La science : le rationalisme

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1. La recherche d'Epicure.  
Refus de la superstition et triomphe de la raison

 

LUCRECE : Disciple d'Epicure (342-270 A.C.N.) et, à travers celui-ci, de Démocrite (né vers 460 A.C.N.), il a écrit un poème philosophique et didactique en 6 chants De rerum natura à la gloire d'Epicure et de son explication du monde. Resté à l'écart de la vie troublée de son époque, il a une ambition : libérer l'humanité par la connaissance. En s'inspirant de la doctrine d'Epicure, il tente d'arracher l'homme à ses passions, à ses craintes, à ses superstitions. La physique épicurienne est fondée sur la sensation qui informe sur le réel et sur l'intelligence qui l'explique; les dieux, s'ils existent, sont relégués loin de la terre, ils ne sont pas intervenus dans la création de l'univers et ne s'occupent pas des affaires humaines.

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Humana ante oculos foede cum vita iaceret
in terris, oppressa gravi sub religione
quae caput a caeli regionibus ostendebat,
horribili super aspectu mortalibus instans,
primum Graius homo mortales tollere contra
est oculos ausus, primusque obsistere contra;
quem neque fama deum nec fulmina nec minitanti
murmure compressit caelum, sed eo magis acrem
irritat animi virtutem, effringere ut arta
naturae primus portarum claustra cuperet.  

Ergo vivida vis animi pervicit et extra
processit longe flammantia moenia mundi,
atque omne immensum peragravit mente animoque,
unde refert nobis victor quid possit oriri,
quid nequeat, finita potestas denique cuique
quanam sit ratione atque alte terminus haerens.

   vocabulaire

Alors qu'aux yeux de tous, la vie humaine gisait, immonde, sur terre, écrasée sous le poids de la superstition qui montrait son visage du haut des régions du ciel et menaçait les mortels de son aspect terrifiant, le premier, un Grec, simple mortel, osa lever ses yeux d'homme contre elle, et, le premier, osa lui faire face. Ni les fables des dieux, ni les éclairs, ni le ciel aux grondements inquiétants ne l'arrêtèrent : ils stimulèrent d'autant plus l'impétueuse ardeur de son esprit à vouloir être le premier qui briserait les verrous serrés des portes de la nature.
La vigueur virulente de son esprit triompha donc; il s'avança loin au-delà des remparts enflammés de notre monde et parcourut par l'intelligence et la réflexion l'univers immense. Vainqueur, il nous rapporte à son retour ce qui peut naître et ce qui ne le peut pas, ainsi que la loi qui précise finalement le pouvoir de chaque chose et les bornes fixées au coeur des choses.

Lucrèce, De la nature, I, 61 - 79.

 

Dans la représentation géocentrique et empreinte d'aristotélisme de la cosmologie antique, le monde familier aux humains se limite à la première sphère, c'est le monde sublunaire, soumis au changement et à l'imperfection. Au-delà des "remparts enflammés du monde", commence l'éther, immuable et parfait. Sur les sphères concentriques qui le subdivisent, se trouvent des corps parfaits et éternels: les planètes, d’abord, ensuite le firmament ou sphère des étoiles fixes. Epicure les "parcourut par l'intelligence et la réflexion" pour fournir une explication matérialiste de nature à libérer l'homme de la superstition. Diogène Laërce (Vie, doctrines et sentences des philosophes illustres, X) nous a conservé l'essentiel de "ce qu'il nous rapporte à son retour" dans 2 lettres adressées à Hérodote et à Pythoclès. On épinglera cette affirmation : " On ne peut s'affranchir de la crainte à propos des choses essentielles si on ne connaît pas exactement la nature de l'univers et si on accorde crédit aux fables divines. Sans la physique, il est impossible d'apprécier les plaisirs purs."
Au même titre que la magie, la superstition devait "rassurer" l'homme primitif en lui donnant des moyens d'action face à un monde arbitraire et démesuré : la magie et la superstition sont dominantes quand le contrôle humain sur son environnement est faible; elles répondent donc aux besoins culturels d'une société. Epicure incarne un changement de mentalité, une nouvelle vision du monde produite par le syncrétisme alexandrin. Lucrèce se serait reconnu dans cette phrase de l'Anglais Francis Bacon : "L'objectif de notre institution est la connaissance des causes et des mouvements cachés des choses, l'élargissement des frontières de l'empire humain..." (La nouvelle Atlantide, 1627).
a, prép. : + Abl. : à partir de, après un verbe passif = par
acer, cris, cre : vif, ardent
alte, inv. : en haut, de haut
animus, i, m. : le coeur, la sympathie, le courage, l'esprit
ante, prép. : +acc., devant, avant ; adv. avant
artus, a, um : serré, étroit
aspectus, us, m. : 1. le regard 2. la faculté de voir 3. la vue, l'aspect, l'apparence
atque, conj. : et, et aussi
audeo, es, ere, ausus sum : oser
caelum, i, n. : le ciel
caput, itis, n. :1. la tête 2. l'extrémité 3. la personne 4. la vie, l'existence 5. la capitale
claustra, orum, n. : la fermeture, les barres, les verrous, les barrières
comprimo, is, ere, pressi, pressum : presser, tenir enfermé, arrêter, retenir, contenir, intimider
contra, adv : au contraire, en face ; prép+acc : contre
cum, inv. :1. Préposition + abl. = avec 2. conjonction + ind. = quand, lorsque, comme, ainsi que 3. conjonction + subj. : alors que
cupio, is, ere, ii ou ivi, itum : désirer
denique, adv. : enfin
deus, i, m. : le dieu
effringo, is, ere, fregi, fractum : briser, saccager, enlever en brisant, faire sauter, forcer
eo, 1. ABL. M-N SING de is, ea, is : le, la, les, lui... ce,..; 2. 1ère pers. sing. de l'IND PR. de eo, ire 3. adv. là, à ce point 4. par cela, à cause de cela, d'autant
ergo, conj. : donc
et, conj. : et. adv. aussi
extra, + acc. : en dehors de
fama, ae, f. : la nouvelle, la rumeur, la réputation
finitus, a, um : limité
flammo, as, are : être enflammé, flamber
foede, adv. : honteusement
fulmen, inis, n. : la foudre
Graius, a, um : grec
gravis, e : sérieux, triste, lourd, alourdi
haereo, es, ere, haesi, haesum : être attaché
homo, minis, m. : l'homme, l'humain
horribilis, e : qui fait horreur, horrible, effrayant
humanus, a, um : humain
iaceo, es, ere, cui, citurus : être étendu, s'étendre
immensus, a, um : immense
in, prép. : (acc. ou abl.) dans, sur, contre
inrito, as, are : pousser à, exciter
insto, as, are, stiti, staturus : 1. se tenir su 2. presser, insister 3. être sur le point de, être imminent
longe, inv. : longuement, au loin
magis, adv. : plus
mens, mentis, f. : l'esprit
minitor, aris, ari : menacer (+ Datif)
moenia, ium, n. : les murs, les murailles
mortalis, e : mortel
mundus, i, m. : le monde, le firmament
murmur, uris, n. : le murmure, le grondement
natura, ae, f. : la nature
nec, adv. : et...ne...pas
neque, adv. : et ne pas
nequeo, is, ire, ii, itum : ne pouvoir pas, n'être pas en état de
nos, nostrum : nous, je
obsisto, is, ere, stiti, - : se placer devant, se dresser contre, résister à
oculus, i, m. : l'oeil
omne, is, n. : le tout
opprimo, is, ere, pressi, pressum : opprimer, accabler
orior, iris, iri, ortus sum : naître, tirer son origine, se lever (soleil)
ostendo, is, ere, tendi, tentum : tendre, montrer
peragro, as, are : parcourir
pervinco, is, ere, vici, victum : vaincre complètement, triompher
porta, ae, f. : la porte (d'une ville)
possum, potes, posse, potui : pouvoir
potestas, atis, f. : 1. la puissance, le pouvoir 2. le pouvoir d'un magistrat 3. la faculté, l'occasion de faire qqch.
primum, adv. : d'abord, pour la première fois
primus, a, um : premier
procedo, is, ere, cessi, cessum : s'avancer, aboutir à
quae, 4 possibilités : 1. N.F.S. N.F.PL. N.N.PL., ACC. N. PL. du relatif = qui, que (ce que, ce qui) 2. idem de l'interrogatif : quel? qui? que? 3. faux relatif = et ea - et eae 4. après si, nisi, ne, num = aliquae
quem, 4 possibilités : 1. acc. mas. sing. du pronom relatif = que 2. faux relatif = et eum 3. après si, nis, ne num = aliquem : quelque, quelqu'un 4. pronom ou adjectif interrogatif = qui?, que?, quel?
quid, 1. Interrogatif neutre de quis : quelle chose?, que?, quoi?. 2. eh quoi! 3. pourquoi? 4. après si, nisi, ne num = aliquid
quisnam, quaenam, quidnam : qui donc ?, quoi donc ?
quisque, quaeque, quidque : chaque, chacun, chaque chose
ratio, onis, f. : la raison, le raisonnement, le compte
refero, fers, ferre, tuli, latum : 1. reporter 2. porter en retour, rapporter (refert : il importe)
regio, onis, f. : la région, l'arrondissement
religio, onis, f. : le scrupule religieux, la religion
sed, conj. : mais
sub, prép. : + Abl. : sous
sum, es, esse, fui : être
super = desuper = d'en haut
terminus, i, m. : la borne, la limite
terra, ae, f. : la terre
tollo, is, tollere, sustuli, sublatum : 1. soulever, élever, porter, élever 2. lever, enlever, supprimer
unde, adv. : d'où?
ut, conj. : + ind. : quand, depuis que; + subj; : pour que, que, de (but ou verbe de volonté), de sorte que (conséquence) adv. : comme, ainsi que
victor, oris, m. : le vainqueur
virtus, utis, f. : le courage, l'honnêteté
vis, -, f. : la force
vita, ae, f. : la vie
vividus, a, um : plein de vie, vigoureux, vif, énergique
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