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MÉNANDRE

 

Anthologie

 

Liste des pièces - Les Papyrus de Ménandre

Les Portraits de Ménandre

 

 

 

SOMMAIRE

 

 

 

Le Grincheux

 

Résumé de la pièce

- Un ami dévoué

- Un homme impossible

- Sentence

- Autocritique

 

La Samienne

 

Résumé de la pièce

- Trop bavarde !

- Crise et arrangement

- Un père à son fils

- Deux sentences

 

Fragments de pièces identifiées

 

- L'Accusateur

- Les Adelphes

- L'Andrienne

- L'Androgyne ou les Crétois

- Les Arbitres

- Les Arrhéphores

- La Bandelette

- La Béotienne

- Le Bouclier

- Le Carthaginois

- La Caution

- Celui qui est puni

- La Cnidienne

- La Colère

- Le Collier

- Les Convives

- Le Dépôt

- Les deux Fils du même père

- La double Tromperie

- L'Enfant supposé

- L'Enrôlement des troupes

- L'Eunuque

- Le Faux Héraclès

- Les Fêtes d'Héphaïstos

- La Femme battue

- La Femme incendiée

- Hydrie

- Les Imbriens

- Le Héros

- La Joueuse de flûte

- Le Législateur

- La Leucadienne

- Les Lutteurs

- Le Misanthrope

- Le Mysogyne

- L'Olynthienne

- Le Patron de navire

- Le Paysan

- Les Pêcheurs

- La Périnthienne

- Le Poignard

- Le Prêtre de Cybèle

- La Prêtresse

- Les Soldats

- Thaïs

- La Thessalienne

- Thrasiléon

- Le Trésor

- Trophonios

 

Fragments de comédies anonymes

I. Citations de Stobée

II. Citations d'autres auteurs

III. « Monosticha »

 

Liste des pièces de Ménandre

 

Les papyrus de Ménandre

 

Les portraits de Ménandre

 

 

 

LE GRINCHEUX

 

 

 

    Un jeune et riche citadin, Sostrate, est amoureux de la fille d'un paysan pauvre, Cnémon. Celui-ci est un intraitable misanthrope, l'égal de l'Alceste de Molière : il déteste ni plus ni moins l'humanité entière, en particulier les riches nantis de la cité. Sostrate tente plusieurs fois d'obtenir par la ruse la main de la jeune fille, avec l'aide de son esclave, Pyrrhias, et de son ami, le parasite Chéréas, en vain. La situation paraît bloquée lorsque soudain Cnémon, à la suite d'une maladresse, fait tomber son seau dans un puits. Refusant toute aide, il veut récupérer l'objet seul, mais lui-même tombe à son tour dans le puits. Sostrate le sauve d'une mort certaine et Cnémon, qui reconnaît ses torts passés, fait du jeune homme son héritier. Désormais le mariage devient possible. Tout se termine dans la liesse générale, au point que l'on voit Cnémon, pendant la cérémonie du mariage, se dérider sous la pression des invités.

 

 

 

L'ami dévoué

 

Chéréas

Mais que me chantes-tu là ? Tu as vu une fille

De bonne famille en train d'orner les nymphes

De notre voisinage, et voici que d'un coup

Tu t'es amourachée...

 

Sostrate

                                Oui, c'est cela : d'un coup !

 

Chéréas

Quelle célérité ! Avais-tu, en sortant,

Décidé de tomber amoureux sur-le-champ ?

 

Sostrate

Moque-toi, Chéréas ! Ma souffrance est réelle.

 

Chéréas

Je n'en doute pas.

 

Sostrate

                                C'est la raison pour laquelle

Je suis à cet endroit pour avoir ton soutien.

En tant qu'ami, toi seul pourras mener à bien

Ce que j'ai entrepris.

 

Chéréas

                                Voila comment je fais

Dans un semblable cas. Un ami a besoin

De mes soins diligents pour un motif galant ?

Aussitôt je ravis la donzelle et la mène

À bon port ! Je suis tout consumé, tout en délire,

Rien ne peut m'arrêter quoi qu'on vienne me dire.

Je ne la connais pas ? Ah ! que cela ne tienne,

Je la veux sans délai ! De fait, la lenteur

Accroît la passion ; qu'on s'active, et dans l'heure,

C'est fini ! Qu'on m'évoque une fille à marier,

Je me sens transformé, je vais me renseigner

Sur ses parents, ses biens et son tempérament.

 

 

UN HOMME IMPOSSIBLE

 

Pyrrhias

Ah ! laissez-moi passer ! Allons ! écartez-vous :

Apprenez que je suis poursuivi par un fou !

 

Sostrate

Mais que se passe-t-il, mon pauvre et jeune ami ?

 

Pyrrhias

On veut me lapider ! Oui, on cherche à m'occire !

 

Sostrate

Que dis-tu ? Où vas-tu ? Je crois que tu délires !

 

Pyrrhias

Est-ce fini ! Est-il parti ?

 

Sostrate

                    Oui, en effet !

 

Pyrrhias

Je croyais bien qu'il était encore après moi.

 

Sostrate

Mais dis-moi la raison d'un pareil désarroi.

 

Pyrrhias

Partons, je t'en supplie !

 

Sostrate

                                Où ?

 

Pyrrhias

    Le plus loin d'ici !

C'est un satyre, un fou, un malade ce type !

À force de courir longtemps sur le sentier,

J'aurais pu esquinter mes pauvres doigts de pied.

 

Sostrate (à Chéréas)

Il a dû se montrer fort peu accommodant

En arrivant ici.

 

Chéréas

Oui.

 

Pyrrhias

Non, assurément !

De cet individu, il faut qu'on se méfie.

J'ai du mal à parler, je suis trop essoufflé !

J'ai donc frappé à la porte de son logis

Et puis j'ai dit ceci : « Je voudrais voir le maître. »

Une vieillarde, alors, pas très bien dans sa tête

Me l'a montré d'ici en pleine effervescence,

Car il se fatiguait à ramasser des poires,

À moins que ce ne fût du bois pour sa potence.

Je suis allé au champ et me suis approché.

Je me suis cependant quelque peu distancié

(Je suis bien élevé) ; puis je l'ai salué.

Alors je lui ai dit : « Je suis venu, grand-père,

Pour régler une affaire. » Alors il prit la mouche :

« Mais ça ne va pas bien ! Tu foules mon terrain ! »

Aussitôt il saisit une motte de terre

Et la jette sur moi !

 

Sostrate

Qu'il moisisse aux Enfers !

 

Pyrrhias

À peine ai-je fermé les yeux et je lui dis :

« Que les dieux... » Mais il prend une branche aussitôt

Et me tape dessus tout en hurlant ces mots :

« Qu'est-ce que tu me veux-tu avec tous tes récits ?

Le chemin communal, qu'en fais-tu, mon joli ? »

 

Chéréas

Ce paysan est fou !

 

Pyrrhias

Je me suis vite enfui !

Pendant un long moment l'homme m'a poursuivi

Aux alentours avant de descendre en un bois :

C'est là qu'il m'a lancé des cailloux, de la terre

Et des poires aussi ! Ce vieillard est dément !

De grâce, enfuyez-vous !

 

Sostrate

Tu n'es pas téméraire !

 

Pyrrhias

N'avez-vous pas compris ? C'est une brute austère.

Je vous dis que tout crus il vient pour nous manger !

 

Chéréas

Il se peut qu'aujourd'hui nous l'ayons dérangé.

Il est plus prudent de reporter la visite.

Oui, attendons plus tard pour notre réussite.

 

Pyrrhias

Je crois qu'il n'y a rien, non rien, de plus hargneux

Qu'un paysan très vieux, rustaud et laborieux.

J'irai demain très tôt lui rendre une visite.

Je m'en irai tout seul ; je sais où il habite.

En attendant, rentre chez toi; tout ira bien !

 

Sostrate

Il a trouvé le bon tuyau pour me laisser.

C'est vrai que pour m'aider il n'était pas pressé.

Il n'a donc pas voulu m'accompagner. Et toi, (à Pyrrhias)

Pauvre idiot, que les dieux te fassent expier.

 

 

Sentence

 

Tous les hommes, je crois, qu'il soient veinards ou pas,

Connaissent tôt ou tard un retour de bâton.

Pour le veinard, sa vie est douce et sans tracas,

Et le reste dès lors qu'il supporte sa chance

Sans tomber dans le mal. Mais lorsqu'il en est là,

Victime de l'appât du gain, l'homme s'avance

Sur le chemin du pire ! Et pour les pauvres gens,

S'ils ne font rien de mal dans la gêne où ils sont,

S'ils daignent consentir à leur condition,

Il arrive un beau jour où, devenus confiants,

Ils croient pouvoir gagner un lot plus séduisant.

Pourquoi je parle ainsi ? Certes, tu es nanti ;

Cependant méfie-toi ! Ne nous accable pas,

Nous les petites gens, d'un injuste mépris.

Sache devant autrui montrer que tu mérites

De garder dignement ce bonheur accompli.

 

 

AUTOCRITIQUE

 

Gorgias, Myrrhiné, je viens vous faire part

De ma décision : elle est irrévocable,

Il vous faut l'accepter. J'avais l'illusion

De vivre en autarcie. Or j'ai vu que la mort

Peut être un grand souci. J'ai saisi mon erreur.

À ses côtés on a toujours besoin d'un cœur

Qui vous prête main forte. Oui, j'ai vu à quel point

Les hommes sont garants de leurs petits besoins,

Sans se préoccuper de ceux de leurs prochains.

Je ne puis l'accepter ! Ce Gorgias s'est montré

À mon égard comme un homme fort honorable.

À celui qui pourtant lui refusait sa porte,

Qui ne lui adressait jamais de mots aimables,

À quelqu'un de la sorte, il a sauvé la vie.

Or un autre aurait dit : « Puisqu'il est interdit

De franchir ta clôture, eh bien, je reste ici !

N'attends aucun secours, toi qui te fous de nous ! »

Désormais, mon garçon, si je meurs en ce jour,

- Peut-être ? – à moins que je puisse en réchapper,

Tu deviendras mon fils car je vais t'adopter.

Tout ce que j'ai sera en ta possession.

Ma fille, elle est à toi : donne-lui un mari !

Car moi, je t'avoue, si par hasard je guéris,

Jamais je ne saurais lui dénicher le bon.

Tous, j'en suis convaincu, oui, tous me déplairont !

Ah ! ma fille, aide-moi ; il faut que je m'étende.

Un homme plein d'honneur se doit de parler peu.

Mais mon garçon, il faut encor que tu m'entendes.

Oui, un mot sur ma façon de me comporter... (lacunes)

...Si les hommes étaient un peu plus généreux,

Prisons et tribunaux n'auraient droit de cité,

Nulle guerre ici-bas ne pourrait éclater,

Et d'un modeste bien on saurait profiter...

 

 

 

 

LA SAMIENNE

 

 

 Pompéi, masques de jeune homme et de jeune fille

 

   Déméas et Nicératos, deux amis, sont en voyage. C'est à ce moment que la maîtresse du premier, courtisane originaire de Samos, met au monde son fils qui, comme c'est l'usage, est aussitôt abandonné. Au même moment, la fille de Nicératos accouche d'un garçon, né de ses amours avec le fils de Déméas, Moschion. Celui-ci désire alors épouser la femme qu'il aime.

Les deux pères revenus, ils annoncent qu'ils vont marier leurs enfants respectifs. Tout se passe donc à merveille si ce n'est que Moschion se tait sur l'enfant qui est né pendant leur absence. Les deux tourtereaux décident d'un commun accord de ne rien avouer à leurs pères avant que le mariage ne soit célébré. Sur l'enfant qui se présente, ils font croire qu'il est celui de la Samienne et de Déméas. Après maints quiproquos qui vont mettre la puce à l'oreille à Déméas (voir ci-dessous), Moschion dira la vérité sur l'enfant, les deux pères se mettront enfin d'accord, et la pièce finira dans la bonne humeur générale et le mariage des amants.

 

 

 

 TROP BAVARDE !

 

Dès que je fus entré chez moi, plein de vigueur,

En vue de préparer les fêtes d'Hyménée,

En deux mots j'expliquai à tous mes serviteurs

De briquer la maison, d'enfourner les gâteaux,

De disposer enfin la divine corbeille.

Bref, tout semblait alors se passer à merveille :

Bien sûr, un tel labeur nous bousculait un peu.

On était tous pressés et, sur un édredon,

Quelque part dans un coin, on avait déposé

Le bambin qui hurlait. Les servantes criaient :

« De l'huile et du charbon, de l'eau, de la farine. »

Et moi, je leur rendais service à ma façon.

Voilà donc, c'est ainsi que j'entrai dans l'office.

J'avais beaucoup à prendre et j'y restais longtemps.

Or, du premier étage une femme apparut :

Elle entra dans la pièce à côté de l'office.

Cette femme n'était plus très jeune aujourd'hui,

Mais elle avait été de Moschion la nourrice.

Elle fut ma servante avant d'être affranchie.

Elle vit le bébé dont nul ne s'occupait :

Ne sachant pas du tout que j'étais à côté.

La femme s'exprima en toute liberté,

Parlant avec ces mots qui sont communément

Susurrés aux enfants : « Où elle est la maman,

Mon bébé, mon trésor ? » Alors elle l'embrassa

Et le prit dans ses bras. Quand elle l'eut calmé,

Elle lui dit tout bas : « Pauvrette ! Quand Moschion

Était un nouveau-né, j'aimais le pouponner !

Maintenant qu'à son tour elle a un tout-petit,

C'est vraiment autre chose... » (Lacune de trois vers) On vit entrer bientôt

Une jeune servante et la vieille lui dit :

« Veux-tu baigner l'enfant, fainéante ! » Misère

De ne pas le soigner quand on marie son père ! »

Mais l'autre la prévient : « Il faut que tu arrêtes

De parler aussi fort : en ces lieux est le maître. »

Puis la servante, sur un autre ton, lui dit :

« Ta maîtresse t'appelle, il faut sortir d'ici !

(Tout bas) Il n'a rien entendu ! Ouf ! nous avons eu chaud ! »

Mais avant de partir je ne sais où encore... (Lacune)

La nourrice lança : « Je parle beaucoup trop ! »

 

 

CRISE ET ARRANGEMENT

 

Déméas

Par Zeus, le père ayant eut vent de tous ces faits

Va être furieux : c'est un homme, en effet,

Inflexible, implacable, avare de surcroît.

J'aurais dû éprouver quelques menus soupçons !

Il veut ma mort ! Mazette ! Il crie comme un démon.

Dire qu'il brûlerait ce pauvre nourrisson !

Quoi ! voir mon petit-fils réduit en tas de cendres ?

La porte claque ! Il n'est pas homme, ce me semble !

Non ! C'est un ouragan !

 

Nicératos

                                Chrysis est contre moi :

Jamais rien ne fut pire ! Elle a persuadé

Ma femme de se taire. Elle tient le bébé

D'une main ferme. Il ne faut pas qu'elle s'étonne

Si je la tue aussi !

 

Déméas

Tu veux tuer la femme ?

 

Nicératos

Oui, puisqu'elle sait tout de cet horrible drame !

 

Déméas

Non !

 

Nicératos rentre dans sa maison

 

Déméas

Il bout de colère. Et comme il a bondi

Dans sa maison. Je crois que jamais je n'ai vu

Quelqu'un dans cet état. Mieux vaut tout expliquer.

Par Apollon, la porte a de nouveau claqué !

 

Chrysis

Ah ! pauvre que je suis ! Voyons, que vais-je faire !

Mais où dois-je m'enfuir ? Il va prendre l'enfant !

 

Déméas

Chrysis ! Viens par ici !

 

Chrysis

Qui m'interpelle ainsi !

 

Déméas

Entre ici, presse-toi !

 

Nicératos

    Où vas-tu comme ça !

 

Déméas

Je dois m'engager dans un combat singulier.

 

Nicératos

Enlève-toi de là ! (à Déméas) Va vite t'éloigner !

Je vais prendre l'enfant. Après j'écouterai

Des femmes les propos.

 

Déméas

Ce fou va me cogner.

 

Nicératos

Bien sûr, je vais le faire ! (Il le frappe)

 

Déméas

Allez ouste, aux Enfers !

Eh ! Chrysis, sauve-toi ! Il est plus fort que moi !

 

Nicératos

Cette fois, c'est toi qui m'a touché le premier,

Je puis en témoigner, mais n'ai point le bébé !

 

Déméas

C'est sûr, il m'appartient.

 

Nicératos

Ce bébé est le mien !

 

Déméas

C'est l'horreur intégrale ! Au secours, mes voisins !

 

Nicératos

Tu peux crier : je vais vous tuer un à un !

 

Déméas

Je vais t'en empêcher. Sois un peu raisonnable !

 

Nicératos

Tu vas commettre là un acte impardonnable.

Tu savais tout du drame.

 

Déméas

Apprends la vérité

Et laisse-la !

 

Nicératos

Ton fils m'a vertement roulé

Dans la farine...

 

Déméas

Impossible, il doit se marier

Avec ta fille ! Ami, allons nous promener.

Dis, Nicératos, as-tu entendu parler

De Zeus qui, une fois qu'il fut changé en or,

S'écoula par le toit pour séduire une fille

Enfermée dans sa chambre ?

 

Nicératos

Et quel est le rapport ?

 

Déméas

Attendons-nous à tout ! Il coule bien ton toit ?

 

Nicératos

Beaucoup, mais je te dis : quel est donc le rapport ?

 

Déméas

Zeus se transforme en eau, tantôt il devient or.

Zeus est alors coupable.

 

Nicératos

Ah ! Encore une fable !

 

Déméas

Que non ! Zeus a trouvé que ta fille était belle.

 

Nicératos

Le saligaud !

 

Déméas

Non, la chose est surnaturelle.

Et d'ailleurs, plein de gens sont des divinités,

Et ils sont parmi nous. Pourquoi les redouter ?

Androclès l'usurier qui brasse tant d'argent,

Il te semble immortel ? Tout juste, c'est un dieu.

Fais brûler de l'encens ! Le mariage sera :

C'est le vœu du Destin.

 

Nicératos

Arrangeons cette affaire !

 

Déméas

Tu es intelligent, bien que tu fus naguère

Pétri par la colère. Allez, rentre chez toi,

Car il faut maintenant que tout se passe au mieux !

 

Nicératos

Assurément, tu es un homme merveilleux.

 

 

UN PÈRE À SON FILS

 

Je suis ton papa, c'est moi qui t'ai recueilli ;

Oui, je t'ai éduqué quand tu étais petit.

Si ta vie, jusque-là, fut pleine d'agrément,

C'est grâce à moi que tu le dois assurément !

Cette vie d'autrefois peut rendre tolérable

Le chagrin dont je suis aujourd'hui responsable.

Allons ! sois un bon fils ! Je fus déraisonnable !

Mais hélas, tout ne fut que méprise et folie.

Toutefois j'ai gardé, même si j'ai failli,

Mon amour paternel. C'est pourquoi, dans mon cœur,

Je cachais ce secret, cette funeste erreur.

Si j'ai fait une faute une fois dans ma vie,

N'oublie pas pour autant ce que tu as vécu

Pour l'unique profit d'un moment de folie.

 

 

DEUX SENTENCES

 

Non, la naissance ne donne pas la noblesse :

Celui qui considère un homme de sagesse

Comme un être bien né, et fait du vicieux

Un bâtard sans pareil, est bien judicieux.

 

Le hasard est divin et le salut provient

D'action invisibles.

 

 

 

 

FRAGMENTS DE PIÈCES IDENTIFIÉES

 

 

 

Paris, Jardin du Luxembourg, « L'Acteur grec », par Bourgeois

 

 

 

L'ACCUSATEUR

 

Le mieux chez un esclave est de servir son maître.

 

Cité par Stobée

 

 

 

LES ADELPHES

 

C'est sûr, il est fort difficile aux pauvres gens

De trouver un parent ; personne n'est pressé

De rencontrer celui qui vit dans le besoin :

 

Cité par Stobée

 

 

Les sages l'ont voulu : un homme clairvoyant

Peut compter de tous temps sur un dieu fort ancien,

Et ce dieu, c'est l'Esprit.

 

Cité par Justin

 

 

Celui qui n'a connu ni honte ni peur même,

Se révèle souvent d'une impudence extrême.

 

Cité par Stobée

 

 

Le pauvre est réservé dans ce qu'il entreprend,

Car il craint, en effet, que pour lui le mépris

N'apparaisse flagrant.

 

Cité par Stobée

 

 

 

L'ANDRIENNE

 

Facile pour les gens éclatants de santé

De dire à leurs amis, quand ils sont alités,

Ce qu'il faut avaler.

 

Cité par Moret

 

 

Le courroux de l'amant est de courte durée.

 

Cité par Donatus

 

 

 

L'ANDROGYNE

ou Les Crétois

 

Je suis un être humain, je sais avec éclat

Les troubles du destin : rien ne dure ici-bas.

Cité par Stobée

 

 

En amitié, il ne faut pas de négligence.

 

Cité par Stobée

 

 

 

LES ARBITRES

 

Je m'en vais t'assommer, ô Sophroné, sinon

Que je meure aussitôt de la pire des morts.

Quoi ! tu veux me donner des conseils ? Hein ! pardon,

A moi ? Donc selon toi, vieille peau, j'aurais tort

De reprendre ma fille avec empressement ?

Je ne dois pas broncher, attendre calmement

Que son gentil mari se gave de la dot.

Pour décrire mon bien, des paroles idiotes !

Tu veux m'embobiner, n'est-ce point ton dessein ?

Je vais faire très vite ! Et si tu continues,

Tu vas crier plus fort. Ah ! cette Sophroné,

Toujours à me juger ! Mais as-tu vu l'étang

Là-bas ? Tu le connais, je vais t'y emmener

Cette nuit toute entière, te jeter là-dedans

Et attendre ta mort. Oui, je vais t'obliger

À te soumettre à moi, à ne plus me gruger.

 

Papyrus du Caire

 

 

Pourquoi se fatiguer à veiller au mariage

Des femmes ? En effet, celles dont on eut soin

De l'éducation ont fait plus de ravages

Dans leurs foyers que celles qui n'en avaient point.

 

Papyrus du Caire

 

 

Tout homme normal doit redouter le malheur.

Mais être humilié, telle est la pire horreur !

 

Cité par Stobée

 

 

 

LES ARRHÉPHORES

 

Les aléas du sort peuvent ôter à l'homme

Ses biens ; et s'il survit par un heureux hasard,

Il lui reste un soutien, et il se nomme l'Art.

 

Cité par Stobée

 

 

Ne vous comportez pas ainsi et soyez sages :

Évitez le mariage.

Moi, je me suis marié : aussi je vous demande

La plus grande prudence.

 

Cité par Athénée

 

 

 

LA BANDELETTE

 

Le hasard, bien qu'il soit invisible, a toujours

Pour cible notre vie. Selon sa volonté,

Tandis que nous dormons, il apporte malheur

Ou bien félicité.

 

Cité par Stobée

 

 

 

LA BÉOTIENNE

 

La richesse est un voile étouffant les misères.

 

Cité par Stobée

 

 

 

LE BOUCLIER

 

Tout homme qui n'attend que l'assouvissement

De ses propres désirs se condamne à l'affront

Et de la vérité et des événements.

 

Cité par Justin

 

 

Oui, à ma connaissance, un soldat est celui

Qui ne garde sa vie qu'au prix de lourds ennuis ;

Par contre, de périr il a toutes les chances.

 

Cité par Justin

 

 

La richesse n'est qu'un éblouissant manteau

Qui cache les défauts.

 

Cité par Stobée

 

 

Ce vieillard qui traînait son nez partout, eh bien,

C'est l'oncle paternel. C'est la mal incarné,

Le pire assurément de tout le genre humain.

Ce malandrin n'a ni ami ni parents, non !

Les horreurs que l'on voit dans la vie, il s'en fout !

Ce qu'il désire avoir, je le résume : tout !

C'est son obsession ! Bref il est solitaire ;

Il n'a pour le servir qu'une vieille grand-mère.

 

Papyrus Bodmer

 

 

 

LA CANÉPHORE

 

L'imprudence aboutit toujours à des grands maux.

 

 

Cité par Stobée

 

 

Quoi ! la prospérité ? Travail et volonté !

 

Cité par Stobée

 

 

 

LE CARTHAGINOIS

 

Très dur assurément d'effacer en un jour

Une lubie ancienne.

 

Cité par Stobée

 

 

Un caractère honnête est  au-dessus des lois.

 

Cité par Stobée

 

 

 

LA CAUTION

 

Pour qu'on puisse fermer les yeux sur une injure,

Il faut que celle-ci ait été bien légère

Et que le temps laissé permette le faire.

 

Cité par Stobée

 

 

 

CELUI QUI EST PUNI

 

Ah ! beauté de la loi ! Toutefois, c'est passer

De l'équité à l'injure que d'en user

Avec sévérité.

 

Cité par Stobée

 

 

 

LA CNIDIENNE

 

Je crois que la naissance est de peu d'importance.

Le bâtard est celui qui vit dans l'infamie.

Seul compte, selon moi, une honnête existence.

 

Cité par Stobée

 

 

 

LE COCHER

 

Les malheurs non issus de notre intempérance,

Mais que l'âpre Destin veut nous faire éprouver,

Un homme sage doit savoir les supporter

Avec calme et vaillance.

 

Cité par Stobée

 

 

 

Je n'aime pas qu'un dieu erre sur les chemins

Ou s'introduise au fond de nos pauvres chaumières.

Non, qu'il reste chez lui et qu'il prenne grand soin

À protéger tous ceux qui l'aiment, le vénèrent.

 

Cité par Justin

 

 

 

LA COLÈRE

 

Jamais un homme intègre en un jour s'enrichit.

 

Cité par Stobée

 

Commettre l'adultère est chose téméraire

Et son titre suppose ou la vie ou la mort !

 

 

Cité par Stobée

 

 

LE COLLIER

 

Hélas, trois fois hélas ! comme il se perd celui

Qui se marie et qui, en outre, devient père !

Quoi ! se mettre en ménage et n'avoir rien prévu !

Quoi ! n'avoir jamais mis de l'argent de côté,

De quoi se prémunir contre l'adversité ;

N'avoir rien préparé pour couvrir ses besoins.

Un tel homme n'a plus qu'à survivre caché,

Et qu'à se lamenter. Sa vie est un hiver.

Vivre ainsi en commun, partager la misère

Et jamais la douceur ! Voyez mon expérience :

Que mon malheur soit la leçon par excellence.

 

Cité par Stobée

 

 

Tu parais étonné par mon rude chagrin.

Ne t'ai-je pas appris, Lamias, que je me suis

Contraint à épouser une riche héritière ?

Ne te l'ai-je point dit ? Elle a cette chaumière,

Et ces champs. Or la clause absolue de ces biens,

C'était le mariage !

 

Cité par Stobée

 

 

Supprimons de la vie toute raison d'ennuis :

Car il est court le temps qui nous est imparti !

 

Cité par Stobée

 

 

 

LES CONVIVES

 

Décidément, Éros est un dieu bien puissant :

Pour lui, on ose parjurer ce qui fut un moment

Juré au nom des dieux.

 

Cité par Stobée

 

 

 

 

LE DÉPÔT

 

Affligeant d'être pauvre et dépourvu de force.

 

Cité par Stobée

 

 

 

LES DEUX FILS DU MÊME PÈRE

 

D'un timide j'ai très bonne opinion.

 

Cité par Stobée

 

 

Dans le malheur un homme est forcément crédule :

Il croit alors trouver auprès de ses voisins

De fructueux conseils, sans savoir que ceux-ci

Ne voient que leurs desseins.

 

Cité par Stobée

 

 

 

LA DOUBLE TROMPERIE

 

Celui pour qui les dieux ont un peu de tendresse

Meurt en pleine jeunesse.

 

Cité par Plutarque

 

 

 

L'ENFANT SUPPOSÉ

 

Je ne crois pas celui qui dit que la prudence

Est le seul bien possible :

En effet, le hasard, pour moi, n'est point nuisible.

 

Cité par Stobée

 

 

Dites la vérité, gage de sûreté.

 

Cité par Stobée

 

 

De tous les animaux des terres ou des mers,

La femme est bien le pire.

 

Cité par Stobée

 

 

Enrichissez-vous donc ! Tout sera recouvert :

Votre basse origine et vos actes pervers.

 

Cité par Stobée

 

 

Fortune, chose étrange, en fait, inexplicable !

Cité par Stobée

 

 

Heureux celui qui meurt très tôt, Parménion,

Sans regret, du moment qu'il s'est bien épanché

Du feu et du soleil. Il peut vivre cent ans,

Il n'aura jamais plus la même vision

Qu'à ses vingt ans. Si vous partez rapidement

D'ici-bas, vous saurez profiter, sans nul doute,

Des plus merveilleuses provisions de route,

Sans encombres, de quoi faire un excellent gîte.

Si vous persistez à vivre coûte que coûte,

Vous arrivez à terme, épuisé, démuni,

Plein d'ennemis ; de plus, la vieillesse vous ronge.

On ne meurt pas heureux quand la vie se prolonge.

 

Cité par Stobée

 

 

 

L'ENRÔLEMENT DES TROUPES

 

La fortune ? Un mystère ! Oui, rien ne nous l'explique,

Pas même la raison. De quel côté aller ?

Nul ne peut affirmer : « Je ne subirais point

Des heures fatidiques. »

 

Cité par Stobée

 

 

Oui, son père était pauvre, mais lui fut sans conteste

Bien éduqué. De fait, ce jeune homme rougit

De posséder les biens paternels, si modestes.

Il est reconnaissant ! Cet arbrisseau produit

Les fruits éblouissants de ses soins attentifs.

 

Cité par Théon

 

 

 

L'EUNUQUE

 

Ne combats pas les dieux, évite leur fureur ;

Laisse-toi dominer par la nécessité.

 

Cité par Stobée

 

 

 

LE FAUX HÉRACLÈS

 

Un homme dont la vie n'est qu'un rude esclavage

Est dur pour l'entourage.

 

Cité par Stobée

 

 

 

LES FÊTES D'HÉPHAÏSTOS

 

Qu'il est triste de voir un vieil homme amoureux :

Chercher une aventure interdite par l'âge

Me semble le destin le plus calamiteux.

 

Cité par Stobée

 

 

 

LA FEMME BATTUE

 

Un homme qui désire avoir la belle vie

Et ne profite pas cependant des bienfaits

Octroyés par les dieux est un sombre abruti !

Oui, bien sûr, si les dieux lui sont indifférents,

Et qu'il est accablé de chagrins, de malheurs,

Ce n'est plus de sa faute, il est vrai, c'est la leur !

 

Cité par Stobée

 

 

Souvent la vérité se présente, absolue,

Alors que jusque là on ne l'attendait plus.

 

Cité par Stobée

 

 

 

LA FEMME INCENDIÉE

 

Ô maître, sur la terre, il y a trois manières

Qui domptent le réel : soit la loi soit l'usage

Soit la nécessité.

 

Cité par Stobée

 

 

 

LE HÉROS

 

Éros : en ce bas monde aucune autre puissance !

Même le ciel lui doit complète obéissance.

 

Cité par Stobée

 

 

Il serait plus normal et plus juste vraiment,

Qu'à un être bien né s'ajoute un corps parfait,

Enfin qu'un homme libre ait de doux sentiments.

 

Cité par Stobée

 

 

 

HYDRIE

 

Solitude ! Ah ! la belle condition

Pour celui qui refuse une vie déréglée ;

C'est vrai, je vous avoue ma satisfaction

De me voir entouré de tout ce qui me plaît.

Il suffit d'un champ pour être nourri au mieux.

Car des clients n'attirent que les envieux.

Certes, dans la cité, tout paraît bel et bon,

Mais bien vite pourtant les charmes se défont.

 

Cité par Stobée

 

C'est le tempérament qui est persuasif,

Ce n'est pas le propos.

 

Cité par Stobée

 

 

LES IMBRIENS

 

Oui, le raisonnement, belle chose, mon père !

Par le raisonnement, on règle ses affaires.

C'est par lui qu'on devient un magistrat modèle,

Un grand législateur, un général aussi,

Un homme généreux dévoué à autrui.

 

Cité par Stobée

 

 

 

LA JOUEUSE DE FLÛTE

 

Un lien solide existe entre vie et souffrance ;

La douleur s'insinue même dans l'opulence ;

Même sous les lauriers de gloire elle survient.

Et pour les indigents c'est un rude gardien

Qui vous retient toujours sans nulle complaisance.

 

Cité par Plutarque

 

 

Je croyais fermement que les gens fortunés

N'étaient point endettés, ne criaient pas la nuit ;

Non, franchement, je ne croyais pas qu'ils tournaient

Et se retournaient dans leur lit, rongés d'ennuis ;

Je croyais qu'ils étaient exemptés d'insomnies,

Laissant aux miséreux les tortueuses nuits.

Quelle déception, Phanias ! Vous, les heureux,

Vous subissez aussi des crises inouïes.

 

Cité par Stobée

 

 

 

LE LÉGISLATEUR

 

La Loi doit sévir, et, pour ne point la subir,

En la redoutant, rendez-la vous familière !

Vous ne subirez pas, de ce fait, sa colère.

Cité par Ammonius

 

 

Quoi ! Il a observé la loi ? C'est tout alors ?

Il ne l'a qu'observée ! Dans ce cas, c'est trop fort !

Seule la Loi écrite est pleinement contente !

Celui qui se comporte ainsi doit redouter

Le bourreau plus encor que la légalité.

 

Cité par Ammonius

 

 

Prenez garde à la Loi et vous serez indemne.

 

Cité par Ammonius

 

 

 

LA LEUCADIENNE

 

Je n'écoute pas ceux dont la main est tendue

Pour recevoir de l'or. Par leur comportement,

Je sens bien que le mal les a vite vaincus.

 

Cité par Strabon

 

 

Si les pauvres gens sont venus nous visiter,

C'est parce qu'ils sont mus par la divinité.

 

Cité par Strabon

 

 

Les pauvres gens, dit-on, sont  un présent des dieux.

 

Cité par Strabon

 

 

 

LES LUTTEURS

 

Ne baissons pas les bras quand l'ennui nous étreint.

Quand un tourment survient, il peut en naître un bien.

 

Cité par Stobée

 

 

 

LE MISANTHROPE

 

Ô  Nuit ! divinité, plus que toutes les autres,

Imprégnée par Cypris, toi à qui l'on s'adresse

Tant de fois, qui entends les amants en détresse,

As-tu vu dans ton ombre amant plus effondré ?

 

Papyrus Oxyrhynchos

 

 

 

LE MYSOGYNE

 

Symilos

Je t'avoue que je suis contre le mariage.

 

Agatoboukos

Car de lui tu ne vois que le mauvais côté

Et les inconvénients ; or tu ne considères

Jamais ce que pourraient être ses avantages.

Tu prétends que la femme est une dépensière.

L'économie n'est point le fort du mariage,

J'en conviens. Mais celui qui prête ce serment

Sera comblé de biens, il aura des enfants.

Quand tu seras souffrant, ton épouse saura

Te soigner avec zèle. Et malgré tes revers,

Elle sera fidèle. À l'instant de la mort,

Elle se chargera de fermer tes paupières ;

Elle s'occupera des rites funéraires

Avec un grand sérieux. Voilà des arguments

Qui devraient tempérer ton appréhension.

Vue de cette manière, un mariage est bon.

Mais si tu ne fais que poser dans la balance

Le fardeau des chagrins, sans jamais faire cas

Des points avantageux, l'hymen te semblera

La pire des démences.

 

Cité par Stobée

 

 

Un cheval irascible, un fruit au goût infâme :

J'ai défini la femme !

 

Cité par Apostolius

 

 

 

L'OLYNTHIENNE

 

Quel gâchis ! La nature était pour lui si bonne,

Et voici que l'argent vient débaucher notre homme !

 

Cité par Stobée

 

 

 

LE PATRON DE NAVIRE

 

Quand on aime on devient un être bien meilleur.

 

 

Cité par Stobée

 

 

Ô Zeus, dieu vénéré, terrible est l'espérance !

 

Cité par Stobée

 

 

 

LE PAYSAN

 

Un pauvre, ô Gorgias, est objet de mépris

Même s'il parle juste,

Car on pense toujours qu'il recherche un profit.

 

Cité par Stobée

 

 

Un homme de sang-froid supporte l'injustice

Avec quelque vaillance.

Or la colère prouve une âme en déchéance.

 

Cité par Stobée

 

 

 

LES PÊCHEURS

 

Il est un don précieux que la fortune donne :

On ressemble un peu plus à l'image d'un homme.

 

Cité par Stobée

 

 

Mon seul dieu est celui qui me donne à manger.

 

Cité par Athénée

 

 

 

LA PÉRINTHIENNE

 

Je ne saurai prétendre admirer ce cadavre

Orné et parfumé, car au bûcher le feu

Viendra le consumer et le réduire, en fait,

Au même tas cendré qu'un type miséreux.

 

Cité par Stobée

 

 

J'exècre l'apparence : elle ressemble aux dieux

Joliment plaqués d'or, alors que par-dessous,

Ce n'est qu'un bois rugueux.

 

Scholie d'Hermogène

 

 

 

LE POIGNARD

 

Je n'aurai jamais cru avoir de la fortune.

L'esprit est chaviré d'une joie sidérante :

La chose est étonnante !

 

Cité par Stobée

 

 

Surtout ne pas lancer : « Ça n'arrivera pas ! »

 

Cité par Stobée

 

 

 

LE PRÊTRE DE CYBÈLE

 

Je célèbre celui qui a l'intelligence

En plus des dons du corps. En effet, grâce à elle,

Il gérera ses biens, ne plaçant la dépense

Quand lorsqu'il y a lieu. Car user des richesses

N'est pas donné à tous : souvent c'est un motif

De honte et de bassesse.

 

 

Cité par Stobée

 

 

 

LA PRÊTRESSE

 

Une femme doit rester chez elle : c'est ainsi !

C'est la prostituée qui quitte son logis.

Or la rue est au chien, pas à la femme honnête.

 

Cité par Stobée

 

 

 

LES SOLDATS

 

Quand on l'a perpétré, on n'envisage pas

L'ampleur de son forfait ! Ce n'est que bien après

Que les sombres remords viennent nous étouffer.

 

Cité par Stobée

 

 

 

THAÏS

 

Les gens qui sont de détestable compagnie

Peuvent influencer les hommes sains d'esprit.

 

Cité par Saint Paul

Épitre aux Corinthiens

 

 

Muse, apprête tes chants ! Il faut qu'en ce théâtre

On voit ce personnage : une femme acariâtre,

Mais dotée toutefois d'une grâce parfaite

Et d'un joli babil ; une femme crachant

Quelquefois son venin sur ceux qui la fréquentent,

Qui les jette dehors ; une femme exigeante

N'aimant personne ; en fait, une femme n'ouvrant

Son clapet que pour la joie de vociférer.

 

Cité par Plutarque

 

 

 

LA THESSALIENNE

 

Il suffit de bien peu pour trouver le malheur.

 

Le courage permet à l'esclave de vivre.

 

Cité par Stobée

 

 

 

THRASILÉON

 

Celui pour qui agir est une chose vile

Ne devrait pas manger. Par de telles manières

Je crois que cette vie sur terre est inutile.

Il ne mérite pas les repas qu'il savoure.

 

Cité par Athénée

 

 

La navigation la meilleure est à voiles :

Sinon il faudra bien vous résoudre à des rames.

 

Cité par Stobée

 

 

 

LE TRÉSOR

 

Quelques couplets jaillis d'une simple chanson

Et vous voici pris par l'amour, la passion.

 

Cité par Stobée

 

 

 

TROPHONIOS

 

Promettre de ne faire aucun acte mauvais,

Belle entrée dans ce monde !

 

Cité par Stobée

 

 

 

 

FRAGMENTS DE Pièces ANONYMES

 

 

 Mosaïque de Zeugma représentant une scène tirée d'une pièce de Ménandre (IVe apr. J.-C.)

 

 

    Tous les fragments traduits ci-dessous sont en grande partie extraits du Florilège de Stobée, qui fut longtemps, comme je l'indique dans mon article, Ménandre, le comique raffiné, la source essentielle de notre connaissance de Ménandre. Toutefois, deux autres rubriques suivent l'anthologie stobéenne, l'une contenant des citations d'autres auteurs, l'autre quelques sentences tirées du recueil des 758 monostiques (sorte de maximes en un vers), attribuées à Ménandre. À noter que l'intégralité de ces sentences est disponible sur la Toile avec le texte grec, suivie d'une traduction latine et d'une traduction allemande : Menander Monosticha.

 

 

 

 

I. Citations de Stobée

 

 

Si tu veux une idée de l'homme que tu es,

Vois le long du chemin la foule des tombeaux

Où repose la cendre, où reposent les os

Des sages vénérés, des princes, des tyrans,

Des hommes fortunés ou bien d'un noble sang,

Des hommes glorieux, des gens au corps charmant ;

Le temps a tout détruit de ce monde opulent :

Il unit dans la mort le cercle des humains.

Et si tu veux vraiment connaître ton destin,

C'est dans ces alentours qu'il te faut regarder.

 

 

Si, suffisamment tôt, tu parviens à l'auberge,

Tu ne crains ni dégoût ni même épuisement :

Au terme tu viendras un peu moins tristement,

Sans laisser en chemin ce qui te fut plaisant.

Mais l'homme qui s'attarde et qui vit trop longtemps,

Dont la vie se prolonge à écouter des fables,

Sans dessein, épuisé, tracassé de souffrances,

Celui-là finira bien mal son existence.

 

 

Quand l'homme se marie, on pense à des vétilles :

Cette fille a-t-elle eu une brave nourrice ?

Appartient-elle au moins à une vraie famille ?

Quant à son caractère, on l'oublie fréquemment.

Pour délivrer la dot on recourt à l'expert :

On voit si son argent est bel et bien réel,

Même si dans trois mois on l'aura dépensé.

Puis on accueille enfin la fameuse donzelle

Au risque de trouver un esprit insensé,

Une pie trop bavarde ou bien une excitée.

Moi je prendrai ma fille et la mettrai en ville.

Que celui qui la veut daigne montrer son nez !

Je lui laisse le temps de méditer un peu

Sur le sort qui l'attend. La femme est un fléau.

Quelle félicité pour celui dont l'élue

N'a que quelques défauts.

 

 

De l'aveu d'Épicharme, seraient dieux seulement

Les astres, le soleil, la terre, l'eau, le vent !

Mais pour moi, les dieux ont d'autres noms : or, argent.

S'il les comble sans cesse au fond de sa demeure,

L'homme, toute sa vie, connaîtra le bonheur :

Terres, biens matériels, esclaves et maisons,

Une foule d'amis, quelques relations.

Dépense ton argent avec précaution

Et les dieux pour toujours te seront redevables.

 

 

Raisonne un peu, veux-tu ? Tu es homme après tout,

Et plus que tout vivant, tu es sujet sur terre

Aux pires des tourments. Certes, l'homme s'affaire

Sur les plus hauts sommets, lui, ce fragile atome.

Or il cherche sans cesse à s'élever plus haut :

La chute, évidemment, n'en est plus énorme.

Allons, vois ! Tu n'as point souffert des plus grands maux ;

Ton ennui, somme toute, est plus que modéré :

Aussi qu'il en soit de même pour ton regret.

 

 

- Si tu es clairvoyant, ne te marie jamais.

Reste comme tu es ! Crois-en mon expérience,

Moi qui me suis marié.

                             - Je regrette, l'accord

Sera bientôt signé.

                    - Bon, qu'il en soit ainsi !

Mais tu vas voguer sur des océans de peines,

En plein cœur de l'Égée, dans la mer de Libye.

Du naufrage, vois-tu, on ne sort pas indemne...

 

 

Mon fils, à ta souffrance, il est un bon remède :

Écouter les avis de tes amis sincères.

Malgré le grand, l'affreux tourment qui te poursuit,

Ne va t'énerver, surtout point de colère.

C'est dans les plus puissants malaises de l'esprit

Que tu dois avec force écouter la raison,

Prendre sur toi, calmer l'ardeur des passions.

 

 

Après avoir subi ce cortège d'injures,

Le refuge le plus doux est bien l'amitié.

Avoir des confidents prêts à vous soutenir,

Pleurer sans qu'on se moque, oui, cela me rassure,

 

 

Ô fieffé animal ! Je suis idiot de croire

Qu'une femme est un tant soit peu reconnaissante.

Si elle n'est pas pire après tous mes bienfaits,

Je m'en serais plutôt bien tiré : en effet,

Chez elle, remercier n'est pas vraiment le fort.

 

 

Pamphilos, si quelqu'un désire sacrifier

Des taureaux ou d'autres animaux précieux

Sur les riches autels consacrés à nos dieux ;

Si son vêtement est de pourpre et brodé d'or ;

Si des bagues d'ivoire illuminent ses doigts ;

Bref s'il pense qu'ainsi il peut souscrire aux dieux,

Sache que c'est un sot ! En effet, il se doit

Plutôt d'aider les autres.

 

 

Maître, puisque ta mère, en te mettant au monde,

T'a donné le loisir de jouir constamment

D'une vie de plaisirs, de faire librement

Ce dont tu as envie, qu'un dieu te l'ait permis,

Alors, tu as raison de vouloir t'emporter,

Car ce dieu est perfide et t'a fort maltraité.

Or tu respires l'air à tout homme commun,

Si je puis m'exprimer à la façon tragique.

Donc j'exige de toi un peu de dignité.

Bon, je dois m'expliquer. Tu es homme, et de fait,

Comme il est si courant, tu es passé soudain

D'un bonheur absolu à des ennuis certains.

Quand on est au sommet, la chute est redoutable

Puisqu'il faut renoncer aux choses profitables.

Mais entre nous, voyons ! ta perte est modérée

Et tes maux sont réduits. Aussi sois mesuré

Et ne te plains pas trop du souci qui t'accable.

 

 

Les animaux sont plus heureux que les humains

Et plus sages aussi. Tenez ! Portez les yeux

Sur l'âne que voici : tout le monde convient

De son pauvre destin. Pourtant, de ses tourments,

Il n'est pas responsable : il ne subit que ceux

Dont le hasard l'accable. Alors que l'être humain...

Bon, outre les tourments qu'il ne peut éviter,

Il s'en crée de nouveaux. Le moindre éternuement ?

Une injure fuse et la colère le prend.

Un mauvais rêve et le voici terrorisé ;

Le cri d'une chouette : il est traumatisé.

Car l'homme, aux lourds tracas voulus par la nature,

En ajoute des tas qui portent sa facture.

Et comme ils sont nombreux : préjugés, vanité,

Ambition, démesure...

 

 

Donner à une femme un esprit littéraire,

C'est offrir du venin à l'affreuse vipère.

 

 

Mon garçon, tu ne sembles pas te rendre compte

Qu'au fond de chaque chose il y a un péril,

Une corruption qui porte le principe

De la destruction. Un exemple, veux-tu ?

La rouille tue le fer et le ver s'insinue

Et grignote le bois ; et de même, l'envie,

La compagne avilie d'une âme sans vertu

Vous languit et finit par vous désintégrer,

Dès que vous l'accueillez. C'est ce que l'on a vu,

Ce que l'on voit encore, et qu'on verra toujours.

 

 

Si l'on vient m'annoncer : « Craton, une fois mort,

Tu reviendras chez nous selon ta volonté,

Sous la forme d'un chien, d'un homme ou d'un bélier.

Tu dois vivr e deux fois, tel est l'ordre divin :

Choisis selon tes vœux ! », je lancerai ces mots :

« Par les dieux, que je sois n'importe toi, pourvu

Que je ne sois humain. De tous les animaux,

C'est celui dont la vie est la pire injustice,

Que ce soit dans la joie ou dans les préjudices.

Un bon cheval est plus estimé qu'une rosse.

Un bon chien est plus apprécié qu'un mauvais.

Un coq brave au combat est d'emblée remarqué.

Pour l'homme, la bonté, la fierté, la valeur,

N'ont aucune importance : en effet, le flatteur

Est toujours triomphant. De même le méchant

Le talonne de peu. D'un mot, qu'on me fasse âne,

Cela m'évitera de voir de misérables gens

Dans un bonheur infâme. »

 

 

C'est le vide absolu et nul ne peut entendre

Le discours que je tiens. Sachez, ô citoyens,

Que ma vie, jusque-là, ressemblait à la mort.

Vous m'avez bien compris, c'était là mon destin.

Tout était si confus : le beau, le mal, le bien ;

Mon esprit tout entier n'était qu'obscurité ;

Je ne discernais rien de toutes ces idées.

Dorénavant, voyez : on me croirait sorti

Du temple d'Asclépios, parfaitement guéri !

Je suis ressuscité pour toujours à la vie.

Je me balade, je cause et je réfléchis.

Le soleil du miracle, eh bien ! je l'ai trouvé !

Le jour est rayonnant, je vois tout arriver :

Le ciel, l'acropole et les murs du théâtre.

 

 

Je préfère un ami bien présent et sincère

Que de l'argent caché au fin fond de la terre.

 

 

Derkippos ! Mnésippos ! Quel refuge inouï

Qu'une douce amitié après ces calomnies !

Mais oui, qu'il est suave en cette sale époque

Que de livrer ses pleurs sans être la risée ;

Quelle faveur de voir les autres partager

Notre grande douleur

 

 

On peut devenir riche en se donnant la peine,

Devenir philosophe à force d'étudier,

Conserver la santé avec un bon régime ;

Mais contre la douleur, nul onguent qui ne tienne !

 

 

Lorsque, à la beauté corporelle se joint

Un bel esprit, on est amoureux doublement.

 

 

Certes, je suis jeunot pour m'adresser à vous,

Mais oubliez cela pourvu que je sois sage.

 

 

Ne divulgue pas de secrets à ton ami :

Tu les perdrais bien vite.

 

 

Il faut plaindre celui qui vit dans l'opulence

Et qui, de plus, ne laisse aucune descendance.

 

 

Je suis bien plus heureux à servir un bon maître

Qu'à vivre en liberté, plus pauvre qu'une bête.

 

 

Les richesses ne font le plaisir que des yeux,

Car ce n'est ni plus ni moins qu'une belle écorce.

À celui qui en est détenteur, qu'il s'efforce

D'avoir assez d'esprit pour les gérer au mieux.

 

 

Le philtre d'une femme est son humeur égale :

Un mari se soumet à cette arme fatale.

 

 

Une vie trop légère : on devient vaniteux.

Des biens trop superflus sont forcément propices

À vous précipiter dans des mœurs étrangères :

Bientôt vous n'êtes plus l'être connu jadis.

 

 

Une fois marié, les biens que l'on reçoit

Sont souvent dangereux, et n'offrent nulle joie.

 

 

Ô vieillesse ennemie, tu ronges la beauté ;

Ce qui fut la splendeur se transforme en laideur ;

Notre vivacité se transforme en lenteur.

 

 

La vérité naît du vin comme de l'injure :

Par eux, tous nos amis montrent leur vraie nature.

 

 

C'est beau de voir un roi, oubliant sa puissance,

Faisant des lois avec justice et tempérance.

 

 

Nul ne voit ses défauts. Mais qu'un homme paraisse,

Ne se comportant pas comme vous l'espérez,

Aussitôt, d'un regard, vous le dévaluerez.

 

 

La paix est forcément propice au laboureur,

Même si son domaine est recouvert de pierres.

Par contre Arès détruit les sols les plus prospères.

 

 

Les terres sans attrait, patries des hommes sains !

 

 

La vie du paysan égrène ses plaisirs.

 

 

Non, le travail n'est pas suffisant pour finir

L'œuvre qu'on entreprend, car le succès dépend

De la persévérance.

 

 

Ne point insulter son prochain c'est commencer

À être un peu humain. Une pierre lancée,

Une injure jetée, ne sont pas rapportables.

 

 

Un homme vertueux, qu'il vienne d'Éthiopie

Ou d'ailleurs, restera vertueux quoiqu'on fasse,

Ma chère mère. Un sage est et restera un sage !

Ce Scythe est un salaud, j'en conviens ; et pourtant,

Le Scythe Anacharsis fut aussi bon et grand.

 

 

Nous nous amoindrissons, bien sûr, au fil du temps.

Un bienfait cependant : nous devenons prudents.

 

 

La venue d'un ami, dans un cas de malheur,

Vous console toujours. Vois, lorsque nous souffrons,

Il faut un médecin. Quand l'âme est mal en point,

On appelle l'ami : par son affection,

Il guérit aussitôt le souci qui nous tient.

 

 

Ô tristes cheveux blancs, lourd fardeau des vieux jours :

Dire que bien des gens voient en toi un recours !

Or, non seulement tu n'offres nulle douceur,

Mais tu viens nous briser par des flots de malheurs.

 

 

Tu te plains sans arrêt d'être vieux. Mais voyons !

C'est là le terme, ami, où tous nous échouons

Dès que nous sommes nés. C'est le destin humain.

Il faut le supporter avec témérité :

C'est le fardeau commun.

 

 

La Fortune est changeante : elle agit par caprice

Et jamais par raison.

 

 

Je hais ces beaux parleurs ! Des faits, non des paroles !

 

 

Pauvreté sans-souci vaut mieux que la richesse,

Surtout si celle-ci se vit dans la tristesse.

 

 

Je déteste ces gens tout de méchanceté

Qui osent vous parler de générosité.

 

 

Ah ! si tous s'entraidaient, nul ne serait en manque !

 

 

Il n'y a rien de plus vil que la calomnie :

Elle amène le crime auprès de l'innocence,

Noircissant par là même une noble conscience.

 

 

Quiconque est une proie pour l'yeuse calomnie

Est soit un vicieux soit un pauvre abruti.

 

 

Tu reçois peu, c'est bien : cela est mieux que rien.

 

 

Myope est l'imprudence, en fait elle est aveugle,

À moins d'être excessif.

 

 

De ton domaine immense, homme riche et vivant,

Il ne te restera, mort, que quelques arpents.

 

 

Vivre dans l'opulence avec de bons amis,

La plus belle des chances.

Vouloir rechercher plus amène les ennuis.

 

 

Réfléchis à cela : mieux vaut être modeste

Et vivre en s'amusant que friqué et chagrin.

Être pauvre gaiement plutôt que riche et triste !

 

 

Il vaut mieux posséder un médiocre pécule,

Honnêtement acquis, que de folles richesses

Qui vous chargent d'opprobre.

 

 

Qui n'a pu conserver un esprit sain et droit,

Alors que le bonheur est là, ne saurait guère

De par sa déraison vivre heureux et prospère.

 

 

Soyez bons, soyez droits !

Votre comportement aura force de loi.

 

 

Le Destin nous le dit : un conseil exécrable

Porte aussitôt malheur à celui qui le donne.

 

 

Non, il ne faut jamais faire tort à autrui :

Voilà une maxime à la portée de tous.

 

 

Un homme pauvre se raccroche à l'espérance.

Je n'envie pas celui qui possède des biens

Mais qui d'eux s'en balance.

 

 

Justice toujours triomphe !

 

 

Un criminel fût-il le plus dur, le plus fort,

Est forcément rongé un jour par le remords.

 

 

Il ne faut pas parler avec l'homme enivré :

Il ne sera jamais en manque d'arguments.

 

 

Homme, ne surpasse pas ton humanité.

 

 

La cause d'une injure est souvent insensée.

Hélas, que de dégâts par elle sont laissées.

 

 

Pour la communauté, il importe qu'un homme

Qui a dilapidé son argent voit ternir

Sa réputation.

 

 

De nos jours, la pudeur s'est bel et bien enfuie,

Et l'on recherche en vain un être qui rougit.

 

 

Oui, oui, c'est un moment cruel et un revers

De la fortune. Il faut à tout prix résister.

Un homme intelligent doit pouvoir s'apaiser

Quand on lui a tout pris : il supporte le poids

Des aléas du sort avec témérité.

Vraiment, que lui sert-il, en regardant les astres,

De crier : « Ah ! malheur ! » Non, en cas de désastre

La constance suffit.

 

 

Ah ! vertu du silence !

 

 

Avoir femme et enfants, c'est vouloir s'exposer,

Parménion, à subir des tourments à l'excès.

 

 

Un pauvre type ayant contracté mariage,

Renonçant de ce fait au calme célibat,

Certes, touche la dot, mais devient pour la vie

L'esclave de sa femme. En fait, ce qu'il épouse

Ce n'est pas une femme mais une tyrannie !

 

 

La femme en sa maison n'a que le second rôle :

En effet, le premier échoit à son mari.

Par nature, un ménage est en péril, s'étiole

Dès l'instant où la femme impose son avis.

 

 

Les dieux sont attentifs à de douces prières.

 

 

Dormir nourrit celui qui n'a pas de quoi vivre.

 

 

Une toison blanchie montre le temps qui passe,

        Et non pas la vertu.

 

 

N'oublie pas, ô gamin, qu'un jour tu seras vieux.

 

 

Un homme vicieux au visage avenant

Est comme un nœud coulant menaçant le passant.

 

 

J'ai plein d'argent et d'or autour de moi ; pourtant

Nul ne me dit que mon bonheur est éclatant.

 

 

Non, je n'admire pas celui qui, plein aux as,

Ne partage son bien avec personne, hélas !

 

 

Quand on a bu plus que de raison, on s'assomme ;

Néanmoins cet état ne dépend pas du nombre

De coupes qu'on a bues mais de l'esprit de l'homme.

 

 

Tu reçois, souviens-toi ! Tu donnes, oublie donc !

 

 

Mourir n'est pas honteux. Mourir honteusement

Est autrement affreux.

 

 

Bénédiction ! Un homme qui en est un !

 

 

 

II. Citations d'autres auteurs

 

 

N'est-ce pas justice, après tout, que Prométhée

Souffre, comme on le dit, sur les monts caucasiens ?

À part le feu du ciel qu'il nous a confié,

Qu'a-t-il fait de plaisant ? Si le courroux divin

S'est abattu sur lui, c'est pour avoir créé

L'espèce féminine, un insigne forfait !

La femme ? À dire vrai, funeste invention !

Un homme se marie, oh ! l'affreuse union !

Elle croque son fric, et de plus, elle attire

En son lit plein d'amants. Sans oublier enfin

Les soucis, les poisons, et le tourment jaloux

Qui ronge toute femme et ne la quitte point.

 

Cité par Pseudo-Lucien, Les Amours

 

 

Usez de votre bien comme si vous deviez

Mourir demain. Mais dans le même temps, gardez

Votre argent fermement comme si vous deviez

Vivre jusqu'à cent ans. L'épargne et la dépense

Sont deux excès immenses.

 

 Cité par Ausone

 

 

Je suis environné par l'argent et par l'or ;

On dit que je suis riche,

Mais jamais que je suis amoureux de mon sort.

 

Cité par Strabon

 

 

Quoi donc ! des ennemis se sont réconciliés !

Autant parler des loups et de leur amitié.

 

Cité par Eustathe

 

 

Il n'est point de terrain qui refuse de l'eau.

 

Scholiaste d'Hésiode

 

 

Il faut se conformer aux lois de sa cité.

 

Cité par Apostolius

 

 

 

III. « Monosticha »

 

 

La nuit porte conseil.

 

 

Chez l'homme, les soucis causent les maladies.

 

 

Presser de s'enrichir, presser de se ruiner.

 

 

Le mariage est un mal, mais un mal nécessaire.

 

 

Ne fuis pas le réel pour de pauvres chimères.

 

 

Tu as beaucoup d'amis : tu détiens un trésor.

 

 

Une bonne morale apporte de bons fruits.

 

 

Tu es homme : voilà la cause de ton mal.

 

 

Un homme vraiment libre a pour fin la bonté.

 

 

Restons muets plutôt que de parler en vain.

 

 

Tais-toi La langue qui faiblit nous dit la vérité.

 

 

Le vraisemblable vaut chez le pauvre d'esprit.

 

 

Un homme droit et bon se moque des injures.

 

 

Tes amis sont soucieux, donc tu dois l'être aussi.

 

 

Tu t'aimes trop toi-même et tu resteras seul.

 

 

Un mal physique est préférable aux mal de l'âme.

 

 

Le temps nous révèle et vérité et lumière.

 

 

Se repentir permet de se juger soi-même.

 

 

Un ignorant jamais ne saurait se tromper.

 

 

Dans l'adversité, l'homme échoue dans l'espérance.

 

 

Ne dis rien sous serment, même pour dire vrai.

 

 

Quand le chêne est tombé, on se fait bûcheron.

 

 

On se réconcilie souvent avec un mort.

 

 

L'être noble subit son destin avec force.

 

 

Tout provient de la terre et revient à la terre.

 

 

 

Vue du théâtre de Palmyre

 

 

 

LISTE DES PIÈCES DE MÉNANDRE

 

Les recherches des spécialistes du XIXe siècle nous ont permis d'établir une liste de quatre vingt-douze pièces de Ménandre sur les cent huit dénombrées par la Souda.

 

 

L'Accusateur

Glykéra

Les Adelphes

Le Grincheux

L'Amante

L'Héritière

L'Andrienne

Le Héros

L'Androgyne ou les Crétois

L'Homme inquiet

Les Aphrodisies

L'Homme qui se punit

L'Apparition

L'homme superstitieux

Les Arbitres

L'Homme triste

L'Arréphore ou la Joueuse de flûte

Hydrie

La Bague

Les Imbriens

La Bandelette

La Femme incendiée

La Béotienne

Les Joueuses de cottabe

Le Bouclier

Les Jumelles

Le Bouquet

Le Législateur

Les Buveuses de ciguë

La Leucadienne

Le Calomniateur

Les Locriens

La Canéphore

Les Lutteurs

La Carienne

Le Misogyne

Le Carthaginois

La Nourrice

La Caution

L'Olynthienne

Chalcéis

Le Palefrenier

Le Cithariste

La Concubine

La Cnidienne

La Parole rétractée ou la Messénienne

Le Cocher

La Pâtissière

La Colère

Le Patron du navire

Le Collier

Le Paysan

Les Compagnons

Les Pêcheurs

Les Consanguins

La Périnthienne

Les Convives

Phanium

Les Cousins

Les Pilotes

La Cruche

Le Poignard

Dardanos

Le Prêtre de Cybèle

Le Dépôt

La Prêtresse

Les Deux fils du même père

Le Réseau

La Devineresse

Le Sacrifice avant la noce

La Double tromperie

La Samienne

L'Enfant supposé

Les Sicyoniens

L'Éphésien

Les Soldats

L'Esclave

Thaïs

L'Eunuque

La Thessalienne

Le Faux Héraclès

Thrasyléon

La Femme battue

Le Trésor

La Femme tondue

Trophonios

Les Fêtes d'Héphaïstos

Les Vendus

   Le Flatteur

La Veuve

 

 

LES PAPYRUS DE MÉNANDRE

 

 

     Voici la liste complète et précise de tous les papyrus découverts plus ou moins récemment et qui ont permis de révéler les pièces de Ménandre.

 

 

 

L'Apparition : P. Petr. Graec. 388 (IVe s.) ; P. Oxy. 2825 (ler s.).

Les Arbitres : P. Petr. Graec. 388 (IVe s.) ; P. Caire 43227 (Ve s. ) ; P. Oxy. 2829 (IIIe-IVe s.) ; P. Oxy. 1236 (IVe s.) ; P. Berlin 21142 (IIIe s.).

Le Bouclier : P. Bodmer XXVI et P. Cologne 904 (IIIe-IVe s.) ; P. S. I. 126 (Ve s.).

Les Buveuses de ciguë : P. Ross. Georg. 10 (IIe s.).

Le Carthaginois : P. Oxy. 2654 et P. Cologne 5031 (Ier s.).

Le Cithariste : P. Berlin 9767 (Ier s. av. J.-C.) ; P. Turner 5 (IIe-IIIe s.).

La Double Tromperie : P. Oxy. (IIIe-IVe s.).

Le Flatteur : P. Oxy. 2655 + 409 (IIe s.) ; P. Oxy. 1237 (IIIe s.).

Le Grincheux : P. Bodmer IV (IIIe-IVe s.) ; P. Bodl. Gr. class. g. 50 (P) (IIIe-IVe s.) ; P. Oxy. 2467 ((IIIe s.) ; P. Berlin 21199 (IVe-Ve s.) ; P. Oslo 168 (IIIe s. av. J.-C.).

Le Héros : P. Caire 43227 (Ve s.).

Hydrie : P. Heidelberg G. 406 + P. Rylands 16 (a) et P. Hibeh 5 (IIIe s. av. J.-C.) ; P. Pétrie 4 (1) (IIIe s. av. J.-C.).

Le Misanthrope : P. IFAO 89 (IIIe s.) ; P. Oxy. 3368 (IIIe s.) ; P. Oxy. 3369 (IIIe s.) ; P. Oxy. 3370 (IIIe s.) ; P. Oxy. 2567 ((IIIe s.) ; P. Oxy. 2656 (IVe s.) ; P. Berlin 13932 (Ve s.) ; P. Berlin 13281 ((IIIe s.) ; P. Oxy.1013 (Ve-VIe s.) ; P. Oxy. 1605 ((IIIe s.).

Le Misogyne : P. S. I. 99 (IIIe s.).

Le Paysan : P. Genève 155 (Ve-VIe s.) ; P. Berlin 21106 (Ier s. av. J.-C.) ; P. S. I. 100 (IVe s.) ; P. British Mus. 2823 A (IVe s.).

La Périnthienne : P. Oxy. 855 (IIIe s.).

La Devineresse : P. S. I. 1280 (IIe s.).

La Samienne : P. Bodmer XXV et P. Barcelone 45 (IIIe-IVe s.); P. Oxy. 2943 (IIIe s.) ; P. Caire 43227 (Ve s.) ; P. Oxy. 2831 (IIe s.).

Les Sicyoniens : P. Sorb. 73, 2272 et 2273 (IIIe s. av. J.-C.) ; P. Oxy. 1238 et 3217 (ler s.).

La Tondue : P. Caire 43227 (Ve s.) ; P. Heidelberg 219 (IIe s.) ; P. Oxy. 2830 ((IIIe s.) ; P. Leipzig 613 ((IIIe s.) ; P. Oxy. 211 (ler-IIe s.).

 

 

Papyrus contenant des vers du Misanthrope de Ménandre

 

 

 

LES PORTRAITS DE MÉNANDRE

 

 

Boston, Museum of Fine Arts

 

    L'Antiquité nous a légué un grand nombre de portraits de Ménandre, la plupart ornant les villas des riches Romains cultivés, notamment à Pompéi. C'est la preuve la plus criante de sa popularité littéraire. À titre de comparaison, de l'autre grand comique athénien, Aristophane, nous n'avons que bien peu de représentations, et encore sujettes à caution.

    J'ai sélectionné huit bustes différents du poète, les deux plus remarquables, incontestablement, et les plus réalistes, étant ceux conservés à Boston et à Ottawa. Tous ces portraits sont des répliques plus ou moins réussies de la célèbre statue érigée à Athènes, en 291 av. J.- C., à peine un an après la mort du  poète, œuvre de Céphisodote et Timarchos, les deux fils de Praxitèle.

 

 

 

Boston, Museum of Fine Arts

Philadelphie, University Museum

Musée de Corfou

Rome, Musée des Thermes

 

Ottawa, Ontario Museum

Rome, Villa Albani

Collection privée

Musée Ashmoléen

 

 

    Il existe aussi quelques mosaïques représentant Ménandre. Les deux plus belles, reproduites ci-dessous, sont des découvertes récentes. La première, exhumée à Thuburbo Majus, en Tunisie, datable de la fin du IIe siècle apr. J.- C., montre un charmant décor végétal entourant, au centre, un tableau carré où figure le dramaturge grec.

    La seconde mosaïque, trouvée à Antioche, montre le poète conversant avec sa maîtresse, la courtisane Glykéra, dans une scène de banquet.

    Quant à la fresque représentant Ménandre, elle décore l'entrée d'une villa de Pompéi, que l'on l'habitude d'appeler, depuis sa découverte, « Villa de Ménandre ».

 

 

 

 

Tunis, Musée du Bardo

Pompéi, Villa de Ménandre

                                              

 

 

Musée d'Antioche