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ANONYME

 

UNE CHRONIQUE LATINE INEDITE  DES ROIS DE CASTILLE (1236)

 

(1et 2) (3, 4 et 5)

Oeuvre numérisée et traduite par Marc Szwajcer

 


 

ANONYME

 

INTRODUCTION

 

UNE CHRONIQUE LATINE INEDITE  DES ROIS DE CASTILLE (1236)[1]

(MS. G 1 DE LA R. ACADEMIA. DE LA HISTORIA.)

Par G. Cirot

 

 

La chronique dont le texte suit se trouve dans un manuscrit in-folio relié en parchemin, avec ce titre au dos : Chronica B. Isidori iun. et aliorum, et 280 folios de parchemin (233 mm x 301 mm) répartis en cahiers de huit. Ce manuscrit' appartient à l'Academia de la Historia, et porte la cote G 1.

L'écriture, très lisible, est la même d'un bout à l'autre du manuscrit.[2] C'est celle qu’on appelle vulgairement et improprement gothique. Un des textes transcrits étant l’Epitoma de regibus Apulie et Sicilie de Felinus Sandeus, précédée d'une lettre de Michael Fernus à Pomponius Laetus en date des ides d'avril (13 avril 1495), comme on verra à la planche VII, notre manuscrit date donc au plus tôt des dernières années de XVe siècle. L’Epitoma en question parut sans indication de lieu ni d'année, mais probablement l'année même marquée par l'éditeur, Michele Ferno, dans la lettre citée ci dessus. Notre manuscrit ne contient vraisemblablement qu'une copie de l'édition.

Les titres et les dates sont en couleur, mais les lettres initiales manquent au début des paragraphes. En voici le contenu :

A. Les mêmes textes, et dans le même ordre que dans le manuscrit A 189, à savoir : 1° la Chronique léonaise (fol. 1-57), sur laquelle on pourra voir le Bull. hisp., tome XI (1909), p. 269-282, et tome XIII (1911), p. 133-156, 381-439; — 2° l’Histoire de Wamba par Julien de Tolède (fol. 58-68), comme dans l’España sagrada : « In nomine dni. Incipit liber de istoria gallie. que temporibus diue memorie principis babe a dno, iuliano toletane sedis epo. edita est: — In nomine sancte trinitatis... (Florez, n° i) [S]olet uirtus esse presidio... (n° 2). Affuit enim in diebus nostris clarissimus bamba...» Termine « ...et qui iam cecidit in horum se bis semper proscriptionibus recognoscat. finit de paulo. », c'est-à-dire avec le n°30 de Florez, où manquent ces trois derniers mots ; manque le Judicium in tyrannorum perfidia qui suit dans Florez, et que l'on trouve également jusqu'aux premiers mots inclus du n° 37 dans Luc de Tuy tel que l'a édité Schott (Hisp. illustrata, tome IV, p. 67, l. I, à p. 68, l. 41); — 3° la Chronique latine du Cid (fol. 69-86v) : « Incipiunt gesta roderici campi docti (également dans A 189, mais pas dans Risco). [Q]uoniam rerum temporalium gesta... monasterio collatis honorifice sepeliuit[3] »; 4° les Généalogies des rois de Navarre, des comtes de Pailhars, de Toulouse et de Gascogne (fol. 87-88v), dont il est question dans l'article du Bull. hisp. cité plus haut (particulièrement tome XIII, p. 137, 147, et pour le texte même p. 433).

B. Chronique des rois de Castille (fol. 89-122). C'est le texte inédit qu'on trouvera plus loin.

C. L’Epitoma de regno Apulie et Sicilie de Felino Sandei, avec le prologue : « Ad lectorem. Michael. Parthenopes uarias qui nescis ordine clades... » Au fol. 124,1a lettre de « Michael Fernus mediolanus pomponio leto litterarum principi. s. Quid agas in Quirinali tuo .. (fol. 125) id. apr. M.CCCC.XCV. » Au fol. 125 v, dédicace « Alexandro VI pontifici maximo. Dum paulo ante desyderassel a me... », puis le texte: « Ciuitas neopolitana paulo ultra... (fol. 151 v) Carolus antea fuerat uocatus ex hungaria contra tramam primam quam interfecit ». Enfin (ib.) « Michael Fernus Mediolanensis ad Felinum Sandeum... accusationis deprecaturum. Audio succense te mihi... », et, fol. 152., « Ad D. meum D. felinum Michael idem. Queque Selon, et que Cesar sanxere periti... Fata ego que uates certa futura cano. F'inis ».

D. Paralipomenon Hispanie de Juan de Margarit (fol. 153-280). Commence comme dans Beale, Rerum hispanicarum, t. I, p. 1, avec la dédicace « [Q]uum descripsissem libris decem obliterata hispanie... », puis (fol. 154) le prologue « [Q]uum inter rerum maximas hispanie ubertales... » (Beale, p. 2); enfin (fol. 155 v) « Incipit liber primus. Europe diuisio. Caput primum. Hispania Europe prouincia est » (Beale : « Europa prouincia est », p. 3, par erreur sans doute). Finit comme dans Beale « Et si qui plures addunt annos errant uehementer. Finis » (fol. 278). Suit l’index des dix livres (fol. 278v-280v). Voir mon travail sur Les Histoires générales d’Espagne, p. 48.

Ce manuscrit fait partie de la bibliothèque du grand généalogiste D. Luis de Salazar y Castro, nommé par Charles II chroniqueur de Castille en 1685, et cronista mayor de Indias en 1691. Toute sa vie, qui fut longue, puisqu'il atteignit l'âge de soixante-seize ans, Salazar la consacra à l'étude et à la production de nombreuses œuvres, principalement généalogiques,[4] en vue desquelles il forma peu à peu et à force de persévérance une riche collection de manuscrits et de documents, en partie grâce à la générosité du roi, qui fit de lui le bibliothécaire de sa Real Camara. D'autres lui vinrent des cronistas ses prédécesseurs. Il en acquit enfin dans les ventes, et tel fut le cas pour ceux du fameux cronista Pellicer y Tovar (cronista mayor d'Aragon depuis 1640,[5] mort en 1679), ainsi que pour une partie de ceux de Juan Lucas Cortés, dont Salazar dit : « Falleció pobre y lleno de honor à 31 de agosto de 1701, sin dejar a sus herederos mas bien que una excelente librería. » Le noyau de cette collection considérable et variée était formé par les pièces généalogiques, de la richesse desquelles l'œuvre principale de leur possesseur, l’Historia genealógica de la casa de Lara (1696-97), peut donner une idée.

Craignant la dispersion de sa bibliothèque, Salazar l'avait déposée de son vivant au monastère des bénédictins de Monserrate, à Madrid, et la leur légua à sa mort (1734). Il voulut être enterré dans leur église et fonda une chapellenie de deux cents ducats par an pour le moine chargé des fonctions de bibliothécaire, fonctions pour lesquelles il avait désigné son ami intime, le P. Diego Mecolaeta. Connaissant mieux que per sonne la valeur de ses manuscrits et sachant par expérience les dangers auxquels le prêt les exposait, il dicta un règlement sévère à cet égard; mais les bons moines ne surent pas toujours résister aux prières appuyées de puissantes recommandations : si bien qu'il se produisit de lamentables disparitions et de sacrilèges mutilations.

Lors de la suppression des ordres religieux, dont les biens devinrent propriété de l'État, la bibliothèque de Monserrate fut remise à la Bibliothèque nationale, puis aux Cortes. Les bibliothécaires Patiño et Gallardo constatèrent alors de nombreux manques ; et on en constata d'autres lorsque le Congreso (25 juin 1850) remit la même bibliothèque à l'Académie de l'Histoire, qui l'avait réclamée comme héritière de Salazar y Castro dans les emplois officiels de « Cronista Mayor de los Reinos de Espana é Indias ».

*

* *

Nous savons donc que ce précieux manuscrit fit partie de la bibliothèque de D. Luis de Salazar. Mais qui le rédigea ou le fit rédiger? Quel en fut le premier possesseur? A première vue, il paraît bien difficile de répondre, puisqu'on n'y trouve aucune mention de nature à nous renseigner.

Cependant, l'Académie de l'Histoire possède un autre manuscrit en parchemin coté G 2, identique comme dimension et comme aspect, si bien que Ton peut les considérer comme deux jumeaux. S'ils ne sont pas de la main du même calligraphe (on en jugera par les fac-similés ci-joints, pl. V-VIII), ils présentent tout au moins des écritures extrêmement voisines, la même distribution des couleurs bleue et rouge dans les titres et dates, la même répartition en cahiers de huit folios avec réclames pour chaque cahier. La seule différence consiste dans le nombre de lignes. Il y en a 36 à la page dans le G 1, et 35 seulement dans le G 2. Tout, jusqu'à la couverture, accuse l'intention de faire de ces deux recueils les deux tomes d'une seule collection, et le contenu confirme cette impression.

En effet, le G 2, qui compte 303 folios et porte au dos : Chronicoram B. Isidori et Historia Roderici Sancii, contient deux œuvres, qui sont : 1º Chronicon Mundi a Luca Tudensi diacono (fol. 1-127); 2º Compendiosa historia hispanica a Roderico Sanctio episcopo Palentino (fol. 128-303v). On voit que le G 2 est bien le complément du G 1.

De même que, dans G 1, le texte de l’Epitoma de regno Apulie et Sicilie a été copié sur l'édition imprimée, celui de l’Historia hispanica, dans G 2, est une transcription de l'édition parue à Rome vers 1470 par les soins d'Udalricus Gallus (voir Les Histoires générales d'Espagne, p. 10), y compris le colophon « De mandato R. P. D. Roderici Episcopi Palentini auctoris huius libri. Ego Vdalricus Gallus sine calamo aut pennis eudem librum impressi », qu'on trouve dans les trois exemplaires de la Bibliothèque nationale de Paris et dans l'exemplaire de Ricardo Heredia.[6]

Or, au chapitra XXVI de la quatrième partie de son ouvrage, Rodrigo Sanchez, parlant du mariage de Henri IV avec Jeanne de Portugal, et commettant une erreur volontaire ou non, écrit ceci (fol. 282 du ms. G 2) : « Deinde Hërricus ex eadem Johana regina inclitam filiam Eli(fol. 282 v.)sabeth : quam cuncti regni status in primogenitam iurarut simul et receperunt » (même texte dans Beale, t. I, p. 425, l. 43). Dans le manuscrit, en marge, d'une écriture toute semblable à celle du texte, quoique un peu plus menue (à cause du peu d'espace laissé libre sans doute), on trouve une note que voici (voir pl. VIII[7]):

Aditio. ffallitur uehementer auctor complacere cupiens pocius henrrico quam ueritati Nam hec non Elisabet. Sed Johana henrrici huius exposita uel inposita filia fuit, uulgo beltraneja nuncupata que fuit jurata. adulatorie uel adulterine ut regi et regine coplacerent jurantes Neque misterio vacat Elisabet pro Johanna hic nuncupata adulterina filia deo agente sublata nomine : sicut fuit priuata succesione : uera legitima quia Johannis regis filia elisabet nominata sic deo annuente fuit prolata in regnorum sucesione fe... sime uidimus regnasse. Caruajal.

Quel que soit le sens exact de la seconde partie, d'ailleurs peu lisible, de cette note, ce qui nous intéresse, c'est la signature Carvajal, accompagnée d'un paraphe. Il est assez naturel de penser tout de suite au célèbre Lorenzo Galindez de Carvajal, dont on connaît le rôle sous les rois catholiques et la place dans l'historiographie espagnole (voir au tome XX de la Colección de Documentos inéditos l'étude que lui a consacrée Floranes, et Les Histoires générales d'Espagne, p. 116). Tel fut l'avis d'Abella, qui, dans une Noticia y plan de un viaje para reconocer y formar la Colección diplomática de España, déclare, à propos du G 2, que :

Este codice fue de Garvajal, come se deja ver por su firma original puesta al fin de una adicion marginal de la misma letra, aun que mas menuda que la del codice.

La signature est-elle de la même main que la note ? Ce n'est pas absolument sûr, car on y trouve une forme d'r qui est sans exemple dans la note elle-même et dans le texte. En ce cas, on peut supposer que le copiste aura transcrit sous la dictée et Carvajal aurait signé. Il est possible aussi que le copiste ait simplement transcrit une note marginale olographe qu'il trouvait sur l'exemplaire imprimé à copier, et qu'il ait cherché à imiter la signature.

Parmi les manuscrits de l'Escorial, Ewald {Neues Archiv, t. VI, p. 247) en décrit un, sous la cote f. I 18, en papier, fol. xve siècle, qui contient les deux mêmes textes que nous trouvons dans G I, à savoir:

1º Luc de Tuy, avec cette note marginale: « Hinc incipit prologus et historia diaconi Lucae Tudensis extrada sub cura Petri Ponce episcopi Placentini ex libro vetusto membranis conscripto reperto in bibliotheca doctoris Laurentii Galindez de Carvajal a consilio iusticiae et a secretis regis et imperatoris Charoli quinti ».

2º L'Historia hispanica de Rodrigo Sanchez, avec le colophon de l'édition d'Udalricus Gallus tel que nous l'avons transcrit plus haut.

C’est évidemment xvie, et non xve siècle, qu'Ewald a voulu dire, car Pedro Ponce de Léon, évêque de Plasencia de 1559 à 1573, année de sa mort, est sans nul doute le personnage nommé dans la note marginale. Plusieurs Carvajal l'ont précédé sur ce siège, entre autres Bernardino Carvajal, mort en 1023, et Gutierre Vargas de Carvajal, son prédécesseur immédiat, mort en 1559. C'est peut-être ce dernier qui avait hérité de la bibliothèque de Lorenzo, né à Plasencia et mort dans la même ville avant 1530 (Floranes, p. 403).

Dans le « libro vetusto membranis conscripto » d'où Pedro Ponce fit tirer la copie de l'Escorial, devons-nous reconnaître le G 2 ? l est fort possible que ce dernier manuscrit, qui, comme le G 1, paraît à première vue beaucoup plus ancien qu'il n'est, tant à cause de l'écriture que du parchemin, ait fait le même effet à l'évêque de Plasencia, ou l'auteur de la note. Il y a dans le contenu des deux manuscrits une coïncidence qui rend difficile l'hypothèse d'un Luc séparé ayant appartenu à Galíndez et retrouvé par Ponce. On est bien tenté de croire que le manuscrit de Galíndez contenant le Luc comprenait aussi la copie du Sanchez ou était joint à l'édition qui le contenait. Et de deux choses l'une : ou la signature dont il a été question est authentique, et c'est le G 2 qui a servi de modèle au manuscrit de l'Escorial ; ou elle n'est qu'imitée, et le G 2, comme le manuscrit de l'Escorial, serait une copie d'un recueil formé par Galíndez, aujourd'hui perdu. De toute façon, la collection constituée par le G 1 et le G 2 remonte à ce célèbre érudit. Et rien n'empêche d'admettre au surplus que ces deux manuscrits ont été exécutés sur son ordre.

Ce ne seraient pas les seuls. Deux autres, de même format et de même aspect, contenant l'un la première et la deuxième Décades d'Alphonse de Palencia, l'autre la troisième, ont fait partie de la bibliothèque de Salazar tant qu'elle fut à Monserrate, mais avaient déjà disparu quand elle passa au Congreso, et par conséquent ne figurent pas dans le fonds de l'Académie de l'Histoire. D. Juan Iriarte les décrivait ainsi en 1739:

Están ambos escritos en pergamino, con titulos é iniciales coloradas y azules. Están como acabados de escribir. Parecen de la misma mano que los dos que acabamos de describir (c'est-à-dire G 1 et G 2), como se conoce de la letra y calidad del pergamino: del tamaño, etc, aunque estos dos ultimos tienen la letra y renglones un poco mas metidos...

La supposition est des plus vraisemblables. Quoi qu'en dise Floranes (p. 399), parmi les rédactions castillanes plus ou moins fidèles des Décades d'Alphonse de Palencia, il y en a une, la moins connue, qui a pour auteur notre Galíndez (voir Bull. hisp., t. XI, 1909, p. 441) Il est assez naturel que celui-ci ait voulu recueillir dans sa collection l'œuvre latine.

Cette collection, ce n'était pas par bibliomanie que Galíndez l'avait constituée. Nous savons par Morales (Discurso de los privilegios, t. VII, p. xviii de l’éd. de la Coronica par Cano) que l'érudit professeur de Salamanque avait projeté d'écrire une Histoire de Castille. Il avait également recueilli un grand nombre de privilèges pour la documenter (ibid.). Et, d'autre part, il avait formé un recueil des lois du royaume dont les Cortes de Valladolid en 1544 demandèrent en vain l'impression, et dont il reste trois tomes à l'Escorial, selon Floranes (p. 346 8). Un tel ensemble accuse un effort vraiment considérable, malheureusement inutile, puisque l'auteur ne publia rien de sa double collection (dont probablement ne faisaient pas partie la Chronique de Jean II et les Generaciones, qu'il édita en 1517). Pour ne parler que des textes historiques, la Chronique latine du Cid fut publiée seulement 262 ans après la mort de Galíndez, et d'après un autre manuscrit; la Chronique latine des rois de Castille ne voit le jour qu'à présent; la Chronique léonaise ne l'a vu que depuis peu; les Décades d'Alphonse de Palencia viennent seulement de paraître, mais dans une traduction, œuvre méritoire de M. Paz y Mélia. Luc n'attendit que jusque 1608; et Jean de Girone, 1545; mais il est douteux que les copies de notre érudit aient été utilisées.

* * *

Nous avons vu que Juan Iriarte, bibliothécaire du roi, avait connu et décrit les deux manuscrits G 1 et G 2 alors qu'ils étaient à Monserrate. Il avait en effet passé une année, de 1738 à 1739, à étudier la collection laissée par Salazar. Et pourtant, chose à peine croyable, il ne sut pas distinguer les textes que renferme le G 1, puisque dans la note qu'il lui consacre il fait un seul ouvrage de l'Histoire de Wamba par Julien, de la Gesta Roderici, des Généalogies des rois de Navarre, etc., et enfin de notre chronique. Il les délimite en effet en bloc : « Incipit liber de historia Gallie... a domino Iuliano... Desinit: quam cito potuit equitare Toletum... burgis advenit », derniers mots de ce dernier texte.

C'est seulement un demi-siècle après qu'un érudit plus curieux se rendit compte de l'existence, dans ce même manuscrit, d'une chronique inédite des rois de Castille. Il s'agit de l'Aragonais Manuel Abella, né à Pedrola en 1763 (voir Latassa y Gomez Uriel, Bibliotecas antigua y nueva de escritores aragoneses), un homme trop oublié, qui a peu imprimé, mais dont le labeur énorme, représenté par de nombreux volumes manuscrits, constitue une des richesses de l'Académie de l'Histoire. L'article que lui consacre Gomez Uriel en donnera une idée. Ayant reçu du roi en 1795 la mission de réunir les textes contemporains de l'histoire d'Espagne et de former une collection diplomatique aussi complète que possible, avec l'autorisation de travailler dans toutes les archives et bibliothèques du royaume, il fouilla d'abord, entre autres, celle de Monserrate à laquelle il emprunta, cette même année, sur reçu, les deux manuscrits G 1 et G 2. L'importance de la Chronique latine des rois de Castille ne lui avait pas échappé…..

Peu après sa découverte, Abella avait eu l’occasion d'en tirer parti dans le Diccionario geográfico-histórico de España por la Real Academia paru en 1802, à l'article Guipúzcoa, signé A(bella), p. 341. Les renseignements qu'il y donne ne font que confirmer ce que nous savons déjà ; mais il cite un passage relatif à la conquête de Vitoria, de l'Alava et du Guipúzcoa par Alphonse VIII, et que l'on trouvera au § 16 de notre édition. Après plusieurs années d'explorations à travers les bibliothèques et les archives, le 22 juin 1804, Abella, académicien de numero depuis 1797, remettait à l'Académie de l'Histoire plusieurs tomes de documents relatifs au règne d'Alphonse VIII ; et la commission de diplomatique, reconnaissant que cette collection était « laudable por su objeto, método y observaciones », déclara qu'il y aurait intérêt à imprimer quelques-unes des œuvres inédites qui y étaient comprises, et entre autres « la apreciable historia latina del citado rey y su hijo D. Enrique, que fue escrita por uno que assistio al concilio lateranense, como apéndice de las memorias del marqués de Mondéjar, impresas por nuestro académico D. Francisco Cerdá. » La réunion de cette commission avait eu lieu le 10 août 1804; et le 28 septembre Abella remporta le tout, ainsi qu'il résulte d'un reçu de lui, « para continuar la colección de documentos y no repetir las copias de los que ya están en estos tomos, y arreglar cronologicamente los que vaya aumentando ». Quand, après la guerre de l'Indépendance, en novembre 1815, il remit à l'Académie sa collection telle qu'elle est à présent, la copie de la chronique n'y existait probablement plus; en tout cas, seule la couverture où elle se trouvait figure au tome VIII de la collection.

Abella mourut le 29 avril 1817; c'est donc de son vivant que remise fut faite de ses papiers à l'Académie. Sa copie de la Chronique latine des rois de Castille fut-elle enlevée du recueil pour être remise à l'imprimeur, en vue de la publication, malheureusement jamais effectuée, au tome II des Memorias históricas de la Vida y acciones del Rey D. Alonso el Noble? Et le Fuero de Cuenca, qui manque également à la collection, a-t-il eu le même sort? Ou bien Abella, voyant sans beaucoup de plaisir que la décision de l'Académie condamnait cette chronique trouvée par lui à paraître obscurément parmi les appendices d'une publication faite par un autre que lui, pensa-t-il la publier lui-même à part, après avoir élucidé la question de paternité, et avec les notes nécessaires? et eut-il, à cause de cela, la précaution de la séparer de sa collection? Il est difficile de répondre d'une façon péremptoire. En tout cas, la tentation est grande de reconnaître la copie d'Abella dans la « Cronica latina de Alonso VIIIl, del monasterio de Montserrat; ilustrada con notas. 118 pags. de letra mui clara aunque pequena » comprise dans la Miscelánea histórica de papeles manuscritos pertenecientes a la historia de España, recogidos en su mayor parte por D. Eugenio Llaguno y Amirola » décrite par Salvá (nº 3060) comme formée de plusieurs volumes, cahiers et feuilles séparées, et renfermée en cinq grands cartons. Celte Mîscelanea passa dans la bibliothèque de Ricardo Heredia, et figure au nº 3105 de son Catalogue, paru en 1893). Où est-elle à présent?

Une copie de la copie d'Abella se trouve au British Museum (cf. Gayangos, Catalogue of the Spanish Manuscripts... in the British Museum, t. 1, p. 203). Elle a la cote Egerton, 1125. Sur le dos, on lit : anonimo | cronicon de alonso viii. mus. brit. bibl. egerton. 1125 plut. dxix. f. Elle contient 91 folios utilisés. Sur le premier folio de garde, on lit : « Purchased of St. Bohn 14 june 1845). »

Au folio I, dune autre main que le texte : « Cronicon del rey dº. Alfonso VIII de Castilla escrito en el siglo xiii copiado del q' copió de Manuel Abella en el manuscrito de Monserrate de Madrid. Suit le texte : « Defuncto comite... » A la fin : « ... Laus tibi Christe. — Comprovada Madrid 24 de Setiembre de 1795. M. Abello » (sic). Le copiste a tout copié, jusqu'au nom d'Abella, qu'il a transcrit de travers.

Le système employé pour la transcription dans cette copie, et par conséquent aussi dans celle d'Abella, est jusqu'à un certain point analogue à celui qui sera ici même employé, c'est-à-dire que l'original (le manuscrit de l'Academia, indubitablement) est reproduit avec ses fautes; les corrections (de la même main que le texte dans cette copie du British Museum) sont mises en marge. Ainsi,[8] tenum (fol. 89), uir (fol. 91v) dans le texte; tenuit, nisi en marge. Pourtant, on lit caedium pour cedum (fol. 91), frigido pour frigida (fol. 94), oblitus pour oblictus (fol. 96), scripto pour scripta, qui pouvait subsister (fol. 118v), receperat pour reuerat (fol. 90). Ces corrections ont peut-être été faites inconsciemment, ou bien le copiste (le premier ou le second, ou l'un comme l'autre) aura faibli dans son système.

Les abréviations sont presque toujours résolues dans le texte même, sauf une fois : .S. (en marge : Sancius). Les u sont remplacés par des v; les ae, restitués à la place des e ordinaires dans les manuscrits du moyen âge. L'orthographe du manuscrit n'est pas toujours respectée : totius, pour tocius (fol. 91v). Les initiales qui manquent dans l'original sont suppléées sans signe particulier. Les mots considérés comme fautifs par le correcteur sont soulignés. Ils l'étaient déjà sans doute dans la copie d'Abella. Les noms propres sont mis avec majuscule.

Il y a au surplus d’assez nombreuses erreurs : Garsae pour Garsie (fol. 91v); misserunt pour miserunt (fol. 100v); rententem pour renitentem (fol. 98). Voici des bévues assez plaisantes. Au folio 90v de l'original, il manque un mot entre fuerat et indicabat : la copie du British Museum porte fuerat deest indicabat. Au folio 98, il y a un blanc; sur la copie on lit : stuporem locus mendosiis et mutilus hostibus. On devine sans peine que les notes d'Abella ont été incorporées au texte, ce qui ne prouve pas l'intelligence de notre copiste.

Les abréviations ne sont pas toujours bien résolues……

Ces fautes ne sont généralement pas imputables à l'auteur de la copie du British Muséum, qui n’a guère fait que transcrire ce qu'il voyait, mais à celui de la copie d'Abella, qu'Abella avait sans doute corrigée et signée de sa main, mais non copiée lui même. S'il l'eût copiée lui-même, on ne lirait pas sur le manuscrit du British Muséum des erreurs que lui même amende d’une façon dubitative, en revenant tout simplement au texte du manuscrit de l'Academia…..

Notons enfin que la copie du British Museum ne comporte d’alinéas qu'aux endroits où il y en a sur l'original.

On trouve en marge, outre les corrections, des renvois à des notes: nota 2a, etc. Mais les notes manquent….

Cette copie du British Museum n'étant qu'une transcription mauvaise et médiate du manuscrit de l'Academia, ne pouvait nous être utile que pour les corrections marquées en marge. Elles sont généralement bonnes. Tout au plus y en a-t-il quelqu'une de contestable : par exemple, quand Abella veut lire « Ipse vir nobilis » au lieu de « Ipse uero nobilis ». Il aurait pu en faire qu'il n'a pas faites, par exemple quand il accepte la lecture…

En tout cas, toutes les fois que ses corrections (c'est-à-dire presque toujours) méritaient d'être adoptées, il n'était qu'honnête de marquer son nom, même quand elles s'étaient présentées toutes seules à notre esprit déjà avant l'examen de la copie qui nous les a transmises.

Nous aurons à examiner la question de paternité, et à souligner ce que ce nouveau texte apporte de nouveau à l'histoire des rois de Castille jusqu'à la prise de Cordoue. Mais il convient auparavant de le mettre sous les yeux du lecteur. Les notes que l'on trouvera en bas des pages ont paru nécessaires, soit pour permettre une comparaison de détail avec les textes déjà connus, soit encore pour résoudre quelques difficultés. Elles prépareront les conclusions. Quant au texte lui-même, il eut été plus commode pour le lecteur de le lui présenter expurgé des innombrables fautes du manuscrit. Mais alors, de deux choses lune : ou il fallait procéder à une reconstitution orthographique complète, chose délicate sinon impossible, ou il fallait reproduire le manuscrit tel qu'il était. C'est ce dernier système qui a été employé pour la Chronique léonaise. Il n'est pas à l'abri de tout reproche, mais il a du bon, surtout quand le manuscrit est unique. L'imprimé devient alors l'équivalent du manuscrit, à condition que la copie en soit aussi fidèle que possible matériellement. On trouvera donc ici les fautes même les plus grossières et, la plupart du temps, les abréviations du manuscrit G 1. Si l'on vient à découvrir une autre copie indépendante, il suffira d'en relever les variantes. .Notre édition fournira au moins une base sûre, et non un texte plus ou moins conjectural.

 

 

ANONYME

CHRONIQUE LATINE DES ROIS DE CASTILLE

JUSQU'EN 1236[9]

 

[I. Des comtes de Castille à la mort de Sanche III[10]].

 

1. Quand il mourut, le comte Fernand Gonzalez, premier comte de Castille après la défaite subie par les chrétiens en Espagne à l'époque de Rodrigue, roi des Goths, son fils le comte Garcia-Fernand lui succéda; à ce dernier succéda son fils le comte Sanche. Un fils de Sanche, l'infant Garcia, quand il alla au Léon pour se marier avec la fille du roi[11] ou d'un comte, fut assassiné par certains Léonais.[12]

Devenue seule, doña Mayor, fille du comte susnommé Sanche, fut donnée en mariage au roi de Navarre et de Nájera, Sanche, petit-fils de Sanche Abarca. Le roi Sanche eut deux enfants de doña Mayor, Ferdinand et Garcia,[13] qui s’affrontèrent à Atapuerca,[14] et où mourut le roi Garcia. Ainsi Ferdinand possédait son royaume, celui de son frère[15] et le León, car il avait épousé la fille de Bermude, roi du León.

2. Quand mourut le roi Ferdinand, surnommé le Gras,[16] qui libéra Coimbra de l’emprise des Maures, lui succédèrent ses trois fils: le roi Sanche en Castille, le roi Alphonse au Léon, en Asturies et en Galice, et le roi Garcia en Navarre et Nájera.[17] Cependant, le roi Sanche,[18] homme énergique et belliqueux, ne voulait pas diviser le royaume de son père, comme le dit l'adage: aucun pouvoir ne saurait tolérer un adversaire proche.[19] Il fit prisonnier son frère, le roi Garcia, qui mourut peu après en captivité;[20] comme il chassa de son royaume de son frère le Roi Alphonse, qui s'exila chez le roi des Maures, qui régnait à cette époque sur Tolède. Cependant, considérant enfin que rien n'est fait si quelque chose reste à faire, le roi Sanche occupa Zamora, qui appartenait à sa sœur Urraca ; apparemment, il fut traîtreusement tué par un messager de Satan, nommé Vellido Adolfez. Comme Sanche était mort, sa sœur Urraca envoya ses messagers à son autre frère Alphonse, qui vivait alors à Tolède. Dès qu’il reçut son message, le roi Alphonse[21] revint très rapidement et, avec l’aide de Dieu, récupéra intégralement le royaume paternel. Dieu lui inspira l'intention salutaire d’aller assiéger Tolède, dont il connaissait bien l'emplacement, puisqu'il y avait vécu, il étudia soigneusement l'ensemble de ses coins les plus intimes et les plus secrets. Par conséquent, pendant de nombreuses années il attaqua prudemment la ville, chaque année dévastant les champs et détruisant les récoltes. Enfin, grâce à la puissance de Dieu, les Maures rendirent la ville de Tolède[22] au roi Alphonse le recevant avec honneur comme Seigneur et Roi, à la condition qu'il leur permettrait de rester dans la ville et de garder leur maison et leurs biens, tout en le servant, comme le roi. Après la prise de la majestueuse et belle ville fortifiée de Tolède, le roi, sage et puissant, commença à dévaster toute la région connue sous le nom d’Extremadura, et par la puissance de notre Seigneur Jésus Christ, arracha aux mains des Sarrasins, de nombreux châteaux et villes de la Trasierra.[23] Ayant étendu à de nombreux égards son royaume et comme il n'avait pas de fils non plus, car le seul qu'il avait eu, nommé Sanche, était mort aux mains des Sarrasins près de la ville appelée Uclés, le roi commença à examiner et à recherche sérieusement avec qui, sans perte d'honneur, il pourrait donner en mariage comme épouse légitime sa fille, nommée Urraca. A la vérité il découvrit qu’en Espagne, il n'existait personne digne d’être considéré comme un fils de roi ; il fit venir des terres de Bourgogne, proches de la rivière Arar, communément appelée Saône, un homme noble, courageux par les armes, très connu et doté de bonnes mœurs, à savoir le comte Raymond,[24] avec qui il unit sa fille Urraca en mariage. Le dit comte, ne vécut pas ensuite longtemps avec sa femme, dont il eut un fils nommé Alphonse, qui régna ensuite longtemps sur la terre d'Espagne et fut reconnu comme empereur. Le comte Raymond vint avec un parent nommé Henri,[25] également comte, à qui le roi Alphonse, par amour pour son gendre, donna pour femme une fille illégitime,[26] et dont le comte Henri eut un fils, le roi Alphonse de Portugal,[27] qui fut le père du roi Sanche,[28] père du Roi Alphonse.[29] Tous deux sont morts de mélancolie.[30] De son vivant le roi conquit encore Tolède ; quand il mourut, son gendre, le comte Raymond resta avec son fils Alphonse, qui devint plus tard empereur, et les petits enfants grandirent en Galice.

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CHRONICA LATINA REGUM CASTELLAE

 

Extrait du Bulletin Hispanique, 1912.

Texte de G. Cirot

 

1. (Fol. 89) [D]efuncto comite fernando gundissalui qui primus tenum[tenuit][31] comitatum in castella post subuersionem populi x'ani. tempore roderici regis gotorum factam in yspaniis sucessit ei filius eius comes garsias fernandi. cui successit filius comes sancius. cuius filius garsias infans interfectus fuit apud legionem cum iuisset ut duceret in uxorem filiam regis uel cuiusdam comitis. f [ser (lire per)] quosdam legion[legionenses]. Relicta uero domna maior filia iam dicti comitis sancii tradita fuit nuptu regi nauarre. et naiare. s.[scilicet] sanctio nepoti de sancho auarca. de qua maiore dictus. s.[santius] rex habuit duos filios. s. garsiam et fe'randum qui pugnauerunt iuxta ataporcam. Vbi interfectus est rex garsias. Tunc igitur rex fernandus habuit regnum suum et regnum fratris et regnum legion rone[ratione] uxoris q2[quia] duxerat filiam regis legion vermudii : —

2. [M]ortuo uero rege fernando qui cognominatus est pinguis qui liberauit conimbriam de manibus maurorum successerunt ei tres filii sui in regno. Rex sancius in castll'a. Rex alfonsus in legione et asturiis et gallecia. Rex garsias in naiera et in nauarra. Rex uero sancius tanquam uir strenuus et bellicosus impatiens consortis. in regno pris[patris] iuxta illud. omnisque potestas impatiens consortis. ut XXIII. q. VII. c. qd' aut[autem][32] circa principium erit. regem garsiam fratrem suum cepit qui no longo lempore post mortuus est in eius captiuitatem[sic]. Regem alfonsum fratrem suum expulit de regno. qui expulsus adiit regem maurorum qui tunc dominabatur toleto. Sed rex sancius nil credens actum cum quid superesset agendum zamoram obsedit quam tenebat soror sua urraca. ubi et interfectus est a quodam satellite sathane prodiciose sicut fama reffert s. a uellido adolfez. Ipso mortuo predicta soror regis misit nuncios suos ad fratrem suum regem alfonsum. qui ea tempestate apud toletum morabatur. Recepto nuncio predictus rex in continenti reuersus est et disponente deo regnum paternum plene adeptus est. Inspirauit ei dominus deus consilium salutare ut obsideret toletum. cuius statum ad plenum nouerat utpote qui eius interiora et secretiora dum ubi[ibi] moram faceret non perfunctorie fuerat perscrutatus. Mullis igitur annis eam impugnauit prudenter singulis annis seietes[segetes] uastando et fructus omnes destruendo. Tandem uirtute diuina compulsi mauri tolletani tradiderunt ciuitatem suam predicto regi alfonso ipsum recipientes honorifice in dominum et in regem. Adiecta conditione quod liceret eis remanere in ciuitate retinere domos et possessiones suas et quod seruirent ei sicut regi. Capta | nobilissima et munitissima, ciuitate toleto. cepit predictus rex totam terram que dicitur extremadura populare castra multa et uillas alias ultra serrant per virtutem domini nostri ihu xpi. tanquam uir sapiens et potens eripiens de manibus sarracenorum. Sic igitur predictus rex regno multipliciter ampliato cum filium non haberet nam unicus quem habuerat nomme sancius interfeclus fuerat a sarracenis iuxta uillam que dicitur ucles. cepit tractare et diligenter inquirere cui filiam suam nomine urracam quam de legitima uxore susceperat posset saluo suo honore matrimonialiter.[sic (manque le verbe)] Verum cum in yspaniis non inueniret talem qui uideretur dignus esse gener regis aduocauit de burgundie partibus que sunt iuxta ararim qui fluuius uulgo dicitur saona uirum nobilem in armis strenuum ualde famosum bonis moribus ornatum comitem. s. remondum cui predictam filiam suam urracam. s. in matrimonio copulauit. Dictus comes non longo tempore uixit postea cum uxore de qua suscepit filium alfonsum nominatum. qui postea longo tempore regnauit in hyspaniis et nominatus est imperator. Cum predicto comite remondo uenit quidam consanguineus suus nomine henricus qui et cornes erat cui predictus rex alfonsus ob amorem generi sui tradidit in uxorem alteram quam habebat non de legitimo matrimonio. de qua predictus comes henricus filium habuit. s. regem aldefonsum portugalie. qui fuit pater regis sancii. patris regis alfonsi quorum uterque mortuus est vicio malanconie laborans. Viuente ad huc rege supradicto qui toletum ceperat mortuus est gener eius comes remondus. et remansit filius eius alfonsus. s. qui postea fuit imperator puer tenellus. qui et in gallecia nutritus est : —

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[1] La Chronique latine des rois de Castille ou Chronica regum Castellae est une histoire des rois de Castille écrite en latin sous le règne de Ferdinand III, allant de la mort du légendaire comte Fernand Gonzalez jusqu'à la conquête de Cordoue par Ferdinand III en 1236. Elle fut probablement écrite par l'évêque d'Osma, Juan de Soria. Afin de situer le royaume de Castille dans un contexte international, l’auteur introduit en mode synchrone le Maghreb, l'Empire byzantin ou le royaume de France. Wikipédia.

Ceux qui lisent l’espagnol pourront consulter Luis Charlo Brea, Crónica latina de los reyes de Castilla, Madrid, Akal, 1999.

[2] Voir Bulletin hisp., tome XIII, p. 133 et suiv., où je rappelle les mentions qui en ont été faites jusqu'à présent à ma connaissance, et où j'ai mis en regard la liste des textes qu'il renferme et celle des textes compris dans le manuscrit A 189 de la même Académie. On trouvera, adjoint au même fascicule, un fac-similé, réduit de plus d'un tiers, du folio 53 recto.

J'explique au même endroit dans quelles circonstances j'ai découvert la chronique que je publie ici. Mais je tiens à renouveler l'expression de ma reconnaissance à M. Ignacio Olavide, dont le nom eût dû, en toute justice, figurer avec et avant le mien en bas du présent article. La part qu'il a prise à la découverte, les recherches minutieuses el acharnées auxquelles il s'est livré pour tirer au clair toutes les questions qui se posaient devant nous, la patience et le soin qu'il a montrés dans la révision des épreuves (revues par moi sur des photocopies et par nous deux en présence du manuscrit), lui donnaient, lui imposaient le droit de mettre sa signature. C'est la seule peine qu'il ait refusé de prendre, el il m'a interdit le plaisir de la prendre pour lui.

[3] Sur l'édition que M. Bonilla vient de donner de celle chronique d'après A. 189 et G. I, voir Bull. hisp., t. XIII, p. 438.

[4] Sur Luis de Salazar el ses manuscrits généalogiques, voir Morel-Fatio, dans Bull. hisp., t. VI, p. 362.

[5] « Ayer lunes 8 del corriente (= 8 octobre 1640), Don Josef Pellicer de Tobar juró su oficio de Chronista mayor de los Reynos de la Corona de Aragon, las dos Sicilias y Jerusalen. » (Avisos históricos de D.José Pellicer y Tobar, dans Semanario erudito, t. XXXI, p. a?5), Voir la notice d'Antonio dans la Bibl. hisp. nova.

[6] Catalogue de la bibliothèque de M. Ricardo Heredia. n º 3093.

[7] Je n'ai malheureusement pu obtenir une photographie bien convenable de cette page du manuscrit et le bas de la note avec la signature n'a pu venir dans la simili comme il eut fallu.

[8] Les folios indiques sont ceux du ms. G 1.

[9] Voir Bull. hisp., t. XIV, p. 30. Reproduisant le texte tel qu'il est dans le manuscrit G. 1, je laisse souvent les abréviations sans les résoudre, et en les représentant de mon mieux, quitte à les résoudre en bas de page. Pour plus de commodité, je rappellerai ici que le Chronicon Burgense, le Chronicon Compostellanum, les Annales Complutenses, le Chronicon Conimbricense, les Anales Toledanos I, II et III, les Annales Compostellani et le Chronicon de Cardena se trouvent au tome XXIII de l’España sagrada; le Chronicon Cerratense au tome II ; la Chronique de Silos au tome XVII; l'Historia Compostellana au tome XX, et la Chronica Adefonsi imperatoris au tome XXI; que le Chronicon Lusitanum est au tome XIV, et se trouve aussi, avec le Conimbricense, dans le tome I des Portugaliae Monumenta historica, Scriptores (Olisipone, 1856), qui contient eu outre le Chronicon Lamecense, et que, malheureusement, je n'ai eu à ma portée que par intervalles. Les Généalogies du Liber Regum sont au tome I des Reynas Catholicas de Florez (3e éd., p. 492 et suiv.); la Chronique de San Juan de la Peña, dans la Biblioteca de Escritores aragoneses (Section histórico-doctrinal, t. I, 1876). C'est, d'après l'édition de Beale, la seconde (1579), que je cite Rodrigue de Tolède, mais je tiens compte de celles de Scholl et de Lorenzana ; quant à Luc, il n'a eu qu'une édition, due à Mariana et à Schott, dans le tome IV de l’Hispania illustrata (1608). Outre la Primera Crónica general éditée par M. Menéndez Pidal, il y a intérêt à consulter la Estoria de los Godos éditée par M. Paz y Mélia au tome LXXXVIII de la Colección de Documentas inéditos, et la Crónica de España publiée aux tomes CV et CVI de la même collection, toutes deux traductions libres de l'œuvre de Rodrigue de Tolède (cf. mes Histoires générales d'Espagne entre Alphonse X et Philippe II, p. 78): C'est d'après l'édition en quinze tomes que je cite Lamente, Historia general de España. Je désignerai par l'abréviation Salazar, Lara, l'œuvre fondamentale de Luis de Salazar y Castro, Historia genealógica de la Casa de Lara, 4 tomes, Madrid, 1696-97 et 1694.

[10] On peut diviser cette chronique en trois parties : 1º la partie préliminaire, des comtes de Castille à la mort de Sanche III ; 2º le règne d'Alphonse VIII; 3º les règnes de Henri I et de Ferdinand III. C'est surtout pour le règne d'Alphonse VIII et celui de Ferdinand III (à partir de l'écrasement des Laras) qu'elle complète les textes connus.

[11] La Chronique léonaise (II, 92) est tout à fait affirmative : c'était la soeur de Bermudo III, la fille d'Alphonse V, Sancha. Notre auteur n'est pas toujours bien informé pour ce qui s'est passé avant son époque. Il résume de mémoire sans doute.

[12] Cf. Chronique léonaise, II, 92, note 2. D'après Rodrigue, le meurtrier fut Ruy Vélaz, secondé par ses frères Diego et Iñigo; mais la Chronique générale (§ 788) relate aussi « la estoria del Romanz. », qui ajoute un autre acteur, Fernand Llaynez. Voir R. Menéndez Pidal, El elemento histórico en el « Romanz dell Inffant Garcia » (dans Studi letterari e linguistici dédiés à Pio Rajna, Firenze, 1911).

[13] Voici, pour plus de clarté, un tableau généalogique (rectifié en ce qui concerne Doña Sancha).

Voir les Généalogies que j'ai publiées à la suite de la Chronique léonaise et l'introduction à celte même chronique. D'après ces Généalogies el la Chronique léonaise (III, 1), la fille du comte Sancho, femme du roi Sancho, s'appelait Urraca et non Mayor. Il est donc probable que ces deux textes sont restés inconnus à notre auteur.

[14] Atapuerca, à une vingtaine de kilomètres au nord-est de Burgos, Cf. Chronique de Silos, § 84.

[15] Selon Rodrigue (VI, ii) Ferdinand ne garda en son pouvoir que Nájera et laissa le pays entre l'Ebre et les Pyrénées à son neveu Sancho Garcés (el de Peñalen), fils aîné de Garcia Sanchez. Luc dit pourtant qu'il étendit sa domination « ab ultimis finibus Galleciae usque Tolosam » (p. 93, l. 13).

[16] Je n'ai pas rencontré ailleurs ce qualificatif appliqué à Ferdinand Ier.

[17] Erreur manifeste à l'égard des fils de Ferdinand Ier. La Chronique léonaise présente aussi, dans son texte primitif, que nous a conservé le manuscrit G. 1, une grosse inexactitude puisqu'elle fait d'Alphonse l'aîné (voir Bull. hisp., t. XIII, p. 154 et pl. VII), ce qu'une main assez ancienne a corrigé dans A. 189 (ib.., pl. VI).

[18] Sanche II le Fort (1036-1072).

[19] Lucain, I, 93 :

........................................ omnisque potestas

Impatiens consortis erit...

Circa principium s'entend bien, mais non ce qui précède, et qui doit être une référence.

[20] Voir Chronique léonaise (Bull. Hisp., 1909, p. 267, § 3). Non longo tempore post n'est guère d'accord avec les vingt-quatre années d'emprisonnement marqués par la dite Chronique, ni avec les XX annos § amplius dont parle Pelage. Ou faut-il supprimer non? Il est à noter qu'ici les deux Chroniques sont d'accord (et avec elles le Liber Regum) pour attribuer à Sanche la mise de Garsias en captivité, tandis que Pelage et la Chronique dite de Silos l'attribuent à Alphonse (voir Bull. hisp., p. 267, note 2).

[21] Alphonse VI de Castille (1040-1109). Le Cid Campeador fut au service d’Alphonse.

[22] En 1085, après onze années de guerre et de siège, les musulmans de Tolède capitulent.

[23] Le § 7 contient un passage qui montre assez bien ce qu'on entendait alors par Extremadura et ultra serram : « Abulam et Segouiam et alias uillas circumadiacentes in extremadura, et Toletum et omnia que sunt ultra serram versus parles illas. » Primitivement l'Extremadura comprenait les pays au sud du Duero (cf. § 32, 33 et 61), avec Soria comme limite extrême au nord (cf. Madoz). Ségovie et Avila y étaient donc incluses. Quant à ultra serram c'est l'équivalent de ce qu'un document de 1164, cité par Risco (Esp. sagr., t. XXXV, p. 216) appelle Traserra : « Fernando regnante Toleli, & in tota Traserra, & in Extrematura... ». C'est le pays situé au sud des sierras de Guadarrama et de Gredos. L’Extremadura était donc au nord, et la Traserra au sud des sierras. On sait que le nom d'Extremadura a été appliqué successivement ensuite à des pays de plus en plus au sud.

[24] Raymond de Bourgogne (1059-1107) dit Tête Hardie, roi de León et de Galice en Espagne, fils du comte Guillaume Ier de Bourgogne, frère des comtes Renaud II de Bourgogne, Étienne Ier de Bourgogne et du pape Calixte II avec qui il fonde le Pèlerinage de Saint-Jacques-de-Compostelle. Il mourut le 31 mai 1107 à Grajal, en Espagne.

[25] Henri (1066-1112), comte de Portugal, fondateur du royaume de Portugal, ép. Thérèse, fille bâtarde d'Alphonse VI de Castille, qui lui donna en dot le comté de Portugal.

[26] Cf. Chronica Adefonsi imp., § 29 : « Ipsa autem Tarasia erat filia Regis Domini Adefonsi, sed de non legitima, valde tamen a Rege dilecta, nomine Ximena Munionis, quam Rex dilectionis et honoris causa dedit maritatam Enrico comiti, et dotavit eam magnifice, dans Portugalensem terram jure hereditario. »

[27] Alphonse Henriques Ier (1110-1185), premier roi du Portugal, (1139-1185)

[28] Sanche Ier (1154-1221), roi du Portugal (1185-1211).

[29] Alphonse II le Gros (1185-1223), roi du Portugal (1211-1223).

[30] Ce barbarisme, est sans doute dû à la prononciation populaire du mot dans le castillan d'alors.

[31] Entre crochets figurent les variantes ou ce qu’il faut comprendre quand il s’agit d’une abréviation.

[32] B. M. (= copie du British Museum)