FRAGMENTS
II. PLAIDOYER CONTRE CINESIAS
ΠΡΟΣ ΚΙΝΗΣΙΑΝ ΥΠΕΡ ΦΑΝΙΟΥ ΠΑΡΑΝΟΜΩΝ
FRAGMENTS
II.
C'est encore Athénée qui nous a conservé ce fragment. Il nous représente Cinésias dont il y est question, comme un homme qui faisait profession de nuire, qui s'était enrichi par le métier de calomniateur qu'il exerçait à Athènes, qui portait une âme fort méchante dans un corps faible et attaqué de phtisie, comme un homme enfin en butte à toutes les satyres des poètes comiques. Harpocration nous en donne à-peu-près la même idée, et dit que Lysias avait composé contre lui deux discours. Il est probable, d'après ses paroles, qu'un de ces deux discours était celui où Lysias défendait un nommé Phanias accusé par Cinésïas d'avoir violé les lois ; c'est le discours d'où est tiré le fragment qui suit. Lysias parle en passant du même Cinésias, dans le discours composé pour un citoyen accusé de s'être laissé corrompre par des présents.
[1] Θαυμάζω δὲ εἰ μὴ βαρέως φέρετε ὅτι Κινησίας ἐστὶν ὁ τοῖς νόμοις βοηθός, ὃν ὑμεῖς πάντες ἐπίστασθε ἀσεβέστατον ἁπάντων καὶ παρανομώτατον ἀνθρώπων γεγονέναι. Οὐχ οὗτός ἐστιν ὁ τοιαῦτα περὶ θεοὺς ἐξαμαρτάνων, ἃ τοῖς μὲν ἄλλοις αἰσχρόν ἐστι καὶ λέγειν, τῶν κωμῳδοδιδασκάλων 〈δ´〉 ἀκούετε καθ´ ἕκαστον ἐνιαυτόν; οὐ μετὰ τούτου ποτὲ [2] Ἀπολλοφάνης καὶ Μυσταλίδης καὶ Λυσίθεος συνειστιῶντο, μίαν ἡμέραν ταξάμενοι τῶν ἀποφράδων, ἀντὶ δὲ νουμηνιαστῶν κακοδαιμονιστὰς σφίσιν αὐτοῖς τοὔνομα θέμενοι, πρέπον μὲν ταῖς αὑτῶν τύχαις, οὐ μὴν ὡς τοῦτο διαπραττόμενοι τὴν διάνοιαν ἔσχον, ἀλλ´ ὡς καταγελῶντες τῶν θεῶν καὶ τῶν νόμων τῶν ἡμετέρων. [3] Ἐκείνων μὲν οὖν ἕκαστος ἀπώλετο, ὥσπερ εἰκὸς τοὺς τοιούτους· τοῦτον δὲ τὸν ὑπὸ πλείστων γιγνωσκόμενον οἱ θεοὶ οὕτως διέθεσαν, ὥστε τοὺς ἐχθροὺς βούλεσθαι αὐτὸν ζῆν μᾶλλον ἢ τεθνάναι, παράδειγμα τοῖς ἄλλοις, ἵν´ ἴδωσιν ὅτι τοῖς λίαν ὑβρι στικῶς τὰ θεῖα διακειμένοις οὐκ εἰς τοὺς παῖδας ἀποτίθενται τὰς τιμωρίας, ἀλλ´ αὐτοὺς κακῶς ἀπολλύουσι, μείζους καὶ χαλεπωτέρας καὶ τὰς συμφορὰς καὶ τὰς νόσους ἢ τοῖς ἄλλοις ἀνθρώποις προσβάλλοντες. [4] Τὸ μὲν γὰρ ἀποθανεῖν ἢ καμεῖν νομίμως κοινὸν ἡμῖν ἅπασιν ἐστί, τὸ δ´ οὕτως ἔχοντα τοσοῦτον χρόνον διατελεῖν καὶ καθ´ ἑκάστην ἡμέραν ἀποθνῄσκοντα μὴ δύνασθαι τελευτῆσαι τὸν βίον τούτοις μόνοις προσήκει τοῖς τὰ τοιαῦτα ἅπερ οὗτος ἐξημαρ τηκόσιν. |
[1] Je suis surpris que vous ne soyez pas indignés de voir Cinésias prendre la défense des lois, lui que vous savez tous être de tous les hommes celui qui brave le plus les dieux et les lois. N'est. ce pas lui qui a commis envers les dieux des sacrilèges qu'il ne me serait pas honnête de rapporter, et dont les poètes comiques vous entretiennent tous les ans ? [2] Apollophane, Mystalide et Lysithée, ne célébraient-ils pas avec lui des festins, affectant de choisir un jour néfaste (01), et se donnant le nom d'ennemis des dieux, nom qui convenait au sort qu'ils ont éprouvé, mais qui avoir un autre sens dans leur intention, qui annonçait leur mépris pour les dieux et pour les lois. [3] Chacun d'eux a péri comme le méritaient de tels personnages. Quant à Cinésias, si connu parmi nous, tel est l'état où les dieux l'ont réduit, que ses ennemis désirent qu'il continue de vivre, pour être un exemple qui apprenne aux autres que les dieux ne se contentent pas toujours de punir les enfants des scélérats qui les outragent ; mais, qu'exerçant leur courroux contre les impies eux-mêmes, ils leur envoient des, malheurs et des maladies plus cruelles qu'aux autres hommes. [4] Subir la mort ou des maladies ordinaires, c'est la destinée commune de tous les mortels ; se trouver depuis tant d'années dans un état de dépérissement, mourir tous les jours sans pouvoir quitter la vie, c'est le sort qui ne convient qu'aux hommes qui se permettent les forfaits que s'est permis Cinésias, |
(01) On appelait jours néfastes, des jours regardés comme malheureux, dans lesquels il était défendu de faire des sacrifices. - Ennemis des dieux. Le mot grec signifie en même temps qui hait les dieux et qui est haï des dieux. J'ai cru qu'ennemis des dieux pouvait rendre cette double idée. |