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PLINE L'ANCIEN
HISTOIRE NATURELLE
LIVRE VINGT ET UN.
Texte français
Paris : Durocher,
1848-1850.
LIVRE XXI, TRAITANT DE LA NATURE DES FLEURS ET DES GUIRLANDES. I et II. Des guirlandes; des couronnes tressées. - III. Quels sont ceux qui ont inventé l'art d'assortir les fleurs. Quand s'est-on servi pour la première fois du mot corolle, et pourquoi? - IV. Quel est celui qui a donné le premier des couronnes en feuilles d'argent et d'or. Pourquoi ont-elles été appelles corollaria? Des lemnisques; quel est celui qui les a ciselés le premier. - V. Quel cas on faisait des couronnes parmi les anciens. - VI. Sévérité des anciens au sujet des couronnes. - VII. Quel citoyen fut couronné de fleurs par le peuple romain. - VIII. Couronnes tressées; coronnes cousues; courounes de nard; couronnes de soie. - IX. Auteurs qui ont écrit sur les fleurs. Anecdote touchant la reine Cléopâtre au sujet des couronnes. - X. De la rose ; douze espèces. - XI. Quatre espèces de lis. - XII. Trois espèces de narcisse. - XIII. Combien il faut teindre un plant pour que les fleurs naissent colorées. - XIV. De quelle manière chaque espèce de violette naît, se sème et se cultive; les violettes sont de trois couleurs différentes; cinq espèces de violettes jaunes. - XV. Du caltha; fleur royale. - XVI. Du baccbar; du combretum ; de l'asarum. - XVII. Du safran; lieux où il fleurit le mieux. Des fleurs connues au temps de la guerre de Troie. - XVIII. De la nature des odeurs. - XIX. Iris. - XX. Saliunca. - XXI. Polium ou teuthrion. -XXII. Étoffes qui rivalisent avec les fleurs. - XXIII. Amarante. - XXIV. Cyanos, holochrysos. - XXV. Petillum; belilum. - XXVI. Chrysocome ou chrysitis. - XXVII. Arbustes dont les fleurs serrent à faire des couronnes. - XXVIII. Arbustes dont les feuilles servent à faire des couronnes. - XXIX. Mélottron; spirée; origan; deux espèces de cneorum ou de casia. Mélissophyllum ou melittène; mélilot ou tresse de Campanie. - XXX. Du trèfle; trois espèces. - XXXI. Trois espèces de thym; plantes qui naissent de fleur et non de graine. - XXXII. Conyza. - XXXIII. Fleur de Jupiter; hémérocamme; helenium; phlox. Plantes dont les branches et les feuilles sont odorantes. - XXXIV. Aurone. Adonium, deux espèces. Plantes qui se propagent d'elles-mêmes. Leucanthémum. - XXXV. Deux espèces d'amaracus. - XXXVI. Nyctégretum, ou chénomicos, ou nyctalops. - XXXVII. Mélilot. - XXXVIII. Époque de la floraison d'après les saisons: fleurs du printemps: violette, anémone à couronne; oenanthe (herbe), melianthum; héliochrysos glaïeul; hyacinthe. - XXXIX. Fleurs d'été : lychnis; tiphyon; amaracus de Phrygie; deux espèces de pothos; deux espèces d'orsines; vincapervinca ou chamaedaphné, qui est toujours verte. - XL. Quelle est la durée de chaque fleur. - XLI. Quelles plantes il faut semer entre les fleurs pour les abeilles; cérinthe. - XLII. Des maladies des abeilles, et des remèdes. - XLIII. De la nourriture des abeilles. - XLIV. Du miel vénéneux, et des remèdes à y opposer. - XLV. Du miel qui ôte la raison. - XLVI. Du miel auquel les mouches ne touchent pas. - XLVII. Des ruches, et des soins qu'elles exigent. - XLVIII. Si les abeilles éprouvent le besoin de la faim. - XLIX. De la fabrication de la cire; quelles en sont les meilleurs espèces. De la cire carthaginoise. - L. Emplois, chez chaque peuple, des plantes qui naissent spontanément; nature, merveilles. Fraises; tamnus; ruscus; deux espèces de batis; panais des prés; houblon. - LI. Colocase. - LII. Cichorium, anthalium, oetum, arachidna, arecos, candryala, hypochoeris, caucalis, anthriscum, scandix, parthénium, strychnum, corchorus; aphace, acynopos, épipétron. Plantes qui ne fleurissent jamais; plantes qui fleurissent toujours. - LIII. Quatre espèces de cnécus. - LIV. Herbtes à aiguillons : eryngion; réglisse, tribulus, ononis, phéos ou stoebe, hippophaes. - LV. Quatre espèces d'orties : Iamium: scorpion. - LVI. Chardon, acorna ou phonos, leucacanthos, chalceos, cnécus, polyacanthos, onopyxos, helxine, scolymos, chamaeléon, tétratrix, acanthice mastiche. - LVII. Ectacus ou cactus, pternix, aigrette, ascalla. - LVIII. Macre ou châtaigne d'eau ; arrête-bœuf. - LIX. Herbes arrangées d'après leurs tiges : coronopus, orcanette, anthémide, phyllanthe, crépis, lotos. - LX. Différences des herbes d'après leurs feuilles. Herbes qui fleurissent partiellement; herbes dont les feuilles ne tombent pas : héliotrope, adiantum. - LXI. Espèces de plantes en épi: stanyopos, alopécuros, stéléphuros ou ortyx ou plantago, thryallis. - LXII. Perdicium; ornithogale. - LXIII. Herbes qui naissent au bout d'un an; herbes qui fleurissent par le haut; herbes qui fleurissent par le bas. - LXIV. Lappa, herbe qui produit au dedans d'elle-même; opuntia, fournissant des racines par sa feuille. - LXV. Iasone, condrylla, picris, qui fleurit l'année entière. - LXVI. Plantes qui fleurissent avant de produire leur tige; plantes qui ont une tige avant de produire des fleurs; plantes qui fleurissent trois fois. - LXVII. Cypiros, huit remèdes. Thésium. - LXVIII. Asphodèle ou hastula regia; anthéricus. - LXIX. Joncs, six espèces, quatre remèdes. - LXX. Cypérus, quatorze remèdes. Cypéris, cypira. - LXXI. Holoschoenos. - LXXII. Dix remèdes fournis par le jonc odorant, ou teuchitès. - LXXIII. Remèdes fournis par les fleurs énumérées ci-dessus : par la rose, XXII. - LXXIV. Par le lis, XVI. - LXXV. Par le narcisse, XXVIII. - LXXVI. Par les violettes, XXVIII. - LXXVII. Par le bacchar, XVII. Par le combretum, I. - LXXVIII. Par l'asarum, VIII. - LXXIX. Par le nard gaulois, VIII. - LXXX. Par l'herbe qu'on appelle phu, IV. - LXXXI. Par le safran, XX. - LXXXII. Par le crocomagma deSyrie, II. - LXXXIII. Par l'iris. XLI. Par le saliunca, III - LXXXIV. Par le polium, XIX. - LXXXV. Par l'holochrysos, III. Par la chrysocome, VI. - LXXXVI. Par le mélissophyllum, XIII. - LXXXVII. Par le melilot, XIII. - LXXXVIII. Par le trèfle, IV. - LXXXIX. Par le thym, XXIX. - XC. Par l'hémérocalle, IV. - XCI. Par l'helénium, V. - XCII. Par l'aurone, XXII. - XCIII. Par le Ieucanthémum, I. Par l'amaracum, IX. - XCIV. Par l'anémone on phrénion. X. - XCV. Par l'oenanthe, VI. - XCVI. Par l'hellochrysum, XI. - XCVII. Par l'hyacinthe, VIII. - CXVIII. Par la lychnis. VII. - XCIX. Par la vincapervinca, IV. - C. Par le ruscum, III. - CI. Par le batis, II. - CII. Par la colocase, II. - CIII. Par l'anthyllium ou anthyllum, VI. - CIV. Par le parthénium ou Ieucanthès ou amnacus, VIII. - CV. Par le trychnon, ou strychnon, ou halicacabum, ou callias, ou dorycnion, ou manicon, ou peritton, ou nevras, ou morion, ou moly, VIII. - CVI. Par le corcherus, VI. - CVII. Par le cnécos, III. - CVIII. Par la persoluta, I. - CIX. Interprétation des nom grecs des poids et mesures. Résumé: Remèdes, histoires et observations, 730. Auteurs : Caton le Censeur, M. Varron, Massurius, Valerius Antias, Caepion, Vestinus, Vibius Rufinus, Hygin, Pomponius Méla, Pomponius Lénaeus, Celse, Calpurnius Bassus, C. Valgius, Licinius Macer. Sextius Niger qui a écrit en grec, Julius Bassus qui a écrit en grec, Antonius Castor. Auteurs étrangers : Théophraste, Démocrite, Orphée, Pythagore, Magon, Ménandre qui a écrit Des choses utiles à la vie, Nicandre, Homère, Hésiode, Musée, Sophocle, Anaxilaüs. Médecins :
Mnésithée qui a écrit sur les couronnes, Callimaque qui a écrit
sur les couronnes, Phanias le Physicien, Simus, Timariste, Hippocrate,
Chrysippe, Dioclès, Ophélion, Héraclide, Hicésius, Denys, Apollodore de Citium,
Apollodore de Tarente, Praxagore, Plistonicus, Médius, Dieuchès, Cléophante,
Philistion, Asclépiade, Cratévas, Pétronius Diodotus, lolias, Erasistrate,
Diagoras, Andréas, Mnésis, Damion, Dalion, Sosisème, Tlépoléme, Métrodore,
Solon, Lycus, Olympias la Thébaine, Philinus, Petrichus, Micton, Glaucias,
Xénocrate.
I. (I.) [1] Caton a recommandé de semer aussi dans les jardins les fleurs à tresser les couronnes, fleurs remarquables surtout par une délicatesse qu'on ne saurait exprimer; car nul ne peut parler avec la même facilite que la nature peut colorer; la nature, qui s'égaye et se joue dans la joie infinie d'une fécondité si variée. Les autres végétaux, elle les a produits pour les besoins et la nourriture; aussi leur a-t-elle accorde des années et des siècles : [2] mais les fleurs et leurs parfums, elle ne les engendre que pour durer un jour; grande leçon, qui manifestement montre aux hommes que ce qui fleurit avec le plus d'éclat se fane avec le plus de promptitude. La peinture même ne suffit pas à reproduire ces couleurs dans la variété de leurs combinaisons, soit que des fleurs nombreuses entrent alternativement dans la composition des tresses, soit qu'un faisceau d'une fleur spéciale, disposé circulairement, obliquement, en spirale, coure comme une couronne dans la couronne elle-même. II. (II.) [1] Les anciens se servaient de couronnes minces, qu'ils nommaient stroppes; d'où vient le nom des strophioles. Le nom même de couronnes ne s'est généralisé que tardivement ; il était exclusivement réservé aux couronnes employées dans les sacrifices, ou comme récompense militaire. Quand elles se faisaient avec des fleurs, on les appelait serin de serere (tresser), ou de series (série). L'usage n'en est pas fort ancien chez les Grecs eux-mêmes. III. [1] La coutume fut d'abord de couronner les vainqueurs dans les combats sacrés avec des branches d'arbre. Dans la suite on commença à varier les nuances par une combinaison de fleurs qui relevant à la fois l'odeur et la couleur; invention due, dans la ville de Sicyone, au génie du peintre Pausias (XXXV, 40,1,3 et 12) et de la bouquetière Glycère, qu'il aimait passionnément. Le peintre reproduisait par la peinture les ouvrages de la bouquetière; la bouquetière le défiait en les variant; c'était un combat de l'art et de la nature . On possède encore les tableaux de cet artiste, et surtout celui qu'on nomme Stephaneplocos (la Bouquetière), on Il peignit Glycère elle-même. Cette invention remonte à la centième olympiade. [2] Les couronnes de fleurs étant ainsi de mode, on vit venir celles qu'on nomme Égyptiennes, puis les couronnes d'hiver pour le temps où la terre refuse des fleurs, et qui sont faites de lamelles de corne colorées. Peu à peu l'usage s'établit à Rome de les appeler corolles, désignation due d'abord à la délicatesse de ces ouvrages; les couronnes que l'on donna dans la suite, faites avec de minces lames d'airain dorées ou argentées, se nommaient corollaires. IV. (III.) [1] Crassus le riche fut le premier qui, ayant fait faire des feuilles artificielles en argent et en or, distribua de pareilles couronnes lors de ses jeux. Pour embellir les couronnes elles-mêmes, on y ajouta des lemnisques (espèces de bandelettes), à l'imitation des couronnes étrusques, qui ne devaient avoir que des lemnisques d'or. Longtemps ils furent sans ornement. P. Claudius Pulcher (an de Rome 570) fut le premier qui les fit ciseler, et ajouta des bractées d'or à la mince lamelle qui faisait le lemnisque. V. [1] Toutefois, on estima toujours beaucoup les couronnes gagnées même dans les jeux; car les citoyens, lors des jeux [consulaires), descendaient eux-mêmes dans le cirque pour prendre part au combat, et y envoyaient leurs esclaves. De là cette loi des Douze Tables : " SI quelqu'un gagne une couronne par lui-même ou par son argent, qu'elle lui soit donnée à cause de son mérite. " Il n'est pas douteux que par ces mots, gagnée par son argent, la loi n'ait entendu une couronne gagnée par ses esclaves ou ses chevaux. Or quel était l'honneur qu'elle procurait? C'était qu'après leur mort le vainqueur et ses père et mère avaient le droit d'être couronnés pendant que le corps était exposé dans la maison, ou porté au lieu des funérailles. Du reste, les couronnes, même celles des jeux, ne se mettaient pas indifféremment en toute circonstance. VI. [1] En ceci la sévérité était fort grande. L. Fulvlus, banquier, dans la seconde guerre punique, accusé d'avoir pendant le jour, de son balcon, regardé dans le forum, ayant une couronne de roses sur la tête, fut emprisonné par l'ordre du sénat, et il ne fut relâché qu'après la fin de la guerre. P. Munatius, ayant mis sur sa tête une couronne de fleurs enlevée à la statue de Marsyas, fut condamné aux fers par les triumvirs; il en appela aux tribuns du peuple, mais ceux-ci n'intercédèrent pas. Il en était autrement à Athènes, ou des jeunes gens en débauche, avant midi, entraient même dans les écoles des philosophes. Chez nous on ne trouve pas d'exemple d'une licence pareille, si ce n'est chez la fille (VII, 46) du dieu Auguste, laquelle, dans ses débauches nocturnes, couronna la statue de Marsyas, comme le déplore la lettre de son divin père. VII. [1] Le peuple romain n'a honoré de fleurs quel le seul Scipion, surnommé Sérapion (VII, 10) à cause de sa ressemblance avec un certain marchand de porcs. Cette circonstance l'avait rendu très cher au peuple pendant son tribunat; du reste, il était digne de la famille des Africains. Il ne laissa pas assez de bien pour se faire enterrer ; le peuple se cotisa pour la dépense des funérailles, et de toutes les ouvertures des maisons on jeta des fleurs sur le convoi. VIII. [1] Dès lors les couronnes étalent employées à honorer les dieux, les lares publics et particuliers, les tombeaux et les mânes. Les plus estimées étaient tressées : quant aux couronnes cousues, nous les trouvons dans les sacrifices des Saliens, et elles étalent d'apparat dans leurs repas. On en vint ensuite aux couronnes de roses; et enfin le luxe fut poussé au point qu'on n'estima plus que les couronnes faites avec les seuls pétales de la fleur; puis on alla demander à l'Inde ou au delà de l'Inde la matière des couronnes cousues; car aujourd'hui il est du grand ton de les donner en feuilles de nard, ou faites de diverses couleurs, avec des étoffes de sole parfumées. C'est là le dernier terme auquel en est le luxe des femmes. IX. [1] Parmi les Grecs, les médecins Mnésithée et Callimaque ont écrit des traités spéciaux sur les couronnes, et indiqué celles qui faisaient mal à la tête. En effet, la santé y est jusqu'à un certain point Intéressée: c'est surtout pendant qu'on boit et qu'on se livre à la gaieté, que les odeurs actives s'insinuent traîtreusement; et l'on connaît l'adresse scélérate de Cléopâtre. Lors des apprêts de la guerre d'Actium, Antoine redoutait jusqu'aux présents de cette reine, et ne prenait d'aliment, qu'après les avoir fait déguster : on rapporte que, voulant se jouer de ses craintes, elle enduisit de poison l'extrémité des fleurs d'une couronne ; ayant cette couronne sur sa tête, et la gaieté faisant des progrès, elle invita Antoine à boire les couronnes. [2] Qui dans cette circonstance aurait redouté des embûches La couronne est effeuillée, jetée dans une coupe... Antoine va boire; elle l'arrête de la main : " C'est donc, dit-elle, Marc-Antoine, contre moi que vous prenez la précaution nouvelle des dégustateurs Et voyez, si je pouvais vivre sans vous, comment les occasions ou les moyens me manqueraient ! " . Elle fit venir de la prison un homme, qui but et expira aussitôt. Outre les deux auteurs nommés plus haut, Théophraste (Hist., VI, 6 et 7), chez les Grecs, a écrit sur les fleurs. Chez nous quelques-uns ont, il est vrai, intitulé leurs livres Anthologie; mais personne, à ma connaissance du moins, n'a traité expressément des fleurs. Quant à nous, nous n'avons pas l'intention ici de tresser des couronnes, cela serait frivole; mais nous dirons sur les fleurs ce qui nous paraître digne d'être rapporté. X. (IV.) [1] Les Romains n'avaient dans leurs jardins qu'un très petit nombre d'espèces de fleurs à couronnes, et presque uniquement les violettes et les roses. Le végétal qui porte la rose est, à vrai dire, plutôt une épine qu'un arbuste; cette fleur vient aussi sur une espèce de ronce (rosa canina) (XVI, 71), et là même elle est d'une odeur agréable, quoique peu pénétrante. Toutes les roses sont d'abord enfermées dans un bouton dont l'enveloppe est grenue; ce bouton ne tarde pas à se gonfler, et à former une sorte de cône vert. Peu à peu la fleur prend une teinte rouge, s'entrouvre et s'épanouit, embrassant des filaments jaunes placés au centre. L'emploi qu'on en fait dans les couronnes est, pour ainsi dire, le moindre parti qu'on en tire : on la fait macérer dans l'huile, et cela dès la guerre de Troie, d'après le témoignage d'Homère (Il, XXIII, 186); de plus, on l'incorpore dans des parfums, comme nous l'avons dit (XIII, 2); on remploie aussi seule en médecine; on la fait entrer dans des emplâtres et des collyres, à cause de ses qualités pénétrantes ; on s'en sert encore à parfumer les tables dans les festins, et jamais elle ne cause de mal. [2] Les espèces les plus célèbres parmi nous sont la rose de Préneste et celle de Campanie; d'autres ont ajouté celle de Milet, qui est d'un rouge très vif, et qui n'a pas plus de douze feuilles; vient ensuite celle de Trachinie (IV, 14), qui est moins rouge, puis celle d'Alabanda, dont les feuilles sont blanchâtres : la moins estimée est la rose épineuse, qui a beaucoup de feuilles, mais très petites. Les roses différent, en effet, par le nombre des feuilles, par la rudesse, le poli, la couleur, l'odeur. [3] Le nombre des feuilles, qui n'est jamais de moins de cinq, va toujours croissant, au point qu'Il est une espèce à cent feuilles : elle vient en Italie, dans la Campanie, et en Grèce, dans les environs de Philippes; mais dans ce dernier lieu elle ne croît pu naturellement: elle vient du mont Pangée, qui est dans le voisinage, et qui produit des ruses à feuilles nombreuses et petites; les habitants les transplantent, et les améliorent par cela même. Cette espèce n'est pas très odorante, non plus que celle dont la feuille est très large et très grande. On peut dire, en peu de mots, que le parfum de la fleur est en rapport avec la rudesse du calice. Caepion, qui vivait sous le règne de l'empereur Tibère, a prétendu que la rose à cent feuilles ne s'employait pas dans les couronnes, ou bien qu'on la reléguait à la jonction des deux branches, n'étant remarquable ni par le parfum ni par la forme. [4] Celle que les Latins nomment grecque, et les Grecs lychnis (agrostema coronaria, L.) ne vient que dans les lieux humides, n'a jamais plus de cinq feuilles, n'est pu plus grosse qu'au violette, et n'a aucune odeur. Une autre, nommée graecula, a les feuilles réunies en peloton; elle ne s'épanouit que lorsqu'on la presse avec la main, et semble toujours être en bouton; les feuilles en sont très larges. Une autre est portée sur une tige semblable à celle de la mauve, et dont les feuilles sont celles de l'olivier; on la nomme mosceuton. La rose d'automne, appelée coroecola, tient le milieu pour la grosseur entre les précédentes. Toutes ces roses sont sans odeur, excepté ta coroneola et celle qui vient sur une ronce; tant il y a de fausses roses! [5] Au reste, la vraie rose doit elle-même beaucoup au terroir : c'est à Cyrène qu'elle est le plus odorante; aussi le parfum qu'on y fait est-il excellait; à Carthagène en Espagne [grâce au terroir], il y a des roses précoces pendant tout l'hiver. La température n'est pas non plus sans influence : en certaines années, les roses sont moins odorantes. En outre, elles sont toutes plus parfumées dans les lieux secs que dans les lieux humides. Le rosier ne veut être planté ni dans les terrains gras, ni dans les terrains argileux, ni dans les terrains arrosés; il se contente d'une terre légère, et aime particulièrement un sol couvert de gravois. La rose de Campanie est précoce, celle de Milet est tardive; cependant c'est celle de Préneste qui finit la dernière. Pour le rosier on travaille la terre plus profondément que pour le blé, plus superficiellement que pour la vigne. [6] Il vient très lentement de graine (la graine est dans le calice, sous la fleur même, et recouverte d'un duvet) ; aussi préfère-t-on le planter de bouture. Une seule espèce se plante, comme le roseau (XVI, 67), par des yeux de racine: c'est le rosier à roses pâles, épineuses, à cinq pétales, à branches très longues; cette rose est la seconde des roses grecques. Tous les rosiers gagnent à être taillés et passés au feu. La transplantation les fait, comme la vigne, pousser très bien et très vite : on a des boutures de quatre doigts de long ou plus, on les plante après le coucher des Pléiades; puis, lorsque le Favonius [vent d'occident] souffle, on les replante à des intervalles d'un pied, et l'on remue fréquemment la terre alentour. Ceux qui veulent rendre les rosiers hâtifs font une fosse d'un pied autour de la racine, et y versent de l'eau chaude au moment ou les boutons commencent à pousser. XI. (V.) [1] Le lis tient le premier rang après la rose, et il a quelque analogie avec elle en raison du parfum et de l'huile qu'on en tire, et qu'on nomme lirinon (XIII, 2). Placé au milieu des rosiers, il produit le meilleur effet, car il commence à donner des fleurs quand les rosiers sont à moitié de leur saison. Aucuns fleur ne s'élève plus haut, le lis atteignant parfois trois coudées; la tête en est toujours languissamment penchée, comme si elle était trop pesante pour la tige. La blancheur du lis est admirable : il est strié à l'extérieur; étroit par le bas, Il va peu à peu en s'élargissant en forme de coupe; le limbe en est renversé, et un filament ténu, la graine et des espèces de safrans se dressent dans le centre. L'odeur, comme la couleur, est double, et autre pour les pétales, autre pour les étamines : Il y a use petite différence ; mais, dans la composition du parfum et de l'huile, on ne rejette pas les pétales. [2] Une fleur assez semblable est produite par la plante herbacée qu'on nomme liseron (convolvulvus sepium, L.). Elle vient dans les buissons, est sans odeur, et n'a point à l'intérieur de safrans (filaments jaunes), ne reproduisant que la blancheur, sorte d'ébauche de la nature s'essayant à la production du lis. Le lis blanc se propage par tous les procédés dont on se sert pour le rosier, et de plus, comme l'hipposelinum (XIX, 48) (smyrnium olusatrum L.), à l'aide d'une gomme qui tel est propre. Rien n'est plus fécond, une racine portant souvent cinquante bulbes. Il y a aussi un lis rouge (lilium chalcedonicum, L.), nommé crinon par les Grecs. D'autres auteurs en nomment la fleur cynorrhodon. Le plus estimé est celui d'Antioche, puis celui de Laodicée de Syrie, puis celui de la Phasilide (XIII, 9); au quatrième rang est celui de l'Italie. XII. [1] On connaît encore des lis pourpres; la tige en est parfois double; la racine est seulement plus charnue; le bulbe est plus gros, mais unique : on les nomme narcisses (narcissus serotinus, L.) Une seconde espèce a la fleur blanche et la corolle pourpre (n. poeticus, L.) Il y a encore cette différence avec les lis, que les feuilles des narcisses sont à la racine. Les plus beaux viennent dans les montagnes de la Lycie. Une troisième espèce a tout semblable aux autres, excepté la corolle, qui est verte (n. tazetta, L.). Tous sont tardifs, fleurissant après le coucher d'Arcturus (XVIII, 76) et vers l'équinoxe d'automne. XIII. [1] Il a été aussi inventé un procédé particulier de reproduction, grâce au goût que les hommes ont pour les choses monstrueuses. On ramasse au mois de juillet des tiges sèches de lis, et on les suspend à la fumée ; puis, au mois de mars, quand les petits nœuds comblement à pousser, on les fait macérer dans la lie de vin noir ou grec, afin qu'ils prennent couleur, et on les plante ainsi dans de petites fosses ou l'on répand quelques hemines (0 litr., 27) de lie. De la sorte on obtient des lis pourpres : il est singulier de teindre une tige pour qu'il en naisse une fleur colorée. XIV. (VI.) [1] La fleur la plus estimée ensuite est la violette; il y en a plusieurs espèces : pourpres, jaunes, blanches (mathiola incana). Elles se reproduisent toutes de plant, comme les herbes potagères. Les violettes pourpre, (viola odorata, L.), qui poussent spontanément dans le terrains bien exposés et maigres, ont les pétales assez larges et sortent immédiatement de la racine, qui est charnue. Les Grecs n'appliquent qu'à elles seules le nom d'ia, et c'est d'après elles qu'est dénommée l'étoffe ianthine (violette). Parmi les violettes cultivées, les plus estimées sont les jaunes (cheiranthus cheiri, L.) ; espèces : la tusculane, celle qu'on nomme marine, à pétales un peu plus larges mais moins odorants, et la calathlane tout à fait Inodore, à pétales très petits. Celle-ci est un présent de l'automne; les autres sont un présent du printemps. XV. [1] La caltha (calendula officinalis, L.) t ressemble beaucoup à la violette calathlane; elle est de même couleur et de même grandeur; elle l'emporte pour le nombre des pétales sur la violette marine, qui n'en a pas plus de cinq; mais elle lui est intérieure pour l'odeur : en effet, celle de la caltha est forte. L'odeur n'est pas moins forte dans la plante appelée scopa royale (chenopodium scoparium, L.); mais ici ce sont les feuilles, et non les fleurs qui sont odorantes. XVI. [1] Le bacchar (gnaphalium sanguineum, L.) n'a que la racine d'odorante ; quelques-uns le nomment nard des champs (XII, 27). On faisait autrefois des parfums avec cette racine. Aristophane, poète de I'ancienne comédie, le témoigne. Quelques-uns ont donné, à tort, l'epithète d'exotique à cette plante. L'odeur en est très voisine de celle du cinnamome. Le bacchar vient dans un sol maigre et non humide. On donne le nom de combretum (juncus maximus, L.) à une plante qui lui ressemble beaucoup, dont les feuilles vont en s'amincissant comme des fils, et qui est plus haute que le bacchar. Mais ce n'est pas tout, il faut aussi corriger l'erreur de ceux qui ont appliqué au bacchar le nom de nard des champs : c'est une autre plante qui porte ce surnom; les Grecq la nomment asaron : nous en avons donné (XII, 21) la description en parlant des espèces du nard. J'ajouterai l'étymologie de ce nom, telle que je la trouve : l'asaron est, dit-on, ainsi appelé parce qu'il n'entre point dans les couronnes (asarum europaeum). XVII. [1] Le safran sauvage (crocus vernus, L.) est le meilleur; il ne convient nullement de le semer en Italie, chaque carré ne rapportant que le vingt-quatrieme du coût. On le multiplie par caïeux. Le safran cultivé (c. sativus, L.) est plus large, plus grand et plus beau; mais il a beaucoup moins de force; Il dégénère toujours, et il est d'un faible rapport même à Cyrène, où les autres fleurs sont toujours les plus estimées. Le plus recherché est celui de Cilicie, et dans ce pays celui du mont Corycus; au second rang est celui du mont Olympe en Lycie; au troisième rang, celui de Centuripinum en Sicile. Quelques-uns ont donné la seconde place au safran phlégéen. Il n'est rien qu'on falsifie autant. On reconnaît qu'il est pur lorsqu'il craque sous la main qui le presse, comme s'il était friable; en effet, quand il est humide, ce qui est dû à la falsification, il cède à la pression. [2] Une seconde épreuve, c'est de porter la main à la figure : il devra picoter le visage et les yeux. Il y a une espèce particulière de safran cultivé qui est extrêmement goûtée; comme elle a du blanc au milieu, on l'appelle dialeucon. Le safran de la Cyrénaïque a le défaut opposé; il est le plus foncé de tous; il se gâte aussi très promptement. Partout le meilleur est celui qui est le plus épais et le plus court ; le plus mauvais est celui qui sent le moisi. Mucien dit qu'en Lycie, au bout de sept à huit ans, on le transplante dans un terrain préparé, et que ce procédé le renouvelle au moment où il dégénère. On ne fait jamais entrer le safran dans les couronnes, les feuilles en étant étroites et formant une espèce de chevelu; [3] mais il va merveilleusement avec le vin, et surtout avec le vin doux. Réduit en poudre, on s'en sert pour parfumer les théâtres. La floraison a lieu lors du coucher des Pléiades, et dure peu de jours; la feuille chasse la fleur. Il est verdoyant au sostice d'hiver, et on le récolte; on le fait sécher â l'ombre, de préférence par un temps froid. La racine en est charnue, et plus vivace que celle des autres plantes. Elle aime a être battue et foulée aux pieds, et elle n'en vient que mieux ; aussi le safran prospère-t-il surtout le long des sentiers et des fontaines. Il était estimé des le temps de la guerre de Troie; du moins Homère (Il. XIV, 348) fait-il mention de trois fleurs, le lotus, le safran et l'hyacinthe (gladiolus segetum). XVIII. (VII.) [1] Toutes les substances odorantes et par conséquent les herbes différent par la couleur, l'odeur et le suc. Il est rare qu'une substance odorante ne soit pas amère, et réciproquement les substances douces sont rarement odorantes. Ainsi le vin est-il plus odorant que la moût, et les productions sauvages plus que celles qui sont dues à la culture. Quelques fleurs ont une bonne odeur de loin, et de près n'en ont presque plus; telle est la violette. La rose fraîche a meilleure odeur de loin; la rose sèche, de prés. Toutes les fleurs ont une odeur plus pénétrante au printemps et le matin. Au fur et à mesure que s'approche l'heure de midi, l'odeur s'affaiblit. [2] Les fleurs des jeunes plantes sont aussi moins odorantes que celles des vieilles ; toutefois c'est dans l'âge intermédiaire que les fleurs ont le plus de parfum. La rose et le safran sont plus odorants quand on les récolte par un temps serein. Au reste, tout est plus parfumé dans les contrées chaudes que dans les contrées froides; en Égypte pourtant les fleurs sont très peu odorantes, parce que l'air y est brumeux et chargé de rosée, à cause du Nil. Quelques fleurs ont une odeur forte, quoique suave; d'autres, tant qu'elles sont vertes, ne sentent rien, à cause d'un excès d'humidité, par exemple le bucéros, qui est le fenugrec. Toutes les fleurs qui ont une odeur pénétrante ne sont pas sans suc : par exemple la violette, la rose, le safran; mais celles qui, douées d'une odeur pénétrante, n'ont pas de suc, ont toutes une odeur forte : par exemple les deux espèces de lis (XXI, 11). L'aurone et la marjolaine ont des odeurs pénétrantes. Dans certaines plantes la fleur seule est suave, les autres parties sont inodores, comme dans la violette et le rester. Parmi les plantes de jardin, les plus odorantes sont les plantes sèches, telles que la rue, la menthe, l'ache; il en est de même de celles qui croissent dans les lieux secs. Quelques fruits deviennent plus odorants en vieillissant; tel est le coing. Ces mêmes fruits, cueillis, le sont plus que sur l'arbre ; d'autres n'ont d'odeur que concassés ou froissés; d'autres, que dépouillés de leur écorce. Certaines substances ne sont odorantes que brûlées, par exemple l'encens et la myrrhe. Toutes les fleurs sont plus amères pilées qu'intactes. Quelques plantes conservent plus longtemps leur odeur, étant sèches, par exemple le mélilot; certains rendent plus odorantes le lieu où elles croissent, telles que l'iris (XII, 52), qui va jusqu'à parfumer l'arbre tout entier, quel qu'il soit, avec les racines duquel il aura été en contact. L'hespéris (giroflée triste, cheiranthus tristis, L.) a plus d'odeur la nuit, ce qui lui a valu ce nom. Aucun des animaux n'est odorant, à moins que nous n'ajoutions fol à ce qui est dit de la panthère (VIII, 23). XIX. [1] Il est encore une distinction qu'il ne faut pas omettre: c'est que plusieurs des plantes odorantes n'entrent pas dans les couronnes, par exemple l'iris et la sallunca, quoique doués tous deux d'une odeur très recherchée. Dans l'iris (XIII, 2) il n'y a d'odorant que la racine, employée pour la parfumerie et la médecine. L'iris le plus estimé est celui de l'Illyrie, et dans ce pays même celui non des contrées maritimes, mais des forêts sur les bords du Drilon et de la Narone; au second rang est celui de la Macédoine, qui est très allongé, blanchâtre et mince ; au troisième rang, celui d'Afrique, le plus grand de tous et d'une saveur très amère. [2] L'iris d'Illyrie comprend deux espèces : le raphanitis, ainsi nommé à cause de sa ressemblance avec le raifort, et le rhizotomos, qui est roussâtre et d'une qualité supérieure (XXI, 38). Le meilleur iris est celui qui, manié, excite l'éternuement. La tige de l'iris est longue d'une coudée, et droite; la fleur est de diverses couleurs, comme l'arc-en-ciel, d'où il a pris son nom. On estime aussi l'iris de Pisidie. Ceux qui doivent arracher l'iris répandent pendant tout autour, trois mois à l'avance, de l'eau miellée, comme s'Ils voulaient par ce sacrifice apaiser la terre; avec la pointe d'une épée ils tracent autour de l'iris trots cercla, et, dès qu'ils l'ont recueilli, ils le lèvent vers le ciel. [3] C'est une plante à propriétés caustiques ; et, maniée, elle fait venir des ampoules comme la brûlure. On recommande surtout d'être, pour le récolter, en état de continence. La racine sèche, et même encore dans la terre, est très promptement attaquée par les vers. Autrefois c'étaient Leucade et l'Elide, où depuis longtemps on cultive cette plante, qui fournissaient la meilleure huile d'iris (XIII, 2); maintenant la meilleure vient de la Pamphylie, mais on estime beaucoup aussi celle de la Cilicie et des contrées septentrionales. XX. [1] La sallunca (valeriana celtica, L.), dont la feuille un peu courte n'est pas susceptible d'être tressée, a de nombreuses racines, herbe plutôt que fleur, tellement serrée qu'elle semble avoir été pressée avec la main, en un mot gazon d'un genre particulier. Elle vient dans la Pannonie, dans la Norique, sur les pentes des Alpes exposées au soleil, et, parmi les villes, à Eporédia. L'odeur en est tellement agréable, que l'exploitation commence à en valoir celle d'une mine : on aime beaucoup à la placer dans les vêtements. XXI. [1] Il en est de même chez les Grecs du polion, plante célébrée par Musée et Hésiode, qui la disent bonne à tout, et propre spécialement à faire acquérir la renommée et les dignités; herbe véritablement merveilleuse, si, comme on le rapporte, les feuilles en sont blanches le matin, pourpres à midi, bleues au coucher du soleil. Il y en a de deux espèces : le pollen des champs (teucrium polium, L.), plus grand; le polion sauvage, plus petit (teucrium montanum, L.) : quelques-uns moment ce dernier tenthrion. Les feuilles en sont semblables aux cheveux blancs de l'homme; elles naissent immédiatement de la racine , et ne s'élèvent jamais à plus d'un palme. XXII. (VIII.) [1] C'en est assez sur les fleurs odorantes : le luxe, qui se glorifie d'avoir vaincu sur ce point la nature par la composition des parfums, a voulu rivaliser aussi dans les étoffes avec les fleurs que recommande l'éclat de leurs couleurs. Je remarque qu'Il y a trois couleurs principales : le rouge de coccus (IX, 65), qui brille de tout son éclat dans les roses, et dont on retrouve le reflet (XXXVII, 40) dans la pourpre de Tyr, dans la pourpre deux fois teinte, et dans celle de Laconie; la couleur d'améthyste, qui brille dans les violettes (XXXVII, 40), et qui se retrouve dans la couleur pourpre et celle que nous avons nommée ianthine ( nous ne parlons que des genres qui offrent plusieurs subdivisions); [2] enfin la couleur conchylienne proprement dite (s, 64), de plusieurs sortes: l'une semblable à l'héliotrope, et généralement plus foncée; l'autre ressemblant à la mauve, et tirant sur le pourpre; une troisième ressemblant à la violette tardive, et c'est celle qui a le plus de vivacité. Voila les rivaux en présence; la nature et le luxe se livrent le combat. Je vois dans les auteurs que le jaune était en honneur dès les temps les plus anciens, mais on le réservait exclusivement aux femmes pour les voiles nuptiaux; et de là vient peut-être qu'il n'est pas compté parmi les couleurs principales, c'est-à-dire communes aux hommes et aux femmes ; c'est en effet cette communauté qui donna le premier rang. XXIII. [1] Nous sommes sans aucun doute vaincus par l'amarante (amarante passe-velours, celosia cristala. L.) : c'est, à vrai dire, plutôt un épi de pourpre qu'une fleur; et de fait elle est inodore. Chose merveilleuse, elle se plaît d'être cueillie, et n'en repousse que mieux ! Elle vient au mois d'août, et, dure jusqu'en automne. La palme est à l'amarante d'Alexandrie, que l'on recueille pour la conserver : quand toutes les fleurs ont passé, on la trempe dans l'eau, et, par une propriété singulière, elle revit; aussi sert-elle à faire les couronnes d'hiver. La qualité spéciale de l'amarante, ainsi appelée parce qu'elle ne se flétrit pas, est indiques par son nom. XXIV. [1] Le nom aussi du cyanus (le bluet) en exprime la couleur. De même pour l'holochrysi (XXI, 85) (immortelle, gnaphalium staechas, L.). Aucune de ces fleurs n'était employée du temps d'Alexandre Ie Grand; car les auteurs de l'époque immédiatement suivante n'en ont pas parlé, ce qui prouve qu'elles ne sont venues en faveur que plus tard. Toutefois, qui pourrait douter que la connaissance n'en soit due aux Grecs, puisque l'Italie n'a que des noms grecs pour les désigner? XXV. [1] Mals certes c'est l'Italie qui a dénommé le petilium (geum rivale, L. ?), plante automnale, naissant auprès des buissons, et recommandable seulement par sa couleur, qui est celle de la rose sauvage. Les feuilles, petites, sont au nombre de cinq. Chose singulière, dans cette fleur la tête se recourbe; et ce n'est qu'après qu'elle s'est redressée que naissent les pétales, formant une corolle petite et de couleur variée, avec une graine jaune au dedans. [2] Le bellion (chrysanthemum segetum, L. ?) est jaune aussi ; il a une couronne de cinquante-cinq barbules, en forme de pastille. Ce sont des fleurs des prés, et les fleurs des prés sont la plupart sans usage, et sans nom par conséquent; ces deux fleurs mêmes portent tantôt un nom, tantôt un autre. XXVI. [1] La chrysocome (chrysocome linosiris, L) ou chrysitis n'a pas de dénomination latine; elles un palme de hauteur, les fleurs en corymbe, d'un jaune d'or; la racine noire, un goût passant de l'astringent au doux : elle croît dans les lieux pierreux et ombragés. XXVII. (IX.) [1] Après avoir passé en revue presque toutes les couleurs les plus célèbres, venons à ces couronnes qui plaisent par la seule variété. il y a deux espèces de ces couronnes: les unes sont faites de fleurs, les autres de feuilles. Les couronnes à fleurs sont les couronnes du genêt (XXIV, 40), cueilli avec sa fleur jaune; du rhododendron (XVI, 33; XXIV, 53); du jujubier, qu'on nomme aussi arbre de Cappadoce, et qui a une fleur odorante semblable a celle de l'olivier; du cyclaminum, qui croît parmi les ronces, dont nous parlerons davantage ailleurs (XXV, 67), et dont la fleur ont couleur de pourpre. XXVIII. [1] Quant aux couronnes à feuilles, le premier rang appartient à celles qui sont faites avec les feuilles du smilax et du lierre, plantes dont nous avons suffisamment parlé a propos des arbrisseaux (XVI, 63 et 62; XXIV, 47 et 49). On emploie encore d'autres espèces qu'il faut indiquer par des noms grecs, attendu que la langue latine présente beaucoup de lacunes dans cette nomenclature. La plupart, il est vrai, sont exotiques; toutefois, il nous faut en faire mention, puisque nous traitons de la nature, et non de l'Italie. XXIX. [1] Ainsi, on emploie dans les couronnes la feuille du melothron(XXIII, 16), de la spiraea (ligustrum vulgare, L. ?), de l'origan (XX, 67), du cneorum (daphne gnidium, L.) appelé casia par Hygin, du cunilago (XX, 63) ou conyza, du melissophyllon ou aplastrum (XX, 45), du mélilot (melilotus officinalis, L.), que nous appelons sertula de Campanie; car le mélilot le plus estimé de l'Italie est celui de la Campanie, comme le meilleur de la Grèce est celui du cap Sunium : viennent ensuite celui de Chalcis et celui de Crète. Partout cette plante croît dans des lieux âpres et sauvages; le nom de sertula qu'elle porte prouve qu'autrefois on en faisait des couronnes. L'odeur, ainsi que la fleur, approche de celle du safran. La tige est blanche : plus les feuilles sont courtes et épaisses, plus on estime le mélilot. XXX. [1] La feuille du trèfle entre aussi dans la composition des couronnes. Il y a trois espèces de trèfle : le premier est nommé chez les Grecs tentôt minyanthes, tantôt asphaltion (psoralea bituminosa, L.); la feuille en est plus grande, et les fabricants de couronnes l'emploient: le second, nommé oxytriphyllon, a la feuille aiguë; le troisième est de tous le plus petit. Parmi ces plantes il en est qui ont les tiges fortes, comme le marathron (fenouil), l'hippomarathron (cachrys sicula) (XX, 95 et 96 ), le myophonum (XXVII, 2) (aconilum napellus, L.). On se sert aussi des ombelles des férules et de la fleur purpurine du lierre (XVI, 62). Il est encore une espèce différente de lierre qui est semblable aux roses sauvages (XVI, 62 ); la couleur seule en plaît; elle est inodore. [2] (X.) On connaît aussi deux cneoron, l'un foncé (daphne cneorum, L.), l'autre blanc (d. gnidium, L.); ce dernier est odorant ; tous deux sont ramifiés. Ils fleurissent après l'équinoxe d'automne. Deux origans aussi sont employés dans les couronnes : l'un n'a point de graine; l'autre, qui est odorant, se nomme crétois (XX, 69). XXXI. [1] Même nombre de thyms : l'un blanc, l'autre foncé. Le thym fleurit vers le solstice d'été; alors les abeilles viennent à la récolte, et c'est un présage pour le miel : en effet, les apiculteurs espèrent un bon produit quand la floraison du thym est abondante. Les pluies lui nuisent, et en font tomber la fleur. On ne peut apercevoir la graine du thym, et cependant la graine de l'origan, très petite, n'échappe pas à la vue. Mais qu'importe que la nature l'ait cachée? On sait qu'elle est dans la fleur; on sème celle-ci, et la plante se multiplie. Que n'ont pas tenté les hommes? Le miel de l'Attique passe pour le meilleur du monde entier : [2] on a donc transplanté du thym de l'Attique, plante qu'à grande peine, comme nous disons, on reproduit par sa fleur. Mais une autre condition naturelle rendit vaines ces tentatives : le thym de l'Attique ne vit qu'a proximité des exhalaisons marines. Autrefois on pensait qu'il en était ainsi de toute espèce de thym, et que pour cette raison il n'en venait pas en Arcadie. Alors on croyait aussi qu'à plus de trois cents stades de la mer l'olivier ne poussait pas (XV, 1). Aujourd'hui nous savons que dans la province Narbonnaise les campagnes pierreuses sont remplies de thym ; c'est presque le seul revenu du pays, des milliers de moutons y venant de contrées lointaines paître cette plante. XXXII. [1] Deux espèces de conyza (X, 63 et t 64), le mâle (erigeron viscosum, L) et la femelle (erigeron graveolens, L.), entrent dans les couronnes; la différence est dans la feuille : la femelle l'a plus menue, plus effilée et plus étroite; le mâle l'a en forme de tulle, et plus divisée. La fleur du mâle est aussi plus éclatante; celle des deux espèces est tardive, et vient après le lever d'Arcturus. L'odeur de la conyza mâle est plus forte, celle du la conyza femelle est plue pénétrante; aussi la conyra femelle a-t-elle plus de vertu contre les morsures des bêtes. Les feuilles de la conyra femelle ont l'odeur du miel; la racine du mâle est nommée par quelques-uns libations : nous en avons parlé (XX, 64). XXXIII. [1] Dans les conyza ce n'est que la feuille qui entre dans les couronnes; mais dans la fleur de Jupiter (agrastemma flos Iovis, L.), l'amaricus (marjolaine), l'hémérocalle (XXI, 90) (pancratium maritimum, L.), l'aurone, l'hélenium, le sisymbrium et le serpolet, toutes plantes ligneuses, on emploie la fleur à la façon de la rose. La fleur de Jupiter ne plaît que par sa couleur; elle est inodore, de même que celle qui en grec se nomme phlox (silene vespertina). Mais les branches et les feuilles sont odorantes dans les végétaux susdits, excepté dans le serpolet. L'hélénium passe pour être né des larmes d'Hélène, aussi celui de l'île d'Hélène est-il le plus estimé. C'est une plante rameuse, qui étend sur le sol ses petites branches, longues de neuf pouces; la feuille est semblable à celle du serpolet. XXXIV. [1] La fleur de l'aurone a une odeur forte, mais agréable; elle est de couleur d'or. Abandonnée à elle-même, l'aurone se propage spontanément; elle se provigne par son sommet. Mais si on la multiplie, c'est de graine plutôt que de racine ou de bouture; et encore vient-elle difficilement de graine. On la transplante ainsi que l'adonium, opérations qui se font l'été pour l'une et l'autre : ces plantes sont en effet très frileuses, néanmoins trop de soleil leur nuit; mais quand elles ont pris de la force, elles poussent des rameaux à la façon de la rue. Le leucanthemum (XXII, 26) (camomille) a l'odeur de l'aurone : il a la fleur blanche, et est feuillé. XXXV. (XI.) [1] Dioclès le médecin et les Siciliens donnent le nom d'amaracus (origanum majorana, L.) a la plante appelée sampsochum en Égypte et en Syrie : on la multiplie des deux façons, de graine et de bouture; elle est plus vivace que les précédentes, et a meilleure odeur. L'amaracus a, comme l'aurone, beaucoup de graines; mais, tandis que l'aurone n'a qu'une racine qui s'enfonce profondément, celle des autres est à fleur de terre, et tient à peine au sol. On sème au commencement de l'automne, et même en certaines localités au printemps, celle de ces plantes qui aiment l'ombre, l'eau et l'engrais. XXXVI. [1] Le nyctegreton (caesalpina pulcherrna, L.?) a été pour Démocrite au nombre des rares merveilles. Selon cet auteur, il est de couleur hysgine, il a la feuille de l'épine, il rampe sur le sol; le plus beau se trouve en Gédrosie; on l'arrache après l'équinoxe du printemps, on le fait sécher pendant trente jours au clair de la lune ; ainsi préparé, il brille la nuit Les mages et les rois des Parthes emploient cette plante lorsqu'ils prononcent des voeux; elle se nomme aussi chénomychon, parce que la vue seule en fait fuir les oies; d'autres la nomment nyctalops, parce que la nuit elle brille de loin. XXXVII. [1] Le mélilot vient partout; cependant le plus estimé est celui de l'Attique : en tout pays on préfère celui qui est récent, qui n'est pas blanchâtre, et qui a le plus de ressemblance avec le safran; en Italie toutefois le blanc est plus odorant. XXXVIII. [1] La violette blanche (mathiola incana, L.) est la première des fleurs qui annoncent le printemps; dans les localités chaudes, elle s'épanouit même dès l'hiver. Viennent ensuite la violette appelée ion, la violette pourprée, la violette couleur de flamme, autrement phlox (XXI, 33), du moins l'espèce sauvage. Le cyclaminum (XXV, 67) fleurit deux fois par an, au printemps et à l'automne ; il craint l'été et l'hiver. Le narcisse et le lis au delà des mers sont un peu plus tardifs que les plantes précédentes ; en Italie, comme nous l'avons dit (XXI, 11), ils fleurissent après les roses; en Grèce, l'anémone est encore plus tardive : c'est la fleur d'un bulbe sauvage; elle est différente de celle dont nous parlerons à propos des plantes médicinales (XXI, 94). Viennent ensuite l'oenanthe (XXI, 95 ), le méllanthum, et, parmi les plantes sauvages, l'héilochrysos (XXI, 24), [2] puis une autre espèce d'anémone nommée limonia, puis le glaïeul, accompagné de l'hyacinthe; en dernier lieu, la rose parmi les fleurs printanières. La rose est aussi la fleur qui passe le plus vite, excepté la rose cultivée; parmi les autres, celles qui durent le plus sont l'hyacinthe, la violette blanche et l'oenanthe; mais, pour faire durer longtemps cette dernière il faut, en la cueillant souvent, l'empêcher de monter en graine. L'oenanthe vient dans les lieux chauds; elle a l'odeur de la vigne en fleur, ce qui lui a valu le nom qu'elle porte. [3] L'hyacinthe (gladiolus segetum) est l'objet de deux fables : d'après l'une, elle porte le deuil de celui qu'avait aimé Apollon; d'après l'autre, elle est née du sang d'Ajax, les veinures de la fleur étant disposées de manière à figurer les lettres grecques AI (AIAS, Ajax). [4] L'héliochrysor a la fleur couleur d'or, la feuille menue, la tige grêle, mais dure. D'après les mages, celui qui s'en couronne, et qui prend des parfums d'une boîte d'or apyre (qui n'a pas éprouvé le feu), obtient crédit et gloire parmi les hommes. Telles sont les fleurs du printemps. XXXIX. [1] Viennent ensuite les fleurs d'été, la lychnis (agrostemma coronaria, L.), la fleur de Jupiter, et une autre espèce de lis, ainsi que le tiphyon (scilla autumnalis, L.) et l'amaracus dit de Phrygie; mais la fleur la plus remarquable est le pothos (silens sibthorpiana). On en distingue deux : l'un qui a la fleur de l'hyacinthe; l'autre qui est plus blanc (s. otites, L.) et qu'on ne sème guère qu'autour des tombeaux, parce qu'il dure davantage. L'iris aussi fleurit en été. Mais ces fleurs à leur tour passent et se fanent; d'autres les remplacent en automne : une troisième espèce de lis; le safran et l'orsinum, ayant l'un et l'autre deux espèces, l'une inodore, l'autre odorante : dès les premières pluies toutes ces fleurs s'épanouissent. [2] Les fabricants de couronnes emploient même la fleur de l'épine (XXIV, 66); on confit bien, pour flatter le palais, les pousses de l'épine blanche! Tel est l'ordre des fleurs d'outre-mer. En Italie, à la violette succède la rose; le lis vient pendant que celle-ci dure; la rose est remplacée par le bluet; le bluet, par l'amarante: quant àl a pervenche, elle est toujours verte. Les feuilles en entourent chaque noeud en forme de couronne, c'est une plante topiaire; elle sert quelquefois à défaut d'autres. Les Grecs lui donnent le nom de chamaedaphné. XL. [1] La violette blanche (XXI, 28) dure au plus trois ans : passé ce temps, elle dégénère. Le rosier va jusqu'à cinq ans sans être ni taillé ni brûlé, opérations qui le rajeunissent. Nous avons dit (XXI, 10) que le terrain importe aussi beaucoup : en Égypte toutes ces plantes sont inodores ; le myrte seul a une odeur excellente. Il est même certains pays où la floraison se fait deux mois plus tôt que dans d'autres. Les plantations de rosiers doivent être bâchées aussitôt après le Favonius, et une seconde fois au solstice d'été : on aura soin, entre les deux façons, que le terrain soit parfaitement nettoyé. XLI. (XII.) [1] Les ruches et les abeilles vont très bien avec les jardins et les plantes à couronnes, et sont, sans grands frais, d'un bon rapport quand elles réussissent. Pour les abeilles, il faut semer le thym, l'apiastrum (melissa officinalis, L.), le rosier, la violette, le lis, le cytise, la fève, l'erville (vicia ercilia, L. ), la cunila (sarriette) (XIX, 50) , le pavot, la conyza, la casia, le mélilot, le mélissophyllum (XXI, 29), le cérinthe (cerinthe major, L.). Le cérinthe a la feuille blanche et recourbée, une coudée de haut , la fleur offrant une concavité pleine d'un suc mielleux. Les abeilles sont très avides de la fleur de ces plantes, et même de la fleur du sénevé; chose étonnante, car il est certain qu'elles ne touchent pas à la fleur de l'olivier (XI, 8) ; aussi vaut-il mieux tenir cet arbre loin d'elles. Il est d'autres arbres, au contraire, qu'il convient de mettre à leur proximité, attendu qu'Ils invitent les essaims qui s'envolent, et les empêchent de s'écarter. XLII. [1] Il faut aussi prendre garde au cornouiller : les abeilles qui en goûtent la fleur meurent de flux de ventre; le remède, c'est de leur donner des sorbes pilées avec du miel ou de l'urine d'homme ou de boeuf, ou des grains de grenade humectés avec du vin amminéen (XIV, 5, 2). Il est très agréable aux ruches d'avoir du genêt planté tout autour. XLIII. [1] J'ai trouvé sur la nourriture des abeilles un fait singulier, et digne d'être rapporté. Il est un bourg appelé Hostilia, et baigné par le Pô; les habitants, quand la nourriture manque dans les environs, mettent les ruches sur des bateaux, et chaque nuit ils leur font remonter un espace de cinq mille pas; au jour, les abeilles sortent et vont butiner; elles reviennent aux bateaux, et ainsi on les change de lieu jusqu'à ce que, le poids faisant enfoncer davantage les bateaux, on comprend que les ruches sont pleines : on revient alors, et on recueille le miel. (XIII.) En Espagne, pour une même raison, on fait voyager les ruches sur des mulets. XLIV. [1] La nourriture a tant d'influence qu'il est même des miels vénéneux. A Héraclée du Pont, en certaines années, le miel devient très pernicieux, quoiqu'il soit toujours fait par les mêmes abeilles. Les auteurs n'ont pas dit de quelles fleurs provenait ce miel; pour nous, nous transcrirons ce que nous avons lu. Il est une plane funeste aux bêtes de somme, plus encore aux chèvres, et pour cela nommée aegolethron (azalea pontica) : les fleurs de cette plante, macérées par un printemps pluvieux, contractent des propriétés nuisibles; aussi cette altération ne se produit pas tous les ans. Voici les signes du miel empoisonné: ne s'épaississant point; d'une couleur plus rouge, d'une odeur toute particulière et provoquant aussitôt des éternuements; plus pesant que le bon miel. [2] Ceux qui en out mangé se couchent à terre cherchant le frais; ils sont, en effet, baignés de sueur. Il y a beaucoup de remèdes dont nous parlerons en lieu et place (XXIX, 31); mais comme il faut en citer immédiatement quelques-uns pour un cas aussi insidieux, je mentionnerai l'hydromel vieux, avec d'excellent miel et de la rue ; les salaisons aussi, pourvu qu'on en prenne à plusieurs reprises, mais pour les revomir aussitôt. Il est certain que les chiens qui mangent les déjections des malades contractent cette affection, et éprouvent les mêmes douleurs. Néanmoins l'hydromel préparé avec ce miel est, quand il a vieilli, innocent; cela est reconnu. Rien non plus n'est meilleur que ce miel, avec le costus, pour adoucir la peau des femmes; avec l'aloès, pour guérir les meurtrissures. XLV. [1] Dans la même partie du Pont, au pays des Sannes, il est une autre espèce de miel, appelée maenomenon, à cause de la folie qu'il produit : on attribue cette malfaisance à la fleur du rhododendron, dont les forêts sont remplies; et cette nation, bien qu'elle paye aux Romains un tribut de cire, ne peut tiret aucun parti d'un miel aussi pernicieux. Dans la Perse et dans la Gétulie, partie de la Mauritanie Césarienne et limitrophe du pays des Massaesylliens, il se produit des rayons vénéneux ; et même quelques-uns ne le sont qu'en partie, circonstance excessivement insidieuse, si la couleur livide ne mettait en garde. Quelles intentions attribuer à la nature en ce piège d'un miel vénéneux, non dans toutes les années ni dans les rayons tout entiers, et dû cependant aux mêmes abeilles? [2] C'était peu d'avoir produit une substance dans laquelle il est si facile de donner du poison: fallait-il qu'elle-même en incorporât dans le miel, au détriment de tant d'animaux ? Mais qu'a-t-elle voulu, sinon rendre l'homme plu précautionné et moins avide? Et en effet, n'avait-elle pas armé les abeilles elles–mêmes d'aiguillons, et d'aiguillons empoisonnes? Le remède contre ces piqûres, je le rapporterai sans différer : [3] On fomentera l'endroit piqué avec du jus de mauve ou de feuilles de lierre, ou bien on boira le jus de ces plantes. Il est étrange cependant que ces insectes, qui portent des poisons dans leur bouche et qui en distillent, n'en meurent pas: sans doute la nature, maîtresse des choses, a donné aux abeilles contre ces poisons la résistance qu'elle a donnée contre les serpents aux Psylles (VII, 2), et aux Marses parmi les hommes. XLVI. (XIV.) [1] La Crète offre un autre miel merveilleux. Sur le mont Carina, qui a neuf mille pas de tour et sur lequel on ne trouve pas de mouches, les abeilles font un miel auquel les mouches ne touchent en aucun pays. Cela même fait reconnaître ce miel, qu'on préfère pour les préparations médicinales. XLVII. [1] Les ruches doivent regarder le lever équinoxial, et éviter l'Aquilon aussi bien que le Favonius. Les meilleures ruches sont celles d'écorce, ensuite celles de d'écorce, en troisième lieu celles d'osier; on en a fait faire en pierre spéculaire, afin d'observer le travail des abeilles à l'intérieur(XVI, 16). Il est très avantageux d'oindre tout autour la ruches avec de la fiente de bœuf. L'opercule doit être mobile par derrière, afin qu'on puisse le pousser en dedans, si la ruche est grande ou l'opération peu productive, de peur que, découragées, les abeilles ne renoncent à travailler; puis on le ramène peu à peu en arrière, les trampant ainsi sur le progrès de leur ouvrage. [2] En hiver on couvrira les ruches avec de la paille; on fera de fréquentes fumigations, surtout avec la fumée de fiente de boeuf. Elle leur est bonne, tue les insectes qui se développent, les araignées, les papillons, les vers, et même excite les abeilles. Il est facile de les débarrasser des araignées, mais le papillon est un ennemi plus dangereux : pour le détruire, on choisit au printemps, quand la mauve mûrit, une nuit sans lune, par un ciel serein, et on allume des flambeaux devant la ruche : les papillons se jettent dans la flamme. XLVIII. [1] Si l'on pense que les abeilles n'ont plus d'aliments, on mettra à la porte de la ruche des raisins secs et des figues pilées, ou bien de la laine cardée, humectée avec du vin cuit ou du raisiné, ou de l'eau miellée. On y met aussi de la chair de poule crue. En certains étés même, où une sécheresse continue leur a enlevé l'aliment fourni par les fleurs, il faut leur donner de la nourriture comme il vient d'être dit. Quand on récolte le miel, on frotte les issues des ruches avec le mélissophyllon (mélisse) ou le genêt broyés, ou bien on les entoure par le milieu avec la vigne blanche, de peur que les abeilles ne se dispersent. On recommande de laver avec de l'eau les pots à miel et les rayons : cette eau, bouillie, fait, dit-on, un vinaigre très salutaire. XLIX. [1] La cire se fait avec les rayons dont on a exprimé le miel ; pour cela on les passe à l'eau, on les fait sécher pendant trois jours dans l'obscurité; le quatrième jour, on les fait fondre sur le feu dans un vase de terre neuf, avec assez d'eau pour qu'ils en soient recouverts; puis on filtre le liquide dans un panier. Alors on fait cuire la cire dans le même vase avec la même eau, et on la verse dans des vases enduits de miel et contenant de l'eau froide. La meilleure est la cire appelée punique; au second rang est une cire très jaune, ayant l'odeur du miel lorsqu'elle est pure, provenant du Pont, et qui, chose étrange ! n'est pas altérée par le miel vénéneux (XXI 44 et 45). Au troisième rang est la cire de Crète; elle a le plus de propolis, substance dont nous avons parlé en traitant des abeilles (XI, 6). Après toutes ces cires vient celle de Corse; et comme elle provient du buis, on lui attribue certaine vertu médicamenteuse. [2] La cire punique se prépare de cette façon : On expose souvent à l'air de la cire Jaune, puis on la fait bouillir dans de l'eau de mer prise au large, et à laquelle on ajoute du nitre; puis avec des cuillers on enlève la fleur de la cire, c'est-à-dire, la partie la plus blanche, et on la verse dans un pot contenant un peu d'eau froide; on fait de nouveau bouillir à part cette portion dans de l'eau de mer, puis on refroidit le vase. Après avoir renouvelé cette opération trois fois, on fait sécher la cire sur une claie de jonc, en plein air, à la lumière du soleil et à celle de la lune : la lune la blanchit, le soleil la sèche; et pour qu'il ne la liquéfie pas, on la protége avec une toile fine. On l'obtient aussi blanche que possible, si après l'insolation on la fait encore recuire. La cire punique est la meilleure pour les préparations médicinales. On rend noire la cire en y incorporant de la cendre de papyrus; rouge, en y incorporant de l'orcanette; [3] enfin, on lui donne toutes sortes de couleurs avec différents drogues, et l'on s'en est pour modeler, pour un nombre Infini d'usages, et même pour vernir les murailles et les armes. Nous avons, à propos des abeilles (XI, 6), donné les autres détails sur le miel et ces insectes; et maintenant ce qu'il y avait à dire sur les jardins est a peu près complet. L. (XV.) [1] Passons aux plantes croissant spontanément, et employées comme aliment dans la plupart des pays, et surtout en Égypte; là elles croissent en telle quantité, que cette contrée est peut-être la seule qui pourrait se passer de céréales, dont pourtant elle abonde. En Italie nous n'en connaissons que très peu, le fraisier, le tamnus (tamnus communis, L), le ruscus (ruscus aculeatus) (XXIII, 83), le batis marin (chritmum maritimum), le batis de jardin (XXVI, 50), nommé par quelques-uns asperge des Gaules, le panais des prés (daucus carotta), le houblon ; et encore sont-ce plutôt des hors-d'oeuvre que des aliments. LI. [1] La plante de ce genre la plus célèbre en Égypte est la colocase (arum colocasia, L.), que quelques-uns nomment cyamos (fève). On la trouve dans le Nil; la tige, cuite, se divise sous la dent en filaments ténus; le thyrse, qui sort d'entre les feuilles, est remarquable ; les feuilles, très larges par comparaison avec celles des arbres, resemblent à celles de la plante que nous nommons personata (XXV, 68), et qui vient dans nos rivières. Les indigènes se complaisent tellement dans les présents de leur fleuve, qu'avec des feuilles de colocasia entrelacées ils font des vases de différentes formes, où ils aiment à boire. Maintenant on cultive cette plante en Italie. LII. [1] En Égypte, le second rang est donné au cichorium (chicorée) (XX, 29), que nous avons nommé endive erratique. Il vient après le lever des Pléiades, et fleurit par portions. La racine en est tenace ; aussi l'emploie-t-on pour faire des liens. L'anthalium (cyperus esculentus, L) croît plus loin du Nil ; le fruit est gros et rond comme la nèfle, sans noyau, sans écorce; la feuille est celle du cyperus. On le mange cuit, ainsi que l'oetum (pistache de terre, arachis hypogea, L.), plante qui n'a que peu de feuilles, et des feuilles très petites, mais dont la racine est grosse. On mange encore l'arachis (lathyrus amphicarpos, L.) et l'aracos (lathyrus tuberosus, L. ), qui ont des racines rameuses et multiples ; du reste point de feuilles, point de partie herbacée, rien qui soit hors du sol. [2] Les autres plantes mangées communément en Égypte sont la condrilla (condrilla juncea, L.), l'hypochoeris (hyoseris lucida, L.), le caucalis (pimpinella saxifraga, L.), l'anthriscus , le sandix (XXII, 38), appelé par d'autres tragopogon, à feuille de safran, le parthenium (XXI, 104), le strychnum (XXI, 105), le corchorus (anagallis arvensis, L), l'aphace (leotondon taraxacum, L.), qui vient à l'équinoxe, l'acinos (thymus acinos, L ), l'épipétron (sedum rupestre , L.), qui ne fleurit jamais, tandis que l'aphace, remplaçant à mesure les fleurs qui se fanent, fleurit tout l'hiver, tout le printemps, et jusqu'en été. Llll. [1] Les Égyptiens ont en outre beaucoup d'autres plantes peu connues; ils vantent surtout le cnicos (carthamus tinctorius, L. ), inconnu à l'Italie, et qu'ils aiment, non comme aliment, mais pour l'huile qu'ils tirent de sa graine. On distingue d'abord le cnicos en sauvage et en cultivé, puis le cnicos sauvage en deux espèces : l'une est moins épineuse que le cnicos cultivé, et a une tige semblable, si ce n'est qu'elle est plus droite ; aussi dans l'antiquité les femmes s'en servaient pour quenouilles, ce qui l'a fait appeler atractylis (carthamus lanatus, L.) par quelques-uns; la graine en est blanche, grosse, amère. L'autre espèce est plus hérissée; la tige en est plus grosse et presque rampante, la graine menue. Le cnicos est du genre des plantes épineuses; car il faut aussi distinguer les genres. LIV. [1] Certaines plantes en effet sont épineuses, d'autres ne le sont pas. Les épineuses se subdivisent en beaucoup d'espèces : l'asperge (asparagus aphylle) et le scorpio (spartium scorpius, L.) sont totalement épineux, et n'ont aucune feuille. Quelques plantes ont des épines et des feuilles, comme le chardon, l'éryngion (XXII , 8), la réglisse (XXII, 11), l'ortie; toutes ces plantes, en effet, ont des feuilles piquantes. D'autres ont des feuilles près des épines, comme l'ononis et le tribulus (XXI, 58). Certaines ont des épines et à la feuille et à la tige, comme le phéos, nommé par quelques-uns stoebe (poterium spinosum). L'hippophaes (XXII, 14) a des épines aux noeuds; le tribulus offre cela de particulier, que le fruit même est épineux. LV. [1] De toutes ces plantes la plus connue est l'ortie, dont les godets, lors de la floraison, produisent un duvet purpurin; elle dépasse souvent deux coudées. Il y en a plusieurs espèces : on remarque l'ortie sauvage, qu'on nomme aussi femelle, et qui est moins piquante; et, parmi les orties sauvages, celle qui est nommée canine, qui pique davantage, dont la tige même est mordicante, et dont les feuilles sont dentelées : on remarque encore celle qui a de l'odeur, et qu'on nomme herculanes. Toutes les orties ont une graine abondante et noire. Chose singulière, sans aiguillons un simple duvet fait du mal; et il suffit de le toucher légèrement, pour qu'il excite du prurit et des élevures qui deviennent sur-le-champ semblables aux brûlures. [2] Le remède en est connu : c'est l'huile. La propriété pongitive ne naît pas avec la plante elle-même, elle ne se développe qu'avec l'influence du soleil. L'ortie commence à pousser au printemps; c'est alors un aliment qui n'est pas désagréable; et même il est l'objet d'une superstition pour beaucoup, qui pensent par là se préserver de maladies pendant toute l'année. La racine des orties sauvages rend plus tendres toutes les viandes avec lesquelles on la fait cuire, et ne cause aucun mal. L'ortie privée de propriétés pongitives se nomme lamium (XXII, 16). Nous parlerons du scorpion à propos des herbes médicinales (XXII, 17). LVI. (XVI.) [1] Le chardon a les feuilles et les tiges garnies d'un duvet épineux; de même l'acorna (enicus acarna, L.), le leucacanthos (centaurea dalmatica, Petter.), le chalceos (cartina corymbosa, L), le cnicos (carthamus tinctorius), le poIyacanthos (cirsiam spinosissimum, DC.), l'onopyxos (onopordon illyricum, L.), l'helxine (acarna gummifera, L.), le scolymus (scolymus maculatus). Le chamaeléon (XXII, 21) n'a pas d'aiguillons aux feuilles. Autre différence: certaines de ces plantes sont multicaules et rameuses, comme le chardon; d'autres sont unicaules et rameuses, comme le cnicos; quelques-unes sont épineuses à la tête seulement, comme l'éryngium. Certaines fleurissent en été, comme le tétralix (centaurea solstitialis) et l'hehine. Le scolymus aussi fleurit tard et longtemps. [2] L'acorna ne se distingue que par sa couleur rousse et son suc gras; l'atractylis serait semblable s'il n'avait pas plus de blancheur, et s'il ne rendait un suc couleur de sang, ce qui le fait appeler phonos par quelques-uns (carthamus lanatus, L.); l'odeur en est fade; la graine mûrit tardivement, pas avant l'automne, remarque qui s'applique à toutes les plantes épineuses. Ces plantes viennent toutes de graine et de rejeton. [3] Le scolymus, qui appartient au genre des chardons, en diffère en ce que la racine, étant cuite, se mange (XX, 99). Ce qui est singulier dans cette espèce, c'est que pendant tout l'été, sans interruption, elle porte des fleurs, des bourgeons et des fruits; les aiguillons, quand la feuille est desséchée, cessent de piquer. L'helxine ne se trouve que rarement, et dans quelques pays seulement. Elle offre des feuilles radicales, du milieu desquelles sort une espèce de pomme couverte de feuilles particulières; la tête contient un suc d'un goût agréable, qu'on appelle mastic d'épine. LVII. [1] Le cactus (cinara carlunculus, L.) est spécial à la Sicile, et il a aussi des caractères spéciaux : la racine émet des tiges qui rampent à terre, à feuilles larges et épineuses; ces tiges se nomment cactus, et on ne les dédaigne pas comme aliment, même lorsqu'elles sont vieilles. La plante porte une autre tige qui est droite, et qu'on nomme pternix (silybum marianum, L.) : elle n'est pas moins agréable au goût, mais ne peut se garder. La graine est garnie d'un duvet qu'on nomme pappos (aigrette). Cette aigrette ôtée, ainsi que l'écorce, le fruit est tendre, et semblable à la moelle du palmier ; on le nomme ascalla. LVIII. [1] Le tribulus (châtaigne d'eau, trapa natans, L.) ne croît que dans les lieux marécageux; détestable ailleurs, il se mange sur les bords du Nil et du Strymon. Il penche vers le fond de l'eau; il a une feuille semblable à celle de l'orme, et portée sur un long pédicule. Dans les autres pays on a deux espèces de tribulus: l'un (tribulus terrestris, L.) a les feuilles de la cirercule (XIX, 61), l'autre (fagonia cretica, L.) a les feuilles munies de piquants. Ce dernier fleurit aussi plus tard, et on le trouve plus fréquemment dans les hales des métairies. La graine en est noire, plus ronde, renfermée dans une gousse; celle de l'autre est semblable à du sable. Parmi les plantes épineuses, Il faut aussi ranger l'ononis (arrête-bœuf, ononis antiquorum, L. ). Il a en effet des piquants aux branches; les feuilles, semblables à celles de la rue, sont placées auprès des piquants, et garnissent toute la tige, en forme de couronne. L'ononls vient après les céréales; elle est incommode pour la charrue, et particulièrement vivace. LIX. [1] Certaines plantes épineuses ont la tige rampante, comme celle qu'on nomme coronopus (lotus ornithopodiodes, L.). Au contraire, ont la tige droite : l'orcanette, dont la racine est employée à teindre le bois et la cire, et, parmi les plantes moins hérissées, l'anthémis (XXII, 26), le phyllanthes (centaurea nigra), l'anémone, l'aphace (pissenlit). Le crepis et le lotos (melilotus officinalis, L.) ont la tige foliacée. LX. [1] Ici, mêmes différences que dans les arbres quant à la brièveté et à la longueur du pédicule de la feuille, quant aux dimensions de la feuille elle-même, quant à ses angles et à ses dentelures, quant à l'odeur et à la fleur. La fleur dure plus longtemps chez les plantes dont la floraison est successive, comme l'ocimum (le basilic?), l'héliotrope (XXII, 29), l'aphace et l'onochili (echium rubrum, L.). (XVII.) Beaucoup de ces plantes, comme aussi certains arbres, ne perdent pas leurs feuilles, particulièrement l'héliotrope, radiante (adiantum capillus Veneris, L.), le polium (teucrium polium, L.). LXI. [1] Il est un autre genre, celui des plantes à épi, auquel appartiennent le cynops (plantago cynops), l'alopecuros (polypogon monspeliense), le stelephuros (plantago lagopus, L.), nommé par quelques-uns ortyx, par d'autres plantain (nous en parlerons plus au long à propos des herbes médicinales), et le thryallis (verbascum limnense, L. ). L'alopecuros a un épi mou, et garni d'un duvet serré; offrant de la ressemblance avec une queue de renard, il en a reçu le nom. Le stelephuros, n'était la floraison sucensive de l'alopécuros, lui ressemble beaucoup. Dans la chicorée et les plantes analogues, les feuilles sont près de terre et sortent de la racine, après le lever des Pléiades (XVII, 66). LXII. [1] Ce n'est pas seulement en Égypte que se mange le perdicium(XXII, 19 ) : ce nom lui vient de la perdrix, qui aime à l'arracher. Il a des racines grosses et nombreuses. De même l'ornithogale (ornithogalum umbellatum, L.) a une tige tendre, blanche, une racine d'un demi-pied, bulbeuse, molle, et pourvue de trois ou quatre rejetons. On fait cuire cette plante dans de la bouillie. LXIII. [1] Chose singulière! le lotos (melilotus caerulea, L.) et l'agilops (avena fatua, L.) ne lèvent qu'au bout d'un an. L'anthémis (XXII, 26) offre aussi la particularité remarquable de commencer à fleurir par le haut, tandis que toutes les plantes dont la floraison est successive commencent par le bas. LXIV. [1] La lappa (galium aparine, L.), qui s'attache à tout, présente une singularité : c'est de donner naissance à une fleur qui ne se montre pas, mais qui reste cachée, et qui produit à l'intérieur les graines; semblable en cela aux animaux dont les oeufs n'éclosent qu'au dedans du corps. Dans les environs de la ville d'Oponte, croît l'opuntia (cactus opuntia, L.), manger agréable même pour l'homme. Choie étonnante! la feuille de cette plante prend racine, et c'est ainsi qu'elle se multiplie. LXV. [1] L'iasione (XXII, 39) (convolvulus sepium, L.) n'a qu'une feuille, mais tellement repliée qu'elle paraît en avoir plusieurs. La condrylla (XXI, 52) est amère, et le suc de la racine est âcre. Amers aussi sont et l'aphace (pissenlit) et la plante nommée picris (XXII, 31), qui fleurit toute l'année, et qui doit à son amertume le nom qu'elle porte. LXVI. [1] On doit remarquer aussi la scille et le safran : tandis que toutes les autres plantes produisent d'abord des feuilles, puis s'arrondissent en tiges, celles-là montrent la tige avant la feuille; mais dans le safran la fleur est poussée par la tige; dans la scille, la tige parait, puis la fleur en sort. Cette plante fleurit trois fois, comme nous l'avons dit (XVIII, 66, 7), indiquant ainsi les trois époques du labourage. LXVII. [1] Quelques-uns rangent parmi les bulbes la racine du cypirus ou glaïeul. Cette racine est bonne a manger; bouillie et pétrie avec la pâte, elle rend le pain plus agréable au goût et plus pesant. La plante nommée thésion (XXII, 31) ressemble assez au glaïeul, mais la saveur en est âpre. LXVIII. [1] La autres plantes du même genre diffèrent par la feuille : celle de l'asphodèle est oblongue et étroite, celle de la seille large et maniable, celle du glaïeul (gladiolus, petite épée) semblable à son nom. On mange dans l'asphodèle et la graine grillée et le bulbe, mais ce dernier se fait cuire sous la cendre, puis on y ajoute du sel et de l'huile; on le pile encore avec des figues, ce qui, d'après Hésiode, est un mets très délicat. On prétend que, semé devant la porte des métairies, l'asphodèle est un préservatif contre les maléfices. Homère ( Od., XI, 539 et XXIV, 13) a fait aussi mention de cette plante. Les bulbes en sont semblables à des navets de médiocre grosseur, et aucune plante n'en a davantage; on en compte souvent quatre-vingts. [2] Théophraste, presque tous les Grecs, et à leur tête Pythagore, ont appelé anthéricon la tige, qui a une coudée et souvent deux, et des feuilles de poireau sauvage, en réservant le nom d'asphodèle à la racine, c'est-à-dire aux bulbes. Les Latins appellent cette plante albucus, et hastula regia l'asphodèle, dont la tige porte des grains semblables à ceux du raisin, distinguant ainsi deux espèces. L'albucus a une tige d'une coudée, grosse, nue, unie; Magon recommande de le couper a la fin du mois de mars et au commencement d'avril, avant la floraison et avant que la graine ne grossisse; de fendre les tiges, de les exposer au soleil le quatrième jour, et d'en faire des bottes lorsqu'elles seront sèches. [3] Le même auteur dit que les Grecs donnent le nom de pistana à la plante aquatique que nous appelons flèche (sagitttaria sagittaefolia L.) Il recommande de l'écorcer depuis les ides de mai (16 mai) jusqu'à la fin d'octobre, et de la faire sécher à un soleil doux. Il veut encore que l'on coupe durant tout le mois de juillet, jusqu'à la racine, l'autre glaïeul nommé cypirus, et qui est aussi une plante de marais, et de le faire sécher au soleil à partir du troisième jour jusqu'au qu'il devienne blanc, avec la précaution de le rentrer tous les jours avant le soleil couché, attendu que la rosée de la nuit est nuisible aux plantes de marais qui sont coupées. LXIX. (XVIII.) [1] Magon fait les mêmes recommandations pour le jonc qu'il nomme mariscus (grand jonc, schoenus mariscus, L.), et qui est employé à tresser des nattes. Il conseille de le cueillir depuis le mois de juin jusqu'à la mi-juillet; et pour le faire sécher il indique les mêmes pratiques que celles que nous avons rapportées en lieu et place pour le jonc de marais. Il fait un second genre du jonc marin (juncus maritimus, L.), appelé par les Grecs ozyschoenos. Il y a trois espèces de joncs : le jonc aigu, stérile, que les Grecs nomment mâle et oxys; les deux autres espèces sont: le jonc femelle, portant une graine noire, [2] et nommé mélancranis, plus gros et plus rameux que le précédent, et l'holoschoenos (scirpus holoschœnus, L.), encore plus gros et plus rameux. Le mélancranis naît isolé, mais l'oxys et I'holoschoenos croissent sur la même motte. L'holoschoenos vaut le mieux pour la vannerie, parce qu'il est souple et charnu; il porte des fruits semblables à des oeufs attachés les uns eux autres. On multiplie le jonc mile par la sommité, que l'on plante en terre; on multiplie le mélancranis de graine. [3] Au reste, les racines de tous les joncs meurent chaque année. On emploie le jonc à faire des nasses de pécheur et d'élégants ouvrages de vannerie. La moelle en est très bonne pour les lampes; et près des Alpes maritimes les joncs sont tellement gros, que, fendus et ouverts, ils ont près d'un pouce de largeur; et en Égypte tellement minces, qu'on en fait des cribles; et c'est le meilleur parti qu'on en tire. [4] Quelques-uns distinguent encore comme espèce particulière le jonc triangulaire nommé cypérus (XXI, 70, mais beaucoup ne le discernent pas du cypirus, à cause de la ressemblance de nom; pour nous, nous ferons la distinction. Le cypirus est, comme nous l'avons dit (XXI, 97), le glaïeul; il a une racine bulbeuse; le plus estimé est celui de la Crète, puis celui de Naxos, en troisième lieu celui de la Phénicie; celui de Crète est blanc, et a une odeur approchant de celle du nard; l'odeur de celui de Naxos en plus âcre ; celui de Phénicie n'a qu'une faible senteur; celui d'Égypte (car il en vient aussi dans ce pays) est Inodore. Cette plante dissipe les tumeurs dures; car déjà nous allons entrer dans l'exposition des remèdes, les fleurs et les parfums étant d'un grand usage en a médecine. [5] Pour le cypirus je suivrai Apollodore, qui défendait de le prendre en boisson: toutefois, le reconnaissant pour très efficace contre les calculs, il s'en sert en fomentation. Il ne doute pas qu'il ne provoque l'avortement, et il rapporte cette particularité singulière, que les barbares se font diminuer la rate en recevant dans la bouche la fumée de cette plante; qu'ils ne sortent jamais qu'après cette fumigation; et que de la sorte ils deviennent chaque jour plus vigoureux et plus robustes. Suivant lui, employé en onction avec l'huile, c'est un remède non douteux pour les écorchures et la mauvaise odeur des aisselles. LXX. [1] Le cypérus ( souchet, cyperus longus, L.) comme nous venons de le dire (XXI, 69), est un jonc anguleux, blanc près de terre, noir et gros au sommet. Les feuilles du bas sont plus grêles que celles du poireau; celles du haut sont menues, et entre elles est la graine. La racine ressemble à une olive noire ; quand elle est oblongue, on la nomme cyperis; elle est d'un grand usage en médecine. Le cypérus le plus estimé est celui du pays d'Ammon (V, 5), en second lieu celui de Rhodes, en troisième celui de Théra, en dernier celui d'Égypte; ce qui ajoute a la confusion, car ce pays produit aussi le cypirus (glaïeul) ; mais le cypirus est très dur et à peine odorant, tandis que le cypérus a toujours une odeur qui joue celle du nard. [2] Il y a aussi une plante de l'Inde qu'on nomme cypira (curcuma longa, L.); elle ressemble au gingembre; mâchée, elle a le goût du safran. Le cypérus a des propriétés épilatoires. On l'applique sur les ptéryglons, sur les ulcères des parties génitales, sur ceux de la bouche, en un mot sur ceux de toutes les parties humides. La racine est un remède efficace contre les piqûres des serpents et des scorpions. Prise en boisson, elle est emménagogue; à trop haute dose, elle a tant de force qu'elle provoque même la chute de la matrice. Favorisant la sortie des calculs et des urines, elle est très utile aux hydropiques. On l'applique sur les ulcères serpigineux et surtout sur ceux de la gorge, dans du vin ou du vinaigre. LXXI. [1] La racine de jonc bouillie dans trois hemines (0 litr., 81) d'eau, jusqu'à réduction du tiers, est un remède contre la toux. La graine, grillée et bue dans de l'eau, arrête le flux de ventre et les menstrues. Le jonc appelé huloschaenos cause des douleurs de tête; on en mâche les parties voisines de la racine contre la morsure des araignées. Je trouve aussi la mention d'une espèce de jonc nommée euripice, dont la graine est soporifique, mais ne doit être prise qu'avec mesure, de peur qu'elle ne jette dans le narcotisme. LXXII. [1] Nous indiquerons aussi les propriétés médicinales du jonc odorant (andropogon schoenanthus, L.), qui vient, comme nous l'avons dit en lieu et place (XII, 48), dans la Coele-Syrie. Le plus estimé est celui du pays des Nabatéens : on l'appelle teuchite; au second rang est celui de Babylone; le plus mauvais est celui d'Afrique, qui est inodore. Le jonc odorant est rond, et laisse sur la langue un goût âpre et vineux. Le vrai donne, frotté, une odeur de rose, et la cassure en est rougeâtre. Il dissipe les flatuosités; aussi est-il bon pour l'estomac, et dans les vomissements de bile et de sang. Il calme le hoquet, provoque des éructations, pousse aux urines, et guérit la vessie. Les femmes en emploient la décoction. Dans l'opisthotonos on en fait des applications avec la résine sèche, qui a des vertus échauffantes. LXXIII. [1] La rose est astringente et réfrigérante; on emploie les pétales, les fleurs et les têtes. La partie blanche des pétales se nomme onglet; la fleur renferme la graine et les filaments; la t$ete, le bouton et le calice. On en fait sécher les pétales, ou bien, par trois procédés différents, on en tire le suc : dans le premier on se contente de les exprimer sans ôter les onglets, qui en effet contiennent le plus de suc; dans le second, on ôte les onglets, et on fait macérer le reste avec de l'huile ou du vin, au soleil, dans des vases de verre. Quelques-uns ajoutent du sel, d'autres, de l'orcanette, ou de l'aspalathe (spartium horridum), ou du joncodorant, parce qu'alors c'est un bon remède pour la matrice et dans la dysenterie. Dans le troisième procédé on ôte les onglets, on pile les feuilles, on les exprime à travers un linge serré , on revit le suc dans un vase d'airain, et on le fait cuire à un feu doux. Jusqu'à consistance de miel; pour cela il faut choisir les pétales les plus odorants. (XIX.) Nous avons dit, en parlant des vins (XIV, 19), comment se fait le vin de roses. Le suc de rose est bon pour les oreilles; [2] en gargarisme, pour les ulcérations de la bouche, pour les gencives, pour le amygdales; on l'emploie pour la gorge, pour la matrice, pour les affections du siège, pour les douleurs de tête. Dans la fièvre, seul ou avec du vinaigre; on s'en sert contre l'insomnie, contre les nausées. Les pétales brûlés entrent dans callibépharum (cosmétique des paupières) ; réduits en poudre, on en saupoudre les cuisses; secs, ils adoucissent l'épiphora. La fleur est soporifique; prise dans de l'hydromel, elle arrête les flux des femmes, et surtout les flux blancs et les crachements de sang ; prise dans trois cyathes (0 litr., 135) de vin, et en quantité suffisante pour les parfumer, elle apaise les douleurs d'estomac. [3] Le fruit est très bon quand il est jaune et n'a pas plus d'un an ; on le fait sécher à l'ombre: le noir est sans usage. On en frictionne les dents douloureuses; Il est diurétique; on l'applique sur l'estomac et sur les érysipèles récents; mis sous les narines, il purge le cerveau. Les têtes prises en boisson arrêtent le flux du ventre et l'hémorragie. Les onglets sont utiles contre l'épiphora. La rose rend sordides les ulcères des yeux, si ce n'est au commencement de l'épiphora, appliquée sèche avec du pain; les pétales sont avantageux dans les affections de l'estomac, dans les tranchées, dans les maux de ventre et d'intestins, et sur les hypocondres, même en topique. On les confit aussi comme le lapathum (patience) pour les manger. Il faut prendre garde à la moisissure, qui s'en empare promptement. Les pétales dont on a exprimé le suc ne sont pas sans quelque usage. On en fait une poudre qui sert à réprimer la sueur; on la jette sur le corps à la sortie du bain, on l'y laisse sécher, puis on l'enlève avec de l'eau froide. La tête du rosier sauvage, avec de la graisse d'ours, est merveilleuse contre l'alopécie. LXXIV. [1] Si la beauté de la fleur de lis est célèbre, l'utilité multipliée des oignons ne l'est pas moins : pris en breuvage dans du vin, ils sont bons contre les morsures des serpents et les champignons vénéneux. Pour les cors aux pieds on les fait cuire dans du vin, et on les laisse appliqués pendant trois jours. Cuits avec de la graisse ou de l'huile, ils font revenir le poil sur les parties brûlées; pris dans du vin miellé, ils évacuent par le bas le mauvais sang. Ils sont bons pour la rate, pour les hernies, pour les spasmes et pour les menstrues. Bouillis dans du vin et appliqués avec du miel, ils guérissent les plaies des parties nerveuses, [2] dissipent les lichens, les lèpres, et les taches Ientigineuses de la face. Ils effacent les rides. Les feuilles, cuites dans du vinaigre, se mettent sur les plaies, sur les testicules enflammés; mais alors il vaut mieux les appliquer avec la jusquiame et la farine de froment. On applique la graine sur les érysipèles; la fleur et les feuilles, sur les vieux ulcères. Le suc exprimé de la fleur est appelé par les uns miel, par les autres syrium; on l'emploie pour détendre la matrice, exciter la sueur et mûrir les suppurations. LXXV. [1] Deux espèces de narcisse sont employées en médecine : le narcisse à fleur purpurine (XXI, 12) (narcissus poeticus, L.) et le narcisse à fleur herbacée (narcissus tazetta, L.). Ce dernier est contraire à l'estomac, aussi est-Il vomitif et purgatif; il attaque les nerfs, il rend la tête pesante; appelé narcisse, du narcotisme, et non de l'enfant de la Fable. L'oignon des deux espèces a un goût mielleux. Appliqué avec un peu de miel sur les brûlures, il est utile; de même pour les plaies et les luxations. Avec du miel et de la farine d'avoine, il est bon contre le panus; la même préparation fait sortir les corps enfoncés dans les chairs. Pilé dans de la polenta et de l'huile, il guérit les contusions et les coups de pierre ; il nettoie les plaies, mélangé avec de la farine. Il efface les taches noires de la peau. Les fleurs donnent l'huile de narcisse, bonne pour amollir les duretés et réchauffer les parties gelées. Elle est très avantageuse pour les oreilles, mais elle cause en même temps des douleurs de tête. LXXVI. [1] Il y a des violettes sauvages et des violettes cultivées. Les violettes pourpres sont réfrigérantes. Contre les inflammations, on les applique sur l'estomac brûlant, et dans les chaleurs de la tête, sur le front. On s'en sert en particulier pour les fluxions des yeux, pour la chute du siège et de la matrice, et contre les suppurations. Portées en couronnes ou simplement flairées, elles dissipent l'ivresse et les pesanteurs de tête; bues dans de l'eau, l'esquinancie. La partie purpurine prise dans de l'eau guérit l'épilepsie, surtout chez les enfants. La graine de violettes est bonne contre la piqûre des scorpions. La fleur de la violette blanche fait ouvrir les abcès; la plante même les résout. La violette blanche et la violette jaune diminuent les menstrues et font couler les urines ; fraîches, elles ont moins de vertu; [2] aussi les emploie-t-on sèches, gardées depuis un an. La violette jaune, à la dose d'un demi-cyathe dans trois cyathes (0 lit., 135) d'eau, est emménagogue. Les racines, appliquées avec du vinaigre, apaisent les maux de rate, la goutte; avec de la myrrhe et du safran, les inflammations des yeux. Les feuilles avec du miel nettoient les ulcères de la tête; avec du cérat, les rhagades du siège et les autres fissures des parties humides ; avec du vinaigre, elles guérissent les abcès. LXXVII. [1] Le bacchar (digitale pourprée? ), appelé par quelques-uns en latin perpessa, est employé en médecine. Il est utile contre les morsures des serpents, contre les douleurs et les chaleurs de la tête, contre les fluxions. On l'applique sur les mamelles tuméfiées après l'accouchement, sur l'aœgilops commençant, et sur l'érysipèle. L'odeur en est soporitive. Il est bon de faire boire une décoction de la racine dans les spasmes, dans les chutes graves, dans les convulsions, dans l'asthme. Contre les toux invétérées, on fait bouillir trois ou quatre des racines jusqu'à réduction au tiers : cette boisson purge les femmes après une fausse couche; elle dissipe les points de côté, et chasse les pierres de la vessie. On fait aussi avec le bacchar une poudre siccative [de la sueur]. On met du bacchar dans les vêtements, à cause de l'odeur. Le combretum, que nous avons dit semblable au bacchar (XXI, 16), pilé avec de l'axonge, guérit merveilleusement les blessures. LXXVIII. [1] On prétend que l'asaret (asarum europaeum, L.) est bon pour les affections du foie, pris à la dose d'une once dans une hémine (0 litr., 27) de vin miellé coupé d'eau. Il évacue par le bas comme l'ellébore. Il est bon dans l'hydropisie, dans les affections des hypocondres, de la matrice, et dans l'ictère; mêlé à du moût, il fait un vin diurétique. On l'arrache dés qu'il jette des feuilles ; on le fait sécher à l'ombre. Il se moisit très promptement. LXXIX. (XX.) [1] Quelques-uns, comme nous l'avons dit (XXI, 16), ayant appelé nard des champs la racine du bacchar, nous mettrons ici les propriétés médicinales du nard celtique, conformément à ce que nous avons promis en traitant des arbres exotiques (XII, 26). Il est avantageux, à la dose de deux drachmes (8 gram.) dans du vin, contre la morsure des serpents; dans de l'eau ou dans du vin, contre les inflammations du colon, du foie et des reins, et contre l'ictère; seul ou avec l'absinthe, contre l'hydropisie. Il arrête les métrorrhagies (valeriana celtica). LXXX. [1] La racine de la plante qu'au même endroit nous avons appelée phu (valeriana Dioscoridis, Sibth. ), pilée ou bouillie, se prend en boisson dans les suffocations hystériques, dans les douleurs de la poitrine ou des côtés. Dans du vin, elle est emménagogue. LXXXI. [1] Le safran ne se mêle ni au miel ni à aucune substance douce, mais il se mêle très bien au vin ou à l'eau ; il est très utile en médecine. On le garde dans des boites de corne. Appliqué avec de l'oeuf, il dissipe toutes les inflammations, mais surtout celles des yeux; il dissipe aussi les suffocations hystériques, les ulcérations de l'estomac, de la poitrine, des reins, du foie, du poumon et de la vessie; il est particulièrement utile dans l'inflammation de ces parties, ainsi que dans la toux et la pleurésie. Il guérit les démangeaisons; il est diurétique. Ceux qui auront bu préalablement du safran ne ressentiront pas la pesanteur de tête que cause le vin, et résisteront à l'ivresse. Une couronne de safran dissipe les fumées du vin. Le safran est soporitif; il émeut doucement la tête; il est aphrodisiaque. La fleur, réduite en liniment avec la terre cimoliée, s'applique sur l'érysipèle. Le safran entre dans la composition de plusieurs médicaments. LXXXII. [1] Il y a même un collyre qui lui doit son nom. Le marc de l'onguent de safran (crocinum), qu'on appelle crocomagma, n'est pas sans utilité contre la cataracte; il est diurétique, plus échauffant que le safran lui-même; le meilleur est celui qui, mis dans la bouche, laisse aux dents et à la salive la couleur du safran. LXXXIII. [1] L'iris roux est meilleur que le le blanc. Il est bon d'en faire porter aux enfants, surtout quand ils font des dents et quand ils toussent, et de faire prendre quelques gouttes du suc de la plante à ceux qui ont des vers. Les autres propriétés ne diffèrent guère de celles du miel. ris déterge les ulcères de la tête et surtout les vieux abcès. A la dose de deux drachmes (8 gram.) avec du miel, il lâche le ventre. En infusion, Il est bon pour la toux, les tranchées, les flatuosités; avec du vinaigre, contre les affections de la rate; avec de l'oxycrat, contre les morsures des serpents et des araignées; à la dose de deus drachmes, dans du pain ou de l'eau, contre la piqûre des scorpions; [2] en application avec de l'huile, contre les morsures des chiens, contre les refroidissements, contre les douleurs des nerfs. On l'applique, avec la résine, sur les lombes et les hanches. Il a une vertu échauffante. Présenté sous les narines, il excite l'éternuement et purge le cerveau. Dans les douleurs de tête, on s'en sert en application avec le coing ou le struthée [espèce de coing ]. Il dissipe les fumées du vin et l'orthopnée. Il est vomitif, à la dose de deux oboles (1 gr., 8). Il fait sortir les esquilles, appliqué avec du miel. En poudre, on l'emploie dans le panaris. On mêle cette poudre avec du vin, on l'applique sur les cors et la verrues, la laissant trois jours en place. [3] Mâché, l'iris corrige la mauvaise haleine et l'odeur désagréable des aisselles. Le suc ramollit toutes les duretés. L'iris est soporatif, mais il consume la liqueur séminale; il guérit les rhagades du siège, les condylomes, et toutes les excroissance. Il est des auteurs qui appellent xyris (iris fetidissima, L.) l'iris sauvage. Celui-ci dissipe les scrofules, les panus, les tumeurs inguinales : on recommande de le cueillir de la main gauche quand il est destiné à cet usage, et de nommer la personne pour qui on le cueille. A ce sujet, nous dévoilerons le crime des herboristes : ils gardent une partie de cet iris et de quelques autres herbes, comme le plantain ; et s'ils ne se croient pas assez bien payés, et qu'ils veuillent être employés une seconde fois, ils enterrent cette partie dans l'endroit même où ils ont cueilli la plante, avec l'intention, je pense, de raviver le mal qu'ils avalent péri. La racine de la saliunca (XXI, 20), cuite dans du vin, arrête le vomissement, et fortifie l'estomac. LXXXIV. [1] Quant au polion (XXI, 21), selon Musée et Hésiode, ceux qui ambitionnent les honneurs et la gloire doivent s'en frotter, le manier, le cultiver; contre les serpents on doit le mettre sous son lit, le brûler, ou le prendre en breuvage, ou en faire des applications, bouilli, frais ou sec, dans du vin. On le fait boire dans du vinaigre contre les affections de la rate ; dans du vin, contre l'ictère; bouilli dans du vin, contre l'hydropisie commençante : de cette dernière façon, on l'applique aussi sur les plaies. Il fait sortir l'arrière-faix et les foetus morts ; il dissipe les douleurs générales; il évacue la vessie; on l'applique dans les fluxions des yeux. Il n'est point de simple qui mérite mieux rentrer dans la composition alexipharmaque. [3] Qu'il soit mauvais à l'estomac, qu'il charge la tête, et que, pris en boisson, il fasse avorter, c'est ce que nient quelques-uns. Ils disent encore superstitieusement qu'il faut, dès qu'on l'a trouvé, se l'attacher au cou contre la cataracte, en prenant garde qu'il ne touche à terre. Ils disent qu'il a les feuilles semblables a celles du thym , si ce n'est qu'elles sont plus molles, plus blanches et plus cotonneuses. Pilé avec la rue sauvage dans de l'eau de pluie, ou prétend qu'il adoucit les aspics ; et, non moins que la fleur de grenadier, il resserre les plaies, les arrête, et les empêche de s'étendre. LXXXV. [1] L'holochrysos (XXI, 24) (gnaphalium stoechas, L) est bon pour la strangurie, bu dans du vin, et pour les fluxions des yeux, en application; avec de la lie de vin brûlée et de la polenta, il guérit les lichens. La racine de chrysocome (XXI, 26) est échauffante et astringente. On la donne en boisson contre les affections du foie et des poumons; dans de l'eau miellée, contre les douleurs de matrice : elle est emménagogue, et, administrée crue, elle évacue la eaux de l'hydropisie. LXXXVI. [1] Le mélissophyllon ou mélittène (melissa officinalis, L.), si on en frotte les ruches, empêche les abeilles de fuir : il n'est, en effet, point de fleur qu'elles aiment mieux. Il est très aisé de conserver les essaims dans les fétus où elle abonde. C'est un excellent remède contre les piqûres de ces insectes, des guêpes et autres semblables, comme aussi des araignées et des scorpions; excellent aussi contre les suffocations hystériques, avec addition de nitre; contre les tranchées intestinales, avec du vin. On se sert des feuilles avec du sel, en application, contre les écrouelles et les affections du siège. La décoction en est emménagogue, résout les inflammations, guérit les ulcères, est bonne contre les maladies articulaires et les morsures des chiens. On remploie utilement dans les dysenteries invétérées, dans le flux céliaque, dans l'orthopnée, dans les affections de la rate, dans les ulcères de la poitrine. On regarde comme un excellent remède pour éclaircir la vue, de s'en frotter les yeux, mélangée avec du miel. LXXXVII. [1] Le mélilot (melilotus officinalis, L.) aussi guérit les maux des yeux, avec un jaune d'oeuf ou la graine de lin. Il apaise les douleurs des mâchoires et celles de la tête, avec de l'huile rosat; avec du vin cuit, les douleurs des oreilles ainsi que les enflures et les crevasses qui viennent aux mains; les douleurs d'estomac, cuit dans du vin, ou pilé cru. Il produit le même effet dans les affections de matrice. On l'emploie pour guérir les testicules, la chute du fondement et les affections de cette partie, bouilli frais dans de l'eau ou dans du vin cuit; avec addition d'huile rosat, on l'applique sur les carcinomes. On le fait bouillir dans du vin doux. Il et particulièrement efficace contre les mélicéris. LXXXVIII. (XXI.) [1] On regarde, je le sais, le trèfle (XXI, 30) comme excellent contre les blessures des serpents et des scorpions, la graine à la dose de vingt grains dans du vin ou de l'oxycrat, ou bien la feuille ou l'herbe tout entière en décoction; et on assure qu'il se se voit jamais de serpents dans le trèfle. Des auteurs célèbres, je le sais encore, ont prétendu que le trèfle que nous avons appelé minyanthes (XXI, 30) est un antidote universel, à la dose de vingt-cinq grains seulement ; sans compter beaucoup d'autres propriétés médicinales qui lui sont attribués. Mais ces opinions sont contrebalancées dans mon esprit par une autorité très imposante : le poète Sophocle dit que cette plante est vénéneuse. [2] Le 2 médecin Simus, de son côté, assure que la décoction ou le suc versé sur le corps cause le sentiment de cuisson qu'éprouvent les personnes blessée par un serpent, auxquelles on applique le trèfle. Je pense donc qu'il ne doit être employé que comme contre-poison : peut-être, en effet, le venin en est-il contraire à celui qu'il s'agit de combattre, phénomène qu'on a observé dans beaucoup d'autres cas. Je remarque que la graine du trèfle à petites feuilles, réduits en onguent pour le visage, est utile aux femmes pour entretenir la fraîcheur de la peau. LXXXIX. [1] Le thym doit être cueilli en fleur et séché à l'ombre. Il y en a de deux sortes : le blanc, à racine ligneuse, et croissant sur les coteaux; il est plus estimé; l'autre, qui est plus foncé et porte des fleurs noirs. L'un et l'autre passent pour très propres à éclaircir la vue, pris soit dans les aliments, soit dans les médicaments; préparés de même, ils sont bons contre la toux invétérée. En loch, avec du vinaigre et du sel, Ils facilitent l'expectoration; avec du miel, ils dissolvent les grumeaux de sang; [2] appliqués extérieurement avec de la moutarde, ils diminuent les fluxions chroniques de la gorge, ainsi que les affections de l'estomac et du ventre. Toutefois il faut en user modérément, parce qu'ils échauffent. Ils resserrent le ventre. S'il y a des ulcérations dans les intestins, il faut en mettre le poids d'un denier (2 gr., 85) dans un setier (0 Iltr., 54) de vinaigre et de miel; même précaution si la douleur est dans le côté, ou entre les épaules ou dans la poitrine. Dans du vinaigre avec du miel, ils sont avantageux pour les affections des hypocondres: cette potion se donne aussi dans l'aliénation mentale et dans la mélancolie. [3] On la donne dans l'épilepsie; lors de l'accès, l'odeur du thym fait revenir les malades. On dit même que les épileptiques doivent dormir sur du thym mollet. Le thym soulage dans l'orthopnée, dans l'asthme et dans les retards des règles. Il expulse les foetus morts, bouilli dans de l'eau jusqu'à réduction du tiers: aux hommes on le donne, avec du miel et du vinaigre, contre les flatuosités comme aussi contre les gonflements du ventre et des testicules, et contre les douleurs de vessie; appliqué avec du vin, il guérit les tumeurs et les fluxions; avec du vinaigre, les callosités et les verrues. On l'applique avec du vin, dans la coxalgie; pilé avec de l'huile et versé sur de la laine, dans les maladies articulaires et dans les luxations. On en fait prendre en boisson dans les maladies articulaires, à la dose de trois oboles (2 gr., 25), dans trois de vinaigre et de miel ; pilé avec du sel, dans l'anorexie. XC. [1] L'hémérocalie (hemerocallis fulva, L) a la feuille tendre et d'un vert pâle, la racine odorante et bulbeuse. Cette racine, appliquée, en pessaire, avec du miel, évacue les eaux et même le mauvais sang. Les feuilles s'appliquent sur les fluxions des yeux et sur les seins douloureux après l'accouchement. XCI. [1] L'hélénium, né, comme nous l'avons dit (XXI, 22) (thymus incanus), des larmes d'Hélène, passe pour augmenter la beauté et pour entretenir la délicatesse de la peau chez les femmes, tant au visage que dans le reste du corps. En outre, on prétend que cette plante donne de la grâce et de l'attrait à celles qui en font usage, et que, prise avec du vin, elle excite la gaieté, produisant le même effet que le népenthès vanté par Homère (Od., IV, 221), qui faisait oublier tout sujet de tristesse. Le suc de l'hélénium est fort doux; la racine prise à jeun, dans de l'eau, soulage dans l'orthopnée; elle est blanche en dedans, et a une saveur douce; on la prend en breuvage dans du vin, contre les morsures des serpents ; on dit encore que broyée elle tue les rats. XCII. [1] On distingue deux espèces d'aurone : l'une des champs, l'autre des montagnes; cette dernière est pour nous l'aurone femelle (santolina chamoecyparrisos), l'autre, l'aurone mâle (artemisia abrotanum). L'une et l'autre sont amères comme l'absinthe. La plus estimée est celle de Sicile, puis celle de Galatie. Les feuilles sont employées, mais la semence a plus de force pour échauffer; aussi est-elle bonne aux nerfs, à la toux, à l'orthopnée, aux convulsions, aux ruptures, aux lombes, aux stranguries. On fait bouillir des poignées de cette plante jusqu'à réduction du tiers, et l'on donne quatre cyathes de cette décoction. On prescrit la graine pilée, dans de l'eau, à la dose d'une drachme. Elle est bonne pour la matrice. Avec la farine d'orge, elle mûrit les tumeurs. Avec la pulpe de coing que l'on aura fait cuire, on l'applique sur les yeux enflammés. [2] Elle chasse les serpents : contre leur morsure on s'en sert, ou en boisson dans du vin, ou en application. Elle est très efficace contre les animaux dont le venin produit des tremblements et du froid, tels que les scorpions et les araignées phalanges. En boisson, elle est bonne aussi contre les autres poisons, contre les frissons, d'où qu'ils proviennent, et pour l'extraction des corps étrangers. Elle chasse aussi les vers intestinaux. On prétend qu'une branche d'aurone, mise sous le chevet, est aphrodisiaque, et que cette plante est très efficace contre tous les maléfices qui causent l'Impuissance. XCIII. (XXII.) [1] Le leucanthème (XXI, 34), mêlé avec deux parties de vinaigre, est salutaire dans l'asthme. Le sampsuchum ou amaracum (XXI, 35) (celui de Chypre est le plus estimé et le plus odorant) guérit les piqûres des scorpions, en topique, avec du vinaigre et du sel. En pessaire, il est emménagogue; en boisson, il a moins de force; avec la polenta, il arrête les fluxions des yeux. La décoction dissipe les tranchées. Il est diurétique; il est bon dans l'hydropisie. Sec, il est sternutatoire. On en extrait une huile appelée sampsuchine ou amaracine : elle échauffe et ramollit les nerfs; elle échauffe aussi la matrice. Les feuilles sont bonnes, avec du miel, dans les meurtrissures ; avec du cérat, dans les luxations. XCIV. (XXIII.) [1] Ci-dessus (XXI, 38) nous n'avons parlé que des anémones à couronne (anemona coronaria, L.); maintenant parlons des anémones médicinales. Quelques-uns appellent l'anémone phrénion. Il y en a de deux sortes : l'une sauvage (anemone apennina), l'autre (a. hortensis, L.) croissant dans les lieux cultivés, toutes deux aimant les terrains sablonneux. L'anémone cultivée a plusieurs espèces : les unes, et ce sont les plus communes, portent des fleurs écarlates; les autres, des fleurs pourpres ; d'autres, des fleurs blanches. Ces trois espèces ont les feuilles semblables à celles de l'ache ; elles ne passent guère un demi-pied en hauteur, et le sommet en est comme celui de l'asperge. [2] La fleur ne s'épanouit que quand le vent souffle, et c'est ce qui a valu a l'anémone le nom qu'elle porte (ἄνεμος, vent ). L'anémone sauvage est plus grande, a les feuilles plus larges, et porte des fleurs écarlates. Quelques-uns, par erreur, prennent pour l'anémone sauvage l'argemone (XXV, 56); d'autres, le pavot que nous avons appelé rhoeas (XIX, 53). Mais la différence est grande : ces deux dernières plantes fleurissent plus tard; l'anémone n'en a ni le suc ni le calice, outre qu'elle se termine en pointe d'asperge. Les anémones conviennent dans les douleurs et les inflammations de la tête, dans les maladies de la matrice, et pour faire venir le lait. Elles sont emménagogues, prises avec de la décoction d'orge, ou en pessaire, avec de la laine. [3] La racine, mâchée, attire la pituite, guérit le mal de dents : en décoction, elle guérit les fluxions des yeux et efface les cicatrices. Les mages ont attribué de grands effets à ces plantes, ordonnant de cueillir aussitôt la première qu'on aura aperçue de l'année, et de dire qu'on la cueille pour guérir de la fièvre tierce ou de la fièvre quarte; après quoi on enveloppera la fleur dans du drap incarnat, on la gardera à l'ombre, pour la porter en amulette quand il en sera besoin. La racine de l'anémone à fleur écarlate, broyée et appliquée sur un animal quelconque, y fait plaie par sa vertu corrosive; aussi s'en sert-on pour déterger les ulcères. XCV. (XXIV.) [1] L'oenanthe (spiraea filipendula, L.) est une plante qui croît dans les lieux pierreux; elle a les feuilles du panais, et les racines grosses et nombreuses. La tige et les feuilles, prises en boisson avec du miel et du vin rouge, facilitent l'accouchement et font sortir l'arrière-faix; dans du miel, elles apaisent la toux et sont diurétiques: la racine convient aussi aux affections de vessie. XCVI. (XXV.) [1] L'héliochrysum, nommé par d'autres chrysanthemon, a de petits rameaux blancs et les feuilles blanchâtres, semblables à celles de l'aurone. Les bouquets, disposée en rond, et brillant comme l'or aux rayons du soleil, pendent en grappes et ne se flétrissent jamais ; aussi en fait-on des couronnes pour les dieux, usage auquel Ptolémée, roi d'Égypte, fut constamment fidèle. Il croît parmi les buissons. Pris avec du vin, il est diurétique et emménagogue; il résout les duretés et les inflammations; avec du miel, on en fait un topique pour les brûlures; en potion, on l'emploie contre la morsure des serpents et les douleurs lombaires; avec du vin miellé, il fond le sang caillé dans le ventre ou la vessie. Les feuilles broyées, à la dose de trois oboles dans du vin blanc, arrêtent les pertes chez les femmes. Il conserve les vêtements par son odeur, qui n'est pas sans agrément (immortelle, gnaphalium stoechas). XCVII. (XXVI.) [1] L'hyacinthe (XVI, 31; XXI, 38) croît surtout dans la Gaule, où elle est employée pour la teinture écarlate nommée hysgine. La racine (XVI, 31) est bulbeuse, et fort connue des marchands d'esclaves : appliquée avec du vin doux, elle arrête la marche et retarde les signes de la puberté. Elle guérit les tranchées et les piqûres d'araignées; elle est diurétique. On en donne la graine avec l'aurone, dans les blessures faites par les serpents et les scorpions, et dans l'ictère (delphinium peregrinum, L.) XCVIIl. [1] La graine de celychnis (XXI, 10) couleur de feu, pilée dans du vin, se boit contre les blessures faites par les serpents, les scorpions, les frelons et autres animaux venimeux. Le lychnis sauvage (githago segetum, L.) est contraire à l'estomac; il lâche le ventre. A la dose de deux drachmes, il est très bon pour évacuer la bile. Il est tellement contraire aux scorpions, que la vue seule en engourdit ces insectes. Les Astatiques appellent la racine bolite; on dit qu'attachée près de l'oeil elle efface les taies. XCIX. (XXVII.) [1] La vincapervinca ou chamaedaphné, pilée sèche, se donne dans de l'eau aux hydropiques, à la dose d'une cuiller, et évacue très promptement le liquide épanché; cuite dans la cendre et arrosée de vin, elle résout les tumeurs. Le suc est un remède pour les oreilles. En suppositoire, on dit que cette plante est très bonne dans la diarrhée (vinca minor, L.) C. [1] La racine du ruscus en décoction se prend, de deux jours l'un, dans l'affection calculeuse, dans les cas où l'urine sort difficilement ou est sanguinolente. Il faut que la racine ait été cueillie la veille, que le lendemain matin on la fasse cuire, et qu'on en mêle un setier à deux cyathes (0 litr., 09) de vin. Quelques-uns pilent cette racine crue, et la prennent dans de l'eau ; enfin on prétend que rien n'est plus utile pour les parties viriles que les jeunes tiges broyées dans du vinaigre (ruscus aculeatus, L.) CI. [1] Le batis (XXVI, 50) relâche le ventre. Pilé cru, on en fait un topique pour les goutteux. L'acinos (thymus acinos, L.) est cultivé par les Égyptiens, qui en font des couronnes et qui le mangent; on le prendrait pour l'ocimum, si les tiges et les feuilles n'étaient pas plus velues, et s'il n'avait beaucoup d'odeur. Il est emménagogue et diurétique. CII. (XXVIII.) [1] La colocase (XXI, 51 ), suivant Glaucias, adoucit l'acrimonie des humeurs, et est bonne à l'estomac. CIII. (XXIX.) [1] Les Égyptiens mangent l'anthalion (XXI, 52) ; je ne trouve pas qu'Il serve à d'autre usage. Mais il est une autre plante nommée anthyllion, que quelques-uns appellent anthyllus, et dont on distingue deux espèces : l'une (cressa cretica, L.) semblable par les feuilles et les branches à la lentille, haute d'un palme, croissant dans les terrains sablonneux et exposés nu soleil, et d'une saveur un peu salée; l'autre (ajuga iva, L.) ressemblant au chamaepitys, plus petite et plus velue, la fleur pourpre. d'une odeur forte, et croissant dans les lieux pierreux. La première, avec de l'huile rosat et du lait, forme un excellent topique pour la matrice et pour les plaies; on la prend en breuvage, à la dose de trois drachmes, dans la strangurie et dans la gravelle. L'autre se prend en breuvage, avec du miel et du vinaigre, à la dose de quatre drachmes, pour les duretés de matrice, les tranchées et l'épilepsie. CIV. (XXX.) [1] Le parthénion (parietaria diffusa, L.) est appelé par les uns leucanthes, par les autres amnacus. Celse (De re med., II, 33), entre les Latins, le nomme perdicium et muralis. Il croît dans les haies de jardins, porte une fleur blanche, est d'une odeur désagréable et d'un goût amer. Avec la décoction on fait un bain de siège, dans les duretés et les inflammations de matrice. Sec, avec du miel et du vinaigre, en suppositoire, il évacue l'atrabile, propriété qui le rend avantageux contre les vertiges et les calculs. On en fait un topique pour l'érysipèle, et, avec du vieux oing, pour les écrouelles. Pour les fièvres tierces, les mages recommandent de le cueillir de la main gauche, et de dire, sans se retourner, pour qui on la cueille; puis, d'en mettre une feuille sous la langue du malade, et de la lui faire avaler un moment après dans un cystite (0 litr., 045) d'eau. CV. (XXXI.) [1] Le trychnos (XXVII, 108) est écrit par quelques-uns strychnon (solanum nigrum, L.). Plût au ciel qu'il ne fût pas employé, en Égypte, même par les fabricants de couronnes, que trompe la ressemblance de ses fleurs avec celles de l'autre espèce! Cette autre espèce porte des baies rouges renfermées dans des follicules, et est appelée tantôt halicacabus, tantôt callion (physalis alkekengi, L.); les Latins la nomment vesicarla, parce qu'elle est bonne pour la vessie et les calculs : c'est plutôt un arbrisseau qu'une herbe, à follicules grands, larges, turbinés, contenant dans l'intérieur un grain volumineux , qui mûrit en novembre. [2] Il y a une troisième espèce (solarium villosum, Lamarck), qui a les feuilles de l'ocimum; Je ne veux pas en donner une description exacte, car je traite des remèdes et non des poisons : or, quelques gouttes du suc suffisent pour troubler la raison. Toutefois les auteurs grecs en ont fait un jeu : suivant eux, à la dose d'une drachme, cette plante produit des imaginations lascives, des visions fantastiques, que l'on croit réelles; à une dose double, une vraie folie; à toute dose plus forte, la mort. [3] C'est là la plante vénéneuse que les auteurs les plus loyaux ont appelée sans détour doryculon, nom qui vient de ce qu'on empolsonnait les armes avec cette plante, qui croît partout ; d'autres, avec moins de franchise, l'ont surnommée manicon (qui cause la folie); ceux qui en dissimulaient criminellement les propriétés lui donnaient le nom d'érythron, de nevras, de perisson. On ne doit entrer dans ces détails que pour mettre les gens sur leurs gardes. [4] Il y a encore une autre espèce d'halicacabon; elle est narcotique, et conduit à la mort plus promptement même que l'opium. Quelques-uns la nomment morion, d'autres moly; elle a été préconisée par Dioclès et Evenor ; Tlmariste même l'a célébrée dans des vers : grave oubli des devoirs du médecin ! car, en vantant un gargarisme d'halicacabon dans du vin comme un remède efficace pour raffermir les dents ébranlées, ils ont ajoute qu'il ne faut pas le tenir longtemps dans la bouche, parce qu'il cause le délire. C'est là indiquer des remèdes plus dangereux que le mal même (physalis somnifera). [5] Il est une troisième espèce d'halicacabon (solanum melongena, L.), qui est bonne à manger, quoiqu'on lui préfère pour le goût celle des jardins; et Xénocrate assure qu'il n'est pas de maladie corporelle dans laquelle le strychnos ne soit salutaire. Mais de tels remèdes ne sont pas assez précieux pour que je croie permis, en vue de l'utilité qui en pourrait résulter, de les publier, surtout quand on en a tant d'autres qui sont sans danger. Ceux qui font le métier de devins prennent en breuvage de la racine d'halicacabon, parce qu'ils veulent paraître agités d'une fureur prophétique, pour donner plus de crédit à leurs impostures. [6] Le remède contre l'haIicacabon (et j'indique plus volontiers le remède que le poison) est de boire beaucoup d'eau miellée chaude. Je ne dois pas omettre non plus que l'halicacabon est si contraire à l'aspic, que la racine placée près de ce reptile l'engourdit, lui qui tue par l'engourdissement. Aussi, pilée avec de l'huile, est-elle salutaire contre la morsure de l'aspic. CVI. (XXXII.) [1] Le corchoron (corchorus olilorius, L.) est une plante qu'on mange à Alexandrie. Les feuilles sont roulées sur elles-mêmes, comme celles du mûrier. On le croit salutaire aux hypocondres, et bon pour l'alopécie et le lentigo. J'al lu encore qu'il guérissait très promptement la gale des boeufs; et, d'après Nicandre (Theriac., p. 44 ), c'est un bon remède contre la morsure des serpents, avant qu'il ait fleuri. CVII. [1] Il ne conviendrait pas de s'arrêter à parler du cnicos ou atractylis (XXI, 53), plante d'Égypte, s'il n'offrait un puissant secours contre les animaux venimeux et les champignons. On a observé que les personnes piquées par un scorpion ne ressentent point de douleur tant qu'elles tiennent cette herbe. CVIII. (XXXIII.) [1] Les Égyptiens cultivent dans les jardins la persoluta, qu'ils emploient dans les couronnes. Il yen a de deux sortes, le mâle et la femelle; on prétend que l'un et l'autre, si on en met sous la personne, sont un obstacle aux plaisirs de l'amour, surtout pour les hommes (plante inconnue). CIX. (XXXIV.) [1] Comme pour les poids et mesures il nous faut souvent employer les noms grecs, je vais en donner ici, une fois pour toutes, l'explication. La drachme attique (les médecins ne suivent guère que le système attique) pèse un denier d'argent (3 gram 85): elle équivaut encore à six oboles, l'obole pesant dix chalques. Le cyathe pèse dix drachmes. Quand on dit acétabule, on entend la quatrième partie d'une hémine, c'est-à-dire quinze drachmes. La mine, en grec mna, pèse cent drachmes attiques.
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