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table des matières dE PROCOPE

 

 

 

Oeuvre numérisée par Marc Szwajcer

texte grec

 

 

LIVRE IV.

DES ÉDIFICES

DE JUSTINIEN,

Ecrit par Procope de Césarée.

CHAPITRE I.

1. Préface de Procope.  2. Patrie de Justinien. 3. Première, & seconde Justinienne. 4. Plusieurs petites places réparées par Justinien.

1. S'il y a du péril à s'engager sur une mer orageuse avec un vaisseau mal équipé, il n'y a pas moins de témérité de vouloir exprimer par la bassesse de mon style la magnificence des Edifices de Justinien. Il faisait paraître dans tous ses ouvrages, & principalement dans ces bâtiments, une telle élévation d'esprit, qu’il n'y a point de discours qui la puisse égaler. Surtout comme il souhaitait avec passion qu'il ne manquât rien à ceux de l'Europe, il les a mis dans une perfection qu'il n'est pas aisé de décrire. En effet ils sont d'une structure aussi solide, & aussi durable que le demande le voisinage du Danube, & les fréquentes irruptions des Huns, des Goths, des Scythes, des Sclavons, & des Sauromates, que l'ancienne histoire a représentés sur des chariots, & dans un changement continuel de demeure. Comme Justinien ne voulait rien omettre de ce qui pouvait servir à les réprimer, il fit construire une infinité de forts où il laissa de puissantes garnisons pour faire tête à des ennemis, qui brulent d'impatience de prendre les armes, bien qu'ils n'en aient joint de sujet. Qui font la guerre sans la déclarer, sans l'interrompre, soit par une suspension d'armes, ou par une trêve, & sans la vouloir terminer par un traité, enfin qui la commencent avec injustice, & qui la finissent avec violence. Je continuerai cependant l'histoire que j'ai commencée. Il ne faut pas qu'un si beau dessein demeure imparfait, & ce nous serait un juste sujet de reproche de nous lasser d'écrire les grandes choses, que l'Empereur ne se lasse point de faire. Mais avant que de parler des Edifices de l'Europe, il faut parler de l'Europe même.

3. Il y a une partie de la mer Adriatique qui se répand dans la terre ferme, & qui forme le Golfe Ionique, & à l'Epire à un de ses côtés, & la Calabre à l'autre. Le Danube coule à l'opposite, & donne à cette partie d'Europe la figure d'une île. Justinien y a élevé des ouvrages, par lesquels il a bouché le partage aux Barbares qui habitent au-delà du Danube.

2. Je commencerai par la patrie de Justinien, étant juste qu'elle tienne le premier rang dans mon histoire, aussi bien que dans l'Empire. Et certes elle est l'unique de toutes les villes, qui puisse se vanter d'avoir produit, & d'avoir élevé un Prince, dont les exploits sont au-dessus des pensées & des expressions des plus éloquents Ecrivains.

4. Il y a dans la Dardanie Européenne, au-delà du territoire de Duras, proche du tort de Bédériane, une ville nommée Tauresium, qui est celle d'où Justinien, le réparateur de l'Empire, a tiré sa naissance. Il l’a fait clore d'une muraille en carré, & il a élevé quatre Tours aux quatre coins.

5. Il a fondé tout proche une ville très magnifique qu'il a nommée la première Justinienne. Il semble que c’était une reconnaissance que les Romains devaient rendre au pays, qui avait porté & nourri leur conservateur. L'Empereur y fit construire un superbe aqueduc, afin qu'il y eût de l'eau dans toutes les saisons. Il y a laissé des marques glorieuses de sa magnificence dans les bâtiments dont il l'a ornée, dans les Eglises, dans les Palais, dans les galeries, dans les marchés, dans les bains, & dans les autres ouvrages publics. Enfin il en a fait une ville très peuplée, très riche, & très superbe, de sorte que non seulement elle a été élevée à la dignité de Métropole, mais encore elle a eu l'avantage de devenir le siège de l’Archevêque des Illyriens, les autres villes lui ayant déféré cet honneur, comme à la première du pays. Elle rend autant d'éclat à l'Empereur qu'elle en reçoit de lui. Car si d'un côté elle a la gloire de l'avoir produit, de l'autre, il a la satisfaction de l'avoir fondée. Je n'ajouterai plus rien à son éloge. J'avoue que je ne puis lui donner toutes les louanges qu'elle mérite, & qu'il n'y a point d'éloquence qui ne soit au-dessus d'elle, puisqu’elle a donné à l'Empire un aussi grand Prince que Justinien.

6. Il a rebâti entièrement le fort de Bédériane, & il l’a refait d'une structure plus solide qu'il n’était auparavant. Il y avait en Dardanie une ville nommée Ulpiane, dont il a réparé presque toutes les murailles, qui tombaient en ruine. Et prés l'avoir embellie de divers ornement, il l'a nommée seconde Justinienne.

7. Il a fondé une autre ville voisine, qu'il a nommée Justinopole, du nom de l'Empereur son oncle. Il a réparé de telle forte les murailles de Sardique, de Naïsopole, de Germane, & de Pantalie, qu'elles sont maintenant imprenables. Il a fondé tout auprès trois autres villes, Cratiscare, Quimédabe, & Rumisiéne ; parce qu'il avait dessein que le Danube servît comme de rempart à l'Europe, & à toutes les places que je viens de nommer, il a élevé plusieurs forts sur les bords de ce fleuve, & il y a établi de bonnes garnisons, afin d'en empêcher le partage aux Barbares. Après avoir achevé un si grand nombre d'ouvrages, il ne laissa pas de se défier de l'inconstance des choses humaines, & d'appréhender que les ennemis traversassent le Danube, inondassent les terres, & emmenassent ses sujets en captivité. C'est pourquoi il ne se contenta pas d'avoir pourvu à leur sureté par les fortifications des places, il fît encore fortifier les terres des particuliers dans l'ancienne & la nouvelle Epire, où il fit bâtir la ville de Justinianopole, qui s'appelait auparavant Andrinople.

8. Il a fait réparer les villes de Nicopole, de Photique, & de Phénicie. Mais comme ces deux dernières étaient assises dans un pays si marécageux qu'il n’était pas possible d'y élever des murailles sur des fondement qui fussent solides, il les laissa dans l'état où elles étaient, & il se contenta de bâtir auprès deux Citadelles sur deux hauteurs, au même endroit. Près d'une ancienne ville nommée Eurée, il y avait un lac, au milieu duquel était une presqu'île, où l'on allait par une langue de terre, que la nature semblait n'avoir réservée que pour y servir de passage, l'Empereur y fonda une ville sur une hauteur, & il la peupla des habitants d'Eurée, qu'il y transféra.

 

CHAPITRE II.

Fortifications des Thermopiles, & de plusieurs villes de Grèce.

1. Quand on est sorti de l'Epire, & que l’on a traversé l'Etolie, & l'Acarnanie on rencontre le Golfe de Crisée, l'Isthme de Corinthe, & le reste de la Grèce. C’est la partie que l'Empereur a jugée la plus digne de ses soins, & que l'on ne peut voir sans admirer la multitude des ouvrages dont il l'a embellie, & fortifiée. Quoi qu'il ait pourvu à tout ce qu'elle contient, il a particulièrement pourvu aux Pas des Thermopiles. Il était autrefois fort aisé de se rendre maître des montagnes parce qu'elles n'étaient fermées que de faibles murailles. Justinien les a rehaussées & a doublé les créneaux. Il a fait la même chose à un vieux château qui n'avait pas été bien bâti par le passé & il y a fait conduire de l'eau dont il avait grand besoin. Il a encore fait fortifier plusieurs autres Pas où il n'y avait auparavant ni muraille ni défense.

2. Il y a sujet de s'étonner de ce que bien qu'il y eut divers Pas presque tout ouverts, & par où des chariots pouvaient passer, néanmoins l'Empereur des Perses n'en a découvert qu'un seul des plus étroits, qui lui fut montré par des déserteurs. En effet, la mer qui bat le pied des montagnes, & les torrents qui en descendent avec violence avaient tellement élargi les chemins, qu'on n'espérait pas pouvoir joindre des roches que la nature avait réparées. La difficulté de l'entreprise était cause que l’on s'abandonnait à la fortune au lieu de commencer le travail, & que l'on se persuadait être en sureté parce que les ennemis ne connaissaient pas assez le pays. Et certes ceux qui ont aversion du travail ne sauraient croire que ce qui leur paraît difficile soit aisé aux autres. C'est pourquoi on ne peut refuser à Justinien la gloire d'avoir surpassé en vigilance tous les Princes qui ont jamais commandé. La mer a obéi à ses dedans, & elle s'est retirée pour céder à l'industrie des ouvriers qu'il employait, & pour leur laisser poser des fondements à l'endroit même qu'elle couvrait auparavant de ses vagues. Mais après avoir uni des forêts qui étaient éloignées l’une de l'autre & après avoir joint la mer aux montagnes, enfin après avoir fortifié toute la Grèce, l'affection qu'il avait pour ses sujets n'a pas encore été satisfaite. Faisant réflexion sur l’instabilité des choses humaines, & considérant qu'il n'y a point de fortification qui soit imprenable il a fait faire au dedans de la muraille divers petits forts afin que si elle était prise, les soldats eussent un lieu de retraite. Il a fait bâtir des greniers pour serrer les grains, & des réservoirs pour contenir l'eau. Et au lieu que les Empereurs précédents avaient laissé la muraille sans garnison, il y a mis deux mille soldats. Quand les ennemis faisaient des irruptions par le passé il n'y avait que des paysans qui prenaient les armes. Mais comme ils n'étaient pas accoutumés à les manier, ils s’en servaient fort mal & ils laissaient la Grèce exposée au pillage. Ce fut la crainte de la dépense qui fut cause du dégât de ce pays-là durant très longtemps.

3. Voila ce que l'Empereur a fait faire pour fortifier les Thermopiles. Il n'y a point de ville alentour dont il n'ait pris un soin très particulier. Il a fait entièrement rétablir les murailles de Saxos, d'Ypase, de Coracion, d'Unnon, de Balée & de Leontarion. Pour ce qui est d'Héraclée, voici les ouvrages qu'il y a fait faire. Quand on va d'Illyrie en Grèce on rencontre deux montagnes, qui en rapprochant forment un Pas fort étroit. Il en sort une fontaine qui produit un petit ruisseau. Mais lorsque la pluie tombe en abondance il s'y amasse un torrent qui roule avec impétuosité à travers les montagnes. Les Barbares pouvaient entrer par cet endroit dans les Thermopiles, & ensuite dans la Grèce. Il avait autrefois été fortifié d'un côté par la ville d'Héraclès dont j’ai ci-devant parlé, & de l’autre par celle de Myropole qui en est proche. Mais comme le temps avoir ruiné les fortifications de ces deux villes, Justinien les répara & éleva un mur très solide par le moyen duquel il joignit les extrémités des montagnes & il en boucha l'entrée. De là vient que le torrent bat le pied du mur, jusqu’à ce qu’il s'élève au-dessus & qu’il se perde.

4. Il a aussi pourvu à la sureté de toutes les villes qui sont au dedans des Thermopiles, en faisant réparer leurs murailles. En effet, celles de Corinthe avaient été renversées par un tremblement de terre & celles d'Athènes, de Platée, & des autres villes de la Béotie étaient tombées de vieillesse. Ce prince n'a pas voulu qu’aucune place fut hors d'état de se défendre. Car comme il veillait sans cesse pour le bien & pour le repos de ses sujets, il a considéré que les Barbares, qui faisaient continuellement des courses aux environs des Thermopiles, se modéreraient un peu eux-mêmes quand ils sauraient que leurs peines seraient inutiles, & quand ils considéreraient qu'il ne leur servirait de rien d'avoir passé le mur, puisqu'ils trouveraient ensuite des villes bien fortifiées, & dont ils ne se pourraient rendre maîtres, sans essuyer auparavant les fatigues de plusieurs sièges. On n'entreprend pas le travail quand on n'en attend point de récompense. Et on quitte l’espérance du bien à venir pour jouir & repos présent.

5. Après que Justinien eut achevé tous les ouvrages dont je viens de parler, il apprit que toutes les villes du Péloponnèse manquaient de murailles, & comme il fallait trop de temps pour les fortifier en particulier, il se contenta de fermer l’isthme, d'y élever des forts & d'y mettre des garnisons de telle forte que l'ennemi n'en saurait approcher, quand même il aurait forcé les Thermopiles.

 

CHAPITRE III.

Ouvrages faits par Justinien en Thessalie & en Macédoine.

 

1. Il y avait en Thessalie une ville nommée Dioclétianopole, qui ayant été autrefois fort heureuse, avait depuis été ruinée par les Barbares, et abandonnée par les habitants. Au milieu d'un lac était une presqu'île où l'on entrait par une langue de terre large seulement de quinze pieds. Il s’y élève une montagne qui la commande d'un coté, & qui de l’autre est arrosée par l'eau du lac. Justinien, considérant que la Ville de Dioclétianopole avait une assiette qui n’était point du tout avantageuse, & qu’elle avait été plusieurs fois pillée par les ennemis, fit bâtir dans la presqu’île une autre ville à laquelle il donna son nom. Il fit aussi réparer les murailles, & les fortifications d'Echinée, de Thèbes, de Pharsale, de Démétrias qui est la Capitale du pays, de Gomphe, de Tricate, & de quelques autres.

2. Puisque nous sommes dans la Thessalie, il faut que nous voyons le mont Pélion, & le fleuve Pénée. Ce fleuve coule doucement de ce mont & fait le principal ornement de la Ville de Larisse qu'il arrose. Celle de Phtie ne paraît plus aujourd'hui & le temps qui détruit tout n’en a laissé aucun vestige. Le Pénée a partout un cours fort doux, & fort tranquille jusqu'à ce qu'il se décharge dans la mer. Les terres qu'il arrose sont fort fertiles, & produisent toutes fortes de fruits. Mais les habitants ne tirent aucun avantage de cette-abondance, à cause de l'appréhension continuelle où ils sont, d'être accablés par les ennemis faute d'une place forte où ils puissent se mettre à couvert, les murailles de Larisse, & de Césarée étant presque tout à fait tombées, Justinien les a fait réparer, & a rendu par ce moyen au pas sa première félicité. Il s'élève tout proche des montagnes escarpées & couvertes de forêts, qui servirent autrefois de demeure aux Centaures, & qui furent le champ de la bataille qu'ils donnèrent aux Lapithes, si nous en voulons croire la fable qui parle d’une espèce d'animaux monstrueux qui étaient à moitié hommes & bêtes à moitié. L’antiquité a laissé dans le lieu-même une marque de la croyance qu'elle a ajoutée à cette fable, le fort qui est bâti sur cette, montagne s'appelant encore aujourd’hui Centauropole. L'Empereur a fait réparer les murailles de ce fort qui étaient ruinées, de même que celles d’un autre nommé Euryméne. Il a pris pareil soin de divers autres de Thessalie, desquels je serai le Catalogue en faisant celui des places qu'il a rétablies dans la Macédoine.

3. Pour ne rien laisser dans la Grèce que nous ne considérions, passons dans l’île d’Eubée qui est voisine d'Athènes & de Marathon. Cette île est vis-à-vis de la Grèce, à laquelle elle était jointe autrefois, & de laquelle elle a été séparé par un détroit qui n'est pas plus large qu'un ruisseau à l’endroit de Calcide & que on appelé Euripe. On joint quelquefois l'île à la terre ferme avec une poutre, & alors les insulaires vont comme de plein pied dans le continent. Quelquefois ils ôtent la poutre & ils traversent le détroit dans des barques. Ainsi en l'ôtant ou en la mettant, ils vont tantôt sur la terre, & tantôt sur la mer & ils semblent être habitants tantôt du continent, & tantôt d'une île. Pallène est une Péninsule, à l'entrée de laquelle les habitants avaient autrefois fait une muraille d'une mer à l'autre, & où ils avaient bâti une ville que l’on appelait Potidée, & que l'on appelé aujourd'hui Cassandre. Le temps en avait tellement ruiné les fortifications, que quand les Huns firent irruption sur cette côte, ils l’emportèrent du premier assaut bien qu'ils ne sussent point faire de sièges & qu'ils n'en eussent jamais fait auparavant. Ce fut une occasion favorable à Justinien de faire paraître la grandeur de son âme & comme il prenait un soin particulier de remédier aux plus fâcheux accidents, il faisait en sorte que ses sujets trouvaient de l'avantage, dans leurs disgrâces. Il fortifia tellement Pallène, qui sert comme de rempart au pays, & les avenues d'alentour, que les ennemis ne sauraient rien entreprendre de ce côté-là. Voila ce qui regarde la Macédoine.

4. Le fleuve Regius coule assez près de Thessalonique, ou après avoir arrosé un terroir fort fertile, il se décharge dans la mer. Son cours est calme & paisible. Son eau est bonne à boire. Les bords sont couverts d'agréables pâturages : mais le pays avec tous ces avantages était exposé aux courses des ennemis n’ayant aucun fort dans l’espace de quarante milles. C’est pourquoi Justinien en fit bâtir un à l’embouchure de ce fleuve & il le nomma Artémise.

 

CHAPITRE IV.

Liste des forts que Justinien a fait réparer dans l’Epire, dans la Macédoine, dans la Thessalie, dans la Dardanie & dans l’Illyrie:

 

Il est juste de parler de toutes les autres fortifications que l'Empereur a fait faire en Europe. Si c'était pour des étrangers, & pour les sujets d'un Etat fort éloigne que j'en fisse la liste, je suis assuré qu'elle ne trouverait point de créance dans les esprits, parce qu'elle ne serait appuyée du témoignage d'aucune personne. Mais je ne dis rien qui ne soit exposé à la vue de tout le monde ; les habitants des lieux dont je parle sont autant de témoins de la vérité de ce que j’avance. Etant donc animé de la constance, & de la force que donne la vérité, je ferai rémunération des nouvelles fortifications que Justinien a fait faire dans le pays que je viens de marquer, ou des anciennes qu’il a fait réparer : & je le ferai en forme de liste & de catalogue, afin d'éviter la confusion.

Boulpiansus

Episterba

Sceminites

Aona

Stephaniacum

Argus

Aliula

Dyrrachin

St. Sabianus

Gemenus

Bacustê

Alistrus

Patapa

Epidunta

Bacusta

Martis

Eirenê

Speretium

Aoiôn

Stredên

Gynaecomites

Labellus

Epileum

Piscinae

Deuphracus

Dolebin

Hedonia

Titiana

Cithinas

Ulibula

Brebatê

Thesaurus

Forts qui ont été réparés :

Sait Etienne
Cethreôn

Apis

Peleum

Comê

Pacuê

Scidrenpole

Antipagrae

Tithyra

Brebeta

Bupus

Endyneia

Dionysus

Ptocheiou

Tyrcanus

Capaza

Pupsalus

Gabraeum

Dionoia

Clementiana

Illyrin

Cilicae

Argyas

Therma

Amanteia

Paretium

Forts bâtis de neuf dans l'ancienne Epire:

Parmus

Olbus

Cionin

Marciana

Algus

Ceimenus

Xeropotamus

Europê

Chimaerae

Helega

Homonoia

Adanum

Forts qui n'ont été que réparés.

Murciara

Castina

Genysius

Percus

Marmarata

Listria

Petroniana

Carmina

St. Sabinus

La cisterne du fort de Comê

Martius

Pezium

Onalus

Un peu au-delà de Justinianopolis et de Phptique, les deux forts de St. Donatus

Symphygium

Pronathidum

Hedones

Castellus

Bulibas

Palyrus

Trana

Poseidôn

Colophonia

Forts réparés dans la Macédoine

Candida

Colobona

Basilica Amyntou

Melichiza

Pascas

Aulon

Bolbus

Brigizes

Optas

Pleurum

Caminus

Therma

Bogas

Neapolis

Calarnas

Museum

Acremba

Adrianium

Edana

Siclae

Nymphium

Metizus

Argicianum

Bazinus

Cassopas

Parthiôn

Gentianum

Priniana

Thesteum

Cyrrou

Gourassôn

Cumarciana

Limnederium

Bourboöden

Babas

Cryniana

Pelecum

Lagês

Crataea

Phasciae

Placidiana

Hygea

Limnaae

Optium

Charadrus

Cassopes

Forts réparés dans la Thessalie

Alcôn

Lossonus

Geronticê

Perbyla

Cercineou

Scidreûs

Phracellan

Forts bâtis de neuf dans la Dardanie.

Laberium

Castimum

Rhabestum

Castellium

Acrenza

Terias

Drullus

Victorias

Forts qui ont été réparés

Cesiana

Tezulê

Usiana

Besiana

Mascas

Listê

Celliriana

Zysbaes

Genzana

Petrizên

Eutychiana

Mulatô

Belas

Cattarus

Cattarecus

Pentza

Cattapheterus

Dabanus

Cubinus

Germatza

Victoriana

Azeta

Durbuliana

Suricum

Cusines

Tuttiana

Ballesiana

Bella

Catrelates

Casyella

Maniana

Priscupera

Miletês

Dardapara

Cesuna

Beriniana

Lasbarus

Castellobretara

Edetziô

Dinium

Cecola

Emastus

Castelona

Capomalba

Seretus

Ptocheium

Cuinô

Berzana

Besaïana

Arsa

Blezô

Labutza

Quintou

Bermezium

Catrasema

Rhotun

Cobenciles

Marcelliana

Primoniana

Pamilinus

Aria

Dans le territoire de la ville de Sardique

Scupium

Stenes

Marcipetra

Briparum

Romaniana

Struas

Protiana

Maccuniana

Scopentzana

Dans le champ de Cabézane le Fort de Balbes a été bâti de neuf, et ceux qui suivent ont été réparés.

Byrsia

Stamazô

Clesbestita

Duiana

Turicla

Medeca

Peplabius

Cunae

Bineüs

Trisciana

Parnusta

Tzimes

Bidzô

Stenecorta

Danedebae

Ardeia

** bâtis de neuf **

Bugarama

Betzas

Bregedaba

Borbrega

Turûs

Réparés

Salebries

Arcunes

Duries

Buteries

Barbaries

Arbatias

Cutzusura

Etaeries

Itaberies

Bottes

Bitzimaeas

Badziania

Banes

Bimerus

Tusudeaas

Scuanes

Scentudies

Scares

Tugurias

Bemastes

Stramentias

Lignius

Itadeba

Dans le territoire de la ville de Germane le fort de Scaphion a été bâti de neuf, et ceux qui suivent ont été réparés.

Germas

Candaras

Rolligeras

Scinzeries

Rhiginocastellum

Suegogmense

Dans le territoire de la ville Pauta

Tarporum

Suabastas

Cherduscera

Blebois

Zeapuries

Dans le champ Scassétane.

Alarum

Magimias

Lucunanta

Balausum

Buttis

* Bâtis de neuf dans le territoire de la ville **

Calbentia

Pharanores

Stranbasta

Aldanes

Barachtestes

Sarmates

Arsena

Brarcedum

Eraria

Bercadium

Sabiniribes

Timiana

Candilar

Arsaza

Biculea

Castellium

Groffes

Garces

Pistes

Dusmanes

Bratzista

Holodoris

Cassia

Grandetum

Urbriana

Nogeto

Gurbicum

Lautzones

Duliares

Mediana

Tiuncona

Castellium

Réparés.

Hercula

Mutzianicastellum

Burdopes

Calis

Millareca

Dedbera

Chesdupara

Dans le champ Remesianèse.

Brittura

Subaras

Lamponiana

Stronges

Dalmatas

Primiana

Phrerraria

Topera

Tomes

Cuas

Tzertzenutzas

Stens

Aeadaba

Destreba

Pretzouries

Cumudeba

Deurias

Lutzolo

Rhepordenes

Spelonca

Scumbro

Briparo

Tulcoburgo

Longiana

Lupophantana

Dardapara

Burdomina

Grinciapana

Graecus

Drasimarca

Dans le champ d'Aquinée le Fort de Timatochion a été bâti de neuf, et ceux qui suivent ont été réparés.

Petres

Sculcoburgo

Vindimiola

Braeola

Arganocili

Castellonovo

Florentiana

Romyliana

Septecasae

Argentares

Auriliana

Gembero

Clemades

Turribas

Gribo

Chalaro

Tzutrato

Mutzipara

Stendas

Scaripara

Odriuzo

Cipipene

Trasiana

Potes

Amulo

Setlotes

Timaciolum

Meridio

Meriopontede

Tredetetilious

Braeola

Motreses

Vicanovo

Quartiana

Julioballae

Pontzas

Zanes

CHAPITRE V.

1. Cours du Danube. 2. Fortifications faites sur les bords.

1. Voila de quelle manière Justinien a fortifié les villes méditerranéennes de l'Illyrie. Je m'en vais dire comment il a fortifié le bord du Danube. Les Empereurs précédents avaient élevé des forts & des villes pour en empêcher le partage aux nations étrangères. Mais ces villes & ces forts servaient plutôt à montrer que le bord n'en était pas tout à fait inhabité, qu'ils ne servaient à le défendre. Il est vrai qu'alors les Barbares ne faisaient pas volontiers de sièges & que les fortifications ne consistaient qu’en une Tour, où il y avait un petit nombre de soldats. Ce qui suffisait pour les arrêter. Mais Attila étant venu depuis avec une formidable armée rasa ces petits forts & fit une terrible irruption sur nos terres. Justinien les a relevés non pas tels qu'ils étaient mais il les a faits plus solides. Voici comment.

2. Le Danube tire sa source des montagnes des Celtes ou des Gaulois. Il traverse une vaste étendue de pays qui est presque tout désert, & qui n'est habité en certains endroits que par des Barbares qui n'entretiennent aucun commerce avec les hommes polis.

3. Lorsqu'il s'approche de la Dace il sépare nos terres de celles de ces peuples. Voila pourquoi les Romains appellent la Dace Ripense, c'est-à-dire la Dace qui est sur la rive.

3. Singédon est la première, & la plus ancienne ville qui ait été faite en cet endroit-là. Les Barbares en étant devenus maîtres par la suite du temps l'ont rasée. Justinien l’a fait rebâtir & l'a rendue & plus forte & plus magnifique qu'elle n'avait jamais été. Il a aussi fait bâtir un fort à huit milles de Singédon, que l’on a appelé pour ce sujet-là le huitième. Au-delà il a fait rebâtir entièrement une ancienne ville nommée Viminaque, qui avait été ruinée.

 

CHAPITRE VI.

Ouvrages bâtis par Justinien depuis la ville de Viminaque jusqu’à la Thrace.

 

1. Quand on est sorti de Viminaque l’on rencontre sur le bord du Danube trois forts, Picne, Cupe & Nova, qui ne consistaient autrefois qu'en une Tour. Justinien y a depuis élevé un si grand nombre de maisons & de fortifications qu'il en a fait des villes fort célèbres. Il y avait sur l'autre bord, à l'opposite de Nova, une Tour dont le véritable nom était Litérata, & que les habitants appelaient par corruption Lédérata. Cette Tour ayant été autrefois abandonnée, Justinien en a depuis fait un fort considérable. En suite de Nova il y a divers forts, savoir Cantabazate, Smorne, Campse, Tanate, Serne & Ducéprate. Il y en a encore plusieurs autres sur l'autre bord qui ont tous été bâtis de neuf par les soins du même Prince. Il y a un peu plus loin une forteresse nommée la tête de bœuf, bâtie autrefois par Trajan, & tout auprès, une ancienne ville nommée Zane que l'Empereur a fait fortifier, de telle forte que ce sont maintenant deux des plus puissants boulevards de l'Empire. Proche de Zane est un fort, nommé Pont. Le fleuve se coupe en cet endroit pour entourer une partie de son rivage, après quoi il se remet dans son canal ordinaire». Ce n’est pas de lui-même qu'il fait ce détour, il y est forcé par l'artifice des hommes. Je dirai ici pourquoi ce fort a été appelé Pont, & pourquoi le cours du Danube a été détourné en cet endroit-là.

2. L'Empereur Trajan étant d'un naturel ardent, & ambitieux semblait avoir de l'indignation de ce que son Empire n’était pas d'une étendue infinie & de ce que le Danube y servait de bornes. Il désira donc d'en joindre les deux bords avec un Pont afin qu'il n'apportât plus d'obstacle à les conquêtes. Je n'entreprendrai pas d'en faire la description. Il faudrait pour cela avoir la suffisance de cet Apollodore de Damas, qui en donna le dessin. Mais quelque grand que sut cet ouvrage, il devint inutile aux Romains, parce que la suite du temps, & le cours du fleuve le ruinèrent. Trajan rebâtit deux forts aux deux bouts du Pont. L'un de ces forts a été depuis nommé Pont, & l'autre Théodora. Les ruines du pont remplirent de telle sorte le canal du Danube qu'il changea son cours, & prit le tour dont j'ai parlé. Ces deux forts ayant été ruinés tant par la longueur du temps, que par les irruptions des Barbares, Justinien a fait réparer très solidement le fort du Pont, qui est au côté droit du Danube, & a assuré par ce moyen le repos de l’Illyrie & pour celui de Théodora il l'a négligé parce qu'il était trop exposé aux courses des nations étrangères. Le même Empereur a fait bâtir au-dessus du fort du Pont divers autres forts dont voici les noms : Narbourg, Susiane, Armate, Timéne, Théodoropole, Stilibourg, & Alicanibourg.

3. Il y a tout proche une ville nommée Ager, dont l’Empereur a relevé une partie qui était tombée en ruine. Il a aussi réparé trois autres forts, dont l'un se nommait Lacbourg, l'autre Bourgneuf, & le dernier Dortic. Il a tellement réparé une Tour, nommée la Tour du Juif, qu'elle peut maintenant passer pour une très belle citadelle. De plus, il a entouré de murailles le bourg nommé le Bourg-haut, qui était entièrement dépeuplé. Il en a fait autant à un fort, nommé Gombe. Il a réparé la Citadelle Crispas, Longiniane & Ponte-Serium qui étaient presque ruinées par le temps. Il a refait les créneaux de Boulogne & de Novo qui étaient tombés. Il a réparé toutes les ruines de la ville Ratiaria. Il y en a dont il a accru l'enceinte & il y en a d'autres dont il l'a diminuée, selon qu'il l'a jugé à propos pour en rendre l'accès plus difficile. Il a fait de la Tour Mocatiane une Citadelle, pourvue de tout ce que l'on y peut désirer. Il a rétréci un espace d'Almum, & il l'a mis en état de soutenir l'attaque des ennemis. Il y a plusieurs endroits où n’ayant trouvé qu'une Tour qui était aisée à assiéger & à prendre, il en a fait des forts très considérables. Tricesse & Putédin en peuvent servir d'exemple. Il a merveilleusement bien réparé les fortifications de Cébre. Il a bâti de neuf deux autres forts, savoir l'un dans un lieu nommé Bigranaë, & l'autre dans un lieu nommé Onos, où il n'y avait auparavant qu'une Tour. Il y avait tout auprès des vieux vestiges d'une ville nommée Augusta, elle retient encore le même nom maintenant qu'elle a été entièrement rebâtie par Justinien, & remplie d'un grand nombre d'habitants. Il a fait à la Citadelle Edabe toutes les réparations qui y étaient nécessaires. Il a relevé la ville de Variane qui était tombée est ruine & il a entouré de murailles celle de Valériane qui était toute ouverte.

4. Il a étendu ses pensées, & ses soins jusques aux places les plus éloignées du bord du Danube, & il a entouré de fortes murailles le Camp de Mars, Zetnocerte, & Iscos. Il a réparé les fortifications & les murailles du fort des Huns sur le bord du Danube. On avait élevé assez proche de ce fort deux ouvrages pour la défense des deux bords de ce fleuve. L'un qui était dans l’Illyrie avait été appelé petit Palais, & l'autre qui était à l'opposite avait été appelé Sicibide. Ces deux ouvrages ayant été ruinés par le temps, ont été si bien réparés par Justinien qu'ils contribuent extrêmement à réprimer les courses des Barbares. De plus il a rebâti tout de neuf un ancien fort, nomme le fort d'Eryme. Il a réparé le fort de Lapidaris qui est à l'extrémité de l'Illyrie. Et il a tellement accru une Tour nommée la Tour de Lucernariabourg, qu'elle a autant d'espace qu'une citadelle d'une juste grandeur. L'Empereur ne s’est pas contenté de faire bâtir ces ouvrages dans l'Illyrie, il a pourvu encore à la sureté de cette Province par les garnisons qu'il y a établies.

 

CHAPITRE VII.

Autres ouvrages bâtis ou réparés par Justinien sur le Danube.

 

1. Nous avons décrit jusqu'ici les fortifications que l'Empereur a fait faire dans l’Illyrie sur le Danube ; parlons maintenant de celles qu'il a fait faire dans la Thrace sur le même fleuve, avant que de parler de celles qui sont sur la terre un peu loin de ses bords. Entrons d'abord dans le pays des Mysiens, qui confinent à l’Illyrie & que les Poètes ont dit combattre de près. Justinien a fait bâtir de neuf le fort de Sécurisca, qui est le premier qui se présente à la vue après celui de Lucernariabourg, & il a fait réparer les raines de celui de Cintodéme. Il a fondé un peu plus loin une ville qu'il a nommée Théodoropole, du nom de l'Impératrice sa femme. Il a fait réparer les forts de Tigas & de Iatron. Il a ajouté au fort de Maxence une Tour qu'il y jugeait nécessaire, & il a fait construire tout de neuf un autre fort nommé Cinton. Il y a ensuite la Citadelle de Tramacarisque, vis-à-vis dé laquelle est le fort de Daphné, qui fut autrefois bâti avec un grand loin par l'Empereur Constantin, mais comme dans la suite du temps il avait été démoli par les Barbares, il fut réparé par Justinien. Ce même Prince fit faire aussi les réparations qui étaient nécessaires aux citadelles d'Aliènes, & de Candidiane, qui avaient été un peu auparavant ruinées par les ennemis. Il y a ensuite trois forts sur le Danube savoir Salcopyrge, Dorostole, & Sucidabe, dont il a fait refaire les ruines. Il a pris le même soin du fort de Quesore, qui est un peu éloigné du rivage. Quoi que celui de Palmate en fût aussi éloigné, il n'a pas laissé de le réparer, & d'en augmenter l’étendue. Il a rebâti tout proche un autre fort nommé Adine pour repousser les Sclavons qui dressaient des embuscades en cet endroit-là, & pour réprimer l'insolence, de leurs brigandages. Il a encore élevé un autre fort tout proche qui se nomme Tilicion, & au côté gauche une citadelle.

2. Voila ce qui regarde les forts de la Mysie, qui sont sur le bord du Danube. Entrons maintenant dans la. Scythie, où nous verrons d'abord le fort de Saint Cyrille duquel Justinien a fait réparer divers endroits qui tombaient en ruine. Il y avait ensuite un vieux château nommé Ulmiton qui avait longtemps servi de retraite aux Sclavons, mais qui alors était désolé. Justinien le fit entièrement rebâtir, & garantit par ce moyen la côte des incursions de ces Barbares. Outre cela il a. fait réparer les murailles de la ville d'Ibide, & il a fait bâtir au delà un fort, nommé Egiste. Il a fait faire plusieurs autres réparations à un autre fort nommé Almyris, qui est a l'extrémité de la Scythie. Il n’est pas juste de passier sous silence les autres places que le même Prince a fait fortifier en cette partie de l'Europe.

 

CHAPITRE VIII.

1. Chemin de Région. 2. Pont de la Fourmi. 3. Citernes de la ville d’Atyra & quelques autres bâtiments.

 

1. J’ai fait le dénombrement des Edifices que l'Empereur a fait faire dans la Dardanie, dans l'Epire, dans la Macédoine, dans les autres parties de l'Illyrie, dans la Grèce, & sur les bords du Danube. Il est à propos de faire à cette heure mention de la Thrace. Comme Constantinople surpasse toutes les autres villes encore plus par l’éminence de sa dignité, que par l'avantage de son assiette, & comme elle s'élève pour défendre l'Europe, ainsi qu'une citadelle, & qu'elle garde la mer qui la sépare d'avec l'Asie, il est juste qu'elle fasse le commencement de ma narration, & qu'elle lui serve de fondement. Mais puisque j'ai déjà décrit les Edifices tant particuliers que publics, que ce Prince a fait faire dans la ville, & aux environs, je pallierai plus avant.

2. Il y a dans un faubourg un fort, nommé Strongylon, d'un nom qui a quelque rapport à la figure qui est ronde ; le chemin qui conduit de ce fort à Région étant haut & bas, & se trouvant rompu par les eaux, & par la fange, toutes les fois que les pluies étaient abondantes, Justinien le fit paver de grosses pierres & le rendit aisé & commode. Il est de la largeur qu'il faut pour passer deux chariots de front. Les pierres sont fort dures, fort larges, & fort épaisses. Elles sont si bien jointes, qu'il semble que ce ne soit qu'une seule pièce. En voila assez sur ce sujet.

3. Il y a proche de Région un lac où plusieurs rivières se déchargent ; il s’étend jusqu’à la mer & n’a avec elle qu'un même rivage qui est fort battu par ses vagues. Quoi que les eaux de la mer & du lac soient enfermées dans un même canal, elles ne laissent pas d'avoir un cours tout contraire. Lorsqu'elles se sont un peu approchées, elles se replient, & se retirent comme si elles s'imposaient des bornes. Il y a à l'endroit où elles se joignent un détroit où l’on ne les peut distinguer. Le lac ne se décharge pas toujours dans la mer, ni la mer ne remonte pas toujours dans le lac. Lorsqu'après de grandes pluies il souffle un vent de Midi le lac avance visiblement vers la mer, au contraire lorsqu'il souffle un vent de Septentrion la mer se répand sur le lac, & s'étend fort loin, quoi que ce soit dans un espace fort étroit & fort profond, que l’on a appelé pour ce sujet, Fourmi. Le Détroit où la mer & le lac se mêlent, a un Pont où l'on ne pouvait autrefois passer sans danger, parce que les vagues enlevaient souvent le pont, & les hommes qui passaient dessus. Justinien pourvût à la sureté du passage en faisant bâtir un pont de pierre au lieu du pont de bois.

4. Il y a au-delà de Région une Ville nommée Atyra, dont les habitants étaient extrêmement incommodés par la disette d'eau : mais Justinien les a délivrés de cette incommodité, en faisant faire une citerne, qui est plus que suffisante pour fournir aux nécessités de la Ville. Il a aussi fait réparer les ruines des murailles.

5. Au-delà d’Atyra est un lieu nommé Episcopia par les habitants, qui n'avait aucune fortification, & était tout à fait exposé aux courses des ennemis : Justinien l’a fait fortifier d'une manière toute nouvelle. Le bâtiment s'avance hors de l'enceinte de la muraille, & étant fort étroit au commencement, il devient fort large, & est revêtu par les deux bouts de deux Tours, ce qui empêche les ennemis de pouvoir approcher des murailles. Les Portes ne sont pas à l'ordinaire an milieu des courtines entre deux Tours, mais à coté dans des enfoncements qui les dérobent à la vue des ennemis. Ce fut Théodore Silentiaire, homme de grande suffisance, qui fut emploie à cet ouvrage. Ayant à décrire la grande muraille, remarquons quelque chose auparavant.

 

CHAPITRE IX.

1. Grande muraille bâtie par Anastase & réparée par Justinien. 2. Réparations faites à Sétivrée,

à Héraclée, & d’autres villes.

 

1. La mer Méditerranée a l'Europe au côté gauche, & se répand vers l'Orient jusqu'à la Thrace, où elle se divise en deux, & continue d'un côté à se répandre vers l'Orient & forme de l'autre le Pont-Euxin. Quand elle est arrivée à Constantinople, elle tourne du côté d'Orient comme si c’était une borne ; de là elle se jette dans un Golfe & et elle fait l’isthme de Thrace, non pas en se partageant en deux bras, comme aux autres isthmes, mais en entourant la Thrace, & surtout les faubourgs de Constantinople, d'une manière tout à fait admirable. Les maisons y ont été bâties non pour la nécessité, mais pour le luxe. Elles y sont embellies d'une quantité prodigieuse d'ornements vains & précieux, qui ne peuvent procéder que de l'orgueil de l'esprit, & de la superfluité des richesses. On n'y voit que des meubles exquis & travaillés avec autant d'art que de dépense. Quand les ennemis surviennent à l'imprévu ils ruinent ces belles maisons, & les réduisent à un état pitoyable.

2. L'Empereur Anastase désirant autrefois y apporter du remède, fit bâtir à quarante milles de Constantinople une muraille, longue de l’espace de deux journées de chemin, qui touchait d'une mer à l'autre. Il s'imaginait avoir pourvu par là à la sureté des maisons qui étaient dans cette enceinte : mais ce qu'il y fit fut trouvé plus incommode qu’utile & la muraille, pour avoir trop d’étendue, n’eut pas assez de solidité. Il fallait un nombre prodigieux de soldats pour la garder, & de quelque côté que vinssent les ennemis, ils en prenaient une partie & chassaient l'autre.

3. L'Empereur a fait réparer tous les endroits des murailles qui étaient tombés par terre, & de plus, pour la sureté de la garnison, il a fait boucher les Portes par où l'on allait d'une Tour à l'autre, & il a fait faire une porte par en bas, un degré à chaque Tour. Ceux qui les gardent les ferment quand il est nécessaire & se tenant à couvert, ils méprisent les efforts des ennemis.

 Il a pourvu à la sureté de cette muraille non seulement en faisant ce que je viens de dire, mais en réparant les fortifications de Sélivrée,

4. Heradée, cette ville si célèbre qui est tout proche sur le bord de la mer, & qui s’appelait autrefois Périnthe, qui tenait le premier rang dans l’Europe & qui n’y tient plus maintenant que le second, manquait d’eau, non par la qualité de son assiette mais par la négligence de ceux qui l’avaient bâtie, car l'Europe où elle est assise, est arrosée d’un grand nombre de fontaines, & on avait eu soin d’y faire un Aqueduc, mais il avait été ruiné par la suite des années, & peut-être aussi par la faute des habitants. Le Palais dé la Ville avait couru la même fortune. Justinien s’est appliqué avec un soirs; & avec une magnificence toute Royale à réparer l’un & l'autre.

5. À une journée d'Héraclée est un lieu nommé Rodosto, qui est dans une situation fort avantageuse pour naviguer sur l’Hellespont, & qui est fort commode aux marchands pour aborder, pour décharger leurs marchandises, & pour en emporter d'autres dans les pays étrangers. Mais comme il était naturellement de facile accès, & qu'il n'avait pas été fortifié par l’art des hommes, il avait été abandonné par les marchands, qui n'y trouvaient point de sureté. Justinien l'a très bien fortifié, & en le fortifiant il a pourvu à la conservation des peuples d'alentour. Il y a bâti une ville très spacieuse, et très forte, où les paysans se retirent dans les temps de guerre & où ils portent ce qu'ils ont de meilleur.

 

CHAPITRE X.

1. Grande muraille de la Chersonèse. 2. Réparations d’Aphrodisias, de Cibéris, de Callipole, & de quelques autres places.

 

1. Disons maintenant quelque chose des soins que le même Prince a pris de fortifier la Chersonèse Elle s'avance à l'opposite d'une partie de la Thrace & semble être prête de se joindre à l'Asie, elle a un Promontoire près de la ville d'Eléonte, qui s'étend à l’endroit-même, où se forme le Golfe de la mer Noire. Il s'en faut peu qu'elle ne soit une île, & il n'y a qu'un isthme fort étroit qui l'en empêche ; c'est pour cela qu'elle a été appelée Chersonèse. Les anciens avaient bâti sur cet isthme une muraille qui pouvait être prise sans peine,, & qui était aussi basse que si elle n'eut été faite que pour enclore un jardin. Ils avaient élevé aux deux côtés de l'isthme deux Moles si faibles & si méprisables, qu'ils semblaient plus propres à faire entrer l'ennemi qu'à le repousser. Ils s'imaginaient cependant que ces murailles & ces Moles étaient imprenables & sur cette imagination ils n'avaient élevé aucune fortification dans la Chersonèse, bien qu'elle eût le chemin de trois journées en longueur. Il n'y a pas longtemps que les ennemis en parcourant la Thrace tentèrent d'entrer dans l'isthme, qu'ils chassèrent sans peine ceux qui le gardaient & passèrent la muraille.

2. Justinien qui veillait avec une application continuelle au bien de ses sujets fit abattre entièrement la vieille muraille sans en laisser le moindre vertige & en fit élever au même endroit une autre d'une hauteur & d'une largeur fort raisonnable. Au-dessus des créneaux il fit faire une galerie voûtée afin que les soldats fussent à couvert, & au dessus de cette galerie, il fit faire un autre rang de créneaux, afin de doubler le nombre des soldats. Aux deux bouts il fit construire deux Moles & il les fit élever à une hauteur égale à celle des murailles. Il fit nettoyer les fossés, & les fit creuser d'une largeur & d'une profondeur extraordinaire. Il y mit de plus une garnison fort nombreuse, & capable de garder la grande muraille, & de repousser ceux à qui prendrait envie de l'attaquer.

3. Après avoir pourvu de la sorte à la sureté des avenues il ne négligea pas pour cela les fortifications du dedans, mais il les mit en état de résister au cas que la grande muraille fut prise par malheur. Il fit fermer pour cet effet la ville d'Aphrodisias qui ne l'avait jamais été. Il rebâtit entièrement celle de Cibéris qui était en ruine. Il la peupla de nouveaux habitants. Il y construisit des bains, des hôpitaux, & d'autres Edifices qui sont la beauté des villes.

4. Il fit encore entourer de fortes murailles la ville de Callipole que les anciens avaient tout à fait négligée, par la confiance qu'ils avaient eue dans la muraille de la Chersonèse. Il y fit aussi bâtir des caves, & des greniers pour renfermer les provisions nécessaires aux gens de guerre.

5. Il y a à l'opposite d'Abyde une ville fort ancienne nommée Seste, qui est commandée par une colline, de qui n'avait autrefois ni fortifications ni murailles. L'Empereur y a fait bâtir une citadelle qui est de très difficile accès, & qui passe pour imprenable. Il y a proche de Seste une autre ville nommée Eléonte, où il s'élève un rocher fort vaste & détaché de la mer, au haut duquel Justinien a fait bâtir un fort. Il en a fait construire encore un autre à côté de la grande muraille & d'une manière fort solide, & ainsi il a pourvu à la sureté des peuples de la Chersonèse.

 

CHAPITRE XI.

Fortifications de la ville d'Enus, du bourg de Bellure, & de quelques autres places.

 

Il y a au-delà de la Chersonèse une ville nommée Enus, du nom d'Enée fils d'Anchise son fondateur. Les murailles de cette ville sont si basses qu'il n'y avait rien si aisé que de passer par dessus. De plus, elles avaient du côté de la mer une ouverture par où elles donnaient un partage tout libre. L'Empereur les a élevées à une telle hauteur que les ennemis, bien loin d'espérer de les prendre, n'osent seulement songer à les attaquer. Mais bien que l'Empereur eût fait entourer cette ville d'une si forte muraille, qu'elle semblait imprenable, le pays n'en fut pas moins exposé au pillage parce qu'il n'y avait presque jamais eu de forts dans Rodope. Il y avait bien avant dans la terre un bourg nommé Bellure, qui égalait les villes en richesses & en habitants. Mais comme il n’était point fermé de murailles il n’était pas moins sujet aux incursions que les terres d'alentour. Justinien l'a fermé, & lui a donné le nom de ville. Il a pris un soin particulier de réparer ce qui manquait aux autres places de Rodope & surtout aux murailles de Trajanopole, & de Maximianopole.

2. Pour ce qui est d'Anastasiopole elle était fermée de mitrailles. Mais comme la côte n’était pas fortifiée, les Huns y abordaient, enlevaient les vaisseaux, & incommodaient les îles voisines. Justinien a fait bâtir pour ce sujet une muraille le long de la côte, & il a conservé par ce moyen les vaisseaux, & les iInsulaires.

3. Il a de plus fait faire un aqueduc pour conduire l’eau depuis une montagne voisine jusqu'à la Ville.

4. Il y a dans Rodope une ancienne ville nommée Topére, qui est presqu'entourée par une rivière, & commandée par une colline par où les Sclavons l'ont prise depuis peu de rems. L'Empereur l'a fait enfermer de murailles qui s'élèvent à une telle hauteur qu'elles sont autant au dessus de la colline qu'elles étaient autrefois au dessous. Il a fait ajouter au haut une galerie couverte, d'où les soldats de la garnison peuvent tirer sur les assiégeants. De plus il a fait de chaque Tour comme autant de Citadelles.

5. Il faut que j'ajoute de quelle manière il a fortifié le reste de la Thrace & le pays que l'on appelé Emimont. Il a fait réparer tous les endroits de Philippopole & de Plotinopole qui menaçaient de ruine, ou qui étaient faibles, & hors d'état de soutenir le choc des ennemis. Il a élevé une infinité de forts dans la Thrace, & au lieu qu'elle était sujette auparavant aux courses, & aux ravages, il l'en a entièrement préservée. Voici les noms de ces forts autant que je puis m'en souvenir.

Dans l'Europe:

Lydicae

Elaeae

 

A Rhodope:

Caseëra

Theodoropolis

Thrasou

Sudanel

Mundepa

Tharsandala

Denizus

Toparum

Dalatarba

Bre

Cuscabiri

Cusculis

 

En Thrace:

Bospara

Besuparum

Capisturia

Beripara

Isgipera

Ozormê

 Bereiärus

Tamonbari

Scemnas

Carasthyra

Pinzus

Tuleûs

Arzum

Castrazarba

Zositersum

Bergisum

Dingium

Sacissus

Curtuxura

Potamùcastellum

Eisdicaea

 

Le marché de Taurocephali

Belaïdipara

Scitaces

Bepara

Pusinum

Hymauparubri

Scariotasalucra

Augustas

Urdaûs

St. Trajan

Dertallus

Solbanû

Bascum

Zincyro

 

D'Haemimontum:

Zemarcû

Ceriparon

Casibonon

Ucû

Antonum

Gesilafossatum

Cheroenum

Probinû

St. Theodore

Burdepto

Raculê

St. Julian

Tzitaëtûs

Belastyras

Getrinas

Bredas

Verus

Thocyodis

Via

Anagoncli

Suras

Authiparû

Dordas

Sarmathon

Clisura

Hylasianae

Thrasarichû

Baeca

Chrysanthus

Marcerota

Zdebrên

St. Theodore

Asgarzus

Burtudgiz

Taurocomum

Nicê

Cabotumba

Deixas

Getristaus

Debrê

Probinû

Carberus

Teësimontê

Asgizûs

Dalatarba

Theodoropolis

Tzyeidon

Tzonpolegon

Basibunum

Anchialus

Marcianum

Cyridana

Beculi

 Forts de Thrace sur les bords du Pont-Euxin & du Danube

 Mysie,

Erculente

Scatrina

Appiara

Exentaprista

Deoniana

Limô

Odyssus

Vidigis

Arina

Nicopolis

Zicideba

Spibyrus

Polliscastellum

Cistidizus

Basternas

Metallus

Beripara

Spathizus

Marcerota

Bodas

Zisnudeba

Turulês

Justinianopolis

Therma

Gemellomontes

Asilba

Cuscauri

Cusculi

Fossatum

Bisdina

Marcianopolis

Scythias

Grapsô

Nonô

Trosmês

Neaïodunô

Residina

Constantiana

Callatis

Bassidina

Beledina

Abrittus

Rubusta

Diniscarta

Monteregine

Becis

Altina

Manroballe

Tigra

Scedeba

Novas

Dans le milieu des terres:

Copustorus

Birginasô

Tillitô

Ancyriana

Murideba

Itzês

Castellonovo

Padisara

Bismapha

Valentiniana

Zaldapa

Axiopa

Carsô

Gratiana

Preïdis

Argamô

Paulimandra

Tzasclis

Pulchra Theodora

Tomis

Creas

Catassû

Nisconis

Novejustiniana

Presidiô

Ergamia et d'autres qui sont innombrables.