Aristote : Métaphysique

ARISTOTE

LA METAPHYSIQUE

DISSERTATION SUR LA COMPOSITION DE LA MÉTAPHYSIQUE D'ARISTOTE

SOMMAIRES DES CHAPITRES DES XIV LIVRES DE LA MÉTAPHYSIQUE D'ARISTOTE

Préface livre II

 

BARTHÉLEMY SAINT-HILAIRE.

 

 

 

 

DISSERTATION SUR LA COMPOSITION DE LA MÉTAPHYSIQUE D'ARISTOTE

SOMMAIRES DES CHAPITRES DES XIV LIVRES DE LA MÉTAPHYSIQUE D'ARISTOTE

 

 

 

 

CCLIII

Le moyen le plus simple et le plus sûr de juger de la composition de la Métaphysique d'Aristote, c'est d'analyser avec exactitude ce monument tel qu'il se trouve dans l'état où il est arrivé jusqu'à nous. II n'a pas changé depuis le temps d'Andronicus de Rhodes, c'est-à-dire, depuis près de vingt siècles. Les générations successives de commentateurs, de philosophes, de philologues, d'éditeurs, qui l'ont étudié sous presque tous les aspects, n'en ont jamais modifié l'arrangement, quelque défectueux que cet arrangement ait pu leur paraître. Peut-être serait-il téméraire d'affirmer que la Métaphysique soit sortie des mains d'Aristote sous la forme même où nous l'avons ; mais il est certain que cette forme est la seule qu'aient connue l'Antiquité, et, après elle, le monde moderne, à remonter au siècle de Sylla et de Cicéron.

Entre Cicéron et Aristote, il y a près de trois cents ans ; dans cet intervalle, quelles altérations a subies le texte de la Métaphysique? C'est là une question dont CCLIV  nous nous occuperons plus tard. Nous toucherons d'abord la question de l'analyse, qui est de beaucoup la plus importante, et sur laquelle il est facile d'être clair et précis.

Voici cette analyse, livre par livre, et presque chapitre par chapitre.

Le premier livre est consacré à deux choses : la définition de la philosophie et l'examen des systèmes antérieurs, y compris celui de Platon, sur lequel Aristote s'arrête ici, comme dans toutes ses œuvres, plus longtemps que sur aucun autre. La définition de la philosophie remplit les trois premiers chapitres à peu près exclusivement, et elle se termine par ce magnifique éloge d'Anaxagore que l'on a répété tant de fois, après le philosophe. Quant à l'examen des systèmes, qui tient les quatre derniers chapitres, il porte plus particulièrement sur les Pythagoriciens et sur la Théorie des Idées. Le but principal de l'auteur, dans ce premier livre, est donc de tracer une esquisse de la science qu'il appelle de son vrai nom la Philosophie première, et que nous appelons aujourd'hui la Métaphysique, expression désormais adoptée sans retour, bien qu'elle soit beaucoup moins convenable. En réfutant les systèmes qui ont précédé le sien, Aristote se propose de prouver que sa théorie dos quatre causes est à la fois plus originale et plus complète que toutes celles de ses devanciers.

Tout ce premier livre est d'une régularité à peu près irréprochable, et la pensée de l'auteur s'y développe sans lacune, si ce n'est sans obscurité.

Le second livre, que les commentateurs grecs ont  CCLV nommé le Petit Ier livre, ne se compose que de trois chapitres. On dirait que, dans le premier de ces chapitres, le sujet va recommencer, puisqu'on y trouve encore quelques généralités sur la nature de la science, sur les conditions de ses progrès, et sur la philosophie. C'est là sans doute ce qui aura porté des scholiastes, trop peu attentifs, à faire de ce second livre une annexe et comme un supplément du premier. Cette liaison n'est qu'apparente, et le chapitre qui suit doit dissiper l'illusion, si on l'a conçue un instant. Le sujet de ce second chapitre n'a pas le moindre rapport avec celui qui vient d'être exposé, d'ailleurs bien superficiellement, dans le chapitre premier. Cette question toute nouvelle, c'est de savoir si une série infinie de causes est possible, et s'il ne faut pas de toute néces-sité s'en tenir à un principe unique et supérieur, duquel tout le reste dérive, ou auquel tout le reste doit se rattacher. Dans le troisième chapitre, qui succède au second, avec la même incohérence, surgit une question non moins inattendue : c'est la discussion des méthodes qu'un maître,ou qu'un écrivain, doit suivre pour plaire à ses auditeurs ou à ses lecteurs, et pour arriver à les convaincre.

Ainsi, les trois chapitres, qui composent le second livre s'appliquent à trois sujets différents, qui n'ont aucune liaison entre eux, non plus qu'avec le premier livre ; et, en outre, le dernier de ces sujets regarderait la Rhétorique bien plus que la Métaphysique.

Le livre III reprend évidemment et poursuit le sujet traité dans le Ier, sans tenir compte de ce livre intercalaire, qui est venu rompre la pensée et en suspendre CCLVI le légitime développement. Avant de procéder à l'é-tude de la Philosophie première, l'auteur conseille, avec beaucoup de sagesse, et afin de ne pas faire fausse route, de poser tout d'abord aussi clairement que possible les questions qu'on doit résoudre. Il énumère en effet celles qu'il a l'intention de traiter lui-même, et il établit que c'est à une seule et même science d'étudier les principes des choses et les principes de îa démonstration. Pour soutenir ces assertions, il réfute quelques opinions contraires avancées par les écoles de Pythagore et de Platon, qui se sont perdues dans de vaines abstractions. Pour lui, les vrais principes de la science sont les genres les plus élevés des choses, les Universaux, que l'esprit conçoit dans les êtres individuels, sans les en séparer.

Sans doute on peut trouver que les pensées émises dans ce troisième livre ne sont pas très étroitement enchaînées entre elles, et que la marche de la discussion n'est pas très rigoureuse ; mais ce n'en est pas moins une suite fort acceptable du premier livre. Sans que l'ordre soit aussi parfait qu'on pourrait le désirer, les déviations ne sont pas très fortes, et elles ne troublent pas très sensiblement les exigences de la logique.

Le quatrième livre poursuit cette discussion en l'approfondissant; il détermine avec plus de précision encore la nature spéciale de la Philosophie première, comparativement à toutes les autres sciences. La Philosophie première étudie l'Être en tant qu'Etre ; elle ne l'étudié pas dans les modes diversifiés à l'infini qu'il peut offrir à notre observation, mais dans ce qui le fait être ce qu'il est, c'est-à-dire, dans son essence. CCLVII Les sciences particulières considèrent l'Etre dans toutes ses propriétés, si différentes les unes des autres, et dans ses formes innombrables ; la Philosophie première le considère exclusivement en lui-même ; elle s'attache à l'Etre en soi, pour découvrir en quoi consiste sa substance, indépendamment de toutes ses attributions.

Tel est le sujet de la première partie du IVe livre. La seconde partie, plus importante et plus grave, traite d'une question qui est très voisine de celle-là, et qui se lie à celle de l'Être en soi. Le principe le plus élevé et le plus inébranlable de tous les principes, c'est le suivant : « Une même chose ne peut pas, dans « le même temps et sous le même rapport, être et n'être pas. » C'est là ce qu'on nomme le principe de contradiction; et Aristote trouve à ce principe une telle valeur qu'il essaie de le mettre dans toute sa lumière, avec une sorte de complaisance et de prolixité, qui ne lui sont pas habituelles. A l'aide du principe de contradiction, il réfute le Scepticisme, qu'il accable sous des objections invincibles, cent fois reproduites depuis lors, sans qu'on ait pu les rendre plus fortes qu'Aristote no l'a fait du premier coup. C'est surtout à la doctrine de Protagore qu'il s'adresse sans oublier celles d'Heraclite et de Cratyle; il les met en poussière ; et à ces théories sophistiques, il oppose la pratique constante de la vie, qui les contredit d'autant plus sûrement qu'elle les ignore, et le sens commun, qui ne s'en occupe que pour les repousser avec le plus profond dédain. L'auteur achève cette défaite du Scepticisme en combattant énergiquement CCLVII le Sensualisme, qui prétend faire des sens de l'homme la mesure de la vérité ; et il démontre que, sur cette base trop peu large, il est absolument impossible d'asseoir l'édifice de la science. Tout est mobile et sujet à un changement perpétuel dans le monde de la sensation, tandis que la science a nécessairement besoin, pour se fonder, de l'immuable, de l'immobile et de l'éternel.

Cette réfutation du Sensualisme et du Scepticisme est une des parties les plus belles et les plus solides de toute la Métaphysique. Aristote n'a peut-être rien écrit de plus grand. On retrouve, dans ces quatre ou cinq chapitres, le ton du premier livre, et quelque chose de l'austère majesté qui éclate dans plusieurs parties du douzième.

Mais tout à coup le sujet s'arrête de la manière la plus brusque et la moins justifiée. Le cinquième livre ne contient que des définitions de mots, au nombre de trente, à commencer par les mots de Principe, Cause, Élément, Nature, etc., et à finir par ceux de Genre et d'Accident. Le plus souvent, ces définitions sont justes et délicates ; quelques-unes même sont de la plus rare précision. Mais, si bon nombre de ces mots sont d'un emploi fréquent en Métaphysique, il y en a beaucoup aussi dont la Métaphysique ne fait presque pas d'usage, et que l'auteur aurait pu s'abstenir d'expliquer. En outre ces définitions se succèdent sans aucun ordre ; et l'on pourrait même bien des fois les intervertir avec avantage. Enfin le caractère le plus saillant du cinquième livre, c'est que, comme le second, il n'est qu'une intercalation maladroite et absolument CCLIX déplacée ; il figurerait tout aussi bien dans un traité de Logique.

Le sixième livre revient sur la définition de la Philosophie première, considérée comme la science de l'Être en tant qu'être ; et, pour éclaircir cette définition, il analyse ridée de l'Être dans les nuances diverses qu'elle peut revêtir, et qui souvent trompent les philosophes aussi bien que le vulgaire. L'Être véritable ne se trouve que dans la catégorie de la substance, et les catégories suivantes ne contiennent d'Être que dans la mesure où elles se rapportent à la première d'entre elles, qui est la seule essentielle. Pour que l'Être ait une quantité, une qualité, une relation quelconque, un lieu, un temps, etc., il faut d'abord qu'il soit, d'une manière absolue et sans détermination.

Le septième livre semble continuer la discussion sur la substance. On a même trouvé que ce livre était si étroitement lié au précédent qu'on s'est étonné qu'on ait jamais pu les séparer en livres distincts, au lieu de les réunir en un seul. Cette opinion n'est exacte qu'en partie ; elle s'applique bien aux quatre premiers chapitres, si l'on veut; mais, à partir du cinquième, l'auteur commence une théorie générale de la définition, qu'il poursuit avec peu de méthode et de clarté pendant huit autres chapitres, du cinquième au douzième compris. Puis, dans le treizième et le quatorzième chapitres, il revient h la définition de la substance, qui pouvait sembler épuisée, après tant de ré-pétitions et de redites peu nécessaires. Enfin, il quitte de nouveau, dans les deux derniers chapitres, la ques- CCLX tion de la définition, pour revenir à la théorie de la substance et à la critique du système des Idées.

Le désordre que nous venons de signaler dans le septième livre continue dans le huitième, où il est encore plus apparent. Ce livre reproduit une bonne partie des discussions précédentes, sans y rien ajouter qui mérite quelque attention ; c'est un recueil de fragments plutôt qu'un ouvrage proprement dit. Ces fragments, traitant des mêmes matières, ont été mis à la suite du livre septième, où ces matières avaient été plus complètement exposées ; et cette ressemblance, du reste assea éloignée, paraît être le seul motif qui ait fait classer le huitième livre immédiatement après l'autre. Ce motif est bien léger; mais, dans l'Anti-quité, les scholiastes n'apportaient pas à ces choses l'exactitude que la critique moderne y demande impérieusement.

La théorie de l'acte et de la puissance remplit le neuvième livre, sans que d'ailleurs cette théorie, une des plus originales de tout le Péripatétisme, soit rattachée expressément à aucune de celles qui la précèdent. L'Etre ne se comprend bien que par cette distinction profonde, de l'actuel et du possible, qui est due à Aristote ; elle est indispensable à l'exacte détermination de la substance. Mais l'auteur n'a pas pris la peine de relier cette discussion à l'ensemble de son œuvre, et d'en montrer la vraie place. Ce ne sont pas, du reste, les seules traces de désordre que contient le neuvième livre. Dans le chapitre sixième, on remarque une interpolation qui en occupe la dernière partie presque tout entière. Du moins, Alexandre d'Aphro-. CCLXI dise n'a-t-il pas commenté ces paragraphes, qui paraissent avoir été ajoutés postérieurement et n'être qu'un hors-d'œuvré inexplicable. A la suite de ce passage, la théorie de l'acte et de la puissance, comparés l'un à l'autre sous divers rapports, s'achève dans trois chapitres successifs. Puis, le dixième chapitre aborde un sujet tout à fait étranger, et discute la nature de l'Être considéré comme fondement de la vérité et de l'erreur. Cette étude nouvelle ne fait guère que répéter ce qui a été déjà dit plus haut dans le livre sixième, et c'est avec raison que des commentateurs ont proposé de la rejeter de la Métaphysique, et de la renvoyer à l'Or-ganon, où elle serait en effet en son lieu véritable.

Ce qu'on vient de dire de la fin du neuvième livre est encore plus exact pour le dixième livre tout entier. Ce livre est également déplacé; lui aussi, il appartiendrait bien plus convenablement à l'Organon. Il est rempli par une discussion peu régulière sur l'unité et la pluralité, à laquelle se mêle une autre discussion sur les contraires, étudiés dans les genres et les espèces, dans la privation et la possession, et poursuivis jusque dans la différence des sexes. Pris dans sa totalité, le dixième livre est encore un hors-d'œuvre, dont rien ne justifie la présence dans le lieu où le hasard l'a sans doute égaré. Alexandre d'Aphrodise n'a pas commenté les trois derniers chapitres ; et il est très-probable qu'il ne les a pas connus.

Le désordre est encore plus évident, s'il est possible, dans le livre suivant, le onzième. Ce livre est un des plus longs de la Métaphysique, puisqu'il se compose de douze chapitres, tous assez développés. Il CCLXII revient d'abord sur la définition générale de la philosophie, si amplement exposée dès le premier livre ; et il continue, en analysant sous une forme quelquefois plus claire et plus brève, les matières déjà traitées dans les IIIe, IVe et Ve livres : Définition de l'Être et de la substance, nature des principes et des entités mathématiques, principe de contradiction, réfutation du système d'Heraclite et de celui de Protagore, définition de la science, et particulièrement de la Théo-logie, confondue avec laPhilosophie première, etc. ,etc. Puis, cette analyse rétrospective vient à cesser; et dans le milieu d'un chapitre, sans aucune transition, sans la moindre explication, commencent une suite de fragments empruntés mot pour mot à la Physique, dont ils reproduisent le texte avec une entière fidélité, parfois même avec quelques améliorations de détail. Ces fragments, pu plutôt ces extraits, sont fort longs, puisqu'ils remplissent plus de quatre grands chapitres, c'est-à-dire la fin du huitième et les suivants, neuvième, dixième, onzième et douzième. Il est vrai que les emprunts, faits à la Physique avec assez peu d'ordre, s'adressent à des sujets qui regardent tout aussi bien la Métaphysique, l'acte et la puissance, l'infini, le changement, et le mouvement, etc.

Sur ce onzième livre, si bizarrement composé de deux parties, l'une de redites, et l'autre de citations, on s'est posé les deux questions de savoir si c'est là le premier jet d'une pensée peu sûre d'elle-même et qui se cherche, ou si ce n'est pas plutôt un abrégé fait par une main plus ou moins intelligente, et un recueil de morceaux qui auront paru dignes d'une attention  CCLXIII spéciale, et qui, à ce titre, auront été tirés d'un ouvrage étranger. Cette dernière supposition est la plus vraisemblable. Aristote ne s'est pas essayé, dans les premiers chapitres du onzième livre, sur des sujets qu'il devait exposer ailleurs d'une manière si magistrale. Ce n'est pas lui non plus qui a pris à son ouvrage de Physique des passages entiers pour les transporter dans sa Philosophie première, où ils sont beaucoup moins bien placés. Ce qui semble le plus probable, c'est que le résumé contenu dans les premiers chapitres du onzième livre, est de la main de quelque élève direct du philosophe, ou de la main de quelque scho-liaste antérieur à Alexandre d'Aphrodise ; et que les extraits qui forment les derniers chapitres n'ont pas une origine plus relevée. Ce sont bien les pensées du maître, ce sont même ses expressions; mais ce ne peut pas être Aristote personnellement qui ait senti le besoin de s'abréger lui-même, ou de se répéter. Il faut donc considérer tout le onzième livre, non pas comme apocryphe, mais comme une annexe aussi peu nécessaire que d'autres, et qui a été mise là où elle est, par hasard ou par ignorance.

Le douzième livre, le plus important de tous, sans comparaison, puisqu'il contient la théodicée d'Aristote, peut prêter aussi à la critique. Les cinq premiers chapitres, sans être une répétition ni une analyse de pensées déjà exprimées, traite cependant de choses qui peuvent paraître suffisamment connues, la substance, le changement, la forme, la matière, la privation, les quatre causes, la nature des principes. Ces débuts du douzième livre sont très peu réguliers, et ils rappellent CCLXIV d'une façon assez fâcheuse le désordre de quelques autres livres. Mais avec le sixième chapitre commence la théorie de la substance éternelle, qui se poursuit jusqu'à la fin du livre avec une simplicité, une profondeur et une sublimité que personne n'a dépassées, et qu'Aristote lui-même n'a guère trouvées que cette seule fois. La nécessité absolue d'un premier moteur éternel et universel, la spiritualité de Dieu, réduit à l'acte pur, l'unité de Dieu régissant le monde, où il ne faut qu'un seul maître, de même que dans un état bien ordonné il n'y a qu'un seul souverain : tels sont les objets solennels qui terminent le douzième livre, et sur lesquels il se clôt.

Il semble que la Philosophie première devrait finir également à cette limite, au-delà de laquelle il n'y a plus rien, et que la Métaphysique', après être montée jusqu'à Dieu, n'aurait plus qu'à s'arrêter. Mais il n'en est rien; et, à la suite du douzième livre, il s'en trouve deux autres encore, le treizième et le quatorzième, qui sont consacrés en presque-totalité à réfuter la théorie des Nombres, telle que l'avaient présentée les écoles de Pythagore et de Platon. Cette réfutation est bien l'objet général de ces deux derniers livres, qui sont assez étroitement liés l'un à l'autre. Pourtant, s'ils forment dans leur ensemble une œuvre suffisamment régulière, les détails le sont souventbien peu ; ce sont encore de fréquentes répétitions de choses antérieurement élucidées ; et, par exemple, dans les chapitres quatrième et cinquième du livre treize, on retrouve une reproduction presque textuelle de la réfutation de la théorie des Idées, telle qu'elle est déjà dans le cha- CCLXV pitre septième du premier livre. Dans le chapitre neu-vième de ce même livre treizième, apparaît tout à coup, et pour n'y occuper que quelques paragraphes, la théorie de la substance, exposée déjà tant de fois. Enfin, dans le quatorzième et dernier livre, le premier chapitre, qui traite des Contraires, n'a pas la moindre relation avec la fin du livre treizième; et le second cfiapitre débute par des considérations sur les choses éternelles, qui n'ont qu'un rapport très lointain avec la théorie des Nombres. Cette discussion spéciale recommence dans le chapitre troisième, en y mêlant la théorie des Idées. Le quatrième chapitre, encore moins régulier, examine jusqu'à quel point les notions de bien et de mal sont compatibles avec les doctrines pythagoriciennes et platoniciennes. Enfin, les deux chapitres cinquième et sixième reviennent à la théorie des Nombres ; et ils achèvent la Métaphysique tout entière, si ce n'est selon la pensée même d'Aristote, du moins selon l'ordre où elle nous est parvenue, ordre profondément troublé et absolument injusti-fiable, bien qu'il remonte à la plus haute et à la plus vénérable antiquité.

Telle est l'analyse exacte, si ce n'est tout à fait com-plète, de ce grand monument qu'on appelle la Métaphysique d'Aristote. Si cette analyse est aussi claire que nous avons désiré la faire, les résultats qui en sortent sont de toute évidence, et il n'est pas même besoin d'une très grande attention pour voir ce qu'ils sont.

1° La Métaphysique d'Aristote n'est pas un ouvrage systématique ; et l'examen le plus superficiel suffit à CCLXVI  prouver qu'elle n'est qu'un recueil de fragments puisés à diverses sources.

2° Le contexte ne fournit pas les indications nécessaires pour rétablir un peu d'ordre, ni une continuité un peu satisfaisante dans cet amas confus de matériaux. Cette restauration, qui a été possible pour quelques autres ouvrages d'Aristote, ne l'est pas pour celui-ci ; et il faut se contenter de ces débris, tels qu'ils sont, sans essayer de reconstruire un édifice qui n'a jamais été construit, et qui ne pourrait plus l'être par nous que de la façon la plus arbitraire.

3° La plupart de ces fragments sont presque informes ; mais quelques-uns sont d'un prix inestimable, et ils peuvent compter parmi les trésors les plus précieux, non pas seulement de la philosophie grecque, mais aussi de l'esprit humain.

4° Quelque déplorable que soit l'état où ces ruines nous ont été transmises, il n'est pas possible d'élever un doute un peu fondé sur l'authenticité du monument. Sauf peut-être deux ou trois chapitres peu importants, on sent partout la main d'Aristote et l'empreinte manifeste de son génie. C'est bien là son style absolument inimitable; c'est sa concision et.sa plénitude extraordinaires. C'est partout aussi la négligence d'une rédaction insuffisante; mais cette négligence est bien la sienne ; c'est bien la même que celle qu'on peut remarquer dans le Traité de TAmey presque au même degré, dans la Physique, dans le Traité du Ciel, et dans tant d'autres œuvres dont l'authenticité est inattaquable.

5° Selon toute apparence, ces ébauches, dont quel-  CCLXVII ques-unes sont plus avancées que d'autres, se rattachaient à quelque grand dessein, que la mort est venue interrompre. Quel était précisément ce dessein? C'est là un secret que le philosophe a emporté avec lui dans la tombe, et que nous n'en ferons jamais sortir :

« Res alta terra et caligine mersas. »

Alexandre d'Aphrodise, vers le second siècle de notre ère, a commenté toute la Métaphysique telle que nous l'avons actuellement, sauf quelques passages peu nombreux; et son commentaire, qui reste encore le meilleur de tous, est une preuve irréfragable que l'Antiquité a cru devoir s'abstenir de tout essai de restitution, comme nous nous en abstenons nous-mêmes. A bien des passages de ce commentaire si étendu, et en général si lumineux, on peut croire qu'Alexandre d'Aphrodise ne méconnaissait pas plus que nous les défauts si frappants du livre. Cependant il n'a cherché en aucune manière à les corriger ; il a suivi l'auteur pas à pas, se bornant à élucider sa pensée, sans essayer de la rendre plus systématique et de la mieux ordonner. Il nous faut imiter cette sage réserve, qui coûte sans doute beaucoup plus à nos habitudes qu'elle ne coûtait à celle des Anciens. Bien que la critique littéraire fût née dès longtemps, et qu'Aristote lui-même eût puissamment contribué à la créer, l'érudition telle que nous la concevons, minutieuse, scientifique, positive, était inconnue; et l'on doit même dire, sans trop d'exagération, qu'elle ne s'est constituée que de notre temps. L'Antiquité a dû être choquée aussi de l'in- CCLXVIII cohérence de la Métaphysique ; mais elle Ta acceptée ; et, le respect aidant, elle n'a point osé porter une main téméraire sur un ouvrage qu'Aristote lui-même n'avait pu compléter. L'admiration lui a suffi, et elle a suspendu son jugement. Le Moyen-Age tout entier l'a imitée, et il n'a pas été plus hardi qu'elle. C'est seulement dans les deux derniers siècles, et dans le nôtre, qu'on a fait quelques tentatives, qui n'ont pas été couronnées de succès, comme il était facile de le prévoir.

Maintenant, que s'est-il passé durant le temps qui s'est écoulé depuis la mort d'Àristote jusqu'à la translation de ses ouvrages à Rome? Dans quel état l'auteur lui-même a-tril laissé son œuvre? Lorsque Aristote mourut, la Métaphysique était-elle dans le demi-chaos où elle nous apparaît à cette heure? Il n'est guère permis d'en douter, quand on consulte les témoignages des deux seuls auteurs de l'Antiquité qui ont touché, bien qu'indirectement, ce point délicat et obscur.

Écoutons d'abord Strabon. Dans son livre treizième, où il décrit la Troade, il rapporte quelques faits de l'histoire de Scepsis, une des principales villes de la contrée, et il ajoute :

« C'est à Scepsis qu'étaient nés les philosophes socratiques, Éraste et Coriscus, ainsi que Nélée, son fils, qui fut un des disciples d'Aristote et de Théophraste. Nélée hérita de la bibliothèque de Théophraste, où se trouvait aussi celle d'Aristote. En effet, Aristote avait légué sa bibliothèque personnelle à Théophraste, en même temps que son école ; et c'est lui le premier, autant que nous le sachions, qui eut l'idée de rassembler des livres et qui apprit CCLIX aux Rois d'Egypte à constituer une bibliothèque. Théophraste, à son tour, légua la bibliothèque d'Aristote à Nélée, qui la transporta à Scepsis. En mourant, Nélée la transmit à ses héritiers, gens vulgaires, qui tinrent les livres enfermés et entassés sans beaucoup de soin. Plus tard, quand ils virent les rois Attales, auxquels était soumise leur ville, rechercher avec ardeur des livres pour en composer une bibliothèque à Pergame, ils cachèrent les leurs dans un caveau souterrain. Les livres y furent abîmés par l'humidité et par les vers ; et ce fut bien du temps après que la famille de Nélée vendit très cher à Àpellicon de Téos les livres d'Aristote et ceux de Théophraste. Mais Apellicon aimait plus les livres qu'il n'avait de talent philosophique; et quand il essaya de réparer les dommages des vers et de la moisissure, et de publier de nouvelles copies, il ne sut pas restituer convenablement les lacunes, et il donna des exemplaires remplis de fautes. Voilà comment les anciens péripatéticions, qui succédèrent à Théophraste, n'ayant quetrèspeude ces livres, et ayant surtout des livres Exotériques, ne purent faire de philosophie sérieuse, et se bornèrent à des dissertations de rhétorique sur des sujets donnés. Les Péripatéticiens, qui vinrent postérieurement et après la publication de ces ouvrages, purent plus aisément faire de la philosophie et étudier celle d'Aristote ; mais ils n'en furent pas moins forcés de se contenter souvent de simples conjectures, à cause de la multitude des fautes. Rome contribua beaucoup à en augmenter encore le nombre; car CCLXX Apellicon venait à peine de mourir quand Sylla, s'étant rendu maître d'Athènes, prit aussi la bibliothèque d'Apellicon, et la fit transporter à Rome. Là, le grammairien Tyrannion, qui était grand partisan d'Aristote, et qui avait gagné le Bibliothécaire, put avoir les livres à sa disposition, ainsi que les eurent quelques libraires, qui se servirent de mauvais copistes, et ne firent pas faire de collations. C'est là, du reste, un défaut qui dépare bien des livres qu'on fait transcrire pour les vendre, soit à Rome, soit à Alexandrie. Mais en voilà assez sur ce sujet. » (STRABON, liv. XIII, ch. i, § 84, p. 520, édit. Firmin-Didot.)

Ce récit de Strabon, sans doute recueilli sur les lieux, est fort intéressant; mais il ne touche pas di-rectement le point spécial qui nous occupe. Les vers, la moisissure peuvent altérer profondément des manuscrits ; mais ces accidents, tout déplorables qu'ils sont pour les livres, sont fort restreints et ne font rien à la composition même des ouvrages. Par suite de Thumidité ou par l'érosion des insectes, il peut s'introduire bien des lacunes dans un texte ; et plus tard, il est dificile certainement de rétablir les parties altérées et les phrases incorrectes, par une variante qui les répare ou qui les complète. Mais si la Métaphysique nous offre dans quelques passages des difficultés de cet ordre, ces difficultés sont insignifiantes; et elles ne nuiraient point absolument à l'ensemble de l'œuvre, ni à son ordonnance générale. Or, c'est d'un désordre incurable que nous avons à nous plaindre, dans toute l'étendue des quatorze livres de la Meta- CCLXXI physique, et c'est un mal sans remède. Plût à Dieu que nous n'eussions à combattre que l'action des vers et de l'humidité !

Un reproche qu'on peut adresser à Strabon, c'est qu'il n'a pas suffisamment distingué les ouvrages écrits par Aristote lui-même et les livres qui composaient sa bibliothèque. Il est vrai que ce n'est pas une recherche littéraire que fait Strabon; c'est une étude géographique ; et comme il vit trois siècles déjà après Aristote, la tradition lui donne des renseignements un peu confus; il les répète tels qu'on les lui a transmis, sans tenir beaucoup à les éclaircir et à les préciser.

Un siècle et demi après Strabon, Plutarque, qui copie son récit, l'abrège ; et il y ajoute cependant de nouveaux détails, à l'aide desquels on peut faire faire à la question un pa» de plus.

« Sylla, dit-il, étant parti d'Éphèse avec toute sa flotte, arriva trois jours après dans le port du Pirée ; et après s'être fait initier aux Mystères, il s'empara, pour son usage personnel, de la bibliothèque d'Apellicon de Téos, où se trouvaient la plupart des livres d'Aristote et de Théophraste. A cette époque, ces livres, n'étaient pas encore fort répandus dans le public, et ils en étaient à peine connus. On ce prétend que cetlte bibliothèque ayant été apportée à Rome, le grammairien Tyrannion fut chargé de mettre en ordre la plupart des livres, et qu'Andronicus de Rhodes, ayant pu obtenir de lui des copies, les livra au public, et y ajouta les tables dont on se sert encore aujourd'hui. On peut croire que les anciens Péripatéticiens ont été des esprits très-distin- CCLXXII gués et amis de l'étude ; mais ils ne possédaient qu'un petit nombre des ouvrages d'Aristote et de Théophraste ; et encore, ils les connaissaient assez mal, parce que Nélée de Scepsis, à qui Théophraste avait légué ses livres, n'avait eu pour héritiers que des gens aussi négligents qu'ignorants. » (Plutarque, Vie de Sylla, ch. xxvi, p. 559, édit. Firmin-Didot.)

Ce témoignage de Plutarque sur les travaux d'Andronicus de Rhodes est confirmé par celui de Porphyre, qui vivait un siècle environ après Plutarque. Porphyre, en divisant les traités de Plotin en Ennéades, « prétend imiter l'exemple d'Andronicus de Rhodes, qui rangea les ouvrages d'Aristote et de Théophraste en traités séparés, et qui eut soin de réunir ensemble les écrits qui roulaient sur les mêmes matières. » (Porphyre, Vie de Plotin, ch. xxrv, p. 28, t. P% de la traduction des Ennéades par Bouillet.)

Quels furent précisément les travaux d'Apellicon de Téos à Athènes, de Tyrannion le grammairien et d'Andronicus de Rhodes, le Péripatéticien, à Rome? C'est un problème sur lequel il est presque impossible de rien savoir. Le peu que Strabon nous apprend sur Apellicon n'est pas fait pour nous donner une bien haute idée de son savoir. Apellicon aimait passionnément les livres ; c'était là son seul mérite, et il paraît qu'il pouvait les payer fort cher pour satisfaire sa passion ; mais les copies qu'il fit faire sur les originaux d'Aristote et de Théophraste étaient des plus fautives.

Tyrannion, le grammairien, est un personnage beau- CCLXXIII  coup plus connu, et, autant qu'on peut en juger, beaucoup plus éclairé. Cicéron, qui était lié avec lui, en parle souvent dans ses Lettres, non sans estime. Tantôt, il invoque son concours pour un ouvrage de géographie qu'il méditait, sur le plan suivi par Eratosthène (ad Atticum, liv. II, lettre VI, p. 226, édit. de V. Le Clerc, in-18); tantôt, il le loue de l'ordre admirable qu'il a su mettre dans la Bibliothèque dont Cicéron lui avait confié le rangement à Antium (id. IV, lettre IV, p. 26, ibid.). D'autres fois, Cicéron se propose d'entendre, avec son ami Atticus, la lecture d'un ouvrage de Tyrannion (id., XII, lettre II, p. 414) ; et il reproche à Atticus, qui admirait vivement l'ouvrage du grammairien, de ne l'avoir pas attendu pour jouir de la lecture en sa compagnie (id., lettre VI, p. 424). Cicéron ajoute, sans désigner précisément le sujet de cet ouvrage, si fort apprécié par Atticus, que ce sujet était assez mince. Mais l'admiration d'un homme qui avait tant de goût, lui est une garantie que ce travail est excellent en son genre ; et Cicéron n'hésite pas à demander qu'on le lui envoie, pour qu'il puisse Je lire tout à l'aise. Enfin Cicéron, qui a chez lui le fils de Quintus, son frère, fait donner à l'enfant, qui est son neveu, des leçons par Tyrannion, et il se loue des progrès que le grammairien fait faire au petit garçon sous ses yeux (Lettres à Quintus, liv. II, lettre IV, p. 120). On peut ajouter que Tyrannion était d'Amisos, ville du royaume du Pont, peu éloignée d'Amasée, où Strabon était né. Strabon rappelle qu'il avait étudié la philosophie avec deux de ses condisciples, Boëthus de Sidon et Diodote, frère de Boëthus, et CCXXIV  selon toute apparence, c'était sous la conduite de Tyrannion, leur professeur commun (Strabon, liv. XVI, ch. xxiv, p. 645, édit. Firmin-Didot); car, en parlant d'Amisos, sur le Pont-Euxin, il nous apprend que cette ville était la patrie de son maître, le grammairien Tyrannion. (Strabon, liv. XII, ch. iii, p. 469, édit. Firmin-Didot.)

Quoi qu'il en soit, on doit regretter de ne pas con-naître mieux la nature des travaux de Tyrannion sur la Métaphysique. On ne peut pas douter que ses études ne fussent très-sérieuses et très-savantes. Quel en fut le résultat? C'est là un point resté tout à fait obscur; et on ne saurait l'éclaircir qu'à l'aide de cou-' jectures, qu'il est plus prudent de ne pas risquer.

Quant à Andronicus de Rhodes, ce que nous en disent Plutarque et Porphyre est fait pour piquer notre curiosité plus que pour la satisfaire. Outre les copies qu'il publia des ouvrages d'Aristote, il dressa des index;et répartit les manuscrits selon la conformité des matières. Ces Index, ces tables dressées par lui étaient toujours en usage au temps de Plutarque, qui semble en parler comme s'il les avait sous les yeux. L'arrangement qu'Andronicus introduisit dans les ouvrages d'Aristote, quel était-il? Nous ne le savons pas; mais, sans hasarder une hypothèse téméraire, on peut admettre que la disposition actuelle de toutes les œuvres du philosophe vient d'Andronicus, au moins en très-grande partie, et que la Métaphysique notamment nous est arrivée telle qu'il la connut et l'arrangea, avec ses défauts d'incohérences, de répétitions, et d'emprunts à d'autres ouvrages, D'Andro- CCLXXV nicus de Rhodes à Alexandre d'Aphrodise, il y a trois siècles environ; et rien ne donne à penser que, durant cet intervalle, aucun changement ait été introduit par personne dans la composition de la Métaphysique. Le commentaire d'Alexandre d'Aphrodise a fixé le texte d'une manière définitive, et lui a donné une sorte de caractère sacré, pour tous les disciples du Péripatétisme. Alexandre se plaint assez souvent de l'obscurité de l'ouvrage qu'il explique; mais il ne cherche pas à y mettre un ordre meilleur ; il se contente de celui que la tradition lui a transmis, et il le respecte scrupuleusement.

Pour rencontrer un jugement plus sévère et plus juste, il faut descendre jusqu'au vi° siècle Asclépius de Tralles, élève d'Ammonius, fils d'Hermias, se prononce sur la composition de la Métaphysique plus nettement qu'aucun de ses prédécesseurs ; et aujourd'hui même, instruits comme nous le sommes par tant de travaux, il ne nous serait guère possible d'en parler mieux. Après avoir parcouru les titres divers qu'a reçus l'ouvrage d'Aristote, y compris le titre de Méta-physique, Asclépius ajoute :

« Quant à la manière dont cet ouvrage est composé, on peut dire qu'il n'a pas été rédigé comme le sont les autres traités d'Aristote ; il ne semble pas en avoir la régularité et l'enchaînement habituels. En ce qui regarde la suite des pensées, il laisse parfois à désirer; et des morceaux entiers tirés d'ouvrages étrangers y ont été introduits. Enfin, il y a de fréquentes répétitions. On cherche à excuser ce désordre, et l'excuse n'est pas sans valeur, en disant  CCLXXVI qu'Aristote, après avoir écrit le présent ouvrage l'avait envoyé à Eudèmc de Rhodes, son ami. Eudème ne jugea pas à propos de publier une œuvre  de cette importance dans l'état où elle se trouvait. Plus tard, Eudèmc mourut, et quelques parties du livre furent détruites. Les philosophes postérieurs à Eudème n'osèrent pas y rien ajouter de leur chef; et comme l'ouvrage presque entier était défectueux et ne rendait pas assez complètement la pensée de l'auteur, ils comblèrent les lacunes par des emprunts faits à ses autres ouvrages, raccordant le tout du mieux qu'il leur fut possible. » (Voir les scholies sur la Métaphysique, édit. de l'Académie de Berlin,t. II, p. 519, b, 33.)

Il est à présumer qu'une opinion aussi ferme sur la composition de la Métaphysique appartient à l'Ecole plutôt encore qu'à Asclépius lui-même, qui n'est qu'un élève, écho docile de ses maîtres. Cette appréciation si vraie devait s'être formée peu à peu, par suite des études incessantes dont l'œuvre du philosophe était l'objet. On l'avait d'abord admirée sans réserve, et l'on peut voir qu'Alexandre d'Aphrodise ne va pas au-delà de quelques remarques timides sur l'obscurité de certains passages, ou sur l'incorrection de certaines leçons. Mais les esprits devenaient plus indépendants à mesure qu'ils regardaient de plus près ce monument grandiose et informe, et qu'essayant d'en pénétrer les profonds détours, ils s'apercevaient que ce labyrinthe est sans issue. Le jugement qu'a porté Asclépius doit être également le nôtre ; et il restera désormais celui de la libre critique, respectueuse mais . CCLXXVII clairvoyante, signalant des défauts trop évidents, qui ne sont pas attribuables à l'auteur, mais qui sont les effets regrettables de la mort, du hasard et du temps.

Dans toutes les considérations qui précèdent, nous avons négligé à dessein les preuves intrinsèques que la Métaphysique semble renfermer de son authenticité et de sa composition. Nous avons aussi négligé les preuves qui peuvent s'appuyer sur les citations que la Métaphysique fait d'autres ouvrages d'Aristote, ou sur les citations que d'autres ouvrages d'Aristote font tle la Métaphysique.

Les preuves intrinsèques sont les références que contient la Métaphysique elle-même, et qui se rapportent soit à des théories antérieures que l'auteur rappelle, soit à des théories postérieures qu'il annonce à l'avance. Elles sont très nombreuses, puisque, de compte fait, elles sont une cinquantaine au moins. En général, elles sont exactes, bien que quelquefois l'auteur oublie ses promesses, et n'y soit pas toujours très fidèle ; mais, la plupart du temps, il les tient. Ses souvenirs non plus ne le trompent guère ; mais, comme on doit le penser, ces références n'ont jamais toute la précision et toute la netteté que nous pourrions désirer, et que nous sommes habitués à porter aujourd'hui dans les recherches philologiques. L'indication est toujours générale, et celle qui est fournie au lecteur ne spécifie jamais ni le livre, ni le chapitre, ni, à plus forte raison, le paragraphe. Mais, quelque imparfaites que soient ces soudures, elles attestent que des efforts multipliés ont été faits pour relier, CCLVIII autant que possible, les parties disjointes d'une construction trop peu solide. Pourtant, en voulant faire croire que l'ouvrage avait reçu d'Aristote la forme qu'il nous offre maintenant, les antiques éditeurs, soit Apellicon, soit Tyrannion, soit Andronicus de Rhodes ou tout autre, sont allés beaucoup trop loin, et il serait bien imprudent de les suivre sur ce terrain. L'analyse des quatorze livres de la Métaphysique faite plus haut a démontré surabondamment que ce n'était pas là une composition régulière, à quelque faible degré que ce fût. Les références même ont d'autant moins de valeur qu'elles sont plus nombreuses. On les conçoit jusqu'à un certain point de la part des scholiastes ; mais on ne saurait admettre qu'elles puissent venir de l'auteur. En admettant même, comme nous le faisons avec une pleine conviction, que tous les morceaux et tous les fragments sont d'Aristote, il en sentait lui-même trop clairement l'imperfection et le désordre pour essayer de les réunir en un seul corps. Un commentateur a pu se hasarder dans une entreprise scabreuse, où l'engageait le respect universellement ressenti pour un puissant génie, dominateur de l'École, et où l'engageait peut-être aussi son amour-propre d'éditeur. Les renvois accumulés cachaient dans une certaine mesure la dislocation du tout pour des yeux trop crédules. Mais quant à nous, nous ne pouvons pas nous y méprendre; nous ne sommes pas auditeurs d'Alexandre d'Aphrodise ou de Simpli-cius, et nous affirmons que les citations ne sont pas d'Aristote, parce qu'elles supposent que la Métaphyque formait un ensemble systématique qu'elle ne pré- CCLXXIX sente pas réellement, et qu'elle présentait certainement à l'auteur moins encore qu'à personne.

C'est presque avec la même réserve qu'il faut accepter les citations que la Métaphysique contient d'autres ouvrages aristotéliques. Ces citations sont moins nombreuses que les premières ; mais on peut en compter jusqu'à vingt à peu près. Parfois, ces indications sont formelles; et c'est ainsi que la Physique est citée jusqu'à cinq fois dans le seul premier livre, et autant de fois peut-être dans les livres suivants. La Morale à Nicomaque et les Derniers Analytiques y sont mentionnés chacun une fois. D'autres indications plus vagues ne nomment pas précisément les ouvrages ; mais elles les désignent suffisamment pour que le doute ne soit pas permis. Il n'est pas possible d'ailleurs d'en tirer des renseignements de quelque importance, sur la composition et l'authenticité de la Métaphysique.

Reste la troisième espèce de citations, c'est-à-dire les citations de la Métaphysique dans d'autres ouvrages d'Aristote, reconnus pour parfaitement authentiques. Ces citations seraient peut-être les plus décisives do toutes; mais ici encore on peut élever les mêmes doutes que plus haut. Aristote ne peut pas avoir personnellement cité la Métaphysique, et cela pour deux raisons : la première, c'est que le nom de Métaphysique lui est étranger, puisque ce nom n'est venu en usage que longtemps après lui ; la seconde raison non moins forte, c'est qu'Aristote n'a pu citer un ouvrage qu'il n'a point composé, et qui n'a pris quelque con-sistance que sous la main de ses successeurs, à la dis- CCLXXX tance de plusieurs siècles. Seulement il se peut que, dans cet amas de fragments qui forment la Métaphyque, il s'en trouve auxquels Aristote a pu quelquefois faire allusion. Mais ceci même, en supposant que ce fût prouvé positivement, n'aurait pas grande importance. L'authenticité de la Métaphysique est manifeste et même indiscutable, pour tous ceux qui se sont familiarisés avec le style du philosophe. Une citation de plus ou de moins de quelqu'un de ces fragments, à quoi servirait-elle? Si la Métaphysique est bien certainement d'Aristote, ce qui n'est pas de lui, c'est la réunion violente de tous ces matériaux, qui pouvaient bien être destinés à un seul et même ouvrage, mais qui n'ont jamais été rangés dans un cadre méthodique, par la main qui les avait produits.

Nous pouvons donc laisser de côté comme presque entièrement inutiles toutes les citations, soit de la Métaphysique elle-même par elle-même, soit d'autres ouvrages d'Aristote par la Métaphysique, soit aussi de la Métaphysique par d'autres ouvrages. Toutes ces concordances, même quand elles sont exactes, n'ont qu'un très-faible intérêt, parce qu'elles ne proviennent que des scholiastes, et que l'auteur sans doute n'y est pour quoi que ce soit.

Une dernière question qu'il convient de ne point passer tout à fait sous silence, c'est celle qui concerne le mot même de Métaphysique. On sait qu'il n'appartient point au philosophe, et que pour lui la science générale qu'il cherche et qu'il définit si bien, s'appelle la Philosophie première ou la Théologie. C'esl une de ces deux dénominations qu'il aurait fallu con- CCLXXXXI server, d'abord parce qu'elles viennent d'Aristote, et ensuite parce qu'elles sont les plus justes. Un autre nom a prévalu, et il serait trop tard désormais pour protester contre l'usage qui a en sa faveur une tradition respectable par son ancienneté. Cette tradition doit remonter tout au moins jusqu'à Andronicus de Rhodes. Il paraîtrait qu'après avoir mis en ordre les autres ouvrages d'Aristote et notamment la Physique, il trouva une masse de fragments presque sans suite, qui se rapportaient tous plus ou moins directement à la Philosophie première ; il les rassembla ; et, pour indiquer la place qu'il leur assignait dans son classement, plutôt encore que pour leur appliquer un nom commun, il les intitula : « Morceaux qui viennent après la Physique », ou pour traduire littéralement : Métaphysique. Peut-être aussi ce mot équivoque de Métaphysique répondait-il, dans la pensée d'Andronicus, à une classification qui n'avait plus un sens exclusivement matériel. Au-dessus de Tétude de la nature, qui ne comprend que des phénomènes observables à nos sens, s'ouvre une étude plus générale et plus relevée qui dépasse la Physique, et qui mérite le nom de Métaphysique, par lequel on la recommande à l'attention et au respect des hommes. C'est là pour nous désormais la signification vraie du mot de Métaphysique ; elle est à nos yeux ce que la Philosophie première était pour Aristote, la science des principes et des causes, s'adressant d'abord aux choses de la nature et à la réalité sensible, mais ensuite les dépas sant, pour s'élever, dans la mesure où cette ambition est permise à l'homme, jusqu'à la cause première, in- CCLXXXII finie, immuable, éternelle, de l'univers entier, jusqu'à l'intelligence divine elle-même. Telle est la portée de la Métaphysique en général, et spécialement de celle d'Aristote.

Mais il est temps de résumer toute cette dissertation ; et les conclusions qu'on en doit tirer peuvent être exprimées en deux mots :

Oui, la Métaphysique d'Aristote est dans un désordre absolument irrémédiable.

Oui, ce monument, quelque irrégulier qu'il soit, est parfaitement authentique; et tel qu'il est, il appartient bien, dans son ensemble, à qui on l'attribue.

A toutes les preuves qu'on a précédemment données, ajoutons-en deux encore, sur lesquelles il est bon que l'esprit du lecteur s'arrête en dernier lieu. Les théories exposées d'un bout a l'autre de cette œuvre sont en un constant accord avec les théories connues du philosophe; et cette ressemblance, qui va jusqu'à l'identité dans presque tous les cas, est un témoignage considérable. Sans doute un écrivain postérieur aurait pu s'inspirer d'Aristote et l'imiter ; mais ici il n'y a pas trace de ces faiblesses qui trahissent toujours l'imitation la plus habile. Partout, si ce n'est dans deux ou trois chapitres, éclate une puissante originalité, qui ne nous laisse pas un seul instant d'hésitation. Et puis, dans tout le cours de la Métaphysique, nous retrouvons perpétuellement la réfutation de la théorie des Idées ; et cette réfutation semble être le but principal, ou la passion, de l'auteur. Il n'y a qu'un contemporain de Platon, et son rival, qui pût mettre une telle âpreté à cette critique incessante. CCLXXXIII Que l'on veuille bien peser cet argument ; il n'y en a guère de plus fort pour nous convaincre de l'authenticité de la Métaphysigue. Enfin, si la Métaphysique n'est pas d'Aristote? de qui donc pourrait-elle être? Et l'heureuse Grèce aurait-elle à se flatter d'avoir produit, à côté d'Aristole, quelque autre génie aussi profond et aussi étendu ?

CCLXXXV SOMMAIRES DES CHAPITRES DES XIV LIVRES DE LA MÉTAPHYSIQUE D'ARISTOTE

LIVRE PREMIER

CHAPITRE PREMIER. — Origine de la philosophie; répartition des facultés entre les diverses classes d'animaux; rôle de la mé-moire; supériorité de l'homme ; l'expérience tirée de l'obser-vation; citation de Polus; l'art et la science; débuts et progrès des arts; idée générale de la science, fondée sur des notions universelles; apparition successive des différentes sciences; naissance des mathématiques en Egypte; citation de la Morale; la sagesse ou philosophie; définition préliminaire de la philosophie, qu'on peut se représenter comme la science des principes et des causes.

CHAPITRE II — Définition plus spéciale de la sagesse ou philo-sophie; idées qu'on se fait habituellement du sage ou philosophe, au nombre de quatre principales; analyse de chacune de ces idées; en résumé, la science des généralités est le but particulier de la philosophie; elle est la science des principes premiers et universels ; ce n'est pas une science pratique, d'une utilité immédiate; elle est la dernière qui paraisse entre toutes les autres; citation de Simonide; grandeur et sublimité presque divine de cette science ; elle cherche à savoir uniquement pour connaître la vérité.

CHAPITRE III. — La philosophie est l'étude des causes premières ou principes ; quatre espèces de causes : la substance, la matière, l'origine du mouvement et le but final ; citation de la Physique; les premiers philosophes s'attachèrent à l'idée de la matière; ils sont unanimes à cet égard; mais ils diffèrent CCLXXXVI sur le nombre des principes; Thalès se prononce pour l'eau : les Théologues, Hippon, Anaximène et Diogène se prononcent pouf l'air; Hippase et Heraclite, pour le feu; Empédocle admet les quatre éléments; insuffisance de ces systèmes, aboutissant tous à l'unité de l'Être; nécessité d'une recherche plus profonde, et d'une cause autre que la matière; Parménide la pressent; Anaxagore de Clazomène la trouve dans l'Intelligence ; immensité de cette découverte ; Heniiotimo de Clazomène.

CHAPITRE IV. — Hésiode et Parménide; puissance de l'Amour: Empédocle admet deux principes : l'Amour et la Discorde ; citation de la Physique; insuffisance de tous ces systèmes; critique d'Empédocle ; ses défauts et ses mérites; Anaxagore ; Leucippe et Démocrite ; leurs systèmes du plein et du vide ; ils expliquent tous les phénomènes à l'aide de trois différences; résumé sur les deux causes, substance et mouvement.

CHANTRE V.— Philosophie des Pythagoriciens ; passionnés pour les mathématiques, ils font des nombres les principes des choses; leurs travaux sur l'harmonie musicale ; ils appliquent le nombre à l'explication des phénomènes célestes; leurs hypothèses hasardées: l'Antichthôn; ils font du nombre la cause matérielle des êtres; théorie de quelques autres Pythagoriciens; la double série des dix principes opposés; Alcméon de Crotone, plus jeune que Pythagore ; infériorité de son système; philosophie de l'unité, Parménide et Mélis-sus; Xénophane admet l'unité en Dieu; citation de la Physique; Parménide forcé de rompre son unité et de reconnaître deux causes; résumé de toutes les philosophies antérieures; mérites et défauts des Pythagoriciens.

CHAPITRE VI. — Philosophie de Platon; ses rapports avec les Pythagoriciens, Heraclite et Cratyle; inlluence de Socrate sur Platon ; la théorie des Idées sortie de ces influences diverses; exposition de cette théorie; comparaison do Platon et des Pythagoriciens; leurs différences.— Résumé des recherches antérieures; citation de la Physique; les philosophes anciens se sont attachés presque uniquement à la cause matérielle; ils ont traité à peine la question de l'essence et la CCLXXXVII cause finale; exactitude de la théorie de l'auteur prouvée par cette histoire du passé; examen plus détaillé des opinions des philosophes sur les quatre causes.

CHAPITRE VII.— Critique des théories antérieures qui n'admettent qu'un seul principe, la matière; elles négligent les choses incorporelles, et elles ne. tiennent compte, ni du mou-vement, ni de l'essence des choses, ni des transformations des éléments entre eux ; rôle de la terre dans ces théories ; citation d'Hésiode ; théories qui admettent plusieurs éléments; critique d'Empédocle; critique d'Anaxagore; critique des Pythagoriciens et de leur théorie des nombres ; critique générale de la théorie des Idées de Platon; cette théorie multiplie inutilement les êtres sans expliquer la réalité ; elle crée des homonymies sans substance réelle; elle se fonde sur des démonstrations insuffisantes et des définitions arbi-traires; elle suppose entre les Idées et les Êtres un ternie commun, qu'elle ne peut désigner; elle ne peut rendre compte du mouvement, ni même des idées prises pour exemplaires des choses ; citation du Phèdon ; confusion des Idées avec les nombres; oubli du mouvement, des longueurs, des surfaces et des solides; les Idées ne peuvent servir à expliquer la science. Résumé général de cette critique des philosophiez antérieures; citation de la Physique; conclusion.

LIVRE II

CHAPITRE PREMIER: — Difficulté de découvrir le vrai, le progrès s'obtient par le concours des efforts réunis; la splendeur même des phénomènes éblouit notre esprit ; reconnaissance due & tous ceux qui cultivent la science; chacun a son utilité particulière ; la philosophie est la science spéculative de la vérité ; elle est la plus vraie de toutes les sciences, parce que c'est par elle que les autres peuvent être vraies.

CHAPITRE II. — Nécessité absolue d'un premier principe en toutes choses; impossibilité d'une série infinie sous le rapport de la matière, du mouvement, du but final et de l'essence ; double sens de l'idée de génération ; simple succession dans le temps; conséquences fâcheuses de la doctrine qui admet la série infinie des causes.

CCLXXXVIII CHAPITRE III. — De la méthode à suivre en philosophie et dos diverses modes d'exposition; influence de l'habitude sur les auditeurs et les élèves; exemple des lois; les formules ma-thématiques; limites dans lesquelles il faut les employer; on ne doit pas confondre la science et la méthode qu'on y explique; méthode propre à l'étude de la nature.

LIVRE III

CHAPITRE PREMIER. — Utilité de bien poser les questions pour arriver sûrement aux solutions qu'on cherche; impartialité vis-à-vis de tous les systèmes; énuméralion des questions préliminaires; indication spéciale de quelques-unes des plus importantes, et notamment de la nature particulière des principes, selon qu'on les sépare des choses ou qu'on les trouve dans les choses mêmes.

CHAPITRE II. — Énuméralion des questions diverses qu'on doit se poser; de la multiplicité des sciences appliquées à l'étude des principes; caractère propre des mathématiques, auxquelles l'idée du Bien est étrangère; critique d'Aristippe; importance supérieure de la science qui s'occupe du but  final et du bien dans les choses; des principes de la réalité, et des principes de la démonstration; c'est à une seule science de s'occuper de ces deux ordres de principes; des êtres étudiés en eux-mêmes et dans leurs attributs essentiels; des êtres en dehors des êtres sensibles; critique nouvelle de la théorie des Idées et de la théorie des êtres intermédiaires; conséquences insoutenables de ces deux théories, et spécialement de la dernière, qui mène au renversement de toutes les sciences.

CHAPITRE III. — Discussion nouvelle sur les genres; sont-ils les principes des choses? Ou les principes des choses ne sont-ils pas plutôt les éléments matériels dont les choses se composent? Arguments en sens contraires; les genres étant nécessaires à la définition, ils semblent devoir être pris pour principes; réponse à cette objection; l'Un et l'Être ne peuvent être des principes; les espèces ne peuvent pas davantage être des principes; en résumé, ce sont les genres les plus CCLXXXIX élevés qui peuvent paraître des principes plus que tout le reste.

CHAPITRE IV. — Nouvelles objections en sens opposés pour et contre l'existence des genres indépendante et séparée des choses ; conditions nécessaires de la science ; il faut de l'universel et de l'éternel; de la diversité et de l'uniformité des principes, selon que les choses sont périssables ou impérissables; citation d'Hésiode; idées grossières qu'on se fait vulgairement des Dieux, considérés comme auteurs et principes des êtres; citations diverses d'Empédocle; ses contradictions; de la nature des principes ; de l'Un et de l'Être pris pour la substance des choses ; Platon et les Pythagoriciens ; impossibilités de cette théorie ; des rapports de l'Unité et de l'Être avec les Nombres; réfutation de Zenon sur l'indivisibilité de l'Un; son système conduit à l'absolu nihilisme; il ne peut expliquer, ni la multiplicité des êtres, ni les grandeurs.

CHAPITRE V. — De la nature des points, des lignes et des surfaces ; on a essayé de les prendre aussi pour la substance des choses ; opinions en sens contraires ; en faire des substances réelles, c'est détruire toute idée de la substance, et aussi de la production et de la destruction des choses; les points, les lignes et les surfaces ne sont que des limites et des divisions, ainsi que l'instant.

CHAPITRE VI. — Retour à la critique de la théorie des Idées; nouveaux arguments contre et pour cette théorie, et sur la nature des êtres mathématiques ; autres questions analogues sur la nature des principes, qui peuvent être, ou simplement possibles, ou absolument réels ; de l'existence des Universaux ; il n'y a que des êtres individuels.

LIVRE IV

CHAPITRE PREMIER. — De la science spéciale de l'Être considéré uniquement en tant qu'Être, avec ses attributs essentiels; cette science est distincte de toutes les sciences qui étudient l'Être sous un point de vue particulier.

CHAPITRE II — Des acceptions différentes du mot Être; exem- CCXC ples à l'appui de la science qui étudie l'Être en tant qu'Être ; les sciences spéciales n'étudient que des espèces de l'Être ; identité de l'Un et de l'Être ; citation du Choix des contraires; une même science connaît les contraires opposés ; différence de la négation et de la privation ; réduction de toutes les oppositions à celle de l'unité et de la pluralité; rôle de la philosophie dans ces questions, à côté de la Dialectique et de la Sophistique; conclusion sur la science de l'Être considéré uniquement comme tel.

CHAPITRE III. — La science qui étudie l'Être dans toute sa généralité est celle aussi qui doit connaître les axiomes mathématiques ; les sciences particulières n'ont point à ex-pliquer les axiomes dont elles se servent; erreur du Physicien! excusable à certains égards ; c'est à la philosophie de s'occuper des axiomes ; importance du principe de contradiction, le plus général et le plus ferme de tous les principes; Heraclite.

CHAPITRE IV. — Défense du principe de contradiction; il est évident de soi et n'a pas besoin de démonstration; objections qu'on essaie de faire contre la vérité de ce principe ; futilité de ces objections ; méthode à suivre pour forcer l'adversaire à répondre directement à la question qu'on lui a faite; erreurs monstrueuses auxquelles aboutit cette doctrine, en détruisant toute idée de substance, et en réduisant l'Être et ses attributs à de simples qualités ; limite nécessaire des attributs ; il n'y a pas attributs d'attributs ; confusion de toutes choses ; l'affirmation et la négation sont également vraies et également fausses; critique de Protagore; critique d'Anaxa-gore; scepticisme universel; danger et fausseté de ce système ; la pratique constante des choses de la vie démontre combien il est erroné ; il y a quelque chose d'absolu dans le monde ; il y a tout au moins du plus et du moins dans les choses; condamnation sévère du Scepticisme.

CHAPITRE V. — Critique de la doctrine de Protagore sur le témoignage de nos sens ; objections diverses ; erreur de Démocrite et d'Empédocle; citations de vers d'Empédocle et de Parménide ; maxime prêtée à Anaxagore ; Homère ; Épicharme con tre Xénophane ; causes générales de leurs fâcheuses mépri- CCXCI ses; Heraclite et Cratyle; idée vraie qu'on doit se faire du changement; il n'est pas universel; du témoignage de nos sens; sa valeur propre et ses limites; impossibilité du Scepticisme et son absurdité ; citation de Platon ; il y a dans le monde, outre les objets sensibles, quelque chose d'immuable et de nécessaire.

CHAPITRE VI. — Suite de la critique du système de Protagore ; principe de l'erreur sur laquelle il repose; tout n'est pas démontrable ; tout n'est pas relatif dans le monde ; concession que sont obligés de faire les partisans de cette théorie; insuffisance de cette concession ; elle maintient la relativité universelle et détruit toute substance ; incertitude du témoi-gnage des sens; leurs variations dans un même individu, ou dans des individus différents; résumé des objections contre la théorie de l'apparence, et condamnation définitive de cette doctrine.

CHAPITRE VII — Les contradictoires n'admettent point entre elles de moyen terme; définition de la vérité et de l'erreur; conséquences insoutenables qui sortent de la théorie de l'in-termédiaire ; double cause de cette erreur ; différence entre les théories d'Heraclite et celles d'Ânaxagore.

CHAPITRE VII. — Erreurs des opinions exclusives soutenant, les unes, que tout est faux ; les autres, que tout est vrai ; Heraclite ; opposition nécessaire des contradictoires, dont l'une des deux est absolument vraie ; tout n'est pas en repos ; tout n'est pas en mouvement ; nécessité d'un premier moteur.

LIVRE V

CHAPITRE PREMIER. — Définition du mol Principe; sept accep-tions diverses : le point de départ, le moyen pour faire le mieux possible, le début, l'origine, la volonté, l'art, la source de la connaissance. Les causes sont en même nombre que les principes; conditions communes à tous les principes; principes intrinsèques; principes extérieurs; exemples divers; le bien et le mal, principes de connaissance et d'action.

CHAPITRE II. — Définition du mot Cause. Quatre espèces de CCXCII causes : la matière, la forme, le mouvement et le but final ; exemples divers de ces quatre sortes de causes. Une seule et même chose peut avoir plusieurs causes, le mot de Cause ayant des acceptions diverses; réciprocité des causes s'engendrant l'une l'autre; une même cause peut produire des effets contraires, selon qu'elle est présente ou absente; nouveaux exemples pour faire mieux comprendre les différences des quatre espèces de causes. Nuances diverses de toutes les causes, moins nombreuses qu'on ne croirait; causes supérieures; causes secondaires; causes directes; causes indirectes; Polyclète et la statue; causes en acte, causes en puissance, agissant effectivement ou pouvant agir; combinaison ou isolement des diverses causes; six causes accouplées deux à deux; différences de l'acte et de la puissance.

CHAPITRE III. — Définition du mot Élément; il désigne la partie indivisible des choses, ou la partie spécifiquement identique; éléments des corps; éléments des figures géométriques; éléments des démonstrations; sens dérivés du mot Élément; le petit, le simple sont des éléments; les Universaux le sont plus que la différence.

CHAPITRE IV. — Définition du mot Nature. Ce mot signifie la production et le développement des êtres, leur principe in-trinsèque, leur mouvement propre, qu'ils tirent d'eux seuls, leur matière primordiale, leurs éléments, leur organisation initiale, malgré ce qu'en a dit Empédocle, qui nie cette organisation et ne reconnaît que mélange et séparation d'éléments ; Nature signifie encore la matière première des êtres, leur espèce et leur forme, fin dernière de tout développement; enfin la Nature est la substance essentielle de tous les êtres doués d'un mouvement spontané.

CHAPITRE V. — Définition du mot Nécessaire. Il signifie coopé-ration indispensable pour la vie ou l'existence de la chose; condition inévitable; contrainte ou violence; citations d'Évé-nus et de Sophocle ; l'idée de la nécessité s'applique surtout à un état de choses qui ne peut pas être autrement; nécessités secondaires ; nécessité dans les démonstrations et dans le syllogisme ; propositions nécessaires par elles-mêmes ou CCXCIII par intermédiaires ; il n'y a pas de nécessité pour l'éternel et l'immobile.

CHAPITRE VI. — Définition du mot Unité. Unité accidentelle et essentielle, de simple attribution ou d'essence; exemples divers pour expliquer l'unité ainsi comprise ; unité de continuité ; ensemble de choses réunies ; définition de la continuité, et de l'unité particulière qu'elle peut former; continuité plus grande dans la ligne droite que dans la ligne courbe ; unité d'espèce ; unité de genre ; termes plus ou moins compréhea-sifs pour représenter cette unité; unité de définition; unité par indivisibilité des choses; unité par identité de substance; unité d'ensemble et de composition des parties régulièrement ordonnées pour former un tout; unité prise pour mesure dans chaque genre ; l'unité est toujours nécessairement indivisible; le nombre, le point, la ligne, la surface, le solide; subordination des termes entre eux, les inférieurs étant compris dans les supérieurs; rapports des unités entre elles. La pluralité est opposée à l'unité ; aspects divers de la pluralité.

CHAPITRE VIII — Définition du mol d'Être ; double sens de l'idée d'Être, indirect ou essentiel; les attributs de l'Être n'ont qu'un sens indirect et accidentel; les attributs d'attributs n'ont encore l'Être que plus indirectement; sens essentiel de l'idée d'Être; ce sens s'applique à toutes les catégories; énumération incomplète des catégories; l'ijiée d'Être confondue parfois avec l'idée de la vérité ; double-sens de l'Être pris sous tous les aspects; Être en simple puissance; Être en réalité effective et actuelle; exemples divers. Indication d'études ultérieures sur la puissance et sur l'acte.

CHAPITRE VIII. — Définition du mot de Substance; ce mot signifie d'abord les corps simples, les éléments; il signifie aussi les corps en général, les êtres individuels, sujets des attributs; la substance se confond avec l'essence intrinsèque des êtres, avec ce qui les constitue nécessairement; rôle du nombre, pris pour la substance ; l'idée de substance est le fond de la définition ; deux acceptions principales du mot de Substance : le sujet et la forme.

CHAPITRE IX. — Définition du mot Identité; premier sens du CCXCIV mot d'Identique, pris indirectement par rapport aux attributs d'un même être ; second sens du mot d'Identique appliqué à des êtres substantiels; signification du mot Autre; signification du mot Différent; signification du mot Sembla-ble, et du mot Dissemblable ; opposition de ces deux mots.

CHAPITRE X. — Définition du mot Opposé; contradiction, contraires, relatifs, privation et possession; définition spéciale du mot Contraire ; quatre espèces diverses de contraires ; contraires dérivés; nuances diverses de ces mots selon les nuances de l'Un et de l'Être; définition du mot Autre; acceptions diverses de ce mot; l'identité est le contraire de l'opposition.

CHAPITRE XI. — Définition des mots Antérieur et Postérieur; antériorité et postériorité de lieu; antériorité et postériorité de temps; antériorité et postériorité de mouvement, de puissance, d'ordre et de position; antériorité et postériorité relatives & la connaissance, selon la raison, ou selon le témoignage des sens; les modifications suivent sous ce rapport les sujets auxquels elles s'appliquent; antériorité résultant de l'indépendance; citation de Platon; le sujet est antérieur aux attributs ; la puissance est antérieure à l'acte.

CHAPITRE XII. — Définition du mot Puissance ou Possibilité; premier sens du mot de Puissance ; c'est le principe du chan-gement produit sur un autre être ; puissance signifie aussi la faculté de souffrir, ou la faculté d'achever une chose selon une volonté rétléchie ; puissance confondue avec l'immuabilité; puissance d'action et de repos; puissance venant des qualités qu'on possède et de celles dont on manque ; puissance du bien ; impuissance opposée à la puissance ; conditions de temps et de lieu. Puissance prise dans le sens de possibilité et d'impossibilité; définition de l'impossible; le contraire de l'impossible est nécessairement vrai; sens divers  du mot Possible; la puissance en géométrie n'est qu'une expression métaphorique; résumé sur les mots de Puissance et de Possibilité; l'idée première de la puissance est la faculté de produire un changement quelconque.

CHAPITRE XIII. — Définition du mot Quantité ; quantité en-tendue d'une manière générale; le nombre, la grandeur; CCXCV longueur, largeur, profondeur; quantités substantielles, quantités indirectes; nuances et modifications delà quantité; les quantités indirectes ne le sont que par les objets auxquels elles s'appliquent; comment le mouvement et le temps sont des quantités.

CHAPITRE XIV. — Définition du mot Qualité ; la qualité est d'abord la différence qui caractérise substantiellement un être ; idée de la qualité dans les êtres immobiles, et spécialement dans les nombres; nombres simples, nombres multiples; second sens du mot de Qualité, appliqué aux êtres qui changent et se modifient; rôle du bien et du mal, déterminant surtout les qualités dans les êtres animés et doués de libre arbitre.

CHAPITRE XV. — Définition du mot Relatif; relatifs sous le rapport de la quantité, comme les multiples et les sous-multiples; relatifs sous le rapport de l'action et de la souffrance; relatifs numériques, déterminés ou indéterminés; relatifs de puissance; relatifs de réalité et d'action; relatifs de temps; relatifs de privation; il n'y a pas de réciprocité entre les relatifs; un terme est relatif à un autre, sans que cet autre lui soit relatif à son tour ; relatifs en soi ; relatifs par dériva-tion de genre ; relatifs indirects.

CHAPITRE XVI. — Définition du mot Parfait ; parfait représente toujours quelque chose de complet, à quoi rien ne manque ; perfection de temps ; perfection de mérite ; emploi métaphorique de ce mot appliqué au mal, quahd le mal est complet; perfection relative à la fin des choses et à leur pourquoi; la mort et la fin des choses ; perfection essentielle ; perfection dérivée.

CHAPITRE XVII. — Définition du mot Terme ; double sens du mot Terme; il peut être aussi bien le point de départ que le point d'arrivée; le Terme se confond avec le pourquoi et le but final; rapports et différences du Terme et du Principe.

CHAPITRE XVIII. — Définition de l'expression de En soi; elle signifie d'abord la forme et l'essence des choses; puis, leur matière et leur sujet; rapports de l'idée de En soi et de l'idée de Cause ; application de cette expression à la position et au CCXCVI lieu; application aux éléments essentiels de la définition ; ap-plication au primitif du genre, et à ce qui n'a pas d'autre cause que soi.

CHAPITRE XIX. — Définition du mot Disposition.

CHAPITRE XX. — Définition du mot Possession ou État ; premier sens dans lequel ce mot peut être pris; second sens de ce mot, qui se confond presque entièrement avec celui de Disposition ; une simple partie de la chose suffit pour la caractériser de celte façon.

CHAPITRE XXI. — Définition du mot Passion ; en un premier sens, c'est la qualité; en un autre sens, c'est la réalisation des qualités, surtout des mauvaises; passion peut avoir aussi le sens de malheur et de grande peine.

CHAPITRE XXII. — Définition du mot Privation ; premier sens, absence d'une qualité qui n'est pas naturelle; second sens, absence d'une qualité de nature, relativement au temps, à la partie, à la condition, à la manière; privation signifie aussi l'ablation des choses; privations exprimées par des particules négatives; privation confondue avec la petitesse de la chose, sa difficulté, ou sa mauvaise disposition; sens vrai du mot Privation.

CHAPITRE XXIII. — Définition du mot Avoir ; d'abord l'idée d'Avoir peUjt se confondre avec l'idée d'action; dans un second sens, Avoir signifie Servir de réceptacle ; Avoir signifie aussi la contenance ; Avoir dans le sens de soutenir, ou dans le sens détenir en cohésion; significations du mot Être correspondant à celle du mot Avoir.

CHAPITRE XXIV. — Définition du mot Provenir; ce mot peut se rapporter à la matière ou au mouvement; il se rapporte aussi au composé et à ses parties; ou bien à l'inverse, il se rapporte aux parties qui forment le tout ; Provenir se rapporte enfin à l'origine et au temps.

CHAPITRE XXV. — Définition du mot Partie ; partie signifie, en général, une division d'une quantité quelconque; en particulier, la division qui mesure exactement le tout; le mot de Partie peut être pris sans aucun rapport à la quantité ; parties du genre, parties de l'espèce, parties de la définition.

CCXCVII  CHAPITRE XXVI. — Définition du mot Tout; double sens de ce mot, pris au sens numérique, ou au sens de totalité; le contenant et l'universel ; le continu et le fini ; emploi simultané des deux sens du mot Tout dans certains cas; exemples divers pour éclaircir ces expressions et leurs nuances.

CHAPITRE XXVII. — Définition du mot Mutilé ou incomplet; ce mot ne s'applique pas indifféremment & une quantité quel-conque ; conditions de l'application régulière de ce mot; position essentielle des parties; continuité et choix spécial des parties; exemples d'une coupe, de l'ablation d'un membre, et de la calvitie.

CHAPITRE XXVIII. — Définition du mot Genre ; le genre est d'a-bord la succession continue d'êtres de même espèce, l'auteur de la race étant un homme ou une femme ; idée commune appliquée à plusieurs espèces; le genre dans les définitions est la notion essentielle; en résumé, le mot de Genre a trois sens principaux ; conditions qui constituent la différence de genre; chaque catégorie forme un genre particulier de l'Être.

CHAPITRE XXIX. — Définition du mot Faux ; deux sens, où le mot Faux indique ce qui ne peut pas être et ce qui n'est pas; fausseté d'un tableau; fausseté d'un rêve; définition fausse; citation d'Antisthène ; fausseté appliquée au mensonge; citation et réfutation de YHippias; théorie insoutenable qui y est exposée sur la volonté dans l'homme faux.

CHAPITRE XXX. — Définition du mot Accident ; l'accident est toujours dans un autre ; il n'est ni nécessaire ni habituel ; le trésor trouvé en faisant un trou; l'accident n'a pas de cause déterminée ; c'est un effet du hasard ; la tempête poussant à Égine, ou la violence des pirates y conduisant, sans qu'on veuille y aller; autre sens du mot Accident; l'attribut d'une chose peut être même éternel, sans faire partie de l'essence ; exemple du triangle.

LIVRE VI

CHAPITRE PREMIER. — Retour à la Philosophie première, qui étu-die l'Être dans toute sa généralité ; différence avec les scien- CCXCVIII ces qui ont un objet spécial ; elles admettent toutes l'existence de leur objet, soit sur le témoignage des sens, soit par hypothèse ; procédé ordinaire de la Physique ; l'objet qu'elle étudie est toujours plus ou moins matériel, mobile et non isolé ; triple division des sciences ; procédé ordinaire des Mathématiques, qui étudient l'immobile, mais un immobile qui est encore matériel ; l'objet de la Théologie ou Philosophie première est l'immobile, éternel et séparé de la matière ; nécessité et supériorité de.la Philosophie première.

CHAPITRE II. — Nuances diverses du mot d'Être; être en soi, être par accident; analyse et définition de l'accident; exemples de l'architecture et de la géométrie ; citation de Platon, critiquant justement les Sophistes; l'accident se rapproche beaucoup du Non-être; nécessité d'étudier l'accident, pour démontrer qu'il n'y a pas pour l'accident de science possible, et que la science ne s'adresse qu'à ce qui est toujours, ou dans la plupart des cas; le froid, dans la Canicule, est un accident, parce que c'est contraire à l'ordre habituel des choses; autres exemples de l'accident; les choses éternelles, ou du moins les plus habituelles, sont l'objet de la science ; et c'est là ce qui fait qu'il n'y a pas de science pour l'accident.

CHAPITRE III. — Tout n'est pas nécessaire dans le monde ; il y a des causes nécessaires; mais il y en a qui ne le sont pas; et il y a des causes indéterminées de l'accidentel et du fortuit. De l'Être considéré en tant que vrai ou faux; ce caractère résulte toujours en lui d'une simple vue de l'esprit, qui combine ou divise les choses ; il n'y a pas à étudier l'Être en tant qu'accidentel ; retour à la véritable étude de l'Être considéré uniquement en tant qu'Être; annonce de quelques autres recherches postérieures.

LIVRE VII

CHAPITRE PREMIER. — Véritable sens du mot d'Être; l'Être considéré en lui-même et dans ses attributs; l'Être est d'abord indispensable, et les modes de l'Être ne viennent qu'à la suite; la catégorie de la substance, ou de l'individuel, est la première de toutes, et les autres s'appuient sur celle-là; l'Être CCXCIX premier est la substance, qui a la priorité en définition, en connaissance, en temps et en nature ; la substance seule est séparable ; les autres catégories ne le sont pas ; la question de l'Être, si ancienne et si controversée, se réduit à celle de la substance.

CHAPITRE II. — La Substance se manifeste surtout dans les corps naturels ; les animaux, les plantes, le feu, l'eau, la terre, le ciel avec les étoiles, le soleil et la lune sont des substances; questions à se poser; opinions diverses des philosophes; Pla-ton et Speusippe ; les Idées et les nombres considérés comme principes des substances; méthode à suivre dans cette étude; énumération des problèmes.

CHAPITRE III. — Quatre sens du mot Substance : Essence, Universel, Genre et Sujet; analyse du sujet; la matière et la forme; le composé qu'elles constituent en se réunissant; la substance n'est jamais un attribut; c'est elles qui reçoit tous les attributs; elle ne peut se confondre avec la matière, non plus qu'avec le composé résultant de la matière et de la forme ; analyse de la forme ; théorie des substances sensibles annoncée.

CHAPITRE IV. — Retour sur l'idée de Substance; condition générale de la science; sens absolu de l'expression: En soi; dif-férences de la catégorie première, de la substance, et des autres catégories; définition de l'Être pris individuellement et en lui-même, ou pris avec une modification quelconque; la définition s'applique surtout aux substances; il ne faut pas la confondre avec la simple appellation; elle s'adresse toujours au primitif; l'Être est surtout dans la catégorie de la substance; mais il est aussi dans les autres d'une façon déterminée ; le Non-Être lui-même Est, mais à l'état de Non-être; les autres catégories n'ont d'Être que par homonymie ; objet primitif et essentiel de la définition; unité absolue de l'être qu'elle fait connaître.

CHAPITRE V. — De la définition appliquée à des termes com-plexes; exemple de l'idée de Camus, qui implique nécessai-rement l'idée de Nez; l'idée de mâle ou de femelle implique nécessairement celle d'animal; et l'idée d'impair, celle de nombre ; difficulté de la définition dans ces cas ; il n'y a de CCC définition véritable que pour les substances; pour les autres catégories, il faut toujours recourir à une addition quelconque; le mot de Définition ne peut avoir qu'une seule signification; il s'applique, ainsi que l'essence, aux substances seu-les, ou du moins plus qu'à tout le reste, et d'une manière primitive et absolue.

CHAPITRE VI. — De l'identité de l'essence d'une chose avec la chose même; distinction nécessaire de la chose et de ses attributs; objection contre la théorie des Idées; impossibilité de la science dans ce système, et destruction nécessaire des êtres ; identité de l'Être en soi et de quelques-uns de ses attributs essentiels; ne pas créer inutilement des êtres qui n'ont rien de réel; il faut prendre garde d'aller à l'infini; la définition de l'Être et celle de ses attributs essentiels sont identiques; réponse aux objections sophistiques. Résumé.

CHAPITRE VII. — Les phénomènes sont de trois espèces, selon que la nature, l'art ou le hasard les produisent; phénomènes naturels; phénomènes que l'art produit; conception de l'esprit nécessairement antérieure à la production de la chose ; succession de raisonnements dans l'esprit du médecin avant d'agir; cette conception s'adresse précisément à l'essence des choses; idée des phénomènes que produit le hasard; pour tout phénomène, il faut toujours admettre quelque chose de préexistant ; la notion de matière est presque toujours impliquée dans la définition ; appellation des choses dérivée du nom de celles d'où elles sortent; exemples divers de la statue et de la maison; cette dérivation est indispensable pour expliquer la notion de changement.

CHAPITRE VIII. — Tout phénomène est soumis à deux conditions : la cause et la matière; exemple de la sphère d'airain; la forme ne se produit pas à proprement parler, parce qu'il faudrait qu'elle fût distincte de l'objet dont elle est la forme ; elle n'existe jamais que dans cet autre objet, c'est-à-dire, dans la matière à laquelle on donne une figure nouvelle; objections contre la théorie des Idées ; elles n'expliquent pas la production des êtres; elles ne font que l'obscurcir; il suffit d'un être qui engendre pour comprendre l'être engen- CCCI dré, même quand le cas n'est pas conforme à la nature; le cheval et le mulet; différence de la matière; identité de l'espèce.

CHAPITRE IX. — Certaines choses peuvent être indifféremment le produit de l'art ou le produit du hasard ; d'autres ne le peu-vent pas; explication de cette différence, qui tient à la matière des choses, douée ou privée d'un mouvement propre, ou de telle espèce particulière de mouvement; homonymie des causes productives avec l'être produit; comparaison avec les syllogismes; action du germe analogue à celle de l'artiste; pour une production quelconque, il faut toujours une matière et une forme préexistantes; condition spéciale de la catégorie de la substance.

CHAPITRE X. — Rapport de la définition du Tout à la définition des parties ; question de l'antériorité du Tout ou des parties ; sens divers du mot Partie ; la partie est, d'une manière générale, la mesure de la quantité ; union de la matière et de la forme pour composer l'être réel; dans la définition, c'est la forme qu'on exprime et non la matière; exemples divers: la ligne, la syllabe, l'angle droit. — Nouvelle exposition des mêmes théories; parties de la définition qui sont antérieures au défini; parties qui y sont postérieures ; exemple de l'angle aigu, qui implique la notion de l'angle droit; le cercle et ses segments ; exemple de l'âme dans l'être animé; elle est antérieure à l'animal, ou tout entière, ou par quelques-unes de ses parties ; fonctions du cœur et du cerveau, essentielles à la notion de l'être animé, et comprises dans sa définition ; il n'y a pas de déflnition pour les individus; il n'y a pour eux que le témoignage des sens; obscurité de la matière ; la matière se distingue en matière sensible et en matière intelligible ; le Tout n'est pas antérieur à ses parties d'une manière absolue; résumé de la question, et solution générale.

CHAPITRE XI. — Des parties de la définition et de la forme; importance de cette discussion ; distinction des parties matérielles et des parties non matérielles; abstraction des parties matérielles; objection contre la théorio des Idées et contre les Pythagoriciens, qui réduisent tout à l'unité; CCCII erreur du jeune Socrate dans la définition de l'animal ; définition de rhomme composé de l'âme et du corps; il n'y a pas de substance séparée des substances sensibles; du rôle de la Physique, qui peut aussi, dans une certaine mesure, s'occuper des définitions; il lui importe de savoir ce que sont les choses en elles-mêmes ; dans la définition de l'essence, il n'y a plus de matière, parce que la matière elle-même est toujours indéterminée ; résumé de celte partie de la théorie.

CHAPITRE XII. — Théorie de la définition, destinée à compléter celle des Analytiques; de l'unité que forme la définition; comment se forme cette unité ; définition par la méthode de division ; exemple de la définition de l'animal; divisions successives des différences qu'il présente ; la dernière différence de la chose est son essence et sa définition ; répétitions inévitables ; ligne directe des divisions successives ; divisions indirectes et accidentelles; la définition est la notion des différences; impossibilité d'intervertir l'ordre où les divisions se succèdent; résumé de cette première théorie.

CHAPITRE XIII. — Théorie de l'universel et du rAle qu'il joue dans la définition; l'universel ne peut jamais être une substance; c'est un terme commun, et c'est un attribut; de la présence de l'universel dans la définition ; il parait être une qualité plutôt qu'une substance ; la substance ne peut être composée de plusieurs substances actuelles; elle peut l'être de substances qui seraient à l'état de simple puissance; citation et approbation d'une théorie de Démocrite ; les atomes, selon lui, sont les substances. Objection contre la théorie précédente ; il n'y a plus de définition possible pour quoi que ce soit, si la définition est indécomposable ; annonce d'une étude ultérieure de cette question.

CHAPITRE XIV. — Critique de la théorie des Idées; les Idées ne peuvent pas être des substances; l'universel ainsi conçu aurait simultanément les contraires; l'Idée se multiplie à l'infini, avec les individus même dans lesquels on la trouve; objections diverses contre les Idées ; impossibilités plus graves encore si Ton applique cette théorie aux choses sensibles.

CCCIII CHAPITRE XV. — La substance peut s'entendre tout à la fois de la notion de l'objet et de sa matière réunies, ou de sa notion pure et immatérielle ; il n'y a, ni définition, ni démonstration pour les substances sensibles ; raison de cette impossibilité ; il n'y a ni science ni définition du particulier, quand bien même le particulier est éternel ; définition du soleil prise pour exemple ; on se trompe en croyant le définir quand on ne fait qu'ajouter à sa notion des épithètes, qui n'éclaircissent rien; critiques diverses contre la théorie des Idées; impossibilité absolue de définir les Idées prises individuellement; on s'en convaincrait aisément en essayant d'en faire une définition régulière.
 

CHAPITRE XVI. — Il ne faut pas confondre les substances vérita-bles et actuelles avec celles qui ne sont qu'à l'état de simple possibilité ; cette confusion pourrait s'appliquer surtout aux parties des animaux ; l'Un et l'Être ne sont pas la substance ; les Universaux le sont encore moins ; objections diverses contre la théorie des Idées; éternité des Astres, que perçoivent nos sens et qu'affirme notre raison.

CHAPITRE XVII. — Exposition nouvelle de l'idée de la substance ; théorie spéciale de l'auteur ; la substance est à la fois principe et cause ; il faut admettre préalablement l'existence de la chose, avant de rechercher ce qu'elle est ; ce qu'elle est se distingue de la chose même ; la vraie recherche est celle de la cause ; la cause peut être, ou le but auquel la chose est destinée, ou le principe initial du mouvement; au fond, cela revient toujours à rechercher la cause de la matière; exemples divers; composition de la chair; composition de la syllabe ; les éléments de la chair, les lettres de la syllabe, subsistent même après que la chair et la syllabe ne subsistent plus; ce quelque chose qui forme la syllabe et la chair est la substance; ce n'est pas un élément, ni un composé d'éléments ; à un certain point de vue, la nature pourrait être prise pour la substance des choses, comme l'ont cru quelques philosophes.

CCCIV LIVRE VIII

CHAPITRE PREMIER. — Conséquences et résumé de ce qui précède; substances admises par tous les systèmes : les corps simples de la nature, les plantes, les animaux, le ciel, etc. ; quelques philosophes y joignent les Idées et les êtres mathé-matiques; des substances sensibles; matière et forme; composé résultant de l'une et de l'autre; explication détaillée de ce qu'il faut entendre par Sujet; citation de la Physique.

CHAPITRE II. — De la substance sensible ; Démocrite ne reconnaît que trois différences dans les choses; il y en a bien davantage; énumération de quelques différences des choses; . la substance a tous ces aspects divers; et cependant elle ne se confond pas avec ses différences; l'acte des choses diffère en même temps que la matière; exemples de quelques définitions : un seuil de porte, une maison, un accord musical ; exemple d'une définition matérielle ; exemple d'une définition relative à l'acte même de la chose et à sa forme spécifique; définitions d'Archytas réunissant les deux caractères; définition du temps serein; définition du calme de la mer ; résumé de cette discussion ; distinction des trois éléments de la substance : la matière, la forme, et le composé réel résultant des deux.

CHAPITRE III. — Incertitude sur la signification du nom des choses, qui peut exprimer la substance seule, ou la substance mêlée à la matière ; exemples divers de cette incertitude; de la substance des choses périssables; elle est inséparable de ces choses ; la nature est plutôt leur substance ; réfutation des théories de l'école d'Antisthène sur l'impossibilité de définir quoi que ce soit; on peut toujours définir la substance concrète ; comparaison de la définition et du nombre; leurs rapports et leurs différences; critique de quelques théories.

CHAPITRE IV. — De la substance matérielle; chaque chose a sa matière propre ; exemple du phlegme dans le corps humain ; une chose peut venir d'une autre de plusieurs façons; nécessité absolue de certaine matière pour certains objets ; une CCCV scie ne peut être, ni en bois, ni en laine; pour la cause des phénomènes, il faut distinguer les acceptions diverses» du mot Cause ; exemple de la cause matérielle de l'homme ; des substances naturelles et éternelles; souvent elles n'ont pas de matière; cause de l'éclipsé de lune; phénomène du sommeil.

CHAPITRE V, — Tous les contraires ne peuvent pas venir les uns des autres; il y a des choses sans matière; de>la matière des contraires et de son rapport à chacun d'eux ; rapports de l'eau au vin et au vinaigre; loi de la transformation intermédiaire de l'un des contraires, avant qu'il ne passe à son contraire opposé; rapports du vivant et du mort; passage de l'un à l'autre, comme la nuit vient du jour; le vinaigre redevient eau avant de devenir vin.

CHAPITRE VI. — De l'unité des définitions et des nombres ; la cause spéciale de l'unité de la définition, c'est l'unité môme du défini; exemple de la définition et de l'unité de l'homme; critique de la théorie des Idées, qui ne peut pas fournir une définition exacte des choses ; pour établir une définition so-lide, il suffit de distinguer la matière et la forme ; distinction également nécessaire de la matière intelligible et de la matière sensible ; pour les choses sans matière, on sait immédiatement ce qu'elles sont, et sans l'intermédiaire d'une définition; critique de la théorie de la participation et d'autres explications aussi vaines; Lycophron; résumé de cette discussion.

LIVRE IX

CHAPITRE PREMIER. — De la puissance ou simple possibilité opposée à l'acte et à la réalité ; de la puissance ; idée qu'on doit se faire de la puissance prise au vrai sens du mot; élimination des homonymies ; sens multiples du mot de Puis-, sance; il s'entend aussi bien au sens passif qu'au sens actif; puissance de souffrir, ou défaire, l'action qui vient d'un autre, ou qui s'exerce sur un autre; l'être ne peut rien souffrir de lui-môme; de l'impuissance et de la privation.

CCCVI CHAPITRE II. — Des diverses espèces de Puissances ; les unes sont douées de raison ; les autres, irraisonnables ; les arts et les sciences; les puissances rationnelles peuvent produire tour à tour les contraires; les puissances sans raison ne produisent jqpi'un seul et même effet; supériorité de la science; action et procédé de l'esprit; faire bien, suppose la puissance de faire; mais la réciproque n'est pas toujours vraie.

CHAPITRE III. — Réfutation des Mégariques, qui identifient l'acte et la puissance ; conséquences fausses de cette théorie ; c'est revenir au système de Protagore et ramener tout à la sensation ; c'est supprimer le mouvement et la production des choses ; distinction nécessaire de l'acte et de la puissance ; vraie signification du mot d'Acte ; il ne faut pas confondre l'acte et le mouvement, qui ne peut jamais appartenir à ce qui n'est pas.

CHAPITRE IV. — Le possible dans son sens véritable doit toujours pouvoir se réaliser; exemple du diamètre, qui est toujours incommensurable; distinction de l'erreur et de l'impossible; l'impossible est ce qui ne peut jamais être sous quelque rapport que ce soit; enchaînement nécessaire des choses corrélatives; démonstration littérale de la solidarité de l'un des .termes avec l'autre.

CHAPITRE V. —Puissances ou facultés naturelles; facultés ac-quises; exercées avec réilexion, ou sans raison; les facultés instinctives ont un champ d'action très limité et toujours le même; les facultés rationnelles peuvent faire les contraires; mais elles ne peuvent pas les faire à la fois ; conditions générales pour l'exercice des facultés.

CHAPITRE VI. — De l'Acte et de ses nuances diverses ; distinction de l'acte et de la puissance ; exemples de différents actes opposés à la simple faculté; puissances corrélatives aux actes; application spéciale des mots d'Acte et de Puissance à l'infini; des différentes sortes d'actions qui supposent toujours le mouvement; des actions qui ne le supposent pas; tout mouvement est nécessairement incomplet ; distinction qu'on doit faire entre l'acte et le mouvement; résumé de cette discussion.

CCCVII CHAPITAE VII. — Étude de la notion de Puissance; cas précis où une chose est, ou n'est pas, en puissance; il faut,pour que la chose soit dite en puissance, que rien ne la sépare de l'acte ; exemples divers cités à l'appui de la théorie ; on peut toujours remonter à un primitif, qui n'est pas lui-même en puissance, mais qui est la source d'où vient, par intermédiaire, l'objet qui est vraiment et directement en puissance.

CHAPITRE VIII. — Antériorité de l'Acte sur la Puissance ; démonstration de ce principe au point dé vue de la raison, et au point de vue du temps ; l'être en puissance vient toujours d'un être actuellement réel ; réfutation d'un sophisme qui nie la possibilité de la science ; l'acte est antérieur à la puissance sous le rapport de la substance; la postériorité de génération n'empêche pas l'antériorité d'espèce et de substance; prbcédé de la nature; l'Hermès de Pauson; étymo-logie du mot d'Acte et sens précis qu'il faut y donner; actes qui n'ont pas de conséquences hors d'eux-mêmes ; actes qui produisent des conséquences extérieures; on peut quelquefois remonter d'acte en acte jusqu'au moteur premier et éternel ; rien d'éternel n'est en puissance ; ou du moins, il n'est en puissance que partiellement; toutes les choses éternelles sont en acte; le soleil, les astres, le ciel entier, sont toujours en action ; critique des philosophes physiciens, qui redoutent la fin des choses ; mouvement indéfectible de la terre et du feu ; critique de la théorie des Idées ; résumé de cette discussion.

CHAPITRE IX. — L'acte du bien vaut mieux que la simple puis-sance du bien ; la puissance peut être l'un ou l'autre des contraires; et comme l'un des deux contraires est le bien, il est supérieur & ce qui pourrait aussi être le mal ; en fait de mal, l'acte est pire que la puissance ; le mal ne peut se trouver, ni dans les principes, ni dans les choses éternelles ; en réalisant les choses, on peut se convaincre que l'acte est au-dessus de la puissance ; exemples divers pris dans la géométrie.

CHAPITRE X. — Le caractère éminent de l'Être, c'est le vrai ou le faux; la nature de la vérité ou de l'erreur consiste à réunir, ou à séparer, certaines notions; les choses ne changent pas avec l'idée qu'on s'en fait; mais nous devons régler CCCVIII nos pensées d'après les choses; l'unité immobile des choses empêche qu'il n'y ait pour elles alternative de vérité et d'erreur; il faut simplement les percevoir; si on ne les perçoit pas, il n'y a pas d'erreur, il n'y a qu'ignorance ; les choses immobiles n'ont pas d'alternative de temps; les propriétés du triangle sont constantes, et elles ne changent jamais.

LIVRE X

CHAPITRE PREMIER. — Acceptions diverses du mot "d'Unité : quatre nuances principales ; l'idée de continuité est impliquée dans celle d'unité; conditions du continu et du mouvement; unité substantielle; unité de définition ; unité individuelle; unité par attribut universel ; distinction nécessaire des objets qu'on appelle Uns, et de l'unité considérée dans son essence; application de cette distinction aux deux mots de Cause et d'Élément; l'unité se rapporte à la quantité plus spécialement qu'à toute autre catégorie ; idée générale de la mesure; la mesure est toujours homogène à l'objet mesuré; exemples divers, des grandeurs, des mouvements, de la science et de la sensation ; mesure des choses ; réfutation de Protagore.

CHAPITRE II. — De l'essence de l'unité ; elle est une substance réelle, selon les Pythagoriciens et Platon; l'opinion des Physiciens est plus près de la vérité; l'universel ne peut être une réalité en dehors des choses; rapports et identité de l'Être et de l'Un; ils ne sont substances, ni l'un, ni l'autre; ce sont de simples universaux ; exemples divers des couleurs, des sons musicaux, des articulations du langage; démonstration de fidentité de l'Être et de l'Un; ils accompagnent toutes les catégories, sans être dans aucune.

CHAPITRE III. — Opposition de l'unité et de la pluralité ; la première répondant à l'indivisible; et la seconde, au divisible] caractères de l'unité ; caractères de la pluralité ; l'identité, la ressemblance et l'égalité; le même et l'autre; différent et hétérogène ; nuances diverses de toutes ces expressions ; les choses ne peuvent différer que par le genre ou l'espèce ; les CCCIX contraires ne sont au fond que des différences; résumé de ces théories, indiquées déjà ailleurs.

CHAPITRE IV. — L'opposition par contraires est la plus grande différence possible; c'est la différence parfaite et finie; définition de cette différence ; elle a lieu surtout dans les genres et les espèces; nuances diverses de l'opposition par contraires : la contradiction, la privation, l'opposition par contraires, et les relatifs ; distinction de la privation et de la contradiction; rapports de ces deux termes; privation absolue ou partielle; le contraire est toujours la privation de l'autre contraire.

CHAPITRE V. — De l'opposition de l'unité et de la pluralité ; de l'opposition de l'égal au plus grand et au plus petit ; manières diverses de concevoir la relation de l'égal aux deux autres termes; l'égal est la négation privative des deux, puisqu'il n'est l'égal, ni de l'un, ni de l'autre; application de cette théorie aux couleurs différentes ; pour être réellement opposées et avoir un intermédiaire, les choses doivent être dans le même genre.

CHAPITRE VI. — Suite de l'opposition de l'unité et de la pluralité; cette opposition n'est pas absolue; opposition de Peu et de Beaucoup ; opposition de Un et de Deux ; la première pluralité, c'est Deux; réfutation d'Anaxagore; de l'unité et de la pluralité numériques; leur opposition est celle des relatifs; rapports de la science & l'objet su ; différence de ce rapport avec le rapport de l'unité & la pluralité ; dans les nombres, l'unité est toujours la mesure.

CHAPITRE VII. — De la nature des intermédiaires ; ils tirent toujours leur origine des contraires; ils sont dans le même genre qu'eux ; exemples des sons et des couleurs ; les inter-médiaires sont toujours placés entre des opposés; il n'y a pas d'intermédiaires pour la contradiction ; râle des inter-médiaires dans les relatifs, dans les privatifs, et dans les* contraires proprement dits; exemples du blanc et du noir pris pour extrêmes ; nature spéciale des intermédiaires ; leur rapport aux contraires et aux différences; résumé de la théorie des intermédiaires et des contraires.

CCCX. CHAPITRE VIII. — Rapports du genre et de l'espèce; la différence d'espèce implique l'identité du genre ; c'est la différence qui fait la vérité du genre ; la différence est une opposition par contraires ; l'opposition par contraires est la différence parfaite ; les contraires àont toujours dans le même ordre de catégorie ; et ils sont les extrémités du genre, puisqu'il y a entre eux la plus grande distance possible; lés espèces ne peuvent, ni être identiques au genre, ni différer de lui spécifiquement.

CHAPITRE IX. — La différence des sexes n'est pas une différence d'espèce, bien qu'elle soit essentielle; origine des différences spécifiques ; distinction de la définition essentielle d'une chose et de sa matière ; il n'y a de différence d'espèce que dans le cas où la définition essentielle est différente; la matière n'y importe pas ; les qualités accidentelles des êtres ne sont pas des différences d'espèce; exemples divers; solution de la question relative aux sexes; résumé de cette théorie.

CHAPITRE X. — Opposition des contraires, comme celle du périssable et de l'impérissable ; ce ne sont pas là des contraires accidentels; ils font partie de l'essence des êtres, et ce sont des attributs nécessaires partout où ils apparaissent; argument nouveau tiré de cette théorie contre le système des Idées.

LIVRE XI

CHAPITRE PREMIER. — De la nature de la philosophie : forme-t-elle une science unique, ou se compose-t-elle de plusieurs sciences? De la science qui s'occupe de la démonstration des choses; la philosophie s'occupe-t-elle de toutes les subtances, ou de certaines d'entre elles? S'occupe-t-elle des accidents? Citation de la Physique; critique de la théorie des Idées ; de la nature des êtres mathématiques ; la philosophie peut être définie la science des Universaux, c'est-à-dire des genres les plus généraux, l'Un et l'Être.

CHAPITRE II. — Questions diverses sur la possibilité d'une substance en dehors des substances sensibles et individuelles ; CCCXI difficultés des deux solutions en sens contraire; l'Être et l'Un ne peuvent pas servir de principes universels; les lignes ne peuvent pas davantage être prises pour principes ; de la nature de la science et des objets sur lesquels elle peut porter; du rôle de l'espèce et de la forme; il y a des cas où l'espèce et la forme ne peuvent point subsister en dehors des objets; identité et diversité des principes.

CHAPITRE III. — La philosophie est la science de l'Être en tant qu'Être ; acceptions diverses du mot Être, ainsi que d'autres mots: Médical, Hygiénique; l'Être et l'Un peuvent se con-fondre ; relations des contraires, opposés et dénommés par privation ; le procédé d'abstraction qu'emploient les Mathématiques peut s'appliquer à l'étude de l'Être en tant qu'Être ; on considère l'Être en soi, sans regarder & ses attributs et à ses conditions ; c'est le rôle propre de la philosophie.

CHAPITRE IV. — Différents points de vue des Mathématiques, de la Physique et de la Philosophie ; la science mathématique et la Physique ne s'occupent que de certains accidents de l'Être ; la Philosophie première est la seule qui s'occupe de l'Être en tant, qu'Être, dans toute sa généralité.

CHAPITRE V. — Importance du principe de contradiction énoncé sous cette forme : « Une même chose ne peut en un même temps être et n'être pas » ; il n'y a pas de démonstration possible pour ce principe, parce qu'il n'y en a pas de plus certain; réfutation du principe contraire; méthode à suivre pour cette réfutation; argument personnel; nécessité de définir clairement les mots dont on se sert; Heraclite combattu par sa propre doctrine ; on arrive, avec un tel système, à confondre toutes choses, et à rendre toute discussion absolument impossible.

CHAPITRE VI. — Réfutation du système de Protagore, faisant de l'homme la mesure des choses ; origine de cette doctrine ; citation de la Physique; causes de la différence des sensations d'un homme ' à un autre homme ; expérience de l'oeil qui voit les objets doubles, sous certaine pression; il ne faut chercher la vérité que dans'les choses immuables; les corps célestes; contradictions dans la doctrine de Protagore, prouvées par la théorie du mouvement; ces philosophes se con- CCCXII tredisent eux-mêmes ; et, dans la pratique, ils se conduisent comme s'ils ne croyaient pas à leur propre système ; exemples de l'alimentation ; effets des maladies sur nos sensations; vice de méthode dans ces systèmes philosophiques; Heraclite et Anaxagore également condamnés; tout n'est pas dans tout; deux propositions contraires ne peuvent être également vraies.

CHAPITRE VII. — Définition du but de la science ; procédés de toutes les sciences; division et différences des sciences; objet propre de la Physique ; sa méthode et sa nature ; objets et méthode des sciences productrices, pratiques et théoriques; science de la substance séparée et immobile; trois principales sciences d'observation théorique : la Physique, les Mathématiques, et la Théologie ; cette dernière est la plus plus haute des sciences théoriques, c'est la science du divin ; et elle est universelle, puisqu'elle étudie l'Être en tant qu'Être.

CHAPITRE ViII. — Théorie de l'Être pris au sens accidentel; la science ne peut jamais s'appliquer à l'accident; exemples de diverses sciences ; rôle particulier de la Sophistique, Jus-tement définie et blâmée par Platon ; définition de l'accident; causes et principes particuliers de l'accident ; autrement, tout serait nécessaire dans le monde; notion exacte de l'Être en soi et non accidentel, combinée avec la pensée ou en dehors d'elle ; limites du hasard ; il n'y a pas de hasard dans la nature, ni dans l'Intelligence; les causes du hasard sont indéfinies comme lui; elles restent toujours obscures pour l'homme; l'Intelligence et la nature sont antérieures et supérieures au hasard.

CHAPITRE IX. — Distinction de l'acte et de la puissance, applicable à toutes les catégories; théorie du mouvement; il est nécessairement dans les choses, et ses espèces sont aussi nombreuses que celles de l'Être; définition du mouvement; il est l'acte du possible en tant que possible ; justification de cette théorie; exemples divers; réfutation des théories contraires ; on ne saurait définir le mouvement autrement qu'on ne le fait ici; cause de la difficulté qu'on trouve à bien défi-• nir le mouvement; c'est qu'il est indéterminé ; il n'est précisément, ni en puissance, ni en acte ; il n'est qu'un acte in- CCCXIII complet, acte obscur, mais réel ; le mouvement est dans le mobile ; le mouvement est tout à la fois l'acte du mobile et l'acte du moteur; il n'y a qu'un seul et même acte pour les deux ; exemples divers de cette unité, dans les nombres et dans l'espace.

CHAPITRE X. — De l'infini; définitions diverses qu'on en peut donner; l'infini n'est pas perceptible à la sensation; il est indivisible au sens où l'on dit de la voix qu'elle est invisible ; l'infini est en soi et non par accident; il n'est jamais actuel ; il ne peut avoir, ni parties, ni divisions ; il ne peut pas y avoir de corps sensible qui soit infini ; l'infini ne peut être, ni composé, ni simple; il n'est pas composé, parce que les éléments sont en nombre fini; il ne peut pas davantage être simple, parce qu'alors il serait seul des éléments et remplirait le monde; citation d'Heraclite; l'infini ne peut être un corps, parce qu'alors il aurait un lieu ; il ne peut être, ni homogène, ni composé de parties hétérogènes ; le lieu des corps ne peut pas être infini, non plus que le corps lui-même ; l'infini ne peut être affecté dans aucune de ses parties; il ne peut avoir non plus de position; aucune des six espèces du lieu ne peut lui convenir; toutes les directions sont finies ; et celles de l'infini ne le sont pas ; l'infini n'a, ni antérieur, ni postérieur.

CHAPITBE XI. — Définition du changement; le changement peut être absolu ou partiel ; rapport du changement au mouve-ment ; différence du mobile ; différence du moteur; le mobile et le moteur peuvent être absolus, ou partiels, ou primitifs; le changement n'a lieu que dans les contraires, dans les termes moyens et dans la contradiction ; il n'y a que trois changements possibles d'un sujet à un sujet, de ce qui n'est pas sujet & un sujet, et enfin d'un sujet à ce qui n'est pas sujet; il n'y a pas de changement possible de ce qui n'est pas sujet à ce qui n'est pas sujet; le changement de sujet à  sujet, par contradiction, est une génération absolue; le changement de sujet en ce qui n'est pas sujet est une destruction absolue; le Non-Être et le possible ne peuvent avoir de mouvement; la destruction n'est pas non plus un mouvement; la destruction et la génération sont des termes de la contradiction; rôle de la privation.

CCCXIV CHAPITRE XII. — Le moutement ne peut être que dans les trois catégories, de la qualité, de la quantité, et du lieu; il n'y a pas mouvement de mouvement, changement de changement, production de production; un mouvement ultérieur suppose l'antérieur; nécessité d'une matière où se produit le changement; il n'y a de mouvement que dans les catégories où il peut y avoir opposition de contraires; définition de plusieurs termes indispensables dans ces théories ; immobile, repos, simultanéité de lieu, contact, conséquence, continuité, contiguïté, combinaison, succession sans contact ni contiguïté; différence des points et des unités; les points se touchent; les unités ne se touchent pas; les uns ont des intermédiaires ; les autres ne peuvent en avoir.

LIVRE XII

CHAPITRE PREMIER. — De la substance ; son importance dans le monde; la qualité et,la quantité ne .viennent qu'en sous-ordre, et elles n'ont qu'une réalité secondaire ; recherches des anciens philosophes supérieures à celles des philosophes plus récents, en ce qu'elles étaient plus particulières ; trois substances : l'une sensible et éternelle ; l'autre sensible et périssable; la troisième immobile, comprenant les espèces et les entités mathématiques ; division des écoles ; les deux premières substances sont étudiées par la Physique; la troisième est l'objet d'une science spéciale.

CHAPITRE II. — Condition essentielle du changement; il faut qu'il y ait un sujet qui soit permanent pour que le change-ment puisse s'y opérer d'un contraire à l'autre; c'est la matière ; quatre espèces de changement dans quatre des catégories seulement; le changement est le passage de la puissance à la réalité; citations d'Anaxagore, d'Empédocle, d'Anaximandre, de Démocrite ; . des diverses espèces de Non-Être ; trois causes : la forme, la privation et la matière.

CHAPITRE III. — La matière et la forme sont constantes ; trois conditions du changement; nécessité d'un point d'arrêt pour ne pas se perdre dans l'infini; toute substance dans la nature CCCXV vient d'une autre substance de même nom; trois substances distinctes, matière, forme naturelle, individualité; citation et louange de Platon; probabilité de substance permanente; rôle de l'âme, et surtout dans l'entendement; réfutation du système des Idées, en ce qui concerne les individus dans la nature ; simultanéité de la définition et du défini.

CHAPITRE IV. — Les principes et les causes ne peuvent être iden-tiques pour toutes choses; exemple des substances et des relatifs, dont les principes ne peuvent être les mêmes; sens où Ton peut dire que les principes sont communs; différence du principe et de l'élément; principes généraux au nombre de trois : forme, privation et matière ; on peut compter aussi trois causes ; mais on peut aussi en compter quatre, principes ou causes, en y ajoutant le moteur premier, qui meut tout l'univers.

CHAPITRE V. — Rôle des substances ; elles sont les premières entre toutes les choses; identité et diversité des principes; rapport de l'acte et de la puissance ; la matière n'est jamais qu'en puissance, afin de recevoir tour & tour les contraires; exemple des causes et des éléments de l'homme; des Universaux ; c'est l'individu qui produit l'individu ; l'universel n'a pas d'existence réelle ; principes généraux ; diversités d'applications qu'ils peuvent recevoir; les primitifs sont nécessairement en acte.

CHAPITRE VI. — Nécessité d'une substance éternelle et immobile ; le mouvement est éternel, ainsi que la durée; le temps et le mouvement se mesurent mutuellement et se confondent; l'acte est indispensable au mouvement; la puissance n'y suffit pas; critique de la théorie des Idées; il faut une substance éternelle et immatérielle; question de l'antériorité entre l'acte et la puissance ; opinions des Théologues et des Naturalistes ; Leucippe et Platon soutiennent l'éternité de l'acte ; question du premier principe ; lacune dans la théorie de Platon ; l'antériorité de l'acte sur la puissance est soutenue par Ânaxagore, Empédocle et Leucippe; uniformité et régularité périodique de l'univers ; condition de la production et de la destruction éternelles des choses; nécessité d'un premier principe actuel et agissant sur un autre prin- CCCXVI cipe ; les deux principes réunis sont causes de la diversité éternelle des phénomènes.

CHAPITRE VII. — Conséquences de l'éternité du mouvement; nécessité d'un être éternel qui le produise et le maintienne ; opinion qu'on peut se faire de ce mouvement produit par un être immobile ; action qu'exerce l'objet désiré sur les êtres qui le désirent; nécessité de diverses nuances; nécessité de l'absolu, principe auquel sont suspendus l'univers et la na-ture ; la vie de Dieu, autant que l'homme peut la concevoir d'après la sienne propre ; comment l'intelligence et l'intelli-gible peuvent se confondre ; définition de Dieu ; son éternelle félicité de contemplation ; erreur des Pythagoriciens et de Speusippe, qui font le germe antérieur à l'être d'où le germe est sorti. Le principe éternel ne peut avoir aucune grandeur, ni finie, ni infinie.

CHAPITRE VIII. — Théorie de la substance éternelle; insuffisance du système des Idées sur cette question ; unité de la substance éternelle ; rôle des astres et des planètes ; il y a autant de substances éternelles que de planètes diverses ; caractère spécial de l'astronomie, entre toutes les sciences ; recherches particulières de l'auteur; système d'Eudoxe sur le soleil et la lune, sur les planètes et les étoiles fixes; système analogue de Callippe ; nombre des sphères élevé à quarante-sept; multiplicité des substances éternelles ; unité du ciel, et unité du moteur; traditions vénérables de l'antiquité; les astres sont des Dieux, et la divinité enveloppe la nature entière; utilité de ces grandes croyances, dégagées des fables dont elles sont obscurcies.

CHAPITRE IX. — Théorie de l'intelligence divine ; Dieu doit penser sans cesse, et c'est là sa dignité propre; il doit penser à ce qu'il y a de plus grand, et il ne doit jamais changer; l'intelligence ne peut que se penser elle-même, puisqu'elle est ce qu'il y a de plus grand dans l'univers ; la pensée et l'objet pensé, tous deux immatériels, se confondent dans l'intelli-gence de Dieu ; comparaison de l'intelligence humaine avec l'intelligence divine.

CHAPITRE X. — Du bien et de la perfection dans l'univers; néces-sité de l'ordre dans le monde; organisations diverses des CCXVII différents êtres ; comparaison de l'univers et d'une famille bien réglée ; harmonie de l'ensemble des choses ; opinions des philosophes sur ce sujet; erreurs insoutenables d'Empé-docle, d'Anaxagore, et de quelques autres; la théorie de deux principes contraires dans l'univers est fausse; insuffisance de la théorie des Idées; supériorité de la théorie nouvelle ; opinions des Théologues et des Physiciens ; nécessité absolue d'un principe premier, supérieur à tous les autres; sans lui, l'ensemble des choses n'est qu'une succession d'épisodes qui n'ont aucun lien entre eux ; l'univers est régi par un seul principe souverain ; citation d'un vers d'Homère.

LIVRE XIII

CHAPITRE PREMIER. — Citation de la Physique; utilité de l'examen des opinions antérieures sur la substance immobile et éternelle, en dehors des choses sensibles; deux doctrines différentes sur cette question ; théorie des êtres mathématiques, et théorie des Idées, tantôt distinctes l'une de l'autre et tantôt confondues ; étudier d'abord les êtres mathématiques, et ensuite les Idées; citation des Traités Exotériques; opinions diverses sur les êtres mathématiques.

CHAPITRE II. — Citation des Questions antérieurement énoncées ; de la nature des êtres mathématiques ; ils sont indivisibles ; ils ne peuvent être isolés des choses sensibles ; démonstration de cette proposition par l'étude des surfaces, des lignes et des points, et par l'étude des nombres; exemples des diverses sciences, astronomie, géométrie, optique, harmonie; impossibilité de comprendre l'unité dans les êtres mathématiques ; formation des êtres mathématiques ; succession des dimensions qui les forment; antériorité et postériorité logiques et substantielles ; différence de la Logique et de la réalité ; les êtres mathématiques ne sont pas des substances ; ils ne sont pas séparés des choses sensibles, et ils n'en font point partie; ils n'existent que dans un sens indirect 8t tout relatif.

CCCXVIII. CHAPITRE III. — De la nature propre des Mathématiques; point de vue exclusif d'où elles considèrent les choses ; procédés des autres sciences; procédés de la Géométrie; exactitude et simplicité des Mathématiques, à cause de la simplicité même des objets abstraits qu'elles étudient; méthode générale des Mathématiques ; méthodes spéciales de l'Harmonie, de l'Optique et de la Mécanique; hypothèses permises à l'arithméticien et au géomètre; critiques injustes élevées contre les Mathématiques; elles s'occupent aussi à leur manière du bien et du beau ; indication de nouvelles recherches sur la nature des Mathématiques; certitude des êtres dont les Mathématiques s'occupent.

CHAPITRE IV. — Critique de la théorie des Idées ; cette théorie est venue de celle d'Heraclite sur le flux perpétuel de toutes choses; le rôle de Socrate a été surtout moral; Démocrite et les Pythagoriciens; deux grands mérites de Socrate; il emploie l'induction et la définition ; il n'a jamais admis que les Universaux fussent séparés des choses ; erreurs des fon-dateurs de la théorie des Idées; ils multiplient les êtres inutilement; insuffisance de leurs démonstrations; contra-dictions où ils tombent; objections diverses; de la participa-tion des Idées.

CHAPITRE V. — Suite de la critique de la théorie des Idées ; les Idées ne peuvent servir en rien à faire comprendre les choses sensibles, éternelles ou périssables; elles n'en sont pas la substance; réfutation d'Anaxagore et d'Eudoxe; les Idées ne peuvent pas être les exemplaires des choses, et ce sont là de vains mots et de simples métaphores ; les choses auraient ainsi plusieurs modèles ; la substance d'une chose ne peut être séparée de cette chose, comme on le fait pour les Idées; citation du Phédon; condamnation générale de la théorie des Idées.

CHAPITRE VI.— Critique de la théorie des Nombres; diverses manières de comprendre la nature du nombre ; explication du nombre mathématique; trois espèces de nombres; opinions des philosophes sur cette question ; doctrine particulière des Pythagoriciens ; ils font des nombres la substance des choses sensibles; théorie contraire du nombre idéal: CCCXIX théorie dut nombre appliquée également aux longueurs, aux surfaces et aux solides ; réfutation générale de toutes ces doctrines sur les Nombres.

CHAPITRE VII. — Suite de la critique de la théorie des Nombres; question de savoir si les unités peuvent ou ne peuvent pas se combiner; les Idées ne peuvent pas être des nombres; de la formation des nombres; réfutation de quelques erreurs; insuffisance de la théorie qui fait sortir tous les nombres de l'unité et de la Dyade indéterminée; conséquences insoutenables qui en résultent; difficultés réelles de la théorie des Nombres ; on peut soutenir que les unités sont différentes les unes des autres, ou qu'elles ne présentent aucune différence; nature particulière des unités dont le nombre se compose; elles sont sans aucune différence; réponse aux systèmes contraires.

CHAPITRE VIII. — De la différence dû nombre et de l'unité; rap-ports des unités entré elles ; erreur de la théorie des Idées et de la théorie des êtres mathématiques ; citation de Platon ; on ne peut identifier le nombre idéal et le nombre mathématique; réfutation des théories des Pythagoriciens; le nombre né peut pas être séparé des choses, comme on le prétend; objections diverses; de la nature de l'unité, prise pour principe des nombres; les Pythagoriciens ont eu tort de vouloir étudier à la fois les êtres mathématiques et les Universaux ; ils en arrivent à faire le nombre Detix antérieur au nombre, Un.

CHAPITRE IX. — De la formation des nombres; fausse explication 1 de quelques philosophes; notion dtf la grandeur; difficultés <Jùe présentent tontes ces théories ;' rapports vrais de l'unité et de la pluralité; de la notion du point géométrique; le nombre et la grandeur ne peuvent être séparés des choses ; différence du nombre ' idéal et dh nombre mathématique ; confusion des Idées et des êtres mathématiques; critique spéciale de la théorie des Idées; citation d'Épicharme; origine réelle de la théorie des idées; rôle de Socrate, qui n'adopta pas cette théorie, en ce qu'elle sépare les Idées et les ' choses sensibles ; notion fausse de la réalité des choses.

CCCXXX. CHAPITRE X. — Suite de la critique de la théorie des Idées; égale difficulté de les admettre et de les repousser; objections dans les deux sens; démonstration sur les lettres prises comme éléments des mots ; par les Idées, on multiplie les éléments des choses & l'infini, et l'on rend dès lors la science impossible ; nécessité absolue des Universaux pour consti-' tuep 1& science ; double sens des mots Science et Savoir, en simple puissance et en acte; la puissance est la matière de l'universel, et elle est indéterminée; l'acte est toujours déterminé dans un objet individuel; exemples de la vue et de la couleur; les principes sont nécessairement universels; les deux aspects de la science.

LIVRE XIV

CHAPITRE PREMIER. — Retour sur la théorie des Contraires ; il leur faut toujours un sujet substantiel, dans lequel s'opère le passage d'un contraire à l'autre; théories diverses qui cherchent dans les contraires l'origine des nombres ; le grand et le petit, l'égal et l'inégal, le surpassant et le surpassé ; le peu et le beaucoup; l'unité et la multiplicité; l'unité est la véritable mesure ; son râle essentiel ; tout le reste n'est que du relatif; nature véritable de la relation; elle a moins de substance que toute autre catégorie; le nombre ne peut pas n'être qu'une relation.

CHAPITRE II. — De la composition des choses éternelles; elles sont sans éléments; de la nature éternelle des nombres; ex* plications diverses qui en ont été données; erreurs de quelques philosophes; objection de Parménide, et réponse à cette objection ; acceptions diverses du mot d'Être ; ce qu'on doit entendre par le Non-Être; distinction du Non-Être et de l'Être en puissance ; nuances des diverses catégories ; question de la multiplicité des êtres, au point de vue de chacune des catégories successives; solutions incomplètes qu'a essayées le système des Idées; les nombres ne sont pas des idées; et, comme tels, ils ne sont pas causes des choses; inutilité du nombre idéal; caractère véritable des théories arithmétiques.

CCCXXl CHAPITRE III. — Suite de la critique de la théorie des Idées ; doctrine et erreur des Pythagoriciens; ils sont dans le vrai quand ils ne séparent pas les nombres et les choses ; théories diverses, où ils ne tiennent pas assez compte des faits tels que nos sens les observent en ce monde; opinion de quelques philosophes sur le rôle des limites dans la composition des corps ; les limites ne peuvent pas être des substances ; ordre et régularité des œuvres de la nature ; théories des premiers philosophes, qui ont admis le nombre idéal et le nombre mathématique; défauts de toutes ces théories; on peut leur appliquer le mot de Simonide sur les discours sans fin; les Pythagoriciens essaient d'expliquer l'origine des choses; leurs recherches sur l'univers sont surtout physiques; et l'on ne peut s'en occuper qu'indirectement dans la présente étude.

CHAPITRE IV. — Suite de la critique de la théorie des Idées et des Nombres; question nouvelle sur le rapport du bien et du beau avec les principes ; opinion des Théologues contemporains et des plus anciens poètes sur l'unité dans l'ordre universel des choses; citations dePhérécyde, des Mages, d'Ero-pédocle, d'Anaxagore ; difficulté de comprendre ce que c'est que le bien dans la théorie des Idées; confusion fâcheuse du bien et du mal dans plusieurs systèmes ; causes générales de ces erreurs.

CHAPITRE V. — Suite de la critique de la théorie des Nombres; les nombres ne sont pas les premiers éléments des choses ; dans quelle mesure on peut dire que le nombre se môle aux choses; le nombre ne peut pas venir des contraires; le nombre est impérissable, tandis que les contraires sont essentiellement périssables; erreur d'Eurytus; les nombres ne peuvent être à aucun titre causes des choses ; ils ne sont, ni cause substantielle, ni cause efficiente, ni cause finale.

CHAPITRE VI. — Suite et fin de la critique de la théorie des Nombres ; rapport du Bien au nombre ; importance de la pro-portion dans la composition des choses; de la vraie nature du mélange; application des nombres au mouvement des corps célestes ; vanité de ces théories ; les nombres ne peuvent être causes ; et souvent l'identité de nombre dans les CCCXXII choses les plus dissemblables n'est qu'une coïncidence; exemples divers; obscurité impénétrable de ces questions; le Bien existe; mais il faut l'expliquer tout autrement; des effets de l'analogie dans toutes les catégories de l'Être; il ne faut pas s'y laisser tromper; réfutation nouvelle de la théorie des Nombres idéaux. — Conclusion générale; les êtres mathématiques ne sont pas séparés des choses sensibles ; et ce ne sont pas des principes.