Constantion Porphyrogénète

CONSTANTIN VII PORPHYROGÉNÈTE

De Administrando Imperio. CHAPITRE XXVIII

Oeuvre mise en page et traduite  par Marc Szwajcer

Traduction française reprise au site

http://sourcesmedievales.unblog.fr/2008/07/12/la-lagune-de-venise-par-constantin-porphygenete-ca-948-952/#more-270

chapitre 27 - chapitre 29

 

 

 

 

 

Διήγησις, πῶς κατῳκίσθη ἡ νῦν καλουμένη Βενετία.

Ἰστέον, ὅτι ἡ Βενετία τὸ μὲν παλαιὸν ἦν τόπος ἔρημός τις ἀοίκητος καὶ βαλτώδης. Οἱ δὲ νῦν καλούμενοι Βενέτικοι ὑπῆρχον Φράγγοι ἀπὸ Ἀκουϊλεγίας καὶ ἀπὸ τῶν ἑτέρων τόπων τῆς Φραγγίας, καὶ κατῴκουν εἰς τὴν ξηρὰν ἄντικρυ τῆς Βενετίας. Τοῦ δὲ Ἀττίλα, τοῦ βασιλέως τῶν Ἀβάρων, ἐλθόντος καὶ πάσας τὰς Φραγγίας καταληϊσαμένου καὶ ἀφανίσαντος, ἤρξαντο φεύγειν μὲν πάντες οἱ Φράγγοι ἀπὸ Ἀκουϊλεγίας καὶ ἀπὸ τῶν ἑτέρων τῆς Φραγγίας κάστρων, ἔρχεσθαι δὲ πρὸς τὰς ἀοικήτους νήσους τῆς Βενετίας καὶ ποιεῖν ἐκεῖσε καλύβια διὰ τὸν τοῦ βασιλέως Ἀττίλα φόβον. Αὐτοῦ οὖν τοῦ βασιλέως Ἀττίλα ληϊσαμένου πᾶσαν τὴν χώραν τῆς ξηρᾶς καὶ μέχρι Ῥώμης καὶ Καλαβρίας ἐλθόντος καὶ τὴν Βενετίαν μακρόθεν καταλιπόντος, ἄδειαν εὑρόντες οἱ προσπεφευγότες ἐν ταῖς νήσοις τῆς Βενετίας καὶ οἷον τὴν δειλίαν ἀποσεισάμενοι, ἅπαντες ἐβουλεύσαντο τοῦ κατοικῆσαι ἐκεῖσε, ὅπερ καὶ ἐποίησαν, κατοικήσαντες ἐκεῖσε μέχρι τῆς σήμερον. Μετὰ δὲ τὸ ἀναχωρῆσαι τὸν Ἀττίλαν, μετὰ χρόνους πολλοὺς παρεγένετο πάλιν Πιπῖνος ὁ ῥήξ, ὃς ἦρχε τότε τῆς τε Παπίας καὶ ἑτέρων ῥηγάτων. Εἶχεν γὰρ οὗτος ὁ Πιπῖνος ἀδελφοὺς τρεῖς, οἵτινες ἦρχον πασῶν τῶν Φραγγιῶν καὶ Σκλαβηνιῶν. Τοῦ δὲ ῥηγὸς Πιπίνου ἐλθόντος κατὰ τῶν Βενετίκων μετὰ δυνάμεως καὶ λαοῦ πολλοῦ, παρεκάθισεν διὰ τῆς ξηρᾶς ἐκεῖθεν τοῦ περάματος τῶν νήσων τῆς Βενετίας εἰς τόπον λεγόμενον Ἀειβόλας. Οἱ οὖν Βενέτικοι ἰδόντες τὸν ῥῆγα Πιπῖνον μετὰ τῆς ἑαυτοῦ δυνάμεως κατ´ αὐτῶν ἐπερχόμενον καὶ μέλλοντα μετὰ τῶν ἵππων ἀποπλεῦσαι πρὸς τὴν νῆσον τοῦ Μαδαμαύκου (ἔστιν γὰρ αὕτη ἡ νῆσος πλησίον τῆς ξηρᾶς), βαλόντες κερατάρια, ἅπαν τὸ πέραμα ἐναπέφραξαν. Εἰς ἀμηχανίαν οὖν ἐλθὼν ὁ τοῦ ῥηγὸς Πιπίνου λαὸς (οὐδὲ γὰρ ἦν δυνατὸν αὐτοὺς ἀλλαχοῦ περᾶσαι), παρεκάθισαν αὐτοῖς διὰ τῆς ξηρᾶς μῆνας ἕξ, πολεμοῦντες καθ´ ἑκάστην ἡμέραν μετ´ αὐτῶν. Καὶ οἱ μὲν Βενέτικοι εἰσήρχοντο εἰς τὰ πλοῖα αὐτῶν, καὶ ἵσταντο ὄπισθεν τῶν παρ´ αὐτῶν ῥιφέντων κεραταρίων, ὁ δὲ ῥὴξ Πιπῖνος ἵστατο μετὰ τοῦ λαοῦ αὐτοῦ ἐν τῷ αἰγιαλῷ. Καὶ οἱ μὲν Βενέτικοι μετὰ τοξείας καὶ ῥιπταρίων ἐπολέμουν, μὴ ἐῶντες αὐτοὺς πρὸς τὴν νῆσον διαπερᾶσαι. Ἀπορήσας οὖν ὁ ῥὴξ Πιπῖνος, εἶπεν πρὸς τοὺς Βενετίκους, ὅτι· «Ὑπὸ τὴν ἐμὴν χεῖρα καὶ πρόνοιαν γίνεσθε, ἐπειδὴ ἀπὸ τῆς ἐμῆς χώρας καὶ ἐξουσίας ἐστέ». Οἱ δὲ Βενέτικοι ἀντέλεγον αὐτῷ, ὅτι· «Ἡμεῖς δοῦλοι θέλομεν εἶναι τοῦ βασιλέως Ῥωμαίων καὶ οὐχὶ σοῦ.» Ἐπὶ πολὺ δὲ βιασθέντες οἱ Βενέτικοι ἀπὸ τῆς γεγονυίας ὀχλήσεως πρὸς αὐτούς, ἐποιήσαντο εἰρηνικὰς σπονδὰς πρὸς τὸν ῥῆγα Πιπῖνον τοῦ παρέχειν αὐτῷ πλεῖστα πάκτα. Ἔκτοτε δὲ καθ´ ἕκαστον χρόνον ἠλαττοῦτο τὸ πάκτον, ὅπερ καὶ μέχρι τῆς σήμερον διασώζεται. Τελοῦσι γὰρ οἱ Βενέτικοι τῷ κατέχοντι τὸ ῥηγᾶτον Ἰταλίας, ἤτοι Παπίας, διβάρια ἀσήμιν λίτρας λϛʹ καθ´ ἕκαστον χρόνον. Καὶ τούτῳ τῷ τρόπῳ ἔπαυσεν ὁ μεταξὺ Φράγγων καὶ Βενετίκων πόλεμος. Ὅτε δὲ ἤρξατο ἀποφεύγειν ὁ λαὸς πρὸς Βενετίαν καὶ ἀποσυνάγεσθαι, ὥστε πολλοὺς γίνεσθαι, ἀνηγόρευσαν ἑαυτοὺς δοῦκα τὸν εὐγενείᾳ τῶν ἄλλων διαφέροντα. Ἐγεγόνει δὲ ὁ πρῶτος δοὺξ ἐν αὐτοῖς, πρὶν ἢ ἐλθεῖν κατ´ αὐτῶν ὁ ῥὴξ Πιπῖνος. Ἦν δὲ τῷ τότε καιρῷ τὸ δουκᾶτον εἰς τόπον λεγόμενον Τζιβιτάνουβα, ὅπερ ἑρμηνεύεται ‘νεόκαστρον’. Διὰ δὲ τὸ εἶναι τὸ προειρημένον νησίον πλησίον τῆς ξηρᾶς κοινῇ βουλῇ μετέθηκαν τὸ δουκᾶτον εἰς ἕτερον νησίον, ἐν ᾧ καὶ νῦν ἔστιν σήμερον, διὰ τὸ εἶναι μήκοθεν τῆς ξηρᾶς, ὅσον βλέπει τις ἄνδρα ἵππῳ ἐφεζόμενον.

 

 

 

 

28. Récit du peuplement de ce qu’on appelle maintenant Venise.

Jadis, Venise était un lieu désert, inhabité et marécageux. Ceux que l'on appelle actuellement Vénitiens étaient des Francs d'Aquilée et des autres lieux de Francie et ils habitaient sur la Terre Ferme en face de Venise. Mais quand Attila, le basileus des Avars,[1] vint et dévasta complètement et dépeupla toutes les régions de Francie, tous les Francs d'Aquilée et des autres cités de Francie commencèrent à fuir et à aller dans les îles inhabitées de Venise et à y construire des cahutes en raison de la peur causée par le basileus Attila. Et quand le basileus Attila a eu dévasté toute la région de la Terre Ferme et avancé aussi loin que Rome et la Calabre et a laissé Venise bien loin derrière lui, ceux qui avaient fui pour se réfugier dans les îles de Venise, ayant acquis un endroit où vivre et tiré la crainte de leur cœur, décidèrent ensemble de s'établir là, ce qu'ils firent et ils s'y sont établis jusqu'à ce jour. Mais à nouveau de nombreuses années après qu'Attila s'était retiré, arriva le roi Pépin[2] qui régnait alors sur Pavie et d'autres royaumes. Pavie et d'autres royaumes. Ce Pépin avait trois frères[3] et ils régnaient sur les pays francs et esclavons.[4] Or quand le roi Pépin arriva contre les Vénitiens avec toute sa puissance et une forte armée, il en fit le blocus du côté de la Terre Ferme, à l'opposite du passage entre elle et les îles de Venise, en un lieu appelé Aeibolas. Et donc les Vénitiens voyant le roi Pépin venir contre eux avec toute sa puissance et se préparer à s'embarquer avec tous ses chevaux pour l'île de Madamaucon (car c'est une île proche de la Terre Ferme) ils plantèrent des pieux et barrèrent complètement ce passage. L'armée du roi Pépin fut obligée d'en rester là (car il ne lui était pas possible de passer en un autre endroit) et en fit le blocus côté Terre Ferme, six mois durant, sans cesser un jour de la combattre.[5] Les Vénitiens voulurent équiper leurs bateaux et prirent position derrière les pieux qu'ils avaient plantés et le roi Pépin voulut prendre position avec son armée le long de la côte. Les Vénitiens l'assaillirent avec flèches et javelots et l'arrêtèrent dans sa tentative de passer vers l'île. Or le roi Pépin, en fin de compte, dit aux Vénitiens : « Vous êtes sous ma main et ma pronoia puisque vous êtes de mon pays et de mon domaine. » Mais les Vénitiens lui répondirent : « Nous voulons être les sujets de l'empereur des Romains et non de vous. » Puis, cependant comme ils avaient été longtemps gênés par tous les ennuis qui leur étaient arrivés, les Vénitiens firent un traité de paix avec le roi Pépin, acceptant de lui payer un tribut considérable. Mais jusqu'à présent le tribut est allé diminuant d'année en année bien qu'il soit encore payé actuellement. En effet, les Vénitiens paient à celui qui règne sur le royaume d'Italie, c'est-à-dire Pavie une rente annuelle de 36 livres d'argent non monnayé. Ainsi se termina la guerre entre Francs et Vénitiens. Quand le peuple commença à s'enfuir vers Venise et à s'y grouper en nombre, ils proclamèrent comme doge celui qui surpassait tous les autres en noblesse. Le premier de leurs doges avait été désigné avant que le roi Pépin ne marche contre eux.[6] À cette époque, la résidence du doge était un endroit appelé Civitanova qui signifie « nouvelle cité ». Mais comme cette île susdite est toute proche de la Terre Ferme, d'un commun conseil, ils transférèrent la résidence du doge dans une autre île, où elle est actuellement car elle est éloignée de la Terre Ferme, à une distance telle que l'on puisse distinguer un homme sur le dos d'un cheval.


 


 
 

[1] Les Huns, qui sont souvent confondu au moyen âge avec les Avars. (Wikipédia)

[2] Pépin le Jeune (777-810), troisième fils de Charlemagne, roi d'Italie (781-810).

[3] Il s’agit là des fils de Charlemagne : son bâtard Pépin le Bossu (~770 - † 811) et ses frères "légitimes": Charles (~772 - † 811), héritier du trône, et Louis le Pieux (778-840), roi d'Aquitaine (781-814), empereur à partir de 814.

[4] Constantin fait référence aux Slaves situés le long de la frontière orientale de l'Empire franc sur lesquels les Carolingiens à la fin du VIII siècle cherchèrent à consolider leur contrôle militaire et politique.

[5] Le siège de Venise dura de l'automne 809 au printemps 810.

[6] En 726 ou 727.

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