ISTHMIQUES
ISTHMIQUES. ISTHMIQUE I. A HÉRODOTE DE THEBES , VAINQUEUR A LA COURSE DES CHARS. Argument. — Date de la victoire : 457 ans avant J. C. — Lieu de la scène : Thèbes. Pour célébrer Thèbes, sa patrie, Pindare laisse un moment de côté un chant qu'il destinait à Céos : aux louanges qu'il décerne à son héros il associe le Thébain Iolas, le Spartiate Castor, tous deux athlètes immortels. — Destinée d'Asopodore, père d'Hérodote; banni deThèbes il a trouvé un asile dans Orchomène; il jouit aujourd'hui de son premier bonheur. Maximes : les mortels vaillants et généreux méritent d'être chantés: les récompeuses varient avec les conditions ; mais les beaux vers sont le prix qu'ambitionnent l'athlète et le guerrier. — Victoires d'Hérodote. Puisse-t-il obtenir de nouveaux succès, lui qui n'est point avare ! Dans cette ode Pindare rattache l'éloge de Thèbes à celui d'Hérodote. Que si, comme nous le pensons, la victoire qu'il célèbre date de 457 avant J. C, les Thébains et les Spartiates étaient alors alliés; à Tanagre, à Œnophile ils combattirent ensemble contre les Athéniciens, en 466; ceci expliquerait la courte digression où l'auteur réunit, pour les vanter, Iolas de Thèbes et Castor de Lacédémone.
Le mode est dorien selon Hermann. |
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ΗΡΟΔΟΤΩι ΘΗΒΑΙΩι ΑΡΜΑΤΙ
Μᾶτερ ἐμά, τὸ τεόν, χρύσασπι Θήβα, |
A HÉRODOTE DE THÈBES , VAINQUEUR A LA COURSE DES CHARS. Str. 1. —- Thèbes (1) au bouclier d'or, ô ma mère, pour te chanter, je quitterai même d'autres travaux. Ne t'offense point (2), sourcilleuse Délos qui m'inspires. Quoi de plus cher aux bons que des parents vénérés ? Pardonne, ô cité d'Apollon. Les dieux aidant, j'achèverai ces deux hymnes (3) Ant. 1. — Où le chœur chante, et Phébus à la longue chevelure, honoré dans l'île de Céos par un peuple de marins, et la colline de l'Isthme (4) pressé par les flots : car, dans les jeux, elle vient de donner à la race de Cadmus six couronnes, prix de victoires glorieuses pour ma patrie. Là aussi Alcmène a mis au monde l'intrépide Ép. 1. — Enfant (5) qui fit trembler jadis les chiens de Géryon. Pour moi, tout en vantant le quadrige d'Hérodote , je veux associer celui qui n'en guida point les rênes par des mains étrangères, à l'hymne de Castor et (6) d'Iolas. Car ces héros furent les plus habiles conducteurs de chars que Lacédémone et Thèbes aient enfantés. Str. 2. — Souvent ils ont pris part aux luttes solennelles et orné leurs maisons de trépieds, d'urnes et de coupes d'or, après avoir cueilli les palmes de la victoire ; leur vertu brille éclatante dans les courses nues et dans les courses armées, où les boucliers retentissent; Ant. 2. — Comme leurs mains s'ennoblirent en dardant les javelots ; en lançant les disques de pierre ! Car le pentathle n'existait pas encore; mais chaque exercice avait son prix à part. Que de fois les cheveux couronnés de feuillage, on a vu paraître, et près des eaux de Dircé et sur les rives de l'Eurotas, Ép. 2. — Le fils (7) d'Iphiclès, compatriote des Spartes (8), et le Tyndaride (9) qui habitait le sol escarpé de Thérapné parmi les Achéens ! Adieu (10). Moi, je vais, en adressant cet hymne à Neptune (11), à l'isthme sacré, aux rives d'Oncheste (12), proclamer parmi les titres de gloire de mon héros la noble destinée de son père Asopodore, Str. 3. — Et Orchomène (13), patrie de ses ancêtres, où tout meurtri par un naufrage, au sortir de la vaste mer (14), il fut accueilli dans son affreuse misère. Aujourd'hui le sort, qui a présidé à sa naissance, l'a rétabli dans sa félicité première. Mais quiconque a souffert possède un esprit prévoyant. Ant. 3. — Que si un mortel poursuit la gloire de toute son âme, s'il n'épargne ni l'or, ni les sueurs, nous devons, lorsqu'il la trouve, lui rendre, sans envie, un magnifique hommage. Car légère est l'offrande du poète pour payer mille labeurs, et relever, par une belle parole, la commune (15) gloire. Ép. 3. — Diverse selon les œuvres, la récompense est douce à tous les hommes, au berger, au cultivateur, à l'oiseleur, à celui que nourrit la mer. Chacun travaille uniquement pour repousser de ses entrailles la cruelle faim. Mais le mortel qui a remporté une brillante victoire dans les luttes ou à la guerre, trouve, s'il est dignement loué, le prix le plus beau dans les éloges fleuris de ses concitoyens et des étrangers. Str. 4. — Il faut donc aussi que je célèbre l'agitateur du globe, fils de Cronos, ce dieu (16) voisin, protecteur des chars qui parcourent la lice; il faut que j'invoque tes enfants (17), ô Amphitryon, et la vallée de (18) Minyas et le bois sacré de Cérès à Éleusine, et l'Eubée (19), dans les courses circulaires. Ant. 4. — J'ajoute, ô Protésilas (20), l'enceinte que te consacrèrent dans Phylacé des guerriers argiens. Mais dire tous les succès accordés aux coursiers d'Hérodote par Mercure, qui préside aux luttes, c'est ce que me défendent les bornes étroites de cet hymne. Souvent ce que l'on passe sous silence cause un plaisir plus vif. Ép. 4. — Puisse-t-il, enlevé sur les ailes radieuses des Muses à la douce voix, revenir aussi de Pytho et d'Olympie, les mains pleines des nobles palmes de l'Alphée, pour l'honneur de Thèbes aux sept portes ! Celui qui couve chez lui des trésors cachés et se rit des hommes qu'il outrage , ne songe pas qu'il lui faudra livrer à Pluton une âme veuve de gloire. |
ISTHMIQUE II. A XÉNOCRATE D'AGRIGENTE, VAINQUEUR A LA COURSE DES CHARS. Argument. — Date de la victoire : 476 avant J. C. On ne sait pas l'époque où cette ode fut composée; mais on peut affirmer qu'elle ne l'a pas été avant 470. Théron d'Agrigente et son frère Xénocrate étaient morts. C'est au fils du vainqueur, à Thrasybule, qu'elle est adressée pour l'anniversaire de la victoire. Autrefois la passion inspirait les poètes : Aujourd'hui l'argent est le mobile de tout. Pindare n'a pu composer plus tôt ces vers; d'ailleurs la victoire de Xénocrate a déjà été célébrée. Nombreux succès de Xénocrate et de sa famille dans les jeux publics ; vertus du héros ; il est d'un caractère doux ; il est passionné pour les coursiers et les chars; pieux, hospitalier. Il n'oubliera pas la mémoire de son père. Rien de plus simple que le cadré de cette pièce : Pindare vante les succès et les vertus de Xénocrate ; il recommande au fils d'en perpétuer le souvenir. Le mode est dorien, selon Hermann. |
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ΞΕΝΟΚΡΑΤΕΙ ΑΚΡΑΓΑΝΤΙΝΩι ΑΡΜΑΤΙ
Οἱ μὲν πάλαι, ὦ Θρασύβουλε, φῶτες, οἳ χρυσαμπύκων |
A XÉNOCRATE D'AGRIGENTE, VAINQUEUR A LA COURSE DES CHARS. Str. 1. — O Thrasybule (21), les hommes d'autrefois, qui montaient sur le char des Muses aux réseaux d'or, leur noble lyre à la main, s'empressaient de lancer des hymnes mélodieux à ces enfants beaux d'une ravissante puberté, amie d'Aphrodite au trône brillant. Ant. 1. — Car, en ce tempe, la Muse n'était ni avide de gain, ni mercenaire; on n'achetait pas la voix de Terpsichore (22), douce comme le miel; elle n'inscrivait pas sur son front le prix de ses chante suaves. Mais il faut aujourd'hui suivre ce mot d'un Argien, qui s'éloigne peu de la vérité. Ép. 1. — « L'argent, l'argent fait l'homme, disait-il; j'ai perdu à. la fois mes biens et mes amis.» Vous me comprenez (23) : elle n'est point inconnue (24) la victoire que je chante, remportée dans l'Isthme (25) par les coursiers de Xénocrate, grâce à Neptune (26), qui lui envoya la couronne de Sélinum (27) dorien (28), pour qu'il en ceignit ses cheveux, Str. 2. — Honorant ainsi un héros au beau char, lumière d'Agrigente. Près de Crissa (29), le puissant Apollon le vit, et là aussi le combla de gloire; et, dans la superbe Athènes, admis aux fêtes renommées des Érechtides (30), il n'eut pas à blâmer la main du mortel qui veillait sur son char en pressant les coursiers, Ant. 2. — La main de Nicomaque portée à propos sur les brides abattues. Celui-ci fut même reconnu par les héraults (31) des jeux, par les Éléens, prêtres de Jupiter Cronide; sans doute, pour les avoir reçus en hôte généreux; ils saluèrent d'une voix affectueuse celui que la brillante victoire venait de recevoir dans ses bras, Ép. 2. — Dans leur propre pays, appelé l'enceinte sacrée de Jupiter Olympien ; où les fils d'Ènésidème se couvrirent d'une gloire immortelle (32). Ce n'est pas d'aujourd'hui, ô Thrasybule, que vos palais connaissent les aimables pompes et le miel des doux hymnes ; Str. 3. — Car nul écueil, nulle route n'arrête celui qui porte aux hommes illustres les présents que leur doivent les vierges de PHélicon. Puisse-je, en lançant au loin le disque, l'emporter autant que Xénocrate par l'aménité de son caractère ! Les citoyens vénéraient (33) ses mœurs; Ant. 3. — Il aimait à élever des coursiers selon la coutume des Grecs; il prenait part à tous les banquets des dieux. Autour de sa table hospitalière ne souffla jamais de vent qui fit (34) plier les voiles; mais, en été, il naviguait jusqu'au Phase; en hiver, jusqu'aux rivages du Nil (35). Ep. 3. — Que son fils, en dépit de l'envie qui obsède l'âme humaine, n'oublie donc jamais, ni la vertu paternelle, ni ces vers; car, je ne les ai point composés pour qu'ils dorment dans le silence. Chante-les, ô Nicasippe (36), quand tu seras chez mon hôte chéri. |
ISTHMΙQUE III. (III et ΙV) A MELISSUS ΤHΕΒΑIΝ, VAINQUEUR AU PANCRACE. Argument. — Date de la victoire : 474 avant J. C. — Quelques années après la bataille de Platée. — Lieu de la scène : Thèbes. Mélissus était de la race des Cléonymides : l'ode où il est chanté fut représentée probablement le soir dans une fête de famille. Marche de la composition. Éloge de la modération et de la piété dans une fortune brillante. Il convient cependant de célébrer les héros, et, par conséquent, Mélissus vainqueur dans l'Isthme et dans Némée. Mélissus imite ses ancêtres illustrés autrefois à la course des chars et unis par le sang aux Labdacides. Sa victoire rend facile aux poètes l'éloge des Cléonymides. Honorés dans Thèbes, hôtes publics des cités voisines, sans orgueil, passionnés pour les coursiers, guerriers courageux, ils semblaient avoir atteint le comble de la gloire: cependant quatre d'entre eux périrent dans les combats en un seul jour. — Mais Neptune, en couronnant Mélissus, vient de relever l'éclat de cette famille. — En effet, après avoir eu des succès dans Athènes et à Sicyone, les Cléonymides ont été longtemps négligés par la fortune, et leur antique renom allait s'éclipser. — Ainsi le brave Ajax fut un moment oublié des Grecs. — Ce qu'Homère a fait pour venger la mémoire d'Ajax, Pindare le fera pour les Cléonymides en célébrant Mélissus: puissent les Muses seconder ses efforts ! — Supériorité de Mélissus au pancrace : petit de corps, il ressemble au vainqueur d'An tée, à Hercule aujourd'hui habitant de l'Olympe. — Jeux funèbres consacrés dans Thèbes aux fils d'Hercule et de Mégare. Mélissus s'y est aussi distingué en suivant les conseils d'un excellent maître. Au début de l'ode, Pindare a placé la maxime qui en lie toutes les parties : Les mortels ne sont dignes d'éloges que lorsqu'ils savent réprimer l'orgueil au sein de la prospérité. Tel fut Mélissus, tels les Cléonymides; aussi obtiennent-ils le prix qu'ils méritent, comme Ajax dans les chants d'Homère, comme Hercule dans les cieux.
Le mode est dorien, selon Hermann. |
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ΜΕΛΙΣΣΩι ΘΗΒΑΙΩι ΙΠΠΟΙΣ
Εἴ τις ἀνδρῶν εὐτυχήσαις ἢ σὺν εὐδόξοις ἀέθλοις ΜΕΛΙΣΣΩι ΘΗΒΑΙΩι ΠΑΓΚΡΑΤΙΩι
Ἔστι μοι θεῶν ἕκατι μυρία παντᾷ κέλευθος· |
A MELISSUS ΤHΕΒΑIΝ, VAINQUEUR AU PANCRACE. Str. 1. — Lorsqu'un mortel heureux, ou par de mémorables luttes ou par d'immenses richesses étouffe dans son âme un misérable orgueil, il mérite d'être vanté parmi les citoyens. O Jupiter, c'est de toi que les hommes reçoivent les grandes vertus; et dans les justes, le bonheur vit durable, tandis que pour les âmes perverses il ne fleurit pas toujours. Ant. 1. — Mais (37), en retour de ses hauts faits, il faut chanter un héros, il faut le combler de louanges dans les hymnes suaves du chœur. Il est double le prix, que dans les luttes, la fortune a donné à Mélissus, elle qui inspire à son cœur une douce joie; dans les plaines de l'isthme (38), il a remporté des couronnes ; et dans la vallée profonde du Lion (39) à la vaste poitrine, il a fait proclamer Thèbes, Ép. 1. — Par la victoire de ses coursiers. Non, il ne flétrit point la gloire attachée au nom de ses aïeux. Vous connaissez l'antique renom de Cléonyme (40) à la course des chars; et, du côté maternel, alliés à la famille des Labdacides (41), ils consacraient leurs richesses à dresser des quadriges pour les joutes. Mais le temps amène, avec la révolution des jours, des changements sans fin. Seuls les en-fonts des dieux sont invulnérables. Str. 2. — De toutes parts, grâce au ciel, je puis suivre de nombreuses voies (42), ô Mélissus (et dans l'isthme tu me les a rendues faciles), pour chanter vos vertus, les vertus dont un Dieu ne cesse de répandre l'éclat sur la vie mortelle des Cléonymides. Mais, en mille sens, les vents rapides poussent tous les hommes. Ant. 2. — On dit que, dans l'origine, honorés à Thèbes, proxènes (43) des cités voisines, ils ne connaissaient point les cris de l'injure; et tous les témoignages glorieux distribués parmi les hommes au mérite immense des vivants et des morts, ils en furent comblés ; et les vertus sublimes de leur race ont atteint les colohnes d'Hercule (44). Ép. 2. — Ahl gardez-vous d'aspirer à une gloire plus grande. Ils élevaient aussi des coursiers ; ils étaient chéris de Mars aux armes d'airain : Hé bien, en un seul jour, l'ouragan de la guerre ravit quatre (45) héros à l'heureux foyer. Mais aujourd'hui, après un hiver sombre (46) de plusieurs mois, ils ont, comme la terre, repris l'éclat des roses purpurines, Str. 1.3. — Par la volonté des Immortels. L'agitateur du globe, le dieu qui habite Oncheste (47) et la digue (48) des mers, devant les remparts de Corinthe, en accordante tes aïeux cet hymne de victoire, fait lever de son lit de repos la renommée qui jadis publiait leurs exploits. Car elle s'était endormie. Mais elle s'est réveillée toute éclatante, comme Lucifer au milieu des autres étoiles. Ant. 3. — Après avoir proclamé que leur char avait obtenu la victoire dans Athènes et dans les jeux d'adresse à Sicyone, elle les a fait couronner aussi de guirlandes poétiques par les contemporains. Jamais leurs chars courbés ne manquaient aux luttes publiques, mais ils aimaient à rivaliser avec tous les Grecs par le luxe des chevaux. A ceux qui ne tentent rien, le silence de l'oubli. Ép. 3. — Cependant la fortune laisse dans l'ombre ceux même qui combattent tant qu'ils n'ont pas atteint le but suprême (49). C'est elle qui donne les succès et les revers. Quelquefois aussi l'artifice des faibles fait échouer les forts et les abat. Vous connaissez la valeur meurtrière d'Ajax (50), qui, dans la nuit avancée, se perça de son épée,à la honte de tous les guerriers grecs accourus au siège de Troie. Str. 4. — Homère ne laissa pas de l'illustrer parmi les hommes, d'exalter ce grand courage; il recommanda aux poètes à venir de le chanter en tenant le rameau (51) des divins poèmes ; elle retentit dans l'immortalité la renommée de tout ce qu'ont chanté de beaux vers : sur la terre féconde et sur les mers, les nobles œuvres rayonnent d'un éclat impérissable. Ant. 4. — Puissions-nous, avec la faveur des Muses, allumer aussi en l'honneur de Mélissus le flambeau de nos hymnes; auréole méritée par une victoire au pancrace, par le fils de Tirésias (52); son courage dans le combat est pareil à l'ardeur sauvage des lions rugissants ; pour la ruse, c'est un renard qui, renversé sur le dos, arrête l'attaque . d'un aigle. Que tout nous soit arme contre l'ennemi. Ép. 4. — Il n'avait point reçu en partage la haute taille d'Orion (53); mais, à le voir, on le méprisait, lui si redoutable par la pesanteur de ses coups. Ainsi jadis, de la cad-méenne Thèbes, vint aux champs d'Antée (54), un héros, petit de corps, mais d'une âme indomptable, pour l'attaquer dans la fertile Libye, et l'empêcher de suspendre à la voûte du temple de Neptune les crânes de ses hôtes; Str: 5. — C'était le fils d'AIcmène. Et il est monté dans l'Olympe, après avoir exploré tous les continents, et le bassin de la mer qui blanchit entre des rivages escarpés; après avoir pacifié la route des navigateurs. Maintenant, à côté du dieu qui porte l'égide, il goûte le bonheur suprême, honoré des immortels qui le chérissent, époux d'Hébé, roi d'un palais d'or et gendre de Junon. Ant. 5. — C'est pour lui qu'aux portes d'Electre (55), nous ses concitoyens, nous offrons un festin solennel, nous couronnons les autels de nouvelles guirlandes, nous brûlons des victimes aux mânes de huit fils guerriers que lui donna Mégare, fille de Créon, et pour lesquels, au coucher du soleil, s'élève une flamme radieuse qui dure toute la nuit et lance dans les airs une fumée odoriférante. Ép. 5. — Le lendemain ont lieu les jeux annuels où se mesurent les forces. Là, couronné de myrtes blancs (56), Mélissus fut proclamé deux fois vainqueur parmi les hommes, lui qui déjà avait remporté un troisième succès parmi les enfants, docile à suivre les conseils du prudent conducteur qui dirigeait son char. Je célèbre aussi avec lui Orsée dans les doux éloges que je répands. |
ISTHMIQUE IV. (V) A PHYLACIDAS D'ÉGINE, VAINQUEUR AU PANCRACE. Argument. — Date de la victoire: 498? — Lieu de la scène: Égine; maison de Lampon. Phylacidas, Éginète, était le plus jeune fils de Lampon; il vainquit deux fois aux jeux istbroiques; cette victoire est la seconde qu'il remporta; voyez sur la famille de Lampon l'argument de la cinquième néméenne. Puissance de la déesse Thia : c'est elle qui donne la victoire aux navires et aux cbars dans les guerres, elle qui distribue les prix des jeux publics. — Victoire de Phylacidas et de Pythéas son frère aîné. — Partie mythique : comment parler d'Égine sans parler de ses héros ? chaque cité a les siens qu'elle vante. Tout récemment encore les matelots Éginètes se sont immortalisés à Salamine. — Retour au sujet : Éloge du vainqueur et de sa famille. Unité de plan : double gloire d'Égine et dans les batailles et dans les jeux publics ; l'une vient de briller pour elle à Salamine; l'autre, dans le succès de Phylacidas. Le mode est dorien (57) selon Hermann. |
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ΦΥΛΑΚΙΔΑι ΑΙΓΙΝΗΤΗι ΠΑΓΚΡΑΤΙΩι
Μᾶτερ Ἁλίου πολυώνυμε Θεία, |
A PHYLACIDAS D'ÉGINE, VAINQUEUR AU PANCRACE.
Str. 1. — Mère du soleil, illustre Thia (58), c'est par toi . que les hommes
estiment au-dessus de tout la puissance
de l'or; car, grâce à toi, ô reine, les vaisseaux luttant sur les flots, les
coursiers attelés aux chars (59), sont admirés dans le choc rapide des combats.
Ant. 1. — Et, par toi, les joutes d'athlètes font conquérir une bien douce gloire
à celui dont la chevelure est ceinte de nombreuses couronnes gagnées par son
bras ou ses pieds vîtes. Mais la force des hommes ne brille que de l'aveu des
dieux. Deux choses seules épanouissent la plus charmante fleur de la vie et
l'éclat de l'opulence :
Ép. 1. — Un beau succès, un beau renom. N'aspire point à devenir Jupiter. Tu
possèdes tout, si tu as en partage ce double trésor. Aux mortels, des choses
mortelles. Dans le souvenir de l'isthme (60), ô Phylacidas, fleurissent deux de tes
victoires, et dans Némée deux succès au pancrace , celui de Pythéas et le tien.
Mais, sans les Éacides (61) mon cœur n'essaie point de chants. Je suis venu avec
les Grâces (62) vers les fils de Lampon,
Str. 2. — Dans une cité où régnent les lois. Que si elle suit une brillante voie
d'oeuvres divines, n'envie point à ses efforts un chant mêlé d'éloges. Car la
gloire est le prix des plus vaillants héros; on les célèbre à jamais sur la lyre
et sur les flûtes aux sons variés ;
Ant. 2. — Jupiter veut que vénérés ils inspirent la pensée des sages. Dans les
sacrifices splendides des Étoliens on honore les valeureux Œnides (63); à Thèbes,
Iolas dompteur de coursiers; dans Argos, Persée; la bravoure de Castor et de
Pollux, sur les rives de l'Eurotas :
Ép. 2. — Mais, dans Œnone (64), c'est le grand cœur
d'Éaque et de ses fils. Deux fois, les armes à la main, ils ont dévasté la ville
de Troie; d'abord, en suivant Hercule, puis avec les Atrides. Déroule les faits
dès l'origine. Dis-nous quels guerriers tuèrent Cycnus, tuèrent Hector et le roi
des Éthiopiens, l'intrépide Memnon aux armes d'airain(
65); enfin qui a percé d'une
lance le brave Télèphe (66) aux bords du Calque
(67).
Str. 3. — Ma bouche proclame que ces héros ont pour patrie l'île célèbre
d'Égine. Depuis longtemps, elle est debout la tour élevée par leurs vertus
sublimesn. Pour eux, ma langue facile a bien des flèches retentissantes à
décocher ; elle peut le témoigner, la ville d'Ajax, Salamine, sauvée dans une
guerre récente par des marins (68) ,
Ant. 3. — Lorsqu'une désastreuse tempête (69) de Jupiter frappa d'une grêle de
trépas d'innombrables guerriers. Couvrons toutefois leur gloire du silence (70).
Jupiter dispense une chose et une autre, Jupiter, arbitre souverain. Mais les
victoires que nous chantons aiment aussi le miel délicieux des éloges.
Ép, 3. — Qu'il vienne disputer le prix des luttes à la race de (71) Cléonice, celui
qui la connaît. Certes les longs efforts de ses héros n'ont jamais faibli, et
les plus coûteuses espérances n'ont point émoussé leur ardeur. Je loue aussi
Pythéas (72) entre les lutteurs. Ses mains ont enseigné à Phylacidas le droit
chemin des coups les plus prompts. Prends, pour lui cette couronne, ô
Phylacidas, et porte-lui cette mitre (73) de laine, envoie-lui aussi ce chant ailé. |
ISTHMIQUE V. (VI) A PHYLACIDAS, VAINQUEUR AU PANCRACE PARMI LES ENFANTS. Argument. — Date de la victoire: avant la bataille de Salamine: 480 avant J. C.((75) — Lieu de la scène: Égine, dans un festin. Détails sur le héros : voyez la cinquième Néméenne. Idées principales. Pindare annonce le sujet. Éloge de Pythéas, frère ainé du vainqueur. Puisse Phylacidas vaincre aussi à Olympie ! — Gloire des Éacides qui s'étend jusque chez les Éthiopiens et les Hyperboréens. Qui n'a pas entendu parler de Pelée, d'Ajax et de Télamon? — Exploits de Télamon et d'Hercule; prise de Troie, défaite des Méropes et des géants. Lorsque Hercule se présenta chez les Eacides et les invita à le suivre contre Troie, ils étaient à table, Télamon lui offrit une coupe; alors Hercule s'écria : «O Jupiter, je te prie d'accorder à mon hôte un noble fils.» Il dit, et un aigle parut aussitôt comme pour garantir l'accomplissement de ce vœu. Le héros reprend la parole : «Tu l'auras ce fils, ô Télamon ; il se nommera Ajax et sera brave. » — Retour au sujet. Victoires de Phylacidas et de sa famille; Éloge de Lampon son père. Enchaînement des idées. Pindare célèbre la force des fils de Lampon et surtout de Phylacidas qui vient le vaincre dans l'isthme. Leur gloire sera grande comme celle des Éacides : tous deux se signalent comme Hercule et Télamon; ils réalisent les vœux d'un père tendre comme Ajax réalise les promesses du héros corinthien : sans doute aussi les convives du festin joyeux adressent en leur faveur de consolantes prières au roi des immortels. Le mérite du père a préparé la gloire des fils. |
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ΦΥΛΑΚΙΔΑι ΑΙΓΙΝΗΤΗι ΠΑΓΚΡΑΤΙΩι
Θάλλοντος ἀνδρῶν ὡς ὅτε συμποσίου |
A PHYLACIDAS, VAINQUEUR AU PANCRACE PARMI LES ENFANTS.
Str. 1. — Comme en un banquet où fleurit la joie, nous mêlons dans un deuxième
cratère (76) les hymnes des Muses pour la valeureuse lignée de Lampon ; à Némée,
d'abord, ô Jupiter, nous avions reçu de toi les couronnes fleuries; et
maintenant le maître de l'Isthme (77) et
les cinquante Néréides ont donné une nouvelle victoire à Phylacidas, le plus
jeune des fils. Puissé-je offrira l'Olympien sauveur (78),
une troisième libation de vers mélodieux en faveur d'Égine !
Ant. 1. — Car, lorsqu'un mortel ami de la magnificence et du travail, pratique
les vertus divines, et qu'un dieu le couvre d'une gloire désirée, alors honoré
des immortels, il jette l'ancre au sein de la félicité suprême. Voilà les
souhaits qu'il voudrait voir accomplir, le fils de Cléonice (79), avant la mort et la
blanche vieillesse. Pour moi, je conjure Clotho au trône élevé, et les Parques,
ses sœurs, de remplir les nobles vœux d'un mortel que je chéris.
Ep. 1. — Et vous, Éacides aux chars d'or, sachez que je me suis imposé la loi de
ne jamais aborder dans votre lie sans la combler d'éloges. Par mille hauts
faits, vous n'avez cessé de vous ouvrir de vastes routes jusqu'au delà des
sources du Nil (80) et au milieu des Hyperboréens
(81). Il n'est point de ville assez
barbare, assez étrangère à notre langage, pour ignorer la gloire du héros Pelée,
heureux gendre des dieux (82) ;
Str. 2. — Ou la gloire d'Ajax, fils de Télamon et celle dé son père; guerrier à
l'armure d'airain, compagnon de
guerre intrépide, qui, au siège héroïque de Troie, pour punir Laomédon, fut
emmené sur des vaisseaux avec les Tirynthiens par le fils d'AIcmène. Et celui-ci
s'empara de Pergame, et secondé par lui, fit périr les tribus des Méropes (83) et
le berger, haut comme une montagne, Alcyonée qu'il rencontra dans les champs
Phlégréens ; et la main d'Hercule ne ménagea point la corde vibrante de l'arc
terrible;
Ant. 2. — Mais lorsqu'il vint prier Éacide de s'embarquer avec lui, il trouva
toute une troupe de convives. Couvert d'une peau de lion, debout, le vaillant
Amphitryoniadèe fut convié par l'illustre Télamon à préluder aux libations de
Nectar, et reçut de lui une large coupe d'or ciselée et pleine de vin. Alors,
levant aux cieux ses bras invincibles, il fit entendre ces paroles : «O
bienfaisant «Jupiter, si jamais tu as écouté ma prière avec plaisir,
Ép. — «Je t'en conjure aujourd'hui par les plus vives supplications, donne à
cet époux d'Éribée (84) un fils courageux qui mette le comble au bonheur de mon
hôte (85). Que son corps soit dur comme cette peau qui m'enveloppe, la peau du
monstre (86) sauvage, dont la mort signala dans Némée mon premier exploit. Qu'il
ait la valeur en partage.» Il dit, et sur-le-champ, le dieu lui envoie le roi
des oiseaux, un aigle immense. La plus douce joie chatouilla le chœur du héros;
Str. 3. —- Ët, d'une voix retentissante (car il était devin) : «Tu l'auras,
s'écria-t-il, ce fils que tu désires, ô Télamon.» Et du nom (87)
de cet aigle qui avait apparu, il l'appela le vigoureux Ajax, effroi des peuples
dans les travaux de Mars. Il dit et s'assied aussitôt. Mais je serais trop long
si je rappelais tant de hauts faits. Ο Muse, je suis venu pour dispenser des
louanges à Phylacidas (88), à Pythéas (89)
et à Euthymène. Comme ceux des Argiens (90)
mes discours seront très-brefs.
Ant. 3. — Trois victoires au pancrace dans l'isthme (91),
d'autres dansNémée aux beaux ombrages, ont été remportées par ces fils illustres
et par leur oncle maternel ; quelle foule de poèmes ils ont fait éclore à la
lumière ! ils versent sur la tribu des Psalychiades (92)
la plus brillante rosée des Grâces (93);
honneur pour la maison de Thémistius (94),
ils habitent une ville chérie des dieux. Tout entier à ce qu'il fait, Lampon (95)
attache un haut prix au mot d'Hésiode (96);
sans cesse il le repèle comme un précepte à ses enfants;
Ep. 3. — Il fait rejaillir sa gloire sur toute la cité; on le chérit
encore pour son hospitalité gracieuse. Modéré par pensée, il l'est encore en
fait. Sa langue est d'accord avec son âme. Il est entre les athlètes ce qu'est
entre les autres pierres celle de Naxos (97)
qui entame l'airain. Sur eux tous je verserai l'onde pure de Dircé (98),
cette onde que les vierges au sein puissant, filles de Mnémosyne à l'écharpe
d'or, ont fait jaillir près des portes fortifiées de Cadmus (99). |
ISTHMIQUE VI. (VII) A STREPSIADE, THEBAIN, VAINQUEUR AU PANCRACE. Argument, — Date de la victoire et de la composition de l'ode : 456 avant J.. C ? — Lieu de la scène : Thèbes. Slrepsiade vivait dans une époque fort agitée. Les Lacédémoniens et les Thébains réunis avaient triomphé d'Athènes à Tanagre, 467 avant J, C. Mais, soixante jours après, les Thébains avaient été défaits à leur tour par les Athéniens, à Œnophyte. Thèbes se donna un gouvernement populaire. C'est alors que Strepsiade remporta le prix du pancrace aux jeux isthmiques. Énuméralion des gloires de Thèbes. — Victoire de Strepsiade. Son oncle, nommé aussi Strepsiade, vient de succomber noblement dans un combat; il était brave comme Hector, Méléagre, Amphiaraus. — Pindare a été vivement affligé de cette mort; mais la victoire isthmique de Strepsiade lui rend la joie. Puissent les dieux ne pas troubler le poète sur le soir de sa vie! — Soyons sages et modérés dans nos désirs.—Apollon, accorde-nous une victoire pythique. Enchaînement des idées. Éloge de Strepsiade, dont les destinées, comme celle de Thèbes, sont mêlées de bonheur et de revers. |
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ΣΤΡΕΨΙΑΔΗι ΘΗΒΑΙΩι ΠΑΓΚΡΑΤΙΩι
Τίνι τῶν πάρος, ὦ μάκαιρα Θήβα, |
A STREPSIADE, THEBAIN,
VAINQUEUR AU PANCRACE.
Str. 1. — Quelle est, ô divine Thèbes, parmi les vieux souvenirs de ta
gloire,celui qui réjouit le plus ton cœur? Est-ce le jour où tu mis au monde le
compagnon de Cérès aux cymbales (100)
bruyantes, Bacchus (101) à la longue
chevelure? Est-ce la nuit profonde où tu reçus le plus puissant des dieux
accompagné d'une pluie d'or,
Ant. 1. — Lorsqu'il s'arrêta sous les portiques d'Amphitryon (102),
à l'épouse duquel il portait la semence d'Hercule? Est-ce Tirésias (103)aux
sages conseils ? Iolas (104), habile
cavalier? Sont-ce les Spartes (105) aux
lances infatigables ? Est-ce la mêlée (106)
terrible après laquelle tu renvoyas Adraste, privé
Ép. 1. — De guerriers sans nombre, dans Argos aux beaux coursiers? Ou la
colonie (107) dorienne de Lacédémone
établie sur un pied ferme, grâce à ton secours, et la prise d'Amycles (108)
par les Égides (109), tes enfants, que
guidait la Pythie? Elle dort la mémoire d'un antique bienfait (110),
et les mortels oublient
Str. 2. — Tout ce qui n'atteint point une fleur exquise de perfection
dans les flots glorieux de la poésie. Prépare donc aussi pour Strepsiade et des
chœurs et de doux hymnes. Dans l'isthme (111),
il a remporté la victoire au pancrace; sa force est terrible, il est beau à
voir; sa vertu ne dément point sa beauté.
Ant. 2. — Illustré par les Muses aux tresses noires, il partage l'éclat
de sa gloire avec un oncle maternel nommé comme lui (112),
que Mars au bouclier d'airain a frappé de mort. Mais l'honneur est réservé aux
braves. Oui, celui qui, dans les tempêtes de la guerre, éloigne de sa chère
Ép. 2. — Ët refoule la désolation dans les rangs ennemis , acquiert à ses
concitoyens une gloire suprême, et pendant sa vie et après sa mort. Pour toi, ô
fils de (113) Diodote, en marchant sur les
traces du belliqueux Méléagre (114), sur
les traces d'Hector (115) et d'Amphiaraus
(116), tu as exhalé ton âme dans la fleur
de l'âge,
Str. 3. — Au premier rang de la mêlée, où les plus intrépides combattants
défendaient une dernière espérance (117).
J'en ai ressenti une douleur inexprimable. Mais aujourd'hui Géocbus (118)
fait succéder pour moi le calme à l'orage. Je chanterai une couronne sur la
tête. Puissent les dieux jaloux ne pas troubler
Ant. 3. — Les jouissances paisibles que je goûte chaque jour en
m'avançant vers la vieillesse et le terme fatal de la vie (119)
! Car nous mourrons également tous; mais nos destinées sont diverses. Le mortel
aux vues ambitieuses est trop petit pour atteindre les parvis d'airain
qu'habitent les dieux, et Pégase, d'un coup d'aile, a renversé
Ep. 3. — Bellérophon (120),
son maître, qui voulait monter aux demeures célestes, jusque dans les conseils
de Jupiter. Au bonheur injuste est réservé une fin cruelle. Pour nous, ô Loxias
à la chevelure d'or, accorde-nous aussi la couronne fleurie dans les jeux de
Pytho.
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ISTHMIQUE VII. (VIII) A CLEANDRE D'ÉGINE, VAINQUEUR AU PANCRACE. Argument. — Date de la victoire : 479 avant J. C. — Date de la composition de l'ode et de la représentation : 479 avant J. C. — Lieu de la scène : Égine; le vestibule du palais de Télésicrate, père du vainqueur. Cléandre d'Égine avait remporté le prix aux jeux Néméens et aux Isthmiques peu de temps après la défaite des Perses à Platée. Victoire de Cléandre dans l'Isthme et dans Némée. — Guerre épouvantable repoussée par les Grecs et qui inspire encore de l'effroi. — Il faut cependant que le poète reprenne courage; il s'agit de vanter une lie chérie; Égine et Thèbes sont deux sœurs. — Égine (nymphe), transportée par Jupiter à Œnone (île d'Égine), y met au monde Ëaque, le plus sage des hommes. — Valeur et sagesse des Éacides — Différends dans l'assemblée des dieux au sujet de Thétis : Jupiter et Neptune veulent tous deux l'épouser; Tbétis demande qu'un mortel, que le sage Pelée devienne son époux. Les dieux y consentent et le fils d'Éaque aussi. — Bientôt Achille est célébré par les poëtes; Achille vainqueur deTélèphe, de Memnon, d'Hector. — Ainsi les Muses chantent Nicoclès, cousin de Cléandre, qui a aussi vaincu aux jeux isthmiques. — Victoires de Cléandre. Unité de plan. Éloge d'Égine dans la personne de Cléandre et surtout dans celle des Éacides. Les critiques pensent que la position de Thèbes, accusée de Médisme, après l'expulsion des barbares, affligeait profondément le poète, et que» dans cette ode, il voulait pour ainsi dire engager Égine à se porter médiatrice entre sa patrie et les autres cités de la Grèce pour les réconcilier. Ainsi Pelée avait joué le rôle de pacificateur parmi les dieux. |
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ΚΛΕΑΝΔΡΩι ΑΙΓΙΝΗΤΗι ΠΑΓΚΡΑΤΙΩι
Κλεάνδρῳ τις ἁλικίᾳ τε λύτρον |
A CLEANDRE D'ÉGINE, VAINQUEUR AU PANCRACE.
Str. 1. — Pour payer à Cléandre et à sa jeunesse, enfants (121),
le prix glorieux de ses travaux, allons au brillant portique de son
pèreTélésarque (122) éveiller la fête, et
récompenser une victoire isthmique (123),
et celui qui obtint le premier rang aux luttes de Némée. Et moi aussi, Ton veut,
malgré la tristesse (124) de mon âme, que
j'invoque pour lui la Muse blonde. Eh bienl affranchis de vives (125)
alarmes, ne nous abattons point veufs de couronnes, ne nourrissons pas le deuil.
Loin des stériles plaintes, chantons plutôt quelque doux hymne, même après la
souffrance;
Str. 2. — Car un dieu vient d'écarter de nos têtes le rocher de Tantale,
épouvantable fléau qui menaçait la Grèce. Mais, avec mon effroi, s'est dissipée
une grande douleur. Le plus sûr est toujours de s'attacher aux choses présentes
(126). Car sur les humains plane le temps
perfide (127) qui déroule le cours de la
vie. Mais ici encore il est, avec la liberté (128),
un remède pour les mortels. Que la douce espérance soit donc chère à l'homme; un
fils de Thèbes aux sept portes doit avant tout offrir à Égine la fleur des
Grâces, puisque toutes deux furent les filles d'un même père, les plus jeunes
des Asopides (129), toutes deux chéries de
Jupiter roi. Il a établi l'une d'elles près des belles eaux de Dircé (130),
pour gouverner une ville amie (131) des
chars;
Str. 3. — Pour toi, il t'épousa transportée dans l'Ile d'Œnopie (132),
et là, au père de la foudre, tu donnas pour fils Éaque, mortel vénéré, qui
servait d'arbitre aux dieux même. Semblables à des immortels, ses fils et les
fils belliqueux de ses fils, s'illustrèrent par leur valeur dans le cruel
tumulte des guerres aux armes d'airain ; et ils furent sages et modérés de cœur.
C'est ce que n'oublièrent pas les dieux assemblés, le jour où Jupiter et le beau
Neptune se disputèrent la main deThétis, chacun d'eux voulant l'avoir pour
charmante épouse. Car ils l'aimaient d'amour. Mais les autres immortels, dans
leur prudence, ne permirent point cet hymen,
Str. 4. — Après avoir entendu la voix des oracles. Or, au milieu d'eux,
la sage Thémis dit que,selon le destin, la déesse des flots mettrait au monde un
roi plus redoutable que son père, un roi dont la main lancerait des traits plus
terribles que la foudre et l'invincible trident, si elle s'unissait à Jupiter ou
à l'un des frères de Jupiter. «Ne le souffrez point. Qu'elle entre dans le lit
d'un mortel, et qu'elle voie périr à la guerre son fils, rival de Mars par son
bras ; de l'éclair, par la vitesse de ses pieds. Mon avis est qu'il faut honorer
de cette divine alliance, Pelée, fils d'Éaque, le plus pieux mortel que
nourrisse, dit-on, le sol d'Iolcos.
Str. 6. — «Hâtez-vous d'envoyer un message droit à l'antre immortel de
Chiron (133). Que la fille de Nérée (134)
ne nous appelle pas une seconde fois à de litigieux suffrages. Mais, dans une
soirée éclairée (135) par la pleine lune,
qu'elle «ouvre aux caresses du héros sa ceinture virginale.» Telles furent les
paroles que la déesse adressa aux Cronides. Ils L'approuvèrent par un signe de
leurs sourcils immortels. Et ces paroles portèrent leur fruit. Car, de concert
avec eux, on dit que ce prince hâta les noces deThétis. Bientôt la bouche des
sages publia au loin la jeune valeur d'Achille, et il rougit les pampres de
Mysie en arrosant la terre du sang noir de Télèphe;
Str. 6. — Et il fît un pont (136).
au retour des Atrides, il délivra Hélène, après avoir brisé de sa lance les
nerfs de Troie, les guerriers qui lui résistaient, lorsque dans la plaine il
poussait la mêlée homicide ; et il tua l'intrépide Memnon, Hector et d'autres
chefs : c'est en leur montrant (137) la
demeure de Proserpine, qu'Achille, rempart des Éacides, illustra Égine et sa
race. Il n'est plus, et les hymnes ne l'ont point abandonné. Mais debout près de
son bûcher et de sa tombe, les vierges de l'Hélicon exhalent leur douleur en
mémorables accents. Ainsi les immortels voulurent qu'un héros même expiré
appartint au chant des déesses.
Str. 7. — Il en est de même en ce jour, et le char des Muses s'élance
pour louer la mémoire du lutteur Nicoclès (138).
Chantez donc celui qui, dans l'Isthme (139),
a reçu des Doriens (140) la couronne de
Sélinum; qui jadis avait déjà triomphé des rivaux ses voisins, en leur portant
d'inévitables coups. Il n'enlève rien à tant de gloire, le fils de (141)
son digne oncle paternel. Que les (142)
compagnons de Cléandre, vainqueur naguère au pancrace, lui tressent une
brillante couronne de myrte (143); il a
pris une part heureuse aux lices d'Alcalhotis (144),
et les jeunes gens l'ont applaudi dans Épidaure (145).
Un homme de bien peut le louer; il n'a point flétri dans les ténèbres une
jeunesse sans gloire.
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(1) II existait une statue de Thèbes où elle était représentée en guerrière armée d'un bouclier d'or. (2) Pindare, s'occupait alors d'une ode en l'honneur de Céos ; Délos y était mentionnée. (3) L'un pour Céos, l'autre pour Hérodote. (4) De Corinthe (5) Hercule cité à propos aux approches de la lutte contre Athènes. (6) En composant un hymne semblable à l'hymne de Castor ou d'Iolas, probablement par le rhythme. (7) Iolas. (8) Thébains, nés des dents du dragon, qui avaient été semées. (9) Castor. (10) Transition. (11) Il préside aux jeux célébrés dans l'isthme de Corinthe. (12) Ville de Béotie avec on temple de Neptune ; Hérodote s'y était distingné dans les jeux publics. (13) En Béotie. (14) Style figuré. (15) La gloire du vainqueur rejaillit sur tous ses compatriotes. 16) Neptune honoré à Oncheste qui n'est pas loin de Thèbes. (17) Hercule et lolas; Iolas était fils d'Iphiclès et petit-fils d'Amphitryon. Pindare les invoque, parce qu'ils ont accordé à Hérodote de nombreux succès dans les luttes publiques de Thèbes (18) D'Orchoméne où régna Minyas; on célébrait des jeux funèbres sur son tombeau. (19) Hérodote s'est signalé dans tous les lieux que Pindare cite. (20) Roi de Phylacé, en Thessalie. (21) Fils de Xénocrate, tyran d'Agrigente. Xénocrate était frère de Théron qui mourut 470 avant J. C. (22) Muse de la danse accompagnée de musique ; elle avait son rôle dans la représentation d'une ode. (23) J'ai eu d'autres travaux à terminer : c'est ce qui m'a empêché de composer plus tôt celle ode. (24) Elle a déjà été chantée; nouvelle excuse (25) De Corinthe. (26) II présidait aux jeux de l'Isthme. (27) Apium palustre. (28) Pour Achéen : les Achéens sont souvent confondus avec les Doriens. (29) En Locride, aux jeux Pythiques. (30) Surnom des Athéniens, pris de leur roi Érecthée. (31) Qui annoncent l'époque de la célébration des jeux et donnent le programme des fêtes, pendant lesquelles toutes les querelles, toutes les guerres doivent s'arrêter. (32) Théron et Xénocrate. (33) On voit que Xénocrate était mort. (34) Qui le forçât d'être moins généreux. (35) Le Phase et le Nil, deux termes de navigation, l'un plus éloigné, l'autre plus rapproché de la Sicile. Ce langage figuré signifie que Xénocrate, en tout temps, accneillait les voyageurs : en été, lorsqu'ils sont très-nombreux et se hasardent dans de lointaines expéditions; en hiver, lorsque le nombre en est faible. (36) Chargé de porter cet hymne à Thrasybule. (37) Quoique la modestie soit recommandable. (38) De Corinthe. (39) A Némée.. (40) Un des aïeux de Mélissus. (41) Les plus célèbres sont Laïus, Œdipe, Étéocle, Polynice. (42) J'ai mille moyens de te louer (43) Magistrats chargés d'accueillir les étrangers. (44) Ils se sont élevés an faite de la gloire. (45) A la bataille de Platée, 479 avant J. C. (46) A prés des revers. (47) En Béotie. (48) L'Isthme de Corinthe. (49) La victoire. (50) Comme Ajax les Cléonymides ont souvent été frustrés d'une récompense qu'ils méritaient. (51) Le rameau que tenaient les Rhapsodes en chantant leurs vers. (52) Mélissus. (53) Géant fameux, chasseur célèbre et d'une force extraordinaire. (54) Géants de Libye. (55) A Thèbes. (56) Selon l'usage dans les jeux funèbres. (57) Nous ne devons affirmer que telle ode est sur tel mode que lorsqu'il est indiqué par le poëte lui-même: nous ne croyons pas que l'étude du métré et du rhythme dans les vers puisse donner des notions scientifiques assez précises pour déterminer le mode. (58) Fille d'Uranus et de la terre, elle épousa son frère Hypérion, dont elle eut la lune, le soleil et l'aurore. Elle présidait à l'or et aux richesses. (59) Ces deux choses exigent de grandes dépenses. (60) De Corinthe. (61) Les descendants d'Eaque, Pelée, Achille, Télamon. (62) Qui embellissent le vainqueur. (63) Méléagre et Tydée. (64) Egine. (65) Ces trois guerriers furent tués par Achille. (66) Roi de Mysie, blessé par Achille. (67) En Mysie. (68) La valeur des guerriers d'Égine a depuis longtemps élevé, pour protéger leur patrie, un rempart inexpugnable. (69) Les matelots d'Égine. (70) Bataille de Salamine 480 avant J. C. (71) N'excitons pas le courroux des dieux par des éloges exagérés. (72) Phylacidas, Pythéas. (73) Frère aîné de Phylacidas. (74) Bandelettes attachées à la couronne. (75) Selon Suidas, à l'époque de la bataille de Salamine, 480 avant J. C, Pindare était âgé de quarante ans. (76) Images empruntées à l'usage que suivaient les anciens, d'offrir des libations aux dieux dans les festins; celles du premier cratère à Jupiter; du deuxième, ordinairement à la terre et aux héros ; du troisième, à Jupiter sauveur. (77) Neptune. (78) Il souhaite une victoire olympique à son héros. (79) Lampon, père de Phylacidas. (80) Jusqu'aux extrémités du monde (81) Près des colonnes d'Hercule , d'après les recherches de J. H. Yossiùs. (82) II épousa Thétis. (83) Habliaient l'Ile de Cos. (84) En Macédoine, près de Pallène. (85) Télamon. (86) Peau de lion. (87) Le mot grec qui signifie aigle a quelque analogie avec le nom d'Ajax : la première syllabe des deux mots est la même. (88) Fils de Lampon. (89) Frère de Lampon. (90) Doriens. Les discours des Doriens étaient, en général, courts; témoins les Spartiates et le mot laconisme. (91) De Corinthe. (92) La famille du vainqueur en faisait partie. (93) Ces déesses répandaient la beauté sur toute la personne du vainqueur. (94) Aïeul du vainqueur. (95) Père de Phylacidas. (96) Dans son ouvrage Des OEuvres et des jours, v. 382, Hésiode dit que l'on augmenté son patrimoine par le travail. (97) Île de la mer Egée où se trouvaient des pierres à aiguiser. (98) Fontaine de Thèbes. (99) Thébes. (100) Bacchus était honoré avec Corée dans Thèbes. (101) Instrument dont on se servait dans les cérémonies de la déesse. (102) Absent alors : il faisait une expédition contre les Téléboens. (103) Devin de Thèbes. (104) Ami d'Hercule. (105) Nom des anciens Thébains nés des dents du dragon. (106) Guerre des sept chefs devant Thèbes. Allusion à la défaite récente des Argiens qui combattaient à Tanagre dans les rangs des Athéniens. (107) Vers 1100 avant J. C (108) En Laconie. (109) Ancienne tribu de Thèbes. (110) Allusion à l'ingratitude des Spartiates qui, après la viotoire de Tanagre, abandonnèrent les Thébains. (111) De Corinthe. (112) Strepsiade. (113 Strepsiade, l'oncle du vainqueur. (114) L'Un des chasseurs qui poursuivirent le sanglier de Calydon ; il fit aussi la guerre aux Curetée. (115) Mort devant Troie. (116) Mort devant Thèbes. (117) A la bataille d'Oenophyte. (118) Qui embrasse la terre : surnom de Neptune. (119) Ce passage rappelle la dernière phrase de Bossuet dans la péroraison de l'oraison funèbre de Gondé. (120) Fils de Glaucus, roi de Corinthe ; Jupiter envoya un taon qui piqua le courtier ; le cavalier fut renversé. (121) Choristes (122) A Égine. (123) A Corinthe (124) Cette tristesse de Pindare tenait sans doote à la situation équivoque de Thèbes après la bataille de Platée. (125) Les barbares ont été repoussés. (126) Et présentement il s'agit d'une féte. (127) Tout ce début est une lutte du poëte entre des craintes passées et des maux qui menacent; il n'ose se livrer franchement à la joie. (128) Le gouvernement démocratique venait d'être établi à Thèbes. (129) Filles d'Asopus, fleuve deLaconie: toutes deux, Thèbes et Égine. (130) Fontaine de Béotie. (131) Thèbes. (132) Égine. (133) Centaure qui habitait la Thessalie. (134) Thétis. (135) Temps que les anciens croyaient favorable au mariage. (136) Il assura leur retour. (137) En les tuant. (138) Cousin du vainqueur; il était mort. (139) De Corinthe.
(140) Les Doriens avaient envahi le
Péloponèse. (141) Cléandre, fils de l'oncle de Nicoclès. (142) Le chœur. (143) C'était la couronne décernée dans les jeux d'Alcathoüs. (144) A Mégare qui les avait ouvertes en son honneur parce qu'il avait tué un énorme lion ; Alcathoüs était fils de Pélops. (145) En Argolide, aux jeux d'Esculape. |