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ARISTOTE

POLITIQUE livre V ou VIII selon les éditions

Deux sortes de monarchies

Rois et tyrans.

 

 

 

§ 1. Λείπεται δ' ἐπελθεῖν καὶ περὶ μοναρχίας, ἐξ ὧν τε φθείρεται καὶ δι' ὧν σῴζεσθαι πέφυκεν. 1310b Σχεδὸν δὲ παραπλήσια τοῖς εἰρημένοις περὶ τὰς πολιτείας ἐστὶ καὶ τὰ συμβαίνοντα περὶ τὰς βασιλείας καὶ τὰς τυραννίδας. Ἡ μὲν γὰρ βασιλεία κατὰ τὴν ἀριστοκρατίαν ἐστίν, ἡ δὲ τυραννὶς ἐξ ὀλιγαρχίας τῆς ὑστάτης σύγκειται καὶ δημοκρατίας· διὸ δὴ καὶ βλαβερωτάτη τοῖς ἀρχομένοις ἐστίν, ἅτε ἐκ δυοῖν συγκειμένη κακῶν καὶ τὰς παρεκβάσεις καὶ τὰς ἁμαρτίας ἔχουσα τὰς παρ' ἀμφοτέρων τῶν πολιτειῶν.

§2. Ὑπάρχει δ' ἡ γένεσις εὐθὺς ἐξ ἐναντίων ἑκατέρᾳ τῶν μοναρχιῶν· ἡ μὲν γὰρ βασιλεία πρὸς βοήθειαν τὴν ἀπὸ τοῦ δήμου τοῖς ἐπιεικέσι γέγονεν, καὶ καθίσταται βασιλεὺς ἐκ τῶν ἐπιεικῶν καθ' ὑπεροχὴν ἀρετῆς ἢ πράξεων τῶν ἀπὸ τῆς ἀρετῆς, ἢ καθ' ὑπεροχὴν τοιούτου γένους, ὁ δὲ τύραννος ἐκ τοῦ δήμου καὶ τοῦ πλήθους ἐπὶ τοὺς γνωρίμους, ὅπως ὁ δῆμος ἀδικῆται μηδὲν ὑπ' αὐτῶν.

§ 3. Φανερὸν δ' ἐκ τῶν συμβεβηκότων. Σχεδὸν γὰρ οἱ πλεῖστοι τῶν τυράννων γεγόνασιν ἐκ δημαγωγῶν ὡς εἰπεῖν, πιστευθέντες ἐκ τοῦ διαβάλλειν τοὺς γνωρίμους. Αἱ μὲν γὰρ τοῦτον τὸν τρόπον κατέστησαν τῶν τυραννίδων, ἤδη τῶν πόλεων ηὐξημένων, αἱ δὲ πρὸ τούτων ἐκ τε τῶν βασιλέων παρεκβαινόντων τὰ πάτρια καὶ δεσποτικωτέρας ἀρχῆς ὀρεγομένων, αἱ δὲ ἐκ τῶν αἱρετῶν ἐπὶ τὰς κυρίας ἀρχάς (τὸ γὰρ ἀρχαῖον οἱ δῆμοι καθίστασαν πολυχρονίους τὰς δημιουργίας καὶ τὰς θεωρίας), αἱ δ' ἐκ τῶν ὀλιγαρχιῶν, αἱρουμένων ἕνα τινὰ κύριον ἐπὶ τὰς μεγίστας ἀρχάς.

§ 4. Πᾶσι γὰρ ὑπῆρχε τοῖς τρόποις τούτοις τὸ κατεργάζεσθαι ῥᾳδίως, εἰ μόνον βουληθεῖεν, διὰ τὸ δύναμιν προυυπάρχειν τοῖς μὲν βασιλικῆς ἀρχῆς τοῖς δὲ τὴν τῆς τιμῆς· οἷον Φείδων μὲν περὶ Ἄργος καὶ ἕτεροι τύραννοι κατέστησαν βασιλείας ὑπαρχούσης, οἱ δὲ περὶ τὴν Ἰωνίαν καὶ Φάλαρις ἐκ τῶν τιμῶν, Παναίτιος δ' ἐν Λεοντίνοις καὶ Κύψελος ἐν Κορίνθῳ καὶ Πεισίστρατος Ἀθήνησι καὶ Διονύσιος ἐν Συρακούσαις καὶ ἕτεροι τὸν αὐτὸν τρόπον ἐκ δημαγωγίας.

§ 5. Καθάπερ οὖν εἴπομεν, ἡ βασιλεία τέτακται κατὰ τὴν ἀριστοκρατίαν. Κατ' ἀξίαν γάρ ἐστιν, ἢ κατ' ἰδίαν ἀρετὴν ἢ κατὰ γένος, ἢ κατ' εὐεργεσίας, ἢ κατὰ ταῦτά τε καὶ δύναμιν. Ἅπαντες γὰρ εὐεργετήσαντες ἢ δυνάμενοι τὰς πόλεις ἢ τὰ ἔθνη εὐεργετεῖν ἐτύγχανον τῆς τιμῆς ταύτης, οἱ μὲν κατὰ πόλεμον κωλύσαντες δουλεύειν, ὥσπερ Κόδρος, οἱ δ' ἐλευθερώσαντες, ὥσπερ Κῦρος, ἢ κτίσαντες ἢ κτησάμενοι χώραν, ὥσπερ οἱ Λακεδαιμονίων βασιλεῖς καὶ Μακεδόνων καὶ Μολοττῶν.

§ 6. Βούλεται δ' ὁ βασιλεὺς εἶναι φύλαξ, 1311a ὅπως οἱ μὲν κεκτημένοι τὰς οὐσίας μηθὲν ἄδικον πάσχωσιν, ὁ δὲ δῆμος μὴ ὑβρίζηται μηθέν· ἡ δὲ τυραννίς, ὥσπερ εἴρηται πολλάκις, πρὸς οὐδὲν ἀποβλέπει κοινόν, εἰ μὴ τῆς ἰδίας ὠφελείας χάριν. Ἔστι δὲ σκοπὸς τυραννικὸς μὲν τὸ ἡδύ, βασιλικὸς δὲ τὸ καλόν. Διὸ καὶ τῶν πλεονεκτημάτων τὰ μὲν χρήματα τυραννικὰ, τὰ δ' εἰς τιμὴν βασιλικὰ μᾶλλον· καὶ φυλακὴ βασιλικὴ μὲν πολιτική, τυραννικὴ δὲ διὰ ξένων.

§ 7. Ὅτι δ' ἡ τυραννὶς ἔχει κακὰ καὶ τὰ τῆς δημοκρατίας καὶ τὰ τῆς ὀλιγαρχίας, φανερόν· ἐκ μὲν ὀλιγαρχίας τὸ τὸ τέλος εἶναι πλοῦτον νοὕτω γὰρ καὶ διαμένειν ἀναγκαῖον μόνως τήν τε φυλακὴν καὶ τὴν τρυφήνν, καὶ τὸ τῷ πλήθει μηδὲν πιστεύειν νδιὸ καὶ τὴν παραίρεσιν ποιοῦνται τῶν ὅπλωνν, καὶ τὸ κακοῦν τὸν ὄχλον καὶ τὸ ἐκ τοῦ ἄστεως ἀπελαύνειν καὶ διοικίζειν ἀμφοτέρων κοινόν, καὶ τῆς ὀλιγαρχίας καὶ τῆς τυραννίδος· ἐκ δημοκρατίας δὲ τὸ πολεμεῖν τοῖς γνωρίμοις καὶ διαφθείρειν λάθρᾳ καὶ φανερῶς καὶ φυγαδεύειν ὡς ἀντιτέχνους καὶ πρὸς τὴν ἀρχὴν ἐμποδίους. Ἐκ γὰρ τούτων συμβαίνει γίγνεσθαι καὶ τὰς ἐπιβουλάς, τῶν μὲν ἄρχειν αὐτῶν βουλομένων, τῶν δὲ μὴ δουλεύειν. Ὅθεν καὶ τὸ Περιάνδρου πρὸς Θρασύβουλον συμβούλευμά ἐστιν, ἡ τῶν ὑπερεχόντων σταχύων κόλουσις, ὡς δέον αἰεὶ τοὺς ὑπερέχοντας τῶν πολιτῶν ἀναιρεῖν.

§ 1. Il nous reste à voir quelles sont les causes les plus ordinaires de renversement et de conservation pour la monarchie. Les considérations qu'il convient de présenter sur le destin des royautés et des tyrannies, se rapprochent beaucoup de celles que nous avons indiquées à propos des États républicains. La royauté se rapproche de l'aristocratie, et la tyrannie se compose des éléments de l'oligarchie extrême et de la démagogie; aussi est-elle pour les sujets le plus funeste des systèmes, parce qu'elle est formée de deux mauvais gouvernements, et qu'elle réunit les lacunes et les vices de l'un et de l'autre.

§ 2. Du reste, ces deux espèces de monarchies sont tout opposées, même dès leur point de départ. La royauté est créée par les hautes classes, qu'elle doit défendre contre le peuple, et le roi est pris dans le sein même des classes élevées, parmi lesquelles il se distingue par sa vertu supérieure, ou par les actions éclatantes qu'elle lui inspire, ou par l'illustration non moins méritée de sa race. Le tyran, au contraire, est tiré du peuple et de la masse, contre les citoyens puissants, dont il doit repousser l'oppression.

§ 3. On peut le voir sans peine par les faits. Presque tous les tyrans, on peut dire, ont été d'abord des démagogues, qui avaient gagné la confiance du peuple en calomniant les principaux citoyens. Quelques tyrannies se sont formées de cette manière quand les États étaient déjà puissants. D'autres, plus anciennes, n'étaient que des royautés violant toutes les lois du pays, et prétendant à une autorité despotique. D'autres ont été fondées par des hommes parvenus en vertu d'une élection aux premières magistratures, parce que jadis le peuple donnait à longue échéance tous les grands emplois et toutes les fonctions publiques. D'autres enfin sont sorties de gouvernements oligarchiques qui avaient imprudemment confié à un seul individu des attributions politiques d'une excessive importance.

§ 4. Grâce à ces circonstances, l'usurpation était alors facile à tous les tyrans ; de fait, ils n'ont eu qu'à vouloir le devenir, parce qu'ils possédaient préalablement ou la puissance royale, ou celle qu'assure une haute considération : témoin Phidon d'Argos et tous les autres tyrans qui débutèrent par être rois ; témoin tous les tyrans d'Ionie, et Phalaris, qui avaient d'abord été revêtus de hautes magistratures : Panoetius à Léontium, Cypsèle à Corinthe, Pisistrate à Athènes, Denys à Syracuse, et tant d'autres tyrans qui, comme eux, sont sortis de la démagogie.

§ 5. La royauté, je le répète, se classe auprès de l'aristocratie, en ce qu'elle est, comme elle, le prix de la considération personnelle, d'une vertu éminente, de la naissance, de grands services rendus, ou de tous ces avantages réunis à la capacité. Tous ceux qui ont rendu d'éminents services à des cités, à des peuples, ou qui étaient assez forts pour en rendre, ont obtenu cette haute distinction : les uns ayant par des victoires préservé le peuple de l'esclavage, comme Codrus; les autres lui ayant rendu la liberté, comme Cyrus; d'autres ayant fondé l'État lui-même, ou possédant le territoire, comme les rois des Spartiates, des Macédoniens et des Molosses.

§ 6. Le roi a pour mission spéciale de veiller à ce que ceux qui possèdent n'éprouvent aucun tort dans leur fortune, et le peuple aucun outrage dans son honneur. Le tyran, au contraire, comme je l'ai dit plus d'une fois, n'a jamais eu vue, dans les affaires communes, que son intérêt personnel. Le but du tyran, c'est la jouissance; celui du roi, c'est la vertu. Aussi, en fait d'ambition, le tyran songe-t-il surtout à l'argent; le roi, surtout à l'honneur. La garde d'un roi se compose de citoyens ; celle d'un tyran, d'étrangers.

§ 7. Il est du reste bien facile de voir que la tyrannie a tous les inconvénients de la démocratie et de l'oligarchie. Comme celle-ci, elle ne pense qu'à la richesse, qui nécessairement peut seule lui garantir et la fidélité des satellites, et la jouissance du luxe. La tyrannie se défie aussi des masses, et leur enlève le droit de posséder des armes. Nuire au peuple, éloigner les citoyens de la cité, les disperser, sont des manoeuvres communes à l'oligarchie et à la tyrannie. A la démocratie, la tyrannie emprunte ce système de guerre continuelle contre les citoyens puissants, cette lutte secrète et publique qui les détruit, ces bannissements qui les frappent sous prétexte qu'ils sont factieux et ennemis de l'autorité; car elle n'ignore pas que c'est des rangs des hautes classes que sortiront contre elle les conspirations, que les uns ourdissent dans l'intention de se saisir du pouvoir à leur profit, et les autres, pour se soustraire à l'esclavage qui les opprime. voilà ce que signifiait le conseil de Périandre à Thrasybule ; et ce nivellement des épis qui dépassaient les autres, voulait dire qu'il fallait toujours se défaire des citoyens éminents.