Annales de Tacite

 

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Propos critiques sur la politique d'Auguste

TACITE : C. Cornelius Tacitus, d'abord avocat, se mit, relativement tard, à écrire. Après Le Dialogue des orateurs, l'Agricola, Les Moeurs des Germains, TACITE écrivit l'histoire romaine, ab excessu divi Augusti, en deux ouvrages, les Histoires et les Annales, qui nous sont parvenus mutilés
 

X. [1] Dicebatur contra: pietatem erga parentem et tempora rei publicae obtentui sumpta: ceterum cupidine dominandi concitos per largitionem veteranos, paratum ab adulescente privato exercitum, corruptas consulis legiones, simulatam Pompeianarum gratiam partium. [2] Mox ubi decreto patrum fascis et ius praetoris invaserit, caesis Hirtio et Pansa, sive hostis illos, seu Pansam venenum vulneri adfusum, sui milites Hirtium et machinator doli Caesar abstulerat, utriusque copias occupavisse; extortum invito senatu consulatum, armaque quae in Antonium acceperit contra rem publicam versa; proscriptionem civium, divisiones agrorum ne ipsis quidem qui fecere laudatas. [3] Sane Cassii et Brutorum exitus paternis inimicitiis datos, quamquam fas sit privata odia publicis utilitatibus remittere: sed Pompeium imagine pacis, sed Lepidum specie amicitiae deceptos; post Antonium, Tarentino Brundisinoque foedere et nuptiis sororis inlectum, subdolae adfinitatis poenas morte exsolvisse. [4] Pacem sine dubio post haec, verum cruentam: Lollianas Varianasque cladis, interfectos Romae Varrones, Egnatios, Iullos. [5] Nec domesticis abstinebatur: abducta Neroni uxor et consulti per ludibrium pontifices an concepto necdum edito partu rite nuberet; Q. Vitellii et Vedii Pollionis luxus; postremo Livia gravis in rem publicam mater, gravis domui Caesarum noverca. [6] Nihil deorum honoribus relictum cum se templis et effigie numinum per flamines et sacerdotes coli vellet. [7] Ne Tiberium quidem caritate aut rei publicae cura successorem adscitum, sed quoniam adrogantiam saevitiamque eius introspexerit, comparatione deterrima sibi gloriam quaesivisse. Etenim Augustus paucis ante annis, cum Tiberio tribuniciam potestatem a patribus rursum postularet, quamquam honora oratione, quaedam de habitu cultuque et institutis eius iecerat quae velut excusando exprobraret. [8] Ceterum sepultura more perfecta templum et caelestes religiones decernuntur.

   vocabulaire

IX. On disait, d'un autre côté, "que sa tendresse pour son père et les désordres de la république ne lui avaient servi que de prétextes; que c'était par ambition qu'il avait rassemblé les vétérans à force de largesses, levé une armée au sortir de l'enfance et sans titre public, corrompu les légions d'un consul, affecté pour le parti de Pompée un zèle hypocrite; c'était par ambition qu'ayant usurpé, à la faveur d'un sénatus-consulte, les faisceaux et l'autorité de préteur, il s'était emparé des troupes d'Hirtius et de Pansa, tués par l'ennemi peut-être, mais peut-être aussi par les artifices de César, s'il est vrai que du poison fut versé dans la blessure de Pansa, et qu'Hirtius périt de la main de ses propres soldats. Que dire du consulat envahi malgré les sénateurs? Des armes reçues contre Antoine et tournées contre la république? De cette proscription de citoyens, de ces distributions de terres, qui n'avaient même pas l'approbation de leurs auteurs? Que la mort de Cassius et des deux Brutus eût été vraiment offerte aux mânes paternels, on pouvait le croire; et encore eût-il pu, sans impiété, immoler à l'intérêt public ses ressentiments domestiques. Mais Sextus, mais Lépide, il les avait trompés, l'un par un simulacre de paix, l'autre par une feinte amitié; mais Antoine, il l'avait entraîné dans le piège par les traités de Tarente et de Brindes et l'hymen de sa sœur, alliance perfide que le malheureux Antoine avait payée de sa vie. La paix sans doute était venue ensuite, mais une paix sanglante : au dehors, les désordres de Lollius et de Varus; à Rome, le meurtre des Varron, des Egnatius, des Iule." On n'épargnait pas même sa vie privée : on lui reprochait "la femme de Tibérius enlevée au lit conjugal; les pontifes interrogés par dérision si, enceinte d'un premier époux, il lui était permis de se marier à un autre; et le luxe effréné de Q. Tedius et de Vedius Pollio; et Livie, fatale, comme mère, à la république, plus fatale, comme marâtre, à la maison des Césars. Et les honneurs des dieux ravis par un homme qui avait voulu comme eux des temples, des images sacrées, des flamines, des prêtres. Même en appelant Tibère à lui succéder, il avait consulté ni son cœur, ni le bien public; mais il avait deviné cette âme hautaine et cruelle, et cherché de la gloire dans un odieux contraste." En effet, peu d'années avant sa mort, Auguste, demandant une seconde fois pour Tibère la puissance tribunitienne, avait, dans un discours, d'ailleurs à sa louange, jeté sur son maintien, son extérieur et ses mœurs, quelques traits d'une censure déguisée en apologie. La solennité des funérailles terminée, on décerne au prince mort un temple et les honneurs divins.

 

[1] Dicebatur contra:

pietatem erga parentem et tempora rei publicae obtentui sumpta:

ceterum cupidine dominandi concitos per largitionem veteranos,

paratum ab adulescente privato exercitum,

corruptas consulis legiones,

simulatam Pompeianarum gratiam partium.

[2] Mox ubi decreto patrum fascis et ius praetoris invaserit,

caesis Hirtio et Pansa,

sive hostis illos, (abstulerat)

seu Pansam venenum vulneri adfusum, (abstulerat)

sui milites Hirtium (abstulerant)

et machinator doli Caesar abstulerat,

utriusque copias occupavisse;

extortum invito senatu consulatum,

armaque quae in Antonium acceperit contra rem publicam versa;

proscriptionem civium, divisiones agrorum ne ipsis quidem qui fecere laudatas.

[3] Sane Cassii et Brutorum exitus paternis inimicitiis datos,

quamquam fas sit privata odia publicis utilitatibus remittere:

sed Pompeium imagine pacis, sed Lepidum specie amicitiae deceptos;

post Antonium, Tarentino Brundisinoque foedere et nuptiis sororis inlectum, subdolae adfinitatis poenas morte exsolvisse.

[4] Pacem sine dubio post haec, verum cruentam:

Lollianas Varianasque cladis, interfectos Romae Varrones, Egnatios, Iullos.

[5] Nec domesticis abstinebatur:

abducta Neroni uxor

et consulti per ludibrium pontifices

an concepto necdum edito partu rite nuberet;

Q. Vitellii et Vedii Pollionis luxus;

postremo Livia gravis in rem publicam mater,

gravis domui Caesarum noverca.

[6] Nihil deorum honoribus relictum

cum

se templis et effigie numinum per flamines et sacerdotes coli

vellet.

[7] Ne Tiberium quidem caritate aut rei publicae cura successorem adscitum,

sed quoniam adrogantiam saevitiamque eius introspexerit,

comparatione deterrima sibi gloriam quaesivisse.

Etenim Augustus paucis ante annis,

cum Tiberio tribuniciam potestatem a patribus rursum postularet,

quamquam honora oratione,

quaedam de habitu cultuque et institutis eius iecerat

quae velut excusando exprobraret.

[8] Ceterum sepultura more perfecta

templum et caelestes religiones decernuntur. 

a, prép. : ab, prép. : (+abl) à partir de, après un verbe passif = par

ab, prép. : ab, prép. : (+abl) à partir de, après un verbe passif = par

abduco, is, ere, duxi, ductum : emmener

abstineo, es, ere, tinui, tentum : s'abstenir

accipio, is, ere, cepi, ceptum : recevoir, apprendre

adfinitas, atis, f. : le voisinage, la parenté

adfundo, is, ere, fudi, fusum : verser sur

adrogantia, ae, f. : l'arrogance, la présomption

adscisco, is, ere, ivi, itum : s'associer

adulescens, entis, m. : jeune homme

ager, agri, m. : la terre, le territoire, le champ

amicitia, ae, f. : l'amitié

an, inv. : est-ce que, ou est-ce que ; an... an..., si... ou si

annus, i, m. : l'année

ante, inv. : prép+acc., devant, avant ; adv. avant

Antonius, ii, m. : Antoine

arma, orum, n. : les armes

aufero, fers, ferre, abstuli, ablatum : emporter

Augustus, i, m. : Auguste

aut, conj. : ou, ou bien

Brundisinus, a, um : de Brundisium (ville et port de Calabre)

Brutus, i, m. : Brutus

caedo, is, ere, cecidi, caesum : abattre, tuer

caelestis, e : céleste, du ciel

Caesar, aris, m. : César, empereur

caritas, atis, f. : l=amour

Cassius, i, m. : Cassius

ceterum, adv. : du reste

civis, is, m. : le citoyen

clades, is, f. : la blessure, la perte, le dommage, le désastre militaire, la grave défaite

colo, is, ere, colui, cultum : honorer, cultiver, habiter

comparatio, ionis, f. : la comparaison

concio, is, ire, conciui, concitum : assembler, réunir, mettre en mouvement

concipio, is, ere, cepi, ceptum : faire naître, produire

consul, is, m. : le consul

consulatus, us, m. : le consulat

consulo, is, ere, sului, sultum : consulter

contra, adv : au contraire, en face ; prép+acc : contre

copia, ae, f. : l'abondance (pl. les richesses, les troupes)

corrumpo, is, ere, rupi, ruptum : corrompre

cruentus, a, um : sanglant, sanguinaire

cultus, us, m. : l'action de cultiver, le culte, l'élégance raffinée

cupido, dinis, m. : le désir

cura, ae, f. : le soin, le souci

de, prép. + abl. : au sujet de, du haut de, de

decerno, is, ere, crevi, cretum : décréter, décider

dico, is, ere, dixi, dictum : dire, appeler

deterrimus, a, um : le pire, le plus mauvais

deus, i, m. : le dieu

divisio, ionis, f. : le partage, la répartition, la distribution

decipio, is, ere, cepi, ceptum : tromper, abuser

decretum, i, n. : décision, décret

do, das, dare, dedi, datum : donner

dolus, i, m. : l'adresse, la ruse

domesticus, a, um : privé, domestique

dominor, aris, ari : être maître

domus, us, f. : la maison

dubium, ii, n. : doute

edo, is, ere, edidi, editum : faire sortir, faire naître, publier

effigies, ei, f. : la représentation, l'image, le portrait, la copie, le fantôme

Egnatius, i, m. : m. : Egnatius

erga, prép.+ acc. : devant, en face de

et, conj. : et, aussi

etenim, inv. : et en effet

excuso, as, are : excuser, justifier, disculper

exercitus, us, m. : l'armée

exitus, us, m. : la sortie, l'issue, le résultat, l'aboutissement, la mort, la fin, la conclusion

exprobro, as, are : blâmer, reprocher

exsolvo, is, ere, solui, solutum : ouvrir

extorqueo, es, ere, torsi, tortum : arracher, retirer, traîner en longueur

facio, is, ere, feci, factum : faire

fas, n. indécl. : droit divin ; fas est : il est permis par les dieux de...

fascis, is, m. : paquet ; pl. : faisceaux

flamen, inis, m. : flamine (prêtre d'un dieu particulier)

foedus, deris, n. : le traité

gloria, ae, f. : la gloire

gratia, ae, f. : la grâce, la reconnaissance (gratias agere = remercier)

gravis, e : sérieux, triste, lourd, alourdi

habitus, us, m. : la manière d'être, l'apparence, l'habit

hic, haec, hoc : ce, cette, celui-ci, celle-ci

Hirtius, i, m. : Hirtius

honorus, a, um : honorable, qui honore

honos, oris, m. : l'honneur

hostis, is, m. : l'ennemi

iacio, is, ere, ieci, iactum : jeter

ille, illa, illud : ce, cette

imago, inis, f. : l' imitation, l'image

in, prép. : (acc. ou abl.) dans, sur, contre

inimicitia, ae, f. (souvent au pluriel) : la haine, l'inimitié

inlicio, is, ere, lexi, lectum : engager, entraîner à

institutum, i, n. : l'usage établi

interficio, is, ere, feci, fectum : tuer

introspicio, is, ere, spexi, spectum : regarder dans, regarder à l'intérieur

invado, is, ere, vasi, vasum : envahir, saisir

invitus, a, um : contre son gré

ipse, ipsa, ipsum : même

is, ea, id : ce, cette

Iullus, i, m. : Iule

ius, iuris, n. : le droit, la justice

largitio, ionis, f. : la générosité

laudo, as, are : louer

legio, onis, f. : la légion

Lepidus, i, m. : Lepide

Livia, ae, f. : Livia, Livie

Lollianus, a, um : de Lollius

ludibrium, i, n. : le jeu, la plaisanterie

luxus, us, m. : l'excès, la débauche, le faste

machinator, oris, m. : le mécanicien, l'inventeur, le machinateur

mater, tris, f. : la mère

miles, itis, m. : le soldat

mors, mortis, f. : la mort

mos, moris, m. : sing. : la coutume ; pl. : les moeurs

mox, inv. : bientôt

ne, inv. : pour que... ne... pas, de peur que, que

nec, neque = et non , et...ne...pas

necdum, adv. : et pas encore

Nero, onis, m. : Néron

nihil, ou nil : rien

noverca, ae, f. : le belle-mère, la marâtre

nubo, is, ere, bui, putm : se marier

numen, inis, n. : l' assentiment, la volonté ; la volonté des dieux, la puissance divine; un dieu, une divinité

nuptiae, arum : les noces, le mariage

obtentus, us, m. : l'action de tendre, le prétexte

occupo, as, are : se saisir de, envahir, remplir, devancer, couper (la parole)

odium, i, n. : la haine

oratio, onis, f. : le discours

Pansa, ae, m. : Pansa

paratus, a, um : prêt

parens, entis, m. : parent

pars, partis, f. : la partie, le côté

partus, us, m. : l'accouchement, le nouveau-né

pater, tris, m. : le père, le magistrat

paternus, a, um : du père, des aïeux

pauci, ae, a : pl. peu de

pax, pacis, f. : la paix

per, prép. : (acc) à travers, par

perfectus, a, um : achevé, parfait

pietas, atis, f. : le respect, le patriotisme, l'affection

poena, ae, f. : le châtiment

Pollio, Pollionis, m. : Pollion

Pompeianus, a, um : de Pompée

Pompeius, i, m. : Pompée

pontifex, icis, m. : le pontife

possum, potes, posse, potui : pouvoir

post, prép+acc. : après

postremo, inv. : enfin

postulo, as, are : demander, réclamer

potestas, atis, f. : le pouvoir

praetor, oris, m. : le préteur

privatus, a, um : privé

privatus, a, um : privé

proscriptio, ionis, f. : la proscription

publicus, a, um : public

Q, abr. pour Quintus

quae, 4 possibilités : 1. N.F.S. N.F.PL. N.N.PL., ACC. N. PL. du relatif = qui, que (ce que, ce qui)2. idem de l'interrogatif : quel? qui? que? 3. faux relatif = et ea 4. après si, nisi, ne, num = aliquae

quaero, is, ere, sivi, situm : chercher, demander

quamquam, quanquam + ind. : bien que

qui, 1. N.M. S., N. M. PL. du pronom relatif = qui 2. faux relatif = et is ou et ei 3. NMS ou N.M.PL. de l'interrogatif = qui? quel? 4. après si, nisi, ne, num = aliqui

qui, quae, quod, pr. rel : qui, que, quoi, dont, lequel...

quidam, quaedam, quoddam/quiddam : un certain, quelqu'un, quelque chose

quidem, inv. : certes (ne-) ne pas même

quoniam, conj. : puisque

religio, onis, f. : le scrupule religieux, la religion

relinquo, is, ere, reliqui, relictum : laisser, abandonner

remitto, is, ere, misi, missum : renvoyer, abandonner

res, rei, f. : la chose

rite, adv. : selon les rites

Roma, ae, f. : Rome

rursum, adv. : en revanche, une seconde fois, de nouveau

sacerdos, dotis, m. : le prêtre

saevitia, ae, f. : la fureur, la violence, la dureté, la cruauté

sane, adv. : vraiment, parfaitement

se, pron. réfl. : se, soi

sed, conj. : mais

senatus, us, m. : le sénat

sepultura, ae, f. : les derniers devoirs, la sépulture

seu, inv., répété : soit... soit

simulo, as, are : simuler

sine, prép. : (abl) sans

siue, (seu) inv. : siue... siue : soit... soit

soror, oris, f. : la soeur

species, ei, f : l'apparence, l'aspect

subdolus, a, um : rusé

successor, oris, m. : le successeur dans une fonction

sum, es, esse, fui : être

sumo, is, ere, sumpsi, sumptum : se charger de, prendre

suus, a, um : adj. : son; pronom : le sien, le leur

Tarentinus, a, um : de Tarente

templum, i, n. : le temple

tempus, oris, n. : le temps

Tiberius, ii, m. : Tibère

tribunicius, a, um : tribunitien

ubi, inv. : où, quand

uterque, utraque, utrumque : chacun des deux

utilitas, atis, f. : l'utilité

uxor, oris, f. : l'épouse, la femme

Varianus, a, um : de Varus

Varro, onis, m. : Varron

Vedius, i, m. : Vedius

velut, inv. : comme

venenum, i, n. : le poison, le venin

verto, is, ere, verti, versum : tourner, changer, traduire

verum, conj. : vraiment, en vérité, mais

veteranus, a, um : vieux, ancien

Vitellius, i, m. : Vitellius

volo, vis, velle : vouloir

vulnus, eris, n. : la blessure