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IV. UNE ZONE DE SILENCE DANS LE BELLUM GALLICUM : LA QUESTION D'ARGENT
UNE SITUATION PEU BRILLANTE
Durant
son édilité, outre le Comitium*,
le Forum et les basiliques**,
il fit même décorer le Capitole***
où l'on construisit des portiques provisoires afin d'y exposer une partie de ses
collections, tant il possédait d'oeuvres d'art. Il donna aussi des chasses**** et des jeux, soit avec
son collègue, soit pour son propre compte. Par surcroît, César donna aussi un combat de
gladiateurs.
SUÉTONE
(*) aire de réunion des assemblées populaires
(**) bâtiments à usage public (marché couvert, tribunal, ...)
(***) colline de Rome où se trouvait le grand temple de Jupiter
(****) spectacles comportant des animaux
On assure qu'avant d'avoir obtenu aucune charge, il s'était endetté de 1.300 talents. Mais le sacrifice d'une grande partie de sa fortune, soit dans l'intendance des réparations de la Voie Appienne, soit dans son édilité où il fit combattre devant le peuple trois cent vingt paires de gladiateurs, la somptuosité des jeux, des fêtes, des festins qu'il donna et qui effaçaient tout ce qu'on avait fait avant lui de plus brillant inspirèrent au peuple une telle affection qu'il n'y eut personne qui ne cherchât à lui procurer de nouvelles charges et de nouveaux honneurs.
César,
en sortant de sa préture, fut désigné par le sort pour aller commander en Espagne. Ses
créanciers, qu'il était hors d'état de satisfaire, vinrent crier après lui et
solliciter le paiement de leurs créances. Il eut donc recours à Crassus qui s'engagea
envers les créanciers les plus difficiles et les moins traitables, pour la somme de huit
cents talents.
PLUTARQUE
On
prétend que César disait de lui-même qu'il lui faudrait vingt-cinq millions de
sesterces pour ne rien avoir.
APPIEN
Remarque : Il n'est guère possible de convertir les sommes figurant dans les textes ci-dessus en monnaies contemporaines. Quoi qu'il en soit, elles sont très élevées.
RETOURNEMENT DE SITUATION
On
approuve l'enrichissement de Labiénus* et de Mamurra**, les jardins de la villa tusculane*** de Balbus****. Mais tout est sorti de la même source.
CICÉRON (lettre de fin déc. 50)
(*) légat de César pendant
toute la guerre des Gaules; son officier le plus efficace.
(**) officier de César, chef du génie
(***) Tusculum : ville du Latium; beaucoup d'aristocrates romains y avaient une villa
(Cicéron, par ex.)
(****) partisan de César
Qui
peut voir, qui peut souffrir, à moins d'être impudique, vorace et joueur, que Mamurra
possède tout ce que possédaient avant lui la Gaule chevelue et la Bretagne où finit la
terre ? Il a commencé par mettre en pièces les biens de son père, sa seconde proie lui
est venue du Pont (Asie Mineure), la troisième de l'Ibérie, celle-là bien connue du
Tage aux flots chargés d'or; il est la terreur des Gaules, la terreur des Bretagnes.
CATULLE
En Gaule, il pilla les chapelles et les temples des dieux qui étaient remplis d'offrandes et quand il détruisit des villes, ce fut plus souvent pour faire du butin que par représailles. C'est à force de rapines et de sacrilèges manifestes qu'il put supporter les charges des guerres civiles, les dépenses de ses triomphes et de ses spectacles. SUÉTONE
César
donna cent millions de sesterces rien que pour le terrain où devait s'élever son forum.
PLINE L'ANCIEN
César envoyait à Rome de l'or, de l'argent et les autres dépouilles et richesses conquises sur tant d'ennemis, pour séduire les Romains présents, pour subvenir aux besoins des édiles, des préteurs, des consuls et de leurs épouses et il se faisait de nombreux partisans.
Parmi
ceux-ci se trouvaient le consul Paullus, qu'il fit changer de parti moyennant une somme de
quinze cents talents, le tribun du peuple Curion, libéré par lui d'une masse
considérable de dettes et Marc Antoine qui, en qualité d'ami de Curion, partageait ses
profits.
PLUTARQUE
EN GUISE DE CONCLUSION
LA MONTÉE D'UN PÉRIL
En 55, Caton, adversaire politique de César, met le Sénat en garde.
Caton
passa ensuite à l'examen de la politique de César depuis le début; et dévoilant ses
intentions comme eût pu le faire, non un ennemi, mais un comparse, associé aux projets
de César, il fit voir aux sénateurs que s'ils étaient sages, il leur fallait redouter,
non pas les enfants des Germains et des Celtes, mais le grand homme lui-même.
PLUTARQUE
A la fin de la guerre des Gaules, Cicéron fait le relevé des atouts politiques et militaires de César.
C'est
quand il était faible qu'il fallait lui résister et c'était facile. Aujourd'hui, onze
légions, toute la cavalerie qu'il voudra, les Transpadans*, la plèbe urbaine, tant de tribuns de la plèbe, une
jeunesse prête à tout risquer; et son autorité de chef et son audace !
CICÉRON (lettre de fin déc. 50)
(*) La Gaule Cisalpine (Italie du nord) était partagée en Gaule Cispadane (au sud du Pô) et Transpadane (au nord du Pô). César avait accordé la citoyenneté romaine aux Transpadans.
Une formule frappante
Tour
à tour, César domptait les ennemis avec les armes des Romains, et il gagnait les Romains
avec l'argent des ennemis.
PLUTARQUE