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table des matières dE MANILIUS
MANILIUS
ASTRONOMIQUES/ ASTRONOMICON
LIVRE V
Introduction
livre I -
livre II - livre III
- livre IV
Oeuvre numérisée par Marc
Szwajcer
LIBER V.
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LIVRE V.
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Hic alius
finisset iter signisque relatis
quis adversa meant stellarum numina quinque
quadrijugis et Phœbus equis, et Delia bigis,
non ultra struxisset opus, cœloque rediret
Ac per descensum medios percurreret ignes
saturni, Jovis et Martis solisque, sub illis;
post Venerem et Maia natum te, luna, vagantem.
me superare viam mundus jubet, omnia circum
sidera vectatum, et toto decurrere cœlo,
10
cum semel ætherios ausus conscendere currus
summum contigerim sua per fastigia culmen.
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Un autre eût ici terminé
sa course céleste ; après avoir traité des signes dont
le mouvement est contrarié par celui des cinq étoiles
errantes, de Phébus porté sur un char à quatre chevaux,
de Diane qui se promène sur le sien attelé de deux
coursiers, il s'abstiendrait de toute autre recherche;
il descendrait du ciel, et, sur sa route, il visiterait
les orbes inférieurs de Saturne, de Jupiter, de Mars et
du Soleil, et, après avoir traversé ceux de Vénus et de
Mercure, il étudierait les erreurs de la lune. Le ciel
veut que je poursuive ma course : il m'a fait monter sur
un char éthéré, qui doit me porter jusqu'à sa cime la
plus élevée; il me défend d'en descendre avant de
l'avoir parcouru en entier, avant d'en avoir visité
toutes les constellations. |
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hinc
vocat Orion, magni pars maxima cœli,
et ratis heroum, quæ nunc quoque navigat astris,
fluminaque errantis late sinuantia flexus,
et bifer, et cetus squamis atque ore tremendo
hesperidumque vigil custos et divitis auri,
et canis in totum portans incendia mundum,
Araque divorum, cui votum solvit Olympus:
illinc per geminas anguis qui labitur arctos
20 Heniochusque
memor currus, plaustrique bootes
Atque Ariadnææ cœlestia dona coronæ,
Victor et invisæ Perseus cum falce Medusæ
Andromedamque negans genitor cum conjuge Cepheus,
quique volat stellatus equus celerique sagittæ
delphinus certans, et Juppiter alite tectus,
ceteraque in toto passim labentia cœlo.
quæ mihi per proprias vires sunt cuncta canenda;
quid valeant ortu, quid cum merguntur in undas,
et quota de bis sex astris pars quæque reducat.
30 His stellis
proprias vires et tempora rerum
constituit magni quondam fabricator Olympi.
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D'un côté, je me sens
appelé par Orion, partie considérable du vaste
firmament; par le navire qui a porté tant de héros, et
qui vogue encore parmi les astres ; par le fleuve
qui serpente au loin dans le ciel ; par le centaure, et
par la baleine aux dures écailles et à la gueule
menaçante ; par le gardien vigilant du jardin des
Hespérides et de ses pommes d'or ; par le grand chien,
dont l'uni vers entier ressent les feux; par l'autel des
dieux, auquel l'Olympe paye le tribut de son hommage. Je
vois, de l'autre côté, le dragon qui se replie entre les
deux ourses ; le cocher qui fait encore rouler son char,
et le bouvier qui conduit sa charrue; la couronne d'Ariadne,
présent vraiment céleste ; Persée armé de son glaive, et
vainqueur de l'horrible Méduse ; Céphée et son épouse,
qui semblent méconnaître leur fille Andromède; le cheval
ailé, tout rayonnant d'étoiles; le dauphin disputant de
vitesse avec la flèche ; Jupiter sous l'enveloppe d'un
oiseau, et plusieurs autres astérismes qui roulent dans
l'étendue du ciel. Tels sont les objets que
j'entreprends de chanter : je dirai leurs propriétés,
leurs influences, soit à leur lever, soit lorsqu'ils se
précipitent dans l'Océan ; je déterminerai quel degré
des douze signes ramène chacune de ces constellations
sur l'horizon. C'est le créateur de l'univers qui leur
imprima dans l'origine leur énergie particulière, et qui
détermina le temps où cette force devait être déployée. |
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Vir gregis et ponti victor,
cui parte relicta
nomen onusque dedit, nec pelle immunis ab ipsa,
colchidos et magicas artes qui uisere Iolcon
medeæ jussit, movitque venena per orbem,
nunc quoque vicinam puppi, ceu naviget, Argo
A dextri lateris
ducit regione per astra.
sed tum prima suos puppis consurgit in ignes,
quattuor in partes cum corniger extulit ora.
40 Illa quisquis
erit terris oriente creatus,
rector erit puppis clavoque immobilis hærens
mutabit pelago terras ventisque sequetur
fortunam totumque volet tranare profundum
classibus, atque alios menses altumque videre
phasin et in cautes Tiphyn superare trementem.
tolle istos ortus hominum sub sidere tali,
sustuleris bellum Trojæ classemque solutam
sanguine et appulsam terris; non invehet undis
persida nec pelagus Xerxes facietque tegetque;
50 Versa Syracusis
Salamis non merget Athenas;
punica nec toto fluitabunt æquore rostra:
Actiacosque sinus inter suspensus utrimque
orbis et in ponto cœli fortuna natabit.
his ducibus cæco ducuntur in æquore classes
et coit ipsa sibi tellus, totusque per usus
diversos rerum ventis arcessitur orbis.
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Le chef du troupeau,
vainqueur de l’Hellespont, auquel il valut ce nom, en
s'y allégeant d'une partie de son fardeau, le bélier qui
y perdit même sa précieuse toison, et qui donna occasion
à la princesse de Colchos de porter à Iolcos l'art
funeste des empoisonnements, et de le répandre de là sur
toutes les parties de la terre; le bélier, comme s'il
fendait encore les flots, traîne à sa suite la poupe du
navire Argo, voisine de lui, et à la droite de laquelle
il est situé. Cette poupe commence à hisser ses premiers
fanaux, lorsque le quatrième degré du bélier monte sur
l'horizon. Quiconque naîtra sous un tel ascendant
commandera un vaisseau ; attaché au timon, il préférera
la mer à la terre; les vents seront les dépositaires de
sa fortune; il voudra parcourir toute l'étendue de
l'Océan, et rencontrer à l'embouchure de quelque nouveau
fleuve une nouvelle armée d'Argonautes, pour intimider
son pilote Typhis, et le forcer de chercher son salut au
milieu des plus dangereux écueils. Que le navire ne
produise point de tels navigateurs, il n'y aura plus de
guerre de Troie; l'effusion du sang ne sera plus le prix
du départ d'une flotte, ou de son arrivée au lieu de sa
destination ; Xerxès n'embarquera pas toute la Perse, ne
creusera pas de nouvelles mers, ne construira pas de
pont sur les anciennes; le succès des Athéniens à
Salamine n'amènera pas leur ruine entière à Syracuse ;
les débris des flottes de Carthage n'encombreront plus
les mers; le monde ne paraîtra pas en suspens à la
journée d'Actium, et le sort du ciel ne semblera pas
dépendre de l'inconstance des flots. C'est sous la
conduite de tels chefs qu'on voit des vaisseaux courir
sur toutes les mers, rapprocher toutes les parties de la
terre, et nous faire jouir, avec l'aide des vents, de
toutes les commodités que ce globe peut fournir. |
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sed
decima lateris surgens de parte sinistri
maximus Orion magnumque amplexus Olympum,
(quod fulgente super terras cœlumque trahente,
60 Ementita diem
nigras nox contrahit alas)
solertes animos, uelocia corpora finget
Atque agilem officio mentem, curasque per omnis
indelassato properantia corda vigore.
instar erit populi, totaque habitabit in urbe
limina pervolitans, unumque per omnia uerbum
mane salutandi portans communis amicus.
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A la gauche du bélier, et
avec son dixième degré, Orion se lève : c'est la plus
belle des constellations; elle parait embrasser toute
l'étendue de l'Olympe : lorsqu'elle est sur l'horizon,
entraînant le ciel entier, la nuit, émule du jour,
semble ne pas vouloir déployer ses ailes ténébreuses.
Orion procure un génie vif, un corps alerte, un
caractère prompt à obliger, un courage infatigable dans
les plus fâcheuses circonstances. Un seul homme de cette
espèce vaut tout un peuple, il habite tous les quartiers
d'une ville, il est à toutes les portes, c'est l'ami de
tout le monde ; et, dès le matin, tout citoyen reçoit de
lui le même salut. |
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sed, cum
se terris aries ter quinque peractis
partibus extollit, primum juga tollit ab undis
heniochus clivoque rotas convellit ab imo,
70 Qua gelidus
Boreas aquilonibus instat acutis.
ille dabit proprium studium cœloque retentas
quas prius in terris agitator amaverat, artes;
stare levi curru moderantem quattuor ora
spumigeris frenata lupis, et flectere equorum
prævalidas vires ac torto stringere gyro;
Aut, cum laxato fugerunt cardine claustra,
exagitare feros, pronumque anteire volantes
Vixque rotis levibus summum contingere campum
Vincentem pedibus ventos; vel prima tenentem
80 Agmina in
obliquum cursus agitare malignos,
obstantemque mora totum præcludere circum,
Vel medium turbæ, nunc dextros ire per orbes
fidentem campo, nunc meta currere acuta
spemque sub extremo dubiam suspendere casu.
nec non alterno desultor sidere dorso
quadrupedum, et stabiles poterit defigere
plantas,
perque volabit equo, ludens per terga volantum;
Aut solo vectatus equo, nunc arma movebit,
nunc ciet in longo per cursum præmia circo.
90 Quicquid de
tali studio formatur, habebit.
hinc mihi Salmoneus (qui cœlum imitatus in orbe,
pontibus impositis, missisque per æra quadrigis
expressisse sonum mundi sibi visus, et ipsum
Admovisse Jovem terris; male fulmina fingi
sensit, et immissos ignes super ipse secutus
morte Jovem didicit) generatus possit haberi.
hoc genitum credas de sidere Bellerophontem
imposuisse viam mundo per signa uolantem,
cui cœlum campus fuerat, terræque fretumque
100 Sub pedibus,
non ulla tulit uestigia cursus.
his erit Heniochi surgens tibi forma notanda.
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Mais lorsque le quinzième
degré du bélier se montre à l'orient, le cocher sort du
sein des ondes ; son char gravit la partie inférieure du
ciel, on le voit paraître vers la plage d'où le glacial
Borée nous fait sentir le froid piquant de son haleine.
Cet astérisme inspire ses propres inclinations, le goût
qu'il avait sur terre pour la conduite d'un char, et
qu'il conserve encore dans le ciel. On aimera cet
exercice, on se plaira à voir écumer le frein dans la
bouche de quatre coursiers, à modérer leur trop grande
ardeur, à les faire caracoler à propos; ou, dès que la
barrière sera ouverte et que les chevaux l'auront
franchie, on saura hâter leur vol, et, penché en avant,
on semblera vouloir devancer les coursiers ; les roues
toucheront à peine la superficie de l'arène, et l'on
surpassera la vitesse du vent ; ou, parvenu à la tête de
ceux qui disputent le prix de la course, on leur coupera
le chemin, pour les empêcher de prendre l'avantage ; on
emploiera mille ruses pour retarder leur marche et leur
fermer en quelque sorte toute la largeur du cirque; ou,
si l'on se trouve au milieu des concurrents, assuré de
la qualité du sol, on saura tourner à droite aussitôt
qu'il en sera temps, s'approcher de la borne le plus
près possible, et tenir jusqu'à la fin les esprits
indécis sur l'issue de la lutte. On aura aussi le talent
de conduire deux chevaux accouplés, de sauter de l'un
sur l'autre, de se tenir alternativement debout sur
chacun des deux, de voler de l'un à l'autre, et
d'accompagner cet exercice de mille tours d'adresse. Ou
bien plusieurs rivaux, montés chacun sur un cheval,
tantôt s'exerceront armés, et tantôt entrecouperont leur
course dans le cirque, en offrant l'image d'un combat
simulé. En un mot, on aura tous les talents qui peuvent
se rapporter au maniement des chevaux. C'était sous le
cocher sans doute qu'était né Salmonée, qui, faisant
rouler un quadrige sur un pont d'airain, croyait imiter
le ciel, et s'imaginait qu'en contrefaisant la foudre il
passerait pour Jupiter descendu sur ce globe. L'insensé
s'aperçut bientôt qu'il n'était pas facile d'imiter le
tonnerre, et, renversé par un foudre véritable, il
éprouva combien son pouvoir était inférieur à celui de
Jupiter. Ne doutez pas que cette même constellation
n'ait présidé à la naissance de Bellérophon, qui, se
frayant vers les cieux une route nouvelle, vola
jusqu'aux étoiles. Le ciel était sa carrière ; il voyait
la terre et l'Océan sous ses pieds : il ne laissa dans
sa course aucun vestige de la route qu'il avait tenue.
Telles sont les influences du cocher au moment de son
lever. |
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cumque
decem partes aries duplicaverit ortus,
incipient hædi tremulum producere mentum
hirtaque tum demum terris promittere terga
qua dexter Boreas spirat. Ne crede severæ
frontis opus signo, strictosque ne crede Catones
Abruptumque pari Torquatum et Horatia facta:
majus onus signo est, hædis nec tanta petulcis
conveniunt. Levibus gaudent lascivaque signant
110 Pectora; et in
lusus facilis agilemque uigorem
desudant: vario ducunt in amore juventam;
in vulnus numquam virtus, sed sæpe libido
impellit; turpisque emitur vel morte voluptas;
[et minimum cecidisse malum est, quia crimine
victum.]
nec non et cultus pecorum nascentibus addunt
pastoremque suum generant, cui fistula collo
hæreat et voces alterna per oscula ducat.
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Lorsque le degré ascendant
du bélier doublera le nombre de dix, les chevreaux
commenceront à nous montrer leurs ondoyants mentons, et
leurs dos hérissés monteront bientôt après au-dessus de
l'horizon, vers la partie boréale du ciel. N'attribuez
pas à cette constellation la naissance de ces hommes
graves et sévères, austères comme des Catons, qui
punissent de mort leur propre fils, comme Manlius, et
qui ont le courage d'un Horace : la charge serait trop
pesante pour un tel astérisme ; les chevreaux pétulants
ne sont pas capables d'inspirer des sentiments si
nobles; ils s'amusent de choses frivoles, ils sont
l'image des cœurs lascifs ; ardents à toute sorte de
jeux, ils aiment à faire parade de leur intrépide
agilité. Ils engagent la jeunesse dans des amours
illicites : guidé alors, non par la vertu, mais par la
passion, l'on affronte mille dangers ; la mort même n'a
rien de terrible, pourvu qu'on se satisfasse. [Et cette
mort, en effet, est le moindre des malheurs ; le plus
grand est le crime qui y a conduit.] Les chevreaux
donnent aussi de l'inclination pour la garde des
troupeaux; ils président à la naissance de ceux qui,
chargés de les conduire aux pâturages, portent toujours
au cou un tendre chalumeau, dont ils tirent des sons
mélodieux. |
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sed, cum
bis denas augebit septima partes
lanigeri, surgent hyades; quo tempore natis
120 Nulla quies
placet, in nullo sunt otia fructu;
sed populum turbamque petunt, rerumque tumultus.
seditio clamorque juvat, Gracchosque tenentes
rostra volunt montemque sacrum rarosque Quirites;
pacis bella probant, curæque alimenta ministrant.
immundosque greges agitant per sordida rura;
et fidum Lærtiadæ genuere syboten.
hos generant hyades mores surgentibus astris.
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Mais lorsqu'à deux fois
dix degrés du bélier il en sera joint sept autres, les
hyades se lèveront. Ceux qui naissent alors sont ennemis
du repos; l'inaction n'a pour eux aucun attrait ; ils
sont partisans du peuple, ils cherchent le trouble : les
tumultes séditieux, les discussions bruyantes sont de
leur goût; ils aiment à entendre les Gracques haranguer
du haut de la tribune, à voir le peuple sur le mont
Sacré, et Rome presque sans citoyens ; ces guerres
intestines leur plaisent, et ils tiennent en haleine la
vigilance des magistrats. D'autres gardent à la campagne
des troupeaux d'animaux immono.es : c'est sous ces
étoiles sans doute qu'était né le fidèle porcher du fils
de Laërte. Tels sont les penchants que les hyades
inspirent, lorsqu'elles se lèvent à l'instant de quelque
naissance. |
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ultima
Lanigeri cum pars excluditur orbi,
quæ totum ostendit terris, atque eruit undis;
130 Olenie servans
prægressos tollitur hædos
[e gelido stellata polo, quæ dextera pars est,]
officio magni mater Jovis: illa Tonanti
fida alimenta dedit pectusque implevit hiantis
lacte suo, dedit et dignas ad fulmina vires.
hinc trepidæ mentes, tremebundaque corda
creantur,
suspensa ad strepitus, levibusque obnoxia causis.
his etiam ingenita est visendi ignota cupido,
ut nova per montes quærunt arbusta capellæ,
semper et ulterius pascentes tendere gaudent.
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Lorsque le bélier,
montrant son dernier degré à la terre, est entièrement
levé, et sorti du sein des ondes, on commence à voir la
chèvre ; elle veille à la garde de ses chevreaux,
qu'elle a fait casser devant elle : [elle se lève du
côté du pôle glacé, à la partie droite du ciel.]
Nourrice de Jupiter, elle lui tint lieu de mère; et le
lait dont elle abreuva ce dieu encore enfant lui donna
la force de lancer la foudre. Ceux qui naissent sous
elle, sont naturellement timides; leur esprit craintif
prend l'alarme au moindre bruit, et s'effraye des plus
vains fantômes, ils sont d'ailleurs portés à visiter des
terres inconnues : telle la chèvre gravit sur les
rochers pour y chercher de nouveaux arbustes, et se
plaît à avancer toujours, pour paître en des lieux où
elle n'a pas encore brouté. |
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140
Taurus, in aversos præceps cum tollitur ortus,
sexta parte sui certantis luce sorores
pleiadas ducit; quibus aspirantibus almam
in lucem eduntur Bacchi Venerisque sequaces;
perque dapes mensasque super petulantia corda
et sale mordaci dulcis quærentia risus.
illis cura sui cultus, frontisque decoræ
semper erit; tortos in fluctum ponere crines
Aut vinclis revocare comas, et vertice denso
fingere et appositis caput emutare capillis
150 Pumicibusque
cavis horrentia membra polire
Atque odisse virum, sterilesque optare lacertos.
femineæ vestes, nec in usum tegmina plantis
sed speciem; fractique placent ad mollia gressus.
naturæ pudet, atque habitat sub pectore cæco
Ambitio, et morbum virtutis nomine jactant.
semper amare, parum est, cupient et amare videri.
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Lorsque le taureau,
reculant d'un pas précipité, nous montre la sixième
partie de l'espace qu'il occupe,
il fait lever les pléiades, sœurs célestes, égales en
éclat. Ceux dont elles éclairent alors la naissance sont
amis de Bacchus et de Vénus. Dans la joie des festins,
ils s'abandonnent à la pétulance de leur caractère, et
égayent les convives par le sel mordant de la
plaisanterie. Ils ont toujours le plus grand soin de
leur parure : curieux d'une propreté recherchée, ils
disposent leurs cheveux en boucles flottantes, ou les
retiennent avec des bandelettes, pour en former une
touffe épaisse et élevée ; ou enfin ils changent leur
visage, en se couvrant d'une fausse chevelure. Ils ont
recours à la pierre-ponce pour adoucir la peau de leurs
membres hérissés; ce qui tient en eux de l'homme leur
est un objet d'horreur ; ils voudraient que leurs bras
ne se chargeassent jamais d'aucun poil. Ils s'habillent
en femme; s'ils sont chaussés, ce n'est pas pour
l'usage, mais pour la parure; leur démarche est
efféminée et sautillante. Ils rougissent d'être hommes,
et leur aveuglement est tel, qu'avec ces défauts ils
ambitionnent de passer pour honnêtes. C'est peu pour eux
d'aimer, ils veulent qu'on les tienne pour véritablement
amoureux. |
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Jam vero
geminis fraterna ferentibus astra
in cœlum, summoque natantibus æquore ponti
septima pars leporem tollit; quo sidere natis
160 Vix alas
natura negat volucrumque meatus.
tantus erit per membra vigor referentia ventos.
ille prius victor stadio quam missus abibit;
ille cito motu rigidos eludere cæstus,
nunc exire levis missas, nunc mittere palmas;
ille pilam celeri fugientem reddere planta
et pedibus pensare manus, et ludere fulcro
mobilibusque citos ictus glomerare lacertis;
ille potens turba perfundere membra pilarum
per totumque vagas corpus disponere palmas,
170 Ut
teneat tantos orbes, sibique ipse reludat
et velut edoctos jubeat volitare per ipsum.
invigilat somnis, curos industria vincit,
otia per varios exercet dulcia lusus.
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Les gémeaux présentent
ensuite au-dessus des eaux de l'Océan leurs étoiles,
unies par les liens de la fraternité. Le septième degré
de ce signe amène le lièvre : ceux qui naissent sous
cette constellation ont comme reçu de la nature des
ailes et le don de voler, tant est grande l'agilité de
leurs membres, qui égale la rapidité des vents. Ils ne
sont pas encore partis de la barrière, qu'ils ont déjà
remporté le prix de la course ; par la souplesse de
leurs mouvements, ils parent les rudes atteintes du
ceste, aussi habiles à esquiver les coups de
l'adversaire qu'à lui en porter d'assurés. Une balle qui
va fuir, ils la reprennent d'un pied agile, qui fait
alors l'office de main ; ils sautent après elle dans
leurs jeux, et leurs bras, toujours en mouvement,
multiplient les coups rapides. Un autre jette en l'air
tant de balles, qu'en retombant elles le couvrent tout
entier ; alors ses mains se portent à toutes les parties
de son corps, prêtes à recevoir et à renvoyer ces
balles, qui, pour ainsi dire, instruites de la route
qu'elles doivent tenir, obéissent à son ordre, et
retombent autour de lui. Ces mortels veillent en
dormant;
ils sont ingénieux à écarter tout sujet d'inquiétude,
et, dans un paisible loisir, ils ne s'occupent que de
varier leurs amusements. |
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nunc
cancro vicina canam, cui parte sinistra
consurgunt Jugulæ; quibus aspirantibus orti
te, Meleagre, colunt flammis absentibus ustum
reddentemque tuæ per mortem mutua matri,
cujus et ante necem paulatim vita sepulta est;
Atque Atalantæos conatum ferre labores;
180 Et Calydonea
bellantem rupe puellam
Vincentemque viros et quam potuisse videre
Virgine majus erat sternentem vulnere primo.
quaque erat Actæon silvis mirandus, et ante
quam canibus nova præda fuit. Ducuntur et ipsi,
retibus, et claudunt campos, formidine montes.
mendacisque parant foveas, laqueosque tenaces,
currentisque feras pedicarum compede nectunt
Aut canibus ferrove necant, prædasque reportant.
sunt quibus in ponto studium est cepisse ferarum
190 Diversas
facies, et cæco mersa profundo
sternere littoreis monstrorum corpora arenis
horrendumque fretis in bella lacessere pontum
et colare vagos inductis retibus amnes,
At per nulla sequi dubitant, vestigia prædas,
luxuriæ quia terra parum, fastidiet orbem
Venter, et ipse gulam Nereus ex æquore pascet.
|
Passons aux astérismes
voisins de l'écrevisse : à sa gauche se lèvent les
étoiles du baudrier d'Orion.
Ceux qui les ont pour ascendant vous affectionnent
particulièrement, Méléagre, vous qui fûtes consumé par
des flammes lointaines, vous dont la mort causa celle de
votre mère, vous qui perdîtes lentement la vie, avant de
rendre le dernier soupir. Ils ont une égale vénération
pour celui qui soulagea Atlas du poids de son fardeau ;
pour l'héroïne
qui combattit sur les rochers de la Calédonie, qui
surpassa les hommes en courage, qui porta le premier
coup à un monstre qu'il semblait qu'une fille ne pouvait
pas même regarder impunément ; pour Actéon enfin, ce
modèle du chasseur, avant que le destin en ait fait la
proie de ses chiens. Ils chassent aussi aux filets ; de
vastes montagnes sont entourées d'épouvantails de
plumes; on prépare des fosses trompeuses, on dispose des
pièges perfides; les bêtes sauvages, au milieu de leur
course, se trouvent arrêtées dans les lacs qui leur sont
tendus ; le fer ou les chiens terminent la chasse, et
l'on emporte la proie. D'autres se plaisent à poursuivre
dans la mer toute espèce de poisson, et à étaler sur la
grève les animaux monstrueux qu'ils ont tirés des
gouffres de l'Océan : ils portent la guerre sur les
ondes, et jusque dans les bras de mer les plus orageux;
ils coupent par des filets le courant des fleuves ; ils
suivent leur proie avec ardeur, partout où ils la
soupçonnent. La terre ne suffit plus au luxe de nos
tables, nous sommes dégoûtés de ce qu'elle fournit; il
faut, pour satisfaire nos goûts, que Nérée nous procure
des productions d'un autre élément. |
|
At
Procyon oriens, cum jam vicesima cancro
septimaque ex undis pars sese emergit in astra,
Venatus non ille quidem verum arma creatis
200 Venandi
tribuit; catulos nutrire sagacis
et genus a proavis, mores numerare per urbes,
retiaque et valida venabula cuspide fixa
lentaque correctis formare hastilia nodis;
et quæcumque solet venandi poscere cura
in proprios fabricare dabit venalia quæstus.
|
Procyon
paraît, lorsque le vingt-septième degré de l'écrevisse
sort de l'onde. Il ne forme pas, à la vérité, des
chasseurs, mais il fournit les instruments nécessaires à
la vénerie : il enseigne à dresser les jeunes chiens
pour la quête, à distinguer leur espèce par la race dont
ils sortent, leurs qualités par le lieu de leur
naissance; à faire des filets, de forts épieux garnis de
fer, des javelots souples et noueux; à fabriquer, en un
mot, toutes les armes, tout l'équipage convenable à un
chasseur : on en fera commerce, et ce sera l'objet d'une
profession lucrative. |
|
cum
vero in vastos surget Nemeæus hiatus,
exoritur canis,
latratque canicula flammas
et rabit igne suo, geminatque incendia solis:
qua subdente facem terris radiosque movente
210 Dimicat in
cineres orbis, fatumque supremum
sortitur, languetque suis Neptunus in undis,
et viridis nemori sanguis decedit et herbis.
cuncta peregrinos orbes animalia quærunt;
Atque eget alterius mundus; natura suismet
Ægrotat morbis, nimios obsessa per æstus
inque rogo vivit. Tantus per sidera fervor
funditur! atque uno ceu sunt in lumine cuncta.
hæc ubi se ponto per pronas extulit oras,
nascentem si quem pelagi perstrinxerit unda,
220 Effrenos
animo, violentaque pectora finget
irarumque dabit fluctus, odiumque, metumque
totius vulgi. Præcurrunt verba loquentis,
Ante os est animus: nec magnis concita causis
corda micant et lingua rabit latratque loquendo:
morsibus et crebris dentes in voce relinquit.
Ardescit vitio vitium, viresque ministrat
bacchus, et in flammam sævas exsuscitat iras.
nec silvas rupesque timent, vastosque leones
Aut spumantis apri dentes, atque arma ferarum,
230 Effunduntque
suas concesso in corpore flammas.
ne tales mirere artes sub sidere tali:
cernis ut ipsum etiam sidus uenetur in astris?
prægressum quærit leporem comprendere cursu.
|
Lorsque le lion commence à
nous montrer sa terrible gueule, le chien se lève, la
canicule vomit des flammes : l'ardeur de ses feux la
rend furieuse, et double la chaleur du soleil. Quand
elle secoue son flambeau sur le globe, et qu'elle nous
darde ses rayons, la terre, presque réduite en cendre,
semble être à son dernier moment; Neptune languit au
fond de ses eaux, les arbres des forêts sont sans sève,
les herbes sans vigueur. Tous les animaux cherchent un
asile sous un ciel lointain ; le monde aurait besoin
d'un autre monde, où il pût se réfugier. La nature, au
milieu de cet incendie, éprouve des maux dont elle-même
est la cause, et elle vit en quelque sorte sur son
bûcher; tant est grande la chaleur répandue par tout le
ciel ! Les feux de tous les astres semblent concentrés
dans un seul. Lorsque cette constellation, sortant des
eaux, commence à monter sur le penchant du globe, celui
que l'eau de la mer effleure alors au moment de sa
naissance sera d'un caractère violent et impétueux:
livré à ses fureurs, il sera pour la foule un objet de
terreur et de haine ; un tel homme précipite sans raison
ses paroles ; il n'a pas encore ouvert la bouche, qu'il
a déjà montré son emportement : le sujet le plus léger
le met hors de lui-même ; il écume, il hurle au lieu de
parler ; il se tord la langue, et ne peut achever son
discours. Un autre défaut rend celui-ci plus redoutable
encore : Bacchus augmente la fureur de cet insensé, dont
l'indomptable rage se porte aux derniers excès. La nuit
des forêts, la hauteur des montagnes, la vue d'un lion
terrible, les défenses d'un sanglier écumant, les armes
dont les bêtes sauvages sont pourvues, rien n'est
capable de l'intimider; il déploie sa fureur contre le
premier ennemi qui se présente. Au reste, ne soyez pas
surpris que cette constellation inspire de telles
inclinations. Ne voyez-vous pas qu'elle chasse elle-même
dans le ciel? Elle cherche à atteindre dans sa course le
lièvre qui fuit devant elle. |
|
ultima
pars magni cum tollitur orta leonis,
crater auratis surgit cælatus ab astris.
inde trahit quicumque genus moresque, sequetur
irriguos rivis campos, amnesque, lacusque,
et te, Bacche, tuas nubentem junget ad ulmos,
disponetve jugis imitatus fronde choreas;
240 Robore vel
proprio fidentem in brachia ducet
teque tibi credet semper; quin matre resectum,
Abjunget thalamis, segetemque interseret uvis:
quæque alia innumeri cultus est forma per orbem
pro regione colet: nec parce vina recepta
hauriet; emeritis et fructibus ipse fruetur
gaudebitque mero, mergetque in pocula mentem.
nec solum terræ spem credet in annua vota:
Annonæ quoque vectigal, mercesque sequetur
præcipue quas humor alit; nec deserit unda.
250 Tales effinget
crater humoris amator. |
Lorsque le dernier degré
du vaste signe du lion monte sur l'horizon, on voit
paraître la coupe, qui semble comme ciselée par l'éclat
des étoiles qui la décorent. Celui qui est redevable à
cet astérisme de ses mœurs et de ses inclinations doit
aimer les plaines arrosées de ruisseaux, les rivières et
les lacs : il se plaira, ô Bacchus, à vous marier avec
l'ormeau, à vous donner sur les coteaux des formes
symétriques ; ou, se fiant à vos forces, il vous étendra
en treilles, et vous abandonnera à vous-même ; ou bien
du principal cep il retranchera des provins, qu'il
soutiendra avec des échalas, et dans les intervalles des
plants il sèmera des légumes. Et comme les méthodes de
culture varient infiniment suivant les lieux, il
étudiera et suivra les usages de chaque contrée.
D'ailleurs il ne ménagera pas le vin qu'il aura
recueilli ; il jouira des fruits que lui donnera la
vigne; il boira avec plaisir son vin sans mélange, il
noiera volontiers sa raison dans son verre. Il ne se
contentera pas des fruits que la terre lui fournira
chaque année; il prendra à ferme les impôts sur les
denrées; il fera commerce de marchandises, de celles
surtout qui doivent à l'eau leur production et leur
accroissement. Tel est le caractère de ceux qui naissent
sous la coupe, constellation amie de toute chose
liquide. |
|
Jam
subit Erigone; quæ cum tibi quinque feretur
partibus ereptis ponto, tollentur ab undis
clara Ariadnææ quondam monumenta coronæ
et mollis tribuent artes. Hinc dona puellæ
namque nitent;
illinc oriens est ipsa puella.
ille colet nitidis gemmantem floribus hortum
pallentes violas et purpureos hyacinthos,
liliaque, et Tyrias imitata papavera luces
Vernantisque rosæ rubicundo sanguine florem
260 Cæruleumque
foliis viridi quin gramine collem.
Conseret, et veris depinget prata figuris;
Aut varios nectet flores, sertisque locabit
effingetque suum sidus : quin mutua pressos
incoquet eque Arabum silvis miscebit odores;
et Medos unguenta dabit referentia flatus,
ut sit adulterio sucorum gratia major.
munditiæ cultusque placent, artesque decoræ,
et lenocinium vitæ, præsensque voluptas.
virginis hoc anni poscunt floresque coronæ.
|
Erigone paraît ensuite
lorsque ses cinq premiers degrés se seront soustraits à
la mer, on verra au-dessus des eaux le monument éclatant
de la couronne d'Ariadne. Elle inspirera du penchant
pour des occupations douces et tranquilles : cela doit
être ; on voit se lever d'un côté les dons de la vierge,
de l'autre la vierge elle-même. On cultivera des
parterres émaillés de fleurs, et où naîtront la pâle
violette, la jacinthe pourprée, le lis, le pavot, émule
des brillantes couleurs de Tyr, la rose, dont la tendre
beauté est si agréablement relevée par un rouge incarnat
: on ornera les coteaux de bosquets et de gazon toujours
vert; on embellira les prairies des couleurs les plus
naturelles : ou bien, assemblant diverses fleurs, on en
formera des guirlandes, image de la constellation
dominante. De plus, on en distillera les sucs, on y
mêlera des parfums extraits des bois odoriférants de
l'Arabie ; on en composera des onguents dont la suave
odeur ne le cédera point à celle du laurier de Médie, et
que le mélange de tant de sues exquis rendra bien plus
utiles. On recherchera la propreté, la bonne grâce,
l'élégance de la parure, tout ce qui fait l'agrément, le
plaisir de la vie: l'âge tendre encore de la vierge, les
fleurs dont est formée la couronne, semblent commander
ces inclinations. |
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270
At cum per decimam consurgens horrida partem
spica feret præ se vallantis corpus aristas,
Arvorum ingenerat studium rurisque colendi;
seminaque in fœnus sulcatis credere terris;
usuramque sequi majorem sorte, receptis
frugibus innumeris; atque horrea quærere messi
(Quod solum decuit mortales nosse metallum:
nulla fames, non ulla forent jejunia terris;
dives erat census, saturatis gentibus orbis.)
et si forte labor ruris tardaverit, artes
280 Quis sine
nulla Ceres, non ullus seminis usus,
subdere fracturo silici frumenta, superque
ducere pendentes orbes et mergere farra
Ac torrere focis, hominumque alimenta parare,
Atque unum genus in multas variare figuras.
et quia dispositis habitatur spica per artem
frugibus, et structo similes componitur ordo,
seminibusque suis cellas atque horrea præbet;
sculpentem faciet sanctis laquearia templis
condentemque nouum cœlum per tecta Tonantis.
290 Hæc fuerat
quondam divis concessa figura:
At jam luxuriæ pars est: triclinia templis
concertant; tectique auro jam vescimur auro.
|
Lorsque l'épi hérissé,
se levant au dixième degré de la vierge, fera voir les
barbes qui le défendent, il inspirera le goût de la
campagne et de l'agriculture : on confiera son grain aux
sillons, dans l'espérance de grosses usures ; on en
obtiendra des intérêts, que l'abondance de la récolte
rendra bien plus considérables que le principal ; on
préparera des greniers pour recevoir la moisson. C'est
en effet là le seul métal que l'homme eût dû chercher
dans le sein de la terre ; il n'y eût eu alors ni famine
ni indigence; chacun ayant abondamment le nécessaire,
tous eussent été également riches. Si l'on ne peut
s'appliquer aux travaux de la campagne, on exercera des
arts sans lesquels les faveurs de Cérès et le produit
des moissons deviendraient inutiles : on mettra le blé
sous le caillou qui doit le broyer ; on donnera le
mouvement à la pierre circulaire sous laquelle il sera
placé; on détrempera la farine, on la fera cuire au feu
; on préparera la nourriture ordinaire de l'homme, et
avec la même pâte on fera des mets variés à l'infini. De
plus, comme l'épi renferme plusieurs grains, rangés dans
on ordre symétrique, et assez semblable à celui que les
hommes observent dans leurs constructions, chaque
semence ayant sa cellule et son habitation particulière
; l'épi de la vierge donnera le talent d'orner de
sculptures les lambris des temples, et de décorer de
compartiments les lieux où le maître du tonnerre est
honoré. De telles somptuosités étaient autrefois
réservées pour les dieux ; elles font aujourd'hui partie
de notre luxe : la pompe de nos buffets ne le cède en
rien à celle des temples; couverts d'or, nous voulons
que nos tables en soient aussi couvertes. |
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sed parte
octava surgentem cerne sagittam
chelarum: dabit hæc jaculum torquere lacertis,
et calamum nervis, glebas et mittere virgis,
pendentemque suo volucrem deprendere cœlo,
cuspide vel triplici securum figere piscem.
quod potius dederim Teucro sidusve genusve?
teve, Philoctete, cui malim credere parti?
300 Hectoris ille
faces arcu teloque fugavit,
[Mittebat qui atros ignes in mille carinas] :
hic sortem pharetra Trojæ bellique gerebat,
major et armatis hostis subsederat exul.
quin etiam ille pater tali de sidere cretus
esse potest, qui serpentem super ora cubantem
infelix, nati, somnumque animamque bibentem
sustinuit misso petere ac prosternere telo.
Ars erat esse patrem; vicit natura periclum
et pariter juvenem somnoque ac morte levavit
310 Tunc iterum
natum et fato per somnia raptum. |
Voyez maintenant la flèche
se lever avec le huitième degré de la balance : c'est
d'elle qu'on tiendra l'art de lancer le javelot avec la
main, la flèche avec l'arc, le caillou avec la fronde;
d'atteindre un oiseau dans la plus haute élévation de
son vol, de percer avec un triple harpon le poisson qui
se croit en sûreté. Sous quelle autre constellation
placerais-je la naissance de Teucer? à quelle autre
partie du ciel, ô Philoctète, serait-il possible
d'attribuer la vôtre? Teucer, avec son arc et ses
flèches, détourne les feux qu'[Hector lançait contre la
nombreuse flotte des Grecs :] Philoctète portait dans
son carquois le sort de la guerre et la destinée d'Ilion
: réduit à l'inaction d'un triste exil, il était un
ennemi plus redoutable que tous les Grecs armés contre
Troie. Ce fut probablement sous la flèche que naquit ce
père qui eut le courage de viser et l'adresse de tuer un
serpent étendu sur le visage de son fils endormi, et qui
lui suçait le sang et la vie. L'amour paternel est un
grand maître ; la nature fut plus forte que le danger;
elle arracha en même temps au sommeil et à la mort cet
enfant, qui, renaissant une seconde fois, fut soustrait
en dormant aux ciseaux de la Parque. |
|
At,
cum secretis
improvidus hædus in arvis
erranti similis fratrum vestigia quærit
postque gregem longo producitur intervallo,
sollertes animos, agitataque pectora in usus
effingit varios, nec deficientia curis
nec contenta domo. Populi sunt illa ministra
perque magistratus et publica jura feruntur.
non illo coram
digitos quæsiverit hasta,
defueritque bonis sector, pœnamque lucretur
320 Noxius et
patriam fraudarit debitor æris.
cognitor est urbis. Necnon lascivit amores
in varios; ponitque forum suadente Lyæo,
mobilis in saltus et scenæ mollior arte.
|
Mais lorsque l'imprudent
chevreau, errant dans dos plaines écartées, paraît
chercher à rejoindre ses frères, et qu'ils se lèvent
longtemps après le troupeau dont il a fait partie, il
préside à la naissance de ceux qui ont l'esprit souple
et inquiet : pleins de ressources, ils s'immiscent dans
toutes les affaires; les leurs ne leur suffisant pas,
ils se chargent de celles du public; ils sont
perpétuellement chez les magistrats, ils fréquentent
tous les tribunaux. Partout où ils se trouvent, il ne
manque jamais d'enchérisseur aux ventes publiques,
d'adjudicataire à la criée des biens confisqués, de
délateur contre les coupables de péculat, ou contre les
banqueroutiers frauduleux. Ils sont les agents de toute
la ville. Ils sont d'ailleurs ardents pour le plaisir de
l'amour, et Bacchus leur fait oublier les affaires
contentieuses; ils s'exercent à la danse, et
s'amollissent sur le théâtre. |
|
nunc
surgente lyra, testudinis enatat undis
forma,
per heredem tantum post fata sonantis;
qua quondam mentemque fretis Œagrius Orpheus
et sensus scopulis, et silvis addidit aures
et diti lacrymas, et morti denique finem.
hinc venient vocis dotes, chordæque sonantis
330
Garrulaque in modulos diversa tibia forma
et quodcumque manu loquitur, flatuque movetur.
ille dabit cantus inter convivia dulces
mulcebitque sono Bacchum, noctesque tenebit.
quin etiam curas inter, secreta movebit
Carmina, furtivo modulatus murmure vocem,
solus et ipse suas semper cantabit ad aures,
sic dictante lyra, cum pars vicesima sexta
chelarum surget, quæ cornua ducet ad astra.
|
Lorsque la lyre se lève,
on voit paraître au-dessus des ondes l'image de la
tortue, qui, après l'accomplissement de son destin,
rendit encore des sons sous les doigts du dieu qui en
avait hérité. C'est par elle qu'Orphée, fils d'Œagre,
sut donner de l'intelligence aux animaux, du sentiment
aux rochers, des oreilles aux forêts; il attendrit même
Pluton, et mit un terme à la mort. De là naissent
l'harmonie de la voix, celle des instruments,
l'expressive mélodie de la flûte, qui, sous des formes
différentes, produit de si douces modulations ; en un
mot, tout ce qui parle sous les doigts, tout ce qui est
mis en mouvement par le souffle. On chantera
agréablement dans un repas ; on ajoutera par le charme
de sa voix de nouvelles grâces à Bacchus ; on y
emploiera des nuits entières. Quoiqu’occupé d'affaires
sérieuses, on répétera quelque chanson, l'on murmurera
des airs à voix basse ; seul, on chantera pour soi-même,
sans être entendu d'antres oreilles que des siennes.
C'est la lyre qui inspire ces inclinations; elle
commence à montrer ses bras au lever du vingt-sixième
degré de la balance. |
|
sed
regione nepæ vix partes octo trahentis
340 Ara ferens
turis, stellis imitantibus, ignem,
(in qua devoti quondam cecidere gigantes,
nec prius armavit violento fulmine dextram
Juppiter, ante deos
quam constitit ipse sacerdos;)
quos potius fingent partus, quam templa colentes,
Atque auctoratos
in tertia jura ministros,
divorumque sacra venerantes numina voce,
pene deos et qui possint ventura videre?
|
Mais avec le scorpion,
montrant à peine son huitième degré, l'autel paraît; le
groupe de ses étoiles représente le feu qui doit
consumer l'encens dont il est chargé. C'est au pied de
cet autel que les géants furent autrefois terrassés :
Jupiter ne s'arma de son foudre vengeur qu'après y avoir
exercé les fonctions de prêtre des dieux. Quels hommes
formera cette constellation, sinon ceux qui sont
destinés au culte des autels, et qui, admis au troisième
degré de ce saint ministère, presque dieux eux-mêmes,
chantent d'une voix majestueuse les louanges de la
divinité, et peuvent lire dans l'avenir ! |
|
quattuor
appositis centaurus partibus effert
sidera, et ex ipso mores nascentibus addit.
350 Hic mulos aget
aut mannos, mixtoque jugabit
semine quadrupedes, aut curru celsior ibit;
Aut ornabit equos phaleris aut ducet in arma.
ille tenet medicas artes ad membra ferorum:
et non auditos mutarum tollere morbos.
hoc est artis opus non exspectare gementes
et sibi non ægrum jamdudum credere corpus.
|
Quatre degrés de plus
montreront les étoiles du centaure, qui donne des
inclinations analogues à sa nature. L'un conduira des
mulets ou des chevaux de somme; il mettra sous le joug
des quadrupèdes de race mêlée; il dirigera un char avec
adresse; il ornera son coursier de riches harnois, et le
conduira au combat. Un autre possédera le secret de
guérir les maladies des chevaux : c'est un grand art que
de pouvoir se passer de la déclaration du malade, que
d'appliquer des remèdes aux maladies de bêtes qui ne
peuvent les indiquer, que de pressentir leurs
souffrances longtemps avant qu'elles les ressentent
elles mêmes. |
|
Nunc
subit arcitenens, cujus pars quinta nitentem
Arcturum ostendit ponto, quo tempore natis
fortuna ipsa suos audet committere census,
360 Regales ut
opes et sancta æraria servent
regnantes sub rege suo, rerumque ministri,
tutelamque gerant populi, domibusve regendis
præpositi, curas alieno limini claudant.
|
Le sagittaire vient
ensuite; avec son cinquième degré, on voit lever la
brillante étoile Arcturus. La fortune ne craint
pas de confier ses trésors à ceux qui naissent sous cet
astre; ils sont destinés à être les dépositaires des
finances des rois et du trésor public, à régner sous
l'autorité de leurs princes, à devenir leurs principaux
ministres, ou à se voir chargés des intérêts du peuple,
ou à être intendants des grandes maisons, à borner leurs
occupations aux soins qu'ils prendront des affaires
d'autrui. |
|
Arcitenens
cum se totum produxerit undis,
ter decima sub parte feri, formantibus astris
plumeus in cœlum nitidis olor evolat alis.
quo surgente trahens lucem, matremque relinquens
ipse quoque ærios populos cœloque dicatum
Alituum genus in studium censusque vocabit.
370 Mille fluent
artes; aut bellum indicere mundo
et medios inter volucrem prensare meatus,
Aut nido captare suo; ramove sedentem
pascentemve super surgentia ducere lina.
Atque hæc in luxum: jam ventri longius itur,
quam modo militiæ. Numidarum pascimur oris
phasidos et lucis; arcessitur inde macellum
unde aurata novo convecta est æquore pellis.
quin etiam linguas hominum sensusque docebit
Ærias volucres, novaque in commercia ducet
380 Verbaque
præcipiet naturæ lege negata.
ipse deum cycnus condit vocemque sub illo
non totus volucer, secumque immurmurat intus.
nec te prætereant clausas qui culmine summo
pascere aves Veneris gaudent et credere campo
Ac certis revocare notis; totamque per urbem
qui gestant caveis volucres ad jussa paratas,
quorum omnis parvo consistit passere census.
has erit et similis tribuens olor aureus artes.
|
Lorsque le sagittaire sera
entièrement sorti du sein des eaux, au lever du
trentième degré de cet astérisme, le cygne, décoré de
ses brillantes étoiles, déploiera ses ailes éclatantes
et prendra son vol vers le ciel. L'homme qui,
abandonnant le sein maternel, voit alors le jour,
s'occupera des habitants de l'air, et de toutes les
espèces d'oiseaux qui peuplent le ciel ; il en fera
commerce. De là mille industries; on fera la guerre dans
les airs; on arrêtera les oiseaux au milieu de leur vol,
on les surprendra dans leurs nids, on les engagera dans
des filets, soit lorsqu'ils sont perchés sur la branche,
soit lorsqu'ils prennent à terre leur nourriture. Et
tous ces soins n'ont que notre luxe pour objet ; celui
de la table nous fait pénétrer jusqu'aux contrées que
nos armes n'ont pu subjuguer; nous mettons à
contribution les extrémités de la Numidie, les bois qui
bordent le Phase; on expose, dans nos marchés, des
denrées apportées du pays d'où de hardis navigateurs
enlevèrent autrefois la toison d'or. On aura de plus le
talent de former les oiseaux à notre langage, à nos
expressions, de leur apprendre à s'entretenir avec nous,
de leur enseigner à faire de leur langue un usage que la
nature leur a interdit. Le cygne nous cache un dieu;
cette divinité lui prête une espèce de voix; il est plus
qu'oiseau, il murmure des paroles au-dedans de lui-même.
N'oublions pas ceux qui aiment à élever l'oiseau de
Vénus
dans les parties les plus hautes de leur maison, et qui,
après l'avoir mis en liberté, savent le rappeler au
moyen de certains signaux, ou qui portent par toute la
ville des cages renfermant des oiseaux dressés à obéir
au commandement : souvent leurs richesses ne consistent
qu'en quelques vils passereaux. Tels sont les arts
auxquels on est porté par la brillante constellation du
cygne. |
|
Anguitenens
magno circumdatus orbe draconis,
390 Cum venit in
regione tuæ, capricorne, figuræ,
non inimica facit serpentum membra creatis.
Accipient sinibusque suis peploque fluenti;
osculaque horrendis jungent impune venenis.
|
Le serpentaire, enveloppé
dans les replis de son serpent, paraît avec le signe du
capricorne, et rend ceux qui naissent alors
invulnérables aux traits de ces animaux; ils les mettent
dans leur sein, ils les cachent sous leurs robes
traînantes, ils baisent impunément ces sales et venimeux
reptiles. |
|
At cum se
patrio producens ab æquore piscis
in cœlumque ferens alienis finibus ibit;
quisquis erit tali capiens sub tempore vitam,
litoribus ripisque suos circumferet annos,
pendentem et cæco captabit in æquore piscem,
cumque suis domibus concha valloque latentes
400 Protrahet
immersus. Nihil est audere relictum.
quæstus naufragio petitur, corpusque profundo
immissum pariter quam præda exquiritur ipsa.
nec semper tanti merces est parva laboris:
censibus æquantur conchæ, lapidum absque nitore
Vix quisquam est locuples: oneratur terra
profundo.
tali sorte suas artes per littora tractat,
Aut emit externos pretio mutatque labores
institor æquoreæ varia sub imagine mercis.
|
Mais lorsque le poisson,
sortant de l'océan, sa vraie patrie, se lève au-dessus
de l'horizon, pour entrer dans un élément étranger,
celui qui alors recevra la vie passera ses années sur le
bord des fleuves, sur le rivage de la mer : il
surprendra le poisson au fond de l'eau; plongeant
lui-même dans la mer, il en retirera les perles cachées
sous la nacre, et ravira en même temps les maisons qui
les recèlent. Il ne reste plus à l'homme de nouveaux
périls à braver. On risque de se noyer, pourvu qu'on
entrevoie quelque gain. Quelquefois, avec les perles, on
retire le corps de celui qui a péri dans cette pêche.
Mais c'est qu'ordinairement le profit qu'on en retire
est très-considérable : les perles sont aussi estimées
que les plus riches domaines. A peine peut-on passer
pour riche, si on ne l'est en pierreries ; sur les
richesses de la terre on accumule celles de l'Océan. Tel
est donc le sort de celui qui nait sous le poisson : il
exerce ses talents le long des rivages, ou il emploie à
prix d'argent d'autres pêcheurs, profite de leur
travail, et fait commerce de toute espèce de marchandise
maritime. |
|
cumque fidis
magno succedunt sidera mundo
410 Quæsitor
scelerum veniet vindexque reorum,
qui commissa suis rimabitur argumentis
in lucemque trahet tacita lætantia fraude.
hinc etiam immitis tortor, pœnæque minister
et quisquis vero favit, culpamue perodit
proditur, atque alto qui jurgia pectore tollat.
|
Lorsque les étoiles de la
lyre commencent à monter dans le ciel, elles président à
la naissance de celui qui sera choisi pour informer des
crimes, pour en ordonner la punition, pour rassembler
les preuves de ceux qui ont été commis, pour faire
paraître au grand jour ceux qu'on espérait tenir
perpétuellement cachés. Il faut mettre aussi dans cette
classe l'inexorable bourreau, les autres ministres de la
justice, ceux qui aiment la vérité, qui haïssent le mal,
qui apaisent les querelles, et déracinent du cœur les
inimitiés. |
|
cæruleus
ponto cum se delphinus in astra
erigit et
squamam stellis imitantibus exit,
Ambiguus terræ partus pelagoque creatur.
nam velut ipse citis perlabitur æquora pinnis,
420 Nunc summum
scindens pelagus, nunc alta profundi
et sinibus vires sumit, fluctumque figurat,
sic, venit ex illo quisquis, volitabit in undis.
hic alterna ferens in lentos bracchia tractus,
nunc plausa resonabit aqua; nunc æquore mersas
diducet palmas, furtivus remus in ipso,
nunc in aquas rectus veniet, passuque natabit
et vada mentitus reddet super æquora campum:
Aut immota ferens in tergus membra latusve
non onerabit aquas, summisque accumbet in undis
430 Pendebitque
super; totus sine remige velum.
illis in ponto jucundum est quærere pontum,
corporaque immergunt undis, ipsumque sub antris
nerea, et æquoreas conantur visere nymphas,
exportantque maris prædas, et rapta profundo
naufragia, atque imas avidi scrutantur arenas.
par ex diverso studium sociatur utrumque
in genus, atque uno digestum semine surgit.
Adnumeres etiam illa licet cognata per artem
corpora, quæ valido saliunt excussa petauro
440 Alternosque
cient motus, elatus et ante
nunc jacet atque hujus casu suspenditur ille,
membrave, per flammas orbesque emissa flagrantis,
molliter ut liquidis per humum ponuntur in undis:
delphinumque suo per inane imitantia motu
et viduata volant pennis, et in ære ludunt.
At, si deficient artes, remanebit in illis
materies tamen apta: dabit natura vigoreæ
Atque alacres cursus, campoque volantia membra.
|
Au moment où le dauphin
azuré quitte l'Océan pour paraître au milieu des astres,
et qu'il fait briller ses étoiles semblables à des
écailles, on voit naître des hommes d'une nature
amphibie ; la terre et l'eau sont à la fois leur
élément. Le dauphin aux rapides nageoires fend les
ondes, tantôt sillonnant leur surface, tantôt plongeant
au fond des eaux : et il retrouve de nouvelles forces
dans la sinuosité de ses mouvements, qui nous représente
l'inégalité des flots. Ainsi celui qui lui doit la vie
paraît voler dans l'eau. Agitant lentement ses bras l'un
après l'autre, ou il en frappe l'onde avec bruit, ou il
les écarte et les plonge sous l'eau, et s'en sert comme
d'avirons cachés qui le dirigent : tantôt il se tient
debout dans l'eau ; il nage et parait marcher; on dirait
qu'il est sur un gué, et que la mer est pour lui une
plaine unie : tantôt, couché tranquillement sur le dos
ou sur le côté, il ne pèse point sur les flots, il
n'enfonce point, c'est sur un lit qu'il repose; on le
prendrait pour une nacelle qui n'a pas besoin de
rameurs. Celui-là se plaît à chercher la mer dans la mer
même, à plonger au fond de l'eau, à visiter Nérée et les
nymphes dans leurs grottes profondes : il en rapporte
les dépouilles de la mer, les richesses que les
naufrages y ont déposées; il fouille avec avidité
jusqu'au fond de ses gouffres. C'est de part et d'autre
la même inclination, mais appliquée différemment;
quoique ainsi partagée, elle n'a qu'une origine. A ces
sortes d'industrie on en peut ajouter d'autres qui s'y
rapportent : telle est celle de ces hommes qui, sur une
balançoire, s'élèvent et retombent alternativement et
font en retombant monter ceux qui sont placés de l'autre
côté. Telle est aussi celle de ces gladiateurs qui
traversent des flammes ou des cerceaux enflammés,
retombent à terre aussi doucement qu'ils tomberaient
dans l'eau, et qui, par la flexibilité de leurs
mouvements, imitent l'agilité du dauphin, volent sans
ailes et se jouent dans les airs. S'ils ne s'appliquent
pas à ces exercices, ils y auront du moins la plus
grande aptitude; la nature leur aura donné toute la
force nécessaire, une grande souplesse dans les membres,
une extrême légèreté à la course. |
|
sed
regione means Cepheus humentis aquari
450 Non dabit in
lusum mores: facit ora severæ
frontes ac vultus componit pondere mentis.
pascentur curis, veterumque exempla revolvent
semper, et antiqui laudabunt verba Catonis,
tutorisve supercilium, patruive rigorem.
componet teneros etiam qui nutriat annos
et dominum dominus prætextæ lege sequatur,
quodque agit, id credat, stupefactus imagine
juris,
quin etiam tragico præstabunt verba coturno,
cujus erit, quamquam in chartis, stylus ipse
cruentus.
460 Nec minus et
scelerum facie, rerumque tumultu
gaudebunt: atri luctum memorare sepulchri;
ructantemque patrem natos, solemque reversum
et cæcum sine nube diem; Thebana juvabit
dicere bella uteri, mixtumque in fratre parentem,
quin et Medeæ natos, fratremque, patremque,
hinc vestes flammas illinc pro munere missas
Æriamque fugam, junctosque in curribus angues.
forsitan ipse etiam Cepheus referetur in actus.
mille
alias rerum species in carmina ducent.
470 At si
quis studio scribendi mitior ibit,
comica componet lætis spectacula ludis,
Ardentes juvenes, raptasque in amore puellas
elusosque senes, agilesque per omnia servos,
quis in cuncta suam produxit sæcula vitam
doctor urbe sua linguæ sub flore Menander,
qui vitæ ostendit
vitam
chartisque sacravit.
et, si tanta operum vires commenta negarint,
externis tamen aptus erit, nunc voce pœtis
nunc tacito gestu; referetque affectibus ora,
480 Et sua dicendo
faciet; solusque per omnes
ibit personas, et turbam reddet in uno:
[Aut magnos heroas aget, scenisque togatas.]
omnis fortunæ vultum per membra reducet,
Æquabitque choros gestu, cogetque videre
præsentem Trojam Priamumque ante ora cadentem.
|
Céphée sortant des eaux,
en même temps que les étoiles de l'humide Verseau,
n'inspirera point de goût pour les jeux ; il donnera un
front grave, un visage où se peindra l'austérité du
caractère. On se nourrira de soins et d'inquiétudes, on
ne citera que les exemples du vieux temps, on fera sans
cesse l'éloge des maximes de l'ancien Caton, on aura
l'air sourcilleux d'un tuteur, ou la morgue d'un oncle
sévère. Ce même astérisme forme aussi des gouverneurs
pour la tendre jeunesse : donnés pour maîtres à des
enfants qui sont véritablement les leurs, éblouis de
cette autorité précaire, ils semblent se persuader
qu'ils sont réellement ce qu'ils ne font que
représenter. Il produit aussi ces écrivains éloquents,
la gloire du cothurne tragique, et dont le style,
quoique sur le papier, ne respire que le carnage. Ils se
plairont au récit des forfaits et des révolutions
sanglantes, ils aimeront à tracer les funèbres images
d'un affreux tombeau, à représenter un père se
rassasiant des membres de son fils, le soleil reculant
d'effroi, le jour changé en nuit. Ils mettront
volontiers sur la scène deux frères s'égorgeant sous les
murs de Thèbes ; un père qui est en même temps le frère
de ses deux fils; les enfants, le frère et le père de
Médée; ici une robe empoisonnée, là des flammes qu'elle
envoie pour présent nuptial, sa fuite à travers les
airs, son char enlevé par des dragons ; et Céphée
lui-même pourra figurer aussi dans leurs tragédies. Ils
traceront enfin dans leurs vers mille autres images
aussi terribles. Si des sujets moins tragiques sont du
goût de quelqu'un de ces écrivains, il cherchera à
plaire au spectateur par les grâces de la comédie : il
introduira sur le théâtre des jeunes gens entraînés par
la fougue de l'âge, des jeunes filles enlevées par leurs
amants, des vieillards trompés, des valets hardis à tout
entreprendre. C'est par là que Ménandre s'est fait une
réputation immortelle : profitant de la beauté de la
langue, il se fit le précepteur de ses concitoyens; et,
en traçant dans ses écrits la vie de l'homme telle
qu'elle était, il montra ce qu'elle devait être. Mais si
les forces des élèves de Céphée ne leur permettent pas
d'exécuter de pareils ouvrages, ils auront au moins le
talent de seconder les poètes dramatiques, soit par la
voix, soit par des gestes muets; leur visage
représentera toutes les passions, ils se les
approprieront par l'expression : un seul d'entre eux
suffira pour rendre tous les rôles, et tiendra lieu
d'une troupe de comédiens. [Il jouera tantôt le rôle des
plus célèbres héros, tantôt celui d'un simple
particulier.] Il prendra l'air et le ton convenables à
tous les états ; son geste rendra tout ce que dit le
chœur; il vous fera voir Troie en cendres, et Priam
expirant à vos yeux. |
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nunc
Aquilæ sidus referam, quæ parte sinistra
rorantis juvenis,
quem terris sustulit ipsa,
fertur, et extentis prædam circumvolat alis.
fulmina missa refert et cœlo militat ales
490 Bis sextamque
notat partem fluvialis aquari.
illius in terris orientis tempore natus
Ad spolia et partas surget vel cæde rapinas
[Cumque hominum dederit strages, dabit ille ferarum.]
nec pacem a bello, civem discernet ab hoste.
ipse sibi lex est; et qua fert cumque voluntas
præcipitat vires: laus est contendere cuncta.
At si forte bonis accesserit impetus ausis,
improbitas fiet virtus; et condere bella
et magnis patriam poterit ornare triumphis.
500 Et quia non
tractat volucris, sed suggerit arma,
immissosque refert ignes, et fulmina reddit:
regis erit magnive ducis per bella minister
ingentisque suis præstabit viribus usus.
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Je passe à la
constellation de l'aigle : elle vole à la gauche du
jeune échanson qu'elle enleva elle-même à la terre; elle
couve sa proie sous ses ailes déployées. Cet oiseau
rapporte les foudres lancées par Jupiter, et combat
ainsi pour le ciel : son lever détermine celui du
douzième degré du verseau. Celui qui naît au même
instant que lui se livrera au vol, au brigandage, et
n'épargnera pas même la vie de ceux qu'il voudra
dépouiller. [Après avoir exercé sa fureur contre les
hommes, il retendra sur les bêtes sauvages.] Pour lui
point de différence entre la guerre et la paix, entre
l'ennemi et le citoyen ; il n'a d'autre loi que sa
volonté ; il déploie son caractère violent partout où le
porte son caprice ; il se fait un mérite de disputer
toute possession. Mais son ardeur l'engage-t-elle pur
hasard dans une juste cause, cet emportement deviendra
courage; il se distinguera dans l'art militaire, il sera
capable d'acquérir à sa patrie l'honneur des plus
éclatants triomphes. Et comme l'aigle ne combat pas
lui-même, mais fournit des armes, en rapportant à
Jupiter les foudres qu'il a lancés; celui qui naît sous
cette constellation sera le ministre d'un roi ou d'un
général d'armée, et, par son mâle courage, il lui rendra
les plus importants services. |
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At, cum
Cassiope bis denis partibus actis
Æquorei juvenis, dextra de parte resurgit,
Artifices auri faciet; qui mille figuris
Vertere opus possint caræque acquirere dotem
materiæ, et lapidum vivos miscere colores.
hinc augusta nitent sacratis munera templis,
510 Aurea
Phœbeis certantia lumina flammis
gemmarumque jubar, radiantes lucibus ignes.
hinc Pompeia manent veteris monimenta triumphi
et Mithridateos vultus induta tropæa.
hinc lenocinium formæ, cultusque repertus
corporis, atque auro quæsita est gratia frontis
perque caput ducti lapides, per colla manusque
et pedibus niveis fulserunt aurea vincla.
quid potius matrona velit tractare creatos,
quam factum revocare suos quod possit ad usus?
520 Ac ne materies
tali sub munere desit,
quærere sub terris aurum, furtoque latentem
naturam eruere omnem, orbemque invertere prædæ
imperat, et glæbas inter deprendere gazam
invitamque novo tandem producere cœlo.
ille etiam fulvas avidus numerabit arenas
perfundetque novo stillantia littora ponto
magnaque ramentis faciet momenta minutis :
pontique ille leget census spumantis in aurum,
et perlucentes cupiens prensare lapillos
530 Vorticibus
mediis oculos immittet avaros.
et coquet argenti glebas, venamque latentem
eruet et silicem rivo saliente liquabit;
Aut facti mercator erit per utrumque metalli,
Alterum et alterius semper mutabit ad usus.
talia Cassiope nascentum pectora finget.
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Mais lorsqu'après le lever
de deux fois dix degrés du verseau, Cassiopée se
montrera à la droite de ce signe, elle fera naître des
orfèvres, qui auront le talent de donner à l'or toutes
les formes possibles, d'ajouter par leur travail un
nouveau prix à ce précieux métal, et d'en relever
l'éclat par les brillantes couleurs des pierreries. De
là ces augustes présents qui décorent nos temples
sacrés, ces lambris dont la splendeur égale celle de
l'astre du jour, cet éclat des pierres précieuses, ce
feu éblouissant des diamants ; de là ces monuments
encore subsistants de l'ancien triomphe de Pompée, et
ces trophées ornés du portrait de Mithridate. De laces
parures qui rehaussent la beauté : on a eu recours à
l'or pour s'embellir; on a orné sa tête, son cou, ses
mains, de pierreries ; des boucles d'or ont étincelé sur
des pieds d'une blancheur éblouissante. A quel art une
femme distinguée
peut-elle appliquer ceux qui lui doivent l'être, si ce
n'est à celui dont elle peut faire un aussi grand usage
pour sa parure? Mais, pour fournir la matière nécessaire
à cette profession, Cassiopée excite encore à chercher
l'or dans les entrailles de la terre, à arracher du sein
de la nature les richesses qu'elle veut nous dérober, à
bouleverser notre globe pour en ravir ces dépouilles, à
tâcher de découvrir des trésors dans des monceaux de
sable, et à les produire, comme malgré eux, au grand
jour. On comptera avec avidité tous les grains du sable
qui recèle l'or, on le lavera dans plusieurs eaux, et de
la réunion de plusieurs de ces grains on formera des
masses précieuses. On rassemblera même les richesses de
la mer, dont l'écume peut contenir de l'or; et, pour se
procurer quelques parcelles de cet éclatant métal, ou
portera ses regards avides jusque dans les gouffres les
plus profonds. On mettra aussi l'argent au creuset,
après l'avoir extrait de lamine, et l'avoir purifié dans
quelque ruisseau d'eau saillante. Ou enfin l'on fera
commerce de ces deux métaux préparés par ces deux sortes
d'ouvriers,
et on les échangera l'un contre l'autre pour un usage
réciproque. Telles seront les inclinations de ceux à la
naissance desquels préside Cassiopée. |
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Andromedæ
sequitur sidus, quæ, piscibus ortis
bis sex in partes, cœlo venit aurea dextro.
hanc quondam pœnæ dirorum
culpa parentum
prodidit, infestus totis cum finibus omnis
540 Incubuit
pontus, timuit tum naufraga tellus,
proposita est merces, vesano dedere ponto
Andromedan, teneros ut bellua manderet artus.
hic hymenæus erat. Solataque publica damna
privatis lacrymis, ornatur victima pœnæ;
induiturque sinus non hæc ad vota paratos:
Virginis et vivæ rapitur sine funere funus.
Ac simul infesti ventum est ad litora ponti,
mollia per duras panduntur bracchia cautes;
Astrinxere pedes scopulis, injectaque vincla,
550 Et cruce
virginea moritura puella pependit.
servatur tamen in pœna cultusque pudorque;
supplicia ipsa decent. Nivea cervice reclinis
molliter ipsa, suæ custos est ipsa figuræ.
defluxere sinus humeris, fugitque lacertos
Vestis, et effusi scapulis lusere capilli.
te circum alcyones pinnis planxere volantes
fleveruntque tuos miserando carmine casus,
et tibi contextas umbram fecere per alas;
Ad tua sustinuit fluctus spectacula pontus,
560 Assuetasque
sibi desiit perfundere rupes,
extulit et liquido Nereis ab æquore vultus;
et casus miserata tuos roravit et undas.
ipsa levi flatu refovens pendentia membra
Aura per extremas resonavit flebile rupes.
tandem Gorgonei victorem Persea monstri
felix illa dies redeuntem ad littora duxit.
isque, ubi pendentem uidit de rupe puellam,
diriguit, facie quem non stupefecerat hostis:
Vixque manu spolium tenuit; victorque Medusæ
570 Victus in
Andromeda est. Jam cautibus invidet ipsis
felicesque vocat, teneant quæ membra, catenas;
et, postquam pœnæ causam cognovit ab ipsa,
destinat in thalamos per bellum vadere ponti,
Altera si Gorgo veniat, non territus ire.
concitat ærios cursus, flentesque parentes
promissu vitæ recreat, pactusque maritum
Ad littus remeat. Gravidus jam surgere pontus
cœperat et longo fugiebant agmine fluctus
impellentis onus monstri. Caput eminet undas
580 Scindentis,
pelagusque vomit: circumsonat æquor
dentibus, inque ipso rapidum mare navigat ore;
hinc vasti surgunt immensis torquibus orbes,
tergaque consumunt pelagus. Sonat undique Syrtys
Atque ipsi metuunt montes scopulique ruentem.
infelix virgo, quamvis sub vindice tanto
quæ tua tunc fuerat facies? quam fugit in auras
spiritus! ut toto caruerunt sanguine membra!
cum tua fata cavis e rupibus ipsa uideres
Adnantemque tibi pœnam, pelagusque ferentem,
590 Quantula præda
maris! quassis hic subvolat alis
perseus et cœlo pendens libratur in hostem
gorgoneo tinctum defigens sanguine ferrum.
illa subit contra, versamque a gurgite frontem
erigit, et tortis innitens orbibus alte
emicat, ac toto sublimis corpore fertur.
sed quantum illa subit semet jaculata profundo,
is tantum revolat laxumque per æra ludit
nec cedit tamen illa viro, sed sævit in auras
morsibus, et vani crepitant sine vulnere dentes;
600 Efflat et in
cœlum pelagus mergitque volantem
sanguineis nudis, pontumque extollit in astra.
spectabat pugnam pugnandi causa puella,
Jamque oblita sui, metuit pro vindice tali
suspirans, animoque magis quam corpore pendet.
tandem confossis subsedit bellua membris
plena maris, summasque iterum remeavit ad undas,
et magnum vasto contexit corpore pontum,
tum quoque terribilis, nec virginis ore videnda.
perfundit liquido Perseus in marmore corpus,
610 Major et ex
undis ad cautes pervolat altas
solvitque hærentem vinclis de rupe puellam
desponsam pugna,
nupturam dote mariti.
hic dedit Andromedæ cœlum, stellisque sacravit
mercedem tanti belli, quo concidit ipsa
gorgone non levius monstrum, pelagusque levavit.
quisquis in Andromedæ surgentis tempora ponto
nascitur, immitis veniet pœnæque minister,
carceris et duri custos, quo stante superbo
prostratæ jaceant miserorum in limine matres
620 Pernoctesque
patres cupiant extrema suorum
oscula et in proprias animam transferre medullas:
carnificisque venit mortem vendentis imago
Accensosque rogos, cui stricta sæpe securi
supplicium vectigal erit: qui denique posset
pendentem e scopulis ipsam spectare puellam,
Vinctorum dominus
sociusque in parte catenæ
interdum, pœnis innoxia corpora servat.
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Elle est suivie
d'Andromède, qui, toute rayonnante d'or, paraît à la
droite du ciel, lorsque douze degrés des poissons se
sont élevés sur l'horizon. La faute des coupables
auteurs de ses jours l'exposa autrefois à un cruel
supplice, lorsque la mer débordée inondait tous les
rivages, et que la terre craignit un naufrage universel.
On proposa pour condition du salut public d'abandonner
Andromède à la fureur des flots; ses membres délicats
devaient être la pâture d'un monstre hideux. Tel était
l'hyménée auquel on la destinait. Victime désignée pour
mettre fin, par sa seule mort, au malheur de tout un
peuple, elle est parée pour ce sacrifice ; on la revêt
d'habillements qui avaient eu une destination bien
différente. Sans aucune pompe funèbre, on traîne cette
jeune princesse, encore vivante, au lieu de sa
sépulture. Dès qu'on est arrivé sur le rivage de cette
mer terrible, on étend ses tendres bras sur un dur
rocher ; ses pieds y sont liés ; on la charge de chaînes
; elle est comme attachée à la croix sur laquelle elle
doit expirer. Dans cet appareil de torture, on a soin
cependant que rien ne puisse offenser la décence, ni
alarmer la pudeur. Son infortune ajoute à sa beauté : sa
tête est mollement penchée sur un sein d'une blancheur
éblouissante; abandonnée de tous, elle est seule
gardienne d'elle-même. Ses habits ont glissé de dessus
ses épaules; ses bras sont nus, ses cheveux épars
flottent autour de sa tête. Les alcyons volant autour de
vous, infortunée princesse, témoignèrent leur douleur
par leurs tristes concerts ; ils déplorèrent votre
destinée, et, joignant leurs ailes, ils vous mirent à
l'abri des ardeurs du soleil. La mer, à votre aspect,
retint ses flots, et n'osa les porter jusqu'à leurs
limites ordinaires. La Néréide éleva sa tête au-dessus
des ondes, et, sensible à votre malheur, elle arrosa la
mer de ses larmes. Le Zéphyr, rafraîchissant de sa douce
haleine vos membres étendus, fit retentir d'un triste
sifflement les rochers d'alentour. Mais enfin cet
heureux jour ramène sur ce rivage Persée, vainqueur de
l'horrible Méduse. Il voit la princesse enchaînée sur le
rocher; il est glacé d'horreur, lui que n'avait pas
épouvanté le hideux aspect de la Gorgone : la dépouille
qu'il en a remportée échappe presque de ses mains :
vainqueur de Méduse, il est vaincu par la vue
d'Andromède. Il est jaloux du roc où elle est attachée,
il envie le bonheur des chaînes qui la retiennent.
Instruit par elle des causes de son malheur, il veut,
pour acquérir le titre de son époux, combattre la mer
même, prêt à tout entreprendre, dût-il avoir à lutter
contre une seconde Gorgone. Il fend l'air avec rapidité,
il rassure Céphée et Cassiopée, en s'engageant à sauver
la princesse; Andromède lui est promise, il retourne au
rivage. Déjà la mer avait commencé à s'enfler; les
flots, cédant à l'impétuosité du monstre qui les pousse,
fuient en mugissant devant lui : sa tête s'élève
au-dessus d'eux ; il revomit l'onde amère, les flots
battent avec bruit contre ses dents, une mer orageuse
paraît rouler dans son énorme gueule; sa croupe se
recourbe en une infinité de replis immenses, et couvre
presque toute la plaine liquide. Les Syrtes retentissent
du bruit qu'il fait en s'avançant; les rochers, les
montagnes frémissent à son approche. Princesse
infortunée, quel était alors votre destin, malgré le
puissant défenseur armé pour vous secourir? Quelle
pâleur était la vôtre! quelle défaillance! quel froid
pénétrait tous vos membres, lorsque, du rocher où vous
étiez retenue, vous vîtes la mort s'avancer vers vous,
et votre supplice apporté sur l'aile des flots ! faible
proie, hélas, pour un si énorme monstre! Persée abaisse
son vol ; planant dans l'air, il s'élance tout à coup
contre le monstre, et plonge dans son sang cette épée
terrible, teinte encore de celui de Méduse. Le monstre
se défend contre le jeune héros, dresse sa tête
au-dessus des flots, et, s'appuyant sur les replis
immenses de sa queue, il bondit et s'élève de toute sa
hauteur. Inutiles efforts! chaque fois qu'il s'élance,
Persée prend son vol plus haut, et semble se jouer dans
les airs. Le monstre ne cède cependant point, il déploie
sa rage contre l'air; ses dents craquent sans faire de
blessures ; l'eau sort à gros bouillons de ses naseaux,
il inonde Persée d'un fleuve de sang, et fait rejaillir
la mer jusqu'au ciel. A la vue de ce combat dont elle
est l'objet, Andromède oublie son propre péril, et
n'envisage en soupirant que celui de son généreux
défenseur; son esprit agité est moins libre que son
corps. Enfin percé de coups, le monstre se plonge dans
les flots ; il ne peut plus rejeter l'eau qu'il respire,
il revient à la surface, et couvre de son énorme cadavre
une vaste étendue de mer, trop redoutable encore pour
être vu sans effroi par une jeune princesse. Persée se
lave dans le cristal liquide d'une eau pure, et, plus
grand qu'avant le combat, il vole à la cime du rocher,
et dégage la princesse de ses liens : il s'était assuré
sa main par la défaite du monstre; l'hyménée suivit; le
succès du combat tint lieu de dot. Persée obtint pour
Andromède les honneurs du ciel, elle fut mise au nombre
des constellations : digne issue d'un combat glorieux,
où un monstre, non moins redoutable que Méduse, périt,
et soulagea la mer de son poids odieux. Quiconque naît
au moment où Andromède sort du sein des eaux sera sans
pitié; il fera servir la justice à la punition des
criminels ; la garde de la prison publique lui sera
confiée; il verra avec dédain les mères des malheureux
prisonniers prosternées contre terre à ses pieds, les
pères passant les nuits entières à sa porte, demandant
la grâce d'embrasser leurs enfants pour la dernière
fois, et de recevoir leur dernier soupir en les tenant
serrés entre leurs bras. On voit encore ici ce bourreau
qui fait trafic de la mort qu'il donne, des bûchers
qu'il allume, des haches qu'il teint de sang; les
supplices sont revenus : il serait capable d'envisager
sans frémir la vertueuse Andromède garrottée sur la cime
de son rocher. Quelquefois chargé de la garde des
captifs, et partageant le poids de leurs chaînes, il
veille sur les innocentes victimes de l'iniquité, pour
qu'elles ne puissent échapper au supplice. |
|
piscibus
exortis cum pars vicesima prima
signabit terræ limen, fulgebit et orbi,
630 Ærius
nascetur aquus cœloque volabit,
Velocisque dabit sub tali tempore partus
omne per officium vigilantia membra ferentis.
hic glomerabit equo gyros, dorsoque superbus
Ardua bella geret rector cum milite mixtus.
hic stadium fraudare fide poteritque videri
mentitus passus, et campum tollere cursu.
quamvis extremo, citius revolaverit orbe
nuntius extremum vel bis penetraverit orbem.
Vilibus ille etiam sanabit vulnera succis
640 Quadrupedum,
et medicas artes in membra ferorum
noverit, humanos et quæ nascentur ad usus.
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Lorsque les poissons étant
à l'orient, leur vingt-unième degré déterminera
l'horizon, et se montrera à la terre, le cheval céleste
se lèvera, et prendra son vol vers le ciel. Ceux qui
naîtront alors seront d'une agilité extrême; leurs
membres alertes seront aptes à toute espèce d'exercice.
Celui-ci fera tourner et caracoler un cheval en mille
cercles; fièrement monté sur son coursier, un jour de
bataille, général et soldat tout ensemble, il se jettera
dans la mêlée. Celui-là franchit la carrière avec une
vitesse incroyable; sa course impose au spectateur,
l'espace semble disparaître sous ses pas. En un instant
il vous rapporte des nouvelles de l'extrémité même de la
terre; il fait deux fois le voyage, s'il est nécessaire.
Il aura aussi le talent de guérir les maladies des
quadrupèdes, en employant le suc des herbes les plus
communes : il connaîtra la vertu des plantes
médicinales, soit de celles dont ou se sert dans les
maladies des chevaux, soit même de celles qui sont
réservées pour l'usage de l'homme. |
|
nixa
genu species, et Graio nomine dicta
engonasi,
(ignota facies sub origine constat)
dextra per extremos attollit lumina pisces.
hinc fuga nascentum, dolus insidiæque creantur,
grassatorque venit media metuendus in urbe.
et, si forte aliquas animus exsurget in artes,
in prærupta dabit studium, vendetque periclo
ingenium: ac tenues ausus sine limite gressus
650 Certa per
extentos ponet vestigia funes;
et cœli meditatus iter vestigia perdet
pene sua et pendens populum suspendet ab ipso.
|
A la droite du ciel, et
conjointement avec le dernier degré des poissons, se
lève l'astérisme agenouillé ; les Grecs le nomment
Engonasi : son attitude, on la connaît; quelle en
est la cause, on l'ignore. Celui qui naît alors sera
fugitif, fourbe, toujours au guet pour tendre des
pièges, brigand redoutable dans l'intérieur des villes.
Si sa volonté le porte vers quelque industrie, ce sera
vers celles qu'on ne peut exercer sans danger ; les
périls lui paraîtront un prix digne de ses talents.
Hardi à poser ses pieds où rien ne semble pouvoir les
soutenir, il marchera sur une corde horizontalement
tendue : il paraîtra, au contraire, ne plus s'appuyer
sur rien et monter inutilement vers le ciel, lorsque,
suspendu à une corde verticale, il tiendra les yeux du
spectateur arrêtés sur lui. |
|
læva
sub extremis consurgunt sidera ceti
piscibus Andromedam ponto cœloque sequentis.
hic trahit in pelagi cædes, et vulnera natos
squamigeri gregis: extentis laqueare profundum
retibus et pontum vinclis artare furentem;
et velut in laxo securas æquore phocas
carceribus claudunt raris, et compede nectunt
660 Incautosque
trahunt macularum lumine thynnos.
nec cepisse sat est: luctantur corpora nodis
expectantque novas acies ferroque necantur,
inficiturque suo permixtus sanguine pontus.
tum quoque, cum toto jacuerunt littore prædæ,
Altera fit cædis cædes: scinduntur in artus,
corpore et ex uno varius discribitur usus.
illa datis melior, sucis pars illa retentis.
hinc sanies pretiosa fluit, floremque cruoris
evomit ex mixto gustum sale temperat oris;
670 Illa putris
turba est: strages confunditur omnis
permiscetque suas alterna in damna figuras,
communemque cibis usum, sucumque ministrat.
Aut cum cæruleo stetit ipsa simillima ponto
squamigerum nubes
turbaque immobilis hæret,
excipitur vasta circumvallata sagena
ingentesque lacus et Bacchi dolia complet
humoresque vomit socias per mutua dote;
et fluit in liquidam tabem resoluta medullas.
quin etiam magnas poterunt celebrare salinas
680 Et pontum
coquere, et ponti secernere virus,
cum solidum certo distendunt margine campum
Adpelluntque suo deductum ex æquore fluctum
claudendoque negant. Tum demum suscipit auras
Area, tum posito per solem humore nitescit.
congeritur siccum pelagus, mensisque profundi
canities seposta maris; spumæque rigentis
ingentis faciunt cumulos; pelagique venenum,
quo perit usus aquæ suco corruptus amaro,
Vitali sale permutant, redduntque salubre.
|
La baleine, se levant à
gauche avec le dernier degré des poissons, suit
Andromède dans le ciel, après l'avoir poursuivie sur le
bord de la mer. Par elle, on fait une guerre sanglante
aux poissons et à tout animal portant écailles; on
embarrasse le fond des eaux par des filets, on enchaîne
en quelque sorte les flots furieux ; on arrête, on
enferme dans des prisons maillées les veaux marins, qui
s'y croient eu sûreté comme en pleine mer; on surprend
les thons, déçus par la largeur des mailles des filets.
Ce n'est pas assez de les avoir pris; on les laisse
s'agiter en s'efforçant de rompre les nœuds qui les
retiennent, on attend que la proie devienne plus
abondante ; on les tue alors, et les eaux de la mer sont
rougies de leur sang. Lorsque toute la grève est
couverte du produit de la pêche, on procède à une
nouvelle boucherie : on coupe le poisson en morceaux, et
ces membres divisés sont réservés pour des usages
différents. Telle partie est meilleure desséchée; telle
autre, conservée avec tous ses sucs. De celles-ci on
extrait une saumure précieuse, c'est la partie la plus
pure du sang ; relevée avec le sel, elle fournit un
assaisonnement délicat. Celles-là paraissent trop
faciles à se corrompre, ce sont les intestins; on les
rassemble, ils se communiquent par le mélange une
fermentation réciproque, et forment un autre
assaisonnement d'un usage plus général. Ou lorsqu'on
voit sur l'eau une nuée de poissons dont la couleur
azurée se distingue à peine de celle de la mer, et que
leur multitude même rend immobiles, on les environne
d'une vaste seine et l'on en remplit des caques et des
tonneaux; ces poissons ainsi renfermés mêlent tous leurs
sucs, et de leur chair corrompue on obtient encore une
nouvelle espèce de saumure. Une autre profession de ceux
qui naissent sous la baleine, c'est de travailler aux
grandes salines, de communiquer à l'eau de la mer une
chaleur suffisante, et de la dépouiller de son venin.
Dans ce but, ils préparent une aire assez vaste, et
l'entourent d'un rebord élevé : ils y font entrer l'eau
de la mer par une ouverture qu'ils referment, pour
empêcher l'eau de s'échapper. L'aire reste exposée à la
chaleur de l'été: l'humidité, dissipée par l'ardeur du
soleil, dépose une matière brillante et desséchée que
l'on recueille, une production blanche de la mer que
l'on réserve pour le service de la table, une écume
solide dont on remplit de vastes greniers. C'était un
vrai poison, dont l'amertume ne permettait pas
d'employer l'eau qu'il corrompait : on en a fait un sel
vivifiant et salutaire |
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690
At revoluta polo cum primis vultibus arctos
Ad sua perpetuos revocat vestigia passus
numquam tincta vadis, sed semper flexilis orbe;
Aut cynosura minor cum prima luce resurgit:
et pariter vastusve leo vel scorpios acer
nocte sub extrema promittunt jura diei :
non inimica feræ tali sub tempore natis
ora ferent, placidasque regent commercia gentes.
ille manu vastos poterit frenare leones
et palpare lupos, pantheris ludere captis,
700 Nec fugiet
validas cognati sideris ursas
inque artes hominum perversaque munia ducet;
ille elephanta premet dorso, stimulisque movebit
turpiter in tanto cedentem pondere punctis;
ille tigrim rabie solvet, pacique domabit;
quæque alia infestant silvis animalia terras
iunget amicitia secum,
catulosque sagaces
......................................................................... |
La grande ourse, la tête
penchée vers la terre, termine sa révolution autour du
pôle, et recommence à parcourir une carrière qu'elle ne
cesse jamais de fournir, ne se couchant point, mais
décrivant sans cesse le même chemin sur l'horizon ; les
premiers feux de la petite ourse commencent aussi à se
lever de nouveau ; le vaste lion et le violent scorpion,
sortant à leur tour des ténèbres, reparaissent au-dessus
de l'horizon. Celui qui naît alors sera respecté des
bêtes féroces ; il empêchera qu'elles ne nuisent au
commerce pacifique des nations. Il aura le talent
d'apprivoiser les lions farouches, de caresser les
loups, de prendre les panthères, et déjouer avec elles;
il n'évitera pas la rencontre des ourses, qui ont tant
de rapport avec sa constellation. Il montera sur le dos
de l'éléphant, le conduira à sa guise, lui fera faire
des exercices qui lui sont étrangers, et ne parais sent
convenir qu'à l'homme ; cette masse énorme obéira
honteusement à un léger aiguillon. Il domptera la fureur
du tigre, et le rendra doux et paisible : il se fera
aimer de tous les autres animaux féroces qui dévastent
les forêts. Les chiens, dont l'odorat est si
subtil…………………… |
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tertia
Pleiadas dotavit forma sorores
femineum rubro vultum suffusa pyropo,
invenitque parem sub te, cynosura, colorem,
710 Et quos
Delphinus jaculatur quattuor ignes
deltotonque tribus facibus, similique nitentem
luce
Aquilam et flexos per lubrica terga dracones.
tum quartum quintumque genus discernitur omni
e numero, summamque gradus disjungit utramque.
maxima pars numero censu concluditur imo,
quæ neque per cunctas noctes, neque tempore in
omni
resplendet, vasto cœli submota profundo,
sed cum clara suos avertit Delia cursus
cumque vagæ stellæ terris sua lumina condunt,
720 Mersit et
ardentis Orion aureus ignes
signaque transgressus mutat per tempora Phœbus,
effulget tenebris, et nocte accenditur atra.
tunc conferta licet cœli fulgentia templa
cernere luminibus densis, totumque micare
stipatum stellis mundum, nec cedere summa
floribus aut siccæ curvum per littus arenæ,
sed quot eant semper nascentes æquore fluctus,
quot delapsa cadant foliorum millia silvis,
Amplius hoc ignes numero volitare per orbem.
730 Utque per
ingentes populus describitur urbes,
principiumque patres retinent, et proximum
equester
ordo locum, populumque equiti, populoque subire
Vulgus iners videas et jam sine nomine turbam:
sic etiam in magno quædam respublica mundo est;
quam natura facit, quæ cœlo condidit urbem.
sunt stellæ procerum similes, sunt proxima primis
sidera, suntque gradus, atque omnia jura priorum:
maximus est populus, summo qui culmine fertur,
cui si pro numero vires natura dedisset,
740 Ipse suas
æther flammas sufferre nequiret,
totus et accenso mundus flagraret Olympo. |
Le troisième ordre
renferme les pléiades, unies entre elles par les liens
d'une commune origine : leur éclat est tempéré par une
tendre rougeur convenable à leur sexe. On remarque cette
même couleur dans vos étoiles, ô Cynosure! dans les
quatre qui étincellent sur le dauphin, dans les trois du
triangle ; l'aigle et les dragons, dans leurs replis,
offrent de pareilles étoiles. Celles du quatrième et du
cinquième ordre se font reconnaître facilement par tout
le ciel; l'éclat seul distingue ces deux ordres. Enfin
le plus grand nombre des étoiles forme la dernière
classe : celles-ci, dispersées dans la plus haute région
du ciel, ne brillent ni toutes les nuits, ni en tout
temps. Mais lorsque la déesse de Délos a plongé son char
au-dessous de notre hémisphère, que les étoiles errantes
nous refusent leur lumière, que le brillant Orion ne
nous montre plus ses étoiles éclatantes, et que le
soleil, après avoir parcouru tous les signes, renouvelle
l'année, ces étoiles percent les ténèbres, et leur feu
devient visible dans l'obscurité de la nuit. Alors vous
voyez la céleste voûte semée de flambeaux sans nombre;
le ciel renvoie de toutes parts l'éclat des étoiles ;
elles ne sont pas moins nombreuses que les fleurs, que
les grains de sable accumulés sur le rivage inégal de
l'Océan : comptez, si vous le pouvez, les flots qui se
succèdent sur la surface de la mer, les feuilles qui
tombent par milliers dans les forêts; vous n'approcherez
pas du nombre des feux qui circulent dans le ciel.
Comme, dans le dénombrement des habitants d'une grande
ville, on met les sénateurs au premier rang, l'ordre
équestre au second, le citoyen après le chevalier, enfin
après le citoyen le vil peuple, la populace sans nom; de
même il existe dans le monde une espèce de république
établie par la nature, qui du ciel a fait une grande
ville. Là, des étoiles représentent les chefs; d'autres
approchent fort près de ces premières : tous les
honneurs, tous les droits sont réservés pour ces astres
principaux. Le peuple vient ensuite, il est innombrable,
il roule au haut de la voûte céleste : si la nature eût
accordé à ces petites étoiles des forces proportionnées
à leur nombre la région éthérée ne pourrait supporter
ses propres feux, et les flammes du ciel embrasé
consumeraient l'univers. |
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NOTES DU LIVRE V.
v. 37.
A dextri lateris. On a vu ailleurs qu'un
signe qui en précède un autre est censé être à sa
droite. Mais de plus, selon le savant évoque
d'Avranches, la partie boréale du ciel est censée être à
droite, et la partie australe à gauche. Il paraît, en
effet, que, dans toute cette combinaison du lever des
constellations avec celui des douze signes, Manilius
suit assez fidèlement cette nomenclature. Au reste,
cette concomitance du lever des signes avec celui des
autres constellations tant australes que boréales, telle
qu'elle nous est donnée par Manilius, n'est point du
tout exacte, ainsi que Scaliger l'a remarqué. Par
exemple, le poète nous dit que la poupe du vaisseau se
lève avec le quatrième degré du bélier. Quelle
monstrueuse astrologie! s'écrie Scaliger : du temps de
Manilius, les premières étoiles du navire se levaient
avec le onzième degré de l’écrevisse. Nous ne relèverons
pas toutes les autres erreurs de cette espèce ; elles
ont été assez fidèlement copiées par Firmicus, et
Scaliger n'en a laissé tomber aucune. Mais si Manilius
est ici mauvais astronome, ses erreurs sont de la plus
petite conséquence, et d'ailleurs il nous en dédommage
bien par la beauté des descriptions et des épisodes dont
ce cinquième livre est tissu.
v. 207.
Latratque canicula flammas. A la lettre,
la canicule aboie des flammes. La canicule, dans la
gueule du grand chien, est la plus belle des étoiles
fixes; on la nomme aussi Sirius. Quelques
écrivains ont confondu la canicule avec le petit chien.
Selon Scaliger, le nom de chien représente la
constellation entière du grand chien, et celui de
Sirius ou de canicule est restreint à
signifier la belle étoile de sa gueule. Huet, toujours
prompt à contredire Scaliger, prouve, par une foule
d'autorités, que les noms de chien, de
canicule, de Sirius, ont été appliqués assez
indifféremment et à la belle étoile de la gueule, et à
la constellation entière : en cela Huet a raison. Mais
il est certain, d'un autre côté, qu'on a souvent
distingue l'une et l'autre ; que Manilius nommément,
dans le vers qui nous occupe, autorise cette
distinction; que, par le chien, il désigne la
constellation entière, et, par la canicule, l'étoile la
plus brillante de cette constellation. Ainsi Scaliger
n'a pas tout à fait tort, Bentlei ne convient pas que
Manilius distingue ici le chien de la canicule; et, en
effet, notre poète, lib. I, v. 395, paraît donner à la
constellation entière le nom de canicule. Mais
Manilius était poète, el non astronome; il revêt, comme
nous l'avons dit ailleurs, des ornements de la poésie ce
qu'il a rassemblé de divers auteurs : il n'est pas
étonnant qu'il se contredise quelquefois. D'ailleurs
c'est une bien légère erreur, que de donner le même nom
à une constellation et à la principale étoile de cette
constellation.
v. 255.
Illinc oriens est ipsa puella. Ceci
suppose que les étoiles de la couronne ont primitivement
fait partie de la constellation de la vierge ; ou, plus
probablement peut-être, qu'on a confondu le signe de la
vierge avec Ariadne.
v. 311.
Improvidus hœdus. On ne sait ce que c'est
que cette constellation du chevreau, manifestement
distincte de la chèvre et des chevreaux du cocher :
Manilius, et son copiste Firmicus, sont les seuls qui en
fassent mention. Huet soutient vivement contre Scaliger
qu'il s'agit ici des deux chevreaux de la constellation
du cocher. Le savant prélat avait apparemment oublié que
Manilius, v. 102 et suiv. de ce même livre, fait lever
ces chevreaux avec le vingtième degré du bélier ; et
celui ci se lève avec la balance.
v. 318.
Non... digitos quœsiverit hasta.
A la lettre : Partout où ils seront, la pique
ne manquera pas de doigts.
Dans les ventes publiques,
on enfonçait une pique en terre, et celui qui voulait
enchérir élevait un doigt, ou l’étendait vers cette
pique.
v. 325.
Per heredem. Mercure est, dit-on,
l'inventeur de la lyre; il forma la première avec une
écaille de tortue, et c'est cette première lyre que les
mythologistes ont placée dans le ciel.
v. 343.
Juppiter ante deos. Théon, d'après
Ératosthène, témoigne que les dieux se jurèrent sur
l'autel une alliance contre les géants ; c'était donc
devant les dieux, en leur présence, que Jupiter exerçait
les fonctions sacerdotales,
ante Deos.
v. 355.
In tertia jura ministros. Les trois
degrés étaient celui des œditui,
chargés du soin de tout ce qui appartenait au
temple, tels que seraient aujourd'hui nos sacristains;
celui des simples prêtres, et celui des hiérophantes ou
souverains pontifes : ceux-ci prédisaient l'avenir. Il
est clair que Manilius parle ici des hiérophantes, et
non des œditui, comme l'a
rêvé Dufay.
v. 400.
Cumque fides. Voici une autre lyre
inconnue à tous les astronomes anciens et modernes. La
lyre est appelée par les Grecs lyra;
par les Latins, fides.
Est-ce que Manilius a vu dans ces deux noms deux
constellations différentes? Firmicus, son copiste, ne
fait mention que d'une seule lyre; il la fait lever avec
le dixième degré du capricorne, et lui attribue les
mêmes influences que Manilius départit à sa seconde
lyre. L'unique lyre, connue des astronomes, précède le
capricorne, et d'ailleurs elle est d'environ soixante
degrés plus boréale que ce signe : il y a donc longtemps
qu'elle est levée, lorsque le capricorne commence à
paraître au-dessus de l'horizon.
v. 417.
Squamam slellis imitanlibus. Scaliger
fait ici une vive sortie contre notre poète, sur ce
qu'il donne des écailles au dauphin. Mais Manilius
n'était pas naturaliste : il s'est véritablement trompé
ici, et il n'est pas le seul des anciens poètes qui ait
donné dans celte erreur. Ovide, Métam. III, 663,
représentant les Tyrrhéniens changés par Bacchus en
dauphins, couvre leur peau d'écailles. Voyez
Huet,
v. 470.
Qui vitœ ostendit vitam. Je n'assurerai
pas que j'aie rendu complètement le sens de Manilius.
Suivant Scaliger, qui prend vitœ
pour un génitif, Ménandre a enseigné quelle
était la véritable vie de l'homme ou de la vie humaine,
et cette vie de la vie est l'amour, dit-il. Huet et
Bentlei pensent que le sens de Manilius est que Ménandre
a montré à son siècle quelles étaient les mœurs de son
siècle, qu'il les a représentées fidèlement. Ce sens
nous paraît plus admissible que le premier ; il est
renfermé dans celui que nous avons cru devoir adopter.
v. 487.
Rorantis juvenis. Ganymède ; c'était,
avant le règne de l'empereur Adrien, le nom de la
constellation qu'on a nommée depuis Antinoüs. Elle est
représentée sur nos cartes célestes sous la figure d'un
jeune homme que l'aigle tient dans ses serres; ce qui
conviendrait mieux à Ganymède qu'à Antinoüs. D'antres
entendent ceci du verseau. Mais quoique l'aigle se lève,
suivant Manilius, avec le verseau, ces deux
constellations sont trop distantes l'une de l'autre pour
que l'on puisse dire que l'aigle couvre le verseau de
ses ailes. D'ailleurs, l'aigle en tout sens est à la
droite du verseau, elle le précède, elle est plus
boréale que lui. D'un autre côté cependant, Manilius,
faisant dans son premier livre l’énumération des
constellations, n'y renferme pas le Ganymède, dit
aujourd'hui Antinoüs. Concluons, avec quelques
interprètes, qu'il s'agit ici de Ganymède, il est vrai,
mais que ce Ganymède de Manilius n'est autre que le
verseau ; et que quant aux difficultés qu'on pourrait
proposer, il faut toujours se souvenir que, comme nous
l'avons dit plusieurs fois, Manilius était meilleur
poêle qu'astronome. Sa plus grande erreur est ici de
faire lever le douzième degré du verseau avec l'aigle;
et de son temps l'aigle se levait quatre ou cinq heures
au moins avant le douzième degré du ver seau. Il faut
bien lui passer cette erreur : pourquoi ne lui
passerions-nous pas les autres?
V. 538.
Culpa parentum. La faute des parents
d'Andromède, ou plutôt celle de sa mère Cassiopée, avait
été de préférer la beauté d'Andromède à celle des
Néréides. Aratus insinue, Cicéron dans ses Aratées dit
clairement, que c'était sa propre beauté qu'elle avait
prétendu plus accomplie que celle de ces déesses. Les
Néréides, outrées d'un juste dépit, en portèrent des
plaintes amères à Neptune; et ce dieu punit l'orgueil de
Cassiopée par des débordements qui firent les plus
grands ravages dans les terres voisines de la mer. De
plus, un monstre marin d'une taille énorme était apporté
par les flots et désolait toute la campagne: hommes,
femmes, enfants, bestiaux, tous les êtres vivants qu'il
rencontrait étaient une faible proie pour sa voracité.
On consulta l'oracle : il fut répondu que ces fléaux ne
pouvaient cesser que lorsqu'on aurait abandonné
Andromède à la fureur du monstre. Tel est le prélude de
l'histoire, ou plutôt de la fable dont Manilius va nous
raconter la suite. On fait ordinairement Céphée roi
d'Ethiopie; la scène aurait été sur la mer Rouge.
Manilius n'était apparemment pas de cet avis; il donne,
vers 552, à Andromède une blancheur éblouissante, qui
cadrerait mal avec la noirceur des Éthiopiens. De plus,
il fait mention, v. 583, des Syrtes qui étaient bien
certainement situées sur la côte septentrionale de
l'Afrique. Il s'agit donc ici de la mer Méditerranée.
v. 612.
Nupturam dote mariti. A la lettre,
Andromède devait se marier, dotée par son époux. Suivant
l'usage ordinaire, Andromède aurait dû porter en mariage
une dot à Persée; ici c'est au contraire Persée qui la
dote, en la défendant du monstre, et en lui conservant
la vie, sans laquelle toute autre dot lui devenait
inutile.
v. 626.
Sociusque in parte catenæ.
Scaliger remarque que le criminel et celui
auquel on en confiait la garde étaient liés souvent
d'une même chaîne. Cela se pratiquait surtout à l'égard
des soldats.
v. 643
Engonasi. Engonasi, à la lettre,
signifie, à genoux : celte constellation est plus
connue sous le nom d'Hercule, qu'on lui a donné
depuis. On ne laisse pas cependant de le représenter
toujours sur nos cartes célestes fléchissant un genou,
et appuyant son autre pied sur la tête du dragon. Mais
on couvre sa tête et ses épaules de la dépouille d'un
lion ; on lui met à la main droite une massue, à la
gauche un rameau et le chien Cerbère : les anciens
astronomes, qui ne lui donnaient pas le nom d'Hercule,
ne lui reconnaissaient probablement pas ces attributs.
v. 674.
Squamigerum nubes, La pêche dont parle
maintenant Manilius est celle du maquereau. Les Turcs,
les Grecs, les Italiens retirent de ce poisson une
saumure qui était autrefois très recherchée. C'est celle
dont parle Horace, Serm. II, Sat.
viii, 46. Dans le texte, Manilius parle de poissons à
écailles: mais celui qui, v. 417, a donné des écailles
au dauphin en peut bien maintenant gratifier le
maquereau.
v. 690.
At revoluta.... En termes simples et
didactiques: Au lever du lion, la grande ourse est au
plus bas de sa révolution et commence à remonter; et
pareillement, au lever du scorpion, la petite ourse,
parvenue au méridien sous le pôle, commence également à
se relever. Celui qui naît sous ces dispositions du
ciel, etc. Du temps de Manilius, et à plus forte raison
au siècle d'Eudoxe, la petite ourse n'était pas si
voisine du pôle qu'elle l'est actuellement.
v. 706.
Catulosque sagaces.... Il manque ici
plusieurs vers. Manilius y parlait sans doute des
influences du dragon. Il distinguait ensuite les étoiles
en six classes, relativement à leur éclat ou à leur
grandeur apparente. Il faisait l'énumération des étoiles
du premier et du second ordre.
v. 712.
Aquilam... dracones. Le dragon et le
serpent, suivant Bentlei. Je pense qu'on y peut joindre
l'hydre, qui comprend aussi plusieurs étoiles de la
troisième grandeur. L'hydre et le dragon, sur nos globes
célestes, sont représentés comme de simples serpents. Au
reste, Manilius n'a pas prétendu sans doute faire ici
une énumération exacte des étoiles de la troisième
grandeur : il s'en trouve dans presque toutes les
constellations.
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