LES PROBLÈMES D'ARISTOTE
DISSERTATION
SUR LA COMPOSITION ET L'AUTHENTICITÉ DES PROBLÈMES
Caractère général du recueil des
Problèmes, qui est trop peu connu, quoique fort curieux ;
composition de ce recueil ; nomenclature de ses 38 sections, avec le
nombre des questions ; conséquences à tirer de ce tableau;
classification imparfaite ; ordre partiel ; répétitions fréquentes ;
absence de système ; emprunts à Théophraste ; hypothèse improbable
d'une compilation ; causes possibles du désordre des Problèmes ;
conformité à la doctrine aristotélique et au style d'Aristote ;
spécimens de quelques questions des Problèmes ; observations très
exactes sur l'ivrognerie, sur l'éternuement, sur l'arc-en-ciel, sur
l'origine de la numération décimale, sur le mouvement du cylindre et
du cône, sur le partage égal des votes, sur le vol dans les lieux
publies, sur la mélancolie, etc. ; sens du mot de Problèmes ;
preuves de l'authenticité ; Aristote, Théophraste, Cicéron, Sénèque,
Pline, Plutarque, Aulu-Gelle ; catalogues de Diogène Laërte, de
l'anonyme de Mesnage et de l'arabe ; opinions des Modernes, depuis
Henri Estienne jusqu'à MM. Bussemaker et Emile Heitz ; analyse des
Proverbes inédits, qui sont apocryphes. Conclusions.
Parmi tous les ouvrages d'Aristote, il
n'en est pas un qui soit plus curieux que les Problèmes. Sans doute,
ce traité n'est pas un des plus importants de la collection générale
; mais par sa forme et son originalité, il mérite une attention
particulière. Comment est-il si peu connu, et même si injustement
dédaigné? Probablement parce qu'il n'a pas été traduit dans les
langues vulgaires, et que, depuis plus de deux siècles, il a cessé
d'être l'objet de sérieux commentaires. Celui de Septali, le plus
complet de tous, est de 1632; et il ne paraît pas que, depuis cette
époque, on ait rien fait de considérable. Louis Septali, médecin et
professeur de science politique à Milan, avait adopté ce traité pour
sujet de ses doctes leçons. Fort habile helléniste, il était
admirateur passionné d'Aristote, pour l'infaillibilité duquel il a
un respect que le Moyen-âge ne dépassait certainement pas. Septali
n'a point eu d'imitateurs ni de rivaux. On peut donc croire
qu'aujourd'hui les Problèmes d'Aristote paraîtront une œuvre assez
nouvelle. François Bacon, malgré son aveugle mépris pour
l'Antiquité, ressentait en leur faveur une bienveillance
exceptionnelle ; mais malgré cet éloge, très sommaire d'ailleurs,
Bacon n'avait pas fait des Problèmes une étude bien approfondie. En
tout cas, sa recommandation n'a pas eu de suites ; et le xviiie
siècle n'a pas été tenté, non plus que le nôtre, de vérifier jusqu'à
quel point elle était fondée.
Les Problèmes sont-ils authentiques ?
C'est là un point essentiel à éclaircir. Mais comme ce point est
fort obscur et que la solution ne peut être qu'hypothétique, il faut
en réserver la discussion, et faire passer, auparavant, l'examen de
l'état où se présentent actuellement les Problèmes, d'après la
tradition qui est arrivée jusqu'à nous, et qui sera transmise à nos
successeurs, sans que rien désormais ne semble devoir la modifier.
Ce recueil se compose de 38 sections,
d'inégal e étendue, où les sujets les plus variés sont exposés, sous
forme de questions, avec des réponses, plus ou moins développées.
Certaines sections contiennent 67, 64, 62, 58, 50, 42, 41 questions
(Sections X, XXVI, XI, I, XIX, II et V, XXIII) tandis que d'autres
sections n'en contiennent que 8, 7, 6 et même 3 (Sections XXVIII,
VI, XXXVII, XVII et XXXVI). On s'est étonné quelquefois de ces
disparates numériques ; mais elles ont dû se produire tout
naturellement, selon que l'auteur avait eu l'occasion de se livrer à
des observations sur telle série de faits plutôt que sur telle autre
; on, même, selon que le sujet prêtait aux recherches.
Pour qu'on se fasse une idée de la
diversité des questions soulevées et résolues, il est bon de
rappeler ici les titres de chacune des 38 sections, et de les
embrasser d'un coup d'œil. On pourra tirer de ce tableau, quelque
aride qu'en soit la nomenclature, des conséquences assez
instructives.
1. De la maladie. 58 questions.
2. De la sueur. 42 --
3. Du vin et de l'ivresse. 35 —
4. De l'acte vénérien. 33 —
5. De la fatigue. 42 --
6. Des habitudes du corps. 7 --
7. De la sympathie. 10 —
8. Du frisson. 22 --
9. Des meurtrissures. 14 --
10. Faits naturels. 67 —
Il. De la voix. 62 --
12. Des bonnes odeurs. 13 —
13. Des mauvaises odeurs. 12 -
14. De la température. 16 —
15. Mathématiques; astronomie. 13 —
16. Des êtres inanimés. 13 —
17. Des êtres animés. 3 —
18. Philologie. 10 --
19. Harmonie musicale. 50 —
20. Des arbrisseaux et des légumes. 36
—
21. De la farine et de la pâte. 26 --
22. Des fruits et de l'automne. 14
questions.
23. De l'eau de mer. 41 —
24. Des eaux thermales. 19 --
25. De l'air. 22 --
26. Des vents. 61 --
27. De la peur et du courage. Il —
28. De la tempérance et de la
débauche. 8 —
29. De la justice. 16 --
30. De l'intelligence. 14 --
31. Des yeux. 30 --
32. Des oreilles. 13 --
33. Du nez. 18 --
34. De la bouche. 12 --
35. Du toucher. 10 --
36. Du visage. 3 —
37. Du corps. 6 --
38. Des couleurs. Il --
Le total de ces questions se monte à
896; il est quelque peu différent suivant les divisions qu'on
établit, en réunissant certaines questions en une seule, ou à
l'inverse, en les séparant. Ces divergences sont insignifiantes.
La première conséquence à tirer de ce
tableau, c'est que le recueil n'a rien de systématique. Les sections
et les matières se succèdent sans avoir le moindre lien entre elles
; leur seul rapport est de faire partie d'une même collection qui
les renferme toutes. Il n'y a pas là de plan d'ensemble. Les
sections sont juxtaposées, et rien de plus.
Une autre conséquence non moins
évidente, c'est que l'auteur de toutes ces observations avait
certainement un esprit étendu et fort exact. Si les sections n'ont
qu'une relation factice, il n'en est pas de même dans l'intérieur de
chacune d'elles. Là ce sont des questions qui s'accordent les unes
avec les autres, et qui, sans prétendre à une rigueur scientifique,
forment un tout régulier, par l'identité des sujets qu'elles
traitent.
Il y a donc ici deux arrangements :
d'abord la réunion des questions qui se rapprochent entre elles, et
ensuite le recueil général en sections. Ce second arrangement est
arbitraire et confus. Le premier n'a pas ces défauts. Il ne vise pas
davantage à organiser une doctrine ; mais nécessairement il est
mieux coordonné, quoiqu'il ne le soit peut-être pas encore assez
pour nous satisfaire.
En poussant l'analyse un peu plus
loin, on découvre dans le recueil entier des désordres partiels, qui
peuvent nous surprendre, en ce qu'il aurait été très facile de les
éviter. Il y a d'une section à l'autre des répétitions absolument
inutiles, au nombre de plus de 120. Les mêmes questions se
reproduisent pour peu que le sujet le comporte. D'autres fois, si
les questions ne sont pas identiques, elles se ressemblent du moins
tellement qu'il n'y avait aucun motif de les renouveler. Dans un
mémoire exact et savant, M. Prantl, de l'Académie de Munich, a pris
soin de faire le dénombrement de toutes ces anomalies (Mémoires de
l'Académie de Munich, tome VI, pp. 341-377, 6 juillet 1850). II a
trouvé que 14 problèmes se répétaient sans la plus légère
différence; sept autres ne diffèrent presque point ; un est
identique à deux autres, si on les accouple. Enfin 108 offrent les
mêmes questions, mais les résolvent un peu autrement. M. Prantl a
consigné tous ces détails, qui exigent, pour être compris, une
quantité de chiffres, se référant aux sections et aux paragraphes.
On retrouvera ces indications dans les noies jointes à cette
traduction ; et les chiffres cités à leur rang seront plus
significatifs.
A y regarder encore de plus près, on
voit qu'un même et seul problème contient parfois plusieurs sujets
et même des contradictions. Les contradictions sont encore plus
flagrantes quand elles sont exprimées d'une section à une autre
section, et qu'elles soutiennent successivement le pour et le
contre, avec une égale assurance.
M. Prantl remarque en outre que 120
problèmes environ ont emprunté l'idée qu'ils étudient aux ouvrages
d'Aristote sur l'histoire naturelle. Nous avons aussi indiqué ces
concordances, toutes les fois que l'occasion s'en est présentée.
Mais une concordance bien plus frappante encore, quoique d'ordinaire
on y ait insisté trop peu, ce sont les emprunts faits à Théophraste
par l'auteur des Problèmes, ou à l'auteur des Problèmes par
Théophraste. Ces emprunts sont souvent, de part et d'autre, de
simples plagiats, les mots et les expressions étant uniformes.
D'autres fois, ce sont des imitations tellement analogues qu'il n'y
a point à s'y méprendre. Dans la plupart des cas, Théophraste est
plus clair et moins laconique. On dirait qu'il commente un thème
trop concis. Dans d'autres cas, au contraire, on pourrait supposer
que l'auteur des Problèmes a fait un extrait de Théophraste, en
l'abrégeant. Il y a plus de cinquante passages de cette sorte, où se
rencontrent ces étroites relations. Il est très difficile de les
expliquer dans l'un ou l'autre sens. En ceci, on ne doit pas oublier
que Théophraste a été le disciple et le successeur d'Aristote, et
qu'il a bien pu conserver et s'approprier quelques-unes des théories
de son maître. Mais il se peut de même que, si Aristote n'est pas
l'auteur des Problèmes, cet auteur, quel qu'il soit, ait fortifié
ses doctrines de celles de Théophraste. Il est vrai que l'on prétend
que les ouvrages de Théophraste auxquels les Problèmes ont fait ces
emprunts, ne sont pas authentiques. Mais cette hypothèse paraît bien
gratuite; car les fragments de traités attribués à Théophraste sont
manifestement dignes de lui, pour les pensées et pour le style. On y
reconnaît sans peine toutes les qualités du fondateur de la
Botanique. Si donc il était prouvé que l'auteur des Problèmes est
postérieur à Théophraste, il ne pourrait pas l'être de beaucoup,
puisqu'il n'est pas moins prouvé, ainsi qu'on le verra bientôt, que
le recueil des Problèmes existait à Rome, au temps de Cicéron, tel
que nous l'avons aujourd'hui.
Que l'auteur des Problèmes soit un
compilateur vulgaire, il semble impossible de s'arrêter à cette
supposition. Un compilateur, même peu adroit, n'aurait pas poussé la
négligence jusqu'à laisser tant de répétitions et de contradictions
dans l'œuvre qu'il aurait ébauchée. Il lui aurait suffi, pour les
faire disparaître, de la révision la plus superficielle. On peut
donc admettre que le désordre même des Problèmes est un indice
qu'une main respectueuse les a laissés tels qu'elle les recevait, et
qu'elle ne s'est pas cru le droit d'y rien changer, même pour en
corriger les fautes les plus saillantes. Et à ce point de vue, on ne
peut s'empêcher de se souvenir du récit de Strabon et de Plutarque,
sur le destin des manuscrits d'Aristote, possédés d'abord par
Théophraste, et allant, avec ses héritiers, s'égarer dans
l'Asie-Mineure, jusqu'à ce que Sylla, les enlevant d'Athènes, où
Apellicon les avait rapportés, les fasse venir à Rome dans sa
bibliothèque. De quelque manière qu'Aristote ait terminé sa trop
courte vie, ou sait que, forcé de quitter la Grèce en toute hâte,
devant la réaction antimacédonienne, il n'a pas pu mettre en ordre
ses papiers et ses livres. Les questions que son génie s'était
faites sur une multitude de sujets sont-elles le canevas des
Problèmes ? Ces formules monotones par demandes et par réponses
étaient-elles à son usage et dans ses habitudes de travail ? Il
serait à peu près aussi hasardeux de l'affirmer que de le- nier.
Mais l'hypothèse qui fait d'Aristote l'auteur des Problèmes aurait
l'avantage de dissiper bien des obscurités. Certes, cette hypothèse
elle-même est sujette à de fortes objections ; mais elle est en
somme moins invraisemblable que toute autre.
En attendant, nous poursuivons notre
examen qui continuera à s'appuyer sur un fondement réel, à savoir
sur les Problèmes, en les prenant tels qu'ils sont entre nos mains.
Un premier point, qui est
incontestable, c'est qu'il n'y a rien dans le recueil qui trahisse
un temps postérieur à celui d'Aristote. Un faussaire, qui aurait
voulu abriter son œuvre sous ce grand nom, aurait infailliblement
révélé sa fraude par quelque méprise et par quelque anachronisme. Il
n'y a pas trace de cette supercherie dans les Problèmes.
De l'aveu même de M. Prantl, qui est
fort impartial, la doctrine, quand il y en a une, est tout
aristotélique. Les explications, sans être précisément
systématiques, impliquent de toute nécessité certains principes ; et
tous ceux que ces explications allèguent ou supposent, sont
généralement ceux d'Aristote. On peut ajouter que le style est
presque partout d'une langue excellente. S'il pèche par quelque
endroit, c'est de temps à autre par une concision qui rappelle celle
du philosophe. Il y a bien quelques passages douteux ; mais ils sont
si rares qu'on peut les négliger sans dommage. On objectera
peut-être que le style, étant affaire de goût, ne saurait être pris
pour une preuve décisive. L'objection a sa valeur, on ne peut le
nier ; mais pourtant il y a de telles nuances entre les styles qu'on
peut les discerner presque à coup sûr. Apparemment le style
d'Aristote n'est pas celui de Platon et de Xénophon ; le style de
Polybe n'est pas celui de Thucydide. C'est une distinction aisée
pour peu qu'on ait eu un long commerce avec chacun d'eux. Mais, sans
remonter à l'Antiquité, notre propre langue ne nous offrirait-elle
pas autant d'exemples que l'on voudrait? Le style des Problèmes
est-il le style ordinaire d'Aristote ? Nous répondons par
l'affirmation, presque sans hésitation. Les obscurités, qui sont
assez nombreuses, s'expliquent fort bien par la rédaction rapide de
notes disposées d'abord au hasard des circonstances, et réunies
ensuite d'après leurs analogies. Il est bien probable que si
l'auteur avait pu les réviser à loisir, il aurait retranché les
répétitions et les contradictions, qu'excuse un premier jet, et
corrigé l'incohérence d'observations faites à de longs intervalles
de temps. Aristote, après un classement provisoire, n'aura pas pu en
faire un meilleur ; et encore une fois cette supposition est plus
acceptable que celle d'un compilateur qui aurait été négligent au
point extrême où nous le voyons.
Mais laissons l'argument tiré du
style. En voici un autre, qui est peut-être moins récusable. Parmi
toutes ces questions, au nombre de près de neuf cents, il n'y en a
que quelques- unes qui puissent paraître, ou futiles, ou erronées.
La presque totalité pourrait être posée encore aujourd'hui, et l'on
n'aurait pas à s'étonner de les entendre discuter par les savants de
nos jours. Elles sont en général fort délicates, pour ne pas dire
subtiles ; mais à ce titre même elles ne doivent pas nous être trop
suspectes, la subtilité n'étant pas étrangère au génie
aristotélique. C'est que, pour apprécier les Problèmes, il faut
savoir nettement séparer, si l'on veut être juste, les questions et
les réponses. Les faits sont presque tous admirablement observés, et
nous ne pourrions pas nous flatter, malgré tous nos progrès, de
faire mieux. Mais les explications de ces faits ne sont pas à l'abri
de la critique. Nous avouons sans peine qu'elles sont au contraire
souvent insuffisantes, quelquefois même ridicules. Mais pour se
préserver d'une excessive sévérité, on n'a qu'à se rappeler où en
était la science quatre cents ans avant notre ère. Ces théories, qui
nous choquent tant, ont régné sans conteste jusqu'au xviie siècle;
et il y a deux siècles tout au plus que la science moderne a secoué
définitivement le joug, si utile au Moyen-âge.
Remarquons, en passant, que cette
exactitude à constater les phénomènes est de toute évidence dans les
Problèmes, comme dans les ouvrages principaux d'Aristote. C'est une
preuve, après tant d'autres, que les Anciens ont observé aussi bien
que les Modernes, obéissant instinctivement à la loi qui régit
l'esprit humain, et qui lui impose partout et en tout temps une
seule et même méthode. L'unique différence entre nous et les
Anciens, c'est que nous connaissons beaucoup plus de faits et que
nous en comprenons mieux les causes. C'est une gloire que nous
pouvons revendiquer légitimement. Mais le procédé est absolument
identique ; et il y aurait iniquité et singulier aveuglement
d'amour-propre à élever entre l'Antiquité et nous une barrière qui
n'existe point.
Nous ne voudrions pas insister plus
qu'il ne convient sur le mérite de toutes les observations
consignées dans les Problèmes ; mais parmi les questions qu'ils
agitent, il faut en choisir quelques-unes comme spécimens, afin de
dissiper tous les doutes, s'il peut en subsister encore. Il est
d'autant mieux de combattre le préjugé qu'il est plus répandu et
plus invétéré.
Ainsi, dans la section III, §§ 5 et
26, l'auteur se demande pourquoi les ivrognes sont atteints de
tremblement, et pourquoi le tremblement augmente chez eux à mesure
qu'ils boivent davantage. Le fait est positif, et l'observation est
aussi exacte que fréquente. La question vaut donc la peine d'être
discutée. Voici la réponse. Le vin par lui-même est échauffant, et
c'est d'ordinaire le froid qui fait trembler plus que toute autre
impression. On a vu cependant bien des ivrognes qui ne prenaient que
du vin pour toute nourriture, trembler si violemment qu'ils
échappaient aux mains de ceux qui essayaient de calmer leur
agitation, et qu'on pouvait les asperger d'eau chaude sans qu'ils en
sentissent rien. Le tremblement ne vient que de refroidissement, et
le refroidissement se produit, soit parce que la chaleur du dedans
est suspendue par le froid extérieur, comme en hiver, soit que la
chaleur naturelle vienne à s'éteindre sous l'influence de son
contraire, qui est le froid, et sous l'influence de l'âge, comme
dans la vieillesse. Elle peut encore s'éteindre par une chaleur
étrangère, qui serait excessive, par exemple sous l'action d'un
soleil ardent, ou celle d'un feu qui nous brûle. C'est précisément
ce qui se passe chez les gens qui s'enivrent. Mais il semble que
c'est tout le contraire qui devrait se passer en eux, puisque le vin
cause tant de chaleur. C'est que les contraires peuvent bien
produire un même effet ; seulement, ils le produisent autrement. Le
tremblement de l'ivrogne provient d'un défaut de chaleur, mais
spécialement d'un défaut de chaleur naturelle. La matière qui est
faite pour entretenir la chaleur dans chacun de nous étant détruite,
la chaleur disparaît nécessairement. Les choses sans vie en sont là,
comme on le voit par une lampe dont la lumière s'éteint lorsque
l'huile est consommée ; et comme on le voit aussi par les êtres
vivants, pour qui la vieillesse amène le même désordre. La preuve
que cette affection chez les ivrognes et chez les vieillards tient à
un refroidissement intérieur, c'est qu'ils tremblent sans que la
température extérieure ait rien de plus rigoureux.
Dans la section X, §§ 20 et 26,
l'auteur demande pourquoi l'homme est presque le seul animal qui
éternue, ou du moins pourquoi l'homme éternue plus que les autres
animaux. Est-ce parce qu'il a de larges vaisseaux dans lesquels
doivent passer le souffle et l'odorat, et que ces vaisseaux étant
remplis d'air déterminent l'éternuement, pour se soulager ? La
question est de peu d'importance sans doute ; mais l'observation est
juste et délicate. L'auteur y est revenu à plusieurs reprises ; et
il s'efforce de l'expliquer. Il remarque d'abord que ce qui prouve
la largeur des vaisseaux chez l'homme, c'est que, parmi les animaux,
il est un de ceux dont l'odorat est le moins développé ; des
vaisseaux plus étroits lui donneraient des sensations plus vives.
L'auteur ajoute que l'homme éprouve le coryza, ou le rhume de
cerveau, plus souvent que tout autre animal. Ce qui fait cette
différence, c'est que la chaleur se concentre vers la région du
cœur, et tend naturellement à s'élever. Or, chez les autres animaux,
par exemple chez les quadrupèdes, la chaleur ne peut se diriger, par
son mouvement propre, qu'entre les épaules de l'animal ; là elle se
divise, une partie allant vers le cou et la tête, et l'autre partie
allant dans le rachis et dans les lombes, parce que tous ces organes
sont placés sur une même ligne droite, et opposes à la base qui
porte l'animal. Cette assiette du corps étant donnée, les liquides
s'y répartissent partout régulièrement, en avant et en arrière. Au
contraire, dans l'homme, qui repose, comme les plantes, tout droit
sur sa base, la chaleur se dirige très abondamment et avec violence
vers la tète ; et en y parvenant, elle échauffe et dessèche les
vaisseaux que la tête contient. Dans cette disposition, les
vaisseaux de la tête reçoivent les liquides plus aisément que les
vaisseaux placés au-dessous du cœur. Les liquides, qui sont légers
et mal digérés, y suivent la chaleur ; ils remplissent les vaisseaux
dans lesquels ils entrent, et ils y causent des écoulements et des
éternuements. Le bruit qu'on fait en éternuant est produit par
l'air, qui se porte avec force dans le nez. Après l'homme, ce sont
les oiseaux qui ont le plus souvent le coryza, parce que ce sont eux
qui se rapprochent le plus de la forme humaine. Mais cependant ils
souffrent du coryza moins que l'homme, parce qu'ils ont presque
toujours la tête basse pour prendre leur nourriture sur le sol. Ne
peut-on pas encore expliquer l'éter- nuement par la dimension du
ne/de l'homme, qui est proportionnellement très court? Le liquide en
s'y échauffant devient bien vite de l'air, tandis que. chez les
autres animaux la longueur du nez fait que le liquide s'y refroidit,
avant d'en sortir.
A propos de l'éternuement, l'auteur
recherche pourquoi, de tous les bruits qui sortent de notre corps,
celui-là est le seul qui soit accueilli par de bonnes paroles, qui
en font une chose presque divine. C'est probablement parce que ce
bruit vient de la tète, c'est-à-dire, du lieu le plus sacré de toute
la personne humaine. Cette opinion de l'Antiquité a laissé des
traces jusque chez nous, après plus de deux mille ans ; et nous
saluons toujours l'éternuement par un « Dieu vous bénisse », dont on
gratifie son voisin. (Section XXXIII, § 10.)
Autre exemple d'une observation bien
faite, qui a de plus l'avantage de réfuter une erreur fort répandue,
à ce qu'il paraît, chez les paysans de la Grèce. (Section XII, § 3.)
On prétendait que, quand un arc-en-ciel se produit, tous les arbres
qu'il abrite contractent une bonne odeur. Est-ce vrai ? Est-ce faux
? Et, si ce phénomène est vrai, quelle en peut être la cause ? Une
première chose qui est évidente, c'est que ce ne sont pas tous les
arbres qui deviennent ainsi odorants, ni toutes les fois que
l'arc-en-ciel paraît ; car on a pu constater fréquemment que, malgré
l'arc-en-ciel, il n'y avait pas le moindre changement dans les
arbres. Et même lorsque le phénomène se produit, ce n'est pas pour
toutes les essences d'arbres. Néanmoins il suffit que le fait se
réalise une fois par hasard pour que cette opinion s'accrédite. En
tout cas, ce serait indirectement qu'on pourrait attribuera l'arc-
en-ciel une influence de ce genre, puisque l'arc-en-ciel n'a rien
d'une substance, et qu'il n'est qu'une réfraction accidentelle de la
lumière. Mais cette prétendue action n'atteint jamais, comme on le
dit, une forêt entière, dans quelque étal qu'elle soit ; car elle ne
touche pas les arbres -verts ; et elle ne se produit pas non plus
par des temps de sécheresse. Aussi, les bergers s'accordent-ils
adire que celte bonne odeur ne se répand réellement qu'après les
pluies qui suivent l'arc-en-ciel, et qu'elle est sensible surtout
pour le genêt, pour le nerprun, c'est-à-dire, pour les arbres dont
les fleurs sont déjà odorantes. La même chose absolument se passe
sur toute la surface de la terre. Les régions sous le soleil ont une
odeur plus agréable que celles de l'Ourse ; les régions d'Orient,
plus que celles du Midi. Il paraît donc certain que, pour les arbres
que l'arc-en-ciel recouvre, rien ne se manifeste, s'il n'y a pas
d'eau. Dès qu'il y en a, le bois qui en est imprégné, et qui
l'élabore par sa chaleur propre, exhale la vapeur qu'il contient. Il
ne faut pas d'ailleurs que la pluie soit trop forte ; car alors elle
éteindrait toute chaleur dans le bois. Mais, en général, les pluies
qui tombent après l'Iris ne sont pas très abondantes; elles sont
plutôt de force médiocre. S'il y a plusieurs arcs-en-ciel, l'odeur
n'est pas plus sensible ; et souvent même elle est plus faible. Il
est donc probable que, comme on ne voit rien d'extraordinaire que
l'arc-en-ciel, on suppose que c'est lui qui produit la bonne odeur
des bois.
Une question plus grave, c'est
l'origine de la numération décimale (section XV, § 3). Pourquoi tous
les peuples, les barbares aussi bien que les Grecs, comptent-ils par
dix et non par tout autre nombre, par exemple par cinq, et ne
redoublent-ils pas cinq, en disant cinq et un, cinq et deux, comme
on dit dix et un, onze; dix et deux, douze ? Et pourquoi n'allant
pas au delà de dix se bornent-ils à multiplier sans cesse ce nombre
? En effet, tout nombre, quel qu'il soit, n'est jamais que celui qui
le précède, auquel s'ajoute un, deux, ou tel autre nombre. On
s'arrête à dix pour compter tout le reste. Ce ne peut pas être un
effet du hasard, puisque tous les peuples en sont là, et qu'ils y
sont toujours. Or, un fait qui se répète en tout temps et partout
n'est pas un hasard ; c'est un fait essentiellement naturel. Cette
constance ne tient-elle pas à ce que dix est un nombre complet, en
ce qu'il a toutes les formes que peut prendre un nombre ? En effet,
on y trouve le pair, l'impair, le carré, le cube, la longueur, la
surface; c'est le premier des composés. N'est-ce pas encore parce
que la décade est un principe qui représente la somme de un, deux,
trois et quatre? Les cubes de ces quatre nombres ne forment-ils pas
dix fois dix, ou cent ? Et n'est-ce pas d'après ces nombres que tout
l'univers est organisé, si l'on en croit les Pythagoriciens ? Mais
cette numération par dix ne tient-elle pas à ce que tous les hommes
ont dix doigts ; et qu'ayant pour eux le vote d'un nombre qui leur
est propre, ils ont compté tous les autres objets par ce même nombre
? Il y a une peuplade de Thraces qui ne compte que jusqu'à quatre ;
c'est la seule ; et elle est semblable aux enfants, dont la mémoire
ne peut aller plus loin, et qui n'ont pas besoin d'en savoir
davantage.
Après une question arithmétique, on
peut rappeler une question de géométrie, qui n'est pas moins
heureusement résolue (section XVI, § 5). Pourquoi un cylindre qu'on
pousse va-t-il toujours en ligne droite et décrit-il toujours des
droites, par les cercles qui le terminent ? Pourquoi le cône se
meut-il circulairement, son sommet restant en place, et pourquoi
décrit-il un cercle horizontal ? Tous deux cependant se meuvent en
cercle ; mais sur la surface du sol, le cylindre ne trace que des
droites, tandis que le cône y trace des cercles, attendu que les
cercles qui composent le cône sont inégaux, et que les plus grands
vont toujours plus vite, bien qu'ils aient le même centre. Tous les
cercles qui sont dans le cône se meuvent bien en même temps, mais
d'une façon inégale ; et il en résulte que les plus extérieurs
parcourent dans le même temps plus d'espace et décrivent une ligne
plus grande. C'est ce qui fait aussi que leur mouvement est
circulaire. Tous sont placés sur la même droite ; mais comme cette
droite se meut circulairement, les points qui la forment ne
parcourent pas tous une ligne égale dans le même temps, bien qu'ils
soient tous également sur une ligne droite. Dans le cylindre, au
contraire, tous les cercles étant égaux et n'ayant qu'un même
centre, tous les points qui touchent le sol sont mus ensemble; et
les cercles ayant tous la même vitesse quand ils roulent, parce que
le cylindre est partout égal en roulant sur le sol et que tous les
points décrivent ensemble chacun leur cercle, il en résulte que
toutes les droites tracées sur la surface sont égales. Ils les ont
décrites en touchant la surface, étant tous égaux et tous animés de
la même vitesse. Ce sont des lignes droites qui sont tracées sur une
même ligne, qui se meut tout droit ; et le cylindre, en les suivant,
se meut lui-même en ligne droite. Il n'y a d'ailleurs aucune
différence à tirer le cylindre dans la position où il a tout d'abord
touché la surface, ou à le faire rouler sur lui- même. Ce sera
toujours par une ligne égale et pareille que les points du cylindre
toucheront la surface, soit qu'on le traîne, soit qu'il roule.
On retrouverait dans une foule
d'autres questions la même sagacité d'analyse que dans celles qu'on
vient d'exposer; par exemple, l'explication du jeu de la clepsydre,
selon qu'on ouvre ou qu'on bouche un de ses trous (section XVI, §8),
l'indication des effets que la lecture produit sur le sommeil, en le
provoquant ou en l'éloignant (section XVIII, § 7); la perte des
navires en pleine mer et par un beau temps (section XXIII, §5), la
couleur de la mer selon les régions et les côtes (section XXIII, §
6). Nous passons sur ces questions ; mais il faut encore nous
occuper de quelques-unes, afin qu'on puisse juger complètement de la
manière de l'auteur, qui ne se dément nulle part dans tout le cours
des Problèmes.
Section XXIX, § 13. Pourquoi le
partage des votes doit-il profiter à l'accusé plutôt qu'à
l'accusateur ? N'est-ce pas parce que l'accusé ne connaît qu'au
moment du procès l'énumération des griefs auxquels il doit répondre,
et se procurer des témoins pour se disculper ? Il n'est pas facile
de deviner les points sur lesquels on aura surtout à se préparer, et
les témoignages qu'il conviendra d'invoquer, afin de prouver son
innocence. L'accusateur, au contraire, a tout le temps qu'il veut
pour constituer son affaire, avant que la cause ne soit appelée.
Quand il paraît au tribunal, il a pu rassembler tous les moyens pour
soutenir son accusation. Le législateur, qui a bien vu toutes ces
infériorités du défendeur, met à son profit les doutes que les juges
peuvent avoir. On ne saurait que l'approuver. En effet, les accusés
étant toujours remplis de crainte, oublient bien des cboses qu'ils
pourraient dire ou faire en leur faveur, quoique ordinairement ils
courent plus de danger que les accusateurs. Si donc ils obtiennent,
malgré leurs omissions, l'égalité des suffrages, il est bien à
croire que, s'ils n'avaient rien omis, ils l'auraient emporté. On
peut ajouter que chacun, quand il est juge, préférerait acquitter un
innocent plutôt que d'avoir à condamner un coupable, par exemple
dans une affaire d'esclavage ou de meurtre. Les faits étant prouvés
dans ces deux cas, nous aimerions mieux acquitter, que de condamner,
si les faits étaient faux. Quand on a des doutes, on doit se décider
pour l'erreur la moins grave. Certainement il est regrettable de
reconnaître qu'un esclave est un homme libre ; mais il serait bien
plus fâcheux encore de déclarer qu'un homme libre est un esclave. De
plus, quand l'un des plaideurs réclame quelque chose et que l'autre
conteste, on ne donne pas sur-le-champ l'objet du litige à celui qui
le réclame ; mais on le laisse aux mains du possesseur, jusqu'au
prononcé du jugement. Il en doit être de même pour les juges ; et
quand les votes s'égalisent, sans que la balance penche d'aucun
côté, le législateur a voulu que les choses restassent dans le statu
quo. On peut compter parmi les fautes irréparables les peines
sévères qu'on prononce. Si, par exemple, on a condamné injustement
et sans le savoir, on ne peut plus rectifier la sentence, quand
l'occasion s'en présente. Mais si, au contraire, on a prononcé
l'acquittement sans forte raison, mais dans l'espérance que le
coupable s'amendera, est-ce une bien grande faute si les juges ont
épargné la mort à un tel homme ? S'il recommence plus tard, on peut
toujours le punir pour les deux méfaits commis par lui. On peut se
rendre coupable dans un accès de colère, par peur, par passion et
par une foule de motifs de ce genre, sans qu'il y ait de
préméditation. Mais quand on fait une réclamation injuste, c'est
presque toujours de propos délibéré qu'on agit. C'est par ce motif
que le législateur donne gain de cause au défendeur, quand l'égalité
des votes déclare tout à la fois que la réclamation du demandeur est
injuste, et que le défendeur a eu tort. Nous-mêmes, dans notre
intérieur, nous ne traitons pas autrement les gens qui nous servent.
Quand nous les soupçonnons de quelque faute, sans en avoir
d'ailleurs la certitude, nous ne sévissons pas sur-le-champ ; et
s'il n'y a pas quelque faute nouvelle de commise, nous laissons
tomber la chose. Mais celui qui calomnie a toujours prémédité son
méfait, tandis que sa victime n'a failli que sous le coup de la
nécessité, ou par ignorance, ou par tout autre motif aussi imprévu.
L'égalité des suffrages signifie, à moitié tout au moins, que le
demandeur a prémédité sa démarche, tandis que l'autre moitié décide
que, si le défendeur a été coupable, il l'a été sans intention. Du
moment qu'il est reconnu que l'un a fait une faute plus grave que
l'autre, le législateur a bien raison d'adjuger la cause au moins
coupable. Enfin, quand on sait que celui qu'on lèse injustement s'en
apercevra, et que cependant on lui fait tort, on est bien plus
coupable que si la victime ignore le mal qu'on lui cause. Or, quand
on élève une réclamation injuste, on ne peut pas croire que le
malheureux qu'on calomnie ignorera le tort qu'on lui fait, tandis
que bien souvent on commet une faute en croyant que la victime ne
s'en doutera pas. Concluons donc que le demandeur est en ceci plus
injuste que le défendeur.
Une autre discussion, aussi bien
conduite que toutes les précédentes, est relative au vol commis dans
un lieu publie, dans un établissement, dans un bain, dans un marché
(section XXIX, § H); ce vol est d'autant plus criminel que, dans ces
lieux, la nature même des choses laisse nécessairement plus de
latitude aux malfaiteurs. Cependant nous ne nous arrêtons pas à
cette question, non plus qu'à quelques autres qui sont tout aussi
remarquables, sur le mouvement simultané des yeux (section XXXI, §
7), ou sur l'usage hygiénique des frictions (section XXXVII, §3).
Nous terminerons cette appréciation générale des Problèmes par la
question sur la mélancolie. Cette question a une grande importance
historique, puisqu'elle a été citée formellement par Cicéron, à une
époque où les œuvres d'Aristote venaient d'être apportées à Rome et
mises en ordre par Andronicus de Rhodes.
(Section XXX, § 1). Pourquoi tous les
personnages qui sont devenus illustres, en philosophie, en
politique, en poésie, dans les arts, ont-ils généralement été
mélancoliques ? Et même pourquoi quelques-uns l'ont-ils été à ce
point d'être malades ? On le dit d'abord d'Hercule, dans les temps
héroïques ; et il semble bien qu'il a eu cette sorte de tempérament.
C'est ce qui a porté les Anciens à nommer, d'après lui, maladie
sacrée tous les désordres qu'amène l'épilepsie. On a conservé le
souvenir de sa fureur extraordinaire contre ses enfants, et contre
lui-même, quand il déchirait ses blessures de ses propres mains,
avant de disparaître sur l'Oéta. Ce sont là en effet des symptômes
fréquents dans les accès de bile noire. Lysandre, le Lacédémonien, a
été sujet aux mêmes souffrances, peu de temps avant sa mort. On cite
encore Ajax et Bellérophon, l'un qui devint tout à fait fou ;
l'autre, qui ne recherchait que les déserts, « se dévorant le cœur
loin de la société des humains », comme dit Homère. Bien d'autres
héros, si l'on en croit la tradition, ont éprouvé un mal analogue,
ainsi que, dans des temps plus rapprochés, Empédocle, Platon,
Socrate, et une foule d'autres personnages bien connus. La plupart
des poètes ont été non moins mélancoliques ; el l'on en cite un bon
nombre qui ont égale- ment souffert des troubles que ce tempérament
détermine dans la santé. Chez les poètes, leur nature personnelle
incline à ces affections. Tous les mélancoliques, presque sans
exception, ont cette disposition naturelle. Quelle en est la cause ?
Pour nous faire mieux comprendre nous nous servirons d'une
comparaison. Le vin, quand on en boit une grande quantité, nous met
surtout dans l'état où nous supposons les gens dits mélancoliques;
il modifie nos caractères de cent façons, colère, attendrissement
qui fait aimer tout le monde, sympathie universelle, effronterie,
etc, Le miel, le lait, et l'eau, et tant d'autres aliments du même
genre n'ont pas du tout cette action. On peut se convaincre que le
vin opère toutes ces transformations, en voyant combien il peut
changer les gens qui contractent l'habitude de s'enivrer. Si on les
voit à jeun, ils sont de sang-froid et taciturnes. Pour peu qu'ils
boivent un peu plus qu'il ne faut, les voilà d'une loquacité que
rien n'arrête. En absorbant encore plus de vin, ils se mettent à
déclamer ; ils sont pleins d'assurance; et en se laissant aller
encore davantage, ils sont prêts à tout faire et à tout risquer.
Quelques gorgées de plus les portent à insulter tout le monde, et
les rendent fous. Enfin, un excès extrême les fait tomber dans
l'idiotisme, comme les malades atteints d'épilepsie dès leur
enfance, ou ceux qui se livrent sans raison à des idées
mélancoliques. De même donc qu'une personne peut changer de manière
d'être en buvant trop de vin, de même il y a des hommes qui, chacun
en particulier, ont un tempérament de cette espèce. Ce que l'ivresse
produit chez les uns, c'est la nature qui le produit chez les
autres. L'un est bavard ; l'autre est agité; tel autre a les larmes
faciles; c'est la nature qui les a faits ce qu'ils sont. Aussi,
Homère met-il ces paroles dans la bouche du Cyclope: «Je me mets à
pleurer, dit-on, quand je suis ivre. » Les uns alors sont pris d'une
pitié subite ; d'autres sont grossiers; d'autres, d'un silence
morne. D'autres s'arrêtent tout à coup de parler, et c'est ce qu'on
remarque surtout chez les mélancoliques, qui ont des extases. Dans
ces effusions, l'ivrogne va jusqu'à embrasser sur la bouche des gens
qu'il n'oserait jamais embrasser, quand il est à jeun, soit à cause
de sa position, soit à cause de leur âge.
Mais le vin ne donne quelque chose de
particulier aux gens ivres que pour bien peu de temps, tandis que la
nature vous fait ce que vous êtes pour la vie entière. C'est elle
qui fait les braves, les silencieux, les bienveillants, les lâches.
L'influence du vin et de la nature est donc la même sur les
dispositions de chacun de nous. C'est toujours de part et d'autre
une chaleur qui se thésaurise dans les organes. Le liquide absorbé,
et le tempérament que donne la bile noire, sont des spiritueux.
Aussi les maladies qui affectent la respiration et les hypochondres,
sont-elles qualifiées de mélancoliques par les médecins. De là vient
encore que le vin pousse les gens aux plaisirs de l'amour. La
mythologie a réuni bien justement Bacchus et Aphrodite; et presque
tous les mélancoliques sont lascifs et débauchés. Comme la chaleur
que la nature met dans les mélancoliques est toute voisine du siège
de l'intelligence, les mélancoliques sont exposés aux maladies qui
viennent de la folie ou de l'enthousiasme délirant. Les Sibylles,
les Bacchantes, et tous ceux qui sont inspirés par les Dieux ne sont
pas précisément malades; mais c'est un tempérament qui leur est
naturel. Maracus, le Syracusain, n'était jamais meilleur poète que
quand il était hors de lui. Lorsque la chaleur se précipite avec
excès vers le centre, les gens deviennent mélancoliques; mais ils
sont plus intelligents, et, sous bien des rapports, ils sont
supérieurs au reste des hommes, dans la science, dans l'art, dans le
gouvernement des affaires publiques. Ce penchant à la mélancolie
produit de grandes différences devant les dangers; et quelquefois
alors on ne se ressemble plus à soi-même, sous le coup de la peur.
Le tempérament mélancolique, qui est tout ensemble très chaud et
très froid, cause toutes ces alternatives. Tantôt froid comme de
l'eau, tantôt chaud comme le feu, il fait un lâche devant le péril,
si, à ce moment, c'est le froid qui domine. Il ouvre la porte à la
peur; et la peur refroidit, puisqu'elle fait trembler. Avec un peu
plus de chaleur, la peur vous laisse en un état moyen ; et alors,
bien que le danger soit toujours le même, on y reste insensible. On
peut donc conclure que l'action de la bile noire étant très
variable, l'humeur des mélancoliques ne l'est pas moins. Elle nous
change tout autant que le vin peut le faire, quand on en prend avec
excès. En résumé, on peut dire aussi que tous les hommes
mélancoliques sont des hommes distingués, non point par suite d'une
maladie, mais par le tempérament que la nature leur a donné.
Ces longues analyses doivent bien
montrer quelle est la manière de l'auteur, ce que sont les questions
qu'il aborde, comment il les traite, et quelle est la valeur des
discussions auxquelles il se livre. Nous trouvons, pour notre part,
que cette valeur est considérable ; et les spécimens que nous venons
de rappeler, et que nous aurions pu multiplier encore, sont un
témoignage frappant. Tout cela appartient à la plus haute Antiquité
; et l'esprit grec, au temps d'Alexandre, a pu faire de semblables
recherches, sous cette forme, qui est très scientifique, et avec une
sagacité à laquelle ses autres chefs-d'œuvre ont dû nous habituer.
Ici, l'on peut surprendre le génie hellénique dans ses procédés les
plus intimes et les plus efficaces. Un fait est constaté ; on
l'expose et l'on se demande quelle en est la cause et l'explication.
En répétant ces interrogations et ces réponses, provisoires les unes
et les autres, on accumule une multitude indéfinie d'observations,
auxquelles s'appliquent des solutions en nombre égal. Ce sont des
matériaux successivement recueillis, qu'on classe d'abord d'après
leurs affinités, et qui ne sont que des pierres d'attente pour un
édifice plus régulier, ou plutôt pour des édifices qu'on se propose
d'élever successivement, sans se préoccuper du temps énorme que
chacun d'eux exigerait. Quel que soit un avenir dont on ne dispose
pas, on a soin de ne pas perdre tant de pensées diverses et
précieuses. On les consigne sur-le-champ, sauf à les employer
ultérieurement, si on le peut.
Voilà l'idée générale sous laquelle se
présentent les Problèmes. Quelle est l'authenticité de ce recueil ?
C'est là ce qu'il nous reste à éclaircir, dans la mesure ou il est
possible de le faire, à la distance où nous sommes, et d'après les
documents que nous possédons. D'abord, il faut savoir que le sens du
mot de Problème en grec répond complètement au sens du mot que notre
langue reproduit. Etymologiquement Problème signifie simplement une
chose mise en avant d'une autre; et c'est si bien la signification
première qu'un Problème, dans la langue de la stratégie grecque, est
un ouvrage avancé destiné à protéger des opérations militaires.
Aristote a plus d'une fois pris le mot de Problème dans ce premier
sens, et l'on en trouve plus d'un exemple dans les Problèmes
eux-mêmes. Section I, § 34, il est rappelé que, dans certains cas
morbides, le médecin peut cire embarrassé de savoir quelles sont les
parties qu'il faut couper, ou celles qu'il faut cautériser ; et on
lui recommande de ne brûler que les larges excroissances et celles
qui ont beaucoup de « relief ». Dans ce passage, on le voit, c'est
le sens propre du mot Problème. Un second sens qui est de beaucoup
le plus ordinaire, c'est celui de question, de proposition, qu'on
avance et qu'on veut discuter. Aristote a très fréquemment employé
ce mot dans ses ouvrages de logique. En langue française, notre mot
de Question est un équivalent très exact, tandis que le mot de
Problème, quoique emprunté de la langue grecque, a une nuance un peu
différente, qui appartient surtout aux mathématiques. A la logique,
on peut joindre les Problèmes eux-mêmes, section III, § 22.
Quant au titre du recueil des
Problèmes, Aristote est naturellement le premier de tous les
témoins. II l'a cité au moins sept fois dans ses autres ouvrages.
Nous relevons toutes ces citations une à une.
Météorologie, Livre II, ch. 6, § 1 ;
Edition Firmin-Didot, III, 588. Aristote se promet d'exposer la
théorie des vents, et il ajoute : « Nous traiterons en outre de tous
les détails qui n'ont pu être exposés dans les Problèmes
particuliers. » Cette mention indique très clairement la section
XXVI de nos Problèmes, qui est en effet consacrée à des détails
spéciaux sur chacun des vents. On a élevé parfois des doutes sur
cette expression de «Particuliers»; mais nous ne partageons pas ces
scrupules exagérés, et nous reconnaissons là une désignation précise
des Problèmes, divisés, comme ils le sont, en explications
spéciales. Le chapitre sur les vents ne fait pas exception, et ce
sont en effet des questions très particulières qui sont traitées
successivement, et chacune à part.
Une seconde citation, qui se rencontre
également dans la Météorologie, est moins nette. Aristote vient de
dire que les parasites ne se forment jamais dans l'estomac de
l'animal, mais qu'ils se produisent dans la partie inférieure des
entrailles, et il ajoute : « C'est dans d'autres ouvrages que nous
avons dit quelle est la cause de cette putréfaction ». Alexandre d'Aphrodisée
affirme, dans son commentaire, qu'Aristote a voulu désigner les
Problèmes par ces mots. « D'autres ouvrages ». Ce n'est pas
absolument démontré, bien qu'Alexandre d'Aphrodisée fut mieux placé
que personne pour en juger. On trouve bien dans les Problèmes,
section XX, § 12, un détail qui peut correspondre à ce passage de la
Météorologie, livre IV, ch. 3, § 25, édition Firmin-Didot, p. 614,
lign. 3 ; mais ce détail est si concis qu'il ne semble pas très
probable qu'Aristote ait voulu y faire allusion.
Dans les Opuscules, traité de la
Mémoire et de la réminiscence, ch. 2, § 2, édition de Firmin-Didot,
p. 469, lig. 30, Aristote s'en réfère pour la réminiscence à ses «
Discours épichérématiques », en d'autres termes ses Essais ; et
Michel d'Ephèse croit qu'il s'agit des Problèmes, qui seraient
désignés sous cette locution. Mais comme il n'y a rien dans les
Problèmes qui soit relatif à la réminiscence et à la mémoire, il est
probable que Michel d'Ephèse s'est trompé.
Le traité du Sommeil et de la veille,
ch. 2, § 14, p. 160, et édition de Firmin-Didot, t. III, p. bO4, a
une citation un peu plus directe, mais qui n'est pas encore
positive. Aristote rappelle qu'il a expliqué dans ses «
Problématiques » comment il se fait qu'on se souvient des songes
qu'on a eus durant le sommeil, bien qu'on oublie souvent les actes
faits durant la veille. On a voulu voir dans les Problématiques nos
Problèmes ; mais ici non plus, nos Problèmes ne nous offrent rien de
pareil, ni même d'analogue.
Autre citation, qui n'est pas plus
concordante, traité de la Jeunesse et de la vieillesse, ch. o, § 6,
p. 326, édition Firmin-Didot, t. III, p. 535. Aristote indique
comment il faut, pour conserver longtemps le feu, le couvrir de
cendre ; et il renvoie à ses Problèmes, pour la cause spéciale qui
fait que le feu s'éteint si on le laisse libre, et qu'il se conserve
bien plus longtemps, en couvant sous la cendre dont on l'a
recouvert. Les Problèmes sont textuellement nommés dans ce passage ;
mais les nôtres sont muets sur ce phénomène bien connu, et c'est en
vain qu'on a cru y trouver une allusion dans la section I, § 55.
Les citations sont beaucoup plus
satisfaisantes dans les deux grands traités des Parties des animaux,
et de la Génération des animaux.
Parties des animaux, livre III, ch.
15, §2, p. Il6, et édition Firmin-Didot, t. III, p. 273, Aristote
annonce qu'il a expliqué dans les Problèmes comment la présure se
forme dans celui des estomacs des ruminants qu'on appelle le
Hérisson. Les Problèmes sont expressément nommés ; mais ils ne
contiennent actuellement rien sur le hérisson des ruminants.
Le traité de la Génération des animaux
fournit, à lui seul, trois références, où les Problèmes sont nommés
également. La première dans le livre II, ch. 10, § 3, p. Il6, et
édition Firmin-Didot, tome III, p. 368, sur la dureté de l'alliage
du cuivre et de l'étain ; la seconde, livre IV, ch. 4, § 17, p. 296,
et édition Firmin-Didot, tome III, p. 400, sur les variations de
dates dans la naissance de l'homme ; et la troisième, livre IV, ch.
7, § 2, p. 322, édition Firmin-Didot, tome III, p. 410, où Aristote
rappelle qu'il a expliqué dans ses Problèmes la cause de la môle
chez les femmes. Aucun de ces trois sujets n'a laissé de trace dans
nos Problèmes actuels.
Enfin quelques commentateurs ont cru
reconnaître les Problèmes dans les Encycliques de la Morale à
Nicomaque, livre I, ch. 2, § 13, p. 14, et édition Firmin-Didot,
tome II, p. 4, ligne 2; mais l'hypothèse est d'autant moins
soutenable que les Encycliques étaient en deux livres, si l'on en
croit les catalogues de Diogène-Laërce et d'Hésychius, nos 122 et
nos Il3.
En résumé, aucune des citations
personnelles d'Aristote ne se rapporte distinctement aux Problèmes,
tels que nous les avons. Mais si ces références n'y sont pas
applicables, il n'en reste pas moins certain qu'Aristote avait
composé un ouvrage qui portait ce nom. D'où viennent donc ces
inexactitudes ? On les a quelquefois attribuées à Andronicus de
Rhodes. qui se les serait permises, comme complément de la
classification qu'il essayait d'établir dans les nombreux écrits du
philosophe. Ce sont peut-être aussi des interpolations, imaginées à
bonne intention par des copistes postérieurs. Quoi qu'il en puisse
être, on a été amené à penser qu'Aristote avait composé un recueil
de Problèmes beaucoup plus considérable, dont le nôtre ne serait
qu'un extrait.
Après le témoignage d'Aristote, c'est
celui de son disciple Théophraste qu'il faudrait invoquer. Mais on
n'est pas moins embarrassé, bien que par des motifs différents.
Théophraste n'a jamais cité les Problèmes ; mais, ainsi que nous
l'avons dit plus haut, des Problèmes entiers se reproduisent mot à
mot dans quelques traités de Théophraste. Quand ce n'est pas
l'expression qui est identique, c'est la pensée ; et comme cette
coïncidence se répète un très grand nombre de fois, il est de la
dernière évidence qu'il y a plagiat. Tout ce qui reste à décider,
c'est de quel côté il est. Est-ce l'élève qui a copié le maître ? A
première vue, on peut trouver que c'est très probable ; mais d'autre
part, il paraît, dans bien des théories, que l'originalité
appartient à Théophraste. Entre ces deux alternatives, on ne peut se
décider que si de nouveaux documents nous sont fournis par quelque
heureux hasard. Mais, selon toute apparence, ils nous manqueront
toujours ; et la solution restera impossible pour nos successeurs
comme pour nous. Entre Théophraste et Cicéron, deux siècles environ
s'écoulent, où les Problèmes ne sont jamais mentionnés. Mais Cicéron
nous apporte un témoignage irrécusable. Il est à Tuscu- lum, dans sa
maison de campagne, où il est entouré d'amis choisis. Il est arrivé
à une époque de sa vie où déjà sa carrière d'orateur est faite ; et
bien qu'il ait obtenu au barreau les succès les plus éclatants et
les plus mérités, il veut aborder des matières plus fécondes et plus
sublimes. Ce sont des questions de philosophie qu'il traitera dans
les heures de loisir qu'il s'est créées; et la première question
qu'il propose à ses convives, non moins curieux que lui de ces
hautes spéculations, c'est celle du mépris de la mort. Il soutient
avec Platon et Socrate que l'âme est immortelle. Il vante les
admirables facultés dont l'âme est douée; mais il sait aussi qu'elle
est jointe à un corps ; et à ce propos, il cite l'opinion
d'Aristote, qui a dit que la mélancolie est le partage de tous les
hommes de génie. Ainsi qu'on l'a vu dans une de nos analyses, c'est
précisément le sujet qu'Aristote a étudié dans la section XXX, § I,
des Problèmes. La référence est donc parfaitement exacte. Cicéron a
sous les yeux les Problèmes d'Aristote, bien qu'il ne les désigne
pas par leur titre propre. Mais si nous pouvions éprouver en ceci le
moindre doute, il n'y aurait, pour le dissiper, qu'à se rappeler ce
qu'ajoute Cicéron : « Aristote confirme sa remarque par divers
exemples, et regardant le fait comme certain, il en donne la
raison». N'est-ce pas le résumé fidèle de la discussion d'Aristote ?
Après avoir énoncé le principe général de sa théorie, ne l'appuie-
t-il pas par les exemples d'Hercule et de Bellérophon, dans la
mythologie ; d'Ajax, dans les temps héroïques ; et dans des temps
plus rapprochés, de Lysandre, le Spartiate, d'Empédocle, de Socrate
et de Platon parmi les philosophes ? Que pourrait-on demander de
plus ? Et Cicéron, s'il n'a pas en main tout notre recueil des
Problèmes, en a du moins cette partie, qu'il a lue comme nous
pouvons la lire aujourd'hui.
C'est également à cette section des
Problèmes et à cette théorie approuvée par Cicéron, que Sénèque fait
allusion à la fin de son traité de la Tranquillité de l'âme. Tout en
vantant le calme de l'intelligence et de la raison, Sénèque ne
proscrit pas tout à fait les excitations extérieures, qui, en
agissant sur le corps, doivent communiquer à nos facultés plus de
vigueur. Les voyages, le changement de climat, un léger excès dans
le boire et le manger, l'ivresse même pratiquée dans une certaine
mesure, sont des moyens de réveiller notre activité intellectuelle.
Pour soutenir cette thèse, Sénèque en appelle, un peu confusément, à
quelques personnages dont l'autorité n'est pas à dédaigner, Solon,
Arcésilas, Anacréon, Caton, Platon ; il en arrive à Aristote, qui a
dit : « Qu'il n'est point de grand génie qui n'ait son coin de
folie». Evidemment, c'est de la théorie de la mélancolie qu'il
s'agit; et le résumé sommaire que Sénèque en donne, est au fond très
exact. Comme Cicéron, Sénèque connaît donc les Problèmes, et il
semble les goûter autant que lui.
La parole de Cicéron et de Sénèque n'a
pas besoin d'appui étranger. Mais après eux, les témoignages
abondent, aussi décisifs que nombreux : d'abord Pline, vers la fin
du Ier siècle de notre ère, et ensuite Plutarque et Aulu-Gelle, dans
le second ou au début du troisième, et Diogène Laërce, qui est
presque leur contemporain.
Pline, Histoire naturelle, livre
XVIII, ch. 34, (77, édition et traduction Littré, p. 703), en
parlant de l'action du vent sur les végétaux et sur le bétail, cite
l'opinion d'Aristote (vir immensae subtilitatis) relativement à
l'influence du vent que les Grecs nomment le Caecias. Il ne
pousse pas sa citation plus loin ; mais, c'est une allusion très
claire à la section XXVI des Problèmes, §§ 1 et 31, où Aristote
décrit l'action spéciale du Cœcias. Ce que Pline ajoute sur
l'opposition des vents du Nord et du Midi est puisé à la même
source, bien qu'il ne le dise pas.
Plutarque, qui vit de l'an 50 à l'an
120 après J.-C., a fait tant de citations des Problèmes qu'avec lui
le seul embarras est de choisir.
D'abord, dans la Vie de Lysandre (ch.
2, § 6, édition de Firmin-Didot, p. 518), il rappelle qu'Aristote a
remarqué que tous les grands hommes ont été de tempérament
mélancolique : par exemple, Socrate, Platon, Hercule; et, en parlant
de Lysandre spécialement, Aristote a dit que ce personnage n'avait
pas toujours été mélancolique, mais qu'il l'était devenu dans sa
vieillesse. C'est la théorie de notre section XXX, § 1, que nous
avons déjà vue admirée par Cicéron et Sénèque.
Mais c'est surtout dans le traité des
Propos de table (Symposiaques) que Plutarque allègue fréquemment
l'autorité d'Aristote. Il y agite des questions toutes semblables à
celles de nos Problèmes ; il les appelle de ce même nom. Les
convives auxquels il prête ses dialogues sont gens fort instruits,
qui ont beaucoup de lecture. Quand ils citent Aristote, on peut être
assuré que c'est de première main et fort exactement.
Symposiaques, livre I, question 9, § §
1 et 2, édition Firmin-Didot, Œuvres morales, tome II, p. 759, ligne
20, un des convives demande à l'autre pourquoi Homère nous
représente l'aimable Nausicaa lavant le linge de sa famille dans la
rivière, au lieu de le laver dans la mer, qui cependant est plus
près. Théon, le convive ainsi interrogé, répond qu'Aristote a dès
longtemps résolu cette difficulté, en faisant remarquer que l'eau de
mer contient des parties terreuses, qui la rendent plus lourde, en
même temps qu'elles causent sa salure. De là vient qu'on nage dans
la mer plus aisément que dans l'eau douce, et que les navires y
enfoncent moins, même avec des charges plus fortes. L'eau douce au
contraire, étant plus légère, cède davantage à la pesanteur des
corps qui y sont plongés. Mais sa ténuité même fait qu'elle pénètre
les étoffes et qu'elle les nettoie mieux. Plutarque conteste en
partie cette explication. Mais la controverse nous importe peu,
puisqu'en effet c'est bien le résumé de l'opinion d'Aristote,
section XXIII, §§3, 10, 13, lu, 27, 32, 38. PIutarque a donc lu
cette partie des Problèmes, bien qu'il ne les nomme pas.
Symposiaques, ibid. L'eau de mer,
selon Aristote, est quelque chose de graisseux, comme le sel qu'on
en tire. De là vient que les lampes brûlent mieux quand on y met
quelques grains de sel, et que l'eau de mer, quand on en répand
quelques gouttes sur le feu, s'enflamme avec lui, parce qu'elle est,
de toutes les eaux, celle qui brûle le plus facilement. On peut voir
les mêmes idées, d'ailleurs plus ou moins justes, dans les
Problèmes, section XXIII, §§ 7 et 15.
Symposiaques, ibid., et quelques
lignes plus bas, il est dit qu'Aristote a remarqué que, quand on se
baigne dans la mer, on se sèche au soleil plus rapidement que quand
on sort d'un bain d'eau douce. C'est bien la pensée exprimée dans
les Problèmes, section XXIII, §10.
Symposiaques, livre III, question 3,
il est parlé d'un traité d'Aristote sur l'ivresse, où il aurait
avancé que les vieillards s'enivrent facilement, ainsi que les
femmes. Nous ne connaissons pas ce traité spécial; mais c'est
peut-être la section III des Problèmes, consacrée tout entière à
l'ivresse et à ses effets. Il n'y est pas question des femmes ; il y
est fait allusion aux vieillards, § o et § 26. A cette première
citation, le convive qui l'a faite en joint une seconde. Selon lui,
Aristote assure qu'on s'enivre moins en buvant tout d'un trait et
sans reprendre haleine. C'est en effet ce qu'on trouve dans les
Problèmes, section III, §§ 12, 21, 23.
Symposiaques, livre III, question 5,
un des convives de Plutarque s'étonne qu'on puisse soutenir que le
vin est froid par sa nature propre. Plutarque est pour l'affirmative
; et il emprunte cette opinion à Aristote, et même à Epicure. Son
ami ne se rend pas; et Plutarque, pour le convaincre, est obligé de
développer tous les arguments qu'on peut tirer des effets de
refroidissement que le vin produit chez les ivrognes. Toute sa
discussion est prise de celle d'Aristote, Problèmes, section III.
Seulement Plutarque ne l'a peut-être pas très bien compris. D'après
l'auteur des Problèmes, le vin n'est pas directement froid ; au
contraire, il est naturellement chaud ; mais sa chaleur éteint la
chaleur vitale dans le corps des ivrognes; et c'est en ce sens qu'on
peut dire qu'il est froid, parce que, la chaleur vitale étant
détruite, c'est le froid qui y succède; et le refroidissement,
poussé trop loin, pourrait être mortel.
Symposiaques, livre Il1, question 7,
édition Firmin-Didot, p. 796. A Athènes, on avait la coutume
d'offrir aux Dieux les prémices du vin doux. A cette occasion, le
père de Plu- larque célèbre le sacrifice d'usage; et après le
souper, il propose aux jeunes camarades de son fils de discuter
cette question : « Pourquoi le vin doux n'enivre-t-il point ? » On
s'en rapporte à l'avis d'Aristote, qui rend compte du phénomène par
la pesanteur du vin doux et par la quantité d'eau qu'il renferme.
C'est précisément la raison que donnent les Problèmes, section III,
§ 18.
Symposiaques, livre III, question 8.
L'entretien continue sur les effets de l'ivresse; et le père de
Plutarque se demande pourquoi une demi-ivresse fait déraisonner plus
qu'une ivresse complète ; il ne trouve pas qu'Aristote ait bien
expliqué ce singulier phénomène. Il a dit que, quand on est à jeun,
on voit les choses telles qu'elles sont et qu'on raisonne bien ; et
que, quand on est abruti par l'ivresse, on a perdu tout usage de
l'intelligence, tandis que quand on est à moitié ivre (en grec,
Ἀκροθώραξ), il ne reste que l'imagination dans toute sa vigueur.
Mais la raison est déjà troublée ; elle juge encore, mais elle juge
mal ; c'est la fantaisie seule qui conduit les gens ainsi grisés. Ce
sont là les expressions mêmes d'Aristote dans les Problèmes, section
Il1, §§ 2 et 27. Le père de Plutarque n'approuve pas tout à fait
cette démonstration, que son fils adopte complètement.
Symposiaques, livre III, question 10,
§ 18, édition Firmin-Didot, p. 801. Un convive raconte qu'ayant reçu
de la chasse d'un ami une pièce de sanglier, il avait laissé le
morceau exposé aux rayons de la lune, et que la viande s'était plus
gâtée qu'aux rayons du soleil. En recherchant la cause de ce
phénomène, Plutarque cite Aristote, qui affirme que les plaies
faites par l'airain se guérissent plus vite que les plaies faites
par le fer. C'est précisément ce que disent nos Problèmes, section
I, § 34.
Dans un autre entretien (Symposiaques,
livre VI, question 8, § 3, édition Firmin-Didot, p. 84o), Plutarque
rappelle cette assertion d'Aristote que, quand au dehors il y a un
refroidissement extrême, les parties internes éprouvent une chaleur
considérable et une liquéfaction abondante. La citation est exacte,
comme on le voit par les Problèmes, section II, § 5, et section XIV,
§ 16.
Symposiaques, livre VII, question 5, §
2, édition Firmin-Didot, p. 859, Callistrate discute sur les effets
de la musique, et il croit, contrairement à l'opinion d'Aristote,
qu'on peut être intempérant par les organes de l'ouïe et de la vue,
comme on l'est par les organes du toucher et du goût. Aristote n'est
pas absolument dans le vrai quand il borne à ces deux derniers sens
l'idée d'intempérance. Problèmes, section XXVIII, §§ 2 et 7.
Symposiaques, livre VIII, question 3,
édition Firmin-Didot, p. 878 et 879. Plutarque est à souper avec
quelques amis chez Ammonius, préteur à Athènes, quand un bruit
violent vient à retentir dans toute la maison. Ce sont des gens qui
réclament à grands cris l'intervention du préteur dans une affaire
qui les intéresse. Quand le tapage est apaisé, les convives se
demandent comment il se fait qu'on entende si bien au dedans le
bruit extérieur, tandis que du dehors on a tant de peine à entendre
les voix parties du dedans. Ammonius cite l'avis d'Aristote, qu'il
approuve; et à la suite, il discute deux autres questions, l'une sur
la différence des sons dans la nuit et dans le jour, l'autre sur la
sonorité des vases vides ou pleins. Tous ces phénomènes sont étudiés
formellement dans nos Problèmes, section XI, §§ 8, 33 et 37.
Symposiaques, livre VIII, question 10,
§4, édition Firmin-Didot, p. 895, ligne 36, Plutarque et ses fils,
avec quelques amis, entre autres Favorinus, sont réunis aux
Thermopyles, sans doute pour y célébrer une fête nationale. Un d'eux
a sur lui l'ouvrage d'Aristote intitulé : Questions naturelles. On
en lit plusieurs passages, dont l'un concerne l'effet que produisent
les fruits sur la santé, en provoquant des rêves, « pendant les mois
de la chute des feuilles ». Aristote supposait que les mauvais
rêves, à cette époque, venaient de l'usage immodéré qu'on faisait
alors des fruits de toute espèce. Si, dans ce passage, les Problèmes
sont expressément nommés, ils ne nous fournissent pas très
précisément, dans l'état où nous les avons, la pensée que Plutarque
en tire. Pourtant, dans la section XXII, il est question de la
digestion des fruits, qui semblent fort lourds pour certains
estomacs.
Voilà, de compte fait, douze citations
des Problèmes dans les Symposiaques, et l'on pourrait en découvrir
d'autres dans ce même traité. Dans des traités de Plutarque
différents, on en trouve encore trois, qu'il ne faut pas négliger,
quelque satisfaisantes que soient les précédentes.
Dans le traité d'Isis et d'Osiris, ch.
79, édition Firmin-Didot, page 468, l'auteur cite Aristote sur
l'action des parfums exhalés par les fleurs et par les prairies, qui
est aussi salubre qu'agréable; elle contribue à la santé au moins
autant qu'au plaisir. La section Xll de nos Problèmes est consacrée
à l'étude des bonnes odeurs. L'opinion que Plutarque attribue au
philosophe ne s'y rencontre pas sous la même forme ; mais le passage
de Plutarque peut sembler en être un résumé assez exact.
Dans le traité des Oracles de la
Pythie, ch. 3, édition Firmin-Didot, p. 483, il est parlé de
l'opinion d'Aristote, relativement à l'effet que l'huile produit sur
la rouille. Cette citation ne se rapporte pas à nos Problèmes, mais
aux « Problèmes inédits », publiés par M. Bussemaker, livre III, ch.
17, édition Firmin-Didot, tome IV, p. 328.
Dans le traité de la Répression de la
colère, ch. 3, édition Firmin-Didot, p. 551, ligne 3, on rappelle
qu'Aristote a dit que la colère cède à une aspersion d'eau froide ;
et cette assertion se retrouve effectivement dans nos Problèmes,
section VIII, § 20.
En résumé, Plutarque a nos Problèmes;
mais il a peut-être aussi, sous la même désignation, un autre
ouvrage que le nôtre.
Après Plutarque, Aulu-Gelle, son
contemporain, connaît les Proverbes d'Aristote tout comme nous; et
s'il les cite moins souvent, ses indications ont l'avantage d'être
beaucoup plus précises. Aulu-Gelle, qui vivait sous Adrien et
Antonin le Pieux et qui mourut dans les premières années du règne de
Marc-Aurèle, était un de ces Romains qui cherchaient à s'approprier
tous les trésors de la culture hellénique. Fort jeune encore, sa
famille l'avait envoyé compléter son éducation aux écoles d'Athènes,
et il semble bien qu'il y est retourné plus d'une fois. Dans une
préface, qu'un auteur moderne ne désavouerait pas, il nous apprend
comment il a composé son recueil, et pourquoi il lui a donné le
titre de Nuits Attiques. C'est sur le sol de l'Attique et pendant
les longues nuits d'hiver qu'il a composé son recueil, avec les
remarques de tout genre que lui fournissaient ses lectures. Il a la
passion de la grammaire, de la rhétorique et de la jurisprudence. Il
réunit ses notes en vingt livres, où il s'inquiète peu de l'ordre et
de l'affinité des matières. En bon père de famille, il a pensé à
préparer à ses enfants des sujets de délassements, pour les loisirs
que les affaires pourront leur laisser. Aulu-Gelle est un lettré,
qui ne manque pas de goût et qui est fort instruit. Quand il parle
d'Aristote et qu'il le traduit, on voit qu'il le comprend à
merveille, dans le texte que ses maîtres d'Athènes lui ont
communiqué. On peut donc s'en fier à lui et à eux.
Nuits Attiques, livre I, ch. 11.
Aulu-Gelle rappelle, d'après Thucydide, que les Lacédémoniens
avaient l'habitude de marcher au combat au son des flutes et non des
trompettes; et, à ce propos, il cite l'opinion d'Aristote, qui, dans
ses Livres des Problèmes, « in libris Problematum, » a expliqué
cette vieille coutume d'une marche si intrépide et si noble, et qui
a dit en quelques mots : « Pourquoi marchent-ils au combat au son de
la flûte ? C'est pour reconnaître les lâches qui n'osent pas
avancer. » Et Aulu-Gelle cite le texte grec, sans le traduire. Comme
ce passage ne se retrouve pas dans nos Problèmes, il est bien
probable que l'édition qu'avait l'auteur latin n'était pas tout à
fait semblable à la noire. C'est une remarque qu'on a déjà dû faire
pour une citation de Plutarque. Mais dans Aulu-Gelle, cette
différence n'a pas de conséquence; et il va nous présenter plusieurs
citations qui sont parfaitement conformes à notre texte actuel.
Nuits Attiques, livre II, ch. 22.
Favorinus, à qui Aulu-Gelle cède la parole, expose une théorie
complète des vents, et il rappelle ce qu'Aristote a dit du Cœcias,
vent qui souffle de telle façon qu'après avoir poussé quelque peu
les nuages, il les attire de nouveau sur lui. C'est précisément ce
que disent aussi nos Problèmes, au § 1 de la section XXVI, et ibid.,
§ 31. Favorinus répète, comme Aristote, le proverbe populaire auquel
cette marche récurrente du Cœcias avait donné naissance.
Nuits Attiques, livre II, ch. 30.
Selon Aulu-Gelle, les physiciens les plus savants ont observé que,
lorsque l'Auster souffle, la mer devient verdâtre ou bleu foncé,
tandis que, sous le souffle de l'Aquilon, la couleur s'obscurcit et
tourne au noir. Aulu-Gelle ajoute en son propre nom : « Je crois
avoir trouvé la cause de ce phénomène dans les livres des Problèmes
d'Aristote. Pourquoi, dit-il, quand l'Auster vient à souffler, la
mer est-elle bleu foncé, et est-elle plus noire et plus obscure
quand c'est l'Aquilon ? Est-ce parce que l'Aquilon agite moins les
flots ? Car plus un objet est immobile, plus il semble noir. » C'est
la traduction fort exacte du § 39 de la section XXVI.
Mais c'est particulièrement dans le
livre XIX des Nuits Attiques qu'Aulu-Gelle multiplie ses citations
des Problèmes.
Nuits Attiques, livre XIX, § 2,
l'auteur, dissertant sur les plaisirs des sens, louables quand ils
sont modérés, honteux et méprisables quand ils ne le sont pas,
s'attache aux deux sens du goût et du toucher, dont les excès sont
réprouvés par les sages. Il s'autorise, pour cette théorie, du
jugement d'Aristote, persuadé que les conseils d'un si illustre
philosophe détourneront bien des gens de ces voluptés infâmes. Il
cite en grec un passage de douze ou quinze lignes qui est
textuellement dans nos Problèmes, section XXV111, § 7. On ne saurait
désirer un témoignage plus complet ni plus frappant.
Nuits Attiques, livre XIX, ch. 4. «
Aristote, dit Aulu-Gelle, a composé un ouvrage intitulé Problèmes
physiques (Problemata physica), qui abonde en observations aussi
intéressantes que variées. Il y recherche, par exemple, pourquoi une
frayeur subite et violente cause presque toujours et incontinent la
diarrhée, et pourquoi, après être resté longtemps devant le feu, on
sent le besoin d'uriner. » C'est bien ce qu'Aristote dit dans nos
Problèmes, section XXVII, § 10.
Au chapitre suivant, 5 du livre XIX
des Nuits Attiques, Aulu-Gelle raconte qu'il s'était retiré pendant
les grandes chaleurs de l'été chez un de ses riches amis à Tibur. Au
repas, on servait de l'eau de neige, pour mieux rafraîchir les
convives, qui ne se faisaient pas faute d'en boire largement. Un
d'eux, fort instruit et admirateur passionné d'Aristote, essayait de
les arrêter, parce que, selon les médecins les plus expérimentés et
selon Aristote, « qui savait tout ce qu'un homme peut savoir »,
c'est une boisson malsaine. Les convives n'écoutent pas le sermon ;
mais le péripatéticien va chercher un exemplaire d'Aristote à la
bibliothèque de Tibur, qui était dans le temple d'Hercule; et il lit
un passage où l'eau de neige est absolument condamnée par le
philosophe, comme nuisible à la santé. Aulu-Gelle cite encore
textuellement ce passage, en le traduisant. Mais ce passage ne se
retrouve pas dans nos Problèmes, bien que le sujet y soit touché par
des allusions. La plupart des convives se laissent convaincre par
une autorité aussi grave ; et ils s'abstiennent de ce
rafraîchissement dangereux.
Même livre XIX des Nuits Attiques, §
6, Aulu-Gelle dit : « On lit dans les Problèmes d'Aristote :
Pourquoi la honte fait-elle rougir, et la crainte fait-elle pâlir,
malgré la ressemblance de ces deux affections ? C'est que, par
l'effet de la honte, le sang se répand du cœur dans toutes les
parties du corps et se montre à la surface, au lieu que, dans la
crainte, il se retire du cœur et abandonne le reste du corps. »
Aulu-Gelle cite en grec ce passage, dont il avait discuté le sujet
avec un de ses maîtres d'Athènes, Taurus ; le texte qu'il reproduit
n'est pas absolument le nôtre ; mais les pensées sont bien
d'Aristote ; et nous les retrouvons identiquement dans nos
Problèmes, section XXVII, §§ 6 et 8, et section XXXI, §§ 1, 3, 8,
12.
Enfin, Nuits Attiques, livre XX, § 4,
Aulu-Gelle raconte qu'un jeune homme riche, son condisciple, aimait
la société des comédiens, des joueurs de flûte, et qu'il se plaisait
à fréquenter ces hommes de libre allure, que les
Grecs appellent les artistes de
Bacchus. Taurus voulait détourner ce jeune homme de la compagnie des
gens de théâtre, et il lui envoya le passage suivant de l'ouvrage
d'Aristote intitulé: Problèmes encycliques, en lui recommandant de
le lire tous les jours: « Pourquoi les artistes de Bacchus sont-ils
le plus souvent des gens pervertis ? Est-ce parce qu'ils restent
étrangers à l'étude et à la philosophie, consacrant la plus grande
partie de leur existence au métier qui les fait vivre? Est-ce parce
qu'ils sont presque toujours dans les débauches, quelquefois dans la
misère ? Ce sont là deux sources de vices. » Aulu-Gelle reproduit le
texte grec, qui est celui-là même que nous avons, Problèmes, section
XXX, § 10. On voit qu'Aulu-Gelle, après avoir appelé l'ouvrage
d'Aristote Problèmes naturels, Questions naturelles, l'appelle ici
Problèmes encycliques, ou encyclopédiques. La diversité des matières
étudiées dans les 38 sections des Problèmes est en effet une sorte
d'encyclopédie.
Huit citations d'Aulu-Gelle, seize de
Plutarque, sans oublier Sénèque et Cicéron, forment un ensemble de
témoignages irrésistibles. Il doit être avéré désormais que, dès le
temps de Sylla, les Problèmes d'Aristote sont connus de tous les
lettrés romains, qui savent le grec aussi bien que leur propre
langue. Le texte est pour eux le même en général que celui de nos
éditions ; mais il semble assez probable aussi qu'il y a quelque
différence de rédaction. Ces conclusions peuvent sembler
définitivement acquises.
On pourrait y joindre, si on le
voulait, le témoignage des Catalogues de Diogène Laërte, de
l'Anonyme de Mesnage(IIésychius ?) et même de l'Anonyme arabe,
composés sans doute d'après ceux de Ptolémée et d'Andronicus de
Rhodes (édition de Firmin-Didot, tome IV, 2e partie, pp. et suiv.
par M. Emile Heitz, d'après MM. Cobet et Valentin Rose). Le
Catalogue de Diogène Laërte, qui est de beaucoup le moins irrégulier
et le plus digne d'attention, cite, numéro 120, un ouvrage
d'Aristote intitulé : Problèmes physiques par ordre, 38. Ce sont nos
38 sections des Problèmes actuels, rangés comme ils le sont.
L'Anonyme de Mesnage, sous son numéro 101, reproduit cette
indication, en déplaçant seulement une partie de l'expression sans
la changer, et mettant 38 avant Par ordre. L'Arabe, numéro 50, parle
de Questions naturelles ; mais il ne leur attribue que quatre
livres, ce qui laisserait supposer qu'il y avait pour les Problèmes
une division que nous ne connaissons pas, et qui ne se rapporte même
pas aux Problèmes inédits, divisés en trois sections. Ailleurs,
numéro 66, il parle de Questions encycliques. C'est le recueil des
Problèmes. Dans une annexe à ce catalogue arabe, il y a, sous le
numéro 5, la mention d'un ouvrage sur le vin et sur l'ivresse, comme
dans les Problèmes actuels ; mais cet opuscule ne contenait que 22
questions, tandis que les Problèmes en ont 35 sur ce sujet, section
III.
N'est-ce pas assez des autorités si
graves que nous avons indiquées ? Auprès d'elles, les catalogues
perdent beaucoup de leur poids ; et à cet égard, nous partageons
l'avis de M. Emile Heitz, qui les juge très peu satisfaisants, bien
qu'il ne faille pas les dédaigner entièrement. On pourrait même,
pour en finir avec les Anciens, du IIe au Ve siècle, consulter
Galien, Apulée, Athénée, Macrobe et plusieurs autres ; mais ce
complément semble superflu après tout ce que nous venons de
constater.
En passant aux Modernes, nous n'avons
plus rien à apprendre d'eux sur l'authenticité ; mais il est utile
de savoir ce qu'ils pensent du recueil. A l'exemple de M. Carl
Prantl, nous interrogerons Henri Estienne (1557), Sylburge (1585),
Casaubon (15090), Septali (1632),; dans le xviiie siècle, Harles,
Buhle, Levêque, et dans le nôtre, Stahr, Prantl, Bussemaker, Emile
Heitz, etc, Henri Estienne, dans une préface à quelques ouvrages
d'Aristote et de Théophraste, déclare que la plus petite partie des
Problèmes est d'Aristote, et que le reste est plus récent. De la
part d'un juge tel que lui, cette appréciation a une réelle
importance. On ne peut pas cependant l'accepter sans réserve ; ce
n'est pas la plus petite partie des Problèmes qui doit paraître
l'œuvre d'Aristote ; c'est au contraire la presque totalité ; et si
l'on doit faire des exceptions, elles sont certainement peu
nombreuses. Sylburge, en parlant des Problèmes attribués à Alexandre
d'Aphrodisée et à Cassius, partage l'avis d'Henri Estienne ; et il
ne reconnaît aussi la main d'Aristote que dans une partie des
Problèmes. Éditeur des œuvres complètes du philosophe, il devait
avoir un juste sentiment de son style, qu'il avait pratiqué durant
de longues années. Casaubon, qui adonné, comme Sylburge, une édition
générale, mais moins bonne, d'Aristote, croit que la plus grande
partie des Problèmes est authentique. Louis Septali, l'auteur du
commentaire le plus étendu, n'hésite pas; c'est Aristote seul qu'il
est sûr d'expliquer à ses élèves; et lorsque, sur des points
extrêmement rares, il se sépare de lui, c'est aux copistes et à des
interpolations qu'il s'en prend. Mais il ne peut jamais admettre
qu'Aristote se soit trompé; et quand Aristote paraît se contredire
lui-même, il s'efforce de concilier les oppositions choquantes que
présente parfois la rédaction des Problèmes, Harles ne semble pas
avoir plus de doutes que Septali, sans être néanmoins aussi
enthousiaste. Buhle, qui d'abord avait admis l'authenticité, s'est
ravisé plus tard, et il a supposé que les Problèmes n'étaient que la
réunion d'extraits empruntés à divers auteurs. Cette hypothèse n'est
pas acceptable.
Lévesque [Notiees et extraits des
manuscrits, tome VII, 2e partie, p. 1iH) croit que ce sont des
rédactions d'élèves d'Aristote, supposition qui n'est pas plus
admissible que celle de Buhle. Ad. Stahr (Aristotelia, II, p. 158)
ne doute pas que les Problèmes ne soient l'œuvre d'un péripatéticien
postérieur . M. Bussemaker (édition Firmin-Didot, tome IV, préface)
ne semble pas hésiter non plus ; les Problèmes sont d'Aristote; et
même une grande partie des Problèmes inédits lui appartiennent. M.
Emile Heit/; n'avait pas à se prononcer dans son édition des
Fragments d'Aristote ; mais quoiqu'il ne critique pas spécialement
nos Problèmes, il s'en est beaucoup occupé, en rassemblant les
citations que nous- même nous avons citées plus haut, et l'on peut
supposer qu'il tient les Problèmes pour suspects, plus que ne le
faisait M. Bussemaker, (édition Firmin-Didot, tome IV, 2e partie,
pp. 194 et suiv.)
Nous ne voudrions pas, pour notre
part, émettre une opinion qui prétendît à être absolument définitive
; mais, parmi tous les auteurs que nous venons de rappeler, c'est
peut-être encore à Casaubon que nous nous joindrions le plus
volontiers. Ce qui nous inspire cette confiance, ce .sont avant tout
les témoignages venus de l'Antiquité, à commencer par celui de
Cicéron, que tant d'autres ont suivi.
Cette préface serait incomplète si
nous ne disions pas au moins quelques mots des Problèmes inédits,
que Bussemaker a découverts, d'après les indications d'Yriarte, dans
les bibliothèques de Paris et de Madrid. Le recueil, divisé en trois
sections, contient 262 questions ou Problèmes : 22 pour la première
; 186 pour la seconde ; et 54 pour la dernière. Les matières sont
confuses, et en général fort disparates, quoique juxtaposées. La
première section est peut-être la moins irrégulière des trois ; elle
est plus particulièrement médicale, bien que les sujets en soient
encore très variés. Les réponses sont fort longues, parfois même
prolixes. Au contraire, dans la seconde section, ou au moins à son
début, les questions et les réponses sont à peine de quelques
lignes. Après la 38e question, l'auteur s'arrête tout à coup, pour
annoncer, dans une sorte de parenthèse, qu'il va traiter des
accidents communs à tous les âges : vertige, éternuement,
bâillement, hoquet, étourdissement, et de quelques accidents
particuliers, tels que la couleur des cheveux et des poils, la
calvitie, la voix grave ou aiguë, le nasillement, la vigueur ou la
faiblesse de quelques sens, l'ouïe, l'odorat, etc,, tous sujets
traités dans nos Problèmes. Il finira en parlant de la nausée. Après
cette digression, il reprend le cours de ses questions, et il suit
d'abord assez bien le programme qu'il vient de se tracer, vertige et
éternuement ; puis, il l'abandonne pour se poser une question sur
les vents; il revient encore à l'éternuement en quelques questions,
qu'il laisse bientôt pour disserter longuement sur les poils, sur
les ongles, sur les cheveux. Il passe ensuite à la voix ; il y
consacre une quinzaine de questions. Il en donne aussi quelques-unes
à l'odorat. Il est plus bref encore sur la nausée ; il s'étend
davantage sur les purgatifs et sur la diarrhée, qu'il étudie dans
tous ses effets et toutes ses causes. Il laisse ce genre de
questions à partir de la 125e, et jusqu'à la 186e, qui finit la
seconde section, il ne s'occupe que de zoologie ; il donne son
attention à peu près exclusivement au cochon et au cheval. La
troisième section est encore plus irrégulière. Après quelques
questions fort étranges de botanique, l'auteur s'arrête au vin, à
l'huile, au lait, aux œufs, aux viandes rôties ou bouillies, en se
permettant, sur son chemin, des détours peu explicables, sur les
Thraces, qui parlent le grec d'autant plus mal qu'ils sont plus
âgés, et sur l'eau du lac Hyrcanien, qui lave parfaitement le linge.
La 54e et dernière question demande pourquoi la chaleur du soleil
fait dormir certaines personnes et ôte le sommeil à d'autres. Dans
la 11e question de cette troisième section , l'auteur s'autorise de
l'opinion d'Aristote sur la transfusion du vin dans des outres. Dans
nos Problèmes, Aristote a bien en effet traité le même sujet,
section XXV, § 8. Ceci prouve de reste qu'Aristote n'a pas composé
les Problèmes inédits, que quelque faussaire maladroit a mis sous
son nom. Mais pour en être bien convaincu, il suffit d'un coup d'œil
jeté au hasard sur cette composition presque informe. Ni les
pensées, ni le style ne peuvent être d'Aristote. Ils ne sont pas
même de son temps ; et il fallait une bien grande confiance dans la
crédulité des lecteurs pour risquer une fraude si transparente. Ce
qui est vrai, c'est que le compilateur des Problèmes inédits
connaissait les Problèmes d'Aristote, puisqu'il l'a imité, ou
reproduit, dans bon nombre de questions, une quarantaine environ, où
il s'inspire de lui très souvent, tout en ne le nommant qu'une seule
fois.
Maintenant, après avoir éclairci,
autant qu'il a dépendu de nous, les obscurités qui recouvrent la
composition et l'authenticité de nos Problèmes et de leurs 38
sections, il nous faut conclure. Les résultats de notre discussion
sont les suivants :
1e Les Problèmes sont attribués à
Aristote dès le temps de Cicéron, qui les avait lus dans la
bibliothèque laissée par Sylla, et dans les exemplaires classés par
Andronicus de Rhodes. Après Cicéron, d'autres écrivains,
considérables aussi, les connaissent comme lui, et en citent des
morceaux entiers, soit dans le texte grec, soit dans des traductions
fidèles.
2e L'authenticité, établie par tous
ces témoignages, qui s'appuient les uns les autres, doit paraître
prouvée également par la nature des discussions qui remplissent nos
Problèmes. Elles ne sont pas indignes du génie d'Aristote ; et la
forme qu'elles ont revêtue par questions et par réponses semble
avoir en, dans l'Antiquité, une grande vogue, puisque cette forme a
été imitée par Plutarque et par d'autres écrivains.
3e Cette authenticité générale n'est
pas infirmée par le désordre de quelques parties, par des
contradictions et des interpolations, qui sont d'ailleurs assez
rares. Le désordre s'explique, ainsi que les répétitions, par les
circonstances où Aristote a dû s'éloigner précipitamment d'Athènes.
Enfin, des interpolations se présentent dans toutes les œuvres
d'Aristote, et les Problèmes n'y ont pas échappe. plus que d'autres.
SOMMAIRE DES
SECTIONS DES PROBLÈMES D'ARISTOTE
Section
Première. Questions médicales. — De la maladie; sa cause
générale; méthodes diverses des médecins; influences des saisons et
des vents; effet contagieux de la peste: vents du nord et vents du
sud; leur action sur les maladies diverses ; changement de boissons
; changement d'air; maladies des vieillards; effet des contrées
marécageuses sur les plaies; maladies des enfants; maladies aiguës;
effets de l'hiver et de l'été sur les maladies; du printemps et de
l'automne; du cataplasme ; du pus; emploi du fer et du feu; action
particulière de l'airain sur les plaies; de la tisane d'orge, de la
tisane de blé; différents emplois des bains et des frictions; des
purgations par en haut et par en bas; des purgatifs divers; effets
du poivre sur la vessie; effet général des purgatifs; effet des
plantes odorantes; des ulcères; influence de l'acte vénérien; des
symptômes fournis par les urines; des conditions de la santé; des
engelures; doses des potions ; traitement des lièvres quartes ;
causes ordinaires des lièvres.
Section II.
Questions sur la sueur. — Rapports de la respiration et
de la sueur ; effet de l'eau chaude sur la sueur; salure de la
sueur; la sueur plus forte dans les parties hantes du corps que dans
les parties inférieures; sueur provenant du travail manuel; sueur de
la tête sans odeur ; sueur après la fatigue ; sueur provenant des
lotions; sueur provoquée par les vêtements ; sueur du visage ; sueur
provoquée par le feu ; sueur épongée ; plantes sudorifiques ; sueur
plus forte dans le dos ; sueur dans le sommeil ; sueur causant des
nausées; sueur aux pieds; sueur en hiver et en été ; soulagement que
procure la sueur ; sueur produite en courant; sueur pendant le repas
; sueur produite par la peur ; sueur dans les étuves; sueur de
fatigue ; sueur de frisson ; sueurs chaudes, sueurs froides ; sueur
venant de la vivacité des mouvements; sueurs spontanées; salubrité
de la sueur. 54
Section III.
De l'usage du vin et de l'ivresse. — Influence du froid
sur les ivrognes; leur déraisonnement; effet du vin trempé d'eau;
infécondité des ivrognes; leur tremblement ; les enfants n'aiment
pas le vin; effets de l'ivresse sur le sens du goût; tournoiement de
tous les objets dans l'ivresse ; multiplication des objets aux yeux
de l'ivrogne ; différence du vin doux et du vin pur causant 1
ivresse; ivresse du matin; effets de l'exercice ; actions diverses
du vin sur les ivrognes ; influence du chou sur l'ivresse ;
vomissements dans l'ivresse ; effets de l'absorption plus ou moins
rapide du vin ; cas où le vin peut être mortel; larmes faciles des
ivrognes; influence de la dimension des coupes sur l'ivresse;
explication du tremblement auquel les ivrognes sont sujets;
insanités dans la demi-ivresse; différence du vin doux et du vin
ordinaire; les ivrognes aiment à se chauffer au soleil; bégaiement
des ivrognes ; leur impuissance ; urination des ivrognes, jeunes ou
vieux; effets de l'huile contre l'ivresse. 89
Section IV.
Questions relatives à l'acte vénérien. — De l'effet que
l'acte vénérien et la mort causent sur les yeux; des effets sur les
jambes; objet des poils du pubis; des pollutions nocturnes;
affaiblissement causé par la perte du sperme; effet de la peur sur
l'émission du sperme; effet du jeûne sur l'acte vénérien; dégoût des
jeunes gens pour leurs premières amours; effet de l'équitation sur
les plaisirs vénériens; odeur de la peau à l'époque de la puberté;
l'être sorti de notre semence est le seul qui soit vraiment nôtre ;
de l'acte vénérien dans l'eau; vivacité du plaisir vénérien; effet
morbide et réfrigérant de l'acte vénérien ; chute des cils et des
cheveux causée par les excès; effet du besoin d'uriner; effet des
hernies; abattement à la suite de l'acte vénérien; l'érection; odeur
qu'exhalent les gens lascifs; effet des saisons sur les plaisirs de
l'amour; différences dans la vivacité de la sensation vénérienne ;
variétés de constitution; pudeur qui empêche d'avouer le désir
vénérien, tandis qu'on avoue bien d autres besoins ; les hommes plus
ardents en hiver; les femmes, eu été; effets de la continence
excessive; froideur vénérienne des mélancoliques; lascivité des
oiseaux et des hommes; effets de l'acte vénérien sur l'acuité de la
vue. 130
Section V. De
la fatigue. — De la marche sur un terrain plat ou sur un
terrain accidenté; affaiblissement de la voix iu.nnl on est épuisé
de fatigue ; action de la gymnastique, rapetissant le ventre et
faisant disparaître la graisse; effet des frictions d huile sur les
membres fatigués ; effet des vomitifs contre la fatigue; fatigue des
bras agissant à vide; céphalalgie causée par la marche rapide;
différences de l'effet des terrains où l'on marche; des petits pas;
effet de l'équitation sur le larmoiement des yeux: effets des
exercices sur le ventre ; des courses rapides et longues; rythme de
la respiration ; chutes fréquentes dans les courses; fatigue des
genoux dans les montées; et dans K-s descentes, fatigue des cuisses;
essoufflement; tempéraments de force moyenne; plaies par suite de
fatigues ; repas après les exercices ; course et marche ; pollutions
nocturnes; effets de la tempérance; action des bains et des lotions
; suffocations dans une course violente ; irrégularités dans la
marche ; terrains en pente. 165
Section VI.
Effets de la position du corps et de ses habitudes. —
Effets de la vie sédentaire, selon les tempéraments, et de la
gymnastique sur les membres; de la flexion du corps durant le
sommeil; du vertige quand on est assis, ou debout ; du sommeil selon
qu'on est couché sur le côté droit, ou sur le côté gauche ; de
l'engourdissement; de la position sur le côté gauche, ou sur le côté
droit. 204
Section VII.
De quelques effets de sympathie. — Effets du bâillement
d'autrui sur le nôtre ; effets du feu sur l'envie d'uriner ; de la
contagion de certaines maladies ; effets de certains bruits sur nos
sens, et de certains objets sur la vue ; effets de certaines
blessures; contagion de la phtisie, de l'ophtalmie et de la peste;
action du pourpier et du sel sur les saignements ; action contraire
de la cendre et du nitre. 210
Section VIII.
Effets du froid et du frisson. — De la pâleur causée par
le froid; de l'insomnie venant de la même cause; action du froid sur
les maladies, sur les athlètes. sur les extrémités du corps ; froid
de pieds ; action du froid sur les gens replets; frissons après
l'éternuement et l'urination; effet du froid sur l'appétit et après
les exercices; frisson causé par l'eau froide et l'eau chaude;
érection des poils; balbutiement causé par le froid; froid plus
intense quand on court ; froid du matin ; effets du feu sur les gens
qui ont froid ; la colère empêche de sentir le froid; action du
froid sur les cheveux, les poils et le sommeil. 221
Section IX.
Des meurtrissures, des contusions et des cicatrices. —
Effets de la viande fraîche et des œufs sur les meurtrissures;
cicatrices noires; cicatrices blanches; nature des plaies, noires à
la circonférence, blanches au centre; effets des éclisses ; effets
d'un coup de baguette opposés aux effets que produit un corps plus
large ; rapports de la rate et des couleurs de la cicatrice ; effets
de certaines substances sur les contusions : action de la thapsie et
du cyathe sur les plaies; noirceur de la peau dans les parties du
corps qui ont eu des plaies répétées ; impression du métal sur les
contusions ; absence de poils sur les cicatrices ; cause des
gonflements et des taches livides survenant à la suite d'un coup.
238
Section X.
Explication sommaire de quelques faits naturels. — De la
toux chez l'homme et les autres animaux; saignements de nez; la
graisse; la lèpre blanche; le lait produit plus ou moins abondamment
selon les espèces; la boisson change la couleur des animaux ; les
mâles sont plus grands que les femelles; gestation longue ou courte
; ressemblance des jeunes à leurs parents ; les yeux bleus; les
nains; multiparité ; distance des yeux ; pollutions nocturnes ;
mouvements de la tète; éternuement ; épaisseur de la langue ;
urination des femelles ; chute des poils; laine des montons;
lascivité des gens velus ; nombre des pieds toujours pair ; les
cicatrices ; les jumeaux ; le sommeil ; relations des jeunes et des
parents ; méchanceté des animaux après la parturition ; les eunuques
; la voix dans l'homme et dans les animaux; la pierre chez l'homme;
le rot; animaux domestiques et sauvages; ombilic de l'homme;
saillies des animaux; écartement des dents ; raies de la main ;
difformités de l'espèce humaine ; effets de la fumée ; sociabilité
des animaux ; parties du corps plus ou moins velues; explication de
l'éternuement ; grosseur des animaux marins ; nourriture sèche et
liquide ; la calvitie n'atteint pas les eunuques ; déjections des
animaux ; complexion plus ou moins dure des animaux en rapport avec
leur courage ; des monstruosités ; cheveux de l'homme seuls à
blanchir; naissance spontanée ; dents, ongles et peau des Ethiopiens
; animaux vivant sans tête. 251
Section XI.
Faits relatifs à la voix et au son. — Infirmité fréquente
de l'ouïe ; chaleur cause de la force de la voix ; influence de la
nuit sur le son ; de loin, la voix paraît plus aiguë ; résonance des
vases fermés ; bruit de l'eau qui tombe, plus aigu quand elle est
froide ; rudesse de la voix au moment du réveil ; enrouement après
le repas ; différences de la voix dans le rire ou dans les pleurs ;
acuité de la voix chez les enfants et les jeunes animaux : effets de
la liqueur séminale sur la voix ; gravité de la voix en hiver, et
après qu'on a bu ou vomi ; effet de la distance sur le son ; acuité
de la voix par l'effet de la maladie ; le son dans l'écho ; voix
grave des veaux ; diminution du son par la paille répandue sur le
plancher ; pétillement du sel dans le feu ; bégaiement alternatif
des enfants ; sonorité des vaisseaux vides ; effet du bâillement sur
l'ouïe ; tremblement de la voix dans l'inquiétude et dans la peur ;
le bégaiement empêche de parler à voix basse ; portée différente du
son de dehors en dedans, ou de dedans en dehors ; effet du poireau
sur la voix ; effet de la respiration ; portée de la voix du haut en
bas et de bas en haut ; effet de l'ivresse sur la voix ; différence
de la lumière et de la voix par rapport aux corps ; effets de la
simultanéité des voix ; cause du bégaiement; l'homme est le seul
animal qui bégaie ; formation tardive de la voix chez l'homme ;
action des corps environnants sur le son ; voix des enfants, des
femmes, des eunuques et des vieillards. 318
Section XII.
Des bonnes odeurs. — Effets de la distance sur la
sensation des odeurs ; erreur populaire prêtant à l'arc-en-ciel une
influence sur l'odeur des arbres ; odeur des fleurs et des parfums
meilleure de loin ; les choses ont plus d'odeur quand on les agite ;
action du froid sur la propagation des odeurs ; la cendre
incandescente développe les odeurs plus que le feu ; différences
dans l'odeur des roses selon leur conformation ; nature de l'odeur ;
action de l'eau sur l'odeur des vins ; les vins purs ou mélangés.
374
Section XIII.
Des mauvaises odeurs. — Odeur de l'urine plus ou moins
forte selon la durée du séjour dans le corps ; moindre effet de
l'odeur après les repas ; mauvaise odeur des fleurs fanées ; odeurs
des animaux ; effets de la chaleur sur l'intensité des odeurs ;
effets de l'ail sur l'odeur de l'urine ; explication de ces effets
d'après l'école d'Héraclite ; odeur plus forte de l'haleine quand on
est à jeun ; odeur particulière des aisselles ; influence des
parfums sur les mauvaises odeurs naturelles ; haleine mauvaise des
gens contrefaits ; effets des parfums sur l'odeur de la sueur ;
effets du mouvement sur la propagation des odeurs. 385
Section XIV. De l'influence de la
température. — L'excès du froid et l'excès de la chaleur produisent
le même effet sur le caractère et le visage ; conservation du blé
dans la contrée froide du Pont-Euxin ; action du froid sur les
inflammations ; conformation des Ethiopiens et des Egyptiens ;
influence du vent du midi sur les naissances ; influence d'une
atmosphère marécageuse sur les plaies ; influence du climat sur la
longévité et sur l'intelligence ; coloration des marins ; étés de
chaleur étouffante dans les climats froids ; couleur bleue ou noire
des yeux selon les climats ; influences du climat sur l'esprit et le
courage. 397
Section XV.
Questions de mathématiques et d'astronomie. — Nature et
propriétés du diamètre ; explication de ce nom ; numération par dix
; sa nature et ses causes ; exception singulière chez quelques
peuples ; forme sphérique de la terre ; divers aspects qu'elle
présente à l'observateur ; variations de l'ombre portée par le
soleil ; démonstrations graphiques ; forme circulaire des images de
rayons solaires passant par un trou ; des phases de la lune ;
explication de sou apparence recti- ligue, bien qu'elle soit
sphérique ; phénomènes du soleil et de la lune, qui semblent des
surfaces, bien que ce soit des corps ronds et bombés ; longueur des
ombres du soleil à sou lever et à son coucher ; démonstrations
graphiques ; du parhélie ; sa position nécessaire ; oscillation de
l'extrémité de l'ombre solaire ; cette oscillation n'est qu'une
apparence, causée par la multitude des corpuscules que l'air
contient toujours, et qu'on peut voir dans les ouvertures de portes.
410
Section XVI.
Phénomènes de choses inanimées. — De la forme et de la
translucidité des bulles d'air dans l'eau ; mouvement des corps
composés de parties dont le poids est inégal ; angles d incidence et
de réflexion égaux ; diversité des mouvements des cylindres et des
cônes ; aspects divers de la tranche des livres, selon l'inclinaison
où on les regarde ; diversité d aspect des grandeurs réunies ou
divisées ; écoulement de l'eau des clepsydres ; opinion d Anaxagore
; action de l'air qui obstrue le goulot de la clepsydre ; rondeur de
certaines parties chez les plantes et chez les animaux ; rondeur
ordinaire des extrémités des objets ; effets giratoires des corps
qu'on lance ; mouvements combinés des corps composés de diverses
matières ; rebondissement des corps qui tombent ; combinaisons et
oppositions des forces qui agissent sur les corps, en rapport avec
leur tendance naturelle à tomber. 1
Section XVII.
Des êtres animés. — Effets du rapprochement sur la
grandeur des personnes et des choses; isolées, elles paraissent
toujours plus petites; croissance des animaux et des plantes en
longueur plus que dans les deux autres dimensions; sens différents
dans lesquels on peut entendre les mots d'antérieur et de
postérieur; application aux choses humaines ; la vie de l'homme ne
saurait être un cercle ; opinion d'Alcméon. 21
Section
XVIII. Questions de philologie. — Influence de la lecture
sur le sommeil; effets divers qu'elle produit selon les individus ;
exercice que les discussions donnent à l'esprit ; dans la
rhétorique, les exemples frappent plus que les raisonnements ;
qualifications différentes données aux gens de professions diverses
; différence du philosophe et de l'orateur; entêtement à garder de
mauvaises habitudes; caractère des discussions; plaisir qu ou trouve
aux récits qu'on écoute. 26
Section XIX.
Questions d'harmonie. — La flûte peut exprimer la gaieté
ou la tristesse; effets de la distance sur la voix d'une seule
personne ou de plusieurs personnes parlant à la fois; dissonances au
grave ou à l'aigu; airs connus plus agréables que ceux qu'on entend
pour la première fois ; effet des changements de modulations ; la
lyre avait jadis sept cordes ; accompagnement des instruments;
fredonnement ; relations des cordes de la lyre ; rapports du grave
et de l'aigu ; les nomes d'autrefois ; chants qui comportent des
antistrophes ; accord et unisson ; chant à l'octave ; fautes du
chant plus sensibles dans le ton grave; mesure plus ou moins bien
observée selon le nombre des chanteurs ; rapports des notes hantes
et des notes basses ; la note médiate ; caractère moral des
harmonies ; différence du son, de la saveur et de la couleur ; modes
hypodorien et hypophrygien; la plus belle des consonances;
difficulté de chanter à l'aigu plutôt qu'au grave ; plaisir que fait
la régularité du rythme; notes qui peuvent ou ne peuvent pas servir
à la consonance ; résonance des cordes qui ne sont point touchées ;
voix isolée ou voix accompagnée ; sept ont un milieu, huit n'en ont
pas ; notes fausses surtout à l'aigu ; habitudes musicales des
Anciens ; modes uniquement appliqués à la tragédie ; le grave est
plus doux que l'aigu ; résonances diverses de vases vides ou à
demi-pleins. 36
Section XX.
Des arbrisseaux et des légumes. — Action de l'eau de mer
sur certains légumes ; effet de la menthe qu'on mange ; légumes qui
ont des fleurs sans fruits ; plantes bouillies, plantes grillées;
plantes comestibles; vie des plantes plus ou moins longue ; culture
du persil, des concombres et des coloquintes ; amertume de certaines
graines; culture du câprier; moyen de faire grossir les raves;
procédé pour faire blanchir les concombres et les coloquintes; effet
diurétique de certaines plantes odorantes; croissance plus ou moins
grande de certains légumes, selon que la graine est plus ou moins
ancienne; culture de la rue greffée; lacune du texte; amertume du
thym dans l'Attique; de la floraison artificielle du lys, des
oignons et de la menthe; effet de l'oignon sur les yeux ; le myrte
écrasé a plus d'odeur : noyaux de myrte ; goût particulier du
péricarpe de certains fruits ; plantes poussant hors de terre ;
croissance de l'ail et de l'oignon ; effet de l'eau chaude sur
certaines plantes; odeur plus forte de l'ail quand la tige est
vieille ; conservation et chute des feuilles de myrte ; marais
utiles à la croissance des concombres ; effet des parfums sur
l'odeur de la sueur ; action de la rue dans les maléfices ; mélange
de l'origan au vin ; feuilles du myrte plus ou moins abondantes,
selon que l'arbrisseau est blanc ou noir. 84
Section XXI.
De la farine, de la pâte, et autres matières analogues. —
Effet de l'huile sur la farine et la tisane ; le blé plus
nourrissant que l'orge; farine plus ou moins claire ; blancheur du
pain plus ou moins frais ; pain salé, pain sans sel; pains collés
les uns aux antres; pâte plus ou moins indigeste, selon qu'elle est
pétrie; différences de la pâte et du levain ; action du feu sur la
pâte ; mélange de miel et de farine; le pain de seigle se dessèche
moins; effets de l'habitude sur l'alimentation ; couleurs diverses
de la pâte ; pains durcissant selon qu'ils ont été plus ou moins
pétris ; mélanges d'eau et de farine; grumeaux et grains de blé ;
bouillie bien battue ; teint et santé des ouvriers selon qu'ils
travaillent le blé ou l'orge ; le pain devenant plus dur quand on le
fait rôtir, et plus tendre si on le fait chauffer; farine se tassant
par le refroidissement. 117
Section XXII.
Des faits de l'automne.— Goût des fruits mangés avant ou
après le repas ; les choses douces rassasient plus vite que les
choses amères ; conservation des fruits dans des vases bien fermés ;
goût du vin bu après des fruits ; effet des friandises et du dessert
; nécessité de boire après les fruits ; manière de manger les
figues; saveur du vin, bu après qu'on a mangé des aliments rêches ;
dessiccation des figues; saveur des aliments selon qu'ils sont
chauds ou froids ; emploi de la paille ; action des figues sur les
dents ; difficulté de broyer les pépins. 140
Section
XXIII. De l'eau salée et de la mer. — De la marche du
flot suivant la forme du rivage et la force du vent; de la marche et
du poids des navires; apaisement des vagues dans certains cas; perte
des navires dans des tourbillons; couleur de la mer dans le
Pont-Euxin et dans la mer Egée; température de la mer; sa
transparence selon les localités et selon les vents ; pesanteur de
l'eau salée; rapports des flots et des vents; natation en mer et en
rivière; vent de mer; vent de terre; des vagues dans les bras de
mer; eau de mer plus ou moins salée ; trous creusés sur le bord de
la mer, donnant d'abord de l'eau douce; fonte du sel marin; de la
couleur de l'eau agitée ou tranquille; rapports du flot et de la
profondeur de l'eau; eau de mer plus douce dans les lieux exposés au
midi; rochers sur le bord de la mer; eaux plus salées à la surface;
eaux moins salées près de terre; dessiccation de l'eau de mer;
graviers dans les étangs; fécondité des marais desséchés; salure de
la mer; formes arrondies des galets; action laxative de la natation;
qualité de l'eau de Pœsa. 151
Section XXIV.
Des eaux chaudes. — Effet de l'huile sur la chaleur de
l'eau; chaleur des eaux de puits; chaleur différente de l'eau et du
feu; effet de l'eau bouillante sur certaines matières ; action du
feu sur le fond des vases qu'il touche; ébullition de l'eau, variant
avec les saisons; effet de l'eau chaude sur la peau; l'eau chaude ne
fait pas d'explosion comme quelques matières; gonflement des
matières qu'on chauffe ; effets de l'eau chaude sur la pierre;
sensations diverses que causent les bains de pied; effet du soleil
sur l'eau qu'il échauffe; eaux thermales de Magnésie et d'Atarnée ;
eau des bains chauffés par la chaleur solaire; flux alternatif de
certaines eaux thermales plus ou moins saumâtres; causes de ces
phénomènes; nature saumâtre des eaux thermales en général ; eaux
thermales variant de nature ; odeur de soufre; goût salé; effet de
la cendre sur les eaux qui y entrent. 187
Section XXV.
Phénomènes de l'air. — Effet de l'air sur le gonflement
des membres; bruits souterrains dans les marais; siccité de l'air en
contact avec l'eau; beau temps à minuit et à midi; froid du matin et
du soir; température dans la région du Pont-Euxin; pureté de l'air
dans la nuit ; phénomène singulier des outres; différence de l'air
et de la lumière traversant les corps ; l'air sorti des bulles d'eau
n'est pas mouillé; outres surnageant quand elles sont pleines d'air
; conservation des matières en vases clos; influence de la sérénité
du ciel sur la température ; air plus ou moins chaud selon sa
quantité ; matières corruptibles et incorruptibles; effets des
nuages sur la température; fraîcheur de l'air dans les habitations.
202
Section XXVI.
Phénomènes du vent. — Effet spécial du vent du nord sur
les nuages ; les vents étésiens ; vent du sud après la gelée blanche
; vents changeant avec les saisons ; vents soufflant de la mer ;
vents après la pluie ; action du soleil sur les vents ; durée des
vents du nord ; durée des vents du midi; vents de la canicule; vents
sous la constellation d'Orion; fréquence des vents du nord; époque
des vents du sud; odeur de certains vents; rapport des vents et des
éclipses; rapports des vents du midi avec la pluie; vents du
couchant, vents de l'orient selon les saisons ; action du vent sur
le flair des chiens ; influence du vent d'ouest sur les nuages;
vents d'ouest à l'équinoxe ; vent d'est et du midi amenant la pluie
; action desséchante des vents ; variétés des brises de mer ;
citation d'Homère, sur le vent d ouest ou zéphyre ; vents de la
canicule au lever et
au coucher du soleil; vent d'ouest le matin et le soir; action du
soleil sur les vents ; origine des vents ; rapports des cours d'eau
et des vents; couleur de la mer selon les vents ; effets divers des
vents du sud selon leurs forces ; alternatives dans la force des
vents ; effets des golfes sur les vents; action des vents chauds sur
la constitution humaine, et des vents froids sur l'appétit; vents en
Egypte; comparaison des vents du nord et des vents du midi ;
température variable des vents; vents du sud froids eu Libye; vents
amenant des fièvres ; régularité des vents étésiens ; vent froid du
sud-ouest; effets optiques du vent d'est; heures diverses des vents
dans la journée; douceur du vent d'ouest; vents de l'Attique, des
iles. de l'Hellespont, de Lesbos ; pronostics des vents;
singularités des vents en Arcadie, contrée élevée et humide;
rapports des stries du ciel avec les vents et la pluie. 222
Section
XXVII. De la peur et du courage. — La peur fait trembler
ceux qui l'éprouvent ; parfois elle produit la soif; de la chaleur
dans la colère ; du froid dans la peur ; les hommes courageux aiment
généralement à boire ; des honneurs publies rendus au courage ;
utilité sociale du courage militaire ; effets de la peur sur la voix
et sur les mains, et aussi sur la lèvre inférieure ; du froid et de
la soif dans la peur ; douleur arrachant des cris ; mutisme de la
peur : effets de la peur sur les entrailles; action de la peur sur
les testicules; resserrement des parties honteuses ; effets de la
peur sur la vessie ; effets de la peur sur les actes vénériens. 278
Section
XXVIII. De l'intempérance et de la débauche. — De la
modération et de l'intempérance; de la continence et de la débauche;
continuation nécessaire des excès auxquels on se livre; il n'y a que
deux sens où l'on soit intempérant, le toucher et le goût ; nature
différente de la colère; dangers de la jeunesse et de la richesse;
besoins comparés de la soif et de la faim; souffrance et plaisir de
l'une et de l'autre: relations du besoin et du plaisir ; le rire
provoqué par les choses connues d'avance. 292
Section XXIX.
De la justice ou de l'injustice. — Les peines portées
contre le vol plus graves que les peines portées contre la calomnie
; abus de confiance par refus de rendre un dépôt; considérations
secondaires dont les juges tiennent compte; on commet de petits
délits sans être capable d en commettre de plus grands ; abus de
confiance plus coupable que l'usure ; fortune facile aux gens
malhonnêtes ; défense des morts plus nécessaire que celle des
vivants ; utilité des bonnes sociétés ; meurtre d'une femme plus
odieux que celui d'un homme; position des parties au tribunal ;
partage égal des votes favorable à l'accusé ; vols commis dans des
lieux publies; insultes aux magistrats; vol et calomnie. 300
Section XXX.
De la réflexion, de l'intelligence et de la sagesse. —
Les hommes les plus distingués sont en général mélancoliques;
exemples divers ; Lysandre, le lacédémonien ; Empédocle, Platon,
Socrate ; définition du tempérament mélancolique ; effets du vin et
de l'ivresse analogues à ceux de la bile noire ; citation d'Homère ;
description de l'homme ivre ; variétés des effets du vin sur le
caractère et sur les actes sexuels ; action de la chaleur et du
froid ; influence de l'alimentation de chaque jour sur la formation
de la bile ; la mélancolie est une maladie ; cas des Sibylles et des
Bacchantes; inspiration des poètes; effets de la mélancolie sur
l'intelligence et le talent ; alternatives de dispositions
contraires dans notre humeur ; variations de la physionomie ;
audaces ou frayeurs excessives ; mélancolie de nature ; mélancolie
acquise ; abattements ou excitations ; enfance et vieillesse ;
effets des rapports vénériens chez la plupart des hommes ; ce que c
est que la science ; causes de l'intelligence supérieure de l'homme
; dimension proportionnelle de sa tète ; quand une route est bien
connue, elle parait plus courte ; indéterminée, elle paraît sans fin
; progrès de la raison avec l'âge; emplois de la main et de
l'intelligence dans l'homme ; développements successifs de nos
facultés ; facilité à apprendre dans la jeunesse ; puissance
variable de la mémoire selon les heures du jour; supériorité de
l'homme sur le reste des animaux ; citation de Platon; différences
entre les plaisirs intellectuels ; procédés de la médecine pour la
guérison complète des maladies ; équilibre du chaud et du froid,
nécessaire à la santé ; différence du philosophe et de l'orateur ;
mauvais caractère des vignerons en général ; prix pour les exercices
du corps; les prix ne sont pas possibles pour les exercices de
l'intelligence; impossibilité de juger de la sagesse avec équité ;
mobilité de la volonté humaine ; on dédaigne l'emploi des choses
qu'on a le plus désirées; disposition indispensable de l'âme pour
que la pensée s'exerce; activité de l'âme dans le sommeil. 318
Section XXXI.
Des yeux. — Relation de l'éternuement et des yeux ; usage
d'un seul œil ; rougeur des yeux dans un accès de colère ; effet
contraire de la honte sur les oreilles; les aveugles de naissance ne
deviennent jamais chauves ; effets de la fumée sur les yeux ;
mobilité des yeux; direction oblique à droite et à gauche; rapports
des yeux l'un à l'antre; variétés du strabisme; effets de la
pression sur la partie inférieure du globe de l'œil ; écriture très
fine des myopes ; explication de cette apparente contradiction ;
influence de l'ophtalmie sur la portée de la vue ; maladie d'un seul
œil ; effets de l'éloignement de la vision ; objets paraissant
doubles ; égalité de la vision de droite et de gauche ; l'exercice
de la vue ne la rend pas meilleure ; les myopes ont une écriture
très fine ; clignement des paupières chez les myopes; objet simple
paraissant double ; objets doubles paraissant simples ; effets des
diverses couleurs sur l'organe de la vue ; vision plus forte quand
les deux yeux agissent à la fois ; les yeux résistent au froid ;
larmes chaudes, larmes froides, selon les cas ; œil gauche se
fermant plus souvent que le droit ; myopes et presbytes; l'homme est
seul sujet au strabisme ; effets d'une trop vive lumière sur la vue
; égalité des yeux. 347
Section XXXII.
Des oreilles. — Rougeur des oreilles dans la honte;
bruissement des oreilles dans l'eau; précautions des plongeurs pour
leurs oreilles; différence d'audition dans les deux oreilles ;
rougeur des yeux dans la colère ; toux provoquée par le frottement
des oreilles; différence d'audition dans les deux oreilles ; effet
de l'eau entrant dans les oreilles ; action de l'huile sur l'eau
dont les oreilles sont pleines ; effets du bâillement sur l'ouïe.
372
Section.
XXXIII. Du nez. — Effet de l'éternuement sur le hoquet;
le frottement de l'œil diminue l'éternuement; multiplicité des
éternuements ; effet du soleil sur l'éternuement ; action de l'eau
froide sur les saignements de nez; caractère sacré qu'on prête à
l'éternuement : l'homme éternue plus que les autres animaux ; les
éternuements ont diverses significations, selon les heures de la
journée; peine des vieillards à éternuer; nasillement des sourds ;
l'éternuement ne se produit pas durant le sommeil; frisson causé par
l'éternuement; forme du nez chez les personnes qui ont les cheveux
crépus et chez les enfants. 332
Section XXXIV.
De la bouche et des organes qu'elle contient. —
L'écartement des dents annonce une vie courte; les dents sont plus
sensibles au froid que la chair ; symptômes qu'on peut tirer de
l'état de la langue ; saveurs que sent la langue ; couleurs de la
langue ; haleine chaude et froide : on ne peut renouveler
sur-le-champ une forte expiration ; organes servant au passage des
aliments ; organes servant au passage de la respiration ; signes de
longévité tirés des lignes de la main ; rétrécissement du ventre
dans une forte aspiration ; jeu de la respiration. 398
Section XXXV.
Des phénomènes du toucher. — Contact étranger ; contact
de soi-même ; chatouillement des aisselles et de la plante des pieds
; excitabilité de diverses parties du corps ; rapports de la chaleur
naturelle et des objets extérieurs selon les saisons ; frissonnement
des poils ; on ne se chatouille pas soi-même ; sensibilité des
lèvres ; frissons après les repas ; illusions du toucher pour un
objet qu'on fait rouler sous les doigts superposés. 408
Section XXXVI.
Du visage. — Des portraits du visage ; leur objet ; le
visage sue plus que tont le reste du corps ; fréquence des boutons
au visage. 414
Sectiom
XXXVII. Faits relatifs au corps entier. — Le poids du
corps n'est changé que par la sueur; conservation de l'équilibre ;
action des massages sur les parties charnues du corps ; dessiccation
successive ; conditions de la sante ; nécessité du mouvement des
humeurs ; effets de la chaleur et du froid dans des conditions
pareilles ; les frictions raffermissent la chair; exercices en place
et courses. 416
Section
XXXVIII. De la couleur de la peau. — Effets du soleil sur
la cire, l'huile et la peau ; teint des mains toujours très bruns ;
effets des vêtements sur la chaleur du corps ; effet de frictions
d'huile sur la personne ou sous les vêtements ; effet du grand air
sur la coloration du visage ; influence des exercices sur le teint,
selon qu'ils sont modérés ou violents ; station au soleil ;
exercices en plein soleil ; action du soleil et du feu sur la peau ;
changements de la peau dans la vieillesse ; action de la farine
d'orge et de blé sur le teint des meuniers. 423
FIN DES SOMMAIRES.
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