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ÉLIEN

HISTOIRES DIVERSES

LIVRE QUATRIÈME.

1. Coutumes de différents peuples. - 2. Dispute de Nicostrate et de Laodocus. - 3. Comparaison de Polygnote et de Denys. - 4. Loi des Thébains concernant des peintres et les sculpteurs. - 5. Traits de reconnaissance. - 6. Oracle concernant Athènes. - 7. De l'état des méchants après leur mort, et de Pausanias. - 8. De l'inconstance de la fortune. - 9. Modestie de Platon. - 10. Conduite de Périclès envers le peuple d'Athènes. - 11. De Socrate. - 12. D'un tableau d'Hélène peint par Zeuxis. - 13. Sentiment d'Épicure sur le bonheur. - 14. De l'économie, et de la conservation de son bien. - 15. Exemples singuliers de l'utilité de la maladie. - 16. Caractères particuliers de quelques Anciens. - 17. Opinions de Pythagore; traits singuliers qui le concernent. - 18. Honneurs que Denys rendit à Platon. - 19. De Philippe et d'Aristote. - 20. De Démocrite. - 21. De Socrate et de Platon. - 22. Du luxe des Athéniens. - 23. De quelques prodigues. - 24. Des moyens d'entretenir l'amitié. - 25. Folie extraordinaire de Thrasyllus. - 26. D'Électre. - 27. De Pamphaès et de Crésus. - 28. De Phérécyde. - 29. Trait de folie d'Alexandre.

1. Coutumes de différents peuples.

LES Lucaniens ont une loi conçue en ces termes : « Si un étranger arrivant vers le coucher du soleil, demande un logement à quelqu'un, que celui qui refusera de le recevoir, soit condamné à une amende, pour avoir manqué à l'hospitalité.» Je crois que l'objet de la loi, en décernant cette peine, était de venger à la fois et l'étranger, et Jupiter hospitalier (01).
J'ai ouï dire que les Dardaniens, peuple de l'Illyrie, ne sont baignés que trois fois dans leur vie; lorsqu'ils viennent au monde, lorsqu'ils se marient, lorsqu'ils sont morts.
Les Indiens ne prêtent ni n'empruntent à usure : il est inouï que chez eux quelqu'un ait fait ou essuyé une injustice. Aussi ne connaissent-ils l'usage ni des billets, ni des nantissements ou gages.
Suivant une loi des Sardes, les enfants, lorsque leurs pères, sont parvenus à une extrême vieillesse, les assomment à coups de massue; puis les enterrent pour prévenir, disent-ils, la honte attachée à la décrépitude, et les faiblesses d'un corps que le poids des années rend incapable de remplir aucun devoir. Par une autre loi du même peuple, l'oisiveté était punissable en justice : ceux qu'on voyait sans état, et dont on ignorait les ressources, étaient obligés de déclarer les moyens qu'ils employaient pour vivre (02).
Les Assyriens rassemblent dans quelqu'une de leurs villes toutes les filles nubiles, et font publier qu'elles sont à vendre : chacun emmène, et prend pour sa femme, celle qu'il vient d'acheter (03).
Un habitant de Byblos (04) qui trouve par hasard quelque chose dans un chemin, ne s'en empare jamais : il ne prend point dans un lieu ce qu'il n'y avait pas mis. Autrement, il croirait faire un vol, non une trouvaille (05).
Les Derbices (06) font mourir tous les septuagénaires des deux sexes : ils égorgent les hommes comme des victimes (07); ils étranglent les femmes.
Les habitants de la Colchide ensevelissent leurs morts dans des peaux bien cousues, puis les suspendent à des arbres.
C'était une pratique commune chez les Lydiens, que les nouvelles mariées se prostituassent, avant que d'habiter avec leur mari (08); mais le mariage une fois consommé, elles devaient à leur époux une fidélité inviolable : il n'y avait point de grâce pour celle qui s'en serait écartée.

2. Dispute de Nicosrate et de Laodocus.

ON raconte que le joueur de lyre Nicostrate, disputant un jour sur la musique avec Laodocus, qui savait, en jouant de la lyre, s'accompagner de la voix (09), lui dit : Vous êtes petit dans un grand art; et je suis grand dans un art borné. Si nous voulons nous en rapporter à ce mot très sensé de Nicostrate, il n'y a pas moins de mérite à étendre les limites de son art, qu'à augmenter ses possessions et sa fortune.

3. Comparaison de Polygnote et de Denys.

POLYGNOTE de Thasos (10) et Denys de Colophon étaient peintres. Le premier traitait tous ses sujets en grand : il ne présentait, pour disputer le prix, que des tableaux dont les personnages étaient peints avec les proportions de la plus belle nature. Les tableaux de Denys étaient beaucoup plus petits : en cela seul il différait de Polygnote, auquel il n'était point inférieur dans l'expression des caractères et des passions, dans la position de ses figures, dans la délicatesse des draperies, et autres parties de l'art.

4. Loi des Thébains concernant les peintres et les sculpteurs.

J'AI ouï dire que les Thébains avaient une loi qui ordonnait aux artistes, soit peintres, soit sculpteurs, de représenter leurs figures de la manière la plus décente, sous peine, à ceux qui y contreviendraient, d'être punis par une amende (11).

5. Traits de reconnaissance.

JE vais citer quelques exemples mémorables de reconnaissance, en commençant par le fait de Thésée et d'Hercule.
Thésée étant allé avec Pirithoüs chez Aïdonée, roi des Molosses (12), dans le dessein de lui enlever son épouse, non pour en faire sa femme, mais uniquement pour seconder son ami, avait été arrêté et mis dans les fers par Aïdonée. Il en fut tiré par Hercule, qui passait dans le pays des Molosses. En mémoire de ce bienfait, Thésée érigea un autel à Hercule.
Les sept chefs qui assiégèrent Thèbes, pour s'acquitter envers Pronax dont ils avaient occasionné la mort (13), établirent en son honneur des jeux (14), que plusieurs ont cru avoir été ordinairement institués en l'honneur d'Archémorus.
Nestor éprouva la reconnaissance d'Hercule. Nélée avait refusé de purifier ce héros (15); et ses fils, à l'exception du seul Nestor, avaient été de l'avis de leur père. Hercule irrité s'empara de la ville de Pylos, fit mourir Nélée avec tous ses enfants, et non content d'épargner Nestor, lui donna le royaume de son père.
Les Athéniens reconnurent, dans les descendants d'Hercule, le service que l'auteur de leur race avait rendu à Thésée. Ils les conduisirent dans le Péloponnèse (16).
Hercule, pour récompenser la valeur des trois cent soixante Cléoniens (17) qui l'avaient suivi dans son expédition contre les Molionides (18), et qui étaient morts en combattant vaillamment, leur transporta les honneurs qu'on lui rendait à Némée (19); honneurs que les habitants lui avaient déférés, lorsqu'il eut tué le lion qui infestait leur pays et ravageait leurs campagnes.
Ménesthée (20), fils de Pétéus, ne fut point ingrat envers Castor et Pollux. Ces deux héros, après avoir chassé d'Athènes les fils de Thésée et emmené en captivité sa mère Aethra avaient donné son royaume à Ménesthée (21) : ils y gagnèrent les noms de rois et de sauveurs; Ménesthée est le premier qui les ait appelés de ces deux noms.
Dans le temps où Darius, fils d'Hystaspe, n'était encore qu'un simple particulier, Syloson (22) lui avait fait présent d'une robe. Darius, étant parvenu au trône, donna à Syloson la souveraineté de Samos, sa patrie. C'est bien là l’occasion d'appliquer le proverbe, de l'or pour du cuivre (23).

6. Oracle concernant Athènes.

LES Lacédémoniens ayant consulté l'oracle sur le dessein qu'ils avaient de détruire la ville d'Athènes, en reçurent cette réponse : « Gardez-vous de porter la main sur l'asile commun de la Grèce (24).»

7. De l'état des méchants après leur mort, et de Pausanias.

LA mort n'est point un état de repos pour les méchants : ou bien on leur refuse la sépulture (25); ou, s'il arrive qu'elle leur ait été accordée, ils perdent bientôt le fruit des honneurs funèbres qui leur ont été rendus, et sont bannis du port commun à tous les hommes. Epitimidès (26) rapporte que les Lacédémoniens, après avoir fait mourir de faim leur roi Pausanias, qui s'était lié avec les Mèdes, firent jeter son cadavre hors des frontières de la Laconie (27).

8. De l'inconstance de la fortune.

EST-IL quelqu'un qui n'ait pas entendu parler des vicissitudes si promptes et quelquefois si subites de la fortune ?
Les Thébains, après avoir été soumis aux Lacédémoniens, les subjuguèrent à leur tour : non contents d'avoir pénétré dans le Péloponnèse, ils passèrent l'Eurotas et ravagèrent la Laconie. Peut-être même auraient-ils pris Lacédémone, si Épaminondas n'avait pas craint que tous les peuples du Péloponnèse ne s’unissent pour la défendre.
Denys le tyran, assiégé par les Carthaginois, avait perdu tout espoir de salut, son courage l'avait abandonné : déjà même il songeait à prendre la fuite, lorsqu'un de ses amis, nommé Ellopidas (28), s'approchant de lui, "O Denys, lui dit-il, que le titre de roi embellit bien une tombe ! " Ce mot fit sentir à Denys la honte de son projet, et ranima tellement son courage, qu'après avoir battu, avec un petit nombre de soldats, plusieurs milliers d'ennemis, il étendit encore les bornes de sa domination.
Lorsqu'Amyntas, roi de Macédoine (29), eut perdu ses états, après la victoire que des barbares de son voisinage avaient remportée sur lui, il résolut d'abandonner son pays, s'estimant trop heureux s'il pouvait sauver sa personne. Pendant qu'il était occupé de cette idée, quelqu'un lui répéta le propos d'Ellopidas à Denys (30) : c'en fut assez; Amyntas se rendit maître d'une petite place, et avec très peu de soldats qu'il y rassembla, il recouvra son royaume.
Les Égyptiens désignaient Artaxerxe Ochus par un mot de leur langue qui signifie âne (31), se moquant ainsi de la lâcheté de ce prince, par la comparaison qu'ils en faisaient avec le caractère paresseux de l'animal. Ochus, pour se venger (32), leur enleva leur boeuf Apis, et en fit un sacrifice à l'âne.
Dion, fis d'Hipparinus, que Denys avait exilé, revint attaquer le tyran avec une armée de deux mille hommes, et le réduisit à l'état de fugitif, auquel lui-même l'avait réduit un peu auparavant.
Les Syracusains, avec neuf vaisseaux, remportèrent une victoire complète sur les Carthaginois qui en avaient cent cinquante.

9. Modestie de Platon.

PLATON, fils d'Ariston, étant à Olympie, se trouva logé avec des gens qu'il ne connaissait pas, et de qui il n'était pas connu. Il mangeait sans façon à la même table, et passait avec eux les jours entiers. Bientôt il sut tellement gagner l'amitié de ces étrangers, que, charmés de sa société, ils se félicitaient de l'heureux hasard qui leur avait fait rencontrer un tel homme. Il ne leur parla ni de l'Académie ni de Socrate, et se contenta de leur dire qu'il se nommait Platon. Quelque temps après, ces étrangers étant venus à Athènes, Platon les reçut avec toute sorte d'honnêteté. Eux alors adressant la parole au philosophe, "Faites-nous voir, lui dirent-ils, le disciple de Socrate, qui porte le même nom que vous, conduisez-nous à son école; recommandez-nous à ce personnage célèbre, afin que nous puissions profiter de ses lumières." Platon, avec un sourire qui lui était naturel, "C'est moi," leur dit-il. Les étrangers furent extrêmement surpris d'avoir méconnu ce grand homme, dans le temps où il vivait familièrement avec eux; ils ne pouvaient s'en prendre qu'à sa modestie. Ainsi Platon avait fait voir qu'il pouvait plaire et se faire des amis, sans le secours de sa philosophie.
Le même Platon donnait à Aristote le nom de poulain. Que signifiait ce nom ? On sait que le poulain donne des coups de pied à sa mère, après s'être rassasié de son lait. Sans doute ce nom désignait l'ingratitude d'Aristote, qui, après avoir puisé dans les leçons de Platon les principes de la philosophie, après s'être rempli de ses préceptes, s'éloigna de lui, éleva une école contre celle de son maître, alla, escorté de ses disciples et de ses amis, l'attaquer au milieu de la promenade, et affecta de le contredire en tout (33).

10. Conduite de Périclès envers le peuple d'Athènes.

NE pourrait-on pas reprocher à Périclès, fils de Xanthippe, d'avoir poussé trop loin sa complaisance pour le peuple d'Athènes ? Pour moi, je le pense ainsi. Toutes les fois que Périclès devait parler dans une assemblée, il faisait des voeux pour ne laisser échapper aucune parole qui pût choquer le peuple, ou contrarier ses penchants et ses volontés.

11. De Socrate.

DIOGÈNE accusait Socrate d'un excès de délicatesse peu philosophique. Il lui reprochait d'être trop recherché dans sa maison (34), dans son lit, et jusque dans certaines chaussures dont il se servait quelquefois (35).

12. D'un tableau d'Hélène peint par Zeuxis.

ZEUXIS d'Héraclée avait fait un tableau d'Hélène, qui lui valut beaucoup d'argent (36). Bien loin de le montrer gratis, il ne permettait de le voir qu'autant qu'on payait d'avance une certaine somme qu'il avait fixée. Le trafic que Zeuxis fit ainsi de son Hélène, donna lieu aux Grecs d'alors de la nommer la Prostituée.

13. Sentiment d'Épicure sur le bonheur.

ÉPICURE de Gargette (37) disait : « Celui qui ne sait pas se contenter de peu, n'en a jamais assez. » Il disait encore que pourvu qu'il eût du pain et de l'eau, il disputerait de bonheur avec Jupiter même. Puisqu'Épicure pensait ainsi, il nous reste à savoir dans quel esprit il a fait l'éloge de la volupté (38).

14. De l'économie, et de la conservation de son bien.

SOUVENT, dit Archiloque (39), des richesses amassées avec beaucoup de peine, et obole à obole, sont englouties par une prostituée. Il en est, ajoute-t-il, de l'argent comme du hérisson : il est aisé de se saisir de cet animal, et difficile de ne le pas laisser échapper. Anaxagoras (40), dans son ouvrage intitulé De la royauté, dit pareillement des richesses, qu'il en coûte encore plus pour les conserver que pour les acquérir.

15. Exemples singuliers de l'utilité de la maladie.

HIÉRON, tyran de Sicile, qui n'avait jamais cultivé son esprit, était, dit-on, le plus ignorant des hommes, si l'on en excepte son frère Gélon (41) : mais étant tombé malade, réduit à l'inaction par sa faiblesse, il profita de son loisir pour prendre des leçons de quelques savants; et bientôt il se trouva lui-même fort instruit. Aussi, depuis qu'il eut recouvré la santé, il conserva toujours une liaison intime avec Simonide de Céos, Pindare de Thèbes, et Bacchylide de Iulis (42). Pour Gélon, il resta dans son ignorance.
J'ai ouï dire de même que Ptolémée II (43) devint savant durant le cours d'une maladie.
Nous apprenons de Platon, que Théagès (44) dut à une longue maladie ses connaissances philosophiques. Comme ses infirmités l'empêchaient de se livrer aux affaires publiques, il s'appliqua tout entier à l'étude de la philosophie. Quel est l'homme sensé qui n'eût pas souhaité une pareille maladie à Alcibiade, à Critias, au Lacédémonien Pausanias et à quelques autres personnages du même caractère ? On n'aurait pas vu Alcibiade et Critias s'éloigner des principes de Socrate; on n'aurait point eu à reprocher au premier les écarts de sa conduite; d'avoir changé de moeurs comme de pays, adoptant successivement les manières des Spartiates, des Béotiens, des Thessaliens, et finissant par se plonger dans les délices des Mèdes et des Perses, à la cour de Pharnabaze (45). Le second ne serait pas devenu un tyran et un monstre de cruauté; il n'aurait pas fait le malheur de sa patrie; il n'aurait pas emporté au tombeau la haine de ses concitoyens (46).
Il fut avantageux à Straton, fils de Corrhagus (47), d'avoir été malade. Né riche et d'une famille considérable, Straton avait négligé les exercices de la gymnastique; mais ayant été attaqué d'un mal de rate, il y eut recours comme à un remède efficace. Ce ne fut d'abord que pour le besoin qu'en avait sa santé : ensuite, flatté des progrès qu'il faisait dans cet art, il s'y livra avec tant d'ardeur, qu'il parvint à remporter dans le même jour le prix de la lutte et du pancrace (48) aux jeux olympiques. Il fut encore couronné à l'olympiade suivante, ainsi qu'aux jeux Néméens, Pythiques et Isthmiens.
Le lutteur Démocrate, quoique fort incommodé d'un mal aux pieds, se rendit au lieu destiné pour les jeux. Là, se plaçant au milieu du stade, et traçant un cercle autour de lui, il proposa aux lutteurs à qui il venait disputer le prix, d'essayer de le tirer de cette enceinte : comme ils ne purent en venir à bout, Démocrate, pour être demeuré ferme et inébranlable dans son poste, remporta la couronne (49).

16. Caractères particuliers de quelques Anciens.

CELUI qui se laisserait conduire par Callias (50), deviendrait ivrogne; avec Isménias (51), on deviendrait joueur de flûte, avantageux avec Alcibiade; Crobylus (52) ferait des cuisiniers. On apprendrait de Démosthène l'art de parler avec force; d'Épaminondas, l'art de la guerre. Agésilas inspirerait la noblesse des sentiments, Phocion la bonté, Aristide la justice, Socrate la sagesse.

17. Opinions de Pythagore; traits singuliers qui le concernent.

PYTHAGORE publiait hautement que l'excellence des germes dont il était formé lui avait communiqué l'immortalité (53). On le vit, en, effet, le même jour et à la même heure, à Métaponte et à Crotone : il montra dans Olympie une de ses cuisses, qui était d'or (54) : il rappela au Crotoniate Myllias (55), que c'était lui-même qui avait autrefois régné en Phrygie (56), sous le nom de Midas, fils de Gordius. Un jour, un aigle blanc vint se poser auprès de lui, et s'en laissa caresser. Une autre fois, en passant le fleuve Cosas (57), le dieu fleuve l'appela par son nom, et lui dit, " Salut à Pythagore. "
Selon ce philosophe, la feuille de mauve (58) était un objet sacré. Rien dans l'univers n'était aussi sage que le Nombre (59) : la première place, après le Nombre, appartenait à celui qui donna des noms aux choses.
Il prétendait que les morts, en se rassemblant, produisent les tremblements de terre; que l'arc-en-ciel était la source du Nil (60), et que l'espèce de bourdonnement qui retentit souvent dans les oreilles, est la voix des génies. Personne n'osait lui proposer ni doute, ni question : on recevait ce qu'il avait dit comme autant d'oracles des dieux (61). Lorsqu'en voyageant il arrivait dans une ville, "Pythagore, disait-on, vient ici, non pour enseigner, mais pour guérir (62)."
Le même philosophe exigeait qu'on s'abstînt de manger le coeur des animaux (63), la chair du coq blanc (64), surtout celle des animaux qui étaient morts de leur mort naturelle (65). Il interdisait aussi les bains (66), et ne voulait pas qu'on suivît les chemins publics (67), parce qu'on n'est jamais certain que ces lieux soient parfaitement purs.

18. Honneurs que Denys rendit à Platon.

PLATON, que Denys le jeune avait invité par plusieurs lettres à venir en Sicile, y étant enfin arrivé, le tyran le fit monter sur son char, et voulut servir lui-même de cocher au fils d'Ariston. Alors, dit-on, un Syracusain, homme d'esprit, qui avait bien lu Homère, surpris agréablement de ce qu'il voyait, cita ces vers de l'Iliade, en y faisant un léger changement : "L'essieu gémit sous ce poids énorme; il porte à la fois un mortel redoutable, et le plus vertueux des hommes (68)".
On remarque de plus que Denys, qui se défiait de tout le monde, avait tant de vénération pour Platon, que ce philosophe était le seul qui entrât chez le tyran sans être fouillé, quoique Denys fût instruit des liaisons intimes de Platon avec Dion (69).

19. De Philippe et d'Aristote.

PHILIPPE, roi de Macédoine, ne fut pas seulement célèbre par son habileté dans l'art de la guerre et par son éloquence : à ces deux qualités, il joignit le mérite d'estimer le savoir. En comblant de richesses Aristote, il le mit en état d'acquérir des connaissances très étendues dans tous les genres, et particulièrement dans l'histoire des animaux; histoire qu'on peut regarder comme le fruit des bienfaits de Philippe (70). Platon et Théophraste furent aussi en grande considération auprès de ce prince.

20. De Démocrite.

ENTRE plusieurs traits de sagesse dont la renommée fait honneur à Démocrite d'Abdère, on doit surtout remarquer le projet qu'il conçut de vivre inconnu, et le choix des moyens qu'il employa pour y parvenir. Il prit le parti de voyager en différents pays : il s'entretint à Babylone avec les Chaldéens, en Perse avec les Mages, aux Indes avec les Gymnosophistes. Des biens que Damasippe, son père (71) avait partagés entre ses trois fils, Démocrite ne prit qu'une somme d'argent pour ses voyages, et abandonna le reste à ses frères. Il a mérité que Théophraste dît de lui, qu'il rapporta de ses courses des choses plus précieuses que n'avaient fait Ulysse et Ménélas, qui, semblables à des marchands phéniciens, ne parcoururent les terres et les mers que dans la vue d'amasser de l'argent.
Les Abdéritains appelèrent Démocrite la philosophie (72), comme ils appelèrent Protagoras le discours (73). Démocrite traitait tous les hommes de fous; ils étaient pour lui un objet continuel de risée : de là, il fut nommé par ses concitoyens Gelasinus (le rieur). On raconte que la première fois qu'Hippocrate le rencontra, il le prit pour un insensé; mais que dans la suite, ayant eu occasion de le voir souvent, il conçut pour lui la plus haute estime. On ajoute même que ce fut en l'honneur de Démocrite, qu'Hippocrate, né Dorien (74), écrivit ses ouvrages en dialecte ionique.

21. De Socrate et de Platon.

SOCRATE aimait Alcibiade : Platon avait pour Dion la plus grande tendresse; et cette tendresse ne fut pas inutile à Dion.

22. Du luxe des Athéniens.

AUTREFOIS les Athéniens portaient des manteaux de pourpre et des robes peintes de diverses couleurs. Lorsqu'ils se montraient en public, leurs cheveux, entrelacés de cigales d'or (75) et d'autres ornements du même métal, s'élevaient en pointe au-dessus de leur tête. Des esclaves les suivaient avec des sièges pliants, afin qu'ils eussent partout de quoi être assis commodément. On peut bien juger qu'ils poussaient encore plus loin la délicatesse dans leurs tables et dans toute leur manière de vivre. Ce sont cependant ces Athéniens qui furent vainqueurs à Marathon.

23. De quelques prodigues.

L'AMOUR du plaisir et la débauche avaient réduit à l'indigence Périclès (76), Callias fils d'Hipponicus, et Nicias de Pergase (77). Quand ils se virent sans ressource, ils se présentèrent l'un à l'autre de la ciguë pour dernière boisson, et terminèrent ainsi leur vie comme on termine un festin (78).

24. Des moyens d'entretenir l'amitié.

UN jour que Léoprépès de Céos, père de Simonide, était assis dans le gymnase, deux jeunes gens qui s'aimaient tendrement, vinrent lui demander quel était le moyen de rendre leur amitié durable. "C'est, leur répondit Léoprépès, de vous passer mutuellement vos moments d'humeur, et de ne point vous aigrir l'un l'autre en vous contrariant dans vos goûts."

25. Folie extraordinaire de Thrasyllus.

THRASYLLUS d'Aexone (79) eut un genre de folie singulier et sans exemple. Il avait quitté la ville et s'était établi dans le Pirée : là, il se figura que tous les vaisseaux qui y abordaient, étaient à lui; il en tenait un registre exact, leur ordonnait de repartir pour de nouveaux voyages; et quand, après une heureuse navigation, ils rentraient dans le port, il en témoignait sa joie par les démonstrations les plus vives. Cette frénésie dura plusieurs années, jusqu'à ce que son frère, revenant de Sicile, le mît entre les mains d'un médecin qui l'en guérit. Depuis ce temps, Thrasyllus se rappelait souvent les années qu'il avait passées dans la démence, et avouait que le plus grand plaisir qu'il eut eu dans le cours de sa vie, avait été de voir arriver en bon état ces vaisseaux qui ne lui appartenaient point.

26. D'Électre.

NOUS apprenons de Xanthus (80), poète lyrique, qui vivait avant Stésichore d'Himère (81), qu'Électre, fille d'Agamemnon, se nommait originairement Laodice (82); mais qu'après l'assassinat de son père, lorsqu'Égisthe eut épousé Clytemnestre, et se fut emparé du royaume d'Argos, les Argiens, la voyant, sans époux, vieillir dans l'état de fille (83), lui donnèrent le nom d'Électre; nom qui exprimait l'état de cette princesse (84).

27. De Pamphaès et de Crésus.

PAMPHAÈS de Priène (85) avait donné trente mines (86) à Crésus, dans un temps où le roi de Lydie son père vivait encore. Dès que Crésus fut monté sur le trône il envoya un chariot rempli d'argent à Pamphaés.
Diogène ayant reçu de Diotime de Caryste (87) une petite pièce de monnaie : "que les dieux, lui dit-il, nous accordent tout ce que vous pouvez désirer; d'être un homme, et d'avoir une famille (88) !" Ce mot renfermait un trait de satire contre la mollesse efféminée de Diotime.

28. De Phérécyde.

PHÉRÉCYDE (89) de Syros (90) termina sa vie de la façon du monde la plus misérable : tout son corps fut rongé par la vermine. Son visage était tellement défiguré qu'il fut obligé de se séparer de la société de ses amis. Quand quelqu'un venait lui demander de ses nouvelles, Phérécyde passant un doigt décharné à travers un trou de sa porte, "Voilà, répondait-il, en quel état est tout mon corps ". Les Déliens attribuaient cette maladie au courroux du dieu qu'on révère dans leur ville (91) : Phérécyde, disent-ils, étant à Délos avec ses disciples, citait différents traits de sa propre sagesse, entre autres, qu'il n'avait jamais sacrifié à aucune divinité, et que néanmoins il n'avait pas mené une vie moins douce ni moins agréable que ceux qui offrent des hécatombes (92). Il paya cher cette insolente vanité.

29. Trait de folie d'Alexandre.

JE ne puis m'empêcher de rire de la folie d'Alexandre, fils de Philippe. Ce prince ayant appris que Démocrite assurait dans ses ouvrages qu'il y avait un nombre infini de mondes, se désolait de n'être pas encore maître du seul qui fût connu (93). Que Démocrite eût bien ri d'Alexandre ! Rieur de profession comme l'était Démocrite, on juge aisément, sans que je le dise, que ce trait ne lui aurait pas échappé.

(01)  Stobée attribue une pareille loi à Charondas.

(02)  Cette loi était commune aux Égyptiens, aux Lucaniens, aux Athéniens, aux Lacédémoniens, et à plusieurs autres peuples.

(03)  Ces sortes de marchés publics étaient en usage chez plusieurs anciens peuples. En général, les maris achetaient presque toujours leurs femmes, soit en leur constituant une dot, soit en leur faisant des présents considérables; quelquefois même on était obligé d'en faire aux parents de l''épouse.

(04) Byblos, ville célèbre de Phénicie, consacrée à Adonis.

(05) Élien a rapporté, au chap. 46 du liv. III, une loi semblable, qui s'observait chez les Stagirites.

(06) Peuple de l'Asie, situé auprès de l'Hyrcanie.

(07) Suivant Strabon (liv. XI), non seulement les Derbices immolaient les septuagénaires des deux sexes; mais de plus, les parents les mangeaient, comme on avait coutume de manger la chair des victimes. Ainsi le katayæontew, dont Élien se sert et qu'on n'employait que pour désigner les sacrifices offerts aux dieux, doit être pris dans toute son étendue.

(08) Les Augiles, peuple d'Afrique, avaient une coutume qui ressemble beaucoup à celle des Lydiens. Voici ce qu'en dit Pomponius Méla, I, 8 : Feminis eorum solemne est, nocte, qua nubunt, omnium stupro patere, qui cum munere advenerint; et tum cum plurimis concubuisse, maximum decus: in reliquum pudicitia insignis est.

(09) La différence du talent de ces deux hommes est marquée par les mots kiyarist®w et kiyarÄdñw.

(10) Ces deux peintres florissaient peu avant la guerre du Péloponnèse. Les Athéniens donnèrent à Polygnote le droit de citoyen d'Athènes, en reconnaissance de ce qu'il leur avait fait plusieurs ouvrages gratis., Voyez Junius, de Pict. Vet.

(11) Le mot tÛmhra, du texte, peut être pris moins généralement, et signifie en particulier, une amende égale au prix que l'ouvrage aurait été estimé.

(12)  La Mythologie a confondu ce prince avec Pluton, à qui on a souvent donné le nom d'Aïdoneus.

(13)  Pronax fut dévoré par un serpent, tandis que sa nourrice était allée montrer une fontaine aux généraux qui assiégeaient Thèbes. Élien fait deux personnages de Pronax et d'Archémorus : d'autres prétendent que c'est le même, qui fut nommé Archémorus, parce que sa mort était regardée comme le principe des malheurs des sept chefs.

(14)  Ce sont les jeux Néméens.

(15) Hercule voulait être purifié du meurtre de sa femme et de ses enfants. Hygin, Fable 21.

(16)  Ceci ne doit pas s'entendre du célèbre retour des Héraclides dans le Péloponnèse, auquel les Athéniens n'eurent aucune part. Périzonius conjecture que le retour dont il s'agit ici, doit se rapporter aux dernières années de la vie de Thésée.

(17)  Cléone, ville située entre Corinthe et Argos. Strab., liv. VIII.

(18)  Les Molionides étaient deux frères, Eurytus et Ctéatus, fils d'Actor et de Molione : ils s'étaient attiré la haine d'Hercule, pour avoir défendu contre lui leur oncle Augias. La fable les représente avec un seul corps, mais ayant deux têtes, quatre bras et quatre pieds.

(19) On ne sait pas précisément en quoi consistaient ces honneurs : ce n'était peut-être que le droit de présider aux jeux Néméens.

(20)  Ménesthée était de la race des anciens rois d'Athènes, et descendait d'Érechthée.

(21) Leur haine contre Thésée venait de ce qu'il avait enlevé leur soeur Hélène.

(22)  Syloson était frère de Polycrate, tyran de Samos. Lorsqu'il fit à Darius le présent dont parle Élien, ce prince était un des gardes de Cambyse. Hérodote, III, 39 et 193.

(23)  Élien fait allusion a l'échange de Glaucus et de Diomède (Iliad., VI, 236)  d'où était né le proverbe xræsea xalkeÛvn.

(24) La réponse de la Pythie est fondée sur ce qu'on ne recevait nulle part plus volontiers qu'à Athènes les étrangers et les fugitifs.

(25)  On connaît l'opinion des Anciens, qui croyaient que les âmes ne pouvaient passer le Styx tant qu'on n'avait pas rendu aux corps les derniers devoirs

(26)  On ne connaît d'auteur de ce nom, qu'un philosophe de la secte Cyrénaïque, disciple d'Antipater, dont parle Diogène Laërce. Les commentateurs croient qu'Élien a voulu parler de Timée, qui, à cause de son goût pour la satire, fut surnommé Épitimée : on le trouve, en effet, désigné par ce nom dans Athénée, liv. VI, chap. 20.

(27) On lit dans Cornélius Népos, que pour faire périr Pausanias, on mura la porte du temple où il s'était réfugié, et que sa mère y mit la première pierre. L'auteur des Parallèles, attribuées à Plutarque, ajoute que ce fut elle qui donna l'avis de jeter son corps hors du territoire de Sparte. Diodore de Sicile, liv. XI, nie ce fait, et dit qu'il fut permis à ses parents de l'enterrer.

(28) Cet ami est nommé Éloris dans Diodore, liv. XX.

(29) Amyntas, père de Philippe. Les barbares dont il s'agit étaient les Illyriens.

(30)  Dans une sédition qui s'éleva à Constantinople, l'an 532, l'empereur Justinien, désespérant de l'apaiser, avait formé le projet de s'enfuir. L'impératrice Théodora l'en détourna par un discours vigoureux, qu'elle finit en lui disant, comme Ellopidas à Denys : Le trône est le tombeau le plus glorieux. Hist. du Bas Empire, par M. Le Beau, t. IX, p. 145.

(31) Périzonius pense que le mot égyptien qui répond à celui d'âne, est Narsès. On trouve, en effet, Ochus appelé de ce nom dans Strabon, liv. XV.

(32)  Ochus, irrité de leur mépris, voyant d'ailleurs que les Phéniciens et les Cypriotes se soulevaient à l’exemple des Égyptiens, marcha en personne contre ces différents peuples, et les soumit. Ce fut alors que, pour se venger des Egyptiens, dit Élien, au liv. X de l'Hist. des Anim., chap. 28, il fit un dieu de l'âne, et lui immola le boeuf Apis. Plutarque raconte (de Iside et Osiride), qu'Ochus usa si cruellement de la victoire, qu'on le nomma depuis M‹xaira, le Glaive.

(33) Élien a déjà rapporté ce trait de l'ingratitude d'Aristote, au chap. 19 du liv. III.

(34)  Élien qualifie petite la maison de Socrate, oÞkÛdion. La petitesse de cette maison a été rendue célèbre par la réponse de Socrate à celui qui paraissait en être surpris : Plût au ciel, lui dit-il, que je pusse la remplir de vrais amis! Ce que Phèdre (III, 9) a exprimé par ce vers :
Utinam, inquit, veris hanc amicis impleam !

(35) Ces chaussures, nommées par Élien blaètai, étaient appelées par les Athéniens konÛpodew parce qu'étant fort minces, elles n'élevaient pas les pieds au-dessus de la poussière. On s'en servait particulièrement à table.

(36)  Périzonius croit que ce tableau était une copie de celui que Zeuxis avait peint, pour être dédié dans le temple de Junon Lacinia, à Crotone. Les Crotoniates, afin que leur Hélène fût plus parfaite, avaient permis au peintre, par un décret public, de choisir entre toutes leurs filles cinq des plus belles, pour lui servir de modèle.

(37)  Gargette, bourg de l'Attique.

(38)  On n'est pas parfaitement d'accord sur l'idée qu'il faut attacher au mot volupté dans Épicure. On peut consulter l'ouvrage de M. l'Abbé Batteux, intitulé, La Morale d'Épicure.

(39)  Archiloque, un des plus anciens poètes grecs : il vivait vers la quinzième olympiade. On le regarde comme l'inventeur des vers ïambes.

(40) Il ne faut point confondre cet Anaxagoras avec le philosophe du même nom : celui dont il s'agit ici était un rhéteur, disciple d'Isocrate. Voy. Ménage sur Diogène Laërce, p. 4

(41)  Gélon ne faisait cas que des exercices du corps. Un jour, dans un festin où tous les conviés jouaient de la lyre, et s'accompagnaient de la voix, Gélon, pour montrer aussi ses talents, se fit amener un cheval, et sauta dessus avec une aisance admirable. Plutarque, Apophtegmes.

(42)  Iulis, ville de l'île de Céos. Simonide était parent de Bacchylide et citoyen de Iulis, comme lui. Strab., liv. X.

(43) C'est ce prince qui fut surnommé Philadelphe, et qui commença la fameuse bibliothèque d'Alexandrie. Strabon ( liv. XVII) attribue son goût pour les sciences à la même cause qu'Élien.

(44)  Théagès, disciple de Socrate. Ce passage est extrait du sixième livre de la République; on trouvera le texte original dans la seconde partie des Pensées de Platon, seconde édition, pag. 244. J. V. L.

(45) Corn. Népos, Plutarque, Athénée, etc. peignent Alcibiade des mêmes couleurs,

(46) Critias, un des trente tyrans, et le plus cruel de tous. Il fut tué dans le combat que Thrasybule leur livra, lorsqu'il revint dans sa patrie à la tête des citoyens qu'ils en avaient bannis. Xénoph., liv. II.

(47) Straton, originaire d'Alexandrie, demeurait à Aegium dans le Péloponnèse. On lit dans Pausanias ( Achaic. ), que les Aegiens lui firent construire, près de la ville, un portique où il pût s'exercer.

(48) Voy. sur le pancrace la note 3 du chap. 30, liv. III.

(49) On ne voit pas la liaison du fait de Démocrate avec les exemples précédents; à moins qu'on ne suppose que les efforts qu'il fit pour se maintenir dans la place qu'il avait prise, le guérirent de son mal aux pieds; ce qu'Élien ne dit pas. - Il veut dire probablement que cette infirmité fut avantageuse à Démocrate, parce qu'elle fut pour lui l'occasion d une victoire qu'il n'aurait peut-être pas remportée dans la lutte ordinaire. J. V. L.

(50)  Callias était, ainsi qu'Alcibiade, un des plus riches disciples de Socrate. Aristophane parle souvent du goût de Callias pour le plaisir.

(51)   Isménias, célèbre joueur de flûte, né à Thisbé, en Béotie.

(52) Périzonius conjecture que Crobylus pourrait bien être ce sycophante athénien, qui, rencontrant Platon, lorsque ce philosophe allait défendre Chabrias, le menaça du destin de Socrate. Voy. Diogène Laërce, Vie de Platon.

(53) On le croyait fils d'Apollon.

(54) Élien a rapporté ces deux faits, ainsi que celui du fleuve Cosas, à peu près dans les mêmes termes, au chap. 26 du liv. II.

(55) Porphyre (Vie de Pythag. ) compte Myllias au nombre des disciples de ce philosophe.

(56) On sait que Pythagore est l'auteur du système de la métempsycose. Il prétendait se ressouvenir d'avoir été Euphorbe, dans le temps de la guerre de Troie.

(57) Sur le nom de ce fleuve, voy. la note 3 du chap. 62, liv. II.

(58) Périzonius pense que Pythagore regardait la feuille de mauve comme sacrée, parce que cette plante avait été une des premières nourritures des hommes.

(59) Pythagore croyait que les nombres entraient dans la composition de tous les êtres, et qu'ils étaient le principe: de toutes choses. lamblique, Vie de Pythagore.

(60)  Gesner propose une correction ingénieuse, mais qui se concilie mal avec les opinions connues de Pythagore et de plusieurs autres philosophes anciens : il veut qu'au lieu de Éw ² g° toè NeÛlou ¤stÛ, on, lise, Éw aég¯ toè ²lÛou ¤stÛ. Alors il faudrait traduire, l'arc-en-ciel est comme le reflet des rayons du soleil. Gronovius propose de lire phg¯ toè NeÛlou, l'Iris est la source du Nil. Cette correction s'accorde assez avec l'opinion des Anciens, qui croyaient que le Nil prenait sa source dans un autre univers. C'est celle que j'ai suivie. On peut consulter, sur ce passage, les notes des commentateurs.

(61) De là ce mot si connu, Aétòw ¦fa, le maître l'a dit.

(62) Ceci peut s'entendre de la guérison du corps, comme de celle de l'âme. Pythagore avait des connaissances en médecine. Élien, liv. IX, c. 22, et Diog. Laërce.

(63)  Il défendait, dit Iamblique, Vie de Pythag., de manger le coeur et la cervelle des animaux, parce que là est le siège de la sagesse et de la vie.

(64) Pythagore voulait qu'on s'abstînt en général de manger des coqs parce qu'ils sont consacrés au soleil et à la lune, et qu'ils indiquent les heures par leur chant. Diog. Laërce.

(65)  Pythagore paraît avoir pris chez les Juifs cette aversion pour les animaux qui étaient morts naturellement. Josèphe, contre Apion, liv. II, observe qu'il avait emprunté de ce peuple beaucoup d'autres usages.

(66) Cette défense doit s'entendre des bains publics; car on sait, par Iamblique, que les sectateurs de Pythagore se baignaient tous les jours.

(67) Iamblique prétend qu'il faut entendre, par les chemins publics, les coutumes, les opinions et les moeurs du vulgaire, dont Pythagore voulait qu'on s'écartât.

(68) Ces vers sont tirés du liv. V. de l'Iliade, v. 838, où Minerve irritée prend la place de Sthénélus, cocher de Diomède. Homère dit : L'essieu gémit sous ce poids énorme; il porte à la fois une déesse redoutable, et le plus vaillant des hommes.

(69) Illustre Syracusain, fils d'Hipparinus, gendre de Denys le jeune.

(70) Suivant la plupart des auteurs anciens, Alexandre contribua beaucoup plus que Philippe à la composition de l'Histoire des Animaux. Pline (liv. VIII, ch. 16) dit que ce prince envoya plusieurs milliers d'hommes faire des recherches en Asie et en Grèce, avec ordre de rapporter des animaux de toutes les espèces, quadrupèdes, oiseaux, poissons, reptiles, etc.

(71) L'histoire ne donne que deux frères à Démocrite, Damase et Hérodote; ce qui m'a engagé à attribuer au père le partage de son bien entre ses trois fils. S'il n'était pas presque certain que Démocrite n'avait que deux frères, j’'aurais pu dire dans ma traduction, sans faire violence au texte, et peut-être même plus littéralement, que ce fut Démocrite lui-même qui partagea son bien entre ses trois frères.

(72) Non seulement le philosophe, mais la philosophie.

(73) Voy. sur Protagoras les notes du chap. 25, livre premier.

(74) Hippocrate était de Cos, île de la mer Égée.

(75)  Le scholiaste d’Aristophane, sur les Nuées, donne deux raisons de la coutume des anciens Athéniens de porter des cigales d'or : c'est, dit-il, ou parce que les cigales, à cause de leur chant, étaient consacrées à Apollon, une des divinités tutélaires d'Athènes; ou parce qu'elles étaient autochtones, comme les Athéniens prétendaient l'être.

(76) Élien est le seul qui dise que Périclès et Callias s'empoisonnèrent avec de la. ciguë : Périclès ne fut point réduit à l'indigence; il mourut de la peste, étant général des Athéniens. Plutarque, qui nous apprend ce fait, ajoute que Périclès avait fait succéder à sa prodigalité une si grande économie, qu'il en était devenu insupportable à sa femme et à ses enfants. Quant à Callias, disciple de Socrate, Athénée, XII, raconte qu'il mourut de misère, chez une femme étrangère, mais non empoisonné. Il est vraisemblable qu'Élien, écrivant de mémoire, a confondu Périclès et Callias avec Autoclès et Épiclès, compagnons de débauche de Nicias qui burent de la ciguë  quand ils eurent dissipé leur bien.

(77) Pergase, canton de l'Attique, qui faisait partie de la tribu Érechthéide. Ce Nicias ne doit pas être confondu avec le célèbre général du même nom.

(78 Sur la façon dont les repas se terminaient chez les Anciens, on peut voir les notes du chap. 20, livre premier.

(79 Canton de l'Attique, qui faisait partie de la tribu de Cécrops.

(80) Vossius, dans son ouvrage sur les Poètes grecs, n'a point nommé Xanthus. Ce poète est différent de l'historien du même nom, fils de Candaule, roi de Lydie.

(81) Stésichore, contemporain de Cyrus, de Crésus, etc.

(82 On trouve, en effet, dans l'lliade, IX, 145, une des filles d’Agamemnon nommée Laodice. Ce prince, proposant à Achille de lui donner une de ses filles en mariage, lui offre de choisir entre Chrysothémis, Laodice  et Iphianasse.

(83)  Il fallait qu'elle ne fût pas très vieille lorsqu'elle épousa Pylade, puisqu'elle en eut deux fils. Pausanias, Corinth., chap. 16.

(84) Élien dérive le nom d'Électre, du mot …Alektrow sans lit conjugal, qui n'est point mariée. Périzonius pense qu'il vient plutôt d'ƒHl¡ktvr, nom qui fut donné au soleil, parce qu'il ne se repose jamais; d'où l'on a fait …Hlektron, mélange d'or et d'argent, en général, tout ce qui brille. Sa conjecture est d'autant plus probable, que ce nom était commun à plusieurs femmes illustres de la Grèce, telles que la mère de Dardanus, une des Danaïdes, une des filles de l'Océan, etc.

(85)  Priène, dans l'Ionie, auprès de Milet.

(86 Comme la mine attique est évaluée à peu près à quatre-vingts francs de notre monnaie, les trente mines faisaient une somme très modique. Aussi, selon Nicolas de Damas (Excerpt. ex histor. pag. 243, éd. de Coray), le don de Pamphaès à Crésus était de mille statères d'or, qui répondent à deux cents mines. Cette somme s'accorde mieux avec le motif de l'emprunt de Crésus, qui,  comme nous l'apprend le même auteur, devait l'employer à lever des soldats. Nicolas de Damas ajoute que ce fut un chariot plein d'or qui fut envoyé à Pamphaès.

87. Caryste, ville de l'Eubée. Scheffer pense que ce Diotime pourrait bien être le même que le fameux buveur dont parle Élien au chap. 41 du liv. II

88.La réponse de Diogène est une citation d'Homère. Ulysse, dans l'Odyssée, I, 180, dit à Nausicaa, fille d'Alcinoüs : Que les dieux vous accordent tout ce que vous pouvez désirer, un mari, et des enfants ! Je n'ai pas cru devoir expliquer dans ce sens le souhait de Diogène à Diotime.

89. Ancien philosophe, contemporain de Thalès, et maître de Pythagore. Il passe pour être le premier qui ait composé des ouvrages en prose.

90. Une des Cyclades, dans la mer Égée.

91. Les Anciens croyaient que la maladie pédiculaire était une punition des dieux. Pausanias, Baeot.

92. Ce n'était point par impiété que Phérécyde n'offrait pas de sacrifice aux dieux. Comme il croyait à la métempsycose ainsi que Pythagore, son disciple, il rejetait les sacrifices sanglants, et voulait qu'on ne présentât aux dieux que de l'encens, des gâteaux  et autres choses semblables.

93. Juvénal a fait allusion à la folie d'Alexandre dans ces vers, Sat., X, 168;
Unus Pellaeo iuveni non sufficit orbis;
Aestuat infelix angusto limite mundi.