Denys d'Halicarnasse

DENYS DHALICARNASSE

 

ANTIQUITÉS ROMAINES.

ΔΙΟΝΥΣΙΟΥ ΑΛΙΚΑΡΝΑΣΕΩΣ ΡΩΜΑΙΚΗΣ ΑΡΧΑΙΟΛΟΓΙΑΣ ΛΟΓΟΣ ΔΕΚΑΤΟΣ.

 LIVRE DIXIEME II

Seconde partie

 

 

 

 

 

 

 

ANTIQUITÉS ROMAINES DE DENYS DHALICARNASSE

LIVRE DIXIEME.

 

 

 

 

 

LES ANTIQUITES ROMAINES DE DENYS D'HALICARNASSE

LITRE DIXIEME.

CHAPITRE PREMIER.

I. Quarante-neuvième consulat. II. Les tribuns recommencent à soulever le peuple, En quoi avait consulté jusqu' alors le droit Romain. III. Les tribuns entreprennent d'introduire à Rome un nouveau droit : les patriciens s'y opposent. IV. Prodiges surprenants et sans exemple. V. On consulte les devins et les oracles des Sibylles.

I. [10,1] Μετὰ δὲ τούτους ὀλυμπιὰς μὲν ἦν ὀγδοηκοστή, ἣν ἐνίκα στάδιον Τορύμβας Θεσσαλὸς ἄρχοντος Ἀθήνησι Φρασικλέους· ὕπατοι δὲ ἀπεδείχθησαν ἐν Ῥώμῃ Πόπλιος Οὐολούμνιος καὶ Σερούιος Σολπίκιος Καμερῖνος.

II. Οὗτοι στρατιὰν μὲν οὐδεμίαν ἐξήγαγον οὔτε ἐπὶ τιμωρίας ἀναπράξει τῶν ἀδικούντων σφᾶς τε αὐτοὺς καὶ τοὺς συμμάχους οὔθ´ ὡς διὰ φυλακῆς τὰ οἰκεῖα ἕξοντες· τῶν δ´ ἐντὸς τείχους κακῶν πρόνοιαν ἐποιοῦντο, μή τι δεινὸν ὁ δῆμος ἐπὶ τῇ βουλῇ συστὰς ἐξεργάσηται. Ἐταράττετο γὰρ αὖθις ὑπὸ τῶν δημάρχων ἀναδιδασκόμενος, ὅτι πολιτειῶν κρατίστη τοῖς ἐλευθέροις ἐστὶν ἡ ἰσηγορία, καὶ κατὰ νόμους ἠξίου διοικεῖσθαι τά τε ἰδιωτικὰ καὶ τὰ δημόσια. Οὔπω γὰρ τότε ἦν οὔτ´ ἰσονομία παρὰ Ῥωμαίοις οὔτ´ ἰσηγορία, οὐδ´ ἐν γραφαῖς ἅπαντα τὰ δίκαια τεταγμένα· ἀλλὰ τὸ μὲν ἀρχαῖον οἱ βασιλεῖς αὐτῶν ἔταττον τοῖς δεομένοις τὰς δίκας, καὶ τὸ δικαιωθὲν ὑπ´ ἐκείνων τοῦτο νόμος ἦν. Ὡς δ´ ἐπαύσαντο μοναρχούμενοι, τοῖς κατ´ ἐνιαυτὸν ὑπατεύουσιν ἀνέκειτο τά τε ἄλλα τῶν βασιλέων ἔργα καὶ ἡ τοῦ δικαίου διάγνωσις, καὶ τοῖς ἀμφισβητοῦσι πρὸς ἀλλήλους ὑπὲρ ὁτουδήτινος ἐκεῖνοι τὰ δίκαια οἱ διαιροῦντες ἦσαν. Τούτων δὲ τὰ μὲν πολλὰ τοῖς τρόποις τῶν ἀρχόντων ἀριστίνδην ἀποδεικνυμένων ἐπὶ τὰς ἀρχὰς ἀκόλουθα ἦν· κομιδῇ δ´ ὀλίγα τινὰ ἐν ἱεραῖς ἦν βύβλοις ἀποκείμενα, ἃ νόμων εἶχε δύναμιν, ὧν οἱ πατρίκιοι τὴν γνῶσιν εἶχον μόνοι διὰ τὰς ἐν ἄστει διατριβάς, οἱ δὲ πολλοὶ ἐμπορευόμενοί τε καὶ γεωργοῦντες διὰ πολλῶν ἡμερῶν εἰς ἄστυ καταβαίνοντες ἐπὶ τὰς ἀγορὰς ἄπειροι ἔτι ἦσαν.

III. Τὸ δὲ πολίτευμα τοῦτο πρῶτος μὲν ἐπείρασεν εἰσαγαγεῖν Γάιος Τερέντιος δημαρχῶν ἐν τῷ παρελθόντι ἔτει, ἀτελὲς δὲ ἠναγκάσθη καταλιπεῖν τοῦ τε πλήθους ὄντος ἐπὶ στρατοπέδων καὶ τῶν ὑπάτων ἐπίτηδες ἐν τῇ πολεμίᾳ γῇ τὰς δυνάμεις κατασχόντων, ἕως ὁ τῆς ἀρχῆς αὐτοῖς παρέλθῃ χρόνος. [10,2] Τότε δ´ αὐτὸ παραλαβόντες οἱ περὶ Αὖλον Οὐεργίνιον δήμαρχοι τελειῶσαι ἐβούλοντο· ἵνα δὲ μὴ τοῦτο γένοιτο μηδὲ κατὰ νόμους ἀναγκασθεῖεν πολιτεύεσθαι, πάντα ἐπιμηχανώμενοι διετέλουν οἵ τε ὕπατοι καὶ ἡ βουλὴ καὶ τῶν ἄλλων πολιτῶν οἱ πλεῖστον ἐν τῇ πόλει δυνάμενοι· βουλαί τε πολλαὶ καὶ ἐκκλησίαι συνεχεῖς ἐγίνοντο πεῖραί τε παντοῖαι ταῖς ἀρχαῖς κατ´ ἀλλήλων, ἐξ ὧν οὐκ ἄδηλον ἅπασιν ἦν, ὅτι μεγάλη τις καὶ ἀνήκεστος ἐξ ἐκείνης τῆς φιλονεικίας ἀναστήσεται τῇ πόλει συμφορά.

IV. Συνήπτετο δὲ τοῖς ἀνθρωπίνοις λογισμοῖς καὶ τὰ θεῖα δείματα προσγενόμενα, ὧν ἔνια οὔτ´ ἐν δημοσίαις εὑρίσκετο γραφαῖς οὔτε κατ´ ἄλλην φυλαττόμενα μνήμην οὐδεμίαν. Ὅσα μὲν γὰρ ἐν οὐρανῷ σέλα φερόμενα καὶ πυρὸς ἀνάψεις ἐφ´ ἑνὸς μένουσαι τόπου γῆς τε μυκήματα καὶ τρόμοι συνεχεῖς ἐγίνοντο, μορφαί τ´ εἰδώλων ἄλλοτ´ ἀλλοῖαι δι´ ἀέρος φερόμεναι καὶ φωναὶ ταράττουσαι διάνοιαν ἀνθρώπων, καὶ πάντα ὅσα τούτοις ὅμοια συνέπιπτεν, εὑρίσκετο καὶ πάλαι ποτὲ γεγονότα ἧττον τε καὶ μᾶλλον· οὗ δὲ ἄπειροί τε καὶ ἀνήκοοι ἔτι ἦσαν καὶ ἐφ´ ᾧ μάλιστα ἐταράχθησαν, τοιόνδ´ ἦν· νιφετὸς ἐξ οὐρανοῦ κατέσκηψεν εἰς γῆν πολὺς οὐ χιόνα καταφέρων, ἀλλὰ σαρκῶν θραύσματα ἐλάττω τε καὶ μείζω. Τούτων τὰ μὲν πολλὰ μετάρσια προσπετόμεναι πτηνῶν ὅσαι εἰσὶν ἀγέλαι τοῖς στόμασιν ἥρπαζον, τὰ δ´ ἐπὶ τὴν γῆν ἐνεχθέντα ἐν αὐτῇ τε τῇ πόλει καὶ κατὰ τοὺς ἀγροὺς μέχρι πολλοῦ χρόνου κείμενα ἦν οὔτε χρόαν μεταβάλλοντα, οἵαν ἴσχουσι παλαιούμεναι σάρκες, οὔτε σηπεδόνι διαλυόμενα, ὦζέ τε ἀπ´ αὐτῶν οὐδὲν πονηρόν.

V. Τοῦτο τὸ τέρας οἱ μὲν ἐπιχώριοι μάντεις οὐχ οἷοί τ´ ἦσαν συμβαλεῖν· ἐν δὲ τοῖς Σιβυλλείοις εὑρέθη χρησμοῖς, ὅτι πολεμίων ἀλλοεθνῶν παρελθόντων εἰς τὸ τεῖχος ἀγὼν ὑπὲρ ἀνδραποδισμοῦ καταλήψεται τὴν πόλιν, ἄρξει δὲ τοῦ πρὸς τοὺς ἀλλοεθνεῖς πολέμου στάσις ἐμφύλιος, ἣν χρῆν ἀρχομένην ἐξελαύνοντας ἐκ τῆς πόλεως καὶ θεοὺς παραιτουμένους θυσίαις τε καὶ εὐχαῖς ἀποτρέψαι τὰ δεινά· καὶ κρείττους ἔσεσθαι τῶν ἐχθρῶν.

 

 

I. Après Lucrétius et Véturius, la première année de la quatre-vingtième olympiade, en laquelle Torymbas de Thessalie remporta le prix de la course, Phrasiclès étant archonte à Athènes, on élut consuls à Rome Publius Volumnius et Servius Sulpicius Camerinus.

II. Ces nouveaux magistrats ne mirent aucune armée en campagne, ni pour venger les torts faits aux Romains et à leurs alliés, ni pour défendre les terres de la république des insultes des ennemis. Tous leurs soins de bornèrent à apaiser 456  les troubles du dedans, et à prévenir les entreprises du peuple ligué contre le Sénat. Les tribuns en effet recommençaient à le soulever : ils lui faisaient entendre que la meilleure forme de gouvernement pour des gens libres, était d'avoir tous une égale liberté de parler,et en conséquence les plébéiens voulaient que toutes les affaires, tant particulières que publiques, fussent administrées selon les lois. Car l'égalité de droit n'était pas encore établie chez les Romains, il n'était point permis a toutes sortes de personnes de parler dans les délibérations, et tout le droit n'était pas écrit sur des tables. Dans les premiers temps sous le gouvernement monarchique, les rois rendaient eux-mêmes la justice, ils décidaient les procès, et leurs jugements avaient force de loi. Après qu'ils eurent été chassé, [non-seulement] leurs autres fonctions, [ mais encore ] la connaissance des procès et le droit de rendre la justice, passèrent aux consuls annuels. Lorsqu'il s'élevait un différend, quel qu'il fût, entre les citoyens, c'étaient les consuls qui jugeaient l'affaire, et qui rendaient la justice : la plupart même de ces fonctions étaient attachées de droit aux vicegérents et substituts des magistrats qui étaient élus par les grands de l'état. Il y avait très-peu d'articles du droit Romain qui fussent écrits dans les livres sacrés, et qui eussent force de loi ; encore les patriciens étaient-ils les seuls qui en avaient la connaissance, parce qu'ils s'y appliquaient d'une manière particulière. Le peuple tout occupé au commerce et à la culture des terres, et qui ne venait à la ville que de temps en temps pour vendre ou pour acheter, n'y connaissait encore rien.

III. Caius Terentius des tribuns de l'année précédente, essaya le premier d'introduire un nouveau droit et une nouvelle forme de gouvernement : mais il fut obligé d'abandonner son entreprise, parce que le peuple était en  campagne, et que les consuls retenaient l'armée tout exprès dans le pays ennemi jusqu'à ce que le temps de leur magistrature fut écoulé. Sous le consulat de Volunivius et de Sulpicius, Aulus 457 Virginius et les autres tribuns ses collègues, réveillèrent l'affaire, et voulurent la terminer entièrement. Les consuls, le sénat et les citoyens les plus puissants, remuèrent ciel et terre pour faire échouer leur entreprise, de peur d'être eux-mêmes contraints d'administrer la république selon les lois. Le sénat fit à ce sujet plusieurs délibérations,  on tenait continuellement des assemblées ; les magistrats des deux factions n'oubliaient rien pour avoir le dessus. Déjà personne ne doutait que de pareilles intrigues ne causassent enfin quelques maux irrémédiables.

IV. Ces conjectures furent appuyés par des signes divins qui parurent d'autant plus terribles que quelques-uns n'étaient point marqués dans les registres publics, et que de mémoire d'homme on n'en avait jamais vu de semblables. Les feux qui couraient dans l'air, ou qui restaient dans l'endroit où ils s'étaient allumés, les mugissements et les continuels tremblements de terre, les spectres qu'on voyait voltiger, tantôt sous une forme, tantôt sous une autre, les voix effrayantes qu'on entendait de toutes parts et plusieurs autres prodiges, troublaient les cœurs des mortels. On trouvait néanmoins qu'il en était déjà arrivé autrefois de semblables, et qu'il n'y avait que du plus ou du moins. Mais ce qui suivit ces premiers signes, était absolument sans exemple : on n'avait jamais vu ni entendu rien de pareil: l'épouvante et l'alarme de répandirent partout. Il tomba d'en haut une quantité affreuse, non pas de neige, mais de morceaux de chair, les uns plus gros, 458 les autres plus petits : on voyait dans l'air une bande d'oiseaux de toutes les espèces, qui fondant sur cette proie, en enlevaient une partie avec leur bec : ce qui tomba à terre, tant dans la ville, que dans les campagnes, y demeura longtemps, sans changer ni de couleur ni d'odeur, sans s'en aller par pourri ture comme les vieilles chairs, et sans même sentir mauvais.

V. Les devins du pays ne purent donner l'explication de ce prodige. Mais on trouva dans les oracles des Sibylles, que quand des ennemis venus d'un pays étranger entreraient dans Rome, les citoyens combattraient pour défendre leur liberté, et pour n'être pas réduits sous l'esclavage : que ce malheur commencerait par une sédition intestine, qu'il fallait que les Romains l'étouffassent dans ses commencements et que s'ils avaient soin d'apaiser les dieux par des vœux et par des sacrifices, outre qu'ils détourneraient de dessus leurs têtes la tempête qui les menaçait, ils remporteraient une glorieuse victoire sur leurs ennemis.

 

459 CHAPITRE SECOND.

I. Le sénat s'assemble avec les tribuns : on délibère sur les moyens d'apaiser les troubles. II. On n'en peut venir a bout. Les tribuns font une nouvelle loi, portant qu'on élira dix députés pour faire le code des lois. III. Les patriciens la blâment.  IV. Les tribuns indiquent le jour auquel ils doivent la confirmer. V. Les patriciens se plaignent hautement de leur procédé. VI. Ils gagnent une partit des citoyens et intimident les autres. VII. Caeson Quintius le plus ardent de tous les jeunes patriciens. VIII. Les tribuns sont assigner ce jeune homme ; il les refuse pour juges. IX. Son père plaide sa cause, et tâche de fléchir la colère du peuple. X. Le peuple est porté à lui rendre son fils : Virginius s'y oppose ; discours de Virginius. XI. Fausse accusation de Volscius contre le jeune Caeson Quintius. XII. On veut sur le champ mettre à mort l'accusé, les consuls et les. tribuns s'y opposent. XIII. On le met en liberté sous caution. XIV. Le lendemain on le condamne par défaut etc. Il se retire en Tyrrhénie. XV. Son père rend aux cautions de son fils ce qu'ils ont déboursé pour lui : accablé de douleur il se retire à la campagne. XVI. La jeunesse patricienne continue s'opposer à la loi.

I. Ὡς δ´ ἐξηνέχθη ταῦτ´ εἰς τὸ πλῆθος, ἱερὰ μὲν πρῶτον ἔθυσαν, οἷς ἡ τούτων ἐπιμέλεια ἀνέκειτο, θεοῖς ἐξακεστηρίοις τε καὶ ἀποτροπαίοις, ἔπειτα συναχθέντες εἰς τὸ βουλευτήριον οἱ σύνεδροι παρόντων καὶ τῶν δημάρχων ὑπὲρ ἀσφαλείας τε καὶ σωτηρίας τῆς πόλεως ἐσκόπουν. [10,3] Τὸ μὲν οὖν καταλύσασθαι τὰ πρὸς ἀλλήλους ἐγκλήματα καὶ μιᾷ χρήσασθαι γνώμῃ περὶ τῶν κοινῶν, ὡς ὑπετίθεντο οἱ χρησμοί, πάντες ὡμολόγουν· ὅπως δ´ ἂν τοῦτο γένοιτο καὶ ἀπὸ τίνων ἀρξαμένων εἴκειν τοῖς ἑτέροις τὸ διάφορον παύσαιτο στασιάζον, οὐ μικρὰν αὐτοῖς παρεῖχεν ἀπορίαν. Οἱ μὲν γὰρ ὕπατοι καὶ οἱ τῆς βουλῆς προεστῶτες τοὺς εἰσφέροντας καινὰ πολιτεύματα δημάρχους καὶ καταλύειν ἀξιοῦντας τὸν πάτριον τῆς πολιτείας κόσμον αἰτίους ἀπέφαινον τῆς ταραχῆς. Οἱ δὲ δήμαρχοι σφᾶς μὲν αὐτοὺς οὐδὲν ἔλεγον ἀνάξιον δρᾶν οὔτε ἄδικον οὔτε ἀσύμφορον εὐνομίαν εἰσάγειν βουλομένους καὶ ἰσηγορίαν· τοὺς δὲ ὑπάτους καὶ τοὺς πατρικίους αἰτίους ἔσεσθαι τῆς στάσεως ἔλεγον ἀνομίαν αὔξοντας καὶ πλεονεξίαν καὶ ζηλοῦντας τὰ τῶν τυράννων ἔθη.

II. Ταῦτα καὶ πολλὰ τούτοις ὅμοια παρ´ ἑκατέρων ἐπὶ πολλὰς ἡμέρας ἐλέγετο, καὶ προὔβαινε διὰ κενῆς ὁ χρόνος· ἐν ᾧ τῶν κατὰ τὴν πόλιν οὔτε δημοσίων οὔτε ἰδίων οὐδὲν ἐτελεῖτο. Ὡς δ´ οὐδὲν ἐγίνετο τῶν προὔργου, λόγων μὲν ἐκείνων καὶ κατηγοριῶν, ἃς ἐποιοῦντο κατὰ τῆς βουλῆς, οἱ δήμαρχοι ἀπέστησαν· συναγαγόντες δὲ τὸ πλῆθος εἰς τὴν ἐκκλησίαν ὑπέσχοντο τῷ δήμῳ νόμον εἰσοίσειν ὑπὲρ ὧν ἠξίουν. Ἐπαινέσαντος δὲ τοῦ πλήθους τὸν λόγον οὐδὲν ἔτι ἀναβαλόμενοι τὸν παρασκευασθέντα νόμον ἀνέγνωσαν· κεφάλαια δὲ αὐτοῦ τάδε ἦν· ἄνδρας αἱρεθῆναι δέκα ὑπὸ τοῦ δήμου συναχθείσης ἀγορᾶς ἐννόμου τοὺς πρεσβυτάτους τε καὶ φρονιμωτάτους, οἷς ἐστι πλείστη πρόνοια τιμῆς τε καὶ δόξης ἀγαθῆς· τούτους δὲ συγγράψαντας τοὺς ὑπὲρ ἁπάντων νόμους τῶν τε κοινῶν καὶ τῶν ἰδίων εἰς τὸν δῆμον ἐξενεγκεῖν· τοὺς δὲ συγγραφησομένους ὑπ´ αὐτῶν νόμους κεῖσθαι ἐν ἀγορᾷ ταῖς καθ´ ἕκαστον ἐνιαυτὸν ἀποδειχθησομέναις ἀρχαῖς καὶ τοῖς ἰδιώταις ὅρους τῶν πρὸς ἀλλήλους δικαίων.

III.  τοῦτον προθέντες τὸν νόμον ἐξουσίαν ἔδοσαν τοῖς βουλομένοις αὐτοῦ κατηγορεῖν, ἀποδείξαντες τὴν τρίτην ἀγοράν. ἦσαν δὲ πολλοὶ καὶ οὐχ οἱ φαυλότατοι τῶν ἐκ τοῦ συνεδρίου, πρεσβύτεροι καὶ νέοι, κατήγοροι τοῦ νόμου, λόγους διεξιόντες ἐκ πολλῆς ἐπιμελείας καὶ παρασκευῆς· καὶ τοῦτ´ ἐφ´ ἡμέρας ἐγίνετο συχνάς.

IV. Ἔπειτα οἱ δήμαρχοι δυσχεραίνοντες ἐπὶ τῇ διατριβῇ τοῦ χρόνου λόγον μὲν οὐδένα ἔτι τοῖς κατηγόροις τοῦ νόμου προέθεσαν, ἡμέραν δὲ ἀποδείξαντες, ἐν ᾗ κυρώσειν αὐτὸν ἔμελλον, παρεῖναι τοὺς δημότας εἰς αὐτὴν παρεκάλουν ἀθρόους, ὡς οὐκέτι ταῖς μακραῖς δημηγορίαις ἐνοχληθησομένους, ἀλλ´ ἐποίσοντας ὑπὲρ αὐτοῦ τὴν ψῆφον κατὰ φυλάς. Οἱ μὲν δὴ ταῦτα ὑποσχόμενοι διέλυσαν τὴν ἐκκλησίαν.

V. [10,4] Μετὰ δὲ ταῦτα οἵ τε ὕπατοι καὶ τῶν πατρικίων οἱ πλεῖστον δυνάμενοι τραχύτερον ἤδη αὐτῶν προσιόντες καθήπτοντο λέγοντες, ὡς οὐκ ἐπιτρέψουσιν αὐτοῖς νόμους εἰσηγεῖσθαι καὶ τούτους ἀπροβουλεύτους. Συνθήκας γὰρ εἶναι κοινὰς πόλεων τοὺς νόμους, οὐχὶ μέρους τῶν ἐν ταῖς πόλεσιν οἰκούντων. Τοῦ τε πονηροτάτου ὀλέθρου καὶ ἀνηκέστου καὶ οὐδ´ εὐσχήμονος ἀρχὴν ἀπέφαινον εἶναι πόλεσί τε καὶ οἴκοις, ὅταν τὸ κάκιστον τῷ κρατίστῳ νομοθετῇ.

« Ποίαν δὲ ὑμεῖς, ἔφασαν, ὦ δήμαρχοι, νόμων εἰσφορᾶς ἢ ἀναιρέσεως ἐξουσίαν ἔχετε; οὐκ ἐπὶ ῥητοῖς μὲν δικαίοις ταύτην τὴν ἀρχὴν παρὰ τῆς βουλῆς ἐλάβετε, τοῖς δ´ ἀδικουμένοις ἢ κατισχυομένοις τῶν πενήτων βοηθεῖν ᾐτήσασθε τοὺς δημάρχους, ἄλλο δὲ μηδὲν πολυπραγμονεῖν; εἰ δ´ οὖν καὶ πρότερον ἦν τις ὑμῖν δύναμις, ἣν οὐκ ἐκ τοῦ δικαίου βιασάμενοι ἡμᾶς ἐλάβετε, ὑποκατακλινομένης ἑκάστῳ πλεονεκτήματι τῆς βουλῆς, οὐχὶ καὶ ταύτην νῦν ἀπολωλέκατε τῇ μεταβολῇ τῶν ἀρχαιρεσιῶν; οὔτε γὰρ βουλῆς δόγμα ὑμᾶς οὐκέτι ἀποδείκνυσιν ἐπὶ τὴν ἀρχήν, οὔτε αἱ φρᾶτραι τὴν ψῆφον ὑπὲρ ὑμῶν ἐπιφέρουσιν, οὔτε ἱερὰ προθύεται τοῖς θεοῖς πρὸ τῶν ἀρχαιρεσιῶν, ἃ κατὰ νόμους ἐχρῆν ἐπιτελεῖσθαι, οὔτε ἄλλο τῶν πρὸς τοὺς θεοὺς εὐσεβῶν ἢ πρὸς ἀνθρώπους ὁσίων οὐθὲν ἐπὶ τῆς ἀρχῆς τῆς ὑμετέρας γίνεται. Τίνος οὖν ὑμῖν ἔτι μέτεστι τῶν ἱερῶν καὶ σεβασμοῦ δεομένων, ὧν ἕν τι καὶ ὁ νόμος ἦν, ἐξαρνησαμένοις ἅπαντα τὰ νόμιμα; »

VI. Ταῦτά τε δὴ τοῖς δημάρχοις ἔλεγον οἱ πρεσβύτεροι καὶ οἱ νέοι αὐτῶν καθ´ ἑταιρίας διεξιόντες ἀνὰ τὴν πόλιν καὶ τοὺς μὲν ἐπιεικεστέρους τῶν δημοτῶν ὁμιλίαις ἀνελάμβανον κεχαρισμέναις, τοὺς δ´ ἀπειθεῖς καὶ ταραχώδεις ἀπειλαῖς κατεπλήττοντο κινδύνων, εἰ μὴ συμφρονήσειαν· ἤδη δέ τινας τῶν πάνυ ἀπόρων καὶ ἀπερριμμένων, οἷς οὐθενὸς τῶν κοινῶν παρὰ τὰ ἴδια κέρδη φροντὶς ἦν, παίοντες ὥσπερ ἀνδράποδα ἀνεῖργον ἐκ τῆς ἀγορᾶς.

VII. [10,5] Ὁ δὲ πλείστους τε περὶ αὑτὸν ἔχων ἑταίρους καὶ μέγιστον τῶν τότε νέων δυνάμενος Καίσων Κοίντιος ἦν, υἱὸς Λευκίου Κοιντίου τοῦ καλουμένου Κικιννάτου, ᾧ γένος τ´ ἦν ἐπιφανὲς καὶ βίος οὐθενὸς δεύτερος, ἀνὴρ ὀφθῆναί τε κάλλιστος νέων καὶ τὰ πολέμια πάντων λαμπρότατος φύσει τε περὶ λόγους κεχρημένος ἀγαθῇ· ὃς ἐν τῷ τότε χρόνῳ πολὺς ἔρρει κατὰ τῶν δημοτικῶν οὔτε λόγων φειδόμενος, ὧν βαρὺ τοῖς ἐλευθέροις ἀκούειν, οὔτ´ ἔργων ἀκολούθων τοῖς λόγοις ἀπεχόμενος.

VIII. Οἱ μὲν οὖν πατρίκιοι τίμιον αὐτὸν ἐπὶ τούτοις εἶχον καὶ μένειν παρὰ τὰ δεινὰ ἠξίουν αὐτοὶ παρασχεῖν τὸ ἀσφαλὲς ὑπισχνούμενοι· οἱ δ´ ἐκ τοῦ δήμου πάντων δὴ μάλιστα αὐτὸν ἀνθρώπων ἐμίσουν. Τοῦτον τὸν ἄνδρα ἔγνωσαν οἱ δήμαρχοι πρῶτον ἐκποδὼν ποιήσασθαι, ὡς καταπληξόμενοι τοὺς λοιποὺς τῶν νέων καὶ προσαναγκάσοντες σωφρονεῖν. Γνόντες δὲ ταῦτα καὶ παρασκευασάμενοι λόγους τε καὶ μάρτυρας πολλοὺς εἰσάγουσιν αὐτὸν ὑπὸ δίκην ἀδικήματος δημοσίου, θανάτου τιμησάμενοι τὴν δίκην. Παραγγείλαντες δ´ αὐτῷ παρεῖναι πρὸς τὸν δῆμον, ἐπειδὴ καθῆκεν ὁ χρόνος, ὃν ἔταξαν τῇ δίκῃ, συναγαγόντες ἐκκλησίαν μακροὺς ἐποιήσαντο κατ´ αὐτοῦ λόγους, διεξιόντες ὅσα βίᾳ διαπεπραγμένος ἐτύγχανεν εἰς τοὺς δημότας, ὧν τοὺς πεπονθότας αὐτοὺς παρῆγον μάρτυρας. Ὡς δὲ παρέδωκαν τὸν λόγον, αὐτὸ μὲν τὸ μειράκιον οὐχ ὑπήκουε καλούμενον ἐπὶ τὴν ἀπολογίαν, ἀλλ´ ἠξίου τοῖς ἰδιώταις αὐτοῖς ὑπὲρ ὧν ᾐτιῶντο παθεῖν κατὰ τὸν νόμον ὑπέχειν δίκας, ἐπὶ τῶν ὑπάτων τῆς κρίσεως γινομένης·

IX. Ὁ δὲ πατὴρ αὐτοῦ χαλεπῶς φέροντας τὴν αὐθάδειαν τοῦ μειρακίου τοὺς δημοτικοὺς ὁρῶν ἀπελογεῖτο τὰ μὲν πολλὰ ψευδῆ τε καὶ ἐξ ἐπιβουλῆς συγκείμενα κατὰ τοῦ παιδὸς ἀποδεικνύς· ὅσα δ´ οὐκ ἐνῆν ἀρνήσασθαι μικρὰ καὶ φαῦλα καὶ οὐκ ἄξια δημοσίας ὀργῆς εἶναι λέγων καὶ οὐδὲ ταῦτα ἐξ ἐπιβουλῆς ἢ δι´ ὕβριν, ἀλλ´ ὑπὸ φιλοτιμίας μειρακιώδους γεγονότα ἐπιδεικνύμενος, δι´ ἣν πολλὰ μὲν αὐτῷ συμβῆναι δρᾶσαι τῶν ἀβουλήτων ἐν ἁψιμαχίαις, πολλὰ δ´ ἴσως καὶ παθεῖν, οὔτε ἡλικίας ἐν τῷ κρατίστῳ ὄντι οὔτε φρονήσεως ἐν τῷ καθαρωτάτῳ. ἠξίου τε τοὺς δημοτικοὺς μὴ μόνον ὀργὴν μὴ ἔχειν ἐφ´ οἷς ἥμαρτεν εἰς ὀλίγους, ἀλλὰ καὶ χάριν εἰδέναι περὶ ὧν ἅπαντας εὖ ποιῶν ἐν τοῖς πολέμοις διετέλεσε, τοῖς μὲν ἰδιώταις ἐλευθερίαν κτώμενος, τῇ δὲ πατρίδι ἡγεμονίαν, ἑαυτῷ δὲ εἴ ποτε ἁμάρτοι τι φιλανθρωπίαν παρὰ τῶν πολλῶν καὶ βοήθειαν. Καὶ διεξῄει τάς τε στρατείας πάσας καὶ τοὺς ἀγῶνας ἅπαντας, ἐξ ὧν ἀριστεῖα καὶ στεφάνους παρὰ τῶν στρατηγῶν ἔλαβε, πολιτῶν τε ὁπόσων ἐν ταῖς μάχαις ὑπερήσπισε καὶ τείχεσι πολεμίων ὁσάκις πρῶτος ἐπέβη. Τελευτῶν δ´ εἰς οἴκτους κατέβαινε καὶ δεήσεις, ἀντὶ τῆς ἑαυτοῦ πρὸς ἅπαντας ἐπιεικείας βίου τε, ὃς ἐμαρτυρεῖτο αὐτῷ πάσης καθαρὸς διαβολῆς, μίαν ἀπαιτῶν παρὰ τοῦ δήμου χάριν, φυλάξαι τὸν υἱὸν αὐτῷ.

X. [10,6] Ὁ μὲν οὖν δῆμος ἥδετο πάνυ τοῖς λόγοις καὶ χαρίζεσθαι τὸ μειράκιον τῷ πατρὶ πρόθυμος ἦν. Ὁ δὲ Οὐεργίνιος ὁρῶν, ὅτι μὴ δόντος ἐκείνου δίκην ἀφόρητον ἔσται τὸ θράσος τῶν αὐθαδῶν μειρακίων, ἀνίσταται καί φησιν·

« Σοὶ μέν, ὦ Κοίντιε, ἥ τε ἄλλη μαρτυρεῖται πᾶσα ἀρετὴ καὶ ἡ πρὸς τοὺς δημοτικοὺς εὔνοια, ἀνθ´ ὧν τὸ τιμᾶσθαί σοι πάρεστιν. Ἡ δὲ τοῦ μειρακίου βαρύτης καὶ ἡ πρὸς ἅπαντας ἡμᾶς ὑπερηφανία παραίτησιν ἢ συγγνώμην οὐδεμίαν ἐπιδέχεται· ὅστις ὑπὸ τοῖς σοῖς ἤθεσι τραφεὶς οὕτως οὖσι δημοτικοῖς καὶ μετρίοις, ὡς ἅπαντες ἴσμεν, τῶν μὲν σῶν ὑπερεῖδεν ἐπιτηδευμάτων, τυραννικὴν δὲ αὐθάδειαν καὶ βαρβάρων ἀνθρώπων ὕβριν ἠγάπησε, καὶ πονηρῶν ἔργων ζῆλον εἰς τὴν πόλιν ἡμῶν εἰσαγήοχεν. Εἰ μὲν οὖν ἐλάνθανέ σε τοιοῦτος ὤν, νῦν ὅτ´ ἔγνωκας ἀγανακτεῖν ὑπὲρ ἡμῶν δίκαιος ἂν εἴης· εἰ δὲ συνῄδεις τε καὶ συνέπραττες οἷς προεπηλάκιζε τὴν τῶν πενήτων πολιτῶν τύχην, πονηρὸς ἄρα καὶ αὐτὸς ἦσθα, καὶ ἡ τῆς καλοκἀγαθίας δόξα οὐκ ἐκ τοῦ δικαίου σοι περιγέγονεν. Ἀλλὰ γὰρ ὅτι ἠγνόεις αὐτὸν οὐκ ὄντα τῆς σῆς ἀρετῆς ἄξιον, ἐγώ σοι τοῦτ´ ἔχω μαρτυρεῖν. Ἀπολύων δέ σε τοῦ τότε συναδικεῖν ἡμᾶς μέμφομαι τοῦ νῦν ἡμῖν μὴ συναγανακτεῖν. ἵνα δὲ μᾶλλον μάθῃς, ἡλίκον ἄρα τῇ πόλει κακὸν ἐπιτρέφων ἐλάνθανες, ὡς ὠμὸν καὶ τυραννικὸν καὶ οὐδὲ φόνου πολιτικοῦ καθαρόν, ἄκουσον αὐτοῦ φιλότιμον ἔργον καὶ ἀντιπαρεξέτασον αὐτῷ τὰς ἐν τοῖς πολέμοις ἀριστείας· καὶ ὑμῶν ὅσοι συνεπαθεῖτε ἀρτίως οἰκτιζομένῳ τῷ ἀνδρὶ σκοπεῖτε, εἰ ἄρα καλῶς ὑμῖν ἔχει τοιούτου φείσασθαι πολίτου. ».

XI. [10,7] Ταῦτ´ εἰπὼν ἀνίστησιν ἐκ τῶν συναρχόντων Μάρκον Οὐολούσκιον καὶ λέγειν ἐκέλευσεν, ἃ σύνοιδε τῷ μειρακίῳ. Σιωπῆς δὲ γενομένης καὶ πολλῆς ἐξ ἁπάντων προσδοκίας μικρὸν ἐπισχὼν ὁ Οὐολούσκιος εἶπεν·

« Ἐγὼ μάλιστα ἐβουλόμην ἄν, ὦ πολῖται, δίκην ἰδίαν, ἣν ὁ νόμος δίδωσί μοι, παρὰ τούτου λαβεῖν δεινὰ καὶ πέρα δεινῶν πεπονθώς· κωλυθεὶς δὲ τούτου τυχεῖν διὰ πενίαν καὶ ἀσθένειαν καὶ τὸ τῶν πολλῶν εἷς εἶναι, νῦν γ´ ἡνίκα ἔξεστί μοι τὸ τοῦ μάρτυρος σχῆμα, ἐπειδὴ οὐ τὸ τοῦ κατηγόρου, λήψομαι. Ἃ δὲ πέπονθα, ὡς ὠμὰ καὶ ἀνήκεστα, ἀκούσατέ μου. Ἀδελφὸς ἦν μοι Λεύκιος, ὃν ἐγὼ πάντων ἀνθρώπων μᾶλλον ἠγάπησα. Οὗτός μοι συνεδείπνει παρὰ φίλῳ, καὶ μετὰ ταῦτ´ ἀναστάντες τῆς ἐχομένης νυκτὸς ᾠχόμεθα. Διεληλυθόσι δ´ ἡμῖν τὴν ἀγορὰν περιτυγχάνει Καίσων οὑτοσὶ κωμάζων σὺν ἑτέροις ἀγερώχοις μειρακίοις. Καὶ οὗτοι τὸ μὲν πρῶτον ἔσκωπτόν τε καὶ ὕβριζον εἰς ἡμᾶς, οἷα μεθύοντες ἂν νέοι καὶ αὐθάδεις {ὡς ἂν} εἰς ταπεινοὺς καὶ πένητας {ὑβρίσαιεν}, ὡς δ´ ἠγανακτοῦμεν πρὸς αὐτούς, ἐλεύθερον ῥῆμα εἰς τοῦτον εἶπε. Δεινὸν δ´ ἡγησάμενος οὑτοσὶ Καίσων ἀκοῦσαί τι, ὧν οὐκ ἐβούλετο, προσδραμὼν αὐτῷ παίων καὶ λακτίζων καὶ πᾶσαν ἄλλην ὠμότητα καὶ ὕβριν ἐνδεικνύμενος ἀποκτείνει. Ἐμοῦ δὲ κεκραγότος καὶ ἀμυνομένου τοσαῦτα ὅσα ἐδυνάμην, ἐκεῖνον ἤδη νεκρὸν κείμενον ἀφεὶς ἐμὲ πάλιν ἔπαιε καὶ οὐ πρότερον ἐπαύσατο, πρὶν ἀκίνητόν τε καὶ ἄφωνον εἶδεν ἐρριμμένον, δόξας εἶναι νεκρόν. Μετὰ δὲ ταῦτα οὗτος μὲν ἀπιὼν ᾤχετο χαίρων ὥσπερ ἐπὶ καλῷ ἔργῳ· ἡμᾶς δὲ οἱ παραγενόμενοι μετὰ ταῦτα αἵματι πεφυρμένους αἴρουσι καὶ εἰς τὴν οἰκίαν ἀπεκόμισαν, τὸν μὲν ἀδελφόν μου {Λεύκιον} νεκρόν, ὥσπερ ἔφην, ἐμὲ δὲ ἡμιθανῆ καὶ ἐλπίδας ἔχοντα τοῦ ζῆν ὀλίγας. Ταῦτα δ´ ἐγένετο Ποπλίου Σερουιλίου καὶ Λευκίου Αἰβουτίου τὴν ὑπατείαν ἐχόντων, ὅτε ἡ μεγάλη νόσος κατέλαβε τὴν πόλιν, ἧς ἀπελαύσαμεν καὶ ἡμεῖς ἀμφότεροι. Τότε μὲν οὖν δίκην οὐχ οἷόν τ´ ἦν μοι παρ´ αὐτοῦ λαβεῖν τεθνηκότων ἀμφοτέρων τῶν ὑπάτων· Λευκίου δὲ Λοκρητίου καὶ Τίτου Οὐετουρίου παραλαβόντων τὴν ἀρχὴν βουλόμενος αὐτὸν ἀγαγεῖν ὑπὸ δίκην ἐκωλύθην διὰ τὸν πόλεμον, ἐκλελοιπότων ἀμφοτέρων τῶν ὑπάτων τὴν πόλιν. Ὡς δὲ ἀνέστρεψαν ἀπὸ τῆς στρατείας, πολλάκις αὐτὸν ἐπὶ τὴν ἀρχὴν καλῶν, ὁσάκις προσέλθοιμι - καὶ ταῦτα δὴ πολλοὶ τῶν πολιτῶν ἴσασι - πληγὰς ἐλάμβανον ὑπ´ αὐτοῦ. Ταῦτ´ ἐστὶν ἃ πέπονθα, ὦ δημόται, μετὰ πάσης ἀληθείας εἰρημένα πρὸς ὑμᾶς. »

XII. [10,8] Ταῦτ´ εἰπόντος αὐτοῦ κραυγή τε ἐκ τῶν παρόντων ἐγένετο καὶ ὁρμὴ πολλῶν ἐπὶ τὴν ἐκ χειρὸς δίκην. Ἀλλ´ οἵ τε ὕπατοι ἐμποδὼν ἐγένοντο καὶ τῶν δημάρχων οἱ πλείους πονηρὸν ἔθος οὐκ ἀξιοῦντες εἰς τὴν πόλιν εἰσάγειν. ἦν δὲ καὶ τοῦ δήμου τὸ καθαρώτατον οὐ βουλόμενον ἀποστερεῖν λόγου τοὺς ὑπὲρ τῶν μεγίστων ἀγωνιζομένους.

XIII. Τότε μὲν οὖν ἐπέσχε τὴν τῶν θρασυτέρων ὁρμὴν ἡ τοῦ δικαίου πρόνοια, καὶ ἀναβολὴν ἔλαβεν ἡ δίκη, οὐ μικρᾶς ἐμπεσούσης φιλοτιμίας καὶ ζητήσεως ὑπὲρ τοῦ σώματος, εἴτ´ ἐν δεσμοῖς αὐτὸ δεῖ φυλάττεσθαι τέως, εἴτ´ ἐγγυητὰς δοῦναι τῆς ἀφίξεως, ὥσπερ καὶ ὁ πατὴρ ἠξίου· καὶ ἡ βουλὴ συνελθοῦσα ἐψηφίσατο χρήμασι διεγγυηθὲν ἐλεύθερον εἶναι τὸ σῶμα μέχρι δίκης.

XIV. Τῇ δ´ ἑξῆς ἡμέρᾳ συναγαγόντες οἱ δήμαρχοι τὸ πλῆθος, ἐκλιπόντος τοῦ μειρακίου τὴν δίκην, ἐκύρωσαν τὴν κατ´ αὐτοῦ ψῆφον καὶ τοὺς ἐγγυητὰς δέκα ὄντας ἐπράξαντο τὰ περὶ τοῦ σώματος τῆς ἀποκαταστάσεως ὁμολογηθέντα χρήματα. Καίσων μὲν οὖν τοιαύτῃ περιπεσὼν ἐπιβουλῇ, κατασκευασαμένων ἅπαντα τῶν δημάρχων καὶ Οὐολουσκίου ψευδῆ μαρτυρήσαντος, ὡς ἐγένετο φανερὸν σὺν χρόνῳ, φεύγων εἰς Τυρρηνίαν ᾤχετο·

XV. Ὁ δὲ πατὴρ αὐτοῦ τὰ πλεῖστα τῆς οὐσίας ἀπεμπολήσας καὶ τὰ ὁμολογηθέντα ὑπὸ τῶν ἐγγυητῶν χρήματα ἀποδοὺς ἑαυτῷ χωρίον ἓν μικρὸν ὑπολειπόμενος πέραν τοῦ Τεβέριος ποταμοῦ, ἐν ᾧ ταπεινή τις ἦν καλύβη, γεωργῶν αὐτόθι μετὰ δούλων ὀλίγων ἐπίπονον καὶ ταλαίπωρον ἔζη βίον ὑπὸ λύπης τε καὶ πενίας, οὔτε πόλιν ὁρῶν οὔτε φίλους ἀσπαζόμενος οὔθ´ ἑορτάζων οὔτ´ ἄλλης εὐφροσύνης οὐδεμιᾶς ἑαυτῷ μεταδιδούς.

XVI. Τοῖς μέντοι δημάρχοις πολὺ τὸ παράλογον ἐγένετο τῆς ἐλπίδος. Οὐ γὰρ ὅπως ἐπαύσατο ἡ τῶν νέων φιλοτιμία σωφρονισθεῖσα τῇ Καίσωνος συμφορᾷ, πολὺ δὲ χαλεπωτέρα καὶ πλείων ἐγένετο ἔργοις τε καὶ λόγοις καταγωνιζομένη τὸν νόμον· ὥστ´ οὐθὲν ἔτι αὐτοῖς ἐξεγένετο διαπράξασθαι δαπανηθέντος εἰς ταῦτα τοῦ χρόνου τῆς ἀρχῆς. Ὁ μέντοι δῆμος εἰς τὸν ἐπιόντα πάλιν ἐνιαυτὸν ἄρχοντας ἀπέδειξεν αὐτούς.

 

I.  Dès que ces oracles furent divulgués parmi le peuple, ceux qui étaient chargés des fonctions de la religion commencèrent à offrir des sacrifices aux dieux, qui détournent les maux publics et qui préservent des malheurs dont on est menacé. Ensuite le sénat s'assembla avec les tribuns, afin de prendre des mesures pour le salut de la république. Toute l'assemblée fut d'avis qu'il fallait travailler de concert à faire cesser les accusations qu'on formait les uns contre les autres, afin de n'avoir tous qu'un seul et même esprit dans l'administration des affaires, comme portaient les oracles. Mais on était fort embarrassé sur les moyens d'établir à Rome cette parfaite union et d'apaiser les troubles par une réconciliation sincère. La difficulté était de savoir lequel des deux partis commencerait le premier à faire les avances pour céder à ses adversaires. Les consuls et les plus notables du sénat prétendaient qu'on devait regarder les tribuns comme la principale cause de tous les troubles, parce qu'ils avaient voulu abolir l'ancienne forme du gouvernement et introduire des nouveautés. Les tribuns disaient au contraire qu'ils ne faisaient rien qui fut ou indigne de leurs ancêtres, ou injuste et nuisible à l'état, puisqu'ils voulaient seulement introduire l'usage des bonnes lois et établir l'égalité entre tous les citoyens, que les consuls et les patriciens étaient les seuls auteurs des séditions, parce qu'en fomentant la transgression des lois ils ne faisaient qu'augmenter de plus en plus leur domination insupportable 460 qui ne tendait qu'à une véritable tyrannie.

II. Pendant plusieurs jours on tint de semblables propos de part et d'autre. Le temps de passait sans rien conclure, et sans terminer aucune affaire, soit particulière, soit publique. Les tribuns enfin s'aperçoivent qu'ils ne gagnent rien par leurs remontrances et par les plaintes continuelles qu'ils faisaient contre le sénat. Aussitôt ils laissent là toutes leurs vaines poursuites pour prendre d'autres mesures plus convenables. Ils convoquent le peuple, et lui promettent de faire une loi qui renfermera toutes leurs demandes. L'assemblée applaudit à cette proposition, et dans le moment ils font lecture de la loi qu'ils avaient déjà écrite et minutée. En voici la teneur : Que le peuple dans une assemblée légitime, choisirait dix députes respectables par leur âge et par leur prudence, qui n'eussent que l'honneur et la véritable gloire en recommandation: Que ces décemvirs feraient des lois sur toutes les affaires tant publiques que particulières ; et qu'ensuite ils les proposeraient dans une assemblée du peuple : Que les lois qu'ils auraient faites, seraient affichées dans la place publique pour régler les droits tant des particuliers que des magistrats qu'on élirait chaque année.

III. Après avoir proposé cette loi en pleine assemblée, ils laissèrent à tous ceux qui ne la trouveraient pas bonne la liberté de la blâmer, leur accordant du temps jusqu'au troisième jour de marché, c'est- à-dire environ vingt-sept jours, pour faire leurs remontrances. Il y eut plusieurs personnes, et même des plus notables du sénat, tant entre les anciens que parmi les jeunes, qui blâmèrent la loi par des discours étudiés et préparés avec beaucoup de soin, ce qui dura pendant plusieurs jours.

IV. Ensuite les tribuns indignés de ce qu'on perdait ainsi le temps, ne voulurent plus écouter ceux qui parlaient contre la loi. Ayant indiqué le jour auquel ils devaient la confirmer, ils exhortèrent tous les plébéiens de se trouver à l'assemblée pour donner leurs suffrages par tribus, leur promettant qu'on ne leur fatiguerait plus les oreilles par de longues harangues. Sur ces promesses, ils renvoyèrent l'assemblée.

461 V.  Les consuls et les plus puissants des patriciens commencent alors à traiter les tribuns avec plus de hauteur. Ils de plaignent ouvertement de leur procédé: ils protestent qu'ils ne leur permettront jamais d'introduire de nouvelles lois, principalement celles qui n'auront pas encore passé par les délibérations du sénat, que les lois font une espèce de convention de toute une ville, et non pas seulement d'une partie de ses citoyens, et que c'est le commencement de la ruine non seulement la plus certaine [ et la plus inévitable, ] mais encore la plus honteuse et des villes et des familles, quand la partie la plus méchante prescrit des lois à la meilleure et à la plus saine.

« Quel est donc votre pouvoir, disaient- ils, quel droit avez-vous, vous autres tribuns, ou de faire les lois, ou de les abolir? Votre puissance n'est-elle pas une émanation de celle du sénat? Ne l'avez-vous pas reçue à de certaines conditions ? N'avez-vous pas demandé que les tribuns eussent droit de secourir les pauvres à qui on ferait quelque injustice ou violence, à condition qu'ils n'entreprendraient rien de plus? Si donc vous avez eu ci-devant une autorité extorquée du sénat par la force et contre toute justice, ne l'avez-vous pas perdue aujourd'hui en changeant la discipline observée de tous temps dans les comices. En effet, ce n'est plus un décret du sénat qui vous constitue en dignité ; les curies ne donnent plus leurs suffrages pour vous y confirmer, vous n'offrez point aux dieux les sacrifices prescrits par les lois avant que de tenir vos assemblées, en un mot, dans vos élections vous n'observez plus aucune des cérémonies qui peuvent inspirer des sentiments de religion envers les dieux, ou marquer le respect qui est dû aux coutumes établies par les hommes. Pourquoi donc vous mêlez-vous encore de la religion et des saintes cérémonies du culte divin, du nombre desquelles sont les lois mêmes ? Pourquoi, dis-je, vous en mêlez-vous, vous qui avez renoncé à tout droit divin et humain ; vous qui foulez aux pieds toute justice ? »

VI. Voilà les reproches que les patriciens, tant jeunes que vieux, ne cessaient de faire aux tribuns : ils allaient çà et là par bandes, et répandaient ces discours dans-tous les quartiers de la ville. D'un autre côté ils n'oubliaient rien pour gagner le cœur des citoyens. Ils s'insinuaient dans les esprits 462  par des discours agréables et flatteurs, et mettaient dans leur parti les plus raisonnables et les plus modérés des citoyens . Ils épouvantaient en même temps les plus séditieux et les plus entêtés. Ils ne cessaient de les menacer des plus terribles malheurs, ils ne devenaient plus sages et plus soumis. Ils en vinrent même jusqu'à chasser de la place publique et à frapper comme de vils esclaves les plus pauvres des citoyens, qui n'avaient en vue que leurs intérêts particuliers, et qui s'embarrassaient peu de ceux de la république.

VII. Parmi la jeunesse patricienne, Caeson Quintius, fils de Lucius Quintius surnommé Cincinnatus, était alors le plus puissant. Sa haute naissance et ses grandes richesses lui attiraient un grand nombre de partisans, d'ailleurs il était bien fait de sa personne, recommandable par sa bonne mine qui le distinguait au dessus de tous les jeunes gens de son rang, illustre par la bravoure et par ses beaux exploits de guerre, d'un heureux génie pour l'éloquence, qualités qui ne contribuaient pas peu à grossir sa faction. Ce jeune homme se déchaina fortement contre les plébéiens. Il n'épargna ni les paroles les plus dures et les plus capables d'irriter des personnes jalouses de leur liberté, ni les traitements les plus rigoureux.

VIII. Les patriciens pour cette raison l'estimaient beaucoup, ils l'exhortaient à ne de pas épouvanter du péril, et lui promettaient de le soutenir en toute occasion. Les plébéiens au contraire le haïssaient souverainement. Aussi les tribuns résolurent-ils de s'en défaire avant toutes choses, dans l'espérance que par sa mort les autres jeunes gens intimidés garderaient enfin quelques mesures. Dans ce dessein ils préparent des discours exprès, ils apostent plusieurs témoins, ils accusent Quintius d'injustice et de crime envers le public, et ne prétendent pas moins que de le faire condamner à mort. Ils le font donc assigner à comparaître devant le peuple. Le temps marqué pour le jugement étant venu, ils convoquent une assemblée; ils prononcent contre lui un long discours, ils rapportent [ toutes ] les violences qu'il a faites aux plébéiens, et après avoir cité pour témoins ceux mêmes qu'il avait maltraités, ils permettent à l'accusé d'apporter ses raisons de défense. Le jeune homme appelé pour plaider sa cause, commen- 463 ce par récuser ses juges : il proteste. qu'il est prêt à faire satisfaction selon la. loi aux particuliers mêmes qu'il a offenses, pourvu que le procès soit jugé au tribunal des consuls ses juges naturels.

IX. Alors le père de Caeson voyant les plébéiens indignés de son opiniâtreté, plaide lui-même sa cause, et met tout en usage pour justifier son fils. Il fait voir que les griefs dont on l'accuse, n'ont point d'autre fondement que le mensonge, et qu'on les a inventés exprès pour lui tendre des pièges. Quant aux faits qu'il ne peut nier, il les traite de bagatelles qui ne méritent pas la colère publique. Il dit que son fils n'est pas tombé dans ces fautes par mauvais intention, qu'il n'a pas prétendu insulter personne, et qu'il n'y a dans toute sa conduite ni trahison ni mépris: qu'il faut regarder tout ce qu'il a fait comme autant d'emportements d'un jeune homme fier, ardent et ambitieux, qui dans la chaleur de la dispute s'est oublié lui-même: qu'en un mot il y a plus d'indiscrétion que de mauvaise volonté, et que s'étant exposé lui-même aux suites fâcheuses de ces sortes de querelles, on doit croire que le défaut de l'âge, de prudence, et de maturité y a plus de part, que la réflexion et le jugement. Il conjure les plébéiens de ne pas lui en vouloir pour les fautes qu'il a commises dans ses discours, mais de se souvenir des services importants qu'il a rendus dans la guerre, qu'il a exposé mille fois sa vie pour le salut de la république, qu'il n'a pris les armes que pour assurer la liberté des particuliers, pour affermir l'empire de la patrie, et pour en étendre les bornes. Il les prie de lui en marquer leur reconnaissance dans l'occasion: il leur représente que s'il a commis de grandes fautes, il a d'ailleurs mérité par ses belles actions et l'amitié et la protection du peuple Romain. Ensuite il fait l'énumération des campagnes où il s'est signalé, de tous les combats où il s'est trouvé, des prix de valeur qu'il a reçus de ses commandants, des couronnes qui ont été la récompense de sa bravoure, d'un grand nombre de citoyens à qui il a sauvé la vie dans les batailles et de toutes les occasions où il s'est distingué au-dessus des autres en montant le premier à l'escalade sur les murailles des ennemis. Il tâche de calmer les esprits et d'exciter la compassion dans tous les cœurs : il leur représente qu'il a toujours eu pour caractère une grande modération et une douceur infinie 464 envers tout le monde, que tous les citoyens lui rendent ce glorieux témoignage qu'il a mené une vie pure, innocente, exempte de tout soupçon, qu'enfin il leur demande pour toute grâce d'accorder la vie à son fils, et de sacrifier leurs ressentiments à la considération d'un père qui n'a mérité que leurs faveurs.

X.  Le peuple écouta ce discours avec plaisir, et l'on était porté à lui rendre son fils. Mais Virginius qui craignait que la jeunesse patricienne ne devînt dans la suite et plus fière et pus insolente par l'impunité de Caeson, se leva aussitôt et parla ainsi.

« Votre bienveillance envers les plébéiens et vos autres vertus, Quincius, rendent un illustre témoignage en votre faveur, et c'est pour cela que tout le monde vous honore. Mais l'insolence de votre fils, sa dureté inflexible, sa fierté à l'égard de tous les citoyens ne nous permettent pas de lui accorder le pardon. Elevé auprès d'un père donc les mœurs populaires et modérées ont mérité une approbation générale, loin de se former sur un si beau modèle de vertu, il a méprisé les avantages de son éducation, il s'est livré à un orgueil tyrannique, et donnant dans une insolence qui ne convient qu'aux barbares, il a voulu introduire dans Rome les plus pernicieux exemples. Si donc jusqu'à présent vous n'avez pas connu le mauvais caractère de votre fils, aujourd'hui que vous le voyez à découvert pouvez-vous ne pas entrer dans nos justes ressentiments ? Si au contraire vous connaissiez sa conduite et si vous étiez d'intelligence avec lui quand il a insulté à la misère des pauvres citoyens, n'étiez-vous pas vous-même un mauvais citoyen, et méritiez-vous la réputation d'honnête homme que vous avez parmi nous? Mais, me direz-vous, j'ignorais que ce fils n'était pas digne de ma vertu. Je vous crois volontiers et je puis vous rendre moi-même ce témoignage. Mais si je conviens que vous n'avez point été complice des insultes qu'il nous a faites par le passé, je vous blâme aujourd'hui de ne pas partager avec nous notre juste indignation. Et afin que vous compreniez mieux quelle peste pour l'état vous avez nourrie sans le savoir, il faut vous apprendre que votre fils est un cœur cruel, tyrannique, et même souillé du sang de ses citoyens. Ecoutez, je vous prie : on va vous rapporter une de ses belles actions: comparez-la avec les grands exploits de guerre qui lui ont acquis tant de gloire. Et vous, Romains, que la 465 harangue du père a excités à la compassion, voyez s'il est de votre intérêt d'user d'indulgence envers un pareil citoyen ».

XI. Ayant parlé de la sorte, il fit lever Marcus Volscius, un de ses collègues, et lui dit de rapporter ce qu'il savait de la conduite du jeune Caeson. Aussitôt on fit silence, et toute l'assemblée fut en suspens. Volscius un moment après, reparla en ces termes.

« J'aurais souhaité, citoyens, être en état de poursuivre ce jeune homme en mon propre et privé nom, comme les lois me le permettent, pour tirer vengeance des insultes atroces et plus qu'atroces que j'ai reçues de lui. Mais ma pauvreté, mon indigence, et mon peu de crédit en qualité de simple citoyen, m'ont ôté jusqu'ici les moyens de me faire justice. Aujourd'hui que j'en trouve l'occasion, si je ne prends le personnage d'accusateur, au moins je ferai celui de témoin. Vous allez apprendre la manière indigne dont Caeson m'a traité, les outrages sanglants qu'il m'a faits, et les cruautés qu'il a exercées sur moi. J'avais un frère nommé Lucius,  qui m'était plus cher que tout ce que j'ai au monde. Un jour nous soupâmes ensemble chez un ami. Après le repas comme nous nous en revenions de nuit, nous passâmes par la place publique, où nous rencontrâmes Caeson qui venait de faire la débauche avec une troupe de jeunes libertins. D'abord ils commencent à de moquer de nous: ils nous disent mille injures, telles qu'une jeunesse insolente et pleine de vin a coutume d'en vomir contre les pauvres citoyens qu'elle regarde comme des gens de peu de chose. Indigné de ces outrages, mon frère s'échappe en quelques paroles un peu fortes contre un de la troupe. Caeson ne peut souffrir qu'on lui réponde rien de désagréable: il entre en fureur, il se jette sur mon frère, il le maltraite, tantôt à coups de poing, tantôt à coups de pied ; il lui fait [ mille cruautés, ] mille indignités, enfin il le terrasse et le tue. Alors je me mets à crier, et je défends mon frère de toutes mes forces. Caeson le lasse mort sur la place: il se jette sur moi, il ne cesse de m'outrager, il frappe, il re- 466 double les coups, jusqu'a ce qu'étendu sur le pavé sans voix, et sans mouvement, il me croie mort. Il quitte prise pour lors, il rejoint ses camarades, il s'applaudit du coup qu'il a fait. Un moment après, quelques passants accourus au bruit, nous trouvent baignés dans notre sang, et nous emportent chez nous : mon frère Lucius était déjà mort, comme j'ai dit, et moi presque sans vie je n'avais pas grande espérance d'en réchapper. Ce malheur nous arriva sous le consulat de Publius Serviliu» et de Lucius Aebutius, l'année que Rome fut affligée de cette terrible maladie dont nous eûmes tous deux notre part. Je ne pus pas dans ce temps-là demander justice de l'insulte que Caeson avait faite, parce que la contagion avait enlevé les deux consuls. [ Lucius ] Lucretius et Titus Venturius entrés en charge, je voulus le faire assigner pour comparaitre à leur tribunal. Mais il ne fût pas possible d'y réussir : la guerre se déclara, il fallut que les deux [ consuls ] sortissent de Rome pour ouvrir la campagne. Quand ils furent revenus de leur expédition, je le citai plusieurs fois devant eux, mais pour toute justice je ne gagnai que des coups qu'il me donna: j'en appelle à témoins, plusieurs citoyens qui le savent. Voila, Romains, ce qui m'est arrivé et ce que j'ai souffert : voila le récit fidèle de mon infortune, je ne vous dis que la vérité,.

XIII. Ce discours de Volscius fut suivi des cris de toute l'assemblée. Plusieurs se mirent en devoir de punir le coupable sur le champ et par leurs mains. Mais les consuls et la plupart des tribuns arrêtèrent cet emportement, persuadés que ce serait introduire dans Rome une coutume très pernicieuse. La partie même la plus saine du peuple, ne voulait pas qu'on fît mourir les coupables sans les avoir écoutés en leurs défenses. Ainsi un certain égard pour la justice réprima en cette occasion l'ardeur des plus hardis, et le jugement fut différé.

XIII.  Il y eut une grande contestation sur la personne de l'accusé, savoir si on devait le garder en prison ou dans les fers jusqu'à ce que son procès fût instruit, ou s'il fallait le laisser en liberté sous caution, come son père le de- 467 mandait. Enfin le sénat [ assemblé,] ordonna que ceux qui  voudraient le cautionner, donneraient une certaine somme d'argent, moyennant quoi il aurait sa liberté jusqu'au jour que son procès serait décidé.

XIV. Le lendemain les tribuns assemblèrent le peuple : l'accusé n'ayant point comparu, ils le condamnèrent par défaut, et les répondants qui étaient au nombre de dix, furent contrains de payer la somme qu'ils avaient promise pour amende en cas qu'ils ne représentassent point le criminel. Ce fut ainsi que Caeson tomba dans le piège que les tribuns lui avaient dressé, par les artifices de Volscius qui rendit un faux témoignage, comme on le découvrit dans la suite. Il sortit de Rome, et s'en alla en Tyrrhénie.

XV. Son père vendit la plus grande partie de ses biens : il rendit aux cautions de son fils l'argent qu'ils avaient déboursé, et de retira lui-même à une petite terre qui lui restait au de là du Tibre où il avait une pauvre chaumière . Là il menait une vie dure et laborieuse, travaillant à cultiver la terre avec un petit nombre d'esclaves. Accablé de douleur et de pauvreté, il n'allait plus à la ville ; il ne voyait point ses amis, il ne faisait aucune fête, et ne se permettait pas même le moindre divertissement.

XVI. Les tribuns au reste furent bien trompés dans leur espérance. Le malheur de Caeson loin d'arrêter l'insolence des jeunes gens, les rendit plus opiniâtres et plus importuns, de sorte qu'ils s'opposèrent à la confirmation de la loi tant par leurs discours que par leurs actions. Les tribuns employèrent toute leur année à cette unique affaire, sans pouvoir absolument venir à bout de leurs desseins. Le peuple les continua, dans leur dignité pour l'année suivante.

 

 

CHAPITRE TROISIEME.

I. Cinquantième consulat. Rome est menacée des plus terribles malheurs. II. Les tribuns recommencent à faire de nouvelles intrigues. Ils contrefont des lettres qu'ils se font rendre par un inconnu. III. Le peuple court en foule à la place publique : toute la ville est en émotion. IV. Le sénat s'assemble ; les tribuns lui font le rapport de ce qui est contenu dans les prétendues lettres qu'ils viennent de recevoir. Discours du tribun Virginius. V. Que quelques-uns des patriciens et la plupart des chevaliers ont conspiré contre le peuple. VI. Que le sénat doit permettre aux tribuns d'informer contre les coupables ; que l'affaire presse et ne souffre aucun délai. VII. Délibérations du sénat. Discours du consul Caius Claudius : qu'il va parler avec liberté. VIII. Que les tribuns pour exécuter leurs pernicieux desseins, ont feint qu'on tramait une conspiration contre le peuple. IX. Qu'ils ne peuvent pas produire les preuves de cette conspiration. X. Qu'il faut se défier d'eux et éclairer leur conduite. XI. Le tribun Virginius déclame contre le sénat. XII. Appius Erdonius Sabin s'empare du capitole dans l'espérance que les esclaves et les mécontents se joindront à lui. XIII. Il est trompé dans ses espérances, il ne reçoit aucun secours. XIV. L'alarme se répand dans Rome; les consuls exhortent les citoyens à prendre les armes. XV. Les tribuns persuadent au peuple de ne pas s'enrôler qu'à certaines conditions. XVI. Le consul Appius prétend qu'on peut de passer du secours du peuple. Avis contraire de Valérius son collègue. XVII. On lève des troupes. XVIII. On tire au sort leur destination. XIX. Les Tusculans viennent au secours des Romains. Le consul Valerius assiège Erdonius dans la citadelle du capitole : il est tué dans le combat. XX. Erdonius et la plupart de ses soldats perdent aussi la vie. XXI. Les tribuns recommencent leurs poursuites. A la place de Valerius on élit consul Lucius Quintius, qui s'était retiré à la campagne après la condamnation de Caeson son fis. XXII. Le sénat envoie des députés à Quintius : ceux-ci le trouvent labourant son champ etc. XXIII. Mœurs des anciens Romains bien différentes de celles du siècle de Denys d'Halicarnasse. XXIV. Quictius réprime les tribuns et pacifie les troubles. XXV. Il s'applique a rendre la justice. Le sénat veut le continuer dans la dignité de consul ; Quinctius la refuse constamment : il fait élire de nouveaux consuls et se retire à la campagne.

I. [10,9] Ποπλίου δὲ Οὐαλερίου Ποπλικόλα καὶ Γαΐου Κλαυδίου Σαβίνου τὴν ὑπατικὴν ἐξουσίαν παραλαβόντων κίνδυνος ὅσος οὔπω τὴν Ῥώμην κατέσχεν ἐξ ἀλλοεθνοῦς πολέμου, ὃν παρήγαγεν ἐντὸς τείχους ἡ πολιτικὴ στάσις, ὡς οἵ τε Σιβύλλειοι χρησμοὶ προὔλεγον καὶ τὰ ἐκ τοῦ δαιμονίου φανέντα προεθέσπισε τῷ παρελθόντι ἐνιαυτῷ.

II. Διηγήσομαι δὲ τήν τε αἰτίαν, ἀφ´ ἧς ὁ πόλεμος εἰσῆλθε, καὶ τὰ πραχθέντα τοῖς ὑπάτοις κατὰ τὸν τότε ἀγῶνα. Οἱ παρειληφότες τὸ δεύτερον τὴν δημαρχίαν ἐπὶ τῇ ἐλπίδι τοῦ κυρώσειν τὸν νόμον, ὁρῶντες τῶν τε ὑπάτων τὸν ἕτερον, Γάιον Κλαύδιον, ἔμφυτον τὸ πρὸς τοὺς δημοτικοὺς ἔχοντα μῖσος διὰ προγόνων καὶ παρεσκευασμένον ἁπάσῃ μηχανῇ κωλύειν τὰ γινόμενα, τῶν τε νέων τοὺς πλεῖστον δυναμένους εἰς ἀπόνοιαν φανερὰν προεληλυθότας, οὓς οὐκ ἐνῆν τῷ βιαίῳ καταγωνίσασθαι, μάλιστα δὲ τοῦ δήμου τὸ πλεῖον ὑποκατακλινόμενον ταῖς θεραπείαις τῶν πατρικίων καὶ προθυμίαν οὐκέτι περὶ τοῦ νόμου τὴν αὐτὴν παρεχόμενον, ἰταμωτέραν ὁδὸν ἔγνωσαν ἐπὶ τὰ πράγματα πορεύεσθαι, δι´ ἧς καταπλήξονται μὲν τὸν δῆμον, ἀναβαλοῦσι δὲ τὸν ὕπατον. Πρῶτον μὲν κατεσκεύασαν φήμας λέγεσθαι κατὰ τὴν πόλιν παντοδαπάς· ἔπειτ´ ἐξ ἑωθινοῦ καθεζόμενοι δι´ ὅλης ἡμέρας συνήδρευον ἐν τῷ φανερῷ, μεταδιδόντες οὐθενὶ τῶν ἔξωθεν οὔτε βουλεύματος οὔτε λόγου. Ἐπεὶ δὲ καιρὸς ἐπιτήδειος ἔδοξεν αὐτοῖς εἶναι πράττειν τὰ βεβουλευμένα, πλασάμενοι γράμματα καὶ ταῦτα παρασκευάσαντες ἀναδοθῆναι σφίσιν ὑπ´ ἀνδρὸς ἀγνῶτος καθημένοις ἐν ἀγορᾷ, ὡς διῆλθον αὐτά, παίοντες τὰ μέτωπα καὶ κατηφεῖς τὰς ὄψεις ποιήσαντες ἀνίστανται.

III. Πολλοῦ δὲ συνδραμόντος ὄχλου καὶ μέγα τι κακὸν ἐν τοῖς γράμμασιν ἐνεῖναι γεγραμμένον μαντευομένου σιωπὴν προκηρύξαντες εἶπον·

« ἐν ἐσχάτοις ἐστὶν ὑμῖν κινδύνοις, ὦ πολῖται, τὸ δημοτικόν· καὶ εἰ μὴ θεῶν τις εὔνοια προείδετο τῶν ἄδικα πάσχειν μελλόντων, εἰς δεινὰς ἂν ἅπαντες ἤλθομεν συμφοράς. Αἰτούμεθα δὲ ὑμᾶς βραχὺν ἐπισχεῖν χρόνον, ἕως τῇ βουλῇ δηλώσωμεν τὰ προσαγγελθέντα καὶ μετὰ κοινῆς γνώμης πράξωμεν τὰ δέοντα. »

Ταῦτ´ εἰπόντες ᾤχοντο πρὸς τοὺς ὑπάτους. Ἐν ὅσῳ δὲ ἡ βουλὴ συνήγετο χρόνῳ, πολλοὶ καὶ παντοδαποὶ λόγοι κατὰ τὴν ἀγορὰν ἐγίνοντο, τῶν μὲν ἐκ παρασκευῆς ἃ παρηγγέλλετο αὐτοῖς ὑπὸ τῶν δημάρχων κατὰ συστροφὰς λαλούντων, τῶν δέ, ἃ μάλιστα ἐδεδοίκεσαν μὴ γένηται, ταῦτα ὡς ἀπηγγελμένα τοῖς δημάρχοις λεγόντων. Ἔφη δ´ ὁ μέν τις Αἰκανοὺς καὶ Οὐολούσκους ὑποδεξαμένους Καίσωνα Κοίντιον τὸν ὑπὸ τοῦ δήμου καταδικασθέντα ᾑρῆσθαι στρατηγὸν αὐτοκράτορα τῶν ἐθνῶν καὶ πολλὰς δυνάμεις ἀγείραντα μέλλειν ἐπὶ τὴν Ῥώμην ἐλαύνειν· ὁ δέ τις ἀπὸ κοινῆς γνώμης τῶν πατρικίων τὸν ἄνδρα κατάγεσθαι ξενικαῖς δυνάμεσιν, ἵνα ἡ φυλακὴ καταλυθείῃ νῦν τε καὶ εἰς τὸν λοιπὸν χρόνον τῶν δημοτικῶν· ὁ δέ τις οὐχ ἅπαντας εἶναι τοὺς πατρικίους ἔφη τοὺς ταῦτα βεβουλευμένους, ἀλλὰ μόνους τοὺς νέους. Ἐτόλμων δέ τινες λέγειν, ὅτι καὶ ἐντὸς τῆς πόλεως ὁ ἀνὴρ εἴη κρυπτόμενος καὶ μέλλοι καταλαμβάνεσθαι τῶν τόπων τοὺς ἐπικαιροτάτους.

IV. Ὅλης δὲ κραδαινομένης ἐπὶ τῇ προσδοκίᾳ τῶν δεινῶν τῆς πόλεως, καὶ πάντων ἀλλήλους ἐχόντων δι´ ὑποψίας καὶ φυλακῆς, οἱ μὲν ὕπατοι τὴν βουλὴν ἐκάλουν, οἱ δὲ δήμαρχοι παρελθόντες ἐδείκνυσαν τὰ προσαγγελλόμενα. ἦν δὲ ὁ τοὺς λόγους ὑπὲρ αὐτῶν ποιούμενος Αὖλος Οὐεργίνιος καὶ ἔλεξε τοιάδε·

[10,10] « Ὅσον μὲν χρόνον οὐθὲν ἀκριβὲς ἡμῖν ἐφαίνετο τῶν προσαγγελλομένων δεινῶν, ἀλλὰ φῆμαι μετέωροι, καὶ τὸ βεβαιῶσον αὐτὰς οὐθὲν ἦν, ὠκνοῦμεν, ὦ βουλή, φέρειν τοὺς περὶ αὐτῶν λόγους εἰς μέσον, ταραχάς τε ὑποπτεύοντες ἔσεσθαι μεγάλας, οἷα εἰκὸς ἐπὶ δεινοῖς ἀκούσμασι, καὶ δι´ εὐλαβείας ἔχοντες, μὴ ταχύτερα δόξωμεν ὑμῖν βεβουλεῦσθαι μᾶλλον ἢ φρονιμώτερα. Οὐ μὴν ὀλιγωρίᾳ γ´ αὐτὰ παραδόντες ἀφήκαμεν, ἀλλ´ ὅση δύναμις ἡμῖν ἦν ἐπιμελῆ ζήτησιν ἐποιούμεθα τῆς ἀληθείας. Ἐπεὶ δὲ ἡ τοῦ δαιμονίου πρόνοια, ὑφ´ ἧς ἀεὶ σωζόμεθα κοινῇ, καλῶς ποιοῦσα τὰ κεκρυμμένα βουλεύματα καὶ τὰς ἀνοσίους ἐπιχειρήσεις τῶν θεοῖς ἐχθρῶν εἰς φῶς ἄγει, καὶ γράμματα πάρεστιν ἡμῖν, ἃ δεδέγμεθα νεωστὶ παρὰ ξένων εὔνοιαν ἡμῖν ἐνδεικνυμένων, οὓς ὕστερον ἀκούσεσθε, καὶ συντρέχει τε καὶ συνᾴδει τοῖς ἔξωθεν ἐπιστελλομένοις τὰ ἐνθένδε μηνυόμενα, καὶ τὰ πράγματα οὐκέτι μέλλησιν οὐδ´ ἀναβολὴν ἐν χερσὶν ὄντα ἐπιδέχεται, πρὶν εἰς τὸν δῆμον ἐξενεγκεῖν, ὑμῖν πρώτοις ὥσπερ ἐστὶ δίκαιον ἀπαγγεῖλαι διέγνωμεν αὐτά.

V. ἴστε δὴ συνωμοσίαν ἐπὶ τῷ δήμῳ γεγενημένην ὑπ´ ἀνδρῶν οὐκ ἀφανῶν, ἐν οἷς ἐνεῖναι μέν τι λέγεται μέρος οὐ πολὺ καὶ τῶν εἰς τόδε συλλεγομένων τὸ συνέδριον πρεσβυτέρων, τὸ δὲ πλεῖστον ἐκ τῶν ἔξω τῆς βουλῆς ἱππέων, οὓς οὔπω καιρὸς οἵτινές εἰσιν ὑμῖν λέγειν. Μέλλουσι δ´ οὖν, ὡς πυνθανόμεθα, σκοταίαν φυλάξαντες νύκτα κοιμωμένοις ἡμῖν ἐπιχειρεῖν, ἡνίκα οὔτε προιδεῖν τι τῶν γινομένων οὔτε φυλάξασθαι καθ´ ἓν γενόμενοι δυνάμεθα· ἐπιπεσόντες δὲ ταῖς οἰκίαις τούς τε δημάρχους ἡμᾶς κατασφάττειν καὶ τῶν δημοτῶν ἄλλους {τοὺς} ἐναντιωθέντας ποτὲ αὐτοῖς περὶ ἐλευθερίας ἢ τὸ λοιπὸν ἐναντιωσομένους. Ὅταν δὲ ἡμᾶς ἐκποδὼν ποιήσωνται; τότ´ ἤδη κατὰ πολλὴν ἀσφάλειαν ἡγοῦνται διαπράξασθαι παρ´ ὑμῶν τὰ λοιπὰ ἀναιρεθῆναι διὰ κοινοῦ ψηφίσματος τὰς γενομένας ὑμῖν πρὸς τὸν δῆμον ὁμολογίας. Ὁρῶντες δέ, ὅτι ξενικῆς αὐτοῖς χειρὸς εἰς τὰ πράγματα δεῖ κρύφα παρασκευασθείσης καὶ οὐδὲ ταύτης μετρίας, ἄνδρα προσειλήφασιν εἰς ταῦτα τῶν ὑμετέρων φυγάδων Καίσωνα Κοίντιον ἡγεμόνα, ὃν ἐπὶ φόνοις πολιτῶν καὶ διαστάσει τῆς πόλεως ἐξελεγχθέντα διεπράξαντό τινες τῶν ἐνθάδε μὴ δοῦναι δίκην, ἀλλ´ ἀθῷον ἀπελθεῖν ἐκ τῆς πόλεως, κάθοδόν τε πράξειν ὑπέσχηνται καὶ ἀρχὰς προτείνονται καὶ τιμὰς καὶ ἄλλους μισθοὺς τῆς ὑπουργίας. Κἀκεῖνος ὑπέσχηται στρατιὰν αὐτοῖς Αἰκανῶν καὶ Οὐολούσκων ἄξειν ἐπίκουρον, ὅσης ἂν δεηθῶσιν· ἥξει τε οὐκ εἰς μακρὰν αὐτὸς μὲν ἐπαγόμενος τοὺς εὐτολμοτάτους κρύφα κατ´ ὀλίγους εἰσάγων καὶ σποράδας, ἡ δ´ ἄλλη δύναμις, ὅταν οἱ τοῦ δήμου προεστηκότες ἡμεῖς διαφθαρῶμεν, ἐπὶ τὸ ἄλλο πλῆθος τῶν πενήτων χωρήσει, ἐάν τινες ἄρα περιέχωνται τῆς ἐλευθερίας. Ταῦτ´ ἐστίν, ἃ βεβούλευνται ὑπὸ σκότους καὶ μέλλουσι δρᾶν, ὦ βουλή, δεινὰ καὶ ἀνόσια ἔργα, οὔτε θεῖον φοβηθέντες χόλον οὔτε ἀνθρωπίνην ἐντραπέντες νέμεσιν.

VI. [10,11] Ἐν τοσούτῳ δὴ κινδύνῳ σαλεύοντες ἱκέται γινόμεθα ὑμῶν, ὦ πατέρες, ἐπισκήπτοντες θεούς τε καὶ δαίμονας, οἷς κοινῇ θύομεν, καὶ πολέμων ὑπομιμνήσκοντες, οὓς πολλοὺς καὶ μεγάλους σὺν ὑμῖν ἠράμεθα, μὴ περιιδεῖν ὠμὰ καὶ ἀνόσια ὑπὸ τῶν ἐχθρῶν παθόντας ἡμᾶς, ἀλλ´ ἐπαμῦναί τε καὶ συναγανακτῆσαι τιμωρίας ἡμῖν συνεισπράξαντας παρὰ τῶν ταῦτα βουλευσαμένων τὰς προσηκούσας, μάλιστα μὲν παρὰ πάντων, εἰ δὲ μή γε, παρὰ τῶν ἀρξάντων τῆς ἀθεμίτου συνωμοσίας. Πρῶτον δὲ πάντων ἀξιοῦμεν ὑμᾶς, ὦ βουλή, ψηφίσασθαι πρᾶγμα, ὅπερ ἐστὶ δικαιότατον, τὴν ὑπὲρ τῶν μηνυομένων ζήτησιν ὑφ´ ἡμῶν τῶν δημάρχων γίνεσθαι. Χωρὶς γὰρ τοῦ δικαίου καὶ ἀκριβεστάτας ἀνάγκη γίνεσθαι ζητήσεις, ἃς ἂν οἱ κινδυνεύοντες ὑπὲρ αὑτῶν ποιήσωνται. Εἰ δέ τινες ὑμῶν εἰσιν οἷοι μηδὲ καθ´ ἓν εὐγνωμονεῖν, ἀλλὰ πρὸς ἅπαντας τοὺς ὑπὲρ τοῦ δήμου λέγοντας ἀντιτάττεσθαι, ἡδέως ἂν πυθοίμην παρ´ αὐτῶν, ἐπὶ τῷ δυσχεραίνουσι τῶν ἀξιουμένων καὶ τί μέλλουσιν ὑμᾶς πείθειν· πότερα μηδεμίαν ποιεῖσθαι ζήτησιν, ἀλλ´ ὑπεριδεῖν ἔργον οὕτω μέγα καὶ μιαρὸν ἐπὶ τῷ δήμῳ συνιστάμενον; καὶ τίς ἂν τοὺς ταῦτα λέγοντας ὑγιαίνειν φήσειεν, ἀλλ´ οὐχὶ συνδιεφθάρθαι καὶ κοινωνεῖν τῆς συνωμοσίας, ἔπειτα ὑπὲρ αὑτῶν δεδιότας, ἵνα μὴ γένωνται καταφανεῖς, ἀποσπεύδειν τὴν τῆς ἀληθείας ἐξέτασιν; οἷς οὐκ ἂν δικαίως προσέχοιτε δήπου τὸν νοῦν. ἢ τῆς διαγνώσεως τῶν μηνυομένων οὐχ ἡμᾶς εἶναι κυρίους ἀξιώσουσιν, ἀλλὰ τὴν βουλὴν καὶ τοὺς ὑπάτους; τί οὖν τὸ κωλύον ἔσται τὸ αὐτὸ τοῦτο καὶ τοὺς προεστηκότας τοῦ δήμου λέγειν, ἐάν τινες ἐκ τῶν δημοτικῶν ἐπὶ τοῖς ὑπάτοις καὶ τῇ βουλῇ συστάντες πράττωσι τὴν τοῦ συνεδρίου κατάλυσιν, ὅτι τὴν περὶ τῶν δημοτῶν ἐξέτασιν αὐτοὺς δίκαιόν ἐστι ποιεῖσθαι τοὺς ἀνειληφότας τὴν τοῦ δήμου φυλακήν; τί οὖν ἐκ τούτου συμβήσεται; μηδεμίαν πώποτε γενέσθαι ζήτησιν περὶ μηθενὸς πράγματος ἀπορρήτου. Ἀλλ´ οὔθ´ ἡμεῖς ἂν ταῦτ´ ἀξιώσαιμεν· ὕποπτος γὰρ ἡ φιλοτιμία· ὑμεῖς τ´ οὐκ ἂν ὀρθῶς ποιοῖτε τοῖς τὰ ὅμοια ἀξιοῦσι καθ´ ἡμῶν προσέχοντες τὸν νοῦν, ἀλλὰ κοινοὺς ἡγούμενοι τῆς πόλεως ἐχθρούς. Οὐδενὸς μέντοιγε, ὦ βουλή, τοῖς πράγμασιν ὡς τάχους δεῖ. Ὁ γὰρ κίνδυνος ὀξύς, καὶ ἡ μέλλησις τῆς ἀσφαλείας ἄωρος ἐν οὐ μέλλουσι δεινοῖς. Ὥστ´ ἀφέντες τὸ φιλονεικεῖν καὶ λόγους διεξιέναι μακροὺς ψηφίσασθε ὅ τι ἂν δοκῇ κοινῇ συμφέρειν ἤδη. »

VII. [10,12] Ταῦτ´ εἰπόντος αὐτοῦ πολλή τις ἔκπληξις κατέσχε τὸ συνέδριον καὶ ἀμηχανία· διελογίζοντό τε καὶ συνελάλουν ἀλλήλοις, ὡς χαλεπὸν ἑκάτερον ἦν, καὶ τὸ συγχωρεῖν τοῖς δημάρχοις ζητήσεις ἐφ´ ἑαυτῶν ποιεῖσθαι περὶ κοινοῦ καὶ μεγάλου πράγματος, καὶ τὸ μὴ συγχωρεῖν. Ὑποπτεύσας δ´ αὐτῶν τὴν γνώμην ἀνέστη τῶν ὑπάτων ἅτερος, Γάιος Κλαύδιος καὶ ἔλεξε τοιάδε·

« Οὐ δέδοικα, Οὐεργίνιε, μή με ὑπολάβωσιν οὗτοι κοινωνὸν εἶναι τῆς συνωμοσίας, ἣν ἐφ´ ὑμῖν καὶ τῷ δήμῳ πράττεσθαι λέγετε, ἢ τὰ ὑπὲρ ἐμαυτοῦ δεδιότα ἢ τῶν ἐμῶν τινος ἐνόχου ταῖς αἰτίαις ὄντος ἀνεστάναι τἀναντία ὑμῖν ἐροῦντα· ὁ γὰρ βίος ἀπολύει με πάσης ὑποψίας τοιαύτης. Ἃ δὲ νομίζω τῇ τε βουλῇ καὶ τῷ δήμῳ συμφέρειν, ἀπὸ τοῦ κρατίστου καὶ δίχα πάσης εὐλαβείας ἐρῶ. Πολλοῦ, μᾶλλον δὲ τοῦ παντὸς ἁμαρτάνειν δοκεῖ μοι Οὐεργίνιος, εἴ τινα ὑπείληφεν ἡμῶν ἐρεῖν, ἢ ὡς ἀνεξέταστον ἀφεῖσθαι δεῖ πρᾶγμα οὕτως ὂν μέγα καὶ ἀναγκαῖον, ἢ ὡς οὐ δεῖ κοινωνεῖν οὐδὲ παρεῖναι τῇ ζητήσει τοὺς ἀνειληφότας τὴν τοῦ δήμου ἀρχήν. Οὐθεὶς οὔτε ἠλίθιός ἐστιν οὕτως οὔτε τῷ δήμῳ κακόνους, ὥστε ταῦτα λέγειν. Τί οὖν, εἴ τις ἔροιτό με, παθών, ἃ συγχωρῶ καί φημι δίκαια εἶναι, τούτοις ἀντιλέξων ἀνέστην, καὶ τί βούλεταί μου ὁ λόγος, ἐγὼ νὴ Δία φράσω πρὸς ὑμᾶς.

VIII. Παντὸς οἴομαι δεῖν πράγματος, ὦ βουλή, τὰς ἀρχὰς καὶ τὰς πρώτας ὑποθέσεις τοὺς εὖ φρονοῦντας ἀκριβῶς σκοπεῖν· οἷαι γὰρ ἂν αὗται τύχωσιν οὖσαι, τοιούτους ἀνάγκη γίνεσθαι καὶ τοὺς περὶ αὐτῶν λόγους. Φέρε δή, τίς ἡ τοῦδε τοῦ πράγματος ὑπόθεσίς ἐστι καὶ τί τὸ βούλευμα τῶν δημάρχων, ἀκούσατέ μου. Οὐκ ἐνῆν τούτοις οὐδέν, ὧν ἐν τῷ παρελθόντι ἐνιαυτῷ πράττειν ἐπιβαλλόμενοι διεκωλύθησαν, ἐπιτελέσασθαι νῦν ὑμῶν τε ἐναντιουμένων αὐτοῖς ὡς πρότερον καὶ τοῦ δήμου μηκέθ´ ὁμοίως συναγωνιζομένου. Συνιδόντες δὴ τοῦτο ἐσκόπουν, ὅπως ἂν ὑμεῖς τ´ ἀναγκασθείητε παρὰ γνώμην αὐτοῖς εἶξαι, καὶ ὁ δῆμος ἅπαντα ὅς´ ἂν ἀξιῶσι συμπράττειν. Ἀληθῆ μὲν οὖν καὶ δικαίαν ὑπόθεσιν οὐδεμίαν εὕρισκον, δι´ ἧς ἑκάτερον τούτοις ἔσται, πολλὰ δὲ βουλεύματα πειράζοντες καὶ στρέφοντες ἄνω καὶ κάτω τὸ πρᾶγμα τελευτῶντες ἐπὶ τοιοῦτον δή τινα λογισμὸν ἦλθον· αἰτιασώμεθα συνίστασθαί τινας ἐκ τῶν ἐπιφανῶν ἐπὶ καταλύσει τοῦ δήμου, καὶ σφάττειν διεγνωκέναι τοὺς παρέχοντας αὐτῷ τὸ ἀσφαλές. Καὶ ταῦτα ἐκ πολλοῦ παρασκευάσαντες λέγεσθαι κατὰ τὴν πόλιν, ὅταν ἤδη πιστὰ εἶναι τοῖς πολλοῖς δόξῃ - δόξει δὲ διὰ τὸ δέος - ἐπιστολὰς μηχανησώμεθα πολλῶν παρόντων ἡμῖν ὑπ´ ἀνδρὸς ἀγνῶτος ἀναδοθῆναι· ἔπειτ´ ἐλθόντες ἐπὶ τὸ συνέδριον ἀγανακτῶμέν τε καὶ σχετλιάζωμεν καὶ τοῦ ζητεῖν τὰ προσηγγελμένα αἰτῶμεν τὴν ἐξουσίαν. Ἐάν τε γὰρ ἀντιλέγωσιν ἡμῖν οἱ πατρίκιοι, ταύτην ληψόμεθα τοῦ διαβαλεῖν αὐτοὺς πρὸς τὸν δῆμον ἀφορμήν, καὶ οὕτως ἅπαν τὸ δημοτικὸν ἠγριωμένον αὐτοῖς ἕτοιμον ἡμῖν εἰς ἃ βουλόμεθα ὑπάρξει· ἐάν τε συγχωρῶσι, τοὺς γενναιοτάτους ἐξ αὐτῶν καὶ πλεῖστα ἡμῖν ἐναντιωθέντας πρεσβυτέρους τε καὶ νέους ἐλαύνωμεν, ὡς εὑρηκότες ταῖς αἰτίαις ἐνόχους. Ἐκεῖνοι δὲ ἄρα τὰς καταγνώσεις δεδιότες ἢ συμβήσονται πρὸς ἡμᾶς ἐπὶ τῷ μηθὲν ἔτι ἀντιπράττειν ἢ καταλιπεῖν ἀναγκασθήσονται τὴν πόλιν. Ἐκ δὲ τούτου πολλὴν ποιήσομεν ἐρημίαν τοῦ ἀντιπάλου.

IX. [10,13] Ταῦτα τὰ βουλεύματα ἦν αὐτῶν, ὦ βουλή, καὶ τὸν μεταξὺ χρόνον ὃν ἑωρᾶτε συνεδρεύοντας αὐτούς, οὗτος ὁ δόλος ὑπ´ αὐτῶν ὑφαίνετο ἐπὶ τοῖς ἀρίστοις ὑμῶν, καὶ τοῦτο τὸ δίκτυον κατὰ τῶν εὐγενεστάτων ἱππέων ἐπλέκετο. Καὶ ὅτι ἀληθῆ ταῦτ´ ἐστί, βραχέος μοι πάνυ δεῖ λόγου. Φέρε γὰρ εἴπατε μοι, Οὐεργίνιε, οἱ τὰ δεινὰ πεισόμενοι, παρὰ τίνων ἐδέξασθε τὰ γράμματα ξένων; τῶν ποῦ κατοικούντων, ἢ πόθεν ὑμᾶς εἰδότων, ἢ πῶς τἀνθάδε συνεδρευόμενα ἐπισταμένων; τί ἀναβάλλεσθε καὶ μετὰ ταῦτ´ ἐρεῖν αὐτοὺς ὑπισχνεῖσθε, ἀλλ´ οὐ πάλαι λέγετε; τίς δ´ ὁ τὰ γράμματα κομίσας ὑμῖν ἀνήρ ἐστι; τί οὐ κατάγετε αὐτὸν εἰς μέσον, ἵν´ ἀπ´ ἐκείνου πρῶτον ἀρξώμεθα ζητεῖν, εἴτε ἀληθῆ ταῦτ´ ἐστίν, εἴτε ὡς ἐγώ φημι πλάσματα ὑμέτερα; αἱ δὲ δὴ συνᾴδουσαι τοῖς ξενικοῖς γράμμασι μηνύσεις παρὰ τῶν ἐνθάδε τίνες τ´ εἰσὶ καὶ ὑπὸ τίνων γενόμεναι; τί κρύπτετε τὰς πίστεις, ἀλλ´ οὐκ εἰς τὸ ἐμφανὲς ἄγετε; ἀλλ´ οἶμαι τῶν μήτε γενομένων μήτε ἐσομένων ἀδύνατον εὑρεθῆναι πίστιν.

X. Ταῦτ´ ἐστίν, ὦ βουλή, μηνύματα οὐ κατὰ τούτων συνωμοσίας, ἀλλὰ καθ´ ὑμῶν δόλου καὶ πονηρᾶς γνώμης, ᾗ κέχρηνται κρύψαντες οὗτοι· τὰ γὰρ πράγματα αὐτὰ βοᾷ. Αἴτιοι δ´ ὑμεῖς οἱ τὰ πρῶτα ἐπιτρέψαντες αὐτοῖς καὶ τὸ ἀνόητον τῆς ἀρχῆς μεγάλῃ καθοπλίσαντες ἐξουσίᾳ, ὅτε Κοίντιον Καίσωνα τῷ παρελθόντι ἐνιαυτῷ κρίνειν ἐπ´ αἰτίαις ψευδέσιν εἰάσατε, καὶ τοσοῦτον φύλακα τῆς ἀριστοκρατίας ἀναρπαζόμενον ὑπ´ αὐτῶν περιείδετε. Τοιγαροῦν οὐκέτι μετριάζουσιν οὐδὲ καθ´ ἕνα τῶν εὐγενῶν περικόπτουσιν, ἀλλ´ ἀθρόους ἤδη περιβαλόντες τοὺς ἀγαθοὺς ἐλαύνουσιν ἐκ τῆς πόλεως· καὶ πρὸς τοῖς ἄλλοις κακοῖς οὐδ´ ἀντειπεῖν αὐτοῖς ἀξιοῦσιν οὐθένα ὑμῶν, ἀλλ´ εἰς ὑποψίας καὶ διαβολὰς ἄγοντες ὡς κοινωνοῦντα τῶν ἀπορρήτων δεδίττονται καὶ μισόδημον εὐθὺς εἶναί φασι, καὶ προλέγουσιν ἥκειν ἐπὶ τὸν δῆμον ὑφέξοντα τῶν ἐνθάδε ῥηθέντων δίκας. Ἀλλ´ ὑπὲρ μὲν τούτων ἕτερος ἔσται καιρὸς ἐπιτηδειότερος τοῖς λόγοις, νυνὶ δὲ συντεμῶ τὸν λόγον καὶ παύσομαι τὰ πλείω διατεινόμενος· φυλάττεσθαι ὑμῖν παραινῶ τούσδε τοὺς ἄνδρας ὡς συνταράττοντας τὴν πόλιν καὶ μεγάλων ἐκφέροντας ἀρχὰς κακῶν καὶ οὐκ ἐνθάδε μὲν ταῦτα λέγω, πρὸς δὲ τὸν δῆμον ἀποκρύψομαι, ἀλλὰ κἀκεῖ παρρησίᾳ δικαίᾳ χρήσομαι, διδάσκων ὡς οὐδὲν αὐτοῖς ἐπικρέμαται δεινόν, ὅτι μὴ κακοὶ καὶ δόλιοι προστάται πολεμίων ἔργα ἐν προσποιήματι φίλων διαπραττόμενοι. »

XI.Ταῦτ´ εἰπόντος τοῦ ὑπάτου κραυγή τε καὶ πολὺς ἔπαινος ἐκ τῶν παρόντων ἐγένετο, καὶ οὐδὲ λόγου τοῖς δημάρχοις ἔτι μεταδόντες διέλυσαν τὸν σύλλογον. Ἔπειθ´ ὁ μὲν Οὐεργίνιος ἐκκλησίαν συναγαγὼν κατηγόρει τῆς τε βουλῆς καὶ τῶν ὑπάτων, ὁ δὲ Κλαύδιος ἀπελογεῖτο τοὺς αὐτοὺς λόγους διεξιών, οὓς εἶπεν ἐπὶ τῆς βουλῆς. Οἱ μὲν οὖν ἐπιεικέστεροι τῶν δημοτικῶν κενὸν ὑπώπτευον εἶναι τὸν φόβον, οἱ δ´ εὐηθέστεροι πιστεύοντες ταῖς φήμαις ἀληθῆ· ὅσοι δὲ κακοήθεις ἦσαν ἐν αὐτοῖς καὶ μεταβολῆς ἀεὶ δεόμενοι, τοῦ μὲν ἐξετάζειν τἀληθὲς ἢ ψεῦδος οὐκ εἶχον πρόνοιαν, ἀφορμὴν δὲ διχοστασίας ἐζήτουν καὶ θορύβου.

XII. [10,14] Ἐν τοιαύτῃ δὲ ταραχῇ τῆς πόλεως οὔσης ἀνήρ τις ἐκ τοῦ Σαβίνων ἔθνους πατέρων τε οὐκ ἀφανῶν καὶ χρήμασι δυνατός, Ἄππιος Ἑρδώνιος ὄνομα, καταλῦσαι τὴν Ῥωμαίων ἡγεμονίαν ἐπεβάλετο εἴθ´ ἑαυτῷ τυραννίδα κατασκευαζόμενος εἴτε τῷ Σαβίνων ἔθνει πράττων ἀρχὴν καὶ κράτος εἴτ´ ὀνόματος ἀξιωθῆναι βουλόμενος μεγάλου. Κοινωσάμενος δὲ πολλοῖς τῶν φίλων ἣν εἶχε διάνοιαν καὶ τὸν τρόπον τῆς ἐπιχειρήσεως ἀφηγησάμενος, ἐπειδὴ κἀκείνοις ἐδόκει συνήθροιζε τοὺς πελάτας καὶ τῶν θεραπόντων οὓς εἶχεν εὐτολμοτάτους· καὶ δι´ ὀλίγου χρόνου συγκροτήσας δύναμιν ἀνδρῶν τετρακισχιλίων μάλιστα, ὅπλα τε καὶ τροφὰς καὶ τἆλλα ὅσων δεῖ πολέμῳ πάντα εὐτρεπισάμενος, εἰς σκάφας ποταμηγοὺς ἐνεβάλετο. Πλεύσας δὲ διὰ τοῦ Τεβέριος ποταμοῦ προσέσχε τῆς Ῥώμης κατὰ τοῦτο τὸ χωρίον, ἔνθα τὸ Καπιτώλιόν ἐστιν οὐδ´ ὅλον στάδιον ἀπέχον τοῦ ποταμοῦ. ἦσαν δὲ μέσαι τηνικαῦτα νύκτες, καὶ πολλὴ καθ´ ὅλην τὴν πόλιν ἡσυχία, ἣν συνεργὸν λαβὼν ἐξεβίβασε τοὺς ἄνδρας κατὰ σπουδὴν καὶ διὰ τῶν ἀκλείστων πυλῶν· εἰσὶ γάρ τινες ἱεραὶ πύλαι τοῦ Καπιτωλίου κατά τι θέσφατον ἀνειμέναι, Καρμεντίδας αὐτὰς καλοῦσιν· ἀναβιβάσας τὴν δύναμιν εἶχε τὸ φρούριον. Ἐκεῖθεν δ´ ἐπὶ τὴν ἄκραν ὠσάμενος, - ἔστι δὲ τῷ Καπιτωλίῳ προσεχής, - κἀκείνης ἐγεγόνει κύριος. ἦν δὲ αὐτοῦ γνώμη μετὰ τὸ κρατῆσαι τῶν ἐπικαιροτάτων τόπων τούς τε φυγάδας εἰσδέχεσθαι καὶ τοὺς δούλους εἰς ἐλευθερίαν καλεῖν καὶ χρεῶν ἄφεσιν ὑπισχνεῖσθαι τοῖς ἀπόροις τούς τε ἄλλους πολίτας, οἳ ταπεινὰ πράττοντες διὰ φθόνου καὶ μίσους εἶχον τὰς ὑπεροχὰς καὶ μεταβολῆς ἄσμενοι ἂν ἐλάβοντο, κοινωνοὺς ποιεῖσθαι τῶν ὠφελειῶν. Ἡ δὲ θαρρεῖν τε αὐτὸν ἐπαγομένη καὶ πλανῶσα ἐλπίς, ὡς οὐθενὸς ἀτυχήσοντα τῶν προσδοκωμένων, ἡ πολιτικὴ στάσις ἦν, δι´ ἣν οὔτε φιλίαν οὔτε κοινωνίαν οὐδεμίαν ὑπελάμβανε τῷ δήμῳ πρὸς τοὺς πατρικίους ἔτι γενήσεσθαι. Ἐὰν δὲ ἄρα μηθὲν αὐτῷ τούτων κατὰ νοῦν χωρῇ, τηνικαῦτα Σαβίνους τε πανστρατιᾷ καλεῖν ἐδέδοκτο καὶ Οὐολούσκους καὶ τῶν ἄλλων πλησιοχώρων ὅσοις ἂν ᾖ βουλομένοις ἀπηλλάχθαι τῆς Ῥωμαίων ἐπιφθόνου ἀρχῆς.

XIII. [10,15] Συνέβη δὲ αὐτῷ πάντων διαμαρτεῖν ὧν ἤλπισεν οὔτε δούλων αὐτομολησάντων πρὸς αὐτὸν οὔτε φυγάδων κατελθόντων οὔτε ἀτίμων καὶ καταχρέων τὸ ἴδιον κέρδος ἀντὶ τοῦ κοινῇ συμφέροντος ἀλλαξαμένων, τῆς τε ἔξωθεν ἐπικουρίας οὐ λαβούσης χρόνον ἱκανὸν εἰς παρασκευὴν τοῦ πολέμου· τρισὶ γὰρ ἢ τέτταρσι ταῖς πρώταις ἡμέραις τέλος εἰλήφει τὰ πράγματα μέγα δέος καὶ πολλὴν ταραχὴν Ῥωμαίοις παρασχόντα.

XIV. Ἐπεὶ γὰρ ἑάλω τὰ φρούρια, κραυγῆς ἄφνω γενομένης καὶ φυγῆς τῶν περὶ ἐκείνους οἰκούντων τοὺς τόπους, ὅσοι μὴ παραχρῆμα ἐσφάγησαν, ἀγνοοῦντες οἱ πολλοὶ τὸ δεινὸν ὅ τι ποτ´ ἦν ἁρπάσαντες τὰ ὅπλα συνέτρεχον, οἱ μὲν ἐπὶ τὰ μετέωρα χωρία τῆς πόλεως, οἱ δ´ εἰς τοὺς ἀναπεπταμένους αὐτῆς τόπους πολλοὺς σφόδρα ὄντας, οἱ δ´ εἰς τὰ παρακείμενα πεδία· ὅσοι δ´ ἡλικίας ἐν τῷ παρηκμακότι ἦσαν καὶ ῥώμης σώματος ἐν τῷ ἀδυνάτῳ, τὰ τέγη τῶν οἰκιῶν κατεῖχον ἅμα γυναιξὶν ὡς ἀπὸ τούτων ἀγωνιούμενοι πρὸς τοὺς εἰσεληλυθότας· ἅπαντα γὰρ αὐτοῖς ἐδόκει μεστὰ εἶναι πολέμου. Ἡμέρας δὲ γενομένης ὡς ἐγνώσθη τὰ κεκρατημένα τῆς πόλεως φρούρια καὶ ὅστις ἦν ὁ κατέχων ἀνὴρ τοὺς τόπους, οἱ μὲν ὕπατοι προελθόντες εἰς τὴν ἀγορὰν ἐκάλουν τοὺς πολίτας ἐπὶ τὰ ὅπλα,

XV. Οἱ δὲ δήμαρχοι προσκαλεσάμενοι τὸν δῆμον εἰς ἐκκλησίαν ἔλεγον, ὅτι τῷ μὲν συμφέροντι τῆς πόλεως οὐδὲν ἀξιοῦσι πράττειν ἐναντίον, δίκαιον δὲ ὑπολαμβάνουσιν εἶναι τηλικοῦτον ἀγῶνα μέλλοντα τὸν δῆμον ὑπομένειν ἐπὶ ῥητοῖς τισι καὶ διωρισμένοις ἐπὶ τὸ κινδύνευμα χωρεῖν.

« Εἰ μὲν οὖν, ἔφασαν λέγοντες, ὑπισχνοῦνταί τε ὑμῖν οἱ πατρίκιοι καὶ πίστεις βούλονται δοῦναι τὰς ἐπὶ θεῶν, ὅτι καταλυθέντος τοῦδε τοῦ πολέμου συγχωρήσουσιν ὑμῖν ἀποδεῖξαι νομοθέτας καὶ τὸν λοιπὸν χρόνον ἐν ἰσηγορίᾳ πολιτεύεσθαι, συνελευθερῶμεν αὐτοῖς τὴν πατρίδα· εἰ δὲ οὐθὲν ἀξιοῦσι ποιεῖν τῶν μετρίων, τί κινδυνεύομεν καὶ τὰς ψυχὰς ὑπὲρ αὐτῶν προιέμεθα μηθενὸς ἀγαθοῦ μέλλοντες ἀπολαύσεσθαι; «

XVI. Ταῦτα λεγόντων αὐτῶν καὶ τοῦ δήμου πειθομένου καὶ μηδὲ φωνὴν ὑπομένοντος ἀκούειν τῶν ἄλλο τι παραινούντων ὁ μὲν Κλαύδιος οὐθὲν ἠξίου δεῖσθαι τοιαύτης συμμαχίας, ἥτις οὐχ ἑκούσιος, ἀλλ´ ἐπὶ μισθῷ καὶ οὐδὲ τούτῳ μετρίῳ βοηθεῖν βούλεται τῇ πατρίδι, ἀλλ´ αὐτοὺς ἔφη τοὺς πατρικίους ἑαυτῶν σώμασι καὶ τῶν συνόντων αὐτοῖς πελατῶν ὁπλισαμένους, καὶ εἴ τι ἄλλο πλῆθος ἐθελούσιον αὐτοῖς συναρεῖται τοῦ πολέμου, μετὰ τούτων πολιορκεῖν τὰ φρούρια· ἐὰν δὲ μηδ´ οὕτως ἀξιόχρεως ἡ δύναμις αὐτοῖς εἶναι δοκῇ, Λατίνους τε καὶ Ἕρνικας παρακαλεῖν, ἐὰν δ´ ἀνάγκη, καὶ δούλοις ἐλευθερίαν ὑπισχνεῖσθαι καὶ πάντας μᾶλλον ἢ τοὺς ἐπὶ τοιούτων καιρῶν μνησικακοῦντας σφίσι παρακαλεῖν. Ὁ δ´ ἕτερος τῶν ὑπάτων Οὐαλέριος ἀντέλεγε πρὸς ταῦτα οὐκ οἰόμενος δεῖν ἠρεθισμένον τὸ δημοτικὸν ἐκπολεμῶσαι τελέως τοῖς πατρικίοις, εἶξαί τε συνεβούλευε τῷ καιρῷ καὶ πρὸς μὲν τοὺς ἔξωθεν πολεμίους τά γε δίκαια ἀντιτάττειν, πρὸς δὲ τὰς πολιτικὰς διατριβὰς τὰ μέτρια καὶ εὐγνώμονα. Ἐπειδὴ δὲ τοῖς πλείοσι τῶν ἐν τῷ συνεδρίῳ τὰ κράτιστα ἐδόκει λέγειν, προελθὼν εἰς τὴν ἐκκλησίαν καὶ λόγον εὐπρεπῆ διεξελθὼν τελευτῶν τῆς δημηγορίας ὤμοσεν, ἐὰν ὁ δῆμος συνάρηται μετὰ προθυμίας τοῦ πολέμου καὶ καταστῇ τὰ πράγματα τῆς πόλεως, συγχωρήσειν τοῖς δημάρχοις προθεῖναι τῷ πλήθει τὴν περὶ τοῦ νόμου διάγνωσιν, ὃν εἰσέφερον ὑπὲρ τῆς ἰσονομίας, καὶ σπουδάσειν, ὅπως ἐπὶ τῆς ἑαυτοῦ ἀρχῆς ἐπὶ τέλος ἀχθῇ τὰ δόξαντα τῷ δήμῳ. ἦν δὲ ἄρα οὐθὲν αὐτῷ πεπρωμένον ἐπιτελέσαι τῶν ὁμολογηθέντων πλησίον οὔσης τῆς τοῦ θανάτου μοίρας.

XVII. [10,16] Λυθείσης δὲ τῆς ἐκκλησίας περὶ δείλην ὀψίαν συνέρρεον ἐπὶ τοὺς ἀποδειχθέντας ἕκαστοι τόπους, ἀπογραφόμενοί τε πρὸς τοὺς ἡγεμόνας τὰ ὀνόματα καὶ τὸν στρατιωτικὸν ὀμνύντες ὅρκον. Ἐκείνην μὲν οὖν τὴν ἡμέραν καὶ τὴν ἐπιοῦσαν νύκτα ὅλην ἀμφὶ ταῦτα ἦσαν, τῇ δ´ ἑξῆς ἡμέρᾳ λοχαγοί τε προσενέμοντο ὑπὸ τῶν ὑπάτων καὶ ἐπὶ τὰς ἱερὰς ἐτάττοντο σημείας συνεπιρρέοντος καὶ τοῦ κατ´ ἀγροὺς διατρίβοντος ὄχλου.

XVIII. Γενομένων δὲ διὰ τάχους πάντων εὐτρεπῶν μερισάμενοι τὰς δυνάμεις οἱ ὕπατοι κλήρῳ διείλοντο τὰς ἀρχάς. Κλαυδίῳ μὲν οὖν ὁ κλῆρος ἀπέδωκε τὰ πρὸ τῶν τειχῶν διὰ φυλακῆς ἔχειν, μή τις ἔξωθεν ἐπέλθῃ στρατιὰ τοῖς ἔνδον ἐπίκουρος· ὑποψία γὰρ ἅπαντας κατεῖχε μεγάλης σφόδρα κινήσεως, καὶ τὸ ἀντίπαλον ἅπαν ὡς ὁμοῦ συνεπιθησόμενον σφίσιν ἐφοβοῦντο· Οὐαλερίῳ δὲ τὰ φρούρια πολιορκεῖν ὁ δαίμων ἐφῆκεν. Ἐτάχθησαν δὲ καὶ ἐπὶ τοῖς ἄλλοις ἐρύμασιν ἡγεμόνες ὅσα τῆς πόλεως ἐντὸς ἦν καθέξοντες, καὶ κατὰ τὰς ἐπὶ τὸ Καπιτώλιον ἀγούσας ὁδοὺς ἕτεροι κωλύσεως ἕνεκεν τῶν ἀποστησομένων πρὸς τοὺς πολεμίους δούλων τε καὶ ἀπόρων, οὓς παντὸς μάλιστα ἐφοβοῦντο.

XIX. Ἐπικουρικὸν δὲ αὐτοῖς οὐδὲν ἔφθασε παρὰ τῶν συμμάχων ἀφικόμενον, ὅτι μὴ παρὰ Τυσκλάνων μόνον ἐν μιᾷ νυκτὶ ἀκουσάντων τε καὶ παρασκευασαμένων, οὓς ἦγε Λεύκιος Μαμίλιος, ἀνὴρ δραστήριος, ἔχων τὴν μεγίστην ἐν τῇ πόλει τότε ἀρχήν· καὶ συνεκινδύνευον οὗτοι τῷ Οὐαλερίῳ μόνοι καὶ συνεξεῖλον τὰ φρούρια πᾶσαν εὔνοιαν καὶ προθυμίαν ἀποδειξάμενοι. Ἐγένετο δ´ ἡ προσβολὴ τοῖς φρουρίοις πανταχόθεν· οἱ μὲν γὰρ ἀπὸ τῶν πλησίον οἰκιῶν ἀσφάλτου καὶ πίσσης πεπυρωμένης ἀγγεῖα σφενδόναις ἐναρμόττοντες ἐπέβαλλον ὑπὲρ τὸν λόφον· οἱ δὲ συμφοροῦντες {αὐτῶν} φακέλλους φρυγάνων καὶ παρὰ τοῖς ἀποτόμοις τῆς πέτρας βωμοὺς ἐγείροντες ὑψηλοὺς ὑφῆπτον ἀνέμῳ παραδιδόντες τὰς φλόγας ἐπιφόρῳ. Ὅσοι δ´ ἦσαν ἀνδρειότατοι, πυκνώσαντες τοὺς λόχους ἐχώρουν ἄνω κατὰ τὰς χειροποιήτους ὁδούς. ἦν δ´ αὐτοῖς οὔτε τοῦ πλήθους, ᾧ παρὰ πολὺ τῶν ἀντιπάλων προεῖχον, ὄφελος οὐθὲν διὰ στενῆς ἀνιοῦσιν ὁδοῦ καὶ πληθούσης προβόλων ἄνωθεν ἐπικαταραττομένων, ἔνθα συνεξισωθήσεσθαι ἔμελλε τῷ πολλῷ τὸ ὀλίγον· οὔτε τῆς παρὰ τὰ δεινὰ ὑπομονῆς, ἣν πολλοῖς καταστήσαντες πολέμοις εἶχον, οὐδεμία ὄνησις πρὸς ὀρθίους βιαζομένοις σκοπάς. Οὐ γὰρ συστάδην μαχομένους ἔδει τὸ εὔτολμον καὶ καρτερικὸν ἀποδείξασθαι, ἀλλ´ ἑκηβόλοις χρῆσθαι μάχαις. ἦσαν δὲ τῶν μὲν κάτωθεν ἐπὶ τὰ μετέωρα βαλλομένων βραδεῖαί τε καὶ ἀσθενεῖς, εἰ καὶ τύχοιεν, ὥσπερ εἰκός, αἱ πληγαί· τῶν δ´ ἀφ´ ὕψους κάτω ῥιπτουμένων ὀξεῖαι καὶ καρτεραὶ συνεργούντων τοῖς βλήμασι καὶ τῶν ἰδίων βαρῶν. Οὐ μὴν ἔκαμνόν γε οἱ προσβάλλοντες τοῖς ἐρύμασιν, ἀλλὰ διεκαρτέρουν ἀναγκοφαγοῦντες τὰ δεινὰ οὔτε ἡμέρας οὔτε νυκτὸς ἀναπαυόμενοι τῶν πόνων. Τέλος δ´ οὖν ὑπολιπόντων τοὺς πολιορκουμένους τῶν βελῶν καὶ τῶν σωμάτων ἐξαδυνατούντων τρίτῃ τὰ φρούρια ἐξεπολιόρκησαν ἡμέρᾳ. Ἐν ταύτῃ τῇ μάχῃ πολλοὺς Ῥωμαῖοι καὶ ἀγαθοὺς ἄνδρας ἀπέβαλον, κράτιστον δέ, ὥσπερ πρὸς ἁπάντων ὡμολόγητο, τὸν ὕπατον· ὃς οὐκ ὀλίγα τραύματα λαβὼν οὐδ´ ὣς ἀφίστατο τῶν δεινῶν, ἕως ἐπικαταραγεὶς αὐτῷ πέτρος ὑπερμεγέθης ἐπιβαίνοντι τοῦ περιτειχίσματος ἅμα τήν τε νίκην αὐτὸν ἀφείλετο καὶ τὴν ψυχήν.

XX. Ἁλισκομένων δὲ τῶν φρουρίων ὁ μὲν Ἑρδώνιος - ἦν γὰρ καὶ ῥώμῃ σώματος διάφορος καὶ κατὰ χεῖρα γενναῖος - ἄπιστόν τι χρῆμα περὶ αὑτὸν ποιήσας νεκρῶν ὑπὸ πλήθους βελῶν ἀποθνήσκει, τῶν δὲ σὺν αὐτῷ τὰ φρούρια καταλαβομένων ὀλίγοι μέν τινες ζῶντες ἑάλωσαν, οἱ δὲ πλείους σφάττοντες ἑαυτοὺς ἢ κατὰ τῶν κρημνῶν ὠθοῦντες διεφθάρησαν.

XXI. [10,17] Τοῦτο τὸ τέλος λαβόντος τοῦ λῃστρικοῦ πολέμου τὴν πολιτικὴν πάλιν ἀνερρίπιζον οἱ δήμαρχοι στάσιν ἀξιοῦντες ἀπολαβεῖν παρὰ τοῦ περιόντος ὑπάτου τὰς ὑποσχέσεις, ἃς ἐποιήσατο πρὸς αὐτοὺς ὁ τεθνηκὼς ἐν τῇ μάχῃ Οὐαλέριος ὑπὲρ τῆς εἰσφορᾶς τοῦ νόμου. Ὁ δὲ Κλαύδιος μέχρι μέν τινος παρεῖλκε τὸν χρόνον τοτὲ μὲν καθαρμοὺς τῆς πόλεως ἐπιτελῶν, τοτὲ δὲ θυσίας τοῖς θεοῖς χαριστηρίους ἀποδιδούς, τοτὲ δ´ ἀγῶσι καὶ θέαις ἀναλαμβάνων τὸ πλῆθος εἰς εὐπαθείας. Ὡς δ´ αἱ σκήψεις αὐτῷ πᾶσαι κατανάλωντο, τελευτῶν ἔφη δεῖν εἰς τὸν τοῦ τεθνηκότος ὑπάτου τόπον ἕτερον ἀποδειχθῆναι. Τὰ μὲν γὰρ ὑφ´ ἑαυτοῦ μόνου πραχθέντα οὔτε νόμιμα οὔτε βέβαια ἔσεσθαι, τὰ δ´ ὑπ´ ἀμφοῖν ἔννομά τε καὶ κύρια. Ταύτῃ διακρουσάμενος αὐτοὺς τῇ προφάσει προεῖπεν ἀρχαιρεσίων ἡμέραν, ἐν ᾗ τὸν συνάρχοντα ἔμελλεν ἀποδείξειν. Ἐν δὲ τῷ μεταξὺ χρόνῳ δι´ ἀπορρήτων βουλευμάτων οἱ προεστηκότες τοῦ συνεδρίου συνέθεντο κατὰ σφᾶς αὐτούς, ὅτῳ παραδώσουσι τὴν ἀρχήν. Καὶ ἐπειδὴ ὁ τῶν ἀρχαιρεσίων ἐνέστη χρόνος, καὶ ὁ κῆρυξ τὴν πρώτην τάξιν ἐκάλεσεν, εἰσελθόντες εἰς τὸν ἀποδειχθέντα τόπον οἵ τ´ ὀκτωκαίδεκα λόχοι τῶν ἱππέων καὶ οἱ τῶν πεζῶν ὀγδοήκοντα τῶν τὸ μέγιστον τίμημα ἐχόντων Λεύκιον Κοίντιον Κικιννάτον ἀποδεικνύουσιν ὕπατον, οὗ τὸν υἱὸν Καίσωνα Κοίντιον εἰς ἀγῶνα θανάτου καταστήσαντες οἱ δήμαρχοι τὴν πόλιν ἠνάγκασαν ἐκλιπεῖν· καὶ οὐδεμιᾶς ἔτι κληθείσης ἐπὶ τὴν ψηφοφορίαν τάξεως - τρισὶ γὰρ ἦσαν λόχοις πλείους οἱ διενέγκαντες τὴν ψῆφον λόχοι τῶν ὑπολειπομένων - ὁ μὲν δῆμος ἀπῄει συμφορὰν βαρεῖαν ἡγούμενος, ὅτι μισῶν αὐτοὺς ἀνὴρ ἐξουσίας ὑπατικῆς ἔσται κύριος,

XXII. Ἡ βουλὴ δὲ ἔπεμπε τοὺς παραληψομένους τὸν ὕπατον καὶ ἄξοντας ἐπὶ τὴν ἀρχήν. Ἔτυχε δὲ τηνικαῦτα ὁ Κοίντιος ἄρουράν τινα ὑπεργαζόμενος εἰς σποράν, αὐτὸς ἀκολουθῶν τοῖς σχίζουσι τὴν νειὸν βοιδίοις ἀχίτων, περιζωμάτιον ἔχων καὶ ἐπὶ τῇ κεφαλῇ πῖλον. Ἰδὼν δὲ πλῆθος ἀνθρώπων εἰς τὸ χωρίον εἰσιόντων τό τε ἄροτρον ἐπέσχε καὶ πολὺν ἠπόρει χρόνον, οἵτινές τε εἶεν καὶ τίνος δεόμενοι πρὸς αὐτὸν ἥκοιεν· ἔπειτα προσδραμόντος τινὸς καὶ κελεύσαντος κοσμιώτερον ἑαυτὸν ποιῆσαι παρελθὼν εἰς τὴν καλύβην καὶ ἀμφιεσάμενος προῆλθεν. Οἱ δ´ ἐπὶ τὴν παράληψιν αὐτοῦ παρόντες ἠσπάσαντό τε ἅπαντες οὐκ ἐκ τοῦ ὀνόματος, ἀλλ´ ὕπατον καὶ τὴν περιπόρφυρον ἐσθῆτα περιέθεσαν τούς τε πελέκεις καὶ τἆλλα παράσημα τῆς ἀρχῆς παραστήσαντες ἀκολουθεῖν εἰς τὴν πόλιν ἠξίουν. Κἀκεῖνος μικρὸν ἐπισχὼν καὶ δακρύσας τοσοῦτον εἶπεν·

« Ἄσπορον ἄρα μοι τὸ χωρίον ἔσται τοῦτον τὸν ἐνιαυτόν, καὶ κινδυνεύσομεν οὐχ ἕξειν, πόθεν διατραφῶμεν. »

ἔπειτ´ ἀσπασάμενος τὴν γυναῖκα καὶ τῶν ἔνδον ἐπιμελεῖσθαι παραγγείλας ᾤχετο εἰς τὴν πόλιν.

XXIII. Ταῦτα δὲ οὐχ ἑτέρου τινὸς χάριν εἰπεῖν προήχθην, ἀλλ´ ἵνα φανερὸν γένηται πᾶσιν, οἷοι τότε ἦσαν οἱ τῆς Ῥωμαίων πόλεως προεστηκότες, ὡς αὐτουργοὶ καὶ σώφρονες καὶ πενίαν δικαίαν οὐ βαρυνόμενοι καὶ βασιλικὰς οὐ διώκοντες ἐξουσίας, ἀλλὰ καὶ διδομένας ἀναινόμενοι· φανήσονται γὰρ οὐδὲ κατὰ μικρὸν ἐοικότες ἐκείνοις οἱ νῦν, ἀλλὰ τἀναντία πάντα ἐπιτηδεύοντες, πλὴν πάνυ ὀλίγων, δι´ οὓς ἕστηκεν ἔτι τὸ τῆς πόλεως ἀξίωμα καὶ τὸ σώζειν τὴν πρὸς ἐκείνους τοὺς ἄνδρας ὁμοιότητα. Ἀλλὰ περὶ μὲν τούτων ἅλις.

XXIV. [10,18] Ὁ δὲ Κοίντιος παραλαβὼν τὴν ὑπατείαν πρῶτον μὲν ἔπαυσε τοὺς δημάρχους τῶν καινῶν πολιτευμάτων καὶ τῆς ἐπὶ τῷ νόμῳ σπουδῆς προειπών, ὡς εἰ μὴ παύσονται ταράττοντες τὴν πόλιν ἀπάξει Ῥωμαίους ἅπαντας ἐκ τῆς πόλεως στρατείαν κατὰ Οὐολούσκων παραγγείλας. Ἐπεὶ δὲ κωλύσειν αὐτὸν ἔλεγον οἱ δήμαρχοι στρατοῦ ποιεῖσθαι καταγραφήν, συναγαγὼν τὸ πλῆθος εἰς ἐκκλησίαν εἶπεν, ὅτι πάντες ὀμωμόκασι τὸν στρατιωτικὸν ὅρκον, ἀκολουθήσειν τοῖς ὑπάτοις ἐφ´ οὓς ἂν καλῶνται πολέμους, καὶ μήτε ἀπολείψειν τὰ σημεῖα μήτε ἄλλο πράξειν μηθὲν ἐναντίον τῷ νόμῳ· παραλαβὼν δὲ τὴν ὑπατικὴν ἐξουσίαν αὐτὸς ἔχειν ἔφη κρατουμένους ἅπαντας τοῖς ὅρκοις. Εἰπὼν δὲ ταῦτα καὶ διομοσάμενος χρήσεσθαι τῷ νόμῳ κατὰ τῶν ἀπειθούντων ἐκέλευσεν ἐκ τῶν ἱερῶν τὰ σημεῖα καταφέρειν·

« καὶ ἵνα, ἔφη, πᾶσαν ἀπογνῶτε δημαγωγίαν ἐπὶ τῆς ἐμῆς ὑπατείας, οὐ πρότερον ἀναστήσω τὸν στρατὸν ἐκ τῆς πολεμίας, πρὶν ἢ πᾶς ὁ τῆς ἀρχῆς μοι διέλθῃ χρόνος. Ὡς οὖν ἐν ὑπαίθρῳ χειμάσοντες παρασκευάσασθε τὰ εἰς ἐκεῖνον τὸν καιρὸν ἐπιτήδεια. »

 τούτοις καταπληξάμενος αὐτοὺς τοῖς λόγοις ἐπειδὴ κοσμιωτέρους εἶδε γεγονότας καὶ δεομένους ἀφεθῆναι τῆς στρατείας, ἐπὶ τούτοις ἔφη χαριεῖσθαι τὰς ἀναπαύλας τῶν πολέμων, ἐφ´ ᾧ τε μηθὲν ἔτι παρακινεῖν αὐτούς, ἀλλ´ ἐᾶν αὐτὸν ὡς βούλεται τὴν ἀρχὴν τελεῖσθαι, καὶ ἐπὶ τῷ τὰ δίκαια διδόναι τε καὶ λαμβάνειν παρ´ ἀλλήλων.

XXV. [10,19] Καταστάντος δὲ τοῦ θορύβου δικαστήριά τε ἀπεδίδου τοῖς δεομένοις ἐκ πολλῶν παρειλκυσμένα χρόνων, καὶ τὰ πλεῖστα τῶν ἐγκλημάτων αὐτὸς ἴσως καὶ δικαίως διέκρινε δι´ ὅλης ἡμέρας ἐπὶ τοῦ βήματος καθεζόμενος, εὐπρόσοδόν τε καὶ πρᾷον καὶ φιλάνθρωπον τοῖς ἐπὶ τὴν δικαιοδοσίαν ἀφικνουμένοις ἑαυτὸν παρεῖχε καὶ παρεσκεύασεν ἀριστοκρατικὴν οὕτως φανῆναι τὴν πολιτείαν, ὥστε μήτε δημάρχων δεηθῆναι τοὺς διὰ πενίαν ἢ δυσγένειαν ἢ ἄλλην τινὰ ταπεινότητα ὑπὸ τῶν κρειττόνων κατισχυομένους, μήτε καινῆς νομοθεσίας πόθον ἔχειν ἔτι τοὺς ἐν ἰσηγορίᾳ πολιτεύεσθαι βουλομένους, ἀλλ´ ἀγαπᾶν τε καὶ χαίρειν ἅπαντας ἐπὶ τῇ τότε κατασχούσῃ τὴν πόλιν εὐνομίᾳ. Ταῦτά τε δὴ τὰ ἔργα τοῦ ἀνδρὸς ἐπῃνεῖτο ὑπὸ τοῦ δήμου, καὶ ἐπεὶ τὸν ὡρισμένον ἐτέλεσε τῆς ἀρχῆς χρόνον τὸ μὴ δέξασθαι τὴν ὑπατείαν διδομένην τὸ δεύτερον μηδὲ ἀγαπῆσαι τηλικαύτην λαμβάνοντα τιμήν. Κατεῖχε γὰρ αὐτὸν ἐπὶ τῆς ὑπατικῆς ἐξουσίας ἡ βουλὴ πολλὰς προσφέρουσα δεήσεις, ἐπεὶ τὸ τρίτον οἱ δήμαρχοι διεπράξαντο μὴ ἀποθέσθαι τὴν ἀρχήν, ὡς ἐναντιωσόμενον αὐτοῖς καὶ παύσοντα τῶν καινῶν πολιτευμάτων, τὰ μὲν αἰδοῖ, τὰ δὲ φόβῳ, τὸν δὲ δῆμον ὁρῶσα οὐκ ἀναινόμενον ὑπ´ ἀνδρὸς ἀγαθοῦ ἄρχεσθαι. Ὁ δ´ οὔτε τῶν δημάρχων ἐπαινεῖν ἔφη τὸ ἀπαραχώρητον τῆς ἐξουσίας οὔτε αὐτὸς εἰς ὁμοίαν ἐκείνοις ἥξειν διαβολήν. Συναγαγὼν δὲ τὸν δῆμον εἰς ἐκκλησίαν καὶ πολλὴν κατηγορίαν τῶν οὐκ ἀποτιθεμένων τὰς ἀρχὰς διαθέμενος ὅρκους τε διομοσάμενος ἰσχυροὺς περὶ τοῦ μὴ λήψεσθαι πάλιν τὴν ὑπατείαν, πρὶν ἀποθέσθαι τὴν προτέραν ἀρχήν, προεῖπεν ἀρχαιρεσίων ἡμέραν· ἐν ᾗ καταστήσας ὑπάτους ἀπῄει πάλιν εἰς τὸ μικρὸν ἐκεῖνο καλύβιον καὶ τὸν αὐτουργὸν ἔζη βίον ὡς πρότερον.

 

 

 

I. Sous le consulat de Publius Valerius Poplicola et de Caius Claudius Sabinus, la ville de Rome se vit menacée de la plus terrible guerre qu'elle eût eu jusqu'alors à soutenir contre les peuples voisins. Les séditions intestines jetèrent la république dans ce danger évident, comme il avait été prédit par les oracles des Sibylles, et annoncé par les prodiges de l'année précédente. Nous allons rapporter les causes de cette guerre, et la conduite que gardèrent les consuls pendant le temps du péril.

II. Les tribuns, que le peuple avait continués en charge dans l'espérance de faire passer la loi, voyant que Caius Claudius un des consuls avait hérité de la haine implacable de ses ancêtres contre les plébéiens, et qu'il était prêt à s'opposer de 469 toutes ses forces à leurs entreprises, désespérant d'ailleurs de réprimer par voies de fait la faction trop puissante des jeunes patriciens qui poussaient leur hardiesse jusqu'à l'effronterie et la fureur, remarquant que pour comble de disgrâce la plus grande partie du peuple gagné par les caresses des patriciens, n'était plus si empressé à demander la confirmation de la loi : les tribuns, dis- je, résolurent de pousser les affaires sans aucun ménagement, afin d'intimider le peuple, et de renverser les projets du consul. D'abord ils répandent divers bruits dans la ville. Ensuite ils s'attroupent publiquement, restent assis depuis le matin jusqu'au soir, et délibèrent à la vue de tout le monde sur ce qu'ils doivent faire, n'admettant à leur conseil et dans leurs délibérations que ceux qui sont de leur cabale. Enfin, dès que l'occasion leur paraît favorable pour exécuter leur dessein, ils contrefont des lettres, et prennent des mesures afin que quelque inconnu les leur remette entre les mains pendant qu'ils seraient assis dans la place publique. Celui qu'ils en avaient chargé, leur rend ces lettres : ils en font la lecture, ils se lèvent aussitôt de leurs sièges, ils se frappent le front, et baissent les yeux en signe de tristesse.

III. Dans le moment le peuple accourt à eux : chacun est persuadé que ces lettres contiennent quelque fâcheuse nouvelle. Les tribuns se font faire silence, et parlent ainsi.

« Romains, le peuple est menacé d'un danger extrême, et si quelque dieu propice n'avait soin de protéger ceux qui sont sur le point d'éprouver des maux qu'ils n'ont pas mérités, nous serions tous enveloppés dans les malheurs les plus terribles. Nous vous prions de demeurer ici un peu de temps, jusqu'à ce que nous ayons annoncé au sénat ce qu'on nous mande, afin de délibérer ensemble, et de prendre d'un commun consentement les mesures nécessaires pour le bien commun ».

A ces mots ils vont trouver les consuls. Pendant que le sénat s'assemblait, on tenait différents propos dans la place publique. Les uns faisaient des discours faits exprès, suivant les ordres qu'ils en avaient reçus des tribuns. Les autres frappés de l'idée des malheurs dont on était menacé, assuraient que c'était telle et telle chose qu'on avait mandée aux tribuns. L'un disait que les Aeques et les Volsques ayant reçu Caeson Quintius condamné par le peuple, l'avaient élu général des deux nations, et qu'il préparait à attaquer Rome avec une nombreuse armée. L'au- 470 tre prétendait que Caeson d'intelligence avec les patriciens, s'approchait à la tête des troupes étrangères, dans le dessein de détruire, tant pour le présent que pour l'avenir, la puissance des plébéiens, et de rompre toutes leurs mesures. Celui-ci n'attribuait pas la prétendue conspiration à tout le corps de la noblesse, mais seulement à la jeunesse patricienne. Quelques-uns même ne craignaient pas de dire que Caeson Quincius caché dans la ville, cherchait à s'emparer des citadelles et des lieux les plus forts.

 IV. Pendant que toute la ville était ainsi en émotion dans l'attente de quelque grand malheur, et que tous les Romains étaient en défiance et en garde l'un contre l'autre, les consuls convoquent le sénat. Les tribuns se rendent les premiers à l'assemblée, et font le rapport de ce qu'on leur a mandé. Aulus Virginius parla en ces termes au nom de tout le collège.

« Tandis que les maux qu'on nous annonçaient n'étaient pas certain, et qu'ils n'avaient pour fondement que des bruits en l'air qui demandaient confirmation, nous avons, Messieurs, toujours différé à vous en parler, dans la crainte d'exciter de grands troubles, qui sont les suites inévitables des nouvelles fâcheuses. Nous appréhendions d'ailleurs que dans les démarches que nous aurions pu faire avant un plus ample éclaircissement, il ne vous parût plus de précipitation que de prudence. Nous n'avons pas cru néanmoins devoir mépriser les maux qui nous menaçaient et sur les avis qu'on nous a donnés, nous avons mis toute notre application à faire d'exactes recherches pour découvrir la vérité. Mais puisque la providence divine qui ne cesse de conserver cette république, nous découvre aujourd'hui par une bonté particulière les desseins cachés et les entreprises impies des ennemis des dieux ; puisque nous venons de recevoir des lettres de la part des étrangers qui nous aiment, comme vous l'allez voir tout à l'heure, enfin, puisque ce qui se passe dans Rome est entièrement conforme à ce qu'on nous mande de dehors, et que des affaires si pressantes ne souffrent plus aucun retardement : nous nous croyons obligés de commencer par vous avertir de la conspiration, avant que  d'en informer le peuple.

V. Sachez donc qu'on a tramé une conjuration contre le peuple, qu'elle a été faite par des gens de nom, parmi lesquels on prétend qu'il y a quelques-uns, des anciens qui sont 471 ici assemblés, avec un grand nombre de chevaliers qui ne sont pas encore reçus dans le sénat. et qu'il n'est pas temps de nommer. Ils doivent, à ce qu' on nous a dit, prendre le temps de quelque nuit obscure pour nous attaquer endormis dans nos maisons, lorsque nous serons hors d'état ou de prendre les mesures nécessaires, ou de nous rallier pour nous défendre. Leur dessein est de fondre sur nous les armes à la main, d'égorger les tribuns, et de répandre sans exception le sang de tous les plébéiens, qui pour conserver la liberté de la patrie, se sont déjà opposés, ou pourraient dans la suite s'opposer à leurs entreprises pernicieuses. Ils se flattent que délivrés de nous, il leur sera facile de vous engager à rompre d'un commun accord le traité que vous avez fait avec le peuple. Mais voyant que pour venir à bout de leur entreprise, il était nécessaire de s'assurer secrètement d'une puissante armée de troupes étrangères, ils ont pris pour leur général Caeson Quintius un de nos exilés. Quelques-uns de ceux qui sont dans cette assemblée, non contents d'avoir soustrait à la punition ce patricien convaincu de meurtre et souillé du fang des citoyens, l'ont fait évader de Rome. Aujourd'hui ils veulent le rappeler, ils lui font espérer des dignités, ils lui offrent des honneurs et autres récompenses, s'il les sert bien dans leurs desseins. De son côté, il leur a promis de leur amener autant de troupes des Aeques et des Volsques qu'il leur en faudra. Bientôt il doit venir en personne à la tête des soldats les plus déterminés, qu'il a dessein de faire entrer dans Rome en cachette, les uns après les autres, et par différents endroits. Le reste de l'armée attendra qu'on ait égorgé les tribuns, pour faire main basse sur le reste du pauvre peuple, en cas que quelqu'un soit assez hardi pour défendre sa liberté. Voilà, Sénateurs, les projets impies et l'horrible conspiration qu'ils doivent exécuter pendant les ténèbres de la nuit, sans craindre ni la colère des dieux, ni l'indignation des hommes. .

VI. Dans ce danger évident qui nous menace, nous. nous adressons à vous, Pères conscrits. Nous vous conjurons par les dieux et par les génies auxquels nous faisons les mêmes sacrifices, et par le souvenir de tant de guerres importantes que nous avons soutenues avec vous, de ne nous pas abandonner. Ne souffrez pas que nos ennemis exercent sur nous leur cruauté. Ne nous livrez pas à la rage de ces impies 472 qui nous persécutent. Secourez-nous plutôt : aidez-nous à tirer une juste vengeance de ceux qui ont formé une si détestable entreprise. Que pas un de ces scélérats ne nous échappe, ou qu'au moins les principaux chefs de la conjuration portent la peine due à leurs crimes. La première grâce que nous vous demandons, Messieurs, c'est d'ordonner qu'il soit informé par les tribuns contre les coupables, et qu'ils se règlent sur les indices qu'on leur a déjà donnés. N'est-il pas juste en effet, et même nécessaire, que ceux-là mêmes qui sont en danger de  leur vie, fassent d'exactes informations sur le péril qui les menace ? S'il y en a quelques-uns parmi vous, qui peu disposés à embrasser le sentiment des autres, aient résolu de se déclarer contre tous ceux qui parleront en faveur du peuple, je voudrais bien leur demander ce qui leur fait peine dans notre requête, et quel parti ils nous conseillent de prendre. Prétendent-ils que sans faire les informations nécessaires, nous devons dissimuler une horrible conjuration qu'on a formée contre le peuple ? Mais peut-on se persuader, que ceux qui parlent de la (sorte, aient l'esprit sain ? Qui ne croirait au contraire, qu'ils se sont laissés corrompre que complices de la conjuration, s'ils empêchent qu'on n'informe plus amplement, c'est qu'ils craignent pour eux-mêmes, et qu'ils appréhendent qu'on ne les découvre? Vous feriez donc très-mal de les écouter. Peut-être prétendent-ils que ce n'est pas à nous, mais au sénat et aux consuls, à prendre connaissance de ce qu'on nous a déjà découvert de la conjuration. Que si leurs prétentions sont justes, qu'est ce qui empêchera les magistrats du peuple de s'appuyer sur les mêmes raisons, lorsque quelques-uns des plébéiens portant l'insolence jusqu'à de révolter contre les consuls et contre la magistrature, entreprendront d'abolir l'ordre des sénateurs? Les tribuns, dis-je, ne pourront-ils pas soutenir qu'il est juste que ceux qui sont chargés de protéger le peuple, prennent connaissance des affaires qui regardent les plébéiens? Mais qu'arriverait-il de là, sinon que jamais on ne pourrait faire d'informations sur une intrigue pour peu qu'elle fût secrète ? Pour nous, nous sommes bien éloignés d'avoir de semblables prétentions qui ne pourraient manquer de nous rendre suspects. C'est à vous à voir si vous devez écouter des gens qui veulent vous engager à en user ainsi à notre égard, ou s'il faut les regarder comme les ennemis communs de la 473 république. Au reste, Messieurs, rien n'est plus nécessaire qu'une prompte diligence dans l'affaire dont il s'agit, le danger est pressant. Dans des maux qui font à chaque moment de nouveaux progrès, le délai n'est pas de saison, les retardements sont dangereux, il faut prendre ses sûretés, et chercher un prompt remède. C'est pourquoi laissez là les disputes et les longs discours : ordonnez tout présentement ce qui vous paraîtra de plus utile à l'état.  »

VII. Ce discours du tribun jeta tellement l'épouvante dans les esprits, qu'on ne savait plus quel parti prendre. Les sénateurs ayant conféré ensemble, trouvaient qu'il était également périlleux ou d'irriter les tribuns par un refus .ou de leur donner le pouvoir de faire seuls et par eux-mêmes les informations sur une affaire importante qui intéressait tout le public. Enfin Caius Claudius un des consuls, eut quelque soupçon de la mauvaise foi des tribuns, et pénétra dans leurs intrigues et dans leurs vues les plus secrètes. Il se leva de son siège, et parla en ces termes.

« Je ne crains pas, Virginius, que les sénateurs me soupçonnent d'être complice de la conjuration que vous dites qu'on a tramée contre vous et contre le peuple. On n'a garde de s'imaginer, que si je m'oppose à vos demandes, c'est que j'appréhende pour moi ou pour quelqu'un des miens, comme étant coupable du crime dont vous voulez qu'on informe. En effet, ma vie passée me met entièrement à couvert de tout soupçon de cette nature. Je vous dirai donc avec liberté et sans aucun respect humain, ce que je crois de plus avantageux au sénat et  au peuple. Il me paraît que Virginius se trompe de beaucoup, ou pour mieux dire, il se trompe entièrement, s'il croit que quelqu'un de nous dira qu'il n'est pas besoin de faire des perquisitions sur une chose aussi importante et aussi nécessaire que celle dont il s'agit, ou qu'au moins il ne faut pas que les magistrats du peuple soient admis à ces informations, supposé qu'on en fasse. Il n'y a personne, ou assez déraisonnable» ou assez ennemi du peuple pour avoir de semblables sentiments. Si donc on veut savoir ce qui m'oblige de me lever pour combattre des prétentions que je trouve pleines d'équité, et si l'on me demande quel est le but de mon discours, soyez persuadés, Messieurs, que je ne balancerai pas à vous le dire; j'en atteste le grand Jupiter.

VIII. Pour moi, je crois que pour parler judicieusement 474 sur une affaire, tout homme sage doit remonter jusqu'à la source, examiner les commencements avec attention, et considérer le but de chaque chose : car tel est le commencement et le premier but d'une affaire, tels aussi doivent être les discours de celui qui la discute. Sur ce principe, Messieurs, voyons ce qui fait agir les tribuns, examinons quelles ont été d'abord leurs premières vues. Sous notre consulat ils n'ont pu venir à bout de leurs entreprises, que nous avions fait échouer dès l'année précédente. Nous y avons mis des obstacles invincibles, le peuple même s'est ralenti, et devenu moins ardent, ils ne l'ont plus trouvé si favorable à leurs desseins. Qu'ont-ils fait après cela? Ils ont cherché de nouveaux moyens pour vaincre votre résistance, et pour obliger le peuple à les soutenir dans tous leurs projets. Mais n'ayant point trouvé de voies légitimes pour réussir dans ces deux choses, ils ont fait plusieurs tentatives, ils se sont donné mille mouvements, ils ont tourné et retourné l'affaire sur tous les sens enfin après bien des intrigues et des consultations, ils ont raisonné de cette manière. Feignons, ont-ils dit, que quelques-uns des plus apparents de cette ville se sont ligués pour dépouiller le peuple de ses pouvoirs, et qu'ils ont résolu d'égorger ceux qui le protègent. Quand nous aurons semé ces bruits pendant quelque temps dans la ville de Rome, et qu'ils auront fait impression sur les esprits, qui saisis de crainte se persuaderont aisément ce qu'ils appréhendent, nous trouverons le moyen de nous faire rendre des lettres par quelque inconnu en présence de plusieurs témoins. Ensuite noua irons au sénat, nous y porterons nos plaintes, nous gémirons, et nous ferons éclater nos ressentiments, et nous lui demanderons la permission de faire des informations sur ce qu'on nous aura mandé. Si les patriciens nous la refusent, nous prendrons de là occasion de leur faire un crime auprès du peuple : par ce moyen tous les plébéiens irrités contre eux, seront prêts à exécuter tout ce que nous voudrons. Si au contraire ils nous l'accordent, nous poursuivrons comme coupables de trahison les plus illustres du sénat: : nous n'épargnerons ni les jeunes ni les plus anciens : nous nous déferons enfin des plus adents à s'opposer à nos desseins. La crainte d'être punis les obligera ou à sortir de la ville, ou à s'accommoder avec nous, ou à nous promettre de ne plus traverser nos entreprises: par cet artifice, nos adversaires réduits à un très-petit nombre, ne seront plus en état de nous nuire.

475 IX. Tel était, Messieurs, leur dessein : voilà ce qu'ils machinaient contre les premières têtes de l'ordre respectable des sénateurs et des chevaliers pendant tout le temps que vous les avez vus tenir séance et délibérer ente 'eux. Il ne faut pas un long discours pour vous faire voir que ce que j'avance est véritable. Dites-nous, Virginius, et vous tous qui vous croyez menacés de si grands périls, qui sont ces étrangers de qui vous avez reçu des lettres ? Dans quel pays demeurent-ils ? D'où vous connaissent- ils? Comment ont-ils su les délibérations et les complots qu'on fait ici ? Que différez-vous de le dire ? Pourquoi promettre de les nommer bientôt ? Ne devriez-vous pas déjà l'avoir fait ? Mais qui est celui qui vous a donné ces lettres ? Que ne le produisiez-vous en plein sénat, afin que nous commencions par lui demander si ce que vous dites est fondé sur la vérité, ou si c'est un de vos stratagèmes, comme je m'en doute ? Et ces indices que vous prétendez avoir au dedans, qui, selon vous, s'accordent entièrement à ce qu'on vous mande par vos lettres, de quelle nature sont-ils ? Qui est-ce qui vous les a donnés ? Pourquoi ne pas produire vos preuves ?  A quoi sert-il de les tenir secrètes ? Je vois votre embarras : c'est qu'il est impossible de trouver des preuves, d'une chose qui n'est point et qui ne fera jamais.

X. Voila, Messieurs, des indices, non pas d'une conjuration formée contre les tribuns, mais de leur mauvaise intention et des pièges secrets qu'ils nous tendent, la chose parle d'elle-même. Mais vous en êtes la cause: prenez-vous. en donc à vous mêmes, vous qui leur en avez tant souffert d'abord, vous qui avez armé de tant de pouvoir la fureur de ces magistrats, vous qui leur avez permis l'an passé de juger  Caeson Quintius sur de fausses accusations ; vous enfin qui vous êtes laissé enlever dans la personne de ce jeune patricien, le plus grand défenseur de l'Aristocratie. C'est pour cela qu'ils ne gardent plus aucunes mesures : ils n'en veulent pas seulement à quelque noble en particulier, ils attaquent tout le corps des patriciens : ils ne seront point contents qu'ils n'aient chassé de Rome tous les gens de bien. Mais ce qu'il y a de plus criant, c'est qu'ils ne peuvent souffrir que nous leur résistions. Ils nous ferment la bouche, ils nous intimident, et le premier qui ose se déclarer contre eux, ils le rendent suspect, ils le calomnient, ils l'épouvantent par leurs menaces, ils l'accusent d'être corn- 476 plice des plus noires intrigues, ils le traitent d'ennemi du peuple, ils l'assignent à comparaître à son tribunal  et à rendre compte de ce qui a été dit dans vos assemblées. Mais il viendra quelque occasion plus favorable pour parler de cette matière. Quant à présent j'abrégerai le discours, et je ne m'étendrai pas davantage à contester. Je vous conseille d'observer les tribuns comme des perturbateurs du repos public ; défiez-vous d'eux, éclairez leur conduite de peur qu'ils ne jettent les semences de quelque grand malheur. Ce que je déclare en votre présence, je ne le cacherai pas au peuple : je lui dirai la même chose en pleine assemblée avec une entière liberté, et je lui ferai voir qu'il n'est menacé d'aucun péril, si ce n'est de la part de ses magistrats, esprits fourbes et trompeurs, qui sous les apparences d'un zèle ardent pour le bien public, cachent la haine la plus outrée. »

XI. Ce discours du consul fut suivi des acclamations de tout le sénat :on le combla de louanges, et sans laisser parler les tribuns, on renvoya l'assemblée. Virginius ayant convoqué le peuple, se déchaîne fortement contre le sénat et contre les consuls. Claudius lui répond sur le champ, et répète le même discours qu'il avait prononcé dans le sénat. Les plus raisonnables d*entre les plébéiens, s'aperçoivent alors qu'on veut les intimider par de vaines terreurs, tandis que les plus légers et les moins sensés se confirment dans leur première opinion, persuadés que les faux bruits qu'on a répandus sont autant de vérités. Les plus médians citoyens qui ne demandaient que le changement, profitaient volontiers de cette occasion pour exciter des troubles et pour allumer le feu de la sédition, sans de mettre en peine d'éclaircir le fait, ou d'examiner si leur crainte était bien fondée.

XII. Pendant que Rome était ainsi agitée, un certain Appius Erdonius, Sabin de nation, homme de naissance et puissant en richesses, entreprit de détruire la puissance Romaine, soit pour s'ériger en tyran, soit pour relever l'empire de sa nation, soit enfin pour se faire connaître par ses belles actions. Il communiqua son dessein à plusieurs de ses amis, il leur en traça le plan, et leur dit de quelle manière il de proposait de l'exécuter. Quand il vit qu'ils entraient dans sa pensée, il ramassa tous ses clients et les plus déterminés de ses do- 477 mestiques, donc il fit en peu de temps une armée d'environ quatre mille hommes. Apres les avoir fournis de provisions, d'armes, et de toutes les autres choses nécessaires pour une expédition, il les embarqua, dans des bateaux sur le Tibre, et aborda à l'endroit de Rome où est le Capitole, qui n'est pas éloigné d'un stade entier du lit du fleuve. Il était alors environ minuit ; un profond silence régnait dans toute la ville. Erdonius profitant de l'occasion fait promptement descendre ses troupes. Il entre par la porte qu'il trouve ouverte, et s'empare de la colline : car il y a au Capitole une certaine porte sacrée, on l'appelle Carmentale, et on la laisse toujours ouverte par un ordre exprès de l'oracle. De là étant monté jusqu'à la forteresse qui tient au Capitole, il s'en empare aussi. Son dessein était après s'être rendu maître des places fortes, d'y recevoir les exilés, d'inviter les esclaves à recouvrer leur liberté, de promettre aux obérés l'abolition de leurs dettes, et de procurer toutes sortes d'avantages aux autres citoyens qui se voyant dans l'humiliation, haïssaient les plus puissants, leur portaient envie, et ne demandaient que le changement. Les brouilleries qui régnaient à Rome, lui faisaient espérer de réussir dans tous ses projets. Il se flattait que le peuple ne ferait plus ni amitié ni société avec les patriciens ; et en cas qu'il ne réussît pas par ce moyen, il était dans la résolution d'appeler à son secours une nombreuse armée de Sabins, de Volsques et des autres nations voisines, qui ne demanderaient pas mieux que de secouer le joug insupportable de la puissance Romaine.

XIII. Il fut trompé dans toutes ces espérances qui avaient agréablement flatté son ambition. Ni les esclaves, ni les exilés, ni les pauvres accablés de dettes, ni le menu peuple, ne se réfugièrent point auprès de lui : il ne de trouva aucun des citoyens qui préférât son utilité particulière aux intérêts du public. Les étrangers mêmes dont il attendait de puissants secours, n'eurent pas assez de temps pour faire des préparatifs de guerre. En moins de trois ou quatre jours, toutes les affaires qui avaient jeté la crainte et le trouble parmi les Romains furent terminées.

XIV.  Après que les forteresses eurent été prises, les habitants des environs que les troupes d'Erdonius n'avaient pas tués d'abord, poussèrent de grands cris, et prirent la fuite Alors la plus grande partie du peuple court promptement aux armes, sans savoir encore quel malheur ce tumulte annonçait. Ceux-ci s'emparent des lieux les plus élevés de la ville, ceux-là se portent dans les endroits découverts qui étaient en grand nombre : les autres occupent les plaines voisines. En même temps ceux qui n'avaient plus de force, et qui étaient cassés de vieillesse, montent avec les femmes sur les toits des maisons, pour accabler de là les ennemis quand ils passeraient car on croyait que toute la ville en était déjà pleine. Dès qu'il fut jour, et qu'on eut appris quels endroits de la ville étaient déjà occupés, et par quel ennemi, les consuls se rendent à la place publique, et appellent les citoyens pour leur faire prendre les armes.

XV. D'un autre côté les tribuns convoquent une assemblée du peuple:. ils protestent qu'ils ne veulent pas qu'on fasse rien contre le bien public, mais qu'aussi il leur paraît juste que le peuple avant que de s'exposer à un si dangereux combat, sache précisément à quelles conditions et pour quelle récompense il doit s'y exposer.

« Si donc, disaient-ils, les patriciens vous promettent et veulent s'engager par serment, que cette guerre terminée, ils vous permettront de créer des députés pour faire des lois, et que vous vivrez par la suite dans une parfaite égalité avec la noblesse, joignons nous à eux pour défendre la liberté de la patrie. Mais s'ils ne veulent rien faire de ce qui est juste, pourquoi hasarder notre vie sans espérance d'en tirer aucun avantage ? »

 

XVI. Ce discours fait impression sur l'esprit du peuple : il ne veut plus écouter la voix de ceux qui lui parlent d'autre chose. Claudius alors prend la parole. Il dit qu'on n'a pas besoin du secours de ces citoyens qui ne de portent point à défendre leur patrie de bonne volonté, mais seulement en vue d'une récompense dont les conditions ne sont ni justes ni raisonnables. Qu'il vaut beaucoup mieux que les patriciens prennent eux-mêmes les armes, avec leurs clients et une partie du peuple qui ne refusera pas de de joindre à eux pour assiéger les forteresses. Que si ces forces ne leur paraissent pas suffisantes, ils peuvent appeler les Latins et les Hérnïques, ou même 479 promettre la liberté aux esclaves s'il est nécessaire, et qu'enfin il est plus à propos de tenter tout autre moyen, que de mendier le secours de ces citoyens, qui dans des temps si fâcheux réveillent les vieilles querelles et rappellent le souvenir des anciennes injures. Mais Valerius l'autre consul était d'un avis contraire. Il prétendait qu'il ne convenait pas d'irriter le peuple de plus en plus contre les patriciens, puisqu'il ne l'était déjà que trop ; qu'il fallait céder au temps dans des conjonctures si fâcheuses, qu'avec les ennemis du dehors on pouvait user de la dernière rigueur, mais qu'on ne devait employer que la modération et la douceur envers les citoyens pour apaiser les séditions du dedans. La plupart des sénateurs approuvèrent ce dernier sentiment comme le meilleur. Valerius s'avança au milieu de l'assemblée, et après un discours grave et très sensé, il fit serment que si le peuple soutenait la guerre avec ardeur et que les affaires de la ville revinrent en meilleur état, il permettrait aux tribuns de proposer la loi au peuple pour établir l'égalité entre les citoyens, et qu'il ferait en sorte que ce que les plébéiens auraient décidé, se terminât entièrement sous son consulat. Mais étant proche de sa dernière heure, les destins ne lui permirent pas d'exécuter ses promesses.

XVII. L'assemblée congédiée, sur le soir chacun se rendit en diligence au lieu destiné pour donner son nom aux commandants et pour prêter le serment militaire. On employa le reste du jour et la nuit suivante à enrôler les troupes. Le lendemain les consuls rangèrent les capitaines sous les étendards sacrés, et une grande foule de gens de la campagne se rendit auprès d'eux.

XVIII. Tous les préparatifs achevés en très peu de  temps, les consuls partagèrent leurs troupes, et en tirèrent le commandement au sort. Il échut à Claudius de faire la garde devant les murailles de peur que les assiégés ne reçussent quelque secours de dehors,  car on appréhendait qu'il n'y eût de grands mouvements, et que les ennemis par une ligue générale ne vinssent fondre sur les Romains. Le sort donna à Valerius le soin d'assiéger les forteresses. On mit aussi des commandants dans tous les autres lieux de défense, pour garder le dedans de la ville. On posta des corps de garde dans les rues qui conduisent tau capitole pour fermer les avenues aux escla-  480  ves et aux plus pauvres des citoyens, afin qu'ils ne pussent ni déserter ni se joindre à l'ennemi, car on appréhendait alors une révolte de la canaille.

XIX. Il ne vint aucun secours aux Romains de la part des alliés, excepté des Tusculans, qui la nuit même que les ennemis étaient arrivés, entendirent un grand fracas, firent tous leurs préparatifs, et vinrent en diligence au secours du peuple Romain sous la conduite de Lucius Mamilius homme d'expédition et plein de bravoure, qui était alors revêtu de la souveraine puissance dans leur ville. Ces Tusculans furent les seuls qui donnèrent des marques de leur fidélité et qui s'exposèrent au péril avec Valerius. Ils montrèrent beaucoup d'ardeur et de bravoure dans l'action, et on vint enfin à bout dans ce combat de reprendre la forteresse du Capitole. L'attaque se donna par tous les côtés. Les uns de dessus les maisons voisines, y lançaient avec la fronde des vases pleins de bitume et de poix enflammée. Les autres qui avaient ramassé des fagots de sarments, élevèrent des échafauds auprès de la roche escarpée, et mirent le feu au tas de sarments, secondés par un vent favorable qui poussait les flammes contre la citadelle. D'un autre côté les plus hardis serrant leurs bataillons, montèrent en haut par des chemins pratiqués à force de travail. Mais leur grand nombre qui était de beaucoup supérieur aux assiégés ne leur donnait aucun avantage. Obligés de grimper par des sentiers étroits, l'ennemi qui avait une grande facilité pour les accabler d'en haut à coups de pierre, pouvait avec une poignée de monde faire tête a une multitude de combattants. La persévérance même qu'ils avaient acquise pendant de combats, leur était alors inutile. Il fallait passer par des endroits difficiles et de raidir sur le penchant d'une montagne où il était aisé de les renverser. Ils n'avaient pas la liberté ni de signaler leur valeur par un combat de pied ferme, ni de se mesurer de près avec l'ennemi: tout ce qu'ils pouvaient faire, était de se battre au loin à coups de flèches et de javelots. D'ailleurs les coups qu'ils portaient de bas en haut, étaient plus lents et moins bien appliqués, il ne leur était pas possible de faire autrement. Ceux au contraire qu'on leur portait de haut en bas, étaient d'autant plus forts, que la pesanteur naturelle des armes et des pierres les faisait tomber avec impétuosité. 481 Les assiégeants néanmoins, ne se rebutaient point de toutes ces difficultés: ils résistaient aux fatigues, supportaient ce mal nécessaire avec une fermeté opiniâtre, et n'interrompaient leurs travaux ni jour ni nuit. Enfin les assiégés manquant de traits et de forces, la citadelle fut prise d'assaut le troisième jour de l'attaque. Les Romains perdirent à ce siège un grand nombre de braves, entre autres leur consul, qui de l'aveu de  tout le monde signala son courage au-dessus de tous les combattants. Ce grand capitaine tout percé de coups, ne cessa de s'exposer au péril, jusqu'à ce que montant à l'escalade une grosse pierre lui enleva en même temps et la vie et la victoire

XX. La citadelle prise, Erdonius extrêmement robuste de corps et plein de bravoure, après avoir étendu autour de lui un nombre incroyable de corps morts, fut enfin accablé sous une multitude de traits et y perdit la vie. Quant au reste de ses soldats qui s'étaient emparés de la citadelle, quelques-uns, mais en petit nombre, furent faits prisonniers : la plupart des autres de donnèrent la mort de leur propre main, ou se précipitèrent du haut des rochers.

XXI. A peine cette guerre de brigands fut-elle terminée, que les tribuns recommencèrent à jeter des semences de sédition. Ils sommèrent le consul qui restait en vie, d'exécuter les promesses qui leur avaient été faites au sujet d'une nouvelle loi par son collègue Valérius mort dans la précédente bataille. Claudius tira l'affaire en longueur pendant quelque temps, et pour les amuser, tantôt il purifiait la ville .tantôt il offrait aux dieux des sacrifices d'action de grâces, tantôt il divertissait le peuple par des jeux et des spectacles. Enfin après avoir épuisé tous les prétextes, ne pouvant plus éluder leurs poursuites, il dit qu'il fallait élire un consul à la place de Valerius-, que sans cela tout ce qu'il pourrait faire lui seul ne serait ni légitime ni ratifié, au lieu que ce qu'ils détermineraient tous deux d'un commun accord aurait autorité et force de loi. Ayant donc éludé les instances des tribuns par de semblables excuses, il indiqua le jour des comices dans lesquels il devait 482 se nommer un collègue, et pendant cet intervalle les principaux du sénat délibérèrent secrètement entre eux sur le choix de celui qu'ils devaient élever au consulat. Quand le temps des comices fut venu, le héraut appela la première classe. Les dix huit centuries de cavaliers et les quatre vingt centuries des gens de pied composées des plus riches citoyens, entrèrent dans le lieu marqué, où elles élurent consul Lucius Quintius [ Cincinnatus. C'était le père de ce Quintius Caeson ] que les tribuns avaient fait sortir de Rome en le citant à leur tribunal pour s'y voir condamner à mort. Après cela, on n'appela. point les autres classes pour donner leurs suffrages, parce que les centuries qui avaient déjà opiné l'emportaient de trois voix sur celles qui restaient. Ainsi le peuple se retira plein de tristesse, très persuadé que c'était un [ grand ] malheur pour lui, qu'un homme qui le haïssait, fut revêtu de la puissance consulaire.

 

XXII. Le sénat envoya aussitôt des députés à Quintius pour l'inviter à venir à Rome prendre possession de sa charge. Quintius était alors actuellement occupé à labourer son champ pour l'ensemencer : il suivait lui-même ses bœufs qui fendaient la terre, n'ayant pour tout habit que ses caleçons et un bonnet sur la tête. Quand il aperçut une foule de Romains qui entraient dans son champ, il arrêta sa charrue et fut longtemps sans savoir qui ils pouvaient être ni pourquoi ils venaient s'adresser à lui. Ensuite un de la troupe qui s'était avancé devant les autres, lui dit de se mettre dans un état plus convenable. Quintius entre dans sa chaumière, prend son habit et va au devant des envoyés. Alors ceux qui le venaient quérir, le saluent tous, non par son nom, mais en qualité de consul : ils le revêtent d'un habit de pourpre, font porter devant lui les faisceaux et autres marques de sa dignité, et le prient de venir à Rome avec eux. Quintius surpris de ce propos, reste quelque temps sans parler, enfin il rompt le silence, et répandant des larmes il leur dit :

« Mon champ restera donc cette année sans être ensemencé, et nous serons 483 en danger de ne pas avoir de quoi vivre.

Ensuite il embrasse sa femme, il lui recommande d'avoir bien soin du ménage, puis il s'achemine vers la ville.

XXIII.  Si j'ai rapporté ces menues circonstances, c'est pour faire voir à tout le monde quels étaient alors les magistrats de Rome, qu'ils travaillaient de leurs mains, qu'ils vivaient frugalement, qu'une juste et innocente pauvreté ne leur faisait point de peine, et que loin d'aspirer à la puissance royale ou de courir après, ils la réfutaient même quand on la leur offrait. On peut juger de là que les hommes de notre siècle différent de ces anciens en plusieurs choses, et qu'ils ont des inclinations entièrement opposées, excepté quelques-uns, mais en très petit nombre, qui soutiennent encore la dignité de cette ville et qui conservent quelque ressemblance avec ceux des premiers temps. Mais en voila assez sur cette matière.

XXIV. Pour revenir à Quintius, dès qu'il fut entré en charge, il commença par réprimer l'ardeur des tribuns qui voulaient introduire de nouveaux règlements et faire passer la loi. Il leur déclara que s'ils ne cessaient de mettre le trouble et la division dans l'état, il publierait une expédition contre les Volsques et obligerait tous les Romains à faire la campagne. Les tribuns le menaçant d'empêcher qu'il ne levât des troupes, il convoqua une assemblée du peuple. Il représenta 484 aux citoyens qu'ils avaient tous fait le serment militaire, que par là ils s'étaient engagés à suivre les consuls à quelque guerre qu'ils les appelassent, à ne point abandonner les étendras, à ne rien faire de contraire à la dignité du peuple Romain, que puisqu'on l'avait revêtu de la puissance consulaire, il userait de ses droits, qu'il les obligerait à lui obéir, et qu' il leur ferait remplir les engagements qu'ils avaient contractés par leur serment. Après avoir parlé de la sorte, il jura qu'il punirait les désobéissants selon toute la rigueur de la loi, puis il ordonna qu'on apportât les drapeaux qui étaient dans les temples :

Et afin, ajouta-t-il, que les tribuns n'aient plus aucune espérance de corrompre le peuple par leurs discours sous mon consulat, je ne ramènerai point l'armée du pays ennemi que tout le temps de ma magistrature ne soit expiré. Attendez-vous donc à passer l'hiver dans le camp, et préparez ce qui vous est nécessaire pour ce temps-là».

Après les avoir intimidés par ces discours, lorsqu'il vit qu'ils étaient devenus plus modestes et qu'ils le priaient de les exempter de faire la campagne, il protesta qu'il ne les laisserait en repos du côté des guerres qu'à condition qu'ils ne remueraient plus qu'il ferait les fonctions de sa charge comme il le jugerait à propos, sans qu'ils le troublassent et qu'ils se rendraient une justice réciproque dans les différends qui pourraient survenir.

 XXV. Les troubles ainsi pacifiés, il fit vider à leur requête les jugements qui avaient été différés depuis longtemps. Il jugea par lui-même la plupart des causes : il garda dans les  décisions une parfaite égalité, et fit justice à tout le monde. Assis tout le jour sur son tribunal, on le trouvait toujours d'un accès facile : doux, et humain envers ceux qui s'adressaient à lui et témoignait à un chacun beaucoup de bonté. Par cette sage conduite il rendit le gouvernement aristocratique si agréable que les citoyens les plus pauvres et les plus méprisables par la bassesse et l'obscurité de leur naissance ne s'adressaient plus aux tribuns, soit pour implorer leur secours contre l'oppression des grands. soit pour demander que par de nouvelles lois on établit l'égalité entre tous les citoyens, tant on était content de l'état présent des affaires et de la conduite du consul qui faisait observer exactement les bonnes lois. Un si paisible gouvernement attirait à Quintius les applaudissements de toute la ville, on ne cessait de le combler de louanges. 485 Mais ce qui lui attira encore plus d'admiration, c'est qu'ayant fait son temps il refusa constamment la dignité de consul qu'on voulait lui continuer pour la seconde année : on ne put jamais l'engager à l'accepter. Le sénat n'oublia rien pour l'empêcher de de démettre de la magistrature ; persuadé que le peuple se laissait volontiers gouverner par un si honnête homme, et que les tribuns ayant été continués dans leur dignité pour la troisième année, il fallait leur opposer un consul qui pût leur imprimer du respect et de la crainte par son air vénérable, et qui arrêtât leurs poursuites au sujet des nouvelles lois. Toutes les instances de cet illustre corps furent inutiles. Quintius protesta qu'il blâmait les tribuns en ce qu'ils refusaient de se démettre, et que pour lui il ne ferait pas la même faute qu'eux. Il convoqua une assemblée du peuple, où après avoir invectivé par un long discours contre ceux qui ne voulaient point de démettre de leurs charges, il jura par les choses les plus sacrées qu'il n'accepterait pas un second consulat qu'il n'eût abdiqué le premier. Ensuite il indiqua le jour des comices, et ayant élu des consuls il de retira dans sa cabane où il continua comme auparavant à vivre du travail de ses mains.

 

CHAPITRE QUATRIEME.

I. Cinquante-unième consulat. Les Aeques prennent la ville de Tusculum. II. Les tribuns par leur opposition retardent l'enrôlement des troupes. III. Les consuls lèvent des soldats et se mettent en campagne pour secourir leurs alliés, IV. Le consul Fabius rétablit les Tusculans dans leur ville. V. Il force le camp des Aeques et des Volques réunis ensemble. VI. Il ravage le pays des Volsques et distribue le butin à ses soldats. VII Cornélius son collègue remporte deux batailles sur les Antiates. Il prend d'assaut la ville d'Antium et fait punir les auteurs de la révolte. VIII. Traité de faix avec les Aeques. Honneurs du triomphe accordés aux deux consuls.

I. [10,20] Κοίντου δὲ Φαβίου Οὐιβολανοῦ παρειληφότος τὴν ὑπατείαν τὸ τρίτον καὶ Λευκίου Κορνηλίου καὶ τελούντων πατρίους ἀγῶνας Αἰκανῶν ἄνδρες ἐπίλεκτοι πλῆθος ἀμφὶ τοὺς ἑξακισχιλίους ὁπλισμῷ τ´ εὐζώνῳ συνεσταλμένοι καὶ ἐν νυκτὶ ποιησάμενοι τὴν ἔξοδον σκότους ἔτι ὄντος ἐπὶ πόλιν ἀφικνοῦνται Τυσκλάνων, ἥ ἐστι μὲν τοῦ Λατίνων ἔθνους, ἀφέστηκε δὲ τῆς Ῥώμης οὐκ ἔλαττον σταδίων ἑκατόν. Εὑρόντες δὲ ὡς ἐν εἰρήνῃ πύλας τε ἀκλείστους καὶ τεῖχος ἀφύλακτον αἱροῦσι τὴν πόλιν ἐξ ἐφόδου μνησικακοῦντες τοῖς Τυσκλάνοις, ὅτι τῇ Ῥωμαίων πόλει τά τε ἄλλα μετὰ προθυμίας συμπράττοντες διετέλουν, καὶ ἐν τῇ πολιορκίᾳ τοῦ Καπιτωλίου μόνοι συνήραντο τοῦ πολέμου. Ἄνδρας μὲν οὐ πολλούς τινας ἐν τῇ καταλήψει διέφθειραν, ἀλλ´ ἔφθασαν ἤδη αὐτοὺς ὑπὸ τὴν ἅλωσιν τῆς πόλεως ὠσάμενοι διὰ τῶν πυλῶν οἱ ἔνδον, χωρὶς ἢ ὅσοι ὑπὸ νόσων ἢ γήρως φυγεῖν ἀδύνατοι ἦσαν, γύναια δὲ καὶ παιδία καὶ θεράποντας αὐτῶν ἠνδραποδίσαντο καὶ τὰ χρήματα διήρπασαν.

II. Ὡς δ´ ἀπηγγέλθη τὸ δεινὸν εἰς τὴν Ῥώμην ἐκ τῶν διαφυγόντων ἐκ τῆς ἁλώσεως, οἱ μὲν ὕπατοι βοηθεῖν ᾤοντο δεῖν τοῖς φυγάσι κατὰ τάχος καὶ τὴν πόλιν αὐτοῖς ἀποδιδόναι, ἀντέπραττον δὲ οἱ δήμαρχοι στρατιὰν οὐκ ἐῶντες καταγράφειν, ἕως ἂν ἡ περὶ τοὺς νόμους διενεχθῇ ψῆφος.

III. Ἀγανακτούσης δὲ τῆς βουλῆς καὶ διατριβὴν λαμβανούσης τῆς στρατείας ἕτεροι παρῆσαν ἀπὸ τοῦ Λατίνων ἔθνους ἀποσταλέντες, οἳ τὴν Ἀντιατῶν πόλιν ἤγγελλον ἐκ τοῦ φανεροῦ ἀφεστηκέναι, μιᾷ χρησαμένων γνώμῃ Οὐολούσκων τε τῶν ἀρχαίων οἰκητόρων τῆς πόλεως καὶ Ῥωμαίων τῶν ἀφικομένων ὡς αὐτοὺς ἐποίκων καὶ μερισαμένων τὴν γῆν. Ἑρνίκων τε ἄγγελοι κατὰ τοὺς αὐτοὺς παρῆσαν χρόνους δηλοῦντες, ὅτι Οὐολούσκων τε καὶ Αἰκανῶν δύναμις πολλὴ ἐξελήλυθε καί ἐστιν ἐν τῇ αὐτῶν ἤδη γῇ. Τούτων ἅμα προσαγγελλομένων οὐδεμίαν ἀναστροφὴν ἔτι ποιεῖσθαι τοῖς ἐκ τοῦ συνεδρίου ἐδόκει, ἀλλὰ πανστρατιᾷ βοηθεῖν καὶ τοὺς ὑπάτους ἀμφοτέρους ἐξιέναι· ἐὰν δέ τινες ἀπολειφθῶσι τῆς στρατείας Ῥωμαίων ἢ τῶν συμμάχων, ὡς πολεμίοις αὐτοῖς χρῆσθαι. Εἰξάντων δὲ καὶ τῶν δημάρχων καταγράψαντες τοὺς ἐν ἡλικίᾳ πάντας οἱ ὕπατοι καὶ τὰς παρὰ τῶν συμμάχων δυνάμεις μεταπεμψάμενοι κατὰ σπουδὴν ἐξῄεσαν ὑπολιπόμενοι φυλακὴν τῇ πόλει τρίτην μοῖραν τῆς ἐπιχωρίου στρατιᾶς.

IV. Φάβιος μὲν οὖν ἐπὶ τοὺς ἐν τῷ Τυσκλάνων ὄντας Αἰκανοὺς τὴν στρατιὰν ἦγε διὰ τάχους. Τῶν δ´ οἱ μὲν πλείους ἀπεληλύθεσαν ἤδη διηρπακότες τὴν πόλιν, ὀλίγοι δέ τινες ὑπέμενον φυλάττοντες τὴν ἄκραν· ἔστι δὲ σφόδρα ἐχυρὰ καὶ οὐ πολλῆς δεομένη φυλακῆς. Τινὲς μὲν οὖν φασι τοὺς φρουροὺς τῆς ἄκρας ἰδόντας ἐξιοῦσαν ἐκ τῆς Ῥώμης τὴν στρατιάν - εὐσύνοπτα γάρ ἐστιν ἐκ μετεώρου τὰ μεταξὺ χωρία πάντα - ἑκόντας ἐξελθεῖν, ἕτεροι δὲ ἐκπολιορκηθέντας ὑπὸ τοῦ Φαβίου καθ´ ὁμολογίαν παραδοῦναι τὸ φρούριον, τοῖς σώμασιν αὐτοῖς ἄδειαν αἰτησαμένους καὶ ζυγὸν ὑποστάντας.

V. [10,21] Ἀποδοὺς δὲ τοῖς Τυσκλάνοις τὴν πόλιν Φάβιος περὶ δείλην ὀψίαν ἀνίστησι τὴν στρατιάν. Καὶ ὡς εἶχε τάχους ἤλαυνεν ἐπὶ τοὺς πολεμίους, ἀκούων περὶ πόλιν Ἀλγιδὸν ἀθρόας εἶναι τάς τε Οὐολούσκων καὶ τὰς Αἰκανῶν δυνάμεις. Ποιησάμενος δὲ δι´ ὅλης νυκτὸς σύντονον ὁδὸν ὑπ´ αὐτὸν τὸν ὄρθρον ἐπιφαίνεται τοῖς πολεμίοις ἐστρατοπεδευκόσιν ἐν πεδίῳ καὶ οὔτε τάφρον περιβεβλημένοις οὔτε χάρακα, ὡς ἐν οἰκείᾳ τε γῇ καὶ καταφρονήσει τοῦ ἀντιπάλου. Παρακελευσάμενος δὲ τοῖς ἀμφ´ αὐτὸν ἀγαθοῖς ἀνδράσι γίνεσθαι πρῶτος εἰσελαύνει μετὰ τῶν ἱππέων εἰς τὴν τῶν πολεμίων παρεμβολήν, καὶ οἱ πεζοὶ συναλαλάξαντες εἵποντο· τῶν δ´ οἱ μὲν ἔτι κοιμώμενοι ἐφονεύοντο, οἱ δ´ ἀρτίως ἀνεστηκότες καὶ πρὸς ἀλκὴν ἐπιχειροῦντες τραπέσθαι, οἱ δὲ πλείους φεύγοντες ἐσκεδάννυντο.

VI. Ἁλόντος δὲ τοῦ στρατοπέδου κατὰ πολλὴν εὐπέτειαν ἐπιτρέψας τοῖς στρατιώταις τὰ χρήματα ὠφελεῖσθαι καὶ τὰ σώματα πλὴν ὅσα Τυσκλάνων ἦν, οὐ πολὺν ἐνταῦθα διατρίψας χρόνον ἐπὶ τὴν Ἐχετράνων πόλιν ἦγε τὴν δύναμιν, ἣ τότε ἦν τοῦ Οὐολούσκων ἔθνους ἐπιφανεστάτη τε κἀν τῷ κρατίστῳ μάλιστα τόπῳ κειμένη. Στρατοπεδεύσας δὲ πλησίον τῆς πόλεως ἐπὶ πολλὰς ἡμέρας κατ´ ἐλπίδα τοῦ προελεύσεσθαι τοὺς ἔνδον εἰς μάχην, ὡς οὐδεμία ἐξῄει στρατιά, τὴν γῆν αὐτῶν ἐδῄου ἀνθρώπων μεστὴν οὖσαν καὶ βοσκημάτων. Οὐ γὰρ ἔφθασαν ἀνασκευασάμενοι τὰ ἐκ τῶν ἀγρῶν αἰφνιδίου γενηθείσης αὐτοῖς τῆς ἐφόδου. Ἐφεὶς δὲ καὶ ταῦτα τοῖς στρατιώταις διαρπάζειν ὁ Φάβιος καὶ πολλὰς ἐν τῇ προνομῇ διατρίψας ἡμέρας ἀπῆγεν ἐπ´ οἴκου τὴν δύναμιν.

VII. Ὁ δ´ ἕτερος τῶν ὑπάτων Κορνήλιος ἐπὶ τοὺς ἐν Ἀντίῳ Ῥωμαίους τε καὶ Οὐολούσκους ἐλαύνων ἐπιτυγχάνει στρατιᾷ πρὸ τῶν ὁρίων αὐτὸν ὑποδεχομένῃ. Παραταξάμενος δὲ αὐτοῖς καὶ πολλοὺς μὲν φονεύσας, τοὺς δὲ λοιποὺς τρεψάμενος ἀγχοῦ τῆς πόλεως κατεστρατοπέδευσεν. Οὐ τολμώντων δὲ τῶν ἐκ τῆς πόλεως οὐκέτι χωρεῖν εἰς μάχην πρῶτον μὲν τὴν γῆν αὐτῶν ἔκειρεν, ἔπειτα τὴν πόλιν ἀπετάφρευε καὶ περιεχαράκου. Τότε δὴ πάλιν ἀναγκασθέντες ἐξῆλθον ἐκ τῆς πόλεως πανστρατιᾷ, πολὺς καὶ ἀσύντακτος ὄχλος, καὶ συμβαλόντες εἰς μάχην ἔτι κάκιον ἀγωνισάμενοι κατακλείονται τὸ δεύτερον εἰς τὴν πόλιν, αἰσχρῶς καὶ ἀνάνδρως φεύγοντες. Ὁ δ´ ὕπατος οὐδεμίαν αὐτοῖς ἀναστροφὴν ἔτι δοὺς κλίμακας προσέφερε τοῖς τείχεσι καὶ κριοῖς ἐξέκοπτε τὰς πύλας. Ἐπιπόνως δὲ καὶ ταλαιπώρως τῶν ἔνδον ἀπομαχομένων οὐ πολλὰ πραγματευθεὶς κατὰ κράτος αἱρεῖ τὴν πόλιν. Χρήματα μὲν οὖν αὐτῶν, ὅσα χρυσὸς καὶ ἄργυρος καὶ χαλκὸς ἐνῆν, εἰς τὸ δημόσιον ἐκέλευσεν ἀναφέρειν, ἀνδράποδα δὲ τοὺς ταμίας παραλαμβάνοντας καὶ τὰ λοιπὰ λάφυρα πωλεῖν· τοῖς δὲ στρατιώταις ἐσθῆτα καὶ τροφὰς καὶ ὅς´ ἄλλα τοιαῦτα ἐδύναντο ὠφελεῖσθαι ἐπέτρεψεν. Ἔπειτα διακρίνας τῶν τε κληρούχων καὶ τῶν ἀρχαίων Ἀντιατῶν τοὺς ἐπιφανεστάτους τε καὶ τῆς ἀποστάσεως αἰτίους - ἦσαν δὲ πολλοί - ῥάβδοις τε ᾐκίσατο μέχρι πολλοῦ καὶ τοὺς αὐχένας αὐτῶν ἐκέλευσεν ἀποτεμεῖν. Ταῦτα διαπραξάμενος ἀπῆγε καὶ αὐτὸς ἐπ´ οἴκου τὴν δύναμιν.

VIII. Τούτοις ἡ βουλὴ τοῖς ὑπάτοις προσιοῦσί τε ἀπήντησε καὶ θριάμβους ἀμφοτέροις καταγαγεῖν ἐψηφίσατο· καὶ πρὸς Αἰκανοὺς πρεσβευσαμένους ὑπὲρ εἰρήνης ἐποιήσατο συνθήκας περὶ καταλύσεως τοῦ πολέμου, ἐν αἷς ἐγράφη, πόλεις τε καὶ χώρας ἔχοντας Αἰκανούς, ὧν ἐκράτουν, ὅτε αἱ σπονδαὶ ἐγίνοντο, Ῥωμαίοις εἶναι ὑπηκόους, ἄλλο μὲν ὑποτελοῦντας μηθέν, ἐν δὲ τοῖς πολέμοις συμμαχίαν ἀποστέλλοντας ὁσηνδήποτε, ὥσπερ καὶ οἱ ἄλλοι σύμμαχοι. Καὶ τὸ ἔτος τοῦτο ἐτελεύτα.

 

I.  L'année suivante, Quintus Fabius Vibulanus fut consul pour la troisième fois avec Lucius Cornélius. Tandis que ces magistrats célébraient des jeux suivant les cérémonies de la patrie, les Aeques avec un corps de troupes d'environ six mille hommes, tous gens d'élite. et armés à la légère, se mettent en marche pendant la nuit. A la faveur des ténèbres, ils arrivent à Tusculum ville des Latins éloignée de cent stades de Rome. Trouvant les portes ouvertes et les remparts sans défense, parce qu'on était en temps de paix, ils prirent la ville d'emblée pour de venger de ce que 486  les Tusculans toujours fidèles dans l'amitié du peuple Romain, avaient été les seuls qui lui eussent prêté main-forte au siège du capitole occupé par les ennemis. Les Aeques tuèrent  beaucoup de monde a la prise de cette ville. Il est vrai que dans le moment de la première irruption, la plupart des habitants sortirent par d'autres portes, excepté ceux qui accablés de maladie ou de vieillesse ne pouvaient absolument s'enfuir. Mais l'ennemi se dédommagea par la prise des femmes, des enfants, des esclaves, et par l'argent et les effets qu'il pilla.

II. La nouvelle de ce malheur portée à Rome par ceux qui s'étaient sauvés, les consuls résolurent de secourir prompt tement les fugitifs et de les rétablir dans leur ville. Mais les tribuns y mirent opposition et ne voulurent pas qu'on enrôlât des troupes que les lois n'eussent été confirmées par les suffrages du peuple.

III.  Pendant ce retardement dont le sénat fut fort indigné, il arriva d'autres députés de la part des Latins, qui donnèrent avis que la ville d'Antium s'était ouvertement soulevée, et que tous les citoyens, tant les Volsques que les Romains qu'on y avait envoyés en colonie en leur donnant une portion des terres, s'étaient unis ensemble dans cette révolte. En même temps on fut averti de la part des Herniques, qu'une nombreuse armée d'Aeques et de Volsques avait ouvert la campagne et paraissait déjà sur leurs terres. Le sénat accablé de tant de mauvaises nouvelles qu'il recevait coup sur coup, ne crut pas devoir différer plus longtemps à remédier au mal. La résolution fut prise de mettre au plutôt toutes les troupes sur pied, d'envoyer les deux consuls en campagne, et de traiter comme ennemis tous ceux des Romains fie des alliés qui refuseraient de s'enrôler. Alors les tribuns mêmes cèdent à l'autorité du sénat : les consuls enrôlent tout ce qui était en âge de servir, ils font venir les secours des alliés, ils de mettent promptement en marche, et ne laissent que la troisième partie de leurs troupes domestiques pour garder [ la ville et ] le pays.

IV. Fabius fait diligence, et à la tête de son armée  marche contre les Aeques qui étaient à Tusculum. Mais la 487 plupart de leurs troupes s'étaient déjà retirées, après avoir pillé la ville, il n'en était resté qu'un petit nombre pour défendre la citadelle, qui bien fortifiée par elle-même, n'avait besoin que d'une médiocre garnison. Quelques-uns disent que cette garnison se retira d'elle-même de son poste, et que du haut de la citadelle d'où l'on découvre aisément toutes les campagnes qui sont entre les deux villes, ayant aperçu l'armée Romaine, elle n'osa l'attendre. Mais d'autres prétendent que de voyant sur le point d'être forcée par Fabius, elle rendit la place par capitulation, à condition de passer sous le joug, et d'avoir la vie sauve avec la liberté.

V. Fabius ayant rendu la ville aux Tusculans, décampa sur le soir et marcha aux ennemis avec toute la diligence possible ; car il avait appris que toutes les forces des Volsques et des Aeques étaient auprès de la ville d'Algide. Après avoir marché toute la nuit sans discontinuer, il se montra sur le point du jour aux ennemis. Ils étaient campés à découvert dans la plaine, sans fossés et sans retranchements, parce qu'ils étaient sur leurs propres terres et qu'ils méprisaient l'ennemi. Sitôt qu'il les aperçoit, ayant exhorté ses soldats à se comporter en gens de cœur, il fond sur leur camp à la tête de sa cavalerie ; l'infanterie suit de près, elle pousse de grands cris. Les uns encore au lit sont égorgés impitoyablement. Les autres se réveillent en sursaut et courent aux armes pour de mettre en défense. L'ennemi les prévient et les passe au fil de l'épée. La plupart prennent la fuite et de dispersent de côté et d'autre.

VI. Le consul ayant pris le camp sans aucune résistance,  permit au soldat de saisir [ l'argent et] les prisonniers, excepté les Tusculans. Après avoir passé là quelques jours, il mène son armée à Ecetre, alors une des plus célèbres villes des Volsques, située dans un lieu avantageux. Il campe devant la place, et y reste plusieurs jours dans l'espérance que les bourgeois de présenteront pour livrer bataille. Enfin lorsqu'il voit que personne n'ose sortir, il ravage leurs campagnes. Elles étaient pleines d'hommes et de bestiaux, car les Ecetrans attaqués à l'improviste, n'avaient pas eu le temps de transporter les effets de la campagne dans un lieu de sûreté. Fabius fait encore à les troupes des largesses de ce butin, et après avoir employé plusieurs jours au pillage, il reprend le chemin de Rome à la tête de son armée.

VII. Cornelius l'autre consul, qui marchait contre les Volsques et contre les Romains établis à Antium, les trouva sur les frontières où ils l'attendaient de pied ferme. Aussitôt qu'il les eût joints, il leur livra bataille, en tua un grand nombre et mit le reste en fuite. De là il va camper devant Antium. Mais les bourgeois n'osant plus sortir de leurs remparts pour tenter un second combat, il commence par désoler le plat pays et à en couper tous les arbres. Ensuite il bloque la ville, et l'environne d'un fossé et d'une palissade. Alors les ennemis obligés de sortir de leurs murailles, paraissent en grand nombre, mais fort mal en ordre. Ils livrent bataille, [ mais avec moins de succès qu'auparavant. ] Ils sont repoussés honteusement, et après avoir été bien battus, ils rentrent comme des lâches dans leurs remparts. Le consul ne leur donne point de relâche,  il fait dresser des échelles contre les murs, il brise les portes à coups de bélier, et fatigue tellement les assiégés par de continuelles attaques qu'il prend la ville d'assaut sans beaucoup de résistance. Tout l'argent, l'or, et le cuivre qu'il y trouve, il le fait porter au trésor public, il ordonne aux questeurs de vendre a l'encan les prisonniers et le reste du butin ; les habits, les provisions de bouche, et autres choses semblables sont abandonnés aux soldats. Il se saisit ensuite des principaux chefs de la révolte qui étaient en grand nombre, tant des Antiaces, que de ceux qui composaient la colonie Romaine, il les condamne à être honteusement battus de verges pendant un temps considérable, et leur fait trancher la tête. Après cette expédition, il revint à Rome avec son armée.

VIII. Comme les consuls approchaient de la ville, le  489 sénat sortit au devant d'eux, et leur décerna à l'un et à l'autre les honneurs du triomphe. A l'égard des Aeques qui avaient envoyé une ambassade pour demander la paix, il fit un traité avec eux, dont les conditions étaient : que les Aeques conservant les villes et les terres qu'ils avaient lors du traité, deviendraient sujets des Romains. Que cependant on ne leur imposait aucun tribut ; mais que dans les guerres qu'on aurait à soutenir, ils s'obligeaient comme les autres alliés, d'envoyer autant de troupes auxiliaires qu'on leur en demandèrent. Ainsi finit cette année.

 

CHAPITRE CINQUIEME.

I. Cinquante-deuxième consulat. II. Les consuls font des levées : ils de mettent en campagne contre les Aeques et les Sabins. III. Cloelius Gracchus général des Sabins défait le territoire de Tusculum. IV. Le sénat lut envoie une ambassade. V. Réponse fière de Gracchus. VI. Seconde ambassade. VI Le consul Minucius se met en campagne : les ennemis l'attirent dans un lieu désavantageux où ils assiègent de toutes parts. VIII. Nautius l'autre consul revient à Rome où il nomme pour dictateur Lucius Cincinnatus qui était retiré pour lors à la campagne. IX. Fabius gouverneur de Rome, députe vers le dictateur ; ce magistrat vient à Rome. X. Le dictateur de met en campagne : il livre bataille aux ennemis, il les repousse dans leur camp et les investit. XI. Les Aeques manquant de vivres, demandent la paix. Le dictateur la leur accorde, à condition qu'ils passeront sous le joug, qu'ils lui livreront la ville de Corbion etc. XII. Il distribue aux troupes une partie du butin, et oblige le consul Minucius à se démettre. XIII. Le dictateur revient à Rome, et reçoit les honneurs du triomphe. XIV. Il refuse les présents que lui offraient le sénat et ses amis, il abdique la dictature et se retire à fa campagne. XV. Retour du consul Nautius.

I. [10,22] Τῷ δ´ ἑξῆς ἐνιαυτῷ Γάιος Ναύτιος τὸ δεύτερον αἱρεθεὶς καὶ Λεύκιος Μηνύκιος παραλαβόντες τὴν ὕπατον ἀρχὴν τέως μὲν ὑπὲρ τῶν πολιτικῶν δικαίων πόλεμον ἐντὸς τείχους ἐπολέμουν πρὸς τοὺς ἅμα Οὐεργινίῳ δημάρχους τοὺς τέταρτον ἔτος ἤδη τὴν αὐτὴν κατασχόντας ἀρχήν.

II. Ἐπεὶ δ´ ἀπὸ τῶν πλησιοχώρων ἐθνῶν πόλεμος ἐπεγένετο τῇ πόλει, καὶ δέος ἦν, μὴ τὴν ἀρχὴν ἀφαιρεθῶσιν, ἀσμένως δεξάμενοι τὸ συμβὰν ἀπὸ τῆς τύχης τὸν στρατιωτικὸν ἐποιοῦντο κατάλογον καὶ μερισάμενοι τριχῇ τάς τε οἰκείας καὶ τὰς παρὰ τῶν συμμάχων δυνάμεις μίαν μὲν ἐν τῇ πόλει μοῖραν κατέλιπον, ἧς ἡγεῖτο Κόιντος Φάβιος Οὐιβολανός, τὰς δὲ λοιπὰς αὐτοὶ παραλαβόντες ἐξῄεσαν διὰ ταχέων, ἐπὶ μὲν Σαβίνους Ναύτιος, ἐπὶ δ´ Αἰκανοὺς Μηνύκιος. Ἀμφότερα γὰρ ταῦτα τὰ ἔθνη κατὰ τὸν αὐτὸν χρόνον ἀφειστήκει τῆς Ῥωμαίων ἀρχῆς, Σαβῖνοι μὲν ἐκ τοῦ φανεροῦ, καὶ μέχρι Φιδήνης πόλεως ἤλασαν, ἧς ἐκράτουν Ῥωμαῖοι - τετταράκοντα δ´ εἰσὶν οἱ διὰ μέσου τῶν πόλεων στάδιοι - Αἰκανοὶ δὲ λόγῳ μὲν φυλάττοντες τὰ τῆς νεωστὶ γενομένης συμμαχίας δίκαια, ἔργῳ δὲ καὶ οὗτοι πράττοντες τὰ τῶν πολεμίων. Ἐπὶ γὰρ τοὺς συμμάχους αὐτῶν Λατίνους ἐστράτευσαν, ὡς οὐ γενομένων αὐτοῖς πρὸς ἐκείνους ὁμολογιῶν περὶ φιλίας.

III. Ἡγεῖτο δὲ τῆς στρατιᾶς Γράγχος Κοίλιος, ἀνὴρ δραστήριος ἀρχῇ κοσμηθεὶς αὐτοκράτορι, ἣν ἐπὶ τὸ βασιλικώτερον ἐξήγαγεν. Ἐλάσας δὲ μέχρι Τύσκλου πόλεως, ἣν Αἰκανοὶ τῷ πρόσθεν ἐνιαυτῷ καταλαβόμενοι καὶ διαρπάσαντες ὑπὸ Ῥωμαίων ἐξεκρούσθησαν, ἀνθρώπους τε πολλοὺς ἐκ τῶν ἀγρῶν συνήρπασε καὶ βοσκήματα, ὅσα κατέλαβε, καὶ τοὺς καρποὺς τῆς γῆς ἐν ἀκμῇ ὄντας ἔφθειρεν.

IV. Ἀφικομένης δὲ πρεσβείας, ἣν ἀπέστειλεν ἡ Ῥωμαίων βουλὴ μαθεῖν ἀξιοῦσα, τί παθόντες Αἰκανοὶ πολεμοῦσι τοῖς Ῥωμαίων συμμάχοις, φιλίας τ´ αὐτοῖς ὀμωμοσμένης νεωστὶ καὶ οὐδενὸς ἐν τῷ μεταξὺ χρόνῳ γενομένου προσκρούσματος τοῖς ἔθνεσι, καὶ παραινούσης τῷ Κοιλίῳ τούς τ´ αἰχμαλώτους αὐτῶν οὓς εἶχεν ἀφιέναι καὶ τὴν στρατιὰν ἀπάγειν καὶ περὶ ὧν ἠδίκησεν ἢ κατέβλαψε Τυσκλάνους δίκην ὑποσχεῖν,

V. Πολὺν μὲν χρόνον διέτριψεν ὁ Γράγχος οὐδ´ εἰς λόγους τοῖς πρεσβευταῖς ἐρχόμενος, ὡς ἐν ἀσχολίαις δή τισι γεγονώς. Ἐπεὶ δ´ οὖν ἔδοξεν αὐτῷ προσάγειν τοὺς πρέσβεις, κἀκεῖνοι τοὺς ἐπισταλέντας ὑπὸ τῆς βουλῆς λόγους διεξῆλθον·

«  Θαυμάζω, φησίν, ὑμῶν, ὦ Ῥωμαῖοι, τί δή ποτ´ αὐτοὶ μὲν ἅπαντας ἀνθρώπους ἡγεῖσθε πολεμίους, καὶ ὑφ´ ὧν οὐδὲν κακὸν πεπόνθατε, ἀρχῆς καὶ τυραννίδος ἕνεκα, Αἰκανοῖς δ´ οὐ συγχωρεῖτε παρὰ τουτωνὶ Τυσκλάνων ἐχθρῶν ὄντων ἀναπράττεσθαι δίκας, οὐθενὸς ἡμῖν διωμολογημένου περὶ αὐτῶν, ὅτε τὰς πρὸς ὑμᾶς ἐποιούμεθα συνθήκας. Εἰ μὲν οὖν τῶν ὑμετέρων ἰδίων ἀδικεῖσθαί τι ἢ βλάπτεσθαι λέγετε ὑφ´ ἡμῶν, τὰ δίκαια ὑφέξομεν ὑμῖν κατὰ τὰς ὁμολογίας· εἰ δὲ περὶ Τυσκλάνων ἀναπραξόμενοι δίκας ἥκετε, οὐθείς ἐστιν ὑμῖν πρὸς ἐμὲ περὶ τούτων λόγος, ἀλλὰ πρὸς ταύτην λαλεῖτε τὴν φηγόν· δείξας αὐτοῖς τινα πλησίον πεφυκυῖαν. »

VI. [10,23] Ῥωμαῖοι δὲ τοιαῦτα ὑβρισθέντες ὑπὸ τοῦ ἀνδρὸς οὐκ εὐθὺς ὀργῇ ἐπιτρέψαντες ἐξήγαγον τὴν στρατιάν, ἀλλὰ καὶ δευτέραν ὡς αὐτὸν ἀπέστειλαν πρεσβείαν καὶ τοὺς Φητιάλεις καλουμένους ἄνδρας ἱερεῖς ἔπεμψαν ἐπιμαρτυρόμενοι θεούς τε καὶ δαίμονας, ὅτι μὴ δυνηθέντες τῶν δικαίων τυχεῖν ὅσιον ἀναγκασθήσονται πόλεμον ἐκφέρειν·

VII. Καὶ μετὰ ταῦτα τὸν ὕπατον ἀπέστειλαν. Ὁ δὲ Γράγχος, ἐπειδὴ τοὺς Ῥωμαίους προσιόντας ἔμαθεν, ἀναστήσας τὴν δύναμιν ἀπῆγε προσωτέρω, τῶν πολεμίων ἐκ ποδὸς ἑπομένων, βουλόμενος αὐτοὺς εἰς τοιαῦτα προαγαγέσθαι χωρία, ἐν οἷς πλεονεκτήσειν ἔμελλεν· ὅπερ καὶ συνέβη. Φυλάξας γὰρ αὐλῶνα περικλειόμενον ὄρεσιν, ὡς ἐνέβαλον εἰς τοῦτον οἱ Ῥωμαῖοι διώκοντες αὐτόν, ὑποστρέφει τε καὶ στρατοπεδεύεται κατὰ τὴν ἐκ τοῦ αὐλῶνος ἔξω φέρουσαν ὁδόν. Ἐκ δὲ τούτου συνεβεβήκει τοῖς Ῥωμαίοις οὐχ ὃν ἐβούλοντο ἐκλέξασθαι τόπον εἰς στρατοπεδείαν, ἀλλ´ ὃν ἔδωκεν αὐτοῖς ὁ καιρός, ἔνθα οὔθ´ ἵπποις χιλὸν εὔπορον ἦν λαμβάνειν, ὄρεσι περικλειομένου τοῦ τόπου ψιλοῖς καὶ δυσβάτοις, οὔθ´ ἑαυτοῖς τροφὰς ἐκ τῆς πολεμίας συγκομίζειν, ἐπειδὴ κατανάλωντο ἃς οἴκοθεν ἔφερον, οὔτε μεταστρατοπεδεύσασθαι τῶν πολεμίων ἀντικαθημένων καὶ κωλυόντων τὰς ἐξόδους. Βιάσασθαί τε προελόμενοι καὶ προελθόντες εἰς μάχην ἀνεκρούσθησαν καὶ πολλὰς πληγὰς λαβόντες εἰς τὸν αὐτὸν κατεκλείσθησαν χάρακα. Ὁ δὲ Κοίλιος ἐπαρθεὶς τῷ προτερήματι τούτῳ περιετάφρευέ τε αὐτοὺς καὶ περιεχαράκου καὶ πολλὰς ἐλπίδας εἶχε λιμῷ πιεσθέντας παραδώσειν αὐτῷ τὰ ὅπλα.

VIII. Ἀφικομένης δ´ εἰς Ῥώμην περὶ τούτων ἀγγελίας Κόιντος Φάβιος ὁ καταλειφθεὶς ἐπὶ τῆς πόλεως ἔπαρχος ἀπὸ τῆς σὺν αὐτῷ στρατιᾶς ὅσον ἦν ἀκμαιότατόν τε καὶ κράτιστον ἐπιλέξας μέρος ἐπὶ συμμαχίαν ἔπεμψε τῷ ὑπάτῳ. Ἡγεῖτο δὲ τῆς δυνάμεως ταύτης Τίτος Κοίντιος ὁ ταμίας ἀνὴρ ὑπατικός. Πρὸς δὲ τὸν ἕτερον τῶν ὑπάτων Ναύτιον ἐπὶ τῆς ἐν Σαβίνοις στρατιᾶς ὄντα γράμματα διαπέμψας τά τε συμβάντα τῷ Μηνυκίῳ διεσάφησε καὶ αὐτὸν ἥκειν ἠξίου διὰ ταχέων. Κἀκεῖνος ἐπιτρέψας τοῖς πρεσβευταῖς τὸν χάρακα φυλάττειν αὐτὸς σὺν ὀλίγοις ἱππεῦσιν εἰς τὴν Ῥώμην ἐλαύνει συντόνῳ χρησάμενος ἱππασίᾳ· εἰσελθὼν δ´ εἰς τὴν πόλιν ἔτι πολλῆς νυκτὸς οὔσης ἐβουλεύετο σὺν τῷ Φαβίῳ καὶ τῶν ἄλλων πολιτῶν τοῖς πρεσβυτάτοις, ὅ τι χρὴ ποιεῖν. Ἐπεὶ δὲ πᾶσιν ἐδόκει δικτάτορος δεῖσθαι ὁ καιρός, ἀποδείκνυσιν ἐπὶ τὴν ἀρχὴν ταύτην Λεύκιον Κοίντιον Κικιννάτον. Καὶ αὐτὸς μὲν ταῦτα διαπραξάμενος ᾤχετο πάλιν ἐπὶ τὸ στρατόπεδον,

IX. [10,24] ὁ δὲ τῆς πόλεως ἔπαρχος Φάβιος ἔπεμπε τοὺς παραληψομένους τὸν Κοίντιον ἐπὶ τὴν ἀρχήν. Ἔτυχε δὲ καὶ τότε ὁ ἀνὴρ τῶν κατ´ ἀγρὸν ἔργων τι διαπραττόμενος· ἰδὼν δὲ τὸν προσιόντα ὄχλον καὶ ὑποπτεύσας ἐπ´ αὐτὸν ἥκειν ἐσθῆτά τ´ ἐλάμβανεν εὐπρεπεστέραν καὶ ὑπαντήσων αὐτοῖς ἐπορεύετο. Ὡς δ´ ἐγγὺς ἦν, ἵππους τ´ αὐτῷ φαλάροις κεκοσμημένους ἐκπρεπέσι προσῆγον καὶ πελέκεις ἅμα ταῖς ῥάβδοις εἰκοσιτέτταρας παρέστησαν ἐσθῆτά τε ἁλουργῆ καὶ τἆλλα παράσημα, οἷς πρότερον ἡ τῶν βασιλέων ἐκεκόσμητο ἀρχή, προσήνεγκαν. Ὁ δὲ μαθών, ὅτι δικτάτωρ ἀποδέδεικται τῆς πόλεως, οὐχ ὅπως ἠγάπησε τηλικαύτης τιμῆς τυχών, ἀλλὰ προσαγανακτήσας εἶπεν·

« Ἀπολεῖται ἄρα καὶ τούτου τοῦ ἐνιαυτοῦ ὁ καρπὸς διὰ τὰς ἐμὰς ἀσχολίας, καὶ πεινήσομεν ἅπαντες κακῶς. »

μετὰ ταῦτα παραγενόμενος εἰς τὴν πόλιν

X. Πρῶτον μὲν ἐθάρρυνε τοὺς πολίτας λόγον ἐν τῷ πλήθει διεξελθὼν ἐξεγεῖραι τὰς ψυχὰς δυνάμενον ἐλπίσιν ἀγαθαῖς ἔπειτα συναγαγὼν ἅπαντας τοὺς ἐν ἀκμῇ, τούς τε κατὰ τὴν πόλιν καὶ τοὺς ἐκ τῶν ἀγρῶν, καὶ τὰς παρὰ τῶν συμμάχων ἐπικουρίας μεταπεμψάμενος ἱππάρχην τ´ ἀποδείξας Λεύκιον Ταρκύνιον, ἄνδρα τῶν ἠμελημένων μὲν διὰ πενίαν, τὰ δὲ πολέμια γενναῖον, ἐξῆγε συγκεκροτημένην ἔχων δύναμιν, καὶ καταλαβὼν τὸν ταμίαν Τίτον Κοίντιον ἀναδεχόμενον αὐτοῦ τὴν παρουσίαν, λαβὼν καὶ τὴν σὺν ἐκείνῳ δύναμιν ἧκεν ἐπὶ τοὺς πολεμίους. Ὡς δὲ κατώπτευσε τὴν τῶν χωρίων φύσιν, ἐν οἷς ἦν τὰ στρατόπεδα, μέρος μέν τι τῆς στρατιᾶς ἐπὶ τοῖς μετεώροις ἔταξεν, ὡς μήτε βοήθεια παραγένοιτο τοῖς Αἰκανοῖς ἑτέρα μήτε τροφαί, τὴν δὲ λοιπὴν δύναμιν αὐτὸς ἔχων προῆγεν ἐκτεταγμένην ὡς εἰς μάχην. Καὶ ὁ Κοίλιος οὐθὲν ὑποδείσας - ἥ τε γὰρ δύναμις ἡ περὶ αὐτὸν ἦν οὐκ ὀλίγη, καὶ αὐτὸς ἐδόκει ψυχὴν οὐ κακὸς εἶναι κατὰ τὰ πολέμια - δέχεται αὐτὸν ἐπιόντα, καὶ γίνεται μάχη καρτερά. Χρόνου δὲ πολλοῦ διελθόντος καὶ τῶν Ῥωμαίων διὰ τοὺς συνεχεῖς πολέμους ἀναφερόντων τὸν πόνον τῶν τε ἱππέων κατὰ τὸ κάμνον μέρος ἀεὶ ἐπιβοηθούντων τοῖς πεζοῖς ἡσσηθεὶς ὁ Γράγχος κατακλείεται πάλιν εἰς τὸν ἑαυτοῦ χάρακα. Καὶ μετὰ τοῦθ´ ὁ Κοίντιος περιταφρεύσας αὐτὸν ὑψηλῷ χάρακι καὶ πύργοις πυκνοῖς περιλαβών, ἐπεὶ κάμνοντα ἔμαθε τῶν ἀναγκαίων τῇ σπάνει, αὐτός τε προσβολὰς ἐποιεῖτο συνεχεῖς πρὸς τὸν χάρακα τῶν Αἰκανῶν καὶ τῷ Μηνυκίῳ προσέταξεν ἀπὸ τῶν ἑτέρων ἐξιέναι μερῶν.

XI. Ὥστε ἠναγκάσθησαν οἱ Αἰκανοὶ τροφῆς τε ἀπορούμενοι καὶ συμμάχων βοήθειαν ἀπεγνωκότες πολιορκούμενοί τε πολλαχόθεν ἱκετηρίας ἀναλαβόντες ἐπιπρεσβεύεσθαι πρὸς τὸν Κοίντιον περὶ φιλίας {διαλεγόμενοι}. Ὁ δὲ τοῖς μὲν ἄλλοις Αἰκανοῖς ἔφη σπένδεσθαι καὶ διδόναι τοῖς σώμασι τὴν ἄδειαν τά τε ὅπλα ἀποθεμένοις καὶ καθ´ ἕνα διεξιοῦσιν ὑπὸ ζυγόν, Γράγχῳ δὲ τῷ ἡγεμόνι τῶν πολεμίων καὶ τοῖς σὺν ἐκείνῳ βουλεύσασι τὴν ἀπόστασιν ὡς πολεμίοις χρήσασθαι, ἐκέλευσέ τε αὐτοῖς ἄγειν τοὺς ἄνδρας δεδεμένους. Ὑπομενόντων δὲ ταῦτα τῶν Αἰκανῶν τελευταῖον αὐτοῖς ἐκεῖνο προσέταξεν· ἐπειδὴ Τύσκλον πόλιν Ῥωμαίων σύμμαχον ἐξηνδραποδίσαντο καὶ διήρπασαν οὐδὲν ὑπὸ Τυσκλάνων παθόντες κακόν, ἀντιπαρασχεῖν ἑαυτῷ πόλιν τῶν σφετέρων, Κορβιῶνα, τὰ ὅμοια διαθεῖναι. Ταύτας λαβόντες τὰς ἀποκρίσεις οἱ πρέσβεις τῶν Αἰκανῶν προῄεσαν καὶ μετ´ οὐ πολὺ παρῆσαν ἄγοντες τὸν Γράγχον καὶ τοὺς σὺν αὐτῷ δεδεμένους· αὐτοὶ δὲ τὰ ὅπλα θέντες ἐξέλιπον τὴν παρεμβολὴν διαπορευόμενοι, καθάπερ ὁ στρατηγὸς ἐκέλευσε, διὰ τοῦ Ῥωμαίων χάρακος καθ´ ἕνα ὑπὸ ζυγόν, καὶ τὴν Κορβιῶνα κατὰ τὰς ὁμολογίας παρέδοσαν, τὰ ἐλεύθερα σώματα μόνον ἐξελθεῖν αἰτησάμενοι, περὶ ὧν διήλλαξαν τοὺς Τυσκλάνων αἰχμαλώτους.

XII. [10,25] Παραλαβὼν δὲ ὁ Κοίντιος τὴν πόλιν τὰ μὲν ἐπιφανέστατα τῶν λαφύρων εἰς Ῥώμην ἐκέλευσε φέρειν, τὰ δ´ ἄλλα πάντα διελέσθαι κατὰ λόχους ἐπέτρεψε τοῖς τε σὺν αὐτῷ παραγενομένοις στρατιώταις καὶ τοῖς ἅμα Κοιντίῳ τῷ ταμίᾳ προαποσταλεῖσι. Τοῖς δὲ μετὰ Μηνυκίου τοῦ ὑπάτου κατακλεισθεῖσιν ἐν τῷ χάρακι μεγάλην ἔφη δεδωκέναι δωρεὰν τὰ σώματα αὐτῶν ἐκ θανάτου ῥυσάμενος.

ταῦτα πράξας καὶ τὸν Μηνύκιον ἀποθέσθαι τὴν ἀρχὴν ἀναγκάσας ἀνέστρεψεν εἰς τὴν Ῥώμην καὶ κατήγαγε λαμπρότατον ἁπάντων ἡγεμόνων θρίαμβον, ἐν ἡμέραις ἑκκαίδεκα ταῖς πάσαις, ἀφ´ ἧς παρέλαβε τὴν ἀρχήν, στρατόπεδόν τε σώσας φίλιον καὶ πολεμίων δύναμιν ἀκμάζουσαν καθελὼν πόλιν τε αὐτῶν πορθήσας καὶ φρουρὰν αὐτῆς ὑπολιπὼν τόν τε ἡγεμόνα τοῦ πολέμου καὶ τοὺς ἄλλους ἐπιφανεῖς ἄνδρας ἁλύσει δεδεμένους ἀγαγών.

XIV. Καὶ ὃ μάλιστα πάντων αὐτοῦ θαυμάζειν ἄξιον, ὅτι τὴν τοσαύτην ἀρχὴν εἰς ἑξάμηνον εἰληφὼς οὐκ ἐχρήσατο παντὶ τῷ νόμῳ, ἀλλὰ συναγαγὼν τὸν δῆμον εἰς ἐκκλησίαν καὶ περὶ τῶν πεπραγμένων λόγον ἀποδοὺς ἐξωμόσατο τὴν ἀρχὴν τῆς τε βουλῆς δεομένης γῆν τε ὅσην ἐβούλετο λαβεῖν ἐκ τῆς δορικτήτου καὶ ἀνδράποδα καὶ χρήματα ἐκ τῶν λαφύρων ἐπανορθῶσαι τὴν πενίαν πλούτῳ δικαίῳ, ὃν ἀπὸ πολεμίων κάλλιστον ἐκτήσατο τοῖς ἰδίοις πόνοις, οὐκ ἠξίωσε, φίλων τε καὶ συγγενῶν δωρεὰς προσφερόντων μεγάλας καὶ ἀντὶ παντὸς ἀγαθοῦ τιθεμένων ἐκεῖνον τὸν ἄνδρα εὖ ποιεῖν, ἐπαινέσας αὐτοὺς τῆς προθυμίας οὐθὲν τῶν διδομένων ἔλαβεν, ἀλλ´ ἀπῆλθε πάλιν εἰς τὸ μικρὸν ἐκεῖνο χωρίον, καὶ τὸν αὐτουργὸν αὐτοῦ ἀντὶ τοῦ βασιλικοῦ μετειλήφει βίον, μεῖζον φρονῶν ἐπὶ πενίᾳ ἢ ἄλλοι ἐπὶ πλούτῳ.

XV. Μετ´ οὐ πολὺν δὲ χρόνον καὶ Ναύτιος, ἅτερος τῶν ὑπάτων, νικήσας Σαβίνους ἐκ παρατάξεως καὶ τῆς χώρας αὐτῶν πολλὴν καταδραμὼν ἀπῆγεν ἐπ´ οἴκου τὰς δυνάμεις.

I. L'année suivante, Caius Nautius fut consul pour la seconde fois avec Lucius Minucius. Etant entrés en charge, ils furent quelque temps en dispute au sujet du droit public avec le tribun Virginius et ses collègues, qui gardaient toujours la même charge, et retenaient le tribunat pour la quatrième année.

II.  Dans la suite, les peuples voisins ayant déclaré la guerre à la ville de Rome, comme il y avait à craindre qu'on ne la dépouillât de sa puissance, ils profitèrent volontiers de l'occasion que la fortune leur présentait pour enrôler des soldats. Ils divisèrent en trois corps toutes leurs troupes, tant domestiques que celles des alliés. De ces trois corps, l'un fut réservé pour garder la ville sous le commandement de Quintus Fabius Vibulanus. Les consuls se mirent promptement en campa- 490 gne avec les deux autres. Nautius marcha contre les Sabins, Minucius contre les Aeques. Ces deux nations s'étaient soulevées en même temps contre le peuple Romain. Les Sabins l'avaient fait ouvertement, et s'étaient avancés avec leurs troupes jusqu'à Fidènes, ville de l'obéissance des Romains, à quarante stades de Rome. Pour ce qui est des lois qu'en apparence ils observassent encore les articles du nouveau traité, ils faisaient néanmoins des hostilités, et avaient déclaré la guerre aux Latins alliés du peuple Romain, sous prétexte qu'ils n'avaient conclu aucune alliance avec eux.

III. Le chef des Aeques dans cette expédition était Gracchus Clœlius, homme entreprenant, qui avait presque élevé à l'autorité royale la dignité dont il était revêtu. Il s'avança jusqu'à la ville de Tusculum, d'où les Romains avaient chassé les Aeques qui s'en étaient emparés, et qui l'avaient pillée l'année précédente. Il enleva un grand nombre de prisonniers dans les campagnes, il se saisit de tous les bestiaux qu'il put trouver, et ruina les grains qui étaient alors en maturité.

IV. Le sénat Romain dépêcha des ambassadeurs, pour lui demander quel sort on avait fait aux Aeques .et ce qui les obligeait à déclarer la guerre aux alliés de la république, sans en avoir reçu aucun mauvais traitement depuis l'alliance conclue. Ces députés avaient ordre d*exhorter Cloelius à relâcher les prisonniers qu'il avait faits, à retirer ses troupes, et à rendre compte des torts qu'il avait causés aux Tusculans.

V. Gracchus sous prétexte de quelques occupations fort pressantes, différa d'abord de leur donner audience. Enfin il les fit venir, et lorsqu'ils lui eurent exposé les ordres qu'ils avaient reçus du sénat :

« Je suis surpris, Romains, leur dit-il, que vous autres qui par la seule passion de dominer et d'étendre votre empire, regardez tous [ les hommes ] comme ennemis, sans en excepter même ceux qui ne vous ont fait aucun tort ; je suis surpris, dis-je, que vous ne puissiez pas souffrir, que les Aeques tirent vengeance des Tusculans leurs ennemis, vu que dans le traité que nous avons fait avec vous on n'a rien stipulé touchant cette nation. Si donc vous vous plaignez que 491 nous vous ayons fait quelque injustice, à vous en particulier et dans les choses qui vous appartiennent, nous sommes prêts de vous en faire raison suivant le traité d'alliance. Mais si vous venez ici demander justice pour les Tusculans, ce n'est pas à moi que{ vous ] devez en parler, adressez-vous à ce hêtre, ajouta-t il en leur montrant un hêtre qui était proche. »

VI. Les Romains quoique piqués d'une réponse si fière, ne suivirent pas d'abord le mouvement de leur colère pour mettre une armée en campagne. Ils envoyèrent à Gracchus une seconde ambassade accompagnée des personnes sacrées qu'on appelle Féciales, prenant les dieux et les génies à témoins que s'ils ne pouvaient obtenir justice, ils seraient obligés de se la faire par eux-mêmes dans une sainte et juste guerre.

VII. Après cette protestation, le consul eut ordre d'ouvrir la campagne. Gracchus informé que l'armée Romaine venait à lui, décampe aussitôt; et voyant que les ennemis le suivent de fort près, il s'avance plus loin. Son dessein était de les attirer dans quelque endroit où il pût avoir l'avantage. Ce stratagème lui réussit en effet. Il aperçoit un vallon fort étroit et entouré de montagnes de toutes parts : c'est pas là qu'il prend sa route. Il remarque que les Romains s'y sont engagés en le poursuivant avec trop d'ardeur : il tourne tête et se poste dans le chemin par lequel on sort delà vallée. Les Romains ainsi enfermés, ne sont plus maîtres du terrain. Ils n'ont point à choisir, il faut de nécessité qu'ils campent dans un lieu désavantageux. Ce poste était très incommode. Serrés de toutes parts par des montagnes stériles et escarpées, ils manquaient de fourrage pour leurs chevaux. Ils avaient consumé toutes les vivres qu'ils avaient apportés avec eux : il n'y avait pas moyen d'en tirer du pays ennemi, ni même de décamper, toutes les avenues étaient occupées, l'ennemi fermait les passages. Il n'y avait point d'autre remède que de se faire jour par la force, ce fut le parti qu'ils prirent. Ils se rangent en bataille, et s'avancent pour livrer le combat. Mais ils sont repoussés avec perte, et chargés de blessures l'ennemi les contraint de se retirer dans leur premier poste. Ce succès enfle le courage de Cloelius; il,[ les] enferme d'un fossé et 492 d'une palissade, il se flatte enfin de les réduire par la famine, à mettre bas les armes pour de rendre à discrétion.

 

VIII. Ces fâcheuses nouvelles portées à Rome, Quintus Fabius qui y était resté en qualité de gouverneur de la ville, détache la fleur de ses troupes, et les envoie au secours du consul sous le commandement de Titus Quintius questeur et homme consulaire En même temps il écrit à Nautius l'autre consul, qui était dans le pays des Sabins avec son armée : il lui mande l'état où de trouve Minucius, et le prie de venir en diligence. Sur cette nouvelle, Nautius laisse la garde du camp à ses lieutenants. Il part avec une partie de sa cavalerie, il vient à Rome à grandes journées, et arrive chez Fabius pendant les ténèbres de la nuit. Ils tiennent conseil avec les plus anciens citoyens sur l'état des affaires : on opine à créer un dictateur. Nautius nomme à cette dignité Lucius Cincinnatus, après quoi il retourne à son camp.

IX. Fabius gouverneur de Rome, députe aussitôt à Quintius pour le revêtir de la dictature. Ce grand homme était encore occupé alors au travail de la campagne. Dès qu'il  aperçut une foule de Romains qui s'approchaient, il ne douta point que ce ne fût à lui même qu'ils en voulaient: il prend un habit plus décent, et va au devant d'eux. Il les joint dans le moment : ceux-ci lui présentent des chevaux magnifiquement enharnachés, ils font marcher devant lui vingt-quatre licteurs avec des haches entourées de faisceaux, et lui donnent des habits de pourpre avec les autres marques de dignité dont les rois avaient été autrefois revêtus. Quintius s'aperçoit alors qu'on l'a créé dictateur de Rome. Mais loin d'accepter avec joie une si grande dignité, il leur dit tout en colère :

« Voilà encore de nouvelles occupations qu'on me donne : je vais donc perdre les fruits de cette année, et il nous faudra .tous souffrir la faim ? »

II suit néanmoins les députés, et prend le chemin de la ville.

X. Arrivé à Rome, il commence par assembler les citoyens, il les rassure, il leur fait un discours pathétique, il relève leur cou rage abattu, et fait renaître l'espérance dans tous les cœurs. Ensuite il ramasse, tant de la ville que de la cam- 493 pagne, tous ceux qui font en âge de porter les armes : il mande les secours des alliés : il choisit pour général de la cavalerie Lucius Tarquinius, peu connu a cause de sa pauvreté, mais d'ailleurs grand homme de guerre et excellent capitaine. Ayant mis une armée sur pied, il [ part et ] va joindre Titus Quintius qui l'attendait : il prend avec lui les troupes de ce questeur, et marche aux ennemis. Après avoir examiné suffisamment la disposition des lieux où étaient les camps, il poste une partie de son armée sur les hauteurs, pour empêcher que les Aeques ne reçoivent des vivres et de nouveaux renforts, puis il s'avance avec le reste de ses troupes pour livrer bataille. Clœlius qui avait une puissante armée, brave d'ailleurs de sa personne et grand capitaine, le reçoit sans s'épouvanter. L'action fut rude de part et d'autre : elle dura quelque temps sans que la victoire se déclarât. Mais les Romains endurcis aux fatigues par une longue habitude, ne se rebutaient point. Nourris dans de continuelles guerres, ils avaient acquis une expérience parfaite : ils savaient se ménager adroitement la victoire. La cavalerie volait au secours de l'infanterie dès qu'elle commençait à plier en quelque endroit : elle fournit soit de nouvelles forces partout où l'ennemi paraissait prendre le dessus. Une si bonne contenance déconcerta les Aeques : Gracchus fut enfin obligé de lâcher pied ; il perdit la bataille, et fut repoussé dans son camp. Le dictateur l'y enferme par de hautes palissades et par un retranchement fortifié de plusieurs tours de distance en distance. Lorsqu'il le voit pressé par la disette des vivres, il le harcelle par de continuelles attaques, tandis que Minucius par son ordre fait des sorties de l'autre côté.

494 XI.  Les Aeques ainsi assiégés de toutes parts, manquant de vivres, et désespérant de recevoir aucun secours de leurs alliés, se déterminent enfin à envoyer des députés vers le dictateur avec des marques de suppliants pour lui demander la paix. Qintius fait réponse qu'il la leur accorde volontiers et qu'il leur remet la punition corporelle s'ils veulent rendre les armes et se résoudre à passer sous le joug : mais que pour Gracchnus leur commandant qui était auteur de la guerre, et ceux qui avaient concerté la révolte avec lui, il prétend qu'on les lui livre pieds et poings liés pour les traiter comme ennemis. Les députés des Aeques ayant accepté ces conditions, il leur demande en outre, que puisqu'ils ont pillé et réduit en servitude la ville de Tusculum alliée des Romains, qui ne leur a fait aucun mal, ils aient à lui livrer en récompense leur ville de Corbion, afin qu'il la traite avec a même rigueur. Les ambassadeurs s'en vont avec cette réponse, bientôt après ils reviennent trouver le dictateur, amenant Gracchus enchaîné avec des complices de sa révolte. Les Aeques mettent bas les armes : ils sortent de leurs lignes, et passent sous le joug au milieu du camp des Romains suivant les ordres de Quintius. Ils livrèrent après cela la ville de Corbion comme ils en étaient convenus ; la seule grâce qu'ils demandèrent, fut qu'on en laissât sortir les personnes de condition libre, et en échange ils relâchèrent les prisonniers de Tusculum.

XII. Le dictateur maître de Corbion, fit porter à Rome les plus riches dépouilles.  Il abandonna le reste du butin aux troupes qu'il avait amenées, et à celles qui avaient été envoyées devant sous Je commandement du questeur. Pour les autres soldats qui s'étaient laissé enfermer dans le camp avec le consul Minucius, il dit qu'ils devaient être assez contents de ce qu'il les avait délivrés de la mort : à l'égard de Minucius, il l'obligea à se démettre de sa charge.

495 Après cette glorieuse expédition, il revint à Rome, où on lui décerna les honneurs du plus magnifique triomphe dont aucun général eût jamais été gratifié. Il les méritait en effet, puisqu'en seize jours de dictature, il avait 496 délivré le camp des Romains, vaincu une nombreuse armée des Aeques, pillé une de leurs villes dans laquelle il laissa une garnison, et qu'enfin il menait enchaîné le général de cette guerre, avec un grand nombre d'autres prisonniers de marque.

XIV. Mais ce qu'on doit le plus admirer dans ce grand personnage, c'est que revêtu pour six mois d'une dignité si relevée, il ne la garda pas tout le temps que la loi le permettait. Il assembla le peuple, rendit compte de sa conduite, et abdiqua la dictature. Le sénat le conjura de prendre autant qu'il voudrait des terres conquises, des esclaves et de l'argent du butin, pour lui rendre la vie plus douce, et pour soulager sa pauvreté par les richesses qu'il avait gagnées sur l'ennemi avec justice et à la sueur de son corps : ses amis même et ses proches, qui n'avaient rien plus à cœur que de le voir plus à son aise, voulurent lui faire des présents considérables. Leurs offres généreuses furent inutiles : il les remercia avec la plus vive reconnaissance, mais il ne voulut pas accepter leurs présents. Il s'en retourna à sa petite maison de campagne, et préféra à une vie de roi la vie pauvre qu'il y menait en travaillant de ses mains, plus content de sa pauvreté que les autres hommes ne le sont de leurs richesses.

497 XV. Quelque temps après, Nautius l'autre consul revint à Rome avec son armée, coût glorieux d'avoir vaincu les Sabins dans une bataille, et ravagé la plus grande partie de leurs terres.

 

CHAPITRE SIXIEME.

I. Cinquante-troisième consulat. II. Les Sabins ravagent les terres du peuple Romain. Les Aeques prennent Corbion et Orsone. III. Le sénat ordonne aux deux consuls de se mettre en campagne. Les tribuns s'opposent à l'enrôlement des troupes. IV. Ils font jouer de nouveaux renforts. V. Assemblée du sénat. Avis de Lucius Quintius Cincinnatus; qu'il faut remettre toutes les contestations à un autre temps pour marcher aux ennemis. VI. Les consuls assemblent le peuple. Discours du consul Horatius : que les tribuns ayant soulevé le peuple contre le sénat, les patriciens ne laisseront pas de repousser les ennemis avec le secours des citoyens les mieux intentionnés pour le salut de la république etc. VII. Les patriciens fondent en larmes et les plébéiens en sont attendris. Le consul poursuit son discours. VIII. Discours du tribun Virginius que les tribuns et le peuple n'abandonnent point les patriciens ; qu'ils demandent seulement une grâce au sénat. IX. On assemble le sénat. Le tribun demande qu'il soit permis au peuple de créer dix tribuns an lieu de cinq. X. Gaius Claudius est le seul qui s'y oppose. XI. Tous les autres sénateurs opinent à accorder au peuple la grâce qu'il demandait ; on fait le sénatus-consulte, et on désigne dix tribuns pour l'année suivante. XII. Les deux consuls mettent des troupes à la campagne .

I [10,26] Μετὰ δὲ τούτους ὀλυμπιὰς μὲν ἦν ὀγδοηκοστὴ καὶ πρώτη, ἣν ἐνίκα στάδιον Πολύμναστος Κυρηναῖος, Ἀθήνησι δὲ ἄρχων Καλλίας, ἐφ´ οὗ τὴν ὕπατον ἀρχὴν ἐν Ῥώμῃ παρέλαβε Γάιος Ὁράτιος καὶ Κόιντος Μηνύκιος.

II. Ἐπὶ τούτων Σαβῖνοι πάλιν στρατεύσαντες ἐπὶ Ῥωμαίους πολλὴν τῆς χώρας αὐτῶν ἐδῄωσαν, καὶ ἧκον οἱ φυγόντες ἐκ τῶν ἀγρῶν ἀθρόοι κρατεῖσθαι πάντα ὑπ´ αὐτῶν τὰ μεταξὺ Κρουστομερείας τε καὶ Φιδήνης λέγοντες. Αἰκανοί τε οἱ νεωστὶ καταπολεμηθέντες ἐν τοῖς ὅπλοις αὖθις ἦσαν· καὶ οἱ μὲν ἀκμαιότατοι αὐτῶν νυκτὸς ἐλάσαντες ἐπὶ Κορβιῶνα πόλιν, ἣν τῷ παρελθόντι ἐνιαυτῷ Ῥωμαίοις παρέδοσαν, τήν τε φρουρὰν τὴν ἐν αὐτῇ κοιμωμένην εὑρόντες κατέσφαξαν πλὴν ὀλίγων, οἳ ἔτυχον ἀφυστεροῦντες, οἱ δὲ λοιποὶ μεγάλῃ χειρὶ στρατεύσαντες ἐπὶ πόλιν Ὀρτῶνα τοῦ Λατίνων ἔθνους ἐξ ἐφόδου καταλαμβάνονται, καὶ ὅσα Ῥωμαίους οὐχ οἷοί τε ἦσαν ἐργάσασθαι, ταῦτα δι´ ὀργὴν τοὺς συμμάχους αὐτῶν διέθεσαν. Τοὺς μὲν γὰρ ἐν ἥβῃ πάντας, πλὴν εἴ τινες διέφυγον εὐθὺς ἁλισκομένης τῆς πόλεως, ἀπέκτειναν, γυναῖκας δὲ καὶ παῖδας αὐτῶν καὶ τὰ γηραιὰ τῶν σωμάτων ἠνδραποδίσαντο, καὶ τῶν χρημάτων ὅσα δύναμις ἦν αὐτοῖς φέρειν συσκευασάμενοι κατὰ σπουδήν, πρὶν ἅπαντας ἐπιβοηθῆσαι Λατίνους, ἀνέστρεψαν.

III. Τούτων δὲ ἅμα προσαγγελλομένων ὑπό τε Λατίνων καὶ τῶν ἐκ τῆς φρουρᾶς διασωθέντων ἡ μὲν βουλὴ στρατιὰν ἐκπέμπειν ἐψηφίσατο καὶ τοὺς ὑπάτους ἀμφοτέρους πορεύεσθαι· οἱ δὲ περὶ τὸν Οὐεργίνιον δήμαρχοι πέμπτον ἔτος ἐπὶ τῆς αὐτῆς ὄντες ἐξουσίας ἐκώλυον, ὥσπερ καὶ ἐν τοῖς πρότερον ἐποίουν ἔτεσιν, ἐνιστάμενοι ταῖς στρατολογίαις τῶν ὑπάτων, τὸν ἐντὸς τείχους πρῶτον ἀξιοῦντες καταλυθῆναι πόλεμον ἀποδοθείσης τῷ δήμῳ τῆς περὶ τοῦ νόμου διαγνώσεως, ὃν ὑπὲρ τῆς ἰσηγορίας εἰσέφερον, ὅ τε δῆμος αὐτοῖς συνελάμβανε πολλοὺς κατὰ τῆς βουλῆς καὶ ἐπιφθόνους διεξιοῦσι λόγους. Ἑλκομένου δὲ τοῦ χρόνου καὶ οὔτε τῶν ὑπάτων ὑπομενόντων προβουλεῦσαί τε καὶ εἰς τὸν δῆμον ἐξενεγκεῖν τὸν νόμον, οὔτε τῶν δημάρχων συγχωρῆσαι βουλομένων τὴν καταγραφὴν καὶ τὴν ἔξοδον τῆς στρατιᾶς γενέσθαι, λόγων τε πολλῶν καὶ κατηγοριῶν, ἃς ἐποιοῦντο κατ´ ἀλλήλων ἔν τε ταῖς ἐκκλησίαις καὶ ἐπὶ τῆς βουλῆς μάτην ἀναλισκομένων,

IV. Ἑτέρα τις εἰσαχθεῖσα ὑπὸ τῶν δημάρχων ἐπὶ τῇ βουλῇ πολιτεία καὶ παρακρουσαμένη τὸ συνέδριον, τὴν μὲν τότε κατέχουσαν στάσιν ἐπράυνεν, ἑτέρων δὲ πολλῶν καὶ μεγάλων ἐγένετο πλεονεκτημάτων αἰτία τῷ δήμῳ. Διηγήσομαι δὲ καὶ ταύτην τὴν δυναστείαν ὃν τρόπον ὁ δῆμος ἔλαβε.

V. [10,27] Φθειρομένης καὶ διαρπαζομένης τῆς τε Ῥωμαίων καὶ τῶν συμμάχων γῆς, καὶ τῶν πολεμίων ὡς δι´ ἐρημίας ἐλαυνόντων κατ´ ἐλπίδα τοῦ μηδεμίαν ἐπ´ αὐτοὺς ἐξελεύσεσθαι δύναμιν διὰ τὴν κατέχουσαν ἐν τῇ πόλει στάσιν, οἱ μὲν ὕπατοι τὴν βουλὴν συνήγαγον, ὡς περὶ τῶν ὅλων ἔσχατον τοῦτο βουλευσόμενοι. ῥηθέντων δὲ πολλῶν λόγων πρῶτος ἐρωτηθεὶς γνώμην Λεύκιος Κοίντιος, ὁ τῷ παρελθόντι γενόμενος ἔτει δικτάτωρ, ἀνὴρ οὐ μόνον τὰ πολέμια δεινότατος τῶν καθ´ ἑαυτόν, ἀλλὰ καὶ τὰ πολιτικὰ δοκῶν εἶναι φρονιμώτατος, γνώμην ἀπεφήνατο τήνδε· μάλιστα μὲν πείθειν τούς τε δημάρχους καὶ τοὺς ἄλλους πολίτας τὴν μὲν ὑπὲρ τοῦ νόμου διάγνωσιν οὐθὲν ἐν τῷ παρόντι κατεπείγουσαν εἰς ἑτέρους ἀναβαλέσθαι καιροὺς ἐπιτηδειοτέρους, τὸν δ´ ἐν χερσὶν ὄντα καὶ ὅσον οὔπω τῇ πόλει πλησιάζοντα πόλεμον ἄρασθαι πάσῃ προθυμίᾳ, καὶ μὴ περιιδεῖν τὴν μετὰ πολλῶν κτηθεῖσαν ἡγεμονίαν πόνων αἰσχρῶς καὶ ἀνάνδρως ἀπολομένην. Ἐὰν δὲ μὴ πείθηται ὁ δῆμος, τοὺς πατρικίους ἅμα τοῖς πελάταις καθοπλισαμένους τῶν τ´ ἄλλων πολιτῶν παραλαβόντας, οἷς ἦν ἑκοῦσι συνάρασθαι τοῦ καλλίστου ὑπὲρ τῆς πατρίδος ἀγῶνος, χωρεῖν προθύμως ἐπὶ τὸν πόλεμον θεούς, ὅσοι φυλάττουσι τὴν Ῥωμαίων πόλιν, ἡγεμόνας τῆς ἐξόδου ποιησαμένους. Συμβήσεσθαι γὰρ αὐτοῖς δυεῖν καλῶν ἔργων καὶ δικαίων θάτερον, ἢ νίκην ἐξενέγκασθαι πασῶν ὧν αὐτοί ποτε ἢ οἱ πατέρες ἐξηνέγκαντο λαμπροτάτην, ἢ περὶ τῶν ἐν αὐτῇ καλῶν εὐψύχως ἀγωνιζομένοις ἀποθανεῖν. Ταύτης μέντοι τῆς καλῆς πείρας οὔτ´ αὐτὸς ἀπολείψεσθαι ἔφη, ἀλλ´ ἐν ἴσῳ τοῖς κράτιστα ἐρρωμένοις παρὼν ἀγωνιεῖσθαι, οὔτε τῶν ἄλλων τινὰ πρεσβυτέρων, οἷς ἐστιν ἐλευθερίας τε καὶ δόξης ἀγαθῆς λόγος.

VI. [10,28] Ὡς δὲ καὶ τοῖς ἄλλοις ἅπασι ταῦτ´ ἐδόκει, καὶ οὐθεὶς ἦν ὁ τἀναντία ἐρῶν, οἱ μὲν ὕπατοι τὸν δῆμον εἰς ἐκκλησίαν συνεκάλουν. Συνελθόντος δ´ ὡς ἐπὶ καινοῖς ἀκούσμασι παντὸς τοῦ κατὰ τὴν πόλιν ὄχλου παρελθὼν ἅτερος τῶν ὑπάτων Γάιος Ὁράτιος ἐπειρᾶτο πείθειν τοὺς δημοτικοὺς ἑκόντας ὑπομεῖναι καὶ ταύτην τὴν στρατείαν. Ἀντιλεγόντων δὲ τῶν δημάρχων καὶ τοῦ δήμου προσέχοντος αὐτοῖς τὸν νοῦν παρελθὼν πάλιν ὁ ὕπατος εἶπε·

« Καλὸν γ´, ὦ Οὐεργίνιε, καὶ θαυμαστὸν ἔργον ἐξειργάσασθε διασπάσαντες ἀπὸ τῆς βουλῆς τὸν δῆμον· καὶ τὸ μὲν ἐφ´ ὑμῖν εἶναι μέρος πάντ´ ἀπολωλέκαμεν, ὅσα παρὰ τῶν προγόνων παραλαβόντες ἢ τοῖς ἑαυτῶν πόνοις κτησάμενοι κατέσχομεν {ἀγαθά}. Οὐ μὴν ἡμεῖς γ´ ἀκονιτὶ μεθησόμεθα αὐτῶν, ἀλλ´ ἀναλαβόντες τὰ ὅπλα μετὰ τῶν βουλομένων σώζεσθαι τὴν πατρίδα χωρήσομεν ἐπὶ τὸν ἀγῶνα τὰς ἀγαθὰς προβαλλόμενοι τῶν ἔργων ἐλπίδας· καὶ εἴ τις ἄρα θεὸς ἐπισκοπεῖ τοὺς καλοὺς καὶ δικαίους ἀγῶνας, καὶ ἡ τὴν πόλιν τήνδε αὔξουσα ἐκ πολλοῦ τύχη μήπω προλέλοιπεν αὐτήν, κρείττους τῶν ἐχθρῶν ἐσόμεθα· εἰ δέ τις ἄρα ἐνέστηκε δαίμων καὶ ἐναντιοῦται τῇ σωτηρίᾳ τῆς πόλεως, οὔτοι τό γ´ ἐν ἡμῖν εὔνουν καὶ πρόθυμον ἀπολεῖται, ἀλλὰ τὸν ἁπάντων κράτιστον θάνατον αἱρησόμεθα περὶ τῆς πατρίδος. Ὑμεῖς δὲ αὐτοῦ μένοντες οἰκουρεῖτε ἅμα ταῖς γυναιξίν, ὦ καλοὶ καὶ γενναῖοι προστάται τῆς πόλεως, ἐγκαταλιπόντες, μᾶλλον δὲ προδόντες ἡμᾶς, οἷς οὔτ´ ἂν νικήσωμεν ἡμεῖς ὁ βίος ἔσται καλός, οὔτ´ ἂν ἄλλως χωρήσῃ τὰ καθ´ ἡμᾶς ἀσφαλής· εἰ μὴ ἄρα ἐκείνῃ τῇ ψυχρᾷ ἐλπίδι ἐπαίρεσθε, ὡς διαφθαρέντων τῶν πατρικίων ὑμᾶς ἐάσουσιν οἱ πολέμιοι ταύτην ὑπολογιζόμενοι τὴν εὐεργεσίαν, καὶ συγχωρήσουσιν ὑμῖν τὴν πατρίδα καὶ τὴν ἐλευθερίαν καὶ τὴν ἡγεμονίαν καὶ πάντα τἆλλα ἀγαθά, ὅσα νῦν ἔχετε, καρποῦσθαι, ὧν ὑμεῖς ὅτε τὰ ἄριστα ἐφρονεῖτε πολλὴν μὲν γῆν ἀπετέμεσθε, πολλὰς δὲ πόλεις ἐξανδραποδισάμενοι κατεσκάψατε, πολλὰ δὲ καὶ μεγάλα καὶ οὐδ´ ὑπὸ τοῦ παντὸς αἰῶνος ἀφανισθησόμενα τρόπαια καὶ μνημεῖα τῆς ἔχθρας ἀνεστήσατε. Ἀλλὰ τί τῷ δήμῳ ταῦτ´ ἐπιτιμῶ, ὃς οὐδέποτε πονηρὸς ἑκὼν ἐγένετο, μᾶλλον ἢ οὐχ ὑμῖν, ὦ Οὐεργίνιε, τοῖς τὰ καλὰ ταῦτα πολιτευομένοις; ἡμῖν μὲν οὖν, οἷς ἀνάγκη μηδὲν ταπεινὸν φρονεῖν, δέδοκταί τε καὶ οὐθὲν ἔσται τὸ κωλύσον ἄρασθαι τὸν ὑπὲρ τῆς πατρίδος ἀγῶνα, ὑμῖν δὲ τοῖς ἐγκαταλιποῦσι καὶ προδοῦσι τὸ κοινὸν ἥξει δίκη τιμωρὸς οὐ μεμπτὴ παρὰ θεῶν, ἐὰν ἄρα διαφύγητε τὴν παρ´ ἀνθρώπων κόλασιν. Ἀλλ´ οὐδὲ ταύτην διαφεύξεσθε· καὶ μή με δεδίττεσθαι ὑπολάβητε, ἀλλ´ εὖ ἴστε, ὅτι οἱ καταλειφθέντες ἡμῶν ἐνθάδε φύλακες τῆς πόλεως, ἐὰν κρείττω τὰ τῶν ἐχθρῶν γένηται, φρονήσουσιν ἃ προσῆκεν αὐτοῖς φρονεῖν. Οὐ γὰρ ἤδη βαρβάροις μέν τισιν ἁλισκομένοις ὑπὸ τῶν πολεμίων εἰς νοῦν ἦλθε μήτε γυναικῶν αὐτοῖς παραχωρῆσαι μήτε παίδων μήτε πόλεων, ἀλλὰ τὰς μὲν ἐμπρῆσαι, τὰς δὲ κατασφάξαι, Ῥωμαίοις δ´ ἄρα, οἷς ἑτέρων ἄρχειν πάτριόν ἐστιν, οὐ παραστήσεται ταῦτα περὶ ἑαυτῶν φρονεῖν; οὐχ οὕτως ἀγεννεῖς ἔσονται, ἀλλ´ ἀφ´ ὑμῶν τῶν ἐχθίστων ἀρξάμενοι τότε χωρήσουσι πρὸς τὰ φίλια. Πρὸς ταῦτα ὁρῶντες ἐκκλησιάζετε καὶ νόμους εἰσφέρετε καινούς

VII. [10,29] Ταῦτα καὶ πολλὰ τούτοις ὅμοια εἰπὼν παρεστήσατο τοὺς πρεσβυτάτους τῶν πατρικίων κλαίοντας, οὓς ἰδόντες πολλοὶ τῶν δημοτικῶν οὐδ´ αὐτοὶ κατέχειν τὰ δάκρυα ἐδύναντο. Γενομένης δὲ πολλῆς συμπαθείας πρός τε τὰς ἡλικίας τῶν ἀνδρῶν καὶ πρὸς τὰς ἀξίας μικρὸν ἐπισχὼν ὁ ὕπατος·

« Οὐκ αἰσχύνεσθε, ἔφησεν, ὦ πολῖται, οὐδὲ κατὰ γῆς δύεσθε, εἰ οἵδε οἱ γέροντες ὑπὲρ ὑμῶν τῶν νέων τὰ ὅπλα ἀναλήψονται, ἀλλ´ ὑπομενεῖτε ἀπολειφθῆναι τούτων ἡγουμένων, οὓς ἀεὶ πατέρας ἐκαλεῖτε; ὦ σχέτλιοι ὑμεῖς καὶ οὐδὲ πολῖται ταύτης ἄξιοι λέγεσθαι τῆς γῆς, ἣν ἔκτισαν οἱ τοὺς πατέρας ἐπὶ τῶν ὤμων ἐνέγκαντες, οἷς καὶ δι´ ὅπλων καὶ διὰ πυρὸς ὁδοὺς ἀσφαλεῖς θεοὶ παρέσχον.  »

VIII. Ὡς δὲ κατέμαθεν ὁ Οὐεργίνιος ἀγόμενον τὸν δῆμον ὑπὸ τῶν λόγων, δεδοικώς, μὴ παρὰ τὴν ἑαυτοῦ γνώμην κοινωνεῖν ὑπομείνῃ τοῦ πολέμου, παρελθὼν εἶπεν·

« Ἡμεῖς οὔτ´ ἐγκαταλείπομεν οὔτε προδίδομεν ὑμᾶς, ὦ πατέρες, οὐδ´ ἂν ἀπολειφθείημεν ὑμῶν, ὥσπερ οὐδὲ πρότερον ἠξιώσαμεν οὐδεμιᾶς ἀπολειφθῆναι στρατείας, ἀλλὰ καὶ ζῆν αἱρούμεθα σὺν ὑμῖν καὶ πάσχειν, ὅ τι ἂν τῷ δαίμονι δοκῇ, μεθ´ ὑμῶν. Πρόθυμοι δ´ ἐν παντὶ καιρῷ περὶ ὑμᾶς γεγονότες ἀξιοῦμεν μετρίας παρ´ ὑμῶν τυχεῖν χάριτος, ὥσπερ τῶν κοινῶν κινδύνων ἰσομοιροῦμεν ὑμῖν, οὕτως καὶ τῶν δικαίων τὸ ἴσον ἔχειν, νόμους καταστησάμενοι φύλακας τῆς ἐλευθερίας, οἷς ἅπαντες ἀεὶ χρησόμεθα. Εἰ δὲ προσίσταται τοῦθ´ ὑμῖν, καὶ οὐκ ἀξιοῦτε τοῖς ἑαυτῶν πολίταις ταύτην συγχωρῆσαι τὴν χάριν, ἀλλὰ θανάτου τιμᾶσθε τὸ μεταδοῦναι τῷ δήμῳ τῆς ἰσηγορίας, οὐκέτι φιλονεικοῦμεν ὑμῖν· αἰτησόμεθα δ´ ἑτέραν παρ´ ὑμῶν χάριν, ἧς τυχόντες ἴσως ἂν οὐδὲ καινῶν ἔτι δεηθείημεν νόμων. Εἰσέρχεται δ´ ἡμᾶς εὐλάβεια, μή ποτε οὐδὲ ταύτης τύχωμεν, ἐξ ἧς τῇ βουλῇ μὲν οὐδὲν ἔσται βλάβος, τῷ δὲ δήμῳ τιμή τις ὑπάρξει καὶ φιλανθρωπία. »

IX. [10,30] Εἰπόντος δὲ τοῦ ὑπάτου, ὅτι τοῦτο τὸ πολίτευμα τῇ βουλῇ συγχωροῦντες οὐθενὸς ἄλλου ἁμαρτήσονται τῶν μετρίων, καὶ κελεύοντος λέγειν ὅτου δέονται, ὀλίγα διαλεχθεὶς τοῖς συνάρχουσιν ὁ Οὐεργίνιος, ἐπὶ τῆς βουλῆς ἔφησεν ἐρεῖν. Καὶ μετὰ ταῦτα συναγαγόντων τὸ συνέδριον τῶν ὑπάτων παρελθὼν καὶ τὰ δίκαια τοῦ δήμου πρὸς τὴν βουλὴν ἅπαντα εἰσενεγκάμενος ᾐτήσατο διπλασιασθῆναι τὴν ἀρχὴν τὴν προισταμένην τοῦ δήμου, καὶ ἀντὶ τῶν πέντε δημάρχων δέκα εἰς ἕκαστον ἐνιαυτὸν ἀποδείκνυσθαι. Τοῦτο οἱ μὲν ἄλλοι βλάβην οὐδεμίαν ᾤοντο τῷ κοινῷ φέρειν, ἀλλὰ διδόναι καὶ μὴ ἀντιπράττειν παρῄνουν,

X. Ἄρχοντος τῆς γνώμης Λευκίου Κοιντίου, τοῦ τότε μέγιστον ἔχοντος ἐν τῇ βουλῇ κράτος. Εἷς δὲ μόνος ἀντέλεγε Γάιος Κλαύδιος, υἱὸς Ἀππίου Κλαυδίου, τοῦ παρὰ πάντα τὸν χρόνον τοῖς εἰσηγήμασι τῶν δημοτικῶν, εἴ τινα μὴ νόμιμα ἦν, ἐναντιωθέντος, διαδεδεγμένος τὰ πολιτεύματα τοῦ πατρός, καὶ ὅτ´ αὐτὸς εἶχε τὴν ὕπατον ἀρχὴν κωλύσας δοθῆναι τοῖς δημάρχοις τὴν κατὰ τῶν ἱππέων τῶν ἐπὶ τῇ συνωμοσίᾳ διαβαλλομένων ἐξέτασιν, καὶ μακρὸν διεξελθὼν λόγον ἐδίδασκεν, ὅτι μετριώτερος μὲν ὁ δῆμος οὐδὲν οὐδὲ χρηστότερος ἔσται διπλασιασθείσης αὐτῷ τῆς ἀρχῆς, ἀνοητότερος δὲ καὶ βαρύτερος. Οὐ γὰρ ἐπὶ ῥητοῖς τισι παραλήψεσθαι τὴν ἀρχὴν τοὺς ὕστερον ἀποδειχθησομένους, ὥστε μένειν ἐπὶ τοῖς καθεστηκόσιν, ἀλλὰ καὶ τὸν περὶ τῆς κληρουχίας αὖθις προθήσειν λόγον καὶ τὸν ὑπὲρ τῆς ἰσοτιμίας, καὶ πάντας ἑξῆς ζητήσειν, ὅ τι λέγοντες ἢ πράττοντες τὸ μὲν τοῦ δήμου κράτος αὐξήσουσι, τὰς δὲ τῆς βουλῆς τιμὰς καταλύσουσι.

XI. Καὶ σφόδρα ἐκίνησε τοὺς πολλοὺς ὁ λόγος. Ἔπειτα μετήγαγεν αὐτοὺς ὁ Κοίντιος διδάσκων, ὅτι πρὸς τῆς βουλῆς ἐστι τὸ πολλοὺς εἶναι τοῦ δήμου προστάτας. Ἧττον γὰρ ὁμονοήσειν τοὺς πλείους τῶν ἐλαττόνων, μίαν δὲ βοήθειαν εἶναι τοῖς κοινοῖς, ἣν Ἄππιον Κλαύδιον τὸν Γαΐου πατέρα πρῶτον ἰδεῖν, ἐὰν στασιάζῃ τὸ ἀρχεῖον καὶ μὴ πᾶσι τὸ αὐτὸ δοκῇ. Ἐδόκει τε δὴ ταῦτα καὶ γίνεται δόγμα βουλῆς· ἐξεῖναι τῷ δήμῳ δέκα δημάρχους καθ´ ἕκαστον ἐνιαυτὸν ἀποδεικνύναι, τῶν δὲ τότε ὄντων ἐν ἀρχῇ μηθένα. Τοῦτο τὸ προβούλευμα οἱ περὶ τὸν Οὐεργίνιον λαβόντες ἐξήνεγκαν καὶ κυρώσαντες τὸν ἐπ´ αὐτῷ γραφέντα νόμον δέκα δημάρχους εἰς τὸν ἐπιόντα ἐνιαυτὸν ἀπέδειξαν.

XII. Παυσαμένης δὲ τῆς στάσεως καταγράψαντες τὰς δυνάμεις οἱ ὕπατοι διεκληρώσαντο τὰς ἐξόδους· Μηνυκίῳ μὲν οὖν ὁ κατὰ Σαβίνων πόλεμος ἐδόθη, Ὁρατίῳ δὲ ὁ κατ´ Αἰκανῶν, καὶ κατὰ σπουδὴν ἐξῄεσαν ἀμφότεροι. Σαβῖνοι μὲν οὖν τὰς πόλεις διὰ φυλακῆς ἔχοντες ὑπερεῖδον ἀγομένων τε καὶ φερομένων ἁπάντων τῶν κατὰ τοὺς ἀγρούς, Αἰκανοὶ δὲ τὴν ἐναντιωσομένην Ῥωμαίοις δύναμιν ἀπέστειλαν. Ἀγωνισάμενοι δὲ λαμπρῶς οὐχ οἷοί τε ἐγένοντο τὴν Ῥωμαίων ὑπερβαλέσθαι δύναμιν, ἀλλ´ ἠναγκάσθησαν εἰς τὰς πόλεις ἀπελθεῖν ἀποβαλόντες τὸ πολίχνιον, ὑπὲρ οὗ τὸν ἀγῶνα ἐποιοῦντο. Ὁράτιος δὲ τρεψάμενος τοὺς πολεμίους καὶ πολλὰ τῆς χώρας αὐτῶν κακώσας τοῦ τε Κορβιῶνος τὰ τείχη κατασπάσας καὶ τὰς οἰκήσεις ἐκ θεμελίων ἀνελὼν ἀπῆγε τὴν δύναμιν ἐπ´ οἴκου.

 

I.  Après le consulat de Minucius et de Nautius, la première année de la quatre-vingt-unième olympiade, au commencement de laquelle Polymnaste de Cyrène remporta le prix de la course, Callias étant archonte à Athènes, on élut consuls à Rome Caius Horatius et Quintus Minucius.

II. Sous leur régence les Sabins commencèrent une nouvelle campagne, et ravagèrent une grande étendue des terres Romaines : une foule de paysans s'étant réfugiés dans la ville, apportèrent la nouvelle qu'ils occupaient tout le pays depuis Crustumerie jusqu'à Fidénes. D'un autre côté les Aeques qui venaient d'être vaincus depuis peu, avaient repris les armes. Les plus vigoureux de la nation étaient sortis pendant la nuit pour assiéger la ville de Corbion qu'ils avaient livrée l'année précédente aux Romains ; et ayant surpris la garnison endormie, ils l'avaient toute égorgée, hors quelques soldats, mais en petit nombre, qui étaient absents Les autres qui faisaient un corps de troupes considérable, se rendirent à Ortone ville des Latins, prirent cette place d'assaut, et tout le mal qu'ils ne pou- 498 vaient faire au peuple Romain, ils le firent à ses alliés. Après avoir pris la ville, ils tuèrent tous ceux qui étaient en âge de puberté : aucun n'échappa à leur vengeance que ceux qui s'enfuirent pendant qu'on emportait cette place : les femmes, les enfants et les vieillards furent menés en esclavage. L'ennemi pilla tout l'argent et les effets qu'il put trouver : il emporta en diligence un si riche butin avant que tous les Latins se fussent rassemblés pour secourir la ville.

III.  Une si triste nouvelle portée à Rome tant par les Latins que par quelques soldats de la garnison qui s'étaient sauvés, le sénat résolut de mettre une armée en campagne, et de faire marcher les deux consuls contre les rebelles. Mais Virginius et les autres tribuns ses collègues, qui s'étaient fait continuer pour la cinquième année, formèrent opposition à l'enrôlement des troupes, comme ils avaient déjà fait les années précédentes. Ils demandaient avec empressement qu'avant toutes choses on terminât la guerre intestine, en accordant au peuple le pouvoir de connaître de la loi qu'ils avaient faite pour établir l'égalité entre les citoyens. Le peuple d'intelligence avec ses magistrats, appuyait les discours injurieux qu'ils ne cessaient de débiter contre le sénat. Le temps se passait sans rien conclure. D'un côté les consuls ne pouvaient de résoudre à faire délibérer sur la loi pour la proposer au peuple, de l'autre les tribuns ne voulaient pas souffrir qu'on fît des levées pour ouvrir la campagne. Les discours et les plaintes réciproques qu'ils faisaient les uns contre les autres dans les assemblées du peuple et dans le sénat, ne servaient qu'a tirer les affaires en longueur.

IV. Enfin les tribuns firent jouer d'autres ressorts contre le sénat, par un nouveau règlement, qui à la vérité apaisa pour lors la sédition, mais qui dans la suite tourna à l'avantage du peuple, et augmenta considérablement sa puissance. Nous allons rapporter leurs intrigues, et les moyens qu'ils employèrent pour élever le peuple à un si haut degré.

V. Pendant qu'on pillait et ravageait les terres des Romains de même que celles de leurs alliés, et que l'on-traversait leur pays comme un désert, avec d*autant plus de confiance, que la sédition qui régnait dans la ville e Rome, ne permettait pas de mettre des troupes en campagne, les consuls assemblèrent le sénat afin 499 de délibérer comme pour la dernière fois, sur les moyens de soutenir la république chancelante et prête à tomber. Après plusieurs discours, Lucius Quintius, grand homme d'état et le plus brave guerrier de son temps, qui avait été dictateur l'année précédente, fut prié de dire le premier son avis. Il opina d'une manière qui fit également impression et sur les tribuns et sur tous les autres citoyens. Son sentiment fut, que la confirmation de la loi n'était pas une affaire des plus pressée et qu'il fallait la remettre à un autre temps plus commode, mais qu'à l'égard de la guerre dont Rome était menacée de si près, on ne pouvait se dispenser de la soutenir avec toute l'ardeur possible, afin de ne pas s'exposer à perdre par une lâcheté honteuse un empire qui avait coûté tant de travaux. Que si le peuple refusait de servir, c'était aux patriciens, à leurs clients, et à tous les citoyens zélés pour la gloire du nom Romain, à prendre les armes et à marcher aux ennemis, qu'ils pouvaient prendre pour guides de leur entreprise les dieux protecteurs de l'empire Romain, et que sous leurs auspices ils auraient l'une de ces deux glorieuses destinées, ou de remporter la plus belle victoire qu'ils eussent jamais gagnée eux et leurs pères, ou de mourir en combattant généreusement pour la défense de la liberté. Que pour lui, loin de s'exempter de faire avec eux une campagne si digne de la valeur Romaine, il combattrait avec autant de fermeté que les plus braves ; et qu'aucun des vieillards qui aimaient la liberté et la bonne réputation, ne refuserait de suivre son exemple.

VI. Cet avis universellement approuvé sans la moindre contradiction, les consuls convoquèrent une assemblée. Tout le peuple de la ville s'y rendit, dans l'espérance d'entendre quelque chose de nouveau. Gaius Horatius l'un des consuls s'avance au milieu de l'assemblée, et s'efforce d'engager les plébéiens à entreprendre cette expédition de tout leur cœur. Mais comme tes tribuns ne cessaient de se récrier avec d'autant plus d'entêtement que le peuple écoutait volontiers leurs discours, le consul s'avança une seconde fois, et parla en ces termes.

« Vous avez sujet de vous applaudir, Virginius, vous et vos collègues, c'est un merveilleux coup d'avoir soulevé le peuple contre le sénat. Vous n'avez en effet rien oublié pour nous faire perdre tous les avantages que nous avons reçus de nos pères, ou acquis par nos propres travaux. Vous pouvez 500 compter néanmoins que nous ne nous en laisserons pas dépouiller sans nous défendre. Nous prendrons les armes avec ceux des citoyens qui seront animés de quelque zèle pour le salut de la patrie et nous irons au combat dans l'espérance d'une bonne réussite. S'il y a quelque dieu qui favorise les plus nobles projets, qui s'intéresse pour la justice, et qui règle le sort des batailles, si la fortune enfin n'a pas encore abandonné cette ville qu'elle a rendue si puissante depuis tant d'années par les plus merveilleux accroissements : la victoire se déclarera pour nous, et nous triompherons de nos ennemis. Si au contraire quelque divinité ennemie s'oppose au salut de la république, rien ne sera capable ou d'étouffer les sentiments de piété qui nous animent, ou de ralentir notre ardeur : prêts à mourir de la mort la plus glorieuse, nous nous exposerons à tout pour le salut de la patrie. Pour vous, illustres protecteurs et généreux défenseurs de la ville, demeurez à Rome, gardez la maison avec vos femmes, puisque vous nous abandonnez entièrement, ou plutôt puisque vous nous trahissez lâche ment, vous qui ne pouvez pas espérer ni de vivre avec honneur si nous vainquons nos ennemis, ni d'être en sureté si notre entreprise réussit mal : si ce n'est peut-être que vous vous appuyez sur cette faible espérance  qu'après la défaite des patriciens à laquelle vous aurez contribué, les ennemis vous laisseront en repos, et qu'en reconnaissance des services que vous leur aurez rendus en cette occasion ils vous permettront de vivre en paix dans votre patrie, d'y goûter les douceurs de la liberté, de jouir de la souveraine puissance et de tous les biens que vous possédez maintenant. Pouvez-vous donc espérer ces avantages, vous qui autrefois mieux intentionnés pour la république, avez désolé une grande partie de leurs terres, ruiné leurs villes, réduit leurs citoyens sous l'esclavage, vous enfin qui avez élevé contre ces peuples plusieurs trophées de vos victoires, et un grand nombre de monuments de votre inimitié, qui subsisteront dans la postérité la plus reculée, sans jamais être détruits par la succession des siècles?  Mais pourquoi m'amuser à faire ces reproches au peuple qui n'a jamais commis de fautes volontaire. C'est à vous, Virgilius, qu'il faut s'en prendre et c'est à vos collègues qui de concert avec vous ont rétabli ces beaux règlements, et qui mettent les choses sur un si bon pied, Pour nous, généreux 501 aujourd'hui par la nécessité de notre état, nous sommes résolus de tenter le hasard des combats : pleins de nobles sentiments, nous nous exposerons à tout pour la défense de la patrie, et rien ne sera capable de nous arrêter. Vous au contraire, lâches déserteurs qui avez abandonné et trahi la république, les dieux vous puniront comme vous le méritez, et si vous échappez à la vengeance des hommes la colère divine ne peut manquer de tomber sur vous. Ne vous imaginez pas au reste, que ce soient ici de simples menaces, ou que je parle ainsi pour répandre de vaines terreurs. Sachez que si les ennemis remportent la victoire, ceux d'entre nous qui resteront à la garde de la ville prendront des sentiments tels qu'ils doivent avoir. En effet, s'il y a eu des Barbares, qui de voyant pris par l'ennemi, ont mieux aimé brûler leurs raisons et égorger leurs femmes et leurs enfants, que de les abandonnera la discrétion d'un vainqueur insolent, pensez-vous que les Romains n'entreront pas dans les mêmes sentiments ? Nés pour commander aux autres, ne croyez.pas qu'ils renoncent au droit qu'ils ont reçu de leurs pères comme par héritage. Ils ne s'oublieront jamais jusqu'à ce point : ils sauront de soustraire et au joug d'une honteuse servitude, et après avoir commencé par vous qui êtes leurs plus mortels ennemis, ils tourneront leur colère contre ce qu'ils ont de plus cher au monde. C'est dans cette vue et dans cette attente que vous devez tenir vos assemblées et faire de nouvelles lois. »

VII. Après avoir dit ces choses et autres semblables, il fit paraître devant tout le monde les plus âgés des patriciens  baignés de pleurs et la tristesse peinte sur le visage. A la vue de ces vénérables vieillards aussi respectables par leur âge que par leurs dignités soutenues de leur mérite personnel, les cœurs des plébéiens mêmes sont attendris, ils fondent en larmes. Le consul profite de ces heureux moments, et rompant le silence:

« N'avez-vous pas de honte, leur dit il, citoyens, quand vous voyez ces respectables vieillards disposés à prendre les armes au défaut de vous autres jeunes gens. ? Ne devriez-vous pas vous cacher dans les entrailles de la terre ? Pouvez-vous donc vous résoudre à abandonner de si illustres. chefs ? Malheureux que vous êtes, vous qui ne méritez pas d'être citoyens d'une ville, dont les fondateurs portant leurs pères sur leurs épaules, se sont sauvés à travers les armes et l'incen- 502 die par le secours des dieux qui dirigeaient leurs pas, aurez-vous le cœur assez dur pour ne pas vous joindre aux patriciens que vous avez toujours appelés vos pères ? »

VIII. Alors Virginius, voyant que les plébéiens se laissaient gagner par les discours du consul, et craignant qu'ils ne s'engageassent contre son sentiment à suivre les étendards des patriciens, s'avance au milieu de l'assemblée et parle en ces termes.

« Non, Messieurs, nous ne vous abandonnons point  aux dieux ne plaise que nous soyons assez lâches pour vous trahir. Ne savez-vous pas vous- mêmes que nous ne vous avons jamais abandonnés, et que nous n'avons point refusé de prendre les armes dans toutes les guerres que nos ennemis nous ont suscitées jusqu'aujourd'hui ? Toujours attachés aux intérêts de la patrie, nous voulons vivre avec vous et souffrir avec vous tous les maux qu'il plaira aux dieux de nous envoyer. Mais puisque nous vous avons donné en toute occasion des marques de notre zèle, nous vous demandons en récompense une grâce que vous ne pouvez nous refuser sans injustice. Comme nous partageons avec vous les mêmes dangers, souffrez que nous ayons aussi les mêmes droits que vous, permettez qu'on établisse des lois pour la conservation de la liberté qui nous soient communes à tous. Que si vous ne pouvez vous résoudre à accorder cette faveur à vos citoyens, si vous croyez que ce serait une espèce de crime, et si vous regardez l'égalité comme le plus grand de tous les maux, nous ne disputerons plus avec vous. Nous nous retranchons donc à vous demander une autre grâce : peut-être que quand nous l'aurons obtenue, il ne sera pas besoin de faire de nouvelles lois. Mais nous appréhendons que vous ne nous la refusiez aussi. Elle ne porterait cependant aucun préjudice au sénat, et d'ailleurs elle ferait quelque honneur au peuple qui ne peut manquer d'en être content

IX. Sur cette requête, le consul répond que si les tribuns veulent permettre au sénat de délibérer, on ne leur refusera de ce qui est juste : puis il leur ordonne de dire ce qu'ils souhaitent. Alors Virginius confère un moment avec ses collègues : il revient bientôt après, et déclare qu'il veut exposer ses demandes en plein sénat. Dans le moment les consuls convoquèrent une assemblée des sénateurs. On y admet le tribun, il fait l'énumération de tous les privilèges du peuple, puis il 503 demande qu'on double le nombre des magistrats des plébéiens, et. qu'au lieu de cinq tribuns il soit permis d'en créer dix tous les ans.

X. Lucius Quintius qui avait alors une grande autorité dans le sénat, ouvrit le premier avis, Il dit que la création de cinq nouveaux tribuns ne pouvait faire aucun tort à la république et qu'on la devait accorder sans répugnance. Tous les sénateurs se rangèrent de son sentiment. Caius Claudius fut le seul d'un avis contraire. Il était fils de cet Appius Claudius qui s'était toujours opposé aux demandes du peuple qui ne lui paraissaient pas fondées sur la justice. Héritier des sentiments de son père, pendant son consulat il avait empêché qu'on ne permît aux tribuns d'informer contre les chevaliers qu'ils accusaient faussement d'être complices de la conjuration. Ce sénateur représenta en peu de mots, que si on doublait le nombre des magistrats du peuple, loin de devenir meilleur et plus traitable, il n'en serait que plus farouche et plus insolent. Que sans doute les tribuns qu'on élirait dans la suite, ne voudraient pas accepter la dignité tribunitienne à condition de de tenir dans les bornes de la modération qu'on leur prescrirait, qu'ils remettraient d'abord sur le tapis le partage des terres et l'égalité des honneurs entre le peuple et les patriciens, qu'ils n'oublieraient rien pour augmenter la puissance du peuple, et pour diminuer, ou même abolir entièrement l'autorité et les prérogatives du sénat ; qu'ils remueraient ciel et terre pour parvenir à leurs fins, et qu'ils s'y emploieraient l'un après l'autre et de fait et de paroles.

XI. Ce discours fit beaucoup d'impression sur la plupart des sénateurs. Mais Quintius les fit ensuite revenir à son sentiment : il leur représenta qu'il était de l'intérêt du sénat d'augmenter le nombre des magistrats du peuple ; que plus il y en aurait, moins ils seraient d'accord entre eux, et que l'unique remède qu'Appius Claudius père de Caius avait trouvé le premier pour le bien public, était de diviser de sentiment le collège des tribuns afin qu'ils ne fussent jamais d'accord Sur ces remontrances on se rangea de l'avis de Quintius, et on fit un sénatus-consulte qui permettait au peuple d'élire chaque année dix tribuns, mais à condition qu'il ne pourrait élire aucun de ceux qui étaienti alors en charge. Virginius et 504 ses collègues publièrent le décret du sénat, et après avoir confirmé la loi faite à l'occasion de ce décret, ils désignèrent dix tribuns pour l'année suivante.

XII. La. sédition apaisée par cet accommodement, les consuls levèrent des troupes. Ils tirèrent au sort leur destination et les peuples contre lesquels chaque consul devait marcher : la guerre des Sabins échut à Minucius, et celle des Aeques à Horatius. Ils partirent tous deux en diligence. Les Sabins se contentant de garder leurs villes, laissèrent piller et enlever tout ce qu'ils avaient à la campagne. Les Aeques au contraire mirent des troupes sur pied pour arrêter les Romains. Mais quoiqu'ils montrassent beaucoup de vigueur et de bravoure, ils ne purent jamais l'emporter sur l'armée Romaine : ils furent enfin obligés de de retirer dans leurs murailles, après avoir perdu la petite ville pour la défense de laquelle ils avaient combattu. Horatius ayant mis les ennemis en fuite, ravagé la plus grande partie de leurs terres, renversée les murailles de Corbion, et démoli jusqu'aux fondements les maisons de cette petite ville, revint à Rome avec son armée.

 

CHAPITRE SEPTIEME.

I.  Cinquante-quatrième consulat. Nouvelles accusations entre les consuls et les tribuns : ceux-ci usurpent le droit de convoquer le sénat, et demandent qu'on accorde au peuple le mont Aventin pour y bâtir. II. Ils font sommer les consuls. Un licteur repousse l'huissier des tribuns : Iiclius veut punir de mort le licteur. III. Les consuls en appellent aux autres tribuns : ceux-ci soutiennent leur collègue, suivant les conventions faites entre eux. Ils relâchent enfin le licteur.  IV. Le sénat s'assemble. Icilius accusé par les consuls, se justifie. V.  Il propose aussi d'accorder le mont Aventin aux pauvres citoyens. VI. Que ce règlement apaisera les troubles etc. VII. Le sénat reçoit favorablement la requête du tribun. VIII. On distribue des places sur le mont Aventin : le peuple y bâtit des maisons.

 

I. [10,31] Τῷ δ´ ἑξῆς ἔτει Μάρκου Οὐαλερίου καὶ Σπορίου Οὐεργινίου τὴν ὑπατείαν ἐχόντων στρατιὰ μὲν ὑπερόριος οὐδεμία ἐξῆλθε Ῥωμαίων, πολιτικὰ δέ τινα προσκρούσματα τοῖς δημάρχοις πρὸς τοὺς ὑπάτους συνέστη πάλιν, ἐξ ὧν ἔσχον οἱ δήμαρχοι παρασπάσαντές τι τῆς ὑπατικῆς δυναστείας. Τὸν μὲν γὰρ ἔμπροσθεν χρόνον ἐκκλησίας μόνον ἦσαν οἱ δήμαρχοι κύριοι, βουλὴν δὲ συνάγειν ἢ γνώμην ἀγορεύειν οὐκ ἐξῆν αὐτοῖς, ἀλλ´ ἦν τῶν ὑπάτων τοῦτο τὸ γέρας. Οἱ δὲ τότε δήμαρχοι πρῶτοι συγκαλεῖν ἐπεβάλοντο τὴν βουλὴν Ἰκιλλίου τὴν πεῖραν εἰσηγησαμένου, ὃς ἡγεῖτο μὲν τοῦ ἀρχείου, δραστήριος δέ τις ἦν ἀνὴρ καὶ ὡς Ῥωμαῖος εἰπεῖν οὐκ ἀδύνατος. Εἰσέφερε γάρ τι καὶ οὗτος πολίτευμα καινὸν ἀξιῶν ἀπομερισθῆναι τοῖς δημόταις τόπον εἰς οἰκιῶν κατασκευὰς τὸν καλούμενον Αὐεντῖνον. Ἔστι δὲ λόφος ὑψηλὸς ἐπιεικῶς, οὐκ ἐλάττων ἢ δώδεκα σταδίων τὴν περίμετρον, ἐμπεριεχόμενος τῇ πόλει, ὃς οὐχ ἅπας τότε ᾠκεῖτο, ἀλλ´ ἦν δημόσιός τε καὶ ὕλης ἀνάπλεως.

II. Τοῦτο τὸ πολίτευμα εἰσάγων ὁ δήμαρχος τοῖς τότε ὑπάτοις καὶ τῇ βουλῇ προσῄει δεόμενος τὸν ἐπ´ αὐτῷ γραφέντα νόμον προβουλεῦσαί τε καὶ εἰς τὸν δῆμον ἐξενεγκεῖν. Ἀναβαλλομένων δὲ καὶ παρελκόντων τῶν ὑπάτων τὸν χρόνον πέμψας τὸν ὑπηρέτην ὡς αὐτοὺς ἐκέλευσεν ἐπὶ τὴν ἀρχὴν ἀκολουθεῖν καὶ τὴν βουλὴν συγκαλεῖν. Ἐπεὶ δὲ τῶν ῥαβδούχων τις ἀπήλασε τὸν ὑπηρέτην κελευσθεὶς ὑπὸ τῶν ὑπάτων, ἀγανακτήσας ὁ Ἰκίλλιος καὶ οἱ συνάρχοντες αὐτοῦ, συνέλαβον τὸν ῥαβδοῦχον καὶ ἀπῆγον ὡς ῥίψοντες κατὰ τῆς πέτρας.

III. Οἱ δὲ ὕπατοι βιάσασθαι μὲν ἢ τὸν ἀγόμενον ἀφελέσθαι, καίτοι δεινὰ δοκοῦντες ὑβρίσθαι, ἀδύνατοι ἦσαν, ἐπεκαλοῦντο δὲ τὴν ἐκ τῶν ἄλλων δημάρχων βοήθειαν. Οὐθὲν γὰρ τῶν πραττομένων ὑπὸ τῆς ἀρχῆς ἐκείνης ἐπισχεῖν ἢ κωλῦσαι τῶν ἄλλων τινὶ ἔξεστιν, ἀλλ´ ἑτέρου δημάρχου τοῦτ´ ἐστὶ τὸ κράτος. Τοῖς δ´ ἄρα πᾶσιν ἦν ταῦτα κατ´ ἀρχὰς δεδογμένα μήτ´ εἰσηγήσασθαί τινα καινὸν πολίτευμα μηθὲν ἐφ´ ἑαυτοῦ βαλόμενον, ἐὰν μὴ πᾶσι τὸ αὐτὸ δοκῇ, μήτε ἐναντιωθῆναί τινα τοῖς πραττομένοις, ὅς´ ἂν αἱ πλείους γνῶμαι δοκιμάσωσι· καὶ περὶ τούτων εὐθὺς ἅμα τῷ παραλαβεῖν τὴν ἀρχὴν ἱερὰ θύσαντες ὅρκους ἔδοσαν ἀλλήλοις· οὕτως οἰόμενοι μάλιστα τὸ τῆς δημαρχίας ἀκατάλυτον ἔσεσθαι κράτος, ἐὰν τὸ στασιάζον ἐξ αὐτῆς ἀναιρεθῇ. Τοῦτο δὴ φυλάττοντες τὸ συνωμόσιον εἶπον ἀπάγεσθαι τὸν φύλακα τῆς ἀρχῆς τῶν ὑπάτων, κοινὴν ἁπάντων εἶναι λέγοντες τὴν γνώμην, οὐ μὴν διέμεινάν γ´ ἐπὶ τῆς ὀργῆς, ἀλλὰ τοῖς πρεσβυτάτοις τῶν ἐκ τοῦ συνεδρίου παραιτουμένοις τὸν ἄνδρα ἀφῆκαν, τόν τε φθόνον ὑφορώμενοι τοῦ πράγματος, ὅτι πρῶτοι ἔμελλον θανάτῳ ζημιῶσαι τὸν ἄνδρα τὸ κελευσθὲν ὑπὸ τῶν ἀρχόντων ποιήσαντα, καὶ δεδοικότες, μὴ ἀπὸ ταύτης τῆς προφάσεως εἰς ἀπόνοιαν ἀναγκασθῶσιν οἱ πατρίκιοι τραπέσθαι.

IV. [IV. 10,32] Μετὰ τοῦτο τὸ ἔργον συναχθείσης τῆς βουλῆς οἱ μὲν ὕπατοι κατηγορίαν πολλὴν τῶν δημάρχων ἐποιήσαντο· παραλαβὼν δὲ τὸν λόγον ὁ Ἰκίλλιος περί τε τῆς εἰς τὸν ὑπηρέτην ὀργῆς ἀπελογεῖτο τοὺς ἱεροὺς προφερόμενος νόμους, καθ´ οὓς οὔτε ἄρχοντι οὔτ´ ἰδιώτῃ συνεχωρεῖτο πράττειν οὐδὲν ἐναντίον δημάρχῳ, καὶ περὶ τοῦ συγκαλεῖν τὴν βουλὴν ἐδίδασκεν, ὡς οὐθὲν εἴη πεποιηκὼς ἄτοπον, πολλοὺς καὶ παντοδαποὺς εἰς τοῦτο παρασκευασάμενος λόγους.

V. Ὡς δ´ ἀπελύσατο ταύτας τὰς κατηγορίας, τὸν ὑπὲρ τοῦ λόφου νόμον εἰσέφερεν. ἦν δὲ τοιόσδε·

« Ὅσα μὲν ἰδιῶταί τινες εἶχον ἐκ τοῦ δικαίου κτησάμενοι, ταῦτα τοὺς κυρίους κατέχειν· ὅσα δὲ βιασάμενοί τινες ἢ κλοπῇ λαβόντες ᾠκοδομήσαντο, κομισαμένους τὰς δαπάνας, ἃς ἂν οἱ διαιτηταὶ γνῶσι, τῷ δήμῳ παραδιδόναι· τὰ δὲ ἄλλα, ὅσα ἦν δημόσια, χωρὶς ὠνῆς τὸν δῆμον παραλαβόντα διελέσθαι. »

VI. Ἐδίδασκέ τε, ὅτι τοῦτο τὸ πολίτευμα εἰς πολλὰ μὲν καὶ ἄλλα συνοίσει τῇ πόλει, μάλιστα δὲ εἰς τὸ μὴ στασιάζειν ἔτι περὶ τῆς δημοσίας χώρας τοὺς πένητας, ἣν οἱ πατρίκιοι κατεῖχον. Ἀγαπήσειν γὰρ αὐτοὺς τῆς πόλεως λαχόντας μέρος, ἐπειδὴ τῆς χώρας οὐκ ἔξεστι διὰ τοὺς ἐσφετερισμένους αὐτὴν πολλοὺς ὄντας καὶ δυνατούς.

VII. Τοιούτων ῥηθέντων ὑπ´ αὐτοῦ λόγων ὁ μὲν ἀντιλέγων Γάιος Κλαύδιος ἦν μόνος, οἱ δὲ συγκαταινοῦντες πολλοί, καὶ ἔδοξε διδόναι τῷ δήμῳ τὸν τόπον. Μετὰ τοῦτο ἱεροφαντῶν τε παρόντων καὶ οἰωνοσκόπων καὶ ἱεροποιῶν δυεῖν καὶ ποιησαμένων τὰς νομίμους εὐχάς τε καὶ ἀρὰς ἐν τῇ λοχίτιδι ἐκκλησίᾳ συναχθείσῃ ὑπὸ τῶν ὑπάτων ὁ νόμος ἐκυρώθη, ὅς ἐστιν ἐν στήλῃ χαλκῇ γεγραμμένος, ἣν ἀνέθεσαν ἐν τῷ Αὐεντίνῳ κομίσαντες εἰς τὸ τῆς Ἀρτέμιδος ἱερόν.

VIII. Κυρωθέντος δὲ τοῦ νόμου συνελθόντες οἱ δημοτικοὶ τά τε οἰκόπεδα διελάγχανον καὶ κατῳκοδόμουν ὅσον ἕκαστοι τόπον δυνηθεῖεν ἀπολαμβάνοντες. Εἰσὶ δ´ οἳ σύνδυο καὶ σύντρεις καὶ ἔτι πλείους συνιόντες οἰκίαν κατεσκευάζοντο μίαν ἑτέρων μὲν τὰ κατάγεια λαγχανόντων, ἑτέρων δὲ τὰ ὑπερῷα. Ὁ μὲν οὖν ἐνιαυτὸς ἐκεῖνος εἰς τὰς κατασκευὰς τῶν οἰκήσεων ἐδαπανήθη.

I.  L'année suivante sous le consulat de Marcus Valerius et de Spurius Virginius, les Romains ne mirent 505 point de troupes en campagne : mais les disputes de rallumèrent entre les consuls et les tribuns au grand désavantage de la puissance consulaire. Jusqu'alors les tribuns n'avaient été maitres que des assemblées du peuple : il ne leur était pas permis de convoquer le sénat, ni d'y dire leur avis ; cet honneur n'appartenait qu'aux consuls. Les tribuns de cette année furent les premiers qui usurpèrent cette autorité. Icilius, homme adroit et très éloquent, qui était à la tête de leur collège, conçut une entreprise si hardie. Il osa même introduire de nouveaux règlements, et demanda qu'on accordât au peuple le mont Aventin pour y bâtir des maisons. C'est une colline médiocrement haute, située dans l'enceinte des murs de Rome : elle n'a pas moins de douze stades de circuit. Dans ce temps-là elle n'était pas habitée toute entière. C'était une place qui appartenait au public et qui était couverte d'un bois épais.

II. Pour faire passer un règlement si nouveau, le tribun va trouver et les consuls de cette année et le sénat. Il les prie d'examiner la loi qu'il a faite à ce sujet, et d'en renvoyer la connaissance au peuple. Comme les consuls différaient de jour en jour pour gagner du temps, il les somme par un huissier de comparaître devant le collège des tribuns et d'assembler le sénat. Ceux-ci ordonnent à un de leurs licteurs de repousser violemment l'huissier. Alors Icilius et ses collègues entrent en fureur : ils se saisissent du licteur et l'entraînent pour le précipiter du haut de la roche Tarpéienne.

III. Les consuls piqués au vif de l'insulte qu'on leur fait en la personne de leur licteur, n'osent pas néanmoins user de violence pour l'arracher d'entre les mains des magistrats du peuple. Ils se contentent d'invoquer le secours des autres tribuns, car il n'est permis à personne d'arrêter ou d'empêcher ce qui est fait par l'ordre des magistrats plébéiens, à moins que quelqu'un de leur collège n'y mette opposition. Mais les tribuns depuis longtemps avaient pris des mesures pour prévenir cet artifice des consuls. Ils étaient convenus ensemble qu'aucun d'eux n'introduirait un nouveau règlement par son autorité particulière et sans l'approbation de tout le collège, qu'un tribun ne pourrait s'opposer à ce que feraient les autres, et qu'une décision confirmée à la pluralité des voix, serait 506 pour chacun d'eux une loi inviolable. Voila les régies qu'ils s'étaient prescrites d'abord en entrant en charge, et dans les sacrifices ils avaient confirmé cette convention par un serment solennel ; persuadés que pour mettre hors d'atteinte et pour rendre inviolable la dignité tribunitienne, il n'y avait point de moyen plus efficace que de retrancher de leur corps, toute semence de division et de bannir la mésintelligence.. Pour garder les lois de cette convention, les tribuns protestaient que c'était du commun avis de tout le corps qu'ils avaient arrêté le licteur des consuls. Leur colère néanmoins ne dura pas longtemps: bientôt après ils relâchèrent le coupable à la sollicitation des sénateurs les plus respectables par leur âge, soit dans la crainte de s'attirer la haine publique, s'ils commençaient les premiers à punir de mort un homme qui n'avait point fait d'autre crime que d'obéir aux consuls, soit qu'ils appréhendassent qu'une violence si marquée, ne jetât les patriciens dans un désespoir furieux, et ne les mît pour ainsi dire, dans la nécessité de tout entreprendre.

IV. Après cette action, le sénat s'assemble, et les consuls accusent les tribuns avec beaucoup d'aigreur. Icilius prend la parole, il fait voir que sa colère contre le licteur, était juste,. il apporte pour sa défense les lois sacrées, par lesquelles il était défendu et aux magistrats et aux particuliers de résister aux tribuns. A l'égard de la liberté qu'il s'était donnée de vouloir convoquer le sénat, il montra qu'il n'avait rien entrepris au delà de ses droits, et apporta plusieurs raisons qu'il avait méditées pour de justifier sur ce point.

V. Après avoir répondu à ces deux chefs d'accusations,. il parla de la loi qu'il prétendait établir. Elle portait :

« que tous les biens, que les particuliers avaient acquis légitimement et de bon droit, devaient leur rester comme aux véritables possesseurs: mais que toutes les places dont quelques citoyens s'étaient mis en possession ou par force ou par fraude, et sur lesquelles ils avaient bâti des maisons, seraient restituées au peuple, à condition qu'on rendrait aux usurpateurs, suivant l'arbitrage des experts, les dépenses qu'ils y avaient faites pour les bâtiments : qu'enfin tous les autres biens appartenant au public, seraient partagés entre le peuple sans, qu'il en payât rien ».

VI. Icilius représenta qu'outre plusieurs grand avan-  507 tages que ce règlement apporterait à la ville de Rome, il servirait principalement à empêcher les pauvres d'exciter des troubles au sujet des terres publiques dont les patriciens s'étaient emparés. Que les plébéiens seraient contents d'avoir pour eux un quartier dans la ville de Rome : et qu'ils cesseraient enfin de demander la distribution des terres publiques, dont ils ne pouvaient obtenir leur part à cause de la puissance et: du grand nombre de ceux qui les avaient usurpées.

VII. Toute l'assemblée applaudit au discours du tribun Caius Claudius fut le seul qui s'opposa à sa requête. Mais malgré son opposition le sénat fit un décret, par lequel il accorda requête au peuple le terrain que les tribuns demandaient. Ensuite, en présence des pontifes, des augures et de deux sacrificateurs qui firent les prières et les vœux accoutumés, on confirma la loi dans une assemblée des centuries convoquée par les consuls. Elle est gravée sur une colonne d'airain, que les Romains placèrent sur le mont Aventin, dans le temple de Diane.

VIII. Après la confirmation de la loi, les plébéiens assemblés tirèrent au sort les places qu'on leur accordait pour bâtir des maisons. Chacun prit autant de terrain qu'il en pouvait occuper. Il y en eut qui se joignirent deux ou trois ensemble, et même en plus grand nombre, pour bâtir la même maison à frais communs: ils tirèrent au sort, et les uns occupèrent le bas ou rez de chaussée, les autres le haut. C'est ainsi que cette année fut employée à construire des maisons.