Diogène Laërce

DIOGÈNE DE LAERTE



LIVRE IX

 

CHAPITRE II. XÉNOPHANE - ΞΕΝΟΦΑΝΗΣ

1 Héraclite - 3. Parménide

Autre traduction - Traduction Genaille sur le site de Ugo Bratelli

 

 

 

 

 

DIOGENE DE LAERTE.

 

 

LIVRE IX.

CHAPITRE PREMIER.

CHAPITRE II.

XÉNOPHANE

ΞΕΝΟΦΑΝΗΣ

 

[18] Ξενοφάνης Δεξίου ἤ, ὡς Ἀπολλόδωρος, Ὀρθομένους Κολοφώνιος ἐπαινεῖται πρὸς τοῦ Τίμωνος· φησὶ γοῦν,

Ξεινοφάνη θ' ὑπάτυφον, Ὁμηραπάτην ἐπικόπτην.

Οὗτος ἐκπεσὼν τῆς πατρίδος ἐν Ζάγκλῃ τῆς Σικελίας * * διέτριβε δὲ καὶ ἐν Κατάνῃ. Διήκουσε δὲ κατ' ἐνίους μὲν οὐδενός, κατ' ἐνίους δὲ Βότωνος Ἀθηναίου ἤ, ὥς τινες, Ἀρχελάου. Καί, ὡς Σωτίων φησί, κατ' Ἀναξίμανδρον ἦν. Γέγραφε δὲ ἐν ἔπεσι καὶ ἐλεγείας καὶ ἰάμβους καθ' Ἡσιόδου καὶ Ὁμήρου, ἐπικόπτων αὐτῶν τὰ περὶ θεῶν εἰρημένα. Ἀλλὰ καὶ αὐτὸς ἐρραψῴδει τὰ ἑαυτοῦ. Ἀντιδοξάσαι τε λέγεται Θαλῇ καὶ Πυθαγόρᾳ, καθάψασθαι δὲ καὶ Ἐπιμενίδου. Μακροβιώτατός τε γέγονεν, ὥς που καὶ αὐτός φησιν·

[19] Ἤδη δ' ἑπτά τ' ἔασι καὶ ἑξήκοντ' ἐνιαυτοὶ
βληστρίζοντες ἐμὴν φροντίδ' ἀν' Ἑλλάδα γῆν·
ἐκ γενετῆς δὲ τότ' ἦσαν ἐείκοσι πέντε τε πρὸς τοῖς,
εἴπερ ἐγὼ περὶ τῶνδ' οἶδα λέγειν ἐτύμως.

Φησὶ δὲ τέτταρα εἶναι τῶν ὄντων στοιχεῖα, κόσμους δ' ἀπείρους, οὐ παραλλακτοὺς δέ. Τὰ νέφη συνίστασθαι τῆς ἀφ' ἡλίου ἀτμίδος ἀναφερομένης καὶ αἰρούσης αὐτὰ εἰς τὸ περιέχον. Οὐσίαν θεοῦ σφαιροειδῆ, μηδὲν ὅμοιον ἔχουσαν ἀνθρώπῳ· ὅλον δὲ ὁρᾶν καὶ ὅλον ἀκούειν, μὴ μέντοι ἀναπνεῖν· σύμπαντά τε εἶναι νοῦν καὶ φρόνησιν καὶ ἀΐδιον. Πρῶτός τε ἀπεφήνατο ὅτι πᾶν τὸ γινόμενον φθαρτόν ἐστι καὶ ἡ ψυχὴ πνεῦμα.  [20] Ἔφη δὲ καὶ τὰ πολλὰ ἥσσω νοῦ εἶναι. Καὶ τοῖς τυράννοις ἐντυγχάνειν ἢ ὡς ἥκιστα ἢ ὡς ἥδιστα. Ἐμπεδοκλέους δὲ εἰπόντος αὐτῷ ὅτι ἀνεύρετός ἐστιν ὁ σοφός, « Εἰκότως, » ἔφη· « σοφὸν γὰρ εἶναι δεῖ τὸν ἐπιγνωσόμενον τὸν σοφόν.» Φησὶ δὲ Σωτίων πρῶτον αὐτὸν εἰπεῖν ἀκατάληπτα εἶναι τὰ πάντα, πλανώμενος.

Ἐποίησε δὲ καὶ Κολοφῶνος κτίσιν καὶ τὸν εἰς Ἐλέαν τῆς Ἰταλίας ἀποικισμὸν ἔπη δισχίλια. Καὶ ἤκμαζε κατὰ τὴν ἑξηκοστὴν Ὀλυμπιάδα. Φησὶ δὲ Δημήτριος ὁ Φαληρεὺς ἐν τῷ Περὶ γήρως καὶ Παναίτιος ὁ Στωικὸς ἐν τῷ Περὶ εὐθυμίας ταῖς ἰδίαις χερσὶ θάψαι τοὺς υἱεῖς αὐτόν, καθάπερ καὶ Ἀναξαγόραν. Δοκεῖ δὲ πεπρᾶσθαι ὑπὸ * * <καὶ λελύσθαι ὑπὸ> τῶν Πυθαγορικῶν Παρμενίσκου καὶ Ὀρεστάδου, καθά φησι Φαβωρῖνος ἐν Ἀπομνημονευμάτων πρώτῳ.

Γέγονε δὲ καὶ ἄλλος Ξενοφάνης Λέσβιος ποιητὴς ἰάμβων.

Καὶ οὗτοι μὲν οἱ σποράδην.

Xénophane, fils de Dexias, ou d'Orthomène, suivant Apollodore, était de Colophon. Timon fait de lui cet éloge :

Xénophane, moins orgueilleux, flagellant les sottises d'Homère.

199 Chassé de sa patrie, il alla vivre à Zancle, en Sicile, et à Catane. Quelques auteurs prétendent qu'il n'eut aucun maître; d'autres le font disciple soit de Boton, d'Athènes, soit d'Archélaüs (1); Sotion le dit contemporain d'Anaximandre. Il a laissé des poésies épiques, des élégies et des ïambes dirigés contre Hésiode et Homère, dont il attaque la théologie. Il chantait lui-même ses vers. On dit aussi qu'il critiqua Thaïes et Pythagore, sans excepter même Épiménide. Il vécut très-vieux, comme il l'atteste lui-même :

Soixante-sept ans se sont écoulés
Depuis que ma pensée est ballottée sur la terre de Grèce :
Lorsque j'y vins j'en comptais vingt-cinq,
Si tant est que je puisse encore supputer mon âge avec certitude.

Suivant lui, toutes choses proviennent de quatre principes ; les mondes sont infinis et immuables. Les nuages résultent de la condensation dans l'espace des vapeurs élevées par le soleil. Dieu est une substance sphérique ; il n'a aucune ressemblance avec l'homme. Le Tout voit, le Tout entend, mais il ne respire pas. Il est en même temps toutes choses, intelligence, pensée, éternité. Xénophane a le premier proclamé que tout ce qui est engendré est périssable, et que l'âme est un souffle. Il enseignait encore que la pluralité est inférieure à l'intelligence (2). Une de ses maximes était qu'il faut fréquenter les tyrans ou le moins possible, ou le plus agréablement qu'on peut. Empédocle lui ayant dit que le vrai sage était introuvable, il répondit: « Je le conçois, car pour discerner un sage il faut d'abord être sage soi-même. » Sotion prétend 200 qu'il a le premier contesté la certitude de toutes les perceptions, mais c'est là une erreur.

Xénophane avait composé deux mille vers sur la fondation de Colophon et la colonisation d'Élée en Italie. Il florissait vers la soixantième olympiade. On lit dans Démétrius de Phalère ( traité de la Vieillesse) et dans Panétius le stoïcien ( traité de la Tranquillité) qu'il ensevelit ses fils de ses propres mains, comme Anaxagore. Phavorinus dit au premier livre des Commentaires qu'il eut pour ennemis (3) les pythagoriciens Parméniscus et Orestadès.

Il y a eu un autre Xénophane; poëte ïambique, originaire de Lesbos.

Tels sont ceux qu'on a appelés philosophes isolés.



 

(1)  Xénophane est antérieur à Archélaüs de près d'un siècle.

(2)  C'est-à-dire à l'unité.

(3) Je conserve le texte ancien : πεπρσθαι ; de πίπρημι, « chagriner. »