ARISTOTE
MÉTAPHYSIQUE
LIVRE XII
table des matières de la métaphysique
LIVRE XII |
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§ 1. [1069a]
[18] La substance est l'objet de nos études, puisque ce sont les
principes et les causes des substances que nous recherchons. Si, en
effet, l'on considère une chose quelconque formant un tout, la
première partie dans ce tout est la substance ; et si l'on considère
l'ordre de succession, c'est la substance encore qui est la
première, quand on se place à cet autre point de vue. La qualité et
la quantité ne viennent qu'après elle; et même, à parler d'une
manière absolue, la qualité et la quantité ne sont pas même des
êtres; ce ne sont que des qualifications et des mouvements, qui
n'ont pas plus de réalité que n'en peuvent avoir le Non-blanc ou le
Non-droit. Nous disons néanmoins de la qualité et de la quantité
qu'elles Sont, comme nous le disons aussi du Non-blanc. |
§ 1. La substance est l'objet de nos études. Cette question, et toutes celles qui s'y rattachent, ont été traitées surabondamment dans les livres précédents. On ne comprend pas bien pourquoi l'auteur y revient ici, et pourquoi il s'y étend si longuement encore, sens rien ajouter à des théories qui semblent épuisées. Cette critique s'applique surtout aux cinq premiers chapitres du Xlle livre; et MM. Bonitz et Schwegler ont eu grande raison de les distinguer du reste du livre. Ces chapitres sont très insuffisamment rédigés; et il se pourrait qu'ils ne fussent pas de la main du maître, quoique au fond ce soient toujours ses doctrines. - Une chose quelconque formant un tout. Le sens que je donne ici me parait tout à fait d'accord avec le reste du contexte, et aussi avec le commentaire d'Alexandre d'Aphrodise. M. Bonitz a compris qu'il s'agissait de l'ordre universel des choses, « universitatem rerum » L'expression grecque ne repousse pas absolument cette interprétation; mais l'autre, qui est grammaticalement aussi régulière, me paraît mériter la préférence. Le Tout, dont il cet parlé, est le composé de la matière et de la forme. - L'ordre de succession. Des diverses catégories, comme le prouve l'énumération qui suit. - Que n'en peuvent avoir, Le texte n'est pas aussi formel. - De la quantité et de la qualité. C'est traiter la quantité et la qualité comme des négations et du Non-Être. Cette doctrine peut sembler n'être pas toute à fait aristotélique.
§ 2. Rien n'est séparé.
C'est-à-dire que toutes les catégories autres que la substance no
sont que des attributs, qui ne peuvent exister par eux-mêmes, et qui
n'existent que grâce au sujet dans lequel ils sont. - De nos
jours, les philosophes. Ce sont évidemment les Platoniciens que
l'auteur veut désigner. - Les universaux... des
termes universels. Ces deux expressions sont équivalentes,
quoique la première soit plus spécialement scholastique. - Sont
purement logiques. Ou bien :
« Ne s'occupent que des
définitions
». - De trouver un
corps commun. C'est l'expression même du texte; elle est assez
obscure; mais le sens est évidemment celui-ci :
« Que les anciens
philosophes, au lieu de s'occuper de définitions générales et
communes, s'appliquaient surtout à l'étude des phénomènes
particuliers; ils ne recherchaient point ce que c'est que le corps
en général; mais ils étudiaient tel corps spécial, comme le feu, la
terre, etc.
» § 4. Relèvent de la Physique.. sujettes au mouvement. On peut voir en effet que la Physique d'Aristote n'est au fond qu'un traité général du mouvement. Voir ma Préface à la Physique, pp. II et III. - Mais la dernière. C'est-à-dire, la substance immobile. - Autre science. Celte science supérieure est la, Philosophie première. Voir plus haut, liv. I, ch. II, |
CHAPITRE II |
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§ 1. La substance sensible est
soumise au changement; or, le changement vient toujours, soit d'opposés, soit de
termes intermédiaires. Il ne vient pas, cependant, de tous les opposés sans
exception ; car on ne peut pas dire du son qu'il soit blanc; mais le changement
vient du contraire. Il faut donc nécessairement qu'il existe quelque chose qui
change, pour passer d'un contraire à l'autre, puisque ce ne sont pas les
contraires eux-mêmes qui peuvent changer. |
§ 1. Du son qu'il soit blanc. Le son n'est pas dans le genre de la couleur; et l'on ne peut pas dire qu'il soit un des contraires, soit blanc, soit noir. - Le changement vient du contraire. Et comme le dit Alexandre d'Aphrodite « Dans les limites de sa négation propre ». - Il faut donc nécessairement... Voir sur cotte théorie spéciale la Physique, liv. I, ch. VI et suivants; et liv. V, ch. 7. - Quelque chose qui change. C'est le sujet ou la substance, soumise aux attributs, et, par conséquent, au changement. C'est un des principes les plus constants d'Aristote. § 2. Un troisième terme. Voir la Physique, locc. citt. - Nous avons vu. Voir plus haut, liv. XI, ch. IX, § 2. Dans la Physique, liv, V, ch, III, § 1, p. 287 de ma traduction, Aristote ne reconnaît que trois mouvements; et il exclut la catégorie de la substance; mais, en général, il admet quatre mouvements, comme il le fait ici pour les catégories de la substance, de la quantité, de la qualité et du lieu. Voir le traité spécial des Catégories, où Aristote compte six espèces de mouvement, ch. XIV, § 1, p. 128 de ma traduction. Ces six espèces se réduisent à trois, qui chacune ont leur contraire. § 3. La production absolue. Voir les Catégories, ch. XIV. — La modification, Ou si l'on veut encore : « l'Altération ». - Entre les contraires dans chaque genre, Ou « dans chaque catégorie ». § 4. La matière. Comme la matière n'est qu'en puissance, elle peut être tour à tour l'un ou l'autre contraire. - Du Non-Être. C'est-à-dire « De ce qui n'est pas ». - Toutes viennent de l'Être. Ces remarques sont vraies; mais on peut trouver quelles sont bien subtiles. § 5. L'Unité d'Anaxagore. Voir plus haut, liv. 1, ch. VII, § 13. - Le Mélange d'Empédocle. Id., ibid., § 11. - Démocrite, Voir liv. I, ch. IV, §§ 11, 12, 13. - Des choses éternelles. Il semble que ceci sa rapporte aux astres dont le ciel est rempli. - Va d'un lieu à un autre. Et n'a qu'un mouvement de translation. § 6. On peut d'ailleurs se demander. Ceci se rapporte plus particulièrement au § 3, et ne tient pas directement à ce qui précède. - S'entendre de trois manières. L'auteur n'en énonce ici qu'une seule. - L'un venant de l'autre. La pensée n'est pas exprimée complètement; et elle reste obscure; on peut comprendre qu'il s'agit des contraires dont l'un vient de l'autre. - Il ne suffit pas de dire... Ceci est une critique d'Anaxagore. - L'Intelligence. Qui est le grand principe d'Anaxagore, bien qu'il n'ait pas su en tirer toutes les conséquences; voir plus haut, liv. I, ch. III, § 28, et ch. IV, § 7. § 7. Ainsi, il y a trois causes. Ces idées semblent avoir peu de suite entre elles; et, bien que ceci soit la conclusion du chapitre, cette conclusion ne ressort pas très régulièrement de ce qui précède; voir le Physique, liv. I, ch. VIII, § 20, p. 484 de ma traduction. |
CHAPITRE III |
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§ 1. Après ce qui précède, il nous
faut dire que, ni la matière, ni la forme, ne peuvent être produites; je veux
dire, la matière et la forme dernière. En effet, tout changement change quelque
chose, par quelque chose, et en quelque chose : [1070a]
Par quelque chose, c'est le premier moteur; Quelque chose, c'est la matière ; et
En quelque chose, c'est la forme. Le devenir se perdrait dans l'infini, si ce
n'est pas seulement l'airain qui devient sphérique, et qu'il faille encore que
la forme sphérique devienne aussi, et que l'airain lui-même ait à devenir. Il
faut donc nécessairement un point d'arrêt. |
§ 1. Ne peuvent être produites. Voir plus haut, livre VII, ch.VIII, §§ 2 et 3; et la Physique, liv. I, ch. X, § 8, p. 494 de ma traduction. - La matière et la forme dernière. C'est-à-dire : « prises au sens le plus général. » - Tout changement change quelque chose. Voir plus haut, liv. VII, ch. VII, § 1, les mêmes théories beaucoup plus développées. - C'est la forme. Dans la Physique, liv. I. ch. X, § 9. Aristote renvoie spécialement la question de la forme à la Philosophie première, c'est-à-dire à la Métaphysique. Voir plus haut, liv. Vll, ch. VIII, § 2. § 2. Qui porte le même nom qu'elle. L'exemple qu'en donne Aristote un peu plus bas, c'est qu'un homme produit un homme. Voir plus haut, liv. VII. ch. VIII, § 9, - Du hasard, ou de leur popre spontanéité. Sur ces différences, voir la Physique, liv. Il, ch. IV, et surtout ch. VI, p. 41 de ma traduction. - Un homme produit un homme. Il semble que, ceci serait mieux placé un peu plus haut après ces mots : « Le même nom qu'elle a. » M. Schwegler proposait cette transposition; mais M. Bonitz ne l'accepte pas, tout en reconnaissant qu'elle est assez logique. Il attribue cette incorrection à la négligence extrême avec laquelle toute cette partir de la Métaphysique est rédigée. § 3. Trois substances. Plus haut, ch. I, § 3, on a distingué aussi trois substances; mais ce ne sont pus les mêmes. Ici, ce ne sont pus des substances à proprement parler; ce sont plutôt trois éléments intrinsèques de la substance, la matière, la forme et le composé des deux. L'auteur se sert de l'expression « De trois substances », qui n'est pas justifiée par ce qui suit. - Tout ce qui est Un au contact. Je tire ce sens du commentaire d'Alexandre d'Aphrodise. La leçon ordinaire ne donne pas un sens satisfaisant. - Une simple connexion. Voir plus haut, liv. VIl, ch. XVI, § 2. - La nature. Ce serait plutôt « La forme » ; mais le mot de Nature n'a pas ici un autre sens. - La substance individuelle. Le texte n'est pas aussi précis. § 4. De la substance composée. C'est ce que l'auteur vient d'appeler la troisième substance; c'est la chose concrète et sensible. - Si ce n'est dans l'art. Ceci veut dire sans doute que l'art peut être considéré comme séparé et distinct des objets qu'il produit. - D'une autre manière. Il eût été bon d'indiquer précisément quelle est cette autre manière d'être. La forme de la maison est conçue par l'architecte qui la bâtit; et elle n'a qu'une existence intelligible et non réelle, tant que la maison n'existe pas effectivement. § 5. La production et la destruction. Prises au sens absolu du mot, et non plus comme pour la maison, prises en un sens indirect et relatif. Aussi, Platon ne se trompe-t-il pas. Cet éloge de la théorie des idées est fait pour nous surprendre, après toutes les critiques dont cette théorie est constamment l'objet de la part d'Aristote; il est vrai que cet éloge est accompagné d'une restriction : « Si toutefois, etc. » - De la substance par excellence. C'est-à-dire, de la substance individuelle, qui est la dernière en ce sens qu'elle renferme toutes les autres. § 6. Les causes motrices. Ces idées ne font pas suite à ce qui précède d'une manière assez évidente; et, bien que ln forme de l'expression grecque soit celle d'une conclusion, on ne voit pas comment les causes motrices interviennent ici, à moins que ceci ne se rapporte à l'architecte qui construit la maison, et qui devient ainsi la cause du mouvement; et à la forme de la maison, qui ne se réalise qu'avec la maison même et en même temps qu'elle. - Qui ne sont que des définitions. Comme la forme de la maison. - Simultanées à l'objet défini. Voir plus haut, § 4. § 7. C'est ce qu'il faut voir. Ceci ne semble pas indiquer une étude ultérieure; et l'explication qui suit, sur les diverses parties de l'âme, peut paraître suffisante. - Que l'âme est quelque chose de ce genre. En y reconnaissant deux parties distinctes, comme le fait le Traité de l'âme. liv. III, ch. V, p. 302 de ma traduction. - Cette propriété. D'être permanente et même immortelle. § 8. Il est donc bien clair. Cette conclusion ne parait pars ressortir directement de ce qui précède. - L'existence des Idées n'a rien de nécessaire. Ceci semble contredire le § 5, un peu plus haut, où l'auteur admettait la nécessité des Idées pour les choses de la nature. - La définition même et la notion. Il n'y a qu'un seul mot dans le texte grec. |
CHAPITRE IV |
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§ 1. Les causes et les principes
sont, en un sens, différents pour les différents objets; et en un sens, ils ne
le sont pas, si l'on se borne à parler des causes d'une manière générale, et
qu'on admette que c'est, par simple analogie, que les principes sont identiques
pour tous les êtres. Ainsi, l'on pourrait se demander si, en effet, les
principes sont autres, ou s'ils sont les mêmes pour les substances et pour les
relatifs, et appliquer à chacune des autres catégories des considérations
semblables. Mais, en ceci, il serait insensé de croire à l'identité des
principes pour toutes les choses, puisqu'on arriverait à dire que les relatifs
et la substance viennent de principes tout pareils. |
§ 1. Les causes et les principes. Le discussion qui remplit ce chapitre ne tient que de très loin à toutes celles qui précèdent. Il est bien difficile de croire que celle-ci soit de le main d'Aristote, bien qu'elle reproduise assez exactement ses théories. - Si l'on se borne. Le texte n'est pas aussi formel. - Par simple analogie. Ou « proportionnellement »; par exemple, ce que l'airain est à la statue, le bois l'est à la table qui en est faite; et, en ce sens, on pourrait dire que le principe de le statue est le même que celui de la table. - Pour les substances et pour les relatifs. Les relatifs sont pris pour exemple, par-ce que ce sont eux qui, parmi toutes les catégories, s'éloignent le plus de la substance. - Des considérations semblables. C'est-à-dire se demander si les causes et les principes de la quantité, de la qualité, etc., sont les mêmes que ceux de la substance. § 2. Comment l'identité serait-elle possible? Le texte n'est pas aussi formel; mais le sens ne peut être douteux. - Rien qui puisse être commun. L'expression est bien vague; mais je n'ai pas cru pouvoir la préciser davantage. Le principe qui serait à la fois celui des substances et des relatifs, devrait être, par conséquent, plus général qu'aucune des catégories. Or, il n'y a rien qui soit plus général qu'elles. Ainsi, le principe commun ne saurait être en dehors des catégories. - La substance ne saurait être l'élément des relatifs. C'est-à-dire que le principe commun ne peut pas être non plus une des catégories. Toutes ces théories sont fort obscures. § 3. Purement intelligibles. Qui n'ont aucune réalité extérieure, et qui ne sont quelque chose que pour l'esprit qui les conçoit. - Aucune des choses. Les choses intelligibles ne sont ici que l'Un et l'Être, pris au sens purement logique. § 4. Donc. Cette conclusion ne ressort pas assez clairement de ce qui précède. - Nous venons de le dire. § 1. - Les mêmes pour les corps sensibles. Il est certain que la matière du corps sensible reste la même, que ce corps soit chaud ou qu'il soit froid ; mais le principe du froid n'est pas le même que celui de la chaleur; et, en ce sens, on ne peut pas dire que le principe reste le même. - La Matière... Elle est en puissance l'un et l'autre des contraires; mais, en réalité, en acte, elle est nécessairement l'un des deux. - Sont des substances. En d'autres termes, des réalités actuelles qui ne peuvent pas être, comme la matière, l'un ou l'autre contraire, mais qui sont précisément et effectivement l'un des deux. - La chair et l'os qui en viennent. Il ne faut pas attacher plus d'importance qu'il ne convient à cette physiologie. § 5. Pour ces corps. Les corps sensibles, dont il a été question au § précédent. - Une analogie. Voir plus haut, § 1. - Au nombre de trois. Cette théorie appartient tout entière à Aristote; et c'est surtout dans la Physique qu'il l'a exposée. - La surface. Il est difficile de comprendre que la surface soit la matière de la couleur; le blanc, si l'on veut, en est la forme; le noir est la privation du blanc; mais la matière de la couleur, c'est le corps qui est coloré; et le mot de Surface ne veut pas sans doute dire autre chose. - C'est la lumière, l'obscurité et l'air. Correspondant au blanc, au noir et à la surface. - La nuit et le jour. Cette phrase pourrait bien être une addition faite par quelque scholiaste, et passée ensuite dans le texte. § 6. Les causes. Au début du chapitre, l'auteur s'est proposé d'étudier les causes des choses, pour savoir si les causes peuvent être identiques pour tous les êtres, ou si elles varient avec les êtres différents. Il ajoute ici que les causes peuvent être, ou intérieures, ou extérieures. La cause motrice est en général extérieure à l'objet sur lequel elle agit, bien qu'il y ait aussi des êtres qui ont en eux-mêmes le principe de leur mouvement et de leur inertie. - Les diverses acceptions que nous venons d'indiquer. Le texte est beaucoup moins explicite; et il se sert simplement d'un pronom indéfini. Je crois avec M. Bonitz que ce pronom se rapporte à ce qui a été dit plus haut sur la forme, la privation et la matière. - Trois éléments. Qui sont intrinsèques à la chose : matière, forme et privation. - Quatre causes. Qui rentrent en partie dans les trois éléments : essentielle, matérielle, motrice, et finale. - Santé, maladie, corps. La rédaction grecque n'est pas plus régulière ni plus précise que ne l'est ma traduction. § 7. Telles sont les nuances... de Principe. M. Bonitz propose d'omettre cette phrase. qu'Alexandre d'Aphrodise n'a pas commentée et qu'il paraît n'avoir pas connue; quelques manuscrits l'omettent aussi. Elle interrompt, en effet, la suite des pensées, qui se continue dans la phrase suivante. - Pour les hommes qui existent dans la nature. J'ai suivi la leçon que donnent quelques manuscrits, et qu'adoptent MM. Bonitz et Schwegler dans leur texte. - Et que pour les hommes purement intelligibles. L'expression grecque est très vague ; j'ai cru devoir la préciser; mais le sens peut paraître douteux. - Trois causes... en compter quatre. Voir le paragraphe précédent, où c'est le nombre des éléments qui est porté à trois, et celui des causes, à quatre. Il y a évidemment du désordre dans la fin de ce § 7. - En effet. On ne voit pas bien comment cette conclusion se rattache à ce qui précède. - Se confond avec la médecine. Voir plus haut, ch. III, § 8. - L'homme produit l'homme. Voir id., ibid. - Le moteur qui met tout en mouvement. L'expression du texte est aussi vague que ma traduction; il est peu probable qu'il s'agisse du premier moteur dans l'univers; et il semble qu'il s'agit plutôt du moteur qui est le premier dans une suite de moteurs qui sa succèdent pour arriver à un résultat dernier. |
CHAPITRE V |
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§ 1. Comme, parmi les choses, les unes peuvent avoir une existence séparée, et que
les autres ne le peuvent pas, ce sont les premières qui sont les substances; [1071a] et
ce qui fait que les substances sont les causes de tout le reste, c'est que, sans
les substances, les modes des choses et leurs mouvements ne sauraient exister.
Il se peut ensuite que les substances soient l'âme avec le corps, ou
l'intelligence et le désir, ou le corps tout seul. |
§ 1. Les substances sont les causes de tout le reste. Ce qui revient à dire que les substances sont les causes de leurs accidents. Cette expression de Causes peut paraître ici peu exacte. Les substances sont le support des attributs; elles n'en sont pas les causes. - Il se peut ensuite... le corps tout seul. M. Bonitz déclare ne pas comprendre le sens de toute cette phrase, et il trouve que les explications d'Alexandre d'Aphrodise n'éclaircissent pas du tout la pensés fort obscure du texte. Alexandre, en effet, prétend que « l'âme avec le corps » se rapporte aux plantes, que « l'intelligence, le corps et le désir » se rapportent aux hommes; et enfin, que « le corps et ne désir » se rapportent aux animaux privés de raison. Cette explication ne me paraît pas acceptable; et il faut avouer, avec M. Bonitz, que le texte grec, dans l'état où il nous est parvenu et où l'avait déjà Alexandre d'Aphrodise ne nous offre pas de sons satisfaisant. § 2. Sont les mêmes par analogie. L'auteur semble revenir ici à la question déjà traitée plus haut, ch. IV, § 1. - Tels sont l'acte et la puissance. L'expression est peut-être trop vague; et il ne faudrait pas comprendre que l'auteur veuille ici identifier l'acte et la puissance; seulement, l'acte et la puissance ont cette analogie que la puissance peut venir de l'acte, comme l'acte peut venir de la puissance. - Pour le vin. C'est-à-dire que le vin actuel est en puissance du vinaigre. - Pour la chair. C'est-à-dire que la chair actuelle représente en puissance les aliments qui l'ont formée. - Pour l'homme. Qui est actuellement malade, et qui, en puissance, jouit de la santé. - Énumérées par nous. Voir plus haut, ch. IV, § 5. - Un être qui peut être séparé. Il faut entendre par là l'individu, distinct et séparé de tous les autres par son existence propre et indépendante. - Le composé qui résulte des deux. C'est-à-dire, l'être composé de la matière et de la forme, qui se sont réunies pour le constituer. - La privation, c'est l'obscurité. Ces pensées se suivent peu, et l'on ne voit pas le lien qui les rattache l'une à l'autre. § 3. L'acte et la puissance. Tout ce § est fort embarrassé; et les efforts des commentateurs n'en ont pas dissipé les obscurités : les explications d'Alexandre d'Aphrodise sont plus qu'insuffisantes, et il en arrive à conclure que l'acte et la puissance sont pour le soleil et le cercle oblique autres que pour l'homme, par exemple pour Socrate et Sophronisque, son père. - D'une autre manière. Ceci est en partie une répétition du § précédent. - La cause qui produit l'homme. L'expression n'est pas très juste; et l'on ne peut pas dire que les éléments soient la cause de l'homme, même en supposant qu'ils entrent dans sa composition, ainsi qu'on le prétend ici ; ils en sont la matière plutôt que la cause, comme l'auteur le dit lui-même dans la phrase suivante. - Outre en causes. Voir une théorie toute pareille dans le Traité de la Production, liv. II, ch. X, § 3, p. 172 de ma traduction. - Le cercle oblique. C'est l'écliptique, c'est-à-dire, la course apparente du soleil, réglant les saisons diverses de nos climats, favorisant ou arrêtant la production générale des choses. - Qui lui soit homogène. Comme le père l'est au fils qu'il engendre. - Ce sont ses principes moteurs. C'est remonter bien haut que de remonter jusqu'au soleil, pour expliquer la génération de l'homme. § 4. Il y a des causes. Le texte est moins formel ; mais je tire ce sens du commentaire d'Alexandre d'Aphrodise; ce sens ressort d'ailleurs de tout le contexte. - Le primitif actuel. En d'autres termes, l'Individu, comme il est dit dans la phrase suivante. - Ou le possible. C'est la paraphrase du mot précédent. - Les universaux. Ou aussi: « Les causes exprimées d'une manière universelle. » - L'individu seul... En vertu de cet exemple souvent cité : « L'homme engendre l'homme »; mais l'homme individuel, et non pas l'homme en général. - Retiennent. J'ai ajouté ce mot. - Universel et absolu. Il n'y a qu'un seul mot dans le grec. § 5. De plus, les espèces sont les principes des substances. C'est le sens que donne Alexandre d'Aphrodise, et qu'adopte aussi M. Schwegler. M. Bonitz pense qu'il vaut mieux sous-entendre ici, et répéter, le début du § précèdent. On traduirait alors : « Ensuite, il faut regarder aux espèces des substances. etc, » il est certain que cette explication est plus d'accord avec tout le contexte. - Ainsi qu'on l'a dit. Voir plus haut, ch. IV, §§ 1 et 5. - Leur définition générale, En d'autres termes : « Par leur espèce. » § 6. Des substances, des relatifs. Voir plus haut, ch. IV, § 1, une question à peu près pareille, dont celle-ci n'est qu'un développement peu nécessaire. - En toutes choses. J'ai ajouté ceci, pour compléter la pensée. § 7. Tout est détruit... Voir plus haut, § 1. Ceci est encore une répétition peu utile. - La cause aussi est le primitif. Le texte est moins formel. - De cette façon, C'est-à-dire : « Comme des causes et des principes. ». - Comme des causes. C'est le sens que j'emprunte au commentaire d'Alexandre d'Aphrodise. § 8. Nous avons donc expliqué. Conclusion d'une discussion qui est assez confuse et bien peu régulière. - Avec ces cinq chapitres, se termine la première partie du livre XII; et, avec le Vie chapitre, commence la théorie qui donne à ce livre une si haute importance. Voir la Dissertation sur la composition de la Métaphysique. |
CHAPITRE VI |
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§ 1. Nous avons reconnu qu'il y a
trois substances, dont deux sont physiques, et dont la troisième est immobile.
Maintenant nous allons démontrer, pour cette dernière, que, de toute nécessité,
il n'y a qu'une substance éternelle qui puisse être immobile. Les substances, en
effet, sont les premiers des êtres; et si toutes les substances étaient
périssables, tout absolument serait périssable comme elles. Mais il est
impossible que le mouvement naisse, ou qu'il périsse, puisqu'il est éternel,
ainsi que nous l'avons établi. Le temps ne peut pas davantage commencer ni
finir, puisqu'il ne serait pas possible qu'il y eût, ni d'Avant, ni d'Après, si
le temps n'existait pas. |
§ 1. Nous avons reconnu. Voir plus haut, ch. 1, § 3. - Sont physiques... L'expression est assez vague ; mais Physiques veut dire sans doute Perceptibles à nos sens. La troisième substance est purement intelligible. Les deux premières sont soumises au mouvement; la troisième est essentiellement immobile. - Les premiers des êtres. Voir plus haut, ch. IV, § 1, et aussi ch. 1, § 1. - Que le mouvement naisse ou qu'il périsse. Le mouvement et le temps sont éternels; et, par conséquent. voilà tout au moins deux choses qui ne peuvent pas être périssables. - Ainsi que nous l'avons établi. Voir la Physique, liv. VIII, ch. 1, §1. et suiv, p. 453 de me traduction, où cette grande discussion reçoit tous les développements nécessaires. - Le temps ne peut pas davantage commencer ni finir. Parce qu'il est éternel, comme le mouvement. § 2. Le mouvement est continu. Voir la Physique, liv. VIII, ch. X, pp. 518 et suiv. - Le mouvement circulaire. Ce mouvement est celui de tous les grands corps qui peuplent le ciel; seulement, le mouvement n'est pas absolument circulaire, mais elliptique. Ces grands corps ont en outre un mouvement de rotation sur eux-mêmes, qu'on peut considérer aussi comme circulaire. Ainsi, le principe général que pose Aristote est assez exact. § 3. Capable de mouvoir ou capable de faire. C'est une puissance, qui ne suffit pas, si elle ne devient pas actuelle. - Ce qui a la puissante d'agir. Rester à l'état de puissance, c'est être comme si l'on n'était pas. - Supposent les Idées. Dans le système platonicien, les Idées semblent rester à l'état de puissance inféconde, sans jamais passer â la réalité actuelle et effective. - Que toute autre substance. M. Bonitz pense avec raison qu'il s'agit ici des nombres. tels que les Pythagoriciens les entendent. - Et même elle agirait... n'être pas... Il semble que ceci n'est qu'une répétition inutile de ce qui précède; le commencement du § exprime suffisamment la même pensée. § 4. Un principe... de telles substances... Dans la théorie d'Aristote, le principe est unique; et s'il parle de substances multiples, qui sont immatérielles et éternelles, le fond de la pensée n'en reste pas moins le même. - Sans matière. Car, c'est la matière qui est la cause du changement et qui le rend possible, puisque c'est elle qui passe de l'un des contraires à l'autre contraire. § 5. Et l'on dit. Le texte est moins précis. - La puissance est antérieure à l'acte. C'est la conclusion de l'objection contre laquelle Aristote s'élève. Pour lui, l'acte est nécessairement antérieur à la puissance. - Les Théologues. Voir plus haut, liv. I, ch. III, § 14. C'est sans doute Orphée et Hésiode qu'Aristote veut désigner ici. - Avec les Naturalistes. Ce sont Ica philosophes de l'école Ionienne, et aussi Anaxagore, dont le principe sur la confusion primitive de toutes choses est rappelé de nouveau. - L'impossibilité est la même. En d'autres termes, on n'explique pas la cause initiale et universelle du mouvement. - Les menstrues. Elles servent à nourrir et à développer l'être qui sort du germe séminal ; mais ce n'est pas elles qui donnent d'abord le mouvement d'où il vient. - La liqueur séminale. Pour les animaux. - Le germe. Pour les plantes que la terre nourrit et développe ensuite. § 6. Leucippe et Platon. Voir la Traité du Ciel, liv. Ill, ch. II, §§ 3 et 4, p. 236 de ma traduction. Voir aussi le Timée de Platon, p. 119, traduction de M. Victor Cousin. - Ils ne remontent pas davantage jusqu'à sa cause. On peut trouver que cette critique n'est pas très juste, du moins contre Platon; et son Timée atteste qu'Il s'était occupé, au contraire, beaucoup des questions qu'Aristote lui reproche ici d'avoir omises. - De l'homme. J'ai ajouté ces mots, pour compléter le sens que je tire du commentaire d'Alexandre d'Aphrodise. § 7. Pourtant, Platon lui-même. M. Bonitz, avec Édouard Zeller, trouve que ce reproche n'est pas fondé ; et il défend Platon contre Aristote. - Qui se donne le mouvement à lui-même. C'est l'âme; voir le Phèdre, p. 46 de la traduction de M. V. Cousin, et le Timée, p. 140 et suiv. § 8. La puissance est antérieure à l'acte. Voir plus haut, § 5. - Nous en avons expliqué la raison. Voir plus haut, § 3. - Le Chaos ou la Nuit. Cette objection contre le Chaos et la Nuit, considérés comme l'origine des choses, est très remarquable ; et sans qu'Aristote se prononce très nettement sur le problème de la création, il paraît bien supposer que l'intelligence divine est le principe de l'univers, Voir plus haut, liv. I, ch. IV. - Des Périodes régulières. Comme le veut Empédocle; voir liv. I, ch. IV, § 8. - Qu'on admet que l'acte est antérieur. C'est la théorie même d'Aristote. - Pour qu'il y ait production et destruction des choses. M. Bonitz rappelle, à l'occasion de cette théorie, un passage explicite et décisif du Traité de la production et de la destruction, liv. II, ch. X, § 2, p. 171 de ma traduction. - Un autre principe. Alexandre d'Aphrodise pense qu'il s'agit ici des deux principes supérieurs qui régissent le monde, dans le système d'Aristote : la sphère des étoiles fixes, et la sphère qui comprend le soleil et les autres planètes. Le principe qui préside à la sphère des étoiles fixes, est immuable; le second produit, au contraire, deux mouvements, l'un de production et l'autre de destruction. C'est ce qu'Aristote appelle le cercle oblique. Il ne fait d'ailleurs ici que résumer des théories qui sont beaucoup plus développées dans le Traité de la production et de la destruction, loc. cit., et aussi dans le Traité du Ciel, liv. III, ch. I et suiv. § 9. Ce principe. Le principe dont il est question ici, est le principe même du mouvement universel. - Un autre que lui. C'est le mouvement oblique, c'est-à-dire celui qui se fait sur l'écliptique, et qu'indiqua le cours du Soleil, deus les apparences de chaque jour. - Ou sur le primitif. Par primitif, il faut entendre le principe universel du mouvement, qui est antérieur au mouvement oblique. - Comme nous l'avons vu. Le texte est moins précis; et il n'indique cette référence que par un verbe, mis au passé indéfini. Ceci peut se rapporter à ce qui est dit plus haut, § 8, et aussi à divers passages du Traité du ciel et du Traité de la production et de la destruction des choses. § 10. D'autres principes. Alexandre d'Aphrodise croit qu'il s'agit ici des Idées platoniciennes. Peut-être, la critique ne concerne-t-elle pas précisément la théorie des Idées et ne s'adresse-t-elle qu'aux théories du Phèdre et du Timée sur le mouvement. Voir plus haut, § 7 et la note. |
CHAPITRE VII |
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§ 1. Comme il peut en être ainsi
qu'on vient de le dire, et comme, s'il n'en était pas ainsi, tout viendrait de
la Nuit, ou de la confusion primitive de toutes choses, ou même du Néant, du
Non-Être; nous pouvons affirmer que ces difficultés sont résolues pour nous.
Oui, il existe quelque chose qui est éternellement mû, d'un mouvement qui ne
s'arrête jamais; et ce mouvement est circulaire. Cette vérité n'est pas évidente
seulement pour la raison ; elle est, en outre, évidemment prouvée par les faits
eux-mêmes. |
§ 1. Du Néant, du Non-Être. Il n'y a qu'un seul mot dans le texte. - Nous pouvons affirmer. Le grec n'est pas aussi positif. § 2. Le premier ciel. C'est la sphère des étoiles fixes, en opposition avec le mouvement dit soleil et des planètes. Le premier ciel a un mouvement éternel, qui ne peut venir que du moteur immobile et éternel. C'est en ce sens que doit être compris tout ce passage, que confirment des théories analogues de la Physique, liv. VIII, ch. V, et du Traité de l'âme, liv. III, ch. X. - Qui lui donne le monument. Alexandre d'Aphrodise, suivi par M. Schwegler, comprend, au contraire, que le premier ciel donne le mouvement à quelque chose, qui ne peut être que la sphère des planètes. Avec M. Bonitz, je préfère le sens que j'ai donné dans ma traduction, et qui me paraît plus d'accord avec tout le contexte. - Qui meut sans être mû. C'est le premier moteur de l'univers entier. - Comme le désirable et l'intelligible. En d'autres termes, l'objet de la passion est l'objet de l'entendement, de la raison. - Pour l'intelligible et le désirable. J'ai ajouté ces mots, qui ne sont que le développement des précédents, afin que la pensée soit plus claire. - Les primitifs sont les mêmes. Peut-être, l'expression n'est-elle pas tout à fait juste, puisque la suite prouve que, d'une part, il y a une apparence, et que, d'autre part, il y a une réalité; ici, l'apparence du bois; et le, le bois lui-même. - Le primitif de la volonté. Guidée et éclairée par l'intelligence. § 3. L'intelligible est l'autre série. L'intelligence semblerait ici former une première série; l'intelligible en formerait une seconde. Mais peut-être eut-il plus exact de comprendre ce passage au sens qui a été indiqué déjà plus haut, liv. IV, ch, II, §§ 8 et 23, où les deux séries sont celles de l'affirmation, d'une part; et de la négation, d'autre part. - Mais l'Un et l'Absolu. Il est difficile de voir comment ces idées s'enchaînent les unes aux autres. Le commentaire d'Alexandre d'Aphrodite n'aide pas à découvrir quel en est le lien, On pourrait regarder cette phrase comme une interpolation; et M. Victor Cousin n'y voit qu'une remarque épisodique. En la retranchant, les pensées se suivent davantage, sans être encore aussi claires l'on pourrait le désirer. - Le primitif. Ou, « le premier terme » de la série. - La division suivante. Alexandre d'Aphrodise donne un sens différent, et il croit qu'Aristote veut rappeler ici la Division des Contraires, indiquée plus haut, liv. IV, ch. II, § 8. Je crois que, malgré une si grave autorité, le sens que j'adopte, avec plusieurs autres traducteurs, est plus satisfaisant. Aristote divise souvent le Pourquoi des choses, comme il le fait dans deux passages de la Physique, liv. II, ch. II, § 13, p. 16 de ma traduction, et du Traité de l'âme, liv. II, ch. II, § 5, p. 190 de ma traduction, ainsi que le remarque M. Bonitz. - Est dans les immobiles. Le texte n'est pas aussi précis; mais le sens que je donne parait encore le plus probable. - En tant qu'il est animé. Comme le bien, qui meut sans être mû, et qui est la cause finale de toutes choses. Il faut remarquer la vérité de cette doctrine.
§ 4. Si donc une chose est
mue. Ce principe est de toute évidente; et comme le mouvement
est toujours un changement, et au moins un changement de lieu, il
s'ensuit que le premier moteur doit être immobile, puisqu'il est
nécessairement immuable. § 5. Donc de toute nécessité. Cette conclusion ne ressort pas de ce qui la précède immédiatement; et elle se rapporte plutôt aux phrases antérieures; peut-être y a-t-il eu ici quelque interversion dans le texte. - Avec diverses nuances. Ces distinctions dans le sens du mot Nécessaire ont été données plus haut, liv. V, ch. V. M. V. Cousin croit que cette phrase est une parenthèse, comme plus haut, § 3 ; voir sa traduction du XIIe livre de la Métaphysique. - Sachons-le. La particule qu'emploie le grec a cette force. - Mais lui. Le texte n'a qu'un pronom neutre indéterminé. - L'acte de cette vie supérieure. Ici encore le texte est moins précis. - Est le comble du bonheur. Il en difficile de se faire une idée plus haute de La grandeur de l'esprit de l'homme; et c'est surtout à Aristote que de telle théories devaient appartenir. Platon l'appelait l'Intelligence, l'Entendement de l'École. C'en un éloge aussi magnifique que justifié.
§ 6. L'Intelligence.
Ou
«
la pensée
»
- En se touchant elle-même. C'est l'expression même du texte;
et bien qu'elle ait quelque chose de matériel, elle rend
parfaitement ce que l'auteur veut dire. - En elle-même. J'ai
encore ajouté ces mots. - Encore à ce principe. C'est le sens
donné par Alexandre d'Aphrodise. - Dans l'intelligence. J'ai
ajouté ces mots. § 8. Les Pythagoriciens et Speusippe. Pour les Pythagoriciens, voir plus haut, liv. I, ch. V, § 8; peut-être la critique d'Aristote s'adresse-t-elle à la double série des contraires, qu'il attribue aux disciples de Pythagore. Dans cette série, le bien et le mal ne se trouvent qu'au neuvième rang, au lieu d'être au premier. Dans ce que nous connaissons du système pythagoricien, il n'y a guère que cette théorie qui puisse répondre ce passage de la Métaphysique. Pour Speusippe, voir plus haut, liv. VII. ch. II, § 4; et plus loin, liv. XIV, ch. XIV, § 4. Dans le premier de ces deux passages, Speusippe est nommé, mais pour une théorie différente. Dans le second, il n'est pas désigné nommément; mais la critique qui est formulée ici est répétée de nouveau et attribuée à des « théologues », contemporains d'Aristote. Speusippe mourut douze ou treize ans avant Aristote; voir M. Ed. Zeller, Philosophie des Grecs, tome II, p. 840, 3e édition. - C'est là une erreur. Aristote a parfaitement raison contre les Pythagoriciens et Speusippe, si toutefois ils ont eu les opinions qu'il leur prête; mais cet argument peut être tout puissant aussi pour expliquer la création des êtres et l'origine des choses, Les êtres parfaits sont les premiers; et les êtres imparfaits qu'ils produisent n'ont pu venir qu'après eux. La raison qu'en donne Aristote est péremptoire. § 9. Il a été démontré aussi. Voir la Physique, liv. VIII, ch. XV et dernier, pp. 558 et suiv. de ma traduction, où cette théorie sur l'immatérialité du premier moteur est exposée tout au long. Il semble qu'elle est résumée ici, puisque les traits principaux sont essentiellement les mêmes. - Après le mouvement de locomotion. La pensée est incomplètement rendue, comme le remarque M. Victor Cousin. Le moteur immobile donne le mouvement; mais il ne le ressent pas. Le premier mouvement qu'il donne est celui de la locomotion; mais, n'éprouvant pas même celui-là, il n'en éprouve pas d'autre, à plus forte raison. J'ai cru devoir laisser ma traduction indécise comme l'est le texte lui-même; j'aurais craint de la préciser trop. |
CHAPITRE VIII |
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§ 1. Quant à savoir si cette
substance éternelle est unique, ou s'il y en a plusieurs, et combien il y en a,
c'est une question qu'il faut étudier; et l'on ne doit point négliger même les
opinions des autres philosophes, quoique, sur le nombre de ces substances, ils
n'aient rien dit qui offre quelque clarté. |
§ 1. Est unique. Il semble que ce doute est en contradiction avec ce qui a été dit dans le chapitre précédent, sur l'unité du premier moteur et de Dieu; et avec ce qui sera dit plus bas, ch. X, § 14 sur la nécessité d'un chef unique dans l'organisme universel. - Combien il y en a. On verra par ce qui va suivre qu'Aristote reconnaît autant de substances éternelles qu'il y a de planètes, tout au moins, et qu'il les élève toutes au rang de Dieux. - Le nombre de ces substances. Aristote lui-même ne détermine pas précisément ce nombre, à moins qu'on ne compte avec lui autant de substances que de sphères, c'est-à-dire 47; voir plus bas, § 14. Il est, d'ailleurs, possible, comme le croit Alexandre d'Aphrodise, qu'Aristote concilie l'unité do Dieu avec la multiplicité des substances éternelles des astres, qui lui sont subordonnées. Pour nous, cette confusion est inadmissible. § 2. Strictement limités à la Décade. C'est-à-dire : « à dix ». Pour savoir jusqu'à quel point cette critique d'Aristote est exacte, il faudrait avoir les ouvrages des Platoniciens, à côté des ouvrages de Platon, qui nous sont seuls connus, et qui ne présentent pas cette théorie. Du reste, lu même critique se retrouve dans la Physique, liv, III, ch. VIII, § 14, p. 123 de ma traduction. - Des faits. Ce n'est pas le sens qu'on donne ordinairement à l'expression qu'emploie ici le texte; mais celui-ci me semble tout à fait justifié par ce qui suit, § 4. Cette différence d'interprétation n'a, d'ailleurs, presque aucune importance. § 3. Il l'est aussi par accident. Je ne vois, dans le commentaire d'Alexandre d'Aphrodise, aucune explication sur cette théorie. On comprend bien que le moteur premier soit immobile en soi, comme Aristote s'est efforcé de l'établir; mais on ne comprend pas aussi bien comment il peut être immobile par accident. Il semble que cette immobilité est en lui une propriété essentielle. § 4. Simple et absolue. Il n'y a qu'un seul mot dans le texte. - De l'univers. Le texte dit simplement : « du Tout ». Ce Tout n'est peut-être que le ciel, c'est-à-dire la sphère des étoiles fixes. - Celles des planètes. Qui dans le système d'Aristote, et d'après les connaissances de son temps, ne sont qu'au nombre de cinq, si l'on y comprend la terre. - Le corps qui se meut circulairement. C'est le ciel avec tous les corps qui le peuplent. - Dans la Physique. Liv. VIII, ch. VIII, § 7, et ch, IX, p, 514 et suiv. de ma traduction, et ch. XIII, § 41, p. 547; voir aussi le Traité du ciel, liv. I, ch. IV, § 9 ; et liv. II, ch. IV, § 8, p.10 et 140 de ma traduction. § 5. Isolément. Le texte n'est pas aussi formel; mis le sens n'est pas douteux; dans la pensée d'Aristote, chacun des astres est mû par une substance immobile et éternelle. C'est ce qu'il dit en propres ternies au § suivant. § 6. Autant de substances que de planètes. Les substances des planètes, immobiles et éternelles comme le premier moteur de l'univers, peuvent lui être subordonnés, afin que l'harmonie et l'unité du monde puissent subsister. - L'ordre même que présentent les translations des astres. Au temps d'Aristote, ces grands phénomènes ne pouvaient être que peu étudiés et bien mal connus. On en savait assez, cependant, pour constater une certaine disposition régulière entre les planètes qu'on pouvait observer; et l'admiration des philosophes n'en était pas moindre. § 7. Qui se rapproche le plus de la philosophie. J'ai admis la variante très heureuse que M. Bonitz a empruntée, avec raison, au commentaire d'Alexandre d'Aphrodise, qui revient sur cette explication à plusieurs reprises, et qui en donne d'excellents motifs puisés dans le contexte. M. Schwegler, qui paraît approuver cette variante, ne l'a pas cependant admise dans son texte, ni dans sa traduction. - Une substance sensible. Ce sont les astres, dont le nombre se multiplie avec les observations de la science. Les astres sont la matière de l'astronomie, tandis que les mathématiques ne se composent que d'abstractions, qui n'ont point de substance. § 8. A plus d'un mouvement. Il semblerait résulter de ce passage qu'Aristote aurait reconnu les deux mouvements de rotation et de translation; mais cette supposition est peu vraisemblable; et ces deux mouvements n'ont pu être reconnus, et compris, que quand la science a pu constater le vrai système du monde avec Copernic et ses successeurs. Il s'agit donc ici des mouvements multiples que représentaient les sphères imaginées par les astronomes, nommés un peu plus bas, Voir le Traité du ciel, liv. Il, ch. XII, p.117 et suiv, de ma traduction. § 9. Nos propret recherches. Diogène de Laërte, dans son catalogue des œuvres d'Aristote, mentionne un Traité d'Astronomie, en un livre; voir l'édition de Firmin-Didot, liv. V, ch. I, § 26, p. 116. Dans la Météorologie, dans le Traité du ciel, il y a une foule de passages qui prouvent que le philosophe n'était occupé d'astronomie de la manière la plus sérieuse. - Des emprunts. Aristote a toujours assez aimé la vérité pour l'emprunter à ceux qui l'avaient découverte avant lui, et à qui il n'a jamais manque d'en faire honneur. - En savoir bon gré. Il faut rapprocher ces pensées d'autres déclarations tout à fait pareilles, soit à la fin de l'Organon et des Réfutations des Sophistes, soit dans la Morale à Nicomaque, liv. I, ch. III, § 1, p. 16 de ma traduction. § 10. Eudoxe. C'est sans doute le même que le disciple de Platon, dont Aristote a parlé plusieurs fois avec grande estime. tout en combattant son système ; voir plus haut, liv. I, ch. VIII, § 28; et plus loin, liv. XIII, ch. V, § 2, oµ Aristote répète sa critique. Dans la Morale à Nicomaque, liv. 1, ch. X, § 5, liv. V, ch. II, §§ 1 et suiv., liv. X, ch. II, § 13, il combat la théorie du plaisir telle qu'Eudoxe l'exposait. Mais, à côté de travaux philosophiques plus ou moins profonds, Eudoxe s'était surtout signalé comme astronome. Originaire de Cnide, il avait. voyagé en Égypte, où il avait résidé longtemps; et c'est sans doute à l'école des prêtres qu'il avait acquis ses vastes connaissances en astronomie. Il était plus âgé qu'Aristote de vingt ans à peu près, et il mourut longtemps avant lui, à peine âgé de cinquante ans. - Dans trois sphères distinctes. Il est clair que l'invention des différentes sphères par Eudoxe et Callippe avait uniquement pour but d'expliquer la course du soleil et celle de la lune, se levant et se couchant selon les saison et selon les mois, à différents points de l'horizon. La course était beaucoup plus grande en été, et beaucoup plus restreinte en hiver; entre ces deux extrêmes, se plaçait une course moyenne, qui répondait au milieu du zodiaque, et qui le coupait plus ou moins obliquement. - Le cercle que décrit la lune. Il est difficile de comprendre comment on avait pu assimiler la course de la lune à celle du soleil, qui en est si différente. § 11. Quant aux planètes. Les planètes alors connues étaient au nombre de cinq : Saturne, Jupiter, Mars, Vénus et Mercure, la première étant la plus éloignée du soleil et de la lune. - Quatre sphères. En tout, c'était vingt sphères pour ces cinq planètes, et vingt-six avec les sphères du soleil et de la lune. - Selon Eudoxe. J'ai ajouté ces mots. - Toutes les sphères. Je ne crois pas devoir essayer, après tant d'autres, d'expliquer toutes ces théories astronomiques, qui sont fort ingénieuses, et qui doivent être d'une très grande importance pour l'histoire de l'astronomie. Mais je n'espérerais pus être plus heureux que les autres commentateurs, à commencer par Alexandre d'Aphrodise. J'ai fait tout ce qu'il a dépendu de moi pour que ma traduction fût le plus fidèle possible. C'est encore au texte même d'Aristote, ainsi interprété, que devront avoir recours les astronomes que ces questions intéressent plus spécialement. Des explications de ma part, qui ne seraient pas décisives, ne feraient qu'obscurcir la question, loin de l'élucider. § 12. Callippe. De Cyzique, sur la Propontide (mer de Marmara). Il n'est pas probable que ce Callippe, astronome, soit le même que celui dont Aristote parle dans la Rhétorique, liv. II, ch. XXIII, §§ 22 et 30, p. 342 de ma traduction. Ce dernier, auteur d'ouvrages de rhétorique, était lié avec Platon et Dion. §§ 13 et 14. Même remarque sur les théories de Callippe que sur celles d'Eudoxe; je craindrais d'épaissir les obscurités par mon commentaire, et je préfère m'en tenir à la traduction, que j'ai tâché de faire aussi fidèle et aussi claire que possible. - Au nombre de quarante-sept. C'est le nombre qu'adopte Aristote lui-même, et avec lequel il compte qu'on peut expliquer tous les phénomènes astronomiques. § 15. Sont en nombre égal. Les substances immobiles et sensibles peuvent être très multipliées, sans que le premier moteur, immobile et éternel, cesse d'être unique. Mais Aristote n'insiste pas sur cette considération, qui serait essentielle cependant, pour que le philosophe ne semblât point se contredire lui-même. - A de plus forts que nous. C'est l'expression grecque elle même. - Qui vient d'être indiqué. J'ai ajouté ces mots, pour préciser la pensée. Le nombre des substances immobiles et sensibles est toujours de quarante-sept, dans la pensée d'Aristote. Mais que dirait-il, aujourd'hui, quand il saurait que le nombre des substances, telles qu'il les comprend, est infini, puisque ce serait le nombre des étoiles, et non plus seulement des planètes, qui, d'ailleurs, sont déjà près de deux cents et qui seront dans peu bien davantage ? § 16. Il est impossible. Il semble que c'est résoudre la question par la question; et, en voyant ce qu'est devenue cette théorie des quarante-sept sphères, par suite des progrès de la science, on peut juger ce que vaut la conclusion qu'Aristote croit pouvoir en tirer. - Pour les astres. L'expression qu'Aristote donne ici à sa pensée est trop générale; il y a d'autres mouvements que ceux des astres dans le monde. § 17. Si, en effet... Même remarque qu'au § précédent. La conclusion ne paraît pas très rigoureuse. - Il n'y a qu'un seul ciel de possible. Ceci est une vérité incontestable; mais c'est par d'autres raisons que celles qu'en présente Aristote. - Socrate est bien Un. Il semble que ceci est une interpolation; et cette pensée ne s'accorde pu très bien avec ce qui précède. Du reste, elle n'est pas obscure; et l'auteur veut dire que, si la définition peut s'adresser à un grand nombre d'êtres, chacun de ces êtres n'en conserve pas moins son individualité. - L'essence qui fait... Le texte est plus concis; je l'ai paraphrasé. - Ce qui a en soi sa propre fin. Même remarque. § 18. Ainsi donc. Cette conclusion très importante, et que je crois très vraie, n'est pas plus rigoureuse que les précédentes. - Ce qu'il meut. C'est le ciel que meut le premier moteur, immobile et éternel. - Les astres sont des Dieux. Il eût été digne d'Aristote de ne pas accepter si aisément cette tradition, qui contredit manifestement sa théorie de l'intelligence divine. - Que de persuader la multitude. On voit que, dès le temps d'Aristote, on supposait que la religion n'est au fond qu'un calcul politique. Je crois, pour ma part, que cette idée n'est pas très juste. - Des figures d'animaux. Ceci pourrait s'appliquer surtout aux cultes et aux superstitions de l'Égypte. - Des croyances vraiment divines. C'est peut-être exagérer. - Découvertes et perdues plus d'une fois. Cette pensée, qui mérite la plus sérieuse attention, a été répétée plusieurs fois par Aristote, qui paraît y tenir beaucoup; voir la Politique, liv. IV, ch. IX, § 4. page 228 de ma traduction, 3e édition; la Météorologie, liv. I, ch. III, § 4, page 10, et ch. XIV, page 80 et suiv.; le Traité du Ciel, liv. I, ch. III, § 6, page 20 de ma traduction. § 19. Dans quelle mesure restreinte. Le texte est un peu moins formel. Mais le sens n'en est pas moins certain. |
CHAPITRE IX |
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§ 1. En ce qui regarde
l'intelligence éternelle, on peut soulever plus d'une question. Elle est bien
certainement le plus divin de tous les phénomènes; mais quelles conditions
doit-elle remplir pour avoir cette supériorité? C'est là un point qu'il est bien
difficile d'éclaircir. Si elle ne pense actuellement à rien, et qu'elle soit
comme serait un homme plongé dans un profond sommeil, où est la dignité qui lui
appartient? Si elle pense, mais que sa pensée dépende d'un autre principe
supérieur, le principe, qui fait la substance de l'Intelligence divine, n'étant
plus alors la pensée en acte, mais une simple puissance de penser, il s'ensuit
que l'Intelligence divine n'est plus la substance la plus relevée; car sa
dignité tout entière ne consiste qu'à penser. |
§ 1. L'Intelligence éternelle. Le texte dit simplement : « l'Intelligence »; mais toute la suite prouve bien qu'il s'agit de l'intelligence divine et éternelle; et le commentaire d'Alexandre d'Aphrodise donne aussi cette interprétation. Le sens ne peut en rien être douteux. - Actuellement. J'ai ajouté ce mot, qui me paraît indispensable. - D'un autre principe supérieur. Alexandre d'Aphrodise donne un sens différent ce passage. Il suppose qu'il y a dans l'intelligence divine deux parts, comme dans l'âme humaine : une portion qui sent et ne pense pas, et une portion intelligente qui pense; et alors, selon lui, l'intelligente divine, ainsi partagée, ne serait plus ce qu'elle doit être. Donc, ce n'est pas une partie de la substance divine qui pense, c'est la substance entière, qui n'est que pensée actuelle. - En acte. J'ai ajouté ces mots. - Une simple puissance de penser. Il semble que l'on retombe alors dans l'hypothèse précédente, où l'intelligence, comme ensevelie dans le sommeil, ne pense à rien. A en juger par les explications d'Alexandre d'Aphrodise, il est possible qu'il ait eu sous les yeux un texte un peu différent du nôtre. Du moins, il est bien difficile de tirer le sens qu'il donne du texte que nous possédons. § 2. L'intelligence seule. J'ai ajouté ce dernier mot. Le texte dit simplement « l'intelligence » mais, en grec, la désinence d'un mot suffit pour établir une différence entre cette expression et celle qui suit : « l'acte même de l'intelligence ». Notre langue ne m'offrait pas la même ressource ; et c'est ce qui m'a obligé de faire une paraphrase. - De penser au bien tout seul. Évidemment la pensée de Dieu ne peut jamais s'appliquer an mal ; et la théodicée d'Aristote est en ceci d'une vérité profonde. Il est à peine besoin de faire remarquer la grandeur et la précision de toute cette théorie, qui, sur bien des points, est identique à celle de la théologie chrétienne, telle que l'ont faite les Pères de l'Église, à l'aide de labeurs séculaires. § 3. L'acte de la pensée même. Même remarque que plus haut, sur la nuance du mot qu'emploie le texte. - Sera pour elle une fatigue. Puisque l'intelligence aurait à faire un perpétuel effort pour passer de la puissance à l'acte, et pour se maintenir dans un acte, qui serait, pour elle, le résultat nécessaire d'un changement. - La faculté de penser et l'acte de penser... Ces idées ne semblent pas tenir assez étroitement, ni à ce qui les précède ni à ce qui les suit, bien qu'en elles-mêmes elles soient fort justes. § 4. L'Intelligence divine... L'Intelligence divine... Dans ces deux phrases, le texte dit simplement; « l'intelligence ». Mais il n'est pas douteux qu'il s'agisse uniquement de la pensée divine. - Est l'intelligence de l'intelligence. Pour être parfaitement exact, il faudrait peut-être traduire « L'acte de l'intelligence est l'acte de l'intelligence de l'acte de l'intelligence ». La nuance des mots grecs a cette force, que je n'ai pu rendre dans ma traduction. En général, les traducteurs ont adopté cette formule : « la pensée est la pensée de la pensée. » § 5. Sous lequel de ces deux rapports... Il ne semble pas que cette question soit ici résolue ; elle reste plutôt sans réponse. La pensée divine, étant immatérielle, ne peut se confondre avec son objet que si cet objet est la pensée divine elle-même. A cette condition, la pensée et l'objet pensé se confondent en elle, puisque alors il n'y a qu'un seul et même objet qui, d'une part, est pensé, et qui pense, d'autre part. - Qui ont pour but de produire quelque chose. Voir plus haut, des explications spéciales, liv. 1, ch. I, § 18. - Dans les sciences spéculatives. Id., ibid. § 6. Ou bien tout ce qui est immatériel, n'est-il pas indivisible? Cette petite phrase, qui ne se rattache pas très bien au reste de la pensée, pourrait sembler une interpolation. - N'en est-il pas ici de même que pour l'intelligence de l'homme? Dans tout ce passage, j'ai dû préciser la pensée plus que ne le fait le texte grec, afin de la rendre plus claire. J'ai, d'ailleurs, adopté la ponctuation et la légère modification qu'a proposées M. Ravaisson, Essai sur la Métaphysique, t. I, p. 199, et qu'ont suivies MM. Bonitz et Schwegler. Le sens devient ainsi très satisfaisant. - Se contemplant elle-même. Le texte n'est pas aussi précis. J'ai dû l'éclaircir d'après le contexte. |
CHAPITRE X |
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§ 1. Une autre recherche que
nous avons à faire aussi, c'est de savoir comment la nature de l'univers jouit
du bien et de la perfection. Est-ce quelque chose qui serait séparé de lui, et
qui existerait en soi et pour soi uniquement? Est-ce simplement l'ordre qui
éclate dans les choses? Est-ce l'un et l'autre à la fois, ainsi qu'on l'observe
dans l'organisation d'une armée ? Pour une armée, en effet, le bien consiste
dans le bon ordre. Mais le bien pour elle, c'est aussi son général ; et même son
général est son bien plus que tout le reste, attendu que ce n'est pas l'ordre
qui fait le général ,et que c'est, au contraire, le général qui constitue
l'ordre. Tant de chefs sont un mal; il ne faut qu'un seul chef. |
§ 1. Quelque chose qui serait sépare de lui. Il semble bien qua c'est la solution à laquelle Aristote incline; voir la fin de ce livre, et plus haut, ch. VII. - Est-ce simplement l'ordre qui éclate dans les choses? Le texte est plus concis; mais j'ai dû le développer un peu, pour plus de clarté. - Dans l'organisation d'une armée. Cette comparaison, qu'Aristote a peut-être employée le premier, a été, depuis lui, répétée bien des fois. Elle est fort juste, et elle mène directement à la croyance d'un Dieu séparé du monde, comme un général l'est de l'armée qu'il commande. § 2. Est soumis à un ordre certain. C'est une théorie absolument indiscutable, et que confirme la plus simple observation. - Pour tous les êtres. Ces affirmations d'Aristote méritent d'autant plus d'attention que ses travaux d'histoire naturelle sont plus profonds et plus exacts. - D'une maison bien conduite. Alexandre d'Aphrodise commente ce passage comme s'il avait lu dans son texte « d'un État », au lieu d'une maison. A entendre encore le commentateur grec, « les personnes libres » seraient représentées dans l'univers par les grands corps qui peuplent l'espace, et dont les mouvements sont réglés avec la plus absolue précision. § 3. Se distinguer par leurs fonctions diverses. L'expression du texte n'a pas un sens bien déterminé; celui que je donne est encore le plus plausible. - Sont soumises à cette même loi. Ici encore, le texte est moins précis que ne l'est ma traduction. § 4. Les plus acceptables. Le texte emploie une expression qui est assez peu usitée, et que j'ai eu l'occasion de signaler plus haut, liv. XI, ch. II, § 4. - Tous les philosophes. La critique est bien vague ; il aurait mieux valu désigner spécialement les philosophes quelle atteint.
§ 6. D'autres philosophes. C'est Speusippe et les Pythagoriciens; voir plus haut, ch. VII, § 8. - D'autres reconnaissent. Il s'agit ici, comme la suite le prouve, d'Empédocle et d'Anaxagore. § 7. Empédocle. Voir ce qui a été dit plus haut sur Empédocle, liv. I, ch. IV, § 4. - Partie du mélange. Qu'Empédocle appelle aussi le Sphaerus, composé de l'Amour et de la Discorde, qui se sont réunis. - Dans les deux cas. J'ai ajouté ces mots. § 8. Anaxagore. Sur Anaxagore, voir aussi plus haut, liv. I, ch. IV, § 7. - De contraire, ni au bien, ni à l'intelligence. M. Bonitz remarque, avec raison, que cette objection, qui paraît assez sérieuse, serait également valable contre le premier moteur d'Aristote, qui ne peut pas non plus avoir de contraire. § 9. Qu'on ne les mette d'accord. C'est la leçon qui semble la plus probable, et que donnent quelques manuscrits. M. Bonitz et M. Schwegler l'adoptent, ainsi que la plupart des commentateurs. Mais l'expression est bien concise et bien vague. Aristote sans doute veut dire que, pour que la théorie des contraires ait un sens, il faut un troisième terme où les deux contraires peuvent se trouver tour à tour. Ce troisième terme est la matière, où les contraires sont en puissance, puisqu'elle peut les recevoir indifféremment l'un après l'autre. - D'autres font naître les choses du néant. Voir plus haut, ch. VII, § 1. - Dans une unité obscure. Ce sont les Éléates, qui réduisaient l'univers à une unité immobile. - Comment la production des choses... M. Bonitz trouve que tout ce passage est en désordre; et il ne voit pas comment les pensées se suivent et s'enchaînent entre elles, quoique le but général de l'auteur soit évidemment une critique des philosophies antérieures. Cette remarque n'est que trop fondée. § 10. Pour les philosophes... Comme Empédocle, qui admet les deux principes contraires, l'Amour et la Discorde. § 11. Les autres philosophes. C'est une critique générale ; elle s'adresse aux systèmes qui admettent que toutes les choses ont des contraires. Aristote soutient que le premier moteur, tel qu'il le comprend, ne peut avoir de contraire; mais on ne voit pas bien comment cette impossibilité peut s'étendre jusqu'à la sagesse et à la science la plus haute, à moine qu'on ne confonde le premier moteur avec l'intelligence et la sagesse divines. - Au premier de tous les principes. C'est sans doute le moteur premier. - En puissance, ils sont identiques. C'est-à-dire que, par exemple, un objet qui est actuellement blanc, est noir en puissance; et réciproquement. Mais on peut trouver que c'est la une subtilité purement logique. - L'ignorance contraire passe à son contraire. M. Bonite trouve, avec raison, que cette phrase ne peut pas être expliquée d'une manière satisfaisante ; et le commentaire d'Alexandre d'Aphrodise ne l'éclaircit pas. M. Victor Cousin traduit ce passage de la manière sui vante: « L'ignorance, le contraire de la science, impliquerait un objet contraire de l'objet de la science, qui est ce premier être. Or, le premier être n'a pas de contraire. » § 12. Ajoutons... Tout ce § mérite la plus grande attention; et jamais peut-être Aristote ne s'est montré moins partisan du sensualisme, et ne s'est rapproché davantage du spiritualisme platonicien. - Ni harmonie céleste. Le texte n'est pas aussi formel. - Tous les Théologues et les Physiclens. Voir plus haut, liv. I, ch. III, § 14. - Si les Idées et les Nombres. Cette critique des Idées platoniciennes et des Nombres pythagoriciens ne paraît pas suffisamment amenée. Rien n'est plue éloigné des théories des Physiciens que celles de Platon. - Les causes du mouvement. Cette critique est juste, si d'ailleurs elle ne paraît pas être ici très bien à sa place. Voir plus haut, ch. VI, § 3. § 13. De choses sans grandeur. Les choses sans grandeur sont ici les Idées et les Nombres. - Quelque chose à retrancher. L'expression du texte est aussi vague que ma traduction,
§ 14. Comment les nombres
peuvent former une certaine unité. Voir la mérite objection,
exprimée plus haut, liv. VIII, ch. III, § 11. - Le principe
moteur qui fait l'unité des choses. Le texte n'est pas aussi
formel. - Quant à ceux... Ce sont sans doute les
Pythagoriciens qu'Aristote vent désigner ici. - Qu'une succession
d'épisodes. Voir plus loin la même critique formulée dans les
mêmes termes, à peu prés, et d'une manière encore plus vive; liv.
XIV, ch. III, § 7; voir aussi dans la Poétique, ch. IX, § 9,
p. 52 de ma traduction. - Tant de chefs sont un mal. Voir l'Iliade,
chant II, vers 204. Il faut rapprocher cette fin du livre et le
chapitre VIII sur l'unité de l'Intelligence divine, C'est un grand
et juste honneur pour Homère d'être cité, comme autorité, dans ces
graves discussions. Malgré quelques hésitations à propos de la
substance des astres, il est clair qu'Aristote se prononce
définitivement pour l'unité du premier moteur dans l'univers entier,
c'est-à-dire, pour le monothéisme; il ne faut jamais l'oublier. Voir
la Préface sur la théodicée aristotélique, ses défauts et ses
mérites,. |
FIN DU LIVRE XII DE LA MÉTAPHYSIQUE. |