί δ´ ἐστί; τοῦ με τήνδ´ ἐφίστασαι βάσιν; |
DÉJANIRE. — Qu'y a-t-il qui vaille que tu m'arrêtes? |
ΑΓΓΕΛΟΣ Σταθεῖς´ ἄκουσον· καὶ γὰρ οὐδὲ τὸν πάρος
340 |
LE MESSAGER. — Suspens tes pas; prête l'oreille. Si, tout à l'heure, tu n'as pas perdu ton temps à m'écouter, cette fois-ci non plus, je pense. |
ΔΗΙΑΝΕΙΡΑ Πότερον ἐκείνους δῆτα δεῦρ´ αὖθις πάλιν |
DÉJANIRE. — Rappellerons-nous nos gens, ou préfères-tu me parler en présence de ces femmes seulement? |
ΑΓΓΕΛΟΣ Σοὶ ταῖσδέ τ´ οὐδὲν εἴργεται, τούτους δ´ ἔα. |
LE MESSAGER. — Celles-ci ne nous gênent point, mais laisse les autres où ils sont. |
ΔΗΙΑΝΕΙΡΑ Καὶ δὴ βεβᾶσι, χὠ λόγος σημαινέτω. 345 |
DÉJANIRE. — Eh bien, ils sont partis, explique-toi donc. |
ΑΓΓΕΛΟΣ Ἁνὴρ ὅδ´ οὐδὲν ὧν ἔλεξεν ἀρτίως |
LE MESSAGER. — Cet homme n'a point dit la vérité. Ou il vient de mentir devant toi, ou son premier récit n'était que mensonge. |
ΔΗΙΑΝΕΙΡΑ Τί φῄς; σαφῶς μοι φράζε πᾶν ὅσον νοεῖς· |
DÉJANIRE. — Comment cela? Ne me cache rien de ta pensée. Je ne comprends pas ce que tu insinues. |
ΑΓΓΕΛΟΣ Τούτου λέγοντος τἀνδρὸς εἰσήκους´ ἐγώ, |
LE MESSAGER. J’ai parfaitement entendu Lichas raconter devant la foule attroupée que ton mari n'a écrasé Eurytos en sa ville forte d'Oechalie que pour s'emparer de la jeune femme. Nul autre dieu qu'Erôs (22) ne l'a entraîné dans cette guerre, et ni les Lydiens, ni le servage auprès d'Omphale, ni le meurtre d'Iphitos n'y sont pour rien. En oubliant de parler d'Erôs, Lichas fait signifier tout autre chose à son récit! La vérité, c'est qu'Héraclès ne put décider le père à lui donner sa fille pour partager sa couche en secret. C'est pourquoi, ayant forgé un vague prétexte, il attaque la patrie de la jeune femme - je veux dire le royaume d'Eurytos, dont a parlé Lichas —, tue le roi et met à sac sa capitale. Et tu vois qu'aujourd'hui il s'est fait précéder par sa captive, bien résolu qu'il est, femme, à la traiter autrement qu'en esclave (23). Ne te fais aucune illusion : il brûle pour elle. J'ai cru devoir, maîtresse, te rapporter les choses telles que je les ai entendues de la bouche de Lichas, tandis qu'autour de moi, sur la lace; toute la ville écoutait son récit; c'est de quoi le confondre, je pense! Si ces nouvelles te chagrinent, j'en suis fâché, mais j'ai rétabli la vérité. |
ΔΗΙΑΝΕΙΡΑ Οἴμοι τάλαινα, ποῦ ποτ´ εἰμὶ πράγματος;
375 |
DÉJANIRE. — Hélas! Je ne sais plus où j'en suis. Quel sujet d'affliction j'ai introduit sans le savoir sous mon toit! Malheureuse! Mais dis-moi, son nom est-il inconnu, comme le jurait le courrier? |
ΑΓΓΕΛΟΣ Ἦ κάρτα λαμπρὰ καὶ κατ´ ὄνομα καὶ φύσιν, |
LE MESSAGER. — Son origine la distingue autant que sa beauté. C'est la fille du roi Eurytos; elle se nomme Iole. De sa naissance, Lichas ne t'a rien dit; trop discret pour la questionner, bien sûr! |
ΧΟΡΟΣ Ὄλοιντο μή τι πάντες οἱ κακοί, τὰ δὲ |
LE CORYPHÉE. — Périssent, je ne dis pas tous les méchants, mais ceux qui se déshonorent par une dissimulation criminelle! |
ΔΗΙΑΝΕΙΡΑ Τί χρὴ ποεῖν, γυναῖκες; ὡς ἐγὼ λόγοις
385 |
DÉJANIRE. — Que faire, mes amies? Ce que je viens d'entendre me laisse désemparée. |
ΧΟΡΟΣ Πεύθου μολοῦσα τἀνδρός, ὡς τάχ´ ἂν σαφῆ |
LE CORYPHÉE. — Rentre donc et interroge le courrier. Il ne dissimulerait plus longtemps, si tu voulais le contraindre à répondre. |
ΔΗΙΑΝΕΙΡΑ Ἀλλ´ εἶμι· καὶ γὰρ οὐκ ἀπὸ γνώμης λέγεις. |
DÉJANIRE. — Oui, je vais y aller; tu as raison. |
ΑΓΓΕΛΟΣ Ἡμεῖς δὲ προσμένωμεν; ἢ τί χρὴ ποεῖν; 390 |
LE CORYPHÉE. — Et nous, resterons-nous ici? Que devons-nous faire? |
ΔΗΙΑΝΕΙΡΑ Μίμν´, ὡς ὅδ´ ἁνὴρ οὐκ ἐμῶν ὑπ´ ἀγγέλων, |
DÉJANIRE. — Reste. Sans qu'il soit besoin de l'appeler, voici notre homme qui sort du palais. |
ΛΙΧΑΣ Τί χρή, γύναι, μολόντα μ´ Ἡρακλεῖ λέγειν; |
LICHAS. - Femme, n'as-tu point un message à me confier pour Héraclès ? Tu me vois Sur mon départ. |
ΔΗΙΑΝΕΙΡΑ Ὡς ἐκ ταχείας σὺν χρόνῳ βραδεῖ μολὼν
395 |
DÉJANIRE. — Eh quoi! si longtemps attendu, tu t'enfuis déjà? J'ai encore des questions à te poser. |
ΛΙΧΑΣ Ἀλλ´ εἴ τι χρῄζεις ἱστορεῖν, πάρειμ´ ἐγώ. |
LICHAS. — S'il y a des détails dont tu es curieuse, je suis à tes ordres. |
ΔΗΙΑΝΕΙΡΑ Ἦ καὶ τὸ πιστὸν τῆς ἀληθείας νεμεῖς; |
DÉJANIRE. — Peux-tu me garantir que tu dis la vérité? |
ΛΙΧΑΣ Ἴστω μέγας Ζεύς, ὧν γ´ ἂν ἐξειδὼς κυρῶ. |
LICHAS. — Le grand Zeus m'en soit témoin, j'ai dit ce que je sais. |
ΔΗΙΑΝΕΙΡΑ Τίς ἡ γυνὴ δῆτ´ ἐστὶν ἣν ἥκεις ἄγων; 400 |
DÉJANIRE. — Qui est cette femme que tu as amenée (24) ? |
ΛΙΧΑΣ Εὐβοιίς· ὧν δ´ ἔβλαστεν οὐκ ἔχω λέγειν. |
LICHAS. — Une Eubéenne. Quant à ses parents, je ne saurais rien dire. |
ΑΓΓΕΛΟΣ Οὗτος, βλέφ´ ὧδε. Πρὸς τίν´ ἐννέπειν δοκεῖς; |
LE MESSAGER. — Holà, l'homme! Regarde un peu de ce côté. A qui crois-tu que tu t'adresses ? |
ΛΙΧΑΣ Σὺ δ´ εἰς τί δή με τοῦτ´ ἐρωτήσας ἔχεις; |
LICHAS. — Et toi, donc, où veux-tu en venir? |
ΑΓΓΕΛΟΣ Τόλμησον εἰπεῖν, εἰ φρονεῖς, ὅ ς´ ἱστορῶ. |
LE MESSAGER. — N'esquive pas ma question, si tu sais ce que parler veut dire. |
ΛΙΧΑΣ Πρὸς τὴν κρατοῦσαν Δῃάνειραν, Οἰνέως 405 |
LICHAS. — Selon toute apparence, je m'adresse à la reine Déjanire, fille d'Œnée, épouse d'Héraclès, et je suis à son service. |
ΑΓΓΕΛΟΣ Τοῦτ´ αὔτ´ ἔχρῃζον, τοῦτό σου μαθεῖν· λέγεις |
LE MESSAGER. — C'est cela justement que je voulais entendre : tu es son serviteur, dis-tu? |
ΛΙΧΑΣ Δίκαια γάρ. |
LICHAS. — N'est-ce pas la vérité? |
ΑΓΓΕΛΟΣ Τί δῆτα; ποίαν ἀξιοῖς δοῦναι δίκην, 410 |
LE MESSAGER. — Quelle punition penses-tu mériter, alors, si tu es pris à mentir ? |
ΛΙΧΑΣ Πῶς μὴ δίκαιος; τί ποτε ποικίλας ἔχεις; |
LICHAS. — Mentir, moi? Que signifie cette fable ? |
ΑΓΓΕΛΟΣ Οὐδέν· σὺ μέντοι κάρτα τοῦτο δρῶν κυρεῖς. |
LE MESSAGER. — Pour une fable, c'est toi qui viens d'en inventer une. |
ΛΙΧΑΣ Ἄπειμι· μῶρος δ´ ἦ πάλαι κλύων σέθεν. |
LICHAS. — Je te quitte la place. Je suis sot de perdre mon temps à t'écouter. |
ΑΓΓΕΛΟΣ Οὔ, πρίν γ´ ἂν εἴπῃς ἱστορούμενος βραχύ. 415 |
LE MESSAGER. — Réponds d'abord à une simple question. |
ΛΙΧΑΣ Λέγ´, εἴ τι χρῄζεις· καὶ γὰρ οὐ σιγηλὸς εἶ. |
LICHAS. — Questionne, puisque tu en as envie; mais tu es un fieffé bavard. |
ΑΓΓΕΛΟΣ Τὴν αἰχμάλωτον, ἣν ἔπεμψας ἐς δόμους, |
LE MESSAGER. — La captive que tu as amenée... Là, tu sais qui je veux dire? |
ΛΙΧΑΣ Φημί, πρὸς τί δ´ ἱστορεῖς; |
LICHAS. — Oui. Eh bien? |
ΑΓΓΕΛΟΣ Οὔκουν σὺ ταύτην, ἣν ὑπ´ ἀγνοίας ὁρᾷς, |
LE MESSAGER. — N'as-tu pas déclaré que cette prisonnière, que tu feins de ne pas reconnaître, n'était autre qu'Iole, la fille d'Eurytos ? |
ΛΙΧΑΣ Ποίοις ἐν ἀνθρώποισι; τίς πόθεν μολὼν |
LICHAS. — Devant qui ai-je dit cela? Cite un seul témoin qui m'ait entendu. |
ΑΓΓΕΛΟΣ Πολλοῖσιν ἀστῶν· ἐν μέσῃ Τραχινίων |
LE MESSAGER. — Je puis en citer beaucoup : sur la, grand'place de Trachis, toute une foule t'écoutait. |
ΛΙΧΑΣ Ναί, |
LICHAS. — Je disais qu'on me l'avait dit. Se faire l'écho d'un bruit et donner pour certain, cela fait deux. |
ΑΓΓΕΛΟΣ Ποίαν δόκησιν; οὐκ ἐπώμοτος λέγων |
LE MESSAGER. — Un bruit? N'as-tu pas assuré sous la foi du serment que c'est une épouse que tu amenais là pour Héraclès? |
ΛΙΧΑΣ Ἐγὼ δάμαρτα; Πρὸς θεῶν, φράσον, φίλη |
LICHAS. — Moi, j'ai dit une épouse? Par les dieux, chère maîtresse, qui est cet inconnu? |
ΑΓΓΕΛΟΣ Ὃς σοῦ παρὼν ἤκουσεν ὡς ταύτης πόθῳ |
LE MESSAGER. — Quelqu'un qui t'a bel et bien ouï conter comment, pour l'amour de cette jeune fille, tout un pays fut mis sous le joug, sans que sa ruine fût imputable à la Lydienne, mais bien — de toute évidence — à cette passion. |
ΛΙΧΑΣ Ἅνθρωπος, ὦ δέσποιν´, ἀποστήτω. Τὸ γὰρ |
LICHAS. — Maîtresse, renvoie-le. Quelle absurdité de prêter attention à des radotages ! |
ΔΗΙΑΝΕΙΡΑ Μή, πρός σε τοῦ κατ´ ἄκρον Οἰταῖον νάπος |
DÉJANIRE. — Par Zeus qui lance des éclairs sur les hautes futaies de l'Œta! — ne me cache rien. Celle à qui tu t'adresses est une femme raisonnable, qui connaît la vie et l'inconstance de notre nature. Porter un défi à Erôs, comme un pugiliste, cela a-t-il le sens commun? Erôs règne sur les dieux à sa fantaisie; il règne sur moi; pourquoi ne régnerait-il pas sur d'autres femmes ? Que mon mari soit vulnérable à ses traits, lui aussi, je serais bien folle de lui en faire grief; et ce n'est pas non plus la faute de cette femme, car elle n'a voulu ni m'outrager ni me nuire. Que tu me connais mal! (25) Si c'est mon mari qui te souffle ces mensonges, il t'enseigne là une vilaine science; si tu as suivi ta propre inspiration, tu croyais peut-être bien faire, mais il n'est pas douteux que tu as mal agi. Allons, dis toute la vérité. Le nom de menteur déshonore un homme libre. D'ailleurs, tu ne peux plus nous donner le change : trop de gens ont entendu ton récit, qui pourront me le répéter. Est-ce la peur qui te retient? Alors tu trembles mal à propos, car rien ne peut m'être plus pénible que l'incertitude. Et qu'y a-t-il d'effrayant pour moi à savoir? Comme si Héraclès n'en avait pas déjà épousé beaucoup d'autres! En est-il une seule qui ait eu à souffrir de ma part une parole aigre, un affront ? Vois-tu, quand elle se consumerait d'amour pour lui, cette fille a ému ma pitié dès que je l'ai vue, triste victime de sa beauté et cause involontaire de ruine et d'esclavage pour sa patrie (26). Allons, il faut laisser les choses suivre leur cours. Seulement, je t'en avertis : n'essaie pas de jouer au plus fin avec moi. |
ΧΟΡΟΣ Πείθου λεγούσῃ χρηστά, κοὐ μέμψῃ χρόνῳ
470 |
LE CORYPHÉE. — Elle a raison; écoute-la. Tu n'auras pas à le lui reprocher plus tard, et moi je t'en saurai gré. |
ΛΙΧΑΣ Ἀλλ´, ὦ φίλη δέσποιν´, ἐπεί σε μανθάνω |
LICHAS. — Ma chère maîtresse, puisque je vois que, mortelle, tu te résignes sagement aux disgrâces des mortels, je te découvrirai toute la vérité. Il en est bien comme le dit cet homme : Héraclès, un jour, fut pénétré d'un terrible désir pour la jeune femme; à cause d'elle fut consommée la ruine d'Œchalie, sa ville natale. Mais il faut dire aussi ce qui fait honneur à ton mari : jamais il ne m'a demandé de te rien cacher, jamais il n'a nié le fait. C'est moi, maîtresse, craignant de t'affliger, c'est moi seul qui suis fautif, si tu vois là une faute. Main-tenant, tu sais tout. Songe au bonheur de ton mari en même temps qu'au tien : ne hais point cette femme; ne renie pas les bonnes paroles que tu lui as dites. Partout ailleurs invincible, le héros cède en toutes choses à l'amour qu'il a pour elle. |
ΔΗΙΑΝΕΙΡΑ Ἀλλ´ ὧδε καὶ φρονοῦμεν ὥστε ταῦτα δρᾶν,
490 |
DÉJANIRE. — Tu nous donnes un avis conforme à notre dessein. Nous n'attirerons pas sur nous le malheur en bataillant sans espoir contre les dieux. Rentrons à la maison : tu emporteras un message écrit, avec les présents par lesquels je me dois de répondre à ceux que j'ai reçus. Il ne convient pas, ayant conduit jusqu'ici ce beau cortège (27), que tu repartes les mains vides. |
ΧΟΡΟΣ Μέγα
τι σθένος ἁ
Κύπρις
ἐκφέρεται
νίκας ἀεί· |
CHANT DU CHOEUR Quelle force montre Cypris en
chacune de ses victoires! |
ΔΗΙΑΝΕΙΡΑ Ἦμος, φίλαι, κατ´ οἶκον ὁ ξένος θροεῖ |
TROISIÈME ÉPISODE DÉJANIRE. — Mes amies, tandis que le courrier cause avec les jeunes captives en attendant son départ, je suis venue vous retrouver ici sans éveiller l'attention. Je veux vous découvrir ce que j'ai préparé de mes mains et vous faire les confidentes de mon triste sort. Cette jeune fille (ou plutôt, je pense, cette jeune femme), on me l'impose donc, comme on donne l'ordre à un marin d'embarquer une charge suspecte, et c'est là tout le prix de ma tendresse : être deux, désormais, à attendre l'étreinte de l'époux! Oui, c'est ainsi qu'Héraclès, à mes yeux la loyauté, la vertu mêmes, me remercie d'avoir si longtemps gardé son foyer! Oh! je ne vais pas m'irriter contre lui, car il souffre là d'un mal qui le met souvent à l'épreuve. Cependant, vivre sous le même toit qu'une rivale, partager avec elle son mari, quelle femme s'y résoudrait ? Je vois cette jeunesse fraîche éclose et la mienne près de se faner. Le regard de l'homme cueille avidement la fleur nouvelle; il se détourne des autres... Je crains qu'Héraclès n'ait plus de mon époux que le nom : à la plus jeune tout l'amour! Malgré tout, je le répète, pour une femme intelligente, c'est une faute que de céder à la colère. J'ai trouvé, mes amies, un autre remède à mon chagrin, et vous allez le connaître. Je conservais, renfermé dans un coffret d'airain, un présent que m'avait fait autrefois le Centaure Nessos (32). J'étais encore presque une enfant lorsque, mortellement blessé, le vieux monstre au poitrail crépu m'en fit don. D'un bord à l'autre du fleuve Evénos, au cours profond, sans s'aider de rames ni de voiles, il gagnait sa vie en passant à bras les voyageurs. Je faisais alors mon premier voyage avec Héraclès, le jeune époux que mon père m'avait choisi. Le Centaure me prend sur son dos, mais voilà qu'au milieu du passage l'insolent ose porter les mains sur moi. A mes cris, le fils de Zeus se retourne et lui décoche une flèche sifflante qui s'enfonce dans sa poitrine jusqu'au poumon. Le monstre agonisant peut à peine m'adresser quelques mots : « Fille du vieil Oenée, ô ma dernière passagère, cette aventure te portera bonheur si tu consens à m'écouter. Recueille du sang coagulé de ma blessure, mêlé au noir venin de l'hydre de Lerne (33) dont la flèche est imprégnée, et tu posséderas un charme d'amour si puissant sur l'esprit d'Héraclès que jamais il ne chérira aucune femme plus que toi. » Depuis sa mort, mes amies, je conservais à la maison ce présent soigneusement enfermé. L'idée m'est venue d'en teindre une tunique en suivant les instructions du moribond. C'est chose faite. Loin de moi les audaces perfides; puissé-je n'en être jamais capable! Les femmes qui le sont me font horreur. Si seulement, par l'effet de ce philtre, j'éclipsais ma jeune rivale en jetant un charme sur Héraclès, j'aurais atteint mon but. Trouvez-vous mon projet raisonnable ? Sinon, je l'abandonnerai. |
ΧΟΡΟΣ Ἀλλ´ εἴ τις ἐστὶ πίστις ἐν τοῖς δρωμένοις, |
LE CORYPHÉE. — Si tu es fondée à croire que ce moyen peut réussir, l'idée ne m'en semble pas mauvaise. |
ΔΗΙΑΝΕΙΡΑ Οὕτως ἔχει γ´ ἡ πίστις, ὡς τὸ μὲν δοκεῖν
590 |
DÉJANIRE. — Certes, j'ai confiance dans ce moyen, mais je ne peux rien affirmer avant d'avoir tenté l'épreuve. |
ΧΟΡΟΣ Ἀλλ´ εἰδέναι χρὴ δρῶσαν, ὡς οὐδ´ εἰ δοκεῖς |
LE CORYPHÉE. — Essaie donc. Il n'y a que l'expérience qui puisse t'apporter une certitude. |
ΔΗΙΑΝΕΙΡΑ Ἀλλ´ αὐτίκ´ εἰσόμεσθα, τόνδε γὰρ βλέπω |
DÉJANIRE. — Nous serons bientôt fixées. J'aperçois Lichas devant la porte : il est déjà sur son départ. Vous, conservez bien mon secret, Surtout! Ce qu'on garde pour soi, le mal comme le bien, ne risque pas d'être mal jugé. |
ΛΙΧΑΣ Τί χρὴ ποεῖν; σήμαινε, τέκνον Οἰνέως, |
LICHAS (sortant du palais). — Donne-moi tes instructions, fille d'Œnée. Il est grand temps que je parte. |
ΔΗΙΑΝΕΙΡΑ Ἀλλ´ αὐτὰ δή σοι ταῦτα καὶ πράσσω, Λίχα, |
DÉJANIRE. — J'y ai songé, Lichas, pendant que tu devisais avec ces étrangères. Je désire que tu emportes pour mon mari ce vêtement d'un tissu très léger; c'est un ouvrage de ma main. Quand tu le lui remettras, recommande-lui d'avoir soin que personne au monde ne s'en revête avant lui; qu'il ne l'expose ni aux feux du soleil, ni à la flamme d'un autel ou d'un foyer, jusqu'au jour où lui-même, en public, présidant à une immolation de taureaux, il se montrera aux dieux dans l'éclat de cette parure. J'avais promis, s'il me revenait sain et sauf ou que je ne pusse douter de son retour, de leur présenter un Héraclès brillant d'une beauté nouvelle dans sa tunique toute neuve de sacrificateur. Pour gage de tout ceci, tu auras mon sceau apposé sur la cassette : il le reconnaîtra tout de suite. Pars, il en est temps; et souviens-toi qu'un messager doit s'en tenir aux ordres qu'on lui donne. Si tu travailles à mériter mes bonnes grâces, jointes à celles de ton maître, ce sera pour toi double profit. |
ΛΙΧΑΣ Ἀλλ´ εἴπερ Ἑρμοῦ τήνδε πομπεύω τέχνην
620 |
LICHAS. — Foi de messager sûr, digne élève de mon patron Hermès, ne crains point de ma part une fâcheuse surprise : en présentant le coffret dans l'état où je le reçois, j'y joindrai en garantie tes recommandations. |
ΔΗΙΑΝΕΙΡΑ Στείχοις ἂν ἤδη· καὶ γὰρ ἐξεπίστασαι |
DÉJANIRE. — Je ne te retiens plus. Tu as vu, n'est-ce pas, comment vont toutes choses, à la maison? |
ΛΙΧΑΣ Ἐπίσταμαί τε καὶ φράσω σεσωσμένα. |
LICHAS. — J'ai constaté que l'ordre y règne, et je le dirai. |
ΔΗΙΑΝΕΙΡΑ Ἀλλ´ οἶσθα μὲν δὴ καὶ τὰ τῆς ξένης ὁρῶν |
DÉJANIRE. — Tu as vu comment j'ai reçu l'étrangère, avec quelles marques d'amitié ? |
ΛΙΧΑΣ Ὥστ´ ἐκπλαγῆναι τοὐμὸν ἡδονῇ κέαρ. |
LICHAS. — J'en ai moi-même été charmé autant que surpris. |
ΔΗΙΑΝΕΙΡΑ Τί δῆτ´ ἂν ἄλλο γ´ ἐννέποις; δέδοικα γὰρ
630 |
DÉJANIRE. — Que peux-tu dire encore à
ton maître? Que je soupire après son retour? J'aimerais à savoir
d'abord si mes désirs sont partagés. |
ΧΟΡΟΣ
Ὦ ναύλοχα καὶ πετραῖα |
CHANT DU CHOEUR O vous qui habitez devant la
rade, |
(01) LES
TRACHINIENNES
. Sophocle s'inspire d'une épopée perdue, la Prise d'Œchalie, attribuée
par les anciens à Créophyle de Samos, un poète qu'on disait contemporain
d'Homère. On ne sait quelle place y tenait le personnage de Déjanire, mais la
jalousie funeste de cette épouse d'Héraclès a souvent inspiré les lyriques,
d'Archiloque à Pindare. Bacchylide de Céos, en particulier, fournit par avance
un excellent résumé des Trachiniennes (Cf. les Poésies de Bacchylide
de Céos, traduites par A. M. Desrousseaux, fragment XVI).
La tradition la plus commune place le voyage d'Héraclès en Étolie et son
mariage avec la fille d'Œnée après les grands travaux accomplis, mais le
cycle des douze travaux ne fut guère fixé avant l'époque d'Alexandre.
Sophocle était donc libre d'arranger à son gré l'ordre des faits sans
contrarier les versions reçues. Seule la victoire sur l'hydre de Lerne est
présentée par lui comme antérieure aux noces du héros et de Déjanire, car
toute son affabulation reposait sur l'histoire du Centaure et de la flèche
empoisonnée; le reste, il le laisse dans l'ombre. Ce qui importait à son
dessein, c'était d'accentuer le contraste entre la jeune maîtresse et
l'épouse vieillissante.
Sur la date à assigner à la représentation, les critiques se divisent : les
uns tiennent la pièce pour postérieure à l'Héraclès d'Euripide (cf.
Masqueray, introduction aux Trachiniennes); les autres (cf. Parmentier, introduction
à l'Héraclès) jugent que c'est, une fois de plus, Euripide qui a
prétendu corriger les conceptions de son devancier. Des similitudes de détail,
le style d'un prologue, l'emploi d'un personnage accessoire, un dispositif
choral, ou même la reprise d'une situation exploitée comme un lieu commun de
la scène grecque (en l'espèce l'arrivée d'un blessé en proie à un accès de
son mal) n'autorisent aucune conclusion décisive. A s'en tenir aux
vraisemblances, il est singulier que Sophocle, s'il a voulu en remontrer à son
rival, et après avoir tracé cette fine étude de Déjanire, pastiche
supérieur de l'art euripidéen, ait en partie manqué son demi-dieu supplicié,
thème épique fait, semblait-il, exprès pour lui. On dirait qu'il s'est
ingénié à le peindre comme une brute. Au contraire, le lent processus
d'idéalisation qui a humanisé depuis les conceptions primitives la figure du
tueur de monstres trouve sa plus haute expression dans l'Héraclès furieux
d'Euripide. Ce drame expose comment le héros, tous ses travaux accomplis, tombe
dans un piège que lui tend Héra; saisi d'un accès de folie, il tue ses
enfants et sa femme Mégara; après quoi, revenu à la raison, accablé de
remords, il surmonte encore la tentation du désespoir, — donnant ainsi une
leçon à l'époux sans délicatesse de Déjanire. Il n'est pas jusqu'aux
affinités attiques de la légende qu'Euripide ne prenne plaisir à souligner,
plus athénien en l'occurrence que le poète coloniate. Celui-ci mettra, dans sa
dernière oeuvre, la leçon à profit. Une hypothèse toute différente, nous
l'avons indiqué dans notre introduction, est défendue, dans leur édition
récente, par Mazon et M. Dain : Les Trachiniennes seraient la première
en date des pièces conservées de Sophocle.
(02) OEnée,
roi d'Etolie, père de Déjanire, de Méléagre et de Tydée (ce dernier, père
de Diomède).
(03) Fleuve
qui descend du Pinde et se jette dans la mer Ionienne. Il sépare l'Etolie de
l'Acarnanie. Fils de l'Océan et de Téthys, c'est le plus grand et le plus
fécond des fleuves. La racine de son nom : ach (cf. aqua en
latin), se retrouve dans les noms d'autres rivières, et jusque dans le nom des
Achéens : le peuple des rivières.
(04) Héraclès,
c'est le héros dorien : ses voyages, ses aventures, ses vertus, ses travaux,
sont ceux d'une race. Sa figure morale s'est dégagée lentement d'un folklore
abondant et divers où l'on démêle des traditions d'origine argienne et
d'autres du fonds thébain. Dans les mythes les plus anciens, il apparaît,
comme divinité chthonienne, associé à Déméter, à Coré, à Dionysos, dans
les pratiques funéraires et les rites de fécondité. De là ses descentes aux
Enfers; de là les exploits burlesques du paillard et du goinfre célébré dans
les drames satyriques : dieu libérateur, mais esclave lui-même de ses
appétits. S'il est astreint à d'incessantes épreuves, c'est qu'Héra poursuit
en lui un enfant de l'amour.
(05) Iphitos,
fils d'Eurytos. Cf. v. 260-273.
(06)
Ville de Phthiotide, voisine du golfe Maliaque. Héraclès y est l'hôte du roi
Céyx.
(07) Omphale,
reine de Lydie. Selon les uns, Héraclès amoureux se serait laissé aller
auprès d'elle à une mollesse tout orientale, vêtu d'une longue robe à la
mode du pays, et filant aux pieds de sa maîtresse; selon d'autres, il accomplit
pour elle de nouveaux exploits et reconquit ainsi sa liberté.
(08) Le
mot « île » n'est pas dans le texte. Mais l'expression « détroit marin »
et, d'autre part, l'antithèse continent-îles rendent vraisemblable la
suggestion du scoliaste, que nous suivons ici.
(09)
L'Afrique est jointe tantôt à l'Europe, tantôt à l'Asie, dans cette division
des terres en deux continents.
(10) Héraclès
naquit à Thèbes et y fut élevé. Alcmène avait un sanctuaire à Thèbes. Son
mari, Amphitryon, est roi de Thèbes.
(11) Héraclès est descendu plusieurs fois
aux Enfers : il y a capturé Cerbère et l'a traîné au grand jour; il en a
ramené Alceste (cf. Euripide, Alceste), et aussi Thésée.
(12) Racine note : « Pascitur in suis campis.
Bonheur des jeunes filles bien exprimé. »
(13) Cf. n. 185.
(14) Cf. n. 103.
(15) Prairies consacrées aux dieux, donc
interdites à la culture.
(16) Cf. n.
80.
(17) Ortygie
est l'ancien nom de Délos : l'île aux Cailles (Od. V. 123).
(18) Aujourd'hui
cap Lithada, au nord-ouest de l'Eubée.
(19)
Par son servage, explique le scoliaste. On peut aussi entendre : purifié de la
souillure que constitue son servage.
(20) Oechalie,
en Eubée.
(21) Avant
l'arrivée en Argolide des princes Achéens, Tirynthe (la ville des tours)
aurait appartenu à Amphitryon. Héraclès y serait né. Il y habitait encore,
avec sa famille, à l'époque où il accomplissait ses travaux au service
d'Eurysthée. Iphitos, fils d'Eurytos, était son hôte (cf. Od. XXI,
27).
(22) Cf. n. 54.
(23) Note de Racine : « Cette injustice d'Hercule
et son infidélité envers Déjanire sont cause de sa perte et l'en rendent
digne. »
(24) Idem : « Cet air
froid qu'elle affecte et ses interrogations sont très belles. »
(25) Idem : «
Admirable discours d'une jalouse qui veut apprendre son malheur. »
(26) Idem : « Elle
feint d'avoir beaucoup de compassion pour sa rivale. » (Est-ce pure feinte?)
(27) Idem : « Cela
est dit avec une raillerie amère. »
(28) Ville d'Acarnanie,
située sur une hauteur dominant le cours inférieur de l'Achelôos.
(29) Cf. n. 51.
(30) Littéralement :
qui se tend en arrière.
(31) Les juges des Jeux
portent une baguette pour insigne.
(32) Sur les Centaures,
cf. Il. I, 268, II, 743, où ils sont dépeints comme des animaux sauvages,
velus, hantant les montagnes de la Thessalie; Od. XXI, 295-304, où ils
sont désignés par leur nom de centaures : « piqueurs de taureaux ». Peuple
pasteur, aux instincts brutaux et sensuels; associés aux Satyres dans les
pompes dionysiaques, la mythologie les fait fils d'Ixion et de la Nuée (cf.
Pind. Pyth., II, v. 35-70). Comme les Gandharvas de l'Inde, ils seraient
une personnification des rayons solaires. Sur Nessos, on ne sait guère que ce
que rapporte ici Sophocle. L'Evenos est un fleuve d'Etolie.
(33) Serpent géant à
sept têtes, qui vivait dans les marais, au bord du golfe d'Argolide.
(34) Le nom de
Thermopyles (Chaudes Portes) désignait un défilé où se trouvaient des
sources chaudes, extrême prolongement de la chaîne de l'Œta vers le golfe
Maliaque. Une bande alluvionnaire déposée par le Sperchios et où passe la
route actuelle de Lamia à Atalanti a repoussé la côte à trois ou quatre
kilomètres (Cf. Fougères, Guide bleu de la Grèce. Paris, 1911).Au
printemps et à l'automne, se tenaient à Anthéla des assemblées
amphictyoniques. Les amphictyonies étaient des confédérations de plusieurs
cités qui se groupaient autour d'un sanctuaire. La vierge aux flèches d'or est
Artémis; toute la côte de Thessalie lui était consacrée.