Extraits des auteurs grecs concernant la géographie et l'histoire des Gaules
texte et trad. nouv. publ. par Edm. Cougny et Henri Lebègue
LIVRE V
PHILOSTORGIOS (01).
PHILOSTORGE.
1° Philostorgii Cappadocis veteris sub Theodosio juniore scriptoris
Ecclesiasticae Historiae a Constantino M. Ariique intitiis :ad sua usque
tempora, libri XII, a Photio, patriarcha Constantinopolitano peculiari (extra
Bibliothecam ejus hactenus editam) opere in Epitomen contracti, nunc primum
editi a Jacobo Gothofredo, una cum versione, supplementis nonnullis, indiceque
accurato et prolixioribus dissertationibus. Genevæ. - Surnptibus Jacobi
Chouët. M D CXLIII. ; 2è titre : ƒEk tÇn
ƒEkklhsiastikÇn „IstoriÇn FilostorgÛou „Epitom¯ Žpò fvn°w FotÛou (sic)
patri‹rxou , id est Ex, Ecclesiasticis
Philostorgii Historiis Epitome confecta a Photio. patriarcha.
2° Philostorgii Epitome Photio confecta.,Edidit H. Valesius. Parisiis,
an. M DC LXXIII, - Cette édition, suivie par D. B., a été reproduite à
Mayence, si l'on s'en rapporte au titre, ou plutôt à Francfort, en 1679. Celle
qui porte la date Amsterdam, 1695, est exactement la même ; il n'y a de changé
que le titre.
3° Même titre grec et latin, texte revu par Reading pour l'édition de
Cambridge (Cantabrigiæ, typis Academicis, -in-f°. M. DCC. XX.).
4° Même titre grec et latin dans le Patrologiae cursus completus de l'abbé
Migne, gr. in-8°, t. LXV, pp. 455-638.
ABRÉGÉ DES HISTOIRES ECCLÉSIASTIQUES (02).
[Extraits] de la Ire Histoire.
V. Il dit que Constantius, fils de Constantin le Grand, fut, à cause de sa bravoure, proclamé roi des Galaties supérieures où sont les [montagnes] appelées Alpes : ces contrées sont difficiles à envahir, difficiles même à aborder. Les Galaties se nomment aujourd'hui Gallies. La mort de Constantin arriva dans la Brétanie, qu'on appelle [île] d'Alvion. C'est là que le trouva malade Constantin, son fils, qui, par un bonheur incroyable, avait échappé à la malveillance de Dioclétianus ; c'est là qu'il mourut et que lui rendit les derniers devoirs ce fils héritier de son titre de roi (03).
[Extraits] de la IIe Histoire.
XVIII. (0) Il dit que, Constantin le Grand étant mort (04), les malheureux relégués partout aux frontières, obtinrent leur rappel [et purent rentrer] sans crainte. Athanasios, dit-il, revint des Gallies à Alexandrie.
[Extraits] de la IIIe Histoire.
XXIV... (0) Les Alpes Julies séparent les Gallies et l'Italie des Itales (05).
XXVI. Magnentius, défait une première fois, ayant depuis peu à peu repris des forces, s'engagea de nouveau dans la guerre. Très rudement battu et ayant perdu peu s'en faut tous ses hommes, il s'enfuit vers la ville des Lugdunes (06). D'abord, par bonté d'âme sans doute, il égorge son propre frère pour le soustraire aux outrages et aux mains des ennemis ; puis il traite de même tous ceux de ses proches qui étaient auprès de lui. Finalement, ayant dressé une épée devant lui, il se jeta dessus, et, traversé par le fer de part en part, il expira; il n'avait pas joui quatre ans entiers de la tyrannie.
[Extraits] de la IVe Histoire.
II. (0) Supputant la pesanteur du pouvoir et ne se croyant pas de force à le porter seul, Constantius fit venir d'Ionie Julianus, frère de Gallus, le nomma casar et lui donna pour femme sa propre soeur Hélène : il l'envoya ensuite dans les Gallies pour garder ces provinces extrêmement troublées (07)
[Extraits] de la Xe Histoire.
V. (0) Il dit que le roi Théodosius investit de la dignité royale son fils Arcadius encore tout jeune : peu après, le roi Gratianus, dans les Galaties supérieures, périt victime des manoeuvres du tyran Maxime (08)...
[Extraits] de la XIe Histoire.
I
(0) ... Il (Valentinanus le jeune) ne savait pas maîtriser sa colère, et c'est
là surtout ce qui le jeta hors de la vie (09). Un
jour qu'il s'entretenait dans son palais avec Arbagastès, les paroles de ce
barbare le mirent dans une telle fureur qu'il fit un mouvement pour tirer
l'épée contre ce général. Empêché pour le moment par le porte-lance (10),
dont il s'efforçait de saisir l'épée et qui l'arrêta, il essaya de parler de
manière à écarter le soupçon de l'esprit d'Arbagastès. Mais ce général
n'en trouva que mieux dans les paroles du prince de quoi changer le soupçon en
certitude absolue : comme il lui demandait la cause d'un geste si violent,
Valentinianus répondit que c'était pour se tuer, parce que, étant roi, il ne
faisait rien à sa volonté. Arbagastès ne s'occupa pas davantage de cet
incident (D. B.) ; mais plus tard, à Vienne, en Gallie, ayant vu le roi qui,
après son déjeuner, au milieu du jour [retiré] dans les endroits déserts du
logis royal, sur les bords du fleuve, faisait des cabrioles avec ceux qu'il
admettait (11) à ces frivoles passe-temps;
Arbagastès envoya contre lui quelques-uns de ses satellites, et ces soldats,
unissant pour cette besogne la force de leurs mains à la férocité de leur
caractère, étranglèrent ce malheureux. Pas un des serviteurs du roi n'était
là, l'heure du déjeuner les ayant appelés ailleurs. Ceux qui l'avaient
étranglé, de crainte qu'on ne vînt à l'instant même rechercher les auteurs
du crime, lui enroulèrent autour du cou son mouchoir en manière de lacet et le
pendirent pour faire croire qu'il s'était volontairement étranglé lui-même.
II. (0) Arbagastès ayant ainsi fait périr Valentinianus, et se trouvant
écarté du trône par sa naissance, car était né barbare, établit roi des
Romains un certain Eugénius, maître [d'éloquence] (12)
de profession, et hellène de religion. Théodosius, instruit de cette
[usurpation], donne à Honorius la couronne royale (13),
s'occupe lui-même, tout l'hiver de ses préparatifs de guerre et dès
l'apparition du printemps entre en campagne contre le tyran. Arrivé près des
Alpes, il s'en rend maître par trahison ; il se rencontre avec le tyran près
d'un fleuve qu'on surnomme Eau-Froide ; un rude combat s'engage, beaucoup
d'hommes périssent de chaque côté ; mais la victoire, en haine du tyran, fait
honneur à la royauté légitime. Le tyran est pris et il a la tête tranchée.
Arbagaste, désespéré, se jette sur son épée et se tue ...
III.(0) [Il dit] qu'à côté d'Arcadius, en Orient, régnait Rufin ; qu'en
Occident, Stélichon tenait le même rang qu'Honorius. Ni l'un ni l'autre ne se
refusaient à attribuer à chacun des fils de Théodosius les insignes et le
titre de la royauté, mais ils gardaient pour eux la réalité du pouvoir, celle
qui s'exerce par la main et la langue (14) et sous
le nom d'hyparque (15) ils régnaient sur le prince
régnant. Ils ne se contentaient ni l'un ni l'autre de commander sous les rois.
Rufin s'ingéniait à tirer à lui-même le titre de roi, Stélichon
s'évertuait pour en revêtir son fils Euchérius. Quant à Rufin, les soldats
de l'armée qui fut ramenée de Rome, après avoir fait la guerre avec
Théodosius au tyran (16), le massacrèrent à
coups de sabre dans ce qu'on appelle le Tribunal; aux pieds mêmes du roi, soit
qu'ils eussent reçu de Stélichon des ordres pour agir ainsi, soit qu'ils
l'eussent pris en flagrant délit de moqueries à leur adresse. Il fut ainsi mis
en pièces le jour de sa vie où des [officiers] recruteurs l'avaient presque
revêtu de la pourpre (17). Rufin, dit Philostorge,
était de belle taille, l'air mâle ; son intelligence se montrait dans les
mouvements de ses yeux, dans l'aisance de sa parole. Arcadius, au contraire,
était petit, mince, sans force pour l'action, le teint noir. Cette paresse
morale s'annonçait par ses paroles, par la nature de ses yeux, qu'elle montrait
somnolents, entraînés vers la terre et comme incapables de se porter en haut.
De là l'erreur de Rufin, qui se figurait que rien qu'à le voir l'armée se
donnerait la joie de le prendre pour roi et de déposer Arcadius. Cependant les
soldats, lui ayant coupé la tête, la mirent au bout d'une pique avec une
pierre dans la bouche et coururent [la montrer] partout. Ils lui coupèrent
pareillement la main droite et la promenèrent dans tous les ateliers de la
ville en disant : « Donnez à ce [pauvre] affamé. » Et même cette quête
produisit beaucoup d'or ; ceux qui voyaient cet objet donnaient de bon coeur de
l'or pour prix d'un spectacle selon leur coeur. Voilà où aboutit pour Rufin la
passion de régner.
VI. (0) Il dit que le roi Arcadius, après la mort de son père, prit pour
épouse la fille de Baudon (18). Or, Baudon,
barbare de naissance, avait occupé un rang distingué en Occident comme maître
de la milice. La jeune femme n'avait pas l'indolence naturelle de son mari ; il
y avait en elle une honnête mesure de hardiesse barbare. Elle avait déjà
donne à Arcadius deux filles, Pulchérie et Arcadie ; plus tard, elle en eut
une troisième, Marine, et un fils nommé Théodosius.
[Extraits] de la XIIe Histoire.
IV. Le frère de sa soeur, [Adaülf lui succéda (19)... il répudia sa première femme] qui était de la race barbare des Sauromates; alors, dit Philostorgios, s'allia à la race de la pourpre (20) celle qui tire du fer son origine; et non pas seulement alors, mais aussi lorsque Adaülf s'attacha à Placidie par les liens du mariage; et, en effet, la race de la pourpre (Constantin) nourrissant l'espoir de battre Adaülf et d'épouser ensuite Placidie... Après un court intervalle de temps, Adaülf, à qui la colère avait fait jouer nombre de drames, fut égorgé par un de ses domestiques. Dès lors, les barbares traitèrent aveu Honorius ; ils remirent eux-mêmes sa soeur (Placidie) et Attale à ce prince qui s'engagea à leur fournir des vivres, et leur attribua une partie du territoire des Galates (Gaulois) pour le cultiver.
Rhéteur et Sophiste (21).
HISTOIRE BYZANTINE (22).
(Histoire gothique.)
VIII.
(0) Cette ambassade avait pour objet d'adoucir Attèla (23)
qui voulait qu'on lui livrât Silvanus, fils d'Armius, préfet du trésor à
Rome, parce qu'il avait reçu d'un certain Constantius des coupes d'or. Ce
Constantius était sorti de chez les Galates (Gaulois) de l'occident, et il
avait été envoyé, lui aussi, à Attèla et à Blèda, comme le fut après lui
un autre Constantius, en qualité de secrétaire... Attèla et Blèda,
soupçonnant de trahison ce Constantius, le firent mettre en croix (24)...
XV. L'esprit d'Attela était partagé entre des desseins divers, embarrassé
pour décider quels peuples il attaquerait d'abord; il lui parut qu'il ferait
bien d'entreprendre la guerre la plus grande et de mener son armée en Occident,
dans la pensée qu'il n'aurait pas à combattre seulement, contre les Italiotes,
mais aussi contre les Goths et les Francs, contre les Italiotes, pour prendre
[comme femme] Honoria avec ses richesses, contre les Goths, pour rendre service
à Gézérich.
XVI. Attèla, pour faire la guerre aux Francs, saisit le prétexte de la mort de
leur roi et des différends qui s'élevèrent entre ses fils au sujet du trône,
l'aîné ayant résolu d'amener à son alliance Attèla, le plus jeune Aétius.
Ce jeune prince, nous l'avons vu en ambassade à Rome, alors qu'il n'avait pas
encore de barbe et que sa chevelure blonde, fort longue, flottait sur ses
épaules (25). Aétius l'avait adopté, et, lui
ayant fait, ainsi que le roi (l'empereur) de riches présents, gages d'amitié
et d'alliance, il l'avait renvoyé. Pour ces motifs, Attela, faisant, cette
expédition, envoya de nouveau des hommes de sa suite en Italie demander la main
d'Honoria...
XXVII. Majorianus, le roi des Romains d'Occident, qui avait déjà pour alliés
les Goths de la Galatie (Gaule), soumit aussi, soit par la force des armes, soit
par la persuasion, les peuples habitant sur les frontières de son empire (26)...
XXX. Les Romains d'Occident en étaient venus à craindre que Marcellinus, si
ses forces s'augmentaient, ne leur fit la guerre, leurs affaires étant par
différentes causes en grand désarroi; car ils étaient menacés d'un côté
par les Vandèles, de l'autre par Aegidius, un vaillant homme sorti de chez les
Galates d'Occident, ancien compagnon d'armes de Majorianus, ayant avec lui une
nombreuse armée et irrité du meurtre du roi (de l'empereur). Mais alors il fut
détourné de faire la guerre aux Italiotes par ses démêlés avec les Goths de
la Galatie (Gaule), à qui il disputait des terres sur leurs frontières : il
les combattait avec énergie et dans cette guerre il se montra par de grands
exploits un vaillant capitaine (27).
HISTOIRE (28).
Discours II.
Après la mort de. [Julius] Népos, roi de Rome, et l'expulsion de son successeur Augustule, Odoacre resta maître de l'Italie et de Rome même. Mais les Galates (Gaulois) d'Occident étaient contre lui ; ils envoyèrent des ambassadeurs à Zénon; Odoacre lui en envoya aussi et Zénon pencha davantage du côté d'Odoacre (29)...
SUITE DE DION (30).
VI (0). Le roi Galiènus envoie à Postumus, proclamé empereur, des ambassadeurs bien instruits de ce qu'il avait fait et chargés de lui dire qu'il fallait que ceux qui occupaient les points fortifiés [des frontières] se tinssent tranquilles. « Laisse-moi entrer [dans les Gallies], nous combattrons, et le vainqueur sera roi. » Mais Postumus lui répliqua : « Ni je ne te permettrai jamais volontairement de passer les Alpes, ni je ne souhaite d'être mis dans la nécessité de faire la guerre aux Romains. » Galiènus envoie de nouveau vers lui : « Eh bien, dit-il, combattons tous deux seul à seul, les Romains n'en souffriront pas. » L'autre lui répliqua : « Je ne suis point gladiateur, je ne l'ai jamais été ; les provinces que nous perdions et que tu m'avais chargé de sauver, je les ai sauvées, et les Galls m'ont pris pour roi ; je me contente de commander à ceux qui m'ont volontairement choisi; dans la mesure de mon intelligence et de mon pouvoir, je les défends. »
SOCRATÉS LE SCOLASTIQUE (31).
SOCRATE ET SOZOMÈNE.
1° Svkr‹touw sxoliastikoè
kaÜ „ErmeÛou Svzom¡nou ƒEkklhsiastik¯ „IstorÛa.
- Socratis scholastici et Hermiae Sozomeni Historia ecclesiastica. Henricus
Valesius græcum textum collatis mss. codicibus emendavit, latine vertit et
annotationibus illustravit.
Adjecta est ad calcem Disputatio Archelai episcopi adversus Manichaeum. -
Parisiis, typis Petri Le Petit, Regii typographi : via Jacobæa, sub signo
Crucis aureæ. M. DC. LXXXVI; in-f°.
2° Histoire de l'Église, écrite par Socrate. Traduite par M. Cousin,
président en la Cour des Monnoies. Dédiée à Monseigneur le Dauphin. T.II. -
A Paris, chez Damien Foucault, imprimeur et libraire ordinaire du Roi. M. DC.
LXXXVI, in-4°. - Histoire de l'Église, écrite par Sozomène, etc. T. III. -
Le reste de même que pour le vol. contenant l'Histoire de Socrate.
HISTOIRE ECCLÉSIASTIQUE (32).
Tome I.
Chap.
2. (0) Dans les Brettanies, Constantin fut proclamé roi, à la place de
Constantius, son père, mort dans la première année de la CCLXXIe olympiade,
le 25e jour du mois de juillet ...
Chap. 9 (0)... L'ordre convenable est celui qu'observent toutes les églises des
contrées de l'Occident, du Midi, du Nord et quelques-unes des pays de l'Orient,
et c'est pourquoi tous ont pensé que, pour le moment, cet usage est bon, et
moi-même j'ai promis que, grâce à votre intelligence, vous l'auriez pour
agréable ; que ce qui dans la ville des Romains, en Italie et en Afrique, dans
toute l'Égypte, les Hispanies, les Gallies, les Brettanies... est observé d'un
commun accord, serait accueilli bien volontiers par votre haute raison (33)...
Chap. 31... Entraîné-par cette accusation, le roi (Constantius) se met en
colère ; il envoie en exil Athanasios et lui assigne les Gallies pour
résidence. Quelques-uns disent qu'en agissant ainsi le roi avait en vue l'union
de l'Église, parce qu'Athanasios refusait absolument d'entrer en communion avec
Ariôs èt ses sectateurs : c'est ainsi qu'Athanasios demeura à Trivéris, dans
la Gallie.
Tome II.
Ch.
2. Mais Athanasios prévint les desseins de ses ennemis (34),
il revint à Alexandrie muni d'une lettre d'un des Augustes. Cette lettre,
Constantin le jeune, qui portait le même nom que son père, l'avait adressée
de Trivéris, en Gallie au peuple d'Alexandrie.
Chap. 3 (0). « Constantin caesar au peuple de l'église catholique
d'Alexandrie. Il n'a point échappé, je crois, à la-connaissance de votre
raison sacrée que, si Athanasios, l'interprète de notre adorable loi, a été
pour un temps envoyé dans les Gallies, c'est afin d'éviter que la barbarie de
ses sanguinaires ennemis menaçant sa tête sacrée d'un perpétuel danger, il
n'eût à souffrir, par la perversité des méchants, d'irrémédiables
malheurs.... condamné à vivre dans les pays qui me sont soumis, il a trouvé
en abondance dans la ville où il demeurait tout ce qui est nécessaire à la
vie. »
Ch. 25. .... Magnentius s'érigea en tyran dans les contrées occidentales.
Constant, qui régnait dans les contrées occidentales et qui résidait alors
dans les Gallies, fut tué par lui en trahison, et à cette occasion s'alluma
une très grande guerre civile. Le tyran Magnentius était maître de toute
l'Italie; il avait soumis l'Afrique et la Libye, et il tenait, après les avoir
prises, les Gallies elles-mêmes... Magnentius envahissant l'occident le
subjuguait tout entier.
Chap. 32. Ce Magnentius s'étant emparé de Rome, la ville royale, ôta la vie
à plusieurs membres du Sénat, et fit même périr plusieurs personnes du
peuple. Mais, quand les généraux de Constantius; ayant rassemblé les forces
de Rome, marchèrent contre lui, il s'éloigna de cette ville et occupa les
Gallies, où eurent lieu de continuelles rencontres, à l'avantage tantôt d'un
parti tantôt de l'autre. Enfin, Magnentius, défait près de Mursa, qui est un
fort des Gallies (34a), s'enferma dans cette
place, et il s'y passa, dit-on, le fait merveilleux que voici : Magnentius,
voyant ses soldats abattus par leur défaite, tâcha de les raffermir et monta
pour cet effet sur un haut tribunal. Mais eux, voulant le saluer des
acclamations que d'habitude on adresse aux rois, les firent sans y penser en
l'honneur de Constantius, et ce n'est pas Magnentius, mais Constantius que tous
d'une voix ils acclamèrent auguste. Magnentius, estimant que c'était pour lui
un mauvais présage, quitta aussitôt le fort et s'enfuit plus avant dans les
Gallies. Les généraux de Constantius, qui l'y poursuivaient, l'y attaquèrent;
une nouvelle rencontre eut lieu près de l'endroit nommé Montoséleucos, où
Magnentius, entièrement défait, s'enfuit seul à Lugdunum, ville de la Gallie,
à trois journées de marche du fort de Mursa. Arrivé dans cette ville de
Lugdunum, il y fait mourir d'abord sa mère, puis son frère qu'il s'était
associé comme caesar, enfin il s'égorge lui-même. Et cela se fit sous le
sixième consulat de Constantius, sous le deuxième de Constantius Gallus, le
15e jour du mois d'Auguste. Peu de temps après, Décentius, autre frère de
Magnentius, mit fin à sa vie en s'étranglant. Ainsi s'accomplit la destinée
de ce tyran : la république n'y gagna pas une tranquillité parfaite : il s'en
éleva bientôt après, un autre, du nom de Silvanus, mais, tandis qu'il mettait
le trouble dans la Gallie, les généraux de Constantius l'eurent bien vite
détruit.
Ch. 34... Peu de temps après, ayant fait caesar Julianus, frère de Gallus, il
(Constantius) l'envoya contre les barbares qui étaient en Gallie (35)...
Ch. 36. Alors les évêques s'assemblèrent en Italie ... dans la ville de
Mediolanum il y avait Paulinus, évêque de Trivéris (36),
en Gallie, Dionysius et Eusèbius, évêques, l'un d'Albe (37),
la métropole des Itales, l'autre, Eusébius, de Brécelles (Verceil), ville des
Ligyes, en Italie... ils dirent que le blâme infligé à Athanasios n'était
pas fondé...
Ch. 41 (0). Après la foi [proclamée] à Nicaea, on en publia plus tard deux
expositions à Antiochia, aux Encoenies. La troisième est celle qui fut
présentée par Narcisse et les siens au roi Constant, dans les Gallies...
Ch. 47. Pendant que le roi Constantius résidait à Antiochia, le caesar
Julianus, dans les Gallies, en vint aux mains avec une multitude de barbares ;
il fut vainqueur et par là devint cher à tous les soldats, qui le
proclamèrent roi ...
Tome III.
Ch.
1. (0) ... Enfin, la femme du roi, Eusébie, ayant découvert le lieu où se
cachait Julianus, persuada au roi (Constantius) de ne lui faire aucun mal et de
lui permettre d'aller philosopher à Athènes. Pour tout dire en un mot, le roi,
l'ayant rappelé de là auprès de lui, le fit caesar et, lui ayant donné pour
femme sa soeur Hélène, l'envoya dans les Gallies contre les barbares. Car ces
barbares, que le roi Constantius avait peu auparavant pris à sa solde pour
être ses alliés contre Magnéntius, ne lui avaient rendu aucun service contre
ce tyran et pillaient les villes des Romains. Mais, comme Julianus était encore
jeune d'âge, il lui ordonna de ne rien faire sans avoir pris l'avis des chefs
de l'armée. Cependant, ceux qui avaient reçu ce pouvoir, s’occupaient des
affaires avec trop d'indolence et ainsi les barbares devenaient plus forts.
Julianus laissa les généraux se livrer aux festins,à la débauche, mais il
éveillait le courage des soldats en leur promettant une récompense
déterminée pour chaque barbare qu'ils auraient tué. C'est ainsi qu'il
commença d'affaiblir les barbares et de se faire aimer des soldats.
Ch. 10 (0). Il (Eusébios, évêque de Brecelles (38)
avait été prévenu en cela (39) par Hilarius,
évêque de Pyctaves, - c'est une ville de la seconde Akytanie, - qui avait
inspiré les dogmes de la même foi aux évêques d'Italie et de Gallie. Revenu
en effet le premier de l'exil, il s'était emparé de ces pays. Ils combattirent
tout deux généreusement, pour la foi. Hilarius, qui était éloquent, exposa
dans des livres en langue romaine les dogmes de la consubstantialité. Mais cela
n'arriva qu'un peu après le rappel. des exilés.
Tome IV.
Ch. 12 (0). Ils (les députés des Macédoniens (40)) ne rencontrèrent pas le roi (Valentinien) ; il était occupé dans les Gallies à une guerre contre lesSauromates...
Tome. V.
Ch.
6 Gratianus marcha tout de suite vers les Gallies, où les Alamans faisaient des
incursions.
Ch. 11 (0) ... Maxime, parti des contrées de la Brettanie, se souleva contre
l'empire des Romains et attaqua Gratianus déjà sous le faix de sa guerre
contre les Alamans... Justine, mère du roi Valentinianus, arrivant à
Médiolanum, y suscita de grands troubles contre l'évêque Ambrosius et ordonna
qu'il fût envoyé en exil... Sur ce point, on annonce que Gratianus a été
tué, en trahison par le tyran Maxime (41).
Andragathius, général de Maxime, caché dans une voiture qui avait l'air d'une
litière, et était portée par des mules, avait donné l'ordre à ses gardes de
dire que c'était la femme du roi Gratianus ; dans cet équipage, il rencontra
ce prince près de la ville de Lugdunum, en Gallie, au passage d'un fleuve.
Gratianus, croyant que c'était sa femme, ne se mit point en garde contre la
trahison, et, comme un aveugle dans une fosse, il tomba entre les mains de son
ennemi, car Andragathios, s'élançant hors de sa chaise, le tua de sa main...
Ch. 25 (0). Dans les contrées de l'Occident, il y avait un grammairien du nom
d'Eugénius qui enseignait les lettres romaines; ayant laissé là son
enseignement, il s'enrégimenta dans les offices royaux et y devint contrôleur
aux écritures (42) du roi. Comme c'était un
lettré, il y fut plus honoré que les autres et ne sut pas user modérément de
sa fortune. Il prit pour associé Arbogastès, un soldat originaire de la petite
Galatie, homme d'un caractère violent et sanguinaire, qui était arrivé au
poste de chef de la milice, et il inclina vers la tyrannie. À eux deux, ils
complotent le meurtre du roi Valentinianus, après s'être entendus avec les
eunuques de la chambre. Ces serviteurs, qui avaient reçu la promesse qu'il leur
serait fait une position plus grande que celle qu'ils avaient, étranglèrent le
roi pendant son sommeil. Aussitôt donc, Eugénius, devenu le maître dans les
contrées de l'Occident, fit tout ce qu'il est naturel que se permette un tyran.
À cette nouvelle, le roi Théodosius... se rend de nouveau en toute hâte dans
les contrées de l'Occident ; et dès son départ pour la guerre contre
Eugénius, une foule de barbares d'au delà de l’Ister le suivent, bien
résolus à combattre avec lui contre le tyran. Après un court intervalle de
temps, Théodosius arrivé dans les Gallies avec de grandes forces, car
Eugénius se préparait [à la lutte], ayant lui-même plusieurs milliers de
soldats. La rencontre eut lieu près d'un fleuve appelé le Frigdum (43);
Arbogastès, l'auteur de si grands maux, qui s'était enfui deux jours après la
rencontre [des deux armées], reconnut qu'il ne pourrait sauver sa vie et se
perça lui-même de son épée.
Tome VI.
Ch. 4 (0) Le 27 du même mois (novembre (44)) arrivait (à Constantinople) l'armée qui avec le roi Théudosius, avait combattu le tyran. Comme le roi Arcadius était allé, selon l'usage, au-devant de cette armée hors des portes [de la ville], les soldats tuèrent Rufin, son préfet du prétoire : ce Rufin était soupçonné d'aspirer à la tyrannie, et l'on croyait que c'était lui qui avait appelé les Huns, peuple barbare, sur le territoire des Romains...
Tome VII.
Ch. 30... Il est un peuple barbare, qui a ses demeures au delà du fleuve du Rhèn, on l'appelle les Burgunzions (45). Ils mènent une vie tranquille, car ils sont presque tous charpentiers et se nourrissent du salaire qu’ils tirent de ce métier. Le peuple des Huns, par des invasions continuelles, ravageait leur pays et leur tuait souvent beaucoup de monde. Dans cette situation difficile, ils n'eurent pas recours à un homme, ils aimèrent mieux s'adresser à un dieu. Se mettant dans l'esprit que le dieu des Romains est d'un puissant secours pour ceux qui le craignent, tous, d'un commun accord, ils en vinrent à croire au Christ (46). Ils se rendirent dans une ville de la Gallie et prièrent l'évêque de leur donner le baptême chrétien. L'évêque, après les avoir préparés à jeûner pendant sept jours et leur avoir enseigné [les principes de] la foi, les baptisa le huitième jour et les congédia. Pleins de confiance désormais, ils marchèrent contre leurs tyrans, et leur espérance ne fut pas trompée. Une nuit, le roi des Huns, qui se nommait Uptar, creva d'avoir trop mangé, et les Burgunzions, attaquant les barbares privés de leur chef, firent vainqueurs, bien que dans cette rencontre ils fussent peu nombreux contre une multitude d'ennemis : trois mile hommes en mirent à bas environ dix mille. Depuis lors, les Burgunzions furent de fervents chrétiens. C'est vers ce temps que mourut Barbas, l'évêque des Ariens.
HERMIAS SOZOMÉNOS (47).
HISTOIRE ECCLÉSIASTIQUE (48).
Tome I.
Ch. 5 (0)... Il n'est pas vraisemblable que Sopatros (49) eut d'abord un entretien avec Constantin (50), qui gouvernait alors seulement la partie [de l'empire] voisine de l'Océan et du Rhèn. Les différends de ce prince avec Maxentius, qui se trouvait alors en Italie, mettaient le trouble dans les affaires des Romains, et il n'était pas facile de se rendre chez les Galates, chez les Brettans et les autres peuples de ces contrées, où l'on s'accorde à dire que Constantin embrassa la religion des chrétiens, avant de marcher contre Maxentius et d'arriver à Rome et en Italie...
Tome II.
Ch..
6 (0). L'Église grandissait dans tout le monde romain, et la religion
pénétrait même chez les barbares ; les peuples des bords du Rhèn étaient
déjà chrétiens, les Celtes, et à l'intérieur [du pays] et à son
extrémité, vers l'Océan, les Galates, ayant embrassé depuis longtemps la foi
du Christ, s'étaient accommodés d'une vie plus douée et plus raisonnable...
Ch. 28 (0)... Et le roi, soit qu'il crût à la vérité de ces accusations,
soit qu'il pensât qu'à l'avenir les évêques s'accorderaient une fois
qu'Athanasios serait éloigné, assigna à ce prélat pour résidence Trivéris,
chez les Galates du couchant, et Athanasios y fut relégué (51).
Tome III.
Ch.
2 (0). À ce moment (52), Athanasios quitta la
Galatie occidentale et revint à Alexandrie. Constaritin, de son vivant, avait
résolu de le rappeler; il exprima, dit-on, sa volonté dans son testament.
Mais, comme il fut prévenu par la mort, son fils, qui portait le même nom et
qui commandait aussi chez les Galates de l'occident, permit à l'évêque de
revenir et écrivit dans ce sens au peuple d'Alexandrie... « Je ne pense pas
qu'il ait échappé à la connaissance de votre intelligence sacrée
qu'Athanasios, l'interprète de notre adorable loi, avait été tout exprès
envoyé dans les Gallies pour.... »
Ch. 6 (0) Mais ni celui qui occupait alors le siège [épiscopal] de Rome, ni
aucun évêque du reste de l'Italie ou des Romains de par delà n'assistèrent
à cette réunion; à ce moment les Francs ravageaient au couchant le pays des
Galates (53).
Ch. II (0)... Les évêques du levant déposèrent entr'autres, Maximin,
évêque de Trivéris pour avoir excommunié ceux qui d'orient étaient venus en
Gallie (54)...
Tome IV.
Ch.
I (0)... La quatrième année après le concile de Sardô, Constant est tué
chez les Galates du couchant (55). Magnentius, qui
avait préparé ce meurtre, soumit à son obéissance tout le pays où
commandait Constant...
Ch. 7 (0). Sur ces entrefaites (56), Magnentius,
ayant occupé la vieille Rome, fit périr plusieurs sénateurs et plusieurs
plébéiens. Mais, comme il apprit que déjà les généraux de Constantius
marchaient contre lui, il se retira chez les Galates du couchant (dans la Gaule
occidentale) ; et là, dans plusieurs attaques venant soit d'un côté, soit de
l'autre, la victoire fut tantôt pour ceux-ci, tantôt pour, ceux-là, jusqu'à
ce qu'enfin Magnentius, défait, s'enfuit à Mursa, - c'est un fort des Galates,
- où, voyant que ses propres soldats, à cause de leur défaite, en avaient
assez [de la lutte], debout sur une éminence, il essaya de relever leur
courage. Mais eux, dans leur empressement à adresser à Magnentius, aussitôt
qu'il parut, les paroles par lesquelles ils ont l'habitude de saluer leurs rois,
ils acclamèrent auguste, sans le savoir et sans le vouloir, Constantius au lieu
de Magnentius. Celui-ci, conjecturant d'après cela que Dieu ne lui donnait pas
l'empire, quitta ce fort [de Mursa], et essaya d'aller plus loin. Mais l'armée
de Constantius le poursuivait ; la rencontre eut lieu près de Montioseleuque ;
s'étant échappé seul, il se sauva à Lugdunum. Et là, ayant tué sa mère et
son frère qu'il avait fait caesar, il s'égorgea enfin lui-même. Et
Décentius, son autre frère, ne tarda guère [à le suivre] et s'étrangla de
ses propres mains. Et les troubles publics ne finirent pas pour cela. Peu de
temps après, chez ces-mêmes Galates du couchant, un certain Silvanus prit la
tyrannie et fut aussitôt renversé par les généraux de Constantius.
Ch. 21 ... (0) Résolu de gagner l'Orient, il (Constantius) se mit en route, et,
ayant appelé son cousin Julianus, il le fit caesar et l'envoya chez les Galates
du couchant.
Tome V.
Ch. 1 (0) A ce moment, le caesar Julianus, ayant vaincu les barbares des bords du Rhèn, les tua ou les fit prisonniers (57). Arrivé dès lors à l'illustration, chéri d'ailleurs de ses soldats pour sa modestie et sa douceur, il fut par eux proclamé auguste. Et, sans avoir pour ce fait présenté , comme il convenait, aucune excuse à Constantius, il changea les officiers choisis par ce prince et montra, à dessein des lettres par lesquelles l'empereur, appelant les barbares contre Magnentius, les avait introduits dans l'empire romain.... Peu de temps après, Julianus, étant entré dans Constantinople, y fut proclamé empereur. Les Hellènes contaient qu'avant qu'il quittât les Galates, les devins et les démons l'avaient poussé à cette expédition, en lui prédisant la mort de Constantius et une révolution prochaine ...
Tome VI.
Ch. 36... (0) Dans sa grande indignation, Valentinianus poussait de tels cris, et de l'excès de son effort résulta un déchirement intérieur; il se rompit à la fois une veine et une artère, et, ayant perdu beaucoup de sang (58), il termina sa vie dans un château fort de la Gallie (59).....
Tome VII.
Ch.
2 (0). Considérant que les barbares, riverains de l’Ister incommodaient les
Illyriens et les Thraces, qu'il convenait de les repousser, et que sa présence
était nécessaire dans ses provinces de l'Occident, surtout au moment où lés
Alamans maltraitaient les Galates de cette région, il (Gratianus) choisit à
Sirmium, pour l'associer à l'empire, Théodosius, originaire de la partie de
l'Ibérie qui avoisine le mont Pyrènaeum...
Ch.4 (0). Vers ce temps-là (60), comme les Alamans
inquiétaient encore les Galates de l'Occident, Gratianus retourna dans cette
partie de son domaine héréditaire dont il s'était réservé à lui-même et
à son frère l'administration...
Ch. 13.... (0) Pendant que la mère du roi (Justine) était toute à ces soins
et pressait l'exécution de la loi (61), arrive la
nouvelle qu'Andragathios, général de Maxime, avait tué Gratianus en trahison.
Porté dans le char royal où il se tenait caché, le traître avait ordonné
aux guides d'annoncer la femme du roi. Sans rien examiner, Gratianus passa le
fleuve à cet endroit ; récemment marié, tout jeune et très amoureux de sa
femme, dans son ardent désir de la voir, il ne prit aucune précaution et tomba
entre les mains d'Andragathios ; une fois pris, on ne tarda guère à le mettre
à, mort. Maxime, cependant, ayant rassemblé une nombreuse armée, de Brettans,
de Galates des contrées voisines, de Celtes et d'autres peuples de ces
pays-là, marcha vers l'Italie...
Ch. 22. ... (0) Sur ce point, arrive la nouvelle que le roi Valentinianus était
mort étranglé (62). On disait que ceux qui avaient ourdi cette trame pour le
faire périr s'étaient servis des eunuques de la chambre; c'étaient,
entr'autres habitués du palais, Arbogastès, son maître de la milice, parce
qu'ils voyaient le jeune prince imiter son père dans l'exercice du pouvoir et
s'indigner souvent contre leurs décisions. D'autres pensent qu'il fût son
propre meurtrier, parce que, dans sa bouillante jeunesse, il voulait en user
avec certaines personnes comme il ne devait pas le faire et qu'on l'en
empêchait... Et Eugénius, qui se repaissait de ces espérances (63),
rassembla une nombreuse armée et, s'étant emparé de ces hauteurs que les
Romains appellent les Alpes Julies, il gardait ces portes de l'Italie qui
n'offrent pour y entrer qu'un étroit passage, défendu de chaque côté par des
montagnes escarpées et très hautes...
Ch. 23. Eugénius, [vaincu], courut se jeter aux pieds du roi et lui demanda la
vie. Pendant qu'il le suppliait, un des soldats lui coupa la tête. Arbogastès,
qui s'enfuyait après la bataille, se tua de sa propre main...
Tome VIII.
Ch. 1 (0). A ce moment (64), les barbares Huns faisaient des incursions en Arménie et dans certaines parties de l'empire d'Orient, et l'on disait qu'ils y avaient été secrètement attirés, pour y porter le trouble, par Rufin, préfet du prétoire d'Orient, qu'on soupçonnait d'ailleurs d'aspirer à la tyrannie, et telle fut même la cause pour laquelle il ne tarda guère à être mis à mort. Le jour où l'armée revint de la bataille contre Eugénius, alors que le roi, suivant l'usage, alla au-devant d'elle hors de Constantinople, les soldats, sans hésiter, massacrèrent Rufin.
Tome IX.
Ch.
4... (0) Après la mort d'Arcadius (65), Honorius,
par intérêt pour son cousin, eut l'intention de retourner à Constantinople,
afin d'établir auprès de lui des ministres fidèles, qui veillassent à son
salut et au maintien de son autorité royale ; il le considérait comme son fils
et craignait pour lui quelque malheur à cause de sa jeunesse, qui l'exposait à
tous les complots. Comme il allait se mettre en route, Stélichon persuada à
Honorius de rester en Italie, disant que cela était nécessaire, parce qu'il se
trouvait qu'un certain Constantin venait de s'emparer de la tyrannie à
Arèlatus (66). Or, ayant pris celui des deux
sceptres que les Romains appellent labarum; et reçu des lettres du roi qui lui
permettaient de se rendre en Orient, il allait partir en prenant avec lui quatre
légions. Sur ces entrefaites, le bruit ayant couru qu'il avait des desseins
arrêtés contre le roi et qu'il préparait la tyrannie de son fils, ayant pour
complices ceux qui étaient au pouvoir, les soldats se révoltent, ils tuent le
préfet du prétoire d'Italie, celui des Galates, les généraux et les autres
titulaires des offices du palais ; Stélichon lui-même est massacré par les
soldats à Ravenne (67)...
Ch. 14 (0) D'abord les soldats, s'étant révoltés en Brettanie, proclamèrent
Marcus tyran, et, après lui, Gratianus, quand ils eurent tué Marcus. Mais,
lorsqu'à quatre mois d'intervalle au plus Gratianus eut été aussi massacré
par eux; ils élurent Constantin (68)... Or, ce
Constantin, ayant passé de la Brettanie à Bubonia, ville de la Galatie située
sur la mer, attira à lui les soldats campés chez les Galates et les Aquitans,
et mit sous son obéissance tous les sujets de l'empire en ces contrées
jusqu'aux montagnes de l'Italie et de la Galatie, que les Romains appellent
Alpes Cotties...
Ch. 12 (0) ... La puissance de Constantin étant tombée (69),
alors reprirent courage les Vandales, les Suèves et les Alains, peuples
barbares, qui s'emparèrent des passages des Pyrénées et prirent nombre de
châteaux-forts et de villes des Hispans et des Galates, avec ceux qui
commandaient pour le tyran.... (D. B.) Constantin s'enfuit à Arèlattis, qu'il
occupa et où vint aussi dans le même temps son fils Constant, qui s'était
enfui d'Hispanie.
Ch. 13 (0). A ce moment (70), Gérontius, le
meilleur des généraux de Constantin, devint son ennemi. Croyant que Maxime,
son parent (71), était propre à faire un tyran,
il le revêtit de la toge royale et lui permit de demeurer à Tarraconè. Quant
à lui, il marcha en personne contre Constantin et s'arrangea de façon à faire
mourir en passant, le fils de ce dernier, Constant, qui était à Vienne. Car
Constantin, instruit de l'entreprise de Maxime, avait envoyé au delà-du Rhèn
Edovich, un de ses généraux, pour se ménager l'alliance des Francs et des
Alamans, et il avait confié à son fils Constant la garde de Vienne et des
autres villes de cette province ; or Gérontius, ayant poussé jusqu'à
Arèlatus, avait mis le siège devant cette ville. Mais peu après était
arrivée en face du tyran l'armée d'Honorius, que commandait Constantius, le
père de Valentinianus qui fut roi, et Gérontius s'était aussitôt enfui avec
un petit nombre de soldats. (0) La plupart s'étaient joints à ceux de
Constantius. Ceux qui étaient en Hispanie, comme Gérontius après sa fuite
leur paraissait bien méprisable, délibérèrent de le tuer; ils cernèrent sa
maison pendant la nuit et l'assaillirent. Gérontius, avec un seul Alain qui lui
était dévoué et un petit nombre de domestiques, lançant des flèches du haut
de sa maison, tua plus de trois cents de ces soldats. Mais, les traits étant
venus à manquer, les domestiques s'enfuirent, descendant du toit à la
dérobée. Gérontius aurait pu se sauver de la même manière, il ne le voulut
pas, étant retenu par son amour pour Nonnichia, sa femme. Vers le point du
jour, les soldats mirent le feu à la maison, et dès l'ors, n'ayant plus
d'espoir de salut, du consentement de l'Alain, son ami, il lui coupa là tête.
Après cela, comme sa femme se lamentait, et, toute en larmes, se jetait contre
son épée, demandant, avant de tomber au pouvoir d'un étranger, à mourir de
la main de son mari, le suppliant de lui accorder cette dernière faveur, [il
lui coupa aussi la tête] Elle était chrétienne. Gérontius se frappa lui
troisième de son épée, mais, sentant qu'il ne s'était pas donné un coup
mortel, il tira le poignard qu'il portait le long de sa cuisse, et se l'enfonça
dans le coeur...
Ch. 14. Constantin, bloqué par l'armée d'Honorius, soutint encore le siège,
parce qu'on lui avait annoncé qu'Edovich allait arriver avec une grosse armée
de secours, et cette nouvelle n'effrayait pas peules généraux d'Honorius ; ils
songeaient même à s'en retourner en Italie pour essayer d'y faire la guerre.
Cet avis prévalut, et, comme on annonçait qu'Edovich approchait, ils passent
le Rhodan ; Constantius, qui avait [sous ses ordres] l'infanterie, attend de
pied ferme l'arrivée de l'ennemi; Ulphilas, collègue de Constantius, se tenait
caché non loin de là avec la cavalerie. Les ennemis dépassèrent l'endroit
où se trouvait l'armée d'Ulphilas, et ils allaient en venir aux mains avec les
troupes de Constantius, lorsqu'à un signal donné, Ulphilas se montre soudain
sur leurs dernières et les serre de près; les voilà en déroute, les uns
s'enfuient, les autres sont massacrés, le plus grand nombre, mettant bas les
armes, demandent quartier et sont épargnés. Édovich, ayant monté à cheval,
s'enfuit vers une maison de campagne dont il croyait que le propriétaire,
Ecdicius, qui avait reçu de lui de nombreux services, était son ami. Mais
Ecdicius lui coupa la tête et l'offrit aux généraux d'Honorius dans l'espoir
d'en obtenir de grandes récompenses et des honneurs (73).
Constantius donna l'ordre de recevoir cette tête, en disant que la république
était reconnaissante à Ecdicius du bel exploit d'Ulphilas (74),
mais, quand le traître voulut rester auprès de lui, il lui ordonna de se
retirer...
Ch. 15. Après cette victoire, l'armée d'Honorius repasse le fleuve et revient
assiéger la ville. Constantin, instruit du meurtre d'Édovich, dépose de
lui-même la pourpre et les insignes de la royauté, puis, s'étant réfugié
dans l'église, il y est ordonné prêtre. Ceux qui étaient dans les murs,
ayant au préalable reçu, les serments des assiégeants, ouvrirent leurs portes
et furent tous épargnés. Et depuis ce temps, les sujets [de l'empire] en ce
pays se remirent sous l'autorité d'Honorius et obéirent à ceux qui
commandaient pour lui. Constantin, envoyé en Italie avec son fils Julianus, fut
tué en route avant d'y arriver. Peu après furent tués aussi, et à
l'improviste, les tyrans Jovianus et Maxime, dont nous avons parlé, et
plusieurs autres...
PROCOPIOS DE CÉSARÉE (75).
PROCOPE.
1°. ProkopÛou Kaisar¡vw tÇn kat' aétòn
„IstoriÇn biblÛa öktv. Procopii
Cæsariensis Historiarum sui
temporis libri VIII, interprete Claudio Maltreto
Aniciensi, Societatis Jesu. presbytero : a quo supplementis aucti sunt Vaticanis
et in locis aliquot emendati. Parisis e typographi a Regia. M. DC. LXII,. grand
in-f°.. - C'est l'édition dont s'est servi D. Bouquet; nous en donnons la
pagination.
2° L'Histoire de Procope Cæsaréen, Des Guerres faites par l'Empereur
Iustinian contre les Vandales et les Goths, trad. en franç. par Martin Fumée,
Paris; M. D. LXXXVII, in-f°. - La Préface annonce que l'auteur a joint à sa
trad. de Procope celle des livres d'Agathias, qui se rapportent aux mêmes
peuples. L'exemplaire que nous avons entre les mains ne contient rien du
scolastique byzantin.
3° Historia Gothorum, Wandalorum et Langobardorurn ab Hugone Grotio partim
versa, partim in ordine digesta, etc, Amstelodami, et veneunt Parisiis apud
Thomam lolly, via veteris emodationis juxta terminum pontis diui Michaelis sub
signo scuti Hollandiæ. M. DC. LVI, in-8°. - Le Frontispice porte le même
titre avec cette indication : Amstelodami, apud Ludouicum Elzeviritim M D CLV. -
L'extrait de Procope est intitulé Vandalica et Gotthica Procopii. Emendata
plurimis locis : accedentibus supplementis e manuscriptis et sic versa Latine a
Hugone Grotio, pp. 1-428.
4°' Procopius ex recensione Guilielmi Dindorfii. Bonnæ: Impensis Ed.
Weberi, M DCCC XXXIIL 3 vol. in-8°; dans la collection de Niebuhr intitulée
Corpus scriptorum Historiae Byzantinae. Editio emendatior et copiosior, consilio
B. G. Niebuhrii C. F. instituta, auctoritate Academiae litterarum, regiae
Borussicae continuata. Pars II. Procopius. - Notation des mss. et des édit.: A.
Cod. Bibl. nat. - Paris; 1702, XIIIe siècle ; B. Cod. Bibl. nat. Paris, 1699,
Xve s; L. Copie de Leyde, corrigée par Jos. Scaliger; Lm. en marge de la même.
- V. Copie d'un ms. du Vatican par Luc. Holstein. - H. Édit. de David Hoeschel,
Augusta Vindelicorum, 1607; Hm. Marges de l'édit. de Hoeschel; P. Édit. de
Maltret, Paris, 1662 (vid. supra); Pm. Marges de l'édit. de Paris ou de
Maltret.
HISTOIRES (76).
1re tétrade, livre III.
I.
... Parmi les îles, la Brettanie, qui est au delà des colonnes Hèraclées, et
de beaucoup la plus grande de toutes les îles, a été, comme il convenait,
rangée dans le lot de l'Occident...
II.
Ils (les Wisigoths) pillèrent toutes les richesses de toute l'Europe, et, ce
qui est le point capital, n'ayant rien laissé à Rome de ce qui était soit à
l'État, soit aux particuliers, ils passèrent dans les Gallies. L'île de
Brettanie se sépara des Romains; les soldats qui s'y trouvaient prirent pour
roi Constantin ; ce n'était pas un homme obscur. Il rassembla aussitôt une
flotte et une armée considérable, et, à la tête de ces grandes forces, il se
jeta dans l'Hispanie et la Gallie avec l'intention de les asservir. Ensuite,
Alarich mourut de maladie, et l'armée des Wisigoths, sous la conduite
d'Adâülf, passa dans les Gallies; Constantin, défait dans une bataille,
mourut avec ses enfants (77). Les Romains, cependant, ne purent plus conserver
la Brettanie qui, depuis, demeura sous des tyrans (78).
III.
Les Vandiles, qui habitaient près du marais Mæotide, pressés par la famine,
passèrent chez les Germains, qui sont aujourd'hui appelés Francs, et vers le
fleuve du Rhèn, ayant pris pour compagnons les Alains, nation gothiques (79)....
2ème tétrade, livre Ier.
I.
... Le fleuve du Pade, qu'on appelle aussi Eridan, qui par là descend des
montagnes celtiques, et d'autres fleuves encore ... font que cette ville
(Ravenne) est entourée d'eau ...
V...
D'autre part, Justinianus envoya aux chefs des Francs une lettre ainsi conçue :
«. Les Goths ont pris par force l'Italie qui est à nous, et non seulement ils
n'ont aucune intention de nous la rendre, mais ils nous ont provoqués par des
injustices intolérables, excessives ; aussi sommes-nous contraints de marcher
contre eux, et il est juste que vous supportiez avec nous cette guerre que nous
rendent commune la vraie foi qui repousse les opinions des Ariens et la haine
qui nous anime les uns et les autres contre les Goths. » Voilà ce qu'écrivit
le roi, et, s'étant montré généreux envers eux, il leur promit de leur
donner encore plus d'argent quand ils seraient à l'oeuvre. Et ils s'engagèrent
à l'y aider de tout coeur...
XI.
«.. Vous savez (80) bien aussi que le plus grand nombre des Goths et presque
tout notre matériel de guerre est dans les Gallies et les Vénéties (81) et
dans les contrées les plus loin d'ici. Et puis encore, nous sommes en guerre
avec les Francs, et cette guerre que nous avons sur les bras n'est pas moins
lourde que celle-ci, et tant que nous ne l'aurons pas terminée à notre
honneur, en venir à une autre serait une grande folie. Dans une situation
indécise, où l'on n'a pas devant les yeux un seul et unique ennemi, il est
naturel qu'on soit défait par ses adversaires. Je dis donc qu'il faut aller
tout de suite à Ravenne, et, après en avoir fini de ta guerre des Francs et
donné à tout le reste le meilleur ordre possible, combattre ainsi avec toutes
les forces des Goths contre Bélisarius... » Ensuite, ayant rassemblé tous les
Goths de partout, Witigis mit dans cette foule de l'ordre, une répartition
régulière, distribuant à chacun selon son rang des armes et des chevaux; il
n'y eut que les Goths qui tenaient garnison dans les Gallies que, par crainte
des Francs, il ne lui fut pas possible d'appeler à lui. Ces Francs-ci étaient
anciennement nommés Germains. Quelles ont été leurs premières demeures ;
comment ils envahirent les Gallies et se brouillèrent avec les Goths, c'est ce
que je vais dire à présent.
XII.
L'Europe, à l'endroit où elle commence ressemble absolument au Péloponnèse :
elle est située entre deux mers; et la première contrée [qui se présente] le
long de l'Océan et au couchant, a été nommée Hispanie ; [elle s'étend]
jusqu'aux Alpes dans le mont Pyrènrus (82). Pour les gens de ce pays, c'est un
commun usage d'appeler alpes les passages étroits [des montagnes]. Le pays à
partir de là jusqu'aux limites de Ligurie a été appelé Gallie : là: aussi
d'autres Alpes séparent les Gals et les Ligures. La Gallie cependant est
beaucoup plus large que l'Hispanie, et cela se comprend, car l'Europe, qui
commence par une région étroite, s'étend proportionnellement, à mesure qu'on
avance, sur une immense largeur. Des deux côtés de cette contrée, l'un, celui
qui regarde vers le vent de Borée, est entouré par l'Océan; l'autre à vers
le Notus (au sud) la mer appelée Tyrrhènè. Chez les Galls, entre autres
fleuves, coulent le Rhodan et le Rhèn. Ces deux cours d'eau suivant deux routes
opposées, l'un se rend dans la mer Tyrrhènique, l'autre, le Rhèn, a son
embouchure dans l'Océan. Là se trouvent des marais où anciennement habitaient
des Germains, un peuple barbare, qui, dans le principe, n'était guère
considérable, et qu'on appelle aujourd'hui les Francs (83). À eux attenant,
habitaient les Arborykhes, qui, avec tout le reste de la Gallie et avec
l'Hispanie aussi, étaient, dès les temps anciens, sous l'obéissance des
Romains. Après eux, vers le soleil levant, s'étaient établis, avec
l'agrément d'Auguste, le premier roi (empereur), d'autres barbares, les
Thoringes; et non loin d'eux habitaient les Burguzions dans la direction. du
Notus; puis les Suabes au-dessus des Thoringes, et les Alamans, peuples
puissants qu'on trouve, en remontant bien loin, tous établis en ces. régions
et vivant sous leurs, propres lois. Dans la suite des temps, les Wisigoths,
ayant forcé les frontières des Romains, mirent sous leur obéissance toute
l'Hispanie et les Gaules en deçà du Rhodan, et les eurent pour tributaires. Il
se trouvait alors que les Arborykhes étaient devenus les soldats des Romains ;
les Germains, voulant mettre sous leur obéissance ces peuples qui étaient
leurs voisins et qui avaient rejeté leur ancienne forme de gouvernement, les
pillèrent d'abord, puis, poussés par l'amour de la guerre, marchèrent en
masse contre eux. Les Arborykhes montrèrent leur valeur et leur dévouement
pour les Romains; ils se conduisirent en braves dans cette guerre, et les
Germains, n'ayant pu les vaincre par la force, voulurent s'en faire des amis et
des parents. Ces propositions, les Arborykhes les accueillirent sans
répugnance, parce qu'ils étaient chrétiens les uns et les autres : ainsi
réunis en un seul peuple, ils arrivèrent à un haut degré de puissance.
D'autres soldats des Romains avaient été postés aux extrémités du pays des
Galls pour les garder : comme ils ne pouvaient revenir à Rome et qu'ils ne
voulaient pas se joindre à leurs ennemis qui étaient ariens; ils se
donnèrent, avec leurs enseignes et le pays qu'ils gardaient depuis longtemps
pour les Romains, aux Arborykhes et aux Germains ; ils conservèrent leurs
coutumes nationales et les transmirent à leurs descendants qui aujourd'hui
encore croient devoir les garder pieusement. Et, en effet, on les voit de notre
temps enrôlés par corps, comme ils l'étaient dans l'ancienne milice ; c'est
avec leur propres enseignes en tête qu'ils se rangent pour le combat,'observant
toujours leurs lois nationales et gardant en tout et jusque dans leur coiffure
les usages des Romains.
Tant
que la constitution politique des Romains resta la même, leur roi, posséda les
Gallies en deçà du Rhodan ; mais, quand Odoacre y eut substitué une tyrannie
(84), alors, par une concession de ce tyran, les Wisigoths occupèrent toute la
Gallie jusqu'aux Alpes qui marquent les limites entre les Galls et les Ligures.
À la chute d'Odoacre, les Thoringes et les Wisigoths, redoutant la puissance
déjà croissante des Germains, population
féconde qui, devenue très forte, soumettait, à force ouverte tous ceux
qu'elle trouvait devant elle, mirent leurs soins à se faire des alliés des
Goths et de Theuderich. Voulant aussi les avoir pour amis, Theuderich ne
dédaigna pas de s'unir avec eux par des liens de famille : à Alarich le jeune,
qui était alors le chef des Wisigoths, il fiança sa fille vierge Theudichuse,
et à Herménefrid, prince des Thoringes, Amélobergè,
fille d'Amalafride, sa soeur. Depuis lors les Francs, redoutant. Theuderich
s'abstinrent, de toute violence envers eux et partirent en guerre contre les
Burguzions. Plus tard intervinrent entre Francs et Goths des alliances et des
traités pour la ruine des Burguzions (85) : les Francs détruiraient cette
nation et s'annexeraient le pays qu'elle possédait; les vainqueurs recevraient,
à titre d'amende, de ceux de leurs alliés qui n'auraient pas fait campagne
avec eux, une somme d'or déterminée; sous cette condition le pays conquis
appartiendrait aux uns comme aux autres. Par suite de ces conventions, les
Germains marchèrent avec une grande armée contre les Burguzions ; Theuderich
se préparait bien en paroles, mais il remettait toujours au lendemain le
départ de son armée, et c'était à dessein : il attendait les événements.
À grand'peine enfin il envoya ses troupes, mais il avait donné à ses
généraux l'ordre de marcher plus que lentement et, dans le cas où ils
apprendraient que les Francs auraient été vaincus, de ne pas aller plus loin ;
mais, si d'aventure on annonçait une victoire de ses alliés, de hâter le pas.
Et ils firent tout ce que Theuderich leur avait recommandé : les Germains
furent seuls à en venir aux mains avec les Burguzions. Une rude bataille
s'engagea et le carnage fut grand de part et d'autre, car longtemps la lutte fut
presque égale. Mais ensuite les Francs, ayant mis leurs ennemis en déroute,
les poussèrent jusqu'aux extrémités du pays qu'ils habitaient alors et où
ilsavaient de nombreuses forteresses ; les Francs occupèrent tout le reste (86). Instruits de ces événements, les Goths arrivèrent, en toute hâte : mal
reçus de leurs alliés, ils s'excusèrent sur la difficulté des chemins, et
ayant versé [la somme fixée pour] l'amende, ils partagèrent, selon les
conventions, la terre [conquise] avec les vainqueurs. Ainsi l'on connut mieux
encore la prudence de Theuderich, qui, sans avoir perdu aucun de ses sujets,
acquit, pour un peu d'or la moitié du pays pris sur ses ennemis. Ainsi
commencèrent les Goths et les Germains à avoir les uns et les autres, une part
dans le territoire de la Gallie. Après cela, les Germains, dont la puissance
faisait de tels progrès, se souciant peu de Theuderich et de la crainte qu'il
inspirait, menèrent une armée contre Alarich et les Wisigoths. À cette
nouvelle, Alarich pria Theuderich de lui venir en aide au plus vite. Et ce
prince vint à son secours avec une nombreuse armée. Sur ce point, les
Wisigoths, apprenant que les Germains, campaient devant la ville de Carcasianè,
vinrent à leur rencontre et, ayant aussi dressé un camp, s'y établirent. Mais
le temps fut long qui se consuma pour eux à ce siège, ils s'y ennuyèrent, et
voyant leur propre territoire ravagé par l'ennemi, ils s'en firent une idée
effrayante et finirent par de grandes injures contre Alarich, trouvant mauvais
qu'il eût peur des ennemis, et lui reprochant les lenteurs de son beau-père.
Ils affirmaient qu'ils étaient par eux-mêmes capables de soutenir le combat;
et qu'à eux seuls il leur serait facile d'avoir à la guerre l'avantage sur les
Germains. Ainsi, même avant l'arrivée des Goths,, Alarich était forcé d'en
venir au combat avec les ennemis. Les Germains, ayant le dessus en cette
rencontre, tuent la plupart des Wisigoths avec Alarich, leur chef, et, occupant
la plus grande partie de la Gallie, ils assiègent Carcasianè, et mettent à
cette entreprise la plus grande ardeur : ils avaient appris qu'en cette ville se
trouvaient les richesses royales qui, au siècle précédent, avaient été
enlevées par l'ancien Alarich de Rome livrée au pillage ; que dans ce trésor
même étaient les joyaux de Salomon, roi des Hébraei, véritables merveilles,
ornées pour la plupart de belles pierres vertes et emportées jadis de
Hiérosolymes par les Romains. Ceux des Wisigoths qui échappèrent au carnage
proclamèrent pour leur chef Giselich, fils bâtard d'Alarich, parce que
Amalarich, que ce dernier prince avait eu de la fille de Theuderich, était
encore tout enfant. Enfin arriva Theuderich avec l'armée des Goths, et les
Germains, pris de peur, levèrent le siège. En se retirant, ils gardèrent la
partie de la Gallie qui va du fleuve du Rhodan vers l'Océan.. Theuderich, ne
pouvant les chasser de cette contrée, la laissa en leur possession, et garda
pour lui le reste de la Gallie. Puis, Giselich étant mort, il fit en sorte que
le pouvoir passât au fils de sa fille, Amalarich, qui, étant encore enfant,
était sous sa tutelle, et prenant tout l'argent déposé à Carcasianè, il
s'en alla en toute hâte à Ravenne. Mais il continua d'envoyer des magistrats
et des armées en Gallie et en Hispanie, appliqué à ce soin et tâchant par de
prudentes mesures de s'assurer toujours la réalité du pouvoir : aussi
prescrivit-il à ceux qui commandaient en ces contrées de lui apporter le
produit des impôts ; mais, comme en les recevant chaque année il aurait craint
de passer pour avare, il envoyait un don annuel aux armées des Goths et des
Wisigoths... XIII. Quand Theuderich eut disparu du monde (87), les Francs, qui
ne trouvaient plus de résistance, menèrent une armée contre les Thoringes :
ils tuèrent Herménefrid, le chef de ce peuple, et le soumirent tout entier à
leur domination. La femme d'Herménefrid s'enfuit avec ses enfants et se retira
chez Theudat, son frère, alors chef des Goths. Ensuite les Germains en vinrent
aux mains avec ce qui restait des Burguzions, et, vainqueurs dans une grande
bataille, ils enfermèrent le chef de ce peuple dans une forteresse de ce
pays-là et l'y tinrent sous bonne garde (88). Ayant mis les Burgunions sous
leur obéissance, ils les contraignirent, comme prisonniers de guerre, à porter
les armes avec eux contre leurs ennemis ; quant au pays que les vaincus avaient
auparavant habité, ce fut pour eux une conquête qu'ils soumirent à un tribut.
Amalarich, qui était le chef des Wisigoths, étant arrivé à l'âge d'homme et
redoutant la puissance des Germains, prit pour femme la fille de Theudibert leur
chef (89) et partagea la Gallie avec les Goths, et son cousin Atalarich : les
Goths eurent pour leur part les pays en deçà du Rhodan ; ceux qui sont au
delà de ce fleuve restèrent sous la domination dès Wisigoths. Il fut convenu
que le tribut qu'avait exigé Theuderich ne serait plus payé aux Goths, et les
trésors que ce prince avait pris dans la ville de Carcasianè, Atalarich les
rendit loyalement à Amalarich ... Voilà pourquoi se mirent en guerre les uns
contre les autres Germains et Wisigoths ; il y eut une très violente et très
longue bataille ; enfin Amalarich, défait, y perdît un grand nombre des siens
et y mourut lui-même (90). Theudibert reprit sa soeur avec toutes les richesses
[qu'elle avait] et les pays de la Gallie que les Wisigoths avait eus en partage.
Ceux qui avaient échappé au désastre de leur nation émigrèrent avec leurs
femmes et leurs enfants, et, se retirèrent en Hispanie, auprès de Théudès,
qui y exerçait ouvertement la tyrannie. C'est ainsi que les Goths et les
Germains possédèrent la Gallie. Quelque temps après, Theudat, prince des
Goths, informé que Belisarius allait en Sicélie, fit un traité avec les
Germains : leurs chefs devaient recevoir, avec le territoire qui était échu en
partage aux Goths chez les Galls, vingt centaines (91) d'or, et à cette
condition, s'associer avec lui dans cette guerre. Mais ces conventions
n'étaient pas encore exécutées que Theudat arrivait au terme de sa destinée.
Aussi un grand nombre de Goths, et des plus braves, à la tête desquels était
Marcias, gardaient encore le pays [en question]. Witigis ne pouvait les en
retirer : il ne les croyait pas de force à tenir tête aux Francs, qui
vraisemblablement courraient en Gallie et en Italie, si avec toute son armée il
retournait à Rome. Ayant donc convoqué tout ce qu'il y avait de meilleur parmi
les Goths, il leur dit : «... Tout ce que nous pouvions faire de mieux comme
préparatifs de guerre a été fait. Mais les Francs sont là qui nous
arrêtent, les Francs, nos vieux. ennemis ; avec de grandes dépenses en argent
et en hommes, nous avons pu pourtant jusqu'ici leur tenir tête, parce que nous
n'avions en face aucun autre ennemi.... Voici donc mon avis : donnons aux
Germains les Gallies qui bornent leurs possessions, et l'argent que Theudat
était convenu de leur donner avec ce territoire, et non seulement ils
renonceront à leur haine contre nous, mais encore ils nous aideront dans cette
guerre. Quant à la manière dont nous pourrons, si nos affaires vont bien,
recouvrer les Gallies, point de discussion à ce sujet parmi vous. Il me
souvient d'un vieux précepte : Aviser au présent. » Ayant entendu ces
paroles, les plus considérables d'entre les Goths les jugèrent conformes à
leurs intérêts et voulurent qu'elles eussent leur effet. On envoya donc
aussitôt au peuple des Germains des députés chargés de leur donner les
Gallies avec l'or [promis] et de conclure une alliance pour la guerre. Les
Francs avaient alors pour chefs Ildiber, Theudibert et Cloadarius, qui, ayant
reçu les Gallies et l'argent, se les partagèrent en proportion de l'empire de
chacun : ils promirent d'avoir la plus grande amitié pour les Goths, et de leur
envoyer en secret des troupes auxiliaires, non pas pourtant composées de
Francs, mais de peuples soumis à leur obéissance. Ils ne pouvaient conclure
ouvertement une alliance contre les Romains après avoir peu auparavant promis
à leur roi de les aider dans cette guerre. Leur mission accomplie, les
députés retournèrent à Ravenne, et alors Witigis rappela Marcias et les
soldats sous ses ordres.
XV.
... Puis il y a le pays des Vénètes qui s'étend jusqu'à la ville de Ravenne
: les Vénètes ont établi leurs demeures sur la mer. Au-dessus, les Siscii et
les Souabes (non pas ceux qui obéissent aux Francs, mais d'autres que ceux-là)
sont situés au milieu des terres; plus haut se trouvent les Carnii et les
Nurici...Au-dessus de la ville de Ravenne, à gauche du fleuve du Pade,
demeurent les Ligurii; près d'eux, du côté du vent de borée, habitent les
Albans, dans une contrée extraordinairement bonne, qu'on appelle Languvilla. Au
couchant viennent les Galls, et après eux les Hispans.
XVI...
A cette nouvelle (92), Witigis ne voulait pas rester plus longtemps inactif à
Ravenne ; mais Marcias et ses soldats, qui n'étaient pas encore arrivés de la
Gallie, l'empêchaient de partir...
XIX.
... Marcias commandait le camp retranché dans la plaine de Néron : enfin
revenu des Gallies avec les troupes sous ses ordres, il avait pris position dans
cet endroit...
Livre II.
VII.
... Cette ville (Médiolanum) est située chez les Ligures; à moitié chemin
entre Ravenne et les Alpes qui forment là limite des Galls...
XII.
... Parties, du port des Romains, ces troupes (93) abordèrent à Génua, à
l'extrême limité de la Tuscie, bon mouillage sur la route des Gallies et des
Hispanies... À la prière de Witigis, Theudibert, chef des Francs, lui envoya
comme à son allié dix mille hommes, non pas des Francs, mais des Burgunzions,
pour ne pas paraître léser les intérêts du roi (de l'empereur). À leur
dire, ces Burgunzions partaient, volontairement, de leur plein gré, sans avoir
reçu d'ordres de Theudibert...
XXI...
Les femmes furent traitées comme des esclaves et on (94) les donna aux
Burgunzions pour payer le secours qu'on leur devait.
XXV.
À ce moment, les Francs, ayant appris que Goths et Romains avaient été fort
maltraités en cette guerre, pensèrent qu'il leur serait bien facile de
s'emparer de la plus grande partie de l'Italie : ils s'indignaient à l'idée
que d'autres supportaient une guerre de si longue durée pour se rendre maîtres
d'un pays si voisin du leur, tandis qu'eux-mêmes, demeurant bien tranquilles,
se tenaient à l'écart des deux partis. Aussitôt donc, mettant en oubli leurs
serments et les traités qu'ils avaient faits peu auparavant avec les Romains et
les Goths, - car c'est de tous les hommes le peuple le plus prompt à trahir sa
foi - ils se rassemblent au nombre d'environ dix myriades, et sous la conduite
de Theudibert ils entrent en Italie. Ils avaient peu de cavaliers qui étaient
rangés autour du chef et qui seuls portaient des lances. Le restant, tous
piétons, n'avait ni arcs ni lances, mais chacun d'eux portait une épée, un
bouclier et une seule hache. Le fer de cette hache est épais et extrêmement
tranchant de chaque côté, le manche de bois et très court (95). Toujours, sur
un seul signal, lançant cette hache, c'est leur coutume de briser ainsi dès
l'abord les boucliers de leurs adversaires et de les tuer, eux-mêmes. Ainsi les
Francs ayant passé les Alpes, qui forment la limite entre lés Galles et les
Itales, arrivent chez les Ligures. Les Goths qui, d'abord, avaient été
irrités de l'inconséquence de ce peuple à qui on avait maintes fois promis de
lui abandonner beaucoup de terres et beaucoup d'argent pour prix de son
alliance, et qui ne voulait en aucune façon tenir jusqu'à la fin ses
promesses, apprenant l'arrivée de Theudibert avec une grande armée ; dans la
joie de leurs espérances, s'enorgueillissaient à l'excès et pensaient que
désormais ils auraient sans combat l'avantage sur leurs ennemis. Tant qu'ils
furent en Ligurie, les Germains ne firent rien de désagréable pour les Goths :
il fallait que de leur part ils ne trouvassent aucun obstacle au passage du
Pade. Quand ils furent arrivés à, la ville des Ticins, où les anciens Romains
avaient construit un pont sur le fleuve, ceux qui gardaient ce pont, entre
autres bons offices, leur permirent de passer le Pade tout à leur aise. Mais
les Francs, une fois maîtres du pont, immolent les enfants, et les femmes des
Goths qu'ils trouvent là et jettent dans le fleuve leurs corps comme prémices
de la guerre. Car ces barbares, devenus chrétiens, gardent encore la plupart
des pratiques de leur ancienne croyance, l'usage des victimes humaines, d’autres
sacrifices non moins impies, et ils tirent de là des présages. À cette vue,
les Goths furent pris d'une invincible frayeur, et, possédés de l'envie de
s'échapper, ils furent bientôt dans l'enceinte [de leurs retranchements]. Les
Germains donc, ayant passé le Pade, arrivèrent au camp des Goths, et les Goths
d'abord les virent avec plaisir s'approcher d'eux par petites troupes, pensant
que c'étaient autant de braves gens qui venaient à eux comme alliés. Mais
quand la foule des Germains, se répandant à longs flots, se mit à l'oeuvre,
lançant les haches comme des javelots sans discontinuer, et leur fit grand mal,
ils tournèrent le dos, s'enfuirent, et, passant à travers le camp même des
Romains, ils coururent par la route de Ravenne. En les voyant fuir, les Romains
crurent que c'était Bélisaire qui, venant à leur secours, avait pris le camp
des ennemis et les en avait chassés après les avoir vaincus en bataille
[rangée]. Aussi, prenant leurs armes, ils courent pour le joindre. Sans y
penser, ils rencontrent l'armée ennemie ; sans le vouloir, ils en viennent aux
mains : c'est une bataille, une grande défaite pour eux, et comme ils ne
peuvent plus retourner à leur camp, ils s'enfuient en Tuscie. Dès lors, en
sûreté dans ce pays, ils font à Bélisaire un rapport complet de tout ce qui
leur est arrivé. Or, les Francs, vainqueurs, comme il a été dit, des uns et
des autres, maîtres des deux camps entièrement déserts, y trouvent à l'heure
même tout ce qui leur était nécessaire ; mais, comme ils étaient nombreux,
ils consomment en peu de temps toutes les provisions, et, dans cette contrée
déserte, ils n'ont bientôt pour se nourrir que des boeufs et l'eau du Pade ;
mais, avec cette surabondance d'eau, incapables de digérer ces viandes, ils
furent pour la plupart pris d'un flux de ventre et d'une maladie d'entrailles,
et, faute des remèdes nécessaires, ils ne pouvaient s'en tirer : aussi, dit-on
que de cette manière périt le tiers de l'armée des Francs : par, cette
raison, incapables d'aller plus loin, ils demeurèrent là.
Or,
Bélisaire ayant appris que l'armée des Francs approchait, que Martin et
Joannès, vaincus dans une bataille, s'enfuyaient, fut réduit à ne savoir que
faire : il craignait pour toute son armée, mais principalement pour ceux qui
assiégeaient Fisule, informé que les barbares étaient plus près d'eux que de
tous les autres. Aussi, sur l'heure même écrivit à Theudibert ce qui suit.:
« Un homme qui fait profession de vertu ne doit pas mentir, surtout quand il
est le chef de tant de peuples ; ce vice, à mon sens, noble Theudibert, est
indigne de lui ; mais violer des serments écrits, ne se point soucier des
conventions, c'est une chose qui va mal même aux moins considérés parmi les
hommes. Et c'est là, tu le sais, la faute que tu commets aujourd'hui, toi qui,
après avoir promis tout à l'heure de prendre part avec nous à cette guerre
contre les Goths, non content aujourd'hui de garder la neutralité, marches
contre nous ainsi inconsidérément, les armes à la main. Ne va donc pas;
excellent prince, faire, un tel outrage à un grand roi qui ne pourrait, sans
déchoir, manquer de punir cet outrage dans tes plus grands intérêts. Il vaut
mieux garder tranquillement ce que l'on a à soi que de vouloir s'approprier ce
qui ne nous appartient pas, au risque de perdre ce qui nous est nécessaire. »
Theudibert lut cette lettre ; embarrassé comme il l'était dès lors de sa
situation, maudit par les Germains parce que, sans cause, sans prétexte, il les
laissait mourir dans une contrée déserte, il leva le camp avec ce qui lui
restait de ses rangs, et en grande hâte se retira dans son pays.
XXVIII
... Instruits de ce qui se faisait, les chefs des Francs qui voulaient s'emparer
de l'Italie envoient des ambassadeurs à Witigis : ils mettent en avant une
offre d'alliance à condition de partager avec lui la domination dans ce pays.
Bélisaire n'en est pas plus tôt informé qu'il envoie, de son côté, pour
combattre les prétentions des Germains, une ambassade dont faisait partie son
majordome Théodosios. Introduits les premiers auprès de Witigis, les
ambassadeurs des Germains lui dirent : « Les chefs des Germains nous ont
envoyés parce qu'ils souffrent de vous savoir assiégés (96) par Bélisaire,
et, qu'ils ont à coeur de vous venger bien vite, aux termes de leur alliance
avec vous. Une armée qui ne compte pas moins de cinquante myriades de braves
combattants a déjà, croyons-nous, franchi les Alpes, et de ses haches, au
premier choc, elle écrasera, nous nous en vantons, toutes les troupes des
Romains. Il est digne de vous de suivre l'avis non de ceux qui feront de vous
des esclaves, mais d'amis qui, par dévouement pour les Goths, se mettent en
danger de guerre. Autre point et des plus importants : si vous prenez les armes
avec nous, aucune espérance ne restera aux Romains de pouvoir en venir aux
mains avec nos deux armées réunies, mais ici même, sans nulle peine, cette
guerre si redoutable trouvera son dénouement. Si, au contraire, les Goths se
rangent du côté des Romains, ils ne pourront, même ainsi, tenir tête à la
nation des Francs, la lutte ne se fera pas à forces égales, et votre sort sera
d'être défaits avec vos plus mortels ennemis. Or, se jeter dans un abîme
qu'on voit devant soi, quand on peut esquiver le danger, et se sauver, c'est une
grande folie. En outre, la race des Romains s'est fait à l'égard des barbares
une habitude de la perfidie, car elle est par nature leur ennemie. Avec vous
donc, si vous le voulez, nous commanderons à toute. l'Italie, et nous donnerons
à ce pays la forme de gouvernement qui nous paraîtra la meilleure. Il vous
convient à toi et aux Goths de préférer ce qui doit servir vos intérêts. »
Voilà ce que dirent les Francs. Introduits ensuite, les ambassadeurs de
Bélisaire parlèrent ainsi : « L'armée du roi n'aura nullement à souffrir de
cette multitude dont les Germains croient devoir vous faire un épouvantail ;
est-il besoin de longs discours pour vous le démontrer, à vous à qui il a
été donné d'apprendre, par une longue expérience, ce qui à la guerre fait
pencher la balance, et que d'ordinaire la valeur n'est point abattue par le
nombre? Aussi nous ne vous dirons pas que plus que personne au monde le roi peut
surpasser ses ennemis par la multitude de ses soldats. Quant à cette foi dont
les Germains se vantent d'user envers tous les barbares, leur conduite envers
les Thoringes et les Burgunzions d'abord, puis envers vous, leurs alliés,
montre assez ce qu'elle vaut. Oui, il nous plairait de demander aux Francs par
quel dieu ils jureront pour vous donner une sûre garantie de leur foi ; comment
ils respectent le dieu par lequel ils ont juré, vous le savez assez : amenés
à faire alliance avec vous, ils n'ont pas voulu partager avec vous le danger ;
ils ont fait pis, ils ont eu cette impudence de prendre contre vous les armes,
si l'on garde chez vous quelque souvenir de ce qui s'est passé aux bords du
Pade. Mais qu'est-il besoin de parler du passé pour prouver l'impiété des
Francs? Il ne petit rien y avoir de plus dégoûtant que leur présente
ambassade. Comme s'ils avaient oublié les conventions faites, les traités
jurés par eux, ils prétendent aujourd'hui que le secours que vous aurez d'eux
vaut mieux que tout. S'ils obtiennent de vous ce qu'ils veulent, que les Goths
s'unissent à l'armée des Francs; encore, convient-il de calculer jusqu'où
peut aller leur insatiable cupidité. » Voilà ce que dirent les ambassadeurs
de Bélisaire. Witigis, après une longue conférence avec les principaux
d'entre les Goths, préféra traiter avec le roi (l'empereur), et les Francs
furent congédiés sans avoir rien fait.
Dans
les Alpes, qui forment la limite entre les Goths et les Ligures et que les
Romains appellent Alpes Cutiae (97), il y a une ligne de postes fortifiés :
là, depuis longtemps, habitent en grand nombre, avec femmes et enfants, des
Goths de haut rang, qui en ont la garde.
Histoires, IIème tétrade, livre III.
XXXIII.
(Maltr., p. 542.) ... Toute la partie dès Gallies qui était soumise aux Goths
fut dès le commencement de cette guerre livrée par eux aux Germains : ils ne
se croyaient pas de force tenir tête aux deux peuples à la fois, ainsi que je
l'ai dit dans les discours précédents. Cette cession, non seulement les
Romains ne purent l'empêcher, mais Justinianus, leur roi, la confirma de peur
de rencontrer devant lui comme adversaires ces barbares excités à lui faire la
guerre. Car autrefois les Francs ne croyaient pas posséder en toute sûreté
les Gallies, sans avoir un acte revêtu du sceau de l'empereur. Depuis lors, les
chefs des Germains occupent Masalie, la colonie des Phocéens, avec toutes les
côtes de ce pays, et ils sont là les maîtres de la mer. Ce sont eux
aujourd'hui qui, dans l'amphithéâtre d'Arelatos, se donnent le spectacle des
luttes hippiques ; ils font avec l'or des mines de Gallie de la monnaie, et ces
statères ne sont pas, selon l'usage, frappés au coin de l'empereur des Romains
; ils y mettent leur propre image. Le roi des Perses fait bien de la monnaie
d'argent, et l'usage lui permet de la faire à son gré ; mais ni le chef de ce
peuple ni quelque autre roi que ce soit chez les barbares n'a le droit de
marquer à son coin le statère d'or, le métal lui appartînt-il en toute
propriété; car, dans leurs relations commerciales, fût-ce de barbares à
barbares, ils ne peuvent mettre cette monnaie en circulation. Voilà comment
cela se passa pour les Francs. Les Goths et Tôtila avaient le dessus à la
guerre ; les Francs n'en prirent pas moins pour eux la plus grande partie des
Vénéties, et cela, sans peine, car ni les Romains ne pouvaient les repousser,
ni les Goths n'étaient capables de faire la guerre aux deux peuples à la
fois.....
XXXIV.
« ... Tu as encore (98) dans ton royaume tant de villes, tant de terres que tu
cherches des hommes à qui tu puisses en donner quelque partie pour l'habiter.
Oui, les Francs, les Érules, ces Langobards eux-mêmes ont reçu de toi en
présent tant de villes et tant de terres qu'on ne les saurait énumérer...»
XXXVII.
Tôtila, peu auparavant, avait envoyé au chef des Francs une ambassade pour le
prier de lui donner sa fille en mariage ; cette demande avait été repoussée ;
on disait au prétendant qu'il n'était et ne serait jamais roi d'Italie, lui
qui, après avoir pris Rome, n'avait pas su s'y tenir, et qui, après en avoir
détruit une partie, l'avait de nouveau remise à ses ennemis.
Histoires, IIème tétrade, livre IV.
V...
Le fleuve Ister descend des montagnes celtiques...
XX.
Vers ce temps-là, entre le peuple des Warnes et les soldats insulaires qui
habitent dans l'île appelée Brittie, il y eut une guerre et des combats, et
voici quelle en fut la cause : les Warnes sont établis au delà du fleuve Ister
; ils s'étendent jusqu'à l'océan de l'Ourse et au fleuve du Rhèn qui forme
la limite entre eux, les Francs et les autres peuples établis dans ces régions
(99). Tous ces peuples, qui d'ancienneté habitaient sur les deux rives du
Rhèn, avaient chacun leur nom propre. L'un d'eux se nomme les Germains, et ce
nom devenait commun à tous les autres. L'île de Brittie est située dans cet
océan, pas très loin du continent, à deux cents stades au plus des bouches du
Rhèn, entre la Brettanié et l'île de Thulè. La Brettanie, en effet, est
située au couchant; en face des bords extrêmes du pays des Hispans, et sa
distance du continent n'est pas moindre de quatre mille stades ; la Brittie
regarde les extrémités de la Gallie, celles qui sont tournées vers l'Océan,
c'est-à-dire au nord de l'Hispanie et de la Brettanie.... Trois peuples très
nombreux occupent l'île de Brittie, et chacun d'eux a un roi, et un nom propre
:ce sont les Angles, les Frisons (100), et ceux dont le nom est le même que
celui de l'île, les Brittôns. Telle est chez eux, la surabondance de la
population que chaque année, en grand nombre, ils émigrent avec femmes et
enfants, et passent dans le pays des Francs ; et ceux-ci assignent à ces
nouveaux venus pour y habiter la partie de leur territoire qui semble trop
déserte, et de là, dit-on, ils s'arrogent des droits sur cette île. Ce qui
est sûr, c'est que naguère le roi des Francs, envoyant en ambassade au roi
Justinianus à Byzance, quelques-uns de ses amis leur adjoignit des Angles et se
fit gloire de montrer que cette île était dans son empire. Voilà ce qu'il en
est de l'île appelée Brittie.
Peu
de temps auparavant, les Warnes avaient pour chef un prince nommé Hermégiscle,
lequel, ayant à coeur d'affermir son trône, prit pour. femme la soeur de
Theudibert, chef des Francs. Il venait de perdre la femme, qui auparavant
habitait avec lui, et qui lui laissait un fils unique nommé Radiger. Il demanda
pour lui en mariage une jeune fille de l'île de Brittie, dont le frère était
alors roi des Angiles, et donna à cette princesse, comme présent de
fiançailles de grands trésors. Cet homme, chevauchant par la campagne avec les
plus considérables d'entre les Warnes, vit un oiseau perché sur un arbre, et
qui ne cessait de croasser. Alors, soit qu'il comprit le cri de cet oiseau, soit
qu'il sût quelque autre secret et feignît d'avoir le talent merveilleux de
comprendre ce que prédisait l'oiseau, il dit aussitôt à ceux qui
l'accompagnaient qu'il mourrait dans quarante jours : c'était là ce que lui
annonçait la voix de l'oiseau. « J'ai pourvu, dit-il, à ce que vous viviez le
plus tranquillement possible, en toute sécurité, et, pour cela, j'ai cherché
chez les Francs des liens de famille en prenant chez eux une épouse, et j'ai
donné à mon fils une fille de la Brittie pour fiancée. Mais maintenant,
sentant que je vais bientôt mourir, n'ayant point d'enfants, garçon ni fille,
de ma dernière femme, mon fils d'ailleurs n'étant point encore dans les liens
du mariage, eh bien ! je vais vous communiquer toute ma pensée, et, si vous ne
la jugez pas contraire à vos intérêts, aussitôt que je serai arrivé au
terme de ma vie, ratifiez-la et, la fortune aidant, donnez-lui tout son effet.
Je crois donc qu'il vaudra mieux, dans l'intérêt des Warnes, avoir des liens
de famille avec les Francs qu'avec les insulaires. Les Britties, en effet, ne
peuvent avoir des rapports avec vous que tardivement et à grand'peine. Warnes
et Francs n'ont entre eux que l'eau du Rhèn, de sorte que ceux-ci étant nos
plus proches voisins, arrivés comme ils le sont à une grande puissance, sont
à même de nous faire du bien ou de nous ruiner, quand ils le voudront, et
cette ruine sera complète, à moins que des liens de famille n'y mettent
obstacle.
(Maltr.,
p. 622.) . Ces insulaires sont les plus vaillants que nous sachions de tous les
barbares ; ils vont à pied dans les combats. Non. seulement ils ne sont pas
exercés à monter à cheval, mais ils ne savent pas même ce que c'est qu'un
cheval ; car, ils n'en ont pas vu même en peinture dans leur île. Jamais,
paraît-il, cet animal ne s'est trouvé en Brittie. Si parfois, pour une
ambassade ou pour quelque autre affaire, il leur arrive de voyager avec des
Romains, des Francs ou d'autres étrangers ayant des chevaux, et qu'il leur
faille là nécessairement aller à cheval, il n'y a pas moyen pour eux de
sauter sur cette monture; on est obligé de les soulever pour les mettre en
selle, et de même quand ils veulent descendre, il faut les enlever et les
mettre à terre.....
...
Radiger renvoya aussitôt la soeur de Theudibert et épousa la princesse de
Brittie (101)...
...
Le long du rivage de l'île de l'Océan qui est en face de la Brittie, sont
situées une multitude de bourgades, dont les habitants, pêcheurs, laboureurs,
marins fréquentant cette île pour le commerce, sont sous l'obéissance des
Francs; sans cependant être assujettis au tribut...
XXIV...
Il se trouvait que Tôtila avait envoyé plusieurs ambassades qui, admises en
présence du roi Justinianus, lui avaient appris que la plis grande partie de
l'Italie était occupée par les Francs...
Theudibert,
le chef des Francs, avait depuis peu disparu du monde à la suite d'une maladie,
après avoir soumis à un tribut quelques places de la Ligurie, les Alpes Cuties
et la plus grande partie des Vénéties, le tout sans aucune peine. Car les
Francs, s'étant fait une bonne occasion des occupations que les combats
donnaient à leurs voisins, s'enrichissaient sans danger en prenant eux-mêmes
les terres pour lesquelles on combattait. Aux Goths, il restait encore quelques
villes dans les Vénéties, car les Romains avaient mis la main sur les places
maritimes; et les Francs sur toutes les autres. Romains et Goths étant, comme
je l'ai dit, occupés à la guerre qu'ils se faisaient, et ne pouvant se créer
alors de ,nouveaux ennemis, ces derniers entrèrent en pourparlers avec les
Francs : il fut convenu que, pendant toute la durée de la guerre des Goths avec
les Romains, les uns et les autres resteraient tranquillement en possession des
avantages obtenus, qu'il n'y aurait entre eux aucune hostilité ; que, s'il
arrivait un jour que Tôtila eût l'avantage sur le roi Justinianus, alors les
Goths et les Francs régleraient cette situation au mieux des intérêts de
chacun des deux partis. Voilà ce qui fut alors convenu. Mais à Theudibert
succéda son fils Theudibald, et le roi Justinianus envoya Léontios, gendre
d'Athanasios (102), membre du sénat, en ambassade à ce prince, pour l'inviter.
à une alliance armée contre Tôtila et les Goths, et lui demander d'évacuer
en Italie les places où Theudibert avait tenu à entrer, sans en avoir le
droit. Léontios, admis en présence de Theudibald, lui dit : « Peut-être
est-il advenu à d'autres de subir, contrairement à leurs espérances, quelque
coup du sort, mais ce qui aujourd'hui arrive aux Romains de votre part ne s'est
jamais, je pense,, présenté pour personne au monde. Et, en. effet, le roi
Justinianus ne s'est point engagé dans cette guerre, n'a montré aucune envie
de faire la guerre aux Goths, avant que les Francs ayant, à titre d'amis et
d'alliés, reçu beaucoup d’argent, eussent promis de prendre part à, la
lutte. Mais non seulement ils n'ont pas jugé à propos de rien faire de ce
qu'ils avaient promis; bien plus, ils ont commis envers les Romains des
injustices telles qu'on ne saurait aisément s'en faire une idée: Theudibert,
ton père, s'est mis en tête d'envahir, sans raison aucune, des territoires
dont le roi a à grand'peine, à travers maints dangers de guerre, et tandis que
les Francs se tenaient à l'écart, s'était rendu maître. Je viens donc
aujourd'hui vers vous, non pour vous faire des reproches et vous accuser, mais
pour vous adresser des demandes et des conseils qui doivent servir vos
intérêts ; pour que vous conserviez, dis-je, sûrement l'heureuse situation
que vous avez prise, et que vous permettiez aux Romains de garder ce qui leur
appartient... ; enfin, pour
que vous preniez part avec nous à la guerre contre Tôtila, en exécutant les
promesses de ton père. Oui, vous deviez, sans même y'être invités,
entreprendre avec lès Romains cette guerre : car la lutte est entre nous et les
Goths qui, dès le principe, ont été pour les Francs des ennemis, et des
ennemis absolument sans foi, qui vous font de tout temps une guerre implacable
et déloyale, et qui, aujourd'hui qu'ils nous craignent, ne dédaignent pas
d'user envers vous, de flatterie. Qu'ils puissent un jour se débarrasser de
nous, ils ne tarderont, guère à montrer leurs sentiments à l'égard des
Francs... Pensez-y donc ; renouvelez amitié avec notre roi, et repoussez de
tout votre pouvoir ceux qui sont pour vous de vieux ennemis. »
Voilà
ce que dit Léontios. Theudibald lui répondit : « Vous nous appelez à faire
alliance avec vous contre les Goths, mais vous n'avez pour vous ni la raison ni
la justice. Les Goths sont aujourd'hui nos amis. Si les Francs n'ont pas été
pour eux de sûrs alliés, ils ne vous seront non plus jamais fidèles... Quant
aux places dont vous avez fait mention je dirai seulement : Theudibert, mon
père, n'a jamais songé à violer les droits d'aucun de ses voisins, à envahir
les possessions d'autrui; la preuve, c'est que je ne suis pas riche. Ces places,
il ne les a point enlevées aux Romains; c'est de Tôtila, qui les possédait
déjà et qui les lui a expressément cédées, qu'il les a reçues, et c'est de
quoi surtout votre roi Justinianus devait se réjouir avec les Francs... Nous
pouvons cependant remettre à des arbitres l'examen de cette affaire, de façon
que, s'il est démontré que mon père a pris quelque chose aux Romains, nous
soyons obligés de le restituer sans retard.... À ce sujet, des ambassadeurs
seront envoyés par nous à Byzance, et cela dans peu de. temps. » Cela dit, il
congédia Léontios, et envoya en ambassade près du roi .Justinianus le franc
Leudard avec trois autres. Arrivés à Byzance, ils s'y acquittèrent de leur
mission.
XXVI.
Lorsque Narsès fut aussi près que possible des Vénéties, il envoya un
messager aux chefs des Francs qui commandaient les garnisons de ce pays, et leur
demanda de lui livrer passage comme à un ami. Ils répondirent qu'il n'y avait
pas moyen pour eux de faire cette concession à Narsès, sans donner nettement
la cause de leur refus, sans dire, comme ils le pouvaient le mieux, que ce qui
s'y opposait c'était l'intérêt. des Francs et leurs sentiments de
bienveillance envers les Goths ; ils mirent en avant cette raison, qui ne semble
guère spécieuse, que Narsès amenait avec lui leurs pires ennemis, les
Langobards...
XXIX...
L'armée des Romains, sous la conduite de Narsès, ne tarda guère à dresser
aussi son camp dans l'Apennin, et elle s'y établit à la distance de cent
stades au plus du camp des ennemis, sur un plateau entouré de plusieurs tumuli
tout proches c'est là, dit-on, que jadis Camille, qui commandait l'armée des
Romains, vainquit et extermina dans une bataille les bandes galliques. De nos
jours encore, le lieu porte un nom qui atteste cet événement et conserve la
mémoire de ce désastre des Galls : Busta Gallorum : les Latins, en
effet, appellent Busta les restes d'un bûcher, et il y a là en grand
nombre des amas de terre qui sont les tombeaux de ces morts...
XXXIII...
Instruits de ces mouvements (103), les Francs, qui tenaient'garnison dans les
places de la Vénétie, s'opposèrent à cette entreprise; ils réclamaient avec
une extrême passion ce pays comme leur appartenant, et Valérianus s'en retira
avec toute son armée sans avoir rien fait. Les Goths, qui, dans cette
rencontre, avaient dû leur salut à la fuite, passèrent le Pade, occupèrent,
avec la ville de Ticinum, les places de ce pays et se donnèrent pour chef
Téïas. Celui-ci, ayant trouvé dans cette ville tous les trésors que Tôtila
y avait déposés, songea à attirer les Francs dans son alliance ...
XXXIV.
.... Téïas, ne croyant pas les Goths capables, à eux seuls, de lutter contre
l'armée des Romains, envoya une ambassade à Theudibald, chef des Francs ; il
lui promettait beaucoup d'argent, et l'invitait à faire alliance avec les
Goths. Mais les Francs, fort attentifs, je crois, à leurs intérêts, ne
voulaient donner leur sang pour servir, les Goths ni les Romains : ils
s'étaient mis en tête de s'approprier l'Italie, et, pour y parvenir,
d'affronter à eux seuls les dangers de la guerre. Or, il se trouvait que
Tôtila avait déposé à Ticinum une partie de ses trésors, comme il a été
dit auparavant ; mais la plus grande partie se trouvait dans un château-fort
situé à Cymè (104) en Campanie, où il avait mis des gardes, et qu'il avait
placé sous le commandement de son frère et d'Hérodianus... Alors Téïas,
craignant pour la garnison de Cymé et pour les trésors qu'elle gardait, et
n'espérant plus rien des Francs, disposa les hommes de sa suite comme pour
marcher contre les ennemis....
[HISTOIRE SECRÈTE].
XVIII........... L'empire des Goths s'étendit, avant cette guerre (105), de la terre des Galls jusqu'aux frontières de la Dacie, où est la ville de Sirmium. Les Germains (106) tenaient alors la plus grande partie de la terre de Gallie et de Vénétie quand arriva en Italie l'armée des Romains...
DES ÉDIFICES CONSTRUITS PAR LE SEIGNEUR JUSTINIANUS.
Discours IV.
V. ... Le fleuve de l’Ister descend des montagnes des Celtes (107), qu'on appelle aujourd'hui Galls...
(01)
De Borissum en Cappadoce, vers 425.
(02)
XII livres ou « histoires » ;
abrégé, ¤pitom®,
fait par Photius, mais non compris dans sa Bibliothèque.
(03) An
de J.-C. 304.
(04) An de J.-C. 338.
(05) Voici la
traduction du passage de Philostorge cité dans la note 1 ci-contre : « Les
Alpes appelées Sukes et les Alpes Julies sont des passages étroits, traversant
de chaque côté des montagnes très grandes qui en un même point se ferment et
pour ainsi dire se resserrent... » L'auteur essaie évidemment de donner une
idée des « cols » ou hauts passages des Alpes.
(06) An de J.-C. 352.
(07)
An de J.-C. 353. Pour plus de détails, v.
ci-devant Zosime, liv. III, ch. 1 et 2, p. 226-229.
(08)
An de J.-C. 383.
(09)
Littéral. « comme un disque. » - An de J.-C. 392.
(10) Satellite,
garde du corps. - Compar, ce récit avec celui de Zosime, IV, LIII, ci-devant,
p. 262-263.
(11) Nous
traduisons d'après le texte de Valois qui y a introduit sçn,
mais ce mot peut sembler inutile; il n'est point question dans Nicéphore de
personnes que le prince associait à ses jeux. On peut donc très bien se
rapporter à ces lieux solitaires du palais où Valentinien se livrait à ses
frivoles exercices.
(12) M‹gistrow,
magister, s'emploie rarement seul pour signifier « professeur » ; peut-être
faut-il sous-entendre ôffikÛvn,
maître des offices, dignité, ŽjÛa,
à laquelle, grâce à son talent, était arrivé Eugénius.
(13) An
de J.-C. 392.
(14)
Ou par l'action et la parole, c.-à-d. le
droit d'agir et de commander, la puissance exécutive et la puissance
législative.
(15)
Préfet, ou plutôt lieutenant de l'empire, vice-empereur. Rappr. êp°rxe
tÇn basil¡vn deux lignes pl. bas.
(16) Eugène.
(17) An
de J.-C. 395.
(18) C'était un Franc. - V. plus haut, p. 258
259, Zosime, IV, 33.
(19) A Alaric. Valois remplit ainsi la lacune
qui se trouve dans tous les mss. : « Il prit en mariage Placidie qu'Alaric
avait emmenée de Rome comme prisonnière. »
(20)
Comp. les expressions si communes dans
l'hist. Byzant. : porfurog¡nnhtow, ¤n
lougrÛdi trafeÛw, õ t°w porfæraw blastñw, porfæraw Žpñgonow,
etc. - Horace, Art poét., 228 : regali conspectus in ostro.
(21) Milieu du Ve siècle.
(22) En huit
livres ; on suppose que l'Histoire gothique en était une partie. - Il n'en
reste que des morceaux plus ou moins. considérables, conservés, dans les Extraits
des Ambassades. V. la notice en tête du vol.
(23) Vulg.
Attila, d'après les écrivains latins; nous avons cru devoir laisser à ce nom
la forme que lui donne Priscus qui probablement l'entendait prononcer ainsi.
Cette forme se rapproche davantage de celle de ce nom, Athel, Hettel, dans les
légendes germaniques (v. les Niebelungen). Il est bien possible toutefois que
l'il eût ici quelque chose du son de l'i.
(24) Après
J.-C. 448.
(25) Quels
étaient ces princes francs? D. Bouq., adoptant l'opinion de l'abbé Dubos, Hist.
cric. de la monarch. franç., 1I, 15 et 16, croit qu'ils appartenaient à
une tribu des Francs établis sur les rives du Necker, et comptés par Sid.
Apoll., Panég. Avit., 324, parmi les peuples qu'Attila traînait à sa
suite : Ulvosa quem vix Nicer abluit unda - prorumpit Francus. - An de J.-C.
450.
(26)
An de J.-C. 459.
(27)
An de J.-C. 463.
(28)
Trois livres ou discours (lñgoi),
comprenant les règnes de Léon 1er et de Zénon l'Isaurien (457-491). Il n'en
reste que l'analyse et les extraits de Photius, cod. 79.
(29) An de J.-C. 477.
(30)
Ang. Mai, qui a le premier publié ces extraits, croyait qu'ils étaient
empruntés à un ouvrage de Jean d'Antioche. Niebühr les attribuait à Petrus
Patricius. V. la discussion de ces deux opinions par C. Müller, Hist. graec.
Fragm., t. IV, p. 190 et ss.
(31)
Socrate, né à Constantinople au
commencement du règne de Théodose.
(32) En sept
livres, comprenant une période, de cent quarante ans; Olymp., CCLXXI, 1, -
CCCV, 2, apr. J.-C. 305-445.
(33) Comp. liv. V, ch. 22, où cette lettre est
reproduite, d'après Eusèbe.- V. ci-contre la note 2.
(34) Ils espéraient le remplacer sur le
siège épiscopal d'Alexandrie.
(34a)
Compar. plus haut, Zosime, liv. III, 1, p. 226-227, et la note 1. - V. aussi
Orose, VII, 29 : Bellum... apud Mursam gestum.
(35) V.
sur ce fait les détails donnés par Zosime, III, I, 2, et le passage d'Ammien
Marcellin, XV, VIII, 1, cité. dans la note 2; v. aussi plus bas, Socrat., ibid.,
III, 1.
(36)
Paulin, évêque de Trèves, n'assista pas
au concile de milan, mais à celui d'Arles qui eut lieu dix ans plus tôt, 353.
(37) Baranius
note qu'Albe est mis ici pour Milan, qui était, et non pas Albe, la métropole
de l'Italie. Dionysius, qui alors tint tête à Constantius et aux Ariens,
n'était pas évêque d'Albe, mais de Milan.
(38) Verceil.
Plin., III, XVII, 21 : Vercellæ Libicorum ex Sallyis orta... Tacit., Hist.,
I, LXX ... firmissima transpadanæ regionismunicipia Mediolanum, Novariam,
Eporedium ac Vercellas...
(39) La
doctrine de la consubstantialité du père et du fils.
(40)
Sectateurs de Macédonius.
(41) Ce
qui suit se trouve dans. D. B.
(42) Philostorge (v. plus haut, p. 284-5 et
la note 2) dit simplement m‹gistrow,
mais il manque probablement un mot dans le texte.
(43) A
36 milles d'Aguilée. Cette rivière sort des Alpes Juliennes et se jette dans
l'lsonzo; selon Philostorge (pl. h., p. 284), elle s'appelait Eau froide, Cæxron
ìdvr;'c'est la traduction grecque du mot
latin conservé par Socrate; Frigdum, Frigidum [flumen].
(44) Apr.
J.-C. 395.
(45) Vulg.
Burgundiones (Claud. Mamert., Paneg. Maximian., V ; Jornand.,
De Regn. success., LIV; Id., De Reb. Get., XXXI et, passim; lsidor., Chron.,
era DXXI; Paul. Diac., De Gest. Langob., III, 3, etc.), ou Burgundi
(Zosim., I, 67, pl. h., p. 218-219, etc.).
(46) Selon
Orose, Vll, 32, cette conversion des Burgondes aurait eu lieu en 417, et non
vers 430, comme le veut Socrate.
(47) De
Béthélie, près de Gaza en Palestine; contemporain de Socrate, commencement du
Ve siècle ; - avocat à Constantinople.
(48) En
neuf livres appelés tñmoi,
sections, comme ceux de l'histoire ecclésiastique de Socrate.
(49)
Philosophe de l'école de Plotin.
(50) Au
sujet des remords que lui causaient le meurtre de ses proches et surtout celui
de son fils Crispus.
(51)
An de J.-C. 335.
(52) An
de J.-C. 337.
(53) An de
J.-C. 340.
(54) An
de J.-C. 347.
(55) An
de J.-C. 350.
(56) An
de J.-C. 353. - Cf. plus haut, p. 306-7, Socrat., ib.
(57) An
de J.-C. 361.
(58) La
ligne qui suit est dans D. B.
(59) An
de J.-C. 375.
(60) An de J.-C. 379.
(61) An de
J.-C. 383.
(62) An de J.-C. 392.
(63) An de J.-C. 393.
(64) An de J.-C. 395.
(65) An de J.-C. 408.
(66) Cette
phrase est dans D.B. - Arèlatus. L'article t¯n,
qui, un peu plus loin, p. 338, précède ce nom, ne laisse pas de doute sur la
forme latine qu'avait en vue Sozomène. Elle est la même dans Olympiodore, 16,
supra, p. 206 (ubi vid. not. 4), et, dans Zosime, V, XXXI, supr., p. 266.
(67) An de J.-C. 408.
(68) An de J.-C. 410. - La fin de ce ch. est dans
D. B.
(69) Même
année.
(70) Même
date.
(71) Comp.
plus haut, p. 206-207, Olympiodbre,16, et la note 3 de la page 206.
(72) Comparez
(plus haut, p. 2081-209) le récit plus court d'Olympiodore, 16. - Zosime, VI,
5, supr., p. 276-277, donne un motif à la défection de Gérontius : ce
général aurait considéré comme un affront pour lui la préférence accordée
à Justus par Constant, file de Constantin.
(73) An de J.-C. 411.
(74) V. la
note du texte ci-contre. - La correction de Valois est inutile : il n'a pas vu
que Constantius raillait le traître.
(75) Procope de Césarée en Palestine (460
apr. J.-C.), secrétaire et ami de Bélisaire et avocatà Constantinople.
(76) Huit livres, en deux tétrades ou deux
groupes de quatre livres, comprenant les guerres de Bélisaire contre les
Perses, contre les Goths et contre les Vandales (482-552 apr. J.-C.).
(77) Apr.
J.-C. 411.
(78) Par ce
mot Procope désigne sans doute les conquérants étrangers, les Saxons et les
Angles, qui s'emparèrent de la Bretagne, et qu'il considére comme des
usurpateurs dans ce pays arraché par eux à l'Empire romain (448-584).
(79) Apr.
J.-C. 406.
(80) Discours
de Vitigès aux Ostrogoths.
(81) BenetÛai;
Venetiæ,. plur. rare, désigne peut-être comme dans Cassiod., Var.,
XII, 24, les îlots voisins du pays des Vénètes et dont se forma Venise.
(82) Cf.. Senec., Quest. natur., 1, Praefat.
: Pyrenxus medium inter Gallias et Hispanias jugum extollat...
(83) Grotius
appuie sur ce point : gens obscura, donec Françorum nomen famamque. accepit.
Procope est moins affirmatif.
(84) Une domination usurpée.
(85) Apr.
J.-C. 523.
(86) Après J.-C. 503 ou 504. - Cf. Greg.
Turon., II, 32 et ss.
87) An
de J.-C. 526.
(88) An de
J.-C. 534.
(89) An de
J.-C. 528.
(90) Bataille
de Narbonne, 532.
(91) Deux mille livres d'or.
(92) La défaite des Goths par les Romains
près de Pérouse.
(93) Les troupes envoyées par Bélisaire au
secours de Milan (Mediolanum).
(94) Les Goths, vainqueurs à Milan, après
la prise et le sac de cette ville.
(95) C'est l'arme appelée de leur nom
francisque.- Cf. Chateaubriand, Martyrs, VI. - Selon son habitude, il a
un peu altéré les données des textes.
(96) A
Ravenne.
(97) Vulg.
« Cottiae, » Alpes Cottiennes.
(98)
Discours des Gépides à l'empereur
Justinien contre les Langobards (Lombards), leurs ennemis. Les Langobards
avaient parlé les premiers.
(99) Les
Warnes sont sans doute les mêmes que les Varins (Varini) de Pline, IV, XXVIII,
14, et de Tacite, Germ., XL. - Procope semble désigner sous le nom de
Brittie, qui, si je ne me trompe, ne se trouve pas ailleurs, la Chersonèse
cimbrique (Jutland), qu'il prolonge sur les côtes de l'océan Germanique
jusqu'aux îles du Rhin, puisqu'il compte parmi les peuples de cette île les
Angles et les Frisons.
(100) Les
Angiles ou Angles sont assez loin des Frisons ou Frisii, qui faisaient partie
des Istaevones, et se trouvaient au sud de l'Ems, au nord du lac Flevo, le long
de la mer Germanique. Les Angiles, voisins des Warnes ou Varins, étaient entre
l'Elbe, l'Oder et le golfe dit Sinus Lagnus, partie de la Baltique.
(101) La fiancée dédaignée lui avait
déclaré la guerre, l'avait vaincu, fait prisonnier, et ne lui avait pardonné
qu'à la condition que le mariage promis aurait lieu.
(102) Cet Athanase était le frère du
sénateur Alexandre, chargé comme lui de missions délicates.
(103) Le
siège de Vérone par Valèrianus, lieutenant de Narsès.
(104) Cymè, ordinairement en-latin Cumæ,
Cumes; Cÿmè, Kæmh,
est la forme, grecque quelquefois adoptée par les Latins, les poètes surtout,
Silius Ital., XIII, 494; Stat., Silv., IV, III, 65, etc.
(105) La guerre d'Italie, faite par
Justinien aux Ostrogoths.
(106) Les
Germains sont les Francs ; Procope, ici comme partout confond les deux peuples,
ou plutôt fait des Francs un peuple de race germanique.
(107) Procope
a déjà, (supa p. 390-1) exprimé la même idée. Ainsi, de son temps, le mont
Abnoba (Wurtemberg), où le Danube prend sa source, était regardé comme une
partie des montagnes celtiques.
terminé le 17 décembre 2004