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ÉLIEN

HISTOIRES DIVERSES

LIVRE QUATORZIÈME.

1. Mot d'Aristote. - 2. D'Agésilas. - 3. Mot de Timothée. - 4. Mot d'Aristide mourant. - 5. Du gouvernement d'Athènes. - 6. Conseil d'Aristippe pour conserver l'égalité d'âme. - 7. Lois et usages des Lacédémoniens. - 8. Comment Polyclète et Hippomaque firent sentir au peuple son ignorance. - 9. Réponse de Xénocrate. - 10. Réponse de Phocion à Démade. - 11. Devoirs d'un roi envers ses sujets. - 12. Occupation des rois de Perse dans leurs voyages. - 13. Des tragédies d'Agathon. - 14. Du joueur de lyre Stratonique. - 15. Socrate comparé au peintre Pauson. - 16. Mot d'Hipponicus. - 17. Mot de Socrate sur Archélaüs. - 18. Menace singulière d'un maître à son esclave. - 19. De la décence des discours d'Archytas. - 20. Anecdote de Sybaris. - 21. Du poète Syagrus. - 22. Trait singulier de tyrannie. - 23. De l'usage que Clinias et Achille faisaient de la musique. - 24. Générosité de quelques particuliers. - 25. Moyen singulier de conserver la paix dans un état. - 26. D'Antagoras et d'Arcésilas. - 27. D'Agésilas. - 28. De l'orateur Pythéas. - 29. De Lysandre. - 30. De la vanité d'Annon. - 31. De Ptolémée Tryphon. - 32. Mot du Lacédémonien Timandride. - 33. Réponse de Diogène à Platon. - 34. De l'origine des lois chez les Égyptiens. - 35. De Laïs. - 36. Leçon pour ceux qui tirent vanité de leur naissance. - 37. Sur les statues et les tableaux. - 38. Conseil d'Vpaminondas à Pélopidas. - 39. D'Antalcidas. - 40. D'Alexandre, tyran de Phères. - 41. Passion d'Apollodore pour le vin. - 42. Maxime de Xénocrate. - 43. De Ptolémée et de Bérénice. - 44. Loi lacédémonienne contre l'avarice. - 45. De quelques femmes célèbres. - 46. Manière de combattre des Magnésiens. - 47. Mot du peintre - Nicostrate. - 48. Personnages suspects à Alexandre. - 49. Trait de la vie de Philippe.

1. Mot d'Aristote.

ARISOTE, fils de Nicomaque, homme vraiment sage, et qui était bien connu pour tel, ayant été dépouillé des honneurs qu'on lui avait décernés à Delphes (01), écrivit en ces termes à Antipater (02) : "A l'égard des honneurs qu'on m'a décernés à Delphes, et dont je suis maintenant privé, je n'y suis ni extrêmement sensible, ni tout à fait indifférent." Certainement, ce propos ne partait point d'un mouvement d'orgueil : je n'ai garde de taxer Aristote d’un tel vice. Mais en homme judicieux, il pensait qu'autre chose est de n'avoir jamais joui d'un bien, quel qu'il soit, ou de le perdre après l'avoir possédé. Ce n'est pas un grand malheur que de ne point obtenir; mais il est mortifiant d'être privé de ce qu'on a obtenu.

2. D'Agésilas.

AGÉSILAS remerciait les Barbares qui violaient leurs serments, parce qu'en se parjurant ils attiraient sur eux-mêmes le courroux des dieux, et sur lui, leur bienveillance et leur secours.

3. Mot de Timothée.

TIMOTHÉE, reprochant vivement à Aristophon (03) l'excès de son luxe, lui disait : "Souvenez-vous qu'il n'y a rien de honteux pour qui n'en a jamais assez (04)."

4. Mot d'Aristide de mourant.

ARISTIDE de Locres ayant été mordu par une belette d'Espagne (05), et mourant de sa blessure, disait : "Puisqu'un accident devait être la cause de ma mort, j'aurais mieux aimé mourir de la morsure d'un lion, ou d'un léopard, que de celle d'un tel animal." Aristide, à ce qu'il me semble, était plus affligé de mourir d'une blessure ignoble, que de sa mort même.

5. Du gouvernement d'Athènes.

LES Athéniens ne prenaient pas toujours entre les citoyens de leur ville leurs magistrats et les commandants de leurs armées; ils confiaient souvent l'administration de la république à des étrangers dont la probité et les talents étaient reconnus. C'est ainsi, qu'ils choisirent plusieurs fois pour général de leurs troupes Apollodore de Cynique, quoique étranger, et de même Héraclide de Clazomène (06). Ils pensaient que des hommes qui avaient mérité l'estime publique, n’étaient pas indignes de les commander. On ne peut que louer la conduite des Athéniens, qui, sans partialité pour leurs concitoyens savaient honorer et récompenser la vertu dans ceux que la diversité d'origine devait leur rendre indifférents.

6. Conseil d'Aristippe pour conserver l'égalité d'âme.

IL y a, ce me semble, un grand sens dans le conseil que donnait Aristippe (07), de ne se tourmenter ni après coup pour le passé, ni par avance pour l'avenir. "C'est, disait-il, le caractère d'une âme tranquille et naturellement disposée à la gaieté. Il voulait donc qu'on ne s'occupât que du jour présent, et dans ce jour, du seul instant où l'on a, soit quelque chose à exécuter, soit quelque résolution à prendre. "Le présent seul, disait-il, est à nous; le passé et l'avenir ne nous appartiennent point : l’un n'existe déjà plus; il est incertain si l'autre existera."

7. Lois et usages des Lacédémoniens.

IL y avait à Sparte une loi qui portait qu'aucun Spartiate ne devait avoir ni la fraîcheur du teint d'une femme, ni plus d'embonpoint que n'en laissent les exercices habituels du gymnase. En effet, l'un est incompatible avec l’air mâle; l'autre annonce une vie molle et paresseuse. Par la même loi il était ordonné aux jeunes gens de se présenter nus, en public, devant les Vphores, tous les dix jours. On comblait d'éloges ceux qui paraissaient bien conformés, robustes, et façonnés par les exercices, comme le sont des ouvrages faits au tour ou au ciseau. Ceux au contraire qui se trouvaient avoir quelqu'un de leurs membres flasque et mou, par une surabondance de graisse que l'exercice aurait prévenue, étaient punis et battus. Les Vphores apportaient aussi le plus grand soin à l'examen des vêtements; ils en faisaient chaque jour la visite, pour voir si tout était tenu dans l'ordre convenable.
Les cuisiniers de Sparte devaient borner leur talent à savoir faire cuire les viandes (08) : s'il s'étendait plus loin, on les bannissait de la ville, comme en expiation du tort qu'ils avaient fait à la santé des citoyens.
Les mêmes Lacédémoniens, non contents d’avoir chassé de l'assemblée publique (09) Nauclide, fils de Polybiade, à cause de son énorme grosseur et de l'embonpoint excessif où l'avait conduit sa mollesse, le menacèrent de l'exil s'il continuait à mener le genre de vie honteux auquel il s'était livré jusqu'alors, et qui convenait mieux à un Ionien qu'à un Lacédémonien; ajoutant que la forme et toute l'habitude de son corps déshonoraient Sparte et ses lois.

8. Comment Polyclète et Hippomaque firent sentir au peuple son ignorance.

POLYCLÈTE (10) fit en même temps deux statues; l'une, d'après les avis de la multitude, l'autre, selon les règles de l’art. Il eut, pour le public, la complaisance de recevoir les conseils que lui donnait chacun de ceux qui entraient chez lui, changeant et réformant suivant leur goût. Enfin, il exposa ses deux statues. L'une excita l'admiration de tout le monde; l'autre fut un sujet de risée. Alors Polyclète prenant la parole : "La statue que vous critiquez, dit-il, est votre ouvrage, celle que vous admirez est le mien."
Un jour, le joueur de flûte Hipponiaque (11) voyant qu'un de ses disciples, qui jouait de cet instrument suivant toutes les règles de l’art (12), était applaudi de l’assemblée, le frappa de sa baguette, et lui dit, "Vous avez mal joué; autrement de tels auditeurs ne vous applaudiraient pas."

9. Réponse de Xénocrate.

PLATON reprochait souvent à Xénocrate de Chalcédoine sa grossièreté (13); et Xénocrate ne s’en fâchait point. Comme quelqu'un l'excitait à répliquer au philosophe : "Les reproches de Platon, répondit Xénocrate, me sont utiles", et par cette réponse il réduisit son homme au silence.

10. Réponse de Phocion à Démade.

LORSQUE les Athéniens eurent élu Démade pour leur général au préjudice de Phocion (14), Démade, fier de cette préférence, dit à Phocion, en l’abordant, "Prêtez-moi ce manteau sale que vous portiez ordinairement quand vous commandiez l'armée. - Vous serez toujours assez sale (15), lui repartit Phocion, tant que vous serez tel que vous êtes."

11. Devoirs d'un roi envers ses sujets.

PHILISQUE (16) disait un jour à Alexandre : " Travaillez pour la gloire; mais gardez-vous de mériter qu'on vous compare à la peste, ou à quelque autre maladie mortelle : soyez plutôt comme la Paix et la Santé." Philisque voulait dire par là, que gouverner durement et avec hauteur, prendre des villes, détruire des nations, c'est ressembler à la peste; au lien que veiller au salut de ses sujets, c'est imiter deux divinités, la Paix et la Santé.

12. Occupation des rois de Perse dans leurs voyages.

QUAND un roi de perse voyageait, il emportait avec lui, pour ne pas s'ennuyer, une tablette et un couteau qui lui servait à la racler. Ce genre de travail n'exerçait que les mains du roi. Ces princes n'avaient pas un seul livre, et ne prenaient pas la peine de penser, de sorte qu'ils n'occupaient jamais leur esprit ni de lectures graves et sérieuses, ni d'idées nobles et importantes.

13. Des tragédies d'Agathon.

LE poète Agathon (17) faisait un usage fréquent de l'antithèse. Quelqu'un, pour le corriger, lui proposant de retrancher cette figure de ses tragédies : "Vous ne faites donc pas attention, mon ami, répliqua-t-il, que je ne serais plus Agathon", tant il aimait les antithèses, et tant il croyait qu'elles faisaient l'essence de ses pièces.

14. Du joueur de lyre Stratonique.

Le joueur de lyre Stratonique (18), ayant été très bien accueilli dans une maison où on l'avait invité à entrer, fut d'autant plus flatté de cet empressement, qu'il se trouvait dans un pays étranger où il n'avait nulle liaison d'hospitalité. Il fit donc de grands remerciements à celui qui le recevait de si bonne grâce. Mais voyant arriver un nouvel hôte, puis un autre, et s'apercevant enfin que cette maison était ouverte à tous ceux qui voulaient y loger : "Sortons d'ici, dit-il à son esclave, nous avons pris un ramier pour une colombe; ce que nous avons cru une maison d'hospitalité, c’est une hôtellerie (19)."

15. Socrate comparé au peintre Pauson.

ON dit communément, et c'est une espèce de proverbe, les discours de Socrate ressemblent aux tableaux du peintre Pauson (20). Quelqu'un ayant demandé à Pauson de lui peindre un cheval se roulant par terre, il le peignit courant. Celui qui avait fait marché pour le tableau, trouva fort mauvais que le peintre n'en eût pas rempli la condition : "Tournez le tableau, lui dit Pauson; et le cheval qui court, vous paraîtra se vautrer (21)." Telle est, ajoute-t-on, l'ambiguïté des discours de Socrate : il faut les retourner pour en découvrir le véritable sens. En effet, Socrate, pour ne point indisposer contre lui ceux avec qui il conversait, leur tenait des propos énigmatiques, et susceptibles d'un double sens (22).

16. Mot d' Hipponicus.

HIPPONICUS, fils de Callias (23), voulant consacrer une statue à la patrie, quelqu'un lui conseilla de la donner à faire à Polyclète (24). "Je me garderai bien, répondit-il, de faire une offrande dont l'honneur ne serait pas pour moi, et serait tout entier pour l'artiste." On doit effectivement présumer qu'en considérant ce chef-d'oeuvre, on aurait plus admiré Polyclète qu'Hipponicus.

17. Mot de Socrate sur Archélaüs.

SOCRATE disait qu'il en avait coûté quatre cents mines à Archélaüs (25) pour embellir son palais (cette somme fut réellement payée à Zeuxis (26), pour le prix des tableaux dont il devait l’orner); mais que cette dépense était en pure perte pour Archélaüs; que beaucoup de gens venaient avec empressement, et de très loin, pour voir son palais, et que personne ne faisait le voyage de Macédoine pour le voir lui-même sans y être engagé et attiré par son argent; motif peu capable de toucher un sage (27).

18. Menace singulière d'un maître à son esclave.

UN habitant de Chio, en colère contre son esclave, lui disait : "Je ne t'enverrai pas au moulin, mais je te mènerai à Olympie." Apparemment cet homme regardait comme une punition plus sévère d’être brûlé par les rayons du soleil au spectacle des jeux olympiques, que d'être contraint de tourner la meule (28).

19. De la décence des discours d'Archytas.

ARCHYTAS (29), dont la modestie s'étendait à tous la objets, évitait surtout les termes qui auraient pu blesser la pudeur. Quand par hasard il se trouvait forcé de prononcer quelque mot indécent, il ne cédait point à la nécessité de la circonstance; il n'articulait point ce terme, il le traçait sur le mur; montrant ainsi ce qu'il ne pouvait taire, mais éludant l'obligation de le dire.

20. Anecdote de Sybaris.

UN enfant de Sybaris, en passant dans une rue avec son pédagogue (les gens de cette profession n'étaient pas moins voluptueux que les autres Sybarites), trouva par hasard une figue, et la ramassa. Le pédagogue, après une réprimande sévère, lui arracha ridiculement sa trouvaille, et la mangea. Je n'ai pu m'empêcher de rire en lisant ce trait dans les histoires sybaritiques; et comme j'aime trop mes semblables pour leur envier le plaisir d'en rire aussi, j'ai cru devoir en perpétuer le souvenir.

21. Du poète Syagrus.

APRES Orphée et Musée, on vit paraître Syagrus (30), le premier poète, dit-on qui ait chanté la guerre de Troie. Frappé de la grandeur du sujet, il osa entreprendre de le traiter.

22. Trait singulier de tyrannie.

UN tyran de Trézène (31), voulant prévenir les conspirations et les complots qu'on pourrait former contre lui, défendit à ses sujets de converser ensemble, soit en public, soit en particulier. Cette défense leur parut d'une dureté insoutenable : ils l'éludèrent, en convenant entre eux de certains signes des yeux et des mains : ils se jetaient réciproquement des regards tantôt vifs et animés, tantôt tranquilles; et quand leurs maux étaient au comble, chacun d'eux, par le froncement de ses sourcils, annonçait l'état de son âme, déjà peint sur son visage. Tout cela déplut au tyran : sur ces divers changements de visage, il jugea qu'il se tramait quelque chose contre lui dans le silence. Il défendit les signes à ses sujets. Un d'eux, indigné de cette horrible contrainte, et ne pouvant la supporter, enflammé d'ailleurs du désir de détruire la tyrannie, se rendit à la place publique. Là, se tenant debout, il répandit un torrent de larmes. Le peuple, qui s'attroupa autour de lui, en fit autant. Bientôt le tyran fut instruit que personne n'employait plus les signes du visage, mais qu’ils étaient remplacés par les pleurs. Alors, non content d'avoir asservi la langue et les gestes, et voulant encore ôter aux yeux la liberté qu'ils ont reçue de la nature, il accourut en diligence, escorté de ses gardes, pour faire cesser les larmes. Mais le peuple l'eut à peine aperçu, qu'il se saisit des armes que portaient les gardes, et massacra le tyran.

23. De l’usage que Clinias et Achille faisaient de la musique.

LORSQUE Clinias (32), homme d'ailleurs d'un caractère sage, et imbu des préceptes de Pythagore, sentait en lui un mouvement de colère, avec une disposition prochaine à s'y livrer, aussitôt, avant que l'accès fût à son dernier période et pût éclater, il accordait sa lyre et en jouait. Si on lui en demandait la raison : "C’est, répondait-il, pour rétablir le calme dans mon âme." C'est aussi, à mon avis, pour charmer sa colère, qu'Achille, dans l'Iliade, prenant sa lyre et s'accompagnant de la voix, retrace à sa mémoire les actions glorieuses des héros qui l'ont précédé. En effet, Achille aimait tellement la musique, que de toutes les dépouilles d'Eétion, il ne se réserva que sa lyre (33).

24. Générosité de quelques particuliers.

THÉOCLÈS, Thrasonide et Praxis vivaient dans l'opulence, les deux premiers à Corinthe, l'autre à Mitylène. Touchés de la pauvreté de quelques-uns de leurs concitoyens, ils donnèrent un bel exemple de générosité par le sacrifice qu'ils leur firent de leurs richesses, et tâchèrent d'inspirer à d'autres le même sentiment de compassion en faveur des indigents; mais ils n'en purent rien obtenir. Pour eux, ils remirent tout ce qui leur était dû; et le prix de cette générosité fut, non de l'argent, mais la conservation de leur propre vie : car ceux d'entre les débiteurs qui n'avaient pas été déchargés de leurs dettes, saisissant les armes que la fureur leur fournissait, et cédant au plus puissant des motifs, le besoin urgent du nécessaire, se jetèrent sur leurs créanciers et les massacrèrent.

25. Moyen singulier de conserver la paix dans un état.

DANS une dissension très vive qui divisait les habitants de Chio, et qui se répandit chez eux comme une maladie dangereuse, un citoyen (34), vraiment homme d'état, dit à ceux de son parti qui voulaient bannir de la ville tous leurs adversaires : " N'en faites rien; puisque nous les avons vaincus, gardons-en quelques-uns de peur qu'avec le temps nous ne tournions, faute d'ennemis, nos armes contre nous-mêmes. (35)" Il les persuada; et l'on trouva qu'il avait raison.

26. D'Antagoras et d'Arcésilas.

LE poète Antagoras (36) accablait d'injures Arcésilas (37), philosophe académicien quelque part qu'il le rencontrât, et jusque dans la place publique. Arcésilas avait le courage de n'y pas répondre; mais dès qu'il voyait plusieurs personnes assemblées, il s'en approchait et se mêlait à la conversation, pour mettre Antagoras à portée de se déshonorer lui-même par ses injures devant un plus grand nombre de témoins. En effet, ceux qui l'entendaient lui tournaient le dos, et le traitaient de fou.

27. Agésilas.

CEUX-LÀ me paraissent bien dignes de louange, qui, s'opposant au mal dès sa naissance, en coupent la racine avant qu'il ait pris son accroissement. C'est ainsi qu'Agésilas conseilla qu'on fît mourir, sans les entendre, les séditieux qui s'assemblaient la nuit (38) durant l'invasion des Thébains dans la Laconie (39).

28. De l'orateur Pythéas.

QUELQU'UN reprochait à l'orateur Pythéas  (40) qu'il était un méchant homme, et Pythéas n'en disconvenait pas : c'eût été démentir le témoignage de sa conscience. Mais il répondit que de tous ceux qui avaient gouverné la république d'Athènes, il était celui dont la méchanceté avait le moins duré. Il paraît que Pythéas s'applaudissait de n'avoir pas été toujours méchant, et qu'il croyait même ne l'être pas, puisqu'on ne le comptait point parmi ceux que leur méchanceté avait rendus célèbres. Façon de penser peu raisonnable (41); car, à mon avis, celui qui a eu l'intention de faire le mal, n'est pas moins méchant que celui qui l'a fait (42) .

29. De Lysandre.

LYSANDRE introduisit l'argent dans Lacédémone, et apprit à ses concitoyens à violer la défense du dieu qui avait ordonné que l'or et l'argent ne fussent jamais reçus dans Sparte. Quelques gens sages, qui avaient encore l'âme vraiment lacédémonienne et digne de Lycurgue et d'Apollon, s'y opposèrent; d'autres favorisèrent l'entrée de ces métaux, et se déshonorèrent. Ainsi se perdit insensiblement l'ancienne vertu de Sparte.

30. De la vanité d'Annon.

TEL était l'orgueil du Carthaginois Annon (43), que souffrant impatiemment de se voir renfermé dans les bornes de la condition humaine, il forma le projet de se faire donner par la renommée une existence plus excellente que celle qu'il tenait de la nature. Il acheta un grand nombre d'oiseaux, de l'espèce de ceux qu'on forme à chanter, et les nourrit dans un lieu obscur, où il leur enseignait uniquement à répéter, Annon est un dieu. Quand les oiseaux qui n'entendaient jamais que ces mots eurent appris à les bien prononcer, il les lâcha de différents côtés, ne doutant pas que leur chant ne répandît partout ce témoignage en sa faveur. Mais à peine eurent-ils pris leur volée et recouvré leur liberté, que, retournant aux lieux où ils avaient été élevés, ils reprirent leur ramage naturel, et ne formèrent plus que les sons propres des oiseaux, disant pour toujours adieu à Annon, et à ce qu'ils avaient appris durant leur esclavage.

31. De Ptolémée Tryphon.

PTOLÉMÉE, que sa vie voluptueuse fit surnommer Tryphon (44), répondit à une très belle femme qui lui demandait une audience particulière : " Ma sœur m’a défendu tout entretien avec les belles femmes "; à quoi celle-ci, sans se troubler, repartit avec esprit : "Vous ne seriez pas si difficile pour un beau jeune homme." Cette repartie plut fort à Ptolémée.

32. Mot du Lacédémonien Timandride.

UN Lacédémonien, nommé Timandride, partant pour un voyage, chargea son fils du soin de sa maison. A son retour, qui suivit de près son départ, il trouva que son fils avait considérablement augmenté le bien qu'il lui avait laissé : "Vous avez, lui dit-il, offensé plusieurs divinités à la fois, les dieux du pays et les dieux étrangers : tout citoyen vertueux leur consacre son superflu. Rien, ajouta-t-il, n'est plus honteux pour un homme, que d'être trouvé riche à sa mort, après s'être donné pour pauvre durant sa vie."

33. Réponse de Diogène à Platon.

DIOGÈNE assistait un jour à un discours de Platon, et ne l'écoutait point. " Écoute donc, chien, lui dit Platon. Mais, repartit Diogène sans se troubler, on ne m'a jamais vu retourner, comme font les chiens, au lieu où j'ai été vendu (45). " Diogène reprochait ainsi à Platon, son second voyage en Sicile. Platon disait ordinairement de Diogène, que c'était Socrate en délire.

34. De l'origine des ibis chez les Égyptiens.

LES Egyptiens prétendent que Mercure a été l'auteur de leurs lois (46). C'est la manie de tous les peuples de rendre ainsi plus auguste l'origine de leurs coutumes (47). Dans les premiers temps, chez les Égyptiens, les prêtres étaient les juges : le plus vieux en était le chef, et tous étaient soumis à son autorité; ce devait être le plus juste et le plus intègre de tous les hommes. Il portait au cou, un saphir, sur lequel était gravée une figure qu'on nommait la Vérité (48). Pour moi, j'aimerais mieux qu'un juge eût la vérité dans le cœur, que d'en porter l'image représentée sur une pierre.

35. De Laïs.

LAÏS fut surnommée la Hache, par allusion à la dureté de son caractère, et au prix excessif de ses faveurs, surtout pour les étrangers, parce qu'ils n'étaient à Corinthe qu'en passant (49).

36. Leçon pour ceux qui tirent vanité, de leur naissance.

C'EST à bon droit qu’on rit de ceux qui tirent vanité de leurs ancêtres; car, si nous admirons les actions de Marius, nous ignorons quel fut son père; et l'on peut dire la même chose de Caton, de Servius, de Tullus Hostilius, de Romulus (50).

37. Sur les statues et les tableaux.

J'AIME à voir, mais non pas superficiellement et en passant, les statues et les tableaux. Les ouvrages de l'art, principalement ceux dont je parle, offrent toujours quelque instruction utile. Entre plusieurs exemples qui le prouvent, je ne citerai que celui-ci. Jamais peintre ni sculpteur, en représentant les Muses (51), n'a osé changer les traits qui leur sont propres, et leur donner un caractère qui n'eût pas été digne des filles de Jupiter. Quel artiste serait assez dépourvu de sens pour les représenter armées ? On doit entendre par là que, pour être digne de vivre dans le commerce des Muses, l'esprit de paix et de douceur est nécessaire.

38. Conseil d'Épaminondas à Pélopidas.

ENTRE plusieurs mots remarquables du Thébain Épaminondas, on peut compter celui-ci. "Souvenez-vous, disait-il à Pélopidas, de ne jamais sortir de la place publique sans y avoir acquis un nouvel ami."

39. D'Antalcidas.

CE que je vais vous dire est d'un genre moins sérieux. Le roi de Perse (52) ayant envoyé à Antalcidas, qui était près de lui pour traiter de la paix (53), une couronne de roses bien parfumée; "Je reçois le présent, répondit Antalcidas; et je suis touché de cette marque de la bienveillance du roi : mais vous avez anéanti l'odeur des roses; le parfum artificiel a détruit celui que la nature leur a donné."

40. D'Alexandre, tyran de Phères.

ALEXANDRE, tyran de Phères (54), a été renommé pour sa cruauté. Un jour que le poète tragique Théodore (55), jouait, de la maniére la plus touchante, le rôle d'Érope, Alexandre ne pouvant retenir ses larmes, se leva précipitamment et sortit du théâtre. Pour consoler le poète, il lui dit que ce n’était ni par mépris pour son art, ni dans le dessein de lui faire injure, qu'il s'était retiré; mais par la honte de montrer de la pitié pour les malheurs feints d'un acteur, tandis qu'il n'était point touché des maux réels de ses concitoyens.

41. Passion d'Apollodore pour le vin.

APOLLODORE (56), le plus grand buveur de son temps, ne cachait point ce défaut, et ne cherchait à dérober aux yeux du public ni son ivresse, ni les funestes effets dont elle était suivie. Quand il était échauffé par la boisson, il devenait furieux, et d'autant plus à craindre que l'action du vin ajoutait à sa férocité naturelle.

42. Maxime de Xénocrate.

XÉNOCRATE (57), disciple de Platon, disait : "C'est une même chose de jeter les yeux, ou de porter les pieds dans la maison d'autrui." C'est-à-dire que celui qui regarde où il ne devait pas regarder, fait une aussi grande faute que celui qui entre où il ne devait pas entrer.

43. De Ptolémée et de Bérénice.

On raconte qu'un jour, pendant qu'un des deux Ptolémée (58), assis devant une table jouait aux dés, quelqu'un lisait, à côté de lui, les noms des coupables condamnés et les motifs de leur condamnation, afin qu'il marquât ceux qui méritaient la mort; Bérénice, sa femme arracha le registre des mains du lecteur, et ne lui permit pas de lire jusqu'à la fin. "Ce n'est pas en jouant, dit-elle, qu'il faut décider de la vie des hommes; on y doit apporter la plus sérieuse attention : autre chose est le sort des corps, et celui des dés." Ce discours plut beaucoup à Ptolémée; depuis ce moment, il n'entendit plus, durant son jeu, le rapport des jugements rendus en matière criminelle.

44. Loi lacédémonienne contre l'avarice.

UN jeune Lacédémonien, qui avait acheté un fonds de terre à vil prix, fut traduit devant les magistrats, et condamné à l'amende, parce que, dans un âge si tendre, il montrait déjà une grande avidité pour le gain. Ce qui caractérisait le courage des Lacédémoniens, c'est qu'il était aussi ferme contre l'argent que contre les ennemis de la république.

45. De quelques femmes célèbres.

LA Grèce eut trois femmes dont on ne parle qu'avec éloge, Pénélope (59), Alceste (60), et l'épouse de Protésilas (61). Il en est de même, chez les Romains, de Cornélie (62), de Porcie (63) et de Cestile (64). Je pourrais en nommer plusieurs autres mais n'ayant cité qu'un petit nombre de femmes grecques, je ne veux pas grossir la liste des femmes romaines, de peur qu'on ne me soupçonne d'avoir voulu me faire honneur à moi-même en flattant ma patrie.

46. Manière de combattre des Magnésiens.

DANS la guerre que les Magnésiens, établis sur les bords du fleuve Méandre (65), firent aux Éphésiens, chaque cavalier avait avec lui pour compagnon d'armes un chien de chasse (66), outre un esclave habile à tirer de l'arc. Dès que le signal était donné pour en venir aux mains, ces chiens terribles et cruels se jetaient avec fureur sur les troupes ennemies, et, portaient l'épouvante. Ensuite, les esclaves archers, devançant leurs maîtres, lançaient leurs traits, et hâtaient ainsi la défaite d'une armée que les chiens avaient déjà mise en désordre. Alors survenaient les cavaliers, qui formaient la troisième attaque.

47. Mot du peintre Nicostrate.

ZEUXIS d'Héraclée avait fait le portrait d'Hélène (67) : le peintre Nicostrate (68), en le voyant, fut saisi d'une surprise qu'on reconnut aisément pour un signe d'admiration. Quelqu'un s'approchant, lui demanda pourquoi il admirait si fort cet ouvrage. "Si vous aviez mes yeux, répondit Nicostrate, vous ne me feriez pas cette question." Je dirais de même des discours d'éloquence, que pour en sentir les beautés il faut avoir des oreilles savantes, comme les artistes doivent avoir des yeux exercés pour apprécier les productions de leur art.

48. Personnages suspects à Alexandre.

ALEXANDRE se défiait de Ptolémée (69) à cause de sa finesse; d'Arrhias (70) à cause de son caractère libertin; et de Python (71) à cause de son goût pour l'intrigue.

49. Trait de la vie de Philippe.

PHILIPPE attachait à sa maison et prenait à son service les fils des Macédoniens les plus distingués, non par aucun motif qui pût les déshonorer, comme on l'a supposé, ou pour les humilier. Il voulait, au contraire, en les endurcissant au travail, les accoutumer à se trouver toujours prêts à faire ce qu'on exigerait d'eux. On dit qu'il traitait durement ceux d'entre ces jeunes gens qui se montraient efféminés ou indociles. Il fit battre de verges Aphthonète, parce que, pressé par la soif, il avait quitté son rang et s'était écarté du chemin pour entrer dans une hôtellerie. Il fit punir de mort Archédamus, qui s'était dépouillé de ses armes pour courir au butin, malgré la défense qui lui en avait été faite. Archédamus croyait s'être acquis, par sa souplesse et ses flatteries, assez d'empire sur l'esprit de Philippe pour ne pas craindre d'être puni (72).

 

LIVRE QUATORZIÈME.

(01) On ne sait de quels honneurs il s'agit. Etait-ce une statue ? Il paraît certain, par le témoignage de Pausanias ( Eliac. II), qu'un homme, dont on ignore le nom en avait érigé une à Aristote dans Olympie. Etait-ce un autel ? Les Stagirites, ses concitoyens, lui en avaient consacré un, au rapport d'Ammonius; ils avaient même institué en son honneur une fête, appelée de son nom Aristotelée.

(02) Voy. sur Antipater, le c. 47 du liv. III.

(03) Aristophon fut l’ennemi de Timothée, et vint à bout, par ses imputations, de le faire exiler.

(04) Ce mot peut s'appliquer également à un prodigue et à un avare : tous deux n'en ont jamais assez, l'un pour fournir à son luxe, l'autre pour satisfaire le désir d'amasser.

(05) Suivant Hésychius et Suidas, les belettes en Espagne étaient plus grandes qu'en tout autre pays.

(06) Élien paraît avoir copié ce qu'il dit d’Apollodore et d'Héraclide, d'après le dialogue de Platon intitulé Ion; ce qui sert à faire connaître à peu près le temps où ils ont vécu : il aurait pu, d'après le même Platon, ajouter à ces deux hommes Phanosthène d'Andros..

(07) Élien a déjà fait plusieurs fois mention de ce philosophe et de ses opinions. Voy. le chap. 3 du liv. VII; le chap. 20 du liv. IX, etc. .

(08) Sur la frugalité des Lacédémoniens. voy. le chap, 34 du liv. III.

(09) Athénée, qui rapporte le même fait beaucoup plus brièvement dit au contraire qu'on fit avancer Nauclide au milieu de l'assemblée, où Lysandre lui reprocha la mollesse à laquelle il se livrait, et que peu s'en fallut qu'on ne le chassât de la ville. C'est d'après Athénée, que plusieurs commentateurs ont proposé de corriger le texte d'Élien, et de lire ƒEw t¯n ¤kklhsÛan ... kat®gagon au lieu de ƒEk t°w ¤kklhsÛaw et cette correction est justifiée par la vraie signification du verbe kat‹gein, qui n'a jamais été employé pour abducere.

(10) Célèbre sculpteur, né Sicyone, environ un siècle avant Alexandre-le-Grand. Élien rapporte, dans le chap. 16 de ce livre, un trait qui fait connaître combien on estimait les ouvrages de cet artiste.

(11) Dans le chap. 6 du liv.II, Élien raconte la même histoire beaucoup plus au long, avec cette différrence, qu'Hippomaque y est qualifié maître de gymnastique.

(12)  J'ai suivi la conjecture de Périzonius, je propose de lire, ¶marte mhd¢n katŒ tõ aëlhma, au lieu de,¶marte m¡n. Dans la leçon du texte, le mot d'Hippomaque n'aurait aucun sel.

(13) Cependant Platon aimait Xénocrate, et le préférait à Aristote. Voy. le chap. 19 du liv. III.

(14) Il a été parlé de Phocion dans le chap. 25 du liv. I; 16 du liv. II; 47 du liv. III; 43 et 49 du liv. XII, etc.

(15) Démade était extaorginairement livré à la gourmadise, et les flatteries les plus basses ne lui coûtaient rien pour satisfaire cette passion. Quand Antipater disait de lui : "Démade ressemble aux victimes; il ne lui reste que la langue et les entrailles." Plutarque, de Amore divit. On peut voir encore ci-dessus, le c. 12 du liv. V; le c. 47 du liv. XII, etc.

(16) Philisque, né dans l'île d'Égine, disciple de Diogène, et l'un des instituteurs d'Alexandre. Suidas.

(17) Voy. le chap. 21 du liv. II, et le c. 4 du liv. XIII.

(18) Stratonique, Athénien, contemporain d'Alexandre. Nicoclès, roi de Chypre, le fit mourir, pour avoir lancé quelques traits satiriques contre les princes ses enfants. Athén., liv. VIII, c. 12. 

(19) Eustathe, sur le sixième livre de l'Iliade, attribue ce mot à Platon. Quant au proverbe, Palumbem pro columbo, on peut voir les Adages d'Erasme. Nous disons de même en Français, Prendre martre pour renard.

(20) Pauson, peintre célèbre, surtout dans le genre des animaux : il était contemporain d'Aristophane, qui plaisante sur sa pauvreté, dans le Plutus.

(21) Junius,en citant ce fait, à l'article de Pauson (pag. 147 du Catalogue des Artistes), avertit que Lucien et Plutarque l'avaient rapporté avec Élien.

(22) On trouvera dans le quatrième volume des Mém. de l'Acad. des Belles-Lettres, pag. 300, une savante dissertation de M. l'abbé Fraguier sur l'Ironie de Socrate.

(23) Voy. les chap. 16 et 23 du liv. IV.

(24) Voy. le chap. 8 du liv. XIV.

(25) Sur Archélaüs, voy. le chap. 21 du liv. II, et le chap. 9 du liv. VIII.

(26) Voy. le chap. 2 du liv. II, et le c 12 du liv. IV.

(27) C'est ainsi qu'Archélaüs attira près de lui Euripide, Agathon, Pausanias, etc. Voy. le chap. 21 du liv.II, et le c. 4 du liv. XIII.

(28) Les jeux Olympiques étaient célébrés en plein air : on n'y était à l'abri ni du soleil ni de la pluie. Cet usage subsista de même longtemps chez les Romains; et ce ne fut qu'assez tard, au rapport de Valère Maxime, qu'ils couvrirent avec de grandes toiles les lieux où se donnaient les spectacles. Suétone, dans la Vie de Caligula, raconte que quelquefois ce prince, quand le peuple était assemblé pour les combats de gladiateurs, et que le soleil était le plus ardent, faisait ôter les toiles qui couvraient le cirque avec défense générale de sortir.

(29) Voy. sur Archytas, le chap. 17 du liv. III; le c. 14 du liv. VII, etc.

(30 Il en est de ce poète comme de tous ceux qu'on dit avoir précédé Homère : on ne connaît guère que leurs noms. On trouvera dans le premier volume de la Bibl. Gr. de Fabricius, c. 34 tout ce qu'on peut savoir sur Syagrus.

(31) On lit dans le texte, tyran de Truze; mais comme on ne connaît aucun lieu qui ait porté ce nom, j'y ai substitué, d'après les commentateurs, celui de Trézène, ville du Péloponnèse.

(32) Clinias, né à Tarente, contemporain et ami de Platon (Diog. Laërce, Vie de Démocrite). Il tenait cet usage de Pythagore : Pythagoras perturbationes animi lyra componebat, dit Sénèque, de Ira.

(33) Eétion n'est point nommé dans le texte; mais c'est indubitablement de lui qu'Élien veut parler. On voit qu'il a fait allusion aux vers 188 et 189 du neuvième livre de l'Iliade.

(34) Ce citoyen s'appelait Onomadémus; il était à la tête d'un des partis. Plutarque, de Reip. gerend. praecept

(35) Scipion Nasica pensait de même qu'il fallait laisser subsister Carthage, dans la crainte qu'on détruisant la rivale de Rome, les Romains ne s'abandonnassent à la mollesse. Florus, II, 15.

(36) Antagoras était Rhodien. Voss., de Poet. Gr.

(37) Arcésilas, fondateur de la nouvelle Académie et contemporain d'Épicure, qui par jalousie chercha à le décrier.  Il était né dans l'Éolide, et fut envoyé par ses concitoyens en ambassade vers Antigonus Gonatas. Diog. Laër.

(38Agésilas, avec le consentement des Éphores, suspendit, pour ce moment, les lois de Lycurgue, qui défendaient de faire mourir personne sans jugement préalable. Les assemblées nocturnes, dont il s'agit ici, avaient pour but de changer la forme du gouvernement. Plutarque, Vie d'Agésilas.

(39) Les Tbébains étaient commandés par Épaminondas. Voy. le chap. 42 du liv. XIII..

(40) Voy. sur Pythéas, le chap. 7 du liv. VII.

(41) En effet, comme l'a dit P. Syrus,
Non est bonitas,esse meliorem pessimo.

(42) On retrouve cette même pensée dans Juvénal, XIII, 209 :
Nam scelus intra se tacitum qui cogitat ullum,
Facti crimen habet.

(43) On croit que cet Annon, qui s'écrit communément Hannon, est l'auteur du Périple. Vossius, de Hist. Gr., Pag. 415. 

(44) Il paraît qu'il s'agit ici de Ptolémée Philopator, surnommé Tryphon, au rapport de Pline, VII, 56. Ce qu'Élien ajoute de la sœur de ce prince, convient aussi très bien à Philopator, qui avait épousé sa sœur Eurydice, qu'il fit mourir dans la suite, étant devenu amoureux d'une femme nommée Agathoclia, qui pourrait bien être celle dont parle Élien dans ce chapitre.

(45) Diogène faisait allusion au retour de Platon vers Denys, après que ce tyran l'eut fait vendre dans l'île d'Égine (Diog. Laër., Vie de Platon). Le même auteur rapporte différemment la réponse de Diogène, dans la vie de ce philosophe: "Vous avez raison, lui fait-il dire ironiquement à Platon, car je suis retourné vers ceux qui m'ont vendu. "

(46) Élien avait déjà dit la même chose dans le c. 4 du liv. XII.

(47) Tite-Live s'exprime à peu près de même dans le préambule de son histoire Datur haec venia antiquitati, ut miscendo humana divinis, primordia urbium augustiora faciat.

(48) Ceci ressemble à l'Ephod du grand-prêtre des Juifs, dont il est parlé dans l'Exode. Il était orné de pierreries, et suspendu sur la poitrine comme le pectoral du grand-prêtre des Égyptiens. Une autre ressemblance entre les deux prêtres, c'est que celui des Juifs, avant l'établissement de la royauté, jugeait aussi les peuples.

(49) Voy. sur Laïs, le chap. 2 du liv. V, et la première note de ce chapitre. A l'égard du surnom de Hache, il lui fut apparemment donné pour faire entendre qu'elle diminuait la fortune de ses amants, comme la hache atténue le bois. Ce chapitre est le même que le cinquième du liv. XII, où l'auteur dit de plus qu'il l'a emprunté d'Aristophane de Byzance.

(50)  Ce chapitre se trouve déjà plus haut, XII,  6; l'auteur de contente d'ajouter ici les noms de Servius, d'Hostilius et de Romulus.

(51) Tout ce qui est dit ici des Muses, a déjà été rapporté, presque dans les mêmes termes, liv. XII, c. 2.

(52) Artaxerxe Mnémon.

(53) Antalcidas, par haine pour Agésilas, dont il voyait que le crédit croissait pendant la guerre conseilla aux Lacédémoniens de faire la paix. Ayant été envoyé, pour cet effet, en ambassade vers Artaxerxe, il conclut un traité honteux et déshonorant, en abandonnant aux Perses les Grecs établis dans l'Asie. Plutarque, Vie d'Artax.

(54) Alexandre était neveu et gendre de Jason, dont Élien a parlé dans le chap. 9 du liv. XI.  Thébé, fille de Jason et femme d'Alexandre, ne pouvant plus supporter sa cruauté, et secondée par les frères du tyran, le fit mourir.  Plutarque, Vie de Pélopidas.

(55) Plutarque, qui rapporte ce fait dans l'endroit que je viens de citer, qualifie Théodore, acteur tragique, sans dire qu'il fut poète. En effet, Aristote (Polit, VII) parle d'un célèbre acteur de ce nom; mais comme plusieurs poètes étaient en même temps acteurs, il est possible que Théodore fût l'un et l'autre. Une autre différence entre le récit de Ptutarque et celui d'Élien, c'est que Plutarquc dit qu'on représentait les Troyennes d'Euripide. Quoi qu'il en soit, Érope, femme d'Atrée, déshonorée par Thyeste, pouvait bien fournir matière à une tragédie; et nous savons par Plutarque, que le poète Carcinus en avait composé une sous le nom d'Érope.

(56) Apollodore, tyran de Cassandrée, ville qui avait pris son nom de Cassandre, et qui s'appelait auparavant Potidée. Apollodore, après avoir gagné le peuple en feignant un grand zèle pour la démocratie, s'empara bientôt de l'autorité souveraine et l'exerça avec une cruauté inouïe. Polyen. liv. VI.

(57) Voy. le chap. 19 du liv. III, et le chap 9 du liv. XIV.

(58) Comme il y a deux Ptolémée dont les femmes s'appelaient Bérénice, Ptolémée Sôter, et Ptolémée Évergète, il n'est pas facile de décider auquel ce trait doit se rapporter. Périzonius pense qu'eu égard au penchant d'Évergète pour le plaisir et l'oisiveté, il lui convient mieux qu'à l'autre.

(59)  Pénélope est célèbre pour avoir gardé constamment la foi conjugale à Ulysse, malgré les amants dont elle était obsédée.

(60) Alceste, femme d'Admète, roi de Phères en Thessalie, aima si tendrement son mari, qu'elle voulut mourir à sa place. C'est le sujet d'une des tragédies d'Euripide.

(61) La femme de Protésilas s'appelait Laodamie : ayant appris que son mari, qui était allé au siége de Troie, avait été tué en descendant de son vaisseau, elle en mourut de douleur. Hygin, Fab. 103 et 104.

(62) Cornélie, fille du premier Scipion l'Africain, et mère des Gracques.

(63) Porcie, fille de Caton d'Utique, et femme de Brutus, ayant appris la défaite et la mort de son mari, se tua.

(64) Cestilie n'est point connue : Périzonius conjecture, avec beaucoup de vraisemblance, qu'il faut lire Clélie, cette femme courageuse qui se sauva des mains de Porsenna, en traversant le Tibre à la nage.

(65) Il y avait en Asie deux villes dn nom de Magnésie; celle dont parle Élien, et une autre au pied du mont Sipyle. Sur la première de ces villes, et sur la guerre contre les Éphésiens, antérieure au règne de Gygès en Lydie, on peut consulter Strabon, liv. XIV.

(66) Les Celtes menaient aussi à la guerre leurs esclaves et des chiens. Strab. liv. IV.

(67) Voy. sur le portrait d'Hélène, peint par Zeuxis, le chap. 12 du liv. IV.

(68) Périzonius proposede lire, Nicomaque, peintre célèbre, que Plutarque compare à Zeuxis, et dont Junius parle avec éloge; au lieu qu'on ne connaît Nicostrate que par ce passsage d'Élien.

(69) Voy. le chap. 36 du liv. XII, où Élien a traité le même sujet et dont celui-ci paraît être une suite.

(70) Arrhias. Plutarque (de Fort. Alex. ) l'appelle Tarrias; Quinte-Curce le nomme tantôt Adarchias, tantôt Atharias ou Apharias. Quoi qu'il en soit, il est certain que l'homme désigné sous ces différents noms était capitaine des gardes d'Alexandre.

(71) Python était un des sept principaux écuyers d'Alexandre, dont Arrien fait l'énumération, et qui tous étaient les plus intimes amis du prince.

(72) Tout ce qui concerne Archédamus n'est pas trop intelligible dans le texte, que la plupart des commentateurs ont regardé comme corrompu en cet endroit. J'ai cru pouvoir me permettre, pour y trouver un sens raisonnable, de faire une légère transposition, autorisée en quelque sorte par la parenthèse dans laquelle Périzonius a renfermé une partie de la phrase.