DÉMOSTHÈNE
PLAIDOYERS CIVILS
XXXIII
THÉOMNESTE ET APOLLODORE CONTRE NÉÉRA
XXII. Apollodore contre Stéphanos II | TOME II |
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XXXIII
ARGUMENT En 349, Stéphanos a fait condamner Apollodore comme auteur d'un décret illégal. Quoique les juges aient réduit à un talent le taux de l'amende, Apollodore n'en a pas moins été ruiné. Quelques années après, son gendre Théomneste et lui-même essayent de se venger en faisant à leur tour condamner Stéphanos. Ce dernier vit depuis longtemps avec une femme appelée Nééra. Théomneste et Apollodore soutiennent que cette femme est étrangère, qu'après avoir fait métier de prostituée elle a usurpé la qualité d'Athénienne, qu'elle se fait passer pour la femme légitime de Stéphanos et qu'elle a frauduleusement donné à ses enfants la possession d'état d'enfants légitimes. On sait que la loi athénienne réservait ce titre à ceux dont le père et la mère étaient Athéniens. L'accusation intentée est la γραφὴ ξενίας (V. Meier et Schoemann, p. 347). Elle est dirigée contre Nééra, mais Stéphanos s'y trouve nécessairement impliqué comme complice, et au fond c'est à Stéphanos qu'on en veut. Les conséquences d'un semblable procès étaient graves. Si l'accusation était reconnue fondée, Nééra devait être vendue comme esclave, ses enfants déclarés étrangers, Stéphanos lui-même devait être frappé d'atimie. La défense de Stéphanos est très simple. Il ne conteste, ni l'origine, ni les antécédents de Nééra. Il soutient seulement que ses enfants, ceux qu'il a présentés à la phratrie, et mariés comme étant Athéniens, sont nés d'une première femme légitime qu'il a eue avant de vivre avec Nééra. Tout le procès se réduit à ce point de fait. Il est à peine discuté dans le plaidoyer. Théomneste expose qu'il plaide par vengeance, puis Apollodore prend la parole et raconte longuement les aventures de Nééra. Quant au point litigieux, Apollodore n'apporte aucune preuve, si ce n'est une sommation faite par lui à Stéphanos et repoussée par ce dernier, sans doute pour quelque raison plausible. Ce qu'il y a de certain, c'est que le plaidoyer presque tout entier n'est qu'une longue diffamation, et les auditeurs ne s'y méprenaient pas.
Stéphanos était-il le même que celui qui avait prêté son témoignage
à Phérmion, et qu'Apollodore avait poursuivi comme faux témoin? Il
est probable que non. Autrement, dans le procès en faux témoignage
Apollodore n'aurait pas manqué de reprocher à son adversaire les
faits odieux qu'il impute au complice de Nééra. PLAIDOYER Discours de Théoemeste. [1] Bien des raisons, Athéniens, m'ont déterminé à intenter contre Nééra la présente accusation, et à me présenter devant vous. Nous avons été indignement traités par Stéphanos, nous avons couru, par son fait, les plus grands dangers, mon beau-père (01) et moi, ma soeur et ma femme. Aussi la lutte que j'entreprends aujourd'hui n'est pas une attaque, c'est une revanche; car, si nous sommes ennemis, c'est lui qui a commencé, sans avoir jamais eu à se plaindre de ce que nous ayons rien dit ou rien fait contre lui. Mais je veux d'abord vous faire connaître ce que nous avons souffert de sa part, afin que vous soyez plus indulgent pour moi en me voyant combattre pour ma défense. Je veux vous montrer comment nous avons couru les plus grands dangers de perdre notre patrie et notre honneur. [2] Un décret du peuple athénien avait conféré la qualité de citoyen d'Athènes à Pasion et à ses descendants, en récompense des services rendus par lui à l'État. Mon père (02) partagea le sentiment qui avait porté le peuple à accorder cette faveur. Il donna sa fille et ma soeur en mariage à Apollodore, fils de Pasion. C'est d'elle que sont nés les enfants d'Apollodore. Apollodore eut d'excellents procédés, soit envers ma soeur, soit envers nous tous, nous traita en réalité comme des parents, et rendit tout commun entre nous; aussi je pris à mon tour pour femme la fille d'Apollodore, qui était ma nièce. [3] Un certain temps après, Apollodore fut désigné par le sort pour siéger au Conseil. Il subit l'épreuve, et prêta le serment prescrit par la loi (03). A ce moment, la république se trouva dans des circonstances critiques. La guerre venait d'éclater, et vous savez de quoi il s'agissait pour nous. Ou vous étiez les plus forts, et alors vous obteniez la suprématie dans la Grèce, vous gardiez vos possessions, sans contestation de la part de personne, et vous en finissiez une fois pour toutes avec Philippe; ou bien vous tardiez à secourir vos alliés, vous les abandonniez, vous laissiez le corps d'expédition se dissoudre faute de solde, et alors vous perdiez ces alliés, vous passiez, aux yeux des autres Grecs, pour des gens qui ne tiennent pas leur parole, et vous vous exposiez au danger de perdre les dernières possessions qui vous restent, Lemnos, Imbros, Scyros et la Chersonèse. Tous les hommes étaient appelés et s'apprêtaient à partir pour l'Eubée et Olynthe (04). A ce moment Apollodore, étant membre du Conseil, proposa au Conseil un décret et le porta ensuite à l'assemblée du peuple avec l'approbation du Conseil. Il demanda que le peuple votât à main levée (05) sur la question de savoir si les excédants trouvés après acquittementdes dépenses publiques seraient employés au service de la guerre ou aux spectacles. Les lois portaient qu'en cas de guerre les excédants trouvés après acquittement des dépenses publiques seraient employés au service de l'armée (06). Apollodore pensait d'ailleurs d'ailleurs que peuple était maître de décider ce qu'il voulait faire de ses fonds. Enfin, il avait prêté serment de remplir fidèlement ses fonctions de conseiller du peuple athénien. C'est de quoi vous avez tous rendu témoignage dans cette circonstance. [5] En effet, lors du vote, personne ne leva la main à la contre-épreuve pour s'opposer à ce que ces fonds fussent employés au service de la guerre ; et encore aujourd'hui, si par hasard il est question du fait, tout le monde reconnaît qu'Apollodore avait bien parlé et en fut mal récompensé. Mais lorsqu'un homme a trompé par ses discours, c'est lui que les juges doivent prendre en haine et non ceux qu'il a trompés. Stéphanos que voici attaqua le décret pour illégalité (07). Il se présenta au tribunal, produisit de faux témoins pour noircir Apollodore, qu'il disait être débiteur du trésor depuis vingt-cinq ans, souleva de nombreux griefs étrangers à l'accusation, et emporta l'annulation du décret. [6] Jusque-là, il a fait ce qu'il a cru devoir faire. Nous ne lui en voulons pas. Mais au moment où l'on distribuait les bulletins aux juges pour voter sur le montant de la condamnation, nous eûmes beau le prier, il ne voulut rien entendre, et fixa le montant de la condamnation à quinze talents. Ce qu'il voulait, c'était d'infliger l'atimie à Apollodore, à ses enfants, à ma soeur, et de nous plonger tous dans la dernière misère et le plus entier dénuement. [7] En effet, tout notre avoir ne faisait pas trois talents. Ce n'était pas là de quoi payer une dette si énorme. Or, si le montant de la condamnation n'était pas payé à la neuvième prytanie (08), la somme était portée au double, et Apollodore était inscrit comme débiteur de trente talents envers le trésor public. Une fois inscrit comme débiteur public, tous les biens appartenant à Apollodore étaient déclarés propriété nationale, et ensuite vendus, et le résultat était de plonger dans la misère lui-même, ses enfants, sa femme et nous tous. Ce n'est pas tout. [8] La seconde de ses deux filles allait être privée de tout établissement. Voudrait-on en effet la prendre sans dot, des mains d'un débiteur public, réduit à la misère? Voilà les maux immenses dont. Stéphanos nous menaçait tous, sans que jamais nous lui eussions fait aucun tort. Heureusement les juges qui rendirent alors l'arrêt ne furent pas de cet avis, et de cela tout au moins j'ai pour eux une profonde reconnaissance. Ils ne consentirent pas à voir ruiner Apollodore, et fixèrent le chiffre de la condamnation à un talent, somme qu'il pouvait arriver à payer quoique non sans peine. C'est donc avec juste raison que nous avons entrepris de rendre la pareille à Stéphanos. [9] D'ailleurs, ce n'est pas la seule fois qu'il ait cherché à nous perdre. Un autre jour, il a voulu faire bannir Apollodore. Il a soulevé contre lui une calomnie, il a prétendu qu'Apollodore s'étant rendu à Aphidna (09), à la poursuite d'un esclave fugitif, avait frappé une femme et que cette femme était morte du coup qu'elle avait reçu. Il suborna des esclaves qu'il fit passer pour des marchands de Cyrène, et cita Apollodore à comparaître au Palladion (10), pour cause de meurtre. [10] L'affaire fut plaidée par Stéphanos en personne. Il attesta sous la foi du serment qu'Apollodore avait tué cette femme de sa main. Il prononça des imprécations contre lui-même, sa race et toute sa maison (11). Or, le fait était faux. Il ne l'avait ni vu, ni appris par ouï-dire, de qui que ce fût. Convaincu de faux serment et de calomnie, reconnu pour s'être mis aux gages de Képhisophon et d'Apollophane, et pour avoir reçu d'eux de l'argent afin de faire condamner Apollodore au bannissement ou à l'atimie, il obtint un petit nombre de suffrages sur les cinq-cents (12), et sortit de là avec un parjure et la réputation d'un méchant homme. [11] Voyez maintenant, juges, en calculant en vous-mêmes le cours ordinaire des choses, que serais-je devenu, moi et ma femme, et ma sœur, si Apollodore avait eu, par malheur, le sort que lui préparait Stéphanos, soit dans le premier procès, soit dans le second? Dans quel abîme de honte et de calamité ne serais-je pas tombé? [12] Aussi, de toutes parts on vient me trouver, on m'exhorte à tirer vengeance du traitement qu'il nous a fait subir. On me raille, on dit que je suis le plus lâche des hommes, si je ne venge pas des personnes qui me tiennent de si près, ma sœur, mon beau-père et ma belle-mère, mes nièces, ma femme, si je ne traîne pas devant vous cette femme qui offense ouvertement les dieux, qui est un scandale pour toute la ville, et qui foule aux pieds vos lois, si je ne vous prouve pas qu'elle est coupable, et si je ne la livre pas à votre verdict. Puisque Stéphanos a tenté de m'arracher mes proches, contrairement aux lois et à vos décrets, je viens à mon tour prouver contre lui, devant vous, qu'il vit avec une femme étrangère, contrairement à la loi, qu'il introduit des enfants qui ne sont pas les siens dans la phratrie et dans le dème , qu'il marie comme étant de lui les filles des courtisanes, qu'il a offensé les dieux qu'il vous met dans l'impuissance de conférer vos bienfaits si quelqu'un vous paraît digne d'être fait citoyen. En effet, qui voudra encore tenir du peuple cette récompense, subir de grands frais et se donner beaucoup de peine pour devenir citoyen, quand on peut, à moins de frais, recevoir tout cela de Stéphanos ? Après tout, le résultat n'est-il pas le même? [14] Je vous ai dit comment, persécuté par Stéphanos, sans provocation de ma part, j'ai intenté la présente accusation. Le moment est venu de vous montrer que Nééra est étrangère, qu'elle vit avec Stéphanos et qu'elle s'est rendue coupable, envers l'État, de nombreuses infractions aux lois. Ici, juges, je vous adresse une prière convenable, à mon sens, dans la bouche d'un jeune homme qui n'a pas l'habitude de la parole, c'est de m'autoriser à prendre Apollodore pour m'assister dans ce débat. [15] Il est plus âgé que moi, il connaît mieux la pratique des lois, il a pris soin de relever exactement tous les faits; enfin, il a eu à souffrir de la part de Stéphanos, en sorte qu'on ne lui saura pas mauvais gré de faire punir celui qui a commencé. Vous aurez ensuite à discuter la vérité quand vous aurez entendu sur tous les griefs l'accusation et la défense, et vous porterez un vote qui intéresse à la fois la religion, les lois, la justice et vous-mêmes. Discours d'Apollodore. [16] Vous savez, Athéniens, quel tort m'a fait Stéphanos, et comment je suis amené à cette place pour accuser Nééra ici présente. Théomneste vient de vous le dire. Il s'agit maintenant de prouver que Nééra est étrangère, et qu'elle enfreint les lois en vivant avec Stéphanos. C'est ce que je vais vous montrer avec évidence. Et d'abord, on va vous lire la loi aux termes de laquelle la présente accusation a été intentée par Théomneste et se trouve aujourd'hui portée devant vous. LOI. Si un étranger vit avec une Athénienne, par quelque détour ou sous quelque prétexte que ce soit, il pourra être accusé devant les thesmothètes par tout Athénien ayant droit de porter une accusation. S'il est déclaré coupable, il sera vendu, lui-même et ses biens, et le tiers du prix appartiendra an poursuivant. Il en sera de même si une étrangère vit avec un Athénien; dans ce cas l'homme qui aura pris avec lui l'étrangère déclarée coupable payera une amende de mille drachmes. [17] Vous avez entendu la loi, juges. Elle interdit toute union, soit entre une étrangère et un Athénien, soit entre une Athénienne et un étranger, comme aussi toute procréation d'enfants, par quelque détour ou sous quelque prétexte que ce soit. En cas d'infraction de cette défense, elle permet d'en accuser les auteurs devant les thesmothètes, l'étrangère comme l'étranger; et si l'accusé est déclaré coupable, elle veut qu'il soit vendu. le dis donc que Nééra, ici présente, est étrangère, et je veux vous en donner la preuve précise, en prenant les choses au commencement. [18] Les sept filles que vous savez étaient encore de petits enfants quand elles furent acquises par Nicarète, affranchie de Charisios d'Élée, et femme d'Hippias, cuisinier de ce même Charisios. Habile à deviner chez de jeunes enfants la beauté naissante, elle savait les nourrir et les dresser dans les règles, ayant fait de cela son industrie et son gagne-pain. [19] Elle les appelait ses filles, et les faisait passer pour libres, afin de pouvoir exiger davantage de ceux qui voulaient en jouir. Après avoir exploité la jeunesse de chacune d'elles, elle finit par les mettre en vente toutes les sept ensemble, à savoir : Antéia, Stratola, Aristoclée, Métanire, Phila, Isthmiade, et. enfin Nééra ici présente. [20] Quel fut l'acquéreur de chacune d'elles, et comment furent-elles affranchies par ceux qui les avaient achetées de Nicarète (13)? C'est ce que je vous montrerai dans la suite de ce discours, si vous voulez m'entendre, et qu'il me reste assez de temps. Pour le moment, je veux revenir et insister sur ce point que Nééra appartenait à Nicarète, qu'elle faisait métier de prostituée et se livrait, pour de l'argent à ceux qui voulaient jouir d'elle. [21] Lysias; le sophiste (14), amant de Métanire, s'avisa un jour d'ajouter aux dépenses qu'il faisait pour elle celles de l'initiation. Il voyait bien que toutes ses autres dépenses profitaient à la maîtresse de Métanire, au lieu qu'en conduisant cette fille à la fête et aux mystères, il aurait au moins fait quelque chose pour elle. Il invita donc Nicarète à se rendre aux mystères et à y conduire Métanire, pour qu'elle fût initiée, s'engageant à la faire initier lui-même (15). [22] A leur arrivée, Lysias ne les fit pas entrer dans sa maison, par égard pour la femme qu'il avait alors, qui était fille de Brachyllos, et sa nièce à lui, par égard aussi pour sa mère qui était âgée et faisait ménage avec lui. Ce fut chez Philostrate de Colone (16), un tout jeune homme de ses amis, que Lysias les installa toutes les deux, Métanire et Nicarète. Elles étaient accompagnées de Nééra qui alors déjà faisait métier de prostituée, quoiqu'elle ne fût pas encore en âge. [23] Pour prouver que je dis vrai, qu'elle appartenait à Nicarète, qu'elle l'accompagnait, qu'elle se livrait pour de l'argent à qui voulait dépenser pour elle, j'appelle en témoignage devant vous Philostrate lui-même. TÉMOIGNAGE. Philostrate fils de Dionysios de Colone déclare qu'à sa connaissance Nééra appartenait à Nicarète, aussi bien que Métanire, qu'elles demeuraient à Corinthe, et qu'elles descendirent chez lui lorsqu'elles vinrent aux mystères. Qu'enfin elles furent installées chez lui par Lysias fils de Képhalos, son ami intime. [24] Une autre fois, Athéniens, et depuis, Simos le Thessalien, arrive ici pour les grandes Panathénées (17), amenant avec lui Nééra ici présente, accompagnée elle-même de Nicarète. Ils descendirent chez Ctésippe, fils de Glauconidès, de Kydantides (18), et là cette même Nééra but et mangea avec eux, devant tout le monde, en vraie courtisane qu'elle était. Pour prouver que je dis vrai, j'appelle devant vous les témoins du fait. [25] Appelle-moi Euphilétos, fils de Simon d'Aixonée (19), et Aristomaque, fils de Critodémos d'Alopèque (20). TÉMOINS. Euphilétos fils de Simon, d'Aixonée; et Aristomaque fils de Critodémos, d'Alopèque, déclarent avoir vu Simos le Thessalien arriver à Athènes pour les grandes Panathénées, et avec lui Nicarète et Nééra, celle qui est accusée aujourd'hui. Ils les ont vus descendre chez Ctésippe fils de Glauconidès, et Néérà boire avec eux comme une courtisane, beaucoup d'autres personnes étant là et buvant avec eux, chez Ctésippe. [26] Dans la suite elle exerça publiquement son métier à Corinthe, et eut une grande réputation de beauté. Parmi ses amants furent le poète Xénoclidès et le comédien Hipparque, et elle fut entretenue par eux. Pour prouver que je dis vrai, je ne pourrais pas vous produire le témoignage de Xénoclidès. [27] Les lois ne lui permettent pas de déposer en justice: Au moment où vous portiez secours aux Lacédémoniens, sur la proposition de Callistrate (21), il prit la parole dans l'assemblée du peuple pour combattre cette résolution, parce qu'il s'était rendu en temps de paix adjudicataire de la taxe du cinquantième sur le blé (22), et qu'il devait faire ses versements dans la salle du Conseil à chaque prytanie. Il se trouvait ainsi dans tin cas d'exemption légale, et ne partit pas pour cette expédition, mais il fut poursuivi comme réfractaire (23) par Stéphanos que voici, qui ne le ménagea point dans son discours devant le tribunal; il fut donc déclaré coupable et frappé d'atimie. [28] Eh bien, n'est-ce pas là une chose intolérable? Des hommes qui sont nés citoyens , qui sont des membres légitimes de notre État, ce Stéphanos leur a enlevé le droit de parler, et en même temps il prend des personnes qui vous sont étrangères et il en fait, par force, des Athéniens, contrairement à toutes les lois. Mais j'appellerai devant vous Hipparque en personne, et je lui imposerai l'alternative de donner son témoignage ou de s'excuser sous la foi du serment. S'il refuse je lui donnerai citation. Appelle-moi Hipparque. TÉMOIGNAGE. Hipparque d'Athmonon (24) déclare que Xénoclidès et lui ont entretenu à Corinthe Nééra, celle qui est accusée aujourd'hui, qu'elle était courtisane, de celles qui se font entretenir : que Nééra a bu avec lui et avec Xénoclidès le poète, à Corinthe. [29] Elle eut ensuite deux amants, Timanoridas de Corinthe, et Eucratès de Leucade. Voyant à quelles dépenses ils se trouvaient entraînés par les exigences de Nicarète, qui prétendait recevoir d'eux tous les jours tout ce qu'il lui fallait pour les frais de sa maison, ils remirent à Nicarète la somme de trente mines, pour le prix de Nééra, et achetèrent d'elle cette femme, qui, d'après la loi de Corinthe, devint leur esclave commune à tous deux. lis en furent donc maîtres et possesseurs aussi longtemps qu'ils voulurent. [30] Quand ils furent sur le point de se marier ils lui déclarèrent qu'ils ne la verraient pas volontiers faire son métier à Corinthe, ni rester au pouvoir d'un éleveur de filles. Ils aimaient mieux recevoir d'elle moins d'argent qu'ils n'en avaient dépensé et la voir tirer de là quelque profit pour elle. Ils lui tirent donc remise de mille drachmes, cinq cents chacun, sur le prix de sa liberté. Pour les vingt mines formant le surplus, ils stipulèrent qu'elle les leur payerait quand elle aurait pu se les procurer. Ainsi avertie par Eucratès et Timanoridas, Nééra fait venir à Corinthe plusieurs de ses anciens amants, et entre autres Phrynion de Pæania (25), fils de Démon et frère de Démocharès, qui menait une vie de prodigue et de débauché, j'en prends à témoins ceux d'entre vous qui ont atteint un certain âge. [31] Phrynion s'étant rendu auprès d'elle, elle lui répète les paroles qu'elle a entendues d'Eucratès et de Timanoridas; elle lui remet l'argent qu'elle a recueilli de ses autres amants, sous forme de souscriptions réunies pour sa liberté (26), elle y joint ce qu'elle peut avoir gagné elle-même; enfin, elle le prie d'ajouter ce qui manqua pour parfaire les vingt mines, et de payer le tout pour elle à Eucratès et Timanoridas, en sorte qu'elle devienne libre. [32] Phrynion prêta volontiers l'oreille à ces propositions de Nééra, il prit l'argent que les autres amants de cette femme lui avaient apporté , ajouta le surplus, et paya au nom de Nééra les vingt mines à Eucratès et Timanoridas, à condition qu'elle ne ferait pas son métier à Corinthe. Pour preuve que je dis vrai, j'appelle en témoignage cet homme qui était présent. Appelle-moi Philagros de Mélite (27). TÉMOIGNAGE. Philagros de Mélité déclare qu'il était à Corinthe, lorsque Phrynion, le frère de Démochares, remit vingt mines à Timanoridas de Corinthe et à Eucratès de Leucade pour le prix de Nééra, celle même qui plaide en ce moment. Après avoir remis l'argent Phrynion partit pour Athènes, emmenant avec lui Nééra. [33] De retour ici avec cette femme, Phrynion s'en servit sans retenue et sans pudeur. Il n'y avait pas de festin où il ne la conduisit et ne la fit boire. Elle était de toutes ses parties de débauche, et lui se montrait avec elle, sans se cacher, à toute heure, en tout lieu, comme si les •assistants dussent l'admirer d'autant plus qu'il se con, tiendrait moins. Il alla ainsi avec elle dans bien des maisons, en parties de débauche, et entre autres chez Chabrias d'Aixonée. Celui-ci venait de remporter la victoire aux jeux Pythiques, sous l'archontat de Socratide (28), avec un quadrige acheté par lui aux enfants de Mitys d'Argos. A son retour de Delphes, il célébra son triomphe par un festin, au temple de Pallas Coliade (29). Là, pendant que Phrynion dormait, elle reçut, après boire, les caresses de tout le monde, et même des, domestiques de Chabrias qui servaient à table. [34] Pour prouver que je dis vrai, je vais vous produire les témoins qui ont vu le fait, et qui étaient là. Appelle-moi Chionidès de Xypété et Euthétion de Kydathénmon (30). TÉMOIGNAGE. Chionidès de Xypété, et Euthétion de Kydathémeon déclarent qu'ils ont été invités à un festin par Chabrias, lorsque Chabrias vainqueur à la course des chars célébra sa victoire par un repas. Le repas eut lieu au temple de Pallas Coliade; il est à leur connaissance que Phrynion assistait à ce banquet ayant avec lui Nééra, celle qui est accusée aujourd'hui, qu'ils y dormirent eux-mêmes ainsi que Phrynion et Nééra. Pendant la nuit ils ont aperçu plusieurs des convives se lever pour s'approcher de Nééra, et même plusieurs serviteurs, esclaves de Chabrias. [35] Fatiguée d'être ainsi indignement traitée par Phrynion, ne se trouvant pas aimée comme elle aurait voulu l'être, et ne rencontrant pas en lui autant de complaisance qu'elle aurait désiré, elle ramasse tout ce que Phrynion avait chez lui, tous les vêtements, tous les joyaux d'or dont il l'a couverte, ainsi que deux servantes, Thratta et Coccaliné, et s'enfuit à Mégare. C'était le temps où Astéios était archonte à Athènes, et le moment où vous étiez pour la seconde fois en guerre contre les lacédémoniens (31). [36] Elle passa deux ans à Mégare, pendant l'archontat d'Astéios et celui d'Alkisthène, mais le métier qu'elle faisait ne lui rapportait pas assez pour entretenir sa maison. Elle dépensait beaucoup. Les Mégariens ne sont pas généreux et ne donnent pas sans compter. Quant aux étrangers, il en venait peu, à cause de la guerre, les Mégariens étant du parti de Lacédémone , et vous maîtres de la mer. D'autre part, elle ne pouvait pas retourner à Corinthe, car elle n'avait été rachetée par Eucratès et Timanoridas qu'à cette condition. [37] Arrive enfin la paix conclue sous l'archontat de Phrasiclidès, et le combat de Leuctres entre les Thébains et les Lacédémoniens. A ce moment, Stéphanos que voici se rendit à Mégare, descendit chez Nééra comme on descend chez une courtisane, et se mit à vivre avec elle. Elle lui raconta tout ce qui s'était passé, et les outrages de Phrynion ; en même temps elle lui remit tout ce qu'elle avait emporté de chez ce dernier. Elle regrettait le séjour d'Athènes, mais elle avait peur de Phrynion, parce qu'elle l'avait offensé et qu'il avait du ressentiment contre elle. Elle connaissait bien le caractère de cet homme, violent et emporté ; elle prit donc Stéphanos pour son patron (32). [38] Stéphanos, de son côté, pendant son séjour à Mégare, la ranima par ses paroles, et lui inspira confiance ; si Phrynion, disait-il, avait le malheur de la toucher, il s'en repentirait. Personne au monde ne la maltraiterait, lui-même ferait d'elle sa femme, il prendrait les enfants qu'elle avait alors, il les présenterait à la phratrie comme étant nés de lui, et il les ferait citoyens. Il quitta donc Mégare et vint ici, amenant cette femme, et avec elle trois enfants, Proxène, Ariston et une fille qu'on appelle maintenant Phano. [39] Il l'installa, elle et ses enfants, dans la petite maison qu'il possédait près d'Hermès le Mystérieux (33), entre la maison de Dorothée d'Éleusis et celle de Clinomaque, celle même que Spintharos a achetée de lui au prix de sept mines. C'était là toute la fortune de Stéphanos, rien de plus. Il avait deux raisons pour amener ainsi cette femme avec lui. Il se procurait sans bourse délier une belle maîtresse, et de plus c'était celle-ci qui devait gagner le nécessaire et nourrir la maison. Aussi bien, il n'avait pas d'autre moyen d'existence, à part ce que pouvait lui rapporter son métier de sycophante. Mais [40] Phrynion apprit que Nééra était ici, et qu'elle demeurait chez Stéphanos. Il prit avec lui quelques jeunes gens, se rendit à la maison de Stéphanos, et enleva Nééra. Il fallut que Stéphanos l'arrachât de ses mains par une revendication en liberté, dans les formes légales, et se portât caution pour elle devant le polémarque (34). Pour prouver que je dis vrai, je vais vous produire comme témoin de ces faits l'homme qui était alors polémarque. Appelle-moi Aeétès de Kiriadae (35). TÉMOIGNAGE. Aeétès de Kiriadae déclare ce qui suit : Tandis qu'il était polémarque, Nééra, celle même qui se défend en ce moment, fut forcée par Phrynion, frère de Démocharès, de donner caution; les répondants furent Stéphanos d'Ercoades, Glaukétès de Céphisia, Aristocrate de Phalère (36). [41] Cautionnée par Stéphanos, et logeant chez lui, elle n'en continua pas moins à faire le même métier qu'auparavant; elle exigea seulement un plus haut prix de ceux qui voulaient obtenir ses faveurs. N'était-elle pas devenue une femme d'apparence honnête et pourvue d'un mari ? Stéphanos s'entendait avec elle pour faire de bons coups. S'il surprenait auprès de Nééra quelque riche étranger sans expérience, il le retenait captif comme trouvé en flagrant délit d'adultère et lui extorquait ainsi une grosse somme d'argent. [42] Il le fallait bien, car ni Stéphanos ni Nééra ne possédaient aucune fortune, et ils n'avaient pas de quoi suffire aux dépenses de chaque jour. Le ménage, d'ailleurs, était lourd. Il fallait d'abord nourrir lui et elle, puis trois enfants qu'elle avait amenés chez lui, deux servantes, un domestique, outre qu'elle avait pris l'habitude de ne se priver de rien, tandis que d'autres avaient pourvu à ses dépenses. [43] Ajoutez que la politique ne rapportait à Stéphanos rien qui vaille la peine d'en parler. Il n'était pas encore passé orateur, il était encore sycophante, de ceux qui vocifèrent auprès de la tribune, qui se font payer pour accuser, pour dénoncer, pour servir de prête-noms aux autres, jusqu'au jour où il s'est mis au service de Callistratos d'Aphidna (37). Comment et pourquoi? c'est ce que je vous ferai connaître aussi tout à l'heure (38), quand j'aurai fini avec Nééra, quand j'aurai montré qu'elle est étrangère, qu'elle est coupable envers vous et qu'elle a commis des impiétés envers les dieux. [44] Vous verrez que lui aussi mérite d'être puni, et non pas moins que Nééra, mais bien plus sévèrement encore, car lui qui se vante d'être Athénien, il a bravé les lois, vous et les dieux. Au lieu de rougir de ses fautes et de se faire oublier, il s'est conduit en sycophante à l'égard de moi et de maint autre; et par là il a provoqué contre lui-même et contre cette femme la poursuite de Théomneste, accusation terrible, qui révèle ce qu'est Nééra et met au jour la turpitude de Stéphanos. [45] Phrynion intenta donc contre Stéphanos une action (39), pour lui avoir arraché Nééra et l'avoir rendue à la liberté, et pour avoir recelé les objets que Nééra avait emportés de chez lui. Mais leurs amis les rapprochèrent et leur persuadèrent de les constituer arbitres. Pour Phrynion, ce fut Satyros d'Alopèque, frère de Lacédémonios, qui siégea comme arbitre. Pour Stéphanos, ce fut Saunas de Lamptra (40). Tous deux, d'un commun accord, s'adjoignirent Diogiton d'Acharnes (41). [46] Ces arbitres se réunirent dans le temple (42), écoutèrent les deux parties et cette créature elle-même sur tout ce qui s'était passé, et rendirent leur sentence, à laquelle Stéphanos et Phrynion donnèrent leur acquiescement. Elle portait que cette créature serait libre et maîtresse d'elle-même, que les objets emportés par Nééra de chez Phrynion seraient tous rendus à ce dernier, à l'exception des vêtements, des joyaux d'or et des servantes, c'est-à-dire des choses achetées pour l'usage personnel de cette créature, qu'enfin elle vivrait avec chacun des deux, alternativement, de deux jours l'un. Du reste, toutes conventions qu'ils pourraient faire entre eux à ce sujet devaient être observées. L'entretien de cette femme devait être en tous cas à la charge du possesseur; par ce moyen, ils devaient être désormais bons amis et n'avoir plus de ressentiment l'un contre l'autre. [47] Tels sont les termes de l'arrangement qui fut imposé par les arbitres à Phrynion et à Stéphanos, au sujet de Nééra. Pour prouver que je dis vrai, on va vous lire le témoignage qui affirme le fait. Appelle-moi Satyros d'Alopèque, Saunas de Lamptra, Diogiton d'Acharnes. TÉMOIGNAGE. Satyros d'Alopèque, Saurias de Lamptra, Diogiton d'Acharnes déclarent qu'ils ont fait en qualité d'arbitres, entre Stéphanos et Phrynion, un arrangement au sujet de Nééra, celle qui est accusée aujourd'hui. Les termes de cet arrangement étaient bien tels que les énonce Apollodore. ARRANGEMENT. Il a été fait entre Phrynion et Stéphanos l'arrangement suivant : Ils useront l'un et l'autre de Nééra, chacun le même nombre de jours chaque mois, à moins qu'ils ne fassent eux-mêmes entre eux quelque autre convention (43). [48] Après cet arrangement, ceux qui assistaient Stéphanos et Phrynion pour cet arbitrage et toute la contestation firent ce qu'on fait d'ordinaire en pareil cas, surtout quand la querelle s'est élevée à propos d'une courtisane. Ils allèrent souper tour à tour chez celui des deux qui possédait Nééra, et elle-même soupait et buvait avec eux, en courtisane qu'elle était. Pour prouver que je dis vrai, appelle-moi les témoins qui se trouvaient avec eux, Eubule de Probalinthe, Diopithe de Mélité, Ctéson de Kéramées (44). TÉMOIGNAGE. Eubule de Probalinthe, Diopithe de Mélité, Ctéson de Kéramées déclarent qu'après l'arrangement conclu au sujet de Nééra entre Phrynion et Stéphanos, ils ont souvent soupé chez ces derniers et bu avec eux en compagnie de Nééra, celle qui est accusée aujourd'hui, les jours où Nééra était chez Stéphanos, comme ceux où elle était chez Phrynion. [49] Ainsi donc, elle était esclave de naissance, elle a été vendue deux fois, elle a fait métier de se prostituer comme courtisane, elle s'est enfuie de chez Phrynion pour se rendre à Mégare, et de retour ici elle a fourni des répondants, devant le polémarque, comme étrangère. Voilà ce que mon plaidoyer vous révèle, ce qui vous est confirmé par les témoins. Je veux maintenant vous faire voir ce même Stéphanos, que voici, rendant témoignage contre elle et déclarant qu'elle est étrangère. [50] La fille de cette Nééra, ce petit enfant que sa mère avait amené chez Stéphanos, qu'on nommait alors Strybèle (45) et qui s'appelle aujourd'hui Phano, fut mariée par Stephanos, qui la donna, comme étant sa fille, à un Athénien, Phrastor d'Aegilia (46), avec une dot de trente mines. Phrastor est un artisan, gagnant tout juste de quoi vivre. Une fois installée chez lui, elle ne sut pas se faire aux habitudes de son mari, elle voulut imiter les façons de sa mère et le dérèglement qui régnait chez celle-ci. Après tout, n'avait-elle pas été élevée dans cette absolue liberté? [51] Phrastor ne trouva en elle ni une tenue convenable, ni aucune disposition à recevoir ses avis. En même temps il sut, à n'en pas douter, qu'elle était fille non de Stéphanos, mais de Nééra, et qu'il avait été trompé. En effet, il l'avait prise pour épouse comme étant fille de Stéphanos et non de Nééra, et il la croyait née à Stéphanos d'un mariage contracté avec une Athénienne, avant que Stéphanos fût allé vivre avec Nééra. Ému de cette découverte, Phrastor se tint pour offensé et indignement trompé. Il renvoya cette créature, après un an de ménage, enceinte, et ne rendit pas la dot. [52] Stéphanos lui intenta une action à fin d'aliments, à l'Odéon (47). En effet, aux termes de la loi, celui qui renvoie sa femme doit rendre la dot, sinon il en est constitué débiteur avec intérêt à neuf oboles; et en outre, le gardien légal de cette femme peut intenter pour elle une action en aliments, à l'Odéon. Alors Phrastor porte contre Stéphanos une accusation devant les thesmothètes ; il dit que Stéphanos, étant Athénien, lui a donné en mariage la fille d'une étrangère comme étant sa propre fille, et il invoque la loi que nous invoquons nous-mêmes en ce moment. Lis-moi cette loi. LOI. Si quelqu'un donne en mariage à un Athénien une femme étrangère comme étant sa fille, il sera frappé d'atimie, ses biens seront confisqués et le tiers appartiendra à la partie qui aura obtenu la condamnation. L'accusation sera portée devant les thesmothètes, par toute personne ayant le droit d'accuser, comme les poursuites contre les étrangers qui se font passer pour citoyens. [53] On vient de vous lire la loi aux termes de laquelle Stéphanos a été accusé par Phrastor devant les thesmothètes. Mais Stéphanos comprit que s'il était convaincu d'avoir donné en mariage la fille d'une étrangère, il s'exposait à être frappé des peines les plus sévères; il fit donc un arrangement avec Phrastor, renonça à la dot et supprima l'action d'aliments. Phrastor de son côté en fit autant pour l'accusation portée devant les thesmothètes. Pour prouver que je dis vrai , j'appelle Phrastor lui-même comme témoin de ces faits, et je le forcerai de témoigner conformément à la loi. [54] Appelle-moi Phrastor d'Ægilia. TÉMOIGNAGE. Phrastor d'Ægilia déclare ce qui suit : Dès qu'il se fut aperçu que Stéphanos lui avait donné en mariage la fille de Nééra comme étant sa propre fille, il intenta une accusation contre lui devant les thesmothètes, il chassa cette femme de sa maison et cessa de vivre avec elle. Ensuite, Stéphanos ayant intenté contre lui une action d'aliments, à l'Odéon, il conclut un arrangement avec Stéphanos afin de supprimer l'accusation pendante devant les thesmothètes, et l'action d'aliments intentée contre lui par Stéphanos. [55] Il faut maintenant que je vous produise un autre témoignage émané de Phrastor, de sa phratrie et de sa gens et prouvant que cette Nééra est étrangère. Peu de temps après avoir renvoyé la fille de Nééra, Phrastor tomba malade. Il se trouva réduit à un état fâcheux et manquant de tout. Depuis longtemps il était brouillé avec ses parents et n'avait pour eux que des sentiments de colère et de haine. Sans enfant d'ailleurs, et malade comme il l'était, il se laissa prendre par les soins qu'il reçut de Nééra et de sa fille. Elles allaient en effet chez lui [56] pendant qu'il était malade, n'ayant personne pour soigner son mal; elles lui portaient tout ce gui pouvait le soulager et veillaient à tout. Vous savez vous-mêmes combien l'assistance d'une femme est précieuse dans les maladies, auprès d'un malheureux qui souffre, Depuis que Phrastor avait renvoyé la fille de Nééra, enceinte, en apprenant. qu'elle était fille de Nééra et non de Stéphanos, et furieux d'avoir été trompé, un enfant était né de cette femme, Phrastor se laissa amener à reprendre cet enfant et à en faire son fils adoptif. [57] Les raisons qui le décidèrent étaient du reste naturelles et judicieuses. Il se disait qu'il allait mal, sans grand espoir d'en réchapper. Il ne voulait pas laisser ce qu'il avait à ses parents, ni descendre au tombeau sans postérité. Il adopta donc l'enfant et le prit chez lui. Or, jamais il n'eût fait cela en bonne santé, et je vais vous en donner la preuve la plus forte et la plus évidente. [58] Phrastor ne fut pas plus tôt relevé de cette maladie, il ne se sentit pas plus tôt valide et bien portant, qu'il épousa en légitime mariage une femme athénienne, fille légitime de Satyros de Mélité et soeur de Diphilos. Ainsi, qu'il n'ait pas recueilli cet enfant de son plein gré, qu'il ait cédé à l'influence de la maladie, au désir de ne pas rester sans postérité, aux soins de ces femmes, à son aversion pour ses parents auxquels il ne voulait pas laisser son héritage s'il venait à mourir, c'est ce dont vous avez dès à présent preuve suffisante. Mais la suite va vous le faire voir bien plus clairement encore. [59] Le jour où Phrastor étant malade présenta l'enfant né de la fille de Nééra à la phratrie, et à la gens des Brytides (48), qui est aussi la sienne, les membres de la gens votèrent contre l'admission de l'enfant, et refusèrent de l'inscrire comme un des leurs. Ils savaient, sans doute, ce qu'était cette femme que Phrastor avait épousée en premier lieu, la fille de Nééra, comment Phrastor avait renvoyé cette créature, comment enfin, sous l'influence de la maladie, Phrastor s'était déterminé à reprendre l'enfant. [60] Phrastor leur intenta une action pour n'avoir pas inscrit son fils; mais, devant l'arbitre, ceux-ci le mirent en demeure d'affirmer avec serment que dans sa conviction cet enfant était son fils, né d'une femme athénienne en légitime mariage. Sommé par les membres de la gens de faire cette affirmation devant l'arbitre, Phrastor recula devant le serment, et s'abstint de le prêter. [61] Pour prouver que je dis vrai, je vais vous produire comme témoins ceux des Brytides qui étaient présents. TEMOINS. Timostrate d'Hécalé, Xanthippe d'Eroeades, Eualkès de Phalère, Anytos de Lakiades, Euphranor d'Ægilia, Nicippe de Képhalé (49) déclarent ce qui suit : Ils appartiennent ainsi que Phrastor d'Aegilia à la gens qui porte le nom de Brytides (50). Quand Phrastor voulut présenter son fils à la gens, ils s'opposèrent à cette présentation, sachant que le fils de Phrastor était né de la fille de Nééra. [62] Ainsi l'évidence est faite. Vous avez vu ceux qui tie¬nent de plus près à Nééra témoigner contre elle, et déclarer qu'elle est étrangère. C'est Stéphanos, qui la possède maintenant et vit avec elle ; c'est Phrastor, qui a épousé la fille de cette femme. Stéphanos n'osa pas plaider au sujet de cette fille. Accusé lui-même par Phrastor, devant les thesmothètes, d'avoir, étant Athénien, donné en mariage, à lui Phrastor, la fille d'une étrangère, il renonce à la dot, et ne la retire pas. [63] Quant à Phrastor, après avoir épousé la fille de cette Nééra, il la renvoie lorsqu'il sait qu'elle n'est pas la fille de Stéphanos, et ne rend pas la dot. Plus tard, quand la maladie, l'isolement, l'aversion pour ses parents, le déterminent à adopter l'enfant et à le présenter à sa gens, au moment où les membres de cette gens votent contre sa demande et lui défèrent le serment, il ne veut pas le prêter, il préfère ne rien affirmer qui ne soit la vérité, et épouse ensuite une autre femme, une Athénienne, conformément à la loi. Tous ces actes remplis au grand jour, sont autant de témoignages accusateurs contre Nééra et Stéphanos, et prouvant que celle-ci est une étrangère. [64] Considérez maintenant la turpitude et la scélératesse de ce Stéphanos. Vous verrez encore par là que Nééra n'est pas Athénienne. Épaenétos d'Andros, ancien amant de cette Nééra, et ayant fait beaucoup de dépense pour elle, descendait chez eux lorsqu'il faisait un séjour à Athènes, à cause de sa liaison avec Nééra. [65] Stéphanos lui tendit un piége. Un jour, il l'envoie chercher pour le faire venir à la campagne sous prétexte d'un sacrifice, le prend eu flagrant délit avec la fille de cette Nééra, lui fait peur, et tire de lui trente mines. Il exige pour cautions Aristomaque, l'ancien thesmothète, et Nausiphilos, fils de l'ancien archonte Nausinique, et laisse aller Époenétos sur la promesse de payer l'argent. [66] Une fois sorti de là et libre d'agir, Épænétos accuse Stéphanos devant les thesmothètes pour fait de séquestration illicite. Il invoque la loi : En cas de séquestration illicite pour prétendu fait d'adultère, porte cette loi, une accusation peut être intentée devant les thesmothètes à raison de cette séquestration. Si l'auteur du fait est déclaré coupable et jugé l'avoir commis avec guet-apens, le plaignant sera .exempt de toute peine, et les cautions déchargées de leur engagement; mais si le plaignant est déclaré adultère, la loi veut qu'il soit livré par ses cautions à la partie adverse, et celle-ci, dans l'enceinte même du tribunal, lui fait subir le traitement qu'elle veut, comme à un adultère, à la seule condition de ne pas employer le couteau. [67] C'est aux termes de cette loi qu'Épænétos se porta accusateur. Il avoua qu'il s'était servi de la fille, mais soutint qu'il n'était pas adultère; qu'en effet, elle était fille non de Stéphanos mais de Nééra, que sa mère à elle connaissait leurs relations, qu'il avait dépensé beaucoup pour elles, et que n'était lui qui nourrissait toute la maison quand il se trouvait à Athènes. Il produisit encore une autre loi, aux termes de laquelle ne peuvent être saisis comme adultères ceux qui ont affaire à des femmes trouvées dans un lieu de prostitution, ou connues pour provoquer les gens dans l'agora. On était bien, disait-il, dans les termes de la loi. La maison de Stéphanos était bien un lieu de prostitution. Ces gens-là n'avaient pas d'autre métier, et c'est surtout de cela qu'ils vivaient. [68] Tel était le langage d'Épaenétos, et c'est là ce que portait son acte d'accusation. Stéphanos vit bien qu'il allait être reconnu pour éleveur de filles et sycophante. Il offre donc un compromis à Épænétos, proposant pour arbitres les cautions, qu'il déchargera de leur cautionnement en même temps qu'Épænétos supprimera l'accusation. [69] Épaenétos accepta ces conditions et supprima l'accusation qu'il avait intentée contre Stéphanos. Une réunion eut lieu, les cautions siégeant comme arbitres, et là Stéphanos ne trouva rien à dire sur le droit. Il conclut seulement à ce qu'Épænétos fournît quelque chose pour doter la fille de Nééra. Il fit valoir son peu de fortune et la mésaventure déjà arrivée à cette femme avec Phrastor; il dit qu'il avait perdu la dot, et qu'il ne pourrait plus en fournir une autre. [70] « Tu as eu la fille, lui dit-il, tu peux bien faire quelque chose pour elle. » Il joignait à cela d'autres paroles engageantes, de celles qu'on emploie pour se tirer d'un mauvais pas. Après les avoir écoutés tous deux, les arbitres les mirent d'accord et décidèrent Épaenétos à fournir mille drachmes pour la dot de la fille de Nééra. Pour preuve qu'en tout ceci je dis vrai, j'appelle devant vous comme témoins ceux-ci mêmes qui ont été cautions et arbitres. [71] TÉMOINS. Nausiphilos de Képhalé, Aristomaque de Képhalé déclarent ce qui suit : Ils s'étaient portés cautions d'Épænétos d'Andros, le jour où Stéphanos prétendit avoir surpris Époenétos en flagrant délit d'adultère. Lorsque Épaenétos fut sorti de chez Stéphanos, et redevenu libre d'agir, il intenta une accusation contre Stéphanos, devant les thesmothètes, pour séquestration illégale. Ils furent alors pris pour amiables compositeurs, et accordèrent entre eux Epaenétos et Stéphanos. L'accord fut fait dans les termes produits par Apollodore. ACCORD. Stéphanos et Épaenétos ont été mis d'accord par les amiables compositeurs aux conditions suivantes : Les parties ne garderont aucun souvenir de ce qui s'est passé au sujet de la séquestration. Épaenétos donnera mille drachmes à Phano pour sa dot, comme ayant souvent joui d'elle. De son côté Stéphanos mettra Phano à la disposition d'Épaenétos toutes les fois que ce dernier fera séjour en cette ville et voudra coucher avec elle. [72] Bientôt, ce même Stéphanos et cette même Nééra poussèrent encore plus loin l'audace et l'impudence. Cette femme qui avait été publiquement reconnue pour étrangère, et que Stéphanos prétendait avoir trouvée en flagrant délit d'adultère, ils ne se contentèrent plus de la faire passer pour Athénienne ; ils jetèrent les yeux sur Théogène de Cothocides (51), désigné par le sort pour être archonte-roi, homme d'une bonne naissance, mais pauvre et sans expérience des affaires. Stéphanos l'assista dans ses épreuves, et vint à son aide pour la dépense au moment de son entrée en charge. Il s'insinua auprès de lui, devint son assesseur à prix d'argent (52), lui donna pour épouse cette créature, fille de Nééra, et la lui fiança comme étant sa propre tille. Voilà jusqu'où il a poussé le mépris des lois et de vous. [73] Et cette femme a sacrifié pour vous, selon les rites mystérieux, au nom de la ville d'Athènes, elle a vu ce qu'elle ne devait pas voir étant étrangère. Telle que vous la connaissez, elle est entrée là où de tant d'Athéniens nul ne peut entrer que la femme du roi (53); elle a reçu le serment des prêtresses qui servent de ministres pour les cérémonies sacrées (54), elle a été donnée pour épouse à Dionysos, elle a accompli, au nom de la ville d'Athènes, les rites de nos pères pour le service des dieux, rites nombreux, sacrés, mystérieux. Eh quoi ! ces choses que tous ne doivent pas entendre, peut-on les faire accomplir, sans offenser les dieux, par la première venue, surtout par une femme comme celle-là, ayant fait ce qu'elle a fait? [74] Mais je veux remonter plus haut à ce sujet, et vous donner exactement la raison de chaque chose. Vous en serez d'autant plus attentifs à punir, et vous verrez bien que la cause soumise en ce moment à votre vote n'est pas seulement la vôtre et celle des lois, mais aussi celle du culte dû aux dieux. Il s'agit de punir le sacrilège et de frapper le crime. Jadis, Athéniens, cette ville obéissait à des maîtres, et la royauté appartenait à tous ceux qui l'emportaient sur les autres, comme fils de cette terre. Tous les sacrifices étaient accomplis par le roi. Les mystères les plus augustes étaient célébrés par sa femme, et cela était juste puisqu'elle était la reine. [75] Plus tard, Thésée réunit nos ancêtres dispersés, et fonda le gouvernement populaire. La ville devint grande et peuplée. Le roi n'en fut pas moins désigné par le peuple, à mains levées, et choisi parmi les plus distingués pour leur valeur. Mais, pour sa femme, nos pères établirent par une loi qu'elle serait Athénienne, qu'elle n'aurait pas connu d'autre homme et aurait été mariée étant vierge, afin de pouvoir célébrer selon les rites des ancêtres les mystères sacrés, au nom de la ville d'Athènes, afin que le service divin s'accomplit dans toutes les règles, sans qu'il y eût rien d'omis ni rien d'innové. [76] Ils gravèrent cette loi sur une stèle de pierre qu'ils dressèrent dans le temple de Dionysos, auprès de l'autel, au marais. Cette stèle est encore debout aujourd'hui , et on peut y lire la loi écrite en lettres attiques à moitié effacées par le temps. Par là, le peuple rendait témoignage de sa piété envers le dieu, et laissait en dépôt aux générations futures le type des qualités que nous exigeons de celle qui doit être donnée pour épouse au dieu, et accomplir les cérémonies sacrées. C'est pourquoi ils ont dressé cette stèle dans le plus ancien et le plus vénéré des temples de Dionysos, au marais, pour que l'inscription ne fut pas vue de tous. Ce temple, en effet, ne s'ouvre qu'une fois par an, le douze du mois d'anthestérion (55). [77] Eh bien, ces rites anciens et vénérables, conservés par vos ancêtres avec tant de grandeur et de solennité, vous aussi, Athéniens, vous devez les maintenir et punir ceux qui méprisent insolemment vos lois en même temps qu'ils commettent envers les dieux un téméraire sacrilège. Il le faut pour deux raisons : d'abord pour que ces hommes soient punis de leurs fautes, et ensuite pour donner à réfléchir aux autres, et leur inspirer la crainte de se rendre coupables envers les dieux et notre pays. [78] Je veux maintenant appeler le héraut sacré, qui prête son ministère à la femme du roi lorsqu'elle reçoit le serment des prêtresses, portant leurs corbeilles devant l'autel, avant qu'elles touchent aux choses sacrées. Il faut que vous entendiez la formule du serment, ou du moins ce qu'il est permis d'entendre, il faut que vous voyiez combien toutes ces cérémonies sont augustes, combien saintes et antiques. SERMENT DES PRÊTRESSES. Je suis sans tache, franche et pure de toute souillure venant d'une personne impure et du contact de l'homme, et je célèbre aussi les autres fêtes (56) en l'honneur de Dionysos, suivant les rites des ancêtres, aux temps marqués. [79] Vous venez d'entendre le serment, et les rites transmis par les ancêtres, dans la mesure où il est permis d'en parler; vous savez comment cette femme, que Stéphanos avait fait passer pour sa fille et avait donnée pour épouse à Théogène, archonte-roi, a célébré elle-même ces mystères sacrés, et a reçu le serinent des prêtresses; vous savez enfin que l'interdiction de révéler ces mystères s'applique même aux femmes chargées de les célébrer. Eh bien, maintenant je vais vous produire un témoignage qui porte sur un fait secret, mais vous reconnaîtrez, par les circonstances mêmes, que ce témoignage est vrai et ne laisse pas de place au doute. [80] A l'époque de la célébration de ces mystères aux jours marqués, les neuf archontes montèrent à l'Aréopage. Aussitôt, le sénat de l'Aréopage, qui rend tous les jours tant de services à notre ville pour les choses du culte, demanda qui était cette femme de Théogène, et découvrit la vérité. Il maintint l'observation des rites et frappa Théogène d'une amende, la plus forte qu'il lui soit permis de prononcer, mais en secret et en usant de ménagement (57). Vous savez que l'Aréopage ne peut punir un Athénien d'une amende arbitraire. Une explication eut donc lieu. [81] Le sénat de l'Aréopage se montra fort mécontent, et prononça l'amende contre Théogène pour avoir épousé une telle femme, et pour lui avoir permis de célébrer les mystères sacrés au nom de la ville. Alors Théogène pria et supplia avec instance. Il n'avait pas su, disait-il, qu'elle était fille de Nééra; il avait été trompé par Stéphanos, et l'avait prise comme étant la fille légitime de ce dernier, suivant la loi. S'il avait fait Stéphanos son assesseur, c'était par inexpérience et par simplicité. Il avait compté sur lui pour remplir les fonctions de sa charge, comme sur un homme disposé à rendre service, et c'est ce qui l'avait déterminé à devenir son gendre. [82] « Voulez-vous, ajouta-t-il, être assurés que je ne mens pas? Je vais vous en donner la plus forte et la plus éclatante de toutes les preuves. Je renverrai cette femme de ma maison puisqu'elle est fille de Nééra et non de Stéphanos. Si je fais cela, vous me croirez sans doute sur parole quand je vous dis que j'ai été trompé. Et si je ne le fais pas, alors punissez-moi comme un criminel coupable d'un sacrilège envers les dieux. » [83] Ainsi promettait et suppliait Théogène, et l'Aréopage, moitié par compassion pour tant de simplicité, moitié par conviction, jugeant bien que Théogène avait été réellement trompé par Stéphanos, accorda un sursis. A peine descendu de l'Aréopage, la première chose que fit Théogène fut de renvoyer de sa maison cette femme fille de Nééra, et de chasser de son conseil ce Stéphanos qui l'avait trompé. A ce prix, les membres de l'Aréopage cessèrent de poursuivre Théogène et de se montrer mécontents; ils le considérèrent comme ayant été trompé et lui pardonnèrent. [84] Pour prouver que je dis vrai, je vais appeler devant vous Théogène lui-même comme témoin de ces faits, et je vais le contraindre à déposer. Appelle-moi Théogène d'Erchia (58). TÉMOIGNAGE. Théogène d'Erchia déclare ce qui suit : Lorsqu'il était archonte-roi il épousa Phano, la croyant fille de Stéphanos. Mais s'étant aperçu qu'il avait été trompé, il renvoya cette femme et cessa de cohabiter avec elle; en même temps il chassa Stéphanos de son conseil et ne lui permit plus de siéger comme son assesseur. [85] Prends-moi la loi que voici, celle qui règle ces choses, et donnes-en lecture. Il faut que vous sachiez ceci : étant ce qu'elle était, ayant fait ce qu'elle a fait, ce n'est pas seulement aux cérémonies dont je viens de parler qu'elle devait s'abstenir, qu'il lui était interdit de voir, de sacrifier, de célébrer aucun des rites transmis par nos ancêtres, non, c'est à toutes les cérémonies qui s'accomplissent dans Athènes. Lorsqu'une femme a été prise en flagrant délit d'adultère, la loi lui interdit l'approche des cérémonies du culte public, dont elle a cependant permis l'accès même à la femme étrangère, même à la femme esclave, soit pour voir, soit pour prier. [86] Les seules femmes auxquelles la loi interdise l'approche des cérémonies du culte public, sont celles qui ont été prises en flagrant délit d'adultère. Si elles s'introduisent au mépris de la loi, on peut leur faire subir impunément tout ce qu'on veut, jusqu'à la mort exclusivement. Et, en ce cas, la loi donne au premier venu le droit de punir. Pourquoi la loi a-t-elle fait cela? Pourquoi a-t-elle dit que jusqu'à la mort exclusivement cette femme pourra recevoir tous les outrages sans recours ouvert devant aucun tribunal ? C'est afin de tenir les cérémonies exemptes de toutes souillures et de tous sacrilèges. C'est pour inspirer aux femmes une crainte capable de leur faire garder les bonnes moeurs, fuir le vice, vivre honnêtement dans leur maison; pour leur apprendre que, si l'une d'elles enfreint ces devoirs, elle sera exclue à la fois de la maison de son mari et des cérémonies du culte national. [87] Pour vous convaincre qu'il en est bien ainsi, on va vous lire le texte même de la loi. Prends-moi la loi. LOI SUR L'ADULTÈRE. Lorsqu'un mari aura pris sa femme en flagrant délit d'adultère, il ne lui sera plus permis de cohabiter avec elle. S'il le fait, il sera frappé d'atimie. Pareillement, il est interdit à la femme prise en flagrant délit d'adultère d'approcher des cérémonies du culte national. Si elle s'en approche, on pourra lui faire impunément subir toute espèce de traitement, jusqu'à la mort exclusivement. [88] Je veux maintenant, Athéniens, vous produire le témoignage du peuple athénien lui-même, pour vous montrer quel est son zèle pour ces cérémonies, et combien il en est préoccupé. Certes, le peuple athénien est maître souverain de toutes choses en cette ville, et il a le droit de faire tout ce qui lui plaît. Eh bien, il s'est imposé à lui-même des lois auxquelles il est nécessaire de se conformer si l'on veut créer un citoyen, tant il a trouvé belle et magnifique la faveur accordée à l'homme qui devient Athénien. Ce sont ces mêmes lois qui sont aujourd'hui foulées aux pieds par ce Stéphanos, et par ceux qui contractent de pareilles unions. [89] Écoutez-les pourtant, ces lois. La lecture en sera bonne pour vous. Vous verrez comment les plus belles, les plus magnifiques faveurs, accordées aux bienfaiteurs d'Athènes ont été avilies par ces gens-là. Et d'abord, il y a une loi qui s'adresse au peuple, et lui interdit de créer Athénien quiconque n'a pas mérité de devenir citoyen par des services signalés rendus au peuple d'Athènes. Ce n'est pas tout, quand le peuple a donné son consentement et octroyé la faveur, la décision n'est pas encore définitive. Il faut qu'elle soit confirmée à la plus prochaine assemblée par le suffrage de plus de six mille Athéniens votant au scrutin secret. [90] La loi charge les prytanes de placer les urnes et de remettre les boules de vote au peuple à l'entrée, avant que les étrangers s'introduisent et qu'on n'enlève les barrières (59). Elle veut que chacun reste maître absolu de ses résolutions, examine, à part lui, l'homme dont il s'agit de faire un citoyen, et se demande si celui qui va recevoir cette faveur en est vraiment digne. Enfin, après tout cela, elle a ouvert à tout Athénien, contre cet homme, l'accusation d'illégalité. Le premier venu peut se présenter devant le tribunal et prouver que l'étranger n'est pas digne de cette faveur, qu'il est devenu Athénien contrairement aux lois. Cela s'est vu plus d'une fois. [91] Le peuple avait accordé cette faveur, trompé par les discours des solliciteurs. Une accusation d'illégalité a été intentée et portée devant le tribunal. Là, il a été prouvé que le bénéficiaire de cette faveur n'en était pas digne, et le tribunal l'a retirée. Il y a des précédents nombreux et anciens. Ce serait une affaire de les parcourir. Je citerai seulement un exemple qui est dans tontes vos mémoires. Pitholas de Thessalie et Apollonide d'Olynthe (60) avaient été faits citoyens par le peuple. Le tribunal leur a enlevé ce titre. [92] Ce ne sont pas là certes des faits anciens que vous puissiez ignorer. Eh bien, à toutes ces dispositions si belles, si énergiques, sur le droit de cité et les formalités à remplir pour devenir Athénien, une autre loi s'ajoute encore et la plus importante de toutes. Voyez quelles sages précautions le peuple a prises pour lui-même et pour les dieux, comme il a veillé à ce que les sacrifices fussent offerts au nom de la ville suivant les règles du culte! Quiconque a été fait citoyen par le peuple athénien ne peut, ce sont les termes exprès de la loi, ni devenir l'un des neuf archontes, ni participer à aucune cérémonie religieuse. Mais à leurs enfants le peuple accorde tout sans réserve ; à une seule condition, c'est qu'ils soient nés d'une femme athénienne, légitimement donnée en mariage. [93] Pour vous prouver que je dis vrai, je vais vous fournir un puissant et éclatant témoignage. Mais auparavant je veux remonter aux origines de la loi, vous dire comment elle a été portée, en vue de qui elle a été rédigée pour de braves gens qui s'étaient montrés amis dévoués de notre nation. Vous verrez par là comment cette faveur du peuple, réservée pour être la récompense de grands services, est traînée dans la boue, et à quel point la libre disposition de vos faveurs vous est enlevée par ce Stéphanos et par ceux qui ont femme et enfants de la même manière que lui. [94] Vous le savez, Athéniens! seuls entre tous les Grecs, les Platéens vinrent à votre secours à Marathon, au moment où Datis, qui commandait l'armée du roi Darius, venant d'Érétrie, après avoir conquis l'Eubée, descendait dans l'Attique en grande force et commençait à tout ravager. Aujourd'hui encore, il y a un monument qui nous retrace leur vaillante conduite, c'est la fresque qui se trouve au portique des peintures. Ils y sont représentés courant chacun de toutes ses forces pour nous porter secours. C'est la troupe qui porte les casques béotiens. [95] Une autre fois, Xerxès marchait contre la Grèce, et les Thébains s'étaient donnés aux Mèdes, mais les Platéens ne voulurent pas se détacher de notre alliance. Seuls entre tous les Béotiens ils prirent les armes. La moitié occupa les Thermopyles à côté des Lacédémoniens et de Léonidas pour faire tête au barbare qui s'avançait, et ils périrent tous ensemble; les autres montèrent sur vos galères, car ils n'avaient pas de navires à eux, et combattirent avec vous sur mer, à Artémise et à Salamine. [96] Enfin, à Platées, ils prirent part à la dernière bataille livrée contre Mardonius, commandant l'armée da roi, avec vous et avec les autres libérateurs de la Grèce, et furent de ceux qui, se dévouant pour le salut de tous, rendirent la liberté aux autres Grecs. Plus tard, le roi des Lacédémoniens, Pausanias, essaya de vous faire un affront. Les lacédémoniens seuls avaient été jugés par les autres Grecs dignes de l'hégémonie, et Athènes qui en réalité avait été à la tête de la lutte pour la liberté, redoutant la jalousie de ses alliés, ne s'opposait pas à ce que Lacédémone eût cet honneur. [97] Mais ce n'était pas assez pour le roi des Lacédémoniens, Pausanias. Les Grecs, qui avaient pris part à la bataille de Platées et au combat naval de Salamine, avaient fait faire en commun un trépied , et l'avaient déposé dans le temple de Delphes en l'honneur d'Apollon, comme prémices du butin fait sur les barbares. Pausanias, enflé de l'avantage obtenu sur nous, y fit graver ces vers : Après avoir détruit l'armée des Mèdes, le commandant en chef des Grecs, Pausanias, a offert à Phobos ce monument. comme si ce fait d'armes et cette offrande eussent appartenu à lui seul et non à tous les alliés ensemble. [98] Les Grecs furent indignés. Les Platéens, agissant au nom des alliés, intentèrent aux Lacédémoniens, devant les Amphictions, une action qui allait jusqu'à mille talents, et les forcèrent à effacer le distique, pour inscrire les noms des villes qui avaient pris part à l'oeuvre commune. Aussi furent-ils poursuivis d'une haine implacable par les Lacédémoniens et la race royale. Sur le moment, les Lacédémoniens n'eurent pas l'occasion de rien leur faire, mais environ cinquante après, Archidamos, fils de Zeuxidamos, roi des Lacédémoniens, fit en pleine paix une tentative pour s'emparer de Platées. [99] Ce fut de Thèbes que partirent les coups, avec l'aide d'Eurymaque, fils de Léontiadès, alors béotarque. Les portes furent ouvertes pendant la nuit par Nausiclidès et quelques complices, gagnés à prix d'argent. Quand les Platéens s'aperçurent que les Thébains étaient entrés pendant la nuit, et que leur ville avait été ainsi occupée par surprise en pleine paix, ils prirent les armes de leur côté et formèrent leurs troupes. Quand vint le jour, ils virent que les Thébains n'étaient pas nombreux. Il n'était entré qu'une tête de colonne. L'eau qui était tombée en abondance pendant la nuit les avait empêchés de pénétrer en masse. En effet, le fleuve Asopos coulait à pleins bords et n'était pas aisé à passer, surtout la nuit. [100] Voyant donc les Thébains dans la ville, et apprenant qu'ils n'étaient pas entrés tous, les Platéens marchent contre eux, en viennent aux mains, sont les plus forts, se hâtent de tout tuer avant qu'un renfort arrive, et dépêchent vers vous un messager pour vous apprendre ce qui s'est passé, vous faire connaître le combat et leur victoire, et vous demander de leur porter secours si les Thébains viennent ravager leur pays. A cette nouvelle les Athéniens coururent en toute hâte au secours des Platéens, et les Thébains voyant que les Athéniens étaient venus au secours des Platéens s'en retournèrent chez eux. [101] Ainsi échoua la tentative des Thébains, et les Platéens tuèrent tous les prisonniers qu'ils avaient faits dans le combat. De là grande fureur des Lacédémoniens. Cette fois ils ne cherchèrent plus de prétexte et marchèrent sur Platées. Dans tout le Péloponnèse, à l'exception des Argiens, chaque ville reçut l'ordre de leur envoyer les deux tiers de son contingent. Tous les autres Béotiens, les Locriens, les Phocéens, les Maliens, les Oetéens, les Ænianes, furent sommés de se lever en masse. [102] Les Lacédémoniens investirent donc en grande force le rempart des Platéens, puis ils sommèrent ces derniers de répondre s'ils consentaient à livrer leur ville en gardant leur territoire et la jouissance de leurs biens, et à se détacher de l'alliance d'Athènes. Les Platéens refusèrent, et répondirent qu'ils ne pouvaient rien faire sans les Athéniens. En conséquence, les Lacédémoniens les assiégèrent pendant deux ans, élevèrent un double retranchement autour de la ville, et dirigèrent contre elle des attaques nombreuses sous toutes les formes. [103] Les Platéens furent enfin réduits au désespoir. Manquant de tout et n'ayant plus de secours à attendre, ils tirèrent au sort entre eux. Les uns restèrent pour soutenir le site ; les autres, mettant à profit la nuit, la pluie et un vent violent, sortirent de la ville , franchirent le mur d'investissement, sans être aperçus par l'armée ennemie, en égorgeant les gardes, et se réfugièrent ici dans un état affreux, par un bonheur inespéré. Quant à ceux qui étaient restés, voici quel fut leur sort. La ville fut prise de vive force. Tous les hommes furent égorgés, les enfants et les femmes réduits en esclavage, tous ceux du moins qui ne s'étaient pas réfugiés à Athènes en apprenant l'approche des Lacédémoniens (61). [104] Eh bien, ces hommes qui venaient de donner un si éclatant exemple de dévouement à notre nation, qui avaient sacrifié tous leurs biens, et leurs enfants et leurs femmes, eu quels termes leur avez vous donné le droit de cité? Voyez encore une fois les termes dont vous vous êtes servis, car vos décrets mettent la loi dans tout son jour, et vous feront reconnaître que je dis vrai. Prends-moi le décret que voici et donne-leur en lecture. DÉCRET CONCERNANT LES PLATÉENS. Hippocrate a dit : Les Platéens seront Athéniens à partir de ce jour. Il y aura égalité devant la loi entre eux et les autres Athéniens. Ils auront part à toutes les choses auxquelles les Athéniens ont droit de participer, même aux choses sacrées et aux choses saintes, à l'exception des sacerdoces ou fonctions religieuses auxquels on est appelé par sa naissance: Ils ne pourront pas non plus être des neuf archontes, mais leurs enfants le pourront. Les Platéens seront répartis dans les dèmes et les tribus. Après cette répartition il ne sera plus permis à aucun Platéen de devenir Athénien, à moins qu'il n'obtienne cette faveur du peuple athénien. [105] Voyez, Athéniens, quel beau langage et avec quelle exactitude l'orateur a rédigé ce décret au nom du peuple athénien. Avant tout, il a jugé à propos que les Platéens recevant cette récompense fussent examinés un à un devant le tribunal. Deux questions étaient posées : Est-il Platéen? est-il ami d'Athènes? On voulait éviter que plusieurs sous ce prétexte ne s'introduisissent dans la cité. En second lieu, la liste des examinés devait être gravée sur une stèle de pierre et placée dans l'acropole, auprès de la déesse, pour assurer aux générations futures la transmission de la faveur accordée, et pour procurer à chacun une preuve authentique de sa parenté. [106] Plus loin, le décret ne permet de devenir Athénien qu'à la condition de le devenir actuellement, et de subir l'examen devant un tribunal, de peur que d'autres, en se disant Platéens, n'obtinssent par fraude le droit de cité. Le décret impose ensuite aux Platéens eux-mêmes une condition dans l'intérêt d'Athènes et des dieux : Aucun Platéen ne pourra être désigné par le sort pour être l'un des neuf archontes, ni pour exercer aucun sacerdoce, mais leurs enfants le pourront, s'ils sont nés d'une femme athénienne légitimement donnée en mariage. [107] Eh quoi donc! Ces gens étaient nos voisins. Sans contredit, personne entre tous les Grecs n'avait rendu plus de services à notre nation. Cependant, vous avez exprimé avec une exactitude admirable toutes les conditions mises à la jouissance de la faveur accordée. Et cette femme qui s'est livrée à la prostitution dans toute la Grèce, vous lui permettriez de verser sur vous l'opprobre et le mépris, d'insulter Athènes et d'outrager les dieux impunément, elle qui n'est Athénienne ni par la naissance, ni par un décret du peuple lui conférant le droit de cité! [108] Dans quel lieu ne s'est-elle pas livrée à la prostitution ? Où n'est-elle pas allée pour un salaire payé à tant par jour? Ne l'a-t-on pas vue dans tout le Péloponnèse, dans la Thessalie et la Magnésie, avec Simos de Larisse (62) et Eurydamas fils de Médios, à Chios et dans la plus grande partie de l'Ionie avec Sotadès de Crète? Elle suivait les amants qui la prenaient à loyer, lorsqu'elle était encore au pouvoir de Nicarète. Or, une femme vivant sous un maître, s'attachant à qui la paye, que peut-elle faire, dites-moi, sinon se prêter à tous les désirs de ceux qui la prennent à leur service? Et c'est une pareille femme, publiquement connue de tous pour avoir couru le monde entier, que vous déclareriez Athénienne? [109] Que répondrez-vous quand on vous demandera : Quelle belle action avez-vous faite? De quelle souillure, de quel sacrilège, n'allez-vous pas vous charger vous-mêmes? Jusqu'au jour où cette femme a été accusée, où le débat s'est engagé, où tout le monde a su qui elle était, quels sacrilèges elle avait commis, elle seule était coupable, vous n'étiez que négligents. Et encore, parmi vous, les uns ne savaient pas; les autres, bien informés, exprimaient leur indignation en paroles sans pouvoir passer aux effets, tant que personne ne mettait en cause la coupable et n'appelait à voter sur elle. Mais aujourd'hui il n'y a pas un de vous qui ne soit instruit; tout dépend de vous, et vous êtes les maîtres de punir. C'est donc vous qui devenez responsables du sacrilège envers les dieux si vous ne punissez pas cette femme. [110] Et puis, au retour, que dirait chacun de vous à sa femme, à sa fille, à sa mère, après avoir prononcé l'acquittement de l'accusée ? On vous demandera où vous étiez. Vous répondrez : « Nous avons siégé comme juges. » On voudra savoir aussitôt qui vous avez jugé : « Nééra, direz-vous, n'est-il pas vrai? Et voici ce qu'elle a fait : Étant étrangère, elle vit avec un Athénien, contrairement à la loi ; elle a donné en mariage à Théogène, quand il était archonte-roi, sa Ille déjà prostituée. Enfin, cette fille a offert au nom d'Athènes les sacrifices mystérieux, et a été donnée pour épouse à Dionysos. » Vous direz cela, et le reste, reprenant ainsi toute l'accusation, car elle vous a été présentée sur chaque chef, avec assez de soin pour se graver aisément dans vos mémoires. [111] Quand vous aurez fini on vous adressera cette question : « Eh bien, qu'avez-vous fait ? » Vous direz : « Nous avons prononcé l'acquittement. Mais alors, quels reproches vous feront les honnêtes femmes pour avoir admis Nééra à prendre part comme elles-mêmes aux cérémonies publiques et au culte des dieux! Et quant à celles qui ne sont pas sages, ne leur enseignez-vous pas clairement à faire tout ce qu'elles voudront, du moment où il n'y aura plus pour elles rien à craindre ni de vous ni des lois? Car vous montrer indulgents et indifférents à l'égard de Nééra c'est vous donner l'apparence d'approuver sa conduite. [112] Oui, mieux vaudrait n'avoir jamais vu un pareil procès, que de le voir terminé par un acquittement. Après cela, en effet, il y aura pour les prostituées pleine et entière licence de vivre avec qui elles voudront, et d'attribuer leurs enfants au premier venu. Les lois seront impuissantes chez vous, et il dépendra du caprice des courtisanes de venir à bout de tout ce qu'elles voudront. Prenez donc en main la cause des femmes athéniennes. Prenez garde que les filles des pauvres ne puissent plus être mariées. [113] Aujourd'hui, si une fille est sans fortune, la loi vient à son aide et lui fournit une dot suffisante, si peu que la nature lui ait donné de beauté. Mais si Nééra est acquittée, au mépris et en violation de la loi, alors c'en est fait. La prostitution atteindra les filles de mères athéniennes, celles du moins qui n'auront pu être établies à cause de leur pauvreté. En même temps, les courtisanes n'auront plus rien à envier aux femmes libres, du jour où elles pourront impunément se permettre de légitimer leurs enfants comme elles voudront, et de participer aux fonctions religieuses, aux cérémonies sacrées, aux honneurs établis en cette ville. [114] Chacun de vous doit donc se dire que dans ce vote il s'agit de sa femme, ou de sa fille, ou de sa mère, comme d'Athènes, des lois et de la religion. Il s'agit d'empêcher que ces femmes respectables ne soient confondues avec cette prostituée, qu'élevées par leurs parents avec une parfaite sagesse et un soin vigilant, et mariées conformément aux lois, elles ne se trouvent réduites à entrer en partage avec la créature qui, chaque jour, s'est livrée plusieurs fois à plusieurs, de toutes les façons, même les plus obscènes, au gré de chacun. [115] Oubliez que, moi qui vous parle, je suis Apollodore, que ceux qui vont vous présenter la défense ou l'appuyer sont des citoyens, figurez-vous que celte lutte est engagée entre les lois d'un côté, et de l'autre cette Nééra, sur tous les méfaits qu'elle a commis. Quand vous examinerez l'accusation, écoutez parler les lois elles-mêmes, qui sont comme les fondements de cette ville, et suivant lesquelles vous avez juré de prononcer. Que veulent-elles, et en quoi ont-elles été enfreintes? Quand vous en serez à la défense, rappelez-vous l'accusation portée par les lois, la preuve fournie des faits allégués, et regardant cette femme en face, demandez-vous une seule chose : Nééra a-t-elle fait cela? [116] Il est encore à propos de songer à ceci, Athéniens: Archias, qui fut autrefois hiérophanle (63), fut convaincu de sacrilège devant le tribunal pour avoir offert les sacrifices au mépris des rites de nos pères. Vous l'avez puni. On l'accusait, entre autres choses, d'avoir, lors de la fête des récoltes (64), égorgé sur l'autel qui est dans la cour du temple à Éleusis une victime présentée par la courtisane Sinope. Or, les rites défendent d'immoler des victimes ce jour-là, et le droit d'immoler appartenait à la prêtresse et non à lui. [117] Eh bien, voyez quelle serait l'inconséquence! Cet homme était de la race des Eumolpides, issu d'ancêtres illustres, et citoyen de cette ville; il a paru avoir commis je ne sais quelle infraction aux rites, il a été condamné. Rien n'a pu le sauver; ni les supplications de ses parents, ni celles de ses amis, ni les liturgies accomplies au service d'Athènes, soit par lui, soit par ses ancêtres, ni sa qualité de hiérophante. Vous l'avez trouvé coupable, vous l'avez frappé. Et quand cette Nééra a commis un sacrilège envers le même dieu et envers les lois, elle et sa fille, vous hésiteriez à la punir ! [118] Je ne vois pas, en vérité, ce qu'on pourra vous dire pour la défense. Dira-t-on que cette Nééra est Athénienne et vit avec Stéphanos en légitime mariage? Mais les témoins ont déclaré qu'elle est étrangère et qu'elle a été l'esclave de Nicarète. Soutiendra-t-on qu'elle n'est pas son épouse, qu'il l'entretient chez lui comme sa concubine? Mais les enfants nés d'elle et présentés à la phratrie par Stéphanos, mais sa fille donnée en mariage à un Athénien prouvent d'une manière éclatante qu'elle est chez Stéphanos à titre d'épouse. [119] Ira-t-on jusqu'à nier les faits relevés par l'accusation, déclarés par les témoins? Mais à coup sûr, ni Stéphanos lui-même, ni personne pour lui ne réussiront à prouver que cette Nééra est Athénienne. Voici, paraît-il, quelle sera la défense de Stéphanos. Il dira que cette femme est chez lui à titre non d'épouse mais de courtisane, que les enfants ne sont pas d'elle, qu'il les a eus d'une autre femme qui était Athénienne, sa parente, et qu'il prétend avoir épousée auparavant. [120] Pour détruire ce mensonge impudent, pour renverser l'édifice de la défense et des témoignages que Stéphanos s'est procurés, j'ai fait à ce dernier une sommation précise; c'était mon droit, et en même temps un moyen sûr de vous faire connaître la vérité. Je l'ai sommé de me livrer les servantes qui étaient attachées à Nééra lorsqu'elle vint chez Stéphanos en sortant de Mégare, Thratta et Coccaliné, et celles que Nééra acheta depuis, étant chez Stéphanos, Xennis et Drosis. [121] Elles savent pertinemment que Proxène aujourd'hui décédé, qu'Ariston, encore vivant, Antidoride le coureur, et Phano, surnommée Strybèle, qui a été mariée à Théogène l'ancien archonte-roi, sont nés de Nééra. Dans le cas où la question ainsi donnée aurait fourni la preuve que Stéphanos a épousé une femme athénienne et qu'il a eu ces enfants non de Nééra, mais d'une autre femme, qui était Athénienne, je me déclarais prêt à me désister du procès et à ne pas présenter l'accusation. [122] Qu'est-ce que vivre en mariage avec une femme? C'est avoir d'elle des enfants, présenter les fils à la phratrie et au dème, donner les filles en mariage en qualité de père. Nous prenons une courtisane pour nos plaisirs, une concubine pour recevoir d'elle les soins journaliers qu'exige notre santé, nous prenons une épouse pour avoir des enfants légitimes et une fidèle gardienne de tout ce que contient notre maison (65). Si donc il a réellement épousé auparavant une femme athénienne, et si ces enfants sont nés de cette femme et non de Nééra, il pouvait en faire la preuve par le plus sûr de tous les témoignages, en livrant ces servantes. [123] Pour vous prouver que j'ai fait la sommation, on va vous lire le témoignage et la sommation elle-même. Lis d'abord le témoignage et ensuite la sommation. TÉMOIGNAGE. Hippocrate fils d'Hippocrate de Probalinthe, Démosthène fils de Démosthène de Pwania, Diophanès fils de Diophanès d'Alopèqde, Diomène fils d'Archélaos de Kydathénéon, Dinias fils de Phormidas de Kydantides, Lysimaque fils de Lysippe d'Agilia (66) déclarent ce qui suit : Ils étaient présents dans l'agora lorsque Apollodore fit sommation à Stéphanos, demandant que les servantes lui fussent livrées pour être interrogées à la torture sur les faits relevés dans l'accusation portée par Apollodore contre Stéphanos au sujet de Nééra. Stéphanos ne consentit pas à livrer les servantes. La sommation faite est bien cella que produit Apollodore. [124] Lis maintenant la sommation même que j'ai adressée à Stéphanos. SOMMATION. Ceci est la sommation faite par Apollodore à Stéphanos, au sujet des faits relevés dans l'accusation, à savoir que Nééra étant étrangère vit maritalement avec un Athénien. Apollodore est prêt à recevoir les servantes de Nééra, celles qu'elle a amenées avec elle de Mégare, Thratta et Cocealiné, et celles qu'elle a depuis achetées chez Stéphanos, Xennis et Drosis. Elles savent pertinemment que les enfants de Nééra sont de Stéphanos, à savoir Proxêne aujourd'hui décédé, Ariston encore vivant, Antidoride le coureur, et Phano. Il les appliquera à la torture. Si elles avouent que ces enfants sont de Stéphanos et de Nééra, Nééra sera vendue conformément aux lois et les enfants seront déclarés étrangers. Si elles n'avouent pas que ces enfants sont de Nééra, si elles disent qu'ils sont nés d'une autre femme qui était Athénienne, Apollodore se déclare prêt à se désister du procès contre Nééra, et si ces femmes sont endommagées par la torture, il payera le dommage. [125] Voilà quelle fut ma sommation, juges, mais Stéphanos ne voulut pas l'accepter. N'est• il pas vrai, juges, que par là Stéphanos a prononcé lui-même, qu'il a reconnu Nééra coupable au sujet de l'accusation que j'ai portée contre elle? Ne suit-il pas de là que je vous ai dit vrai, que les témoignages produits par moi sont sincères, que cet homme au contraire mentira nécessairement, quoi qu'il dise; qu'enfin il sera convaincu, par son propre fait, de ne rien dire d'utile, du moment où il n'a pas voulu livrer à la torture les servantes que je lui demandais? [126] Quant à moi, juges, c'est pour venger les dieux, que ces gens-là ont offensés par leurs sacrilèges, c'est pour me venger moi-même que j'ai poursuivi les accusés et que je les ai amenés ici, sous votre verdict. Vous autres, juges, en présence des dieux, que ces gens-là ont offensés par leurs infractions aux lois, et auxquels le vote d'aucun d'entre vous ne peut rester caché, rendez un juste verdict. Vengez les dieux d'abord, et vous-mêmes ensuite. Faites cela, et tout le monde dira que vous avez rendu une sentence belle et juste au sujet de Nééra, accusée par moi d'avoir, étant étrangère, vécu maritalement avec un Athénien.
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(01) Apollodore, on le voit quelques lignes plus loin, est à la fois le beau-frère et le beau-père de Théomneste. (02) Dinias, père de Théomneste et de la femme d'Apollodore. Il est nommé dans le plaidoyer pour Phormion, § 17, dans le premier plaidoyer contre Stéphanos, § 55, et dans le plaidoyer contre Polyclès, § 24. (03) Le conseil des Cinq-Cents se composait de citoyens désignés par le sort pour une année. C'était lui qui était chargé de préparer et d'exécuter les décrets de l'assemblée. Comme tous les fonctionnaires désignés par le sort, les conseillers ne pouvaient siéger qu'après avoir subi un examen constatant leur aptitude, et prété serment de donner en toute occasion l'avis qui leur paraîtrait le meilleur. Voy. Perrot, p. 10-36. (04) Ces événements se passaient en 350. Plutarque, tyran d'Érétrie, en Eubée, avait appelé les Athéniens à son secours contre les Phocéens unis aux Macédoniens. (05) L'assemblée du peuple volait sur les décrets, soit à main levée, χειροτονία, soit au scrutin, ἐπιψήφισις. (06) Ces excédants de fonds étaient constamment détournés de leur destination légale pour être employés aux dépenses des spectacles. Eubule avait même fait passer un décret portant peine de mort contre quiconque proposerait de rendre ces fonds au service de la guerre. C'est un des sujets qui reviennent le plus souvent dans les Olynthiennes. Voy. Boech, liv. Il, chap. XXVII. (07) Γραφὴ παρανόμων. L'illégalité consistait sans doute en ce qu'Apollodore, étant débiteur public, n'avait pas qualité pour parler au peuple. (08) Nous avons déjà expliqué cette procédure: La prytane était une période de trente–six jours, le dixième de l'année. A proprement parler, c'était le temps où chacune des dix tribus exerçait à son tour la présidence du conseil. (09) Aphidna, dème de la tribu Léontide ou de la tribu Αeantide. (10) La poursuite des meurtres non prémédités, φόνοι ἀκουσίοι, était portée d'après les lois de Dracon devant le tribunal des épηètes réunis au Palladion. Ces lois sont rapportées dans le plaidoyer contre Macartatos. Ici les éphètes sont remplacées par un tribunal ordinaire de cinq cents héliastes, mais l'ancienne procédure est toujours suivie. Ainsi , la citation consiste en un acte solennel qui emporte à la fois interdiction et assignation (προείπειν). (11) Le serment et les imprécations n'étaient que la conséquence forcée de la procédure criminelle, qui exigeait le serment des deux parties. (12) C'est-à-dire que Stéphanos obtint un peu plus du cinquième des voix, car s'il n'avait pas obtenu ce chiffre, il aurait été condamné à l'amende de mille drachmes, et Théomneste n'eût pas manqué de relever cette circonstance. (13) Toute cette histoire est racontée à peu près de la même façon par Athénée, liv. XIII, p. 593. (14) C'est l'orateur Lysias. (15) Les grands mystères d'Éleusis se célébraient tous les ans le 15 du mois de boédromion, c'est-à-dire vers le 8 septembre. Voy. Barthélemy, Anacharsis, chap. LXVIII. (16) Colone, dème de la tribu Aegéide. Philostratos de Colone est celui qui plus tard accusa Chabrias dans le procès d'Orope. (17) Les grandes Panathénées se célébraient tous les cinq ans, au mois d'hécatombéon (juillet). Voy. Barthélemy, Anacharsis, chap. XXIV. (18) Kydantides, dème de la tribu Ægéide. (19) Æxoné, dème de la tribu Cécropide. (20) Alopèque, dème de la tribu Antiochide. (21) Ceci se passait en 369, lors de l'invasion d'Épaminondas et des Thébains en Laconie. (22) Le droit de douane à l'entrée et à la sortie s'élevait uniformément à 2 pour cent, et de là le nom de cinquantième. Il était affermé, comme on le voit, non en bloc, mais par nature de marchandise. (23) L'accusation dirigée contre Xénocratès avait un nom. Elle s'appelait γραφὴ ἀστρατείας. (24) Athmonon, dème de la tribu Cécropide. (25) Paeania, dème de la tribu Pandionide. Le frère de Phrynion, Démocharès, est celui dont il est parlé dans le plaidoyer contre Évergos et Mnésibule, § 22, 28, 32. Quant à leur frère Démon, ce pouvait bien être l'oncle paternel de Démosthène. (26) Nous trouvons encore ici un exemple de ces souscriptions ou contributions volontaires (ἔρανος) si fréquentes chez les Grecs. (27) Mélité, dème de la tribu Cécropide. (28) L'archontat de Socratide correspond à l'année 373. Le Chahrias dont il s'agit est celui qui s'illustra plus tard comme général et remporta la victoire de Naxos. (29) Le temple de Pallas Coliade était situé au cap Sunion, à l'extrémité méridionale de l'Attique. (30) Xypété, dème de la tribu Cécropide; Kydathénéon, dème de la tribu Pandionide. (31) Les archontats d'Astéios et d'Alkistbénès correspondent aux années 372 et 371. (32) Ἑρμῆ ψιθυρισρής, un buste d'Hermès représenté dans l'attitude d'un homme qui parle à l'oreille d'un autre. (33) Tout métèque devait prendre pour patron et pour répondant un citoyen, προστάτης. Faute de remplir cette obligation, il était exposé à une poursuite spéciale appelée γραφὴ ἀπροστασίου. (34) C'était le polémarque, et non les thesmothètes, qui donnait les actions concernant les étrangers. (35) Kiriade, dème de la tribu Oenéide ou de la tribu Hippothoontide. (36) Ercoeades, dème de la tribu Hippothoontide, Céphisia, de la tribu Érechthéide, Phalère, de la tribu Antiochide ou Oeantide. (37) Sur l'orateur Callistratos d'Aphidna, voy. les plaidoyers contre Timothée et contre Polyclès. (38) Apollodore a oublié de tenir sa promesse, car il ne revient plus sur ce fait. (39) L'action intentée par Phrynion était une simple action civile, sans doute la δίκη βλάβης, ou action en dommages-intérêts. (40) Lamptra, dème de la tribu Érechthéide. (41) Acharnes, dème de la tribu Oenéide. (42) C'était en effet dans les temples que se réunissaient ordinairement les arbitres. Nous ne savons de quel temple il s'agit ici. (43) Les conventions de ce genre se rencontrent fréquemment dans l'ancienne comédie. On voit que le théâtre était en ce point la fidèle peinture des moeurs du temps. (44) Probalinthe, dème de la tribu Pandionide, Mélité, de la tribu Cécropide ou Oenéide, Kéramées, dème de la tribu Acmantide. (45) Le nom de Strybèle signifie à proprement parler toupie. (46) Aegilia, dème de la tribu Antiochide. (47) La restitution de la dot avait toujours lieu en cas de divorce, alors même que la femme était renvoyée par son mari pour cause d'adultère. Nous voyons cependant qu'elle ne fut pas ordonnée dans le cas dont il s'agit. L'intérêt légal de la dot à restituer était de neuf oboles (par mine et par mois), soit 18 pour cent. Pourquoi Stéphanos, agissant comme κύριος; de Phano réclame-t-il non le capital de la dot, mais seulement des aliments? C'est ce que nous ignorons. L'action d'aliments, δίκη σίτου, était portée devant un tribunal qui siégeait à l'Odéon, c'est-à-dire dans l'édifice destiné aux concours de musique. (48) Οἱ γεννῆται, les membres de la gens. (49) On voit par là que les membres d'une même gens pouvaient appartenir à des dèmes différents. (50) Hécalé, dème de la tribu Léontide, Ercοades, de la tribu Hippothoontide, Phalère, de la tribu Œantide ou Antiochide, Lakiades, de la tribu Aenéide, Ægilia, de la tribu Antiochide, Céphalé, de la tribu Acamantide. (51) Cothocides, dème de la tribu Oenéide. (52) Nous avons déjà vu que les archontes se donnaient des assesseurs, πάρεδοι, et qu'avant d'entrer en charge ils subissaient certaines épreuves, δοκιμασία. (53) L'archonte roi était le grand prêtre chargé des sacrifices. Sa femme était chargée comme lui d'accomplir certaines cérémonies religieuses. (54) Γεραιραί, les femmes vouées au service des autels de Dionysios. (55) Vers le 8 février, au moment de la célébration des grandes fêtes de Dionysos. (56) Τὰ θεοίνια καὶ τὰ ἰοβάκχεια. C'étaient lev deux autres fêtes annuelles consacrées à Dionysos et tombant la première à la fin de posidéon (décembre), la seconde le 16 élaphébolion (mars). (57) L'aréopage exerçait à Athènes une sorte de censure, spécialement en tout ce qui concernait le culte. (58) Erchia, dème de la tribu Oeantide ou Aegéide. (59) Τὰ γέρρα, les barrières mobiles qui dans le lieu de l'assemblée séparent les votants des spectateurs. (60) Pitholas avait été exilé de Phères, en 352, et Apollonide avait été exilé d'Olynthe vers la même époque. Un fragment du discours prononcé par leur accusateur est cité par Aristote, Rhétorique, III, 6. (61) Toute cette histoire du siège de Platées paa les Lacédémoniens est raconté par Thucydide, livre II. Ces événements se passaient en l'année 424. (62) Un des nobles Thessaliens qui plus tard embrassèrent le parti de Philippe. (63) Le hiérophante était le principal ministre du temple d'Eleusis. Il devait appartenir à la famille des Eumolpides. Ses fonctions étaient à vie, mais on voit qu'il pouvait être destitué par jugement. Voy. Barthelemy, Anacharsis, chap. LXXVIII. (64) Τὰ Ἀλῶα, les fêtes de l'aire à battre le blé. On offrait les prémices de la récolte à Déméter et sans doute aussi à Bacchus, car il est dit plus bas que Nééra a offensé le même dieu qu'Archiad. ces fêtes se célébraient en posidéon (décembre). (65) Le droit romain fait les mêmes distinctions entre scortum, pellex ou concubina et uxor, voy. la L. 144, D., De verborum significatione, l. 17. (66) Probalinthe, dème de la tribu Pandionide, Paeania, de le tribu Pandionide, Alopèque, de la tribu Antiochide, Kydathénéon, de la tribu Pandionide, Kidantides, de la tribu Aegéide, Aegilia, de la tribu Antiochide. Le second témoin ne peut être que Démosthène, l'orateur.
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