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DION CASSIUS

HISTOIRE ROMAINE

livre XXXIX

 

-46

MORT DE CATON D'UTIQUE 

 


 

10 [1] Depuis que beaucoup de gens avaient cherché refuge chez lui, Caton s’était dans un premier temps préparé à prendre en main les affaires et à résister à César le mieux qu’il le pouvait.
[2] Mais les habitants d'Utique n'étaient déjà pas hostiles à César, et maintenant qu’ils le voyaient victorieux, ils n’écoutaient plus Caton; et les membres du sénat et les chevaliers qui étaient présents par peur d'être arrêtés par celui-ci, pensaient s’enfuir. Caton de son côté ne se décidait pas à faire la guerre contre César (il en était incapable de toute façon), ni de passer de son côté.
[3] Ce n'était pas qu’il eut peur, puisqu'il savait bien que César voulait l'épargner pour sa réputation d’humanité; mais à cause de cela il aimait passionnément la liberté, et il ne voulait être vaincu par personne; et il considérait la pitié de César comme pire que la mort.
[4] C’est pourquoi il convoqua l’ensemble les citoyens qui étaient présents, demanda à chacun où il avait l’intention d’aller, les fit partir avec des provisions pour leur voyage, et ordonna à son fils de se rendre chez César. Le jeune homme lui demanda : "Pourquoi donc ne le fais-tu pas aussi?"
[5] il répondit : "Moi, qui ai été élevé dans la liberté, avec le droit à la parole, je ne peux en vieillissant changer et apprendre à la place l'esclavage; mais toi, qui es né et as été élevé dans cette condition, tu peux servir la divinité qui préside tes destins."

10 [1] Ὅ τε Κάτων τὸ μὲν πρῶτον συγκαταφυγόντων πρὸς αὐτὸν πολλῶν παρεσκευάζετο τῶν τε πραγμάτων ἀντιλαβέσθαι καὶ τὸν Καίσαρα τρόπον τινὰ ἀμύνασθαι·
[2] ὡς δὲ οἵ τε Οὐτικήσιοι, ἅτε μηδὲ ἐν τῷ πρὶν ἐχθρωδῶς τῷ Καίσαρι ἔχοντες καὶ τότε νενικηκότα αὐτὸν ὁρῶντες, οὐκ ἐπείθοντο αὐτῷ, καὶ οἱ ἐκ τῆς γερουσίας τῶν τε ἱππέων παρόντες ἐφοβήθησαν μὴ συλληφθῶσιν ὑπ' αὐτῶν καὶ δρασμὸν ἐβουλεύσαντο, αὐτὸς μὲν οὔτ' ἀντιπολεμῆσαι οὐδὲ γὰρ οἷός τε ἦν οὔτ' αὖ προσχωρῆσαι τῷ Καίσαρι ἔγνω,
[3] οὐχ ὅτι τι ἐδεδίει καὶ γὰρ εὖ ἠπίστατο καὶ πάνυ ἂν σπουδάσαντα αὐτὸν ἑαυτοῦ, τῆς ἐπὶ φιλανθρωπίᾳ δόξης ἕνεκα, φείσασθαι, ἀλλ' ὅτι τῆς τε ἐλευθερίας ἰσχυρῶς ἤρα, καὶ ἡττᾶσθαι οὐδενὸς ἐς οὐδὲν ἐβούλετο, τοῦ τε θανάτου πολὺ τὸν παρὰ τοῦ Καίσαρος ἔλεον χαλεπώτερον ἡγεῖτο εἶναι.
[4] Συγκαλέσας δὲ τοὺς παρόντας τῶν πολιτῶν, καὶ διερωτήσας ὅποι ἕκαστος αὐτῶν ὥρμηται, ἐκείνους μὲν μετ' ἐφοδίων ἐξέπεμψε, τῷ δὲ υἱεῖ πρὸς τὸν Καίσαρα ἐλθεῖν ἐκέλευσε. Πυθομένου τε τοῦ νεανίσκου « Διὰ τί οὖν οὐχὶ καὶ σὺ τοῦτο ποιεῖς; »
[5] ἀπεκρίνατο αὐτῷ « Ὅτι ἐγὼ μὲν ἔν τε ἐλευθερίᾳ καὶ ἐν παρρησίᾳ τραφεὶς οὐ δύναμαι τὴν δουλείαν ἐκ μεταβολῆς ἐπὶ γήρως μεταμαθεῖν· σοὶ δ' ἐν τοιαύτῃ καταστάσει καὶ γεννηθέντι καὶ τρα φέντι τὸν δαίμονα τὸν λαχόντα σε θεραπεύειν προσήκει

11 [1] Après cela, il fit aux habitants d'Utique un exposé de son administration et leur rendit les fonds publics qu’il avait en surplus, aussi bien ceux qu’il avait reçu d’eux et il souhaita quitter la vie avant l'arrivée de César.
[2] Il ne le fit pas de jour, parce que son fils et d'autres autour de lui le surveillaient; mais quand la soirée vint, il glissa secrètement un poignard sous son oreiller, et demanda le livre de Platon sur l'Âme.
[3] Il fit cela soit pour essayer de détourner les soupçons des gens présents, pour qu’on le surveille le moins possible, soit dans le désir d'obtenir une consolation sur la mort en lisant ce livre. Quand il eut fini sa lecture, aux environs de minuit,
[4] il s’empara du poignard, et se l’enfonça dans le ventre. Il serait mort immédiatement d’hémorragie, s’il n’était pas tombé du lit en faisant du bruit et n’avait pas réveillé ceux qui montaient la garde devant sa porte. Alors son fils et quelques autres se précipitèrent à l’intérieur et lui remirent les entrailles dans le ventre, et lui apportèrent une assistance médicale.
[5] Ils emportèrent le poignard et fermèrent les portes à clef, pour qu’il puisse dormir en paix; ils ne pensaient pas qu’il puisse trouver une autre façon de mourir. Mais il enfonça les mains dans la blessure et brisa les points de suture, et c’est ainsi qu’il mourut.
[6] Ainsi Caton, qui fut le plus grand démocrate et le plus grand humaniste de son temps, acquit aussi une grande renommée par sa mort elle-même et obtint le titre d'Uticensis, parce qu’il était mort de cette façon à Utique, et parce qu'il y fut enterré en grande pompe par les habitants.

11 [1] Ταῦτ' οὖν πράξας, καὶ τοῖς Οὐτικησίοις τήν τε διοίκησιν ἀπολογισάμενος καὶ τὰ λοιπὰ χρήματα τά τε ἄλλα ὅσα αὐτῶν εἶχεν ἀποδούς, προαπαλλαγῆναι πρὸ τῆς τοῦ Καίσαρος ἀφίξεως ἠθέλησε.
[2] Καὶ μεθ' ἡμέραν μὲν οὐκ ἐπεχείρησε τοῦτο ποιῆσαι· ὅ τε γὰρ υἱὸς καὶ οἱ ἄλλοι οἱ περὶ αὐτὸν ὄντες φυλακὴν αὐτοῦ εἶχον· ἐπεὶ δὲ ἑσπέρα ἐγένετο, ξιφίδιόν τέ τι κρύφα ὑπὸ τὸ προσκεφάλαιον ὑπέθηκε, καὶ τὸ τοῦ Πλάτωνος βιβλίον τὸ περὶ τῆς ψυχῆς αὐτῷ γεγραμμένον ᾖτησε,
[3] εἴτ' οὖν πόρρω τῆς ὑποψίας τοῦ τι τοιοῦτο βουλεύσασθαι τοὺς παρόντας ἀπαγαγεῖν σπουδάσας, ὅπως ὡς ἥκιστα παρατηρηθῇ, εἴτε καὶ παραμύθιόν τι πρὸς τὸν θάνατον ἐκ τῆς ἀναγνώσεως αὐτοῦ λαβεῖν ἐπιθυμήσας. Ὡς δὲ ἐκεῖνό τε ἀνελέξατο καὶ ἡ νὺξ ἐμέσου,
[4] τό τε ἐγχειρίδιον ὑφείλκυσε, καὶ ἑαυτὸν ἐπὶ τὴν γαστέρα παίσας εὐθὺς ἂν ἐτελεύτησεν ἔξαιμος γενόμενος, εἰ μὴ καταπεσὼν ἐκ τοῦ σκιμποδίου ψόφον τε ἐποίησε καὶ τοὺς προκοιτοῦντας ἐξήγειρε. Καὶ οὕτως ὅ τε υἱὸς καὶ ἄλλοι τινὲς ἐσπεσόντες τά τε ἔντερα αὐτοῦ ἐς τὴν γαστέρα αὖθις κατέταξαν καὶ θεραπείαν αὐτῷ προσήγαγον.
[5] Καὶ οἱ μὲν τό τε ξιφίδιον ἦραν καὶ τὰς θύρας ἔκλεισαν, ὅπως ὕπνου λάχῃ οὐ γὰρ δὴ καὶ ἄλλως πως ἀποθανεῖν αὐτὸν προσεδόκησαν· ἐκεῖνος δὲ ἔς τε τὸ τραῦμα τὰς χεῖρας ἐνέβαλε καὶ τὰς ῥαφὰς αὐτοῦ διαρρήξας ἀπέψυξεν.
[6] Ὁ μὲν οὖν Κάτων καὶ δημοτικώτατος καὶ ἰσχυρότατος καὶ ἰσχυρογνωμονέστατος πάντων τῶν καθ' ἑαυτὸν ἀνθρώπων γενόμενος μεγάλην δόξαν καὶ ἀπ' αὐτοῦ τοῦ θανάτου ἔλαβεν, ὥστε καὶ ἐπωνυμίαν Οὐτικήσιος, ὅτι τε ἐν τῇ Οὐτικῇ οὕτως ἐτελεύτησε καὶ ὅτι δημοσίᾳ ὑπ' αὐτῶν ἐτάφη, κτήσασθαι.

 

 

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