LUCIEN
Ἀ λ η θ ῆ δ ι η γ ή μ α τ α
HISTOIRE VÉRITABLE (01).
explication
des chapitres
1 à 4 (ucl) - 5
à 9 (ucl)
texte grec repris à la bibliotheca
augustana
traduction
Lucien de Samosate
Oeuvres complètes de Lucien de Samosate
trad. nouvelle avec une introd. et des notes par Eugène Talbot,...
Paris : Hachette, 1912
(01)Voir; pour cet opuscule, la préface mise par P. L. Courier, en tête de sa traduction de la Luciade. Pour le côté traditionnel de cette piquante fantaisie de Lucien, on peut lire le Speculum de Vincent de Beauvais, livre IV ; le Reductorium morale Bibliorum de Berchovius ou Berthorius, liber correctus per C. W., civem Argentinensem, 1474 ; les Traditions tératologiques de Berger de Xivrey ; le Monde enchanté de Ferdinand Denis ; notre Essai sur la légende d'Alexandre le Grand, au chapitre intitulé Merveilles du désert, p. 149 et suivantes. Herder apprécie le côté sérieux de ces légendes dans ses Idées sur l'humanité, t. II, p. 512 et suivantes de la traduction d'Edgar Quinet. Voy. aussi G. Cuvier, Discours sur les révolutions du globe, p. 107 et suivantes de l'édition Didot. Quant aux ouvrages imités de celui de Lucien, ou qui doivent en être rapprochés, nous citerons particulièrement Rabelais, Pantagruel ; Cyrano de Bergerac, Voyage dans la lune; Campanella, Cité du soleil ; Thomas More, Utopie ; Swift, Voyages de Gulliver ; Holberg, Voyage souterrain de Niel Klim. La meilleure édition de ce dernier ouvrage a pour titre intégral : Nicolai Klimii Iter subterraneum, novam telluris theoriam ac historiam quintae monarchiae adhuc nobis incognitae exhibens e bibliotheca B. Abelini ; edit. quarta auctior et emendatior. Hafniae et Lipsiae, sumptibus Frid. Christian Pelt, 1766. Elle est fort rare. Il serait à souhaiter qu'on fit une bonne traduction française de ce livre ingénieux.
LIVRE PREMIER. Ὥσπερ τοῖς ἀθλητικοῖς καὶ περὶ τὴν τῶν σωμάτων ἐπιμέλειαν ἀσχολουμένοις οὐ τῆς εὐεξίας μόνον οὐδὲ τῶν γυμνασίων φροντίς ἐστιν, ἀλλὰ καὶ τῆς κατὰ καιρὸν γινομένης ἀνέσεως - μέρος γοῦν τῆς ἀσκήσεως τὸ μέγιστον αὐτὴν ὑπολαμβάνουσιν - οὕτω δὴ καὶ τοῖς περὶ τοὺς λόγους ἐσπουδακόσιν ἡγοῦμαι προσήκειν μετὰ τὴν πολλὴν τῶν σπουδαιοτέρων ἀνάγνωσιν ἀνιέναι τε τὴν διάνοιαν καὶ πρὸς τὸν ἔπειτα κάματον ἀκμαιοτέραν παρασκευάζειν. 1. Les athlètes et ceux qui s'exercent le corps ne se préoccupent pas exclusivement d'entretenir leurs forces naturelles, ils ne songent pas toujours aux travaux du gymnase ; mais ils ont leurs heures de relâche, et ils regardent ce repos comme une très bonne part de leurs exercices. Je crois qu'à leur exemple il convient aux hommes qui s'appliquent à l'étude des lettres, de donner quelque relâche à leur esprit, après de longues heures consacrées à des lectures sérieuses, et de le rendre par là plus vif à reprendre ses travaux. [2] γένοιτο δ᾽ ἂν ἐμμελὴς ἡ ἀνάπαυσις αὐτοῖς, εἰ τοῖς τοιούτοις τῶν ἀναγνωσμάτων ὁμιλοῖεν, ἃ μὴ μόνον ἐκ τοῦ ἀστείου τε καὶ χαρίεντος ψιλὴν παρέξει τὴν ψυχαγωγίαν, ἀλλά τινα καὶ θεωρίαν οὐκ ἄμουσον ἐπιδείξεται, οἷόν τι καὶ περὶ τῶνδε τῶν συγγραμμάτων φρονήσειν ὑπολαμβάνω· οὐ γὰρ μόνον τὸ ξένον τῆς ὑποθέσεως οὐδὲ τὸ χαρίεν τῆς προαιρέσεως ἐπαγωγὸν ἔσται αὐτοῖς οὐδ᾽ ὅτι ψεύσματα ποικίλα πιθανῶς τε καὶ ἐναλήθως ἐξενηνόχαμεν, ἀλλ᾽ ὅτι καὶ τῶν ἱστορουμένων ἕκαστον οὐκ ἀκωμωιδήτως ἤινικται πρός τινας τῶν παλαιῶν ποιητῶν τε καὶ συγγραφέων καὶ φιλοσόφων πολλὰ τεράστια καὶ μυθώδη συγγεγραφότων, οὓς καὶ ὀνομαστὶ ἂν ἔγραφον, εἰ μὴ καὶ αὐτῶι σοι ἐκ τῆς ἀναγνώσεως φανεῖσθαι ἔμελλον. 2. Toutefois, ce repos ne leur sera profitable que s'ils s'appliquent à lire des oeuvres qui ne les charment pas uniquement par un tour spirituel et une agréable simplicité, mais où l'on trouve la science jointe à l'imagination, comme on les reconnaîtra, je l'espère, dans ce livre. En effet, ce n'est pas seulement par la singularité du sujet ni par l'agrément de l'idée qu'il devra plaire ; ni même parce que nous y avons répandu des fictions sous une apparence de probabilité et de vraisemblance ; mais parce que chaque trait de l'histoire fait allusion d'une manière comique à quelques-uns des anciens poètes, historiens ou philosophes, qui ont écrit des récits extraordinaires et fabuleux. J'aurais pu vous citer leurs noms, si vous ne deviez pas facilement les reconnaître à la lecture. [3] Κτησίας ὁ Κτησιόχου ὁ Κνίδιος, ὃς συνέγραψεν περὶ τῆς Ἰνδῶν χώρας καὶ τῶν παρ᾽ αὐτοῖς ἃ μήτε αὐτὸς εἶδεν μήτε ἄλλου ἀληθεύοντος ἤκουσεν. ἔγραψε δὲ καὶ Ἰαμβοῦλος περὶ τῶν ἐν τῆι μεγάληι θαλάττηι πολλὰ παράδοξα, γνώριμον μὲν ἅπασι τὸ ψεῦδος πλασάμενος, οὐκ ἀτερπῆ δὲ ὅμως συνθεὶς τὴν ὑπόθεσιν. πολλοὶ δὲ καὶ ἄλλοι τὰ αὐτὰ τούτοις προελόμενοι συνέγραψαν ὡς δή τινας ἑαυτῶν πλάνας τε καὶ ἀποδημίας, θηρίων τε μεγέθη ἱστοροῦντες καὶ ἀνθρώπων ὡμότητας καὶ βίων καινότητας· ἀρχηγὸς δὲ αὐτοῖς καὶ διδάσκαλος τῆς τοιαύτης βωμολοχίας ὁ τοῦ Ὁμήρου Ὀδυσσεύς, τοῖς περὶ τὸν Ἀλκίνουν διηγούμενος ἀνέμων τε δουλείαν καὶ μονοφθάλμους καὶ ὡμοφάγους καὶ ἀγρίους τινὰς ἀνθρώπους, ἔτι δὲ πολυκέφαλα ζῶια καὶ τὰς ὑπὸ φαρμάκων τῶν ἑταίρων μεταβολάς, οἷς πολλὰ ἐκεῖνος πρὸς ἰδιώτας ἀνθρώπους τοὺς Φαίακας ἐτερατεύσατο. 3. Ctésias de Cnide, fils de Ctésiochus, a écrit sur les Indiens et sur leur pays des choses qu'il n'a ni vues ni entendues de la bouche de personne (02). Jambule a raconté des faits incroyables sur tout ce qui se rencontre dans l'Océan (03) ; il est évident pour tous que cette oeuvre n'est qu'une fiction, c'est cependant une composition qui ne manque pas de charmes. Beaucoup d'autres encore ont choisi de semblables sujets : ils racontent, comme des faits personnels, soit des aventures, soit des voyages, où ils font la description d'animaux énormes, d'hommes pleins de cruauté ou vivant d'une façon étrange. L'auteur et le maître de toutes ces impertinences est l'Ulysse d'Homère, qui raconte chez Alcinoüs l'histoire de l'esclavage des vents, d'hommes qui n'ont qu'un oeil qui vivent de chair crue, et dont les moeurs sont tout à fait sauvages ; puis viennent les monstres à plusieurs têtes, la métamorphose des compagnons d'Ulysse opérée au moyen de certains philtres, et mille autres merveilles qu'il débite aux bons Phéaciens (04).
(02) Voy. les Fragments de Ctésias, dans l'édition d'Hérodote de Didot, p. 79 et suivantes, Cf. Vossius,
Historiens gr., édition Westerrnann, p. 51 et suivantes ; Tzetzès, Chiliades, VII, 244, v. 644 ; Aulu-Gelle,
Nuits attiques, IX, IV. [4] τούτοις οὖν ἐντυχὼν ἅπασιν, τοῦ ψεύσασθαι μὲν οὐ σφόδρα τοὺς ἄνδρας ἐμεμψάμην, ὁρῶν ἤδη σύνηθες ὂν τοῦτο καὶ τοῖς φιλοσοφεῖν ὑπισχνουμένοις· ἐκεῖνο δὲ αὐτῶν ἐθαύμασα, εἰ ἐνόμιζον λήσειν οὐκ ἀληθῆ συγγράφοντες. διόπερ καὶ αὐτὸς ὑπὸ κενοδοξίας ἀπολιπεῖν τι σπουδάσας τοῖς μεθ᾽ ἡμᾶς, ἵνα μὴ μόνος ἄμοιρος ὦ τῆς ἐν τῶι μυθολογεῖν ἐλευθερίας, ἐπεὶ μηδὲν ἀληθὲς ἱστορεῖν εἶχον - οὐδὲν γὰρ ἐπεπόνθειν ἀξιόλογον - ἐπὶ τὸ ψεῦδος ἐτραπόμην πολὺ τῶν ἄλλων εὐγνωμονέστερον· κἂν ἓν γὰρ δὴ τοῦτο ἀληθεύσω λέγων ὅτι ψεύδομαι. οὕτω δ᾽ ἄν μοι δοκῶ καὶ τὴν παρὰ τῶν ἄλλων κατηγορίαν ἐκφυγεῖν αὐτὸς ὁμολογῶν μηδὲν ἀληθὲς λέγειν. γράφω τοίνυν περὶ ὧν μήτε εἶδον μήτε ἔπαθον μήτε παρ᾽ ἄλλων ἐπυθόμην, ἔτι δὲ μήτε ὅλως ὄντων μήτε τὴν ἀρχὴν γενέσθαι δυναμένων. διὸ δεῖ τοὺς ἐντυγχάνοντας μηδαμῶς πιστεύειν αὐτοῖς. 4. Pourtant, quand j'ai lu ces différents auteurs, je ne leur ai pas fait un trop grand crime de leurs mensonges, surtout en voyant que c'était une habitude familière même à ceux qui font profession de philosophie ; et ce qui m'a toujours étonné, c'est qu'ils se soient imaginé qu'en écrivant des fictions, la fausseté de leurs récits échapperait aux lecteurs. Moi-même, cependant, entraîné par le désir de laisser un nom à la postérité, et ne voulant pas être le seul qui n'usât pas de la liberté de feindre, j'ai résolu, n'ayant rien de vrai à raconter, vu qu'il ne m'est arrivé aucune aventure digne d'intérêt, de me rabattre sur un mensonge beaucoup plus raisonnable que ceux des autres. Car n'y aurait-il dans mon livre, pour toute vérité, que l'aveu de mon mensonge ; il me semble que j'échapperais au reproche adressé par moi aux autres narrateurs, en convenant que je ne dis pas un seul mot de vrai. Je vais donc raconter des faits que je n'ai pas vus, des aventures qui ne me sont pas arrivées et que je ne tiens de personne ; j'y ajoute des choses qui n'existent nullement, et qui ne peuvent pas être : il faut donc que les lecteurs n'en croient absolument rien. [5] Ὁρμηθεὶς γάρ ποτε ἀπὸ Ἡρακλείων στηλῶν καὶ ἀφεὶς εἰς τὸν ἑσπέριον ὡκεανὸν οὐρίωι ἀνέμωι τὸν πλοῦν ἐποιούμην. αἰτία δέ μοι τῆς ἀποδημίας καὶ ὑπόθεσις ἡ τῆς διανοίας περιεργία καὶ πραγμάτων καινῶν ἐπιθυμία καὶ τὸ βούλεσθαι μαθεῖν τί τὸ τέλος ἐστὶν τοῦ ὡκεανοῦ καὶ τίνες οἱ πέραν κατοικοῦντες ἄνθρωποι. τούτου γέ τοι ἕνεκα πάμπολλα μὲν σιτία ἐνεβαλόμην, ἱκανὸν δὲ καὶ ὕδωρ ἐνεθέμην, πεντήκοντα δὲ τῶν ἡλικιωτῶν προσεποιησάμην τὴν αὐτὴν ἐμοὶ γνώμην ἔχοντας, ἔτι δὲ καὶ ὅπλων πολύ τι πλῆθος παρεσκευασάμην καὶ κυβερνήτην τὸν ἄριστον μισθῶι μεγάλωι πείσας παρέλαβον καὶ τὴν ναῦν - ἄκατος δὲ ἦν - ὡς πρὸς μέγαν καὶ βίαιον πλοῦν ἐκρατυνάμην. 5. Parti un jour des colonnes d'Hercule, et porté vers l'Océan occidental, je fus poussé au large par un vent favorable. La cause et l'intention de mon voyage étaient une vaine curiosité et le désir de voir du nouveau : je voulais, en outre, savoir quelle est la limite de l'Océan, quels sont les hommes qui en habitent le rivage opposé. Dans ce dessein, j'embarquai de nombreuses provisions de bouche et une quantité d'eau suffisante ; je m'associai cinquante jeunes gens de mon âge, ayant le même projet que moi : je m'étais muni d'un grand nombre d'armes, j'avais engagé, par une forte somme, un pilote à nous servir de guide, et j'avais fait appareiller notre navire, qui était un vaisseau marchand, de manière à résister à une longue et violente traversée. [6] ἡμέραν οὖν καὶ νύκτα οὐρίωι πλέοντες ἔτι τῆς γῆς ὑποφαινομένης οὐ σφόδρα βιαίως ἀνηγόμεθα, τῆς ἐπιούσης δὲ ἅμα ἡλίωι ἀνίσχοντι ὅ τε ἄνεμος ἐπεδίδου καὶ τὸ κῦμα ηὐξάνετο καὶ ζόφος ἐπεγίνετο καὶ οὐκέτ᾽ οὐδὲ στεῖλαι τὴν ὀθόνην δυνατὸν ἦν. ἐπιτρέψαντες οὖν τῶι πνέοντι καὶ παραδόντες ἑαυτοὺς ἐχειμαζόμεθα ἡμέρας ἐννέα καὶ ἑβδομήκοντα, τῆι ὀγδοηκοστῆι δὲ ἄφνω ἐκλάμψαντος ἡλίου καθορῶμεν οὐ πόρρω νῆσον ὑψηλὴν καὶ δασεῖαν, οὐ τραχεῖ περιηχουμένην τῶι κύματι· καὶ γὰρ ἤδη τὸ πολὺ τῆς ζάλης κατεπαύετο. Προσσχόντες οὖν καὶ ἀποβάντες ὡς ἂν ἐκ μακρᾶς ταλαιπωρίας πολὺν μὲν χρόνον ἐπὶ γῆς ἐκείμεθα, διαναστάντες δὲ ὅμως ἀπεκρίναμεν ἡμῶν αὐτῶν τριάκοντα μὲν φύλακας τῆς νεὼς παραμένειν, εἴκοσι δὲ σὺν ἐμοὶ ἀνελθεῖν ἐπὶ κατασκοπῆι τῶν ἐν τῆι νήσωι. 6. Pendant un jour et une nuit, nous eûmes un bon vent, qui nous laissa en vue de la terre, sans nous emporter trop au large. Mais le lendemain, au lever du soleil, la brise devint plus forte, les flots grossirent, l'obscurité nous enveloppa, et il ne fut plus possible d'amener les voiles. Forcés de céder et de nous abandonner aux vents, nous fûmes battus par la tempête durant soixante-dix-neuf jours ; mais le quatre-vingtième, au lever du soleil, nous aperçûmes, à une petite distance, une île élevée, couverte d'arbres, et contre laquelle les flots allaient doucement se briser. Nous nous dirigeons vers le rivage, nous débarquons, et, comme il arrive à des gens qui viennent d'être violemment éprouvés, nous nous, étendons pendant longtemps sur la terre. Enfin nous nous levons ; nous en choisissons trente d'entre nous pour garder le navire, et je prends les vingt autres avec moi pour aller faire une reconnaissance dans l'île. [7] προελθόντες δὲ ὅσον σταδίους τρεῖς ἀπὸ τῆς θαλάττης δι᾽ ὕλης ὁρῶμέν τινα στήλην χαλκοῦ πεποιημένην, Ἑλληνικοῖς γράμμασιν καταγεγραμμένην, ἀμυδροῖς δὲ καὶ ἐκτετριμμένοις, λέγουσαν Ἄχρι τούτων Ἡρακλῆς καὶ Διόνυσος ἀφίκοντο. ἦν δὲ καὶ ἴχνη δύο πλησίον ἐπὶ πέτρας, τὸ μὲν πλεθριαῖον, τὸ δὲ ἔλαττον - ἐμοὶ δοκεῖν, τὸ μὲν τοῦ Διονύσου, τὸ μικρότερον, θάτερον δὲ Ἡρακλέους. προσκυνήσαντες δ᾽ οὖν προῆιμεν· οὔπω δὲ πολὺ παρῆιμεν καὶ ἐφιστάμεθα ποταμῶι οἶνον ῥέοντι ὁμοιότατον μάλιστα οἷόσπερ ὁ Χῖός ἐστιν. ἄφθονον δὲ ἦν τὸ ῥεῦμα καὶ πολύ, ὥστε ἐνιαχοῦ καὶ ναυσίπορον εἶναι δύνασθαι. ἐπήιει οὖν ἡμῖν πολὺ μᾶλλον πιστεύειν τῶι ἐπὶ τῆς στήλης ἐπιγράμματι, ὁρῶσι τὰ σημεῖα τῆς Διονύσου ἐπιδημίας. δόξαν δέ μοι καὶ ὅθεν ἄρχεται ὁ ποταμὸς καταμαθεῖν, ἀνήιειν παρὰ τὸ ῥεῦμα, καὶ πηγὴν μὲν οὐδεμίαν εὗρον αὐτοῦ, πολλὰς δὲ καὶ μεγάλας ἀμπέλους, πλήρεις βοτρύων, παρὰ δὲ τὴν ῥίζαν ἑκάστην ἀπέρρει σταγὼν οἴνου διαυγοῦς, ἀφ᾽ ὧν ἐγίνετο ὁ ποταμός. ἦν δὲ καὶ ἰχθῦς ἐν αὐτῶι πολλοὺς ἰδεῖν, οἴνωι μάλιστα καὶ τὴν χρόαν καὶ τὴν γεῦσιν προσεοικότας· ἡμεῖς γοῦν ἀγρεύσαντες αὐτῶν τινας καὶ ἐμφαγόντες ἐμεθύσθημεν· ἀμέλει καὶ ἀνατεμόντες αὐτοὺς εὑρίσκομεν τρυγὸς μεστούς. ὕστερον μέντοι ἐπινοήσαντες τοὺς ἄλλους ἰχθῦς, τοὺς ἀπὸ τοῦ ὕδατος παραμιγνύντες ἐκεράννυμεν τὸ σφοδρὸν τῆς οἰνοφαγίας.
(05) Voy. notre
Essai sur la légende d'Alexandre le Grand, p. 61 et 167. [8] Τότε δὲ τὸν ποταμὸν διαπεράσαντες ἧι διαβατὸς ἦν, εὕρομεν ἀμπέλων χρῆμα τεράστιον· τὸ μὲν γὰρ ἀπὸ τῆς γῆς, ὁ στέλεχος αὐτὸς εὐερνὴς καὶ παχύς, τὸ δὲ ἄνω γυναῖκες ἦσαν, ὅσον ἐκ τῶν λαγόνων ἅπαντα ἔχουσαι τέλεια - τοιαύτην παρ᾽ ἡμῖν τὴν Δάφνην γράφουσιν ἄρτι τοῦ Ἀπόλλωνος καταλαμβάνοντος ἀποδενδρουμένην. ἀπὸ δὲ τῶν δακτύλων ἄκρων ἐξεφύοντο αὐταῖς οἱ κλάδοι καὶ μεστοὶ ἦσαν βοτρύων. καὶ μὴν καὶ τὰς κεφαλὰς ἐκόμων ἕλιξί τε καὶ φύλλοις καὶ βότρυσι. προσελθόντας δὲ ἡμᾶς ἠσπάζοντο καὶ ἐδεξιοῦντο, αἱ μὲν Λύδιον, αἱ δ᾽ Ἰνδικήν, αἱ πλεῖσται δὲ τὴν Ἑλλάδα φωνὴν προϊέμεναι. καὶ ἐφίλουν δὲ ἡμᾶς τοῖς στόμασιν· ὁ δὲ φιληθεὶς αὐτίκα ἐμέθυεν καὶ παράφορος ἦν. δρέπεσθαι μέντοι οὐ παρεῖχον τοῦ καρποῦ, ἀλλ᾽ ἤλγουν καὶ ἐβόων ἀποσπωμένου. αἱ δὲ καὶ μίγνυσθαι ἡμῖν ἐπεθύμουν· καὶ δύο τινὲς τῶν ἑταίρων πλησιάσαντες αὐταῖς οὐκέτι ἀπελύοντο, ἀλλ᾽ ἐκ τῶν αἰδοίων ἐδέδεντο· συνεφύοντο γὰρ καὶ συνερριζοῦντο. καὶ ἤδη αὐτοῖς κλάδοι ἐπεφύκεσαν οἱ δάκτυλοι, καὶ ταῖς ἕλιξι περιπλεκόμενοι ὅσον οὐδέπω καὶ αὐτοὶ καρποφορήσειν ἔμελλον. 8. Après avoir traversé le fleuve à un endroit guéable, nous trouvons une espèce de vignes tout à fait merveilleuses : le tronc, dans sa partie voisine de la terre, était épais et élancé ; de sa partie supérieure sortaient des femmes, dont le corps, à partir de la ceinture, était d'une beauté parfaite, telles que l'on nous représente Daphné, changée en laurier, au moment où Apollon va l'atteindre. A l'extrémité de leurs doigts poussaient des branches chargées de grappes ; leurs têtes, au lieu de cheveux, étaient couvertes de boucles, qui formaient les pampres et les raisins. Nous nous approchons ; elles nous saluent, nous tendent la main, nous adressent la parole, les unes en langue lydienne, les autres en indien, presque toutes en grec, et nous donnent des baisers sur la bouche ; mais ceux qui les reçoivent deviennent aussitôt ivres et insensés. Cependant elles ne nous permirent pas de cueillir de leurs fruits, et, si quelqu'un en arrachait, elles jetaient des cris de douleur. Quelques-unes nous invitaient à une étreinte amoureuse ; mais deux de nos compagnons s'étant laissé prendre par elles ne purent s'en débarrasser ; ils demeurèrent pris par les parties sexuelles, entés avec ces femmes, et poussant avec elles des racines. : en un instant, leurs doigts se changèrent en rameaux, en vrilles, et l'on eût dit qu'ils allaient aussi produire des raisins. [9] καταλιπόντες δὲ αὐτοὺς ἐπὶ ναῦν ἐφεύγομεν καὶ τοῖς ἀπολειφθεῖσιν διηγούμεθα ἐλθόντες τά τε ἄλλα καὶ τῶν ἑταίρων τὴν ἀμπελομιξίαν. καὶ δὴ λαβόντες ἀμφορέας τινὰς καὶ ὑδρευσάμενοί τε ἅμα καὶ ἐκ τοῦ ποταμοῦ οἰνισάμενοι καὶ αὐτοῦ πλησίον ἐπὶ τῆς ἠιόνος αὐλισάμενοι ἕωθεν ἀνήχθημεν οὐ σφόδρα βιαίωι πνεύματι. Περὶ μεσημβρίαν δὲ οὐκέτι τῆς νήσου φαινομένης ἄφνω τυφὼν ἐπιγενόμενος καὶ περιδινήσας τὴν ναῦν καὶ μετεωρίσας ὅσον ἐπὶ σταδίους τριακοσίους οὐκέτι καθῆκεν εἰς τὸ πέλαγος, ἀλλ᾽ ἄνω μετέωρον ἐξηρτημένην ἄνεμος ἐμπεσὼν τοῖς ἱστίοις ἔφερεν κολπώσας τὴν ὀθόνην. 9. Nous les abandonnons, nous fuyons vers notre vaisseau, et nous racontons à ceux que nous y avions laissés la métamorphose de nos compagnons, désormais incorporés à des vignes. Cependant, munis de quelques amphores, nous faisons une provision d'eau, et nous puisons du vin dans le fleuve, auprès duquel nous passons la nuit. [10] ἑπτὰ δὲ ἡμέρας καὶ τὰς ἴσας νύκτας ἀεροδρομήσαντες, ὀγδόηι καθορῶμεν γῆν τινα μεγάλην ἐν τῶι ἀέρι καθάπερ νῆσον, λαμπρὰν καὶ σφαιροειδῆ καὶ φωτὶ μεγάλωι καταλαμπομένην· προσενεχθέντες δὲ αὐτῆι καὶ ὁρμισάμενοι ἀπέβημεν, ἐπισκοποῦντες δὲ τὴν χώραν εὑρίσκομεν οἰκουμένην τε καὶ γεωργουμένην. ἡμέρας μὲν οὖν οὐδὲν αὐτόθεν ἑωρῶμεν, νυκτὸς δὲ ἐπιγενομένης ἐφαίνοντο ἡμῖν καὶ ἄλλαι πολλαὶ νῆσοι πλησίον, αἱ μὲν μείζους, αἱ δὲ μικρότεραι, πυρὶ τὴν χρόαν προσεοικυῖαι, καὶ ἄλλη δέ τις γῆ κάτω, καὶ πόλεις ἐν αὑτῆι καὶ ποταμοὺς ἔχουσα καὶ πελάγη καὶ ὕλας καὶ ὄρη. ταύτην οὖν τὴν καθ᾽ ἡμᾶς οἰκουμένην εἰκάζομεν. 10. Le huitième jour nous apercevons dans l'espace une grande terre, une espèce d'île brillante, de forme sphérique, et éclairée d'une vive lumière. Nous y abordons, nous débarquons, et, après avoir reconnu le pays, nous le trouvons habité et cultivé. Durant le jour, on ne put apercevoir de là aucun autre objet ; mais sitôt que la nuit fut venue, nous vîmes plusieurs autres îles voisines, les unes plus grandes, les autres plus petites, toutes couleur de feu ; au-dessus l'on voyait encore une autre terre, avec des villes, des fleuves, des mers, des forêts, des montagnes : il nous parut que c'était celle que nous habitons. [11] Δόξαν δὲ ἡμῖν καὶ ἔτι πορρωτέρω προελθεῖν, συνελήφθημεν τοῖς Ἱππογύποις παρ᾽ αὐτοῖς καλουμένοις ἀπαντήσαντες. οἱ δὲ Ἱππόγυποι οὗτοί εἰσιν ἄνδρες ἐπὶ γυπῶν μεγάλων ὀχούμενοι καὶ καθάπερ ἵπποις τοῖς ὀρνέοις χρώμενοι· μεγάλοι γὰρ οἱ γῦπες καὶ ὡς ἐπίπαν τρικέφαλοι. μάθοι δ᾽ ἄν τις τὸ μέγεθος αὐτῶν ἐντεῦθεν· νεὼς γὰρ μεγάλης φορτίδος ἱστοῦ ἕκαστον τῶν πτερῶν μακρότερον καὶ παχύτερον φέρουσι. τούτοις οὖν τοῖς Ἱππογύποις προστέτακται περιπετομένοις τὴν γῆν, εἴ τις εὑρεθείη ξένος, ἀνάγειν ὡς τὸν βασιλέα· καὶ δὴ καὶ ἡμᾶς συλλαβόντες ἀνάγουσιν ὡς αὐτόν. ὁ δὲ θεασάμενος καὶ ἀπὸ τῆς στολῆς εἰκάσας, Ἕλληνες ἆρα, ἔφη, ὑμεῖς, ὦ ξένοι; συμφησάντων δέ, Πῶς οὖν ἀφίκεσθε, ἔφη, τοσοῦτον ἀέρα διελθόντες; καὶ ἡμεῖς τὸ πᾶν αὐτῶι διηγούμεθα· καὶ ὃς ἀρξάμενος τὸ καθ᾽ αὑτὸν ἡμῖν διεξήιει, ὡς καὶ αὐτὸς ἄνθρωπος ὢν τοὔνομα Ἐνδυμίων ἀπὸ τῆς ἡμετέρας γῆς καθεύδων ἀναρπασθείη ποτὲ καὶ ἀφικόμενος βασιλεύσειε τῆς χώρας· εἶναι δὲ τὴν γῆν ἐκείνην ἔλεγε τὴν ἡμῖν κάτω φαινομένην σελήνην. ἀλλὰ θαρρεῖν τε παρεκελεύετο καὶ μηδένα κίνδυνον ὑφορᾶσθαι· πάντα γὰρ ἡμῖν παρέσεσθαι ὧν δεόμεθα. 11. Nous étions décidés à pénétrer plus avant quand nous fûmes rencontrés et pris par des êtres qui se donnent le nom d'Hippogypes (07). Ces Hippogypes sont des hommes portés sur de grands vautours, dont ils se servent comme de chevaux ; ces vautours sont d'une grosseur énorme, et presque tous ont trois têtes : pour donner une idée de leur taille, je dirai que chacune de leurs plumes est plus longue et plus grosse que le mât d'un grand vaisseau de transport. Nos Hippogypes avaient l'ordre de faire le tour de leur île, et, s'ils rencontraient quelque étranger, de l'amener au roi. Ils nous prennent donc et nous conduisent à leur souverain. Celui-ci nous considère, et jugeant qui nous étions d’après nos vêtements : "Étrangers, nous dit-il, vous êtes Grecs ?" Nous répondons affirmativement. "Comment alors êtes-vous venus ici en traversant un si grand espace d'air ?" Nous lui racontons notre aventure, et lui, à son tour, nous dit la sienne. Il était homme et s'appelait Endymion ; un jour, pendant son sommeil, il avait été enlevé de notre terre, et, à son arrivée, on l'avait fait roi de ce pays. Or, ce pays n'était pas autre chose que ce qu'en bas nous appelons la Lune. Il nous engagea à prendre courage et à ne craindre aucun danger, qu'on nous donnerait tout ce dont nous aurions besoin. (07) ῞Ιππος, cheval ; γὺψ, γυπός, vautour.
[12] Ἢν δὲ καὶ κατορθώσω, ἔφη, τὸν πόλεμον ὃν ἐκφέρω νῦν πρὸς τοὺς τὸν ἥλιον κατοικοῦντας, ἁπάντων εὐδαιμονέστατα παρ᾽ ἐμοὶ καταβιώσεσθε. καὶ ἡμεῖς ἠρόμεθα τίνες εἶεν οἱ πολέμιοι καὶ τὴν αἰτίαν τῆς διαφορᾶς· Ὁ δὲ Φαέθων, φησίν, ὁ τῶν ἐν τῶι ἡλίωι κατοικούντων βασιλεύς - οἰκεῖται γὰρ δὴ κἀκεῖνος ὥσπερ καὶ ἡ σελήνη - πολὺν ἤδη πρὸς ἡμᾶς πολεμεῖ χρόνον. ἤρξατο δὲ ἐξ αἰτίας τοιαύτης· τῶν ἐν τῆι ἀρχῆι τῆι ἐμῆι ποτε τοὺς ἀπορωτάτους συναγαγὼν ἐβουλήθην ἀποικίαν ἐς τὸν Ἑωσφόρον στεῖλαι, ὄντα ἔρημον καὶ ὑπὸ μηδενὸς κατοικούμενον· ὁ τοίνυν Φαέθων φθονήσας ἐκώλυσε τὴν ἀποικίαν κατὰ μέσον τὸν πόρον ἀπαντήσας ἐπὶ τῶν Ἱππομυρμήκων. τότε μὲν οὖν νικηθέντες - οὐ γὰρ ἦμεν ἀντίπαλοι τῆι παρασκευῆι - ἀνεχωρήσαμεν· νῦν δὲ βούλομαι αὖθις ἐξενεγκεῖν τὸν πόλεμον καὶ ἀποστεῖλαι τὴν ἀποικίαν. ἢν οὖν ἐθέλητε, κοινωνήσατέ μοι τοῦ στόλου, γῦπας δὲ ὑμῖν ἐγὼ παρέξω τῶν βασιλικῶν ἕνα ἑκάστωι καὶ τὴν ἄλλην ὅπλισιν· αὔριον δὲ ποιησόμεθα τὴν ἔξοδον. Οὕτως, ἔφην ἐγώ, γιγνέσθω, ἐπειδή σοι δοκεῖ. (08) ῞Ιππος, cheval ; μύρμηξ, μύρμηκος, fourmi. [13] Τότε μὲν οὖν παρ᾽ αὐτῶι ἑστιαθέντες ἐμείναμεν, ἕωθεν δὲ διαναστάντες ἐτασσόμεθα· καὶ γὰρ οἱ σκοποὶ ἐσήμαινον πλησίον εἶναι τοὺς πολεμίους. τὸ μὲν οὖν πλῆθος τῆς στρατιᾶς δέκα μυριάδες ἐγένοντο ἄνευ τῶν σκευοφόρων καὶ τῶν μηχανοποιῶν καὶ τῶν πεζῶν καὶ τῶν ξένων συμμάχων· τούτων δὲ ὀκτακισμύριοι μὲν ἦσαν οἱ Ἱππόγυποι, δισμύριοι δὲ οἱ ἐπὶ τῶν Λαχανοπτέρων. ὄρνεον δὲ καὶ τοῦτό ἐστι μέγιστον, ἀντὶ τῶν πτερῶν λαχάνοις πάντηι λάσιον, τὰ δὲ ὡκύπτερα ἔχει θριδακίνης φύλλοις μάλιστα προσεοικότα. ἐπὶ δὲ τούτοις οἱ Κεγχροβόλοι τετάχατο καὶ οἱ Σκοροδομάχοι. ἦλθον δὲ αὐτῶι καὶ ἀπὸ τῆς ἄρκτου σύμμαχοι, τρισμύριοι μὲν Ψυλλοτοξόται, πεντακισμύριοι δὲ Ἀνεμοδρόμοι· τούτων δὲ οἱ μὲν Ψυλλοτοξόται ἐπὶ ψυλλῶν μεγάλων ἱππάζονται, ὅθεν καὶ τὴν προσηγορίαν ἔχουσιν· μέγεθος δὲ τῶν ψυλλῶν ὅσον δώδεκα ἐλέφαντες· οἱ δὲ Ἀνεμοδρόμοι πεζοὶ μέν εἰσιν, φέρονται δὲ ἐν τῶι ἀέρι ἄνευ πτερῶν· ὁ δὲ τρόπος τῆς φορᾶς τοιόσδε. χιτῶνας ποδήρεις ὑπεζωσμένοι κολπώσαντες αὐτοὺς τῶι ἀνέμωι καθάπερ ἱστία φέρονται ὥσπερ τὰ σκάφη. τὰ πολλὰ δ᾽ οἱ τοιοῦτοι ἐν ταῖς μάχαις πελτασταί εἰσιν. ἐλέγοντο δὲ καὶ ἀπὸ τῶν ὑπὲρ τὴν Καππαδοκίαν ἀστέρων ἥξειν Στρουθοβάλανοι μὲν ἑπτακισμύριοι, Ἱππογέρανοι δὲ πεντακισχίλιοι. τούτους ἐγὼ οὐκ ἐθεασάμην· οὐ γὰρ ἀφίκοντο. διόπερ οὐδὲ γράψαι τὰς φύσεις αὐτῶν ἐτόλμησα· τεράστια γὰρ καὶ ἄπιστα περὶ αὐτῶν ἐλέγετο. 13. Il nous retient alors à souper et nous demeurons dans son palais. Le matin, nous nous levons et nous nous mettons en ordre de bataille , avertis par les espions de l'approche des ennemis. Nos forces consistaient en cent mille soldats, sans compter les goujats, les conducteurs des machines, l'infanterie et les troupes alliées : le nombre de ces dernières s'élevait à quatre-vingt mille Hippogypes (09), et vingt mille combattants montés sur des Lachanoptéres (10). C'est une espèce de grands oiseaux tout couverts de légumes au lieu de plumes, et dont les ailes rapides ressemblent beaucoup à des feuilles de laitue. Près d'eux étaient placés les Cenchroboles (11) et les Scorodomaques (12) ; trente mille Psyllotoxotes (13) et cinquante mille Anémodromes (14) étaient venus de l'Étoile de l'Ourse en qualité d'alliés. Les Psyllotoxotes étaient montés sur de grosses puces, d'où leur nom, et ces puces étaient de la taille de deux éléphants : les Anémodronies sont des fantassins, et ils sont portés par les vents sans avoir besoin d'ailes. Voici comment : ils ont de longues robes qui leur descendent jusqu'aux talons ; ils les retroussent, et le vent, venant à s'y engouffrer, les fait naviguer en l'air comme des barques. La plupart se servent de boucliers dans le combat. On disait qu'il devait en outre arriver, des astres situés au-dessus de la Cappadoce, soixante-dix mille Strouthobalanes (15) et cinquante mille Hippogéranes (16); mais nous ne les vîmes pas, attendu qu'ils ne vinrent point. Aussi je n'ose en faire la description ; car ce qu'on en disait me paraissait fabuleux et incroyable.
(09)
῞Ιππος, cheval ; πύγη, fesse. [14] Αὕτη μὲν ἡ τοῦ Ἐνδυμίωνος δύναμις ἦν. σκευὴ δὲ πάντων ἡ αὐτή· κράνη μὲν ἀπὸ τῶν κυάμων, μεγάλοι γὰρ παρ᾽ αὐτοῖς οἱ κύαμοι καὶ καρτεροί· θώρακες δὲ φολιδωτοὶ πάντες θέρμινοι· τὰ γὰρ λέπη τῶν θέρμων συρράπτοντες ποιοῦνται θώρακας, ἄρρηκτον δὲ ἐκεῖ γίνεται τοῦ θέρμου τὸ λέπος ὥσπερ κέρας· ἀσπίδες δὲ καὶ ξίφη οἷα τὰ Ἑλληνικά. 14. Telles étaient lés troupes d'Endymion : toutes portaient la même armure ; les casques étaient de fèves, qui sont dans ce pays grandes et dures ; les cuirasses, disposées par écailles, étaient faites de cosses de lupins cousues ensemble, et dont la peau était aussi impénétrable que de la corne : les boucliers et les sabres ressemblaient à ceux des Grecs. [15] ἐπειδὴ δὲ καιρὸς ἦν, ἐτάξαντο ὧδε· τὸ μὲν δεξιὸν κέρας εἶχον οἱ Ἱππόγυποι καὶ ὁ βασιλεὺς τοὺς ἀρίστους περὶ αὑτὸν ἔχων· καὶ ἡμεῖς ἐν τούτοις ἦμεν· τὸ δὲ εὐώνυμον οἱ Λαχανόπτεροι· τὸ μέσον δὲ οἱ σύμμαχοι ὡς ἑκάστοις ἐδόκει. τὸ δὲ πεζὸν ἦσαν μὲν ἀμφὶ τὰς ἑξακισχιλίας μυριάδας, ἐτάχθησαν δὲ οὕτως. ἀράχναι παρ᾽ αὐτοῖς πολλοὶ καὶ μεγάλοι γίγνονται, πολὺ τῶν Κυκλάδων νήσων ἕκαστος μείζων. τούτοις προσέταξεν διυφῆναι τὸν μεταξὺ τῆς σελήνης καὶ τοῦ Ἑωσφόρου ἀέρα. ὡς δὲ τάχιστα ἐξειργάσαντο καὶ πεδίον ἐποίησαν, ἐπὶ τούτου παρέταξε τὸ πεζόν· ἡγεῖτο δὲ αὐτῶν Νυκτερίων ὁ Εὐδιάνακτος τρίτος αὐτός. 15. Au moment décisif, l'armée fut rangée comme il suit l'aile droite fut occupée par les Hippogypes et par le roi, entouré des plus braves combattants au nombre desquels nous étions ; à la gauche se placèrent les Lachanoptères et au centre les troupes alliées , chacune à son rang. L'infanterie montait à soixante millions, et voici comment on la rangea en bataille. Dans ce pays les araignées sont en grand nombre, et beaucoup plus grosses, chacune , que les îles Cyclades. Endymion leur donna l'ordre de tisser une toile qui s'étendît depuis la Lune jusqu'à l'Étoile du Matin ; elles l'exécutèrent en un instant, et cela fit un champ sur lequel le roi rangea son infanterie, commandée par Nyctérion, fils d'Eudianax (17), et par deux autres généraux. (17) Νυκτέριος, nocturne ; Εὐδιάναξ de εὔδιος, serein et ἄναξ, prince. [16] Τῶν δὲ πολεμίων τὸ μὲν εὐώνυμον εἶχον οἱ Ἱππομύρμηκες καὶ ἐν αὐτοῖς ὁ Φαέθων· θηρία δέ ἐστι μέγιστα, ὑπόπτερα, τοῖς παρ᾽ ἡμῖν μύρμηξι προσεοικότα πλὴν τοῦ μεγέθους· ὁ γὰρ μέγιστος αὐτῶν καὶ δίπλεθρος ἦν. ἐμάχοντο δὲ οὐ μόνον οἱ ἐπ᾽ αὐτῶν, ἀλλὰ καὶ αὐτοὶ μάλιστα τοῖς κέρασιν· ἐλέγοντο δὲ οὗτοι εἶναι ἀμφὶ τὰς πέντε μυριάδας. ἐπὶ δὲ τοῦ δεξιοῦ αὐτῶν ἐτάχθησαν οἱ Ἀεροκώνωπες, ὄντες καὶ οὗτοι ἀμφὶ τὰς πέντε μυριάδας, πάντες τοξόται κώνωψι μεγάλοις ἐποχούμενοι· μετὰ δὲ τούτους οἱ Ἀεροκόρδακες, ψιλοί τε ὄντες καὶ πεζοί, πλὴν μάχιμοί γε καὶ οὗτοι· πόρρωθεν γὰρ ἐσφενδόνων ῥαφανῖδας ὑπερμεγέθεις, καὶ ὁ βληθεὶς οὐδὲ ὀλίγον ἀντέχειν ἐδύνατο, ἀπέθνηισκε δὲ δυσωδίας τινὸς τῶι τραύματι ἐγγινομένης· ἐλέγοντο δὲ χρίειν τὰ βέλη μαλάχης ἰῶι. ἐχόμενοι δὲ αὐτῶν ἐτάχθησαν οἱ Καυλομύκητες, ὁπλῖται ὄντες καὶ ἀγχέμαχοι, τὸ πλῆθος μύριοι· ἐκλήθησαν δὲ Καυλομύκητες, ὅτι ἀσπίσι μὲν μυκητίναις ἐχρῶντο, δόρασι δὲ καυλίνοις τοῖς ἀπὸ τῶν ἀσπαράγων. πλησίον δὲ αὐτῶν οἱ Κυνοβάλανοι ἔστησαν, οὓς ἔπεμψαν αὐτῶι οἱ τὸν Σείριον κατοικοῦντες, πεντακισχίλιοι [καὶ οὗτοιι ἄνδρες κυνοπρόσωποι ἐπὶ βαλάνων πτερωτῶν μαχόμενοι. ἐλέγοντο δὲ κἀκείνωι ὑστερίζειν τῶν συμμάχων οὕς τε ἀπὸ τοῦ Γαλαξίου μετεπέμπετο σφενδονήτας καὶ οἱ Νεφελοκένταυροι. ἀλλ᾽ ἐκεῖνοι μὲν τῆς μάχης ἤδη κεκριμένης ἀφίκοντο, ὡς μήποτε ὤφελον· οἱ σφενδονῆται δὲ οὐδὲ ὅλως παρεγένοντο, διόπερ φασὶν ὕστερον αὐτοῖς ὀργισθέντα τὸν Φαέθοντα πυρπολῆσαι τὴν χώραν. 16. L'aile gauche des ennemis était composée d'Hippomyrméques, au milieu desquels était Phaéton. Ces Hippomyrmèques sont des animaux ailés, semblables à nos fourmis, à la grosseur près, car le plus énorme d'entre eux a au moins deux arpents. Non seulement ceux qui les montent prennent part à l'action, mais ils se battent eux-mêmes avec leurs cornes. On nous dit que leur nombre était d'environ cinquante mille. A l'aile droite étaient les Aéroconopes (18), en nombre à peu près égal, tous archers et montés sur de grands moucherons. Derrière eux on plaça les Aérocoraces (19), infanterie légère et soldats belliqueux : ils lançaient de loin d'énormes raves avec leur fronde ; celui qui en était frappé ne pouvait résister longtemps ; il mourait infecté par l'odeur qui s'exhalait aussitôt de sa blessure ; on disait qu'ils trempaient leurs flèches dans du jus de mauve. Près d'eux se rangèrent les Caulomycétes (20) grosse infanterie, qui se bat de près, au nombre de dix mille. On les appelle Caulomycétes, parce qu'ils se servent de champignons pour boucliers, et pour lances de queues d'asperges. Ensuite venaient les Cynobalanes (21), qu'avaient envoyés à Phaéthon les habitants de Sirius, au nombre de cinq mille. Ce sont des hommes à tête de chien, qui combattent de dessus des glands ailés. On nous dit qu'il leur manquait plusieurs alliés en retard, les frondeurs mandés de la Voie lactée et les Néphélocentaures (22). Ceux-ci arrivèrent quand la bataille était encore indécise, et plût aux dieux qu'ils ne fussent pas venus ! Les frondeurs ne parurent pas ; aussi l'on prétend que dans la suite Phaéthon irrité brûla leur pays. Voilà quelle était l'armée du roi du Soleil.
(18) ᾿Αήρ, ἀέρος, air ; κώνωψ, κώνωπος, moucheron. [17] Τοιαύτηι μὲν καὶ ὁ Φαέθων ἐπήιει παρασκευῆι. συμμίξαντες δὲ ἐπειδὴ τὰ σημεῖα ἤρθη καὶ ὡγκήσαντο ἑκατέρων οἱ ὄνοι - τούτοις γὰρ ἀντὶ σαλπιστῶν χρῶνται - ἐμάχοντο. καὶ τὸ μὲν εὐώνυμον τῶν Ἡλιωτῶν αὐτίκα ἔφυγε οὐδ᾽ εἰς χεῖρας δεξάμενον τοὺς Ἱππογύπους, καὶ ἡμεῖς εἱπόμεθα κτείνοντες· τὸ δεξιὸν δὲ αὐτῶν ἐκράτει τοῦ ἐπὶ τῶι ἡμετέρωι εὐωνύμου, καὶ ἐπεξῆλθον οἱ Ἀεροκώνωπες διώκοντες ἄχρι πρὸς τοὺς πεζούς. ἐνταῦθα δὲ κἀκείνων ἐπιβοηθούντων ἔφυγον ἐγκλίναντες, καὶ μάλιστα ἐπεὶ ἤισθοντο τοὺς ἐπὶ τῶι εὐωνύμωι σφῶν νενικημένους. τῆς δὲ τροπῆς λαμπρᾶς γεγενημένης πολλοὶ μὲν ζῶντες ἡλίσκοντο, πολλοὶ δὲ καὶ ἀνηιροῦντο, καὶ τὸ αἷμα ἔρρει πολὺ μὲν ἐπὶ τῶν νεφῶν, ὥστε αὐτὰ βάπτεσθαι καὶ ἐρυθρὰ φαίνεσθαι, οἷα παρ᾽ ἡμῖν δυομένου τοῦ ἡλίου φαίνεται, πολὺ δὲ καὶ εἰς τὴν γῆν κατέσταζεν, ὥστε με εἰκάζειν μὴ ἄρα τοιούτου τινὸς καὶ πάλαι ἄνω γενομένου Ὅμηρος ὑπέλαβεν αἵματι ὗσαι τὸν Δία ἐπὶ τῶι τοῦ Σαρπηδόνος θανάτωι. 17. On en vient aux mains : les étendards sont déployés ; les ânes des deux armées se mettent à braire ; ce sont eux, en effet, qui servent de trompettes, et la mêlée commence. L'aile gauche des Héliotes (23) ne pouvant soutenir le choc des nos Hippogypes, nous la poursuivons et nous en faisons un grand carnage ; mais leur aile droite enfonce notre gauche, et les Aéroconopes, fondant tout à coup sur elle, la poursuivent jusqu'aux rangs de notre infanterie qui s'avance pour la secourir et les oblige à se retirer en désordre, surtout quand ils s'aperçoivent que leur aile gauche est vaincue : leur déroute devient générale ; beaucoup sont faits prisonniers ; un plus grand nombre sont tués ; le sang ruisselle de tous côtés sur les nuées, qui en sont teintes et qui prennent cette couleur rouge que nous leur voyons au coucher du soleil : il en tomba jusque sur la terre, et ce fut sans doute, selon moi, à l'occasion de quelque événement semblable, arrivé autrefois dans le ciel, qu'Homère nous dit que Jupiter plut du sang à la mort de Sarpédon (24).
(23) Du mot
ἥλιος, soleil. [18] Ἀναστρέψαντες δὲ ἀπὸ τῆς διώξεως δύο τρόπαια ἐστήσαμεν, τὸ μὲν ἐπὶ τῶν ἀραχνίων τῆς πεζομαχίας, τὸ δὲ τῆς ἀερομαχίας ἐπὶ τῶν νεφῶν. ἄρτι δὲ τούτων γινομένων ἠγγέλλοντο ὑπὸ τῶν σκοπῶν οἱ Νεφελοκένταυροι προσελαύνοντες, οὓς ἔδει πρὸ τῆς μάχης ἐλθεῖν τῶι Φαέθοντι. καὶ δὴ ἐφαίνοντο προσιόντες, θέαμα παραδοξότατον, ἐξ ἵππων πτερωτῶν καὶ ἀνθρώπων συγκείμενοι· μέγεθος δὲ τῶν μὲν ἀνθρώπων ὅσον τοῦ Ῥοδίων κολοσσοῦ ἐξ ἡμισείας ἐς τὸ ἄνω, τῶν δὲ ἵππων ὅσον νεὼς μεγάλης φορτίδος. τὸ μέντοι πλῆθος αὐτῶν οὐκ ἀνέγραψα, μή τωι καὶ ἄπιστον δόξηι - τοσοῦτον ἦν. ἡγεῖτο δὲ αὐτῶν ὁ ἐκ τοῦ ζωιδιακοῦ τοξότης. ἐπεὶ δὲ ἤισθοντο τοὺς φίλους νενικημένους, ἐπὶ μὲν τὸν Φαέθοντα ἔπεμπον ἀγγελίαν αὖθις ἐπιέναι, αὐτοὶ δὲ διαταξάμενοι τεταραγμένοις ἐπιπίπτουσι τοῖς Σεληνίταις, ἀτάκτως περὶ τὴν δίωξιν καὶ τὰ λάφυρα διεσκεδασμένοις· καὶ πάντας μὲν τρέπουσιν, αὐτὸν δὲ τὸν βασιλέα καταδιώκουσι πρὸς τὴν πόλιν καὶ τὰ πλεῖστα τῶν ὀρνέων αὐτοῦ κτείνουσιν· ἀνέσπασαν δὲ καὶ τὰ τρόπαια καὶ κατέδραμον ἅπαν τὸ ὑπὸ τῶν ἀραχνῶν πεδίον ὑφασμένον, ἐμὲ δὲ καὶ δύο τινὰς τῶν ἑταίρων ἐζώγρησαν. ἤδη δὲ παρῆν καὶ ὁ Φαέθων καὶ αὖθις ἄλλα τρόπαια ὑπ᾽ ἐκείνων ἵστατο. 18. Au retour de la poursuite des ennemis, nous dressons deux trophées, l'un sur la toile d'araignée, pour célébrer le succès de l'infanterie, l'autre sur les nuées, à cause de notre victoire en l'air. Nous achevions, lorsque des espions vinrent nous annoncer l'arrivée des Néphélocentaures, qui auraient dû venir auprès de Phaéthon avant le combat. Nous les voyons arriver, spectacle étrange d'êtres moitié hommes, moitié chevaux ailés : leur grosseur est telle, que l'homme qui compose la partie supérieure égale la moitié du colosse de Rhodes, et les chevaux un gros vaisseau marchand. Leur nombre était si considérable que je ne l'ai pas écrit, de peur qu'on ne refusât de me croire. Ils avaient à leur tête le Sagittaire du Zodiaque. Dès qu'ils se furent aperçus de la défaite de leurs alliés, ils envoyèrent dire à Phaéthon qu'il revint à la charge ; eux-mêmes s'étant formés en bataille, tombent sur les Sélénites (25), débandés, errants, dispersés à la poursuite de leurs ennemis et à la dépouille des morts. Ils les renversent, donnent la chasse au roi jusqu'à la ville, lui tuent la meilleure partie de ses vautours, arrachent les trophées, parcourent toute la plaine qu'avaient tissée les araignées, et me font prisonnier avec deux de mes compagnons. Phaéthon arrive en ce moment, et nos ennemis, après avoir érigé de nouveaux trophées, nous emmenèrent prisonniers le même jour dans l'empire du Soleil, les mains liées derrière le dos avec un fil d'araignée. (25) De Σελήνη, lune. [19] Ἡμεῖς μὲν οὖν ἀπηγόμεθα ἐς τὸν ἥλιον αὐθημερὸν τὼ χεῖρε ὀπίσω δεθέντες ἀραχνίου ἀποκόμματι. οἱ δὲ πολιορκεῖν μὲν οὐκ ἔγνωσαν τὴν πόλιν, ἀναστρέψαντες δὲ τὸ μεταξὺ τοῦ ἀέρος ἀπετείχιζον, ὥστε μηκέτι τὰς αὐγὰς ἀπὸ τοῦ ἡλίου πρὸς τὴν σελήνην διήκειν. τὸ δὲ τεῖχος ἦν διπλοῦν, νεφελωτόν· ὥστε σαφὴς ἔκλειψις τῆς σελήνης ἐγεγόνει καὶ νυκτὶ διηνεκεῖ πᾶσα κατείχετο. πιεζόμενος δὲ τούτοις ὁ Ἐνδυμίων πέμψας ἱκέτευε καθαιρεῖν τὸ οἰκοδόμημα καὶ μὴ σφᾶς περιορᾶν ἐν σκότωι βιοτεύοντας, ὑπισχνεῖτο δὲ καὶ φόρους τελέσειν καὶ σύμμαχος ἔσεσθαι καὶ μηκέτι πολεμήσειν, καὶ ὁμήρους ἐπὶ τούτοις δοῦναι ἤθελεν. οἱ δὲ περὶ τὸν Φαέθοντα γενομένης δὶς ἐκκλησίας τῆι προτεραίαι μὲν οὐδὲν παρέλυσαν τῆς ὀργῆς, τῆι ὑστεραίαι δὲ μετέγνωσαν, καὶ ἐγένετο ἡ εἰρήνη ἐπὶ τούτοις· 19. Ils ne jugent pas à propos d'assiéger la ville ; mais, revenant sur leurs pas, ils construisent au milieu des airs un mur qui empêche les rayons du Soleil d'arriver jusqu'à la Lune: ce mur était double et composé de nuées. Voilà donc la Lune obscurcie par une éclipse totale, et enveloppée d'une nuit complète. Endymion, accablé d'un tel malheur, envoie des ambassadeurs supplier Phaéthon de détruire la muraille et de ne pas le laisser ainsi vivre dans les ténèbres : il promet de lui payer un tribut, de devenir son allié, de ne plus lui faire la guerre, et il lui offre des otages comme garants du traité, Phaéton assemble deux fois son conseil : à la première délibération, les vainqueurs persistent dans leur colère ; à la seconde, ils se ravisent. [20] Κατὰ τάδε συνθήκας ἐποιήσαντο Ἡλιῶται καὶ οἱ σύμμαχοι πρὸς Σεληνίτας καὶ τοὺς συμμάχους, ἐπὶ τῶι καταλῦσαι μὲν Ἡλιώτας τὸ διατείχισμα καὶ μηκέτι ἐς τὴν σελήνην ἐσβάλλειν, ἀποδοῦναι δὲ καὶ τοὺς αἰχμαλώτους ῥητοῦ ἕκαστον χρήματος, τοὺς δὲ Σεληνίτας ἀφεῖναι μὲν αὐτονόμους τούς γε ἄλλους ἀστέρας, ὅπλα δὲ μὴ ἐπιφέρειν τοῖς Ἡλιώταις, συμμαχεῖν δὲ τῆι ἀλλήλων, ἤν τις ἐπίηι· φόρον δὲ ὑποτελεῖν ἑκάστου ἔτους τὸν βασιλέα τῶν Σεληνιτῶν τῶι βασιλεῖ τῶν Ἡλιωτῶν δρόσου ἀμφορέας μυρίους, καὶ ὁμήρους δὲ σφῶν αὐτῶν δοῦναι μυρίους, τὴν δὲ ἀποικίαν τὴν ἐς τὸν Ἑωσφόρον κοινῆι ποιεῖσθαι, καὶ μετέχειν τῶν ἄλλων τὸν βουλόμενον· ἐγγράψαι δὲ τὰς συνθήκας στήληι ἠλεκτρίνηι καὶ ἀναστῆσαι ἐν μέσωι τῶι ἀέρι ἐπὶ τοῖς μεθορίοις. ὤμοσαν δὲ Ἡλιωτῶν μὲν Πυρωνίδης καὶ Θερείτης καὶ Φλόγιος, Σεληνιτῶν δὲ Νύκτωρ καὶ Μήνιος καὶ Πολυλάμπης. 20. La paix est conclue sur les clauses suivantes : "Une alliance est faite entre les Héliotes et leurs alliés, les Sélénites et leurs alliés, à condition que les Héliotes raseront la muraille d'interception et ne feront plus d'irruption dans la Lune ; ils rendront les prisonniers moyennant la rançon fixée pour chacun d'eux ; de leur côté, les Sélénites laisseront les autres astres se gouverner d'après leurs lois ; ils ne feront plus la guerre aux Héliotes, mais les deux peuples formeront une ligue offensive et défensive ; le roi des Sélénites payera au roi des Héliotes un tribut annuel de dix mille amphores de rosée et lui donnera pour otages pareil nombre de ses sujets, la colonie de l'Étoile du Matin sera faite en commun, et chaque peuple y enverra ceux qui voudront en être ; ce traité sera gravé sur une colonne d'ambre, dressée en l'air , aux confins des deux empires. Ont juré pour les Héliotes : Pyronide, Thérite et Phlogius (26) ; pour les Sélénites : Nyctor, Ménius et Polylampe (27)."
(26)
Pyronide, de πῦρ, πυρός feu ; Thétite, de
θέρος, été ; Phlogius, de φλόξ, φλογός, flamme. [21] Τοιαύτη μὲν ἡ εἰρήνη ἐγένετο· εὐθὺς δὲ τὸ τεῖχος καθηιρεῖτο καὶ ἡμᾶς τοὺς αἰχμαλώτους ἀπέδοσαν. ἐπεὶ δὲ ἀφικόμεθα ἐς τὴν σελήνην, ὑπηντίαζον ἡμᾶς καὶ ἠσπάζοντο μετὰ δακρύων οἵ τε ἑταῖροι καὶ ὁ Ἐνδυμίων αὐτός. καὶ ὁ μὲν ἠξίου μεῖναί τε παρ᾽ αὑτῶι καὶ κοινωνεῖν τῆς ἀποικίας, ὑπισχνούμενος δώσειν πρὸς γάμον τὸν ἑαυτοῦ παῖδα· γυναῖκες γὰρ οὐκ εἰσὶ παρ᾽ αὐτοῖς. ἐγὼ δὲ οὐδαμῶς ἐπειθόμην, ἀλλ᾽ ἠξίουν ἀποπεμφθῆναι κάτω ἐς τὴν θάλατταν. ὡς δὲ ἔγνω ἀδύνατον ὂν πείθειν, ἀποπέμπει ἡμᾶς ἑστιάσας ἑπτὰ ἡμέρας. 21. Ainsi la paix fut conclue, le mur démoli, et nous autres rendus à la liberté. A notre retour dans la Lune, nos compagnons accoururent au-devant de nous, et nous embrassèrent en versant des larmes : Endymion en fit autant ; de plus, il nous engagea à demeurer auprès de lui et à nous établir dans la colonie ; il me promit même de me donner son fils en mariage, car il n'y a pas de femmes dans ce pays ; mais je ne me laissai point aller à ses offres, et je le priai de vouloir bien nous faire redescendre à la mer. Quand il vit qu'il lui était impossible de me convaincre, il nous congédia, après nous avoir régalés pendant sept jours. [22] Ἃ δὲ ἐν τῶι μεταξὺ διατρίβων ἐν τῆι σελήνηι κατενόησα καινὰ καὶ παράδοξα, ταῦτα βούλομαι εἰπεῖν. πρῶτα μὲν τὸ μὴ ἐκ γυναικῶν γεννᾶσθαι αὐτούς, ἀλλ᾽ ἀπὸ τῶν ἀρρένων· γάμοις γὰρ τοῖς ἄρρεσι χρῶνται καὶ οὐδὲ ὄνομα γυναικὸς ὅλως ἴσασι. μέχρι μὲν οὖν πέντε καὶ εἴκοσι ἐτῶν γαμεῖται ἕκαστος, ἀπὸ δὲ τούτων γαμεῖ αὐτός· κύουσι δὲ οὐκ ἐν τῆι νηδύϊ, ἀλλ᾽ ἐν ταῖς γαστροκνημίαις· ἐπειδὰν γὰρ συλλάβηι τὸ ἔμβρυον, παχύνεται ἡ κνήμη, καὶ χρόνωι ὕστερον ἀνατεμόντες ἐξάγουσι νεκρά, ἐκθέντες δὲ αὐτὰ πρὸς τὸν ἄνεμον κεχηνότα ζωιοποιοῦσιν. δοκεῖ δέ μοι καὶ ἐς τοὺς Ἕλληνας ἐκεῖθεν ἥκειν τῆς γαστροκνημίας τοὔνομα, ὅτι παρ᾽ ἐκείνοις ἀντὶ γαστρὸς κυοφορεῖ. μεῖζον δὲ τούτου ἄλλο διηγήσομαι. γένος ἐστὶ παρ᾽ αὐτοῖς ἀνθρώπων οἱ καλούμενοι Δενδρῖται, γίνεται δὲ τὸν τρόπον τοῦτον. ὄρχιν ἀνθρώπου τὸν δεξιὸν ἀποτεμόντες ἐν γῆι φυτεύουσιν, ἐκ δὲ αὐτοῦ δένδρον ἀναφύεται μέγιστον, σάρκινον, οἷον φαλλός· ἔχει δὲ καὶ κλάδους καὶ φύλλα· ὁ δὲ καρπός ἐστι βάλανοι πηχυαῖοι τὸ μέγεθος. ἐπειδὰν οὖν πεπανθῶσιν, τρυγήσαντες αὐτὰς ἐκκολάπτουσι τοὺς ἀνθρώπους. αἰδοῖα μέντοι πρόσθετα ἔχουσιν, οἱ μὲν ἐλεφάντινα, οἱ δὲ πένητες αὐτῶν ξύλινα, καὶ διὰ τούτων ὀχεύουσι καὶ πλησιάζουσι τοῖς γαμέταις τοῖς ἑαυτῶν. 22. Il faut cependant que je vous raconte les choses nouvelles et extraordinaires que j'ai observées, durant mon séjour dans la Lune. Et d'abord ce ne sont point des femmes, mais des mâles qui y perpétuent l'espèce : les mariages n'ont donc lieu qu'entre mâles, et le nom de femme y est totalement inconnu. On y est épousé jusqu'à vingt-cinq ans, et à cet âge on épouse à son tour. Ce n'est point dans le ventre qu'ils portent leurs enfants , mais dans le mollet. Quand l'embryon a été conçu, la jambe grossit ; puis, plus tard, au temps voulu, ils y font une incision et en retirent un enfant mort, qu'ils rendent à la vie en l'exposant au grand air, la bouche ouverte. C'est sans doute de là qu'est venu chez les Grecs le nom de gastrocnémie (28), puisque, au lieu du ventre, c'est la jambe qui devient grosse. Mais voici quelque chose de plus fort. Il y a dans ce pays une espèce d'hommes appelés dendrites (29), qui naissent de la manière suivante : on coupe le testicule droit d'un homme et on le met en terre ; il en naît un arbre grand, charnu, comme un phallus ; il a des branches, des feuilles. Ses fruits sont des glands d'une coudée de longueur. Quand ils sont mûrs, on récolte ces fruits, et on en écosse des hommes. Leurs parties sont artificielles : quelques-uns en ont d'ivoire, les pauvres en ont de bois, et ils remplissent avec cela toutes les fonctions du mariage.
(28) Γαστήρ, ventre ; κνήμη, jambe, cuisse. [23] ἐπειδὰν δὲ γηράσηι ὁ ἄνθρωπος, οὐκ ἀποθνήισκει, ἀλλ᾽ ὥσπερ καπνὸς διαλυόμενος ἀὴρ γίνεται. τροφὴ δὲ πᾶσιν ἡ αὐτή· ἐπειδὰν γὰρ πῦρ ἀνακαύσωσιν, βατράχους ὀπτῶσιν ἐπὶ τῶν ἀνθράκων· πολλοὶ δὲ παρ᾽ αὐτοῖς εἰσιν ἐν τῶι ἀέρι πετόμενοι· ὀπτωμένων δὲ περικαθεσθέντες ὥσπερ δὴ περὶ τράπεζαν κάπτουσιν τὸν ἀναθυμιώμενον καπνὸν καὶ εὐωχοῦνται. σίτωι μὲν δὴ τρέφονται τοιούτωι· ποτὸν δὲ αὐτοῖς ἐστιν ἀὴρ ἀποθλιβόμενος εἰς κύλικα καὶ ὑγρὸν ἀνιεὶς ὥσπερ δρόσον. οὐ μὴν ἀπουροῦσίν γε καὶ ἀφοδεύουσιν, ἀλλ᾽ οὐδὲ τέτρηνται ἧιπερ ἡμεῖς, οὐδὲ τὴν συνουσίαν οἱ παῖδες ἐν ταῖς ἕδραις παρέχουσιν, ἀλλ᾽ ἐν ταῖς ἰγνύσιν ὑπὲρ τὴν γαστροκνημίαν· ἐκεῖ γάρ εἰσι τετρημένοι. 23. Quand un homme est parvenu à une extrême vieillesse, il ne meurt pas, mais il s'évapore en fumée et se dissout dans les airs. Ils se nourrissent tous de la même manière. Ils allument du feu et font rôtir sur le charbons des grenouilles volantes, qui sont chez eux en grande quantité ; puis ils s'asseyent autour de ce feu, comme d'une table, et se régalent en avalant la fumée qui s'exhale du rôti. Tel est leur plat solide. Leur boisson est de l'air pressé dans un vase, où il se résout en un liquide semblable à de la rosée. Ils ne rendent ni urine, ni excréments, n'ayant pas, comme nous, les conduits nécessaires. Ils ne peuvent pas non plus avoir par cette voie de commerce avec des mignons, mais par les jarrets, où s'ouvre leur gastrocnémie. C'est une beauté chez eux que d'être chauve et complément dégarni de cheveux ; ils ont les chevelures en horreur. Dans les comètes, au contraire, les cheveux sont réputés beaux, au moins d'après ce que nous en dirent quelques voyageurs. Leur barbe croît un peu au-dessus du genou ; leurs pieds sont dépourvus d'ongles, et tous n'y ont qu'un seul doigt. Il leur pousse au-dessus des fesses une espèce de gros chou, en manière de queue, toujours vert, et ne se brisant jamais, lors même que l'individu tombe sur le dos. [24] ἀπομύττονται δὲ μέλι δριμύτατον· κἀπειδὰν ἢ πονῶσιν ἢ γυμνάζωνται, γάλακτι πᾶν τὸ σῶμα ἱδροῦσιν, ὥστε καὶ τυροὺς ἀπ᾽ αὐτοῦ πήγνυνται, ὀλίγον τοῦ μέλιτος ἐπιστάξαντες· ἔλαιον δὲ ποιοῦνται ἀπὸ τῶν κρομμύων πάνυ λιπαρόν τε καὶ εὐῶδες ὥσπερ μύρον. ἀμπέλους δὲ πολλὰς ἔχουσιν ὑδροφόρους· αἱ γὰρ ῥᾶγες τῶν βοτρύων εἰσὶν ὥσπερ χάλαζα, καί, ἐμοὶ δοκεῖν, ἐπειδὰν ἐμπεσὼν ἄνεμος διασείσηι τὰς ἀμπέλους ἐκείνας, τότε πρὸς ἡμᾶς καταπίπτει ἡ χάλαζα διαρραγέντων τῶν βοτρύων. τῆι μέντοι γαστρὶ ὅσα πήραι χρῶνται τιθέντες ἐν αὐτῆι ὅσων δέονται· ἀνοικτὴ γὰρ αὐτοῖς αὕτη καὶ πάλιν κλειστή ἐστιν· ἐντέρων δὲ οὐδὲν ὑπάρχειν αὐτῆι φαίνεται, ἢ τοῦτο μόνον, ὅτι δασεῖα πᾶσα ἔντοσθε καὶ λάσιός ἐστιν, ὥστε καὶ τὰ νεογνά, ἐπειδὰν ῥιγώσηι, ἐς ταύτην ὑποδύεται. [25] Ἐσθὴς δὲ τοῖς μὲν πλουσίοις ὑαλίνη μαλθακή, τοῖς πένησι δὲ χαλκῆ ὑφαντή· πολύχαλκα γὰρ τὰ ἐκεῖ χωρία, καὶ ἐργάζονται τὸν χαλκὸν ὕδατι ὑποβρέξαντες ὥσπερ τὰ ἔρια. περὶ μέντοι τῶν ὀφθαλμῶν, οἵους ἔχουσιν, ὀκνῶ μὲν εἰπεῖν, μή τίς με νομίσηι ψεύδεσθαι διὰ τὸ ἄπιστον τοῦ λόγου. ὅμως δὲ καὶ τοῦτο ἐρῶ· τοὺς ὀφθαλμοὺς περιαιρετοὺς ἔχουσι, καὶ ὁ βουλόμενος ἐξελὼν τοὺς αὑτοῦ φυλάττει ἔστ᾽ ἂν δεηθῆι ἰδεῖν· οὕτω δὲ ἐνθέμενος ὁρᾶι· καὶ πολλοὶ τοὺς σφετέρους ἀπολέσαντες παρ᾽ ἄλλων χρησάμενοι ὁρῶσιν. εἰσὶ δ᾽ οἳ καὶ πολλοὺς ἀποθέτους ἔχουσιν, οἱ πλούσιοι. τὰ ὦτα δὲ πλατάνων φύλλα ἐστὶν αὐτοῖς πλήν γε τοῖς ἀπὸ τῶν βαλάνων· ἐκεῖνοι γὰρ μόνοι ξύλινα ἔχουσιν. 25. L'habillement des riches est de verre, étoffe moelleuse, celui des pauvres est un tissu de cuivre ; le pays produit en grande quantité ce métal, qu'ils travaillent comme de la laine, après l'avoir mouillé. Quant à leurs yeux, en vérité je n'ose dire comment ils sont faits, de peur qu'on ne me prenne pour un menteur, tant la chose est incroyable. Je me hasarderai pourtant à dire que leurs yeux sont amovibles : ils les ôtent quand ils veulent et les mettent de côté, jusqu'à ce qu'ils aient envie de voir ; alors, ils les remettent en place pour s'en servir, et, si quelques-uns d'entre eux viennent à perdre leurs yeux, ils empruntent ceux des autres et en font usage, il y a même des riches qui en gardent de rechange. Leurs oreilles sont de feuilles de platane, excepté celles des hommes nés d"un gland, qui les ont de bois. [26] καὶ μὴν καὶ ἄλλο θαῦμα ἐν τοῖς βασιλείοις ἐθεασάμην· κάτοπτρον μέγιστον κεῖται ὑπὲρ φρέατος οὐ πάνυ βαθέος. ἂν μὲν οὖν εἰς τὸ φρέαρ καταβῆι τις, ἀκούει πάντων τῶν παρ᾽ ἡμῖν ἐν τῆι γῆι λεγομένων, ἐὰν δὲ εἰς τὸ κάτοπτρον ἀποβλέψηι, πάσας μὲν πόλεις, πάντα δὲ ἔθνη ὁρᾶι ὥσπερ ἐφεστὼς ἑκάστοις· τότε καὶ τοὺς οἰκείους ἐγὼ ἐθεασάμην καὶ πᾶσαν τὴν πατρίδα, εἰ δὲ κἀκεῖνοι ἐμὲ ἑώρων, οὐκέτι ἔχω τὸ ἀσφαλὲς εἰπεῖν. ὅστις δὲ ταῦτα μὴ πιστεύει οὕτως ἔχειν, ἄν ποτε καὶ αὐτὸς ἐκεῖσε ἀφίκηται, εἴσεται ὡς ἀληθῆ λέγω. 26. Je vis une bien autre merveille dans le palais du roi. C'était un grand miroir, placé au-dessus d'un puits d'une profondeur médiocre. En y descendant, on entendait tout ce qui se dit sur la terre, et en levant les yeux vers le miroir, on voyait toutes les villes et tous les peuples, comme si l'on était au milieu d'eux. J'y vis mes parents et ma patrie ; je ne sais s'ils me virent aussi ; je n'oserais l'affirmer : mais, si l'on se refuse à me croire, on verra bien, en y allant, que je ne suis pas un imposteur. [27] Τότε δ᾽ οὖν ἀσπασάμενοι τὸν βασιλέα καὶ τοὺς ἀμφ᾽ αὐτόν, ἐμβάντες ἀνήχθημεν· ἐμοὶ δὲ καὶ δῶρα ἔδωκεν ὁ Ἐνδυμίων, δύο μὲν τῶν ὑαλίνων χιτώνων, πέντε δὲ χαλκοῦς, καὶ πανοπλίαν θερμίνην, ἃ πάντα ἐν τῶι κήτει κατέλιπον. συνέπεμψε δὲ ἡμῖν καὶ Ἱππογύπους χιλίους παραπέμψοντας ἄχρι σταδίων πεντακοσίων. 27. Cependant, après avoir salué le roi et ses amis, nous mettons à la voile. Endymion me fit présent de deux tuniques de verre, de cinq robes de cuivre et d'une armure complète de cosses de lupins ; mais j'ai laissé tout cela dans la baleine (30), il nous donna pour escorte mille Hippogypes, qui nous accompagnèrent l'espace de cinq cents stades. (30) Voy. plus bas, 30. [28] ἐν δὲ τῶι παράπλωι πολλὰς μὲν καὶ ἄλλας χώρας παρημείψαμεν, προσέσχομεν δὲ καὶ τῶι Ἑωσφόρωι ἄρτι συνοικιζομένωι, καὶ ἀποβάντες ὑδρευσάμεθα. ἐμβάντες δὲ εἰς τὸν ζωιδιακὸν ἐν ἀριστερᾶι παρήιειμεν τὸν ἥλιον, ἐν χρῶι τὴν γῆν παραπλέοντες· οὐ γὰρ ἀπέβημεν καίτοι πολλὰ τῶν ἑταίρων ἐπιθυμούντων, ἀλλ᾽ ὁ ἄνεμος οὐκ ἐφῆκεν. ἐθεώμεθα μέντοι τὴν χώραν εὐθαλῆ τε καὶ πίονα καὶ εὔυδρον καὶ πολλῶν ἀγαθῶν μεστήν. ἰδόντες δ᾽ ἡμᾶς οἱ Νεφελοκένταυροι, μισθοφοροῦντες παρὰ τῶι Φαέθοντι, ἐπέπτησαν ἐπὶ τὴν ναῦν, καὶ μαθόντες ἐνσπόνδους ἀνεχώρησαν. [29] ἤδη δὲ καὶ οἱ Ἱππόγυποι ἀπεληλύθεσαν. 29. Nous voguons ensuite une nuit et un jour; et, vers le soir, nous arrivons à Lychnopolis (31) après avoir dirigé notre course vers les régions inférieures. Cette ville, située dans l'espace aérien qui s'étend entre les Hyades et les Pléiades, est un peu au-dessous du Zodiaque. Nous débarquons, et nous n'y trouvons pas d'hommes, mais des lampes, qui se promenaient sur le port et dans la place publique. Il y en avait de petites, apparemment la populace, et quelques-unes, les grands et les riches, brillantes et lumineuses. Elles avaient chacune leur maison, je veux dire leur lanterne, et chacune leur nom, comme les hommes ; nous les entendions même parler. Loin de nous faire aucun mal, elles nous offrent l'hospitalité. Mais nous n'osons accepter, et personne de nous n'a le courage de souper et de passer la nuit avec elles. Le palais du roi est situé au milieu de la ville. Le prince y est assis toute la nuit, appelant chacune d'elles par son nom. Celle qui ne répond pas est condamnée à mort pour avoir abandonné son poste. La mort, c'est d'être éteinte. Nous, nous rendons au palais pour voir ce qui s'y passait, et nous entendons plusieurs lampes se justifiant et exposant les motifs pour lesquels elles arrivaient si tard. Je reconnus parmi ces lampes celle de notre maison : je lui demandai des nouvelles de ma famille, et elle satisfit à mes questions. Nous passons là le reste de la nuit. Le lendemain, nous repartons, nous nous rapprochons des nuages et nous découvrons la ville de Néphélococcygie (32) : sa vue nous frappe d'admiration ; mais nous n'y pouvons aborder, contrariés par le vent. Le roi régnant est Coronus, fils de Cottyphion (33). Je me rappelai en ce moment ce que dit de cette ville Aristophane, poète grave et véridique, et je trouvai qu'on a tort de ne pas croire à ses assertions. Trois jours après nous aperçûmes distinctement l'Océan, mais aucune terre si ce n'est celles qui sont dans les régions célestes, et déjà même elles prenaient à nos yeux une couleur de feu des plus éclatantes, lorsque, le quatrième loir, vers midi, le vent s'étant calmé et étant tombé tout à fait, nous redescendîmes sui la mer.
(31) Λύχνος, lampe ; πόλις, ville. [30] ὡς δὲ τοῦ ὕδατος ἐψαύσαμεν, θαυμασίως ὑπερηδόμεθα καὶ ὑπερεχαίρομεν καὶ πᾶσαν ἐκ τῶν παρόντων εὐφροσύνην ἐποιούμεθα καὶ ἀπορρίψαντες ἐνηχόμεθα· καὶ γὰρ ἔτυχε γαλήνη οὖσα καὶ εὐσταθοῦν τὸ πέλαγος. 30. A peine avons-nous touché l'eau salée, qu'il fallait voir notre joie, nos transports d'aise ! Nous nous abandonnons à toute l'allégresse d'un pareil instant, et, nous jetant à la mer nous nous mettons à nager. Le temps était calme, la mer tranquille. Mais souvent le retour au bonheur n'est que le présage de plus grandes infortunes ! Il y avait deux jours que notre vaisseau voguait paisiblement sur l'Océan, lorsque, le quatrième, au lever du soleil, nous voyons paraître tout à coup une quantité prodigieuse de monstres marins et de baleines. La plus énorme de toutes était de la longueur de quinze cents stades. Ce monstre nage vers nous la gueule béante, troublant au loin la mer, faisant voler l'écume de toutes parts, et montrant des dents beaucoup plus grosses que nos phallus, aiguës comme des pieux et blanches comme de l'ivoire. Nous nous disons alors le dernier adieu, nous nous embrassons et nous attendons. La baleine arrive, qui nous avale et nous engloutit avec notre vaisseau. Par bonheur elle ne serra pas les dents, ce qui nous eût écrasés, mais le navire put couler à travers les interstices. [31] ἐπεὶ δὲ ἔνδον ἦμεν, τὸ μὲν πρῶτον σκότος ἦν καὶ οὐδὲν ἑωρῶμεν, ὕστερον δὲ αὐτοῦ ἀναχανόντος εἴδομεν κύτος μέγα καὶ πάντηι πλατὺ καὶ ὑψηλόν, ἱκανὸν μυριάνδρωι πόλει ἐνοικεῖν. ἔκειντο δὲ ἐν μέσωι καὶ μικροὶ ἰχθύες καὶ ἄλλα πολλὰ θηρία συγκεκομμένα, καὶ πλοίων ἱστία καὶ ἄγκυραι, καὶ ἀνθρώπων ὀστέα καὶ φορτία, κατὰ μέσον δὲ καὶ γῆ καὶ λόφοι ἦσαν, ἐμοὶ δοκεῖν, ἐκ τῆς ἰλύος ἣν κατέπινε συνιζάνουσα. ὕλη γοῦν ἐπ᾽ αὐτῆς καὶ δένδρα παντοῖα ἐπεφύκει καὶ λάχανα ἐβεβλαστήκει, καὶ ἐώικει πάντα ἐξειργασμένοις· περίμετρον δὲ τῆς γῆς στάδιοι διακόσιοι καὶ τεσσαράκοντα. ἦν δὲ ἰδεῖν καὶ ὄρνεα θαλάττια, λάρους καὶ ἀλκυόνας, ἐπὶ τῶν δένδρων νεοττεύοντα. [32] Τότε μὲν οὖν ἐπὶ πολὺ ἐδακρύομεν, ὕστερον δὲ ἀναστήσαντες τοὺς ἑταίρους τὴν μὲν ναῦν ὑπεστηρίξαμεν, αὐτοὶ δὲ τὰ πυρεῖα συντρίψαντες καὶ ἀνακαύσαντες δεῖπνον ἐκ τῶν παρόντων ἐποιούμεθα. παρέκειτο δὲ ἄφθονα καὶ παντοδαπὰ κρέα τῶν ἰχθύων, καὶ ὕδωρ ἔτι τὸ ἐκ τοῦ Ἑωσφόρου εἴχομεν. τῆι ἐπιούσηι δὲ διαναστάντες, εἴ ποτε ἀναχάνοι τὸ κῆτος, ἑωρῶμεν ἄλλοτε μὲν ὄρη, ἄλλοτε δὲ μόνον τὸν οὐρανόν, πολλάκις δὲ καὶ νήσους· καὶ γὰρ ἠισθανόμεθα φερομένου αὐτοῦ ὀξέως πρὸς πᾶν μέρος τῆς θαλάττης. ἐπεὶ δὲ ἤδη ἐθάδες τῆι διατριβῆι ἐγενόμεθα, λαβὼν ἑπτὰ τῶν ἑταίρων ἐβάδιζον ἐς τὴν ὕλην περισκοπήσασθαι τὰ πάντα βουλόμενος. οὔπω δὲ πέντε ὅλους διελθὼν σταδίους εὗρον ἱερὸν Ποσειδῶνος, ὡς ἐδήλου ἡ ἐπιγραφή, καὶ μετ᾽ οὐ πολὺ καὶ τάφους πολλοὺς καὶ στήλας ἐπ᾽ αὐτῶν πλησίον τε πηγὴν ὕδατος διαυγοῦς, ἔτι δὲ καὶ κυνὸς ὑλακὴν ἠκούομεν καὶ καπνὸς ἐφαίνετο πόρρωθεν καί τινα καὶ ἔπαυλιν εἰκάζομεν. 32. En ce moment, nous nous mettons à fondre en larmes ; mais enfin je relève le courage de mes compagnons. Nous étayons le vaisseau, nous battons le briquet, nous allumons du feu, et nous préparons un repas de tout ce qui nous tombe sous la main : or, il y avait là une grande quantité de poissons de toute espèce, et il nous restait encore de l'eau de l'Étoile du Matin. Le lendemain, à notre lever, chaque fois que la baleine ouvrait la gueule, nous apercevons ici des montagnes, là le ciel tout seul, souvent même des îles, et nous sentons que l'animal parcourt avec vitesse toute l'étendue de la mer. Nous finissons par nous accoutumer à notre séjour ; et, prenant avec moi sept de mes compagnons, je pénètre dans la forêt, déterminé à en faire une reconnaissance complète. Je n'avais pas fait cinq stades, que je trouve un temple de Neptune, comme l'indiquait l'inscription. Un peu plus loin, je découvre plusieurs tombeaux avec leurs cippes, et tout près de là une source d'eau limpide. En même temps nous entendons aboyer un chien, et nous voyons de loin s'élever de la fumée. Nous ne doutons pas qu'il n’y ait là quelque habitation. [33] Σπουδῆι οὖν βαδίζοντες ἐφιστάμεθα πρεσβύτηι καὶ νεανίσκωι μάλα προθύμως πρασιάν τινα ἐργαζομένοις καὶ ὕδωρ ἀπὸ τῆς πηγῆς ἐπ᾽ αὐτὴν διοχετεύουσιν· ἡσθέντες οὖν ἅμα καὶ φοβηθέντες ἔστημεν· κἀκεῖνοι δὲ ταὐτὸ ἡμῖν ὡς τὸ εἰκὸς παθόντες ἄναυδοι παρειστήκεσαν· χρόνωι δὲ ὁ πρεσβύτης ἔφη, Τίνες ὑμεῖς ἄρα ἐστέ, ὦ ξένοι; πότερον τῶν ἐναλίων δαιμόνων ἢ ἄνθρωποι δυστυχεῖς ἡμῖν παραπλήσιοι; καὶ γὰρ ἡμεῖς ἄνθρωποι ὄντες καὶ ἐν γῆι τραφέντες νῦν θαλάττιοι γεγόναμεν καὶ συννηχόμεθα τῶι περιέχοντι τούτωι θηρίωι, οὐδ᾽ ὁ πάσχομεν ἀκριβῶς εἰδότες· τεθνάναι μὲν γὰρ εἰκάζομεν, ζῆν δὲ πιστεύομεν. πρὸς ταῦτα ἐγὼ εἶπον· Καὶ ἡμεῖς τοι ἄνθρωποι νεήλυδές ἐσμεν, ὦ πάτερ, αὐτῶι σκάφει πρώιην καταποθέντες, προήλθομεν δὲ νῦν βουλόμενοι μαθεῖν τὰ ἐν τῆι ὕληι ὡς ἔχει· πολλὴ γάρ τις καὶ λάσιος ἐφαίνετο. δαίμων δέ τις, ὡς ἔοικεν, ἡμᾶς ἤγαγεν σέ τε ὀψομένους καὶ εἰσομένους ὅτι μὴ μόνοι ἐν τῶιδε καθείργμεθα τῶι θηρίωι· ἀλλὰ φράσον γε ἡμῖν τὴν σαυτοῦ τύχην, ὅστις τε ὢν καὶ ὅπως δεῦρο εἰσῆλθες. ὁ δὲ οὐ πρότερον ἔφη ἐρεῖν οὐδὲ πεύσεσθαι παρ᾽ ἡμῶν, πρὶν ξενίων τῶν παρόντων μεταδοῦναι, καὶ λαβὼν ἡμᾶς ἦγεν ἐπὶ τὴν οἰκίαν - ἐπεποίητο δὲ αὐτάρκη καὶ στιβάδας ἐνωικοδόμητο καὶ τὰ ἄλλα ἐξήρτιστο - παραθεὶς δὲ ἡμῖν λάχανά τε καὶ ἀκρόδρυα καὶ ἰχθῦς, ἔτι δὲ καὶ οἶνον ἐγχέας, ἐπειδὴ ἱκανῶς ἐκορέσθημεν, ἐπυνθάνετο ἃ πεπόνθειμεν· κἀγὼ πάντα ἑξῆς διηγησάμην, τόν τε χειμῶνα καὶ τὰ ἐν τῆι νήσωι καὶ τὸν ἐν τῶι ἀέρι πλοῦν καὶ τὸν πόλεμον καὶ τὰ ἄλλα μέχρι τῆς εἰς τὸ κῆτος καταδύσεως. 33. Nous avançons promptement, et nous rencontrons un vieillard et un jeune homme qui travaillaient avec ardeur à cultiver un jardin et à diriger l'eau de la source. Ravis et effrayés tout ensemble, nous nous arrêtons : ceux-ci, visiblement animés des mêmes sentiments que nous, n'osent dire un seul mot. Enfin le vieillard : "Qui êtes-vous, dit-il, étrangers ? des dieux marins, ou d'infortunés mortels, comme nous ? Nous sommes des hommes, jadis habitants de la terre, aujourd'hui vivant au milieu de la mer, forcés de nager avec le monstre qui nous renferme, incertains du sort que nous éprouvons : il nous semble, en effet, que nous sommes morts, et pourtant nous croyons vivre encore. - Et nous aussi, lui dis-je, ô mon père, nous sommes des hommes arrivés depuis peu dans cette contrée ; avant-hier nous fûmes avalés avec notre navire. En ce moment même, nous allions en reconnaissance dans cette forêt, qui nous a paru étendue et épaisse. C'est un dieu sans doute qui nous a conduits, pour vous y voir et pour apprendre que nous ne sommes pas les seuls enfermés dans le monstre. Mais racontez-nous vos aventures, qui vous êtes, et comment vous êtes descendus ici. - Vous le saurez, nous répond le vieillard, mais ce ne sera pas avant que vans ayez reçu de moi les présents de l'hospitalité que je puis vous offrir." A ces mots, il nous prend la main et nous conduit à sa demeure, qu'il avait su rendre assez commode, et dans laquelle il avait disposé des lits avec d'autres objets nécessaires. Là, il nous sert des légumes, des fruits, des poissons, du vin ; et, nous voyant rassasiés, il nous demande le récit de nos aventures. Je lui raconte, sans en rien omettre, la tempête, notre arrivée à l’île des Vignes, notre navigation aérienne, notre bataille, et le reste jusqu'à notre descente dans le poisson. [34] Ὁ δὲ ὑπερθαυμάσας καὶ αὐτὸς ἐν μέρει τὰ καθ᾽ αὑτὸν διεξήιει λέγων, Τὸ μὲν γένος εἰμί, ὦ ξένοι, Κύπριος, ὁρμηθεὶς δὲ κατ᾽ ἐμπορίαν ἀπὸ τῆς πατρίδος μετὰ παιδός, ὃν ὁρᾶτε, καὶ ἄλλων πολλῶν οἰκετῶν ἔπλεον εἰς Ἰταλίαν ποικίλον φόρτον κομίζων ἐπὶ νεὼς μεγάλης, ἣν ἐπὶ στόματι τοῦ κήτους διαλελυμένην ἴσως ἑωράκατε. μέχρι μὲν οὖν Σικελίας εὐτυχῶς διεπλεύσαμεν· ἐκεῖθεν δὲ ἁρπασθέντες ἀνέμωι σφοδρῶι τριταῖοι ἐς τὸν ὡκεανὸν ἀπηνέχθημεν, ἔνθα τῶι κήτει περιτυχόντες καὶ αὔτανδροι καταποθέντες δύο ἡμεῖς μόνοι τῶν ἄλλων ἀποθανόντων ἐσώθημεν. θάψαντες δὲ τοὺς ἑταίρους καὶ ναὸν τῶι Ποσειδῶνι δειμάμενοι τουτονὶ τὸν βίον ζῶμεν, λάχανα μὲν κηπεύοντες, ἰχθῦς δὲ σιτούμενοι καὶ ἀκρόδρυα. πολλὴ δέ, ὡς ὁρᾶτε, ἡ ὕλη, καὶ μὴν καὶ ἀμπέλους ἔχει πολλάς, ἀφ᾽ ὧν ἡδύτατος οἶνος γεννᾶται· καὶ τὴν πηγὴν δὲ ἴσως εἴδετε καλλίστου καὶ ψυχροτάτου ὕδατος. εὐνὴν δὲ ἀπὸ τῶν φύλλων ποιούμεθα, καὶ πῦρ ἄφθονον καίομεν, καὶ ὄρνεα δὲ θηρεύομεν τὰ εἰσπετόμενα, καὶ ζῶντας ἰχθῦς ἀγρεύομεν ἐξιόντες ἐπὶ τὰ βραγχία τοῦ θηρίου, ἔνθα καὶ λουόμεθα, ὁπόταν ἐπιθυμήσωμεν. καὶ μὴν καὶ λίμνη οὐ πόρρω ἐστὶν σταδίων εἴκοσι τὴν περίμετρον, ἰχθῦς ἔχουσα παντοδαπούς, ἐν ἧι καὶ νηχόμεθα καὶ πλέομεν ἐπὶ σκάφους μικροῦ, ὁ ἐγὼ ἐναυπηγησάμην. ἔτη δέ ἐστιν ἡμῖν τῆς καταπόσεως ταῦτα ἑπτὰ καὶ εἴκοσι. 34. Frappé de surprise, il se met à son tour à nous raconter son histoire. "Étrangers, dit-il, je suis né à Chypre. Parti de ma patrie, avec mon fils, que vous voyez, et plusieurs serviteurs, je faisais voile vers l'Italie, emmenant avec moi sur un grand navire notre cargaison, dont vous avez sans doute vu les débris dans le gosier de la baleine. Jusqu'en vue de la Sicile, notre traversée fut heureuse. Mais assaillis alors d'un vent furieux, nous sommes emportés en trois jours dans l'Océan, où cette baleine nous rencontre, et nous avale, hommes et navire. Tous nos compagnons périssent ; seuls, nous échappons tous les deux au danger. Après avoir donné la sépulture à pas morts, nous élevons un temple à Neptune, et nous commençons à vivre comme nous faisons, cultivant des légumes dans ce jardin, mangeant des poissons et des fruits. Cette forêt très étendue, ainsi que vous le voyez, contient des vignes, qui produisent un vin fort agréable ; et vous avez aperçu, sans doute, une source dont l'eau est pleine de limpidité et de fraîcheur. Nous nous faisons un lit de feuillage, nous allumons un grand feu, nous allons à la chasse des oiseaux qui volent autour de nous, et nous péchons des poissons vivants, en pénétrant dans les branchies du cétacé, nous y prenons même des bains, lorsque nous le désirons. Par delà, en effet, se trouve un vaste étang salé, qui peut avoir vingt stades de tour, et dans lequel se trouvent des poissons de toute espèce : nous nous amusons à y nager et à naviguer dessus dans une petite barque que j'ai faite moi-même. Voici la vingt-septième année qui s'écoule depuis notre engloutissement. [35] καὶ τὰ μὲν ἄλλα ἴσως φέρειν δυνάμεθα, οἱ δὲ γείτονες ἡμῶν καὶ πάροικοι σφόδρα χαλεποὶ καὶ βαρεῖς εἰσιν, ἄμικτοί τε ὄντες καὶ ἄγριοι. Ἦ γάρ, ἔφην ἐγώ, καὶ ἄλλοι τινές εἰσιν ἐν τῶι κήτει; Πολλοὶ μὲν οὖν, ἔφη, καὶ ἄξενοι καὶ τὰς μορφὰς ἀλλόκοτοι· τὰ μὲν γὰρ ἑσπέρια καὶ οὐραῖα τῆς ὕλης Ταριχᾶνες οἰκοῦσιν, ἔθνος ἐγχελυωπὸν καὶ καραβοπρόσωπον, μάχιμον καὶ θρασὺ καὶ ὡμοφάγον· τὰ δὲ τῆς ἑτέρας πλευρᾶς κατὰ τὸν δεξιὸν τοῖχον Τριτωνομένδητες, τὰ μὲν ἄνω ἀνθρώποις ἐοικότες, τὰ δὲ κάτω τοῖς γαλεώταις, ἧττον μέντοι ἄδικοί εἰσιν τῶν ἄλλων· τὰ λαιὰ δὲ Καρκινόχειρες καὶ Θυννοκέφαλοι συμμαχίαν τε καὶ φιλίαν πρὸς ἑαυτοὺς πεποιημένοι· τὴν δὲ μεσόγαιαν νέμονται Παγουρίδαι καὶ Ψηττόποδες, γένος μάχιμον καὶ δρομικώτατον· τὰ ἑῶια δέ, τὰ πρὸς αὐτῶι τῶι στόματι, τὰ πολλὰ μὲν ἔρημά ἐστι, προσκλυζόμενα τῆι θαλάττηι· ὅμως δὲ ἐγὼ ταῦτα ἔχω φόρον τοῖς Ψηττόποσιν ὑποτελῶν ἑκάστου ἔτους ὄστρεια πεντακόσια. 35. « Notre condition, d'ailleurs, serait assez tolérable, si nous n'avions des voisins, des êtres logés près de nous, qui sont de moeurs difficiles, insupportables, barbares, sauvages. Eh quoi ! lui dis-je, il y a dans la baleine d'autres êtres que nous ? - Oui, et en grand nombre, répondit-il, tous inhospitaliers et d'un aspect effroyable. A l'extrémité occidentale de la forêt, vers la queue, sont les Tarichanes (34) : ils ont des yeux d'anguille et un visage d'écrevisse : peuple hardi, belliqueux, et ne vivant que de chair crue. De l'autre côté, vers la partie droite, sont les Tritonomendètes (35) : ils ressemblent à des hommes depuis la tête jusqu'à la ceinture ; le reste est d'un bouc. Ils sont moins féroces que les autres. A gauche se trouvent les Carcinochires (36) et les Thynnocéphales (37), qui ont fait entre eux alliance et amitié. Au centre séjournent les Pagourades (38) et les Psettopodes (39), race batailleuse et vite à la course. La partie orientale, vers la gueule, est presque entièrement déserte, à cause des inondations de la mer. Quant à la partie que j'occupe, j'en ai la jouissance, moyennant un tribut annuel de cinq cents huîtres que je paye aux Psettopodes.
(34) Τάριχος, salaison, saumure. [36] τοιαύτη μὲν ἡ χώρα ἐστίν· ὑμᾶς δὲ χρὴ ὁρᾶν ὅπως δυνησόμεθα τοσούτοις ἔθνεσι μάχεσθαι καὶ ὅπως βιοτεύσομεν. Πόσοι δέ, ἔφην ἐγώ, πάντες οὗτοί εἰσιν; Πλείους, ἔφη, τῶν χιλίων. Ὅπλα δὲ τίνα ἐστὶν αὐτοῖς; Οὐδέν, ἔφη, πλὴν τὰ ὀστᾶ τῶν ἰχθύων. Οὐκοῦν, ἔφην ἐγώ, ἄριστα ἂν ἔχοι διὰ μάχης ἐλθεῖν αὐτοῖς, ἅτε οὖσιν ἀνόπλοις αὐτούς γε ὠπλισμένους· εἰ γὰρ κρατήσομεν αὐτῶν, ἀδεῶς τὸν λοιπὸν βίον οἰκήσομεν. Ἔδοξε ταῦτα, καὶ ἀπελθόντες ἐπὶ ναῦν παρεσκευαζόμεθα. αἰτία δὲ τοῦ πολέμου ἔμελλεν ἔσεσθαι τοῦ φόρου ἡ οὐκ ἀπόδοσις, ἤδη τῆς προθεσμίας ἐνεστώσης. καὶ δὴ οἱ μὲν ἔπεμπον ἀπαιτοῦντες τὸν δασμόν· ὁ δὲ ὑπεροπτικῶς ἀποκρινάμενος ἀπεδίωξε τοὺς ἀγγέλους. πρῶτοι οὖν οἱ Ψηττόποδες καὶ οἱ Παγουρίδαι χαλεπαίνοντες τῶι Σκινθάρωι - τοῦτο γὰρ ἐκαλεῖτο - μετὰ πολλοῦ θορύβου ἐπήιεσαν. 36. « Voilà l'état du pays. Il faut cependant pourvoir à notre subsistance et aux moyens de nous défendre contre tous ces habitants. - Quel en est le nombre ? lui dis-je. - Ils sont plus de mille. - Et quelles sont leurs armes ? - Rien que des arêtes de poisson. - Cela étant, lui dis-je, nous ne risquons rien à les attaquer, puisqu'ils n'ont pas d'armes et que nous en avons. Si nous sommes vainqueurs, nous vivrons désormais sans inquiétude." Cet avis prévaut, et nous regagnons notre vaisseau pour faire nos préparatifs. Le refus du tribut devait être le prétexte de la guerre. C'était justement l'époque de l'échéance ; des ambassadeurs étaient venus pour le recevoir. Le vieillard leur répond avec hauteur et les chasse. Aussitôt les Psettopodes et les Pagourades, indignés contre Scintharus (40), c'était le nom de notre hôte, marchent contre lui avec un grand tumulte. (40) De Σκινθός, plongeur. [37] ἡμεῖς δὲ τὴν ἔφοδον ὑποπτεύοντες ἐξοπλισάμενοι ἀνεμένομεν, λόχον τινὰ προτάξαντες ἀνδρῶν πέντε καὶ εἴκοσι. προείρητο δὲ τοῖς ἐν τῆι ἐνέδραι, ἐπειδὰν ἴδωσι παρεληλυθότας τοὺς πολεμίους, ἐπανίστασθαι· καὶ οὕτως ἐποίησαν. ἐπαναστάντες γὰρ κατόπιν ἔκοπτον αὐτούς, καὶ ἡμεῖς δὲ αὐτοὶ πέντε καὶ εἴκοσι τὸν ἀριθμὸν ὄντες - καὶ γὰρ ὁ Σκίνθαρος καὶ ὁ παῖς αὐτοῦ συνεστρατεύοντο - ὑπηντιάζομεν, καὶ συμμίξαντες θυμῶι καὶ ῥώμηι διεκινδυνεύομεν. τέλος δὲ τροπὴν αὐτῶν ποιησάμενοι κατεδιώξαμεν ἄχρι πρὸς τοὺς φωλεούς. ἀπέθανον δὲ τῶν μὲν πολεμίων ἑβδομήκοντα καὶ ἑκατόν, ἡμῶν δὲ εἷς [καὶ] ὁ κυβερνήτης, τρίγλης πλευρᾶι διαπαρεὶς τὸ μετάφρενον. 37. Nous avions prévu leur attaque : nous les attendons de pied ferme, tout en armes, après avoir envoyé une vedette de vingt-cinq hommes ; avec l'ordre de ne sortir d'embuscade que quand ils auraient vu les ennemis passés. Ils exécutent cette manoeuvre, tombent sur les derrières de nos agresseurs, et les taillent en pièces. Pour nous, qui étions aussi au nombre de vingt-cinq, y compris Scintharus et son fils, qui avaient également pris les armes, nous les attaquons de front, et, engageant là mêlée avec courage et vigueur, nous livrons un combat douteux. Enfin, nous les mettons en fuite, et nous les poursuivons vivement jusqu'à leurs cavernes. Ils laissent cent soixante-dix des leurs sur la place; nous n'avons qu'un seul homme tué : le pilote, qui a le dos percé d'une arête de rouget. [38] ἐκείνην μὲν οὖν τὴν ἡμέραν καὶ τὴν νύκτα ἐπηυλισάμεθα τῆι μάχηι καὶ τρόπαιον ἐστήσαμεν ῥάχιν ξηρὰν δελφῖνος ἀναπήξαντες. τῆι ὑστεραίαι δὲ καὶ οἱ ἄλλοι αἰσθόμενοι παρῆσαν, τὸ μὲν δεξιὸν κέρας ἔχοντες οἱ Ταριχᾶνες - ἡγεῖτο δὲ αὐτῶν Πήλαμος - τὸ δὲ εὐώνυμον οἱ Θυννοκέφαλοι, τὸ μέσον δὲ οἱ Καρκινόχειρες· οἱ γὰρ Τριτωνομένδητες τὴν ἡσυχίαν ἦγον οὐδετέροις συμμαχεῖν προαιρούμενοι. ἡμεῖς δὲ προαπαντήσαντες αὐτοῖς παρὰ τὸ Ποσειδώνιον συνεμίξαμεν πολλῆι βοῆι χρώμενοι, ἀντήχει δὲ τὸ κῆτος ὥσπερ τὰ σπήλαια. τρεψάμενοι δὲ αὐτούς, ἅτε γυμνῆτας ὄντας, καὶ καταδιώξαντες ἐς τὴν ὕλην τὸ λοιπὸν ἐπεκρατοῦμεν τῆς γῆς. 38. Nous restons ce jour et la nuit suivante sur le champ de bataille, et nous y dressons un trophée fait de l'épine dorsale d'un dauphin. Le lendemain, les autres peuples, ayant appris la défaite de leurs alliés, se présentent à nous : les Tarichanes, commandés par Pélamus (41), à l'aile droite ; à la gauche, les Thynnocéphales; au centre, les Carcinochires. Les Tritonomendètes avaient gardé la neutralité et ne s'étaient rangés d'aucun parti. La rencontre se fit près du temple de Neptune. Nous nous élançons en poussant de grands cris, qui retentissent dans la baleine comme dans une caverne profonde. Nous mettons en fuite nos adversaires désarmés, nous les poursuivons à travers la forêt, et nous restons maîtres du reste de la contrée. (41) De πηλαμύς, pélamyde, espèce de thon. [39] καὶ μετ᾽ οὐ πολὺ κήρυκας ἀποστείλαντες νεκρούς τε ἀνηιροῦντο καὶ περὶ φιλίας διελέγοντο· ἡμῖν δὲ οὐκ ἐδόκει σπένδεσθαι, ἀλλὰ τῆι ὑστεραίαι χωρήσαντες ἐπ᾽ αὐτοὺς πάντας ἄρδην ἐξεκόψαμεν πλὴν τῶν Τριτωνομενδήτων. οὗτοι δέ, ὡς εἶδον τὰ γινόμενα, διαδράντες ἐκ τῶν βραγχίων ἀφῆκαν αὑτοὺς εἰς τὴν θάλατταν. ἡμεῖς δὲ τὴν χώραν ἐπελθόντες ἔρημον ἤδη οὖσαν τῶν πολεμίων τὸ λοιπὸν ἀδεῶς κατωικοῦμεν, τὰ πολλὰ γυμνασίοις τε καὶ κυνηγεσίοις χρώμενοι καὶ ἀμπελουργοῦντες καὶ τὸν καρπὸν συγκομιζόμενοι τὸν ἐκ τῶν δένδρων, καὶ ὅλως ἐώικειμεν τοῖς ἐν δεσμωτηρίωι μεγάλωι καὶ ἀφύκτωι τρυφῶσι καὶ λελυμένοις. 39. Quelque temps après, ils nous envoient des hérauts, enlèvent leurs morts et font des propositions d'amitié. Nous refusons toute espèce de trêve, et, pénétrant le lendemain sur leur territoire, nous les taillons tous en pièces, à l'exception des Tritonomendètes. Mais ceux-ci, ayant vu de quelle manière nous avions traité les autres, s'enfuient, en courant, par les branchies du cétacé, et s'élancent dans la mer. Maîtres dès lors du pays purgé d'ennemis, nous y vivons tranquilles, nous livrant à divers exercices , à la chasse, à la culture de la vigne, à la récolte du fruit des arbres, semblables, en un mot, à des gens qui vivent agréablement et librement dans une grande prison, d'où il leur est impossible de sortir. Nous passâmes ainsi un an et huit mois. [40] τῶι δ᾽ ἐνάτωι μηνὶ πέμπτηι ἱσταμένου, περὶ τὴν δευτέραν τοῦ στόματος ἄνοιξιν - ἅπαξ γὰρ δὴ τοῦτο κατὰ τὴν ὥραν ἑκάστην ἐποίει τὸ κῆτος, ὥστε ἡμᾶς πρὸς τὰς ἀνοίξεις τεκμαίρεσθαι τὰς ὥρας - περὶ οὖν τὴν δευτέραν, ὥσπερ ἔφην, ἄνοιξιν, ἄφνω βοή τε πολλὴ καὶ θόρυβος ἠκούετο καὶ ὥσπερ κελεύσματα καὶ εἰρεσίαι· ταραχθέντες οὖν ἀνειρπύσαμεν ἐπ᾽ αὐτὸ τὸ στόμα τοῦ θηρίου καὶ στάντες ἐνδοτέρω τῶν ὀδόντων καθεωρῶμεν ἁπάντων ὧν ἐγὼ εἶδον θεαμάτων παραδοξότατον, ἄνδρας μεγάλους, ὅσον ἡμισταδιαίους τὰς ἡλικίας, ἐπὶ νήσων μεγάλων προσπλέοντας ὥσπερ ἐπὶ τριήρων. οἶδα μὲν οὖν ἀπίστοις ἐοικότα ἱστορήσων, λέγω δὲ ὅμως. νῆσοι ἦσαν ἐπιμήκεις μέν, οὐ πάνυ δὲ ὑψηλαί, ὅσον ἑκατὸν σταδίων ἑκάστη τὸ περίμετρον· ἐπὶ δὲ αὐτῶν ἔπλεον τῶν ἀνδρῶν ἐκείνων ἀμφὶ τοὺς εἴκοσι καὶ ἑκατόν· τούτων δὲ οἱ μὲν παρ᾽ ἑκάτερα τῆς νήσου καθήμενοι ἐφεξῆς ἐκωπηλάτουν κυπαρίττοις μεγάλαις αὐτοκλάδοις καὶ αὐτοκόμοις ὥσπερ ἐρετμοῖς, κατόπιν δὲ ἐπὶ τῆς πρύμνης, ὡς ἐδόκει, κυβερνήτης ἐπὶ λόφου ὑψηλοῦ εἱστήκει χάλκεον ἔχων πηδάλιον πεντασταδιαῖον τὸ μῆκος· ἐπὶ δὲ τῆς πρώιρας ὅσον τετταράκοντα ὠπλισμένοι αὐτῶν ἐμάχοντο, πάντα ἐοικότες ἀνθρώποις πλὴν τῆς κόμης· αὕτη δὲ πῦρ ἦν καὶ ἐκάετο, ὥστε οὐδὲ κορύθων ἐδέοντο. ἀντὶ δὲ ἱστίων ὁ ἄνεμος ἐμπίπτων τῆι ὕληι, πολλῆι οὔσηι ἐν ἑκάστηι, ἐκόλπου τε ταύτην καὶ ἔφερε τὴν νῆσον ἧι ἐθέλοι ὁ κυβερνήτης· κελευστὴς δὲ ἐφειστήκει αὐτοῖς, καὶ πρὸς τὴν εἰρεσίαν ὀξέως ἐκινοῦντο ὥσπερ τὰ μακρὰ τῶν πλοίων. 40. Le cinquième jour du neuvième mois, vers le second bâillement de la baleine, car il est bon de savoir que l'animal bâillait une fois par heure, ce qui nous servait à compter les divisions du jour; vers le second bâillement, dis-je, de nombreuses voix et un grand tumulte se font entendre, comme un chant et un bruit de rameurs. Troublés, comme on peut croire, nous nous glissons vers la gueule de la baleine, et, nous tenant dans l'intervalle des dents, nous voyons le plus étrange des spectacles qui se soient offerts à mes yeux, des géants d'un demi-stade de hauteur, voguant sur de grandes îles, comme sur des galères. Je sais bien que ce que je raconte trouvera mes lecteurs incrédules, mais je le dirai pourtant. Ces îles étaient plus longues que hautes, et chacune d'elles, qui avait environ cent stades de circuit, était montée par cent vingt de ces géants. Les uns, assis le long des bords de l'île, se servaient, en guise de rames, de grands cyprès garnis de toutes leurs branches et de tout leur feuillage. Derrière, comme à la poupe, un pilote se tenait debout, monté sur une colline, et tenant à la main un gouvernail d'airain long d'un stade. A la proue, quarante guerriers tout armés paraissaient prêts à combattre : ils ressemblaient tout à fait à des hommes, sauf la chevelure. La leur était de feu, étincelante, en sorte qu'ils n'avaient pas besoin de casques. Au lieu de voiles, chaque île avait au centre une vaste forêt qui se gonflait sous le vent et faisait aller l'île au gré du pilote. Ils avaient un chef de rameurs, et ceux-ci manoeuvraient avec effort, comme on a coutume de le faire, pour faire avancer les gros vaisseaux. [41] Τὸ μὲν οὖν πρῶτον δύο ἢ τρεῖς ἑωρῶμεν, ὕστερον δὲ ἐφάνησαν ὅσον ἑξακόσιοι, καὶ διαστάντες ἐπολέμουν καὶ ἐναυμάχουν. πολλαὶ μὲν οὖν ἀντίπρωιροι συνηράσσοντο ἀλλήλαις, πολλαὶ δὲ καὶ ἐμβληθεῖσαι κατεδύοντο, αἱ δὲ συμπλεκόμεναι καρτερῶς διηγωνίζοντο καὶ οὐ ῥαιδίως ἀπελύοντο· οἱ γὰρ ἐπὶ τῆς πρώιρας τεταγμένοι πᾶσαν ἐπεδείκνυντο προθυμίαν ἐπιβαίνοντες καὶ ἀναιροῦντες· ἐζώγρει δὲ οὐδείς. ἀντὶ δὲ χειρῶν σιδηρῶν πολύποδας μεγάλους ἐκδεδεμένους ἀλλήλοις ἐπερρίπτουν, οἱ δὲ περιπλεκόμενοι τῆι ὕληι κατεῖχον τὴν νῆσον. [42] ἔβαλλον μέντοι καὶ ἐτίτρωσκον ὀστρείοις τε ἁμαξοπληθέσι καὶ σπόγγοις πλεθριαίοις. ἡγεῖτο δὲ τῶν μὲν Αἰολοκένταυρος, τῶν δὲ Θαλασσοπότης· καὶ μάχη αὐτοῖς ἐγεγένητο, ὡς ἐδόκει, λείας ἕνεκα· ἐλέγετο γὰρ ὁ Θαλασσοπότης πολλὰς ἀγέλας δελφίνων τοῦ Αἰολοκενταύρου ἐληλακέναι, ὡς ἦν ἀκούειν ἐπικαλούντων ἀλλήλοις καὶ τὰ ὀνόματα τῶν βασιλέων ἐπιβοωμένων. τέλος δὲ νικῶσιν οἱ τοῦ Αἰολοκενταύρου καὶ νήσους τῶν πολεμίων καταδύουσιν ἀμφὶ τὰς πεντήκοντα καὶ ἑκατόν· καὶ ἄλλας τρεῖς λαμβάνουσιν αὐτοῖς ἀνδράσιν· αἱ δὲ λοιπαὶ πρύμναν κρουσάμεναι ἔφευγον. οἱ δὲ μέχρι τινὸς διώξαντες, ἐπειδὴ ἑσπέρα ἦν, τραπόμενοι πρὸς τὰ ναυάγια τῶν πλείστων ἐπεκράτησαν καὶ τὰ ἑαυτῶν ἀνείλοντο· καὶ γὰρ ἐκείνων κατέδυσαν νῆσοι οὐκ ἐλάττους τῶν ὀγδοήκοντα. ἔστησαν δὲ καὶ τρόπαιον τῆς νησομαχίας ἐπὶ τῆι κεφαλῆι τοῦ κήτους μίαν τῶν πολεμίων νῆσον ἀνασταυρώσαντες. ἐκείνην μὲν οὖν τὴν νύκτα περὶ τὸ θηρίον ηὐλίσαντο ἐξάψαντες αὐτοῦ τὰ ἀπόγεια καὶ ἐπ᾽ ἀγκυρῶν πλησίον ὁρμισάμενοι· καὶ γὰρ ἀγκύραις ἐχρῶντο μεγάλαις ὑαλίναις καρτεραῖς. τῆι ὑστεραίαι δὲ θύσαντες ἐπὶ τοῦ κήτους καὶ τοὺς οἰκείους θάψαντες ἐπ᾽ αὐτοῦ ἀπέπλεον ἡδόμενοι καὶ ὥσπερ παιᾶνας ἄιδοντες. ταῦτα μὲν τὰ κατὰ τὴν νησομαχίαν γενόμενα. 41. D'abord, nous n'en vîmes que deux ou trois ; puis, bientôt, il en parut près de six cents, qui, se séparant en deux flottes, commencèrent une bataille navale. Les proues se choquent ; plusieurs vaisseaux sont fracassés, d'autres s'entr'ouvrent et sont coulés à fond ; plusieurs, dans la mêlée, combattent avec vigueur et ne lâchent point l'abordage ; les hommes placés à la proue déploient la plus grande valeur, s'élancent sur le navire ennemi et massacrent tout sans pitié ; on ne fait aucun prisonnier. Au lieu de grappins, ils se lancent de gros polypes attachés les uns aux autres, qui, s'embarrassant dans la forêt, arrêtent la marche du vaisseau. Ils combattent et se blessent à coups d'huîtres qui rempliraient un char et avec des éponges de la grandeur d'un arpent.
(42) Αἰόλος, Éole ;
κένταυρος, centaure.
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